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75 I Lus et elus I Y Abramovici, ML Piketty Reproduction : Home, sweet home Diverses trousses pour le dosage de LH urinaire a domicile ont fait leur apparition des deux c6t6s de I'Atlantique [1]. Pourquoi LH ? C'est que la d6tection du pic de LH dans le plasma ou les urines est consid6r6e comme la m~tho- de de choix pour pr~dire la surve- nue prochaine de I'ovulation, 6tape essentielle de la prise en charge des couples infertiles. Pourquoi a domicile ? C'est qu'aux enfants de Marx et de Coca-Cola ont succ6d~ les enfants du c&ble et du minitel. Tout vous arrive at home : pour- quoi jour apr~s jour sortir de chez soi pour guetter I'ovulation, ph6- nomene intime entre tous ? Les avocats de cette technique ne manquent pas d'arguments. Rappelons d'abord que la LH & une demi-vie plasmatique br~ve : une demi-heure, et elle est rapi- dement 61imin~e dans les urines. Aussi, la corr61ation est-elle par- faite entre le jour du pic de LH dans les urines et le pic de LH dans le plasma. Le dosage urinai- re a I'avantage de minorer I'effet des fluctuations rapides de LH plasmatique. Et le dosage urinai- re & domicile est & 1'6vidence plus commode pour les femmes plus rapide (3 a 30 minutes), plus simple et moins co0teux que le dosage plasmatique rep6t~ en laboratoire, par RIA. Dans les trousses actuellement disponibles pour usage domestique, c'est la technique ELISA qui est utilis~e. La LH pr~sente dans les urines est prise en sandwich entre deux anticorps. L'un est en r~gle g6n~rale un anticorps polyclonal dirige contre tout ou partie de la mol6cule de LH, I'autre est un anticorps mono- clonal dirig~ contre la sous-unit6 Beta (qui conf~re a chaque hor- mone glycoproteique sa sp6cifici- t6). L'enzyme li6 & cet anticorps monoclonal convertit un substrat incolore en une substance chro- mogene et on ~value I'intensit6 de la coloration produite. La plu- part des trousses sont con£~ues pour d6tecter la LH urinaire & des concentrations egales ou sup~- rieures & 20-40 IU/I, ce qui 6vite en principe des faux-positifs chez les femmes dont les taux de base sont un peu ~lev6s, comme dans le syndrome des ovaires polykys- tiques. II faut tout de meme connaftre les quelques sources de faux negatifs (urines tr~s dilutes par exemple), ainsi que quelques possibles interferences m~dicamenteuses. Dans les trousses les plus r6centes, un contrSle quotidien limite les sources d'erreurs telles que les variations de temperature ou la ration hydrique. Globalement, un examen biquotidien des urines permettra d'identifier le pic de LH dans presque 100% des cas mais un seul examen quotidien suffit I'identifier dans neuf cas sur dix. II existe diverses applications cliniques de cette technique de d~tection de LH urinaire domicile, les unes officielles, les autres potenti6lles. Planification des rapports sexuels (RS) Chez les couples peu fertiles, la p~riode de f~condabilit6 peut ~tre br~ve, d'o0 I'int6r6t de pouvoir mieux planifier les RS. Cette technique de d6tection de LH pourrait permettre de r6duire le nombre des RS autour de I'ovula- tion & un ou deux. (,&, chacun d'appr6cier si cette reduction du nombre de RS est en soi un b~n~fice...). On a voulu aussi faire de ces trousses une aide & la contraception par les m~thodes dites naturelles, mais leur int~r6t n'est pas jusqu'ici document~. Insemination artificielle (IA) L'utilisation des trousses de LH urinaire pour r6aliser une insemi- nation unique par cycle avec un horaire precis reduirait le temps, les coots et les moyens n~ces- saires & I'insemination artificielle. Et c'est peut-~tre encore plus important pour I'insemination intra-ut~rine que pour I'ins~mina- tion intracervicale. S'il n'y a pas pour le moment de preuve que les trousses de LH urinaire am~- liorent les taux de grossesse apr~s IA, le nombre d'ins6mina- tions par cycle est du moins r~duit sans compromettre signifi- cativement ces taux de grosses- se. Test post-co'ftal (TPC) Ce test permet, Iors de I'explora- tion clinique du couple infertile, 1'6valuation de la mobilit6 des

Lus Et Élus

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75

I Lus et elus I

Y Abramovici, ML Piketty

Reproduction : Home, sweet home

Diverses trousses pour le dosage de LH urinaire a domicile ont fait leur apparition des deux c6t6s de I'Atlantique [1]. Pourquoi LH ? C'est que la d6tection du pic de LH dans le plasma ou les urines est consid6r6e comme la m~tho- de de choix pour pr~dire la surve- nue prochaine de I'ovulation, 6tape essentielle de la prise en charge des couples infertiles. Pourquoi a domicile ?

