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Texte en accès libre sur www.pbaudry.com

DU MÊME AUTEUR

Français et Américains, l’autre rive Publié en open source à partir de novembre 2000 sur le site www.pbaudry.com, où le texte intégral est disponible gratuitement. Version papier : Village Mondial / Pearson Ed., Paris, mars 2003 (1ère éd.), août 2004 (2ème éd.). Disponible sur Amazon.fr et Amazon.com, et à la FNAC. French and Americans – The Other Shore Trad. du Français par J.-L. Morhange. Texte intégral disponible gratuitement sur www.pbaudry.com Version papier : Les Frenchies, Berkeley, août 2005. Disponible sur Amazon.fr et Amazon.com Les Frenchies Bande dessinée par Pascal Baudry et Luc Nisset Les Frenchies, Berkeley, septembre 2004. Disponible sur www.pbaudry.com et à la FNAC.

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À Nathalie

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APPEL A CONTRIBUTIONS Je mettrai en ligne des passages que j’ai déjà écrits et je complèterai le texte schématique ci-après, à mesure que je recevrai des contributions d’internautes (souhaits de thèmes à traiter, illustrations, questions, critiques, demandes de clarification, etc.), par e-mail à [email protected]. Merci. Pascal Baudry

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MAIS BON ! Les Français disent « mais bon » à tout bout de champ. Maintenant que je m’en suis aperçu, je ne peux plus l’ignorer – avec un risque évident de contagion du lecteur désormais averti… Voisin sémantique du « quand même », le « mais bon » est de l’ordre du sursaut contre l’adversité, du micro-héroïsme français : « On ne va quand même pas se laisser abattre » (à noter le « on », ce « nous » qui ne dit pas son nom). Après une critique qui ne mène nulle part et qu’il sait largement factice, mais qui ne peut qu’attirer l’assentiment de l’interlocuteur, le Français s’en tire par cette pirouette, ce clin d’œil au système D, qui permettra de se rétablir sur ses pieds comme par magie. Ouf ! « On » a risqué une mini-déprime…, « mais bon ! »1

1 Extrait de Français et Américains, l’autre rive, en accès libre sur www.pbaudry.com

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ARMA VIRUMQUE CANO... Cet ouvrage fait suite à Français et Américains, l’autre rive2, qui semble avoir été, mondialement, le premier essai publié en open source3. Quarante mois se sont écoulés entre mes premiers postings sur la Toile et la sortie de la première édition sur papier. Durant ce temps, j’ai reçu deux mille cinq cents courriels (nous en sommes maintenant à quatre mille cinq cents, et à plus de quatre-vingt mille lecteurs). Les internautes m’ont suggéré par e-mail (à [email protected]) de traiter des sujets qui les intéressaient, ont corrigé des erreurs, ont apporté des exemples et des témoignages personnels ; j’ai répondu systématiquement à chacun et ce dialogue a permis un approfondissement de l’écriture. En proposant le bon vieil e-mail et non la formule du forum ou du blog, on évite les cristallisations sur des sujets polémiques et l’on élargit la gamme des sujets traités. En procédant en open source, l’auteur sait où est son lectorat et donc l’édition sur papier n’est plus une bouteille jetée à la mer mais un texte que l’on sait déjà désiré par un lectorat précis. De plus, lorsque le texte sort sur papier, il y a déjà un bouche-à-oreille, et des journalistes sont prêts à en parler. La centaine de passages dans les médias de Français et Américains, l’autre rive montre bien que cette formule augmente la visibilité de la publication papier. Bien sûr il fut difficile de convaincre des éditeurs (français) du bien-fondé d’une publication qui serait proposée à la vente alors même qu’on pourrait y accéder gratuitement en parallèle – fromage ou dessert, nous y reviendrons. Le succès des deux éditions successives sur papier m’a convaincu de la pertinence de ce mode d’édition original, et je récidive ici. Les commentaires et contributions de toutes natures (questions, critiques, etc.) peuvent m’être envoyés à : [email protected] (et les objections des éditeurs aussi). La mentalité française Vingt années de résidence aux Etats-Unis m’ayant aidé à percevoir et à analyser les différences culturelles entre Français et Américains, j’ai entrepris dans l’ouvrage précédent d’en comprendre les causes - ou en tous cas de me situer à un niveau interprétatif et pas seulement descriptif. Ce travail m’a permis de faire

2 Village Mondial / Pearson E. d. , Paris, deuxième édition: août 2004. Egalement disponible en accès gratuit sur www.pbaudry.com 3 En accès libre et co-écrit avec les lecteurs. Merci de nous signaler d’éventuelles publications en open source antérieures à novembre 2000.

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une sorte de psychanalyse culturelle : né Français en France, qui étais-je dans ma dimension nationale, en quoi étais-je singulier et en quoi reflétais-je des traits caractéristiques des Français ? Au décours de ce travail, il a bien fallu me résoudre à l’évidence : quel que soit le degré de singularité que l’on revendique (surtout lorsque l’on est Français, sachant qu’une telle revendication fait partie du tempérament national), il y a en fait des croyances, des attitudes, des modes de pensée, des comportements plus largement communs entre ressortissants d’un même pays que d’un pays à l’autre. Bien sûr, à l’intérieur d’une même culture, la diversité est si grande que toute tentative de mettre dans le même sac des individus aussi divers semble vouée à l’échec. Cependant, allons observer à Roissy deux escalators, un rempli uniquement de Français et l’autre d’Américains : en moyenne ce n’est pas la même chose. Il y a donc sans doute un niveau de zoom auquel on peut se situer, qui permette, en moyenne, de parler avec pertinence d’une culture donnée. Il ne s’agit évidemment pas là de nier la très grande diversité humaine, et encore moins de comparer des cultures pour déterminer laquelle serait la meilleure (ou, tentative exécrable, la pire). Mais faut prendre conscience de traits communs, s’apercevoir que, sur le clavier du piano culturel, on tend au sein d’un même pays à jouer toujours les mêmes notes et à en éliminer d’autres ; la musique ainsi composée peut être magnifique, mais ce n’est pas la seule possible ni nécessairement la plus désirable. Et lorsqu’un ensemble de traits culturels s’est forgé au fil des siècles dans un environnement donné, il convient, lorsque cet environnement se trouve exposé à la confrontation avec ses vis-à-vis, de faire preuve de discernement pour déterminer les composantes culturelles qui méritent d’être préservées, et celles qui doivent évoluer en vue d’une meilleure performance collective, sans laquelle il n’est pas de survie culturelle. Donc oui, il y a des mentalités nationales, et en particulier une mentalité française. Même si elle évolue quelque peu d’une génération à l’autre, elle repose sur un socle stable qui a fini par prendre la force de l’évidence et de la nécessité alors qu’il n’est que le résultat du façonnage d’un éco-système culturel, modelé par des institutions et transmis notamment par l’éducation. La revendication d’une “exception française” vient encore plus justifier le concept de mentalité appliquée à notre peuple. Le bizutage que le système français impose aux étrangers à qui est venue l’idée saugrenue de venir s’établir chez nous vise à protéger cette singularité contre ce qui est perçu comme une aggression culturelle perpétrée par ces envahisseurs. D’une certaine façon, la mise à l’épreuve de nos constantes culturelles par les étrangers met en route notre système immunitaire culturel et renforce notre identité (pour le meilleur et pour le pire). La mentalité française existe ; elle n’est ni meilleure ni pire que d’autres mais certaines de ses composantes se révèlent plus ou moins efficaces en ces temps de grands changements et d’exposition à la concurrence internationale. Aussi mérite-t-elle d’être mieux identifiée, interprétée, comprise, assumée, pour que

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nous ne soyons pas ballotés par elle à notre insu. Pour ce faire, il nous faudra aller au-delà de l’ignorance, de la force de l’évidence, du déni, de la résistance. Et dépasser notre sensibilité épidermique à la critique – qui est d’ailleurs l’une de nos composantes culturelles. C’est à ce difficile travail de lucidité que je vous convie maintenant. Ce que j’écris dans ce livre ne plaira pas à tout le monde. J’y révèle le faux-semblant central autour duquel notre culture est structurée, et j’en démonte le mécanisme. On n’est pas censé faire ça, puisque, justement, il y a un consensus implicite pour maintenir collectivement une certaine façon de voir les choses, ce qui permet à chacun de rester dans le confort de la plainte geignarde, de tirer les avantages de la passivité, de profiter de l’éparpillement schizophrénique gaulois, tout en s’arrangeant pour n’être pas comptable de ses actions – et en recouvrant le tout d’une épaisse couche de déni, dans un pays qui, de façon préemptive, se prétend cartésien ! En publiant ce qui suit, je sais exactement ce que je fais. Imprécateur, j’ai conscience de révéler un tabou, et, en tant que psychanalyste, je suis bien placé pour savoir ce qu’il en coûte. Mais si l’on ne veut pas que notre pays se plante encore plus, il faut bien que quelqu’un fasse ce boulot.

