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Mémoire Michel Lajoye Édité et mis en ligne par: L'Église Mondiale du Créateur P.O. Box 2002 USA – East Peoria, IL 61611 http://www.creator.org http://www.wcotc.com/france

Michel Lajoye - Mémoire

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Mémoire

Michel Lajoye

Édité et mis en ligne par:

L'Église Mondiale du CréateurP.O. Box 2002USA – East Peoria, IL 61611http://www.creator.orghttp://www.wcotc.com/france

Page 2: Michel Lajoye - Mémoire

Huitième Édition, avril 2001

Avant-propos (en guise d'introduction)

ous tenez entre vos mains un"mémoire" qui n'en est pas àsa première édition: cette

présente est la huitième!La toute première rédaction de ce

document a été achevée il y a 3 ans,en décembre 1997. Date symbolique,puisque cela faisait alors 10 ans quej'étais incarcéré pour une affairecriminelle qui apparaissait déjà comme"pas claire".

Aujourd'hui, en avril 2001, je suisentré dans ma quatorzième année dedétention et je vous propose de lire cemémoire qui vous relate unemanipulation d'État dont, vous aussi,vous avez été victime, puisqu'elle étaitdestinée à influencer votre opinion,votre choix, votre conditionnementélectoral...

Ne pensez pas que j'exagère, carce document vous apprendra que leterrorisme d'État existe, que le Pouvoirn'hésite pas à y recourir, que cela soitpour éliminer des opposants, ou pourservir la propagande d'État. Car qui ya-t-il de mieux qu'un bon attentat,intervenant au bon moment, poursouder une opinion publique derrièreune politique gouvernementale?

En France, dams les années 80,il a été commis divers attentats quel'on a qualifiés d'extrême-droite. Desactions qui ont toujours été perpétréesau "bon moment" pour servir lapropagande gouvernementale contrece qui était à l'époque le FrontNational.

Ce document contient le récitd'une de ces campagnes. Uneopération qui s'est soldée, entreautres, par ma condamnation à laréclusion criminelle à perpétuitéassortie d'une peine incompressible de18 ans, pour la pose d'une bombe, quin'a peut-être pas explosé, et qui, entout cas , n'a causé ni dégât, ni blesséet, bien entendu: aucun mort.Condamnation prononcée à l'issue d'unprocès (si l'on peut appeler celacomme ça...) qui s'est tenu à Caen enjuin l99O, c'est-à-dire entre laprofanation de Carpentras (commise,elle aussi, fort à propos...) etl'adoption/promulgation de la loi qui

porte le nom du stalinien Gayssot etqui contraint les goyim à être desdisciples de la Très Sainte ReligionHolocaustique…

Dans mon récit, je me suisefforcé de décomposer chaque pan decette/mon affaire en commençant parle début: ma rencontre avec undénommé Christophe Arcini qui fut moncoaccusé lors du procès de Caen. Lelecteur découvrira que cet individu,fonctionnaire du Ministère del'intérieur, était un agent chargéd'infiltrer les milieux d'extrême-droiteafin de leur faire commettre desattentats.

Le lecteur découvrira aussicomment la Police Judiciaire etl'lnstitution Judiciaire ont exécuté lesordres du Pouvoir politique et ontrelâché (provisoirement...) cet Arciniqu'ils avaient auparavant interpellé!Ceci pour qu'il puisse continuer à jouerson rôle d'agent-provocateur et mefasse commettre un attentat à labombe.

Lire ce document, ce sera aussientrer dans les coulisses des serviceset des polices politiques . Que ce soitla civile avec les RenseignementsGénéraux, mais aussi de la militaireavec la Direction de la Protection, dela Sécurité et de la Défense (l'ex-Sécurité Militaire).

Cette DPSD, dont il serabeaucoup question dans ce récit, estinconnue du grand public. Pour cedernier, la police politique, en France,se limite aux civils des RG et à ceuxde la Direction de la Surveillance duTerritoire.

Pourtant, les chiffres budgétairespour 1999/2000 sont sans équivoque(cf. l'organigramme paru dansLibération du 26 novembre 1999): laDPSD a officiellement 1620permanents. Et nous en sommesarrivés à 2800 "civils" plus 2200militaires pour la Direction Généraledes Services Extérieurs. Sans omettreles 1709 fonctionnaires de la Directiondu Renseignement Militaire.

À l'opposé, la police politiquecivile compte officiellement, avec lesRG, 3200 fonctionnaires. Et la DST,

quant à elle, est la moins bien lotieavec seulement l5OO agents.Pourtant, la DST est très connue,vous en aviez déjà entendu parler. Cequi n'était pas le cas de la DPSD et deses 1620 barbouzes!

Additionnons la DGSE, la DRM etla DPSD et cela constitue, au senslarge, une police politique militaire de4100 + 1709 + 1620 = 7429 agents! Untotal bien supérieur aux RG (3200) et àla DST (1500) réunis qui, eux,n'alignent donc que 4700 agents, soit2729 de moins que la police politiquemilitaire! Et aux effectifs de cettedernière, il ne faut pas oublier d'yajouter les 95 000 gendarmes qui sontdes militaires et qui ne se font pasprier pour faire, dès que la DPSD leleur ordonne, du renseignement sur telou tel citoyen!

Ces chiffres vous étonnent, maisils parlent d'eux-mêmes: en France lapolice politique est plus militaire quecivile.

Lisez ce mémoire, cela vous enapprendra encore plus sur les activitésde cette police politique militaire,omniprésente, mais dont vous n'aviezjamais entendu parler avant et dontvous ne soupçonniez même pasl'existence, alors que c'est vous,contr ibuable, qui la financez.

Certains lecteurs ne manquerontpas de s'étonner que ce mémoire soitimprimé sur des feuilles A4, et non "enlivre". Cela tient au contenu même dece récit, et aux chiffres détaillés plushaut. Quel est l'éditeur grand publicqui oserait braver ces assassinsst ipendiés par l'État? Alors ce quevous avez entre les mains ne pouvaitêtre qu'un samizdat , car aujourd'hui, àcause des polices politiques, undiss ident ne peut pas plus se faireéditer en France qu'il ne le pouvait enURSS du temps de la "splendeur" duKGB.

Le lecteur dispose, au recto decette présentation, d'un « Sommaire »pour faciliter ses éventuellesrecherches et/ou retours en arrière, àtravers ce mémoire.

Bonne lecture!

V

Page 3: Michel Lajoye - Mémoire

Mémoire de Michel Lajoye page 2

Sommaire

Chapitre 1Premiers contacts avec Arcini (1984)

1. Mon parcours, mon passage au FN,et mon fichage par les policespolitiques ………….…..……………… 3

2. Rencontre avec Arcini .….....……….... 43. Origines d'Arcini…………………..…. 44. Arcini forcément fiché …………….… 45. Travail d'Arcini …………………….… 56. La récupération d'armes, d'explosifs,

et autres ……………………………… 57. Formation qui m'est dispensée …….. 68. Arcini forcément manipulé ou agent

infiltré…………………………………. 7

Chapitre 2Passage à l'armée

1. Procédure d'engagement (mars1985)……………………..…………… 7 4

2. Étrange visite au Peloton d'ElèvesGradés (juin 1985) …………..…..…... 8

3. Arrivée au régiment d'affectation, puisdescription de mon travail ……..……. 9

2. Mon nom disparaît de l'effectifrégimentaire ………………..………... 10

5. Visites officielles de la SécuritéMil itaire (fin mars 1986) ……….….... 10

6. Est-ce un agent de la DGSE? ……… 127. Première mission (avril 1986) ……... 128. Problèmes idéologiques …………….. 139. Les autres missions, en vrac (courant

1986) ………………………………..... 1310. L'affaire des GAL (octobre 1986) ...…. 1411. Refus de la mission GAL, je déserte

(octobre/novembre 1986) …………… 1512. Conclusion du passage à l'armée …... 1613. Contexte de l'époque …………...……. 1614. Durant l'armée, contacts réguliers

avec Arcini …………………………... 19

Chapitre 3Une liberté très surveillée

1. Ma voiture qui prend feu …………..… 202. Une voiture piégée qui disparaît …..... 21

Chapitre 4Ma première incarcération (janvier 1987)

1. L'arrestation …………………………. 222. Le procès "arrangé" de Coutances

(4 août 1987) ………………………… 223. Un projet d'attentat …………..………. 234. Visite d'un colonel en prison et

démission de l'armée …………...…... 24

Chapitre 5Les attentats commis par Arcini (1987)

1. Rappel de ma situation à l'époque deces attentats ……………………..…... 24

2. Le prernier attentat (6 marsl987) ….... 243. Le second attentat (5 juin 1987) …….. 244. Arcini a utilisé sa voiture personnelle  265. Arcini a-t-il opéré seul? ……….……. 266. Le jour de l'attentat, Arcini protégeait

Balladur ………………………...……. 277. Provenance étrange de l'arme du

crime ………………………….……… 278. Celui qui a fourni l'arme abattu par la

suite ….………………………………. 279. Des munitions identiques dans

diverses affaires ……………..……. 2910. Les munitions qui ont servi au crime

de Caen ……………………………… 2911. Précisions de la presse concernant les

munitions ……………..………….. 3012. Arcini a peut-être commis des

attentats en Corse ……………….…... 31

13. Arcini forcément identifié par la policedès juin 1987 ………………………… 31

14. Nouvelle voiture pour Arcini ………… 3315. Une fuite malencontreuse dans la

presse …………………………..……. 3316. Les revendications sionistes ………… 3417. Visite d'un inspecteur à la prison où

j'étais détenu …………………..…….. 34

Chapitre 6Ma sortie de prison (26 octobre 1987)

1. Reprises de contacts avec Arcini….... 35

Chapitre 7L'attentat qui m'est reproché

I. Avant toute chose ……………..……... 352. Arcini n'y a pas participé directement  363. Trajet Caen-Cherbourg (vendredi 20

novembre 1987) ………………..……. 364. Assemblage de la bombe (dimanche

22 novembre 1987) ……………..…… 365. Essai avec la "bombe-test" (lundi 23

novembre 1987) ………..……………. 376. Possible substitution de l'explosif …... 377. Cabines téléphoniques toutes en

panne ……………………….….…….. 378. Obligé de partir pour Caen (25

novembre 1987) ……………….…….. 389. Trajet Cherbourg-Rouen (27

novembre 1987) ……………………. 3910. Derniers repérages (29 novembre

1987) …………………………….…… 3911. L'attentat en lui-même, tel que j'ai

opéré (30 novembre 1987) ……..…… 3912. Retour à Caen (30 novembre 1987) .... 4113. Récit de l'explosion de la bombe

(version officielle) …………………... 4114. Le Parquet n'a jamais convoqué les

témoins! …………………….……….. 4215. Bilan de l'explosion: trois blessés

(version officielle) ……….…………... 4316. "Bizarreries " des versions officielles   4317. Un explosif défectueux selon la

version officielle ……….…………... 4418. Récit de l'attentat (version du témoin

Bounifia) ……………….…………….. 4519. Disposition de chacun (selon

Bounifia) ………………..…………… 4620. Ce qui a suivi mon départ (version

Bounifia) ………………..……………. 4621. Disposition de chacun lors de

l'explosion (version Bounifia) ……… 4722. Effets matériels de l'explosion (selon

Bounifia) ……………………….…….. 4823. Aucun dégât humain (selon Bounifia)  4924. Hypothèse d'une défaillance du

système de mise à feu …...…….…… 5025. Bounifia ne savait pas………...……… 5126. Un assureur fantôme………………… 5127. Conclusions sur ce témoignage de

Bounifia ………………………..…….. 5128. Témoignage de Bounifia, version

janvier 2000 ………………...…….….. 5229. Ce qui a pu se dérouler dans ce bar le

30 novembre 1987 …………………... 5330. Arcini m'a déconseillé un système de

mise à feu "à bille"………………….... 5431. Aucun débris de la bombe ne sera

présent au procès …………..……….. 5532. Conclusions sur cet "attentat virtuel" .. 55

Chapitre 8Derniers jours avant l'arrestation

I. Vendredi 4 décembre 1987 ……..…... 562. Samedi 5 décembre 1987 (envoi

d'une revendication) …………...……. 563. Dimanche 6 décembre 1987 ……..…. 57

4. Lundi 7 décembre 1987 (convocationà la PJ) …………….…………………. 57

5. Plan pour faire évader Arcini deslocaux de la PJ ……….……………… 57

6. Mardi 8 décembre 1987, convocationà la PJ (suite) …….………………….. 57

7. Arcini "s'évade"……………………… 588. Mercredi 9 décembre 1987 (trajet

Caen-Le Havre) ….………………….. 619. Je croise Arcini "par hasard"………... 6110. Le jeudi 10 décembre (l'arrestation) ... 6211. Arrêtés sur "renseignement" ……..… 6412. Un, ou des mystérieux "groupes ar-

més" ………………………………….. 65

Chapitre 9La garde-à-vue et l'instruction

1. Il manque des armes et les explosifsont disparu ……………………..…….. 66

2. L'instruction ………………..………… 693. Les motifs d'inculpation ……...……… 704. Soi-disant arrêté avec l'arme du

crime de Caen ……………….……… 70

Chapitre 10Le dossier

1. Sa remise (8 juin 1990) ………..……. 722. L'enquête de personnalité a été en

partie rédigée par la gendarmerie …... 723. Les parents ……………..……………. 734. Les frères et sœurs ………….……… 745. Procès-verbaux sur la période

scolaire………………………..……… 756. Procès-verbaux militaires …….…… 767. L'enquête fut manifestement stoppée  ………………………………………..8. Pas d'audition d'ami(e) ou de voisin .. 77

Chapitre 11Le procès aux Assises (juin 1990)

1. Dates, lieu, ambiance ………..……… 772. Le président de la Cour ……………... 783. L'avocat général (promu après le

procès) …………….………………… 784. Comportement anormal des jurés ….. 795. Les témoins cités ………………..…... 806. Les témoins que j'avais fait citer …… 807. Les parties civiles qui s'étaient

constituées …………………………… 818. Les experts cités …………….………. 819. Comportement d'Arcini durant le

procès ……………..…………………. 8110. Arcini incapable de décrire, techni-

quement, la bombe …….……………. 8111. Le réquisitoire contre moi ……..……. 8312. Le réquisitoire contre Arcini ……..….. 8313. Les plaidoiries de la défense ……...… 8314. J'ai pris la parole pendant près de 2

heures ………………………..………. 8415. Le verdict ………………………….…. 8416. Arcini est toujours en prison ……..…. 84

Chapitre 12Le pourvoi en cassation

1. Je n'étais pas pour ………….……….. 852. Arcini dépose un pourvoi …….……… 853. L'avocat, qui avait accepté, se désiste

………………………………………... 854. Mon pourvoi, évidemment, rejeté …. 865. Des journaux ont les attendus avant

nous …………………………..………. 86

Conclusion……………………………... 86

Postface de Carlos……………… 97

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Mémoire de Michel Lajoye page 3

Chapitre 1

PREMIERS CONTACTS AVEC ARCINI (1984)

1. MON PARCOURS, MON PASSAGE AU FN ETMON "FICHAGE" PAR LES POLICES POLITIQUES

n 1984, comme aujourd'hui, les médiaprésentaient le Front National comme un partinéofasciste, néonazi, et j'en passe. Dès lors,

puisqu'ils me présentaient ainsi ce mouvement: j'y aiadhéré de confiance!

Mais voyons avant mon parcours personnel, plutôtsinueux, qui m'a conduit à m'encarter dans ce partipolitique (mon "environnement familial" ne seraabordé qu'au chapitre 10).

Je suis né en 1967, le 19 avril, dans la communede Le Dézert (environ 500 habitants à l'époque)située dans le canton de Saint-Jean-de-Daye (celase trouve entre Saint-Lô et Carentan), dans ledépartement de la Manche. J'ai vécu toute monenfance dans cette région à la limite sud du Cotentin.

Au niveau scolarité, ce fut très chaotique, maisseulement à partir du collège. À compter de mes12/13 ans, j'estimais que j'avais mieux à faire que depasser mon temps à bâiller en n'écoutant même pasles professeurs. Et de toute façon pour ce qu'ilsavaient à dire...

Il y a aussi que lorsque j'étais petit, j'étaisanormalement grand pour mon âge... La raison enest que j'ai fait ma croissance en avance, et enconséquence vers mes 12/13 ans, j'avais déjàquasiment ma taille adulte. Je n'ai plus grandi depuismes 13/14 ans. Dès lors, je n'avais pas vraimentenvie de rester avec des "petits merdeux" de monâge qui n'étaient même pas à ma taille en plus... Cecis'ajoutait au fait, aux dires même de mesprofesseurs, que j'avais une maturité précoce. C'estexact, et j'aspirais à d'autres activités/loisirs que ceuxdont j'avais l'âge. Je ne fréquentais donc que despersonnes plus âgées que moi, des aînées de 4 à 5ans, parfois plus.

En ce temps-là, mes loisirs étaient surtout axés"nature": pêche (en rivière), plus chasse. Cela avaitaussi un but très lucratif, car j'habitais en bordure duCotentin, et l'hiver, dès que les rivières entraient encrue, tous les marais étaient inondés. Dans cesderniers, à l'époque, c'était plein de rats d'eau (lescastors locaux!) très facile à capturer lorsque tout estinondé puisqu'ils sont obligés de se réfugier sur desîlots. J'utilisais une barque à moteur et je pouvaisainsi les traquer dans tous les marais du Cotentin. Untanneur m'achetait chaque bête 10 francs. Au débutdes années 80 c'était très rentable, car j'en capturaisen moyenne une trentaine par jour lorsqu'il y avaitdes crues!

Par conséquent, entre aller à l'école, ou capturerdes rats d'eau qui se matérialisaient pour moi enargent de poche, c'était vite choisi! Dès l'hiver, dèsque les premières grosses pluies donnaient descrues: je tombais toujours gravement malade pour ladurée des crues, et de ce fait la scolarité était plutôt

à trou. Le collège avait beau râler, menacer, et toutet tout: rien n'y faisait! Ils ne pouvaient quand mêmepas me forcer à y aller, et encore moins m'attachersur la chaise dans une salle de cours pour que j'yreste... J'avais même le droit à des mises à pied, unvrai bonheur: je manquais le collège, et, en punition,j'étais interdit d'y venir (de toute façon je n'y seraispas venu...) pendant 3 ou 8 jours. J'étais aussi(pour)suivi par une assistante sociale et une(ré)éducatrice qui, évidemment, ne me voyaientjamais: pour ça il aurait d'abord fallu qu'ellesm'attrapent...

Cela a duré ainsi de mes 12/13 ans (1980)jusqu'à mes 16 ans (1983). "L'aggravation" a surtoutété à partir d'avril 1981 où j'ai eu 14 ans, 1'âgeminimum pour avoir un cyclomoteur, et je m'en suisacheté un grâce aux revenus procurés par lescastors... Avec ce véhicule (une petite moto plusqu'un cyclo) j'étais très mobile, ce qui a accru monabsentéisme scolaire...

En avril 1983, j'ai eu 16 ans. Par conséquent libre(outre d'acheter une moto de cylindrée plus grosse)de ne surtout plus aller au collège (puisque lascolarité/endoctrinement est obligatoire jusqu'à 16ans). Je n'ai pas fait un jour de plus, j'ai donc quittél'école à 16 ans pile, et même un peu avant puisquemon 16ème anniversaire tombait durant les vacancesscolaires de Pâques 1983. À l'époque j'étais entroisième, mais disons que j'étais inscrit à ce niveau,car dire que j'y étais scolarisé, cela serait trèsexagéré. La dernière année, si je me souviens bien,j'ai été malade trois mois d'affilée: le trimestre d'hiveroù je chassais les castors du Cotentin...

Durant cette période, puisque je fréquentais desgens plus âgés, nous sortions beaucoup, et chaquejour était un jour de fête... Ce qui me permettait devivre ainsi, c'est que j'étais indépendantfinancièrement grâce à mes activités de chasse auxrats d'eau. À la fin de l'été, début de l'automne,j'agrémentais en faisant du braconnage à la truite demer. Dans la Vire, la plus importante rivière communeaux départements de la Manche et du Calvados, ilremontait pas mal de truites de mer (et parfoisquelques saumons). Il était aisé de les capturer avecun filet lorsque les poissons tentaient de franchir, parles échelles à saumons, les divers barrages de laVire. Des restaurants m'achetaient les prises un trèsbon prix. Les affaires marchaient fort bien...

En 1984 (j'avais 16/17 ans) j'étais donc déjà enrupture totale de scolarité depuis près d'une annéeet peu à peu j'ai changé de fréquentations. Fini lesbeuveries et autres (au bout de 3 à 4 ans, çalasse...), il n'était que temps que cela se termine, queje décroche de certaines accoutumances... J'ai parconséquent mis fin à cette période que l'on peutqualifier de "baba-cool".

Comme précisé plus haut, c'est à ce moment-là(1984) que j'ai adhéré au FN. Ce fut le début de ma

E

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Mémoire de Michel Lajoye page 4

politisation si je puis dire, car auparavant je ne l'étaispas, du moins je ne m'en étais pas rendu compte,alors que je l'étais. . .

En effet, comme tout petit Blanc confié àl'enseignement soi-disant laïque, mais qui est tout cequ'il y a de plus confessionnel, j'ai été soumis à unembrigadement. Mes professeurs voulaient, et mêmedevaient remplir leur mission de fonctionnaires del'État, c'est-à-dire faire de nous tous des moutonsincultes, adeptes des religions d'État, que cela soitl'Antiracisme, les Droits de l'Homme et, bien entendu,la sacro-sainte croyance dans le Dogme de la Shoah,ce Mythe fondateur de nos sociétés actuelles. Ilsexigeaient (c'était au début des années 80,parallèlement à l'arrivée au pouvoir de Mitterrand etl'installation de sa clique! Alors les profs gaucho-socialistes se lâchaient...) que l'on se mobilise pourservir de supplétifs, une sorte de Garde jaune, à cePouvoir sioniste, ce Grand Frère, c'est-à-dire ce BigBrother que tout goy doit aimer et servir. ..

J'étais imperméable à cet endoctrinement pro-sioniste (réaction biologique?), et pour tout dire jeréagissais même, instinctivement, assez violemment àcette acculturation. C'est ce qui explique que, par lasuite, en réaction à ce que l'Éducation nationaleavait voulu m'inculquer, j'ai adhéré au FN (le malabsolu pour mes profs...) dès qu'il est apparu sur lascène politique et que j'ai eu une adresse où lecontacter.

J'aurais sans doute adhéré au FN plus tôt (dès1983, dès la percée de Jean-Pierre Stirbois à Dreux)si j'avais eu le moyen d'entrer en contact avec. Maisdans le département de la Manche, à l'époque, ilétait difficile d'obtenir l'adresse du siège de cemouvement. Je n'ai pu avoir un contact que grâce auqui, au début de 1984, avait eu la bonne idée des'indigner (ses employés aux écritures sont payéspour quotidien Ouest-France cela!) de la créationd'une section du FN dans le sud du département, etde mentionner le nom du responsable local. Le jourmême, je lui écrivais après avoir trouvé son adressedans l'annuaire. On m'a répondu et je me suisencarté.. .

Au FN, j'ai participé à la campagne des électionseuropéennes de 1984, collages d'affiches et autresdans le département de la Manche, notamment sur laville de Saint-Lô. Lors de ces actions militantes, àplusieurs reprises, j'ai subi des contrôles d'identitéopérés par la police urbaine de cette ville.

De fait, pour ma part, dès 1984 (j'avais alors16/17 ans) j'étais forcément fiché auxRenseignements Généraux puisque la policeurbaine, démocratie oblige, transmetautomatiquement les identités des colleurs d'affichesdu FN aux diverses polices politiques et officines depolice de la pensée.

De plus, lors de ces diverses activités, j'étais encompagnie de militants connus et dûment fichés pourleurs opinions nationalistes. Il est évident que les RG(et autres) ont forcément mis en fiche l'identité dunouveau venu.

À l'issue de cette campagne des Européennes dejuin 1984 où le FN a réalisé sa première grande

percée nationale (11%), j'ai quitté ce mouvement. Eneffet, la propagande destinée à conditionner la"masse goye" me l'avait présenté commenéofasciste, néonazi, etc, mais j'ai pu constater, del'intérieur, qu'il y avait tromperie sur la marchandiseque les média vendaient! Donc, ne voyant pas lemoindre prémisse de soulèvement armé enpréparation du côté du FN (et la suite m'a donnéraison...), j'ai tout naturellement, et fort logiquement,quitté ce mouvement démocratique, beaucoup troplégaliste à mon goût.

2. RENCONTRE AVEC ARCINI

Je me suis alors dirigé vers d’autres formationsréputées plus dures. J’ai ainsi été amené à côtoyer leresponsable local d’un mouvement dont je tais lepatronyme. Cette personne avait coutume d’inviterles militants des départements de la Manche et duCalvados à venir discuter de choses et d’autres. Tousmouvements nationalistes confondus, cela nousmettait parfois jusqu’à 5 factieux à table puisque lesdémocrates du FN, qui auraient pu renforcer l’effectif,n’étaient bien sûr pas invités à ces agapes. C’estchez cette personne que j’ai rencontré, en 1984,Christophe Arcini qui venait d’arriver à Caen.

3. ORIGINES D'ARCINI

Christophe Arcini est né en 1961, en Algérie, c’estun pied-noir. Lorsque je l’ai rencontré en 1984, ilavait 23 ans, ce n’était pas un novice en politique. Ilavait un passé activiste. Il était adhérent d’unmouvement nationaliste: l’Œuvre Française. Et je saisaussi que dans le Nord de la France (là où sa famillea été rapatriée), il a fréquenté diverses autresformations, notamment le Parti des Forces Nouvelles(PFN).

4. ARCINI FORCÉMENT FICHÉ

En 1984, lorsque nous organisions nosrencontres "œcuméniques", le "coordonnateur"invitait chacun par téléphone et ce dernier étaitforcément sur écoute chez quelques militants (sanscompter les indics qui renseignaient directement...).Par conséquent les RG avaient forcémentconnaissance d’une prochaine réunion. Il y avait làen général 4 à 5 militants, mais la tendance dure dela région. Ce qui ne pouvait que les intéresser!

Comme la personne chez qui avaient lieu cesréceptions habitait un pavillon, et que chaque invitégarait sa voiture devant, il suffisait à un membre desRG (ou autres) de passer dans la rue pour relever lesnuméros des plaques d’immatriculation des véhiculesafin d’en connaître les propriétaires. J’étais le seul àn’avoir pas d’automobile, puisque à l’époque j’étaisencore trop jeune (j’avais 17 ans, je suis né en avril1967) pour en avoir une.

Puisque Arcini allait à ces rendez-vous avec savoiture et qu’il la garait, comme les autres, bien envue devant la maison, il était forcément fiché commeactiviste depuis, au moins, 1984!

Son fichage est d’autant plus certain pour deuxautres raisons:

Page 6: Michel Lajoye - Mémoire

Mémoire de Michel Lajoye page 5

La première est qu’en 1998, des renseignements(pris auprès de certains militants et ex-militants desrégions de Cherbourg et de Caen) ont permisd’établir qu’en 1984/1987 le nom de ChristopheArcini était connu de la mouvance nationaliste bas-normande.

La seconde est qu’en 1984 j’ai participé avec lui,dans la forêt de Fontainebleau, à un "camp" où seregroupaient divers militants (nous étions plus d’unetrentaine!) venus de tous les coins de France. Vu laproportion d’indicateurs, il est totalement utopique depenser que les RG n’ont pas eu les identités de tousles participants qui s’y étaient rendus, comme Arcini,avec leur véhicule personnel sans en avoirpréalablement changé les plaquesd’immatriculation…

Par conséquent, Arcini était, forcément, fiché en1984!

Et, probablement qu’il l’était déjà avant 1984 àcause de son activisme dans le Nord de la France.Que cela soit au sein du PFN, ou par la suite del’Œuvre Française.

Mais, admettons que ce ne soit que seulement en1984, en Normandie, qu’il ait été "fiché" par unepolice politique.

5. TRAVAIL D'ARCINI

À cette époque (1984) Arcini était déjà artificier-démineur et il venait d’être récemment affecté à Caenavec le grade de Contrôleur. Ce qui, aux vues de ses23 ans (il est né en 1961), était élevé. Il n’étaitartificier-démineur que depuis 1982. Avant d’êtreaffecté à Caen il a passé un an au centre dedéminage d’Arras où ses compétences avaientretenu l’attention.

Lors du procès de juin 1990, dans la partiepersonnalité, il a été dit que l’année où Arcini estdevenu artificier-démineur, il n’y avait qu’un poste àpourvoir pour toute la France. Ce poste a été attribuéà celui arrivé en tête du concours et ce fut Arcini.Cela démontre que c’était un grand professionnel dela chose, car finir premier d’un concours national dece niveau, ce n’est pas à la portée du premier venu!

La propagande officielle, sur cette affaire, aprésenté Arcini comme un vague employé de laSécurité Civile du Calvados, il n’en était rien! Cen’était pas un banal artificier-démineur, mais l’un desartificiers-démineurs les plus cotés de Francedépendant du Ministère de l’Intérieur. Il n’était pasaux ordres de la Sécurité Civile comme cela a étéclaironné trop complaisamment, mais à ceux de laPréfecture qui le détachait à la Sécurité Civile! Ce quin’est pas tout à fait la même chose…

De plus, son affectation en Basse-Normandien’était pas sédentaire, il était régulièrement envoyéen renfort çà et là. Que cela soit en Corse (il yséjournait professionnellement très souvent) ou àParis. En 1986, lorsqu’il y a eu la vague d’attentats, ilfut détaché dans la capitale pour intégrer unebrigade d’intervention qui à la moindre alerte, en cas

de découverte d’objet suspect, était envoyée surplace.1

Arcini était donc à la disposition du Ministère del’Intérieur qui, ayant une très haute idée de sescompétences (il était connu pour faire des miracles),l’envoyait là où on en avait besoin.

De même qu’il n’était pas simple artificier-démineurpuisqu’il assurait également, régulièrement, desprotections rapprochées comme nous le verrons plusloin quand sera abordé l’attentat de Caen commis enjuin 1987. Lorsque des Ministres d’État (ou autresautorités) faisaient une visite en Normandie, ou dansune région où Arcini était détaché temporairement,s’il fallait une protection, c’est lui qui l’assurait pourtout ce qui était du domaine des explosifs. C’est ainsiqu’il fréquentait régulièrement les milieux de lasécurité des hommes politiques.

Christophe Arcini était tout, sauf ce petit employéde la Sécurité Civile de Caen, comme on a tenté, fortlogiquement d’ailleurs, de le présenter.

6. LA RÉCUPÉRATION D'ARMES,D'EXPLOSIFS, ET AUTRES

Pour moi Arcini c’était la relation précieuse, bienplus intéressant que les autres militants que jecôtoyais! Car avec lui, au moins, je ne m’ennuyaispas… Entre coller des affiches et distribuer destracts, ou apprendre des choses très détonantesavec lui, je n’ai pas hésité!

Comme le travail d’Arcini était d’être artificier-démineur et qu’en Normandie c’était encore fréquentqu’à l’époque il soit mis à jour des armes de ladernière guerre mondiale, cela offrait de nombreusesopportunités. En général lorsque sur une plage, oudans un champ, voire dans une maison (chez des"collectionneurs"), il était découvert des obus,grenades, etc, c’était pour lui.

En cas de découverte de ce genre, il arrivait pours’occuper de tout cela, et si c’était transportable, ilemportait le tout à la Sécurité Civile de Caen où ilavait un atelier. En général il opérait seul sur un site.Il n’y a que sur les gros chantiers où ils venaient àplusieurs et c’était le Contrôleur Arcini qui contrôlait,donc qui conduisait les opérations de déminage.

Ces dernières permettaient des récupérations trèsintéressantes. Par exemple, lorsqu’il était mis à jourde l’armement, seul Arcini voyait combienl’emplacement contenait d’obus, de grenades, demines et choses diverses puisque c’était le seul àopérer dessus. Et il rapportait, officiellement, à sonatelier (ou faisait sauter sur place) ce qu’il voulaitbien. Il pouvait en mettre de côté pour lui (et pourmoi), personne ne pouvait le savoir puisque nuln’allait mettre son nez sur les obus et mines pendantqu’il les maniait au risque de se faire sauter avec. 1 En 1998, la Sécurité Civile comptait alors 2.885 membres, dont 1.458professionnels, tous rattachés au Ministère de l'Intérieur. Mais le Corpsdes Artificiers-Démineurs, auquel appartenait officiellement ChristopheArcini, n'était composé que de 123 personnes réparties dans 19 centresrégionaux d'intervention se trouvant, en général, au sein des bases de laSécurité Civile. Cela fait une moyenne d'un peu plus de 6 hommes parcentre de déminage, ce qui explique qu'en cas de besoin (vagued'attentats), on "dégarnissait" un centre pour envoyer des renforts vers unautre.

Page 7: Michel Lajoye - Mémoire

Mémoire de Michel Lajoye page 6

Il faut bien remettre les choses dans leur contextegéographique: dans le milieu des années 80 dansles départements du Calvados et de la Manche, il nese déroulait pas de semaine sans que quelque part ilsoit mis à jour des vestiges des combats de 1944.Alors cela donne une idée du nombre d’opportunitésqu’Arcini avait de récupérer pour lui (et pour moi) desobus, mines, grenades, etc…

C’est ainsi qu’il y avait, également, moyen derécupérer aisément des armes de poing ou d’épaule.Du moins suffisamment facilement pour nous équiper.Il était mis à jour régulièrement (que cela soit sur uneplage ou en pleine campagne) des caisses (ou descantines) qui avaient été enterrées par accidentdurant les combats de 1944. Pour cela il suffisaitqu’un obus (ou une bombe d’avion) tombe àproximité d’une caisse quelconque pour qu’elle seretrouve totalement enterrée pour des décennies.

Puisqu’en général, les armes allemandes,conditionnées dans des caisses, étaientsoigneusement emballées dans des papiers spéciauxde protection, ou des housses en cuir (pour lespistolets dans les cantines), plus de 40 ans après lescaisses et/ou les cantines étaient dans un piteux étatextérieur, mais à l’intérieur, ce qui s’y trouvait étaitencore souvent en bon état. Et même quelquefois àl’état neuf!

Les mises à jour d’armes anglo-américainesn’étaient pas si payantes, cela dépendait du lieu dedécouverte. Parfois il y en avait qui contenaient deschoses intéressantes. Mais le plus souvent ces armesanglo-américaines avaient été perdues sansprotection extérieure suffisante, ce qui faisait qu’ellesétaient presque toujours inutilisables 40 ans après.Seuls les corps des grenades anglo-américainesétaient récupérables, principalement les grenadesanglaises Mills, car simples à recycler. Par exemple,pour une grenade, il suffisait de la brosser pour ôterl’éventuelle oxydation extérieure, et, évidemment, deremplacer la charge explosive vieille de 40 ans (quin’était plus fiable) par une neuve. Idem pour lesystème de mise à feu.

Je précise, tout de même, que les bonnesdécouvertes en armes de poing et d’épaule étaientrares. Par an cela se comptait sur les doigts d’unemain! En revanche pour les obus, mines et grenades:c’était autant que nous en voulions pour ainsi dire, ilsuff isait de se servir!

Outre cette possibilité de récupérer des armes etdes équipements en tout genre de la dernière guerremondiale, il était aisé de se procurer du matériel neuf(plastic, détonateurs, etc...). Arcini pouvait endétourner de son atelier sans aucun problème.Lorsqu’il allait faire sauter des obus ou des mines quiavaient été mis à jour, la charge servant à pétarderétait à son appréciation. Il pouvait, par exemple,mentionner sur son cahier qu’il avait utilisé 1 kilo pourdétruire tel site alors qu’en fait, il n’en avait utilisé que800 grammes, le reste était "mis de côté"… Personnene pouvait contrôler: c’était lui le Contrôleur! Cetexplosif mis de côté nous servait, en priorité, àrecycler le matériel.

Il arrivait aussi quelquefois qu’Arcini soit chargé depétarder des stocks réformés de l’armée françaiseprovenant notamment de régiments dits de Géniematériel. Apparemment l’armée n’avait pas d’artificiercompétent. Ils confiaient ce travail à la Sécurité Civile,autrement dit à Arcini. Et évidemment, mêmeprélèvement au passage, si nous en avions besoin.

Mais, dans ce cas, l’utilisation était plus risquée,car l’explosif militaire est coupé avec des composantschimiques permettant d’identifier le numéro du lot.Ainsi, après l’explosion d’une bombe ou d’unegrenade, à l’analyse scientifique des restes, il estpossible de déterminer le numéro du lot d’explosif, etde ce fait sa provenance régimentaire. Ce qui auraitété fâcheux!

Il n’en était pas de même pour l’explosif de laSécurité Civile servant à pétarder, lui était anonymequant à sa provenance. C’est pour cette raison quec’était celui-là qui était détourné en priorité.

En conclusion, de très grandes facilités pourrécupérer certaines choses, mais il n’était détournéque ce qu’il fallait, cela n’aurait servi à rien que l’onstocke démesurément. Il nous fallait simplement dequoi couvrir nos besoins.

7. FORMATION QUI M'EST DISPENSÉE

En plus de cet approvisionnement en matériel, j’aibénéficié d’une formation. Car j’ai beaucoup apprisavec Arcini dans le maniement des armes et desexplosifs.

De par ses fonctions, puisqu’il dépendait duMinistère de l’Intérieur, Arcini était aussi destinatairede rapports confidentiels. Ces documents étaientpubliés après chaque attentat (en Europe), ou encas de menaces précises. Cela faisait le topo sur lesengins employés par divers groupes terroristes. De cefait, j’avais connaissance de tous les "trucs etastuces" pour réaliser du piégeage. Je pouvais,surtout, me servir de l’expérience des autres (etprendre en compte les erreurs qu’ils avaientcommises). Dans ces documents, destinés à tous lesartificiers du Ministère de l’Intérieur, j’avais aussi lescommentaires et directives indiquant la meilleurefaçon de neutraliser tel ou tel engin courammentemployé par tel groupe terroriste. Ces rapports mepermettaient, aussi, de me rendre compte que lesversions officielles (médiatiques et judiciaires) decertains attentats des années 80 ne correspondaientpas du tout avec la réalité! Mais ceci est une autrehistoire…

Je signale, car cela a son importance, que j’étais,apparemment, le seul "élève" d’Arcini. Mais je n’ensuis pas certain… Je n’ai jamais eu connaissancequ’il ait fait bénéficier d’autres militants de son savoir(et quel savoir!) et il n’approvisionnait pas, à maconnaissance, d’autres activistes en matériel divers(et quel matériel!). Mais je ne peux l’affirmercatégoriquement.

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Mémoire de Michel Lajoye page 7

8. ARCINI FORCÉMENT MANIPULÉ OU AGENTINFILTRÉ

Maintenant il faut être logique: Arcini étaitforcément fiché comme "factieux" (depuis au moins1984, comme expliqué dans ce chapitre à la section4) et il est totalement farfelu de penser qu’unepersonne fichée comme "activiste d’extrême-droite"ait pu occuper un emploi aussi sensible. Etadmettons que ce ne soit qu’en 1984 que les RG, ouautres, l’aient fiché comme activiste. Dans ce cas,dès qu’ils ont appris sa profession, ils ont donnél’alerte! C’est l’évidence même!

Or, Arcini a continué après 1984 (et il était déjàactiviste avant!) à fréquenter les milieux néonazis et

néofascistes, tout en étant Contrôleur artificier-démineur du Ministère de l’Intérieur qui l’avaitdétaché à la Sécurité Civile de Basse-Normandie. Deplus il assurait la protection rapprochée de Ministresd’État!

Donc, soit il était manipulé et on le laissait faireen le surveillant de très près quand même pour savoirqu'il faisait bénéficier de ses connaissances et qui ilapprovisionnait en matériel. Soit, tout simplement,Arcini n’était pas un élément nationaliste infiltré, maisun agent du Ministère de l’Intérieur chargé d’infiltrerles mouvements nationalistes. Cette dernièrehypothèse apparaît aujourd’hui comme la plusplausible.

Chapitre 2

PASSAGE À L'ARMÉE

1. PROCÉDURE D'ENGAGEMENT (mars 1985)

n 1985 je me suis engagé dans l’armée. Maisen fait, initialement, je n’ai jamais eu l’intentionde m’enrôler dans la milice supplétive de l'US

Army, puisque je ne voulais pas servir de sabbat-goyà Tsahal! Je désirais juste faire un devancementd’appel pour être débarrassé du service militaire.

Cependant, ce n’était pas possible, car en mars1985 j’étais encore mineur et l’on ne pouvait paseffectuer de devancement d’appel lorsque l’on avaitmoins de 18 ans. Mais le Centre de documentation etde recrutement de l’armée de terre de Saint-Lô m’aproposé un engagement de 3 ans, et de faire enréalité 6 mois comme engagé, de résilier mon contratau bout de cette période, et de finir les 6 autres moisdu service national (il était d’un an à l’époque)comme appelé. Si c’était possible, c’est qu’engagéalors que j’étais mineur, je pouvais résilier moncontrat au bout de 6 mois (contre 3 mois pour lesengagés majeurs).

Cependant, ce n'était pas possible, car en mars1985 j'étais encore mineur et l'on ne pouvait paseffectuer de devancement d'appel lorsque l'on avaitmoins de 18 ans. Mais le Centre de Documentationet de Recrutement de l'Armée de Terre de Saint-Lôm'a proposé un engagement de 3 ans, et de faire enréalité 6 mois comme engagé, de résilier mon contratau bout de cette période, et de finir les 6 autres moisdu service national (il était d'un an à l'époque)comme appelé. Si c'était possible, c'est qu'engagéalors que j'étais mineur, je pouvais résilier moncontrat au bout de 6 mois (contre 3 mois pour lesengagés majeurs).

C'était alléchant, car le premier semestre j'avais lasolde des professionnels, le second la misère desappelés. En plus je gardais les 45 jours depermission des engagés. C'était vraiment une bonneaffaire qui me convenait parfaitement.

C'est en mars 1985, le 12 (si je me souviens bien)du mois, que je suis entré dans ce centre de

recrutement de Saint-Lô. Après que j'ai accepté l'idéede contracter un engagement, le major qui m'a reçu atéléphoné pour prendre rendez-vous pour les testsque j'ai passés moins de 8 jours plus tard. Ayant étéreçu "haut la main" (note 17/20), j'avais le droit à toutce que je voulais comme affectation régimentaire, àmoi de choisir. Je me suis alors vu énumérer desrégiments, et comme je n'avais pas d'opinion sur lesujet, je répondais toujours « Bof, le suivant c'estquoi? ». Après une vingtaine de « bof... », les nerfsde l'orienteur ont un peu lâché et il m'a dit qu'ilfaudrait que je me décide un peu... Comme à cemoment-là il était sur 5ème Régiment d'Hélicoptères deCombat basé à Pau, ce fut adopté: direction leBéarn, dans l'Aviation Légère de l'Armée de Terre(ALAT).

Par conséquent, je pense (mais chacun est libred'avoir son opinion, je ne fais que relater les faits)que c'est le hasard qui a voulu que je me soisretrouvé dans ce régiment. Il me semble (pour moi quiai vécu ces mésaventures) que si l'orienteur s'étaitfatigué plus tôt, ou plus tard, de mes « bof... »,j'aurais été affecté ailleurs. À moins que ce major n'aitété machiavélique, et qu'il m'ait fait croire que j'avaisle choix de mon affectation, mais qu'il ait prévu, aufinal, de me faire signer, d'une façon ou d'une autre,pour le 5ème RHC.

I1 ne peut être exclu, en effet, que l'on m'aitsciemment envoyé dans cette unité, après qu'Arciniait signalé à ses supérieurs qu'il y avait moyen de mefaire contracter un engagement militaire. Il savait quej'allais me rendre au Centre de Documentation et deRecrutement de l'Armée de Terre de Saint-Lô,puisque je lui en avais parlé. A-t-il agit enconséquence?2

Ce qui pourrait faire répondre par l'affirmative àcette question, c'est une analyse des événements.

2 Nous verrons plus loin, dans la « Conclusion » de ce récit, qu'Arcini afort bien pu être, en réalité, une barbouze opérant pour le compte de lapolice politique militaire. Dans ce cas, son statut de fonctionnaire duMinistère de l'Intérieur n'aurait été qu'une "couverture".

E

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Mémoire de Michel Lajoye page 8

C'est un peu comme si l'armée n'attendait que moi oupresque! I1 suffit de voir avec quelle promptitude j'aiété engagé, accueilli à bras ouverts! Mais il reste biendifficile de dire, de façon affirmative, qu'Arcini a eu(ou n'a pas eu) un rôle dans cet engagement.

Quoi qu'il en soit, le 3 avril 1985, j'étais denouveau au centre de recrutement de Saint-Lô poursigner mon contrat. Ce qui fait qu'entre le 12 mars,date où je suis entré dans ce centre pour merenseigner et le 3 avril, jour où j'y signais monengagement, il s'est écoulé 3 semaines (quellerapidité!). Ce cours délai exclut totalement qu'ils aientfait une enquête de moralité sur mon compte. Il fautcompter trois mois pour une procédure de ce genreet ce n'est que plus tard que je serai (du moins, jel'interprète ainsi) rattrapé par cette enquête.

Une fois le contrat paraphé, je me suis rendu àPau, non pas pour être incorporé tout de suite au5ème RHC, mais pour commencer par un séjour à la"prestigieuse" École des Troupes Aéroportées(ETAP) qui se trouve également à Pau.

2. ÉTRANGE VISITE AU PELOTON D'ÉLÈVESGRADÉS (juin 1985)

Début juin 1985, j’étais militaire depuis deux mois,et cela faisait près d’un trimestre que j’avais sollicitéun engagement. Soit le délai moyen pour le retourd’une enquête de moralité. À cette date, j’étais dansl’un des deux Pelotons d’Elèves Gradés de l’ETAP etje fus demandé dans le bureau du lieutenant duPEG de la 12ème compagnie, un certain Bellinck.

Une fois entré dans la pièce, j’ai pu voir qu’outreBellinck qui était assis à son bureau, il y avait unautre lieutenant derrière lui, adossé au mur. Cemystérieux militaire m’était inconnu, et il avait lescheveux assez "longs" (trop longs pour appartenir àl’ETAP, ou alors c’était le beatnik de l’école!). Bellinckm’a d’entrée dit qu’il avait un "problème de sécurité"avec moi, et qu’il avait une "note de sécurité" àremplir me concernant. J’en ai dès lors conclu que lesRenseignements Généraux (et autres) avaient bienfait leur travail, et que j’étais bel et bien fiché commeactiviste…

Après diverses questions destinées à remplir cettenote de sécurité, j’ai été invité à disposer. J’aiprésumé que cette note ne pouvait avoir étédemandée que par la Sécurité Militaire et que celieutenant, dans le bureau de Bellinck, en faisaitpartie. Il n’avait aucun insigne d’unité, il était juste entreillis, pas de béret ou de képi apparent, et de faitpas de signe qui m’aurait indiqué d’où il venait.Quant à son nom sur la bande patronymique de saveste, je n’ai pas pu le lire, si tenté que cela ait étéson vrai nom en plus. Durant l’entretien que j’ai euavec Bellinck ce lieutenant n’a pas dit un mot, il estresté adossé au mur afin de le soutenir…

Ce qui s’est déroulé est très important, car dèsjuin 1985 j’étais donc repéré officiellement par laSécurité Militaire (cela ne pouvait être que cela!).Tout à partir de cette date doit être vu avec à l’espritque les autorités militaires savaient forcément à quielles avaient à faire, et il ne faut pas exclure que l’on

comptait m’utiliser, me manipuler, pour diverseschoses.

Il faut bien voir qu’à cette époque je côtoyais déjàArcini depuis un moment. Et s’il était manipulé, ceuxqui tiraient les ficelles savaient qu’il m’en avait apprisbeaucoup dans le domaine des explosifs et que jem’entraînais souvent avec lui, que cela soit au tir,lancé de grenades, piégeages complexes, etc. SiArcini n’était pas manipulé, mais un agent infiltré,c’est encore pire, car la police politique était, dans cecas, encore mieux informée!

À partir de ce moment, la logique aurait voulu quel’on me dise de faire mon paquetage et d’aller voirailleurs puisque "l’activisme néonazi" est un motifd’exclusion de l’armée dite française.

Or, ce n’est pas ce qui s’est déroulé, bien aucontraire! Car, à l’issue de cette "visite", cela achangé: on s’occupait de moi. Je me retrouvaisenvoyé en formation et en entraînement bien plussouvent que les autres élèves du peloton.

Par exemple les séances d’instruction étaient parpetits groupes (4 à 5 élèves afin de mieuxpersonnaliser), chaque groupe tournait sur uneactivité. En moyenne une seule activité poussée parjour et par groupe. Le reste du temps: TIG, c’est-à-dire astiquer les bâtiments. Pour ma part j’étais inclusdans plusieurs groupes de façon à êtrecontinuellement en formation. Ce qui fait que lorsqueles autres élèves faisaient une seule activité dans lajournée, j’en avais fait 4 à 5 en passant d’un groupeà l’autre. Et l’on ne me passait rien, là où les autresréussissaient moyennement ce qui leur étaitdemandé, et où les instructeurs s’en foutaient pasmal qu’ils réussissent ou pas, si je faisais une chosemédiocrement, je devais recommencer jusqu’à quecela soit parfait.

C’était systématique, dès que j’arrivais sur unterrain d’entraînement (nous étions toujours plusieursélèves à y arriver), la première chose que faisaient lesinstructeurs c’était de repérer celui qui avait« Lajoye » écrit sur sa bande patronymique. Ilsavaient des consignes de me pousser plus que lesautres, et à chaque fois j’y avais droit.

Il y avait forcément une raison à ce "traitement defaveur". D’autant plus que les listes de l’effectifdésigné pour tels et tels entraînements venaientdirectement de l’état-major de l’ETAP. En quelquesorte, je peux dire que j’ai eu un entraînement pluspoussé avec la contrepartie suivante: aucunepermission et/ou quartier libre. La raison en est quej'étais mélangé à tous les groupes, je passais de l'unà l'autre, et je n'étais donc pas mis au repos enmême temps que "mon" groupe, puisque je n'étaisrattaché à aucun. Ainsi, j'étais "isolé" de la troupe.

J’ai mis ce "traitement spécial" (qui a débutéaussitôt après la mystérieuse visite de ce lieutenant)sur le compte de mon affectation future. Le 5ème RHCest (sur le papier) une "unité d’élite" (ayant connu cerégiment de l’intérieur, j’en rigole encore!), un despiliers de la Force d’Action Rapide (ça aussi, cela mefait encore bien rigoler!) de l’époque. Alors je pensaisqu’à unité d’élite, entraînements plus poussés.

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Mémoire de Michel Lajoye page 9

3. ARRIVÉE AU RÉGIMENT D'AFFECTATION, PUIS DESCRIPTION DE MON TRAVAIL

Fin juillet 1985, la promotion en avait fini avecl'ETAP. Nos examens s'étaient bien déroulés, saufpour quelques-uns qui furent recalés. Pour ma part jeme retrouvais "major de promotion" (j'ai peut-êtrebénéficié d'un petit coup de pouce occulte, maiscomme j'avais bien assimilé les cours dispensés parArcini et dont j'ai fait état au chapitre 1, section 7, lesexamens militaires furent pour moi une "promenadede santé"... ). À ce moment, les élèves gradés ontété ventilés dans leurs unités respectives. Pour moi le5ème RHC qui se trouve à moins de 2 kilomètres del'ETAP, sur la petite commune d'Uzein, là où est situél'aéroport de Pau.

Arrivé à la base d'hélicoptères, j'ai été avisé queje devais me présenter, immédiatement, aucommandant Drulhe (il était Chef d'Escadron pourêtre précis), chef des Services Techniques durégiment.

Une fois que je me suis présenté aux ST, j'ai vu lecommandant Drulhe qui m'a informé que jetravaillerais à son secrétariat et que j'étais égalementà la disposition des officiers comptables des ServicesTechniques qu'il dirigeait.

Partant de là, j'ai intégré ces lieux qui étaientstratégiques dans ce régiment. Ils géraient lacomptabilité matériel (armes notamment), carburants,munitions, parc automobile et d'hélicoptères, piècesdétachées, etc. Le chef des ST est celui qui gère lespotentiels de vols pour chaque hélicoptère, c'est lechef technique de toutes les escadrilles volantes, desateliers d'entretien, que cela soit des véhicules oudes aéronefs. Autrement dit, en importance, le bossaprès le chef de corps et son adjoint!

En étant au secrétariat du chef des ST, j'étais, enquelque sorte, une "mémoire" du service, celui quitriait le courrier, et qui répartissait même le travail de"frappe" sur les deux dactylos appelés, qui de faitdevenaient mes subordonnés. À ce poste, j'avaisaussi accès aux comptabilités, aux clés des soutes àmunitions, aux alarmes, etc. J'occupais dès lors desfonctions bien peu compatibles avec mon fichagecomme activiste!

C'est le moins que l'on puisse dire, car enoccupant cet emploi, j'étais bel et bien un des seulsmilitaires du régiment à avoir, à la fois, accès aux clésdes diverses soutes (munitions, notamment) et auxalarmes que je pouvais neutraliser! Sans oublier lacomptabilité, aisément falsifiable, de tout cela! Ilsauraient voulu accréditer, par la suite, que je me suisforcément copieusement servi dans les stocks, qu' ilsn'auraient pas eu à m'affecter dans un autre serviceau sein du 5ème RHC...

Encore aujourd'hui, je me demande pourquoi ilsm'avaient fait affecter au secrétariat des ServicesTechniques de ce régiment, alors qu' ils savaient pourmon activisme (cf. section 2 de ce chapitre)? J'ai dumal à croire que cette affectation, aux ST du 5èmeRHC, fut le fruit du hasard... Ils en attendaientquelque chose, cela semble évident!

Quoi qu'il en soit, du coup, vu les conditions detravail et les tâches vraiment pas écrasantes (j'avaisjuste à faire travailler les deux dactylos appelés) quej'avais dans ce régiment, cela ne me donnait plus dutout envie de résilier mon contrat au bout de 6 moiscomme je l'avais prévu initialement.

En effet, je n'avais aucune astreinte dans ceservice! J'embauchais le matin à 8 heures, pourdébaucher le soir à 17 heures 30 (17 heures levendredi). Travail (ou plus exactement "acte deprésence au bureau") du lundi au vendredi. Tous lessoirs de libre pour rentrer à l'appartement que j'avaisloué dans Pau. Idem pour le week-end: j'étais libredu vendredi 17 heures au lundi matin 8 heurespuisque les Services Techniques ne travaillaientjamais les week-ends et jours fériés. Ajoutons à tousces quartiers libres, les 45 jours de permission par an.Plus tous les après-midi que je prenais ça et là aprèsavoir demandé l'autorisation à mon commandant derentrer chez moi à midi plutôt qu'à 17 heures 30 (unmilitaire, c'est avant tout un fonctionnaire...). Enoutre, avantage non négligeable: puisque j'étais auservice d'un officier supérieur, j'étais dispensé d'alleraux divers rapports, ainsi que d'aller faire le guignoldans des occasions dont seule l'armée dite françaisea le secret.

En conclusion: un emploi plus administratif quemilitaire, ou pour mieux dire, une sinécure "faite surmesure" pour que je ne résille pas mon contrat, etque je reste au sein de l'armée... J'aurais été bienbête de ne pas y rester, car un travail (si je puisnommer cela ainsi...) aussi reposant, et fort bienpayé, je ne risquais pas de trouver cela dans le civil.

Cet emploi pépère cadrait mal avec ce que l'onavait exigé de moi à I ETAP, où tous les "brevets" et"diplômes que j'y ai obtenus sont estampillésd'appellations issues des "troupes de choc". Mais le5ème Régiment d'Hélicoptères de Combat est,comme son nom l'indique, un régiment de combat,donc il ne comprenait pas de "groupe de choc"destiné au combat (c'était le nom de l'unité qui étaitcensé terroriser l'ennemi, pas son personnel!).

Cependant, compte tenu de mon emploi auxServices Techniques, j'avais plus d'occasions quetout autre militaire de parfaire mon entraînement.J'avais juste à demander à mon commandant si jepouvais aller faire telle ou telle activité afin de medivertir. I1 était toujours d'accord et comme cet officierétait hiérarchiquement le numéro 3 de l'unité,personne, hormis le chef de corps et son adjoint,n'aurait pu se permettre d'aller à l'encontre de cetteautorisation accordée par mon chef... Je citerai deuxexemples de ces facilités qui m'étaient offertes:

Le premier est qu'en tant que secrétaire duservice qui établissait les "potentiels de vol" desappareils, les pilotes ne me refusaient jamais unembarquement lorsque j'allais faire de "l'hélico-stop".Ceci afin de sauter "clandestinement" en parachutedurant un vol passant au-dessus de la drop zone quijouxtait la base militaire (j'avais réussi à me faireallouer un équipement militaire "personnel" pour cessauts).

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Le second est que je passais une bonne partiede mon temps à faire du tir puisque j'avais la placeidéale. Au secrétariat des ST, j'assistais, entre autres,le comptable carburant qui était aussi lemunitionnaire (les munitions sont assimilées auxcarburants). Si pour une séance de tir, il était sortides comptes et déstockés des soutes 10.000cartouches, et si à l'issue de la séance d'instruction,l'officier de tir nous rapportait 8.500 douilles et 1.500munitions non utilisées, nous ne rentrions pas cesdernières en comptabilité. Ceci pour faciliter noscomptes, ainsi que le conditionnement des munitions(de façon générale, nous ne reprenions en compteaucun surplus: tout lot déstocké était considérécomme tiré et devait l'être. Seules devaient nousrevenir les douilles). S'il y avait du rab, je le prenais,passais à l'armurerie prendre une armecorrespondant au calibre des munitions, et encompagnie d'un appelé (il me fallait bien quelqu'unpour ramasser les douilles éjectées... ) j'allais tirer cesurplus au stand de tir. J'y passais parfois plusieursaprès-midi par semaine!

En conséquence, j'avais certes un emploi pépèrede bureau, mais je n'étais pas toujours au bureau!Et, au final, j'avais un entraînement (que j'effectuaisvolontairement), ainsi que des séances de tir ouautres, sans commune mesure avec ce que j'auraiseu en étant dans un "groupe de combat". Ceux quiont été dans de tels groupes savent de quoi je veuxparler! Eux qui n'ont lancé, au mieux, qu'unegrenade, tiré 200 cartouches, n'ont même pas eu ledroit à 15 sauts en parachute, et n'ont vu lemaniement des explosifs que de façon théorique...

4. MON NOM DISPARAÎT DE L'EFFECTIFRÉGIMENTAIRE

Lors de mon affectation aux Services Techniquesle premier travail que j’ai eu à effectuer fut de mettreà jour le tableau des effectifs du commandant Drulhe.Sur l’un des murs de son bureau, il avait ungigantesque tableau organigramme de tous lesservices et escadrilles volantes avec indiqué les nomsdes personnels les composant et sur lesquels lecommandant avait la haute main. Cela faisaitl’ensemble du régiment. J’ai mis de nouvellesétiquettes nominatives suite à la ventilation dunouveau contingent (il y avait toujours quelquesappelés dans les escadrilles volantes et autres pourbalayer les hangars), j’ai ôté les noms des "libérés",etc. Et, bien sûr, vers le haut de ce grand tableaudans la case Secrétariat des Services Techniques,au-dessus des noms des deux dactylos appelés, j’aimis une étiquette avec mon nom, cela allait de soi.

Hé bien apparemment non! Car quelques joursplus tard, par hasard, je constate que l’étiquette avecmon nom avait disparu. J’en remets donc unepuisque quand même, étant celui qui devait veiller àla mise à jour du tableau, cela faisait désordre que leseul nom qui manque cela soit justement le mien.

J’ai surveillé cela, et de nouveau quelques joursplus tard, j’ai vu que l’étiquette avec mon nom étaitencore partie. Il était évident que c’était le

commandant Drulhe, lui-même, qui l’ôtait! Mais je mevoyais mal lui demander en quel honneur il faisaitcela et s’il n’avait pas bientôt fini…

Une chose est cependant évidente: je n’étais pasintégré dans l’effectif régimentaire! Officiellementj’étais affecté au 5ème RHC, mais, au sein de cetteunité, je n’étais pas pris en compte!

Sur le coup je ne me suis posé quelquesquestions pensant que je ne faisais pas l’affaire etque j’allais être éjecté. Mais il n’en a rien été, et lessemaines qui passaient me voyaient m’installer. Cen’est que par la suite que c’est devenu clair lorsquela Sécurité Militaire est venue me voir.

5. VISITES OFFICIELLES DE LA SÉCURITÉMILITAIRE (fin mars 1986)

J’étais engagé, mais comme tous les militairesprofessionnels, j’étais quand même rattaché à uncontingent. Celui de la date de mon engagement,c'est-à-dire le 85/04 qui a été libéré fin mars 1986.Moi aussi, si j’avais résilié mon contact pour redevenirappelé au bout de 6 mois, j’aurais été libéré fin mars1986 à l’issue de la durée légale de service (12 moisà l’époque).

Mais au moment où les appelés du contingent85/04 rentraient chez eux, de mon côté c’est la visitede la Sécurité Militaire que j’ai eue.

Cela s’est déroulé un après-midi (je ne mesouviens plus de la date, cela devait être vers le 25mars 1986), le téléphone a sonné au secrétariat desServices Techniques: j’étais demandé au PC. J’y suisallé, cela n’avait rien d’anormal, j’y étais demandétrès fréquemment pour aller chercher des documentsque le colonel (ou son adjoint) voulait remettre aucommandant Drulhe. En arrivant au bâtiment, j’airemarqué, garée devant, une 305 blanche qui avaitdes plaques d’immatriculation civile. J’ai trouvéanormal qu’une voiture civile soit garée ici puisquel’accès de la base était interdit aux véhicules de cegenre. Mais je n’ai pas prêté plus attention que celaà cette voiture.

Une fois dans le PC, j’ai été informé que j’étaisdemandé dans le bureau du chef de corps adjoint.Je pensais que c’était lui qui voulait me voir, mais cen’était pas le lieutenant-colonel qui était dans sonbureau: c’était un type en civil assis à sa place. Il m’afait asseoir aussitôt, prenant un ton jovial. Je trouvaistrès étrange qu’un civil "squatte" le bureau du chefde corps adjoint. Ce visiteur m’a d'entrée dit qu’il avaità parler avec moi, et que nous en aurions pour toutl’après-midi. J’ai tout de suite pensé RG, puisque toutde même, dans ces moments-là, on y pense…

Il ne m’a pas dit qui il était, il jouait le mystère, etj’étais mal placé pour lui demander « À qui ai-jel’honneur? », puisque s’il était assis à la place dunuméro deux du régiment, c’est qu’il avait un "certainpouvoir" et que ce n’était pas un VRP!

Il a commencé par me poser un tas de questionsqui portaient sur un peu tout, famille, scolarité, etc.Mais visiblement il savait déjà tout cela et il me lefaisait bien voir par des petits commentaires amusés,notamment en rectifiant lui-même les erreurs ou les

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oublis volontaires que je commettais… Toutes cesquestions c’était vraiment la mise en condition pourme désarçonner, car je me demandais vraiment quiétait ce type en civil qui savait absolument tout surmoi: même la moindre bricole lui était connue!.

Mais, chose étonnante, s’il savait tout, et s’il aabsolument tout abordé, il n’a pas été question uneseule fois de politique, de mon activisme notamment.Pourtant il savait forcément…

À un moment, chose certainement que n’avait pasprévu ce mystérieux civil, le lieutenant-colonel3 estvenu dans son bureau pour récupérer un dossier.Comme il me connaissait fort bien, il a eu uncommentaire à mon égard et a dû voir que je n’étaispas à l’aise. Il s'est alors mis à donner à l’autre, lecivil, du « Mon commandant » (le lieutenant-colonell'a-t-il fait exprès pour "griller" mon visiteur?). Ainsi j’aisu tout de suite que j’étais en face d’un militaire, maisen civil. Ce qui pour moi était déjà une indication! J’aitout de suite pensé "Sécurité Militaire" à la place de"Renseignements Généraux"…

J'étais d'autant plus conforté dans mon idéed'avoir affaire à la SM que j'avais été étonnéd'entendre le lieutenant-colonel donner au "civil" du« Mon commandant ». Un supérieur, en l'occurrenceun lieutenant-colonel, ne donne jamais du « mon » àun inférieur en grade, en l'état un commandant. Lefait que le lieutenant-colonel l'ait appelé ainsim'assurait que j'avais en face de moi un"Commissaire politique" à qui même un lieutenant-colonel, chef-adjoint d'un régiment, parlait avec laplus extrême déférence en n'oubliant pas d'inclure le« mon » de politesse qu'il aurait refusé à n'importequel autre commandant.

Après le départ du lieutenant-colonel, cela a étéplus direct, le "civil" a dû se sentir démasqué avec le« Mon commandant ». La période du jeu desquestions dont il connaissait à l’avance toutes lesréponses, était finie. Il m’a alors parlé de la Directionde la Protection, de la Sécurité et de la Défense et ils’est présenté comme le chef de l’Antenne de laProtection, de la Sécurité et de la Défense de larégion. Au niveau national c’est une Direction, doncla DPSD, et au niveau régional des Antennes, parconséquent des APSD. Et celui que j’avais devantmoi c’était le commandant de l’APSD basée àTarbes, au 35ème RAP, avec qui l’Antenne partageaitdes infrastructures.

Il m’a expliqué ce qu’était la DPSD puisque jel’ignorais. Comme tout le monde, j’avais entenduparler de la Sécurité Militaire, mais sans plus et j’enétais resté à la dénomination SM. Il m’a appris quecette dernière n’existait plus depuis novembre 1981,que c’était maintenant la DPSD et qu’elle était liée àla DGSE. Pour simplifier, il m’a présenté la DPSDcomme une version militaire de la DST et des RGréunis (pas moins!). Mais à aucun moment il ne m’adéfini la DPSD comme une "police politique militaire",alors que c’est cela en réalité comme nous le verrons

3 Un dénommé Ladevèze, il est aujourd’hui général. En 1991 il a participéà l’agression contre l’Irak. Et en 1996/1997 il a eu un commandement"onusien" en Bosnie…

plus loin avec les missions que j’ai eu à effectuer. Ilm’a aussi précisé que, c’est important, l’on nedemandait jamais à y entrer, mais que c’était elle quirecrutait son personnel.

Tout cela faisait que plus nous avancions, plus jecomprenais que je n’étais plus du 5ème RHC, maisaffilié à la DPSD. Tout devenait clair: l’entraînementpoussé à l’ETAP, le fait que mon nom ne soit pas surle tableau organigramme du commandant Drulhecontenant l’effectif technique du régiment, etc, etc. Ildevenait évident que lorsque j’étais à l’ETAP j’ai étérepéré, puis recruté à mon insu. Et en juin 1985,lorsque j’étais en PEG à l’ETAP, le lieutenantmystérieux dans le bureau de Bellinck est sans doutevenu voir, de visu, le repéré.

Il faut aussi noter que c’est en mars 1986 que laDPSD est venue au 5ème RHC. On a donc attenduque j’aie accompli la durée légale de service. Ce n’estpas pour rien.

En effet, à aucun moment je n’ai été placé devantun choix, ce commandant de l’APSD de Tarbes nem’a pas demandé si je voulais en être, c’était acquispour lui. Mais hypothèse que j’aie refusé, que je luiaie dit d’entrée que je n’acceptais pas d’être intégréà une police politique (bien qu’à l’époque je nesavais pas que c’en était une). Dans ce cas, c’étaitsimple: il est venu me voir fin mars 1986, soit pile aumoment où le contingent 85/04 (auquel j’étaisrattaché pour ma période légale de service) étaitlibéré. C’est-à-dire à une époque où, moi aussi,j’aurais dû finir mon service si j’avais résilié moncontrat d’engagement comme j’en avais initialementenvie. Il est évident que si j’avais dit « Non » à laDPSD en mars 1986, ils sortaient le fait que j’étaisfiché comme "activiste néonazi" et que l’on ne voulaitpas de ça. Mon contrat aurait été cassé, et, commej’avais accompli les 12 mois minimum, le soir même(ou quelques jours après) j’étais civil. Je pense quec’est uniquement pour cette raison que je n’ai pasété contacté, officiellement, plus tôt.

L’entretien a duré dans les 4 heures quandmême, et j’imagine que ce fut un tête-à-tête commeen subissent tous les recrutés.

Le lendemain, même procédure que la veille:appel téléphonique au secrétariat des ST pour mesignaler que j’étais demandé au PC. Devant il étaitgaré la 305 blanche de la veille plus une 4 L de lamême couleur avec elle aussi une immatriculationcivile.

Une fois arrivé au PC, pour cette seconde visite,j’ai vu que nous n’avions plus droit au bureau de chefde corps adjoint, mais à la salle d’honneur (que l’onaura toujours pour les entrevues suivantes). Lecommandant n’était pas seul, il avait avec lui lechauffeur de la 4L qui me sera présenté commeétant "l’adjudant-chef Michel" (probablement unpseudonyme). Cela a été assez rapide, lecommandant m’a présenté cet adjudant-chef Michelen me disant que cela serait lui mon chef. De làl’officier a pris ses affaires, et il est parti (pour si peuce n’était pas la peine qu’il vienne!).

