Upload
raoul-faucher
View
108
Download
1
Embed Size (px)
Citation preview
Marchés financiers - S. Edouard
Chapitre 6Les crises financières
1. Schéma général d’enchaînement d’une crise financière
2. Historique des crises financières 3. Etude de cas: la crise des subprime
mortgages
Marchés financiers - S. Edouard
Partie 1Schéma générald’enchaînement des crises
Marchés financiers - S. Edouard
1. Le contexte: les 3 D de la globalisation financière
• La désintermédiation : finance directe plutôt qu’indirecte• Le décloisonnement : tous le monde peut intervenir sur tous les
compartiments de marché disparition des distinctions banque commerciale / banque d’affaires, banque / assurance concurrence accrue, baisse des marges et quête de nouveaux clients
• La déréglementation : liberté de circulation de capitaux (financiarisation de la BdP)
• Construction d’un marché unique de l’argent au niveau planétaire (intégration de nouveaux pays aux flux des mouvements des capitaux, marchés des eurodollars, marchés des dérivés de crédit, …)
Marchés financiers - S. Edouard
• Besoin de financer les déficits publics des pays développés hausse des taux d’intérêt
• Déréglementation des marchés financiers– Suppression de la réglementation Q en 1986– Renforcement de la concurrence bancaire (loi bancaire de 1984
en France et création de la « banque universelle »)– Suppression du contrôle des changes et création du marché
unique des capitaux en Europe– Libéralisation du secteur du courtage
• Domination de la finance directe (# finance intermédiée ou indirecte)
Contenu de la déréglementation financière
Marchés financiers - S. Edouard
De nouveaux marchés financiers
• Harmonisation des compartiments de marché– Financement à LT : marché actions et marché obligataire– Financement à CT : marché monétaire (interbancaire)
• Création des marchés dérivés couverture des risques financiers :– Risque de change (effondrement de Bretton Woods)– Risque de taux d’intérêt (politiques monétaires actives)– Risque de fluctuation des cours des actifs (actions, obligations,
matières premières)
• Développement des marchés de gré-à-gré (marché interbancaire, marchés des changes, etc.) opacité
Marchés financiers - S. Edouard
De nouveaux produits
• Actions : privatisations, actions traçantes, etc.
• Obligations : obligations indexées, à taux variable, etc.
• Titres hybriques : obligations convertibles, remboursables en actions (quasi fonds propres), etc.
• Titres exotiques
• Titres de créances négociables : bons du Trésor, certificats de dépôt, billets de trésorerie , etc.
• Produits dérivés : contrats à terme ferme, swaps, options, warrants, certificats et bons de souscription d’action
• Titrisation des créances (immobilières) : MBS (Mortgage Backed Securities), CDO (Collateralised Debt Obligations)
Marchés financiers - S. Edouard
De nouveaux acteurs
• Acteurs publics : les paradis fiscaux et bancaires (centres offshores) Développement de la criminalité financière (blanchiment de
l’argent sale 2 à 5% du PIB mondial, financement du terrorisme, fraudes fiscales, détournement de fonds, corruption)
Source d’innovations financières Fragilisation du système financier international (volatilité des
mouvements de capitaux et absence de règle prudentielle, pas de gestion des risques)
• Les fonds d’investissement– Fonds de pension anglosaxons (logique d’investissement à très
long terme)– Hedge Funds ou fonds spéculatifs (logique d ’investissement à
très court terme)– Fonds de private equity (LBO Leverage Buy Out - Logique
d’investissement à moyen terme)
Marchés financiers - S. Edouard
2. Le risque de système
• Le risque de système = danger d’existence d’un effet de dominos dès lors qu’une crise financière apparaît sur un compartiment de marché en une région du monde développé ou émergent du fait de l’accumulation des risques par les agents financiers risque de contagion
• La crise financière = concrétisation d’un risque de système où un accident financier localisé (crise de change, krach boursier, obligataire ou immobilier) se propage à une partie ou à l’ensemble du système financier international
Marchés financiers - S. Edouard
Etendue des crises financières passées
Ensemble des pays d’Amérique latineCrise de la dette souveraine mexicaine
Crise des PVD de 1982
PropagationOrigine de la criseEvénement historique
Bourse américaine
Marché des changes
Marché des changes
Sphère immobilière
Compartiment obligataire américain
Bourse américaine