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CHAPITRE I

LA POSITIVE ATTITUDE À bon entendeur, salut ! À ce point ! À ce qu’il paraît À ce que je vois… À ce rythme là À ce tarif là À ce train là À chaque jour suffit sa peine À d’autres ! À la limite À la rigueur À la Saint-Glinglin À la tête du client À mon grand dam À qui le dis-tu ! À quoi bon ! À quoi ça ressemble, tout ça ? À quoi tu joues ? (au fait) À tout coup Ah là là ! Ah, ne m’en parle pas ! Allez-y donc ! Allons-y gaiement Alors là ça me dépasse ! Alors là j’te dis tout de suite que… Alors là je ne suis pas du tout d’accord Alors là on arrête tout de suite Alors là tu m’étonnes ! Alors là, ça bat tous les records ! Après moi le déluge Après tout… Après tout ce qu’on a fait Arrête de faire ton cinéma Arrête de te la jouer Arrête ton char Arrête ton cirque Attention Au bas mot Au boulot (allez !) Au cas où (bonne surprise) Au mieux Au moins… Au moins on aura pas tout raté Au moins on lui a donné sa chance Au pire Au point où on en est ! Au prix où est le beurre Au train où vont les choses Autant dire que… Autant le dire tout de suite Avec ça on est sauvés Avec ce qu’on a reçu ! Avec tout ce qu’on a fait pour toi Avec un peu de chance Avoir le cœur gros Avoir les idées mal placées Avoir perdu ses illusions Baisse la tête t’auras l’air d’un coureur Ben quoi ? Bof… Bon courage ! Bon passons Bon, puisque c’est comme ça… Bonjour les dégâts ! Bonjour ! Bonjour l’ambiance ! Bonnet blanc et blanc bonnet Bref… Broyer du noir Ç’aurait été trop facile C’est à peine croyable C’est à voir C’est bien connu ! C’est bien dommage C’est bien fait pour toi C’est bien notre chance ! C’est bien parce que c’est toi C’est bien possible C’est bien triste C’est bon pour cette fois-ci C’est bon pour toi C’est Bysance ! C’est ça le problème C’est ça ou rien C’est comme ça C’est comme ça et pas autrement C’est comme tout C’est cuit d’avance C’est de bon ton C’est de l’histoire ancienne C’est de la rigolade C’est de mieux en mieux C’est de pire en pire C’est déconcertant C’est déjà ça C’est déjà pas mal C’est déjà plus facile comme ça C’est déjà quelque chose C’est dire C’est du beau C’est du jamais vu C’est du propre C’est dur C’est en fonction C’est encore autre chose C’est facile à dire C’est fatal C’est fort regrettable C’est fou ce qu’on s’amuse C’est gai ! C’est hallucinant C’est impardonable C’est impensable C’est inexcusable C’est insensé C’est jamais simple C’est l’époque qui veut ça C’est l’espoir qui fait vivre C’est l’occasion qui fait le larron C’est la dernière C’est la fin de tout C’est la meilleure (de l’année) C’est la totale C’est le bouquet C’est le comble C’est le comble du ridicule C’est le début de la fin C’est le moins qu’on puisse dire C’est le monde à l’envers C’est le pompon C’est loin d’être gagné C’est loin d’être idiot C’est loin d’être joué C’est loin de s’arranger C’est louche tout ça C’est mal barré C’est mal parti C’est malin ça encore C’est même pas la peine d’essayer C’est même pas la peine d’y penser C’est mieux que rien C’est moins pire que je le croyais C’est mort C’est neuf, ça vient de sortir C’est ni fait ni à faire C’est pas à nous que ça arriverait C’est pas autrement

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C’est pas bon pour le moral C’est pas bon signe C’est pas ça qui manque C’est pas comme avant C’est pas commun C’est pas comparable C’est pas croyable C’est pas d’la gnognote C’est pas de refus C’est pas demain la veille ! C’est pas des manières tout de même C’est pas dit d’avance C’est pas donné C’est pas du boulot tout ça C’est pas encore aujourd’hui qu’on mourra de faim ! C’est pas faisable (d’abord !) C’est pas faute d’essayer C’est pas fini C’est pas follichon C’est pas gagné d’avance C’est pas grave C’est pas honnête tout ça C’est pas idiot C’est pas impossible C’est pas jouable C’est pas juste C’est pas la même chose C’est pas la peine C’est pas le genre de la maison C’est pas le tout de ça C’est pas mal quand même C’est pas marrant tout ça C’est pas moi qui vais t’en empêcher C’est pas nouveau tout ça C’est pas par coincidence que… C’est pas par hasard C’est pas pensable C’est pas peu dire C’est pas plus mal comme ça C’est pas plus mal qu’autre chose C’est pas possible C’est pas pour dire mais… C’est pas pour me vanter mais… C’est pas pour tout le monde C’est pas prêt de s’arranger C’est pas si bête que ça en a l’air C’est pas si mal que ça C’est pas si nul que ça ! C’est pas si simple que ça en a l’air C’est pas surprenant C’est pas terrible tout ça C’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd C’est pas toujours facile C’est pas tous les jours qu’on rigole C’est pas tous les jours qu’on voit ça C’est pas tout ! C’est pas très catholique tout ça C’est pas très net tout ça C’est pas un hasard si… C’est pas un mauvais bougre C’est pas un modèle du genre C’est pas une raison C’est pas une vie C’est peut-être mieux comme ça C’est pire qu’avant C’est pire que ça en a l’air C’est pire que tout C’est plus ce que c’était C’est plus fort que lui C’est plutôt mauvais signe C’est que le début ! C’est quelque chose alors ! C’est qui celui-là (d’abord !) C’est quoi ça encore ? C’est quoi ce travail ? C’est reparti comme en 14 C’est reparti pour un tour C’est rien de le dire ! C’est risqué C’est toujours ça d’économisé C’est toujours ça de fait C’est toujours ça de moins à faire C’est toujours ça de pris ! C’est toujours la même chanson C’est toujours la même chose C’est toujours les mêmes qui trinquent C’est toujours pareil C’est toujours sur les mêmes que ça tombe C’est tout vu C’est un modèle du genre C’est un scandale C’est une valeur sûre ! C’est vraiment pas le moment C’était foutu d’avance C’était joué d’avance C’était le bon temps ! C’était pas mon jour C’était perdu d’avance C’était si bien C’était si bien parti C’était trop beau pour durer C’était trop beau pour être vrai C’eût été trop simple Ça a le mérite d’être clair Ça a toujours été comme ça Ça annonce la couleur Ça aurait été dommage Ça aurait pu être pire (tout ça) Ça, ça sort de l’ordinaire Ça cache quelque chose Ça changerait de l’ordinaire Ça commence à bien faire Ça commence bien Ça craint Ça défie l’entendement Ça dépasse l’entendement Ça dépasse la mesure Ça dépasse les bornes Ça devrait être interdit (ces choses-là) Ça devrait pas exister Ça durera ce que ça durera Ça en dit long Ça en prend le chemin Ça frôle l’inconscience Ça gagne à être connu Ça ira quand même Ça laisse rêveur Ça lui pend au bout du nez Ça m’apprendra Ça m’aurait pas étonné Ça m’en a tout l’air Ça m’étonnerait bien Ça mange pas de pain Ça me fait plus mal qu’à toi Ça me passe au dessus de la tête Ça me rassure Ça me tue Ça mine Ça n’a ni queue ni tête Ça n’a pas d’prix Ça n’a pas l’air comme ça Ça n’a pas l’air de vous déplaire Ça n’a rien à voir Ça n’engage à rien Ça n’enlève rien au fait que… Ça n’est pas négligeable Ça ne changera rien