C'est qu'aux enfants de Marx et de Coca-Cola ont succ6d~ les enfants du c&ble et du minitel. Tout vous arrive at home : pour- quoi jour apr~s jour sortir de chez soi pour guetter I'ovulation, ph6- nomene intime entre tous ?

Les avocats de cette technique ne manquent pas d'arguments. Rappelons d'abord que la LH & une demi-vie plasmatique br~ve : une demi-heure, et elle est rapi- dement 61imin~e dans les urines. Aussi, la corr61ation est-elle par- faite entre le jour du pic de LH dans les urines et le pic de LH dans le plasma. Le dosage urinai- re a I'avantage de minorer I'effet des fluctuations rapides de LH plasmatique. Et le dosage urinai- re & domicile est & 1'6vidence plus commode pour les femmes plus rapide (3 a 30 minutes), plus simple et moins co0teux que le dosage plasmatique rep6t~ en laboratoire, par RIA. Dans les trousses actuellement disponibles pour usage domestique, c'est la technique ELISA qui est utilis~e.

La LH pr~sente dans les urines est prise en sandwich entre deux anticorps.

L'un est en r~gle g6n~rale un anticorps polyclonal dirige contre tout ou partie de la mol6cule de LH, I'autre est un anticorps mono- clonal dirig~ contre la sous-unit6 Beta (qui conf~re a chaque hor- mone glycoproteique sa sp6cifici- t6). L'enzyme li6 & cet anticorps monoclonal convertit un substrat incolore en une substance chro- mogene et on ~value I'intensit6 de la coloration produite. La plu- part des trousses sont con£~ues pour d6tecter la LH urinaire & des concentrations egales ou sup~- rieures & 20-40 IU/I, ce qui 6vite en principe des faux-positifs chez les femmes dont les taux de base sont un peu ~lev6s, comme dans le syndrome des ovaires polykys- tiques. II faut tout de meme connaftre les quelques sources de faux negatifs (urines tr~s dilutes par exemple), ainsi que quelques possibles interferences m~dicamenteuses. Dans les trousses les plus r6centes, un contrSle quotidien limite les sources d'erreurs telles que les variations de temperature ou la ration hydrique. Globalement, un examen biquotidien des urines permettra d'identifier le pic de LH dans presque 100% des cas mais un seul examen quotidien suffit I'identifier dans neuf cas sur dix.

II existe diverses applications cliniques de cette technique de d~tection de LH urinaire domicile, les unes officielles, les autres potenti6lles.

Planification des rapports sexuels (RS)

Chez les couples peu fertiles, la p~riode de f~condabilit6 peut ~tre br~ve, d'o0 I'int6r6t de pouvoir mieux planifier les RS. Cette technique de d6tection de LH pourrait permettre de r6duire le nombre des RS autour de I'ovula- tion & un ou deux. (,&, chacun d'appr6cier si cette reduction du nombre de RS est en soi un b~n~fice...). On a voulu aussi faire de ces trousses une aide & la contraception par les m~thodes dites naturelles, mais leur int~r6t n'est pas jusqu'ici document~.

Insemination artificielle (IA)

L'utilisation des trousses de LH urinaire pour r6aliser une insemi- nation unique par cycle avec un horaire precis reduirait le temps, les coots et les moyens n~ces- saires & I'insemination artificielle. Et c'est peut-~tre encore plus important pour I'insemination intra-ut~rine que pour I'ins~mina- tion intracervicale. S'il n'y a pas pour le moment de preuve que les trousses de LH urinaire am~- liorent les taux de grossesse apr~s IA, le nombre d'ins6mina- tions par cycle est du moins r~duit sans compromettre signifi- cativement ces taux de grosses- se .