Bourse américaine
Propagation à l’ensemble des marchés boursiers et sphères réelles des pays développés
e-krach d’avril 2000
Propagation à l’ensemble des pays émergents et en transition à toutes les sphères (Asie, Amérique latine, Russie)
Crise de change thaïlandaise d’avril 1997
Propagation aux autres pays émergents d’Amérique latine (effet tequila) : Brésil, Argentine
Crise de change du Mexique en 1994
Sphères financière et économique au JaponCrise bancaire du Japon de 1990
Compartiment obligataire US et européenKrach obligataire de 1994
Bourses européennes et japonaisesKrach boursier de 1987 aux USA
Sphères économiques et financières, monde développé
Krach boursier américain de 1929
Marchés financiers - S. Edouard
Le rôle des innovations
• Innovations financières : nouveaux instruments financiers (produits dérivés, titres hybrides, produits exotiques, etc.), nouveaux modèles d’évaluation des risques (VaR – Value at Risk et faillite de LTCM), stock-options, comptabilité créative avec Enron, …)
• Innovations réglementaires : abolition des contrôles sur les taux d’intérêt, abandon de l’encadrement du crédit, développement de la finance directe (loi ERISA aux E-U sur les retraites par capitalisation), levée du contrôle des changes, liberté d’établissement d’IF étrangères
• Innovations réelles : généralisation de routines d’achat/vente incorporées dans des logiciels (krach de 1987), TIC (courtiers en ligne), nouveaux secteurs industriels (entreprises Internet) pour lesquels nous ne disposons d’aucune méthode d’évaluation
• Constante historique : la plupart des crises financières font suite à une vague d’innovations financières, réglementaires ou techniques majeures via l’apparition de nouveaux comportements plus risqués et l’absence de régulation adaptée accumulation de risques, crises, apprentissage et stabilisation du système via de nouvelles réglementations
Marchés financiers - S. Edouard
Le rôle des symétries d’information dans la relation prêteur – emprunteur
• Relation principal (recherche d’une information) – agent (détenteur d’une information privative)
• Sélection adverse (information cachée) : incapacité des prêteurs (banques) à sélectionner de « bons » emprunteurs faute d’une information complète
– En période de prospérité, hausse des taux d’intérêt (sélection des projets les plus risqués) aveuglement au désastre
– En période de crise, rationnement du crédit credit crunch
• Aléa de moralité (action cachée) : aucune garantie pour le prêteur de l’utilisation des fonds par l’emprunteur (spéculation, projet risqué, etc.)
• L’hésitation essentielle du prêteur en dernier ressort (banques centrales) entre sauver le système financier de la faillite (injection de liquidités) et financer les spéculateurs (les preneurs de risques non mesurés qui se sentent protégés par les banques centrales)
Marchés financiers - S. Edouard
Le rôle du mimétisme• Rôle du mimétisme mis en avant par la finance comportementale (Robert
Shiller)
• Phase d’euphorie avant la crise : émergence d’une « évaluation conventionnelle optimiste » au sein des opérateurs (cours > fondamentaux) tout le monde veut profiter de la hausse et sous-estime le risque de perte
• Phase de crise : effondrement des repères d’évaluation, contagion du pessimisme
– Fundamentals-based contagion : contagion à toutes les classes d’actifs ayant le même profil rendement - risque (pays émergents, marchés actions, compartiments obligataires)
• Une cause unique (hausse des taux d’intérêt américains pour la crise de la dette souveraine mexicaine d’août 1982 ; dépréciation du dollar par rapport au yen pour la crise asiatique de 1997)
• Intégrations commerciales, économiques et financières : crise du SME de 1992 et 1993 (contagion de « débordement » ou « spill-over »)
– Shift contagion = contagion du stress et de la panique financière, comportements moutonniers
Marchés financiers - S. Edouard
3. Découpage temporel
• Phase d’euphorie : boom du crédit = période de crédit facile encouragée par une conjoncture économique favorable
– Baisse de la prime de risque (les prêteurs ne discriminent plus entre les bons et les mauvais emprunteurs)
– Croissance du crédit explosive (afflux de capitaux étrangers)
– Envolée spéculative du prix de certains actifs (boursiers, immobiliers)
• Phase d’effondrement : retournement brutal des anticipations des prêteurs et des emprunteurs sur un marché des actifs (crise de change, krach boursier, crise immobilière)