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Ça ne court pas les rues Ça ne devrait pas être permis Ça ne fait que de commencer ! Ça ne laisse pas indifférent quand même Ça ne laisse présager rien de bon Ça ne me réussit pas Ça ne peut pas faire de mal Ça ne peut pas nuire Ça ne ressemble à rien Ça ne rime à rien Ça ne s’arrange pas Ça ne s’invente pas Ça ne se dit pas Ça ne se fait pas Ça ne se fait pas comme ça ! Ça ne tenait qu’à un cheveu Ça ne tient qu’à un fil Ça ne va pas fort Ça ne va pas si mal que ça Ça nous fait une belle jambe (tout ça) Ça ou autre chose Ça paie pas de mine Ça passe pour une fois Ça passera comme tout le reste Ça peut encore aller Ça peut pas aller en s’arrangeant Ça peut pas être mauvais Ça peut pas nuire Ça peut toujours servir Ça porte chance Ça porte la poisse Ça pouvait pas tourner plus mal que ça Ça promet ! Ça relève le niveau général Ça reste à voir Ça revient au même Ça s’arrête pas là ! Ça se fête Ça se gâte Ça se passe de tout commentaire Ça se présente pas si mal que ça Ça se saurait Ça sent la fraude Ça sent le roussi Ça sera jamais de trop Ça sera pas facile Ça sera pas la dernière fois Ça sera pas la première fois qu’on nous fait le coup Ça sera toujours ça de fait Ça sera toujours ça de moins à faire Ça sera toujours comme ça Ça serait bien la première fois que… Ça serait dommage Ça serait trop beau pour être vrai Ça serait trop facile Ça sort de l’usine Ça suffit comme ça Ça suffit maintenant Ça tient pas la route cette histoire Ça va de mal en pis Ça va encore (pour cette fois) Ça va être encore de ma faute Ça va être sa fête Ça va faire des dégâts Ça va faire des envieux tout ça Ça va faire des jaloux Ça va faire jaser Ça va faire très mal Ça va mal tourner cette histoire Ça va pas dans le bon sens tout ça Ça va pas le faire Ça va pas se passer comme ça (alors là !) Ça va pas très fort Ça va pour cette fois-ci Ça va se gâter Ça vallait vraiment le déplacement Ça vaut le détour Ça vaut pas la peine Ça vaut pas le coup Ça vaut pas tripette Ça vaut quand même le coup Ça veut tout dire Ça vient de sortir Casser du sucre sur le dos Cause toujours tu m’intéresses Ce n’est rien Ce qui me chagrine Celui-là c’est le champion ! Celui-là il est logé à bonne enseigne Cette fois-ci c’est pour de bon Ceux-là ils exagèrent Chacun à sa place Ciel ! Circulez y a rien à voir Comme d’hab ! Comme de bien entendu Comme il se doit Comme par enchantement Comme par hasard Comme par magie Comme prévu Comme quoi… Comme si Comme si ça ne suffisait pas comme ça ! Comme si de rien n’était Comme si y avait besoin d’en rajouter Comme toujours Comment ai-je pu ! Comment on a pu en arriver là ? Comment on a pu faire sans ? Comment veux-tu qu’on s’en sorte (avec une langue pareille) Contre toute attente Contre vents et marées Crois-en ma longue expérience Crois-tu qu’il y aurait pensé ! D’abord… D’abord ça se saurait ! D’ailleurs D’ici à ce que D’où il sort celui-là ? D’où tu sors ça ? Dans le doute Dans le pire des cas Dans quoi on s’est embarqués encore ! De mieux en mieux De nos jours ! De qui se moque-t-on ? De toutes façons De toute manière Décidément… Déjà Depuis quand…? Des fois (que ça serait vrai) Des trucs pareils, ça devrait pas exister Deux pour le prix d’un Dis-donc Donner du fil à retordre Donner le bon dieu sans confession Du pareil au même tout ça Dur dur

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Eh bé ! Elle est bien bonne celle-là En avant la musique ! En être réduit à… En fin de compte En plus ! En plus de ça En plus du reste ! En prime En principe En revanche En veux tu en voilà En tout cas Encore un petit effort (allez…) Enfin… Est-ce bien nécessaire ? Est-ce bien utile ? Est-ce que ça en vaut la peine ? Est-ce que vous n’auriez pas par hasard… ? Estimez-vous heureux ! Et ben dis donc Et encore ! Et puis quoi encore ! Et toc ! Et voilà le travail ! Excusez du peu Faire comme si de rien n’était Faire l’innocent Faire l’intéressant Faire sa fière Faire sa Sainte-Nitouche Faire tout et son contraire Fais pas cette tête là Fais pas ta tête d’enterrement Fais pas ton malin Faites passer la monnaie ! Faites quelque chose ! Faites-moi grâce des détails Fallait le dire plus tôt Fallait le dire tout de suite Fallait le faire quand même Fallait oser Fallait pas Fallait s’y attendre Fallait y penser quand même Fatigué avant d’avoir commencé Fatigué d’avance ! Faudra s’y faire Faudrait pas pour autant Faudrait pas s’en priver ! Faut avoir les pieds sur terre Faut bien avouer Faut bien se faire une raison Faut bosser un peu Faut dire Faut dire aussi Faut l’faire ! Faut pas confondre Faut pas croire Faut pas dire fontaine je ne boirai pas de ton eau Faut pas en faire trop Faut pas exagérer Faut pas prendre les gens pour des… Faut pas se fouler Faut pas rêver Faut pas s’faire d’illusions Faut pas s’faire de bile pour ça Faut pas s’faire de mauvais sang pour ça Faut pas s’laisser abattre Faut pas s’leurrer Faut pas tout noircir Faut pas y compter Faut se faire une raison Faut se serrer la ceinture Faut vivre avec son époque Fini de rigoler Fini les plaisanteries Foutu pour foutu Fromage ou dessert Grave Hélas ! Holà ! Ici on n’est pas en Amérique Il aura mérité son fauteuil au paradis lui au moins Il doit avoir des choses à se faire pardonner Il en faudrait peu Il est beau ! Il est frais lui Il est grand temps de… Il est pas gâté celui-là Il est pas sorti de la cuisse de Jupiter celui-là ! Il fallait bien que ça arrive Il faut bien faire avec Il faut bien l’avouer Il faut que ça soit bien clair Il manquait plus que ça Il manquait plus que lui (au tableau) Il manquerait plus que ça Il me le donnerait que je n’en voudrais pas Il me les aura toutes faites ! Il n’a pas démérité Il n’a pas honte de Il n’empêche Il n’a pas raté sa rentrée Il n’en fait qu’à sa tête Il ne manquerait plus que ça ! Il n’y a qu’un pas Il n’y a rien à redire (cette fois-ci) Il n’y aura pas de prochaine fois Il ne fait que ce qu’il lui plaît Il ne faut jurer de rien Il ne faut pas avoir peur des mots Il ne faut pas désespérer Il ne l’aura pas volé Il ne l’emportera pas au paradis Il ne manque pas d’air ! Il ne perd rien pour attendre Il ne s’est pas raté Il ne va pas en faire une maladie Il ne va pas encore se plaindre Il s’en est bien sorti (cette fois-ci) Il s’en est fallu de peu Il sort du lot, celui-là ! Il s’y croyait déjà Il va nous en remettre une couche Il va nous remettre ça Ils disent tous ça Ils le font exprès! Ils ne vont pas nous faire le coup Ils nous ont bien eus Ils nous ont pas râtés Ils se la jouent Inutile de te dire Incroyable mais vrai