Test post-co'ftal (TPC)

Ce test permet, Iors de I'explora- tion clinique du couple infertile, 1'6valuation de la mobilit6 des

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spermatozoTdes in vivo. Or un TPC mauvais est souvent le resultat d'une mauvaise planifica- tion dans le cycle. Et les meilleurs scores de pen6tration du mucus cervical sont bien correles avec le pic de LH urinaire. Cette indica- tion potentielle demande 9. ~tre confirmee par des etudes contrS- lees.

Biopsie d'endom#tre (BE)

,&, cause de la variabilite intrin- s#que de la duree de la phase luteale (qui n'est pas toujours de 14 jours), d'aucuns ont suggere de choisir le moment de la BE en fonction de I'ovulation plut6t que du jour suppose des prochaines r~gles. Chez les femmes explo- r6es pour anomalie de la phase luteale, les trousses de LH urinai- re pourraient donc faciliter le choix du jour de la BE.

FIV et GIFT

On a aussi propose I'utilisation de ces trousses pour planifier le recueil d'ovocytes Iors de ces d~marches.

Pompes a GnRH

Enfin, chez les femmes sous pompe pour induction de I'ovula- tion, les trousses de LH urinaire pourraient permettre de planifier les RS ou I'IA.

Si toutes ces indications poten- tielles se confirment, on pourra bient6t vous dire, Mesdames : <<Ovulez, nous ferons le reste>>.

Corsan GH, Ghazi D, Kemmann E (1990) Home urinary luteinizing hormone immunoassays : clinical applications. Fertil Steril 53, 591- 601

<<commis- ce titre aux allures de tube, c'est le regrette Docteur Creff, dans un des derniers papiers [1] issus de son fameux service de I'hSpital Saint-Michel 9. Paris.

L'augmentation de la prolactine- mie est I'une des reponses hor- monales 9. I'activite physique qui survient chez les sportifs, et sur- tout les sportives, pratiquant des activites d'endurance type mara- thon. Encore faut-il distinguer I'elevation transitoire de la prolac- tine qui suit I'effort, et rhyperpro- lactinemie de base permanente, de cause moins evidente. Chez la marathonienne en effet, une hypersecretion importante de la prolactine survient dans les 20 minutes suivant le stimulus pro- lactinog~ne, pour se normaliser au bout d'une heure (en rapport avec la demi-vie courte de la pro- lactine). La prolactinemie, mesu- ree dans trois prelevements faits 9. 10 minutes d'intervalle chez 11 sportives, passe d'une valeur de base de 15-20 ng/ml 9. 25-35 ng/ml awes 90 9. 120 minutes de course, et 9. 45-50 ng/ml Iorsque la course est faite sans soutien- gorge. C'est le resultat de la sti- mulation mecanique des seins, et surtout des mamelons, par les deux mecanismes que detaille savamment AF Creff : le ballote- ment des seins rythme par la course, et le frottement du marne- Ion sur le maillot, en I'absence (frequente) de soutien-gorge.

Mais comment expliquer que ron puisse aussi observer une elevation permanente du taux de base de la prolactine, en dehors de tout contexte adenomateux ? Cette hyperprolactinemie <<fonc- tionnelle>> se developperait pour repondre aux nouvelles condi- tions metaboliques creees par la

pratique reguliere des sports d'endurance. Mortalite : I'hyper- prolactinemie, et ses conse- quences plus ou moins g6nantes telle la galactorrhee, peuvent chez les coureuses de <<fond>, ~tre favorablement affectees par le port d'un soutien-gorge. <,Le soutien-gorge est plus qu'un accessoire vestimentaire>> : on ne saurait mieux dire.

YA

Creff AF, Waysfeld B, Grinda O, Melki F (1989) Marathon, soutien- gorge et prolactine. EndocrinoL Clin 30, 6, 527-530

Souvent femme varie

Naguere encore, H Rozenbaum et F Naudy avaient intitule un repertoire d'examens de labora- toire <<Les inconstantes biolo- giques de la femme>>. C'est sur un air bien connu que chantent en canon VY Fugimoto (de San Francisco comme son nom I'indique) etaL IIs ont etudie [1] chez 28 femmes jeunes, en bonne sante et normalement reglees, I'influence relative de dif- ferents facteurs qui influent par- fois grandement sur un taux de base unique de prolactine ou de progesterone et peuvent m6me ~tre source de <<faux-positifs>> ou de <<faux-negatifs>>. Avec & la cl6 le risque d'alterer un diagnostic, si celui-ci se fonde sur ce seul resultat. Les donnees de leurs travaux sont r6sumes qualitative- ment dans le tableau ci-dessous.