Après le départ du commandant, cet adjudant-chef Michel m’a alors fait savoir diverses choses,

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remis des numéros de téléphone, et expliqué que jeresterais au 5ème RHC, et plus particulièrement auxServices Techniques, mais dans une sorte "d’emploià mi-temps". Il m’a aussi annoncé que lecommandant Drulhe, chef des ST, aurait pourconsignes de me laisser partir selon les directives quel’APSD de Tarbes donnerait.

J’ai également appris une information à cemoment-là, c’est que l’officier dirigeant l’APSD deTarbes (donc celui que je connaissais depuis la veille)c’était le "commandant Février". Là aussi, unpseudonyme à tous les coups.

Je sais que ce commandant Février se faisaitégalement appeler "commandant Tillé". Si je le saisc’est que lorsqu’il venait me voir au 5ème RHC, enmême temps, il allait faire le plein de sa 305 auxpompes régimentaires et sur le bordereau de prise decarburant, il était mentionné "commandant Tillé".Comme le comptable carburant se trouvait auxServices Techniques, le soutier-pompiste rapportaitau secrétariat des ST (donc à moi) les feuillesjournalières. J’ai pu les consulter et savoir de cettefaçon que le civil chauffeur de cette 305 blanchedonnait le grade et le nom de commandant Tillé aupompiste. La feuille de prise de carburant étaittoujours émargée d’une signature "Tillé" à lacalligraphie identique d’une feuille à l’autre. Ce quidémontrait que celui qui utilisait ce patronyme avaitl’habitude de signer ainsi…

6. EST-CE UN AGENT DE LA DGSE?

Et là j’ouvre une parenthèse, car dans l’affaire duRainbow Warrior, il a été cité à plusieurs reprises un"commandant Tillé". J’ignore son implication exacte,j’avais juste lu ce nom dans une publication. Et il y adeux solutions: soit le commandant Février était unpetit plaisantin qui utilisait un pseudonyme connulorsqu’il prenait du carburant ; soit c’est le mêmecommandant Tillé que celui mouillé (c’est le cas de ledire) dans le plasticage du Rainbow Warrior. Ce quiest techniquement possible, la DPSD est liée à laDGSE, et l’on passe de l’une à l’autre très facilementselon les besoins des missions: opérations en Franceou à l’étranger. La DPSD n’ayant été créée que pourcontourner le fait que le DGSE ne doit opérer, enthéorie, qu’à l’étranger.

Physiquement, à l’époque, ce commandantFévrier/Tillé était un sosie du cinéaste ClaudeChabrol. Mêmes lunettes, même "bouille". Il luiressemblait tellement qu’à chaque fois que je voyaisChabrol à la télévision, cela me faisait rigoler de voirmon commandant en train de faire le pitre! Févrieravait la cinquantaine lorsque je l’ai connu (1986).

La seconde visite de la DPSD s’est déroulée sansque je sache précisément ce que l’on attendait demoi. Je suis reparti continuer mon service aux ST enattendant la suite, puisque l’on procédait parépisodes.

Je n’ai pas eu à attendre très longtemps, carquelques jours plus tard, un matin, j’ai eu autéléphone l’adjudant-chef Michel qui m’a dit qu’il

passait me prendre après déjeuner, et que je devaism’habiller en civil.

Je mentionne, par la même occasion, que lecommandant Février et l’adjudant-chef Michel, je lesai toujours vus en civil, jamais en uniforme. C’étaitune règle à l’APSD: tous les membres devaient yvenir en civil afin qu’un observateur ne puisse pasdéterminer les unités de provenance des agents.

Cette visite avait pour but de mieux me présenterla maison et surtout de me confier ma premièremission.

7. PREMIÈRE MISSION (avril 1986)

Une fois installé, il m’a été apporté un dossier,celui d’un certain Christian Coutard, habitant la régionde Rouen (à Tourville la Rivière pour être précis). Lesdocuments qu’il contenait émanaient des RG. C’étaitle dossier RG de Coutard transmis par cette policepolitique civile à la police politique militaire qu’est laDPSD. Cette dernière n’avait pas son propre dossiersur Coutard, et elle prenait pour argent comptant cequ’avaient raconté les RG (la guerre des servicesfaisait qu’ils s’intoxiquaient les uns les autres!).

Il se trouve que je connaissais déjà ce Coutard,puisque Normand j’avais fréquenté un peu tous lesgroupes de Normandie et Coutard en fondaitquasiment un toutes les semaines. Ce type est unescroc notoire, mais il intéressait la DPSD, et pasn’importe quelle antenne, celle de Tarbes! Un sous-groupuscule de Rouen surveillé par l’APSD deTarbes au lieu de celle de Rouen, c’était étrange!Mais peut-être qu’ils considéraient que le "meilleur"pour infiltrer le mouvement de Coutard c’était encoremoi qui le connaissais si bien.

J’ai lu le dossier Coutard et ce qui était dit de songroupuscule, cela m’a amusé, car connaissant déjàce mouvement, je savais que c’était 3 à 4 tondus et 2pelés, et encore, en comptant très large. Or sur lerapport il y avait une cinquantaine de noms de"membres connus", mais inconnus de moi!Etrangement il n’y avait pas mon nom. Ainsi, les RGn’auraient pas su que j’avais fréquenté un temps ceCoutard? Etonnant quand même et très peu crédible!

Une fois lu le dossier, ce fut direct: l’adjudant-chefMichel m’a dit que j’allais retourner en Normandie etm’inscrire au parti de Coutard!

J’avoue que c’était la mission facile pour moi,puisque Coutard je le connaissais déjà. De fait, laDPSD me demandait de faire ce que j’avais déjàréalisé, et je n’avais plus qu’à reprendre contact avecCoutard. Soit la DPSD ignorait (ce qui est douteux!)que je l’avais déjà fréquenté ; soit ils avaient uneautre idée (que j’ignore) derrière la tête.

Toujours est-il qu’aussitôt, c’est-à-dire au toutdébut avril 1986, direction la Normandie, et là j’aiadmiré la "couverture".

En effet, j’étais affecté officiellement au 5ème RHC,et plus particulièrement aux Services Techniques, jene pouvais pas partir comme ça, cela se seraitremarqué. Qu’importe, il y avait les permissionsspéciales, tout était prévu! J’arrivais avec mon cartonde demandes de permission, et je prenais des

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congés selon les besoins de la DPSD. Seulement,les jours ne m’étaient pas décomptés de sur montemps de permissions normales: je gardais mes 45jours de congés par an. Tant et si bien qu’en 1986,ajouté à mes 45 jours de permissions normales, j’aidû être en permission au total une centaine de jours,si ce n’est plus! Sans parler des "en stage" (ouautres prétextes bien vaseux) pour expliquer mesfréquentes absences aux yeux des autres militairesdu 5ème RHC.

Quant aux frais de mission, c’était couvert enliquide. Il m’était remis une somme suffisante pourmes déplacements, et au besoin je pouvaisdemander une rallonge si j’en avais été de mapoche, ce qui n’est jamais arrivé. Il me n’était pasdemandé de notes de frais, c’était une relation deconfiance, j’en avais eu pour tant, un point c’est tout.

Je me suis donc inscrit chez Coutard (cotisationpayée avec les fonds de la DPSD!), je trouvais celadébile de voir la DPSD surveiller un type aussimythomane, escroc, et j’en passe… J’ai passé unpeu moins d’une semaine en Normandie, chezCoutard en plus, car je le connaissais suffisammentpour qu’il m’invite chez lui. C’était de l’infiltrationmenée haut la main: directement dans la place!

À mon retour, l’adjudant-chef Michel est venu mevoir au 5ème RHC, toujours au PC, et j’ai fait moncompte rendu. C’est lui qui s’est déplacé, car commeje n’avais pas de voiture (j’en aurai une dans lessemaines suivantes), c’était plus facile que ce soit luiqui vienne à Pau, plutôt que moi qui aille à Tarbes.

Par la suite, il y a eu d’autres "opérationsCoutard" (ils m’y ont fait aller plein de fois pour vérifierparfois des bricoles). La DPSD faisait une fixation surCoutard, c’en était risible puisque, d’après sa fiche,c’était un indicateur de la gendarmerie de Cléon, enSeine-Maritime, et les RG avaient déjà infiltré sonmouvement4.

Ainsi, les réunions de son groupe (où nous étionsparfois à quatre!) étaient alors couvertes par: les RGqui avaient un agent (je n’ai jamais su avec certitudequi c’était, mais je me doute...), la DPSD qui avait unagent (moi) et Coutard indic de la gendarmerie!Comme la gendarmerie, c’est militaire, la DPSD auraitpu passer par la brigade de Cléon pour avoir sesrenseignements, au lieu de m’envoyer en Normandie.Mais s’ils l’ont fait, c’est qu’il y a une raison. Laquelle?Mystère!

En octobre 1986 la DPSD laissera tomberCoutard, même la police politique militaire a fini par serendre compte que c’était un provocateur, c’est dire!Ils ont mis 6 mois d’enquêtes poussées, de suivis,d’infiltrations, d’écoutes téléphoniques (nous utilisionsun "crédit d’écoutes" de la DGSE pour cela!), etc,pour réaliser que ce type était un mythomane et quece sont les RG qui avaient intoxiqué la DPSD engrossissant démesurément le "danger Coutard". Ilscraignaient, d’après ce que j’ai vu dans les fiches, la

4 La gendarmerie "tenait" Coutard car il faisait dans le vol etl’escroquerie. Il n’était jamais inquiété par la Justice: ses bonsrenseignements lui valaient une "protection en or" avec l’oubli total de toutce qu’il commettait! C’est dire si c’était un indicateur "de qualité", trèsefficace, pour bénéficier d’une telle rémunération!

création d’un "mouvement autonomiste armé" enNormandie puisque Coutard reprenaient (selon lesRG) des thèmes "régionalistes".

Dès fin 1984 (à moins que ce ne soit au début de1985), l’hebdomadaire Minute avait publié deuxpages entières sur Coutard en démontrant que c’étaitun provocateur manipulé par des éléments du PartiSocialiste pour nuire au FN en particulier et auxnationalistes en général. Mais apparemment à laDPSD ils n’avaient pas Minute (ils fichaient juste ceuxqui le lisaient!). Dommage pour eux, car cela leuraurait évité de perdre 6 mois, d’avril 1986 à octobre1986 pour apprendre ce que Minute avait publié à lafin de 1984 ou au début de 1985!

Si j’ai relaté longuement cette "mission Coutard"c’est que lors de mon arrestation en décembre 1987,et lors de mon procès en juin 1990, les média etmême le président de la Cour d’Assises, ont affirméque j’étais membre du parti de Coutard. Non, je n’enétais pas membre, je l’avais infiltré pour le compte dela DPSD, ce qui n’est pas la même chose.

8. PROBLÈMES IDÉOLOGIQUES

Tout cela me posait des gros problèmes. Car toutle temps que cela portait sur des opérationsconcernant des individus comme Coutard, cela allait.Compte tenu que ce dernier était un indic degendarmerie, tout militant de ses sous-groupusculesétait obligatoirement fiché. De fait, cela ne me posaitpas de problème de morale de saboter les"coutarderies". C’était même plutôt de la salubritépublique que d’empêcher ce type de nuire.

Cependant, si pour Coutard cela ne me posaitpas de problème, je savais que tôt ou tard on medemanderait d’autres choses que je ne pourraiaccepter.

Ce qui veut dire que, dès avril 1986, j’ai pris ladécision de leur "tirer ma révérence" dès que celairait trop loin, et qu’ils me demanderaient de faire unechose contraire à mes opinions. Cela sera le cas 6mois plus tard, mais nous n’en sommes pas encorelà…

Pour le moment, en avril 1986, je ne voyais quedes avantages à l’affaire, cela me permettait d’infiltrerle milieu du renseignement pour voir comment iltravaillait.

9. LES AUTRES MISSIONS EN VRAC(courant 1986)

Les autres missions effectuées sont du toutvenant. Du renseignement en majorité, parfois mêmeà l’étranger, notamment en Belgique, et toujoursorienté politiquement dans le même sens: lutte contrela baîîîte immôôônde!

J’ai aussi eu le "plaisir" de participer, en avril1986, à l’exfiltration d’un mystérieux pilote américaintombé dans les Pyrénées français et qui avait étérécupéré par la gendarmerie d’Oloron-Sainte-Marie.D’où venait ce pilote? Venait-il de Grande-Bretagneet se dirigeait-il vers la Libye? Ou, inversement, enrevenait-il? Car détail gênant: cette exfiltration a eulieu la fameuse nuit d’avril 1986 où les USA ont

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bombardé Tripoli pour tenter de tuer le chef de l’Étatlibyen! Il se pourrait que cet avion, mystérieusementécrasé dans les Pyrénées et dont le lendemain deshélicoptères Puma ont été ramasser les morceaux, aitété touché au-dessus de Tripoli par la DCA libyenne ;que le pilote pensait rentrer en Grande-Bretagne,mais qu’il ait fini son vol dans les Pyrénées français…Très fâcheux! Car la France a toujours juré-crachéque les avions américains, partis de Grande-Bretagne (l’Espagne avait refusé qu’ils partent deson territoire), n’avaient jamais survolé le sol français.On imagine l’embarras de Jacques Chirac, alorsPremier Ministre, si à l’aller, ou au retour, un desavions américains s’est écrasé dans les Pyrénéessuite à un problème technique…

Mais peut-être que la Libye n’a rien à voir là-dedans, et qu’il ne se soit agi que d’une banaleliaison aérienne de l’OTAN entre l’Espagne et laGrande-Bretagne (ou inversement) ; ou entrel’Espagne et l’Allemagne (ou inversement). Un piloted’un avion américain en liaison technique a-t-il eu unproblème au-dessus des Pyrénées et a-t-il dûs’éjecter? Tout est possible!

Si le gouvernement français (dont la parole estsacrée!) a affirmé que les avions américains n’ontjamais survolé la France, c’est forcément la véritévraie. À peu près au même moment le mêmegouvernement français avait aussi dit sa véritéconcernant le nuage radioactif de Tchernobyl, àsavoir qu’il n’avait jamais survolé le territoire français!Nuage radioactif, avions américains, même véritévraie?

Pour ma part je n’en sais pas plus, si ce n’est quesuite à cette exfiltration, à laquelle j’ai modestementapporté ma petite contribution, j’ai changé de chef.Avant j’étais "traité" par l’adjudant-chef Michel, par lasuite je le serai directement par le commandantFévrier! Donc: promotion!

10. L'AFFAIRE DES GAL (octobre 1986)

En octobre 1986 (vers le 15 du mois) j’ai eu unentretien avec le commandant Février, cela aurait dûêtre un tête-à-tête de routine, mais cela ne l’a pasété. Pour commencer le lieu de cette rencontre, cen’était ni à l’APSD de Tarbes, ni au 5ème RHC de Pau,mais dans un bar: le Henry IV à Pau. J’avoue quelorsque j’ai appris qu’il me rencontrerait dans un lieupublic j’ai trouvé que Février tombait dans le mauvaisfilm. C’était contraire à la plus élémentaire sécurité, etil était quand même plus fiable de parler "affaires"dans un bureau du 5ème RHC ou de l’APSD deTarbes!

Finalement j’ai pensé que mon officier traitantavait certainement quelqu’un à me présenter, unepersonne non-militaire qu’il ne souhaitait pas faireentrer dans une enceinte de l’armée.

En réalité Février était seul, il m’attendait à unetable, près de la vitrine en plus! Ce qui fait que dutrottoir, du parc public qui était en face, et même dela rue en passant en voiture, nous étions visibles!

Nous pouvions être pris en photo, filmés, etc, sans lemoindre problème!5

L’entretien a eu lieu vers les 18 heures et a duréune heure environ. D’entrée j’ai trouvé Février bizarre,il ne me tutoyait plus (alors qu’il l’avait toujours fait),mais me vouvoyait. Ou alors il alternait les deux etfaisait parfois du « tu/vous » dans la même phrase.

De la part d’un "pro" du renseignement comme lui,cela m’a étonné. Soit il jouait la comédie du"paniqueur" ; soit il paniquait vraiment.

Quoi qu’il en fût, il m’a sorti un baratin (tournantfranchement à la très grosse flagornerie) disant qu’ilavait pour moi de "grands projets" (selon sonexpression). J’ai bien senti qu’il ne contrôlait pasl’opération qu’il allait m’exposer. Jusque-là toutes lesmissions, c’est lui qui les dirigeait, c’était lui le patron.Là c’était évident qu’il ne l’était plus, on lui avait ditde faire comme ci et comme ça, et cela se voyait qu’ilne sentait pas bien l’affaire qui se présentait.

Ce que je devais faire est "simple", il m’a dit que jedevais m’inscrire à l’un des deux para-club de Pau(celui qui est sur la commune d’Uzein). Ensuite jedevais m’y présenter comme "militaire aux idées dedroite", me faire remarquer comme "extrémiste", pourreprendre les termes qui m’ont été tenus.

Ensuite il m’a dit que si tout se déroulait commeprévu, je serais contacté: soit par une jeune femme ;soit par un homme auquel la jeune femme allait mesignaler. Février a ajouté que ces gens étaientsoupçonnés d’être des "recruteurs" de tueurs pour lecompte des GAL6.

J’ai fait en sorte de ne rien laisser paraître lorsqu’ila lâché le terme GAL, mais en réalité, il m’avait sciéavec son annonce. Parce que, tout de même, en1986, les GAL étaient réputés, surtout dans le Béarnet au Pays Basque!

Le tête-à-tête s’est poursuivi et Février a sorti deson attaché-case des photos (du type clichés pris deloin au téléobjectif par les RG ou autres...) de cettejeune femme soupçonnée de signaler à d’autres les"mercenaires galeux" potentiels. Il a aussi sorti desphotos de l’homme soupçonné, puisqu’il ne savaitpas qui des deux allait m’approcher.

Je n’en sais pas plus, car lorsque j’ai demandé« Et après? », j’ai eu pour réponse que l’on aviseraità ce moment-là, puisqu’il n’était pas dit que je soisapproché comme on l’avait prévu. Et cela pouvaitprendre longtemps avant que le poisson ne morde àl’hameçon. Mais, en tout cas, c’était moi l’appât!

J’ai quand même eu un éventail des moyens carj’ai demandé si je devais fréquenter juste un peucomme ça le para-club, ou y être tous les week-endset plus. Car, dans ce cas, cela impliquait des créditsimportants dès lors que ce n’est pas gratuit de fairedes sauts civils en parachute. Il fallait prévoir l’achatd’un matériel civil, ou sa location. Février m’a réponduqu’il y aurait ce qu’il faut. Ce qui m’a confirmé que ce

5 Peut-être que nous l’avons été! Il n’est pas impossible que Février ait dûme montrer et me faire écouter à des gens…6 Ces mystérieux Groupes Antiterroristes de Libération qui liquidaient lesmembres de l’ETA et qui étaient, en partie, composés de policiersespagnols.

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n’était pas l’APSD de Tarbes qui "pilotait" l’affairepuisque, subitement, elle était devenue riche!

Et dans les moyens, le commandant Février aajouté qu’il me serait délivré un permis de portd’arme. Ce détail m’a vraiment fait tiquer, car s’ilm’était délivré un permis de port d’arme (donc unpermis permanent englobant le hors-service), c’estque cette mission "puait" un maximum…

C’est tout, je n’en saurai pas plus, et mêmeaujourd’hui je n’en sais pas plus sur ce qu'onattendait de moi au final. Après cet entretien, j’airepris ma voiture, direction la Normandie, puisque jedevais "opérer" sur Cherbourg en liaison avec l’APSDlocale et je devais, une dernière fois, réaliser une"coutarderie" sur Rouen. Ce qui me laissait quelquesjours pour réfléchir à ce que m’avait dit Févrierconcernant les GAL.

11. REFUS DE LA MISSION GAL, JE DÉSERTE(octobre/novembre 1986)

En fait je n’avais pas beaucoup à réfléchir, car ilétait hors de question que j’accepte quelque chosede ce genre pour le compte de la DPSD. Ce quim’était proposé avait le côté excitant du mystère etde l’aventure. C’était quand même autre chose quela routine qu’ont les militaires moyens! Beaucoupauraient voulu être à ma place, mais au point de vueidéologique je n’avais pas à accepter cela. Commedepuis quelques semaines j’en avais de plus en plusmarre de tout cela, puisque appartenir à une policepolitique militaire ne m’enthousiasmait pas, j’ai parconséquent décidé de déserter. Seul "choix" quej’avais!

Vers les 25 octobre, j’ai eu un contacttéléphonique avec le commandant Février, je l’ai eudepuis Cherbourg puisque à ce moment-là j’étais en"renfort" auprès de l’APSD cherbourgeoise(infiltration/surveillance des "fafounets" locaux). Laconversation (dans laquelle Février me tutoyait ànouveau) a porté sur diverses choses, notamment les"coutarderies" et c’est là que Février m’a annoncéque c’en était fini pour Coutard. Je ne devais plusm’en occuper et il m’a dit que je devais rentrer àPau/Tarbes, car il avait un besoin urgent de moi. Iln’a pas précisé pourquoi, mais j’ai présumé quec’était pour les GAL. Bien qu’il se peut que cette"urgence" ait eu une autre raison!

Cependant, je n’avais pas à rentrer tout de suite.Car, avant de partir en mission en Normandie, j’avaisdéposé un congé de 8 jours et ce n’est que débutnovembre que je devais revoir Février. Mais il ne m’apas revu, puisque je ne suis pas rentré à Pau, ni àTarbes, du moins pas rentré le voir.

Alors ma désertion c’est comme l’on veut: ellepeut être datée de fin octobre 1986 moment où madécision a été prise, ou l’on peut la dater de débutnovembre 1986, époque où ma permission de 8 joursétait finie et où j’aurais dû rentrer.

Je suis quand même passé à Pau fin octobre(durant le temps de mon congé) pour régler diversesaffaires. Je suis également passé au para-clubauquel Février m’avait dit de m’inscrire. J’ai eu de la

chance, dès ma première visite, j’ai vu la jeunefemme signalée par Février. Je craignais de devoirrevenir plusieurs fois pour tomber dessus. Ensuitecela s’est déroulé très rapidement, je suis allé la voir,je lui ai remis une enveloppe en lui disant que j’avaiscela à lui remettre et je suis reparti.

Cette enveloppe contenait des renseignementssur l’APSD de Tarbes, numéros de téléphone,adresses de permanents, d’agents ou d’honorablescorrespondants, également divers numéros deplaques immatriculation fréquemment apposées surles voitures civiles utilisées par l’Antenne, etc, etc.J’abordais aussi les GAL et je mentionnais tout ceque je savais sur ce qui se préparait en relatant cequi m’avait été "proposé" par Février. Je précisaisbien qu’une infiltration était en cours. C’est tout, àeux (les GAL) d’en tirer les conséquences et lesconclusions.

J’ai remis et/ou envoyé des choses similaires àd’autres personnes d’autres groupes ; à descombattants politiques surveillés par des honorablescorrespondants ou des agents officiels de la DPSD.En faisant cela je franchissais plusieurs barrières, nonseulement je faisais défection de la DPSD, mais enplus je lui "cassais la baraque" dans un tasd’infiltrations en cours, sans oublier que je lui "grillais"et même "carbonisais", tous les agents et indics queje connaissais.

Début novembre, le jour où j’aurais dû reprendrele travail, j’ai téléphoné à deux "collègues" pourdemander, à l’un puis à l’autre, comment il avait étépris le fait que le matin, je n’étais pas de retour. Ilsm’ont dit que pour le moment il n’y avait pasd’effervescence, car tout le monde pensait que j’étaisretenu par une mission et que je n’avais pas puprévenir. Ces deux collègues m’ont quand mêmeconseillé « de ne pas déconner » et de rentrer avantque cela ne se remarque. Je leur ai dit que je nerentrerai pas, et que c’était irrévocable.

Quelques jours plus tard, j’ai à nouveautéléphoné à ces collègues pour "prendre latempérature", et là cela avait changé, c’étaitl’ébullition! Par la suite, lors d’une arrestation,j’apprendrais que l’on avait mis de très gros moyens(de gendarmerie, etc), et même les RG (les ennemishéréditaires de la DPSD pourtant...) étaient priés dedonner un coup de main pour me retrouver vite faitpour laver cet affront!

Je n’aurai plus de contact avec ces deuxcollègues par la suite, mais ce dernier appeltéléphonique m’a confirmé que la DPSD était sur lesdents (cela se comprend!) et que l’on n'avait pasbeaucoup apprécié, c’est le moins que l’on puissedire, que d’une part je déserte, mais que d’autre part,je mette en l’air l’opération d’infiltration des GAL! Ainsiqu’un tas d’autres actions dont j’avais euconnaissance en "fouinant" dans les archives del’APSD de Tarbes…

Sans prétention excessive, je peux quand mêmedire que j'ai désorganisé la DPSD pour quelquetemps, car les renseignements détournés, remis àdiverses personnes et/ou groupes, étaient trèsimportants.

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Pour effectuer ces détournements, j'ai profité del'installation récente, par la DPSD dans sesAntennes, de terminaux similaires à ce que lagendarmerie possédait avec son réseau Saphir. Ilsuffisait de pianoter sur le clavier pour avoir desrenseignements sur telle ou telle affaire et/oupersonne fichée. Le réseau Saphir de la gendarmerieétait d'ailleurs inclus dans celui de la DPSD.Évidemment les terminaux n'avaient aucun lecteur dedisquettes (il ne s'agissait pas d'ordinateurs, maisplutôt d'espèces de Minitel) et aucune sortied'imprimante afin qu'un agent "véreux" ne puisse pasdétourner en listage ces précieux renseignements...

Partant de là, les "cerveaux" de la DPSD étaientcertains que personne ne pourrait leur pirater desinformations. Tout au plus craignaient-ils qu'un agent-pirate, ayant réussi à "cracker" les codesd'accès/protection, puisse afficher des pages surl'écran. Mais à moins d'avoir une mémoirephénoménale, il ne pourrait jamais retenir toutes cespages de données. Ce que les cerveaux n'avaientpas prévu, c'est qu'un agent (en l'occurrence moi)utiliserait un appareil photo et photographierait, engros plan, l'écran du terminal sur lequel s'affichaient,les unes après les autres, les pages d'informationsconfidentielles.

Dès lors, il me fut aisé de faire afficher, entreautres, la liste des indics ou agents infiltrés dans telou tel mouvement... En réalité ce ne fut pas aussisimple que cela, car chaque indic avait un nom decode qu'il fallait "percer", mais j'ai schématisé, pourque les non-initiés à ces technologies puissentcomprendre comment j'ai fait pour détourner cesinformations.

Pour conclure ce point, je mentionne que dans lesannées 80, alors que j'étais encore au collège, puispar la suite jusqu'à mon départ pour l'armée, j'avaiscoutume d'aller plusieurs heures par semaine dansun centre informatique. C'est un domaine où je nesuis pas tombé dedans lorsque j'étais tout petit (carcela n'existait pas encore), mais dès que les premiersmicro-ordinateurs sont apparus, je m'y suis intéresséet ai pratiqué. Février le savait (il connaissait tout surmoi comme expliqué à la section 5 de ce chapitre), etil aurait dû se méfier de mes compétences en lamatière que j'ai mises à profit contre le réseau internede la DPSD... Cette dernière, en plus de sa missionde police politique, a celle de veiller à la protection etla sécurité de tout ce qui est lié à la défense, maiselle n'a même pas été foutue de protéger son propreréseau... La honte des hontes pour elle!

12. CONCLUSION DU PASSAGE À L'ARMÉE

J’ai donc été militaire pendant plus de 19 mois deservice actif. De début avril 1985 à novembre 1986.Avec 7 mois d’appartenance "officielle" et active à laDPSD puisque c’est fin mars 1986 qu’ils m’ontoff iciellement contacté, mais c’est en juin 1985 qu’ilsm’ont apparemment recruté.

Il est évident que rien n’a été fait au hasard, jen’ai pas été enrôlé parce que j’étais "bon élève" àl’ETAP, il y a une autre raison. Je suis persuadé que

la DPSD comptait m’utiliser pour quelque chose.Peut-être me faire commettre des actes criminels afind’impliquer l’extrême-droite?

Je doute quand même qu’ils aient été sincères àmon égard et me considéraient comme un agentcomme les autres, à part entière. Il faut bien voir qu’al’époque, lors de la première approche officielle enmars 1986, j’étais à trois semaines de mes 19 ans!Ce qui fait bien jeune pour appartenir de façonactive, à ce genre de service spécialisé enbarbouzeries.

De plus, l’utilisation d’un "bleu" pour des missionsdélicates (comme l’était celle contre les GAL!) estcontraire à tous les usages! Ces dernierscommandent de bien tester le nouvel agent pouréviter les éventuelles "défections". Cette règle debase apparaît comme nécessaire. Si elle avait étéappliquée, l’APSD de Tarbes, et plus généralementla DPSD, n’auraient pas eu ces déboires. Mais, aprèstout, j’étais militaire depuis avril 1985, très bien noté.En mars 1986, après 12 mois de tests militaires, ontdémarré les tests DPSD avec les "missions Coutard"et autres. Puis, comme je donnais pleinementsatisfaction, après ces classes de 18 mois, lecommandant Février a très bien pu commettre uneerreur d’appréciation en pensant (à tort!) que j’étais"bon pour le service".

Par ailleurs, mon jeune âge devenait, dès lors, unatout! Car qui aurait pu penser que ce "gamin" étaitun agent de la DPSD?

Quoi qu’il en soit, j’avais la même reconnaissanceque les autres membres du service, et le même accès(limité!) aux archives. Ce qui n’aurait sans doute pasété le cas s’ils n’avaient pas eu une certaineconfiance… Certainement pas une confianceaveugle, mais une confiance quand même.

Cependant, je les imagine très bien me faireabattre quelqu’un, ou commettre quelque chose desimilaire, et se mettre à dire après: « Lajoye? On neconnaît pas! » et c’était parti pour une campagnecontre l’extrême-droite accusée, évidemment, d’avoirperpétré l’attentat. Avec le recul, nous pouvonsquand même dire que mon recrutement par la DPSDpuait vraiment la grosse manipulation.

Cette affaire d’infiltration des GAL, cela n’était,peut-être (je n’en sais rien!), que le prélude à uneénorme affaire. En effet, en 1991/1992, lors d’un despremiers procès des GAL en Espagne, j’ai suivi unpeu cela dans les média. Et à la fin de 1986, lorsquela DPSD était sur l’affaire, effectivement, des officielsde la police espagnole opéraient illégalement enFrance.

13. CONTEXTE DE L'ÉPOQUE

Il faut aussi remettre cette "infiltration des GAL2dans un contexte général d’une époque trouble.Bien se remémorer ce qui se déroulait dans le milieudes années 80.

Certains pourraient se dire, à la lecture de ce quiva suivre, que l’on s’égare de mon affaire, que celan’a rien à voir, puisqu’elle n’est pas liée aux faits queje vais relater. Mais, je pense qu’il est bon de voir,

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qu’au final, mon affaire qui peut sembler unemanipulation énorme, bien compliquée, incroyable,est somme toute bien peu de choses! Une banalité,comparé aux énormes manipulations des années 80!

Par exemple, en 1986, les média diffusés enFrance n’en avaient que pour les otages français duLiban… Chaque jour, les journaux de la propagandetélévisée s’ouvraient sur un message le rappelant!Maintenant il est généralement connu, et reconnu,qu’en fait de "journalistes otages", étaientprincipalement retenus prisonniers des honorablescorrespondants de services dont le Mossad! Ce quiexplique la mobilisation médiatique qu’il y avait, enFrance, en faveur de certains de ces otages…

En 1986 Pasqua était aussi en grande difficulté,car il y avait dans le pays une vague d’attentats (soi-disant islamistes commis, soi-disant, par le réseau deFouad Ali Saleh). Il n’est pas impossible que Pasquaait voulu « terroriser les terroristes » à bon compte.Peut-être (ce n’est qu’une hypothèse!) arrêter despontes de la police socialiste espagnole, membresdes GAL, venus sur le territoire français éliminer desactivistes de l’ETA.

Ce qui me fait penser cela, c’est qu’à cetteépoque (octobre 1986) j’ai constaté à l’APSD deTarbes une effervescence de messages et autres.C’était comme si le Béarn et le Pays Basque étaientpeuplés de tous les services. Il y avait de tout dansces communications, de la DST, des RG, de la PJ, etje sais que le GIGN est même venu dans la région aumoins pendant une semaine (les gendarmes étaientdispersés et logés incognito dans des casernes de larégion, dont quelques-uns au 5ème RHC, à l’hôtelcadres). Cependant rien ne s’est déroulé. Ils étaienten attente, mais je ne sais pas ce qu’ils attendaient.

De plus, les GAL je connais un peu, car j’ai côtoyéen prison des condamnés membres de cetteorganisation. Ce que j’ai appris c’est qu’en 1986,ceux qui opéraient en France étaient de moins enmoins des "mercenaires", mais de plus en plus deshauts placés dans la hiérarchie de la policeespagnole (ils avaient même sous-traité des missionsaux services spéciaux portugais). De quoi gêner auxentournures le gouvernement socialiste espagnol sices gens de la police ibérique s’étaient fait arrêter,les armes à la main, sur le territoire français! Pasqua(et d’autres...) y ont forcément pensé afin de faireremonter leur côte mise à mal après les attentats entout genre de 1986.

Finalement, ce sera la "branche internationale"d’Action Directe qui sera sacrifiée et qui fera les fraisdu besoin d’opération médiatique de Pasqua et sabande. Après cette arrestation, la cote de Pasquaremontra, celle de Chirac, le Premier Ministre del’époque, fera de même…

De ce fait, Action Directe n’aura pas été sacrifiéepour rien! Car, pour le pouvoir, ce fut un réel sacrifice!La branche internationale d’AD c’est le "fameux"quatuor mis en place par Pierre Joxe et sans douteGilles Ménage, chef de la Cellule Elyséenne, le"Cabinet noir" de Mitterrand. Les quatre d’AD, arrêtésà Vitry-aux-Loges (Loiret très rural...) le 21 février1987, étaient forcément en liberté très surveillée

depuis plusieurs années. Cette arrestation aurait pu,et même dû, être opérée depuis très longtemps.

En effet, à Vitry-aux-Loges (Jean-Marc Rouillan etNathalie Ménigon) deux des quatre membres d’ActionDirecte louaient 4.200 francs (une fortune pourl’époque dans ce coin!) par mois une ferme sansdonner l’illusion d’y travailler. Georges Cipriani etJoëlle Aubron, les deux autres, louaient une autrehabitation proche. Ce qui, évidemment, ne pouvaitqu’attirer l’attention des indigènes (à l’époque encoretrès curieux envers l’étranger à la commune) quidevaient se demander qui étaient ces "babas-cool".

Lors de leur arrestation, en février 1987, celafaisait plus d’un an que Rouillan et Ménigon étaientrésidents de Vitry-aux-Loges. Ils se faisaient passerpour des Belges et roulaient quasiment tous les joursdans une voiture de location non restituée (doncdéclarée volée!) immatriculée en Belgique et dont lesplaques n’étaient même pas maquillées, c’est dire!On ne me fera pas croire que la gendarmerie deVitry-aux-Loges, qui voyait passer et repasser lavoiture devant la brigade, ne s’est jamais demandéqui étaient ces "babas-cool" venus de Belgique etque les pandores n’ont pas passé la plaqued’immatriculation du véhicule au fichier des voituresrecherchées… Et, comme elle était déclarée volée, ila bien fallu qu'on protège ces gens d’AD contre toutearrestation intempestive!

Cette protection est d’autant plus manifeste, queVitry-aux-Loges ne se trouve pas très loin desCercottes! Charmant coin perdu du Loiret, mais qui apour particularisme significatif d’accueillir le centrenational d’instruction du Service Action de la DGSE!Ce qui veut dire (nous étions en 1986/1987, l’URSSexistait encore!) que la gendarmerie du Loiret avaitpour ordre de s’intéresser aux "nouveaux habitants"des environs et de vérifier, scrupuleusement, qu’il nes’agissait pas d’agents kagébistes, ou autres, venusespionner les allées et venues des Cercottes.

Alors la question n’est pas de savoir si le quartetteconstituant la branche internationale d’Action Directeétait protégé, mais: qui était le chef d’orchestre qui leprotégeait?

Quoi qu’il en soit, en février 1987, comme Pasquaet sa bande avaient un besoin très urgent d’amuserl’opinion avec un "succès" dans la lutte contre leterrorisme, faute, sans aucun doute, de pouvoir "sefaire" les GAL, on a sifflé la fin de la récréation pourles quatre de la branche internationale d’ActionDirecte! Ils avaient déjà "bien servi"! Notamment enendossant des attentats commis par d’autres! Jepense surtout au général Audran, évidemmentabattu par des services spéciaux, mais mis au créditd’Action Directe, c’est plus sage…

En effet, dans son livre Guerres secrètes àl’Elysée, le capitaine Paul Barril affirme, pages 98 et246, que c’est le général Audran qui l’a envoyé enIrak. À l’époque, l’Irak était en guerre contre l’Iran.Audran avait donné pour mission au capitaine Barrild’aller en Irak constituer et instruire des commandosde nageurs de combat afin de "tanner" (l’expressionest du général) les Iraniens! Ce qui veut surtout direqu’Audran soutenait bien (très bien même!), à titre

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personnel, l’Irak de Saddam Hussein. Car il adépêché le capitaine Barril et certains autresinstructeurs, plus tout le nécessaire, à titre nonofficiel!

Page 98 de son livre, le capitaine Barril révèleaussi que, la veille de son assassinat, Audran setrouvait en Allemagne. Et, comme par hasard, lors duretour, arrivé à la frontière germano-française, les 6(six!) gardes du corps de la DGSE, affectés à laprotection du général, ont reçu l’ordre de lever leurdispositif! Ce n’est sûrement pas Action Directe quiavait le pouvoir d’ordonner à ces six agents de laDGSE de le laisser effectuer le reste du trajet routiertout seul!

De même, les quatre isolés d’AD ne pouvaientpas deviner qu’Audran serait sans escorte, et qu’ilemprunterait, à coup sûr, la petite route decampagne sur laquelle il a été abattu!

En conséquence, il est clair qu’Audran a étéabandonné! Et même livré, par la DGSE, à destueurs qui n’étaient sûrement pas les quatre d’AD àqui ce fut imputé…

De plus, vu sa personnalité (un général avec unpassé très "spécial" et encore jeune, pas le genre àpantoufler au Ministère...) pour qu’il ait arrêté savoiture, sans se méfier (alors qu’il savait que du KGBau Mossad on voulait sa peau!), sans prendre sonarme en main, c’est qu’il faut vraiment que ceux quilui ont fait signe de s’arrêter aient eu l’apparence del’autorité légitime. Un "vrai-faux" contrôle de lagendarmerie peut-être…

Les raisons de l’assassinat de ce général sontprincipalement liées à la politique au Moyen-Orient.Page 306 de son livre, le capitaine Barril indiquequ’Audran s’opposait à la livraison d’armes à l’Iran!Ce sont ces ventes d’armes qui sont connues, dansle grand public, sous l’appellation d’Affaire Luchaire.Ces livraisons à l’Iran étaient, soi-disant, destinées àfaciliter la libération des divers otages du Liban (lesfameux "journalistes"...). Elles ont aussi servi àfinancer le Parti Socialiste!

Comme Audran, Délégué général à l’Armement,s’opposait catégoriquement à la vente de cetarmement aux Iraniens et que son refus était un vetoincontournable, cela explique son élimination! C’estque certains, comme les Israéliens par exemple,étaient doublement pour ces livraisons. D’une part, ilssoutenaient l’Iran contre l’Irak ; et d’autre partplusieurs de ces "journalistes otages" étaient de chezeux !

Donc, le Mossad a sans doute éliminé Audran-le-gêneur, et comme la DGSE n’a rien à refuser auMossad, on a envoyé se faire voir ailleurs les sixgardes du corps. Ou, autre hypothèse, le Mossad n’yest "pour rien", et Audran a directement été liquidépar la DGSE, la DPSD ou un autre servicegouvernemental français. À l’époque de l’assassinat,le Premier Ministre de la France n’était autre que letrès sioniste Laurent Fabiusida…

Ensuite, une fois l’obstacle supprimé, cet attentatfut porté au crédit d’Action Directe! Ainsi, pourl’opinion publique, l’affaire était claire: c’est Action

Directe qui a exécuté Audran! Puisque les média l’ontaffirmé, c’est forcément la vérité vraie…

Si ce général était un bien trop gros gibier pourAction Directe, Georges Besse, abattu le 17novembre 1986, semble, lui, avoir été à la portée dugroupe. Mais c’est bien plus complexe!

En effet, après l’assassinat de Besse, aussitôt,avant même la prétendue revendication, les médiaont tartiné (tant et plus pour faire diversion!) sur le«  PDG de Renault lâchement assassiné » par lestueurs et tueuses d’AD… Or, il semblerait que ce soitplus le Georges Besse administrateur d’Eurodif(encore un contentieux avec l’Iran, hasard...) qui aitété abattu, que le Georges Besse PDG de Renault…Et c’est loin d’être acquis que ce soit AD qui aitabattu Besse!

Comme quoi, dans le milieu des années 80,époque où la France avait des otages au Liban(notamment à partir de 1986, où le gouvernementChirac voulait à tout prix résoudre le contentieuxEurodif pour aider à faire libérer ces "journalistes"), ilne faisait pas bon s’opposer à l’Iran! Ce dernier pays,je le rappelle, accessoirement soutenu par Israëldans sa guerre contre l’Irak.

À cette époque, des Fatwas (pas vraimentlancées par les Iraniens...) s’abattaient contre tousceux qui posaient un problème dans les relationsentre la France et l’Iran: l’allié de circonstance desIsraéliens!

C’en est d’autant plus vrai, que quelquessemaines après l’assassinat de Besse, ce fut au tourde Michel Baroin, PDG de la GMF! Baroin était, luiaussi tout comme Besse, un administrateur posantun problème dans le règlement du contentieuxEurodif! L’avion de Baroin s’est écrasé, sansexplication, sur le Mont-Cameroun. Pas de chance!

Pour cet "accident" africain de Baroin, commec’était un "accident", on n’a pas eu besoin d’imputerça aux quatre de la branche internationale d’ActionDirecte qui pourtant servait à ça et uniquement à ça!

Car la branche internationale d’AD, c’est bien ça:un groupe monté de toutes pièces par le pouvoirpolitique afin de donner des explications"rationnelles" à certaines morts survenues dans lesannées 80.

Par exemple, sans Action Directe, comment onaurait bien pu expliquer, à l’opinion publique,l’assassinat d’Audran? On n’aurait, quand même, pasosé dire qu’il s’était suicidé? Bien que ce fut laversion servie au bon peuple afin d’expliquer, en1983, la mort du colonel Nut (de la DGSE!) retrouvédans la neige, sur le bord de la route, dans les Alpes.En 1983 la branche internationale d’AD n’était pasencore médiatiquement opérationnelle, sinon il ne faitaucun doute que le colonel Nut aurait été, comme legénéral Audran, abattu par les quatre d’AD! Dumoins: officiellement!

Je sais d’autant plus à quoi m’en tenir sur labranche internationale d’AD que je côtoie GeorgesCipriani, "l’idéologue" des quatre, l’intellectuel du lot,arrêté à Vitry-aux-Loges en février 1987. Noussommes détenus dans la même centrale et noussommes voisins de cellule. Si lui c’est l’intellectuel des

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quatre, au secours pour les autres! Ça, capable demettre sur pied une opération visant à abattre ungénéral du calibre d’Audran? Non mais c’est à mourirde rire! Entre "l’image médiatique" de la brancheinternationale d’AD et "l’image réelle" que j’ai sous lesyeux (et dans le nez, avec les odeurs, vu qu’il trouveque les douches c’est, sans doute, capitalistes-bourgeois), il y a une différence énorme! Il n’aaucune culture militante, ce n’est pas un militantrévolutionnaire (il lit uniquement Le Monde, c’est direles lectures de révolutionnaire...). C’est le parfait"déclassé" à qui l'on pourrait faire endosser n’importequoi. Ce qui a d’ailleurs été fait…

La branche dite internationale d’AD ne doit pasêtre confondue avec la branche dite lyonnaise d’ADqui, elle, était composée de militants révolutionnaires.Des combattants respectables puisque tousantisionistes7. Ce qui explique, évidemment, qu’ilsaient tous été arrêtés très vite (hormis Maxime Frérotqu’ils ont raté), car en France, tout de même, on neplaisante pas avec l’antisionisme! Frérot, l’antijuif,finalement arrêté en novembre 1987, était traqué, lesordres étaient de le tirer à vue ! Il vivait comme unclochard dans des caves, pendant que ceux de labranche internationale pouvaient rouler,tranquillement, dans le Loiret au volant d’une voiturebelge signalée volée (plaques non maquillées!), touten louant (fort cher!) une ferme sans donner l’illusionde travailler… Mais du moment que ces quatre-làrendaient des "petits services" en endossant desattentats commis par d’autres, il n’y avait pas deproblème: une bonne étoile (à six branches!) veillaitsur eux…

C’est donc dans cette ambiance d’attentatsgouvernementaux imputés à d’autres, que j’ai faitdéfection et cassé la baraque à la DPSD concernantdiverses affaires. Si j’ignore ce que j’ai fait échouer,en revanche je sais qu’en cassant la baraque à laDPSD, en les trahissant, je m’en suis fait desennemis jurés, et ma condamnation, c’est eux quisont derrière. J’en suis persuadé! À partir denovembre 1986 ils m’ont "suivi" et ils savaient trèsbien ce que je faisais! Ils m’ont même facilité leschoses pour que j’en fasse le plus possible afin queje sois condamné au maximum.

Nous verrons aussi, au prochain chapitre que,dans un premier temps, ils ont peut-être retenul'option "liquidation" plutôt que condamnation aprèsutilisation. Mais cela a échoué.

14. DURANT L'ARMÉE, CONTACTS RÉGULIERSAVEC ARCINI

Durant toute cette période militaire, je n’ai jamaisperdu le contact avec Arcini. À partir d’avril 1985,date de mon départ pour l’armée, je l’ai moins vuforcément puisque j’étais à Pau, lui à Caen (ou endéplacement selon les besoins).

Mais en 1986 on se voyait très souvent puisque àpartir de fin janvier 1986 j’ai pris 5 semaines de

7 Ce qui contraste avec l’idéologue des quatre de la branche internationalearrêtés à Vitry-aux-Loges! Car, durant un temps, il avait décoré sa celluleavec des Étoiles de David! Tiens, tiens…

permissions, j’avais un reste de congés à prendre de1985. Ensuite à compter d’avril 1986 avec mon"officialisation" à la DPSD, j’étais plus souvent enNormandie qu’à Pau. Par exemple long séjour enavril, mai, juin et juillet. En août j’ai été en vacancesdurant tout le mois et donc en Normandie. Enseptembre j’y suis revenu en mission pour la DPSDau moins pendant un total de trois semaines. Puis enoctobre mission à Cherbourg plus congés. Autantdire que j’ai été, au total, quasiment 3 semaines sur 4en Normandie à partir d’avril 1986, naviguant sanscesse sur les routes avec mon véhicule.

Pour donner une idée de cela: la voiture (civile)neuve que j’ai eue fin avril 1986 et qui me servaitdans tous mes déplacements (aussi bienprofessionnels que personnels, car je les faisais seconfondre…) ) avait au compteur, en janvier 1987,plus de 60.000 kilomètres. Ce qui donne une idée dema "sédentarisation" comme secrétaire-comptableaux Services Techniques du 5ème RHC basé à Pau.

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Chapitre 3

UNE LIBERTÉ TRÈS SURVEILLÉE

1. MA VOITURE QUI PREND FEU

J'ai indiqué plus haut, à la fin de la section 13 duprécédent chapitre, qu'il semble bien que j'aie faitl'objet d'une tentative de liquidation…

Après ma défection de la DPSD, dans la périodequi a suivi, j'ai fait le tour de France des groupes plusou moins clandestins afin de leur livrer desinformations sur la DPSD qui les surveillait. C'est ainsiqu'en novembre 1986, j'étais "en livraison" chez lesautonomistes bretons. Ils m'ont gardé quelques jourscar nous avions sympathisé.

C'est au cours de ce séjour, alors que j'étais encompagnie de quelques activistes bretons, que j'aiété invité à rendre visite à "quelqu'un". Nous avonspassé la soirée chez ce "quelqu'un", et au retour jeme suis arrêté dans une station assez importantepour y faire le plein de carburant. Au moment derepartir le pompiste s'est mis à hurler dans les haut-parleurs de la station que j'avais le feu sous mavoiture. J'ai coupé le contact, du moins tenté, carj'avais la clé en main, mais mon démarreur tournaittoujours (phénomène plutôt étrange!). Il sortaiteffectivement des longues flammes de sous lemoteur, et même de sous le châssis du véhicule. J'aidéclenché l'ouverture du capot et avec un petitextincteur que j'avais à bord, j'ai éteint le sinistre.

Le démarreur a cessé de lui-même de tousser. Lavoiture n'a pas brûlé, il n'y eut aucun dégât, lesflammes n'ont fait que "lécher".

Cependant, je fus quelque peu intrigué par lataille des flammes! Rien, aucun combustible situésous le moteur et/ou le châssis, ne pouvait alimenterun tel foyer!

Nous avons remis le contact du véhicule, maissans actionner le démarreur, poussé la voiture et ellea démarré. Nous sommes allés chez un garagiste(nationaliste breton) ami de mes passagers, et j'y aipassé la nuit (l'incendie est arrivé vers les 22/23heures).

Le lendemain ce professionnel a examiné cedémarreur, car le véhicule n'avait que 7 mois, celasemblait quand même étrange qu'il se soit bloquéainsi et ait continué à tourner alors que le contactélectrique était coupé (j'en suis certain, puisquej'avais la clé dans les mains). Après examen duditdémarreur, et du dessous du véhicule, nous avonsrécupéré une sorte de "pâte résineuse" quis'enflammait lorsque l'on y mettait le feu (nous avonstesté!), et qui ne laissait aucune trace aprèscombustion. Étonnant! S'agissait-i l d'un plastic trèsspécial qui aurait été défectueux, ou mal amorcé, cequi l'a fait flamber/fondre au lieu dedétonner/exploser? Il faut savoir que le plastic, si onle met dans le feu, fond comme de la pâte (celan'explose pas). Pour faire exploser du plastic, il fautun détonateur. Il se peut fort bien qu'il y en avait un

enfoncé dans cette "résine", mais qu'il y ait eudéfaillance.

Toujours est-il que le garagiste a examiné le circuitélectrique de mon véhicule, et tout était en ordre.Donc comment se fait-il que le démarreur ait continuéà tousser alors que j'avais coupé le contact puisquej'avais la clé en main? La seule solution entrevue parce mécanicien, c'est que l'on avait couplé quelquechose au démarreur, lui procurant une alimentationqui ne passait pas par le coupe-circuit géré par la cléde contact. Mais ce quelque chose de mystérieux,nous ne l'avons pas trouvé. Il a pu être ôté(récupéré!) durant la nuit: pendant que je dormaischez le garagiste, puisque ce n'est qu'au matin quenous avons examiné le véhicule. Il peut aussi s'agird'un moyen de mise à feu qui s'est consumé commecette pâte qui ne laissait aucune trace aprèscombustion. Difficile de dire ce qu'il en a été puisquenous n'avons récupéré que cette pâte résineuse.

Quoi qu'il en soit, ce dépanneur, avec ses 30 ansde métier dans la mécanique, m'a assuré que ce quis'était déroulé était électriquement impossible sanssabotage. La meilleure preuve qu'il m'a fournie, c'estque nous sommes allés chez un ferrailleur pour yacheter un démarreur de remplacement, il l'a monté àla place de l'autre, connecté les prises d'alimentation,et sans faire la moindre intervention sur le systèmeélectrique du véhicule: tout a fonctionnénormalement.

Personnellement, tout me porte à croire (mais jeme fais peut-être des idées...) que l'on a voulu mefaire sauter dans ma voiture. Cependant, ceux quiont réalisé l'opération ont subi une défaillance de leursystème de mise à feu. Il semble que cela aurait dûexploser lorsque j'ai démarré après avoir passé lasoirée chez "quelqu'un". Or cela n'a pas fonctionné,ce n'est que plus loin, lorsque je me suis arrêté à lastation-service, qu'au moment de repartir cela a faitlong feu en prenant feu justement...

Une chance en tout cas que mon véhicule étaitun diesel! Le gazole ne s'enflamme pas facilement!Si cela avait été une automobile essence, celaauraient remonté les durits jusqu'au réservoir et toutsautait. J'explosais dans ce véhicule en compagniede mes passagers. Et, bien sûr, la version officielleaurait été la suivante: « Lajoye s'apprêtait àcommettre un attentat en compagnie de membres duFLB, et ils ont explosé avec leur propre bombe qu'ilsmanipulaient » (ainsi la DPSD aurait réglé le"problème Lajoye" et faisait un joli coup en éliminant,par la même occasion, des nationalistes bretons...).

C'est une version de ce genre que l'on a servie enaoût 1986 après que Claude Noblia, ainsi que troisde ses compagnons, aient été tués à Toulon dansl'explosion de leur véhicule.

Noblia, ex-militaire de carrière, comme certains deses passagers, était l'animateur de SOS France. Il fut

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Mémoire de Michel Lajoye page 21

accusé d'avoir perpétré des "attentats racistes". Enseptembre 1986, moins d'un mois après la mort deNoblia, j'avais lu le rapport DPSD sur cette affaire,cela m'avait intrigué, ce n'était pas clair. J'en ai parléà Arcini qui, comme tous les artificiers-démineurs duMinistère de l'Intérieur, avait reçu un rapport sur lesujet. Il m'a affirmé (et tout me porte à le croire) quela voiture de Noblia a explosé dans le sens extérieurvers l'intérieur, c'est-à-dire qu'il n'a pas explosé àcause d'une bombe embarquée, mais à cause d'unengin placé sous le châssis de la voiture et qui aprovoqué l'explosion/embrassement de cettedernière.

Par ailleurs, toutes les actions reprochées àNoblia et ses acolytes avaient été perpétrées avecdes systèmes de mise à feu pyrotechnique (àmèche), et la version officielle dit que Noblia aexplosé avec une bombe à système électrique. Doncpas le type d'engin utilisé d'ordinaire par les membresde SOS France.

Pour finir, il est bon de savoir que Noblia et sesamis sortaient d'une réunion amico-familiale et qu'ilsétaient en chemisette, short et sandales! Pasvraiment la tenue pour aller déposer des bombes, quiplus est avec sa voiture personnelle (car Nobliaexplosé dans son véhicule personnel)8.

Quoi qu'il en soit, considérons dans mon casqu'en novembre 1986 la DPSD a voulu me liquider,mais cela a échoué. Difficile pour eux de remettrecela une seconde fois, car il y a des témoins de lapremière tentative (les nationalistes bretons quiétaient à mon bord, plus le gérant de la station-service, plus le garagiste qui a remis le véhicule enétat, ainsi que quelques autres personnes...). LaDPSD ignore si j'ai gardé (ou plus exactement faitgarder) un échantillon de la fameuse "pâte/résine"qui disparaissait une fois consumée. Dès lors, s'ilsavaient remis cela avec plus de succès, la DPSDprenait le risque que des gens exhibent unéchantillon de cette pâte non consumée etrécupérée après la première tentative de me faireexploser...

2. UNE "VOITURE PIÉGÉE" QUI DISPARAÎT

En décembre 1986, soit un mois après que monautomobile ait pris feu, j’avais réalisé un exercice depiégeage de véhicule dans le cadre de mes "petitsentraînements".

Près de Saint-Lô il y avait un dépôt d’uneancienne entreprise de transport fermée depuis pasmal de temps, et c’était dans un coin désert. Il y avaitdéjà longtemps que les bâtiments avaient été rasés,mais il restait des épaves de deux camions et dedeux voitures. Les carcasses de ces dernièresétaient sur cales, il n’y avait plus les roues, mais le 8 Pour ceux qui veulent en savoir un peu plus sur cette "Affaire Noblia", jeleur recommande la lecture du numéro 93 (avril 2000) de la revueRévision qui contient une étude intitulée « Terrorisme Made in France ».Elle consacre une large place à mon affaire, mais celle de Noblia y esttraitée plus longuement que je ne peux le faire ici (j'écris un mémoire surmon affaire, pas sur celle de Noblia…). Ceux que cela intéresse peuventse procurer le numéro 93 de Révision en écrivant à la revue située au 11rue d'Alembert * F – 92130 Issy-les-Moulineaux. 35 FRF franco de port,règlement à l'ordre d'Alain Guionnet.

reste y était: portières, vitres, etc. C’était justement cequ’il me fallait pour mes "travaux pratiques".

Alors en décembre 1986 (au début du mois), j’aifait mon montage sur une des voitures-épaves dontles portières fonctionnaient parfaitement. L’exerciceconsistait non pas à faire s’envoler des morceauxd’automobile à 300 mètres, mais à faire se déformerle châssis de la voiture en des points précis afin quel’on ne puisse plus ouvrir les portières à cause de ladéformation structurelle. Evidemment, une chargeauxiliaire faisait s’embrasser le véhicule grâce à sonréservoir.

C’est vraiment du "piégeage scientifique", aucunechance d’en réchapper. C’est à ceci que l’on voitqu’ils apprennent de bonnes choses dans les écolesd’artificiers-démineurs du Ministère de l’Intérieur, là oùArcini avait appris cela, puisque c’est lui qui m’aenseigné l’art de piéger de la sorte les véhicules.

Une fois terminé mon rapide montage sur le"véhicule-test", j’ai mis à feu, et cela s’est déroulécomme prévu avec un résultat concluant: impossibled’ouvrir les portières.

Si j’étais suivi par un service comme la DPSD, ouune autre officine de police politique, et qu’ils étaientplanqués aux alentours avec des jumelles, ils m’ontvu faire mon petit manège. Et je pense réellementqu’ils étaient dans le coin.

Ce qui me fait penser cela, c’est que moins d’unesemaine plus tard je suis revenu à cet endroit, carj’avais prévu de revenir pour récupérer diverseschoses sur un des véhicules. Et à mon retour sur leslieux, surprise: l’épave que j’avais piégée n’y étaitplus! Elle avait disparu!

Sur le coup, j’ai pensé à un ferrailleur qui auraitembarqué la voiture. Mais c’est illogique, pourquoi ilaurait pris la carcasse brûlée (donc inutilisable pourlui) alors qu’à côté il y avait une autre épave en "bon"état?

Finalement, à bien y réfléchir, je ne vois qu’unesolution: les RG (ou la DPSD) me surveillaient, etvoyant mon petit manège, ils sont venus, dès que jesuis parti, pour faire embarquer l’épave de la voiturepour aller examiner chez eux ce que j’avais faitdessus. Et surtout analyser ce que j’avais utilisécomme explosif. Cela ne peut être que ça. Qui auraitpu venir enlever cette carcasse calcinée sinon eux?

Dans les jours suivants, je suis repassé pour voirs’il avait été ôté les autres épaves, et rien du tout,elles étaient toujours là. Idem vers le 20 janvier 1987.Cela faisait plus d’un mois que j’avais piégé une deces carcasses et il ne manquait que celle que j’avaisutilisée.

Ce qui veut dire qu’en décembre 1986 on m’avaitretrouvé, on me surveillait, et l'on savait de façoncertaine que je "jouais" avec des explosifs. On devaitdéjà le savoir depuis longtemps puisque cela faisaitdepuis 1984 (depuis que je côtoyais Arcini) querégulièrement je m’adonnais à ce genre de "travauxpratiques".

Je n’ai jamais entendu parler de cette affaire, maisc’est logique! Car, pour eux , en parler cela aurait étéavouer qu’ils savaient tout depuis des mois et mêmepeut-être depuis 1984. Dans un procès, si cela avait

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Mémoire de Michel Lajoye page 22

été révélé qu’ils savaient tout depuis bien longtemps,un avocat aurait pu demander: « Pourquoi vous nel’avez pas arrêté avant? Pourquoi l’avoir laissé posersa bombe? » Réponse: « Pour le faire condamner aumaximum, évidemment! ».

Car il n’y a pas que cette mystérieuse disparitiond’une voiture piégée. J’avais remarqué des détailstroublants sur les lieux où j’avais coutume d’allerm’entraîner au tir. Sur le coup je n’avais pas prêtéattention, mais, avec le recul, j’ai compris que lorsquej’avais le dos tourné des "fouineurs" venaient, sansaucun doute, voir si je n’avais pas égaré des douilleséjectées, ou s’il y avait moyen de récupérer des

ogives de balles logées dans ce qui m’avait servi decible pour envoyer cela à la balistique.

Même si je n’ai jamais remarqué être suivi, ayantété de la DPSD, je sais que les émetteurs que l’ondissimule dans le véhicule de quelqu’un que l’on veutsuivre, c’était très courant en 1986. Il n’y avait plusqu’au cinéma que, pour les filatures, on "collait aucul" de la personne suivie. Par conséquent il suffisaità la DPSD de placer un émetteur dans mon véhiculepour le suivre soit en procédure GPS (Guidage ParSatellite qui indique la position du "bip") ; soit enprocédure Radar moins performante, mais assezefficace pour localiser la "cible" à quelques centainesde mètres près.

Chapitre 4

MA PREMIÈRE INCARCÉRATION (janvier 1987)

1. L'ARRESTATION

e 25 janvier 1987, au matin, j’ai été arrêté dansle département de la Manche par lagendarmerie alors que je me trouvais au volant

d’une voiture (la mienne) contenant des armes.En plus j’étais recherché pour désertion (c’était

d’ailleurs cela le motif d’arrestation).La voiture qui contenait les armes était une Seat

Ronda (l’équivalent espagnol de la Fiat Ritmo) dieselde couleur bleu azur immatriculée 9597 SM 64 (j’étaisdomicilié dans les Pyrénées-Atlantiques).

Au niveau armement, il y avait ce qu’il fallait: celaallait du fusil de guerre à la grenade9. Il y avait aussides minuteries (réveils bricolés en système de mise àfeu), sans oublier divers documents (j’y reviendraiplus loin).

Il y avait également des moyens radios: talkies-walkies.

Divers éléments me font penser que cettearrestation n’a pas enchanté la DPSD, c’était trop tôt!Je n’avais encore rien commis qui pouvait me valoirun passage en Cour d’Assises.

Mon arrestation fut un hasard d’après ce que j’aicru comprendre. Sur cette route 4 gendarmesopéraient des contrôles de routine. Je pensaisd’ailleurs le passer sans problème exactementcomme j’en avais passé beaucoup d’autres. Ce quiexplique que je sois sorti de mon véhiculenormalement. Mais comme le monde est petit, l’undes gendarmes était originaire du même village quemoi, et… me connaissait!

Très vite ces gendarmes ruraux10 ont appelé les"chefs" en découvrant que cette arrestation pourdésertion levait une autre affaire eu égard aucontenu de mon véhicule…

Un capitaine est venu spécialement de Caen, uncommandant est arrivé de Saint-Lô, et il fut envoyé

9 Pour l’anecdote: c’est le "Contrôleur" Arcini qui, dans le cadre de sontravail de démineur, s’occupera de désactiver cette grenade. Lagendarmerie la lui fera porter…10 De la brigade de Saint-Clair-sur-Elle, dans le département de laManche.

(par hélicoptère, c’était urgent!) deux "spécialistes ès-extrême-droite"! Notamment un major qui s’yconnaissait bien en "milieux néonazis": il connaissaittout le monde, ou presque! J’ignore d’où venait cemajor, mais il parlait des "activistes connus" en lesdésignant paternellement par leurs prénoms…Vraiment le brave papy qui veillait sur ses petits-enfants extrémistes… avant de les envoyer en tôle!

Il est aussi venu deux fonctionnaires desRenseignements Généraux, mais la gendarmerieétait jalouse (ou avait-elle plutôt des consignes de laDPSD pour limiter les dégâts?), elle voulait me garderrien que pour elle! Le capitaine a même dit (devantmoi) au commandant qu’il fallait éviter que les RGdébarquent car après la gendarmerie risquait de setrouver dessaisie et ils voulaient garder cette affairepour eux (pour la minimiser?). Et, effectivement, toutle week-end la gendarmerie m’a gardé rien que pourelle, puisque ce n’est seulement que le lundi, entoute fin d’après-midi, juste avant de me présenter auParquet, que le duo des RG a pu me voir trèsbrièvement. Et encore: sans pouvoir m’interrogerofficiellement, puisqu’il n’y a pas eu de procès-verbal.

2. LE PROCÈS "ARRANGÉ" DE COUTANCES(4 août 1987)

Suite à mon arrestation, j’ai été placé, le 26janvier 1987, en détention provisoire à la Maisond’arrêt de Coutances (département de la Manche). Etcela sous l’inculpation de détention d’armes. Jedevais y attendre le procès.

Ce dernier a eu lieu au Tribunal correctionnel deCoutances le 4 août 1987. J’y ai été condamné à 2ans, dont un avec sursis, ce qui faisait qu’avec lesremises de peine automatiques, j’en avais pris pour 9mois pleins. De fait, compte tenu de la préventive:libération pour le 26 octobre 1987.

C’était un verdict bizarre, je pensais prendre plus.Car quand même, la voiture contenait beaucoupd’armes: des armes de guerre notamment dont ilsn’ont pas pu établir la provenance puisque je ne l’aipas donnée ou plutôt si: « J’ai acheté ces armes àun type que s’appelle José [variante de Momo], un

L

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petit au teint mat, je l’ai rencontré dans un bar àPau… » Le pire c’est qu’ils m’ont cru, ou du moins ilsont fait semblant de me croire, parce que cela lesarrangeait.

De plus, il y avait des minuteries de bombes danscette voiture!

Alors avec 9 mois de prison, je m’en tirais bien:trop bien pour que cela soit honnête!

3. UN PROJET D'ATTENTAT

Mais je m’en tirais d’autant mieux qu’il n’y avaitpas que les armes et ces minuteries!

En effet, dans le véhicule, il avait été découvertdes documents: un repérage complet, démontrantqu’une action était en préparation. Dans cesdocuments, la cible était désignée sous la lettre B,donc non désignée clairement, et impossible pour unnon initié de savoir ce dont il s’agissait. Ladocumentation retrouvée était le "plan à suivre".C’était de la logistique pure, un passage en revue detout le matériel nécessaire à l’opération (et le matérielétait dans la voiture!). Il était mentionné la conduite àtenir de chacun durant l’opération. Il y avait desconsignes pour chacun des deux opérants (l’autrec’était Arcini, hasard...).

Ces documents étaient au dossier jugé àCoutances, mais je n’ai pas été interrogéparticulièrement sur eux durant l’instruction. J’ai justerépondu que ce n’était pas des documents sérieux,et finalement je n’en ai pas entendu beaucoupparler. Ils se contentaient, un peu trop facilement, dema version disant que c’était une sorte de scénario…

En réalité, seule mon arrestation en janvier 1987a fait annuler "l’opération" qui devait avoir lieu dansles jours suivants. Car pour passer à l’action, il fallaitune amélioration météo, il y avait eu pas mal deneige début 1987 en Normandie et cela rendaitl’opération délicate.

Le fait que durant l’instruction, puis lors du procès,il n’ait pas été fait une fixation sur ces documents estpour le moins étonnant. Car quand même, c’étaitévident qu’ils avaient une grande importance. Malgrécela, au procès, pas un mot et résultat: 9 moiseffectifs de prison en comptant les remises de peine!

Soit les juges étaient sympathisants, ce que jen’ose évidemment pas penser11 ; soit ils avaient desconsignes d’y aller doucement pour que je sois vitede nouveau libre de commettre quelque chose deplus intéressant pour la DPSD…

Le procès de Coutances a eu lieu en août 1987,soit juste 2 mois après un attentat commis à Caenpar Christophe Arcini (j’aborderai cet attentat auchapitre 5). Territorialement, le Parquet de Coutancesdépend de la Cour d’appel de Caen, et, lors de monprocès, même un juge très bête aurait dû sedemander s’il n’y aura pas un lien…

11 Pour information: le Tribunal était présidé par une femme, une certaineMatho. C’est cette même personne qui en 1996 présidait le Tribunal deCaen qui a condamné sévèrement le révisionniste Vincent Reynouard.Lors d’audiences précédentes, elle avait eu la main lourde contre desnationalistes. Cette Matho est une hystérique envers tout ce qui estnationaliste et/ou révisionniste, ce qui n’en rend que plus étonnant qu’en1987 elle ait été aussi "arrangeante" avec moi…

Je pense réellement qu’à Coutances, le 4 août1987, on ne m’a fait condamner que légèrement pourme faire sortir très rapidement de prison afin que jepasse à l’action le plus vite possible. J’évoquerai auchapitre 5 section 14, la visite à la prison d’uninspecteur. C’était peu après l’attentat de Caencommis par Arcini en juin 1987 et il venait voir où j’enétais…

J’ai donc été libéré le 26 octobre 1987, et de laMaison d’arrêt de Caen, car 3 semaines avant malibération, j’avais été transféré de Coutances à Caen.À croire que "certains" voulaient que je sorte de tauleà Caen: cela leur éviterait le déplacement jusqu’àCoutances pour me prendre en filature à ma sortie…

Lorsque j’ai consulté le dossier du procèsd’Assises jugé à Caen en juin 1990, j’ai pu constaterque le dossier de l’affaire jugée à Coutances en août1987, était bel et bien joint au dossier des attentatsArcini/Lajoye. Mais cette affaire jugée à Coutancesn’a pas été détaillée lors du procès de Caen! Ce quise comprend, car s’il avait été détaillé cette affairejugée à Coutances, des gens auraient pu s’étonnerqu’un type arrêté au volant d’une voiture bourréed’armes (et il fallait voir l’armement!), contenantautant de munitions, équipé de puissants moyensradios, renfermant surtout des documentsdémontrant qu’une action était imminente, n’aiteffectué que 9 mois de prison et que l’on n’ait pas,officiellement, cherché à en savoir plus!