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J’ai comme l’ombre d’un doute J’ai honte J’ai jamais entendu un truc pareil J’allais le dire J’arrête pas de te le dire J’aurais jamais crû ça (d’eux) J’aurai tout entendu (cette fois) J’dis pas non J’disais ça comme ça J’me voyais déjà J’t’arrête tout de suite J’en doute J’en pense pas moins J’en tombe des nues J’peux pas deviner J’pouvais pas savoir J’t’avais prévenu ! J’vous ai pas tout dit J’vous dis pas ! J’vous en dis pas la moitié Je crains le pire Je lui souhaite bien du plaisir Je m’attendais à mieux Je m’attendais à pire Je m’évertue à te le dire Je n’ai rien à lui reprocher Je n’en reviens pas Je ne dis pas non Je ne me plains pas Je ne veux même pas le savoir Je n’irai pas jusqu’à dire Je n’y crois guère Je ne dis pas non Je ne fais que ça Je ne les aurai jamais pensés capables de ça Je ne lui donnerai pas le Bon Dieu sans confession moi Je ne réponds de rien Je ne suis pas contre Je ne vous dis pas tout Je ne vous le fais pas dire Je rêve Je suis tombé de haut Je t’ai à l’œil Je t’attends au tournant toi ! Je t’explique pas Je te l’avais bien dit ! Je te ferai remarquer Je vais m’priver ! Je vais te démontrer par A plus B que tu as tort Je vois Je vois le genre Je vois le style Je voudrais bien voir ça ! Je vous fais grâce du reste Je vous passe les détails Je vous raconte pas tout ! Je vous souhaite bien du plaisir ! Juste pour voir Justement ! L’air de rien L’avenir est assuré L’un n’empêche pas l’autre La croix et la bannière La folie des grandeurs Là, je trouve que tu exagères La plaisanterie a assez duré La vie, c’est dur Le comble (de l’histoire) Le doute n’est plus permis Le hasard en a décidé autrement Le mal est fait Le malheur des uns fait le bonheur des autres Le mieux est l’ennemi du bien Le pire est devant nous Le pire n’est jamais sûr Le pire reste à venir Le plus dur est fait Le plus dur reste à faire Le ridicule ne tue plus ! Le tour est joué Les bras m’en tombent Les dés étaient pipés d’avance Les grands mots, tout de suite ! Les temps sont durs Les voisins vont t’entendre Loin de moi l’idée ! Ma bonté me perdra Maintenant c’est plus la peine Maintenant que tu le dis Mais attends …mais ça va encore Mais de là à… Mais j’ai eu de la chance Mais je me soigne Mais qu’est-ce qu’il veut encore celui-là ! Mais quelle idée ! Malgré les apparences Malgré tout Manque de pot ! Mazette ! M’en parle même pas ! Me demande pas comment Me dis pas ! Me faire ça, à moi ? Mettre un bémol Mieux vaut tard que jamais Mine de rien Misère de misère ! Mon œil ! Montre un peu (pour voir) N’aie crainte N’ayons pas peur des mots N’ayons pas peur du ridicule N’empêche N’en déplaise à certains N’en dites pas plus N’y pense même pas ! Ne l’enterre pas tout de suite Ne m’dis pas ! Ne nous emballons pas Ne nous réjouissons pas trop tôt Ne parlons pas trop vite Ne pas avoir froid aux yeux Ne pas avoir la conscience tranquille Ne pas avoir le sens du ridicule Ne pas avoir peur du ridicule Ne pas y trouver son compte Ne plus savoir à quel saint se vouer Ne serait-ce qu’une seule fois Ne te fais pas de mouron Ne te gêne pas (surtout) ! Ni fait ni à faire Ni vu ni connu Non c’est pas la peine Non mais alors Non mais dis-donc ! Non mais là ! Non mais quand même ? Non mais quoi ?

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Oh la la la la On a déjà donné On a eu de la chance On a failli pleurer On a limité les dégâts On a tiré le gros lot On a vu pire On aura beau dire On aura beau essayer On aura beau faire On aura eu droit à tout On aura tout entendu On aura tout essayé On aura tout vu On aurait dû s’y attendre On avait bien besoin de ça On connaît déjà On connaît la musique On connaît la suite On croit rêver On croyait avoir tout vu On dira ce qu’on voudra mais… On dit ça On en a eu pour notre argent On en a vu d’autres On en n’est pas encore là On en n’est plus là ! On en reprendrait bien On est à bout du rouleau On est bien d’accord On est bien peu de chose On est dans de beaux draps On est dans le pétrin On est fait comme des rats On est loin du compte On est tombés bien bas On est tombés de haut On est tous dans le même bateau On est tous logés à la même enseigne On fait aller On fait avec les moyens du bord On fera avec On fera sans On l’a échappé belle (de justesse) On les avait prévenus On leur souhaite bien du courage On n’a pas à le regretter On n’a pas démérité On n’a pas fini d’en voir On n’a pas perdu notre temps On n’a plus le choix On n’a plus rien à perdre (de toutes façons) On n’a rien inventé On n’arrête pas le progrès ! On n’est est pas à ça près On n’en n’est pas encore là On n’en voit pas le bout On n’en sort pas On n’est jamais trop prudents On n’est pas payés pour ça (d’abord) On n’est pas rendu On n’est pas si mal lotis que ça On n’est pas si mal que ça On n’est pas si nuls que ça On n’est pas sortis de l’auberge ! On n’est pas tirés d’affaire On n’est plus à ça près On n’est plus servis On ne demande pas mieux On ne fait que passer On ne l’a pas raté On ne l’aura pas volé (cette fois) On ne leur en demandait pas tant On ne peut pas leur en vouloir On ne peut pas leur enlever ça On ne peut pas plaire à tout le monde On ne peut pas toujours faire ce qu’on veut dans la vie On ne peut pas tomber plus bas On ne peut pas tout avoir dans la vie On ne peut plus faire confiance à personne On ne pourra pas lui reprocher cela On ne pourra pas lui retirer cela On ne risque rien On ne s’affole pas On ne s’en lasse pas On ne s’ennuit pas (je vois qu’) On ne sait jamais On ne sait plus à qui se fier On ne sait plus quoi inventer ! On ne se refait pas On ne se refuse rien ! On ne sera pas venu pour rien (au moins) On ne va pas en faire un drame On ne va pas faire la fine bouche On ne va pas faire les difficiles On ne va pas s’en vanter On ne va pas se fouler pour ça On nous avait caché ça On peut pas se plaindre (pour une fois) On peut toujours rêver On pourra pas dire le contraire On pourra pas dire que… On pourra pas lui en vouloir pour ça On revient de loin On rit on rit on s’amuse On s’amuse comme on peut On s’attend a tout (de nos jours, avec les jeunes de maintenant) On s’attend au pire On s’attendait à tout sauf à ça On s’en contentera On s’en sortira jamais On s’y attendait mais alors On s’y verrait On sait ce qu’on perd, on ne sait pas ce qu’on gagne On ne sait pas de quoi demain sera fait On ne sait pas où donner de la tête On ne sait pas sur quel pied danser On se calme On se demande d’où ça vient (ça encore) On se fait du mauvais sang On se fiche de qui là ? On se fiche du monde ou quoi ? On se raccroche à se qu’on peut On se rattrape comme on peut On te pardonne pour cette fois On tombera pas plus bas On va bien finir par y arriver On va droit dans le mur On va droit vers la catastrophe On va encore se faire arnaquer On va encore se faire avoir On va le payer On va lui faire sa fête On va pas en faire