• Phase de propagation : fragilisation du système bancaire et transmission de la crise aux autres marchés
– Contagion fondée sur les fondamentaux (intégration commerciale et économique)
– Contagion fondée sur le stress et la panique (rationalité des prêteurs)
Marchés financiers - S. Edouard
Crise de valorisation des actifs financiers : krach boursier (actions, obligations), crise de change, krach immobilier = dévalorisation brutale de la valeur des actifs financiers détenus par les agents économiques
• Crise de liquidité : les agents économiques qui ont empruntés pour acquérir des actifs financiers ne peuvent plus faire face aux échéances de leur service de la dette
• Crise de crédit : les banques se retrouvent avec des créances douteuses (défaillance de leurs débiteurs) crise de confiance du fait d’un risque de banqueroute panique bancaire (retraits massifs des déposants) faillites bancaires
Récession économique (faillites d’entreprise) résultat d’un credit crunch
Marchés financiers - S. Edouard
Une tendance à la réduction de la prime de risque dans les années qui précèdent la crise
Marchés financiers - S. Edouard
Une forte croissance de l’endettement avant la crise
Marchés financiers - S. Edouard
4. Les banques, maillons faibles des crises financières
Le comportement procyclique des banques
• Les banques participent au développement des périodes d’euphorie, via le boom du crédit bancaire qui finance des prises de position spéculatives sur les marchés financiers ou immobilier : plus les acteurs privés voient leur richesse s’accroître du fait de la bulle spéculative, plus ils empruntent auprès des banques pour financer des positions de plus en plus risquées (aveuglement au désastre)
• Les banques accentuent la période de déprime via le credit crunch et les faillites bancaires
Marchés financiers - S. Edouard
Les banques caisses de résonance des crises financières
• Activité de transformation : financer des investissements longs par des ressources courtes (les dépôts liquides)
• Crise par le passif : crainte d’illiquidité de certains déposants de leur banque panique bancaire, même si la solvabilité n’est pas remise en cause
• Crise d’actif : un choc négatif (krach boursier) affecte la rentabilité ou la chronique des remboursements pour les prêts déjà consentis (irréversibilité des engagements) insolvabilité (créances douteuses)
ACTIF PASSIF
Irréversibilité de l’engagement des actifs (prêts à long terme)
Dépôts liquides, susceptibles d’être retirés à chaque instant
Marchés financiers - S. Edouard
Typologie des crises bancaires
• Une défaillance ponctuelle s’étend à l’ensemble du système bancaire et à l’économie Sources : mauvaise appréciation des risques dans un nouveau secteur,
malversation et pratiques délictueuses dans un contexte de défaillance des contrôles
Canaux de propagation : défaillance chez tous les déposants, engagements réciproques des institutions financières
Exemples : Savings and loans (1985), Crédit Lyonnais
• La crise bancaire, conséquence du cycle financier Sources : prise de risque dans les périodes favorables qui se révèle
lors du retournement endogène du couple crédit / prix des actifs Canaux de propagation : toutes les banques sont frappées
simultanément credit crunch Exemples : bulle japonaise 1980
Marchés financiers - S. Edouard
La crise bancaire comme conséquence du cycle financier (source : Boyer, Dehove, Plihon, 2004)
Optimisme
•Convention d’évaluation•Levier d’endettement•Goût pour le risque
Excèsd’endettement
Probabilitéde défaut
Réévaluationde la prisede risqueRenversement
endogène
Réévaluationde la
fragilité financière
Retourde la
confiance
Zone d
e f
ragili
té
Marchés financiers - S. Edouard
• Un choc macro-économique sans précédent à l’origine de la crise bancaire Sources : changement brutal de la politique économique (relèvement
des taux d’intérêt), choix d’un régime économique inadapté (change fixe, libéralisation du compte de capital)
Canaux de transmission : relèvement de la contrainte d’accès au crédit effondrement de la demande de biens immobiliers, de capital productif, de valeurs mobilières
Exemples : Crise du SME 1993, crises latino-américaines 1982, crises asiatiques 1997, Crise argentine 2000, réhaussement des taux d’intérêt de la FED en 2005
Les crises financières, par Robert Boyer, Mario Dehove et Dominique Plihon, CAE, La documentation française, 2004
Marchés financiers - S. Edouard
Partie 2Historique des crises financières