4. VISITE D'UN COLONEL EN PRISON ETDÉMISSION DE L'ARMÉE

Lorsque j’ai été incarcéré en janvier 1987, j’étaisencore "militaire sous contrat". Celui-ci n’ayant pasété cassé après ma désertion, ce qui démontre quel’armée m’aimait bien et était prête à me pardonnerma "petite escapade"… Ce contrat fut cassé aprèsque j’ai signé une démission officielle , car c’est moiqui ai quitté l’armée et non eux qui m’ont radié descadres! J’ai démissionné en mai 1987, soit avant leprocès de Coutances.

L’armée souhaitait, apparemment, que j’aiedémissionné avant mon passage au Tribunalcorrectionnel pour août 1987, mais ce n’était pas unpréalable, je pouvais refuser m’a-t-on dit.

Celui qui m’a affirmé cela est un militaire venu mevisiter, il s’agissait d’un colonel, qui, hasard, était dela DPSD (mais j’ignore de quelle Antenne et sonidentité)! Nous avons évoqué "l’affaire", puis il a sortiune lettre de démission que je n’avais plus qu’àsigner si je souhaitais en rester là (officiellement) avecl’armée.

C’était une lettre adressée à un général deBordeaux12 (dont j’ai malheureusement oublié le nom)et ce document manuscrit, officiellement écrit par moi(mais que je n’ai fait que signer), demandait que moncontrat soit cassé "pour raisons personnelles". Il l’a

12 Ce qui confirme que je ne faisais guère partie du 5ème Régimentd’Hélicoptères de Combat de Pau, lieu où, officiellement, j’étais affecté.En effet, cette unité dépendait à l’époque de la 4ème Division Aéromobileavec son état-major basé à Nancy, pas à Bordeaux! Donc "mon" généralaurait du être à Nancy! Or, pour démissionner, il a fallu que je signe unelettre adressée à "mon" général qui se trouvait à Bordeaux…

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été à compter de la date de la lettre que j’aiparaphée, puisque tout était prévu d’avance. C’est le23 mai 1987 que je suis redevenu civil.

Accessoirement, mais c’est intéressant, j’ai pu voiren 1987, dans mes états de service, que je suisdéclaré militaire du 3 avril 1985 au 23 mai 1987, maisavec "interruption de service actif" des premiers joursde novembre 1986 au 25 janvier 1987 (ma désertionde la DPSD). Mon contrat a par conséquent étésuspendu dès que mon absence a été constatée, etil a été "réactivé" le jour de mon arrestation par lagendarmerie. Ce qui veut dire que mes moisd’incarcération ont compté comme service actif à partentière dans l’armée! Et, ce qui est incroyable, c’estque durant mon incarcération où j’étais considérécomme militaire, qui plus est en activité, j’ai touchésur mon compte bancaire un virement de soldeexactement comme si j’avais été réellement enservice actif! Et ce ne fut pas une erreur!

Dans mes états de service, du moins tels qu’ilsétaient rédigés fin 1987 (maintenant cela a peut-êtreété modifié...) le mot "désertion" n’apparaît pas,simplement une "interruption de service actif" entrenovembre 1986 et janvier 1987. Et les raisons decette "interruption" n’étant pas indiquées, celapourrait être médical par exemple, ou une "mise en

disponibilité" faite à ma demande. C’est quand mêmeétonnant que dans mon dossier militaire la désertionn’apparaisse pas officiellement, et soit simplementremplacée par une formule neutre…

Quant à une condamnation pour cette désertion,on peut toujours fouiner pour tenter de la trouver!Rien de tel n’apparaît dans mon casier judiciaire!

En juin 1990, lors du procès aux Assises, unpsychiatre mandaté par la "justice" pour examiner lesujet, est venu à la barre faire son compte rendu.Comme nous avions discuté de choses et d’autres, jelui avais parlé de cette désertion (je ne m’en suisjamais caché), et cela avait été inclus dans le rapportd’expertise psychiatrique, puis évoqué à la barre parle médecin… Aussitôt le président de la Cour l’ainterrompu pour indiquer: « Mais Lajoye n’a pasdéserté! ». C’était clair, je n’ai pas déserté, on neveut pas en entendre parler! Ce qui se comprend, carsi l’on évoquait cette désertion, une questiondevenait inévitable: « Pourquoi avez-vous désertéalors que vous étiez militaire engagé? ». Cettequestion aurait dû alors m’être posée! Et,évidemment, on n’avait pas envie que je commenceà parler de la DPSD, du commandant Février quim’avait proposé la mission sur les GAL, etc, etc…

Chapitre 5

LES ATTENTATS COMMIS PAR ARCINI (1987)

1. RAPPEL DE MA SITUATION À L'ÉPOQUE DECES ATTENTATS

e rappelle brièvement ma situation pénale del’époque. Comme précisé au chapitre précédent4, « Ma première incarcération ». J’ai été

emprisonné du 26 janvier 1987 au 26 octobre 1987.Donc lorsque Christophe Arcini, officiellementfonctionnaire du Ministère de l’Intérieur (il est bondurant ce récit de toujours garder à l’esprit qui étaitson employeur off iciel !), a commis ses attentats enNormandie, j’étais en prison. Ceci à son importancepuisque cela exclut totalement ma participation!

2. LE PREMIER ATTENTAT (6 mars 1987)

Le premier attentat connu officiellement (car il y ena peut-être eu d’autres avant, j’y viendrai plus loin...)commis par Arcini a eu lieu le 6 mars 1987, en soirée,de nuit. Cela visait un bar arabe, L’Epoque, à Petit-Quevilly, près de Rouen. Arcini a tiré avec un pistoletLüger P08 à travers les vitres.

Il y a eu un blessé léger, un certain MohamedBedani, qui sera partie civile au procès qui suivra.

Cet attentat n’a eu aucun impact médiatique, carle soir même un car-ferry coulait à Zeebrugge et celafaisait la une de la propagande. Mais même s’il n’yavait pas eu ce navire qui a coulé, je ne pense pasque cela aurait fait beaucoup de mousse ces ballestirées contre un bar.

J’ignore les raisons précises de cet attentat, celan’a pas été détaillé plus que ça lors du procès qui asuivi.

3. LE SECOND ATTENTAT (5 juin 1987)

Le second attentat fut un délire médiatique, laraison en est qu’Edouard Balladur, alors Ministre del’Economie du gouvernement Chirac, effectuait unevisite officielle en Normandie et il traînait derrière luides nuées de journalistes qui ont pu faire desreportages.

Le 5 juin Arcini avait décidé (ou plusvraisemblablement, on lui a "suggéré"!) d’abattre lepropriétaire de l’épicerie Aux épices de l’Atlas àCaen. Cette personne, Rahmani Abdeslem Ben Ali,était (et est peut-être encore) surtout le responsablelocal de l’Amicale des Marocains en France.Autrement dit une organisation sensible, puisquecette "Amicale" marocaine, à l’image de celle desAlgériens en France, est là pour encadrer lacommunauté immigrée dans l’hexagone! Notamment"s’occuper" des opposants "exilés" chez nous et quicritiquent un peu trop le régime chérifien quel’Amicale représente…

D’après ce qui fut débattu lors du procès qui asuivi, vers les 10 heures 15, lorsque Arcini est entrédans l’épicerie du Marocain Rahmani, il s’y trouvaittrois personnes: l’une était l’employé, l’AlgérienAbdelkader Moussaoui (le futur mort) ; l’autre unclient, le Tunisien Mohamed Ayari (qui sera partie

J

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civile) ; et la dernière un représentant, un certain JoëlLeconte (qui sera témoin au procès).

Arcini a sorti un Lüger P08. D’après la versionoff icielle (mais peut-on la croire?), c’était la mêmearme que celle utilisée pour l’attentat du 6 marsprécédent à Petit-Quevilly. Une fois le pistolet enmain, il s’est adressé au représentant en lui disant:« Toi, le Blanc, casse-toi », ce qu’il a fait… EnsuiteArcini se serait adressé à Moussaoui en luidemandant s’il était bien Rahmani. Et, comme l’araconté Arcini par la suite lors du procès, Moussaouin’aurait rien trouvé de mieux que de répondre« Oui », qu’il était bien Rahmani! Peut-être a-t-il malcompris? Moussaoui voulait peut-être dire à soninterlocuteur armé qu’il était effectivement dansl’épicerie de Rahmani…

Mais quoi qu’il en soit, Moussaoui a été abattuaussitôt puisque le tireur pensait (de bonne foi!) êtreen présence de Rahmani! Arcini aurait vu ce dernierentrer dans son épicerie, mais, au moment des faits,il se serait trouvé dans la réserve. C’est du moins cequi fut dit, au procès, y compris par le témoinRahmani, lorsqu’il fut débattu des circonstances decet attentat. Mais pour ce qui est du dossier officiel,ce dernier affirme, lui, que Rahmani était "absent del’établissement" lors de l’attentat. Je ne sais qui etque croire…

Il y avait (parait-il) une ressemblance physiqueentre Rahmani et Moussaoui. Cette épicerie n’étaitpas plus éclairée que ça, et comme le tueur portaitdes lunettes de soleil très foncées, cela ne luiauraient pas permis de bien discerner les traits duvisage de son interlocuteur! De plus, ce dernieraffirmant être Rahmani, il n’y avait pas à avoir dedoute! C’est du moins l’explication qu’Arcini adonnée, lors du procès, pour "justifier" sa méprise. Etje crois que c’est ce qui s’est déroulé! Moralité: quandune personne armée vous demande si vous êtesbien Untel, il faut répondre « Non »!

Avant de continuer le récit de ce crime, j’ouvreune parenthèse pour préciser que, pour ce qui est dunombre de coups de feu tirés, c’est fluctuant! Parexemple dans l’Arrêt de renvoi devant les Assises,c’est-à-dire l’Acte d’accusation, il est écrit (page 8)qu’Arcini a tiré 8 fois, autrement dit qu’il a vidé sonchargeur. Je vois mal le très professionnel Arcinicommettre une maladresse de ce genre. Car si l’undes présents avait sorti une arme (on ne saitjamais...), il aurait été fort dépourvu! Puis, plus loin,page 13 du même Arrêt, il est dit en parlant du tueur:« Lorsqu’il avait tiré 5 à 6 coups ».

Il faudrait savoir! L’assassin a tiré 8 fois en vidantson chargeur (ce qui m’étonnerait beaucoup!), ou 5 à6 fois?

Compte tenu qu’un Lüger c’est un pistolet, lesdouilles sont éjectées et retrouvées sur le sol. Il étaitdès lors aisé de savoir, précisément, combien decoups furent tirés. Cela ne fait quand même pas trèssérieux qu’une consultation du dossier officiel nepermette pas de savoir, précisément, combien il y eutde coups de feu!

Au procès, ils ont affirmé qu’il a été tiré à 5reprises. Alors devant l’incertitude, dans la suite de

ce récit, j’écrirai que le tueur a tiré "un certainnombre" de fois, et que les victimes ont encaissé "uncertain nombre" de balles… Car ce dernier point estaussi fluctuant d’un document à l’autre! Par exemple,dans l’Arrêt de renvoi, le nombre d’impacts surMoussaoui (le mort) est tantôt de 6, plus loin de 4,puis cela devient 5! La "justice" sait associer rigueuret précision dans un Acte d’accusation, cela se voit!

Quoi qu’il en soit de ces "fluctuations", après avoirtiré "un certain nombre" de coups de feu surMoussaoui pour le faire s’écrouler au sol, Arcini a tirésur Ayari, le client, qui s’agitait (paniquait...) et quisera donc blessé. Mais le tueur n’achèvera pas ausol Ayari comme il a achevé Moussaoui en lui tirant,en pleine tête, "un certain nombre" de ballesexpansives pour lui faire "exploser" le cerveau.

Le geste de mansuétude envers Ayari démontrebien qu’Arcini venait abattre une personne précise, etnon pas "casser de l’Arabe". Sinon Ayari aurait été,lui aussi, achevé au sol, c’est évident! Si, parhypothèse, le chargeur se trouvait vide, en unefraction de temps, le fonctionnaire du Ministère del’Intérieur pouvait en engager un nouveau pourachever ce client… Ce n’est pas un problèmematériel qui a fait que ce dernier fut épargné… Il y aforcément une autre raison!

Cela voudrait sans doute dire qu’Arcini avait eudes consignes très strictes pour ne tuer que lapersonne initialement visée! De ne surtout pasliquider l’autre Arabe présent! Car moi qui connaissaismon camarade, je peux dire que cet Ayari c’estvéritablement le miraculé! Pour qu’Arcini ait laisséderrière lui un témoin (Arabe de surcroît!), il fautvraiment qu'on lui ait dit de ne pas trucider l’autreMaghrébin!

Pour ma part je ne vois que des consignesparticulières pour expliquer cette différence detraitement qui fait que l’un a reçu `"un certainnombre" de balles (dont au moins une en pleinetête!) et l’autre juste "un certain nombre"(apparemment un seul projectile) dans le bras! Arcini,étant très bon tireur: s’il a atteint le bras, c’est qu’ilvisait le bras!

Reste à savoir pourquoi il ne fallait pas tuerl’autre! Dans cette épicerie, normalement, le meurtrieraurait dû avoir face à lui Rahmani (celui qui étaitvisé), et Moussaoui (l’employé abattu par erreur). Lepremier devait donc, visiblement , être abattu, alorsque le second devait, apparemment, être épargné.

C’est d’autant plus vrai et démontré, qu’Arcini atué Moussaoui car il l’a confondu avec Rahmani. Et,prenant Ayari pour Moussaoui, il a épargné celui-là.

Alors, comme le tireur s’est trompé et a abattucelui qu’il fallait, apparemment, épargner, je medemande si cette erreur n’explique pas ce qui vasuivre dans ce récit!

En effet, Arcini a-t-il commis une énorme gaffe? A-t-il abattu un "honorable correspondant" chargé desurveiller son patron? Rahmani étant le responsablelocal de l’Amicale des Marocains en France(organisation étrangère qui intéressait forcément desservices), il se pourrait que feu Moussaoui, sonemployé algérien, ait eu pour mission de le surveiller.

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Mémoire de Michel Lajoye page 26

C’est très fréquent dans le milieu du Renseignementde faire surveiller un patron, "accessoirement"responsable d’une association "sensible", par un deses employés et/ou associés…

Lorsque cette action fut commise, la pressealgérienne, notamment le quotidien El Moudjahid,organe proche des militaires, a publié des articleshystériques! Ce n'était quand même pas la premièrefois qu'un épicier algérien se faisait abattre enFrance. Mais il faut croire que pour celui-là, c'était uncas spécial puisque les média proches du pouvoirmilitaire hurlaient au scandale. Un de leurs agentsaurait été abattu lors d'une bavure commise par leurscollègues français, ils n'auraient pas hurlé plus!Quand on connaît les relations entre l'Algérie et leMaroc, il n'est pas du tout extravagant de penser quece Moussaoui travaillait pour la Sécurité Militairealgérienne (qui compte de nombreux agents opéranten France!) et que sa mission consistait à surveillerson ennemi, le Marocain Rahmani, responsable localde l'Amicale des Marocains en France.

Seulement, si c’est la bonne hypothèse, cela a dûchauffer pour le matricule d’Arcini s’il a descendu(même par erreur!) un "honorable correspondant"(voire un agent!) d’un service quelconque! Celapourrait expliquer pourquoi la "protection" dufonctionnaire n’a pas joué totalement ensuite…

Quoi qu’il en soit de tout cela, après avoir commisson crime, Arcini a abandonné un tract derevendication sur le sol de l’épicerie, et il l’a quittéepour rejoindre, à pied, une voiture se trouvant àquelques centaines de mètres.

Mais, durant sa fuite pédestre, il a été suivi pardeux hommes, l’un est Macedo Diamentino, l’autreest Godfroy Philippe (ils seront témoins au procès). Ilsont vu le tueur monter dans une voiture: une Simca1100 TI de couleur verte et l’ont suivi à bord d’une504.

Arcini, voyant qu’il était filé, a stoppé son véhicule,en est sorti, et a ouvert le feu "un certain nombre" defois sur ses suiveurs. Au moins une balle traverseraleur pare-brise. Les poursuivants prendront la fuitebien rapidement. Mais leurs témoignages permettrontde savoir que le "tueur raciste" s’est enfui dans uneSimca 1100 TI verte.

Comme aucun véhicule de ce modèle n’avait étésignalé volé: la police en concluait, forcément, quel’automobile utilisée ne pouvait être que la voiturepersonnelle du meurtrier préalablement munie defausses plaques d’immatriculation.

Partant de là, pour la police, cela devenait trèssimple (c’était même enfantin!) de retrouver l’auteurde cet attentat. Il suffisait de "visiter" tous lespropriétaires d’un véhicule de ce type…

4. ARCINI A UTILISÉ SA VOITUREPERSONNELLE

Dans cette action, ce qui semble vraimentincroyable, c’est qu’Arcini a bel et bien utilisé savoiture personnelle! Il s’était juste contenté d’enchanger les plaques d’immatriculation (2612 QJ 14au lieu de 2700 SN 14)! En plus son véhicule était un

"modèle rare", d’une couleur spéciale, un mélangeocre-bronze. C’était, en quelque sorte, avant la modeactuelle, une automobile dite de série limitée de parsa couleur.

Plus précisément, le dossier officiel affirme que lesenquêteurs, aussitôt après l’attentat, en ont concluque cette Simca 1100 TI était soit l’une de la série"Terre de Feu" fabriquée en 1977 à très peud’exemplaires par Simca-Matra ; soit une de lagamme "Armagnac" construite à très peud’exemplaires également, par Talbot-Simca en 1980.Comme l’attentat a eu lieu en 1987, soit 10 ou 7 ans,après la sortie d’usine de ces Simca 1100 TI, celadonne une idée du faible nombre d’exemplaires quirestaient encore en circulation!

D’ailleurs le dossier officiel dit bien qu’il n’en restaitseulement que « quelques modèles encirculation »… Autant dire que pour utiliser un telvéhicule pour une action criminelle, il faut être sûr deson coup!

Le fait qu’Arcini ait utilisé sa voiture personnellepourrait passer pour un amateurisme plusqu’excessif. Mais je ne suis pas si catégorique! Àmon avis cela démontre, surtout, qu’il était certain dene pas se faire prendre! C’est un excès de confiancemanifeste! Exactement comme en commettent ceuxqui ont l’habitude d’opérer! La routine finit par faireque l’on ne prend même plus les précautionsélémentaires…

Je crois que si Arcini en avait été à ses "coupsd’essais", il serait allé voler une voiture… Utiliser sonautomobile personnelle est une bévue que jepourrais admettre si elle avait été le fait d’un abrutiquelconque, mais pas venant d’Arcini! Là non, il nefaut pas pousser quand même! Il était beaucoup tropméticuleux, perfectionniste (il était artificier-démineur!), pour faire une connerie aussi grosse.

Pour moi c’est bien la preuve qu’il était si sûr delui, si sûr de ses protections, qu’il n’a pas jugénécessaire de se procurer un véhicule pourl’opération…

Mais qui pouvait bien être ce service qui donnait àArcini une telle certitude de ne pas être inquiété?C’est là toute la question!

5. ARCINI A-T-IL OPÉRÉ SEUL?

La version officielle dit que le meurtrier a agi seul,mais rien ne prouve qu’il ait réellement agi seul.Certes, les témoins qui ont assisté à la scène et quiont suivi le tueur, n’ont remarqué personne d’autre.Seulement je connais Arcini, beaucoup trop "pro"pour prendre le risque, en sortant de l’épicerie, detomber nez à nez avec un îlotier faisant le trottoir!

Il semble logique que, rue d’Auge, là où setrouvait l’épicerie, il y ait eu un ou des "guetteurs"prêts à faire le coup de feu afin de couvrir la sortied’Arcini s’il était apparu un îlotier attiré par lesdétonations.

Cela me semble aller de soi, mais rien ne vientétayer cette thèse. Arcini a pu agir seul, c’était un"pro" et un habitué de ce genre d’opération…

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Mémoire de Michel Lajoye page 27

6. LE JOUR DE L'ATTENTAT, ARCINIPROTÉGEAIT BALLADUR

Le jour où l’attentat de Caen a été perpétré,Edouard Balladur, alors Ministre de l’Economie dugouvernement Chirac, était en visite en Normandie.Et… c’est Arcini qui, entre autres, assurait saprotection! Car comme je l’ai relaté au chapitre 1section 5, il faisait également de la protectionrapprochée dans le cadre de son travail defonctionnaire dépendant directement du Ministère del’Intérieur.

Cette protection qu’Arcini assurait ce jour-là réduità néant les affirmations des "minimisateurs" qui l’onttoujours présenté (et l’on comprend pourquoi!)comme un simple employé de la Sécurité Civile deCaen… Il est rare que l’on envoie de vaguesemployés de Sécurité Civile comme garde-du-corpsd’un Ministre d’État! Et plus particulièrement duMinistre de l’Economie et des Finances… Surtout àune époque où les menaces terroristes étaientnombreuses! C’est forcément quelqu’un departiculièrement sûr, au-dessus de tout soupçon, quele Ministère de l’Intérieur (à l’époque occupé par lesduettistes Pasqua et Pandraud) avait détaché pourprotéger ce « Cher Edouard », alors l’ami de 25 ansde Chirac…

Donc ce 5 juin 1987 c’était Arcini qui, dans ledomaine des explosifs, mais aussi autres, assurait laprotection rapprochée d’Edouard Balladur. Ce derniertémoignera d’ailleurs, par la suite dans un procès-verbal, que l’artificier que lui avait détaché leMinistère de l’Intérieur était effectivement présent àl’heure.

Arcini devait rejoindre Cherbourg pour prendre encompte Balladur à 13 heures. Moussaoui a étéabattu à Caen vers 10 heures 15. Compte tenu qu’ilfaut environ une heure trente pour faire Caen-Cherbourg en voiture, le tueur avait largement letemps d’abandonner chez lui sa Simca 1100, de sechanger et de prendre son véhicule de service pourse rendre à Cherbourg. Pour ce faire il devait partir,au plus tard, un peu avant 12 heures de Caen pourêtre à 13 à Cherbourg. Au besoin il pouvait utiliser sasirène et son gyrophare amovible pour gagnerCherbourg plus rapidement et être à l’heure à sonrendez-vous ministériel.

En conclusion, c’est très important pour la suite , laprotection de Balladur ne constituait en rien un alibipour l’heure du meurtre de Moussaoui.

7. PROVENANCE ÉTRANGE DE L'ARME DUCRIME

Maintenant voyons la provenance de l’arme ducrime de Caen. C’était un Lüger P08, et d’après laversion officielle de cette affaire, il est dit qu’Arcinis’est procuré cette arme en Corse où il séjournaitsouvent pour son travail. Il l’aurait achetée à uncertain Serge Costa, via André Franceschi. Il n’estdonné aucune date quant à l’achat de cette arme!

Plus précisément, le dossier officiel affirme quesuite à son arrestation, Arcini a accepté de révélerque le Lüger était une arme achetée 3.000 francs en

Corse. Mais il aurait (soi-disant...) refusé de donner lenom du vendeur. Cependant, la police a pu identifierque c’était André Franceschi qui avait mis en contactl’acheteur avec Serge Costa. Franceschi est décritcomme n’ayant pas assisté à la transaction.

Le dossier officiel nous présente ce derniercomme un "pompier d’Ajaccio". J’ignore ce que l’ondoit entendre par là. Car Arcini, artificier-démineur duMinistère de l’Intérieur, était également détaché à laSécurité Civile, par conséquent: pompier . Il n’est pasprécisé dans le dossier officiel si Franceschi était un"pompier-flingueur" du calibre d’Arcini…

J’avoue quand même que cela me semble curieuxcette version officielle , car des armes, notamment desLüger P08, nous en avions suffisamment pour nosbesoins. J’ai expliqué dans le chapitre 1, section 6,que l’on pouvait se procurer des armes facilementgrâce au travail de mon coaccusé et à tout ce que laWehrmacht avait laissé!

Alors je me demande bien pourquoi Arcini auraitété dépenser de l’argent (3.000 francs) pour acheterun Lüger à un type (Costa) qui aurait pu lui vendreune arme "sale", qui avait déjà servi dans une autreaffaire. Tout cela alors que les armes que l’on pouvaitse procurer par ailleurs étaient sûres au point de vuepassé balistique. Lorsque l’on s’approvisionnait enarmement dans ce qu’avait laissé la Wehrmacht enNormandie, au moins nous n’avions pas le risque detomber sur une arme au passé douteux!

Dès lors, cet "achat" d’un Lüger alors que cen’était pas nécessaire matériellement, est pour lemoins étonnant. Il y a forcément une autre raison(que j’ignore!) au fait que ce soit ce Costa, viaFranceschi, qui ait fourni l’arme du crime.

Je précise que Franceschi n’a pas été inculpépour les affaires ayant eu lieu en Normandie, et qu’iln’était pas cité comme témoin au procès de Caen.J’ignore, de ce fait, ce qu’il est devenu par la suite.En écrivant cela, je me pose des questions sur sonsort, eu égard à ce qui suit…

8. CELUI QUI A FOURNI L'ARME ABATTUPAR LA SUITE

En effet, Serge Costa, celui-là même qui auraitfourni le Lüger à Arcini, a ensuite été retrouvé abattu!

Il est écrit dans l’Arrêt de renvoi devant lesAssises en tout et pour tout ceci: « Serge Costa aété tué par balle le 18 février 1987 »! Rien de plus!

D’après certaines sources privées, ce Costa auraitété abattu dans un attentat revendiqué par le FLNC(j’ignore le canal, mais à l’époque ce n’était pasencore trop canalisé) au motif que cela aurait étéune… barbouze ! Comme le FLNC a parfoisrevendiqué (ou l'on a revendiqué pour lui) tout etn’importe quoi, Costa a peut-être été abattu pard’autres… Ce n’est pas parce que la version officielledit FLNC que je crois que c’est le FLNC qui l’aexécuté…

Le plus étrange, c’est qu’aux audiences, lors duprocès de Caen en juin 1990, l’assassinat de Costan’a pas été détaillé! La Corse a quand même étéévoquée pour la provenance de l’arme, il a même été

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Mémoire de Michel Lajoye page 28

cité le nom de Costa, mais pas ce qui lui est arrivéaprès .

J’avoue que cela m’a étonné: celui qui, dans laversion officielle de cette affaire, fournit à Arcini l’armequi a servi à tuer Moussaoui s’est lui-même faitabattre, et ce n’est pas évoqué, en détail, auxaudiences?! Pas un avocat des parties civiles pourfaire un bel effet de manche avec ça?! Et l’avocatgénéral ainsi que le président de la Cour: muets surce point! Il y avait quand même de quoi faire frémirl’assistance avec « ce témoin [un complice? Un“donneur d’ordres" peut-être?] devenu gênant »prestement, et fort opportunément, supprimé!

Certes, Costa a été tué avant les attentatscommis en Normandie, cela exclut sa participation.Mais je soupçonne Arcini de ne pas en avoir été àses coups d’essai! Costa a très bien pu être uncomplice pour d’autres actions.

De plus, c’est le 18 février 1987 (sauf erreur dansla date figurant dans le dossier officiel) que Costa futliquidé, et c’est le 6 mars 1987 que le premierattentat connu en Normandie fut perpétré. Un peucomme si, avant de commencer, on avait suppriméun "témoin gênant", voire liquidé une barbouzerécalcitrante qui refusait de collaborer à cetteopération (ou une autre)…

En tout cas, il est totalement surréaliste que l’onn’ait pas précisé, lors du procès, que le fournisseurde l’arme du crime a été lui-même abattu, alors quec’est dans le dossier! Si au procès, l’assassinat deCosta n’a pas été détaillé, c’est qu’il ne devait pasêtre détaillé, c’est é-vi-dent! Donc, si cela ne devaitpas être abordé, c’est qu’ils ont quelque chose detrès important à nous cacher.

Pour ma part, je n’aurais pas lu dans l’Arrêt derenvoi devant les Assises que Costa a été lui-mêmeabattu, je n’aurais jamais eu connaissance de cela.

En effet, c’est lors de la lecture de l’Arrêt de renvoidevant les Assises, et seulement à ce moment , quej’ai appris que c’est ce Serge Costa qui aurait fourni àArcini l’arme du crime! Durant l’instruction, je n’aijamais été interrogé sur ce Costa, ni sur AndréFranceschi d’ailleurs! Il ne m’a jamais été demandé sije connaissais ces personnes!

Pourtant, puisqu’Arcini était en relation avecCosta et Franceschi, la logique aurait voulu que l’onme demande si, par hasard, moi aussi, je n’auraispas connu ces types. Après tout les fréquentationsd’Arcini auraient pu être mes fréquentations. Or, onne m’a rien demandé durant l’instruction, ni auprocès! Preuve qu’ils savaient que je ne connaissaispas ces gens, et cela démontre surtout que la police(et la "justice" !) en savent beaucoup plus qu’ellesn’ont voulu en dire…

C’est d’autant plus vrai qu’en juin 1990, lors duprocès de Caen, le commissaire Etcheberry patron duSRPJ de Rouen a donné, lors de son témoignage, lerécit d’enquête suivant, contredisant le contenu dudossier officiel:

Il a dit, à la barre des témoins, qu’Arcini avaitrefusé de révéler ou il s’était procuré le pistolet Lügerqui a servi aux attentats en Normandie, notamment àl’assassinat de Moussaoui. Mais, le policier a précisé

que ses services avaient pu déterminer que c’étaitCosta qui avait "vendu" l’arme à Arcini ; que cedernier l’avait achetée lors d’une mission dedéminage en Corse ; et que c’était un pompier quiavait mis en contact les deux hommes.

Le témoignage sous serment d’Etcheberry estlégèrement différent de la version se trouvant dans ledossier officiel ! Dans ce dernier, il est préciséqu’Arcini a collaboré, et indiqué que l’arme venait deCorse (cf. section précédente de ce chapitre). Or,dans son témoignage, Etcheberry, le chef desenquêteurs, à, au contraire, affirmé qu’Arcini fut muetcomme une carpe: rien à en tirer sur la provenancede l’arme. C’est pour le moins contradictoire!

Suivons le témoignage du commissaire Etcheberryqui fut la version servie aux jurés lors du procès, leprésident de la Cour félicitant même le policier pour laprécision de sa déposition…

Lors de ce (faux) témoignage Etcheberry apourtant oublié de préciser un petit détail: Costa estmort assassiné! Dès lors, la provenance de ce Lügerest un grand mystère qui a été résolu en faisant,sans doute, appel aux sciences occultes: puisqueselon ce policier, Arcini refusait (soi-disant!) de révéleroù il a eu l’arme, et puisque Costa était déjà mort, il abien fallu recourir à la divination, voire au spiritismeen faisant tourner les guéridons pour "faire parler" lemort Costa!

En effet, dans cette version d’Etcheberry, c’estquand même surnaturel que la police ait pu savoirque c’est le mort qui a "vendu" (à quelle date?) l’armeà quelqu’un qui n’a "rien voulu révéler2… Arcinihabitait Caen, sa famille dans le Nord, rien ne le liaità la Corse! Hormis son travail de fonctionnaire duMinistère de l’Intérieur! Puisque effectivement, sonemployeur l’envoyait souvent dans l’île pour yeffectuer des missions délicates de déminage (et dedéminage à minage, il n’y a qu’un "dé"!)…

Par conséquent il fallait plus que du "flair policier"pour deviner qu’Arcini, au cours d’une de ces"missions spéciales", en avait profité pour "acheter"une arme à un dénommé Costa!

Surtout que la logique voulait que la police pense,tout de suite, au travail routinier d’Arcini qui luipermettait de récupérer, en Normandie, nombred’armes de la dernière guerre, notamment des LügerP08 (cf. section 6 du chapitre 1)…

Il est plus que manifeste, comme dit plus haut,que la police (qui a donné une version) et la"justice" (qui en a donné une autre) en saventbeaucoup plus qu’elles n’ont voulu en dire…

Quoi qu’il en soit, peu après le jugement de Caen,l’hebdomadaire caennais Liberté, dans son éditiondu vendredi 29 juin 1990, a fait le compte-rendu duprocès. Et la journaliste, Marie Plante, a fait état del’exécution de Costa (pourtant non détaillée lors desaudiences!) en précisant, de façon ironique, qu’il fut« assassiné par l’ex-FLNC, dit-on »… Le "dit-on"laisserait à penser que cette Marie Plante n’y croyaitpas vraiment… Compte tenu que le sort de Costa nefut pas abordé, comment cette journaliste (trèslocale!) a pu savoir, d’une part que Costa avait étéabattu ; d’autre part que c’est par le soi-disant FLNC?

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Mémoire de Michel Lajoye page 29

A-t-elle recueilli, sur l’oreiller, les confidences decertains policiers chargés de cette manipulation?

Dans la suite de ce récit, nous verrons que cethebdomadaire caennais Liberté a, à plusieursreprises, publié des informations réduisant à néant laversion officielle de cette affaire. Cet hebdomadaire,très local, avait, apparemment, une sourced’information de premier ordre sur les affairesArcini/Lajoye!

9. DES MUNITIONS IDENTIQUES DANSDIVERSES AFFAIRES

Mais il n’y a pas que l’exécution de Costa!En effet, des documents affirment que la mort de

cette barbouze est liée à celles de deux Arabes àAjaccio en août 1986! Les munitions qui ont servi àabattre Costa proviendraient du même lot que cellesqui ont servi à abattre ces deux Arabes! Ce doublecrime d’Ajaccio, lui, n’a pas été revendiqué.

Mais cela irait encore bien plus loin! Car si desdocuments affirment que c’est le même lot demunitions dans ces affaires corses, un correspondant(très au fait de la vie criminelle dans l’Ile de Beauté)m’a fait informer que non seulement c’était bien lesmêmes munitions, mais qu’en plus cela seraitégalement la même arme pour ces trois assassinatsqui ont eu lieu dans l’île!

Pour ma part je n’ai pas été entendu sur cetteaffaire de Maghrébins abattus à Ajaccio, alors qu’enaoût 1986 j’étais en vacances, de ce fait absent demon poste militaire. Ce qui aurait pu faire tiquer la PJ(car elle s’est forcément renseignée sur les dates demes congés) qui aurait alors pu me demander si, parhasard, je n’avais pas passé mes vacances d’août1986 du côté d’Ajaccio.

Car, tout de même, deux Arabes abattus "sansraison", de cette façon, à Ajaccio en août 1986,"c’est signé": cela ressemble étrangement auxaffaires Arcini/Lajoye… Mêmes méthodes, mêmescibles!

Si la police, et/ou le juge d’instruction, ne m’ontrien demandé sur le sujet, c’est qu’ils savaient tousque je n’y étais pour rien. Par conséquent, ilssavaient pertinemment qui est celui, ou ceux, qui ontcommis ces actions en Corse.

Pourtant, à ma connaissance, personne n’a étéofficiellement interpellé et encore moins jugé pour cescrimes!

10. LES MUNITIONS QUI ONT SERVI AU CRIMEDE CAEN

Quant aux munitions, des 9 millimètresparabellum, qui ont servi aux attentats commis enNormandie, c’est comme pour la provenance del’arme du crime, il y a aussi deux versions: celle dudossier off iciel et celle de la police, en l’occurrence lecommissaire Etcheberry, chef du SRPJ de Rouen!

Voyons d’abord celle contenue dans l’Arrêt derenvoi devant les Assises. Il est précisé en tout etpour tout, ceci:

« Les munitions utilisées, les S.F.M. 75 lui [Arcini]avaient été données par un collègue démineur

[notez ce qui suit...] ultérieurement décédé, RaymondZiegler. Il en possédait une quarantaine. » Rien deplus!

Chacun a pu lire le très pudique "ultérieurementdécédé"! C’est joliment dit! Après Costa, lefournisseur de l’arme, qui a été liquidé, c’est Ziegler,le fournisseur des munitions, qui est lui aussi:"ultérieurement décédé"! Eh bien, approvisionnerArcini en matériel, cela nuit gravement à la santé!

Il ne nous est pas précisé de quoi ce Ziegler estmort, ni surtout quand il est mort ! Il serait pourtantintéressant de savoir s’il est décédé avant ou aprèsles attentats commis en Normandie! Et nous nesavons pas non plus où il était domicilié. Noussavons juste qu’il était collègue d’Arcini autrement ditartificier-démineur du Ministère de l’Intérieur.

Nous n’en saurons pas davantage, si ce n’est quecela fait un mort de plus! Vu l’hécatombe, comme jel’écrivais à la fin de la section 7 de ce chapitre, ilserait intéressant de savoir si André Franceschi estencore de ce monde!

L’autre version, pour la provenance desmunitions, fut donnée à la barre des témoins par lespirite commissaire Etcheberry. Il dira qu’ils n’ont paspu déterminer la provenance du lot de munitionsayant servi à tuer Moussaoui. Donc exit Ziegler, mortune seconde fois!

Et en disant que l’on ne pouvait pas savoir d’oùvenaient les munitions, ce commissaire a doublementmenti! D’une part, elles auraient été fournies par ceZiegler ; d’autre part les douilles retrouvées sur le solaprès les attentats, si l’on en croit le dossier officiel,sont des munitions militaires et/ou de police. Et,comme toutes les douilles de l’armée et/ou de lapolice, elles étaient dûment immatriculées !

D’ailleurs, dans le dossier officiel, des documentsrépertorient "clairement" l’immatriculation des douilleséjectées par le pistolet Lüger P08 utilisé par Arcini.Cette immatriculation, mentionnée dans l’Acted’accusation, est « 4-75.SF.9.1. » à un endroit, et« SF 4 - 75 X 9 » à un autre (toujours la stricterigueur et la haute précision proverbiale de la"justice" !).

Mais, effectivement, le dossier officiel ne précisepas l’affectation de ces munitions avant d’avoir"appartenu" à ce Ziegler qui les aurait remises àArcini!

Je me permets d’exposer, pour les non-initiés, queles munitions fabriquées en France pour l’arméeet/ou pour la police sont toutes immatriculées sur lesdouilles. Tous les X mille (ou toutes les X cents pourcertaines munitions spécifiques), il est changél’immatriculation. Avec ce numéro, il est aisé,enfantin, de savoir à quel régiment, ou unité depolice, le lot a été envoyé initialement puisque lemunitionnaire de l’armée, et/ou de la police, a toutesses archives depuis 1945.

De ce fait, il ne faut pas venir nous dire, comme l’afait le commissaire Etcheberry lors du procès, que l'onn’a pas pu établir la provenance des munitions, caren vérité c’est que l'on n’a pas voulu révéler l’unitémilitaire, ou à quel service de police, elles avaient étéinitialement destinées.

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Mémoire de Michel Lajoye page 30

En conséquence, nous pouvons légitimementpenser que ces munitions venaient d’une unitéparticulière! Peut-être une "unité très spéciale" del’armée ou de la police et, pour eux , dire, lors duprocès, devant la Cour, devant le public, qu’ellesavaient initialement été mises en dotation dans telleunité militaire, ou tel service de police, cela aurait étégênant…

Si cela n’avait pas été gênant pour eux de nousdire à qui avait été, initialement, envoyé ces balles, ilsnous l’auraient dit, cela semble là aussi é-vi-dent!

Il faut bien voir qu’Arcini a été assez fou d’utilisersa voiture personnelle pour commettre l’attentat deCaen. Alors qui sait, il a très bien pu, aussi, êtreassez toqué pour utiliser des munitions provenant,via Ziegler, du Ministère de l’Intérieur: Ministèreauquel ils appartenaient tous les deux…

Je n’ose quand même pas penser qu’Arcini auraitutilisé les "munitions de service" de son collègueZiegler! Les artificiers-démineurs du Ministère del’Intérieur sont dotés d’une arme de service de leurchoix (revolver ou pistolet) et ils reçoivent pour cettedernière une dotation en munitions. Ce serait quandmême incroyable qu’Arcini ait utilisé les munitions deservice de son collègue! Si c’était le cas (ce que je necrois quand même pas!), il y aurait eu de quoi enémotionner Ziegler qui, justement, est "ultérieurementdécédé"…

Au procès de Caen, il a par ailleurs été préciséqu’Arcini a utilisé des balles expansives (ce que l’ondésigne "populairement" sous le terme de ballesexplosives). Celui qui a donné cette précision est lemédecin légiste qui a autopsié Moussaoui. Il reste àsavoir si c’est Arcini qui a rendu expansives desmunitions classiques, ou si ces balles étaientexpansives à l’origine.

Si c’est cette seconde hypothèse, Arcini auraitalors utilisé des munitions très particulières, et bienpeu "militaires"! En effet, ce genre de projectiles estcontraire aux conventions "machin" et "truc" sur les"lois de la guerre" et il va de soi que l’armée régulièredu pays des "Droits de l’Homme" n’en utilise point etne possède, évidemment, pas ça en stock!

De ce fait, si Arcini a bien utilisé des munitions dece genre, elles proviendraient de certains "servicesspéciaux" (militaires ou civils) qui peuvent,contrairement à l’armée régulière (du moinsofficiellement...), se permettre d’utiliser des munitionstrès spéciales!

11. PRÉCISIONS DE LA PRESSE CONCERNANTLES MUNITIONS

À propos de ces munitions utilisées, notamment àCaen pour tuer Moussaoui, dans l’hebdomadairecaennais Liberté en date du 18 décembre 1987, ilest écrit que ces balles proviennent « d’un lot deplusieurs millions » de cartouches « fabriquées il y aune dizaine d’années » (exact, elles étaient bien de1975, si l’on en croit l’immatriculation), et que « ladestination [initiale ] de ces cartouches avait été enpartie éclaircie ».

Le journaliste, Gérard Laurent, qui a écrit celadans son article, l’a fait après avoir assisté à laconférence de presse du Procureur de Caen. Durantcette dernière, le magistrat relatait l’arrestation etfaisait le point sur les affaires Arcini/Lajoye. Àpremière vue, la source du journaliste est fiable!

Les précisions recueillies par Gérard Laurentportent notamment sur deux points:

Le premier: un lot de « millions de munitions ».Cela me semble beaucoup, car il n’est pas attribuéqu’un seul numéro de série pour une telle quantité.Tous les X mille l’immatriculation est changée.

C’est d’autant plus vrai pour les "munitionsspéciales". Et il semblerait que les projectiles utiliséspar Arcini aient été des "balles expansives" quel’armée ne doit, en théorie, pas posséder, encoremoins utiliser, puisque la France a ratifié la"Convention..."! À moins qu’il ne s’agisse d’un lot de« millions de munitions » de ce type destinées à êtrestockées (plus ou moins secrètement) en vue d’unemobilisation très "spécifique"… Dans ce cas, il a puêtre mis le même numéro de lot à ces millions decartouches.

Si c’est le cas, je sais que les munitions demobilisation sont stockées "un certain temps" (disons10 ans) et après elles sont détruites, remplacées parun lot fabriqué plus récemment. Pour détruire lesmunitions, on les envoie (en général) à des unités quien consomment beaucoup en entraînement.

En admettant que le journaliste dise vrai, et que lelot était de plusieurs millions, il a pu être détruit enétant alloué à une "unité spéciale" qui consomme200 à 500 cartouches par homme et parentraînement. Ziegler et/ou Arcini auraient alors reçuces munitions comme leurs collègues d’entraînement,mais en auraient rempli leurs poches au lieu de touttirer. C’est plausible! Cela expliquerait pourquoi ils nenous ont rien précisé quant à la provenance initialede ces munitions! Car dire que ce lot a été attribué àtelle "unité spéciale", cela serait reconnaître que lesfonctionnaires Ziegler et Arcini en faisaient partie!

Second point: le journaliste prétend que « ladestination [initiale] de ces cartouches avait été enpartie éclaircie ». Il a écrit cela en décembre 1987 enprenant sa source auprès du Procureur de Caen quitenait une conférence de presse!

Or, comme dit plus haut, au procès de juin 1990, ily a le fameux commissaire Etcheberry (celui qui apourtant fait parler le mort Costa pour savoir qu’ilavait vendu l’arme à Arcini qui ne voulait rien dire!)qui est venu affirmer à la barre des témoins qu’il étaitimpossible de savoir précisément d’où venaient cesmunitions, et même de déterminer à quelle unité ellesavaient été initialement allouées… Quant au dossierofficiel, s’il mentionne bien Ziegler, il n’est nullementprécisé l’allocataire antérieur de ces munitions!

Il faudrait quand même accorder les violons entrela version de décembre 1987 rendue publique par leProcureur Général et qui fut reprise par la presse ; laversion du coordonnateur des enquêteurs ; et laversion du dossier officiel !

Il est évident qu ’ils nous cachent la vérité!Puisque les munitions, les douilles pour être précis,

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Mémoire de Michel Lajoye page 31

retrouvées sur le sol de l’épicerie où Moussaoui a étéabattu, comportent toutes une immatriculationmilitaire et/ou de police, ils se foutent du mondelorsqu ’ils nous affirment que l’on ne peut pas savoir àquel régiment, quelle unité de police, quel "servicespécial", ces munitions avaient été allouées! Il estaussi aisé de retrouver le destinataire initial d’un lotde munitions numérotées qu’il est simple de retrouverle propriétaire d’une voiture dont on al’immatriculation!

Que l’on me laisse consulter les archives dumunitionnaire de l’armée et/ou de la police, et je vaistrès vite trouver le destinataire! Hormis si les archivesont fort opportunément pris feu depuis! C’est que, vules ennuis de santé de Costa, de Ziegler, et peut-êtrede Franceschi, je crains le pire pour certainesarchives!

De plus, dans l’Arrêt de renvoi devant les Assises,il est énuméré les numéros qu’avaient, ou qu’auraienteu, les douilles retrouvées après les attentats, maisest-ce qu’ils n’ont pas falsifié les chiffres? Car ils nousont menti sur plein de choses, et je doute qu’ils aientpris le risque énorme de mentionner le véritablenuméro d’enregistrement.

En effet, il nous suffirait d’avoir un sympathisantaux archives du munitionnaire, il consulte les registrespour voir à qui le lot de 9 millimètres parabellumimmatriculé « 4-75.SF.9.1. » (ou « SF 4 - 75 X 9 ») aété alloué, et nous serions renseigné! De ce fait, jedoute fort que, puisque l’on ne doit pas savoir d’oùviennent les munitions, qu’ils aient pris un tel risque!

Je suis persuadé que les numéros des douillesqui figurent dans l’Arrêt de renvoi (ainsi que dansd’autres documents) ne sont pas ceux qui figuraientsur les étuis retrouvés après les attentats. Cescachotteries expliqueraient pourquoi, d’une page àl’autre de l’Acte d’accusation, le numéro de sérievarie (« 4-75.SF.9.1. » à un endroit puis « SF 4 - 75X 9 » à un autre) alors que toutes les douilles sontcensées provenir du même lot! Par conséquent, avoirla même immatriculation…

12. ARCINI A PEUT-ÊTRE COMMIS DESATTENTATS EN CORSE

Maintenant il faut bien en venir à la question quivient à l’esprit, à savoir: est-ce qu’Arcini a commisd’autres attentats, notamment en Corse avant, voireaprès, ceux commis en Normandie?

Car après tout, c’est peut-être Arcini qui a abattuCosta? Je n’ai pas eu connaissance que le tueur decette barbouze ait été arrêté et jugé. En tout casdans le dossier officiel jugé à Caen en juin 1990, s’ilest mentionné que Costa a été abattu en février1987, il n’est pas précisé que l’auteur de ce crime aété identifié, du moins officiellement.

Et comme les deux Arabes d’Ajaccio (évoquésplus haut) et Costa ont été abattus avec desmunitions provenant d’un même lot, et (d’après unesource bien informée) avec la même arme, celalaisserait supposer que c’est le même tueur pour cesaffaires corses.

Dès lors que Costa (présenté par certains commeune barbouze) a été en contact avec Arcini, il nepeut être exclu que ce soit le second, fonctionnairetrès spécial du Ministère de l’Intérieur, qui ait liquidéun "collègue" devenu, pour une raison ou une autre,gênant ou récalcitrant! Ce n’est qu’une hypothèse!

Cependant si je suis dans le vrai avec cettethéorie, si c’est bien Arcini qui a abattu Costa, c’estaussi lui qui a forcément abattu les deux Maghrébinsà Ajaccio, puisque c’est le même lot de balles et ilsemblerait, aussi, que cela soit la même arme!

Et puis le fait que le cas Costa et l’affaire d’Ajaccion’aient pas été détaillés, lors du procès Arcini/Lajoyeorganisé à Caen juin 1990, cela ne fait que renforcermon sentiment qu’il nous a été caché des choses(très gênantes pour eux!) sur ce qui s’est déroulé enCorse.

13. ARCINI FORCÉMENT IDENTIFIÉ PAR LAPOLICE DÈS JUIN 1987

Je reviens sur l’attentat de Caen commis en juin1987. Arcini a donc utilisé sa voiture personnelle, uneSimca 1100 TI d’une couleur très rare.

La version officielle de l’affaire dit que le tueur aété identifié grâce à cela. Seulement la versionoff icielle dit que c’est en décembre 1987 que lapolice, après avoir épluché le fichier des cartesgrises, est remontée à lui.

6 mois pour éplucher les cartes grises, ils espèrentque nous allons les croire?

Il est évident que la PJ a dû mettre desinspecteurs au service des cartes grises et ils ont sortidu fichier toutes celles concernant les Simca 1100 TIde la couleur recherchée.

Et, détails intéressants: la PJ de Caen était àl’époque (sans doute encore maintenant), uneantenne du SRPJ de Rouen. À Caen la PJ n’avaitpas de locaux spécifiques pour elle. Et où la PJ deCaen était-elle logée à l’époque? Tout simplementdans un bâtiment administratif dépendant de lapréfecture de Calvados. Pour être précis, la PJoccupait l’étage tout en haut (au troisième), alors quele premier et second étage étaient occupés par desservices administratifs de la préfecture, dont celuides… cartes grises!

Ce qui veut dire que pour effectuer leursrecherches dans ce fichier, les fonctionnaires de laPJ n’ont eu juste qu’à descendre à l’étage dudessous…

Alors la version qui veut qu’ils aient mis 6 longsmois pour éplucher le fichier des cartes grises qu’ilsavaient sur place, c’est vraiment se foutre du monde!

Admettons qu’en 1987 la préfecture du Calvadosn’ait pas eu de fichier informatisé et qu’il ait fallu touttrier à la main. En 1987, des Simca 1100 dans leCalvados (qui n’est quand même pas undépartement très peuplé), il n’en restait pasbeaucoup en circulation. Il y en avait moins de 4.000(si l’on en croit l’hebdomadaire caennais Liberté du18 décembre 1987) pour les départements duCalvados, de la Seine-Maritime et de l’Eure. Et desSimca 1100 de la série TI et du vert recherché, il y en

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Mémoire de Michel Lajoye page 32

avait moins de 400 pour les trois mêmesdépartements si l’on en croit le même Liberté quiétait sous perfusion policière pour ses informations…

De ce fait, au grand maximum, les inspecteurschargés de trier les cartes grises ont dû mettre deuxjours (admettons trois) pour noter tous les noms des400 propriétaires de Simca 1100 TI de la couleur decelle recherchée.

Et cela d’autant plus que cette affaire faisait unfoin pas possible, on réclamait l’arrestation rapide dutueur! Il avait été mis de gros moyens de recherchesur cette affaire. Robert Pandraud, complice dePasqua au gouvernement de l’époque, avait mêmedéclaré qu’il avait mis tout en œuvre pour retrouverl’auteur de ce crime. Voir, pour avoir une idée desmoyens énormes mis sur cette enquête, les journauxparus après l’attentat du 5 juin 1987!

Ce qui veut aussi dire, qu’au besoin, ils pouvaientutiliser tous ces renforts pour trier le fichier des cartesgrises. Cela a dès lors été forcément très rapide de"sortir" toutes les adresses des propriétaires desSimca 1100 TI de la couleur recherchée.

Pour le département du Calvados, au plus, ildevait y avoir une centaine de voitures de ce type encirculation puisqu’il n’y en avait moins de 400 pour leCalvados, l’Eure et la très peuplée (avec Rouen et LeHavre!) Seine-Maritime. Le dossier officiel nementionne pas le nombre de véhicules de cette sérieencore en circulation dans le Calvados, il affirmesimplement qu’il n’en restait encore que « quelquesmodèles en circulation », c’est dire! Alors, en estimantque le Calvados comptait encore une centaine deSimca 1100 TI du vert recherché, je suis forcémenttrès au-dessus du nombre réel!

Ensuite, admettons qu’Arcini n’ait pas été unagent infiltré, mais un simple activiste. Il fut facile à lapolice de prendre la liste des activistes d’extrême-droite "fichés" aux RG (et Arcini était forcément fichédepuis au moins 1984 comme je l’ai expliqué auchapitre 1 section 4) et de la comparer avec la listedes heureux propriétaires de Simca 1100 TI de lacouleur recherchée.

Donc, soyons larges, et disons que pour le 15 juin(dix jours après l’attentat de Caen), Arcini étaitforcément identifié et arrêté! Même des policiers trèsmauvais, et sans grands moyens, auraient remonté àlui très rapidement!

Si Arcini n’était pas un activiste, mais un agentinfiltré, c’est pareil! Les enquêteurs, en consultant laliste des propriétaires de Simca 1100 TI, auraientsursauté en voyant le nom de leur collègue Arcini. Ilsse seraient demandé si l’agent Arcini, chargéd’infiltrer les milieux d’extrême-droite, ne s’était pas unpeu trop "pris au jeu", sachant que la peste brunec’est très contagieux…

Dans n’importe quel cas de figure, pour le 15 juin1987 l’assassin de Moussaoui était forcément entreles mains de ses collègues de la PJ.

En plus, détails intéressants, Arcini avaitl’habitude de prendre ses repas du midi dans un"restaurant administratif", où pouvaient aller mangertous les employés des administrations de l’État. Jerappelle qu’il était artificier-démineur du Ministère de

l’Intérieur… Et d’autres fonctionnaires de ce Ministèrey déjeunaient également, notamment la plupart desinspecteurs de la PJ de Caen!

Ce qui veut dire que les policiers, chargés derechercher le tueur, avaient pour indication que cedernier circulait dans une Simca 1100 TI d’unecouleur bien particulière. Or, un type se déplaçant àbord d’un tel véhicule, et correspondant précisémentau signalement physique du meurtrier, ils en avaientun sous le nez tous les midis: 5 jours par semaine,puisqu’Arcini partageait la table des inspecteurs de laPJ…

Arcini a (c’est irrécusable) forcément été arrêté parla police judiciaire dans les jours suivants l’attentat deCaen! Puis il a été fait le lien avec certaines affairescorses (et sans doute d’autres affaires quej’évoquerai plus loin!). Mais ils ont gardé Arcini sous lamain, car ils en avaient besoin pour me fairecommettre un attentat. J’étais déjà en tôle àl’époque, mais plus pour longtemps, j’allais bientôtsortir.

Certains répondront que cette hypothèse est ducinéma que je me fais, pensant qu’ils se sont donnéde biens grands moyens pour m’avoir. Mais, je necrois pas une seconde qu’il ait fallu 6 mois à la PJpour remonter à Arcini comme le dit la versionoff icielle de l’enquête!

Je suis maintenant persuadé, avec le recul, qu’ilsont utilisé Arcini pour m’atteindre, et qu’encontrepartie, il a vu une partie de ses crimes"disparaître". Une sorte d’amnistie très particulière! Jepense notamment aux affaires corses (et à d’autresque j’aborderai plus loin), car si ces affaires n’ont pasété évoquées au procès de Caen, alors que toutessont "liées" entre elles, c’est qu’il y a bien une raison!Une raison inavouable!

Et si Arcini a commis diverses actions criminellesdans un peu toutes les régions de France, cela luiaurait valu 4 à 5 (si ce n’est plus!) procès un peupartout dans le pays. Dans ces procès (tous deprocédure criminelle), il était susceptible d’êtrecondamné à chaque fois à la réclusion criminelle àperpétuité assortie d’une peine incompressiblemaximale de 30 ans. Autant dire qu’en cumulantdeux condamnations de ce type, c’est l’assurance dene jamais être libéré de prison.

Alors, à la mi-juin 1987, après avoir logiquementidentifié, et forcément arrêté Arcini, on a pu très bienlui proposer le marché suivant: « Un seul procèsarrangé à Caen, une seule condamnation àperpétuité avec 18 ans de sûreté. Peine“incompressible” que l’on réduira ensuite pour réaliserune discrète libération. Mais, en contrepartie, il fautpousser Lajoye.... »

Ce marché a pu être d’autant plus proposé etconclu avec Arcini que c’était un agent d’un service,c’est clairement démontré dans les faits (son travailnotamment)! Il n’était certes pas du service qui luiassurait une totale impunité (mais n’a-t-il pas commisune bavure impardonnable en abattant Moussaouiau lieu de Rahmani?). Cependant, le service auquelappartenait Arcini lui a "arrangé le coup" commenous le verrons dans la suite de ce récit.

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14. NOUVELLE VOITURE POUR ARCINI

La version officielle de l’affaire dit qu’Arcini,quelques jours après l’attentat de Caen, sachant quesa Simca 1100 TI était recherchée, a acheté uneautre voiture. Il est vrai que par la suite il a eu uneFord Escort.

Mais cela ne change rien, car il restait toujourspropriétaire de sa Simca 1100 TI qui seradécouverte, à la fin de 1987, cachée à Mourmelon(version officielle). Il se retrouvait de ce faitpropriétaire, dans le fichier des cartes grises de lapréfecture du Calvados, de deux véhicules. Ce quipour un célibataire faisait suspect, et le rendaitencore plus suspect!

En effet, ce subit changement de voiture, aussitôtaprès l’attentat, était un aveu! Cela n’en rend aussique plus loufoque la version disant qu’il ait fallu 6mois aux enquêteurs pour identifier Arcini. Car lesinspecteurs de la PJ, avec qui il mangeait le midi, luiauraient alors demandé en le voyant arriver au volantde sa nouvelle automobile: « Tiens, t’as changé debagnole, t’as plus ta Simca 1100? ».

Mais à part ça, il faut croire que ce n’est qu’endécembre 1987, 6 mois après l’attentat de Caen, quela police est remontée à Arcini! Et cela bien qu’il n’yait eu que quelques Simca 1100 TI de la couleurrecherchée encore en circulation dans ledépartement du Calvados!

15. UNE FUITE MALENCONTREUSE DANS LAPRESSE

D’ailleurs la presse locale fait s’écrouler cetteversion officielle . En effet, en décembre 1987, lesjournaux du Calvados, que cela soit le quotidienOuest-France ou le très local hebdomadairecaennais Liberté, faisaient tous état de laprécédente audition (après l’attentat de juin 1987)d’Arcini. Certains journaux comme Liberté du 11décembre 1987 affirmant même qu’il avait été relâché(et s’il a été "relâché", c’est qu’il était arrêté et passimplement auditionné !) car il avait "l’alibi Balladur".

Or nous avons vu plus haut que cet alibi ne tenaitpas, car le crime a eu lieu vers 10 heures 15 à Caen,et Arcini devait être, seulement pour 13 heures, àCherbourg. De plus, pour l’attentat du 6 mars 1987 àPetit-Quevilly, il n’avait aucun alibi. Donc lesjournalistes locaux sont passés à côté du scoop, etils auraient dû penser que la police avait relâchéArcini pour une autre raison!

Si certains sont sceptiques sur mes affirmations,qu’ils aillent consulter le quotidien Ouest-France (leséditions du Calvados) s’étalant du 9 au 13 décembre1987. Ainsi que l’hebdomadaire caennais Libertédans ses numéros du 11 et du 18 décembre 1987.Ces journaux, très locaux, ne vivant que grâce à la"perfusion policière" pour les faits-divers, ont, tous,avec des précisions qui se recoupent, donné moultdétails sur la précédente audition, voire laprécédente arrestation d’Arcini. Un précédentintervenu aussitôt après l’attentat de juin 1987, soitbien avant la première audition officielle de décembre1987!

Or, jamais, ô grand jamais, dans le dossier officieljugé à Caen en juin 1990, ces précédentes auditionset même cette précédente arrestation, réaliséesaprès l’attentat de juin 1987, et complaisammentdécrites avec force détails dans la presse, ne sontapparues! Dans le dossier officiel sur lequel j’ai étécondamné, le "premier contact" d’Arcini avec la PJdébute en décembre 1987! Rien de rien avant !

Ce qui s’est déroulé, c’est que les journalisteslocaux ont des contacts quasi-amicaux avec lespoliciers et, autour d’un verre, les langues se délient,et apparemment, comme à leur habitude, certainspoliciers ont beaucoup bu, par conséquent tropparlé…

Ce n’est que très récemment que j’ai euconnaissance des articles de ces journaux. Car suiteà mon arrestation en décembre 1987, une foisincarcéré, j’avais été placé en isolement doublé d’une"mise au secret" me privant d’accès à la presse, à latélévision, à la radio… Cela a duré près de troissemaines. Je pensais que c’était une lubie du juged’instruction. Pas du tout, maintenant je comprends: ilétait vital, pour eux , que je n’aie pas connaissancede la désastreuse fuite dans les média! Cette fuitequi révélait qu’Arcini avait déjà été interpellé bienavant son arrestation officielle en ma compagnie endécembre 1987! Si j’avais su qu’il avait déjà étéinterpellé avant, j’aurais tout de suite compris lasupercherie!

Et, évidemment, les journaux parus en juin 1990au moment du procès de Caen, ont "gommé latâche" de décembre 1987, à savoir tut la vérité surcette fameuse première interpellation d’Arcini peu detemps après l’attentat de juin 1987.

Quant au fait que cette précédente interpellationn’apparaît pas au dossier officiel, c’est la logiquemême. Si c’était apparu, un avocat aurait alorsdemandé pourquoi la PJ avait relâché Arcini! Commeil n’avait aucun alibi, je vois mal les autorités répondre« Nous avons relâché Arcini pour mieux faire tomberLajoye! »

En conclusion, il apparaît que j’ai été condamnésur un dossier totalement bidonné! Pire: on a utiliséun interpellé depuis 6 mois pour me faire commettreun attentat… et me piéger!

16. LES REVENDICATIONS SIONISTES

Les attentats commis par Arcini en Normandie onteu des revendications très étranges. Il auraitrevendiqué des choses comme Irgoun Reconstituée !J’avoue ne pas bien comprendre pourquoi il a fait ça,et s’il l’a réellement fait de sa propre initiative. Je nevois aucune raison à ces revendications. Pensait-ilfaire accuser des juifs? Les attentats ont tous eu desrevendications sionistes! Arcini, durant les audiencesdu procès, et même avant en procédure d’instruction,a prétendu être membre d’un groupe sioniste. Disait-illa vérité? Arcini, fonctionnaire du Ministère del’Intérieur, était-il, aussi, un goy utilisé comme agentsioniste? Ou, tout simplement, est-il juif?

Les textes de revendication sioniste étaient écritsau normographe et/ou à la machine à écrire. Le

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contenu laissait penser que le rédacteur avait un étatmental assez dérangé. Sur le coup, lorsqu’auxaudiences du procès, j’ai entendu la lecture destextes de revendication, j’ai eu du mal à croirequ’Arcini, de lui-même, avait écrit ce genre de chosestotalement incohérentes compte tenu de sapersonnalité.

Au sujet des revendications, je n’en sais pas plus,je n’ai pas participé à ces attentats (je rappelle quej’étais en tôle!), et tout ce que j’en sais c’est par lapropagande des média, le dossier officiel, et leprocès auquel j’ai assisté.

Quant aux motivations profondes d’Arcini, sescontacts avec les milieux sionistes qu’il a invoqués,cela reste un mystère que l’on s’est bien gardé detenter d’éclaircir de crainte de trouver certainesimplications gênantes.

C’est d’autant plus vrai, que, lors du procèsdevant les Assises du Calvados, l’un des policierstémoins, le commissaire Etcheberry (encore lui!),affirmera, après avoir prêté serment de dire la vérité,qu’aucun groupe sioniste n’existe ou n’a existé dansla région normande…

Après une telle déclaration, je pensais que la salleallait éclater de rire, mais non, j’ai été le seul àm’esclaffer! Pourtant, un tel parjure prononcé àCaen, si près des territoires occupés de Deauville,c’était désopilant! Chacun sait que, grâce àl’autoroute de Normandie, Deauville est au bout duSentier et de ses milices armées…

En tout cas cette déclaration du comique spiriteEtcheberry, prouve, s’il en était besoin, que l'on avaitdonné des consignes claires pour ne pas impliquer"certains groupes"…

17. VISITE D'UN INSPECTEUR À LA PRISON OÙJ'ÉTAIS DÉTENU

Lorsque l’attentat de Caen a été commis le 5 juin1987, je me trouvais alors en prison: à la Maisond’arrêt de Coutances, dans la Manche.

Étrangement, peu de temps après le crime, j’ai eula visite d’un individu qui s’est présenté comme étantun inspecteur de la PJ de Caen, mais qui,évidemment, ne m’a pas laissé son identité. Il venaitau sujet de cet attentat. Je n’ai plus en mémoire ladate exacte de cette visite, mais à cette époque ilsavaient déjà forcément identifié et arrêté Arcini.C’était une dizaine de jours après l’attentat que j’ai vucet inspecteur13.

Ce dernier avait en main le portrait robot du tueuret il m’a demandé si, par hasard, je n’aurais pas unepetite idée sur son identité. Le croquis n’était pas trèsbon (comme toutes choses de ce genre), mais j’aitout de suite eu la confirmation de ce que je pensais:c’était bien Arcini qui avait commis cela puisque je lereconnaissais sur la fiche de recherche que l’on meprésentait.

De plus, de ma cellule, j’avais suivi l’attentat carles média en parlaient abondamment. Et un type

13 Il serait possible d’avoir la date précise de cette visite, et l’identité del’inspecteur visiteur, en consultant le registre de la Maison d’Arrêt deCoutances.

avec une Simca 1100 TI de la couleur annoncée,susceptible de descendre des Arabes, j’avaisjustement ça dans mes relations! Pour moi le tueurne pouvait être qu’Arcini. Alors, dès le 5 juin 1987,dès après l’attentat, dès que les média ont donnédes détails, j’avais deviné que c’était lui qui étaitderrière cette affaire de Caen.

J’ai donc eu la visite d’un inspecteur qui a discutéamicalement et longuement avec moi de choses etd’autres, il me testait, cela se sentait. Il m’a préciséaussi que je n’avais pas trop à m’en faire, que je neprendrais pas trop à mon futur procès encorrectionnel (je devais comparaître moins de 2 moisplus tard) et que je serai libéré dans quelques mois(ce qui s’est révélé exact). Cela confirme ce que jerelatais au chapitre 4, section 2 où j’évoquaisprécisément ce procès "arrangé" de Coutances qui aeu lieu le 4 août 1987 et qui avait bien pour but deme faire sortir de prison le plus vite possible.

À la date de cette visite, la police judiciaire tenaitforcément Arcini, et cet inspecteur est, sans aucundoute, venu voir si je le balançais ou pas. Ainsi, jepense que c’est après cette visite qu’ils ont dûpendre leur décision. C’est-à-dire garder Arcini sousle coude, ne pas l’arrêter officiellement, car ils enavaient besoin pour la suite.

En effet, il ne fait aucun doute qu’ils savaient quej’avais connaissance, ou du moins forcément deviné,que c’était Arcini le tueur. Car une fois l’assassinarrêté après l’attentat de Caen, il leur a forcément ditqu’il me connaissait (il n’avait même pas besoin deleur dire: des éléments matériels démontraient quenous étions en contact). Donc cet inspecteur venaitpour voir si j’allais être coopératif et lui balancer lenom d’Arcini.

Comme je ne le lui ai pas donné, cela leur aconfirmé qu’ils auraient des problèmes avec moi etqu’aussitôt libéré j’allais reprendre mon activisme.Puisque, sans doute pour eux, si j’avais décidé de"raccrocher", il aurait été logique que je balanceArcini ne serait-ce que pour être libéré dans les jourssuivants pour "services rendus". D’ailleurs cetinspecteur me faisait miroiter la chose! Il ne secachait pas que si je lui rendais service, il merenverrait l’ascenseur tout de suite .