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une jaunisse On va pas en mourir On va pas pleurer pour ça ! On va pas pleurer sur leur sort On va pas s’abaisser à ça On va pas s’en plaindre On va pas se laisser abattre On va trinquer On va y avoir droit On verra ce que ça donnera On y prendrait goût Où avais-je la tête encore ? Où allons-nous ? Où vous croyez-vous ? Par dessus le marché Par ici la monnaie ! Par l’opération du Saint-Esprit Par la force des choses Par la même occasion Par les temps qui courent Par quel miracle ? Parce que c’est comme ça Pardi ! Parle pour toi Partisan du moindre effort Pas de bol Pas de cadeau Pas de chance Pas de jaloux ! Pas de pot Pas de problème Pas de souci Pas faire long feu Pas la peine de te faire un dessin Pas logés à la même enseigne Pas mal Pas si bête qu’il en a l’air Pas si sûr que ça Pas si vite Pas tant que ça Pas un pour racheter l’autre Pas vraiment Passons Passons aux choses sérieuses Payer de sa personne Pendant que vous y êtes Peu importe Peut mieux faire Pince moi si je rêve Plus ça change, plus c’est la même chose Plus jamais ça Plus rien ne me surprend Pour ça on peut lui faire confiance Pour ce prix là Pour ce qu’on gagne Pour ce qu’on nous paie ! Pour couronner le tout Pour en rajouter Pour la bonne cause Pour la gloire Pour le même prix Pour le moment Pour le prix qu’on paie Pour ne rien vous cacher Pour peu que… Pour qui ils nous prennent (d’abord) Pour ta peine Pour tromper l’ennemi Pour une fois ! Pour une fois qu’ils ont une bonne idée Pour voir Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Pourvu que ça dure ! Pourvu que ça soit vrai Prendre ses rêves pour la réalité Prendre son mal en patience Prendre ses désirs pour des réalités Prendre sur soi Puisqu’on y est Puisqu’il en est ainsi Puisque c’est comme ça Puisqu’il en est ainsi Qu’est-ce qu’il faut pas faire Qu’est-ce qu’il fout ? Qu’est-ce qu’ils vont encore chercher là ? Qu’est-ce qu’y faut pas entendre ! Qu’est-ce qu’on n’a pas encore inventé là Qu’est ce que ça donnera ça encore Qu’est-ce qu’on est venu faire ici ? Qu’est-ce qu’on peut y faire ? Qu’est-ce qu’on serait sans eux ? Qu’est-ce qu’on trimballe ! Qu’est-ce que ça donnera Qu’est-ce que ça va devenir tout ça Qu’est-ce que j’ai encore fait Qu’est-ce que tu crois ? Qu’est-ce que tu risques de plus ? Qu’est-ce que tu veux ? Qu’est-ce qui leur a pris Qu’est-ce qui va encore nous arriver ? Qu’est-ce qui va encore nous tomber sur la tête (dessus) ? Qu’est-ce-que ça cache encore cette histoire ? Qu’on ne vienne pas nous dire que… Quand bien même Quand les poules auront des dents Quand même Que demande le peuple Que demander de plus Que vont-ils encore inventer ? Quel as ! Quel beau specimen Quel cache misère ! Quel homme ! Quel mauvais esprit Quel mauvais genre Quel mauvais goût ! Quel rabat-joie Quel tableau ! Quelle ambiance ! Quelle aubaine ! Quelle coïncidence Quelle époque Quelle galère ! Quelle honte ! Quelle idée ! Quelle mentalité ! Quelle plaie Quelle série Qui aurait pu dire ça d’avance ? Qui d’autre encore ? Qui l’aurait crû ? (de lui) Qui l’aurait dit ? Qui sait ! Qui va à la chasse perd sa place Quoi d’autre ? Quoiqu’on dise Quoiqu’on fasse

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Regarde ce que tu m’as fait faire Regarde le tableau Regardez-moi ça un peu Retenez-moi ou je fais un malheur Revenons aux choses sérieuses Rien n’est jamais sûr Rien n’est joué Rien n’est plus comme avant Rien n’est simple Rien n’y fera S’endurcir S’il n’y avait que ça ! Sa réputation n’est plus à faire Sait-on jamais Sans blague ! Sans se faire prier Sauvons les apparences Se faire violence Se refaire une virginité Si c’est pas une honte ! Si c’était à refaire je ne le referais pas Si c’était si facile, tout le monde le ferait Si ça te plaît Si j’aurais su j’aurais pas venu Si je peux me permettre Si je te le dis c’est que c’est vrai Si ma tante en avait… Si on va par là Si par extraordinaire Si par hasard… Si par le plus grand des hasards Si seulement Si tu prends ça comme ça Si tu crois qu’ils… Si tu vas par là Si vous n’y voyez pas d’inconvénient… Si vous saviez ! Si y’avait que ça ! Soit dit en passant Soit Sur quelle planète tu vis ? Sûrement Surtout pas ! T’as eu de la chance T’as fait très fort T’as (pas) vu sa tête ? T’as pas idée T’as pas le droit à l’erreur T’as pas tort T’emballe pas si vite que ça T’en as bien de la chance ! T’en as pas d’autres des comme ça ? T’en fais pas une montagne T’en fais trop T’en veux une autre ? T’en veux une… t’en auras T’es comme ton père T’inquiète pas T’y as crû toi ? T’y es pas du tout Tant mieux pour toi Tant pis pour toi Tant qu’à faire Tant que ça durera Te fatigue pas Te prends pas la tête pour ça quand même ! Tenter le diable Tiens donc ! Tirer le diable par la queue Toujours est-il que…. Toujours plus fort Tous comptes faits Tous dans le même bateau Tous les espoirs sont permis Tous les mêmes Tout ça Tout ça pour rien Tout de même pas Tout de suite les grands mots ! Tout dégringole Tout en dépit du bon sens Tout est possible Tout et n’importe quoi Tout feu tout flamme Tout fout le camp ! Tout pour plaire Tout un poème Tout sauf ça Tout se présentait si bien Tout un programme ! Toutes les occasions sont bonnes Treize à la douzaine Très peu pour moi, merci Trop c’est trop Tu connais pas la dernière Tu connais pas ta chance Tu connais pas ton bonheur Tu diras ce que tu voudras mais… Tu fais tout pour me contrarier Tu l’as dit bouffi Tu l’auras bien cherché (celle-là) Tu l’auras bien mérité Tu le fais exprès ou quoi ? Tu me prends pour qui (au juste) ? Tu ne croyais pas si bien dire Tu ne l’auras pas volé (au moins celle-là) Tu ne perd pas le nord Tu ne perds rien pour attendre Tu ne sais pas à quoi tu t’engages Tu ne seras pas déçu du voyage Tu ne te rends pas compte Tu parles ! Tu parles d’un problème ! Tu peux pas le rater Tu peux toujours courir Tu plaisantes ou quoi ? Tu rigoles ou quoi ? Tu t’attendais à quoi au juste ? Tu t’attendais à quoi d’autre ? Tu t’en es bien sorti Tu t’es encore pris un rateau Tu croyais quoi ? Tu t’es regardé ? Tu t’es vu ? Tu t’rends compte ! Tu t’rends pas compte ! Tu te crois où ? Tu te fous de moi ou quoi ? Tu te prends pour qui ? Tu vas le payer Tu vas me faire le plaisir de Tu veux rire ! Tu vois, quand on fait un petit effort Un grand classique du genre Un prêté pour un rendu Une fois n’est pas coutume Une fois passe encore Une misère !

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V’là aut’chose ! Va savoir ! Vaut mieux en rire qu’en pleurer Vendre chèrement sa peau Vivons heureux, vivons cachés Voila le résultat Vous m’en direz tant Vous n’auriez pas dû Vous n’y pensez pas Vous vous rendez compte ? Vu comme c’est parti Vu comme ça commence Vu l’allure Vu la situation Vu la tournure que ça prend Vu le genre Vu le style Y devrait pas y avoir de problème Y laisser des plumes Y perdre au change Y’a anguille sous roche Y’a de l’ambiance Y’a des limites à pas dépasser (quand même) Y’a d’quoi dire Y’a d’quoi faire Y’a des risques Y’a du boulot derrière ! Y’a mieux dans le genre ! Y’a mieux mais c’est plus cher Y’a pas à dire Y’a pas de danger que ça nous arrive ! Y’a pas de mal à ça Y’a pas de quoi Y’a pas de quoi en rajouter Y’a pas de raison d’abord Y’a pas de retour en arrière possible Y’a pas de solution Y’a pas de souci Y’a pas le feu ! Y’a peu de chance Y’a pire dans le genre ! Y’a plus de saison Y’a plus moyen Y’a qu’un pas Y’a rien à faire Y’a rien à y faire Y’a rien à redire ! (alors là) Y’avait longtemps Y’avait qu’à…

… MAIS BON !