On voit que deux facteurs majeurs et communs aux deux hormones sont la pulsatilite secretoire et la variabilite biolo-

Marathon, soutien-gorge et prolactine

Nonobstant une reputation bien etablie, ce n'est pas moi qui ai

Prolactine Progesterone

Variabilit6 biologique +++ +++ Cycle menstruel + ++++ Rythme circadien +++ + Environnement (stress, sommeil) +++ S~cr~tion pulsatile ++++ ++++ Dosage + +

Lus et ~lus 77

gique inter-individuelle (c'est-&- dire les diff6rences entre sujets, toutes conditions egales par ailleurs). ,~ I'inverse d'autres fac- teurs ne sont r~ellement impor- tants que pour interpreter les r~sultats de I'une des deux hor- mones : tels le stress pour la pro- lactine, le cycle menstruel pour la progesterone. Enfin, on verifie que les erreurs inh~rentes au dosage ne contribuent que modestement & la variabilit6 glo- bale des r6sultats d'un dosage unique.

Mais pour interpreter un r~sul- tat, on confronte la donn~e de la patiente aux ,,limites de la norma- le,, du dosage concernS; Les auteurs rappellent que I'~tablisse- ment de ces normes ne doit pas se d~partir de certaines r~gles : - normalit~ des sujets definis par des crit~res objectifs; - nombre suffisamment grand de sujets normaux; - conditions de pr~l#vement et de dosage identiques a celles qui seront utilis~es en routine.

Et de conclure que les cliniciens doivent ~tre conscients de la nature approximative d'un r~sul- tat, malgre son apparente preci- sion, que les biologistes doivent connaftre le contexte clinique du dosage, enfin que les biologistes

devraient ~tablir leurs propres normes.

Ce n'est certes pas une d~cou- verte que ce refrain : ,,Comme la plume au vent / Femme varie / Fol qui s'y fie / Un seul instant,,. Mais, comme on dit au pays du surf, sex and sun, Bis repetita placent.

YA

Fujimoto VY, Clifton DK, Cohen NL, Soules MR (1990) Variability of serum Prolactin and Progeste- rone levels in normal women : the relevance of single hormone mea- surements in the clinical setting. Obstet Gyneco176, 71-78.

T h y r o ' i d e

Faut-il pr61ever ~ 1 h du matin ?

Une article r~cent ~tudie les TSH6mies diurnes et nocturnes chez 15 femmes pr~sentant une d~pression majeure, et les com- pare & celles de 15 femmes t~moins [1].

Contrairement au groupe t6moin, il n'y a pas d'~l~vation nocturne de la TSH pour 14 des 15 femmes d~prim~es. Quarante pour cent des femmes d~prim6es

ont des taux de TSH diurnes inf6- rieurs aux valeurs normales, mais I'information apport~e par la r~ponse au TRH, ~tudiee syste- matiquement, n'est pas toujours superposable.

Une relation inverse existe entre les taux nocturnes de TSH et de cortisol. En revanche, et curieusement, aucune relation n'existe entre les taux de TSH (de base, et apres stimulation) et les scores de Hamilton de la d~pres- sion.

Apr~s avoir 6cart6 I'hypoth~se d'une anomalie de s~cr~tion du TRH pour expliquer ces r~sultats chez les femmes d6prim6es, les auteurs suggerent la responsabili- t6 de I'hypercortisol6mie dans rabsence du pic nocturne de TSH. IIs ~voquent enfin chez ces patientes un certain degr~ d'hypo- thyroidie d'origine centrale, appr6- ci~ surtout sur le pr61~vement nocturne.

MLP

Bartalena L, Placidi GF, Martino E, Falcone M, Pellegrini L, Dell'Osso L, Pacchiarotti, A, Pin- chera A (1990) Nocturnal serum Thyrotropin (TSH) surge and the TSH response to TSH-Releasing Hormone : dissociated behavior in untreated depressives. J Clin Endocrinol Metab 71,650-655