En quelque sorte, cette visite était pour eux unbon moyen de voir où j’en étais. S’ils avaient eu laconviction que j’allais me calmer une fois sorti deprison, Arcini aurait été (je pense) officiellement arrêtéet inculpé pour diverses affaires. Voire purement etsimplement supprimé comme l’a été Costa, et sansdoute quelques autres! Mais, comme ils ont eu laconviction que je n’allais pas me calmer en sortant detaule, on a décidé de garder Arcini sous le coude etde l’utiliser pour me faire mettre en tauledéfinitivement.

Là encore certains affirmeront que je me fais ducinéma, car finalement pour m’éliminer définitivementil aurait suffi de m’abattre comme l’a été Costa! Maisapparemment on a préféré me faire condamner.

Quant à savoir pourquoi, on aurait préféré mefaire condamner plutôt que m’abattre, je n’en saisrien!

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Mais que certains aient préféré unecondamnation, cela peut sembler logique, puisquecette affaire montée contre moi, relève(apparemment) de la vengeance afin de me fairepayer ma défection de la DPSD (cf. section 11 duchapitre 2)! Et qu’est-ce qui est le plus raffiné: sefaire abattre ou être condamné à perpétuité avecl’assurance, avec le régime actuel, de ne jamais êtrelibéré?

Il se peut également, que le "plan initial" ait prévu,qu’après "utilisation", je sois abattu, et que cela aitcafouillé dans l’organisation… Difficile de le savoir!

Quoi qu’il en soit, c’est quand même troublantcette visite de cet inspecteur que je viens de relaterdans cette section, surtout à une date où, fortlogiquement, et comme l’a d’ailleurs révélé la presselocale de décembre 1987, ils avaient déjà arrêtéArcini !

Chapitre 6

MA SORTIE DE PRISON (26 octobre 1987)

1. REPRISE DE CONTACT AVEC ARCINI

e 26 octobre 1987 j’ai été libéré de prisonaprès 9 mois plein puisque avec les remises depeine automatiques cela me faisait,

virtuellement, 12 mois accomplis.J’ai repris contact avec Arcini. Tout me semblait

normal. J’étais loin de me douter qu’il était tenu enlaisse par ses collègues du Ministère de l’Intérieur, etaussi par certains fonctionnaires du Ministère de laDéfense auquel appartient la DPSD…

Certes, j’avais été étonné qu’après l’attentat dejuin 1987 la police n’ait pas remonté au tueursachant qu’il avait utilisé sa propre voiture. Maisjamais je n’aurais imaginé qu’ils l’avaient interpellépour le relâcher afin de l’utiliser contre moi.

Une fois que j’ai revu Arcini, nous avonssimplement fait le point sur ce qui s’était déroulé cesderniers mois. Il a abordé l’attentat de Caen de juin1987, ainsi que celui de mars précédent à Petit-Quevilly. Mais, évidemment, il s’est bien gardé de meparler de son audition par la PJ telle que l’a relatée lapresse de décembre 1987. À aucun moment, jen’apprendrai cette fameuse précédenteinterpellation  ! C’est 10 ans plus tard, et par un

hasard total, que j’aurai connaissance que lesjournaux locaux de l’époque faisaient état de pointscapitaux qui font s’écrouler la version officielle decette affaire.

Le créneau d'octobre à décembre 1987 estparticulier, car comme Arcini a été identifié aussitôtaprès l’attentat de Caen commis en juin 1987, maisremis en liberté contre petit accord sur mon dos, toutce qui a suivi ma libération du 26 octobre 1987 étaitsous contrôle de ceux qui tenaient Arcini en laisse.En conséquence, tout ce que j’ai fait à partir du 26octobre 1987 l’a été sous l’œil d’observateurs, etparfois même fait selon les directives qu’ils donnaientà Arcini.

Normalement si, suite à l’attentat de Caen de juin1987, Arcini avait été officiellement arrêté, et écroué,je ne serais sans doute pas sorti de prison le 26octobre 1987. Je pense que j’aurais été inculpé pour"association de malfaiteurs", puisqu’il aurait étédémontré que j’étais en contact avec Arcini. Celam’aurait sans doute valu quelques mois de prisonsupplémentaires, mais sans plus, n’ayant en rienparticipé aux attentats commis par ce fonctionnairetrès spécial du Ministère de l’Intérieur…

Chapitre 7

L'ATTENTAT QUI M'EST REPROCHÉ

1. AVANT TOUTE CHOSE

l y a plusieurs versions de cet attentat. Certainessont les versions développées au procès de Caenen juin 1990, autrement dit ce sur quoi j’ai été

condamné. Je les désignerai dans ce récit sous levocable version officielle . On peut même parler desversions officielles !

Puis, il y a un autre récit, récent, qui émane d’untémoin de cet attentat, et qui contredit radicalementles versions officielles du Ministère Public. Mais lesaffirmations de ce témoin ont été recueillies en juillet1998 et janvier 2000, soit 10 ans et demi aprèsl’attentat dans le premier cas, et plus de 12 ans dansle second. Ces témoignages sont aussi intervenusplus de 8 et 10 ans après le procès. Ce qui veut direqu’elles ne furent pas prises en compte lors de ce

dernier. Je les inclus dans ce récit à titred’information, et surtout pour démontrer que cetteaffaire est loin d’être éclaircie.

Pour ma part je ne privilégie aucune des versionspar rapport à une autre, sachant que toutes, sansexception, comportent de nombreuses incohérences,et des impossibilités techniques. Toutes cesallégations contradictoires laissent surtout à penserqu’il y a eu mise en scène, et que ce ne fut qu’un"attentat virtuel".

Je vais relater chacune des versions, et détaillerchacune des hypothèses qui apparaissent. Dans unpremier temps, nous verrons les faits que j’ai commis,comment j’ai opéré ; le récit que le Ministère Public adonné de l’explosion qui aurait suivi, et ce que j’enpense. Puis, nous verrons les déclarations que cetémoin a faites en juillet 1998 et la version qu'il a

L

I

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donnée en janvier 2000, ainsi que ce que je penseégalement de ses deux récits.

Voyons donc cet attentat, à commencer par sonorganisation.

2. ARCINI N'Y A PAS PARTICIPÉDIRECTEMENT

Arcini n’a pas participé directement à cette action.De même, qu’il n’a pas pris part à l’assemblage de labombe. Je le spécifie puisque la version officielle ditque c’est lui qui l’a assemblée. Il m’a juste fourni lematériel (explosif, etc) qui était nécessaire pour laconception.

Pour eux , qu’Arcini ait assemblé cette bombe,c’était nécessaire pour joindre cet acte aux autres.Sans cela, comme Arcini n’a pas participé à cetattentat, j’aurais dû être jugé à part dans uneaudience séparée. Or on voulait me faire juger en sacompagnie et pour ce faire on lui a dit d’affirmer quec’était lui le concepteur de la bombe. Ainsi, il devenaitLE complice direct et un procès commun se justifiait.Plus loin je reviendrai sur ces artifices etmanipulations de procédure qui ont été utilisés pourme faire condamner au maximum.

Il va de soi que, si la police n’avait pas sciemmentrelâché Arcini quelques mois plus tôt, cet attentatn’aurait, évidemment, jamais eu lieu. Les problèmesqui seraient survenus suite à l’arrestation officielle dutueur de Moussaoui m’auraient coupé de bien dessources d’approvisionnement. Sans oublier leséventuels problèmes judiciaires pour moi-même.

Mais après tout si on a relâché Arcini, après qu’ilait accepté le petit accord , c’était pour me fairecommettre une action criminelle. En conséquence,que mon "complice" m’ait poussé pour que je passeà l’acte est dans l’ordre des choses. Cela faisaitpartie du petit accord…

L’idée que je commette un attentat, seul, s’estdécidée "normalement". Arcini m’en a entretenu, ilétait passé à l’action, et souhaitait vivement que j’enfasse de même… Ou plus exactement ceux qui letenaient en laisse, depuis son arrestation initiale,souhaitaient vivement que j’en fasse de même!

Arcini me recommandait de passer à l’acte avecune bombe, "pour changer". Les deux autresattentats connus en Normandie ayant été des"mitraillages", il fallait "changer", selon lui… En fait jecomprends le pourquoi d’une bombe, car celapermettait de faire échouer cet attentat! Ce quin’aurait pas été le cas si j’avais utilisé une arme àfeu. Car à moins de me mettre des "balles à blanc",ce qui aurait rendu évidente la supercherie, je voismal comment on aurait pu me faire échouer… Tandisqu’avec une bombe, comme nous le verrons plusloin, ce fut très simple.

Je me suis décidé pour fin novembre. La cible quime fut désignée: le bar Au Pavillon d'Alger à Petit-Quevilly (227 rue Kennedy), près de Rouen. Actionprévue pour le lundi 30 novembre 1987. Cetétablissement faisait l’objet d’une "fiche" complèteindiquant comment il fallait opérer. Nous avions "enboîte" un tas de cibles diverses de ce genre. Les

repérages, pour établir ces fiches, avaient étéeffectués auparavant, en général courant 1986, soitpar Arcini, soit par moi.

3. TRAJET CAEN-CHERBOURG(vendredi 20 novembre 1987)

Le vendredi 20 novembre 1987 je me suis rendudans une cache située à Caen pour prendre de quoiconfectionner une bombe. Tout était déjà prêt. Unréveil était déjà transformé en minuterie (il y en avaitplusieurs prêts d’avance dans cette cache). J’ai prisaussi une charge de plastic, et divers autresaccessoires nécessaires pour réaliser cela.

Ensuite j’ai quitté Caen pour me rendre àCherbourg, où je suis descendu dans un hôtel sousun nom d’emprunt. Arcini connaissait mon point dechute, par conséquent la police qui le tenait en laisseaussi…

3. ASSEMBLAGE DE LA BOMBE(dimanche 22 novembre 1987)

La bombe a été assemblée le dimanche 22novembre, dans l’après-midi, en présence d’HarlemDésir! En effet, à la télévision, sur La 5 de l’époque,Guillaume Durand recevait Désir!

En réalité j’ai assemblé deux engins explosifs:l’un, la bombe destinée à l’attentat, l’autre à un test,une "bombe-test".

Ce qui était destiné à l’attentat, se composaitd’une charge explosive mise dans une boîtemétallique (boîte de conserve). Environ 500 tronçonsmétalliques entouraient le plastic. Le systèmed’amorçage était électrique: composé de deuxdétonateurs couplés. Par sécurité, j’en avais misdeux pour le cas où l’un d’eux aurait eu un problème.Ces détonateurs étaient alimentés par une pile 9volts incluse dans le système de mise à feu. Cedernier constitué par un réveil mécanique transforméde façon à ce qu’il fasse office de "ferme-circuit".

Autrement dit une bombe à retardement tout cequ’il y a de plus classique. Voir ci-dessous le schémaglobal de la bombe destinée à l'attentat:

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La charge explosive que j’ai mise (nous verronsplus loin qu’elle a pu être changée), était de la Tolite(un plastic dérivé du TNT). Elle peut être évaluée à150 grammes, je n’ai pas pesé, mais à vue de nezc’était ça. J’avais un pain qui provenait d’une"récupération".

La provenance de cette charge de plastic étaitassez spéciale. En 1986, lors d’un week-end, lagendarmerie maritime du Havre a trouvé, devantl’embarcadère des car-ferries, un pain de Tolite sansdoute jeté par des "touristes" qui ont eu peur deprendre le ferry avec. Comme l’artificier-démineur depermanence pour toute la Normandie (et la Bretagne)ce week-end là c’était Arcini, il est arrivé avec sonvéhicule de fonction, a embarqué la découverte, etselon les lois de "l’évaporation": en route cela afondu!

Il avait été attendu les analyses chimiques pourmettre cet explosif, ainsi récupéré, "en cache". Carune partie de ce qu’Arcini avait rapporté à son atelier(il n’avait quand même pas tout détourné!), avait étéenvoyé en laboratoire afin de tenter d’en établirl’origine. C’est revenu "inconnu": aucune signaturechimique n’avait été ajoutée lors de la fabrication decet explosif. Donc impossible d’établir le numéro dulot. C’était de l’explosif étranger, sans doute d’Europede l’Est, et bon pour le service. Ce qui a été récupéréau Havre a été mis dans une cache, et c’est ceplastic-là, testé en laboratoire, que j’ai utilisé.

5. ESSAI AVEC LA BOMBE-TEST(lundi 23 novembre 1987)

Comme dit plus haut, j’ai en fait assemblé deuxengins, l’un (la bombe) avec système de mise à feuélectrique: un réveil, une pile et double détonateurélectrique. L’autre (la bombe-test) avec un systèmede mise à feu pyrotechnique: une mèche avec unseul détonateur.

Le lundi 23 novembre 1987, soit juste 7 joursavant l’attentat, je suis parti en voiture de Cherbourgen direction de Saint-Vaast-la-Hougue. J’avais avecmoi un attaché-case qui contenait mes deux bombes.Arrivé à mi-chemin de Cherbourg et Saint-Vaast, jeme suis arrêté pour aller sur une plage déserte que jeconnaissais et qui avait de nombreux blockhaus.

J’ai placé dans l’un d’eux ma bombe-test, j’aiallumé la mèche qui me donnait 30 bonnessecondes, et j’ai filé dans un autre blockhaus. Cela aexplosé, test concluant, aucun dégât extérieur sur lebéton, la charge était évidemment trop faible pour le"briser". Je ne faisais qu’un test, je m’assurais quetout était en ordre. Cet essai probant signifiait que lasœur jumelle de la bombe-test était bonne pour leservice.

Si j’insiste bien sur le fait que l’explosif avec lequelj’ai constitué la bombe était bon, c’est que dans laversion officielle de cette affaire (comme nous leverrons plus loin), ce qui aurait explosé le lundi 30novembre 1987 à Petit-Quevilly était défectueux.

Il y a là un mystère qui ne peut s’expliquer quepar une substitution!

6. POSSIBLE SUBSTITUTION DE L'EXPLOSIF

Après le test, je suis rentré à l’hôtel où je n’avaisplus qu’à attendre une semaine pour passer àl’action puisque c’était prévu pour le lundi 30novembre 1987.

La bombe était placée dans un attaché-casefermé, et régulièrement je m’absentais, la malletterestait, elle, dans ma chambre. Si, comme nous leverrons plus loin, ce qui a explosé lors de l’attentatn’est pas l’explosif avec lequel j’ai assemblé labombe, la substitution a pu s’opérer au cours d’unede mes sorties qui parfois duraient quelques heuresquand même…

Pour cette opération, il suffit de deux personnes,l’une qui me suit et qui indique par radio à une autre,que je me trouve à l’autre bout de la ville et que c’estle moment d’y aller.

Il est tout à fait possible que ces messieurs de laDPSD et autres, aient envoyé quelqu’un dans l’hôtel,dans une chambre voisine. Par radio, il était aisé deprévenir ce complice pour lui dire que j’étais à l’autrebout de la ville, qu’il devait entrer dans ma chambre,et modifier, vite fait, la bombe.

Le temps d’ouvrir l’attaché-case (fermé à clé, maissimple à déverrouiller pour un professionnel), dedéballer la bombe, de changer la charge, etc, c’étaitfaisable en largement moins de 30 minutes pourquelqu’un qui s’y connaît. Et s’ils ont fait cela, ils ontdû envoyer un technicien des explosifs.

J’ignore à quel moment cela a été fait (etnotamment si cela a réellement été fait ! Car ce n’estqu’une hypothèse pour expliquer un point qui seraexaminé plus loin dans ce récit!), mais cettesubstitution a pu être faite à de très nombreusesreprises, et notamment une qui semblerait toutindiquée.

7. CABINES TÉLÉPHONIQUES TOUTES "ENPANNE"

Le lundi 23 novembre 1987, après avoir effectuémon essai avec la bombe-test, le soir, je devais êtredans une cabine téléphonique de Cherbourg pour yrecevoir un appel d’Arcini. À l’heure dite, rien. 30minutes plus tard j’étais à une autre cabine, toujoursrien, et ainsi de suite avec changement de cabinetoutes les 30 minutes pendant 2 heures, soit 5possibilités.

Nous avions ce système pour communiquer. Danschaque ville d’importance en Normandie nous avionsétabli des séries comprenant une liste de 5 cabines.Alors, pour se fixer un rendez-vous téléphonique,c’était (par exemple): « À Cherbourg, 21 heures, sérieA. » Donc à l’heure H il fallait être dans la bonne ville,dans la première cabine de la série indiquée. Si onavait manqué le rendez-vous, à H + 30 minutes ilfallait être dans la seconde cabine de la sériementionnée ; et ainsi de suite jusqu’à H + 2 heures.

Comme ce soir-là je n’ai pas eu le contact, je suisrentré à l’hôtel. Et peu de temps après, le téléphonea sonné dans la chambre, c’était Arcini quim’appelait. Il savait que j’étais descendu ici puisque

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je lui avais dit, ainsi que le nom (d’emprunt) souslequel j’allais y descendre.

Il m’a dit à mots couverts (car je craignais lesécoutes) qu’il ne pouvait pas me joindre, que lescabines « sonnaient toutes “occupé” », et qu’il fallaitque je vienne le voir à Caen. Je lui ai répondu que jele contacterai le lendemain, soit le mardi 24novembre 1987, à 21 heures, sur telle série decabines de Caen.

Cependant, après l’appel d’Arcini, je suis sortiimmédiatement pour m’assurer que l’on ne pouvaitpas appeler les cabines de Cherbourg. Je suis allévers un groupe de téléphones où il y en avait aumoins deux côte à côte. J’en ai utilisé un pourappeler celui d’à côté et écouter si cela sonnait.Impossible, cela donnait une tonalité comme"occupé" alors que le combiné de l’autre poste étaitpourtant bien raccroché… Je suis passé dans uneautre cabine pour réaliser la même opération: mêmeéchec. Je me suis alors déplacé pour tester un autregroupe de téléphones, et j’ai ainsi pu constater quele dysfonctionnement était général.

En effet, c’était toutes les cabines téléphoniquesqui étaient "en dérangement". On pouvait appeler unparticulier depuis un téléphone public (celafonctionnait car j’avais testé en composant unnuméro pris au hasard dans l’annuaire), maisimpossible d’appeler quelqu’un se trouvant dans uneautre cabine ! Et cela quelle que soit la ville, car j’aiappelé, à tout hasard, des téléphones publics deCaen, Saint-Lô, Rouen et Le Havre (dont j’avais lesnuméros), et cela sonnait "occupé" partout!

Du coup, c’était tout le réseau de communicationmis en place entre Arcini et moi qui se trouvaitinutilisable!

Sur le moment j’ai mis cela sur le compte d’unproblème technique des cabines situées àCherbourg. Mais, je me demande, avec le recul, s’ils(DPSD RG, et autres!) n’avaient pas déconnecté tousles téléphones publics afin que l’on puisse s’en servirnormalement (pour joindre des particuliers), mais pasy être appelé et/ou appeler une autre cabine.

C’était simple à réaliser, il suffisait de débrancherquelque chose au central régional, et le tour étaitjoué. Les téléphones publics sont un réseau à part, ilpeut être déconnecté aisément. C’est d’autant plusvrai qu’il suffit de se souvenir qu’au début desannées 80, il était encore impossible d’appeler despersonnes se trouvant dans des cabinestéléphoniques publiques. L’attribution de numéros àces dernières était une chose assez récente aumilieu des années 80. Ce qui veut dire que le boîtiercommutateur, empêchant les cabines de recevoir desappels, était encore aisément accessible…

Quoi qu’il en soit, le lendemain, c’est-à-dire lemardi 24 novembre 1987, à 21 heures, je devaisappeler Arcini. J’étais dans une cabine de Cherbourgpour l’appeler à Caen, dans le premier poste de lasérie indiquée. Mais, avant de me rendre au rendez-vous, j’avais de nouveau testé les téléphonespublics, et ils étaient toujours en dérangement,

comme le veille! Je n’ai en conséquence pas eu lecontact à l’heure H.

Je suis rentré à mon hôtel, et à H plus 30 minutes,j’ai demandé à la réception d’avoir tel numéro. Cettefois cela a fonctionné, j’ai eu Arcini. Comme jen’appelais plus depuis une cabine de Cherbourg, j’aipu avoir un téléphone public de Caen. C’était laconfirmation que seules les cabines téléphoniquesde Cherbourg étaient en dérangement. Voilà unproblème technique qui, avec le recul, me sembletrès étrange, trop opportun!

En tout cas, ce mardi 24 novembre 1987, j’ai euArcini au téléphone, comme il m’avait appelé la veilleet qu’il voulait me voir, je lui ai demandé si c’était« vraiment important », et cela l’était (disait-il), il fallaitque je vienne absolument à Caen le plus vitepossible. J’ai alors pris rendez-vous pour lelendemain, soit le mercredi 25 novembre. Je décidaisde me rendre à Caen par le train.

Si l’hôtel était sur écoute (et il l’était, c’est mêmepour ça que toutes les cabines étaient"neutralisées"!), ils ont eu la conversation de la veille,puis celle du jour, et savaient que le lendemain j’iraivoir Arcini.

8. OBLIGÉ DE PARTIR POUR CAEN(25 novembre 1987)

Ce déplacement ne faisait pas mon affaire, je nepouvais quand même pas me balader avec unebombe assemblée dans un attaché-case, surtout queje devais être mobile pour aller à Caen.

J’avais le choix entre laisser la mallette dans lachambre d’hôtel, ou aller la cacher. J’ai opté pour laseconde solution et le matin je suis allé mettre labombe dans une cache qui ne contenait rien d’autre.

Après j’ai pris le train Cherbourg-Caen, et pourcertains c’était l’assurance que je ne rentrerais pasavant tard le soir: Cherbourg étant en bout de ligne,les trains sont rares!

Une fois à Caen, je suis allé voir Arcini à un lieuconvenu, et en fin de compte cela n’avait riend’urgent! C’était un rendez-vous de routine danslequel nous avons juste abordé des problèmes destockages de matériel. Nous avons aussi parlé del’attentat futur.

Encore aujourd’hui je ne vois que deux raisons àce rendez-vous. Soit Arcini, ou plus exactement ceuxqui le tenaient en laisse, avaient besoin d’uneconfirmation: celle que je passerai bien à l’action. Soitils voulaient m’éloigner de la bombe.

En effet, il serait tentant de penser qu’Arcini m’aattiré pour m’éloigner de l’engin assemblé. C’estpossible, mais pas certain, car j’aurais pu venir avec,rien ne disait que je n’allais pas venir avec monattaché-case et ils ne pouvaient pas le prévoir àl’avance. Ils ne pouvaient pas être certains quej’allais le laisser à Cherbourg. De plus m’éloignantrégulièrement de la bombe aux cours de sorties, ilsn’avaient pas réellement besoin d’Arcini. Mais, on atrès bien pu profiter de cette occasion (idéale!) pourchanger l’explosif et/ou trafiquer les détonateurs!

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Il se peut aussi fort bien qu’ils aient demandé àArcini de me faire venir à Caen afin qu’il puisse medemander, de vive voix (car au téléphone, je n’enaurais pas parlé), si j’étais bien décidé pour cetattentat… Ce que je lui ai confirmé. Nous étions le 25novembre, c’était pour le 30!

Je suis rentré assez tard dans la soirée àCherbourg, je suis allé récupérer l’attaché-case, jen’ai rien remarqué. La bombe y était, et je ne l’ai pasouverte, notamment je n’ai pas ouvert la boîtemétallique contenant la charge de plastic pour voir sic’était le même type d’explosif! Je n’avais pas deraison logique de faire cela. La charge était dans uneboîte fermée par un couvercle en bois enchâssédedans (cf. schéma à la section 4 de ce chapitre) etc'était "du boulot" à ouvrir. Tout était assemblé, il n’yavait plus qu’à relier les prises électriques et à libérerla trotteuse du réveil, point.

En quelque sorte, une fois la bombe assembléedéfinitivement, c'était comme un pli qu'il n'y avait plusqu'à poster. Aucune raison logique d'ouvrir ànouveau pour vérifier puisque cela avait déjà étévérifié, à moult reprises, avant fermeture définitive…Pour ouvrir ma boîte de conserve, et aller vérifier sic'était toujours de la Tolite qui y était, il aurait falluque j'aie des doutes: que j'imagine qu'on ait pu mesaboter mon engin. Mais qu'est-ce qui aurait pu mefaire penser une chose pareille? Il aurait fallu faireune crise de paranoïa aiguë pour cela!

De même que je n'avais aucune raison d’allervérifier si on ne m’avait pas, par hasard, "bidouillé",voire "crevé" les détonateurs!

9. TRAJET CHERBOURG-ROUEN(27 novembre 1987)

Le vendredi 27 novembre 1987 j’ai quittéCherbourg pour gagner Rouen où je suis descendudans un hôtel 0ù j’avais réservé jusqu’au lundi.

10. DERNIERS REPÉRAGES(29 novembre 1987)

Le dimanche 29 novembre 1987 je suis alléeffectuer les derniers repérages, à savoir une visitede la cible à Petit-Quevilly. Je m’y suis rendu en bus.Je suis entré dans le bar vers les 15 heures, j’y ai prisune consommation. Cela m’a permis de voir que toutétait bien conforme aux indications que j’avais sur la"fiche de repérage" qu’Arcini m’avait remise. Vers les15 heures 15 je suis ressorti et je suis rentré à Rouenpar le bus.

11. L'ATTENTAT EN LUI-MÊME, TEL QUE J'AIOPÉRÉ (30 novembre  1987)

En fin de matinée (vers midi) le lundi 30 novembre1987, j’ai quitté l’hôtel où j’étais descendu, et je suisallé mettre mon sac d’affaires à la consigne de lagare, puis j’ai mangé au buffet. Après je suis parti, enbus, avec sous le bras un sac en plastique (àl’enseigne d’un supermarché) emballant une boîte encarton dans laquelle j’avais mis la bombe (les prises

électriques étaient alors reliées comme sur le schémaqui est à la section 4).

Arrivé à Petit-Quevilly, je suis passé à pied devantle bar, tout était en ordre. Il y avait du monde (cela sevoyait à travers les vitres tintées) et je suis entré dansl’établissement. Il était 14 heures.

Une fois entré Au Pavillon d'Alger, j’ai trouvé ladisposition que j’ai indiquée sur le plan suivant. Iln’est pas à l’échelle précise. J’ai mis une dispositionsymbolique pour les tables. C’est juste pour montreroù elles étaient par rapport au bar. De même que le"percolateur" (il s'agit du distributeur debière/limonade pression et non de la machine à café) était peut-être 50 centimètres plus à gauche. Ceplan sommaire est là pour donner aux lecteurs uneidée générale de la configuration des lieux:

Si j’en crois la version officielle de cette affaire, les9 personnes qui se trouvaient dans ce bar lorsque j’ysuis entré, sont: Jelassi, Belghazi, Bounifia (c’est leserveur), Chouikh, Darcy, Fenet, Baahmed, Poyac etLaoudj.

Ce sont ces 9 noms qui figurent sur desdocuments officiels de cette affaire, mais pour mapart j’ignore si ce sont, réellement, ces 9 personnesqui étaient dans le bar. Je n’ai pas demandé les titresde séjour en entrant… Mais il y avait bien 9personnes lorsque je suis entré.

Il n’y avait pas un seul Européen dans cetétablissement lorsque j’y suis entré. Je le stipule cardes noms pourraient prêter à confusion. Pour ma partsi j’avais remarqué qu’il y a un ou des Européensdans ce bar infâme, cela n’aurait rien changé.Seulement je m’étonne quand même de voir desnoms à consonance européenne dans ce lieu où iln’y avait que des Arabes. Il peut être évoqué lafrancisation des noms d’immigrés pour expliquer cela,

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mais je ne suis pas si sûr! Il y a de quoi se poser desquestions, notamment si la liste officielle des présentsdans ce bar est réellement ceux qui y étaient lorsquej’y suis entré. Vu l’ampleur de la manipulation et desmoyens mis en œuvre, cela ne peut être exclu. Car,comme nous le verrons plus loin, ces présents danscet établissement, ces témoins, nous ne les reverronspas lors du procès qui suivra…

Quoi qu’il en soit, le plan précédent montre ou j’aidéposé la bombe. Je l’ai mise sur la gauche entrel’espace séparant le bord du comptoir du bord du"percolateur" à bière qui était surélevé de plusieurscentimètres. Le paquet ne dérangeait personne, il yavait juste la place pour lui et il n’était pasvolumineux.

Une fois au zinc, j’ai commandé un café que j’aibu, puis j’en ai commandé un second, j’ai payé14, etj’ai sucré ce second café.

Ensuite j’ai ouvert mon sac, j’ai enroulé dans mamain le fil rigide qui bloquait la trotteuse du réveil, etj’ai roulé la boîte en carton et le sac ensemble. Cequi fait que ce paquet piégé, posé sur le bar, avaitl’apparence d’une poche de plastique bien ajustéequi emballait une boîte quelconque.

Après je suis sorti par la porte des toilettes(indiquée sur le plan précédent). Mais cela nedonnait pas réellement directement sur les toilettes, ily avait un petit couloir avec une autre porte quidonnait sur la cour dans laquelle il y avait unbâtiment "toilettes".

Sur le plan suivant il n’est pas indiqué ce petitcouloir pour sortir dans la cour. Là aussi j’ai réalisé unplan très symbolique pour donner une idée générale.De même dans la cour il y avait des abris pour lesréserves du bar avec des caisses empilées.

Je suis parti comme c’est indiqué sur le plansuivant:

14 Le serveur s’est même trompé (en ma faveur) en me rendant lamonnaie… Etait-il au courant de quelque chose qui l’a fait être"impressionné" au point de ne plus savoir compter?

Il n’y avait pas de fenêtre entre la partie "bar" et lapartie "cour", dès lors ils ne pouvaient pas me voirpartir. La "sortie vers rue" indiquée sur le plan, c’estun portail qui était ouvert.

Lorsque je suis sorti dans la rue je n’ai rienremarqué d’anormal, ce n’était pas un endroit trèspassager (coin très malfamé...). Juste deux petitesrues (le bar étant à l’angle des deux ruelles), l’unevenant se terminer dans l’autre comme indiqué sur leplan.

Ce qui s’est déroulé dans ce bar après mondépart, je l’ignore totalement !

Car après avoir déposé et mis en œuvre mabombe, ou ce que je croyais être ma bombe, je suisparti dans la direction indiquée sur le plan précédent.J’ai tourné à l’angle d’une rue plus loin (environ 200mètres), et je me suis dirigé, en traversant unboulevard à grande circulation, vers un quartierd’immeubles résidentiels. Je suis entré dans l’und’eux par la porte de derrière donnant sur lescaves/garages à vélos. Il fallait un code d’accès pouraccéder au hall d’entrée (par la face avant dubâtiment), mais par l’arrière (par le garage à vélos), laserrure de la porte avait été préalablement"neutralisée".

Théoriquement j’aurais dû "faire sauter" cettefermeture la veille (juste après les derniers repéragesdans le bar) pour tout préparer. Mais j’ai eu de lachance, car je n’en ai pas eu besoin, puisque lorsquej’y suis allé le dimanche, j’ai constaté qu’il n’y avaitdéjà plus de serrure! Je présume que des "jeunes"étaient passés par là. Je n’imagine quand même pasque ceux qui tenaient Arcini en laisse, ayant lu lesplans de repérage et d’action, avaient décidé dem’aider et d’ouvrir cet accès. Serviables, mais peut-être pas à ce point quand même! Quoique…

Le "plan de repli" était bien mis au point car celaavait été préalablement repéré et minuté puisque,comme je l’ai indiqué plus haut, ce bar faisait l’objetd’une fiche détaillée. Cette dernière, évidemment,accessible à ceux qui tenaient Arcini en laisse…

Une fois dans le garage à vélo, et constaté qu’iln’y avait personne, j’ai ôté mon blouson beige,dessous j’en avais un couleur bleu nuit. J’ai ôté monpantalon noir qui recouvrait un jean bleu. J’ai mis cesaffaires ôtées dans un sac poubelle que j’avais avecmoi. Ainsi, s’il avait été diffusé le signalementvestimentaire du poseur de la bombe, je n’ycorrespondais plus du tout.

C’est à ce moment-là, 14 heures 10, que labombe aurait dû exploser, soit à H plus 5 minutes.Mais je n’ai rien entendu! J’ai mis cela sur le fait quej’étais dans un sous-sol d’immeuble. Cependant, celam’a semblé étrange de ne rien entendre…

Après avoir ôté mes vêtements, je suis sorti par laporte de devant de ce bâtiment, exactement commesi j’habitais la résidence ou que j’en sortais à l’issued’une visite. J’avais à la main mon sac poubellecontenant les vêtements ôtés. Je l’ai déposé dans unconteneur près du jardin d’agrément situé devant.Ces affaires sont ainsi parties (je suppose) àl’incinérateur au ramassage suivant des ordures.

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Mémoire de Michel Lajoye page 41

12. RETOUR À CAEN (30 novembre 1987)

Ensuite j’ai pris le bus, direction la gare de Rouen(c’était direct), afin de prendre le train pour regagnerCaen. Mais cela n’a pas été comme prévu, car j’ailoupé mon train initial: il y avait une énormemanifestation d’agriculteurs dans Rouen, ils ontbloqué la circulation des bus. Sinon c’étaitchronométré pour que je prenne tel bus, que je soisà telle heure à la gare car il y avait un train qui partaitpour Caen quelques minutes après.

Comme je n’ai pas pu prendre le train prévu, jedevais attendre le soir (la liaison Rouen-Caensuivante) et cela posait un très gros problème desécurité. Le plan initial prévoyait qu’avant qu’unéventuel ordre de bouclage soit donné, j’aie déjàquitté Rouen. Ce plan mettait en avant qu’ilsn’auraient pas pensé que le poseur de la bombeavait pu filer si vite et être déjà hors de la villelorsqu’ils l’auraient bouclée. En étant bloqué dansRouen jusqu’au soir, cela rendait toute présencestatique à la gare dangereuse puisque la policepouvait venir la boucler.

Pour pallier ce problème, j’ai récupéré mon sacd’affaires à la consigne de la gare, je l’ai mis sur mondos, et je suis allé manifester avec les agriculteurs.Meilleur moyen de passer inaperçu. Le soir commeun groupe d’agriculteurs rentrait sur Caen, je suisrentré tout simplement avec eux.

Apparemment aucun bouclage de l’agglomérationn’avait été mis en place.

Je signale, car cela a son importance, qu’après lapose de la bombe, j’ai pris le bus à un arrêt d’uneartère principale et en descendant vers Rouen et sagare SNCF, je n’ai croisé aucune force de policeremontant à plein gyrophare vers le lieu de l’attentat.Mais comme devant il y avait une manifestation, ilsauraient eu sans doute du mal à passer, ils ont dûcontourner, ce qui expliquerait que je n’ai rien vu. Oùalors il n’y avait rien à voir car il ne s’est rien déroulé!

13. RÉCIT DE L'EXPLOSION DE LA BOMBE(version officielle)

C’est le lendemain, par la presse régionale, quej’apprendrai que cette bombe aurait fait trois blesséslégers et cela m’a semblé incroyable!

La presse du 1er décembre ne publiera qu’un trèscourt entrefilet pas de détail: black-out sur cetattentat dans l’édition de Ouest-France du mardi. Ilétait seulement mentionné une explosion faisant 3blessés légers, ainsi que le lieu de la déflagration.C’est tout! Apparemment les journalistes, lorsqu’ilsont bouclé leur édition vers les 22-23 heures,n’avaient pas encore les détails autorisés de cetteexplosion intervenue, officiellement, vers 14 heures!Cela peut sembler bizarre quand même!

Ce n’est que dans le quotidien suivant, c’est-à-dire dans le Ouest-France du mercredi 2 décembre1987, que j’ai eu des détails et que j’ai appris que lebar en zinc avait "fait écran"…

Le plan suivant montre la disposition lorsque labombe aurait explosé, et cela, selon les versions

officielles (il y en a plusieurs!) développées au procèsde Caen en juin 1990:

L’une des versions officielles dit que le serveurBounifia, voyant le paquet et pensant que je l’avais"oublié", l’a pris aussitôt après mon départ et missous le bar. Oui, mais où ça sous le bar, au milieu, àdroite, à gauche? C’est vague, plusieurs possibilitésque j’ai symbolisées sur le plan par trois bombes. Unedes versions, la plus répandue, a dit que la bombe aété mise sous le percolateur [à bière/limonade] (doncvers le milieu du bar) ; une autre dit sous le tiroir-caisse) ce qui est vague! Mais il me semble qu’il étaitsur la gauche, sous la machine à café.

Quant au fait, qu’il aurait pensé, que j’avais"oublié" le paquet et qu’il l’aurait ôté aussitôt aprèsmon départ, c’est un peu gros! J’étais parti auxtoilettes, j’avais mon café fumant sur le bar, et vu leretard qu’avait encore la bombe lorsque je suis sorti, ilrestait dans les 4 minutes avant l’explosion. Uneabsence de 4 minutes était encore normale…

Surtout que j’avais fait en sorte de faire le benêtqui ne savait pas lire en lui demandant: « Lestoilettes, SVP? », afin qu’il m’indique la porte oùc’était marqué dessus, et qu’il voit bien que j’y allais.

Et j’indique bien que j’avais réglé les cafés pourqu’il ne pense pas que je m’en allais sans payer!

Dès lors, cette histoire du paquet mis prestementde côté par le serveur, car il a pensé que j’étais partiet que je l’avais "oublié", ce n’est pas très crédible.

Ensuite, il y a deux versions officielles . L’une ditqu’après avoir déplacé la bombe, le serveur est partiservir un client à une table et que l’explosion s’estproduite. L’autre dit qu’après avoir déplacé le paquet,il est parti essuyer une table et que la déflagrations’est produite.

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Mémoire de Michel Lajoye page 42

Dans les deux cas (sur le plan précédent) j’aisymbolisé le serveur au milieu des tables. Voilà donccomment était ce bar, avec ses occupants, lorsquecela aurait explosé, du moins dans les diversesversions officielles développées lors des débats duprocès.

Quant à la version d’aller servir des clients, pastrès crédible, il y avait 9 présents, tous autour ducomptoir! Il faudrait alors que certains soient sortis etqu’ils aient été remplacés par le même nombre denouveaux venus qui se seraient installés à une table,afin de toujours faire 9 présents dans l’établissement.C’est possible, de même que certains qui étaient auzinc ont pu s’asseoir, mais il faut une sacréecoïncidence. La bombe n’avait plus que 4 minutes deretard lorsque je suis sorti et apparemment aucunclient du bar ne s’apprêtait à sortir ou à bouger.

L’autre version qui dit que le serveur est partiessuyer une table, pas crédible non plus. Car lorsqueje suis entré les tables étaient propres, elles étaienttoutes inoccupées (j’avais envisagé de consommer àune table plutôt qu’au bar), et le serveur jouait auxdés avec des clients. Il aurait fallu qu’il abandonne sapartie pour pendre une éponge et aller essuyer unetable…

Mais je comprends l’embarras des tenants desversions officielles , car comme, officiellement, labombe a été déplacée et mise derrière (ou sous) lecomptoir, il faut obligatoirement que le serveur soitdans la salle, de l’autre côté du bar.

En effet, si, lors du procès, toutes les versionsofficielles avaient situé Bounifia derrière son zinc(avec la bombe à côté de lui), nous aurions pudemander (juste comme ça, par pur mauvais esprit)comment il a fait pour ne pas être gravement blessépar cet engin lui explosant dans les jambes!

En conséquence, il faut, il est impératif même,que toutes les diverses versions officielles(développées au procès) situent le serveur Bounifiadans la salle, du "bon" côté du bar. Ce dernier étantce qui est censé avoir fait "écran total" entre labombe et les personnes présentes dans la pièce.

14. LE PARQUET N'A JAMAIS CONVOQUÉ LESTÉMOINS!

Évidemment, nous aurions pu en savoir plus (etéclaircir certains points!) si, au procès qui a suivi, leParquet avait fait citer les témoins!

Car, c’est bien cela qui est suspect, le récit del’attentat, donc de ce qui se serait déroulé après mondépart du bar, a été relaté par le président de la Courd’Assises! Ce dernier s’appuyait, pour son compterendu, sur des documents qu’il avait entre ses mains.Aucun témoin direct n’est venu, à la barre, confirmerou infirmer les dires du Ministère Public!

Moi-même, n’ayant pas assisté à l’explosion (etpour cause!), j’ignorais totalement si la version querelatait le président de la Cour était la vraie. Commentaurais-je pu le savoir? Aucun témoin direct desévénements n’était là pour nous donner sa version! Iln’y avait qu’une version, qu’une vérité: celle duMinistère Public!

Pourtant, dans ce bar, lorsque la bombe auraitexplosé (selon la version officielle), il y avait, si j’encrois les documents judiciaires, 9 personnes ayantces noms: Jelassi, Belghazi, Bounifia, Chouikh,Darcy, Fenet, Baahmed, Poyac et Laoudj. Parconséquent, 9 témoins qui m’ont vu entrer, qui ont vuet surtout subi l’explosion qu’il y aurait eu. Ces gensauraient pu, et même dû, venir nous relater à la barredes témoins ce qui a bien pu se dérouler dans cetétablissement une fois que j’en suis sorti.

Bounifia, le serveur, n’était même pas cité àcomparaître pour nous raconter comment il avaitdéplacé la bombe! C’est dire si ceux qui ont montétoute l’affaire craignaient que la vérité n’apparaisse siles témoins venaient déposer à la barre!

Mais "encore mieux": durant l’instruction, je n’aijamais vu ces témoins! Aucune confrontation enprésence du juge! Ce sont 9 témoins qui auraientpourtant dû raconter (au juge d’instruction) 9 fois lamême chose à savoir l’explosion qu’ils ont subie.

J’ai eu beau feuilleter le dossier officiel, je n’aitrouvé aucun procès-verbal d’audition de ces 9témoins par le juge d’instruction! Est-ce normal qu’unmagistrat instructeur, dans une telle affaire, neconvoque pas les témoins pour les entendre dansson cabinet?

Les seuls témoignages des 9 personnesofficiellement présentes dans ce bar sont contenuesuniquement dans des procès-verbaux de policeréalisés après cet attentat! Ces témoins n’ont jamaisété interrogés par la suite! Ce sont simplement des"procès-verbaux" de police qui ont servi de "preuves"pour me faire condamner! Qui prouve que cesprocès-verbaux de police judiciaire sont LA vérité?Les faits qu’ils contiennent sont très contradictoiresen tout cas.

Et qui prouve que, par exemple, l’individu nomméJelassi (qui a déposé dans un procès verbal depolice après l’attentat) était réellement dans ce bar?Qui me dit que ce ne sont pas des "auxiliaires" depolice, des "indics", etc, que l’on a fait témoignerdans ces procès-verbaux?

Et là j’en reviens au fait que certains qui ontdéposé dans ces procès-verbaux, et qui ontprétendu être dans ce bar, ont des noms àconsonance européenne! Pourtant il n’y avait aucunEuropéen dans ce bar…

Et tout ce que je sais, c’est que si ces 9 témoinsn’ont pas été convoqués pour déposer lors du procèsde Caen, c’est que l'on nous cache, évidemment,quelque chose! Un procès aux Assises sans lesdépositions, à la barre, des témoins directs qui ontassisté aux faits criminels, c’est rare!15

15 Même si cela tend à se généraliser! En effet, en décembre 1997, lorsdu procès de l’affaire de la rue Toullier (en 1975, 22 ans avant le procès,des agents de la DST/Mossad et un de leurs indicateurs furent retrouvésabattus), le Ministère Public a refusé de faire déposer, à la barre, lestémoins oculaires! Lors de ce procès, l’accusé Ilich Ramírez Sánchez,alias Carlos, a par conséquent été condamné à la réclusion criminelle àperpétuité sans que les témoins des faits (pourtant encore en vie,clairement localisés, et en mesure de venir témoigner) ne viennentdéposer à la barre pour donner "leur version"… Ainsi est rendue laJustice en France!

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Mémoire de Michel Lajoye page 43

15. BILAN DE L'EXPLOSION: TROIS BLESSÉS(version officielle)

Quant aux victimes, officiellement, il y en aurait eutrois. Mais blessées à quel niveau? Je voudrais ledétail des blessures! Ce qu’il est impossible d’avoirdans la version officielle !

L’Arrêt de renvoi devant les Assises (qui est leseul document que les jurés ont avec eux lors de leurdélibéré!), précise juste que l’explosion a fait troisblessés. Ces derniers, mentionnés nominativementdans la synthèse du dossier officiel, sont: Jelassi,Belghazi et Bounifia.

Toutes les versions officielles affirment:« L’attentat a fait trois blessés »! Mais encore unefois: quelle fut la nature des blessures? Ce ne fut pasdéveloppé! Il y a eu trois blessés, point! Impossibled'en savoir plus!

Mais là aussi il y a "encore mieux": lors du procèsde juin 1990, aucune victime de cet attentat à labombe ne sera partie civile! La version officielleaffirme qu’il y a eu trois victimes, mais nous ne lesavons jamais vues: ni chez le juge d’instruction, ni auprocès! Ce sont donc des victimes qui n’ont existéque sur le papier: uniquement dans l’Acted’accusation.

C’est d’autant plus vrai, qu’apparemment laCaisse Primaire d’Assurance Maladie n’a jamais vuces blessés non plus! Car s’il y avait eu une dépensede soins et/ou même une simple visite de routine, laCPAM n’aurait pas omis de se porter partie civile pourse faire rembourser par le Fonds de garantie… Celan’a pas été fait! Alors ce sont des victimes qui n’ontreçu aucun soin?

Quant à l’exploitant du bar, il ne s’est pasconstitué partie civile. Idem pour son assureur. Ce quiest pour le moins étonnant! Car, pour mettre enscène cette "explosion" (je détaillerai cette mise enscène à la section suivante), il a forcément falludétériorer quelques bricoles. Et si l’assureur ne s’estpas retourné contre moi, c’est que ce n’est pas lui quia payé pour la remise en état…

Si cela avait été l’assureur, il se serait constituépartie civile pour se faire rembourser par le Fonds degarantie! Par conséquent, il semblerait que danscette affaire (si nous suivons la version officielle),l’assurance n’ait pas joué… Pourquoi? Craignait-onque les experts de la compagnie ne découvrent lasupercherie s’ils avaient expertisé le bar?

Mais alors qui a bien pu payer pour la remise enétat de cet établissement puisque ce n’est pasl’assureur? Y a-t-il eu, réellement, besoin de remettreen état ce bar? a-t-il eu, réellement, des dégâtsmatériels?

Édité et mis en ligne par:

L'Église Mondiale du Créateur

P.O. Box 2002USA – East Peoria, IL 61611

http://www.creator.orghttp://www.wcotc.com/france

16. "BIZARRERIES" DES VERSIONSOFFICIELLES

Ce sont les questions que l’on peut se poserlorsque l’on passe en revue les "bizarreries" (pour nepas dire plus!) des versions officielles . Jusqu’en 1990je ne me suis pas posé trop de questions. J’avoueque j’ai cru à la version officielle que le Parquet m’aservie durant l’instruction: le serveur dans la salle, labombe mise sous/derrière le comptoir, et celui-ci quifait "écran". Cela me semblait possible. Pour moi lezinc avait pu se déformer, accompagner en quelquesorte le souffle. Même si cela me semblait un peugros, car si ce métal avait de telles propriétés, lesblindages seraient en zinc!

Je cherchais une explication rationnelle,technique, à la chose. À l’époque je ne pensais pascomme maintenant, à savoir que l'on a trafiqué mabombe, et/ou qu’elle n’a pas sauté du tout: que touta été mis en scène après…

J’avais juste eu un léger doute durant l’instruction,lorsque le juge m’a lu le rapport du laboratoire qui aanalysé les restes de la bombe qui avait, soi-disant,explosé dans ce bar. Le rapport affirmait que c’étaitdu plastic qui était désigné comme de la Gomme 14.Je connais cet explosif.

Seulement la Gomme 14 c’est un explosif civil dechantier (carrières, mines, etc). Je n’ai jamais eu deGomme 14! J’ai toujours eu de l’explosif militaire,normal, vu les opportunités de provenance.

Et même si j’avais eu de la Gomme 14 je n’enaurais pas utilisé sans savoir comment elle avait étéstockée. Car cet explosif craint l’humidité! S’il a étémouillé, il ne souffle plus, mais entre en fusion etdégage une très forte chaleur, c’est tout!

Sur le coup je n’ai pas trop tiqué, du moins pasplus que ça, je me suis gentiment foutu dulaboratoire. Je me disais que la bombe avait étédétruite lors de son explosion, faisant éclater aupassage une bouteille de pastis (ou autres) et qu’elleavait dû couler dans les débris. Ce qui fait que lelaboratoire avait analysé de la Tolite au Pastis, etcela avait donné de la Gomme 14. Je n’ai pascherché à approfondir plus.

Puis arrive le 8 juin 1990 (un peu avant le procès)et j’ai eu le dossier quelque temps (durant l’après-midi). Je l’ai feuilleté, et j’ai trouvé un "album dephotos" montrant le bar après l’attentat. Lorsque j’aivu les photographies, j’ai tout de suite vu que celan’avait pas explosé! Car, c’est une véritableplaisanterie, sur les clichés figurant au dossier jugé àCaen, il est montré un environnement vaguementnoirci! C’est comme si une forte chaleur avait étédégagée dans un rayon de 50 centimètres autourd’un point. À la vue de telles photos, j’en reviens à laGomme 14. Car de la G14 mouillée, cela provoquece qui est sur les clichés figurant au dossier officiel.

Seulement si c’est de la G14 qui a explosé, il abien fallu que l'on ôte ma Tolite pour la remplacer parde la G14 préalablement "mouillée" pour l’empêcherde souffler ! (la substitution a pu s’opérer comme jel’ai relatée à la section 6 de ce chapitre.)

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Mémoire de Michel Lajoye page 44

Et ce qui m’a étonné le plus sur cesphotographies, c’est que le bar en zinc, notammentle métal lui-même, ne comporte aucune marque oudéformation. Ce qui est très étonnant alors que, soi-disant, selon la version officielle , l’explosion s’estproduite derrière/sous le comptoir. Comment se fait-ilque celui-ci soit rigoureusement intact?

Cela démontre surtout que ce n’est pas la bombeque j’avais confectionnée qui a explosé dans cetétablissement. La charge était faible, mais elle faisait150 grammes quand même! Ce qui en explosantaurait fait se "déchirer" le zinc du bar! Exactementcomme une feuille de papier aluminium tendue sedéchire lorsque l’on donne un coup de poingdedans.

Sur les photos, il ne nous est rien montré de toutcela, juste quelques impacts dans des boiseries setrouvant près de la porte qui conduit aux toilettes (cf.le plan précédent pour situer). Ces impacts auraientété causés par des particules, soi-disant projetéespar le souffle de la bombe. Mais si cette dernièreavait projeté des éclats dans ces boiseries setrouvant éloignées, c’est qu’elle aurait soufflé ! Et, sielle avait soufflé, elle aurait au minimum déformé lezinc du bar derrière/sous lequel elle a soi-disantexplosé… Techniquement l’un ne peut pas aller sansl’autre!

Sur l’une des photos, il est même montré unimpact, soi-disant un éclat arrivé dans le dossierd’une chaise (se trouvant dans la salle, à une table)qu’il aurait perforée. Là cela ne va plus, car la bombenous a été décrite mise sous/derrière le comptoir, etles chaises étaient dans la salle, de l’autre côté. Pourarriver ici cet éclat aurait dû, d’abord, traverser le zincdu bar. Or il n’y a aucun trou dedans! À moins quel’éclat ne soit monté à la verticale vers le plafond pouréviter le bar, puis ait obliqué pour passer au-dessusdes clients, avant de redescendre avec force (grandeforce même!), pour faire un trou dans un dossier enbois d’une chaise, et en traverser le rembourrage!C’est totalement farfelu! Cette perforation dans cedossier de chaise qui était dans la salle, on l’a faitaprès! Probablement avec un clou de 180 millimètreset un marteau…

Tout le reste est de la même eau: lorsque l’onregarde les photos, cela pue la mise en scène. Parexemple sur un cliché, pris lors de la "reconstitutionpolicière"16, il est montré le serveur qui mime le gestequ’il aurait fait avant de mettre la bombesous/derrière le comptoir. On y voit Bounifia, l’œilsoupçonneux, qui regarde ce qu’il y a dans cettepoche en plastique…

S’il a fait ça, il a forcément été intrigué, il a dûregarder ce que c’était que cette boîte de couleurverte. Car la boîte était en fait du carton provenantd’un grand emballage qui avait été découpé, plié,collé, et scotché pour être ajusté à la taille de labombe. Ce qui faisait que cet assemblage conférait à

16 Il n’y a pas eu de reconstitution en ma présence, uniquement une"reconstitution policière"…

cette boîte une apparence visuelle pour le moinsanormale !

Et, dans ses déclarations (si j’en crois ce qui a étédit au procès aux vues des procès-verbaux depolice), le serveur aurait dit qu’il a vu, par un troudans le carton, une partie métallique (cela n’aurait puêtre que le boîte de conserve) qui lui aurait fait croirequ’il s’agissait d’un autoradio…

Seulement ceux qui ont écrit la « vérité qu’elle estvraie », ignoraient que le matin, juste après avoir reliéles prises électriques, j’ai pris du ruban adhésif et j’aiscotché toutes les ouvertures du carton contenant labombe. En conséquence, il n’y avait aucuneouverture, aucun trou ! Pour ouvrir la boîte il auraitfallu prendre un couteau et couper le scotch. Le seul"trou" qu’il y avait dans cette boîte, c’est celui parlequel passait le fil rigide qui bloquait la trotteuse duréveil! Autrement dit un orifice d’un millimètre dediamètre… Alors je voudrais bien savoir par quel troule serveur a pu jeter un œil!

Mais bon, admettons qu’il y ait eu une ouverturequi n’a jamais existé et suivons cette version relatéeau procès. Le serveur regarde donc par "un trou", etil n’a pas été plus curieux?

Imaginons, et même visualisons cette scène:Bounifia jette un œil par ce "trou". S’il en était là, c’estqu’il avait le nez sur la boîte si j’ose dire, puisquec’est par ce "trou" qu’il a vu une "partie métallique".Dans ce cas, cette version officielle s’écroule! Car, enregardant par un trou du carton, le serveur aurait étési près qu’il aurait forcément entendu que cela faisait« tic-tac »là-dedans!

Ce réveil, pour faire « tic-tac », il faisait « tic-tac »!Lors de l’assemblage de la bombe, cela m’avaitmême inquiété qu’il fasse autant de bruit, et c’estpour cette raison que je l’avais incrusté dans un blocde polystyrène (cf. schéma à la section 4 de cechapitre). Malgré l’isolation ses « tic-tac » étaientaudibles à 30 centimètres environ dans unenvironnement de silence total, et à 10 centimètresdans un environnement normalement bruyant.

À cause de cela, la version du serveur regardantce que c’est que ce paquet ne tient pas. Ceux quiont écrit le récit de cette version officielle onttotalement omis de prendre en compte les « tic-tac »du réveil. C’est que l’on ne peut pas penser à toutlorsque l’on écrit ce genre de choses…

17. UN EXPLOSIF DÉFECTUEUX, SELON LAVERSION OFFICIELLE

Au procès de juin 1990, l’expert qui est venuparler de la bombe c’est Claude Calisti et il faut voir lepedigree! À l’époque il était ingénieur en chef - chefdu service des explosifs du laboratoire central de laPréfecture de Police de Paris. C’était donc LE grandspécialiste des explosifs qui est venu à ce procès,quel honneur ils m’ont fait! Ils n’ont pas envoyé lesous-fifre du laboratoire comme c’est d’usagehabituellement pour témoigner. Et l’on va croire, biensûr, que l’étude des débris de cette bombe a étéréalisée par cet ingénieur en chef qui plus est: LEchef du laboratoire lui-même! Je plains Calisti lorsqu’il

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y a des "nuits bleues" en Corse, car s’il analyse toutlui-même, quel travail il doit avoir le lendemain…

Le pire, c'est que lors du procès, personne nes'est étonné que ce soit Calisti qui vienne témoigner.À titre de comparaison, le médecin légiste qui estvenu parler de Moussaoui, tué par Arcini le 5 juin1987 à Caen, est celui qui a examiné le cadavre. Pasle directeur du CHU de Caen! Si cela avait été cedernier, tout le monde aurait rigolé, car chacun saitqu'un directeur de CHU ne pratique pas d'autopsie.Eh bien pour Calisti, personne ne s'est esclaffé dansla salle, car le public trouvait apparemment normalque celui qui vienne déposer au sujet de cettebombe, cela soit LE chef du service des explosifs dulaboratoire central de la Préfecture de Police deParis…

Il va de soi que cette analyse des débris a étéréalisée par un laborantin de base, c'est évident.Calisti ne devait jamais sortir de son bureau, etsurtout pas se salir les mains à examiner les restesd'une bombe. Un chef de service, ça n'analyse pas,ça commande…

Le fait qu’ils aient fait venir, pour témoigner, le"plus grand artificier de France", le chef suprême du"département explosif" du laboratoire central de laPréfecture de Police de Paris, c’était pour couvrir celad’une haute autorité que personne n’oseraitcontester! Si Calisti l’a dit, qui allait oser dire lecontraire? On n’allait quand même pas écouterLajoye qui forcément n’y connaît rien…

Calisti, lors de son témoignage, a parlé d’unebombe à l’explosif défectueux et qui n’aurait passoufflé. Ceci devait expliquer les faibles dégâts quel’on voyait sur les photos prises après l’attentat. J’aialors pris d’office la parole lors de sa déposition pourdire que cette bombe n’était pas défectueuse (maisje n’ai pas parlé de la bombe-test que j’avais faitsauter dans un blockhaus), que je n’avais pas lescompétences d’Arcini, mais que j’en connaissais pasmal sur le sujet. De plus j’ai précisé que je n’avais pasmis de la Gomme 14 et qu’il devait faire erreur dansson analyse.

Il m’a alors été répondu, pas par Calisti, mais parl’avocat général que je n’avais pas été sonné, que cen’était pas moi qui avais assemblé cette bombe mais« Monsieur Arcini » et que dès lors je ne pouvais passavoir.

C’est vrai que dans la version officielle , c’est"l’autre" qui, officiellement, a assemblé cette bombe!Et durant le procès, intervenant en chœur avecCalisti, Arcini a surenchéri en disant qu’effectivement,lorsqu’il a assemblé la bombe, il y a mis de la Gomme14 et qu’elle était, comme il l’avait constaté,défectueuse! Ce qui ne manquait pas de saveur, carcette version affirme alors que mon coaccusé m’auraitremis sciemment une bombe défectueuse! D’oùmanipulation!

Au procès c’était bien: l’expert Calisti et l’expertArcini (qui se connaissaient d’ailleurs fort bien pouravoir déjà travaillé ensemble!) d’accords sur unebombe que ce dernier n’avait pas assemblée et quel’autre n’avait certainement pas analysée lui-même!

C'était digne d'un Ex Libris avec PPDA recevantSullitzer pour qu'il parle de "son" dernier livre.

En tout cas c’est ainsi qu’ils ont emballé l’affairedans la version officielle , le peu d’impact de la bombeest dû à un mauvais explosif (Arcini l’a reconnu lorsdu procès, et s’il l’a reconnu, c’est que c’est vrai...)!

Et soit dit en passant, lors des audiences,puisque tout le monde affirmait que c’était Arcini leconcepteur de la bombe, cela aurait été bien qu’il luisoit demandé d’où venait cette Gomme 14! Car c’estun explosif civil utilisé dans des carrières, mines, etc,non en dotation (officiellement) au Ministère del’Intérieur (dont dépend la Sécurité Civile), et que l’onne trouve pas sur les plages qui ont servi à l’invasionde 1944, lieux où Arcini opérait ses déminagesroutiniers. Et où est le reste du pain de Gomme 14?Arcini a affirmé avoir mis « environ 100 grammes »,donc il devait lui en rester de cette G14. Cela auraitété quand même bien, pour la crédibilité de leursmensonges, qu’ils aillent mettre, chez Arcini, de laG14 du même lot que celle qui a officiellementexplosé le lundi 30 novembre 1987 dans ce bar dePetit-Quevilly.

Quant à moi, il ne m’a jamais été demandé oùj’avais eu l’explosif pour la bombe puisqu'on nevoulait pas que je l’aie assemblée! Il est dès lorslogique qu’il ne m’ait rien été demandé.

De toute façon, il ne m’a jamais été demandé sij’avais fabriqué cet engin! Dès mon arrestation, l a ditque c’était Arcini le concepteur. Ce que j’avais à diren’intéressait personne.

J’anticipe sur le reste de ce récit, mais dans lechapitre 11, section 10, je relate l’incident qui a eulieu lors d’une des audiences du procès aux Assises,lorsque j’ai fait demander à Arcini de décrire la bombede façon technique (couleur des fils, des prisesélectriques, marque et type de la pile, etc). Il en a étéincapable, c’est l’avocat général et le président quil’ont sauvé en venant à son secours.

Ce qui est logique, car entre ce qui est dans ledossier officiel, ce qui s’est dit au procès, et ce quiest la vérité, il y a une marge. Car le 22 novembre1987, comme relaté dans ce chapitre à la section 4,j’ai assemblé deux bombes: l’une pour l’attentat,l’autre pour le test. Deux charges explosivesidentiques provenant de même lots de plastic Tolite.Les bombes étaient jumelles pour ainsi dire. L’une, le23 novembre a parfaitement soufflé, et une semaineplus tard, l’autre, identique, aurait été faire unvulgaire "plouf" comme on peut le voir sur les photosdans le dossier garant de la version officielle .

Lorsque l’on voit les photographies prises par lapolice après la déflagration et qui figurent au dossierofficiel, on se demande si ce ne sont pas deux gros"pétards à corbeaux" qui ont sauté dans ce bar!

18. RÉCIT DE L'ATTENTAT(version du témoin Bounifia)

Comme précisé à la section 1 de ce chapitre, il y aun témoin qui a donné son récit. Il y a même eu deuxrécits qui se recoupent, à un "détail" près et quenous verrons plus loin. Le premier récit fut recueilli en

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Mémoire de Michel Lajoye page 46

juillet 1998 (soit plus de 10 ans après les faits, et plusde 8 ans après le procès), et l'autre en janvier 2000(soit plus de 12 ans après les faits, et près de 10 ansaprès le procès).

Ce témoin qui a été interrogé, à titre privé, n’estautre que Rabia Bounifia, le serveur (et aussi lepatron) du bar! Celui qui, dans les versions officielles ,a déplacé la bombe! C’est le témoin-clé que leMinistère Public n’avait pas cru bon (et l'on sedemande bien pourquoi...) de faire citer lors duprocès de juin 1990.

Ses deux récits sont très étranges, et parfois,disons le, franchement extravagants. Difficile de leuraccorder beaucoup de crédit. Ils me confortentsurtout dans l’idée que cet attentat n’est qu’une miseen scène…

Mais voyons plutôt, jusqu'à la section 27 incluse,ce que le témoin-clé Bounifia a relaté dans sonpremier récit recueilli en juillet 1998 (à la section 28,j'aborderai son autre témoignage, celui recueilli enjanvier 2000)17:

19. DISPOSITION DE CHACUN (selon Bounifia)

Puisque le serveur a été interrogé (à titre"journalistique"), il lui a été demandé de mettre sur unschéma la disposition de chacun. D’après sesdéclarations, et ses indications, 7 clients setrouvaient au bar, 3 à une table, et 2 autres à uneautre.

Ce qui fait qu’avec lui, il y aurait eu 13 présentsdans cet établissement lorsque j’y suis entré.

Voici un plan comportant les dispositions dechacun, moi compris:

17 Je rappelle bien que j’ai été condamné sur la version officielle que nousvenons de voir, et non pas sur la version de Bounifia que nous allonsmaintenant aborder!

Je veux bien croire que la mémoire du témoin aitquelque peu flanché, plus de 10 ans après les faits.Car il nous situe un total de 13 personnes (avec lui)présentes dans ce bar… Pourtant, lorsque j’y suisentré, il n’y en avait que 9 (je sais compter jusqu’à 8+ 1!).

Et je précise, également, que tous les documentsjudiciaires affirment qu’étaient présentes ces 9personnes: Jelassi, Belghazi, Bounifia (le serveur,autrement dit le témoin), Chouikh, Darcy, Fenet,Baahmed, Poyac et Laoudj.

Comment expliquer cette erreur qui situe 13personnes là où je n’en ai vu que 9 et où la "justice"en situe également seulement 9 en les désignantnominativement? J’ai une hypothèse que j’évoqueraien fin de chapitre…

De même, dans son témoignage de juillet 1998, leserveur a situé toutes les personnes à ma gauche,aucune à ma droite.

Or, il y avait du monde à ma droite (comme je l’aiindiqué sur le plan situé à la section 11 de cechapitre). Il y avait notamment un homme d’unetrentaine d’années, qui portait un blouson de cuirnoir. Je m’en souviens fort bien! J’aurais même puidentifier cet individu si je l’avais revu ensuite.

Si je n’en souviens autant, c’est que son allure(disons "sportive") tranchait beaucoup comparé àl’aspect des autres présents. Ce voisin direct dedroite m’avait semblé quelque peu "bizarre". Il m’avaitfait être sur mes gardes… C’est pour cette raison queje me souviens de lui à ce point.

En conséquence, sur le plan réalisé selon lesindications du témoin, comme il n’y a personneindiqué à ma droite (entre moi et la porte destoilettes), cela ne colle pas. Mauvaise mémoire dupatron du bar peut-être…

20. CE QUI A SUIVI MON DÉPART(version Bounifia)

Ensuite il fut demandé au témoin à quelle heurecela a explosé. Réponse: vers 14 heures 50.

Il indique que je suis entré dans sonétablissement vers les 14 heures (ce qui est vrai),que je suis parti aux toilettes (cf. section 11 de cechapitre) quelques minutes plus tard (autrement ditvers les 14 heures 05). Le témoin poursuit son réciten affirmant qu’environ 20 minutes après ma sortie(soit, en comptant large, vers les 14 heures 30) unclient a fait remarquer que j’avais oublié un paquetsur le bar et le patron dit avoir regardé dans le sac. Ildonne la même version que celle relatée dans lasection 16 de ce chapitre. J’ai donc les mêmescommentaires et remarques à formuler, que ceux quej’ai détaillés plus haut, au sujet de ce prétendu troudans la boîte et de cette histoire de partie métalliquequi lui aurait fait penser qu’il s’agissait d’un autoradio.

Puis, c’est là que la version change beaucoup!Car le serveur ne met plus le paquet « sous lecomptoir » (c’est-à-dire sous le bar), mais à droite,dans un casier se trouvant au sol, à l’angle des murs.

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Mémoire de Michel Lajoye page 47

Dans la version officielle (et surtout au procès deCaen lors du récit de cette action), il a été dit que lepaquet gênait, que le patron l’a ôté aussitôt aprèsmon départ!

Or, en juillet 1998, lors de son "interrogatoireprivé", le témoin a bien aff irmé que c’est unevingtaine de minutes après mon départ qu’un clientlui a montré le paquet, qu’il l’a déplacé, et que cela aexplosé (d’après Bounifia) environ 5 minutes après cedéplacement.

Faisons une addition: 14 heures 05 (je sors) + 20minutes plus tard (déplacement de la bombe) + 5minutes après (explosion), cela nous porte à 14heures 30! J’arrondis et compte large, et je vaisjusqu’à 14 heures 35.

14 heures 35, cela ne va pas! Car le patron dubar a bien stipulé que l’explosion a eu lieu vers les 14heures 50! Il nous manque 15 minutes dans ce récit!

De toute façon, le fait que la bombe n’ait eu,lorsque je suis sorti (aux toilettes) à 14 heures 05,encore que 4 minutes de retard, fait s’interroger! Pour14 heures 10, tout aurait dû être réglé (cf. le récitsection 11 de ce chapitre).

Mais bon, admettons que le témoin Bounifia aitune mauvaise mémoire et situe mal la chronologie…

21. DISPOSITION DE CHACUN LORS DEL'EXPLOSION (version Bounifia)

Lors de son "audition privée", il fut demandé auserveur où il se trouvait, et où se situaient les autresprésents lorsque cela a explosé.

Bounifia affirme que lui se trouvait derrière son barà préparer un thé. Donc pas dans la salle (à servir unclient ou essuyer une table) comme ce fut relaté danstoutes les versions officielles relatées au procès dejuin 1990!

Pourtant, dans les débats devant la Courd’Assises du Calvados, le patron du bar a toujoursété situé dans la salle, de l’autre côté du bar.

Logique! Puisque les versions officiellesaffirmaient que c’était le bar en zinc qui avait faitécran, le patron ne pouvait pas , ne devait pas , êtrederrière son comptoir, sinon nous aurions demandécomment il a fait pour ne pas être gravement blesséavec un engin lui explosant dans les jambes!

Maintenant que la bombe n’est plus sous/derrièrele bar, l’emplacement du patron a aussi changé enconséquence. Ça change!