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CHAPITRE II

LA DÉPRESSION

La culture francaise est fondamentalement dépressive – si l’énumération qui précède4 ne vous convainc pas, regardez la consommation d’anxiolytiques et d’anti-dépresseurs en France, championne du monde, ou restez mariner dans votre déni et passez à un autre livre. Comme la posture dépressive est insupportable dans la longue durée, les Français essayent d’en sortir, non pas en la refusant pour de bon, ce dont la plupart ne se croient généralement pas capables, mais en passant sporadiquement par des foucades rebelles, du genre “alors là, je ne suis pas du tout d’accord”, puis ils reviennent à leur position dépressive de base et s’en accommodent jusqu’à leur prochaine rébellion.

Môman J’ai retracé dans Français et Américains, l’autre rive des observations que j’ai faites sur des terrains de jeux et bacs à sable aux États-Unis et en France. La mère américaine5 dit à son rejeton : “Go have fun!”. L’enfant y va, s’amuse, tombe, revient vers la mère qui le réconforte brièvement, lui explique factuellement ce qui s’est passé (“tu courrais, il y avait un arbre, etc.”), lui enseigne comment faire la prochaine fois, puis lui dit : “you can do it”, puis à nouveau “go have fun”. La mère française commence par un certain nombre de limitations : “garde ton manteau tu vas prendre froid, reste où je peux te voir, n’accepte pas de bonbons, ne parle pas à un étranger”. L’enfant y va, s’amuse, tombe, pleure, revient vers Môman, qui lui fout une tarte, puis procède par attributions : “qu’est ce que j’ai fait pour avoir un gosse pareil!”, “t’es bien comme ton père, tu n’écoutes jamais ce qu’on te dit”, etc. Puis elle ajoute des restrictions supplémentaires du genre : “bon maintenant ça suffit, on rentre à la maison”. Par leurs attitudes très contrastées, chacune de ces mères met en place un clivage, douloureux pour l’enfant, et formateur de la personnalité, et, par delà, de la culture nationale. La mère américaine se place d’un côté de cette ligne de démarcation qu’elle crée en expulsant l’enfant. Car, ne nous y trompons pas, le “go” de “go have fun” ne signifie pas simplement “vas-y” mais “fous le camp !”, et sa réitération fréquente a valeur de sevrage social. De l’autre côté de cette césure, l’enfant se trouve plongé dans la réalité, ou, plus exactement, confronté à celle-ci. Nous sommes ici en présence d’une structure ternaire : la mère, l’enfant et la réalité. En expulsant l’enfant, la mère s’exclut. L’enfant devra former

4 Merci à Nathalie Monsaint-Baudry pour l’essentiel de ce long travail de recensement de ce millier d’expressions françaises. 5 Je parle ici de mères WASP (White Anglo Saxon Protestant), sous-groupe ethnique qui donne le la de la culture américaine.

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sa personnalité au seul contact de cette sorte de Père qu’est la réalité extérieure, à laquelle sa mère l’aura abandonné. “Sink or swim!” Pour ne pas couler, l’enfant sera obligé de nager perpétuellement. Cette action permanente forgera sa personnalité. Forcé d’agir constamment, il se définira, et sera défini par la société, par le résultat de ses actions – notamment de son travail, qui sert de raison d’être dans cette culture. Étant forcé à être dans le faire, il ne pourra plus jamais se réfugier dans le royaume maternel de l’être, ce paradis perdu. Le retour geignard à la mère – la dépression – lui est interdit. Dès qu’il déprime, il lui faut voir un psy, et, plus quotidiennement, l’échec n’est pas une option6. De son côté, la mère française met également en place un clivage, mais cette fois-ci entre l’entité créée par la fusion symbiotique entre elle-même et son rejeton d’une part, et la réalité, rejetée à l’extérieur et désignée comme dangereuse (“on sait ce qu’on perd, on ne sait pas ce qu’on gagne”), d’autre part. Deux contes pour enfants viennent illustrer ces attitudes fort contrastées. Pour les Américains, “The Little Engine that Could ” retrace l’histoire de cette petite locomotive (le fait qu’elle est trop jeune est un élément essentiel de ce conte). Apprenant qu’un train rempli de jouets est en panne de l’autre côté de la colline, elle prend sur elle-même d’aller le dépanner. Elle y arrivera malgré son jeune âge, et l’anxiété causée par cette situation problématique trouvera sa résolution dans le happy ending obligatoire. L’équivalent en français est “La chêvre de Monsieur Seguin”. S’ennuyant dans une pâture, certes confortable, mais qu’elle ne connaît que trop bien, elle ronge sa laisse pour aller explorer des champs plus verdoyants, où elle sera dévorée par le Loup. Pour les Français, la réalité, c’est le Loup. Pour eux, tout se passe comme si la mère était clivée entre une Bonne mère, obligatoire (au sens qu’elle ne permet pas qu’on s’en sépare), et une Mauvaise mère, interdite, qui représente le monde extérieur. Bien sûr, le fait que la mère soit uniquement bonne est une fiction – nous verrons les conséquences considérables de cette distorsion de la réalité. Le Français se voit ainsi interdire l’accès au ternaire, forcé qu’il est de se contenter du binaire : Mère-Enfant, ne faisant fusionnellement qu’un, d’un côté, et Réalité de l’autre. Un dedans fusionnel chaleureux ou un dehors mortifère, et point de troisième voie. Jamais cette dichotomie ne présente la réalité comme un tiers qui pourrait servir de référent, de repère, de séparateur, en un mot, de Père, entre l’enfant et la mère. Si l’enfant échappe à l’emprise maternelle, il se retrouve seul et non pas, comme l’enfant américain dans une interaction dialectique avec la réalité dans laquelle il ferait des choses, recevrait un feedback et évoluerait ainsi dans une boucle d’apprentissage continu où il construirait son identité dans le Faire. Le Français procède par foucades : il reste bien au chaud chez Môman (la fratrie, l’équipe, l’entreprise, la fonction publique, la Sécu, la mère-patrie), et il tente de s’en échapper à intervalles réguliers pour se rassurer sur sa capacité

6 Cet optimisme obligatoire, qualifié de naïf, est insupportable aux Français, qui préfèrent s’accrocher à leurs croyances dépressives.

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d’être indépendant de Môman (par des coups de génie, des actes héroïques, des grêves, des usines à gaz, des désaccords aussi violents que fugaces, et autres produits de l’exception française). Enchaîné à Môman au fond de la caverne de Platon, l’enfant français n’a pas accès directement à la réalité extérieure, dont il ne voit que l’ombre projetée. Retenu dans ses élans sporadiques en quête d’une improbable indépendance, il en est réduit, par cette appartenance forcée, à fantasmer le réel, à l’analyser sans s’y confronter directement, à explorer les coins et recoins de l’appartenance. Ce faisant, il acquiert une patine, il élabore la notion de nuance, cette forme de différenciation sans rupture : il ne se séparera pas de la mère mais il apprendra à discerner toute inflexion de sa voix, de son parfum, de sa texture ; le moindre haussement de sourcil sera décodé pour ce que qu’il est, une amorce de plainte, un chantage affectif à l’abandon. Si tu me quittes, tu me tues. Ou, sous une forme plus diluée : n’existe pas (indépendamment de moi), cesse de bouger sans arrêt, tu me donnes la migraine. Et puis, maintenu dans une appartenance dont il apprendra à apprécier les délices ambiguës, il fait de temps en temps mine de vouloir s’échapper mais il sait bien que rester est tellement plus confortable… Alors ses ruptures ne seront pas durables (ou la rupture affirmée avec une entité donnée sera immédiatement suivie d’une forte appartenance à l’entité suivante – ça change mais c’est toujours la même chose). Certes il apprendra à se donner les apparences de l’indépendance (notamment sous la forme affaiblie de la critique), mais c’est en fait sur le lien qu’il construira son univers. Là où les Américains tranchent, séparent, divisent et subdivisent, et se construisent une personnalité fortement individuée qui n’a aucun problème à se vivre comme distincte de celle d’autrui7, le Français se définira par ses appartenances (notamment naissance, diplôme, groupe social), ou, pour faire bonne mesure, par l’autre face de la même pièce que sont ses non-appartenances (souvent sous forme de ruptures-trophées). On voit là les bases d’une société clanique : forte appartenance à son groupe, et forte distance avec les groupes que l’on définit comme concurrents. L’enfant français acquiert des couches de complexité qui sont hors de portée pour des cultures plus simples (ou en tous cas moins compliquées) que la nôtre, comme la culture américaine. Baigné dans l’appartenance, et maintenu dans celle-ci au-delà du raisonnable car y échapper durablement lui est interdit, l’enfant français développe un vocabulaire du lien : là où les concepts qui s’élaborent chez le jeune Américain sont de l’ordre de la chaîne action – résultat, avec une élimination systématique de tout ce qui distrait de cette relation univoque, l’univers conceptuel du Français se compose d’une profusion de liens et de boucles de sens, mais n’inclut pas le résultat, trop dangereux car faisant partie du monde du Réel – en fait, cette riche élaboration conceptuelle permet

7 Mais, corrélativement, beaucoup de difficulté à vivre dans l’appartenance et le lien – ce qui est leur problème et n’ôte rien à ma démonstration.