Marchés financiers - S. Edouard
Accroissement du nombre de crises boursières (fréquence)Accroissement de leur durée la période actuelle ressemble à la période des années 1930
1. Les crises sur les marchés actions
Marchés financiers - S. Edouard
Le krach boursier d’octobre 1987
• Le 19 octobre, le Dow Jones s’effondre de 22,6%. Les ventes de plus de 600 millions de titres provoquent leur illiquidité
• Origine : la bulle spéculative commencée au début des années 1980 fut alimentée par l’endettement massif des entreprises pour leurs prises de position sur les marchés au comptant et les marchés de produits dérivés (contrats à terme sur indices boursiers) rôle des innovations financières et réglementaires dans l’apparition de comportements à risque (comportement spéculatif des entreprises et comportement procyclique des banques)
• Non propagation de la crise boursière grâce à l’intervention immédiate et massive des banques centrales pour refinancer les banques et assurer les crédits à destination de l’économie fonction de prêteur en dernier ressort
Marchés financiers - S. Edouard
Le e-krach de mars 2000
• -42,5% sur 26 mois pour la bourse américaine et – 57% sur 36 mois pour la bourse de Paris crise boursière atypique : lente et continue (faibles variations journalières : le 19/07/02, -4,6%)
• Causes de la phase d’euphorie : innovations technologiques (sociétés Internet) qui conduisent à perte de repère en matière d’évaluation ; vague de mégas fusions
• Retournement : annonces de pertes plus sévères qu’attendues. On se rend brutalement compte que les sociétés de la Net-Economie ont été surévaluées (PER – price earning ratio – 28 contre 15 comme niveau d’équilibre)
• Causes d’une période d’ajustement exceptionnellement longue
– Assainissement des bilans des entreprises devant faire face à un gonflement de l’endettement lié aux opérations de fusion acquisition sur payées
– Scandales comptables en cascades (Enron aux USA, Ahold en Europe)
Marchés financiers - S. Edouard
• Crise des titres de créances négociables en 1969 aux Etats-Unis• Effondrement du marché des obligations de pacotille en 1989 (junk
bonds)• Crise du papier commercial en Suède en 1990 à la suite du
retournement du marché immobilier• Assèchement du marché des obligations en écus en 1992• Crise obligataire de février – mai 1994 aux Etats-Unis• Crise des créances immobilières aux Etats-Unis - août 2007
2. Crise sur les marchés de la dette
Marchés financiers - S. Edouard
La crise obligataire de 1994
Taux d’intérêt %
Échéance
Courbe des tauxaméricains en 1993
Moyenne historique
Taux d’intérêt %
Échéance
Courbe des tauxaméricains en 1993
Moyenne historique
2. Remontée des taux directeurs de laFED en février 1994 => la spéculationest découragée et panique face àl’aplatissement de la courbe des taux
1. Les obligations sont plus attractives(rendement plus élevé) => financéespar des emprunts à court terme
Taux d’intérêt %
Échéance
Courbe des tauxaméricains en 1993
Moyenne historique
3. Vente des obligations et hausse des tauxlongs (quand les cours baissent, les tauxmontent = effet balancier)
Marchés financiers - S. Edouard
3. Les crises bancaires : la crise japonaise des années 1990
Enchaînement de la crise
• Bulles boursière et immobilière vont de pair, alimentées par le crédit facile, les banques étant elles-mêmes les principaux spéculateurs (risques non couverts # banques US)
• Retournement du prix des actifs à l’automne 1989 : -60% du Nikkei en 3 ans énormes pertes latentes pour les banques, dissimulées dans un premier temps par une comptabilité de provisions
• 1995 : tremblement de terre de Kobé fait chuté à nouveau la bourse• Insolvabilité des banques crise de confiance des déposants (retraits des
comptes bancaires au profit des comptes postaux) effondrement des crédits bancaires récession économique
Marchés financiers - S. Edouard
Marchés financiers - S. Edouard
Une gestion à retardement de la crise
• 1992 – 1997 : succession de plans de dépenses publiques pour soutenir la conjoncture (relance keynésienne classique ; taux de l’endettement publique = 160%). Arrêt en 1997 qui plonge le Japon dans la déflation
• Relais de la politique monétaire de la Banque du Japon du taux zéro progressif pour assurer le refinancement des banques commerciales
• Restructuration du système bancaire à partir de 1998 via un mouvement de concentration et nationalisation de banques
Marchés financiers - S. Edouard
Partie 3La crise des subprime mortgages