Quoi qu’il en soit, voici la disposition de chacun etl’emplacement de la bombe, selon le récit du témoinBounifia:

Il n’y a plus que 11 personnes dansl’établissement, car deux des clients (dont l’un deceux qui, selon le témoin, ont fait remarquer quej’avais "oublié" un paquet) ont eu la bonne idée desortir avant l’explosion…

On peut quand même s’étonner, la bombe, dansce témoignage, est là précisément où elle aurait dûêtre placée pour "limiter les dégâts". Et les deuxclients attablés (cf. plan section 19) qui lui faisaientface ont eu la bonne idée de s’en aller…

Et, comme dit plus haut, j’affirme qu’en fait il yavait du monde au comptoir, sur la droite, lorsque jesuis entré dans ce bar. Mais le témoin, lui, situe toutle monde à gauche. Logique!

En effet, compte tenu de comment aurait eu lieul’explosion (selon ce témoin), pour rendre crédible saversion, il ne faut personne là ! Il ne faut pas , il nedoit pas , y avoir du monde à droite! À droite, c’est enplein dans le rayonnement de la bombe qui, dans saversion, a explosé là: dans l’angle du mur de droite(la bombe venait de, et a été placée à, l’extrême-droite ...).

Si le témoin avait situé du monde là, à la droite ducomptoir, cela aurait été si proche de la bombe quel’on en serait venu à la question embarrassante:comment se fait-il que personne n’ait été blessé?Car, comme nous le verrons plus loin, personne nefut blessé!

Quoi qu’il en soit, cette nouvelle version diffère dela version officielle sur laquelle j’ai été condamné! Auprocès, on a toujours dit que la bombe avait étédéplacée aussitôt après mon départ (soit vers 14heures 05) et mise sous/derrière le bar. « Sous lecomptoir » pour être précis!

De plus, selon le témoin, il y aurait eu 11personnes dans cet établissement lorsque cela a

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explosé. Je rappelle que la "justice" a toujours situé,en les désignant nominativement, 9 personnes dansce bar lorsque j’y suis entré! Et, apparemment (maisce n’est pas très clair), selon le Ministère Public, cesont les 9 mêmes personnes qui se trouvaientprésentes lors de l’explosion et qui auraient subicette dernière.

Le témoignage de Bounifia contredit, sur tous lespoints, toutes les versions officielles développées lorsdu procès qui a suivi cet attentat. Mais qui et quecroire?

22. EFFETS MATÉRIELS DE L'EXPLOSION(selon Bounifia)

Quant aux effets de l’explosion que le témoin adécrit et que je vais détailler maintenant, j’affirmed’entrée que c’est techniquement impossible!

Entendons nous bien, je n’ai aucun intérêtparticulier à démolir ce témoignage de Rabia Bounifiapuisqu’il me sert. En effet, il indique « aucun blessé »(je détaillerai plus loin!) ce qui contredit radicalementla version du Ministère Public! J’ai été condamnépour avoir blessé trois personnes! Cependant je necrois pas que le témoin ait dit la vérité, et voyonspourquoi:

Rabia Bounifia a été interrogé sur l’explosion qu’ilaurait subie. Il décrit un souffle phénoménal! Au pointque, comme il l’a affirmé, ce souffle a renversé (telsdes fétus de paille!) les clients assis sur destabourets et/ou accoudés debout au bar. Mais ilindique que lui-même, derrière son comptoir, ne serapas projeté à terre. Pas plus que les trois autres qui,selon lui, étaient assis à une table.

Il faut "visualiser", car les présents (le serveurindique 7 personnes) au bar sont sur la gauche(j’affirme qu’il y avait du monde sur la droite, mais letémoin situe tout le monde à gauche. Nous avons vuplus haut pourquoi il ne faut pas , il ne doit pas , yavoir du monde à droite...). Compte tenu de lahauteur du bar, et du gabarit moyen d’une personne(70 à 80 kilos), il faut un souffle inouï pour renverserquelqu’un. Le seul "point d’appui" pour le souffleétant ce qui dépasse des corps au-dessus ducomptoir, autrement dit les torses.

De plus, ces gens au bar devaient être dans laposition adéquate: penchés en avant, voire appuyéssur le zinc. Pour les renverser, il faut un fort 2coup devent", pas une légère brise…

D’autant que les clients sont assez éloignés dupoint de l’explosion qui serait intervenu sur la droite,à plusieurs mètres, avec le souffle partant du sol (labombe aurait été déplacée et mise dans un casier ausol), et forcément atténué par le zinc du bar, qui lui,étrangement, ne sera pas détérioré! Alors que l’angledu comptoir ne se trouvait à guère plus de 50centimètres de la bombe (cf. le plan précédent)!Pourtant, aucun élément du bar (si proche!) ne seraarraché! Il ne subira aucune déformation! Le zincc’est du solide quand même, pourquoi ne l’utilise-t-onpas pour concevoir des blindages?!

Ce souffle que décrit le témoin, contredit,"accessoirement", la version officielle ! Cette dernière

affirme que l’explosif utilisé était de la Gomme 14défectueuse (cf. section 17 de ce chapitre). Or, de laG14 cela ne souffle pas des masses, et de ladéfectueuse encore moins! Pour souffler autant celaaurait donc bien été de la Tolite qui aurait explosédans cet établissement… Mais encore faudrait-il quecela ait, réellement, soufflé comme le décrit cetémoin! La suite de ce récit nous démontrera quecette explosion relève du fantasme pur et simple!

En effet, le témoin affirme que la déflagration dela bombe a été telle, qu’en plus de renverser lesclients, cela a soufflé presque toutes les vitres desfenêtres en emportant même certains renforts!

Or, ce débit de boisons n’avait pas de vitrine, nides grandes vitres, mais plein de petites vitresteintées sur des fenêtres classiques situées dans lesmurs faisant face aux routes (cf. plan plus haut).C’était de la vitre épaisse sur laquelle il faut exercerune très forte pression pour la faire sortir (enemportant des morceaux des renforts en plus!).

Le témoin indique également que des lambrisrecouvrant les murs ont été arrachés! De sérieuxdégâts ont été occasionné au plafond (je rappelleque la bombe est présumée avoir explosé à unniveau proche du sol!), et l’habitation se trouvant au-dessus de l’établissement a été "secouée". Et pourillustrer ce propos le témoin affirme que des objetsposés sur une table dans la pièce du premier étage(au-dessus du bar) ont été renversés… Fichtre!

À écouter ce témoin, la bombe a causé denombreux dégâts! Et étrangement, "l’album dephotos" figurant au dossier off iciel et censéreprésenter le bar après l’explosion, ne montre riende cet ouragan! C’est quand même étonnant que lesdégâts aient été si apocalyptiques et que les policiersaient oublié de les photographier… Si lesdestructions avaient été telles, je crois, quand même,qu’ils ne nous l’auraient pas caché lors du procès!Qu’ils auraient, au contraire, bien appuyé sur le côtépuissant de cette bombe. Pourtant c’est l’inverse quis’est déroulé!

En effet, pour expliquer le peu d’impact (visible surles photos se trouvant au dossier officiel), on adélégué Calisti pour nous expliquer que si les dégâtsont été minimes, pour ne pas dire insignifiants, c’estparce que l’explosif était défectueux (cf. section 17de ce chapitre).

Seulement il faudrait savoir! C’était défectueux oùcela a ravagé le bar? Car si on écoute Bounifia, à 14heures 50, ce fut un remake de l’explosion deHiroshima dans son établissement!

Et c’est bien ça qui me chagrine. Car les explosifs,je connais un peu. Lorsque du plastic explose, lesouffle "rase" les murs (ceux qu’il n’arrive pas à briser)et "polit" la surface en s’écrasant contre. Ce qui fait"dégager" toutes les aspérités fixées aux murs. Lesouffle agit comme un rabot le long des parois. Dansle cas de ce bar, c’était justement un bar! Parconséquent des bouteilles en pagaille, des lustres,etc… Le souffle de la bombe (qui avait été déplacéeprès du sol!) aurait fait remonter une telle pressiond’air, de souffle, derrière le bar que l’ensemble des

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bouteilles (et autres) entreposées derrière le comptoir(comme c’est d’ordinaire dans un bistrot!) auraient étépropulsées vers le plafond. Une fois atteint la voûte,elles auraient été pulvérisées par le choc et seraientretombées avec une grande violence au sol enmilliers d’éclats. Au sol, là où le souffle avait"renversé" les clients…

Passe encore que ces derniers aient pu échapperà la "grêlée" des centaines de tronçons métalliques(puisque la bombe contenait ce genre d’extra!), maiséchapper à une "grêlée" de milliers de bouts de verrequi auraient dû (si cela avait explosé comme l’aaffirmé ce témoin...) partir de toutes parts: c’est aussigros qu’un "témoignage" d'Elie Wiesel!

Ensuite, ce souffle est parti du sol, car la bombenous a été décrite déplacée et mise dans un casierse trouvant à terre (dans le coin à droite de la pièce).Dans ce cas, si ce souffle a renversé des clients (setrouvant assez loin sur la gauche de la pièce)accoudés au zinc du bar, les chaises de la salleauraient été sorties! Le souffle, en rasant le sol,aurait pris les chaises par en dessous, les auraitsoulevées et propulsées par les fenêtres versl’extérieur du bar, sur la chaussée des deux rues!Logique, si le souffle a renversé (comme des fétus depaille!) des clients de 70 à 80 kilos, ce n’est pas unemalheureuse chaise de même pas 10 kilos qui varester sagement à sa place: elle "décolle" et passepar la fenêtre, c’est évident!

Le patron du bar aurait dit que la bombe a étédéplacée, et que cela a fait "plouf"!, cela aurait étécrédible. Mais là il a décrit un souffle qui, s’il avait eulieu, aurait totalement détruit son établissement. Toutobjet non solidement fixé aurait été mis enmouvement par cette déflagration. Un simple verreserait devenu un projectile meurtrier.

Il faut bien analyser ce que c’est qu’un tel souffledans un bar: un endroit où tout est mobile, où il y aplein de bouteilles, de verres, tables, chaises,tabourets, etc, toutes choses forcément propulséespar la déflagration d’une explosion, et cela donnedes milliers d’éclats divers.

Et à propos d’éclats, puisque la bombe a autantsoufflé, tous les éclats métalliques qu’elle contenaitauraient dû être projetés fort loin! Les tronçons demétal entouraient totalement la charge explosive!Dès lors, ils devaient "décoller" (dans toutes lesdirections!) avec une puissance phénoménale:propulsés par 150 grammes de plastic! Hé bien tousces éclats ont été arrêtés (selon ce témoin) grâce àun « panneau en face » (?) se trouvant sur unmoignon de mur situé dans la salle, près d’une destables et de la porte des toilettes (cf. plan précédentpour situer en gros). Et ce serait ce mystérieuxpanneau (situé quand même assez loin!), qui, à luiseul, aurait attiré (il était magnétique peut-être?), puisrecueilli et enfin stoppé net, la totalité de cette"grêlée" métallique…

Mais, pour ce faire il aurait fallu que tous les éclatsaient été projetés dans la même direction! Ce qui estévidemment rigoureusement impossible puisque leséclats entouraient totalement la charge explosive!

En effet, cette dernière en soufflant aurait projetéles éclats vers le haut, le bas, à l’ouest, à l’est, ausud, au nord: partout autour, exactement comme lefait une bombe!

Ce "rayonnement" en tous sens de ces particulesaurait dû être d’autant plus concrétisé que, dans lemême temps, le témoin nous décrit bel et bien unsouffle qui renverse des clients (se trouvant fort loinsur la gauche) ; fait sauter les vitres avec leurencadrement (fenêtres donnant sur les rues) ;arrache des lambris (sur les murs autour) ; "secoue"l’habitation au-dessus (le plafond du bar). Il est pourle moins étonnant que cela ait soufflé dans toutes lesdirections, mais projeté que dans une seule!

Et toujours à propos de ces éclats métalliques, lezinc du bar aurait dû en être truffé! Il suffit deregarder le plan qui précède pour en avoir lacertitude! Car, si la bombe avait explosé là, dansl’angle de la pièce, le coin du bar se trouvant àenviron 50 centimètres, aurait encaissé de nombreuxéclats! Hé bien non! Les éclats iront (si on en croit cetémoin!) tout droit: tous en direction d’un mystérieuxpanneau, se trouvant dans la salle, sur un moignonde mur, faisait face à la bombe!

Ayant une certaine expérience du maniement, etde l’effet, des explosifs, cela me permet peut-êtred’être plus "critique". Pour d’autres personnes, celapeut sembler "normal" ces détails sur le matériel…Mais voyons le traitement qu’a subi l’humain dans lerécit de cette explosion hallucinante…

23. AUCUN DÉGÂT HUMAIN (selon Bounifia)

Ce qui est capital dans le témoignage de RabiaBounifia, c’est qu’il a affirmé que cet "attentat" n’acausé aucun blessé ! Nous y voilà! Cela explique, ducoup, pourquoi la Caisse Primaire d’AssuranceMaladie (ainsi que les "victimes") ne se sont jamaisconstituées partie civile lors du procès de Caen enjuin 1990. Selon Bounifia, il n’y a eu aucun fraisd’hospitalisation et/ou de soins divers!

Même pas d’admission aux urgences, puisque letémoin a déclaré que ce sont les pompiers qui onteffectué, eux-mêmes, dans un camion, le "check-up"de chacun!

Le patron déclare, en outre, que ce n’est que lelendemain qu’il s’est rendu compte qu’il avait unhématome à la cuisse.

Donc il est clair que Bounifia ne fut jamais blessé!Pourtant, comme je l’ai mentionné dans la section 15de ce chapitre, ce même Bounifia est nominativementdésigné sur la liste des blessés figurant dans ledossier officiel ! Ce dernier affirme que furent blessésles dénommées Jelassi, Belghazi et Bounifia!

Je fais par ailleurs remarquer que dans tous lesdocuments judiciaires la liste des 9 présents dans lebar est donnée dans cet ordre: Jelassi, Belghazi,Bounifia, Chouikh, Darcy, Fenet, Baahmed, Poyac etLaoudj. Chacun peut ainsi constater,qu’étrangement, les trois premiers de la liste sontaussi ceux que la "justice" a comptabilisé comme"blessés"! Un peu comme si on avait dit « il fautinventer trois blessés », et que l'on avait pris les trois

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premiers noms figurant sur la liste des présents dansl’établissement…

Quoi qu’il en soit, avec le témoignage de RabiaBounifia, nous avons une preuve de la manipulationjudiciaire qui apparaît au grand jour! Puisque lepatron du bar ne fut pas blessé, comment se fait-ilque la "justice" l’ait compté, dans l’Acte d’accusationet autres, comme victime? Qui l’a ajouté sur la liste?Ou plus exactement: qui a inventé cette liste de troisblessés?

Lors de son audition privée, le témoin aégalement déclaré (très important!): aucun tympann’a été crevé. Là, avec cette dernière affirmation, ilest clair que l’on approche, de très près, l’intensitéd’un délire wieselien…

En effet, voilà 9 personnes (selon la "justice"!), 11personnes (selon le témoin Rabia Bounifia), qui sontdans un lieu clos où vient de se produire uneexplosion provoquant un souffle inouï (d’après letémoin!). L’onde de choc a tout balayé sur sonpassage! Sur la gauche, 7 personnes accoudées aubar sont renversées, plaquées à terre par le soufflede la bombe qui a explosé dans l’angle, à l’extrême-droite de la pièce! Tous les tympans auraient parconséquent forcément éclaté! Affirmer le contrairec’est se foutre du monde!

Surtout que Bounifia raconte, de lui-même, queles deux clients sortis juste avant l’explosion, et quiavaient eu le temps de faire 500 mètres (c’est lui quile dit!), ont entendu la détonation et qu’ils en sont(apparemment) revenus au bar. Que cela ait étéaudible à 500 mètres, c’est normal. Mais cettedéclaration du témoin signifierait qu’en plein milieuurbain, à travers les rues, malgré la circulation intensedes deux grands boulevards proches, cela s’estentendu distinctement… Ce fut même si tonitruantque ces deux personnes éloignées (d’un demi-kilomètre!) du point sismique ont pu en déterminer,avec précision, que l’épicentre était bien le fameuxétablissement qu’elles venaient juste de quitterpuisqu’elles y sont (apparemment) revenues…

Il est plus qu’évident que lorsqu’une telledétonation se produit, si elle a lieu dans une piècebien close, elle fait "sauter" les tympans despersonnes présentes! D’autres lésions sontobligatoirement occasionnées aux gens qui subissentune telle commotion! Dans le cas de cet attentat,n’importe quel médecin aurait fait "embarquer", pourles garder en observation à l’hôpital, les clientssoufflés et projetés au sol. Aucune personne n’estsoufflée, plaquée à terre, par la déflagration d’unebombe, sans être au moins retenue à l’hôpital! C’estla logique même!

Le souffle d’une bombe est tel (surtout celui décritpar le témoin!), la détonation si terrible, si déchirante,que cela cause des lésions neurologiques, voire deshémorragies internes. De ce fait, les médecinsgardent toujours (voir les attentats de Paris) enobservation toutes les victimes qui se trouvent dansun certain rayon de la bombe. Même ceux qui sontapparemment en "bonne santé" sont gardés enobservation à l’hôpital. Ce qui va d’ailleurs de soi.

Alors, là encore, cela ne colle pas, car le témoinaffirme qu’il n’y a eu aucun blessé, pas le moindretympan n’a été crevé, et personne ne fut admis auxurgences de l’hôpital du coin, puisque chacun s’estcontenté d’aller faire un petit tour dans le camion despompiers pour un rapide examen… Voilà sontémoignage! Je suis plus que sceptique!

Les musulmans croyants y verront, peut-être, uneintervention d’Allah qui a pu multiplier ses doigts afind’en mettre un dans chacune des oreilles desprésents pour protéger leurs tympans…

Autre "point de détail", lors de l’explosion d’unpain de plastic, le souffle et l’intensité déchirante dela détonation ce sont deux choses qui vontensembles, mais la chaleur en est une troisièmeindissociable! La charge provoque une flamme…Dans ce bar, ils ont dû, si cela a explosé, être tousrasés gratis! De la Tolite (ce que j’avais mis dans labombe) cela ne dégage pas une grosse intensité dechaleur, mais l’espace d’une fraction de seconde l’airambiant est enflammé à cause des gaz dégagés (etsoufflés) par l’explosif. Le témoin n’a rien préciséquant à ce qui est arrivé à son système pileux… Celavoudrait donc dire qu’il n’a subi aucun dommage!

Pourtant, il a déclaré, dans son "interrogatoireprivé" de juillet 1998, qu’à l’endroit où a explosé labombe, il y avait une forte flamme! Mais il ne dit riende plus!

Je stipule bien que la logique des explosifs veut,qu’en général, toute personne "décoiffée", par lesouffle d’une charge de plastic, n’ait pas besoin debeaucoup se "recoiffer" après…

24. HYPOTHÈSE D'UNE DÉFAILLANCE DUSYSTÈME DE MISE À FEU

Il y a aussi une hypothèse que vient à l’esprit (etque certaines personnes m’ont signalée comme"possible"): celle d’une défaillance du système demise à feu de cette bombe (elle était programméepour exploser 4 minutes après mon départ).

Un dysfonctionnement qui pourrait expliquer que,selon le témoin Rabia Bounifia, cela n’ait exploséqu’à 14 heures 50 et non à 14 heures 10 commeinitialement prévu. C’est ce "retard à l’allumage" quiaurait permis de déplacer la bombe, puisque Bounifiaaffirme ne l’avoir déplacée qu’une vingtaine deminutes après mon départ.

J’avoue qu’à première vue cette hypothèse peutsembler séduisante. Mais, elle ne résiste pas à uneanalyse, point par point, du témoignage de Bounifia.

En effet, admettons que le système de mise à feude la bombe ait eu un problème. Qu’est-ce que celachange? En quoi c’est différent que la bombe aitexplosé à 14 heures 50 au lieu de 14 heures 10?Cela change juste l’emplacement, au lieu d’explosersur le zinc du bar, elle le fait là où elle fut déplacée(plus de 20 minutes après mon départ). Mais elleexplose quand même!

Qu’elle soit à un bout ou à l’autre de la pièce,c’est kif-kif pour ce qui est de l’intensité en décibelsde la détonation et de la pression d’air qu’a dégagéla déflagration de ce plastic. Je rappelle que le

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témoin Bounifia a décrit une apocalypse dans sonétablissement!

Que le déplacement de la bombe ait protégé lesprésents des projections de cette dernière, d’accord,admettons. Mais le souffle et la détonation qui ontfait sauter les vitres et leur encadrement, auraientaussi fait sauter les tympans des présents et celaque ce soit à 14 heures 10 ou 14 heures 50, voire àn’importe quelle autre heure!

En conclusion, que le système de mise à feu de labombe ait eu une défaillance, cela se pourrait carc’est du domaine du techniquement possible. Mais,puisque le témoin nous décrit une bombe quiexplose, cela ne change rien, strictement rien, à cetechniquement impossible que constitue le non-déchirement des tympans des personnesprésentes…

25. BOUNIFIA NE SAVAIT PAS…

En juillet 1998, lors de son "interrogatoire privé", ilfut aussi demandé au patron du bar pourquoi il nes’est jamais constitué partie civile contre moi. Car il asubi un préjudice commercial. Si son bar a subi lesdégâts qu’il décrit, il a dû fermer le temps des travauxde rénovation… Sans oublier que, comme précisé àla section 15 de ce chapitre, la "justice" comptabiliseBounifia comme un des blessés! Sa réponse pourexpliquer sa non-constitution de partie civile, fut qu’ilne savait pas qu’il pouvait le faire!

Ouais, ouais, bien sûr! Car, comme toute "victimedes racistes", il a forcément vu débarquer un cabinetconseil type MRAP, LICRA, LDH et compagnie! J’aidu mal à y croire à son, « j'savais pas, M’sieur! »…

Je crois plutôt qu'on lui a dit de rester chez lui, carsi au procès il était venu à la barre (en tant que partiecivile) nous raconter "l’ouragan" qu’il a décrit, enprécisant qu’il n’y a eu aucun blessé, j’aurais été pourle moins soupçonneux. Je me serais sans doutepermis de lui demander s’il ne se foutait pas de moiavec cette version de l’explosion…

Des témoins de ce genre, je comprends pourquoion s’est bien gardé de les faire venir au procès deCaen! Dans un procès-verbal, auto-rédigé par lapolice politique, ça va, cela "tient la route". Mais dèsqu’un témoin de ce genre témoigne oralement celadevient assez surréaliste comme peut l’être cettedéposition privée qui a été recueillie en juillet 1998.

26. UN ASSUREUR FANTÔME…

Quant aux dégâts dans le bar, le patron a affirméque c’est un entrepreneur de Sotteville (près deRouen) qui s’est occupé de la remise en état. Et c’estla compagnie d’assurance AXA qui a payé, 6 moisplus tard, les frais.

Mais pourquoi l’assureur ne s’est jamais retournécontre moi en se constituant partie civile? Mystère!Jamais je ne fus contacté par un assureur!

Pourtant, la compagnie aurait dû me contacterpour savoir si j’étais solvable ou non… C’est uneprocédure automatique!

Malgré cela, je ne fus jamais contacté, et aucunecompagnie d’assurance ne fut partie civile au procèsqui suivra cet attentat!

Pourtant, la compagnie aurait dû me contacterpour savoir si j'étais solvable ou non… C'est uneprocédure automatique ! Malgré cela, je ne fus jamaiscontacté, et aucune compagnie d'assurance ne futpartie civile au procès qui suivra cet attentat!

Alors questions: est-ce qu’un assureur aréellement (et à quel moment?) expertisé le bar? Ouest-ce qu’il a remboursé ce qu'on lui a dit derembourser, afin "d’enrichir" la crédibilité de la miseen scène?

En tout cas, AXA c’est une chouette compagnie,car voilà un assureur qui (selon le témoin Bounifia)débourse beaucoup d’argent, et qui ne se retournemême pas contre le vilain méchant néonazi qui a toutcassé dans le bar. Hé ho, chez AXA ce ne seraientpas des sympathisants qui répugnent à se retournercontre "l’extrême-droite"?

L’assureur était certain de se faire rembourser parle Fonds de garantie (pour les victimes d’actes deterrorisme), il n’avait juste qu’à se manifester.

Bah, les compagnies d’assurances étaient encorephilanthropiques à l’époque, cela ne peut être queça…

27. CONCLUSIONS SUR LE TÉMOIGNAGE DEBOUNIFIA

Que penser du témoignage de Bounifia recueillien juillet 1998? À quel moment dit-il la vérité? Trèscompliqué de faire la part de vrai et du faux…

Nous avons vu qu’il parle d’un souffle énorme, degens balayés, reversés, projetés à terre, de vitres etleur encadrement soufflés, de lambris arrachés,d’habitation au-dessus du bar secouée, pour au final:même pas un tympan crevé, et pour toutehospitalisation une simple petite visite dans un banalcamion de pompier garé devant!

Compte tenu du niveau de décibels auquel untympan se déchire, il est dès lors totalementfantaisiste d’affirmer que 150 grammes de plasticdétonnent et soufflent dans un bar bien clos de 30m3 (autrement dit 75 m3, soit une moyenne de 2grammes d’explosif par m3, ce qui est une proportionénorme!) sans faire sauter les tympans des présents.C’est matériellement, techniquement, etc, impossible !Même Wiesel (LA référence en matière de faux-témoignages) n’oserait pas affirmer un truc pareil!

En tout cas cette "déposition" de Bounifia,recueillie en juillet 1998, même si elle estmanifestement fausse, car totalement délirante,contredit quand même la version officielle sur laquellej’ai été condamné en juin 1990! Nous sommes mêmetrès loin de la version du Ministère Public sur laquellej’ai été condamné et qui fait état de trois blessés!

Des victimes que, bien sûr, comme dit plus haut,nous n’avions jamais vues au procès, mais ellesétaient bien là, virtuellement, sur le papier del’accusation! l’Arrêt de renvoi devant les Assises faitbien état de blessés!

Page 53: Michel Lajoye - Mémoire

Mémoire de Michel Lajoye page 52

Or, en juillet 1998, le patron du bar a affirmé (ouavoué, c’est comme on veut...) que personne ne futblessé, pas un seul tympan crevé, et quel’hospitalisation a juste été une "visite médicale" dansle camion sanitaire des pompiers…

Encore une fois: qui et que croire?

28. TEMOIGNAGE DE BOUNIFIA(version janvier 2000)

Voyons maintenant l'autre témoignage deBounifia. Le 16 janvier 2000, des journalistes dumensuel Révision, en vue de préparer leur numéro93 (avril 2000) consacré au "Terrorisme made inFrance", sont allés interroger le patron du bar AuPavillon d'Alger.

Tout d'abord, ils ont ramené une informationinédite, un scoop: le bar visé n'en est pas vraimentun, c'est un foyer! Lors du procès de Caen en juin1990, il ne fut pas précisé que cet établissement étaitaussi un "centre d'hébergement"! Cela change tout!Reste, aussi, à savoir pourquoi, dans le dossierofficiel, il n'apparaît nulle part que c'était un "foyerd'immigrés" qui a été la cible de cet attentat!

Ces "cachotteries" peuvent se comprendreaisément: ce "foyer d'immigrés" comporte 28chambres (et combien de résidents dans chaquepiaule?) en plus du bar. En conséquence, nouspouvons estimer que l'établissement est à problèmes.Il doit bien y avoir quelques clandestins, de ladrogue, toutes choses qui sont courantes dans unfoyer d'immigrés.

Dès lors, Rabia Bounifia, le patron de ce "centred'hébergement", est forcément quelqu'un que lapolice et les autorités préfectorales tiennent! Neserait-ce que pour ses autorisations d'ouverturenocturne durant le Ramadan (car le patron a déclaréque, lors de cette période, il restait ouvert toute lanuit. Tolérance rarissime pour un débit de boisson).Un simple arrêté préfectoral pourrait faire fermer soncommerce, lui supprimer sa licence de cafetier…

Si nous avions su ces choses plus tôt, nousaurions découvert que Bounifia avait (et a encore?)un profil-type pour prêter son concours, contraint etforcé, à une manip'! D'où des investigations pluspoussées dans sa direction.

Même découverte de l'équipe de Révision pour lebar L'Époque, qu'Arcini a "attaqué" le 6 mars 1987(cf. chapitre 5, section 2, de ce mémoire). Il apparaîtqu'il s'agit également d'un "foyer d'immigrés"comprenant un bistrot, ce que ne mentionne à aucunmoment le dossier officiel, et là aussi, ce ne fut jamaisévoqué au procès qui a suivi.

Donc, au final, hormis l'attentat de Caen (commisle 5 juin 1987, voir ce document au chapitre 5,section 3) qui a visé une personne précise (maisArcini s'est trompé de cible), les deux autres attentatsconnus perpétrés en Normandie (à Petit-Quevilly), ontvisé des foyers d'immigrés et non de simples bistroscomme on l'a dit.

Par ailleurs, dans son témoignage du 16 janvier2000, Bounifia a situé 9 personnes dans son bar,soit le même nombre que les documents judiciaires.

Je rappelle que ces derniers affirment qu'étaientprésents les dénommés: Jelassi, Belghazi, Bounifia,Chouikh, Darcy, Fenet, Baahmed, Poyac et Laoudj.Cela change! Car en juillet 1998, le témoin Bounifiaavait situé, en les mentionnant sur un plan, un total(lui compris!) de 13 personnes (cf. ce chapitre,section 19 et suivantes).

Cette variation dans le nombre des présentss'explique par le fait que, suite au témoignage deBounifia recueilli en juillet 1998, j'ai inclus cela dansle mémoire qui a été diffusé. Dès lors, on estforcément allé expliquer au patron du bar que c'était9 présents et non 13…

Pour le reste, le témoignage de Bounifia versionjanvier 2000 est similaire à celui de juillet 1998. Il arépété les mêmes choses, les mêmes incohérences.Je ne reviens pas sur ces dernières. Cessons de"disséquer" les wieseleries de Bounifia, je l'aisuff isamment fait à partir de la section 19 de cechapitre.

Le plus important, c'est que dans son récit dejanvier 2000, le patron de bar affirme, encore unefois, que personne ne fut blessé. Or, j'insiste bien, ledossier officiel contient, à de multiples endroits(notamment dans l'Arrêt de renvoi devant la Courd'Assises), l'affirmation qu'il y a eu trois blessés dansl'attentat qui m'est reproché! Les dénommés Jelassi,Belghazi, Bounifia (les 3 premiers de la liste présentsdans le bar…) sont nominativement désignés comme"blessés"!

Aussitôt après l'attentat, dans son édition du 1er

décembre 1987, le quotidien Ouest-France faisait uncompte-rendu très sommaire de l'attentat et précisait,lui aussi, qu'il y avait eu trois blessés. Affirmationsreprises dans les éditions suivantes. Ce qui veut direqu'avant même d'avoir tous les détails de cetteexplosion, la presse a claironné qu'il y avait eu troisblessés, ce que la "justice" a accrédité par la suite.Signe qui laisserait à penser qu'avant même que jene dépose ce que je croyais être ma bombe, on avaitprévu qu'elle ferait trois blessés… sur le papier!

En conclusion, il faut surtout retenir de cette visite,opérée en janvier 2000 par les enquêteurs deRévision, que: les bars L'Époque et Au Pavillond'Alger sont plus des foyers d'immigrés que desimples estaminets; puis qu'il est, une nouvelle fois,confirmé que personne ne fut blessé dansl'explosion. Ce dernier point démontre clairement quele dossier sur lequel j'ai été jugé, et condamné, a étémanifestement gonflé au niveau des accusations.Sans parler des autres manipulations.

Pour l'anecdote, je relate aussi que l'équipe deRévision a eu quelques problèmes dans ce bistrot.L'un des journalistes a demandé s'il pouvait prendreune photo du bar, cela lui a été accordé, mais dès lepremier flash des clients se sont manifestés et ontexigé que les journalistes paient une tournéegénérale pour prix de ce cliché. S'en sont suivis despalabres, et durant ces derniers, l'un des sacs desjournalistes a été fouillé. C'est à son retour à Parisqu'il s'est rendu compte de la "réquisition" d'unepartie de ses affaires, et qu'il lui est revenu en

Page 54: Michel Lajoye - Mémoire

Mémoire de Michel Lajoye page 53

mémoire l'altercation suite à la photo, puis l'animationautour de son sac dont il ne pouvait s'occuper,employé qu'il était à protéger son appareil. Ceux quiveulent tous les détails, que je ne peux reproduire icicar ce n'est pas le sujet, pourront consulter le numéro93 (avril 2000) de Révision (adresse en bas de lapage 15 de ce document).

Dès lors, avec cette mésaventure, il apparaît quecet établissement mauresque est une vraie zone denon-droit! Et nous en revenons à ce que j'écrivaisplus haut: le patron d'un tel bouge est forcémenttenu, rien n'est gratuit! Si la Préfecture lui délivreactuellement des autorisations d'ouverture nocturne,ce n'est pas sans contrepartie. Ces autorisationsactuelles ne sont peut-être qu'une partie des"avantages en nature" octroyés pour d'anciensservices rendus. Je pense notamment à ceux de1987…

"Accessoirement", ce journaliste qui s'est faitdépouiller fait penser à ce qui aurait dû se produire le30 novembre 1987 lorsque j'ai "oublié" dans ce barun sac en plastique. Compte tenu que tout client(non habitué des lieux) se fait "réquisitionner" sesaffaires, il va de soi que, si cela avait été la faunehabituelle présente dans ce bar, dès que j'auraistourné les talons, mon sac aurait été "visité". Celavoudrait donc dire que, comme je le mentionnais plushaut à la section 14, les présents dans ce bistrot,lorsque j'y suis rentré, n'étaient sans doute que des"figurants" (des "auxiliaires de police"?).

29. CE QUI A PU SE DÉROULER DANS CE BARLE 30 NOVEMBRE 1987

Nous pouvons imaginer ce qui s’est dérouléréellement:

Soit ils (la DPSD, les RG ou autres), m’ont changémon explosif pour de la Gomme 14 préalablement"mouillée", et cela avant que je ne dépose le paquet(cf. la section 6 de ce chapitre). De même que lesdétonateurs ont pu être trafiqués. Ainsi ils pouvaientme laisser commettre un attentat puisque cela allaitfaire "plouf"! Si la Tolite que j’avais mise a étéremplacée par de la Gomme 14 mouillée, cela allaitémettre une intense chaleur, mais rien projeter. Celaexpliquerait pourquoi le rapport du laboratoire etCalisti le jour du procès, ont affirmé que c’est de laGomme 14 qui a explosé dans ce bar. Cettehypothèse expliquerait la version officielledéveloppée au procès de Caen. (cf. section 17 de cechapitre.)

Soit, aussitôt après que j’ai eu tourné le dos àl’angle de la rue, ils ont fait sortir tout le monde dubar, ils en avaient le temps, il leur restait dans lesquatre minutes. Et ils ont mis sur la bombe un"couvercle blindé" que l’on utilise pour "tuer" lesouffle et les projections.

Soit encore, j’ai eu à faire à des "pros" qui ontdéballé le tout vite fait, et qui ont ôté la prise mâle dela prise femelle. Une fois les prises débranchées (oules fils coupés!), le réveil pouvait se déclencher, il n’yavait plus aucun risque. C’est possible, cela peutsembler bien risqué pour un artificier, car il ignore (de

façon certaine) combien de retard il reste avantl’explosion! Mais c’est techniquement possible.

Il faut bien garder à l’esprit qu’ils savaient, viaArcini, où j’allais intervenir. Ce bar faisait l’objet d’une"fiche de repérage" complète indiquant clairementqu’il fallait laisser au moins 4 minutes de retard à labombe de façon à faire le trajet du bar jusqu’àl’immeuble (là où j’ai changé de vêtements).

En conséquence, ceux qui ont lu la fiche savaientd’une part où j’allais intervenir (simple pour eux d’êtreprésents sur place) et d’autre part ils savaient, grâceà la fiche (que j’allais, évidemment, respecter à lalettre!), que lorsque je sortirai du bar, ils auraientdans les 4 minutes pour neutraliser la bombe!Autrement dit plus qu’il n’en faut pour ouvrir le sac,puis la boîte en carton, et débrancher les prisesélectriques.

Si cette hypothèse est la bonne, ils ont eu tout leloisir, ensuite, de: soit faire sauter ma bombe (aprèsl’avoir réactivée) ; soit faire exploser un "pétardmouillé" de Gomme 14 (ce qui expliquerait, du coup,le rapport du laboratoire...) à eux, moins puissant afinde limiter les dégâts dans le bar18.

Et, dans tous les cas, l’établissement était videlors de l’explosion. Cette mise en scène expliqueraitaussi pourquoi c’est à 14 heures 50 (si l’on en croitles dires de Bounifia), soit 45 minutes après mondépart, qu’il y a eu une explosion dans ce bar.

Pour ma part je crois qu’une déflagration (ou plusvraisemblablement une détonation) a bien eu lieu, ilserait très hasardeux pour eux de mentir sur ce point.Ne serait-ce que pour rendre crédible la mise enscène auprès des voisins de ce quartier qui, s’ilsn’avaient pas entendu de détonation, auraient pus’interroger sur ce mystérieux attentat si silencieux…

Pour moi il n’y a vraiment rien de compliqué danscette "mise en scène". Ce sont quand même desprofessionnels et une intervention de ce genre estsimple. C’est un cas d’école si j’ose dire. Rien n’estplus aisé à neutraliser qu’une bombe à retardementsi on connaît le retard qu’il lui reste. Et là ils leconnaissaient via la fameuse fiche! Et de toutefaçon, ouvrir le sac, la boîte en carton et neutraliseren débranchant les prises, c’est l’affaire de quelquessecondes…

L’impératif pour réaliser une telle opération, c’estd’être présent sur place, afin de désactiver la bombedès que le poseur a tourné les talons.

Si je suis dans le vrai avec cette hypothèse, celapourrait expliquer pourquoi le patron du bar situe 13présents dans la salle, là où la "justice" en situeseulement 9! (cf. section 19 de ce chapitre.) Bounifiaa peut-être gaffé, et compté « présents dans la salledu bar », 4 membres des RG et/ou de la DPSD quiétaient présents dans le bâtiment, mais planquésdans une autre pièce à attendre que je sorte du barpour vite venir neutraliser ma bombe… Ce n’estqu’une hypothèse!

18 Je rappelle que sur "l’album de photographies" prises après ce soi-disant attentat, et qui figurent au dossier officiel, les dégâts apparaissentcomme minimes.

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Mémoire de Michel Lajoye page 54

Cette version de la "mise en scène" intervenue lejour de l’attentat, peut sembler ardue, car elleimplique qu’ils aient mis dans la confidence le patrondu bar (les autres présents peuvent fort bien avoirété des "figurants-auxiliaires de police"). D’où lerisque que certains ne tiennent pas leur langue!Risques aussi, en cas "d’interrogatoire privé", d’avoirdes témoignages fantasmagoriques. Mais nous ysommes!

En effet, j’ai relaté à partir de la section 18 de cechapitre le témoignage wieselien qu’en juillet 1998Rabia Bounifia a tenu!

De toute façon, dans tous les cas de figure(bombe modifiée avant que je ne la dépose ouneutralisée après), il leur a fallu mettre au point lescénario écrit dans les procès-verbaux de police,notamment ce serveur qui déclarera avoir regardédans le sac, etc… Car dans ses déclarations,Bounifia a affirmé (y compris lors de ses"interrogatoires privés" de juillet 1998 et de janvier2000) avoir regardé par « un trou du carton » etaperçu une partie métallique qui lui a fait penser qu’ils’agissait d’un autoradio.

Or, comme précisé à la section 16 de ce chapitre,ce "trou" n’a jamais existé puisque le matin, aprèsavoir relié les prises électriques de la bombe, j’aicopieusement scotché l’emballage!

Donc, le patron du bar ment avec cette histoire detrou et d’autoradio! S’il ment sur cela, il mentforcément sur le reste!

30. ARCINI M'A DÉCONSEILLÉ UN SYSTÈME DEMISE À FEU "À BILLE"

Je me dois de mentionner un point: avant la posede cette bombe, j'en ai discuté avec Arcini. Je luiavais notamment fait part de mon intention de"doubler" le système de mise à feu. C'est-à-dire qu'enplus de la minuterie, je voulais y inclure un système"à bille2 entièrement autonome en alimentationélectrique. La bombe aurait ainsi eu deux systèmesde mise à feu distincts: l'un (le réveil) qui se seraitdéclenché à l'heure prévue; et l'autre ("à bille") quiaurait fait exploser immédiatement la bombe siquelqu'un l'avait déplacée, ou même touchée, avantque la minuterie ne la fasse exploser.

Ci-inclus deux schémas qui montrent ce système"à bille":

Un engin explosif équipé de la sorte ne peut plusêtre bougé, une fois "amorcé". Ce que j'aurais fait,c'est qu'après avoir activé la minuterie, j'aurais rouléla bombe dans le sac plastique. Puis, je l'aurais mis"dans le bon sens", tâtonné à travers le sac pourm'assurer que le tube était très légèrement incliné defaçon que la bille d'acier soit bien dans le fond. Unefois ce contrôle effectué, il m'aurait suffi d'ôter,toujours à travers le sac, la tige de sécurité(constituée, par exemple, avec un bâtonnet decoton-tige). Éventuellement la retirer en la faisantpercer le plastique. Une fois cette sécurité enlevée, iln'y aurait plus eu moyen de bouger ce sac, sinon labille d'acier aurait roulé dans le tube, vers les deuxclous, et fermé le circuit électrique qui alimentait lesdétonateurs.

Ce système est particulièrement "vicieux". Arcinime l'avait fortement déconseillé, pour une raisonsimple selon lui: il y avait le risque que le serveur,voyant partir son client, prenne le sac en disant «,« vous oubliez ça! ». C'est vrai que c'est uneprobabilité. Cependant, dans ce cas, on ne déposepas un tel paquet sur un comptoir, sous le nez desclients et du serveur, mais sur une table. Ce quej'aurais bien sûr fait. Et puis j'ai quitté le bar pour lestoilettes, je ne partais pas vraiment, du moins je nedevais pas donner cette impression au serveur...

Maintenant, avec le recul, je me demande si Arcinine m'a pas déconseillé d'ajouter ce système "à bille",car il savait qu'on devrait désamorcer cette bombeaprès mon départ du bistrot.

En effet, pour neutraliser un engin équipé d'un telsystème de mise à feu, c'est très délicat. Il fautdécouper méticuleusement l'emballage, en prenantsoin de ne surtout pas le faire bouger, car ledémineur ne sait pas où est précisément le tube quicontient la bille. "Palper" le sac pour le trouver esttrès risqué, car si on fait pivoter le tube: adieu veaux,vaches et moutons (nous sommes dans un barmaure, point de cochon...)! Un artificier professionnelest rompu à une tâche de ce genre, mais cettedernière demande du temps en plus d'un doigtécertain. Sachant qu'il ne resterait que quelquesminutes à la minuterie avant son déclenchement, unprofessionnel n'aurait jamais eu le temps de laneutraliser à cause du système d'amorçage "à bille".

Dès lors, si j'avais ajouté ce dernier à ma bombe, ilaurait été, à coup sûr, totalement impossible àquiconque de la neutraliser rapidement après mondépart (si tenté que cela ait été fait! Ce n'est quel'une des hypothèses).

Par conséquent, il n'est pas impossible, qu'enprévision de la neutralisation sur place de mon engin,mon camarade m'ait déconseillé d'ajouter cesystème. À plusieurs reprises, lors de notre dernièrerencontre avant cet attentat (le 25 novembre 1987,cf. section 8 de ce chapitre), il m'a posé la questionde savoir ce que j'allais mettre comme système demise à feu. Bien sûr, il me demandait cela car ilprétendait s'inquiéter pour moi, il avait peur que jesaute avec une bombe si, en plus du réveil, je luiadjoignais un système de mise à feu "à bille"... Mais

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Mémoire de Michel Lajoye page 55

je crois maintenant qu'il s'inquiétait, surtout, de savoircomment on pourrait neutraliser mon engin, en moinsde trois minutes, si jamais j'y ajoutais ce système...

Ce comportement d'Arcini accréditerait alorsl'hypothèse que ma bombe a été neutralisée aprèsmon départ du bar, et non à l'hôtel de Cherbourg.

Il se peut aussi que l'intervention ait été double:un sabotage à l'hôtel, avant que je ne dépose labombe; puis une neutralisation après la pose, dèsque j'ai quitté le bar. Pour eux , dans ce genred'opération quand même délicate, mieux vaut avoirdeux fers au feu: si le "plan A" échoue et/ou estinsatisfaisant, le "plan B" est là pour suppléer et/oucompléter!

Arcini a très bien pu, aussi, me déconseiller demettre un système "à bille" en prévision de la versionofficielle . Cette dernière dit que la bombe a étédéplacée et mise derrière/sous le bar et que c'estcelui-ci qui a fait écran. Avec un dispositif de mise àfeu "à bille", ce ne serait plus du tout crédible. Cardans ce cas comment Bounifia aurait-il pu déplacer labombe sans en déclencher immédiatementl'explosion?

Difficile de dire ce qu'il en a été des vraiesmotivations d'Arcini lorsqu'il m'a dissuadé d'utiliser, enplus de la minuterie, un système de mise à feu à bille.Je ne fais que relater ce qui s'est déroulé, chacun enpensera ce qu'il veut.

31. AUCUN DÉBRIS DE LA BOMBE NE SERAPRÉSENT AU PROCÈS

Une autre chose qui démontre que, quelle quesoit la bonne hypothèse, tout n’est qu’une fumisterie,c’est que théoriquement, en cas d’explosion, lesspécialistes arrivent avec des sacs en plastique et ilsramassent les morceaux de la bombe. L’engincontenait un réveil mécanique, une pile, des prisesélectriques, etc, des choses qui restent! Du moinsque l’on retrouve. Eh bien nous ne les avons jamaisrevus au procès! Les débris de la bombe n’étaientpas dans les pièces à conviction présentes auprocès!

Mais s’ils ont fait sauter un pétard de Gomme 14afin de mettre en scène il n’y avait aucun débris debombe à présenter ensuite!

Et si ma bombe a été modifiée avant que je ne ladépose, et si c’est de la Gomme 14 (je rappelle queCalisti a affirmé que la bombe était composée deG14 alors que j’ai mis de la Tolite!) qui est entrée enfusion, la chaleur dégagée et le manque de soufflede la G14 mouillée a soudé cela d’un bloc. Commel’aurait fait un chalumeau! Au procès s’il avait étéapporté un bloc soudé, cela aurait fait mauvais genrecar cela aurait prouvé que la bombe n’avait passoufflé, mais simplement émis une très intensechaleur. Cela aurait réduit à néant une partie del’accusation et démontré le côté totalement inoffensifde cette "bombe"…

Dans les deux cas de figure, cela explique bienpourquoi aucun débris n’a été présenté aux jurés duprocès qui a suivi cet attentat!

J’indique aussi que dans son témoignage recueillien juillet 1998, Rabia Bounifia a déclaré que la policea récupéré « des pleines poignées de ferraille ».Effectivement la bombe contenait bien des morceauxde métal. Mais des pleines poignées, cela me semblebeaucoup. J’avais mis environ 500 tronçonsmétalliques de 1 centimètre de long et 5 millimètresde diamètre (disons de la taille d’une balle de 22 longrifle pour simplifier). Alors 2 à 3 poignées, pas plus.Des éléments, qui de toute façon (là encore on sedemande vraiment pourquoi!), n’étaient pas parmi lespièces à conviction au procès de Caen!

Pourtant, il aurait été bien (pour eux) de pouvoirmontrer aux jurés la perversité de l’individu quidépose une bombe contenant des tronçonsmétalliques comme ceux, soi-disant, récupérés aprèscette prétendue explosion…

32. CONCLUSIONS SUR CET"ATTENTAT VIRTUEL"

Conclusions: ils (la DPSD, les RG et compagnie!)m’ont laissé faire, m’ont surtout, via Arcini qu’ilstenaient en laisse, fait commettre une action mefaisant entrer dans une procédure de condamnationcriminelle. Mais ils ont fait en sorte qu’il n’y ait qu’unattentat virtuel. Car s’il y avait des vraies victimes, etsi cela s’était su qu’ils m’ont encouragé et laissé faire,cela aurait causé un scandale énorme!

Les preuves que tout a été "mis en scène "; quece qui s’est déroulé le 30 novembre 1987 dans cebar n’est pas du tout ce qui est relaté dans lesprocès-verbaux de police contenus dans le dossierofficiel, sont: les déclarations de Rabia Bounifia danslesquelles il infirme la version de la "justice" qui l’acomptabilisé parmi les blessés ; l’absence destémoins aux audiences devant la Cour d’Assises ;l’absence de victime présente au procès ; l’absencede partie civile constituée par ces victimes et/ou laCPAM ; absence de partie civile constituée parl’exploitant du bar et/ou son assureur. Toutes cesabsences sont d’une implacable logique! Car si cesgens avaient été présents au procès, ils auraient étéinterrogés. Si l’un d’eux avait "bafouillé", c’était lacatastrophe pour ceux qui ont monté cettemanipulation!

En effet, nous avons vu à partir de la section 18de ce chapitre à quel point le récit de Rabia Bounifia,qui est censé avoir assisté et subi l’explosion, estrocambolesque! Si cette personne, ce rescapé quiaurait pu aussi être partie civile, nous avait tenu untel récit à la barre des témoins (situant 13 personnesdans son bar alors que la "justice" en compte 9… Etdécrivant un "ouragan" là où les photos prises aprèsl’attentat montrent juste du "noirci"...) il est clair que lasupercherie n’aurait pas pu tenir très longtemps…

Voilà pour l’attentat qui m’est reproché, c’estvraiment très contradictoire, impossible actuellementde savoir ce qui s’est réellement déroulé dans ce barle lundi 30 novembre 1987!

Cependant, c’est bien cet attentat, qui aurait faittrois blessés (selon le Ministère Public) et aucun(selon le témoin Bounifia, lui-même comptabilisé

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Mémoire de Michel Lajoye page 56

comme victime par la "justice"), qui a servi de base àma condamnation. J’ai par conséquent étécondamné pour un fait (une explosion faisant trois

blessés), qui n’a peut-être, et même sûrement, jamaiseu lieu!

Chapitre 8

DERNIERS JOURS AVANT L'ARRESTATION

1. VENDREDI 4 DÉCEMBRE 1987

e jour-là j’ai retrouvé Arcini dans la soirée. Ilhabitait un petit pavillon dans Caen, au 3 rueRouget de Lisle. C’était la première fois que je

le revoyais depuis la bombe du 30 novembre (lesjours qui ont suivi l’attentat sont sans importance).Nous ne nous étions pas revus depuis le 25novembre, et les seuls contacts que nous avons euc’est via le téléphone, de cabine à cabine.

Il était prévu que je reste quelques jours chez lui,il m’avait dit de passer afin que l’on mette au pointdiverses choses.

2. SAMEDI 5 DÉCEMBRE 1987(envoi d’une revendication)

Dans l’après-midi, Arcini a dû s’absenter, pour voirun collègue (prétexte invoqué). Je suis resté seulchez lui durant tout l’après-midi.

La version officielle de cette affaire dit que c’est lesamedi 5 décembre qu’Arcini s’est rendu de Caen àRouen pour y poster la revendication de cet attentatà la bombe du 30 novembre.

Je n’ai jamais eu l’intention de revendiquer quoique ce soit, et je n’ai pas été consulté pour cela. Jen’ai appris l’existence de ce texte de revendicationqu’une fois arrêté! Dans tous les jours qui vont suivreet que je relate dans ce chapitre, j’ignore quel’attentat que j’ai commis a été revendiqué.

D’après la version officielle, cette revendication,en double exemplaire, a été adressée par voiepostale aux quotidiens Ouest-France et Libération.Seulement il y a des couacs, et non des moindres!Car Libération dans son édition du jeudi 10décembre 1987 fera bien état d’une revendication.Mais, le document lui a été expédié depuis la Posteprincipale de Saint-Étienne-du-Rouvray (près deRouen), lors de la levée postale de 16 heures 45, lelundi 7 décembre 1987 (cachet de la Poste)!

C’est assez étrange, car la version officielle, elle,situe très clairement la remise à la Poste d’unerevendication le samedi après-midi. Mais,apparemment, selon Libération qui, lui, a reçu letexte, ce n’est que le lundi suivant, à 16 heures 45,que le contenu de la boîte aux lettres de la Posteprincipale de Saint Etienne de Rouvray aurait étérelevé… Il n’y aurait donc pas eu de levée du courrierle lundi matin à l’ouverture de la Poste? Faitesl’expérience, postez-vous, à vous-même, unecorrespondance un samedi après-midi dans unePoste principale et vous verrez qu’elle sera oblitéréeavant le lundi après-midi suivant…

Quant à la revendication expédiée à Ouest-France, c’est encore mieux: elle ne semble jamaisavoir existé! En effet, dans son numéro du 12-13décembre 1987 (soit après l’arrestation puisque j’aiété interpellé le 10), Ouest-France édition de Caen,affirmera n’avoir jamais reçu la moindre lettre derevendication! Pour expliquer cela, comme à leurhabitude, les tenants de la version officielle ne sedémonteront pas: ils affirmeront alors que si lecourrier n’est pas arrivé, c’est qu’il s’est perdu carenvoyé à une "mauvaise adresse"… Très crédible eneffet! Dans l’Ouest, n'importe quel facteur connaîtOuest-France, et toute lettre adressée à Ouest-France, sans autre mention sur l’enveloppe, seraitcertaine d’arriver à destination tellement ce journalest connu.

Apparemment il semble y avoir eu un manque decoordination entre ce que devait raconter Arcini, pourque cela "colle" avec la version officielle , et ce quis’est réellement déroulé !

C’est plus qu’évident qu'on a dit à Arcini des’accuser, comme prévu dans le plan, d’avoir expédiéune revendication le samedi à Ouest-France etLibération. Seulement c’est bien connu: on est uncon! Car comme nous venons de le voir, larevendication expédiée à Libération n’a été postéeque le lundi dans l’après-midi! Quant à celle destinéeà Ouest-France, au mieux elle est restée sur lebureau de l’agent des RG, ou de la DPSD, qui devaitla poster ; ou au pire, elle n’a jamais été rédigée…

Autre couac important: dans cette revendication,faite à mon insu, et arrivée à Libération, il estmentionné un réveil mécanique bleu composant laminuterie de cette bombe, ainsi qu’une pile 9 volts.Ce sont d’ailleurs les deux seules indicationstechniques données pour "authentifier" larevendication.

Or, je suis formel, je n’ai pas dit un mot à Arcini surla composition technique de cette bombe quant à lacouleur du réveil et à la pile utilisée surtout!

Ainsi, si nous reprenons à nouveau la versionoff icielle de cette affaire, le samedi 5 décembre 1987Arcini rédige une revendication qu’il va poster près deRouen en utilisant sa voiture (la Ford car la Simca1100 il ne roulait plus avec, voir chapitre 5 section14, pour le changement de véhicule). Mais dans cecas nous sommes bien obligés de nous interroger:comment aurait-il pu savoir que le réveil était bleu etque l’alimentation électrique pour la mise à feu étaitune pile 9 volts?

La version officielle dit que c’est Arcini qui aassemblé la bombe, mais c’est faux, c’est moi et je nelui ai rien détaillé!

C

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Mémoire de Michel Lajoye page 57

Il apparaît clairement, dans tous les cas, que ceuxqui tenaient Arcini en laisse depuis environ la mi-juin,ont revendiqué eux-mêmes en mentionnant un réveilbleu et une pile 9 volts. Ce qui explique, qu’enréalité, la seule lettre de revendication arrivée àdestination n’ait été postée que le lundi 7, avant lalevée de 16 heures 45, cachet de la Poste faisant foicomme on dit… Or le lundi 7 décembre 1987, si l’onen croit le dossier officiel de cette affaire, Arcini n’apas quitté la zone de Caen. De fait, il n’a pas pu êtreà Saint-Étienne-du-Rouvray pour y poster ce qu’areçu Libération…

Cette revendication est capitale pour eux , car enrevendiquant, en utilisant le même matériel pour cela,il était établi un lien avec les autres attentats commisen Normandie par Arcini.

Ainsi, pour la "justice", tous les attentats étaientliés par des revendications émanant du mêmegroupe. Dès lors, cela justifiait un procès communpuisque c’était la même organisation derrière les troisactions qui ont eu lieu en Normandie! Finement joué!

3. DIMANCHE 6 DÉCEMBRE 1987

Le dimanche s’est déroulé normalement, rien à endire.

4. LUNDI 7 DÉCEMBRE 1987(convocation à la PJ)

Le lundi Arcini a dû se rendre à son travail, c’étaitle dernier jour que je passais chez lui, j’avais prévude partir le mardi. En fin d’après-midi, retour de moncamarade. Mais il est revenu en ayant à la main uneconvocation de la PJ de Caen qui lui aurait étéremise sur son lieu de travail, à la Sécurité Civile. Ilétait convoqué à la PJ pour le lendemain matin, 8heures 30.

La version officielle de cette affaire veut qu’il aitété convoqué parce qu’il était l’un des propriétairesd’une Simca 1100 TI de la couleur de celle qui étaitrecherchée après l’attentat de Caen, en juin 1987.En effet, comme je l’ai relaté au chapitre 5, la versionofficielle , que l’on doit croire, veut que ce ne soitqu’en décembre 1987 (6 mois après) que la PJ sesoit, enfin, intéressée à Arcini!

Toujours est-il que lorsque j’ai appris laconvocation, j’ai demandé à "mon hôte" s’il enconnaissait les raisons. Évidemment il m’a réponduqu’il n’en savait rien. Nous avons évoqué l’attentat dejuin, et celui de mars précédent. Je lui ai conseillé nepas "paniquer", nous aviserions sur place, car je medisais que la convocation était peut-être pour uneautre raison. Mais à mes yeux cela ne pouvait êtreque les "attentats" l’objet de cette "invitation" à serendre à la PJ.

Lorsque Arcini affirmait ne rien savoir du motif decette convocation, il mentait! Car si l’on en croit lesjournaux parus en décembre 1987, notammentl’hebdomadaire caennais Liberté en date du 11décembre 1987, il avait déjà été interpellé pour cetteaffaire, et relâché parce qu’il avait l’alibi Balladur…(cf. chapitre 5 section 15).

5. PLAN POUR FAIRE ÉVADER ARCINI DESLOCAUX DE LA PJ

Devant les événements, vite fait, nous avonsélaboré un plan d’action, c’est surtout moi qui lemettais au point. Ce plan visait à libérer Arcini s’il étaitretenu à la PJ et c’était possible, car nous avions unebonne connaissance des lieux.

Je conseillais à Arcini de se rendre à saconvocation et de voir sur place. Soit il étaitconvoqué pour une affaire anodine, dans ce cas, ilserait ressorti rapidement ; soit c’était pour l’affairedes attentats, dans ce cas, il devait braquer lespoliciers et s’enfuir.

J’estimais que c’était mieux de se rendre à laconvocation plutôt que de s’enfuir tout de suite, celundi soir. Car, pour moi, il pouvait être convoquépour une autre affaire banale sans importance et semettre en cavale pour une peccadille, ce n’était pasle mieux.

Quant au fait que je proposais à Arcini d’allerl’aider à se libérer de la PJ s’il y était retenu, c’étaittechniquement possible, et même assez simple. LaPJ de Caen est un détachement du SRPJ de Rouen.Il logeait au dernier étage d’un bâtiment administratifde la préfecture du Calvados. Ce n’était pas unbâtiment de police proprement dit, il n’y avait aucuneprotection comme dans une PJ normale.

Cette PJ de Caen il faut la voir juste comme uncouloir, quelques bureaux, pas la moindre porteblindée à l’entrée, encore moins de sas de sécuritépour filtrer les visiteurs. Il suffisait de pousser la porteà l’entrée du couloir pour s’engager dans la partie PJde ce bâtiment préfectoral! C’était une antenneadministrative, et lorsqu’il y avait des gardés à vue,ceux-ci étaient "logés" au commissariat central deCaen.

Côté occupants: 5 inspecteurs et 1 commissairetravaillaient dans ces lieux, mais certains étaientpartis pour enquêtes, par conséquent il y avaitrarement plus de 3 policiers présents. Ces derniersétaient certes armés, mais une telle sortie étaitfaisable.

Cette opération envisagée n’était pas l’attaqued’une place forte, avec au final un échec assuré.C’était l’assaut d’un service administratif, et il ne fautpas oublier que, dans ce plan, il était pris en comptel’effet de surprise. Car c’était Arcini qui aurait sorti sonarme le premier!

J’estimais que mon plan tenait la route et, à mesyeux, si Arcini était bien convoqué pour les attentats,il lui serait facile de s’évader, cela ne tenait qu’à lui.

6. MARDI 8 DÉCEMBRE 1987, CONVOCATIONÀ LA PJ (suite)

Le mardi 8 décembre 1987, pour les 8 heures 30,comme prévu, avant d’aller à son travail, Arcini s’estrendu à sa convocation de Police Judiciaire. Il étaitporteur d’une grenade, de son revolver et desuff isamment de munitions. Je l’ai vu partir avec cetarmement.

De mon côté, je le suivais, et lorsqu’il est entré àl’étage de la PJ, je me suis installé à l’accueil des

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cartes grises, c’est-à-dire à l’entrée du couloir de laPJ puisque c’était un hall commun d’accueil pour tousles étages de ce bâtiment préfectoral. Il y avait pleinde gens, j’ai pris un numéro d’attente puisque c’étaitchacun son tour et cela m’arrangeait qu’il y aitbeaucoup du monde, je passais plus inaperçu: j’étaisune personne comme une autre qui attendait sontour pour une affaire administrative à la préfecture.J’étais assis sur un banc avec à mes pieds un sac desport ouvert et contenant ce qui, éventuellement,serait utile à l’opération.

J’avais bien dit à Arcini qu’il allait être trèsrapidement fixé et que s’ils lui demandaient de viderses poches, c’est que sa convocation devenait unegarde-à-vue, dans ce cas: il devait passer à l’action.

Donc, à 8 heures 30, j’ai vu Arcini entrer dans lapartie PJ du bâtiment préfectoral, tout était prêt, je nepouvais pas faire plus pour lui. Maintenant qu’il étaitentré là-dedans, cela dépendait de lui et de l’objet deson "invitation".

Mais, il avait été convenu aussi qu’à 9 heures 15je quitterais les lieux. Comme à 9 heures 15 Arcinin’était toujours pas ressorti (et n’avait pas tiré nonplus!), j’ai alors pensé qu’il avait dû être convoquépour une affaire anodine parce que si cela avait étégrave, si cela avait été l’affaire des attentats, il y alongtemps que cela se serait "agité" dans cecouloir…

De plus, comme Arcini était copain avec certainsinspecteurs (du moins il les connaissait puisqu’ilsétaient du même Ministère de l’Intérieur etmangeaient ensemble), je me disais qu’il devait êtreen train de tailler la bavette avec eux autour d’uncafé.

Alors, puisque cela faisait 3/4 d’heure qu’il était là-dedans sans qu’il ne se soit déroulé quelque chose,c’est que tout allait bien, et je suis parti commeconvenu.

Cependant, je ne suis pas beaucoup éloigné, carcela m’intriguait. Puisqu’il y avait à côté undépartement annexe de la bibliothèque de Caen, j’ysuis allé. Je me suis installé près d’une fenêtre oùl’on voyait l’entrée/sortie (il n’y en avait qu’une) dubâtiment préfectoral. Je suis resté jusqu’à 11 heuresà la bibliothèque, et je n’ai pas vu ressortir Arcini.

Mais, il aurait pu quitter les lieux alors que j’entraisdans la bibliothèque, car pendant quelques minutesje n’ai pas eu l’entrée du bâtiment préfectoral dansmon champ de vision. Je précise bien que cebâtiment n’avait qu’une entrée/sortie.

Si j’insiste sur ce point c’est qu’il y a la versionoff icielle de tout cela! Cette dernière dit qu’Arcinis’est rendu à sa convocation, qu’il a été interrogé surson emploi du temps le jour des attentats, et plusparticulièrement sur l’assassinat de Moussaoui. Etcette vérité vraie dit qu’ensuite, après son audition,pour compléter celle-ci, Arcini a été conduit à sondomicile par deux inspecteurs (un certain ChristianMorin et Didier Lefeuvre qui seront témoins auprocès) qui y ont opéré une perquisition. Cela seraitlors de cette fouille domiciliaire, qu’Arcini aurait alorsbraqué les policiers, et qu’il se serait enfui avec lavoiture de la PJ (j’y reviendrai en détail plus loin).

Seulement, comme dit plus haut, je n’ai pas vuArcini ressortir de la PJ, que cela soit seul ouaccompagné de deux inspecteurs, et j’ai surveilléjusqu’à 11 heures.

Mais, comme dit plus haut aussi, ils auraient pus’éclipser pendant que j’entrais dans la bibliothèque.Cela m’a pris dans les 5 minutes pour entrer etmonter à l’étage, puis de m’installer à une table, unjournal à la main, mais avec les yeux rivés sur lasortie du bâtiment préfectoral.

De ce fait, pour qu’ils aient échappé à masurveillance, la perquisition chez Arcini aurait dû partirvers les 9 heures 25, moment où j’entrais dans labibliothèque. Or la version officielle de cette affaireaffirme que c’est « vers les 9 heures 45 » qu’ils sontpartis! C’est par conséquent la confirmation de ceque l’on sait déjà: tout est bidon!

De toute façon c’est n’importe quoi cette versionofficielle contenue dans le dossier que l’on en juge:

7. ARCINI "S'ÉVADE"

Cette version officielle, telle qu’elle a été détailléeau procès, et qui figure au dossier dans des versionsparfois différentes (notamment pour les horaires!)d’un document à l’autre, dit en gros ceci:

« Vers les 9 heures 45 », après son audition à laPJ, deux inspecteurs ont emmené Arcini dans une205 banalisée. Arcini était libre, pas de menottes, iln’a même pas été fouillé puisqu’il était encore armé(ce qui fait très crédible: ils ne lui auraient donc pasdemandé de vider ses poches à la PJ?). Ils sont alléchez lui et ont commencé « vers les 10 heures » uneperquisition qui leur aurait fait découvrir une balle derevolver dans un tiroir. De là, Arcini se voyantdémasqué (pourquoi?), sort son revolver justement,puis une grenade qu’il dégoupille (avec les dentspeut-être?). C’est techniquement peu vraisemblable(j’y reviens après). Il y a aussi la version inverse:l’autre inspecteur (les deux "braqués" étaient citéscomme témoins et ce que je relate c’est ce qu’ils ontraconté à l’audience) qui a déposé à la barre destémoins a parlé de la grenade d’abord (probablementdégoupillée avec son autre main) et le revolverexhibé ensuite.

Lors du procès, l’un des deux inspecteurs a doncdonné une chronologie de sortie différente pour lagrenade. Cela à son importance, car commentdégoupiller une grenade si on a, déjà, un revolverdans l’autre main? Bonne question, mais lors duprocès, personne ne l’a posée et l’on ne me donnaitpas la parole pour que je la pose.

Certes, c’est possible de tenir un revolver et dedégoupiller une grenade, mais pendant que l’on faitcela, la garde est baissée et les personnes tenuesen joue ne sont alors plus sous la menace directe del’arme. Elles peuvent "tenter leur chance"…

La grenade d’Arcini était américaine avec unegoupille à pince ressort non modifiée (je l’ai vue). Jem’en étais d’ailleurs étonné auprès de lui, carnormalement, soit il aurait dû mettre une goupilleclassique ; soit la pince de sécurité aurait dû êtrecoupée et remplacée par un élastique de

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caoutchouc. Ceci afin de pouvoir, justement,dégoupiller la grenade d’une seule main en s’aidantavec les dents ou en accrochant l’anneau de goupilledans un crochet quelconque. Sur une grenadeaméricaine qui a une goupille à pince ressort (commepour les grenades de l'armée française), il faut mettrele doigt dans l’anneau et tourner en faisant pivoterl’axe afin de faire s’écarter la pince-ressort de sécuritéqui empêche la clavette de sortir de son logement.Pour cela il faut ses deux mains: l’une (en général ladroite) tenant la grenade et notamment sa "cuillère",l’autre avec un doigt passé dans l’anneau de goupilleque l’on fait pivoter de 45 degrés (pour faire écarterla pince-ressort) avant de tirer dessus.

Il est techniquement impossible de dégoupillerune grenade qui a une sécurité à pince ressort(comme celle qu’avait Arcini ce matin-là) d’une seulemain puisque, dans ce cas, comment on fait pourfaire opérer la rotation de 45 degrés à la goupille touten tenant bien fermement la grenade?

À la rigueur, on peut faire sauter la clavette d’uneseule main en écartant la pince-ressort entre deuxdoigts (pouce-index) et en poussant sur l’axe.Seulement, dans ce cas, la cuillère de la grenaden’est plus tenue par aucun doigt et elle remonte, d’oùl’amorçage de l’engin, et l’impérative nécessité des’en débarrasser très rapidement (surtout que lesgrenades que l’on utilisait avaient des mèches trèsécourtées, ce qui leur donnait trois secondes deretard maximum !)...

Or, dans la version officielle , Arcini a toujoursgardé sa grenade dégoupillée dans sa main (rien n’aexplosé!) et il a remis la goupille après (ça aussi c’esttrès difficile à faire d’une seule main car il faut bienécarter la pince-ressort pour tout remettre en place!).