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d’éviter le Réel. Dans l’éducation, la critique constante des erreurs et fautes permet de développer l’aversion du résultat. Et le fait que quelque chose marche est secondaire, presque vulgaire (comme la Technologie par rapport à la Physique, et la Physique par rapport aux Mathématiques)8. En revanche, la concordance avec les Grands Principes, fussent-ils tirés d’un chapeau pour l’occasion, ça compte. En bref, la sortie de la relation Mère – Enfant n’est pas permise sous la forme d’une entrée dans la réalité, mais seulement par une fuite vers le royaume des Idées. L’implicite Être explicite c’est nommer les choses. Nommer, c’est séparer : mettre au premier plan ce qui est nommé en le tranchant de l’arrière-plan formé par tout ce qui n’est pas nommé. Rester dans l’implicite, c’est refuser de choisir ce que l’on va nommer – ou en être empêché, ne pas en être capable, ou accepter l’Omertà. À l’appartenance maternelle correspond le sous-entendu, l’allusion, la connivence, toutes ces façons de rester bien au chaud en continuant d’obéir à l’obligation de ne faire qu’un avec la Mère. On reste ici dans l’Être, ce qui alimente l’espoir ou l’illusion de ne pas avoir à passer au stade du Faire. La mère française met au monde, mais pas complètement : elle retient sa progéniture avec des élastiques. Il ne faut pas que ses chers petits s’approchent trop du soleil, ils risqueraient de s’y brûler. Dans la culture française, implicite, l’acquisition du langage s’organise autour d’une double contrainte constitutionnelle de notre identité culturelle : apprends les mots qui permettent de distinguer ce qui est nommé de ce qui ne l’est pas, mais reste dans la fusion maternelle et, ce faisant, ne te sépare pas toi-même. Le Père Dans la culture française, le Père est soit absent soit tyrannique. Il est évincé par une collusion de la mère et de l’enfant, et il se satisfait de sa déréliction, sauf lorsque, par foucades, il revient en force en effrayant sa marmaille, qui s’éparpille alors aux quatre vents. Ainsi la justice hésite entre insignifiance et dureté extrême, le supérieur hiérarchique bascule entre laisser-faire et verticalité féodale, le professionnel oscille entre amateurisme et honneur du métier. Le père fouettard se voit affublé des habits de l’ogre qui mangerait ses enfants, “tu vas avoir affaire à ton père quand il va rentrer”. Ainsi le crime est parfait : le “parle à ton père, ma tête est malade” fait écho à : “tu me fatigues”, ce “tu me tues” qui ne veut pas dire son nom. La locution interjective : “Mais qu’est ce que j’ai bien pu

8 Les métiers manuels – et leurs clients – en font les frais.

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faire au Bon Dieu pour avoir un enfant pareil !” déplace la responsabilité sur l’innocent, qui du coup ne l’est plus tout à fait. On voit que dans toute la Sainte Famille, les rôles sont déplacés d’un personnage à l’autre : la mère est clivée, l’enfant ne sait plus à quel Saint se vouer, et avec ça, le Père serait tout puissant ! Repères Dans le grand bazar des identités dévoyées, il ne nous étonnera pas que les repères ne soient pas à leur place. La confusion soigneusement entretenue sur le “qui est qui” entraîne une distorsion du “qui fait quoi” et surtout du “qui est responsable de quoi”. Cela permet à chacun de faire semblant, et à personne de n’être comptable de ses actions. L’imposture originelle, c’est le parricide symbolique du meurtre du Roi et la Révolution ratée qui s’ensuivit, dont la République se targue cependant, continuant d’inscrire à ses frontispices une devise nationale qui dit trois choses et en signifie trois autres. Je ne suis pas celle que vous croyez. Comment assume t-on un parricide? La réalité En France, avoir les pieds sur terre, c’est vulgaire. Ces messieurs poudrés dont parlait Voltaire ne vont pas se laisser compromettre par un travail réel (de tripalium, la torture) : ils passeraient alors de l’Être au Faire ! L’illusion tient lieu de réalité. La projection des ombres sur les parois de la caverne de Platon permet de se contenter de l’idée de la chaise sans avoir à se coltiner la rugosité de l’objet lui-même. Il ne faut surtout pas mettre la main à la pâte. Tout le monde fait semblant, nos énarques comme nos journalistes, tous sauf les vulgaires mortels, les manants et quelques naïfs. Dans un tel contexte, dénoncer la mystification, c’est prendre un risque. On ne touche pas impunément à un tabou. Accountability Les anglo-saxons ont un terme qui n’a pas d’équivalent exact en français, celui d’accountability. On a rendu être “accountable” par “être comptable de ses actions”. C’est plus que cela. Être “accountable” c’est assumer la possibilité d’une mort symbolique en cas d’échec. Le terme n’existe pas directement en français car la culture française s’est organisée autour de l’évitement de l’accountability. A moins que, par un raidissement typique, elle impose une trop grande accountability en basculant sur un mode tyrannique (notamment dans le juridisme), dont l’excès indique bien qu’il s’agit là d’une réaction de compensation, ce qui fait que le droit français est une imposture. Responsable mais pas coupable, c’est la faute à Voltaire, circulez, il n’y a rien à voir.

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Liberté chérie ? En jouant avec les repères pour ne pas être accountable, on croit gagner en liberté. En fait on est alors pareil à ce personnage de James Joyce qui se réjouissait que ses poursuivants qui lui tiraient dessus le râtassent, alors qu’en fait, ils s’amusaient à ne point l’atteindre. Liberté factice de ne pas respecter les repères, entraînant une interversion bien réelle des rôles, pour n’en être que mieux enchaîné à la mère dans la caverne. La pleutrerie clanique amènera à se réfugier au sein de la meute. Et l’on déguisera en intérêt général le corporatisme le plus effréné, on habillera du statut de fonctionnaire l’irresponsabilité la plus éhontée, on appellera “Égalité” la mise en échec d’autrui pour éviter qu’il vous dépasse, on fera entonner par le syndicat la défense d’un soi-disant service public qui est plus à son propre service qu’au service du public, on appellera déontologie la protection des intérêts de caste (notamment de celle des juristes de tous poils), on laissera la justice dysfonctionner gravement, les statisticiens dire des mensonges, et la classe politique faire semblant de diriger le pays. En résultante, chacun y perd car cette non clarté si rassurante s’appuie en fait sur une aliénation de tous les acteurs, complices d’un système pervers. Chacun est compromis, “je te tiens, tu me tiens, par la barbichette…”. Alors, tant qu’à faire, autant jeter l’éthique aux orties. Chacun bénéficiera d’avantages indus, fera ses petites compromissions mesquines, obtiendra des faveurs et des passe-droits, et désignera les boucs émissaires naturels pour s’exonérer de ses responsabilités dans le grand échec collectif dont tout le monde peut se plaindre mais dont en réalité personne n’a suffisamment cure pour passer à l’action : “après moi le déluge”. La dépression Plus notre peuple se réfugie dans le faire semblant, plus il déprime. Car il sait bien que ce qu’il fuit par son déni systématique de la réalité (voir ce qu’on a affublé du terme péjoratif de “déclinisme”) est toujours là. Le message maternel : “tu ne peux pas réussir sans moi” installe la dépression, en ce qu’il conduit l’enfant à tourner contre lui, pour s’auto-limiter, une énergie qu’il était prêt à investir dans le monde. On arrive ainsi au paradoxe d’une nation incroyablement riche d’énergies à la base, mais collectivement atone, sauf lorsque ces énergies se déchaînent lors de revendications d’insoumission simultanées. Vues de la Capitale (caput), les Provinces, ou vu de la Tête, le corps social, sont tout à la fois rejetés car perçus comme extérieurs (tout comme la réalité dans le schéma enfant décrit plus haut) et absorbés, inféodés, dans l’appartenance maternelle fondatrice. La nature implicite de notre culture interdit de mettre des mots sur le mal-être dû à ce trop d’appartenance, et on laissera aux pilules le soin de propulser notre pays au premier rang de la consommation mondiale d’anxiolytiques et d’anti-dépresseurs.