L’inspecteur qui a parlé du revolver sorti avant lagrenade et celle-ci dégoupillée après sa sortie,pouvait, s’il était contre-interrogé sur le champ, êtrepris en flagrant délit de mensonge s’il maintenait saversion. Mais l’on ne m’a pas donné la parolepuisque la partie de ce dossier ne me concernaitpas…

C’est vrai ça, de quoi je me mêlais d’aller vouloirdémontrer que l’inspecteur mentait? Et Arcini disaitque c’était bien ainsi que cela s’était déroulé. Ilreconnaissait la chronologie des faits pour chacunedes versions différentes ! Ce "braquage" n’était pasla partie de mon affaire, c’était celle d’Arcini. Jen’étais accusé que de la pose d’une bombe, pasd’avoir "braqué" des policiers pour "m’évader"! Alorsje n’étais pas invité à m’exprimer sur un sujet ne meconcernant pas directement… Lorsque cela lesarrangeait: les affaires étaient dissociées!

Pour information, et même confirmation, jementionne que l’Arrêt de renvoi devant les Assises,qui relate cette "évasion", donne, lui aussi, unechronologie irréalisable: « Arcini exhibait un revolveret une grenade qu’il dégoupillait aussitôt. »

Poursuivons la version officielle telle que relatéeaux audiences du procès de Caen: une fois lesarmes en main, Arcini menace les inspecteurs, lesfouille l’un après l’autre (mais les policiers ne sont pasarmés, j’y reviens plus loin).

Visualisons la scène: Arcini a alors le revolverdans une main, la grenade dégoupillée dans l’autre.C’est bien ainsi qu’à l’audience les deux inspecteursl’ont décrit. Dans ce cas s’il avait un revolver dansune main, une grenade dans l’autre, il les a fouilléavec quoi et surtout comment? Grâce à sa troisièmemain peut-être?

Poursuivons encore: après la "fouille", il lesenferme, mais sans verrouiller la porte car il les a"séquestrés" dans une pièce (laquelle?) dont la portene fermait pas à clé (ce n’est pas un gag, c’est laversion officielle !).Il leur a juste dit qu’il piégeaitl’entrée ce qui se révélera faux! La porte n’avait pasété piégée! C’est que cela aurait pu mettre endanger la vie des deux inspecteurs, alors pas de ça!Cette porte sera moralement, virtuellement, piégée,ils feront comme si! Ils ont joué à « on dirait que laporte, elle est piégée »!… L’histoire ne dit pas si,dans cette pièce (non désignée!) où ont été"enfermés" les policiers, il y avait une fenêtre. Mais ildevait y en avoir une, car moi qui connaissais lepavillon d’Arcini, je ne vois vraiment pas dans quellepièce il a pu les enfermer: toutes, à part les toilettes,avaient des fenêtres! L’une des versions officiellesaffirme qu’ils ont été "enfermés" dans la cuisine. Unepièce du rez-de-chaussée dont il suffisait d’ouvrir lafenêtre pour sortir…

Après avoir "enfermé" ses "visiteurs", Arcinis’enfuit avec la voiture de la PJ, car lors de la fouilledes policiers, et comme le dit le dossier officiel, il a« volé les clés de leur voiture de service Peugeot 205dans la poche de l’un d’eux »…

Ensuite il faudra un long, très long moment pourque les deux inspecteurs (même pas attachés) sedécident à sortir de la pièce (au risque que celaexplose puisque dans la version officielle Arcini leur adit qu’il piégeait la porte!) où ils étaient "cloîtrés" etdonnent l’alerte. Et, contrairement à ce qu’affirme laversion officielle , aucun barrage de police ne sera misen place dans la zone urbaine de Caen. Pourtant enjuin 1987, lors de l’assassinat de Moussaoui, il y avaiteu des barrages dans l’agglomération pourrechercher la Simca 1100, ce qui avait donné desembouteillages dans Caen (je l’avais vu à la télé !).Là, cette fois, Arcini braque la police, vole la 205 dela PJ, mais l’on ne va pas bloquer la ville pour leretrouver?! Ce n’est que « vers 11 heures » que lavoiture sera retrouvée "par hasard" près de la garede Caen (d’après la version officielle).

Et Arcini, l’honnêteté même, et qui pense à tout,avait bien pris soin (d’après la même version officielle)de fermer l’automobile à clé. Sans doute de crainteque l’on ne la vole, réellement, cette fois! Arcini n’amême pas dérobé le scanner radio dans la voiture ettous les accessoires divers de police qui devaient setrouver dans la boîte à gant de la 205 ou dans lecoffre. Le véhicule était celui du commissaireGaillardon 19(qui sera témoin au procès), il aurait dû,

19 Dans Le Crapouillot n° 86 de février 1986, il est question del'assassinat, près de Rouen,  de François Duprat (l'un des fondateurs, en1972, du Front National. Il en était le n° 2 á sa mort, en 1978, survenuedans une voiture qu'on [ce on dans le cas présent pourrait bien désignerles "mil ices juives"…] avait piégée). Ce numéro du Crapouillot parle du

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logiquement, être bien pourvu en équipementstoujours utiles. Mais "l’évadé" ne touchera à rien, il neprendra rien.

Tout cela c’est la version officielle de cette"évasion". Et l'on est prié de la croire! C’est biensimple: à côté de "l’évasion" d’Arcini, celle deRaymond Samuel dit Aubrac fait crédible, c’est dire!

Ce fut un grand moment de détente auxaudiences du procès lorsque les deux inspecteurssont venus raconter la scène de "l’évasion" d’Arcini etque l’on détaillera le reste! Les journalistes, qui ontsuivi les débats, ont écrit dans leurs feuilles quej’étais « goguenard », « un sourire permanent aucoin des lèvres » durant les récits! Mais c’est eux,tous ces faux-témoins, qui faisaient rien qu’à me fairerigoler! Au lieu de s’occuper de moi, tous cesscribouillards auraient mieux fait de noter lesinvraisemblances contenues dans ces témoignagesrocambolesques.

Car, pour cette affaire "d’évasion", ce qui esthautement savoureux c’est que les policiers n’étaientpas armés! Dans la version officielle , il est dit qu’Arcinia fouillé les inspecteurs pour les désarmer. Aupassage, comment Arcini, homme seul, a fait pour"palper" (avec sa troisième main puisque les deuxautres étaient occupées: l’une par un revolver, l’autrepar une grenade) un policier tout en surveillant l’autrepour qu’il ne lui saute pas dessus?

Quoi qu’il en soit, la version officielle , qui futrelatée lors des audiences du procès, dit bienqu’Arcini n’a pas eu à désarmer les deux enquêteurs,puisqu’ils n’avaient pas d’arme… Je le crois sansproblème! Voilà deux inspecteurs de la PJ, qui vontfaire, sans arme, une perquisition chez un typesuspecté d’attentats, dont un où il y a eu un mort!20

Ils y sont allés les mains dans les poches pour ainsidire! Quand on sait qu’un fonctionnaire de PJ vafacilement aux toilettes avec son arme, affirmer qu’ilssont allés chez Arcini sans leur artillerie, c’est lachose la plus grotesque qui soit!

Surtout que ces inspecteurs de la PJconnaissaient fort bien leur collègue Arcini: lui aussifonctionnaire du Ministère de l’Intérieur, Contrôleurartificier-démineur de la Préfecture pour être précis ;qui, très souvent, assurait des protectionsrapprochées de personnalités, ministres notamment,et qui à ce titre était, cela va de soi, armé ! Ainsi, cematin-là, des trois fonctionnaires du Ministère del’Intérieur, le seul qui n’avait pas oublié son armec’était le Contrôleur artificier-démineur Arcini…

Mais ce n’est pas tout! Mon camarade a"enfermé" chez lui les deux inspecteurs, mais sansles attacher car lorsqu’il les a fouillés, il n’a pas trouvéleurs menottes (version officielle). Ce sont donc deuxinspecteurs (expérimentés!) sans arme et sans unepaire de menottes qui sont allés opérer une commissaire Gaillardon, du SRPJ de Rouen, chargé de l'enquête sur cetassassinat. Ce policier, fort impliqué dans les affaires Arcini/Lajoyecomme nous le verrons dans la suite de ce récit, est donc l'enquêteur quia fait en sorte que les investigations sur la mort de Duprat n'aboutissentjamais, puisque plus de 22 ans après: les coupables sont "inconnus"…20 Les inspecteurs" braqués" avaient, au moins chacun, dans les 20 ansde maison! Il ne s’agit nullement de deux "jeunes" inspecteurs sansexpérience qui ont oublié, tous les deux en même temps, leurs armes…

perquisition chez un type soupçonné d’avoir commisdes attentats et qu’ils savaient forcément armé depar son travail! On se demande bien avec quoi lespoliciers comptaient arrêter le suspect si laperquisition s’avérait fructueuse!

Cette version officielle contenue dans le dossier,puis racontée à l’audience, et dont j’étais le seul àrire, c’est le scénario mal ficelé qui était destiné aufutur procès. Car il fallait bien expliquer telle ou tellechose. Comme il allait y avoir procès, il leur fallait bienexpliquer, officiellement, comment ils étaientremontés à Arcini début décembre 1987. Et très fort:ils l’ont officiellement identifié, mais, mais, mais…sans l’arrêter puisqu’il s’est "évadé"! Il devait leur"échapper", puisqu’ils allaient en avoir besoin pourm’appréhender!

De plus, si Arcini avait été "de bonne foi". si j’osedire, c’est-à-dire non coopératif, non manipulé, et pasavec une laisse depuis 6 mois. S’il avait eu vraimentl’idée de s’enfuir comme il l’a fait (du moins dans laversion officielle !), il l’aurait fait entre 8 heures 30 et9 heures 15: lorsqu’il savait que j’étais dans le Centreadministratif, au bout du couloir donnant surl’antenne de la PJ.

En effet, il faut être logique, une fois dans laplace, et voyant qu’il était bien convoqué pourl’affaire de l’assassinat de Moussaoui, Arcini savaitqu’il était foutu ! Qu’il ne pourrait pas faire illusionlongtemps et que dans les minutes qui allaient suivreils allaient lui demander de vider ses poches, de leurremettre son arme de service! Bien malin celui quiaurait pu lui prédire qu’il aurait l’opportunité (officielle)de s’évader lors de la perquisition qui suivrait cetteaudition. Alors, ses meilleures chances de fuite, il lesavait entre 8 heure 30 et 9 heures 15. Créneaudurant lequel il n’avait juste qu’à sortir son arme,neutraliser d’une façon ou d’une autre lesinspecteurs présents avec lui dans la pièce, etj’arrivais pour l’aider. Il ne l’a pas fait, preuve, à mesyeux, qu’il n’envisageait pas de s’échapper desmains de la PJ!

Il faut aussi remettre cela dans son contexte, à cemoment Arcini est quelqu’un qui est déjà passé àl’action, qui a tué. Dès lors, sortir son arme devant lesinspecteurs (et les neutraliser!) ce n’était pas unechose qui le paralysait de peur. Moussaoui (etprobablement d’autres) en "témoignaient". Aux vuesdes entrées/sorties que j’avais constatées à la PJ, iln’y avait que 4 policiers durant le créneau horaireprévu pour la sortie en force. Autant dire qu’avecl’effet de surprise, c’était simple de s’évader. Arciniétait puissamment armé avec son Magnum il avait aumoins deux enquêteurs avec lui dans le bureau où ilse trouvait, simple de les neutraliser avant qu’ilsn’aient réagi. Après il n’en restait plus que deuxautres dans un ou deux bureaux. Nous aussi nousétions deux, et côté armement il y avait unedisproportion écrasante en notre faveur grâce à desgrenades et un fusil d’assaut que j’avais avec moidans un sac de sport.

Si Arcini s’est "évadé" à un autre moment que lecréneau 8 heures 30 - 9 heures 15, c’est qu’il estimaitqu’il valait mieux "s'enfuir" lorsque je ne serais pas là!

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Il avait peur que je ne vienne l’aider comme je l’avaisprévu. Il a dû dire aux inspecteurs (qui le tenaient enlaisse depuis 6 mois) que j’étais dans l’entrée,puissamment armé, prêt à bondir! Il savaitprécisément ce que j’avais comme armement avecmoi et il l’a forcément détaillé à ses collèguespoliciers!

Et à propos de ce matériel, je me souviens que lematin, avant que l’on aille à la PJ, j’avais retrouvéArcini à une cache d’armes histoire de "faire le plein".Cela l’avait un peu effrayé de me voir remplir mon sacde sport avec des grenades (c’est vrai que j’avais faitfort!). Ainsi que de me voir prendre un fusil d’assautpensant que mon Lüger et mon Ruby comme "armede secours" (en cas d’enrayage de l’arme principale),ne suffiraient pas. Il avait eu comme commentaire« on n’a pas besoin de tout cela » qui, avec le recul,est significatif! Car pas besoin d’un fusil d’assaut pourmener un assaut, c’était nouveau! Finalement, celane l’avait pas emballé plus que ça que je lui proposed’aller lui prêter assistance en cas de problème et dele faire évader…

Par conséquent, si Arcini a informé les inspecteursde la PJ sur la nature de mon armement, il leur aprécisé que si je le voyais "s’évader" là maintenant,j’allais forcément l’aider! De ce fait, il valait mieux qu’il"s’échappe" plus tard lorsque je serais parti, celaserait moins dangereux. Il est plus que probablequ’ils n’avaient pas du tout envie de me voir surgirdans la PJ avec un fusil d’assaut dans les mains. Etc’est pour cette raison, à mon avis, qu’Arcini est restébien sagement à l’étage de l’antenne de la PoliceJudiciaire.

Ils ont peut-être eu à ce moment l’idée dem’arrêter. C’est même plus que probable! Cela auraitaccéléré les choses. Mais il y avait plein de monde àl’accueil dans ce bâtiment préfectoral, et aucun effetde surprise à espérer pour eux: j’étais fin prêt, tendupar le "stress d’avant-assaut". Arcini me connaissantbien, leur a certainement dit que l’arrestation sedéroulerait sans doute très mal (et pas que pourmoi!). Appeler des renforts pour cerner le bâtimentn’aurait rien changé. Le mieux était de me laisserpartir, ce qu’ils ont fait, mais normalement, dès cemardi 8 décembre 1987, l’arrestation aurait pu sefaire. J’étais forcément bien localisé dans Caen. Maisapparemment ils n’étaient pas chaud.

J’évoque aussi un fait qui est très troublant: dansl’après-midi du mardi 8 décembre 1987 (jour de"l’évasion"), je suis passé à deux reprises dans la rueoù il y avait le bâtiment préfectoral où se trouvait laPJ. J’ai pu y voir que la voiture Ford d’Arcini étaittoujours garée, bien sagement, devant la ported’entrée pour ainsi dire. Le véhicule avait unecontravention sur le pare-brise, ce qui veut dire qu’iln’était pas ressorti mettre de l’argent dans leparcmètre.

Mais surtout, cela veut dire que sur le coup de 15heures, et même à 18 heures lorsque je suis passé ànouveau, il ne semblait s’être rien déroulé, puisquesa voiture était toujours garée devant l’antenne de laPJ.

On se demande pourquoi, dans l’après-midi, laFord d’Arcini était encore devant le bâtimentpréfectoral puisque "l’évasion" est censée s’êtreproduite « vers les 10 heures ». Ils n’avaient doncpas emporté la voiture du fuyard pour la fouiller? Elleaurait pu être piégée et/ou contenir des armes ouautres! Les inspecteurs de la PJ savaient que cetteFord était à Arcini. C’est un manque d’intérêt trèsétonnant quand même! Et le matin, comme j’aisurveillé jusqu’à 11 heures le bâtiment préfectoral oùse trouve la PJ, j’aurais dû constater uneeffervescence, des allées et venues de policiers toutagités, puisque la version officielle dit que "l’évasion"a eu lieu « vers les 10 heures ». Il n’en a rien été, jen’ai rien remarqué!

Vers les 21 heures, je suis repassé dans la rue etcette fois la Ford n’était plus là. Reste à savoir si c’estla PJ qui l’a faite enlever ou si c’est Arcini, lui-même,qui est ressorti tranquillement de chez ses collèguespour reprendre sa voiture et aller je ne sais où.

Ces petits détails supplémentaires démontrentque la version officielle n’est pas du tout crédible.Quoi qu’il en soit, ce mardi 8 décembre 1987 je perdsle contact avec Arcini.

8. MERCREDI 9 DÉCEMBRE 1987(trajet Caen-Le Havre)

Le mercredi matin, je décidais de quitter Caenpour Le Havre. Je comptais y aller en train.

Alors que je me rendais à pied à la gare, enpassant devant un vendeur de journaux (tout près dela gare) je vois une affichette des "informationslocales" de Ouest-France avec le titre « Crime racistede la rue d’Auge: le suspect s’enfuit » et en une ilétait relaté "l’évasion", mais sans citer le nom dususpect. En apprenant cela, il n’était plus questionpour moi de prendre le train pour Le Havre, car jepensais que la gare ferroviaire devait être truffée depoliciers à la recherche de "l’évadé". Quant à partiren voiture, cela ne me disait rien, puisque jesupposais que les routes devaient avoir des barragesafin de, normalement, rechercher le fuyard.

Je suis alors reparti pour retourner où j’avaispassé la nuit précédente, et en route j’ai croisé Arcini!

9. JE CROISE ARCINI "PAR HASARD"

Ce qui s’est déroulé, c’est que vers les 10 heures30, au moment d’arriver à la "planque", j’ai croiséArcini qui, comme moi, marchait à pied, un sac enbandoulière. Nous sommes allé là où j’avais passé lanuit, puis nous avons fait le point sur ce qui venait depasser ces dernières heures.

Avec le recul, je ne pense pas du tout que ce soitle hasard qui ait fait que j’ai croisé Arcini. J’avais dûêtre repéré à la gare de Caen, et ceux qui le tenaienten laisse ont dû partir bien vite avec lui en voiturepour le "larguer", en amont de la rue que jeremontais, afin qu’en marchant je le croise 2parhasard".

Caen est grand, et c’est quand même une sacréecoïncidence que ce matin-là, en remontant de la gareen direction d’une "planque", je le croise

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précisément. Il se baladait en ville alors qu’il étaitcensé avoir toutes les polices aux fesses…

Arcini connaissait des "planques", alors sesachant recherché, il aurait dû (s’il n’avait pas ététenu en laisse) à ce moment, y être terré comme toutfugitif en attendant que cela se calme! Au lieu decela, il arpentait le trottoir au risque de croiser unepatrouille de police…

Cette rencontre est très importante, car sans cehasard, je n’aurais pas retrouvé Arcini! Et sans ce"hasard", la police aurait, sans doute, perdu ma tracepour quelque temps.

Certes, mon compagnon d’armes aurait pureprendre contact avec moi, mais seulement via des"boîtes aux lettres".

En effet, dans des immeubles de diverses villes,nous avions des boîtes à lettres desservies encourrier par la Poste. Les noms sur les boîtes étaientbidons et pour se contacter simple: il suffisaitd’envoyer un courrier dans la ville où l’on savait quel’autre se trouvait. Ce dernier passant régulièrementrelever les correspondances, savait alors qu’il étaitdemandé à tel endroit, telle heure. En général uncontact téléphonique fixé pour telle date, dans tellecabine.

Dans mon cas, pour me contacter à nouveau,Arcini aurait dû envoyer des messages dans toutesles villes où j’étais susceptible de m’être retiré. Ce quiaurait pris pas mal de jours (peut-être plusieurssemaines, tout aurait dépendu du moment où jeserais allé relever les "boîtes aux lettres") avant quenous puissions nous retrouver à nouveau ensemble.Ce qui, évidemment, ne faisait pas les affaires deceux qui tenaient Arcini en laisse. Ils ne voulaient pasperdre ma trace, et le meilleur moyen, pour eux , deme "pister", c’était de me coller, tout de suite dans lespattes, leur complice ! C’est uniquement pour cetteraison qu’il y a eu ce "hasard".

Après avoir retrouvé "par hasard" mon camarade,j’ai fait le point avec lui et il m’a raconté sa version deson "évasion". J’avoue que je l’ai cru (mais il ne m’apas tout détaillé quand même...), car je me disais qu’ilavait dû ressortir de la PJ alors que j’entrais dans labibliothèque. À l’époque je n’avais pas le recul quej’ai maintenant sur cette affaire. Je n’avais aucuneraison de mettre en doute la parole d’Arcini, j’ignoraistout ce que j’ai appris par la suite.

Je lui ai quand même demandé pourquoi il nes’était pas évadé entre 8 heures 30 et 9 heures 15,créneau qui était normalement prévu pour cela. Il m’aalors répondu que son interrogatoire se déroulaitbien et qu’il pensait s’en tirer. J’avoue que je l’ai cruaussi, c’était plausible. Lorsqu’il m’a raconté sonévasion, je lui ai quand même demandé ce qu’il avaitfait des armes des inspecteurs, c’est là qu’il m’a ditqu’ils n’étaient pas armés. J’ai aussi demandé s’ilavait volé des choses dans la voiture de police, et ilm’a répondu qu’il n’y avait pas pensé. Je lui aiégalement demandé où il avait passé la nuit, il m’arépondu que c’était au dépôt ferroviaire, dans untrain non fermé. Je l’ai vraiment cru sur tout cela!

Toujours est-il que j’ai décidé de quitter Caen(comme j’avais de toute façon prévu de le faire), et

d’emmener Arcini (ce que je n’aurais pas fait si je nel’avais pas rencontré "par hasard"!). Je ne pouvaisquand même pas le laisser. Je me suis rendu seul àla gare routière pour acheter 2 billets d’autocar pourLe Havre car je pensais que l’autocar serait mieuxque le train. La raison en est que la gare routièreétait plus difficile à surveiller et je me disais que sinous étions repérés, la police n’oserait rien tenterdans un car avec tous ces gens autour.

Vers les 13 heures, nous sommes partis pour LeHavre, le trajet Caen-Le Havre s’est déroulé sans lemoindre problème. Il y avait bien un contrôle degendarmerie au pont de Tancarville, mais ils necontrôlaient, apparemment, que les véhicules desparticuliers. Ils ont laissé passer l’autocar régulierCaen-Le Havre sans s’y intéresser…

Une fois arrivé au Havre, nous sommes allés dansune "planque".

10. JEUDI 10 DÉCEMBRE (l’arrestation)

Le lendemain, dans la journée, nous avons quittéLe Havre pour une petite localité à côté, Octeville, ilse trouve là une ancienne base de l’OTAN habitable.Du moins certains bâtiments et un en particulier prévupour cela. C’était en réalité une ancienne base de lamarine allemande, récupérée et transformée en 1944par les américains, puis par l’OTAN, en terminalpétrolier.

Cette base avait été choisie, car nous étionsdeux, et il fallait un logement pour deux. Si j’avais étéseul, ce n’est pas à Octeville que je me serais rendu.

Nous avions prévu de rester un bon moment ici, letemps que cela se calme! Je devinais que l’on devaitavoir un paquet de monde aux fesses et que c’étaitmiraculeux que l’on ait pu sortir de Caen aussifacilement! Trop facilement même…

En fin d’après-midi, nous sommes arrivés surplace. Seul problème, la base n’avait pas de vivre. Ilfallait que nous allions en chercher et pour cela nousattendions la nuit pour nous rendre au supermarchédu coin. C’était en décembre, il faisait nuit tôt.

En attendant nous avons décidé de faire un peude ménage, et à un moment, je me suis demandé oùétait passé Arcini! Je ne l’ai plus vu pendant assezlongtemps (environ 3/4 d’heure), et je ne savais pasdepuis combien de temps il était déjà parti. Il m’a dit,à son retour, qu’il avait été inspecter les alentours. Jene me suis pas méfié, j’aurais dû!

Maintenant, je suis persuadé qu’il est allétéléphoner pour signaler où nous étions! En courant,il avait largement le temps d’aller au village voisin etd’en revenir, voire plus simple: entrer dans unehabitation la plus proche (un kilomètre environ) pourdemander s’il pouvait téléphoner.

Il est aussi possible qu’il ait été réellement faire untour et que la police nous ait suivi depuis Caen. Maisj’en doute, car à un moment dans Le Havre nousavons emprunté un dédale de sous-solsd’immeubles, ce qui fait que nous sommes ressortisassez loin de là où nous étions entrés. Impossiblepour des suiveurs de garder un contact visuel. Il estde ce fait douteux que la police ait pu nous suivre

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jusqu’à Octeville. Pourtant elle a su que nous yétions!

J’exclus qu’Arcini ait pu avoir un téléphoneportable dans son sac, à l’époque cela ne se faisaitpas comme actuellement. Je ne pense pas non plusqu’il ait eu un scanner radio, mais je ne l’exclus pastotalement. La veille, lorsque je l’ai retrouvé parhasard, il avait un sac de sport en bandoulière et jene me suis pas occupé de savoir ce qu’il avaitdedans. À bien y réfléchir je me demande ce qu’ilpouvait bien contenir, car Arcini n’avait pas d’armeautre que son revolver et une grenade qu’il avait surlui. Il n’avait aucune affaire personnelle…

Toujours est-il qu’arrive l’heure de partir auxcourses. Je prends donc mon sac de sport contenantdiverses grenades, et là, Arcini m’a dit qu’il valaitmieux que je le laisse ici, car nous serionssuffisamment chargés comme cela avec lesprovisions puisque l’on allait en rapporter pour aumoins deux semaines. C’était la seconde fois en 48heures qu’il voulait que: soit que je mette moinsd’armes dans mon sac ; soit que je laisse ce dernier.

Avec le recul que j’ai maintenant de cette affaire,je peux dire qu’Arcini m’a bien désarmé. Car du coup,puisque je n’emportais pas mon sac, je n’avais surmoi que mon Lüger son chargeur engagé et un autrede rechange, c’est tout! Et, c’est important, c’était lapremière fois depuis plusieurs jours que j’étais aussipeu armé.

Je n’ai pas pris de grenade dans mes poches carj’évitais d’en avoir lorsque j’allais dans unsupermarché, cela donnait parfois des renflements àmes poches qui pouvaient laisser à penser à un vigileque j’avais volé quelque chose dans le magasin etcelui dans lequel nous allions n’avait pas bonneréputation…

Si ce soir-là, pour aller au supermarché, j’avaisprévu d’emmener des grenades dans mon sac, c’estque dans cette grande surface, que je connaissaisun peu, il y avait à l’entrée des consignes, commedans une gare, afin que les clients y laissent leursaffaires encombrantes avant d’entrer faire leurscourses. Le sac contenant les grenades, aussi qu’unpistolet Ruby, je l’aurais laissé à la consigne le tempsde faire les achats…

Nous sommes allés faire les courses, et je n’ai paseu tout le temps Arcini avec moi. Alors il n’est pasexclu qu’il ait pu parler à quelqu’un dans lesupermarché, car lorsque j’étais au rayon "truc", luiétait au rayon "machin". Nous nous étions réparti uneliste de provisions pour aller plus vite et nous devionsnous retrouver à la sortie du magasin. Si dansl’après-midi Arcini a été téléphoner pour dire quenous étions à Octeville, dans l’ancienne base OTAN,et que nous allions aller faire les courses ausupermarché du coin, il fut aisé à la police de mettrequelqu’un, connu de lui, dans ce magasin. Cettepersonne n’aura eu juste qu’à pousser son chariot àcôté du sien pour qu’ils discutent et mon camaradede dire un truc du genre: « C’est bon, il n’a qu’unLüger sur lui. » Ce n’est qu’une hypothèse que jeformule. Je n’ai aucune preuve.

En tout cas, au retour du supermarché,comportement très bizarre d’Arcini. Qui ne me sembleencore plus bizarre maintenant que j’ai du recul surl’affaire. Nous revenions à pied, et lorsque nous noussommes engagés sur le chemin menant à la base(environ un bon kilomètre), il traînait derrière moi!Plusieurs fois je l’ai attendu, il marchait parfois plusde 50 mètres derrière moi.

La raison, j’en suis certain, c’est qu’il savait quej’allais me faire sauter dessus, et éventuellementabattre, car une embuscade était précisémenttendue sur ce parcours! Ce n’est quand même pasinnocent que du libre-service au chemin nous ayonsmarché côte à côte à discuter de choses et d’autres,et dans le chemin, il prenait tous les prétextespossibles pour traîner derrière moi à une distanceallant de 10 à parfois 50 mètres. Il est évident qu’ilcraignait les "balles perdues".

Il faisait nuit noire, on n’y voyait vraiment rien, àpeine si l’on distinguait où l’on posait les pieds. À unmoment, vers 20 heures, j’ai pris un "flash aveuglant"parti de je ne sais où! En même temps il y a eu unedétonation (le signal) j’ai entendu crier « Police! »(tout cela en même temps). J’ai tout de suite lâché lesac à provision que je tenais "à bras-le-corps" pourtenter de prendre mon arme, mais ils m’ont attrapéles mains avant. Ce qui était facile puisque je tenaisle sac à bras le corps, ayant même croisés mesdoigts à l’avant pour mieux le serrer contre mapoitrine. Les assaillants, munis de lunettes de visionnocturne, avaient bien vu que j’avais les mains enavant autour de ce gros sac de toile! C’était le RAIDvenu spécialement pour l’arrestation, donc ilsconnaissaient leur affaire, embuscade rondementmenée.

Aucun coup de feu ne fut tiré. Mais si j’avais eu letemps de prendre mon pistolet, il est évident que celaaurait tiré de tous côtés dans ma direction. Ce quiexplique que mon compagnon d’armes,apparemment bien informé, avait pris la sageprécaution de rester assez loin derrière moi…

La version officielle dit qu’Arcini a eu le temps,avant sa neutralisation, de dégoupiller une grenade(décidément expert dans la goupille cet Arcini!), maispas de la lâcher, car un type du RAID lui tenait lamain (version officielle) empêchant la cuillère deremonter. C’est faux, il ne s’est rien déroulé de celasur place. J’ignore pourquoi la version officielleaffirme qu’une grenade a été dégoupillée et qu’il afallu la "regoupiller".

Il a même été dit qu’Arcini avait une grenadeattachée, avec un lacet, autour de son cou et qu’ilcomptait se faire sauter avec. C’est faux aussi, iln’avait rien de tout cela il n’avait qu’une grenadeaméricaine sur lui: la même depuis sa convocation àla PJ et il l’avait, d’après ce que j’ai vu, dans unepoche.

Arcini s’est tout simplement fait neutraliser derrièremoi et ce fut banal. Ils lui ont sauté dessus et c’esttout, rien de plus, je n’ai rien constaté d’autre. Alorsles "faux détails", je crois que c’est surtout pouraccréditer qu’il a résisté, par conséquent qu’il n’étaitpas complice des assaillants…

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Après l’arrestation, nous avons été conduits àRouen dans un premier temps. Puis, après 24 heuresde garde-à-vue, direction Caen pour la suite de cettedernière.

Par ailleurs, je signale que dans le dossier officiel,il est mentionné que lors de son arrestation, Arciniétait porteur d’une grenade anglaise. Or, j’étais surplace, et j’ai vu que c’était une grenade américaine!La confusion n’est pas possible, car j’ai vu, cettearme.

Les grenades américaines ont un bouchonallumeur vissé sur le corps de l’engin, exactementcomme les grenades françaises. En revanche, lesgrenades anglaises (les "Mills") que nous avions ontun système d’amorçage interne. Pour y avoir accès, ilfaut dévisser l’engin par son dessous. Impossible deconfondre une grenade anglaise "Mills" avec unegrenade américaine. Et, je suis formel, Arcini avait surlui, lors de son arrestation, une grenade américaine(re)peinte en vert! J’ignore pourquoi "dans la réalité"du dossier, cela a changé.

Il en est de même pour l’arme de poing qu’avaitArcini sur lui. Il était porteur, lors de son arrestation(j’y étais!) de son revolver de service qu’il détenait entant qu’artificier-démineur du Ministère de l’Intérieur!Mais, étrangement, dans le dossier officiel, exit"l’arme de service", puisqu’il affirme que mon"complice" fut interpellé porteur d’un revolver Partnercalibre 22. D’ailleurs à chaque fois que le dossiermentionne qu’Arcini était armé, que cela soit pour serendre à sa convocation le 8 décembre ou autres,c’est ce Partner qui est mentionné!

Je crois savoir pourquoi ils ont "collé" cette armedans le dossier alors qu’Arcini ne l’avait pas sur luilors de son arrestation! Ainsi cela évite dementionner, dans le dossier officiel, qu’il était armé depar son travail ! De toute façon à aucun momentdans le dossier, cette "arme de service" n’estrépertoriée! Alors, comme elle ne devait pasapparaître, on a décidé que mon camarade s’étaitfait arrêter au Havre avec un Partner qui était,pourtant, d’après ce que je pense en savoir, dansune cache à Caen…

Ils sont forcés de dissimuler l’arme de serviced’Arcini, sinon le "scénario" de la version officielles’écroule. En effet, cette dernière affirme que ce n’estque 6 mois après l’attentat de Caen, qu’enfin, lapolice s’est intéressée à lui. Cette version ne seraitplus du tout crédible si le dossier officiel mentionnaitque, vu sa profession, il était copain avec lesinspecteurs de la PJ. Dans ce cas, tout le mondedemanderait comment après l’attentat de juin 1987,les policiers n’ont pas fait le rapprochement entre lesuspect et leur collègue Arcini roulant dans unevoiture Simca 1100 TI de la couleur de celle qui étaitrecherchée…

Sans oublier qu’il y a la suite, il faut aussi rendrecrédible "l’évasion" du 8 décembre! Par exemple ledossier officiel ne précise pas que les policiers quiont, soi-disant, opéré la perquisition chez Arcini,n’étaient pas armés, et qu’ils n’avaient pas demenottes non plus! Si c’était mentionné, et si en plusil avait été fait état de "l’arme de service" d’Arcini, tout

le monde aurait alors demandé comment despoliciers désarmés (et sans menottes!) ont bien pualler oser faire une perquisition chez un tel suspect,qu’ils savaient forcément armé de par son travail…

En conclusion, finalement, le dossier officiel est"logique". Il s’efforce, péniblement, de rendre crédiblela version officielle .

11. ARRÊTÉS SUR "RENSEIGNEMENT"

Après l’interpellation, l’hebdomadaire caennaisLiberté en date du 11 décembre 1987, a affirméque, selon son confrère Le Havre Libre (qui vit sousperfusion policière pour ses faits-divers), c’est une"information" arrivée aux Renseignements Générauxde Paris qui a indiqué où nous nous trouvions…

De plus, au procès, le commissaire Etcheberry(SRPJ de Rouen) qui relatait notre arrestation àlaquelle il n’a pas assisté21, a affirmé que l’on a étélocalisé sur "renseignement", autrement dit balancés.Il a précisé que c’était la police (sans référence à unservice) qui avait obtenu le "renseignement". Il aajouté que la police protégeait ses indicateurs, etqu’il ne révélerait pas à la Cour d’Assises qui nousavait donnés. Son petit numéro sentait la diversion àplein nez, car il n’avait pas à parler d’indicateur, nousavions été localisés, arrêtés, c’était tout! Personne nelui demandait comment ils avaient trouvé notre"planque". Par contre son petit numéro du « jeconnais l’indicateur, mais je ne dirai pas qui c’est »était logique.

En effet, il était vital pour eux , après la fuite dansla presse du Havre, de me faire croire que la balanceétait extérieure ! Que je ne pense pas qu’elle étaitintérieure, puisque c’est Arcini lui-même qui a aviséses collègues!

D’ailleurs la presse, après avoir écrit la vérité surcette affaire, est revenue à une version plusconforme à la vérité officielle , et elle a écrit que cesont les RG du Havre qui ont eu l’information. Ouf, onrespire, car vraiment Direction Centrale des RG àParis, cela faisait trop haut niveau…

C’est qu’à savoir où se trouvaient Arcini et Lajoye,il y avait Arcini et Lajoye, plus une "autre personne"qui habitait Le Havre. Cette "autre personne",admettons que ce soit elle qui ait balancé. Dans cecas, elle aurait contacté les RG du Havre, de Rouen,ou de Caen. Or, il y a cette désastreuse fuite dans lapresse locale du Havre qui, aussitôt aprèsl’arrestation, a bien précisé que c’était à Paris,directement à la "maison-mère" des RG, que le"tuyau" est arrivé. Il est rare que la Direction Centraledes Renseignements Généraux s’occupe desindicateurs locaux du Havre!

En revanche, vu l’ampleur et les implications decette manipulation, il ne fait aucun doute que c’est laDirection Centrale des Renseignements Généraux,elle-même, qui a cordonné certains points. Il est dece fait tout-à-fait logique que ce soit là qu’Arcini ait dû 21 Nous avons été arrêtés par le RAID, et les policiers de la PJ étaientbien "planqués aux abris", donc ce commissaire n’a rien vu. Ce qui ne l’apas empêché de raconter, à la Cour d’assises, l’arrestation avec moultdétails que personnellement je n’ai pas vus, mais il savait, forcément,mieux que moi…

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aviser ses collègues de l’endroit précis où nous noustrouvions…

D’ailleurs, durant la garde-à-vue, des inspecteursdu Service Régional de la PJ de Rouen, un peu tropenthousiasmés par la conclusion de l’affaire, ontlaissé échapper des petits détails qui démontrentbien qu'on leur avait donné des ordres pour ne pasintervenir eux-mêmes en cas de localisation. Et quipouvait leur donner ces ordres si ce n’est leurssupérieurs de Paris? Certains autres inspecteursfaisaient, parallèlement, état de leur amertume d’avoirété "doublés" par le RAID pour cette arrestation. Carce n’est pas le SRPJ qui a demandé l’assistance duRAID! On a imposé le RAID! Ce dernier avait étéhéliporté au Havre dans deux Puma (les grosmoyens!), et il était commandé par Ange Mancini enpersonne, à l’époque le chef de l’unité. Preuve quecette affaire dépassait, de très loin, les compétencesen manipulation des modestes inspecteurs de la PJlocale. Ces derniers avaient été relégués au rang"d’observateurs" avec pour ordres de ne surtout pass’occuper de cette arrestation.

Je mentionne aussi, à titre d’information, que lapresse de l’époque a diffusé une autre version pourexpliquer la "localisation". Cet autre récit dit que c’estun promeneur (que je n’ai pas croisé...) qui, voyantque je ressemblais au portrait-robot (qui n’avait pasété diffusé dans les média et qui de toute façon neme ressemblait pas du tout!), aurait avisé lui-mêmeles Renseignements Généraux du Havre… Ben tiens,c’est bien connu, en décembre, sur les plages, tousles promeneurs ont en poche le numéro detéléphone des RG…

12.. UN OU DES MYSTÉRIEUX GROUPES ARMÉS

En juillet 1998, plus de 10 ans après l’arrestation,des gens se sont rendus à Octeville, près du Havre.Précisément là où Arcini et moi fûmes interpellés parle RAID, afin de collecter d’éventuelsrenseignements. Sur place il fut rencontré desriverains, et il en fut appris de belles!

En effet, des habitants ont affirmé, qu’en cetemps-là (1986/1987), l’ancienne base de l’OTAN,servait de centre d’entraînement… Ces témoinsparlent d’un "groupe armé" (ou de plusieurs groupes,car il est impossible de savoir si c’était le même àchaque "apparition"!) qui s’entraînait ici! Les riverainsprécisent en outre que les gendarmes, et donc parextension les RG, la DPSD et toute la clique, avaientconnaissance de l’existence de ce, ou ces groupes!Moi j’ignorais! Pourtant en juin 1990 j’ai assisté auprocès de Caen en étant aux premières loges!

Voilà un procès où l’on examinait des affaires desplus étrange, "terrorisme", et ils n’ont pas évoqué ceou ces groupes armés?!

Et nombreux avec ça! Les témoins parlent dedizaines d’activistes parfois présents et quis’entraînaient au tir (armes de guerre!), et même aumaniement d’explosif! Alors là c’est plusqu’incroyable!

Remettons cela dans son contexte: voilà un, oudes groupes armés qui s’entraînent aux vues et sus

de la gendarmerie, et ils nous avaient caché ça auxaudiences du procès de Caen? Non mais là c’estsurréaliste! Surtout qu’aux audiences, à chaque foisqu’Arcini parlait de ses "groupes sionistes" (cf.section 16 du chapitre 5), l’avocat général luirépliquait que non, non, nous étions des isolés etqu’il n’y avait aucun groupe armé (quel qu’il soit!)dans la région normande! Apparemment, ce n’estpas la version des témoins, riverains de l’anciennebase de l’OTAN, qui eux ont bien vu un, ou desgroupes armés s’entraîner ici! Pourquoi, auxaudiences de procès de Caen, et même auparavanten procédure d’instruction, il ne fut jamais mentionnéce, ou ces groupes? Là je me doute un peu!

En effet, comme je l’ai relaté dans le chapitre 5,section 16, eux, ne voulaient surtout pas entendreparler de ces "groupes sionistes" dont Arcini faisaitmention! Ils ont même fait peu de cas, au passage,des revendications sionistes concernant cesattentats!

Pour situer cela dans son contexte, je rappelleque le quotidien Le Monde, du 11 février 1986,publiait la déclaration de Françoise Castro (épousede Laurent Fabiusida, élu de l’agglomérationrouennaise, là où ont eu lieu certains attentats...) quia affirmé que le gouvernement de l’époque « apermis à des milices juives de s’installer dans desquartiers à Paris, mais aussi à Toulouse, à Marseille,à Strasbourg et d’avoir des contacts réguliers avec leMinistère de l’Intérieur… » Certes, dans sonénumération, l’épouse Castro de Fabiusida ne citeaucune ville normande… Mais elle même occupe unehabitation de la région de Rouen, en Normandie22!Elle affirmait également que les contacts sontréguliers avec le Ministère de l’Intérieur qui était leMinistère de tutelle d’Arcini! Ce dernier en dépendaitdirectement, et c’est en 1987 qu’il a commis desattentats revendiqués de façon sioniste…

Alors, ce, ou ces "groupes armés" que lesriverains de l’ancienne base de l’OTAN ont vu àplusieurs reprises, pourraient bien être les mystérieux"groupes sionistes" évoqués par Arcini! Cela pourraitêtre des p’tits gars du Sentier (qui comprendplusieurs milices juives armées), en virée dans leurghetto de Deauville, qui avaient cette based’Octeville (près du Havre) comme "centred’entraînement"… Il faut dire qu’avec ces falaises,c’est un merveilleux centre d’exercices militaires qui ade quoi faire rêver les amoureux de Tsahal!

Certaines personnes m’ont affirmé que ce sontdes "néonazis" qui s’entraînaient ici. Je veux bien lecroire, mais j’avoue que je suis dubitatif!

Soyons bassement logiques: imaginons un instantque ce, ou ces groupes aient été composés de

22 N'oublions pas, non plus, que deux des trois attentats normands ont étéperpétrés sur la commune de Petit-Quevilly dont le maire n'était autre queFrançois Zimeray, encarté au Parti Socialiste, ancien président desÉtudiants Juifs de Sciences-Po, mais surtout membre des B'nai B'rith.Cette secte maçonnique (uniquement réservée aux juifs) voue une hainerabique aux nationalistes français. Elle a même rappelé par voie depresse, notamment dans Le Monde du 26 mars 1986, le serment prêtépar les responsables des partis "de droite" de ne jamais s'allier avec leFront National. La secte des B'nai B'rith peut être considérée comme la"vitrine légale" du terrorisme sioniste: des milices juives!

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"néonazis" (ou assimilés!)! On imagine le tintamarre,le délire, que cette affaire aurait fait! Je vois d’ici lestitres de la propagande: « Des néonazis en armes enNormandie »! Qui plus est: pile là où Arcini et Lajoyese font arrêter! Le "rapprochement" aurait tout desuite été fait! Au procès de Caen, on n'aurait parléque de ça, et rien que de ça ! Cela aurait été le déliretotal! Tandis que là: rien! Alors que la gendarmeriesavait tout! Les riverains spectateurs de cesentraînements paramilitaires (fait à l’arme de guerreselon les témoins!), ont bien certifié que les"autorités" surveillaient ce ou ces groupes, et que lagendarmerie a procédé, au moins une fois, à descontrôles d’identité. De ce fait, on sait qui sont "cesgens"…

Si, comme cela m’a été indiqué, il s’était agi des"néonazis", il est évident qu'on les aurait embarquésvite fait. Ou alors: ce sont des "néonazis spéciaux",qui sont utiles, qu'on protège…

Mais tout de même, je pense que, puisqu'onsurveillait ces gens (sans les arrêter!), ce sont desactivistes qui jouissent d’une "certaine bienveillance"de la part des "autorités"… Ce qui, évidemment, faitregarder dans une certaine direction…

Car, compte tenu de l’hystérie qui agite certains,j’estime que si un, ou des groupes "néonazis"composés de dizaines d’activistes (selon les riverainstémoins des tirs et explosions diverses!) s’étaiententraînés là (avec un tel armement de guerre!), celase saurait su, et pas qu’un peu! Au minimum celaaurait été évoqué au procès de Caen en juin 1990,et pas que là, à mon humble avis!

Au procès de Caen, ils avaient déjà omis de nousparler de ce Costa, fournisseur de l’arme du crimeutilisée par Arcini, et lui-même abattu (cf. chapitre 5,section 8). Silence également sur les autres morts.Mais, ils ont aussi "oublié" de nous préciser que nousavons été arrêtés dans ce qui semble avoir été uncentre d’entraînement d’un ou plusieurs groupesparamilitaires…

Arcini connaissait la base, connaissait-il aussi ceou ces groupes qui s’y entraînaient? Et, surtout, quisont ces activistes?

Pour ma part j’ignorais que cette base servait decentre d’entraînement à des "unités" bien peurégulières, sinon je n’aurais pas été candidat pouraller m’y réfugier!

Chapitre 9

LA GARDE-À-VUE ET L'INSTRUCTION

1. IL MANQUE DES ARMES ET LES EXPLOSIFSONT DISPARU

urant la garde-à-vue, pour ce qui est desarmes, il s’est déroulé de drôles de choses…D’après le dossier officiel de cette affaire,

Arcini aurait "spontanément", durant sa garde-à-vue,indiqué où nous avions des caches d’armes dansCaen. Celles-ci furent "visitées" le samedi 12décembre 1987.

Mais, au procès qui a suivi en juin 1990, je n’aipas vu ces armes, du moins pas toutes! Et dans ledossier, dans l’Arrêt de renvoi devant la Courd’Assises, il est énuméré à "détention d’armes", ceque l’on nous reproche d’avoir détenu. Mais c’estdérisoire!

En effet, au niveau des armes saisies, il n’y a rienpour ainsi dire. Juste ce que l’on avait avec nous lorsde l’arrestation et ce que j’avais dans mon sac restéà l’ancienne base de l’OTAN. À cela s’en ajoutequelques autres (des grenades notamment) trouvéesà Caen selon les indications d’Arcini, mais guère plus.

Pourtant, il était exposé au procès, parmi lespièces à conviction, un fusil US M1. Je l’ai vue !

Je suis formel, j’ai reconnu cette arme qui étaitstockée initialement dans une cache qui comprenaitégalement 3 pistolets Lüger. Ces derniers n’étaientpas, eux, parmi les pièces à conviction! Ilsn’apparaissent pas, non plus, dans le dossier!

De toute façon, ils ne peuvent nier une "certainevalse" avec l’armement, puisque je peux en apporterla preuve par des documents photographiques.

En effet, il est paru, dans le quotidien Ouest-France (édition du Calvados) du mardi 26 juin 1990et l'hebdomadaire caennais Liberté du 29 juin 1990,des photos de presse montrant les pièces àconviction exposées lors du procès. Nous y voyonstrois armes d’épaule et cela ne colle pas du tout avecle contenu de l’Arrêt de renvoi devant les Assises!

C’est le moins que l’on puisse dire, puisque pages23 et 24 de l’Arrêt il est mentionné les armesd’épaule saisies. Idem page 36 et 37. Il n’a été missous scellé (officiellement!) en tout et pour tout,comme arme d’épaule, qu’un misérable fusil dechasse, qui plus est, détail important, "à canon scié".

Or, sur la photo de presse, on peut constater quele fusil au centre n’a pas l’air d’avoir le canon scié!

Ensuite, sur la droite des clichés, il y a, ce que (dubox des accusés), j’ai identifié comme l’US M1évoquée plus haut. Mais cette carabine n'est pasmentionnée dans l’Arrêt!

Sur la gauche de ces photos de presse, on voitdistinctement un fusil d’assaut, c’est une arme deguerre: un SIG Manurhin qui n'est pas non plusrépertorié dans l’Arrêt!

Donc, pour résumer: l’Arrêt fait mention d’uneseule arme d’épaule, un fusil de chasse "à canonscié", mais celui qui se trouvait parmi les pièces àconviction, présentes au procès, n’avait,apparemment, pas le canon scié! Quant aux deuxautres armes d’épaules, c’est encore mieux, elles nefigurent pas du tout dans l’Arrêt!

Lors du procès, je ne me suis pas rendu comptede cette non-concordance! Je n’avais pas le dossieren main! Je pensais naïvement que ces armes,

D

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exposées dans la salle, étaient répertoriées audossier! Cela d’autant plus qu’elles venaient bien descaches d’armes qu’Arcini et moi possédions. J’aireconnu ce matériel!

Il semblerait que cet armement n’ait été là quepour assurer la "décoration"! Sans doute pour"impressionner" le public, qui pouvait admirerl’équipement ainsi étalé. Les armes avaient été enoutre disposées de telle façon que les canons"braquaient" les jurés! Ce qui démontre un certainsens de la mise en scène…

Autre signe qui montre qu’il s’est déroulé dechoses étranges avec l’armement, c’est que durant lagarde-à-vue (le matin du samedi 12 décembre) j’ai vupasser, dans le couloir de la PJ de Caen, despoliciers (je présume que cela en était, bien que je nesache pas qui étaient ces gens habillés en civil) avecdans les mains des armes diverses à nous. Tout celan’apparaît nulle part dans le dossier officiel, et c’étaitencore moins présent au procès puisque j’ai mêmesouri lorsqu’ils ont parlé de notre "arsenal". Comptetenu de ce qui était exposé là (3 armes d’épaule, 3armes de poing, quelques grenades: une misère!), etce que nous possédions en réalité, s’ils avaient toutamené je me demande le qualificatif qu’ils auraientemployé…

Alors où sont passées les autres armes? Etpourquoi les armes d’épaule présentes au procès,parmi les pièces à conviction, n’apparaissent-ellespas répertoriées dans le dossier officiel ? Certainesd’entre elles avaient-elles servi dans d’autresattentats? Si c’est le cas, il convenait de les fairedisparaître car une saisie officielle aurait impliqué uneexpertise balistique qui aurait pu être gênante siArcini a commis d’autres actions avec.

Autre hypothèse qui n’est pas à négliger: c’estque nous ayons eu à faire à des policierscollectionneurs ! Voyant des "armes de collection"(des Lüger à l’état neuf en plus, c’est très prisé!) ilsont pu les garder pour eux!

Je sais par exemple que Dominique Gaillardon(dont il était déjà question dans la note de bas de lapage 60 concernant son "enquête" sur l'assassinatde François Duprat), commissaire de l’antenne de PJde Caen, est un "collectionneur". Je le sais car,début janvier 1987, j’ai vu Arcini avec deux obusd’artillerie complets (douille + ogive), qu’il avaitneutralisés en ôtant les charges explosives desogives et les amorces des douilles. Je lui ai demandési c’était « pour nous » ces obus, et il m’avaitrépondu que non, c’était pour Gaillardon, lecommissaire de la Police Judiciaire de Caen! Ainsi,Arcini fournissait (amicalement!) des obus neutralisésà ce commissaire (et peut-être à d’autres policiers!)pour que, je suppose, il décore sa maison, et/ou lesdonne à des amis.

Et à propos de l’honnête Gaillardon23, lorsqu’il atémoigné au procès, après avoir prêté serment de

23 Pour l’anecdote: après mon arrestation, j’ai été conduit au SRPJ deRouen. Là, tard dans la soirée, le commissaire Gaillardon est venu mevoir pour remplir une fiche. Et pour cela, il a sorti de sa poche un stylo!Mon stylo qu’il avait volé dans mes affaires que l’on m’avait retirées! Etévidemment: « Qui vole un stylo, vole une arme »… Apparemment c’est

dire la vérité, lorsque le président lui a rituellementdemandé s’il connaissait les accusés, il a répondu« non » (même chose pour les inspecteurs, alorsqu’ils mangeaient le midi avec Arcini au restaurantadministratif...). Son « non » pour dire qu’il neconnaissait pas les accusés est vrai, Gaillardon neme connaissait pas, mais ce commissaire fréquentaitsuffisamment Arcini pour lui demander, amicalement,sans contrepartie financière, de lui fournir des obuscomplets pour la décoration de sa maison (et/oucelles d’autres).

Lorsque Gaillardon a dit qu’il ne connaissait pasArcini, j’ai trouvé ce reniement tellement lamentableque j’ai voulu lui rappeler qu’il le connaissait pourtantsuffisamment pour lui demander des obus! Mais jen’ai pas eu la parole, et après il était trop tard, letémoin s’était retiré. De toute façon, ils m’auraienttous traité de menteur si j’avais dit cela.

Le fait que ce commissaire, puis les inspecteurs,aient affirmé ne pas connaître Arcini s’explique par lebesoin de rendre crédible la version officielle . Celle-cidit que c’est en décembre 1987 (6 mois aprèsl’attentat de Caen) qu’ils ont identifié le tueur deMoussaoui en épluchant le fichier des cartes grises.S’ils avaient dit à l’audience qu’ils connaissaientArcini, et mangeaient en sa compagnie le midi, unsaloupiaud aurait alors pu leur demander commentcela se faisait qu’en juin 1987, aussitôt aprèsl’attentat de Caen, ils n’ont pas fait le rapprochementavec leur collègue, propriétaire d’une Simca 1100 TIverte, avec qui ils mangeaient tous les midis… Voilàqui aurait été un bel "outrage à la Cour" et quim’aurait fait expulser immédiatement!

De plus, les policiers ont été gonflés d’affirmer,sous la foi du serment, ne pas connaître moncoaccusé. Je rappelle que ce dernier était artificier-démineur du Ministère de l’Intérieur, et qu’il avait legrade de Contrôleur. Qu’il assurait la protection deministres (et non des moindres!), qu’il intervenaitmême souvent avec la gendarmerie, la policeurbaine, et la PJ lors d’arrestation de suspectsdétenant des grenades ou des explosifs. Alors, quedes policiers de la PJ de Caen aient affirmé, devantla Cour, ne pas le connaître et que le président n’aitpas bronché devant ce parjure , cela en dit long surcette farce judiciaire!

Autres détails concernant la garde-à-vue: lescaches d’armes étaient toutes piégées, règle absolueentre Arcini et moi. Et lorsque mon camarade a révéléoù il y avait des caches dans Caen, il me sembleétonnant que l’on n’ait pas dû faire venir ledéminage. Ces dépôts contenaient des pièges, et il abien fallu les neutraliser! Soit c’est Arcini qui l’a fait lui-même (après tout il était artificier-démineur!), dans cecas, elle était bizarre sa garde-à-vue puisqu’ils lui ont

très courant ces pratiques durant les garde-à-vue car en janvier 1987, lorsde mon arrestation par la gendarmerie, certaines armes que j’avais dansla voiture étaient dans des housses de protection. Ces dernières (dequalité...) disparaîtront toutes "mystérieusement" durant la garde-à-vue…Idem pour une cassette audio de Jean-Pax Méfret que j’avais dans mavoiture et qui a ravi les oreilles d’un mélomane de la gendarmerie! Doncun conseil que je donne à tous: au moment de sortir d’une garde-à-vue (oud’une simple convocation), n’oubliez pas de bien fouiller les gendarmes etles policiers pour récupérer tout ce qu’ils vous ont forcément volé!

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"libéré" les mains afin qu’il démine le site destockage. Soit ils ont fait venir un artificier-démineurqui a travaillé selon les indications d’Arcini, mais dansce cas, pourquoi cela n’apparaît pas au dossier degarde-à-vue?

Il n’est venu au procès aucun témoin pourraconter comment il a fallu neutraliser les pièges!Pourtant la police est bien allée dans ces caches: àl’audience, comme dit plus haut, parmi les pièces àconviction, j’ai vu une US M1 qui en venait!

Et chose qui pourrait frapper l’observateur quiconsulterait le dossier officiel, c’est l’absenced’explosif saisi! Rien, pas de pain de plastic dans lespièces à conviction! Alors que des explosifs nouspouvions en avoir facilement! Plus aisément que desarmes, et que nous en avions quelques kilosd’avance…

Ce que je pense c’est que de l’explosif de cesmêmes lots, de ces mêmes pains, a servi dansd’autres affaires et qu’il valait mieux ne pas enparler…

En effet, en décembre 1987, lorsque je me suisrendu chez Arcini, et que j'y ai passé quelques jours,il m'a confié des choses concernant divers attentats.J'étais en train de perfectionner un cours sur leslettres piégées, et, comme ça, je lui ai dit que celadevait être compliqué d'envoyer ce genre de«missives» à des représentations diplomatiques, carces dernières devaient forcément avoir desdétecteurs. Mon vis-à-vis m'a spontanément réponduque « nôôôn », pas de problème pour lesreprésentations de certains pays "arriérés", ainsi quepour les domiciles hors ambassades des"Excellences". Voulant me démontrer que cesdernières ne se méfiaient pas, il me cita alors commeexemple une campagne de lettres piégées envoyéesà divers diplomates en poste en France, ainsi qu'àdes proches de Bourguiba, le chef de l'Etat tunisien.Cela s'était déroulé courant 1987, au moment de larévolution de palais à Tunis, afin de faire place nettepour que Ben Ali réussisse, plus facilement, sonputsch et devienne calife à la place du calife.

Arcini m'a parlé de cette affaire avec le mêmedétachement blasé que celui avec lequel il m'a parlédes actions commises en Normandie, que ce soitl'attentat du 6 mars ou celui du S juin 1987 que j'aidétaillé au chapitre 5 de ce document.

Bien sûr on pourrait se dire que c'est via sontravail d'artificier-démineur du Ministère de l'Intérieurqu'Arcini a eu vent de ces actions des services contredes proches de Bourguiba. Mais peut-être aussi (et jepenche pour cette hypothèse) qu'Arcini, agent d'unservice, a fait partie de l'équipe qui a réalisé cette"campagne d'éliminations"!

Le fait que cette dernière n'ait jamais étémentionnée dans la presse de 1987 est logique. Lesmédia ne relatent que ce qu'on leur dit de rapporter àla "masse goye". Cette dernière n'a pas à savoircertaines choses! Surtout que la France n'a pasintérêt à informer son opinion publique que des(ses?) "services" ont donné un "petit" coup de pouceà Ben Ali…

Récemment, le journaliste-écrivain Henri deFersan a publié le livre L comme Lajoye. Analysed'un complot d'Etat. L'ouvrage est consacré à monaffaire, et dedans l'auteur mentionne ces actionscontre des diplomates tunisiens en remettant celadans son contexte géopolitique. Il développe en quoila France (qui aime jouer le sabbat-goy d'Israël!) avaitun grand intérêt à privilégier Ben Ali et aider aurenversement du vieux Bourguiba24.

Ces autres attentats expliqueraient, du coup,pourquoi tout l'explosif qu'Arcini et moi possédions atotalement "disparu"! Car une saisie officielle auraitinclus une analyse chimique, et comme c'est sansdoute le même explosif que celui qui a servi ailleurs,dans des affaires ayant des implicationsdiplomatiques avec certains pays dit "sensibles", celaaurait obligé la "justice" à juger Arcini pour cela aussi.Et ça, il ne fallait pas! Car cela aurait été violer le petitaccord passé avec lui (sur mon dos!). . .

Sans oublier le scandale énorme que cela auraitcausé si l'on avait révélé que certains attentats desannées 80 ont été perpétrés par des servicesgouvernementaux, et non pas par ceux qu'on adésignés au "bon peuple"! Car Arcini était tellementblasé par la routine qu'on lui faisait faire, qu'il enévoquait facilement certaines actions (il n'y a pas quecette campagne contre des proches de Bourguiba, jesuis au courant d'autres "bricoles" de ce genre). Il nes'agissait pas de "vantardises" de la part d'Arcini,c'était toujours purement anecdotique. Il ne disaitjamais « j'ai commis… » ou « nous avonscommis… », il citait seulement en exemple unea1faire précise pour illustrer un propos, apporter unerectification. Si cela avait été de la vantardise, celaaurait été raconté avec moult détails imaginaires et ilse serait attribué ces actions. Là, ce n'était pas lecas! C'était le professionnel qui parlait, et qui mementionnait, par un exemple concret et précis, quej'avais dit une connerie en affirmant que lesambassades étaient équipées de "machines àrayons" pour détecter si des lettres suspectes étaientpiégées ou non…

Pour en revenir au matériel saisi par la police suiteà mon arrestation et l'auto-capture d'Arcini,finalement, lorsque l'on voit ce qui a été découvert,nous pourrions penser que mon binôme était plusarmurier qu'artificier-démineur! Car s'il y a bien étésaisi quelques armes, en revanche, aucun explosifne l'a été! Du moins… officiellement ! Dans les motifsd'inculpation il n'y a pas de « détention d'explosif »!

Alors, où est passé tout l'explosif que nous avionset que les policiers ont récupéré ? Qu'en ont-ils fait ?

Je n'ai pas souvenir non plus qu'il ait été analyséce qui se trouvait dans les grenades! Car ellesétaient recyclées avec une charge neuve provenantdes pains de plastic que nous avions. Il aurait pu êtretrès intéressant de savoir si l'explosif, contenu danstelle ou telle grenade, a servi ailleurs…

24 Ceux intéressés par le livre L comme Lajoye. Analyse d'uncomplot d'État, peuvent le commander à l'adresse suivante:Publications HdF * Boîte Postale 18 * 63670 Le Cendre, au prix de 125FRF franco de port. Il est également disponible dans les bonnes librairiesnationalistes.

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De même que je voudrais aussi bien savoir oùsont passées les mines antichars transformées en"grosses grenades" ainsi que les obus! Mais peut-être que, là également, l'explosif qui servait àrecharger ces mines et ces obus provenait du mêmelot de plastic que celui utilisé lors d'autres attentats ?Dans ce cas, là encore, cela expliquerait le pourquoide la disparition de ce matériel lourd.

Tout ce que je peux dire, c'est qu'il s'est déroulédes choses très bizarres durant cette garde-à-vue,puisque la majorité des armes a disparu, ainsi quetous les explosifs.

Mais ce que je ne m'explique pas trop, c'estpourquoi il a été attendu la garde-à-vue pour fairedisparaître ce matériel ? Ils auraient pu le récupéreravant, dès juin 1987, lorsque Arcini fut identifié etarrêté , juste après l'attentat qui a coûté la vie àMoussaoui.

La seule explication que je vois, c'est qu'ilspensaient que j'aurais trouvé étrange de voir lescaches vides de certaines armes et de ne plus ytrouver un gramme d'explosif. Idem chez Arcini alorsqu'il vivait au milieu d'un stock incroyable! Pour eux ,mieux valait tout laisser en place pour que je ne medoute de rien, il serait toujours temps, après monarrestation, durant la garde-à-vue, de tout fairedisparaître. Et qui m'aurait cru si j'avais dit au procèsqu'il manquait plein d'armes et que tout L'explosifque possédait Arcini s'était "volatilisé" ?

Si nous prenons en compte le fait qu'Arcini étaittenu en laisse, qu'il y avait un accord "d'amnistie"pour certains actes, contre une "petite aide" pourm'avoir, tout ce que je trouve bizarre est d'unelogique implacable…

2. L'INSTRUCTION

L’instruction s’est déroulée à Caen, le magistrat-instructeur était une femme, une certaine FabienneJanocka. Pendant l’instruction, j’ai fait pas mal de"caprices", refusant d’y aller! Le juge était d’obligé dedélivrer des mandats d’amener à chaque fois pourme faire venir. Ils devaient aller m’arrêter à la prison…

Cela m’a étonné que toutes les affaires soientinstruites à Caen, car l’attentat qui m’était reproché aété commis à Petit-Quevilly. C’est de fait le Parquetde Rouen qui était territorialement compétent pourme juger! Je n’ai rien commis dans la zone duParquet de Caen! Il est étrange que j’aie été jugé parles Assises du Calvados pour des faits relevant desAssises de Seine-Maritime.

De plus, le tout premier attentat, commis enNormandie, l’a été à Petit-Quevilly. C’est le"mitraillage" d’un bar arabe le 6 mars 1987. Parconséquent, si l’instruction devait se dérouler là où acommencé l’infraction, c’était en Seine-Maritime quecela devait être instruit et jugé. Au total deuxattentats ont été commis en Seine-Maritime, contreun dans le Calvados.

Peu après le procès aux Assises, l’hebdomadaireRivarol a écrit que si l’affaire a été jugée à Caenc’était parce que le Normand de Rouen qu’estFabiusida ne voulait pas d’un procès de ce genre

"chez lui" à cause des revendications sionistesd’Arcini. C’est certain que des "mauvais esprits"auraient pu faire le lien avec les milices juivesévoquées, en son temps, par Françoise Castro,épouse Fabiusida (cf. section 12 du chapitre 8)…Arcini a toujours affirmé être en contact avec desgroupes sionistes, et, en effet, un tel procès "chez"Fabiusida cela aurait fait mauvais genre… Surtoutque deux des trois attentats ont eu lieu à Petit-Quevilly, dont le maire était (est?) François Zimeray,membre "éminent" de la secte des B'nai B'rith, "ailepolitique" des terroristes des milices juives.

Quoi qu’il en soit, l’instruction s’est déroulée(officiellement) comme elle apparaît au dossier, maisce fut un délire total. Car Arcini racontait n’importequoi, ou plus exactement ce que je pensais êtren’importe quoi. À l’époque je n’avais pas le recul quej’ai maintenant, et j’admirais la façon dont il les menaiten bateau, en fait c’était moi qui me faisais mener enbateau…

Durant l’instruction (et même durant la garde-à-vue) il a été question sans cesse d’un groupe appeléla Main Blanche. Il y a même eu un moment VoieLumineuse. C’était ce que nous avions, soi-disant,constitué Arcini et moi. Pour ma part je n’étais pas aucourant que nous formions ce groupe-là à nousdeux!

Cependant, au début j’ai joué le jeu, car je n’avaispas de raison de mettre en doute la sincérité d’Arciniet notamment de me méfier de lui. Je pensais qu’ilétait en train de faire diversion. Donc la MainBlanche , j’ai enchaîné dessus. Idem pour tout lereste, je faisais en sorte que cela "colle" le pluspossible à ce que racontait mon co-inculpé.

En réalité tout est bidon, il n’y a jamais eu degroupe constitué entre Arcini et moi. Il faisait ce qu’ilvoulait de son côté, et moi de même du mien. Il estcertain que l’on se voyait souvent, que l’ons’entraînait ensemble, il y avait la fourniture dematériel, etc, mais nous n’avons pas été complicedans nos actions respectives. Il y avait des actionsprévues en commun, mais elles ne se sont jamaisréalisées.

Quant à la documentation qui aurait été retrouvéechez Arcini, cela ne correspond à rien, c’est du ventqui, j’en suis sûr, a été rédigé entre juin 1987,époque où Arcini a été identifié après l’assassinat deMoussaoui, et décembre 1987, époque où il a étéarrêté avec moi.

Mais toute cette affaire de Main Blanche n’étaitpas là par hasard. C’était destiné à lier toutes lesaffaires et à me faire juger en même temps qu’Arcini,puisque grâce à cela je formais avec lui une"association de malfaiteurs" dénommée la MainBlanche. Sans l’association Main Blanche, lesaffaires auraient dû être dissociées c’est évident, celaaurait dû être des affaires distinctes.

En effet, je n’ai pas participé aux actions d’Arcini,j’étais en prison. Lui n’a pas participé directement àl’attentat que j’ai commis. Nous nous sommes justefait arrêter ensemble. Et si Arcini s’est fait arrêter avecmoi c’est uniquement parce que le mercredi 9décembre 1987 je l’ai croisé "par hasard" dans une

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rue de Caen. Sans cela je ne l’aurais pas eu dansmes pattes à ce moment.

Mais si cela avait été dissocié, mon affaire seraitapparue comme dérisoire, ridicule même! Difficile deme condamner à perpétuité pour si peu, tout lemonde aurait trouvé ça louche. C’est pour joindre lesaffaires qu’il fallait aussi qu’Arcini soit celui qui ait,officiellement, assemblé la bombe que j’ai déposée.Et si on lit les déclarations d’Arcini avec à l’esprit quele but était de me "lier" aux autres attentats, sesdépositions deviennent très claires. Il ne fait aucundoute qu'on lui dictait ce qu’il devait dire.

Pendant l’instruction, du moins dans les premiersmois, Arcini était détenu à la Maison d’arrêt deLisieux. Le monde des prisons étant petit, alors quej’étais quant à moi à celle de Rennes, un détenutransféré de Lisieux m’avait donné comme "tuyau" de« faire gaffe à [mon] pote Arcini »… En effet, ilrecevait régulièrement au parloir avocats la visite dedeux hommes habillés en civil, et qui n’étaient pas ducabinet de son avocat, et ce n’était pas ce dernier…Alors qui étaient ces hommes? Ceux qui venaient luidire de raconter telles choses?

Autres détails troublants, au début de sadétention, il s’est retrouvé au mitard. N’ayant pasgoûté cela, il a écrit une lettre au Parquet affirmantqu’il voulait être entendu (sur quoi?) et qu’il avait des« révélations à faire » (termes employés par lui!)!Évidemment, on s’est bien gardé de l’entendre, on adû lui envoyer les deux civils pour le remettre encondition… Cette lettre d’Arcini est étrangement audossier (ils ont dû oublier de l’ôter), je l’ai lue,apparemment il n’était pas content et il semblaitréellement disposé à tout raconter… Heureusement,par la suite, on l’a changé de prison! Il a été envoyé,chose jamais faite pour un détenu en préventive,dans un Centre de Détention tout neuf à Lorient oùne s’y trouvaient que des condamnés à moins de 5ans! Cela offrait des conditions de détention bienmeilleures (4 étoiles!) qui étaient susceptibles de luifaire oublier ses velléités de "révélations" qu’ilmenaçait de faire…

3. LES MOTIFS D'INCULPATION

Officiellement, si on lit le dossier, l’information quia été ouverte contre moi l’a été pour:

« Assassinat, tentatives d’assassinat, complicitéd’assassinat, fabrication d’engin explosif, résistance àla Force Publique, menace d’atteinte aux personnes,vol, détention et transport d’armes et de munitions de1ère catégorie, association de malfaiteurs. ». Pasmoins!

Encore aujourd’hui ma fiche pénale, decondamné, comprend cet énoncé, et ce n’est pas unhasard. Car une personne qui verrait que je suiscondamné à perpétuité avec 18 ans de sûreté pourau final la simple « dégradation d’un bien immobilier »trouverait ça louche. Tandis que là, si l’on prend mafiche, on se dit que, certes, je suis condamné àperpétuité, mais il y a matière à condamnation.

Et cette affaire a été présentée médiatiquementet judiciairement de façon à accréditer l’idée que j’ai

participé à l’assassinat de Moussaoui! Et même quec’est moi qui l’ai abattu comme on peut le lirerégulièrement dans certains "journaux de référence",comme Le Monde. Beaucoup de gens pensent, debonne foi, que j’ai bel et bien abattu l’épicierMoussaoui car ils l’ont lu dans le journal!

Les motifs d’inculpation (publiés dans la presse aumoment du procès) me concernant sont donc unesavante manipulation, car ils comprennent bien la« complicité d’assassinat » (troisième motifd’inculpation!). Or, le seul mort (officiel puisque l’onne parle pas de Costa et des autres) est Moussaoui.Il a été abattu le 5 juin 1987 et j’étais en prison du 26janvier 1987 au 26 octobre 1987… Ce qui constituequand même un alibi en béton!

Pourtant, si on prend des documents officiels meconcernant et qui figurent dans le dossier (parexemple ma citation à comparaître) on y lit bien queje suis inculpé pour « complicité d’assassinat » (deMoussaoui) et que je vais être jugé pour cela! Maisaussi que je vais l’être pour « assassinat » (deMoussaoui). Ce qui est quand même humoristique,car du coup j’étais accusé (sur la citation àcomparaître) d’être mon propre complice dans unassassinat commis par moi-même…

On mélange sciemment les affaires d’Arcini à lamienne et il y a même mentionné contre moi uneaccusation de « vol » (la 205 de la PJ qu’Arcini auraitdérobée lors son "évasion" et une « résistance à laForce Publique » ("l’évasion")! Même les menacesproférées (qui ne l’ont jamais été en réalité!) parArcini aux policiers lors de "l’évasion" figurent à moncrédit!

Encore récemment, en 1996, puis en 1998, suiteà diverses procédures devant la juridictionadministrative, j’ai pu lire dans plusieurs documentsproduits par le Bureau des Affaires Juridiques duMinistère de la Justice, que je suis condamné, entreautres, pour « assassinat ».... À force de répéter unmensonge, cela devient une vérité! Celui qui aproduit ces multiples documents, est un certain DidierSafar Chef du "Service Contentieux" du Garde desSceaux. Que ce dernier en soit arrivé à fournir, auTribunal Administratif de Strasbourg, puis à la Couradministrative d’appel de Nancy, de faux documentsme concernant et mentionnant que je suis condamnépour « assassinat »..., démontre qu’à très hautniveau, on continue encore aujourd’hui la savantemanipulation. Cela démontre surtout qu’ils onttellement conscience que ma condamnation apparaîtcomme disproportionnée aux observateurs, qu’ilsjugent préférable d’en rajouter un peu afin que celapasse mieux…

4. SOI-DISANT ARRÊTÉ AVEC L'ARME DUCRIME DE CAEN

Durant l’instruction, j’ai appris une chose qui m’aétonné, et que je ne crois pas! Officiellement, lepistolet Lüger, que j’avais sur moi, lors de monarrestation par le RAID, c’est celui qui a servi à tuerMoussaoui. C’est-à-dire l’arme que Costa a remise àArcini (cf. chapitre 5, section 7). Il a aussi été affirmé

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que les munitions que j’avais étaient le reste du lotqui avait servi aux attentats en Normandie.Autrement dit les munitions que Ziegler auraitfournies à Arcini (cf. chapitre 5, section 10).

C’est totalement faux! Car cette arme, j’étais alléla chercher dans une cache en octobre 1987, justeaprès ma libération de prison (cf. chapitre 6 pourcette libération).

Ce que je crois, et ce dont je suis mêmeabsolument certain, c’est qu'on a changé l’armeaprès mon arrestation pour mettre celle qui avait servià abattre Moussaoui. Rien ne ressemble plus à unLüger P08 qu’un autre Lüger P08. Durant l’instruction(et même au procès) il ne m’a pas été remis en mainl’arme. Dès lors, je n’ai pas pu voir si c’était un autreLüger que celui que j’avais sur moi lors de monarrestation. Et d’ailleurs je ne suis pas convaincu quej’aurais pu affirmer, de façon certaine, que c’étaitcette arme-là que j’avais lors de mon interpellation.Hormis, bien sûr, s’il y avait eu une grosse différence,comme une marque spéciale sur la crosse ou autres.

De toute façon nous avons, dans l’Arrêt de renvoidevant les Assises, la preuve de la substitution, leurversion ne tient pas! Ils affirment que c’est Arcini (etce dernier le reconnaît!) qui m’a remis lui-même ceLüger le 9 décembre! Mais il y a un couac énormedans leur récit! Page 27 de l’Arrêt, il est écrit que le 8décembre, pour aller au centre administratif (antennede la PJ à Caen), j’étais porteur de 2 pistolets, ce quiest vrai. Ainsi ce mardi 8 décembre, pour prêterassistance à Arcini (cf. chapitre 8 section 6), j’avais 2pistolets. On retient bien le chiffre 2! Plus loin, surcette même page du même Arrêt, il est menti endisant que le lendemain 9 décembre au matin, Arciniest allé récupérer un pistolet Ruby plus le Lüger(arme du crime) qu’il m’a remis après m’avoirrencontré "par hasard".

Donc, le 9 décembre, il y a, dans cet Arrêt, untotal, pour Arcini et moi, de 4 pistolets ! Les 2pistolets que j’avais avec moi le 8 décembre + les 2pistolets qu’Arcini récupère le 9 décembre = 4pistolets à partir du 9 décembre! Au risque de peinerBig Brother, j’affirme que 2 + 2 = 4!

Or le 10 décembre, suite à l’arrestation, l’Arrêt(dans ses pages 25 et 26) fait état, pour Arcini etmoi, de seulement deux pistolets, un Lüger et unRuby! Il n’y a pas d’autre pistolet (l’autre arme depoing saisie est un revolver)! Ce dont fait mentionl’Arrêt ce sont les armes que mon complice est censéêtre allé récupérer, la veille, le 9 décembre! Mais,dans ce cas, où sont passés les pistolets que j’avaisavec moi le 8 décembre?

Pour les rédacteurs de cet Arrêt, 2 + 2 = 2! Ilmanque 2 pistolets! Ou plus exactement il n’enmanque pas, puisque jamais Arcini ne m’a remis ceLüger et il n’a jamais été récupérer ce Ruby le 9décembre. Ils ne se sont, apparemment, pas renduscompte qu’une simple addition suffit à démontrer quele récit contenu dans l’Arrêt ne colle pas. Imparable!Puisque si Arcini avait réellement récupéré deuxpistolets le 9 décembre, lors de l’arrestationintervenue le 10, ce sont bien quatre armes de ce

type qui auraient été appréhendés, et non seulementdeux !

Bien sûr, ils peuvent prétendre que je m’en suisséparé, que j’ai caché, dans l’intervalle, les deuxpistolets "manquants" et que j’ai remplacé mes armesdu 8 décembre par celles du 9 qu’Arcini m’aurait, soi-disant, remises. Mais dans ce cas, il est pour le moinsétonnant que les policiers ne m’aient pas "cuisiné"pour tenter de retrouver ces deux autres armes… Ilest évident que la police aurait tout fait pour lesretrouver!

Lorsque Arcini raconte que le 9 décembre, il m’aremis le Lüger (arme du crime), c’est comme pour laconfection de la bombe, il s’accuse sur ordres!Preuve qu’il était plus que complice avec ceux quisont derrières cette manipulation.

Il fallait que je sois arrêté avec l’arme du crime, etavec des munitions identiques à celles qui ont tuéMoussaoui, alors ils ont substitué! Ils ont faitdisparaître le Lüger que j’avais pour le remplacer parun autre plus intéressant pour eux…

Pour les munitions, j’en suis d’autant plus certainencore! Le dossier officiel prétend que les cartouchesque j’avais sont le reste du lot que Ziegler avait remisà Arcini et qui a servi, notamment, à tuer Moussaoui.Je sais que c’est faux pour la simple et bonne raisonque les munitions de mon arme, que j’avaisréellement lors de mon arrestation, étaient des ballesallemandes recyclées. J’avais le matériel pourfabriquer mes munitions, alors je prenais descartouches allemandes pour les Lüger, et je lesrecyclais en remplaçant la poudre, ainsi que l’amorced’origine, par du neuf. Ce sont des projectiles de cegenre que j’avais avec moi lors de mon interpellation,aucune confusion de ma part sur ce point.

Le fait que j’aie, officiellement, sur le papier, étéarrêté avec l’arme du crime, et le reste des munitionsayant servi aux attentats en Normandie, n’enaccréditait, évidemment, que plus la collusionArcini/Lajoye! Objectif où l’on voulait en arriver pourjoindre toutes les affaires dans un procès commun.

On peut dire qu’ils se sont donné du mal pourfaire que toutes les affaires normandes soient liéesentre elles! Seul moyen de faire oublier l’indigence demon attentat, et de me faire condamner au maximumen profitant de l’importance des accusations pesantsur Arcini.

Et, soit dit en passant, heureusement que j’étaisen prison du 26 janvier 1987 au 26 octobre 1987!Sinon il ne fait aucun doute que j’aurais étécondamné pour avoir abattu Moussaoui, à Caen, le 5juin 1987! Je n’aurais pu "nier les faits" compte tenudes "preuves accablantes" contre moi! En effet, ledossier officiel affirme que je fus interpellé avec l’armedu crime et le reste des munitions tueuses. Des"preuves" largement suffisantes pour forger l’opiniond’un jury sous influence! Ajoutez un "témoin" quim’aurait "reconnu" et c’était emballé! Cela démontre,surtout, qu’en matière de "preuve", quelles quesoient les affaires, il faut être très prudent! Ils saventen fabriquer!

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Chapitre 10

LE DOSSIER

1. SA REMISE (8 juin 1990)

ne copie du "dossier complet", ou plusexactement présenté abusivement comme tel,m’a été remise le 8 juin 1990, un peu avant

midi. C’était le lendemain de mon transfert de laMaison d’arrêt de Rennes à celle de Caen.

Je n’ai pas pu le consulter longuement car jedevais l’envoyer à Maître Burdeyron (mon avocat àl’époque) qui, lui, ne l’avait pas (et je ne pouvais lephotocopier, faute de moyens techniques pour cela)!Comme à la Maison d’arrêt de Caen le courrier estramassé vers les 17 heures, j’ai eu le dossier justequelques heures en début d’après-midi, ce quiexplique que je n’ai pas pu le consulter à fond avantle procès. Le temps que la Poste achemine lesdocuments à Maître Burdeyron, celui-ci les a eusmoins de deux semaines avant l’ouverture du procès.Ce qui fait catastrophique pour préparer une telleaffaire.

De plus, ce dossier est constitué de telle façonqu’un avocat qui le consulte ne sait pas par quelbout commencer. Cela part dans tous les sens, pourau final n’arriver qu’à du vent.

En effet, comme Arcini a en réalité été identifiédès juin 1987, juste après l’assassinat de Moussaoui,et qu’il a été tenu en laisse jusqu’en décembre 1987,il faut bien se rendre à l’évidence que dans ce cas:tout le dossier jugé à Caen est un faux !

Quant à ceux qui pourraient s’étonner que ce nesoit que le 8 juin 1990 (soit 15 jours avant le procès!)que j’ai eu accès au dossier, je leur répondrai qu’enFrance c’est quand ils le veulent qu’ils daignent enremettre une copie à l’accusé! Les "Droits de ladéfense" et le "Droit à un procès juste et équitable"etc, sont des arguments de propagande destinésaux gogos, et je dirais même destinés aux goyim ! Jeme permets de plagier l’excellente formule deFrançois Brigneau: « À quoi reconnaît-on, en France,un imbécile? C’est celui qui dit “j’ai confiance dans laJustice de mon pays!” ». On ne saurait mieux dire!

Et pour la remise de cette copie, encore dois-jedire merci, car je l’ai eue deux semaines avantl’audience! Ils auraient pu me la remettre le matin duprocès! Voire ne pas m’en remettre du tout! Et 15jours avant, c’était suffisant, le dossier remis ne faisaitque dans les 3.000 pièces, une paille à consulter!

Ce dossier, comme tous ceux de Cours d'Assises,se décompose en deux parties: la première estconsacrée aux faits criminels (je n'y reviens pas,puisque ce fut développé au fur et à mesure de cemémoire); la seconde est intitulée "Enquête depersonnalité". Comme son nom l'indique, celaconcerne la personnalité. Ces investigations sontdestinées à savoir si l'accusé a fait pipi au lit lorsqu'ilétait gosse, et/ou s'il a tiré sur les couettes d'unecopine de maternelle ou de CP pour ceux qui,comme moi, ne sont jamais allés en classe de

maternelle (ça ne se faisait pas au début des années70 dans la France rurale).

Nous allons donc voir le contenu de "l'Enquête depersonnalité", et je remercie ceux qui l'ont établie!Car s'il me fallait encore des preuves de lafalsification du dossier, ils m'en ont fourni plus qu'ilm'en faut.

2. "L'ENQUÊTE DE PERSONNALITÉ" A ÉTÉ ENPARTIE RÉDIGÉE PAR LA GENDARMERIE

Si avant le procès de juin 1990, je n'ai pas eu letemps de consulter le dossier officiel dans sa totalité,en revanche j'avais eu le temps de lire le contenu de"l'Enquête de personnalité" me concernant et j'avaisété édifié!

En effet, lorsque j'ai lu les déclarations de mesparents, cela m'a fait bondir! Car ma mère disait (jerésume) que je m'absentais souvent et notammentune fois où je suis parti pendant plusieurs jours, enBretagne, et qui plus est pas chez n'importe qui:chez Jean-Marie Le Pen lui-même! Ce qui est biensûr totalement faux!

Par la suite (après le procès de juin 1990), j'ai écrità mes parents pour leur demander quelles étaientces choses racontées dans leurs procès-verbauxd'audition. Ils ont fini par me répondre, après quej'aie insisté dans plusieurs lettres, que ce sont lesgendarmes qui avaient écrit cela eux-mêmes ! Cesont eux , au moment de consigner les déclarationsde mes parents, qui ont rajouté ces éléments enaffirmant à ma mère que cela pourrait m'aider de"décharger" ma responsabilité et de dire que j'avaisété "entraîné", "influencé", et patati et patata. Donc,c'était bien la faute à Le Pen et j'étais même,apparemment, allé chez lui, en Bretagne (à LaTrinité-sur-Mer, je suppose!), prendre les dernièresconsignes… Les gendarmes ont aussi précisé à mesparents qu'il fallait me présenter "comme ci et commeça".

Je ne crois pas un instant que ce soient lesgendarmes qui aient eu cette idée-là tout seuls. Carceux qui ont réalisé ces auditions ce sont (c'estmentionné sur les procès-verbaux) des gendarmesde la brigade de Saint-Jean-de-Daye (départementde la Manche), du chef-lieu de canton (500habitants)! Par conséquent, des pandores de lacampagne, forcément pas vraiment au fait dessubtilités politiques liées à "l'extrême-droite"… Onavait, c'est manifeste, briefé ces militaires en leurprécisant ce qu'ils devaient obtenir et faire signer auxparents. Car c'est l'ensemble des auditions de mesparents qui est ainsi bidonné puisque totalement, oupresque, écrit par la gendarmerie!

Par exemple, dans le procès-verbal d'audition dema mère, il est question de la Corse. D'un séjour quej'y aurais fait. C'est exact, puisque je suis bien allédans l'île en 1983. Mais, je suis formel, mes parentsl'ignoraient totalement, et n'avaient aucun moyen de

U

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le savoir! À l'époque où je m'y suis rendu (été 1983),j'avais 16 ans depuis avril et j'étais parti en Corse"comme ca" (vers 13/14 ans, je suis devenu "trèsmobile", mes parents me voyaient de moins enmoins. J'ai abordé cela au chapitre 1, section 1 de cedocument). Je suis resté en Corse tout l'été.

Cependant, dans le procès-verbal de ma mère, ilest précisé que c'est en 1984 que je m'y suis rendu.Ils se seraient apparemment trompés puisque c'esten 1983 que j'ai effectué ce séjour. D'ailleurs, dansl'hebdomadaire caennais Liberté en date duvendredi 29 juin 1990 qui faisait le compte rendu duprocès de Caen, il est fait état de ce tourismeinsulaire. Il est précisé également que cela a eu lieulorsque j'avais 17 ans (donc en 1984). L'erreur dedate a ainsi été reprise par la presse "bien" informéesur ce qu'elle devait écrire.

Si mes parents ne savaient pas que je me suisrendu en Corse, et par conséquent qu'ils n'ont paspu l'indiquer d'eux-mêmes dans leur procès-verbald'audition, en revanche Christophe Arcini a su que jesuis allé dans l'île! Je ne le connaissais pas en 1983,mais en 1984, lors d'une conversation portant sur laCorse, je lui ai dit que je connaissais un peu, puisquej'y avais séjourné durant tout l'été 1983.

Alors je ne vois qu'Arcini pour avoir raconté (àceux qui le tenaient en laisse sans doute…) que jem'étais rendu en Corse en 1983. Et ce sont lesgendarmes (renseignés probablement par la DPSDet/ou autres…) qui, sachant qu'ils devaient ajoutercertaines choses aux procès-verbaux d'audition desparents, l'ont ajouté en faisant une faute de frappe:en tapant 1984 au lieu de 1983. À moins que l'erreurne soit volontaire, mais comme je ne me suis pasrendu en Corse en 1984, je ne vois pas, au premierabord, l'intérêt de cette "faute de frappe"… Il peutaussi s'agir d'Arcini qui a mal transmis, et indiqué1984 au lieu de 1983. Difficile de le savoir…

Mais ce séjour en Corse n'a pas été inclus defaçon innocente dans cette audition parentale. C'estévident! Au besoin cela "prouvait" (c'est ma mère quil'indiquait, alors c'était forcément la "vérité vraie", unemère ne mentirait pas aux gendarmes sur cela1 Quicroirait le contraire?) que je me rendais en Corse detemps à autre. Et qu'est-ce qu'il y a eu dans cetteîle? L'assassinat de Costa qui aurait fourni à Arcini leLüger P08 utilisé pour commettre deux des troisattentats normands. Et aussi ces deux Arabesabattus à Ajaccio en août 1986. (Ces affaires ont étéabordées au chapitre 5 de ce document)

En mentionnant dans ce procès-verbal ce "séjouren Corse", il semble manifeste qu'on voulait en faireconclure certaines choses… Je pense sincèrementqu'on voulait établir une sorte de "connexion" avecdivers crimes qui ont eu lieu dans l'île, notammentceux que j'ai mentionné dans ce mémoire.

En effet, en quelque sorte, les gendarmes avaient"préétabli" dans cette déposition un lien imaginaireavec Le Pen lui-même (on se demande ce qu'il vientfaire là-dedans!), et surtout avec la Corse! Ainsi, pourle cas où l'on aurait eu besoin de charger "un peuplus" les accusations contre moi afin d'obtenir unecondamnation maximum, il était aisé de "démontrer"

que j'avais commis des actions en Corse, puisque jem'y rendais de temps en temps. Pour les "preuves"de ma participation à de quelconques actions, je leurfais confiance, ils auraient fabriqué cela… J'aiexpliqué dans ce mémoire, au chapitre 9 section 4(« Soi-disant arrêté avec l'arme du crime de Caen »),comment on s'y prend pour fabriquer des "preuvesaccablantes".

En tout cas, il est évident que la gendarmerie n'apas ajouté ce "séjour en Corse" sans avoir sous leképi une raison bien précise!

En outre, d'après ce même procès-verbald'audition autodictée, je suis revenu de Corse « lecrâne rasé »… Je me retrouvais par conséquentdécrit comme un skinhead, ce que je n'ai jamais été!Mais qu'importe, dans cette audition, il fallait qu'il y aittous les éléments du fantasme: nous avons Le Pen(qui ne peut être, évidemment, que l'instigateur desactes que j'ai commis!), nous avons la Corse et sesmystérieuses exécutions, et nous avons les"skinheads"! Ne manquait, dans ce document,qu'une allusion au Ku Klux Klan et à Odessa !

Le reste des auditions de mes parents est de lamême eau: tout y est totalement bidon, ou alorsprésenté d'une façon plus que tendancieuse.

Mais, ce qui est significatif, c'est que lors duprocès de Caen, ils n'ont pas exhibé certainesdéclarations contenues dans ces procès-verbaux desparents. C'est dire si c'était gros! Même la licrasse quiétait partie civile et qui pourtant ne recule devantrien, a préféré s'abstenir de sortir ce "séjour chez LePen"! Idem pour la LDH et le MRAP qui, comme leslicrasseux, ont finalement considéré que, sur cecoup-là, la gendarmerie y était allée un peu fortquand même et que cela se voyait vraimentbeaucoup qu'il y avait eu de l'autodictée! L'avocatgénéral, ainsi que le président de la Cour, se sontaussi abstenus de sortir cette déposition, ce"témoignage", pourtant si accablant pour Jean-MarieLe Pen…

3. LES PARENTS

Eu égard à la personnalité de mes parents, il futaisé pour la gendarmerie de leur faire signern'importe quoi! Ou plus exactement, pas n'importequoi: des “indications“ qui auraient pu éventuellementservir!

Mon père est maintenant décédé, il est mort audébut 1995. Je dois dire que c'était des parentsspéciaux (ma mère vit encore). Lorsque je suis né,mes parents avaient tous les deux 44 ans (ils sontnés en 1923). Il y a une grande différence d'âgeentre mes frères, mes sœurs et moi (j'y reviendrai plusloin).

Mon père: alcoolique total. Quant à ma mère, elleest un peu retardée, un brin “simple d'esprit“ commeon dit. Ce qui fait qu'avec deux personnes de cegenre, les gendarmes jouaient sur du velours, ilspouvaient leur faire avaler n'importe quoi et lespersuader de signer des procès-verbaux d'auditionqu'ils avaient en partie rédigés eux-mêmes.

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Ma mère ne pensait évidemment pas à mal, elle aaccepté (certainement sans se rendre compte de cequ'elle faisait!) pour « être utile », comme elle me l'aprécisé dans une lettre. Les gendarmes(« aimables  ») lui ont dit que cela m'aiderait, alors ellel'a cru et a signé les déclarations que les pandoresavaient rédigées…

Et compte tenu que ma mère est un peu “simpled'esprit~ (c'est suite à ma naissance, problèmes dû àl'accouchement), j'estime qu'ils auraient pu s'abstenird'aller recueillir sa déposition, ou alors mettre uneréserve à ses déclarations en précisant un peu leschoses sur son état. Mais ces "gens-là~ n'ont aucunepudeur, et ils ont, au contraire, sauté sur l'occasion!

Mon père travaillait dans une usine, une laiteriesituée à Pont-Hébert, dans le département de laManche. Il avait un emploi d'ouvrier de chaufferie.Quant à ma mère, elle était ce que l'on appelle “mèreau foyer“.

Donc milieu parental très modeste, et même plusque très modeste.

4. LES FRÈRES ET SŒURS

L'audition des parents a été de "l'autodictée",mais pour les frères est sœurs, ce fut la même chose,du moins pour certains.

Mais avant tout, je précise que je suis le dernierde 7 enfants nés, et dont l'un est mort en bas âge il ya très longtemps, bien avant ma naissance. Un desautres, mon frère Émile, est décédé en 1992 de je nesais trop quelle maladie, il avait la quarantaine.

Comme spécifié plus haut, il y a une grandedifférence d'âge entre mes frères et sœurs et moi.Lorsque je suis né, en 1967, certains étaient encorelà mais peu de temps après, ils ont quitté mesparents. À tel point que, hormis ma sœur Odile, quiest l'enfant née juste avant moi (elle a vu le jour en1960), j'étais incapable de préciser l'année denaissance de mes frères et sœurs: je ne les ai pasconnus du tout pour certains. Pour avoir ceséléments, il m'a fallu consulter les procès-verbauxd'audition de "ma famille"!

La raison de cette ignorance est que mon pèremettait ses enfants (les garçons) dehors à 16 ans,âge minimum pour travailler, donc du vent… Les fillesavaient le droit de rester un peu, mais juste un peu.(Aucun des enfants dans la famille n'a pu faired'études. De toute façon, je vois mal comment nosparents auraient pu les payer…) Ce qui veut dire quele premier enfant de la famille (mon frère Émile,décédé en 1992 alors qu'il avait la quarantaine) estparti lorsqu'il a eu 16 ans! Idem pour mes deuxautres frères, Alain et Gustave. Et comme il y a de 15à prés de 20 ans entre mes frères et moi,automatiquement, comme ils sont partis à leurs 16ans, je ne les ai pas réellement connus: j'étais bientrop petit (voire même pas encore né lors du départde certains!) pour m'en souvenir.

Je n'ai, de fait, pas connu ces frères et sœurs,hormis Émile (décédé en 1992), qui était l'aîné de lafamille et qui habitait la même commune que mesparents. Mais je l'ai "connu" de vue, car il était fâché

à mort avec mon père, ce qui fait que "ce type", je levoyais de loin, je savais que c'était l'un de mes frères,mais c'est tout!

Et ce qui est étonnant, c'est que, lors de sonaudition, cet "inconnu" aurait raconté des chosescomme s'il me connaissait très bien! Il est écrit qu'il adéclaré avoir vécu chez mes parents jusqu'à asseztard. Ce qui est rigoureusement faux! Il habitait unemaison, dans la même commune, mais à 1 kilomètrede celle qu'occupaient mes parents et je ne l'aijamais côtoyé!

Mais lui c'est peut-être spécial, car il étaitmécanicien "à son compte" (non-déclaré), et iltraficotait (paraît-il…) dans les pièces détachéesvolées. En conséquence, cela a pu être du donnant-donnant avec les gendarmes: « Tu signes le procès-verbal que l'on a écrit nous-mêmes, et l'on ne parlepas des pièces de voitures volées qu'on a trouvéeschez toi… ».

Pour Marie-Thérèse, l'une de mes deux sœurs etqui est aussi le second enfant de la fratrie, elle estplus âgée que moi (plus de 15 ans), et elle s'estmariée en 1972. À cette époque, j'avais… 5 ans!

Après son mariage, je n'ai pas dû la revoir plusd'une dizaine de fois juste comme ça en "coup devent". Et depuis l'âge de mes 12/13 ans (soit depuis1980 en gros), je me demande si je l'ai revue plusd'une fois, c'est dire si, en 1988, elle était habilitée àparler de moi dans un procès-verbal! Et pourtant, ellel'a fait! Du moins on a fait dire à cette sœur deschoses sur l'adolescence extrémiste, néonazie, etc,de son petit frère pas sage…

Il m'est très aisé de démontrer qu' ils en ont tropfait dans ce procès-verbal de Marie-Thérèse, car il y aune impossibilité temporelle dans cette déposition!Ceux qui ont auto-dicté sont de piètres calculateurs:ils n'ont pas pris en compte la différence d'âge entrema sœur aînée et moi! Puisqu'elle est partie tôt de la"maison familiale" (il est déclaré qu'elle a été placée« en pension »), qu'elle s'est mariée en 1972, et queje suis né en 1967: comment aurait-elle pu prétendrem'avoir côtoyé durant mon adolescence, et cela dansune relation frère/sœur élevés ensemble? Ceux quiont auto-dicté cette déposition, ont pris comme base,pour leurs falsifications, la normalité: savoir que dansune famille ordinaire, la sœur aînée grandit avec lepetit frère! Manque de chance pour eux , ce ne futpas le cas dans la famille Lajoye!

Parmi mes deux autres frères, il y a Alain(troisième enfant après Émile et Marie-Thérèse) etson procès-verbal semble correct. Il a déclaré qu'il nepouvait rien dire sur moi car il ne m'avait pas connu.Ce qui est exact! Il semble que cela soit le seul qui aitdit la vérité (ou plus exactement le seul a qui l'on alaissé dire la vérité; ou le seul dont on n'ait pasfalsifié, après coup, l'audition).

Quant à mon frère Gustave (né quelques annéesaprès Alain), apparemment la gendarmerie ne l'a pastrouvé puisqu'il ne figurait pas au dossier. C'estdommage, cela aurait été marrant. Car bien que je nel'aie pas connu, j'en ai juste un vague souvenir (ladernière fois que je l'ai vu, je devais avoir 7 ou 8ans), il paraît que c'est un gauchiste qui a séjourné

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dans des mouvements et des maquis de guérilla enAmérique du Sud et qu'il y serait encore, s'il ne s'yest pas fait tuer. C'est ce qui se disait la dernière foisque l'on a eu de ses nouvelles.

Odile, ma seconde sœur, est l'enfant née justeavant moi et que j'ai connu puisque seulement 7 ansnous séparent. Mais, elle est partie travailler, enSeine-et-Marne, comme vendeuse lorsqu'elle avait 17ans, donc en 1977. À cette époque, j'avais 9/10 ans.Par la suite, je ne l'ai pas revue plus de quelquesfois, mais juste comme ca en "coup de vent" aussi.Comme pour mon autre sœur, je ne pense pas l'avoirrevu depuis mes 12/13 ans, si ce n'est pour sonmariage qui était en 1980 (c'est là que j'ai revu mesdeux sœurs pour la dernière fois). Par conséquent,avant que je ne milite à quoi que ce soit!

Alors, ce qui est incroyable, et qui m'a paruinitialement d'un culot monstre de sa part, c'est quema sœur Odile déclarait, dans son procès-verbald'audition (si j'en crois ce qui est mentionné!), quemes "activités extrémistes de droite" étaient connues,et qu'ils en parlaient (s'inquiétaient même!) en famille!Lorsque l'on connaît la famille, ceux qui ont dicté celaont été particulièrement gonflés! Puisque ma dernièresœur est partie définitivement de la "maison familiale"en 1977 alors que j'avais 9/10 ans, l'image qu'elle agardé de moi, c'est celle d'un gosse de cet âge! Dèslors, comment aurait-elle pu déclarer, lors de sonaudition, qu'effectivement, ayant été élevée en macompagnie, elle avait constaté que je faisais dans"l'extrémisme de droite" et que, précisément, ils enparlaient lors de "réunions de famille" pour s'en"inquiéter"?

Je précise bien que, si je n'avais pas lu leursprocès-verbaux mentionnant leur "situation", j'auraisété incapable de parler, avec précision, de mes frèreset sœurs (profession, etc…). Donc, si je n'étais pascapable d'en parler, eux ne pouvaient pas être enmesure de parler de moi! Ils ne m'ont pas plus côtoyéque je ne les ai connus! Pourtant, si on lit les procès-verbaux de mon frère Émile et de mes deux sœurs(Marie-Thérèse et Odile), on a la sensation de lire desdéclarations de gens qui ont été élevés à mes côtés,durant mon adolescence. Ce qui est totalementfaux !

Dès lors, dès que j'ai pris connaissance de cesprocès-verbaux, j'ai eu la certitude, la preuve, que:soit on avait tout "auto-dicté" et fait signer ensuite;soit on avait carrément auto-écrit et auto-signé cesdocuments! Voire falsifié des déclarations initialessachant que, de toute façon, si elles étaient utiliséesau procès, les frères et sœurs ne seraient pas là pourdire que ce n'est pas ce qu'ils ont déclaré lors deleurs dépositions.

Il faut savoir que dans des interrogatoires de cegenre, aucune copie des procès-verbaux n'estlaissée aux auditionnés. Il est, par conséquent, aiséde falsifier leurs déclarations! Et même si unepersonne affirmait ne jamais avoir déclaré ce qu'on luia ensuite "fait dire", après falsification, cela serait saparole contre celle des gendarmes et/ou despoliciers. Or, comme chacun doit le savoir: lamaréchaussée et la police sont composées de gens

d'une probité au-dessus de tout soupçon, incapablesde se livrer à de telles forfaitures…

Mais je ne comprends pas pourquoi ils ontbidonné les procès-verbaux d'audition de mes frèreset sœurs pour leur faire dire que j'avais des "activitésd'extrême-droite" connues et affichées. À croire quece n'était pas évident, à première vue… J'estimequ' ils se sont donné beaucoup de mal, et pris degros risques (car je peux prouver la falsification!),pour faire "confirmer" par la famille ce qui étaitflagrant.

En revanche, plus grave est la manipulation desprocès-verbaux de mes parents car elle, elle visait belet bien à impliquer Jean-Marie Le Pen, et à établirune connexion avec la Corse!

En conclusion, cette "Enquête de personnalité"faite auprès de ma famille et qui figure au dossierofficiel est, c'est aisé de le démontrer, falsifiée! Mapersonnalité devait correspondre à un certain profilpréétabli (par qui?), alors ils ont fait en sorte que celacolle parfaitement à l'image qu' ils voulaient donner demoi, et qu' ils avaient besoin de faire "apparaître"pour le cas où… Je sais que dans les affairesjudiciaires ordinaires, la famille, c'est ce qu'il y a deplus proche et qui peut témoigner. Mais pas dansmon cas!

5. PROCÈS-VERBAUX SUR LA PÉRIODESCOLAIRE

Il y a d'autres procès-verbaux dans cette"Enquête de personnalité“, ils viennent de personnescensées être plus éloignées de moi, mais qui enréalité m'ont bien mieux connu que mes frères etsœurs.

Par exemple, il y a un procès-verbal d'auditiond'Henri Turgis, mon instituteur de CM2. Il m'a bienconnu, ainsi que sa femme, puisque cette dernièreétait l'institutrice de CM1. En outre, Henri Turgis,c'était le directeur de l'école du village. Et ce couplehabitait juste à côté de chez mes parents. Alors, enplus de m'avoir eu dans son école (depuis mes 4/5ans jusqu'à mes 11/12 ans), de m'avoir vu dans laclasse de sa femme, et de m'avoir eu dans sa classeà lui, le reste du temps, hors de l'école, il me côtoyaitpuisque que nous étions voisins directs.

Et, étrangement, si on prend ce procès-verbald'audition d'Henri Turgis, le portrait qu'il donne de moine colle pas du tout, mais alors pas du tout, avec cequ'on a fait décrire aux autres: la famille!

La raison est simple: Henri Turgis est quelqu'und'évolué intellectuellement, un instituteur "vieilleécole“, pas le genre à se faire dicter sa dépositionpar qui que ce soit. Et avec lui, il ne fallait pas queles gendarmes, même en étant très “aimables“,espèrent pouvoir rajouter des “petites choses“ ça etlà et lui faire signer le tout à la fin. De même, s'il avaitappris, par hasard, qu'ensuite on a modifié sesdéclarations, il n'aurait pas été sans réagir vivement.

Dans cette “Enquête de personnalité“, dès qu'il aété auditionné des gens d'un certain niveauintellectuel (instituteurs, ou lors de l'enquête réaliséeau collège auprès de professeurs), cela a changé du

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Mémoire de Michel Lajoye page 76

tout au tout. C'est l'avis qui ressort nettement enlisant les documents.

6. PROCÈS-VERBAUX MILITAIRES

Dans cette "Enquête de personnalité", il y a aussil'audition de l’adjudant-chef Duranton qui occupait lesfonctions de Chancelier du 5ème Régimentd’Hélicoptères de Combat basé à Pau. C’est l’unité àlaquelle j’étais officiellement affecté "en couverture"de mes activités pour l’APSD de Tarbes. Cetadjudant-chef Duranton a probablement été mauditpar la DPSD qui a dû s’occuper, ensuite, de l’envoyerprendre une retraite anticipée "bien méritée"! Quel’on en juge par ses déclarations suicidaires:

Pour débuter, il m’a tressé des lauriers sur moncommandement et mon service. Alors qu’il aurait dûsavoir que j’étais, forcément, un militaire nul,indiscipliné, et patati et patata…

Mais il a fait bien pire encore: il a précisé quel’armée avait parfaitement connaissance de mes"opinions extrémistes"! Ce qui signifie que lesautorités militaires savaient (depuis le début!) à quielles avaient à faire et m’employaient, de ce fait, enconséquence!

Et, enfonçant le clou en ruinant par la mêmedéfinitivement sa carrière, Duranton s’est mis àdéclarer que j’étais lié à la DPSD. Certes, il ne faitque parler d’un lien, il ne va pas jusqu’à dire "agentde la DPSD"! Mais bon, lorsque l’on est en relationavec cette maison, ce n’est pas pour rien…

En effet, il est hors de question de voir ce "suivi"de la DPSD comme un 2suivi d’un militaire extrémistede droite". J’étais officiellement secrétaire-comptableaux Services Techniques du 5ème RHC, un "poste-clé", dans cette unité prétendument d’élite. Jamaisun militaire fiché comme "activiste néonazi" etuniquement cela, n’aurait occupé cet emploi. Si je l’aioccupé c’est parce que l’on avait d’autres projets àmon sujet. La Banque Rothschild ne mettrait pas ungoy , braqueur (notoire) de banque, convoyeur de sesfonds! De même, l’Armée française ne met pas unmilitaire fiché comme "néonazi notoire" au secrétariatdes Services Techniques d’un régiment: là où il y ales clés des soutes à munitions, la gestion des armesetc…

Compte tenu de ces opinions, connues del’armée, j’aurais dû être "déplacé", affecté à un autreservice moins sensible. Ou plus simplement et pluslogiquement: renvoyé de l’armée pour "activismenéonazi". Je rappelle que c’est un motif d’exclusiondes rangs de la milice supplétive de l'US Army!

Je crois qu’à l’époque (1985/1986) il devait y avoirune place pour 40 demandes d’engagement militaire.Ce qui veut dire que si l’armée tenait tellement à megarder, alors que je n’étais pas irremplaçable commesecrétaire-comptable, et que j’étais "à risques"compte tenu de mes opinions (parfaitement connuesde l’armée comme l’a stipulé Duranton...), c’est qu’ilsavaient bien des projets précis à mon sujet.

Alors, lorsque le Chancelier du régiment parle d’un"suivi" par la DPSD, il ne peut être pris dans le sens"suivi d’un militaire extrémiste" (que l’armée n’aurait

évidemment pas gardé dans ses rangs...), mais biencomme "suivi d’un agent".

Il faut bien mesurer l’importance constituée parces propos de Duranton! C’est un militaire, pasn’importe lequel: le Chancelier du régiment, celui quia accès aux dossiers sensibles sur les personnelscomposant l’unité, qui affirme à la gendarmerie quej’étais bel et bien lié à la DPSD!

Autres déclarations très intéressantes de cetadjudant-chef: il affirme dans son procès-verbal quetous ceux qui m’ont côtoyé au sein des ServicesTechniques du 5ème RHC ont été mutés ou sont partisà la retraite.

Tiens, tiens, pourquoi l’éclatement du personneldes ST du 5ème RHC? Pourtant aucun n’était prochede la retraite (hormis le commandant Drulhe dont ledépart était prévu pour janvier 1987) et/ou mutableprochainement. Au contraire, puisque certainsavaient été affectés en juin/juillet 1986 ils n’étaientpas mutables avant au moins 5 à 7 ans de présenceau régiment. Quant aux autres, en octobre 1986,lorsque j’ai déserté la DPSD, et par la même les STdu 5ème RHC, il leur restait dans les deux à trois ansavant d’entrer dans la période qui fait que l’on estmuté automatiquement.

Il n’est pas stupide de penser que, si on a éclatéles Services Techniques en mutant et/ou en mettantà la retraite tous ceux qui m’ont connu (comme leprécise Duranton dans son procès-verbal), c’estqu'on avait peur que certains de mes ancienscollègues ne se mettent à parler!

En effet, ces militaires des Services Techniquesdu 5ème RHC auraient pu raconter qu’effectivement,en juillet 1985, je les ai rejoints, mais qu’à compter demars 1986 j’étais plus souvent parti "en mission" pourle compte de la DPSD qu’à travailler aux ST durégiment…

Dans cette base d’hélicoptères de Pau où j’aiservi, il est certain qu’après mon arrestation, qui a étémédiatisée, des langues ont dû se délier. Au Mess,entre deux verres, il a forcément été évoqué"l’affaire"! D’où l’éclatement des ST, ce servicecomposé de fonctionnaires qui n’y étaient pour rien,mais qui en savaient beaucoup trop sur mes contactsavec l’APSD de Tarbes.

Mais ce n’est pas tout, l’adjudant-chef Duranton,décidément très en verve, précisait également dansson procès-verbal d’audition que celui qui pourraitmieux, et surtout plus, parler de moi c’est l’ancienchef des ST: le commandant Pierre Drulhe qui est àla retraite. Et Duranton donnait ses coordonnéespour que les gendarmes puissent aller lui rendrevisite, comme il le leur suggérait ouvertement…

Et là, très étrangement, c’est la fin de "l’Enquêtede personnalité", il n’y a pas d’autre procès-verbalaprès celui de Duranton!

7. L'ENQUÊTE FUT MANIFESTEMENT STOPPÉE

Cela ne colle évidemment pas, car celui qui lit ledossier officiel de mon affaire se met à saliver! Dansle dernier procès-verbal, le Chancelier du régimentvient d’évoquer de mystérieux contacts avec la DPSD

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Mémoire de Michel Lajoye page 77

(qui sont quand même les services spéciaux del’armée!), "d’opinions extrémistes" parfai tementconnues des "Autorités militaires", de collègues tousmutés et/ou mis à la retraite, etc… Le lecteur aimeraiten savoir plus, il a envie d’en savoir plus! Mais rien,pas d’autre procès-verbal: l’enquête est finie!

Soit le juge d’instruction n’était vraiment pascurieux ; soit le magistrat instructeur savaitpertinemment ce qui allait être découvert en faisantauditionner le commandant Drulhe! Il se pourrait bienqu'on ait fait stopper l’enquête…

Durant un temps, j'ai pensé que ces investigationss'étaient poursuivies et qu'on avait, heu disons, dit"d’oublier" d’inclure ces autres procès-verbaux dansle dossier officiel jugé à Caen… En réalité, il semblebien que l'enquête n'ait pas été plus loin!

8. PAS D'AUDITION D'AMI(E) OU DE VOISIN

Je précise, car cela pourrait sembler étrange, qu'iln'a pas été entendu d'ami(e) pour cette “Enquête depersonnalité“. Le juge d'instruction m'a demandé sij'avais des noms d'amis et d'amies à donner (moi-même!) pour qu'il soit réalisé cette “Enquête depersonnalité" (et sans doute aussi pour les interpelleret les incarcérer pour “association de malfaiteurs“…).Je lui ai dit que non (j'ai répondu au juge: « Amis,amies, qu'est-ce donc que cela? »). Et comme lemagistrat ne pouvait pas savoir qui je fréquentais, cefut réglé.

Ensuite pour les voisins, là c'est différent… Mon“adresse administrative“ était au 5ème RHC de Pauoù j'étais en poste (officiellement!) avant madéfection des rangs de la DPSD. La carte grise dema voiture portait cette domiciliation, idem pour mon

permis de conduire et mes divers documentsd'identité. Mais, dans la réalité, lorsque j'étaismilitaire, je ne logeais pas dans la base du RHC.J'habitais dans un appartement (civil, bien entendu!)que j'avais loué dans le centre ville de Pau.

Cela ne fait quand même pas très crédible depenser que le juge d'instruction, dans “l'Enquête depersonnalité“ (et dans le dossier des faits en eux-mêmes), n'ait pas commencé par demander aurégiment (où j'avais été en poste) si je logeais dans labase. Cela semble “un peu“ aberrant que ce robin deservice n'ait jamais cherché (du moinsofficiellement…) à savoir où je pouvais bien habiter!Après tout, l'appartement que j'occupais aurait puêtre un vaste dépôt d'armes, et cela n'intéressait pasle magistrat instructeur?! Il faut le croire, puisqu'ilsemblerait qu'il n'ait jamais voulu découvrir où jedemeurais! Je n'ai rien vu là-dessus dans le “dossierofficiel“! Absence de curiosité révélatrice… En fait laraison est simple: il ne fallait pas parler de celogement dans le dossier, car c'est la DPSD qui m'apistonné pour l'obtenir! L'agence immobilière auraitpu le révéler.

Lorsque je me suis fait arrêter une première foisen janvier 1987 (cf. chapitre 4), quand lagendarmerie m'a demandé où je résidais, je leur airépondu spontanément en rigolant: « Dans mavoiture! ». Tous, ensuite, se sont contentés de cette“réponse“…

Voilà pour “l'Enquête [officielle] de personnalité“.Elle a été bidonnée au niveau “famille“, et elle a étéstoppée par le magistrat instructeur dès que la DPSDest apparue dans un procès-verbal, en l'occurrencecelui de l'adjudant-chef Duranton.

Chapitre 11

LE PROCÈS AUX ASSISSES (juin 1990)

1. DATES. LIEU, AMBIANCE

e procès s’est tenu au Palais de Justice deCaen les lundi 25, mardi 26, et mercredi 27 juin1990. Les audiences duraient la journée

entière: de 9 heures jusqu’à en moyenne 21 heures(avec pause le midi évidemment), soit plus de 30heures d’audience sur les 3 jours.

Ce procès était inscrit en seconde semaine (et enclôture) de la session d’Assises, car cette dernièreavait débuté en fait le 18 juin.

Quant à ma citation à comparaître, elle m’a étéremise par huissier le… 11 juin! Soit juste unesemaine avant l’ouverture de la session d’Assises etexactement deux semaines avant la premièreaudience! Ce qui sentait un peu le procès ajouté encatastrophe au rôle pour que les convocations aientété délivrées si près de la date d’ouverture desdébats.

Il a été dit que ce procès était fixé de longuedate. Peut-être, mais pour ma part je n’étais pas aucourant. Alors si des gens étaient informés "de

longue date", ce n’était pas mon cas et pas celui demon avocat non plus!

Car, pour mon défenseur de l’époque, MaîtreBurdeyron, c’est le 18 mai 1990 qu’il m’a écrit pourm’informer qu’il venait juste de recevoir un courrier duGreffe de la Cour de Caen lui annonçant les datesdu procès. Ce qui veut dire que l’on a dû écrire àl’avocat vers le 15 mai 1990, soit un mois avant lapremière l’audience.

Pour ma part, c’est le 8 juin que j’ai eu le toutpremier document officiel m’avisant que j’allais passeraux Assises à compter du 25 juin. En effet, le 7 juin,j’avais été transféré de la prison de Rennes à cellede Caen (je suis retourné à Rennes quelques joursaprès le procès) et le lendemain de mon transfert,soit le 8 juin, j’ai eu la visite du président de la Courd’Assises qui est venu me voir comme c’est d’usageavant un jugement aux Assises.

La raison de cet ajout du procès à cette sessionde juin 1990 est, évidemment, liée à la profanationdu cimetière juif de Carpentras… Cette manipulationa eu son point d’effervescence médiatique vers le 10mai 1990, certains se sont alors dit que cela serait

L

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Mémoire de Michel Lajoye page 78

une bonne idée que d’organiser le procèsArcini/Lajoye à la session d’Assises de juin, car ils neretrouveraient pas de si tôt un climat pareil. Ce quiexplique pourquoi c’est vers le 15 mai (soit 5 joursaprès le point culminant de la carpentrasserie), quel’on ait écrit à Maître Burdeyron pour lui préciser quele procès, cela serait dans un mois!

L’ambiance suscitée par la manipulation deCarpentras faisait que durant les audiences il y avaitdes manifestations tout autour du Palais de Justicede Caen. Il y avait même des appels à l’attroupementpubliés, sous forme de "communiqués associatifs",dans le quotidien Ouest-France. La Préfecture avait,de son côté, autorisé des manifestations dans la villede Caen!

Mais, étonnamment, le procès n’a pas étémédiatisé à outrance au niveau national, il n’y aqu’au niveau régional où ce fut le délire. Rivarol du 6juillet 1990, page 4, s’en étonnait même en titrant« Le mystère du procès de Caen ». Dans cet article,Camille-Marie Galic s’étonnait qu’en pleine hystérieantiraciste les débats d’un tel procès aient étéoccultés alors qu’il s’agissait de vraies affairesracistes.

2. LE PRÉSIDENT DE LA COUR

Le président de la Cour d’Assises était un certainBernard Salmon. Il a fait parler de lui toutrécemment…

En effet, tout le monde a encore en mémoire lalibération de Patrick Henry, qui vient d'intervenir, alorsqu'il était incarcéré au centre de détention de Caen.L'élargissement de l'assassin du petit PhilippeBertrand a été rendu possible grâce à une décisionprise par la Commission régionale pour les libérationsconditionnelles. Cette dernière, siégeant en Basse-Normandie, était présidée par un magistrat"normand", en l'occurrence un conseiller auprès de laCour d'Appel de Caen qui n'était autre que BernardSalmon.

Ainsi, celui qui a obtenu ma condamnation en1990 est celui qui, onze ans plus tard, a ordonné lalibération de Patrick Henry…

Accessoirement, le fait que Salmon soit toujoursmagistrat auprès de la Cour d'Appel de Caendémontre que ce sioniste rabique préfère nosterritoires occupés à ceux, tout aussi occupés, de laPalestine, où il aurait pu faire son Alyah…

3. L'AVOCAT GÉNÉRAL(promu après le procès)

Quant à l’avocat général, c’était Yves Bot. Alorslui c’est particulier, il a bénéficié d’une cascade depromotions peu de temps après.

C’est indéniable puisqu’en 1990, date du procès,il était simple substitut du Procureur de Caen, autantdire pas grand-chose. Peu de temps après lejugement, il a été promu Procureur Général au Mans.

Dans cette ville, il s’est plutôt illustré par sonincompétence. En 1992, lors des 24 Heures du MansMoto, il y a eu beaucoup d’accidents et 9 (neuf!)motards (parmi ceux venus assister à la course) se

sont tués. De nombreux autres furent blessés,certains pilotent aujourd'hui des fauteuils roulants!Durant plusieurs jours, ces drames de l'inconscienceont donné lieu à un gros battage médiatique, car ils’est avéré que le procureur n’avait pas pris lesmesures élémentaires de sécurité, comme fairemettre en place des points de contrôle de police pourempêcher les "rodéos" et faire signer au préfet undécret interdisant la vente d’alcool. Après une telleincurie (9 morts), on aurait pu penser que Bot allaitvoir sa carrière "un peu" freinée… Or pas du tout!

En 1993, lors de la cohabitationMitterrand/Balladur, le Ministre de la Justice(Méhaignerie à l’époque) avait décidé de nommerYves Bot au poste très sensible (et très convoité!) deDirecteur des Affaires Criminelles et des Grâces. C’estce que l’on appelle de la promotion fulgurante!

C’est le moins que l’on puisse dire! Car Bot n’étaitencore, en juin 1990, qu’un obscur et énièmesubstitut du Procureur de Caen, pas vraiment leposte important, et moins de 3 ans plus tard, aprèsun passage désastreux par Le Mans, il était pressentipour occuper un poste hautement stratégique ! Ladirection des Affaires Criminelles et de Grâces c’estde là que partent les ordres de classement de"certaines affaires", et c’est là que sont instruits lesdossiers de recours en grâce… Par conséquent c’estun poste plus que sensible!

Cependant, en 1993, c’est François Falletti qui aété désigné à la place de Bot directeur des AffairesCriminelles et des Grâces. La raison en est queMitterrand, en tant que Président de la République,était aussi le Président du Conseil Supérieur de laMagistrature, et il s’est catégoriquement opposé à lapromotion de Bot pour un motif bien précis…

En effet, c’est le juge Jean-Pierre qui, en 1992, a"lancé" l’instruction de l’affaire dite du « prêtPelat/Bérégovoy ». Et le juge Jean-Pierre était auMans, sous la coupe de Bot! Ce dernier, en bonprocureur serviteur de l’État, aurait dû empêcher lejuge de mettre son nez dans ce dossier! C’est quel’instruction de cette affaire de "prêt" a plus que nuità Pierre Bérégovoy qui était alors le Premier Ministrede Mitterrand! Bot n’a pas pu empêcher le juge Jean-Pierre de fouiner, mais, heureusement, cela faisaitplus de 2 ans que Pelat était déjà mort (fortopportunément dans un hôpital militaire!) et, le 1er mai1993, il fut rejoint outre-tombe par Bérégovoy qui, lui,s’est suicidé de deux balles… Du coup: affaireclassée pour le « prêt Pelat/Bérégovoy ».! Ouf!

Cette opposition de Mitterrand à la nomination deBot au poste de directeur des Affaires criminelles etdes grâces est totalement liée au fait que ceprocureur n’a pu empêcher le juge Jean-Pierre des’intéresser au financement de la galaxiemitterrandienne. Le Franciscain était connu pour êtreun brin rancunier…

Cependant, Bot a eu un joli lot de consolation!Car après le veto élyséen, il n’est pas repartis’occuper de rillettes au Mans! En compensation il aété désigné "conseiller spécial" auprès de PierreMéhaignerie, Ministre de la Justice!

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Il est évident que cela cache quelque chose! Onavait promis une récompense à Bot, et faute depouvoir lui donner celle qu'on lui avait promise (ladirection des Affaires criminelles et les Grâces), on luia offert un lot de consolation en créant pour lui ceposte de "conseiller spécial" auprès du Garde desSceaux. C’est même Bot qui, de ce fait, a été lerapporteur du projet de réforme du Code Pénalenvisagé par Méhaignerie.

Ce dernier était donc Ministre de la Justice, et celadans un gouvernement dont Edouard Balladur étaitle Premier Ministre. Ce même Balladur qu’Arciniprotégeait le 5 juin 1987 (cf. chapitre 5, section 6)lorsqu’il a abattu (par erreur) Moussaoui… Étrangequand même cette coïncidence!

Et, en 1993, le gouvernement de cohabitationavait, quasiment, les mêmes ministres que ceux quiétaient en place lors de la cohabitation précédente(1986 à 1988). Autrement dit durant la période oùont été commis les attentats relatés dans cedocument! Par exemple, en 1993, c’était notammentle même Pasqua à l’Intérieur que celui qui y était en1987! Époque où Arcini fut relâché par la policeaprès son arrestation initiale (cf. le chapitre 5, section13 et suivantes)…

Alors je suppute la chose suivante: Yves Botsavait pertinemment, pour s’en être personnellementoccupé, ce qu’il y avait derrière « l'affaireArcini/Lajoye ». Et, pour avoir sa promotionfulgurante, il a très bien pu faire "chanter" Balladur! Ily avait de quoi: Arcini, son garde-du-corps de 1987,impliqué dans des "affaires racistes" plus quegênantes! Cela aurait suffi à couler politiquementEdouard Balladur pour sa course à la présidentiellede 1995…

Mais Balladur n’aurait pas été le seul à être gênépar d’éventuelles "révélations", puisque, comme ditplus haut, les ministres de la cohabitation de 1993 à1995 étaient pratiquement les mêmes que lors de laprécédente de 1986 à 1988. Notamment Pasqua!

Même si mon hypothèse de chantage peutsembler très ardue, elle s’appuie sur la logique!: en1990 (en juin) Yves Bot n’était que simple énièmesubstitut auprès du Procureur de Caen, et moins detrois ans plus tard, il devenait l’un des magistrats lesplus "en vue" de France! Il est impossible de gravirles échelons si vite! Il faut avoir eu plusieurs postesde Procureur Général pour avoir une promotion de cetype. Il serait totalement farfelu de penser que lepassage désastreux de Bot au Mans (avec en 1992,durant les 24 Heures, ces 9 morts qui ont été victimesde son incompétence!), aurait pu lui valoir saprestigieuse ascension. La magistrature est régie parun tableau d’avancement, et l'on ne peut pas être enbas de tableau (voire même: pas inscrit du tout autableau d’avancement), et passer en tête de laconfrérie, sans un sacré coup de piston…

De plus, lorsque Balladur ne fut plus PremierMinistre (en 1995, après l’élection à la Présidence dela République de Jacques Chirac), Bot a été"rétrogradé" en étant désigné Procureur Général auParquet de Nanterre (il occupe encore ce posteminable au moment où j'écris: avril 2001). Ce qui veut

bien dire qu’avec Balladur comme Premier Ministre dugouvernement (et un Pasqua à l’Intérieur…), c’étaittout bon pour Bot! Mais un fois Balladur parti, etcertains autres en "disgrâce", il est reparti (a étérenvoyé !) dans le circuit normal de la magistraturecouchée…

Il y a quelque chose là-dessous, c’est l’évidencemême. Qu’il y ait eu pour Bot "coup de piston" durantla période Balladur comme Premier Ministre, c’estirrécusable !

Je porte également à la connaissance du lecteurun fait qu'il est libre d'interpréter comme une simplecoïncidence ou, au contraire, permettant de mesurerl'organisation de ces "gens-là" qui n'ont rien laissé auhasard:

Chapitre 5, sections 7 & 8 de ce document, il estquestion de Serge Costa qui aurait fourni à Arcinil'arme utilisée lors du crime de Caen commis le 5 juin1987. Costa lui-même assassiné. Or, qui officiait auParquet de Bastia au moment de l'exécution deCosta le 18 février 1987? Vous l'avez deviné: Bot!

Ce renseignement hallucinant m'a été transmispar un "anonyme", après lecture d'une précédenteédition de ce mémoire. Cette information figurait dansune édition du Who's Who où l'actuel procureur deNanterre mentionnait dans sa fiche qu'avant sonaffectation à Caen, il était en poste à Bastia. Dèslors, c'est sans aucun doute Bot lui-même qui asupervisé, pour le compte du Ministère Public,l'enquête sur la mort de Costa! Ainsi, Bot a "suivi"Arcini. À moins que cela ne soit celui-ci qui ait "suivi"celui-là?

Quoiqu'il en soit, je mentionne bien que lors de ceprocès, la liquidation de Costa ne fut pas détaillée,alors qu'il y avait avocat général, Yves Bot, fort aucourant de cette Affaire Costa…

Pour en finir avec cette présentation de Bot, jesignale qu'en tant que procureur de Nanterre, il s'estopposé à des poursuites contre Jacques Chirac. Cecidans le cadre d'un des multiples dossiers concernantl'ancien maire de Paris.

4. COMPORTEMENT "ANORMAL" DES JURÉS

Les jurés ont eu un comportement très étrange,de vrais "pots de fleurs!" Ils ne semblaient être là quepour assurer le décor!

Je n’ai pas l’habitude des Cours d’Assises, maisune chose m’a semblé anormale, c’est que duranttout le procès pas un n’a posé une question! Àchaque fois que le président Salmon demandait à lacantonade, en s’adressant aux jurés, s’ils avaient desquestions, invariablement, ils secouaient tous la têtepour dire « Non, non, pas de question ».

Voilà un comportement plutôt curieux compte tenuque parfois c’était très confus et que tout le mondedevait avoir envie de poser des questions pouréclaircir un point. Tout le monde: sauf les jurés!

Mais "encore mieux": devant chaque juré il y avaitun petit tas de feuilles blanches avec posé au traversun stylo bic. C’était à leur disposition pour qu’ilspuissent prendre des notes. Ce qui sembleindispensable dans un procès durant trois jours

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complets. Eh bien, pas un n’a pris la moindre notedurant les audiences! Rien de rien! J’ai bien faitattention à ce détail: aucune note n’a été prise.

En conclusion, nous pouvons nous interroger surle comportement de ces étranges jurés et notammentnous demander s’ils n’avaient pas étésoigneusement sélectionnés, avec pour consignesde la fermer! De ne surtout pas poser la moindrequestion qui aurait pu être gênante.

5. LES TÉMOINS CITÉS

Au niveau des témoins cités par le Parquet, il yavait des policiers. Mais aucun de ceux cités n’estvenu parler en détail de la bombe. Seuls lecommissaire Etcheberry et l’inspecteur Tejada (tousles deux du SRPJ de Rouen) en ont vaguementparlé, mais ils n’étaient pas venus pour mon affaire,mais pour celles d’Arcini.

C’était surtout le cas pour les inspecteurs Morin etLefeuvre qui sont ceux qui ont été, soi-disant,"braqués" par Arcini lors de son "évasion" à laSamuel-Aubrac (cf. chapitre 8 section 7).

Les autres policiers cités étaient venus parler surle fond de l’affaire, notamment le commissaireMeunier (police urbaine de Caen) qui est celui qui estarrivé sur les lieux peu après l’assassinat deMoussaoui et qui a avisé ses collègues de la PJ.

Donc aucun policier n’est venu parler, dans lesdétails, de mon affaire.

Quant aux autres témoins cités: Godfroy Jean,c’est un de ceux qui a poursuivi Arcini après l’attentatdu 5 juin 1987. Idem pour Macedo Diamentino.

Leconte Joël, c’est le représentant qui se trouvaitdans l’épicerie de Caen le 5 juin 1987 et à qui Arcinià dit: « Toi, le Blanc, casse-toi! » (à moins que ce nesoit: « Toi, le blond, casse-toi! »).

Rahmani Abdeslem Ben Ali, c’est le propriétairede l’épicerie, autrement dit le responsable del’Amicale des Marocains de Caen, celui qui devait sefaire abattre.

Il n’y a pas eu d’autre témoin cité par le Parquet!Ce qui veut dire que, comme je l’ai relaté au chapitre7 section 14, les 9 personnes qui étaient dans le baroù j’ai déposé la bombe n’ont pas été appelées àtémoigner! C’est plus que manifeste que si ces 9personnes n’ont pas été citées, c’est qu'on avaitquelque chose à cacher! Que ce qui s’est déroulé le30 novembre 1987 dans le bar Au Pavillon d'Algern’est pas conforme à la vérité officielle !

J’ai, par conséquent, été condamné sans que lestémoins des faits (ou prétendus faits!) ne déposent àla barre!

6. LES TÉMOINS QUE J'AVAIS FAIT CITER

J’avais demandé (comme j’en avais le droit!) qu’ilsoit fait citer des témoins de fond, à savoir lespersonnes suivantes: Claude Cornilleau, OlivierDevalez, Mark Fredriksen et Alain Guionnet.

Ce que je voulais, c’est les faire témoigner deleurs expériences. Toutes ces personnes ont étépoursuivies, et pour certaines lourdementcondamnées (Alain Guionnet et Olivier Devalez

n’avaient pas encore été emprisonnés à cette date),pour leurs écrits ! Mon objectif était le suivant:démontrer par ces témoignages qu’en France laliberté d’opinion n’existe pas, et que de ce fait, laviolence armée est légitime puisque tout autre moyend’expression nous est impossible.

Tout le long du procès, j’ai d’ailleurs bien préciséque puisque l’on ne pouvait pas diffuser d’opinionnationaliste sans être poursuivi par la juiverie, laviolence armée devenait alors un recours légitime! Jerevendiquais un droit à l’insurrection face àl’Occupation sioniste de mon pays.25

Mais le président Salmon m’a vu arriver avec mestémoins, et il a refusé qu’ils déposent sur le fond. Il aexigé qu’ils se cantonnent au rôle de "témoin demoralité"! Je ne les avais pas fait citer pour ça, maisSalmon étant LE président, il avait décidé, en touteimpartialité évidemment, que cela serait comme ça etpas autrement.

Lorsque j’ai fait remarquer à Salmon que jen’avais pas fait citer des "témoins de moralité", maisdes "témoins de fond", il m’a répondu « C’est moi quiconduis les débats ici! ». Il n’a pas ajouté « Silence,misérable goy! », mais il l’a sans doute pensé trèsfort!

Les témoins que j’ai fait citer ont donc été"éjectés" par le président Salmon. Alain Guionnet severra même menacer d’un an de prison ferme s’il nequittait pas la salle immédiatement! Il voulaitréellement témoigner sur le fond et s’accrochait unpeu trop à la barre des témoins au goût de Salmonqui lui avait déjà dit de disposer… Salmon lui a mêmeordonné un retentissant « Silence, ça suffit! » lorsqu’ila commencé à détailler ses condamnations pour sesécrits! L’impartial président fera finalement signe àses golem de la police de "raccompagner" dehors cemalotru!

Cette affaire aura eu, au moins, le mérite demontrer au public présent dans la salle ce que c’estque l’impartialité, un procès équitable, etc… Lesmédia, évidemment, cela va de soi, ne relateront pascet incident, ou alors ils le relateront, mais pasconformément à la vérité…

Pour information et pour comparaison, le matinmême, c’est-à-dire avant qu’il ne fasse chasser lestémoins de la défense, le président Salmon avaitinvité à la barre un individu qui n’était pas cité sur laliste des témoins. C’était une personne qui voulaittémoigner sur le fond et qui avait fait remettre, par uncomparse, un "mot" à l’avocat de la LICRA ; qui lui l’atransmis à l’Avocat Général Bot ; qui l’a ensuite faitparvenir jusqu’au président Salmon. Ce mot disaitqu’une "personne" attendait dehors (la pôvre!) etqu’elle souhaitait témoigner sur le fond…

Ce témoin qui s’invitait carrément, c’était leresponsable du… Consistoire israélite de Caen,autrement dit le rabbin du coin! Alors pensez que leprésident Salmon a laissé venir témoigner, sur lefond, son rabbin! Cela devenait surréaliste ce procès,

25 Ce qui explique, sans doute, l’occultation du contenu des débats par lesmédia d’audience nationale, dont Rivarol s’étonnait à la page 4 de sonnuméro du 7 juillet 1990.

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Mémoire de Michel Lajoye page 81

et l’on imagine les moqueries si, dans une affairecriminelle quelconque, un religieux catholique voulaits’inviter pour témoigner sur le fond comme l’a fait cerabbin…

Pour l’anecdote, à l’issue de son "témoignage", lerabbin est allé s’installer dans la salle. Et, à plusieursreprises, cela m’a beaucoup amusé, j’ai vu l’avocatde la LICRA, après ses interventions, jeter un regarden direction de ce lévite comme s’il en attendait unsigne approbateur…

7. LES PARTIES CIVILES QUI S'ÉTAIENTCONSTITUÉES

Pour les parties civiles, outre les charognardshabituels des "ligues" qui étaient venues se faire del’argent, et de la publicité, sur le cadavre deMoussaoui, il n’y a pas grand monde.

Mohamed Bedani est une des victimes d’Arcini. Ilse trouvait dans le bar qu’il avait "mitraillé" le 6 mars1987 à Petit-Quevilly. Cette partie civile ne meconcernait pas.

Mohamed Ayari, c’est le client blessé dansl’épicerie de Caen le 5 juin 1987. Là aussi, cettepartie civile ne concernait qu’Arcini.

Marie-Noëlle Catherine, c’était la concubine deMoussaoui, l’épicier abattu par Arcini le 5 juin 1987.Là encore, cela ne concernait pas mon affaire26.

Il n’y a pas eu d’autre partie civile constituée parmiles victimes. Notamment aucune de la part despersonnes que se trouvaient dans le bar où j’aidéposé la bombe, et dans lequel, officiellement,selon la version officielle , il y aurait eu trois blessés!

Et comme je le relatais dans le chapitre 7 section25, le propriétaire de l’établissement ne s’est pasconstitué partie civile!

Même l’assureur de ce bar ne s’est pas retournécontre moi, il ne s'est jamais manifesté!

Idem pour la Caisse Primaire d’Assurance Maladiequi était partie civile contre Arcini (elle s’est constituéeà l’audience), mais pas contre moi!

Ce qui démontre bien, encore une fois, qu’il n’y aeu aucun blessé lors du prétendu attentat du 30novembre 1987! Sinon ils auraient occasionné desfrais médicaux, et la CPAM en aurait réclamé leremboursement en se portant partie civile.

J’ai par conséquent été condamné alors qu’il n’yavait pas la moindre partie civile constituée contremoi (outre celles des ligues: LICRA, LDH, MRAP ettoute la clique...)!