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Ça va péter La tentative constante depuis au moins trois décennies des Politiques de tout poil de montrer que ça ne va pas si mal, que l’économie va repartir, que la situation de l’emploi va s’améliorer, etc., recouvre leur grande peur que ça pète si l’on n’essaye pas de remonter le moral de nos concitoyens. Tout comme une mère qui, en disant à ses chers petits que ça ne va pas si mal que ça, renforce leur dépression sous couvert de la guérir du coup, ils ne risquent pas de se rebeller. Au contraire, ça va péter parce que l’énergie que recouvre la couche dépressive s’investira en un projet destructeur, dans l’une de ces nombreuses ruptures à la française, lorsque les élites qui nous gouvernent serviront de bouc émissaire à un peuple qui en aura ras le bol d’avoir été infantilisé, et aussi de s’être infantilisé lui-même (mais sans vouloir l’admettre).

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CHAPITRE III

LA SCHIZOPHRENIE CULTURELLE “C’est schizophrénique !” Vérifiez dans votre journal quotidien ou dans votre débat télévisuel préféré : le qualificatif de “schizophrénique” est beaucoup utilisé à leur propos par les Français eux-mêmes. De façon apparemment métaphorique, certes, mais quand même. Cette expression sert à décrire un clivage – on dit une chose et on en fait une autre ; ou bien, la proverbiale main droite ne sait pas ce que fait la main gauche. Le terme est utilisé à toutes les sauces. Aussi ce mot trop entendu s’use, il devient banal, avant même d’avoir été compris. Or, il s’agit-là d’un mot très fort, “schizophrénie”. Pourquoi utiliser un mot aussi compliqué s’il ne s’agit que de décrire une contradiction simple ? Alors, avant qu’il ne soit complètement affadi et qu’on oublie pourquoi on avait commencé à l’utiliser, lui, et non pas n’importe quel autre, nous allons nous attarder un peu dessus (et dessous) et lui prêter l’attention que mérite sa fréquence. Ce faisant, nous découvrirons à quel point l’emploi de ce mot n’est pas le fruit du hasard, et en quoi il est en fait extrêmement révélateur de la mentalité nationale. [Chapitre en cours de rédaction.]

CHAPITRE IV SORTIR DE LA SCHIZOPHRÉNIE CULTURELLE

[Chapitre en cours de rédaction.]

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ANNEXE

ÉVOLUTIONS ACTUELLES Les banlieues dites “sensibles” Dans les familles schizophréniques, c’est l’enfant dit le plus “sensible” (en fait, le plus perceptif de la fausseté ambiante) qui pète les plombs le premier. Acceptant son statut de malade désigné, de “fou”, il permet aux autres membres de la famille de se croire sains. De la même manière, les “banlieues sensibles” ont pété en premier, et le reste du “corps social” a pu se croire en bonne santé (et à l’abri). Il faut savoir que, dans une telle famille, lorsque le “patient” en question va mieux, si la structure sous-jacente n’a pas évolué, immanquablement un autre membre de la famille prend le rôle de patient désigné – pas toujours avec la même pathologie, d’ailleurs. En France, après que les jeunes des banlieues soient rentrés chez eux, ce sont les étudiants qui se sont mis à exploser, en apparence sur la question du CPE. Si je ne me trompe pas sur le mécanisme en jeu dans ces “explosions sociales”9, les classes moyennes sont les suivantes dans la queue, et le pire est à redouter autour de l’inévitable déception qui suivra, en octobre 2007 ou en mai 2008, les prochaines élections présidentielles, lorsqu’il apparaîtra clairement que le pays n’a plus assez de ressources pour que soient satisfaites simultanément les multiples revendications catégorielles concurrentes. Ou bien les repères auront été mis en place par le vainqueur (et la gravité de la situation réelle du pays aura été exposée), et un projet de redressement crédible aura été proposé, qui fasse appel à l’énorme potentiel affectif de notre peuple, ou bien ça pètera. Pour que la transition se fasse de l’état dépressif endémique à l’investissement collectif dans un projet positif, il faudra passer par un certain nombre de phases. Un tournant évidemment délicat sera la conversion d’une immense colère en énergie créatrice. C’est alors – et alors seulement – que parler de VIème République pourra prendre sens ; c’est trop tôt maintenant, tant qu’un examen critique sincère de nos faiblesses, de nos erreurs et de nos fautes n’est pas envisageable et que gauche et droite se servent respectivement de bouc émissaire. Rebondir

9 Terme à distinguer des “mouvements sociaux”, expression que l’on emploie lorsque tout s’arrête…

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Pour sortir du marasme actuel, il faudra toucher le fond en admettant, individuellement et collectivement, que ça ne peut plus durer. Alors, l’extraordinaire énergie dont les Français sont capables pour venir au secours de la Mère(-Patrie) en danger pourra se libérer dans un grand élan commun, comme on l’a vu à la Libération et de multiples autres fois dans notre histoire. La France a déjà largement démontré qu’elle est le pays de la planète le plus capable de sortir des ornières qu’elle s’est elle-même creusées. Il faudra alors proposer un projet positif : quand un patient dépressif touche le fond, il y a un moment juste pour rebondir. Se voir proposer un projet quand on est en plein marasme ne sert à rien (et celui qui le propose à contre-temps est en fait en collusion avec le “malade”, tel l’entourage apparemment bien intentionné d’un alcoolique, ou que l’assistante sociale et “ses” pauvres). Je m’attends à ces questions de journalistes “Alors, que proposez-vous de constructif ?” – bien que légitimes en apparence, elles sont factices et destinées en fait à éviter de toucher le fond. Y répondre à contre-temps ne pourrait qu’entraîner des échos en “oui mais…”, montrant que toute solution proposée est irréaliste, et qu’on est condamné à rester dans la fange. Un homme providentiel Pour se sortir de situations désespérées, la France a souvent fait appel à un homme providentiel – ou a laissé un homme providentiel saisir les rênes dans une situation chaotique (mais, à part Jeanne d’Arc, pas encore une femme providentielle ; à l’évidence, les temps sont mûrs pour que cela devienne envisageable10). Bien sûr, la vocation d’un tel homme providentiel est de finir crucifié, et les exemples abondent, Napoléon, Pétain et de Gaulle en étant les plus récents. La fonction d’une telle personne sera de clarifier les repères et de proposer un projet fédérateur. Si les repères restent flous, on sera dans la confusion, et si le projet n’est pas assez motivant, dans l’apathie. Une alternative serait une émergence, à partir de la base, dans ce pays où tant de choses de grande valeur se font sur le terrain, mais je crains que les besoins de dépendance maternelle non résolus soient tels en France que cette hypothèse soit irréaliste pour longtemps encore.

10 Voir Français et Américains, l’autre rive, op. cit., première édition, p. 174 : “Il est possible qu’une sortie du collapsus politique français actuel vienne soit des femmes (des vraies, pas des dragons ni des materneuses envahissantes), soit d’un passage par un homme fort (avec tous les risques du genre…) – ou une femme forte”. Ce passage fut mis en ligne en 2000, bien avant l’entrée en scène de Ségolène Royal.