Le seul qui m’ait "poursuivi" dans l’affaire, c’est leMinistère Public ! Et je n’ai pas la sensation que cedernier ait agi « au nom du Peuple français », commeil l'a prétendu…

26 Pour information: cette Marie-Noëlle Catherine s’est vue attribuer, parle Fonds de Garantie (celui pour les victimes d’actes de terrorisme), 1400 000 francs de dédommagements pour la mort de son concubin et nonde son mari comme les média l’ont affirmé… Les Français victimes del’immigration-invasion, qui eux ne sont jamais indemnisés, apprécieront!Mais, en dédommageant copieusement cette femme, on était assuréqu’elle ne chercherait pas à en savoir plus sur cette affaire plus quetrouble.

8. LES EXPERTS CITÉS

Rien de particulier à dire sur la liste des expertscités. Cela concerne surtout Arcini. Hormis despsychologues et psychiatres qui étaient venus nousvoir, puisque ce sont les mêmes qui avaient étédésignés pour "examiner" les deux.

Claude Calisti, dont il a déjà été question auchapitre 7 section 17, est venu parler de la bombe.C’est le seul expert qui soit venu spécialement pourmon affaire. Tous les autres (médecin légiste,ophtalmologiste, armurier) n’étaient là que pour lesaffaires de mon coaccusé.

9. COMPORTEMENT D'ARCINI DURANT LEPROCÈS

Le comportement d’Arcini a été plus que troubleet cela sentait vraiment les textes récités. Lesdialogues étaient surréalistes entre mon "complice" etle président Salmon. Ce dernier disait des choses dugenre: « C’est bien comme ça que cela s’estdéroulé? » en énumérant lui-même les faits contenusdans des documents qu’il avait en main. Et Arcini detoujours, bien poliment, lui répondre par l’affirmative.À aucun moment, il n’a répondu de façon négative, ilétait toujours d’accord avec la version qui lui étaitrelatée. Cela se voyait vraiment que le présidentaidait Arcini dans son rôle d'accusé qui s'auto-accusait.

Mais le plus délirant, c’est que c’est Arcini qui a"décrit" la façon dont j’ai commis l’attentat. Or, il n’y apas assisté, mais il connaissait bien son texte sur cepoint! Le président Salmon lui a par exempledemandé des choses du genre: « Lajoye a déposéle paquet sur le bar et est parti par la sortie destoilettes? » et Arcini de répondre: « Oui, M’sieur leprésident! ».

C’était totalement surréaliste de voir qu’à chaquefois qu’il était question de l’attentat à la bombe,c’était à Arcini que l’on demandait de confirmer… et ille faisait! J’ai bien sûr signalé à Salmon que jetrouvais étonnant sa façon de conduire lesinterrogatoires, il a néanmoins poursuivi! Il m'a justerappelé que c'est le président qui conduit les débats.En conséquence un accusé pas d'accord n'a que ledroit de se taire, sinon: expulsion!.

Au cours du procès, il m’est apparu manifeste qu’ilavait été prévu une "contrepartie" pour Arcini. Ce quiexplique qu’il ait accepté de donner les répliques àSalmon et Bot.

10. ARCINI INCAPABLE DE DÉCRIRE,TECHNIQUEMENT, LA BOMBE

Mais si mon coaccusé connaissait bien son texte,j’ai pu tous les "coincer" sur un point: la versionoff icielle veut que ce soit Arcini qui ait assemblé labombe. Ce qui a permis de le désigner comme"complice direct" afin de joindre toutes les affaires.

Cependant, c’est moi qui ai assemblé l’engin (cf.chapitre 7 section 4). Et lors du procès, alors que lesdialogues pré-appris Salmon/Arcini y allaient bontrain, j’ai demandé au président de la Cour si l’on

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Mémoire de Michel Lajoye page 82

pouvait demander à Arcini de décrire techniquementla bombe.

Puisque c’était lui qui l’avait, soi-disant,assemblée, il allait pouvoir nous en donner les détailscomme la marque et le type de la pile, les couleursdes fils électriques, et aussi la façon dont les fils dudétonateur étaient reliés aux fils de la minuterie (pile),etc, etc…

Là, j’avais mis le doigt sur le gros problème, caraussitôt l’avocat général Bot a vu le danger, et il aironisé sur mon côté provocateur qui faisait del’esbroufe pour faire son intéressant. Et il a ajoutéque « cette diversion » ne le surprenait pas vu le peude respect que j’avais pour les institutionsjudiciaires… Je ne voyais pas le rapport! Le présidentSalmon de son côté en a rajouté, l’essentiel étant defaire sourire la salle, et d’éviter qu’Arcini doiverépondre à ce que j’avais demandé. Les jurés, quantà eux, n’ont pas pensé que j’avais soulevé là unetrès bonne question puisqu’ils n’ont pas demandéque l’on approfondisse…

Car, à cette question, mon coaccusé était bienincapable de répondre et pour cause! Il savait sontexte, mais n’avait pas en mémoire l’intégralité dudossier et il ne pouvait tout de même pas le consulteravant de répondre! Comme j’insistais, Arcini atotalement perdu pied, cela se voyait bien, ilcherchait ses mots (cherchait son texte), et il a donnéun prétexte qui aurait dû être évoqué en dernierrecours.

En effet, il a alors dit: « Lajoye a peut-être modifiéla structure électrique » (ce ne sont pas ses parolesexactes, cependant c’était ça le sens)! Mais ce n’étaitpas tout de suite qu’il fallait qu’il dise cela, c’étaitaprès : en dernier recours!

Car il devait, d’abord, d’écrire une bombe, endisant (éventuellement m’importe quoi) que c’étaittelle pile, telle couleur de fils, etc, cela n’avait aucuneimportance s’il n’avait plus en mémoire le dossier. Carsi cela n’avait pas correspondu à la réalité de cettebombe, pour expliquer la différence entre la versiondonnée par Arcini et la conception technique de labombe "officielle", la parade était de dire: « Lajoye apeut-être modifié la structure électrique ».

Cela veut dire qu’ils avaient répété cette scène, ilsavaient prévu le coup d’un avocat demandant à moncoaccusé de décrire cette bombe (sans regarder ledossier)! Mais Arcini s’est totalement emmêlé lespieds, et a commencé par donner l’explication denon-concordance avant la description. Ensuite,voyant sa gaffe (c’en était une belle!), il a bredouilléqu’il ne savait plus. À ce moment, il était mûr, il allaits’écrouler, il était au bord de la crise de nerfs…

Pour le faire "s’écrouler", il aurait suffit de luirépondre que ce n’était pas crédible car onn’assemble pas une bombe tous les jours, et l'on sesouvient de détails comme le type de la pile, etc, etde réitérer les questions en le "secouant" un peu.Mais je n’avais pas ce pouvoir et l’impartial présidentSalmon jouait dans le même camp que moncoaccusé…

Ce dernier n’avait retenu de cette bombe que"boîte de conserve" et "réveil mécanique bleu" (pour

la minuterie). Autant dire que cela faisait un peuléger! De mon côté, j’ai décrit à la Cour, de façon trèsprécise, cette bombe: modèle et référence de la pile,marque des prises électriques, leur matière, couleur,etc. Ce qui fait que celui qui entendait cela enconcluait que c’est bien moi qui l’avais assembléepuisque j’étais le seul des deux à décrire de mémoireles parties techniques.

Mon intervention a créé un incident. J’ai mêmefrisé l’expulsion. L’avocat général et le président onttotalement changé de sujet, je n’ai pas pu finir dedécrire la bombe: ils ne voulaient pas que j’en parle.Ils ont vu qu’Arcini avait un "coup de fatigue", qu’il sesentait mal (c’était vers les 18 heures, il avait étésollicité depuis le matin 9 heures!) et qu’il était sur lepoint de s’effondrer, de reconnaître qu’il n’avait pasassemblé cet engin, qu’il ne l’avait jamais vu!

Ce que je voulais faire, c’est démontrer, sur place,lors de l’audience, qu’Arcini n’avait pas assemblé labombe. Cela aurait fait apparaître comme totalementanormal que je sois jugé en même temps que luipuisque je n’avais rien à voir avec ses affaires et luirien à voir avec la mienne. Et surtout cela aurait faitapparaître que mon camarade récitait un texte où ildevait s’attribuer, s’accuser de la confection totale decette bombe et cela aurait été déterminant!

En effet, il y avait quand même du public dans lasalle (on refusait même du monde et j’aurais dû fairepayer les entrées au spectacle!) qui aurait compris lasupercherie. Il fallait en conséquence "jouer" le publiccontre la Cour! Cette dernière n’aurait pas pu, devanttous ces gens, continuer à ignorer l’évidence, celaaurait fait trop de « hoooo! » dans la salle.

Le lendemain c’était le défilé des témoins, et sij’avais pu démontrer qu’Arcini mentait sur l’affaire dela bombe et qu'on lui avait fait apprendre un texte, lelendemain je faisais pareil avec le récit de "l’évasion"et c’était gagné. S’il avait été démontré que"l’évasion" d’Arcini était bidon, dans ce cas c’estabsolument toute la supercherie qui serait apparueau public, et il aurait "grondé"! Une fausse évasion, ily aurait eu de quoi! Très rapidement le présidentSalmon aurait fermé sa boutique et renvoyé l’affairepour "supplément d’informations", seule façon de sedégager de ce guêpier et de tenter de la reprendreplus tard.

Mais je n’avais pas le pouvoir de "secouer" Arcini.En matière de Cour d’Assises, c’est le président quiconduit les débats, et pour poser les questions, il fauten passer par lui ! J’ai découvert beaucoup dechoses aux cours de ces trois jours d’audience, et jerappelle que ce n’est que 15 jours avant l’ouverturedu procès que le Parquet de Caen a remis à ladéfense le dossier officiel qui fait près de 3.000pièces. Je n’avais donc pas pu le consulter, et MaîtreBurdeyron, mon avocat de l’époque, n’avait pasvraiment pu préparer l’affaire de son côté, faute detemps. Comme moi, l’avocat découvrait un tas dechoses en cours d’audience.

Par exemple ce n’est que lors de l’ouverture desdébats que nous avons découvert que les personnesprésentes dans le bar ne seraient pas citées à la

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barre des témoins! Le Parquet s’était bien gardé derévéler cela avant!

De plus, il faut bien voir que dans ce procèsstalinien nous étions seuls contre tous, ce n’était pasun procès impartial avec un président cherchant àfaire "éclater la vérité". C’était un procès où tousfaisaient partie de la manipulation: du président àl’avocat général en passant par les faux témoins etmon coaccusé, sans oublier la nuée d’avocats desligues!

J’ai parfaitement conscience que le procès a étéperdu le premier jour, en fin d’après-midi, quandArcini était sur le point de craquer nerveusement etqu’il n’a pas été poussé dans ses derniersretranchements pour lui faire dire qu’il n’avait pasconfectionné cette bombe…

Cela n’a pas empêché, qu’à l’arrivée, c’est bien àArcini qu’a été imputée la « fabrication d’enginexplosif » ! Ce qui prouve que les jurés ont signé làoù on leur a dit de signer, puisqu’ils ont condamnéun type incapable de décrire cet "engin explosif" etreconnu innocent de cela celui qui le décrivaittechniquement.

En général, dans les Cours d’Assises, lorsqu’il y aplusieurs accusés, ils se rejettent mutuellement lesresponsabilités. Là c’était le contraire, nous affirmionschacun avoir assemblé la bombe!

Suite à cet incident, où j’ai voulu démontrerqu’Arcini s’accusait sur ordre, je n’ai plus eu le loisirde poser des questions. Lors du second jour duprocès c’était le défilé des témoins, le président etl’avocat général, qui avaient été échaudés par maquestion de la veille au sujet de la bombe, étaient surla défensive. Je n’ai jamais eu la parole lors de cedéfilé!

Ils ont notamment fait déposer les inspecteurs"braqués" lors de "l’évasion" d’Arcini, puis les ont faitpartir (« Vous pouvez disposer... »), et ce n’estqu’après le départ du dernier témoin que le présidentSalmon a demandé à la défense si elle avait desquestions à poser. C’était se foutre du monde,interroger qui? Il n’y avait plus personne à la barre!

11. LE RÉQUISITOIRE CONTRE MOI

Lors de son réquisitoire Yves Bot a précisé qu’ence qui me concernait, « la loi ne fait pas de différenceentre la tentative et l’assassinat » (pour citer sespropos) et que je devais être condamné comme si labombe avait tué. Je n’étais dès lors pas jugé sur desfaits qui s’étaient produits, mais sur desconséquences qui auraient pu se produire si celas’était déroulé comme ci et/ou comme ça…

Il a demandé pour moi la perpétuité assortie d’unepeine de sûreté de 18 ans. Mais il a bien précisé qu’ilregrettait beaucoup de ne pouvoir requérir une peinede sûreté de 30 ans. Il a même parlé de peine demort, expliquant que cette peine de sûreté de 30 ansla remplaçait.

À l’époque, le Code Pénal en vigueur (il a été"réformé" depuis) prévoyait que pour les attentats àl’explosif la peine de sûreté ne pouvait excéder 18ans! Partant de là, l’avocat général s’est trouvé limité

par cette clause. J’ignorais ce point de Droit, je ne l’aiappris qu’à l’audience. Sans lui il aurait été requis 30ans de sûreté, et je les prenais sans problèmepuisque le but, c’était d’obtenir la plus grossecondamnation possible.

12. LE RÉQUISITOIRE CONTRE ARCINI

Dans le cas d’Arcini, il a été requis perpétuité,mais avec les 30 ans de sûreté. Ce réquisitoire étaitpossible puisqu’il avait contre lui de multiples affaires(par armes à feu), donc, elles, toutes passibles de laréclusion criminelle à perpétuité avec peineincompressible de 30 ans. Et, en prime, il avait (c’étaitla version officielle) la fabrication de la bombe quej’avais déposée, ce qui lui donnait du coup une« complicité de tentative d’assassinat ». Alors 30 ansde sûreté, vue l’ambiance d’après Carpentras, ildevait, normalement, s’il n’y avait pas eu le "petitaccord", les prendre sans problème.

Le réquisitoire de l’avocat général contre Arcinisentait le creux, car finalement il a requis pluslonguement, et plus haineusement, contre moi quecontre mon coaccusé. Et s’il a réclamé 30 ans contrelui c’est pour faire diversion et donner l’illusion qu’il nefaisait pas une fixation sur ma personne.

13. LES PLAIDOIRIES DE LA DÉFENSE

Maître Burdeyron, qui m’assistait durant ce show,n’a pas remis en cause la réalité des faits de l’affaireen elle-même, il a plaidé l’atténuation du réquisitoire.Il a bien plaidé dans ce domaine, mais, peut-être, etmême sûrement, que ce n’était pas sur l’atténuationqu’il fallait plaider, mais la véracité des faits qui n’étaitpas prouvée.

Cependant, à l’époque, nous n’avions pas lavision que j’ai actuellement de cette affaire.

De plus, comme il semblerait que les jurés avaientété soigneusement sélectionnés, l’affaire étaitentendue, et cela ne servait à rien de leur demanderde me condamner à « un peu moins » comme l’a faitl’avocat.

De toute façon lors des plaidoiries, il était aussitrop tard pour mettre en avant l’absence de preuvesde l’explosion et de "jouer" le public contre la Cour.Ce n’était pas à la fin qu’il fallait faire dans le"révisionnisme actif", mais dès le début en exigeantque l’on aille chercher les témoins de cette l’explosionpour les amener à la barre afin qu’ils nous donnentleur version des faits. S’ils avaient refusé d’allerchercher les témoins, automatiquement le publicaurait flairé l’imposture.

Et en cas de refus d’aller chercher les témoins, il yavait aussi moyen de faire théâtral: à savoir queMaître Burdeyron aurait pu prendre ses affaires etquitter la salle (après que je l’ai récusé), et à moi derester dans ma cellule et ne plus revenir à cespitreries tout le temps qu’on n'aurait pas amené lestémoins.

Mais, pour faire tout cela, il aurait fallu que noussachions, avant le procès , qu’ils n’allaient pasapporter la preuve de l’explosion et qu’ils n’allaientpas faire citer les témoins. Comme ce n’est qu’à la fin

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Mémoire de Michel Lajoye page 84

que nous avons compris, et eu la certitude, qu’il yavait eu manipulation, il était trop tard.

Il est aisé, après coup, de dire qu’il fallait faire"comme ci" ou "comme ça"! À l’époque si cela n’apas été fait c’est que nous n’avons n’a pas pu lefaire.

Quant à Arcini, il était défendu par un avocat deCaen qu’il avait choisi, un certain Caratini, gendre deJean-Marie Girault (le maire de Caen27). Lui je ne saismême pas ce qu’il a plaidé, je n’ai pas compris où ilvoulait en venir avec ses "démonstrations" sur la« permissivité de l’extrême-droite » qui m’ont plus faitbâiller qu’autre chose. En un mot: nul!

14. J'AI PRIS LA PAROLE PENDANT PRÈS DEDEUX HEURES

Comme les accusés ont la parole en dernier,lorsque je l’ai eue, Salmon a compris son malheur.Pendant deux heures, je leur ai fait un "exposé" surla chose. Ce texte a été publié en deux parties, lapremière dans Tribune Nationaliste numéro 46 deseptembre/octobre 1990 et la seconde dans lenuméro 47 de novembre 1990. Ils n’ont pas pu mefaire taire, bien que cela les démangeait, comme j’aipu le voir puisqu’ils ouvraient tous leur Code deprocédure pénale à la recherche de l’article qui auraitpu me réduire au silence en limitant le temps deparole d’un accusé.

Lorsque j’ai commencé à m’exprimer, dès que j’aiprononcé des mots comme juif, juiverie, etc, ils m’ontfait un "mini-exodus": tous les avocats (sauf un!) desparties civiles ont quitté la salle en signe deprotestation car mes propos étaient, selon eux,"insoutenables"! Qu’un accusé ait la parole, jecomprends parfaitement que cela ait choqué tousces humanistes! Le seul avocat des parties civiles quiest resté pour "m’écouter2, c’est l’avocat de laLICRA, un certain Badache (celui-là même qui alaissé un trou énorme dans la trésorerie du Club debasket de Caen...), mais il a souffert le martyre!Théoriquement l’avocat de la licrasse aurait dû êtreLibmann, mais il s’est "décommandé" au derniermoment…

Ma déclaration a bien plu à une partie du public!En effet, après le procès, j’ai reçu quelques cartesanonymes de spectateurs qui, venus en curieux,avaient bien aimé ce que j’ai dit et m’ont envoyé unmot à la Maison d’arrêt de Caen pour me le fairesavoir! Certaines cartes revenaient aussi surl’expulsion des témoins que j’avais fait citer, cela avaitchoqué. Preuve que le citoyen caennais de base,venu en spectateur, n’était pas foncièrement hostile!Ce qui était le plus inquiétant pour eux !

27 À l’issue du procès, la mairie de Caen m’a envoyé une factureconcernant des "frais d’entretien de la voirie". En effet, les services de lavoirie de la ville avaient été mobilisés d’urgence pour aller décoller desaffiches apposées en zone urbaine. Ces dernières, collées par des "mainsanonymes", réclamaient ma libération! Cela en avait outré (et pas qu’unpeu!) les avocats des parties civiles pourtant habitués à pétitionner pourréclamer la libération de certains prisonniers. Exemple d'une "cause" del'époque: l'innocent multirécidiviste Knobelpiess pour la LDH, etc…

15. LE VERDICT

Les jurés ont délibéré pendant 1 heure 30, ce quime semble court compte tenu de la longueurimpressionnante de l’Arrêt de renvoi devant la Courd’Assises qu’ils ont dû, normalement, consulter ànouveau. Et comme ils n’avaient pris aucune notedurant les trois jours complets de débats, il a bienfallu qu’ils se remémorent les différentes accusationsen relisant ce document.

À moins que tout n’ait été prévu d’avance, car unverdict, pour une affaire pareille, qui a duré 3 jourscomplets (10 heures de débats par jour), emballépesé en 1 heure 30, c’est bien court je trouve…

Il y avait, semble-t-il, uniquement deux questionspour chaque accusé, car à l’énoncé du verdict leprésident les a rappelé. J’ignore s’il y en avaitd’autres, mais toujours est-il que ce ne sont que deuxquestions qui ont été lues lors de l’énoncé descondamnations. La première était de savoir si j’étaisdéclaré coupable d’avoir déposé une bombe à Petit-Quevilly le 30 novembre 1987. La réponse fut « oui »à 8 voix. L’autre question demandait si je pouvaisbénéficier des circonstances atténuantes, et laréponse fut « non » à 8 voix aussi.

En conclusion, j’ai été condamné à ce queréclamait l’accusation puisqu’il n’y avait aucuneatténuation reconnue.

Même type de questions concernant la culpabilitéd’Arcini sur les faits qui lui étaient reprochés (et il y enavait beaucoup...), et même réponse: 8 voix pour ledéclarer coupable. 8 voix également pour lui refusertoute circonstance atténuante.

Donc, mon coaccusé aurait dû être, fortlogiquement, comme moi, condamnéautomatiquement selon ce qu’avait demandél’accusation puisque les jurés n’ont rien atténué.

Or, Arcini a eu 18 ans de sûreté au lieu des 30ans réclamés. C’est totalement illogique puisque pourprendre moins, il aurait fallu que les jurés atténuenten reconnaissant des circonstances atténuantes, cequ’ils n’ont pas fait! Il est manifeste qu’Arcini a passéun accord pour bénéficier d’une réduction de 12 anspar rapport à ce qu’avait requis l’avocat général! Etentre une peine incompressible de 18 ans et une de30, il y a une grosse différence!

Il semblerait qu’Arcini ait passé un double accorden fait. Un premier prévoyait "l’oubli" d’une partie deses affaires contre une aide pour mon arrestation. Lesecond prévoyait la compression de 30 à 18 ans dela peine de sûreté s’il se comportait "comme il fallait"durant le procès. Ce qui fut fait!

Comme je n’ai pas été condamné pour lafabrication de la bombe, puisqu'on ne voulait pasque je l’aie assemblée: j’ai donc été condamnéuniquement pour la pose d’un paquet piégé qui n’apeut-être même pas explosé!

16. ARCINI EST TOUJOURS EN PRISON

Je me suis demandé à un moment si Arcini étaitbien en prison, ou encore en prison car avec eux , onne sait jamais…

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Mémoire de Michel Lajoye page 85

Je me suis demandé à un moment si Aricini étaitbien en prison, ou encore en prison, car avec eux , onne sait jamais… Si j’avais ces doutes, c’est que jepensais au cas de Frédérique Germain, dite Blond-Blond, de la branche lyonnaise d’Action Directe –Canal Mossad, c'est-à-dire Rouillan et ses acolytes(cf. chapitre 2, section 13). C’est elle qui est derrièrel'arrestation de plusieurs des "sabbat-goyim" d'AD(fusillade de l'avenue Trudaine, etc). Elle a été jugéeavec ses "camarades" qu'elle a trahis et balancés,elle a été condamnée, mais… par décision spéciale(et secrète), elle a été dispensée de peine! Pourtant,elle avait été lourdement condamnée! Elle a eu unesorte de "grâce spéciale" dont les média n’ont jamaisfait mention de cela, hormis la radio RTL qui en avait

parlé et du coup révélé ce qui devait restertotalement secret!

Frédérique Germain a reçu une nouvelle identitépour aller refaire une autre vie. C’était la première foisqu’en France il était adopté un système similaire à cequi se fait aux USA ou en Italie concernant lesrepentis. J’ignore si d’autres personnes en ontbénéficié en France depuis Frédérique Germain.

Dès lors, compte tenu du "précédent FrédériqueGermain", à un moment j’ai eu de sérieux doutes surl’incarcération réelle d’Arcini. Mais j’avais tort dedouter, puisqu’il est actuellement en prison. Auxdernières nouvelles, il avait le matricule 3632 etoccupait la cellule 207 à la Maison centrale de Saint-Maur, près de Châteauroux.

Chapitre 12

LE POURVOI EN CASSATION

1. JE N'ÉTAIS PAS POUR

l’issue de la condamnation, il me fut proposéun pourvoi en cassation. Je ne souhaitais pasen déposer un, car c’était leur donner le plaisir

de le rejeter… De plus, c'était leur donner unelégitimité, reconnaître cette "justice"! Finalement, descamarades ont insisté en me disant que faire casserle verdict, cela m'offrirait un second procès où,d'entrée, je pourrais exiger de voir les témoinsprésents dans le bar, ainsi que les prétenduesvictimes!

J’ai donc accepté d’entamer cette procédure bienparticulière, car la Cour de Cassation ne se prononcepas sur les faits jugés, mais uniquement surd'éventuels "vices de procédure" survenus durant ledéroulement du procès. En 1990, il n'existait pasencore la Cour d'Appel pour les Assises. Elle n'a étéinstituée que le 1er janvier 2001 et je ne peux pas enbénéficier rétroactivement…

2. ARCINI DÉPOSE UN POURVOI

Arcini qui ne souhaitait pas déposer de pourvoi àl’issue du procès, et pour cause, il avait eu 12 ans deréduction par rapport à la peine de sûreté requise,s’est décidé à aller en cassation également lorsqu’il asu que j’y allais… Ce qui était contre toute logique etn’était pas un comportement très cohérent!

En effet, compte tenu du nombre d’accusationscontre lui et de l’ambiance d’après Carpentras, Arcinidevait s’estimer heureux! Il s’en était tiré plus quebien! Il ne pouvait quand même pas espérer êtrecondamné à moins de 18 ans!

Alors pourquoi Arcini, de lui-même, serait allédéposer un pourvoi en cassation pour être jugé ànouveau, avec le risque énorme d’être cette foiscondamné à 30 ans incompressibles ? Je ne croispas du tout qu’il ait effectué cette démarche de lui-même! Ce que je pense, c’est que certains nevoulaient pas me laisser aller seul à un nouveau

procès! Car, si j’avais fait cassation et pas Arcini, et sij’avais eu satisfaction, j’aurais été à nouveau jugé,mais seul cette fois! Dans ce cas, le dossier auraitapparu bien léger, l’absence de témoins se seraitremarquée, idem pour les parties civiles!

Donc il paraît évident qu'on a précisé à mon"complice" qu’il "fallait me suivre" et déposer unpourvoi.

Cependant, Arcini est un malin, car sa requête n’apas été examinée puisqu’il a "oublié" (sciemmentbien sûr!) de signer le Mémoire ampliatif.

Je suis persuadé qu’il l’a fait exprès! C’est mêmeévident! Comme ça il avait bien fait cassation, commeon le lui avait dit, afin de ne pas me laisser aller seulà un éventuel nouveau procès. Mais, il a fait en sortede ne pas prendre le risque de voir son recoursaccepté, en "oubliant" de signer la pièce deprocédure essentielle qu’est le Mémoire ampliatif.

Cela prouve bien qu’Arcini n’était quand mêmepas inconscient, et il n’avait pas envie d’être jugé ànouveau au risque de prendre, cette fois, 30 ansincompressibles… En bon artificier-démineur, il aneutralisé le "piège"!

De plus, il n’était pas assisté d’un avocat pourcette procédure devant la Cour de cassation, alorsqu’il en avait les moyens financiers.

De ce fait, que l’on ne vienne pas me direqu’Arcini, de lui-même, souhaitait véritablementdéposer cette requête, car s’il l’avait souhaitéréellement, il se serait assuré le concours d’unprofessionnel.

3. L'AVOCAT, QUI AVAIT ACCEPTÉ, SEDÉSISTE

Pour mon pourvoi, Maître Burdeyron avaitcontacté Maître Chantal Urtin-Petit, avocat à la Courde cassation, avec qui il avait déjà travaillé. MaîtreUrtin-Petit avait accepté, par lettre, l’affaire et toutallait pour le mieux.

A

Page 87: Michel Lajoye - Mémoire

Mémoire de Michel Lajoye page 86

Puis, peu de temps après, elle a écrit qu’elle nesouhaitait plus s’en occuper… Du coup plus d’avocatpour la cassation. A-t-elle subi des pressions?

Finalement c’est Rivarol, et plus particulièrementCharles Filippi, qui m’a alors envoyé un mot mesignalant de faire appel à Maître Jacques Guinard,avocat à la Cour de cassation. Ce dernier acceptaitaussitôt de s’occuper de cette requête.

4. MON POURVOI, ÉVIDEMMENT, REJETÉ

Évidemment mon pourvoi a été rejeté, ce qui estlogique. Ils s’étaient donné suffisamment de mal pourme faire condamner, ce n’était pas pour remettre çadans un autre procès avec le risque que cela sedéroule mal pour eux .

Maître Guinard avait déniché six moyens etchacun d'eux justifiait, à lui seul, la cassation duverdict. Je ne les détaille pas tous, un seul suffitpuisque cet avocat avait soulevé "l'argument-massue": la feuille signée par les jurés et le texted’Arrêt de la condamnation ne concordent pas! Eneffet, ce qu’ont signé les jurés n’est pas conforme autexte de condamnation… Ce qui laisse songeur…Cela voudrait-il dire que l’Arrêt de condamnation, lu àl’audience, n’a pas été rédigé par les jurés qui,apparemment, ont signé un autre document? Jen’ose y penser…

Quoi qu’il en soit, dans ce cas, la jurisprudenceest plus que centenaire, c’est même automatique etfort logique: est cassé tout procès d’Assises dontl’Arrêt de condamnation lu à l’audience n’est pasconforme au document signé par les jurés.

Dans le cas du procès de Caen, la feuille rédigée(ou plus exactement signée) par les jurés mentionnaitla saisie des armes (ce qui paraît évident...), maisétrangement, la feuille du verdict off iciel lu àl'audience ne contenait pas, ou plus, ce paragrapheordonnant la saisie définitive de l’armement etmatériels divers!

Encore une fois, cela conduit à s’interroger sur lefait de savoir si, par hasard, le verdict n’a pas étérédigé avant, et indépendamment, de la feuillesignée par les jurés…

Heureusement la Cour de Cassation, la plushaute juridiction française en matière de "justice", estlà pour garantir la bonne administration de ce dontelle est garante. Donc, elle a répliqué qu’en l’état, lacassation n’était pas due, un point c’est tout! Idem

pour tous les autres arguments avancés par larequête…

5. DES JOURNAUX ONT LES ATTENDUSAVANT NOUS

L’audience de la Chambre criminelle de la Cour decassation a eu lieu le 23 avril 1991. Maître Guinard,qui me représentait en Cassation, m’a écrit peuaprès, le 26 avril 1991, pour me signaler le rejet etme préciser que dès qu’il aurait connaissance desattendus, c’est-à-dire dès qu’ils seraient disponiblesau Greffe de la Cour de Cassation, il me lescommuniquerait.

Je stipule, pour les non-initiés, qu’il faut un"certain délai" pour que les attendus soientdisponibles, il faut le temps de les rédiger! Lesmagistrats rejettent et/ou condamnent d’abord, ilsargumentent officiellement sur le papier après…

C’est dans un courrier du 5 juin 1991 que MaîtreGuinard m’envoyait copie des attendus qu’il venaittout juste d’obtenir (il les avait eus le 3 juin 1991)auprès du Greffe de la Chambre criminelle de la Courde cassation. Mais, entre temps, certains ont commisune bourde énorme!

En effet, le 3 mai 1991 (soit un mois plus tôt !),l’édition du Calvados de Ouest-France etl’hebdomadaire Liberté de Caen, publiaient un textequasiment identique (une sorte de communiqué depresse) qui annonçait le rejet de mon pourvoi encassation. Cela passionnait apparemment la régionpuisque c’était donné à grand renfort de publicité!Ces deux journaux publiaient cela en reprenant lesmotifs de rejet et en s’appuyant sur quoi? Eh bien,les attendus évidemment!

Seulement il faudrait que l’on nous expliquecomment ces journaux, en date du 3 mai 1991, ontfait pour avoir le texte des attendus que MaîtreGuinard, pourtant avocat à la Cour de Cassation, n’aobtenu, lui, que le 3 juin 1991!

Pour information, l’hebdomadaire Liberté de Caenest une petite feuille citadine qui n’a aucun moyend’investigation. Il faut lui donner une information pourqu’il la publie. Par conséquent, on a fourni à cethebdomadaire de Caen (en même temps qu'àl'édition locale du quotidien Ouest-France) lesattendus! Mais dans ce cas, question: qui a bien pules avoir en sa possession avant leur rédactionofficielle? Il a malheureusement été impossible desavoir qui a informé la presse…

Conclusion

e moins que l’on puisse dire c’est que cetteaffaire est loin d’être éclaircie! Il y a beaucoupde "zones d’ombre". Cependant, vu les

implications, il ne faut pas rêver et il est douteux depenser connaître la vérité, du moins avec le régimeactuel!

De plus, quelle était la véritable finalité de cettemanipulation? Qui était visé? Lorsque la DPSD m’a

recruté, qu’est-ce qu’ils attendaient de moi? Qui a tiréles ficelles de cette manipulation?

Je ne crois pas vraiment que la DPSD m’aitrecruté pour que je fasse partie de la DPSD. J’estimeque j’étais beaucoup trop jeune et trop "bleu" pourêtre envoyé si rapidement sur des missions debarbouzerie! Je pense plutôt que j’ai été recruté pourêtre utilisé par la DPSD. Cela, évidemment, dans unbut bien précis de manipulation.

L

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Mémoire de Michel Lajoye page 87

Comme relaté au chapitre 2, je les aurais bien vume faire commettre une action quelconque, meliquider dans la foulée, et l'on aurait pu lancer unecampagne médiatique contre les nationalistes, et àtous les coups contre le FN qui, évidemment, auraitété l’inspirateur des actes commis par Lajoye… 

D’ailleurs, au final, l’opération a été partiellementréussie, on m’a fait commettre un attentat. Seulementon n’a pas pu mettre cela sur le dos du FN car j’étaislà pour dire qu’il n’y était pour rien. Ce qui fait penserà beaucoup que, sans aucun doute, le "plan initial"(conçu par la DPSD?) prévoyait que je sois abattulors de mon arrestation. Ainsi, il aurait été simple poureux d’impliquer, ensuite, le FN! Je n’aurais pas été làpour dire le contraire!

Or, je n’ai pas été abattu! Reste à savoirpourquoi, et notamment si le plan initial prévoyait queje le sois. Est-ce qu’il y a eu "rivalité" entre lesservices spéciaux militaires et civils? L’un a-t-ilsavonné la planche à l’autre? C’est fort possible! Ilfaut savoir qu’il y a un antagonisme (pour ne pas direconflit ouvert!) entre les civils et les militaires desservices spéciaux. Chaque camp voulant éliminerl’autre pour avoir "l’exclusivité du marché". Il sepourrait que mon affaire ait été utilisée dans cette"guerre" qu’ils se livrent.

En effet, si nous analysons rationnellement leséléments, nous pouvons dire qu’il a été commis deserreurs énormes! La preuve avec ce mémoire! Unedécennie après, il m’a été possible de démontrer lamanipulation. Cette dernière apparaît tellementcousue de fil blanc que personne ne peut la nier.C’est un peu comme si un service avait laissé traînerdes indices, commis sciemment des bourdes, pourque je puisse, ensuite, remonter les tenants etaboutissants afin de montrer du doigt ceux qui sontderrière tout cela.

Compte tenu que j’ai été interpellé par le RAID,policiers civils, que c’est Ange Mancini lui-même (àl’époque le chef de cette unité) qui menait lecommando, il se pourrait que les civils aient joué un"sale tour" aux militaires (les rivaux honnis!) en netirant pas! Mancini était-il là, personnellement, afin debien contrôler qu’aucun de ses hommes necommettrait de "bavure"? Il est en tout cas pour lemoins étonnant que ce soit Mancini, en personne,qui ait opéré mon arrestation…

Car, encore une fois, si j’avais été liquidé en 1987lors de cette interpellation, il aurait été impossible (àqui que ce soit!) de remonter "l’affaire" et dedémontrer la manipulation impliquant les servicesspéciaux de l’armée! Alors qu’aujourd’hui, à causedes civils du RAID qui n’ont pas tiré, c’est bel est bienla DPSD que je montre du doigt! Qui m’a recruté? LaDPSD! À la base de cette affaire, ce sont bien lesservices spéciaux de l’armée, et non pas lesRenseignements Généraux!

Il se peut fort bien que certains militaires semordent aujourd’hui les doigts d’avoir laissé envoyer,pour mon arrestation en 1987, les civils du RAID etnon les militaires du GIGN!

Ceux qui connaissent la rivalité entre les servicesspéciaux civils et militaires, comprendront que cette

hypothèse (qui n’est qu’une hypothèse!) est loind’être à exclure. Actuellement il n’est pas impossibleque les RG ne soient pas mécontents de voir leursrivaux de la DPSD empêtrés avec cette "AffaireLajoye". La police politique civile pourra ainsi fairevaloir, avec des arguments, que la police politiquemilitaire a été minable, qu’elle est composée de nuls,et qu’il faut, pour éviter que cela ne se renouvelle,confier la police politique aux civils…

Mais si cette hypothèse est la bonne, les civilsauraient tort de se réjouir de voir les militaires enlisésavec ce dossier! En effet, pour ma part, je fais partircette "Affaire Lajoye" en 1984: date de ma rencontreavec l’agent civil Arcini, officiellement fonctionnaire duMinistère de l’Intérieur, et non pas uniquement àpartir de 1985/1986, époque de mon recrutement parla DPSD!

De plus, tout au long de ce récit, nous avons vuque les civils, que ce soient les RG et/ou la PoliceJudiciaire, sont loin d’être innocents!

Quoi qu’il en soit, rivalité inter-services ou non, ilest indéniable qu’il y a bel et bien eu une "hauteautorité" derrière les faits relatés dans ce mémoire!

Prenons l’exemple de l’attentat qui m’estreproché. Il apparaît qu’il n’y a jamais eu de blessé,le témoin Rabia Bounifia le confirme. Cependant, desblessés existent sur le papier, dans des procèsverbaux, l’Arrêt de renvoi devant les Assises, etc. Jedoute que ce soient des officiers de police judiciaireet/ou des magistrats qui, d’eux-mêmes, ont prisl’initiative de "faire monter la sauce" et d’inventer desvictimes!

D’autant plus que ces faux blessés, cesmensonges qui ont été formulés dès le début par lapolice judiciaire, ont été couverts par tous lesmagistrats qui, par la suite, sont intervenus dans cedossier. C’est que cela en fait du monde!

Il a bien fallu qu’un service, qu’une "autoritésupérieure", leur ordonne de couvrir cettemanipulation. Et pour que tous ces policiers, tous sesmagistrats, obéissent il faut que le service et/ou"l’autorité supérieure" soient très puissants! Qu’ils lescraignent!

Cette terreur qu’inspirent ceux qui sont derrièrecette manipulation, rend hypothétiques les chancesde voir "réviser" le jugement me condamnant.J’avoue que croire à une révision me sembletotalement utopique. Car pour qu’une telle chose soitacceptée, entreprise, il faudrait que la "justice"reconnaisse son erreur, sa participation active danscette manipulation! Autant dire que c’est du domainede l’illusoire! Je vois mal la magistrature, la policejudiciaire, la police politique civile et militaire, etc, secouvrir la tête de cendres puis avouer, publiquement,qu’elles sont allées jusque-là ! Le reconnaître, celaserait convenir que la France n’a rien à envier auxpires pays totalitaires que l’hexagone se complaît àmontrer du doigt! Les "initiés" savent ce qu’il en est,réellement, de la situation en France. Mais le grandpublic, cette "masse goye", n’a pas à le savoir et nedoit surtout pas le savoir!

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Mémoire de Michel Lajoye page 88

Si on acceptait d’instruire objectivement cette"Affaire Lajoye", c’est-à-dire les faits relatés dans cemémoire, cela serait ouvrir la boîte à Pandore!

En effet, dans cette affaire, les RG (policepolitique civile) sont impliqués, mais la DPSD (policepolitique militaire) l’est aussi et même apparemmentbeaucoup plus! Les premiers dépendent du Ministèrede l’Intérieur, la seconde du Ministère de la Défense.Il faudrait alors expliquer, au public, cettecollaboration inter-services et même interarmes!

Cette collaboration démontre qu’il y a eucoordination au sein d’une cellule… Une sorte de"Cellule de lutte contre l’extrême-droite"… Cettedernière un peu calquée sur le modèle de la "Celluleélyséenne", le cabinet noir de Mitterrand, qui étaitcomposé de militaires (GIGN, DGSE, DPSD) et decivils (RG, DST, PJ). La Cellule Elyséenne démontrebien que, lorsqu’ils le veulent, ils savent faire travaillermilitaires et civils.

En conséquence, chercher qui est derrière monaffaire, cela serait donner un coup de projecteur surces cellules interarmes de lutte contre l’extrême-droitequi existent bel et bien! Car mon cas n’est pas isolé,loin de là!

À Croisy, le 7 mars 1986 (soit à une époquecontemporaine des faits relatés dans ce mémoire),quelques jours avant les élections législatives, uncertain Régis Devaux a poignardé à mort PhilippeBrocard, un militant du Parti Socialiste dont il collaitles affiches. Les média, lors d’une campagnehaineuse, ont affirmé que ce Devaux était un militantdu Front National. Ce qui est "vrai", il était encarté auFN, mais… sous une fausse adresse!

En fait ce Devaux (dont l’affaire fut totalementétouffée ensuite, et pour cause!) était (à l’époque) lesergent Devaux! Affectation militaire: Fort deVanvres! Sous les ordres du colonel Morel. Devauxappartenait à une "Section spéciale" de l’armée(apparemment une Antenne de la DPSD...) casernéeà Vanvres et composée de 120 hommes spécialisésdans l’infiltration des groupes d’extrême-droite!Compte tenu que les services spéciaux de l’arméen’ont aucun pouvoir judiciaire, ces infiltrations nepeuvent avoir comme finalité que la provocation !

Pour la "couverture judiciaire", cette compagnie, àlaquelle appartenait Devaux, travaillait à l’époque(sans doute encore maintenant!) en liaison avec desofficiers de gendarmerie de la brigade de recherchede Paris-Minimes. Ainsi qu’avec le Deuxième Bureaude la Direction Centrale des RenseignementsGénéraux!

Voilà qui constitue une belle "cellule interarmes delutte contre l’extrême-droite"! Elle allie les militairesdes services spéciaux (une compagnie complète: 120agents, ce n’est pas rien!) et ceux de la gendarmerie,avec les civils des Renseignements Généraux! Etcette cellule de Vanvres est une unité qui assassine!

En effet, le cas de Devaux est très significatif. Carvoilà un militaire, des services spéciaux, qui s’encarte(dans le cadre de son travail!) au FN, partidémocratique. Puis, la veille d’élections législatives(très importantes pour le mouvement de Jean-Marie

Le Pen) l’agent infiltré Devaux va assassiner (surordre de qui?) un militant du PS!

Le crime de Croisy, médiatisé à outrance durant lacampagne des législatives de 1986, puisque imputéà un militant du FN, a fait perdre à ce mouvement unnombre considérable de voix! Ce qui était l’objectif àatteindre! Ce pourquoi on a envoyé "en mission" lesergent Devaux! Ce pourquoi le gouvernement, issudu Parti Socialiste, a fait tuer un de ses militants!

Cet assassinat éclaire ma propre affaire, car cettecellule, située à Vanvres et à laquelle appartenaitRégis Devaux, ressemble beaucoup à ce que j’aiconnu à l’APSD de Tarbes!

Il serait intéressant de savoir combien il y a decellules interarmes de ce genre en France!

Il serait tout aussi intéressant de savoir qui lescommande. Car ces opérations de manipulationss’inscrivent dans la continuité politique. La preuve enest mon cas: cela s’est poursuivi quels que soient lesgouvernements! Aucun n’a dit « Stop! » et ordonnéla dissolution de toutes ces cellules! Les faits relatésdans ce mémoire se sont étalés de 1984, date de marencontre avec l’agent Arcini, jusqu’à 1991, date durejet du pourvoi en cassation.

Ce qui veut dire que cela a débuté sous ungouvernement "de gauche" avec un Premier Ministrequi n’était autre que Laurent Fabiusida, l’époux deFrançoise Castro, celle des "milices juives armées"!Le Ministre de l’Intérieur (celui qui a "engagé" Arcinien 1982/1983!) était Pierre Joxe, fils de Louis, lui-même fils d’Halévy.

Cela s’est prolongé en 1987, année où furentcommis les attentats relatés dans ce mémoire. Àcette date (depuis les élections législatives de mars1986) c’était un gouvernement de cohabitation "dedroite", dirigé par Jacques Chirac, un membre duComité d’honneur de la LICRA. À l’Intérieur y étaientles duettistes Pasqua (membre d’honneur duMossad) et le franc-maçon Pandraud qui occupaientun "super-Ministère" de la sécurité.

Ensuite, cela s’est poursuivi sous ungouvernement "de gauche" (qui fut de retour en1988), avec le procès de Caen tenu en juin 1990.Autrement dit un mois après la manipulation deCarpentras (mai 1990) où Joxe s’est tant illustré et unmois avant l’adoption de la Loi Fabius-Gayssot (juillet1990)…

Preuve qu’il y a bien eu continuité dans cetteaffaire! Gauche et droite ont couvert! De ce fait, celatendrait à prouver que "l’autorité supérieure" qui estderrière cette manipulation est "apolitique", si j’osedire… Gauche et droite lui obéissent, collaborent, etutilisent des cellules spéciales dans leur guerre àmort contre les nationalistes!

Mais qui sont donc ceux qui ont à leurs piedstoute la classe politique française? Qui sont ceux quiexècrent les nationalismes (hormis le leur...)? Celapourrait bien être eux l’aiguillon, eux qui exigent quel’on recoure, en France, chez nous, aux mêmesméthodes que celles qui sont utilisées, par eux , enPalestine occupée!

Je sais que certaines personnes s’étonnent, ontmême du mal à croire, que la DPSD (par conséquent

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Mémoire de Michel Lajoye page 89

leur armée chérie!) puisse s’impliquer dans desaffaires de basse police politique. Pourtant c’estlogique! Il y a bien en France, pour le "maintien del’ordre" (défense de rigoler!), une police civile (policenationale) et une police militaire (gendarmerie). Il estdès lors normal qu’en matière de police politique il ensoit de même.

Et à ces sceptiques qui pensent encore que leurarmée vénérée ne tremperait pas là-dedans, je leurdemanderai de se souvenir de l’époque de l’OAS: laSécurité Militaire (qui est devenue la DPSD ennovembre 1981) traquait les membres de l’OAS, ainsique les militants d’autres organisations et cela mêmes’ils étaient civils!

En outre, dans le milieu des années 60 (soit aprèsla fin, officielle, de la guerre en Algérie), c’est bien laSécurité Militaire (c’est-à-dire l’armée républicaine dupays des "Droits de l’Homme"!) qui a perpétré ce quel’on connaît sous le vocable de "l’Affaire Saint-Aubin"! Du nom de ce jeune homme assassiné parerreur, car les tueurs de la SM l’ont confondu avec unavocat qu’ils avaient ordre de supprimer!

Ce qui démontre, par l’exemple, que dans lesannées 60 la Sécurité Militaire était très active enmatière de police politique, n’hésitant pas à liquiderdes civils! Et pas n’importe quels civils puisque, dansce qui a débouché sur "l’Affaire Saint-Aubin", c’est unavocat qui, initialement, était visé! Cela ne sedéroulait pas en URSS, ou dans un de ses payssatellites, mais en France!

Alors il faut être bien naïf pour penser quecertaines pratiques ont été abandonnées à compterde novembre 1981. Date où les socialistes (cesvertueux!) ont restructuré la Sécurité Militaire pour enfaire la DPSD! Bien au contraire même! Cela s’estintensifié puisque la restructuration était destinée àfaire de la "vieillotte" SM une police politique militairemoderne! C’en est à un tel point qu’aujourd’huil’armée est très impliquée dans des affaires demanipulation politique, dans des crimes politiques! Lapreuve avec "l’Affaire Devaux", cet assassinatcommis à Croisy le 7 mars 1986 et que j’ai relaté plushaut!

L’existence même d’une cellule comme celle àlaquelle appartenait Devaux, suffit à donner une idéede l’implication de l’armée en matière de policepolitique!

J’ai par ailleurs reçu, il y a quelque temps, letémoignage d’un ancien militaire qui, lui aussi, a étéutilisé, récemment, par la DPSD dans des affaires debasse police politique ("surveillance/infiltration" demouvements politiques). En conséquence, l’utilisationde l’armée à des fins de basse police politique estplus que démontrée. Elle ne fait aucun doute!

Il faut que les naïfs ouvrent les yeux et réalisentque l’armée qu’ils ont connue n’existe plus!Aujourd’hui elle ne défend plus la nation! Elle sert lepouvoir politique qui, lui, est aux ordres de ceux qu’ilest interdit de nommer!

La DPSD est d’autant plus utilisée par "certains",qu’il faut bien voir que, pour les RenseignementsGénéraux, c’est délicat de surveiller des dissidentsréfugiés à la campagne. La raison en est qu’en zone

très rurale, il est difficile à l’inspecteur des RG d’avoirses renseignements. Il se fait repérer rapidementdans un village de quelques centaines d’habitants.Tandis qu’avec la DPSD, c’est simple! Comme c’estl’armée et que la gendarmerie, c’est militaire: chaquegendarme est un agent en puissance, il suffit de"l’activer".

Ces pratiques de la DPSD sont totalementinconnues de la "masse goye". Les livres sur les RGpullulent, mais la DPSD est inconnue du grandpublic. Gageons que cela continuera! C’est à celaque l’on reconnaît d’ailleurs la puissance de ceservice: il sait rester dans l’ombre et sait fairerespecter, par les média, la loi du silence!

En effet, plus de 35 ans après "l’Affaire Saint-Aubin", alors que des documents prouventl’implication de la Sécurité Militaire, que les noms desdonneurs d’ordres sont connus, quel est le journal,quel est l’éditeur, qui a publié ces preuvesdisponibles? Aucun! Le silence de la terreur!

Idem pour le crime de Croisy commis en 1986!Quel est le média qui a osé braver l’interdit etmentionner que Philippe Brocard, militant du PartiSocialiste, a été poignardé à mort, non pas par unmilitant du Front National, mais par le sergent RégisDevaux, membre des services spéciaux de l’armée,chargé d’infiltrer l’extrême droite? Aucun!

En France, dès que l’on parle police politique, la"masse goye" pense Renseignements Généraux! Leconditionnement pavlovien est parfait! Remarquable!Tout le monde croit qu’il n’y a qu’une police politiquedans ce pays: la civile, avec les RG! Grave, trèsgrave erreur qu’un certain mouvement, lancé dansune conquête démocratique du pouvoir, a déjà payé,et paiera encore, très cher!

Cette implication militaire, dans les affairespolitiques intérieures de ce pays, est d’autant plusvraie qu’elle est aisément mesurable. En effet, qu’est-ce que l’on voit depuis quelque temps? Que c’est lagendarmerie qui s’occupe d’affaires d’ordinairedévolues, voire réservées, aux RenseignementsGénéraux! Le cas le plus significatif, et qui est encoredans toutes les mémoires, c’est "l’Affaire desPaillotes" en Corse. Des gendarmes, donc desmilitaires (par conséquent l’ombre de la DPSDplane...), étaient bien constitués en unité de policepolitique pratiquant le terrorisme gouvernemental!

Même si mon exemple des paillotes est mauvais,puisque dans cette affaire corse, ce n’est pas l’actionen elle-même qui est significative. C’est uneopération très banale pour qui connaît, et a été de laDPSD! En revanche, ce qui l’est moins, c’est que desarrestations d’agents soient ainsi révélées, détailléesau public, via les média. Si ces derniers en ont parlé,c’est qu’ils ont été "autorisés" à le faire, sinon ils enauraient fait état de la même manière qu’ils ont traité,en 1986, l’affaire de Croisy en faisant le silence surl’appartenance du sergent Devaux à une unité trèsspéciale. Dans l’affaire Corse, sans doute qu'on amême donné des ordres aux journalistes pour qu’ils"fassent mousse".

Dès lors, cette "Opération Paillotes" semble bienêtre un règlement de compte entre civils des RG (qui

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Mémoire de Michel Lajoye page 90

ont sous leur contrôle pas mal de "journalistesmondains") et militaires de la DPSD, puisque cesdeux polices politiques se détestent cordialement etse font les pires vacheries afin de tenter dediscréditer l’autre!

Restons donc plutôt dans les affaires dont lesmédia n’ont pas parlé, ou alors pour les présenter dela façon qui arrangeait le plus les servicesgouvernementaux qui en sont les auteurs.

J’ai relaté plus haut "l’Affaire Devaux", mais sinous reprenions toutes les "affaires politiquescriminelles d’extrême-droite" de ces dernièresannées, des affaires Arcini/Lajoye à Carpentras, enpassant par les attentats contre des foyersSONACOTRA de la Côte d’Azur, nous constaterionsqu’il y a toujours un militaire, ou un ex-militaire, qui yest impliqué. Jamais un bidasse de la "régulière",mais toujours un militaire d’une unité en cheville avecla DPSD! Troublant quand même!

Je vais développer l’affaire de la SONACOTRA,puis celle de Carpentras, pour illustrer ces propos.

"L’Affaire de la SONACOTRA", pour ceux quiauraient oublié ce dont il s’agit, je rappelle que cesont plusieurs foyers d’immigrés qui ont été plastiquéen 1988. On nous a présenté cela à l’époque, dansun battage médiatique auquel nous avons droit enpareil cas, comme des attentats perpétrés par des"néonazis". Singuliers "néonazis" aux vues durebondissement intervenu par la suite!

En effet, le Journal du Dimanche du 5septembre 1999 nous apprenait qu’en 1989, aprèsl’arrestation des poseurs de bombes, la DGSE (àlaquelle est liée la DPSD!) a "recélé" leurs matériels!La raison en est que l’un des terroristes, MichelGouge (le Arcini local!), appartenait à ce service!

D’après des informations que j’ai pu recueillir, c’estun hallucinant concours de circonstances qui a misen lumière ce rebondissement: un certain HuyDecloedt, policier à Nice, fut interpellé en 1994 enpossession d’armes et d’explosifs. Son arrestation estdue à une de ses amies trop bavarde au téléphone(Big Brother vous écoute!). Pour ne pas plonger, cefonctionnaire du Ministère de l’Intérieur (qui a étéjugé le 26 janvier 2000 à Paris pour « détentiond’armes, de munitions et d’explosifs », je reviendraiplus loin sur ce procès) s’est "confessé" à un juged’instruction auquel il a avoué avoir "emprunté" cematériel dans un dépôt de la… DGSE!

À ce niveau, ce n’est déjà pas banal! Mais là oùcela se gâte, c’est que l’analyse de l’explosif, quedétenait Decloedt, a révélé qu’il provenait du mêmelot que celui qui a servi à perpétrer les "attentatsracistes" commis en 1988 sur la Côte d’Azur! Cepolicier avait tout bonnement gardé par devers luiune partie de l’armement que la DGSE a faitsoustraire à la "justice"!

Et je précise, pour faire bonne mesure dans cetincroyable imbroglio barbouzard, que c’est Decloedtqui était chargé de coordonner l’enquête sur cesattentats! Interrogé sur cette dernière, il a avouéqu’un accord fut conclu, à très haut niveau, entre lesservices spéciaux de l’armée, la PJ et la Justice afind’obtenir la libération de l’agent de la DGSE,

interpellé suite à ces provocations. Effectivement,Michel Gouge (frère de Nicolas, lui aussi impliquédans cette affaire) fut prestement libéré, et par lasuite condamné (comme convenu, selon les dires deDecloedt) à seulement 6 mois de prison avec sursispour « association de malfaiteurs », alors que cesattentats avaient causé un mort et plusieurs blesséstrès graves!

Comment ne pas faire le lien entre le dossier de laSONACOTRA et "mon" affaire?

En effet, j’ai relaté chapitre 9, section 1, de cedocument que les armes et explosifs que nouspossédions, Arcini et moi, avaient été "récupérés"durant la garde-à-vue, après avoir transité parl’antenne de la PJ de Caen. Exactement comme laDGSE a récupéré les armes et les explosifs utiliséssur la Côte d’Azur dans les attentats contre les foyersd’immigrés!

Et, justement, puisque le déménagement enNormandie a eu lieu en décembre 1987 (suite à monarrestation et l’auto-capture d’Arcini), comment nepas avoir à l’esprit que c’est peut-être bien "notrematériel" qui a ainsi été transféré sur la Côte d’Azurpour servir aux attentats contre la SONACOTRA quiont eu lieu en 1988. Nous retrouvons, dans cettesalade niçoise, les mêmes ingrédients que ceuxmitonnés en Normandie: les services spéciaux del’armée ; des policiers de la Police Judiciaire quiopèrent des forfaitures ; la magistrature couchée quiexécute les ordres et rend un verdict négocié paravance ! Et en prime, une étrange similitude: commeceux commis en Normandie, les attentats contre laSONACOTRA ont été revendiqués de façon sioniste!

Pour l’anecdote, je me permets de signaler que leJDD du 5 septembre 1999, qui révélait lerebondissement dans l’affaire de la SONACOTRA,tentait quand même d’atténuer les choses! MichelDeléan, auteur de l’article, prenait pour argentcomptant la version officielle qui veut que le dépôtd’armes et d’explosifs (d’où provient le matériel aveclequel Decloedt fut interpellé) soit un stock officiel dela DGSE, mais… dissimulé dans une villa située surles hauteurs de Nice!

Tous ceux qui ont été militaires apprécieront ce"comique troupier" que le JDD a repris à son compte!D’ordinaire les soutes [ou dépôts] à munitions, et lesarmureries de l’armée (qui plus est de la DGSE!) setrouvent dans des établissements gardésmilitairement, jamais dans des villas de la Côte d’Azurforcément peu sûres, puisque susceptibles d’êtrecambriolées par des "jeunes".

Il va de soi que cette cache azuréenne desservices spéciaux de l’armée a été constituée aussi"officiellement" que celles qu’Arcini et moi possédionsen Normandie et dont le contenu fut, lui aussi,récupéré.

Autre enseignement à tirer de ce rebondissementdans l'affaire de la SONACOTRA: le contrôle que lesservices exercent sur les média! C'est le moins quel'on puisse dire puisque l'arrestation de Decloedt a eulieu en 1994. Comment se fait-il qu'il ait fallu attendre1999, soit 5 années après l'interpellation, pourqu'enfin un média officiel, en l'occurrence le JDD du

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5 septembre 1999, en parle? Et comment ne pass'étonner que, dans un premier temps, il n'y ait que lapresse militante qui se soit fait écho des "révélations2du JDD? Il a en effet fallu trois mois pour que lagrande presse reprenne à son compte ce que le JDDdu 5 septembre avait publié!

Et encore, ce ne fut "médiatisé" que parce qu'enseptembre 1999, à la suite du déballage opéré par leJDD, le Ministère public s'est senti contraint d'ouvrirune nouvelle information contre les complices deDecloedt qui, jusque-là, "étrangement", n'avaient pasété inquiétés! Cela a abouti, fin 1999, à la mise enexamen des consorts Jean-Pierre Murciano (le jugegrassois qui a instruit le dossier des attentats contreles foyers de la SONACOTRA) et Bernard Farret qui àl'époque de ces forfaitures était le procureur-adjointde Grasse. Ces deux magistrats sont à l'affaire de laSONACOTRA ce que la juge d'instruction FabienneJanocka et le procureur Yves Bot sont aux affairesArcini/Lajoye. La seule différence, c'est que lesseconds ne sont pas (encore?) mis en examen pour« faux en écritures publiques »…

Je stipule bien que cette instruction (ouverte enseptembre 1999), visant Farret et Murciano, concerneles mêmes faits que ceux qui ont été instruits (à partirde 1994) contre Decloedt. La procédure a été"saucissonnée", et le volet du dossier concernant lesdeux robins est donc encore pendant. C'est mêmeparti pour durer longtemps, très longtemps. Sansdoute jusqu'à un oubli total. Voire un "égarement" dudossier (comme dans l'affaire de la secte de l'Eglisede Scientologie…) qui le fera classer.

Quoi qu'il en soit, le procès du lampiste Decloedt(et de lui seul!) s'est tenu le 26 janvier 2000 au Palaisde Justice de Paris, devant la 17ème ChambreCorrectionnelle présidée par Jean-Yves Monfort. Lesdébats furent, bien évidemment, totalement occultéspar les "grands média"! Pourtant, la DGSE impliquéedans des attentats commis en France; la PJ et lesRG complices; plus la "justice" qui entérine le tout: cen'est quand même pas rien! Cela aurait dû, en touteobjectivité, alimenter la chronique journalistiquedurant un "certain temps"!

Ce mutisme des média, sur un pareilrebondissement concernant des "attentats racistes",contraste par rapport à l'hystérie qui s'est emparéedes journalistes après "l'affaire des paillotes" enCorse… Preuve, comme je l'indiquais précédemment,que l'affaire Corse est avant tout un règlement decompte (pour neutraliser le préfet Bonnet quis'intéressait d'un peu trop près à la barbouze YvanColonna?), sinon elle aurait été traitée en sourdine,comme l'arrestation, puis le procès et lacondamnation de Decloedt!

Si le procès de ce dernier s'est tenu le 26 janvier2000, ce n'est que le 1er mars que le verdict futrendu. Il est très modéré puisque cet ex-enquêteurde la PJ de Nice (il est aujourd'hui fonctionnaire desRG du Var!) a été condamné à un an de prison avecsursis et non suspension, encore moins révocation,de la police!

Ce verdict n'est pas une surprise, puisque commeje l'ai indiqué, le Tribunal était présidé par Jean-Yves

Monfort qui a la particularité d'avoir été, jusqu'en1985, juge d'instruction à Grasse. C'est-à-dire que leprésident de la 17ème Chambre Correctionnelle deParis, qui a jugé cet ex-enquêteur de la PJ de Nice,est quelqu'un qui a forcément travaillé avec ladite PJ,et plus particulièrement avec Decloedt.

Sans oublier que cette affaire implique aussi lejuge Murciano, qui est toujours en poste à… Grasse,et Farret, l'ex-procureur adjoint de… Grasse. C'est-à-dire que le premier a été un ex-voisin de bureau deMonfort, et le second l'ex-procureur auquel il étaitsoumis lorsqu'il était juge d'instruction à Grasse!

Pour le "comique" de la situation, et mesurer lavassalité de la presse qui n'a pas dénoncé ce procèstrès fraternel, il est bon que je mentionne que sil'Institution judiciaire a fait dépayser ces affairesazuréennes à Paris, c'est pour ne pas faire juger lesprotagonistes par des magistrats de la mêmejuridiction que celle où ils officient, ou ont officié!Difficile, en l'état, de jouer plus au Tartuffe!

Et comment justifier le "saucissonnage" de laprocédure? Pourquoi avoir jugé, en janvier 2000,Decloedt alors qu'une instruction visant ses complicesFarret et Murciano est encore en cours? Elle pourraitmettre en lumière des faits nouveaux qui éclaireraientle rôle joué par Decloedt. Or on ne peut être jugédeux fois pour les mêmes faits. Un procès communaux trois protagonistes s'imposait, et, évidemment,devant un autre magistrat que leur ami (et sansdoute F .˙.) Monfort!

Cependant, ce procès Decloedt (qui a duré 8heures!) aura quand même permis d'en apprendre unpeu plus sur ces attentats de la Côte d'Azur, et celaen dépit des diversions de Monfort qui, dès que lesdébats arrivaient sur un point embarrassant, gratifiaitl'assistance d'une saillie de diversion. Le prévenu, quide son côté faisait monter la pression pour obtenir unverdict clément, a donné des détails fort intéressantssur ces explosions. Il a notamment affirmé que lesystème de mise à feu des bombes était composé,outre d'un détonateur pyrotechnique, de mèche lenteet d'un boutefeu militaire. Accessoires que desamateurs, comme ceux qui ont (officiellement…)perpétré ces actions, pouvaient difficilement seprocurer sans une "certaine aide".

C'est encore plus vrai pour l'explosif utilisé:artisanal à base de chlorate de soude selon laversion officielle servie, en 1992, lors du procès desposeurs de bombes; coupé avec de la Pentrite selonDecloedt qui s'est exprimé récemment sur le sujet. Etlorsque l'on voit, sur photos, les dégâts provoquésaux foyers de la SONACOTRA, difficile de croire qu'iln'y avait que du désherbant dans cette bombe! Seulun explosif surpuissant comme de la Pentrite peutcauser de tels dommages.

Or, la Pentrite est à l'explosif ce que le caviar està l'alimentation. C'est l'explosif le plus puissant, etsurtout le plus coûteux dont dispose l'armée! Raressont les unités qui en ont en dotation, l'armée (quiest économe…) utilise plutôt du plastic classique. Cequi démontre, par ce matériel que n'ont donc pas lesunités régulières, que ceux qui ont fait sauter cesfoyers d'immigrés étaient bel et bien approvisionnés

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par des services spéciaux, et appartenaient même,pour au moins l'un d'entre eux, auxdits services. Lorsde son procès, Decloedt a confirmé que l'un desprotagonistes, Michel Gouge, appartenaiteffectivement à la DGSE. Ce qui n'empêche pas lagrande presse, et plus particulièrement Le Monde("journal de référence"), de continuer à nous leprésenter comme un "prétendu agent". On voit quitient la laisse des journalistes mondains28…

Par ailleurs je signale, toujours dans le cadre decette "Affaire SONACOTRA", qu'en décembre 1999,peu avant le procès de Decloedt, j'ai écrit au jugeparisien Michèle Colin. Cette dernière était chargéede l'instruction de la partie Murciano/Farret de cedossier, et je voulais lui signaler toutes les similitudesqu'il y avait entre les attentats commis en Normandieen 1987 et ceux perpétrés sur la Côte d'Azur en1988 (cibles et revendications similaires,protagonistes qui viennent des mêmes milieux,implications des services, disparitions d'armes etd'explosifs, etc…). Ma missive était accompagnéed'un exemplaire de ce présent mémoire, arrêté danssa version décembre 1999. Ce document a fortintéressé le magistrat puisqu'elle a même déploré,par la suite, que sa hiérarchie n'ait pas étendu sasaisine à ces "affaires normandes". Puis, à la mi-janvier 2000, rebondissement, ou plus exactementvaporisation du juge Colin!

En effet, mi-janvier 2000, quelqu'un a voulu luitéléphoner au Palais de Justice de Paris, mais on arépondu que Michèle Colin n'était plus là, qu'elle aquitté les services de l'instruction début janvier,comme convenu "de longue date". Pourtant ilsemblerait que cette juge ne comptait, apparemment,pas quitter son poste, du moins pas si rapidement:c'est elle-même qui avait fixé ce rendez-vous à cetinterlocuteur pour la mi-janvier! Et comment peut-oncroire qu'un dossier ultrasensible comme celui quivise Murciano, Farret et la DGSE, aurait pu êtreconfié en septembre 1999 à un juge sur le départpour janvier 2000? À la fin 1999, ce dossier étaitdevenu si explosif, que le juge Colin s'était faiteassister de sa consœur Muriel Josié. On s'orientait, àtrès court terme, vers un déballage judiciaire de"l'Affaire Lajoye", via celle de la SONACOTRA!Mais…ouf on respire, il n'en sera rien, puisque c'estdorénavant un certain Charbonnier qui remplace, àlui seul, ses consœurs Colin et Josié.

Venons en maintenant à Carpentras: uneprofanation est découverte le 10 mai 1990. Lesauteurs en seraient, soi-disant, cinq hommes d’ungroupe animé par un certain Jean-Claude Gos. Cedernier sera mystérieusement tué le 23 décembre1993, par Rachid Belkir, dans un "accident" de laroute (très similaire à celui de "l’Affaire Saint-Aubin"...)! Belkir, quant à lui, sera retrouvé le 16septembre 1995 faisant trempette dans le Rhône, un

28 Dans ce mémoire, j'ai déjà fait état du livre Guerres secrètes àl'Élysée (aux Éditions Albin Michel) signé du capitaine Paul Barril. Maisje le recommande aussi pour la retranscription d'écoutes téléphoniquesqui concernent des conversations entre des journalistes du Monde etceux qui leur donnent leurs ordres. Cela instruira ceux qui croient encoreque la presse est libre et non soumise à des "maîtres occultes".

bloc de béton au pied, et divers projectiles dans latête… Mais, pas de quoi intéresser les média!Pensez donc, des broutilles que tout cela!

Des protagonistes survivants (c’est bien le cas dele dire!), et qui seront jugés en 1997 pour cettecarpentrasserie, on trouve un certain Olivier Fimbry.Ce dernier, en 1990, au moment de la profanation,était "militaire appelé"! Caserné en Allemagne. Àcette époque, Fimbry était dûment fiché comme"activiste néonazi"! Ce qui ne l’empêchait nullementd’accomplir son service militaire…

Mais, encore plus étonnant, à l’issue de sonservice national, Fimbry devient militaire de carrière,qui plus est: sous-officier instructeur. Ce qui aurait étérigoureusement impossible sans "certainesprotections"! Jamais l’armée n’aurait accepté dansses rangs un tel individu fiché de la sorte (son nométait apparu lors de l’enquête initiale sur lacarpentrasserie...), s’il n’avait été qu’un "militantnéonazi"!

Pour un engagement il y a une période deprobation de 3 mois (6 mois pour les engagés quisont encore mineurs), et si durant cette périodel’engagé peut résilier son contrat sur simple décisionde sa part, c’est aussi valable dans l’autre sens.L’armée peut mettre fin à un contrat dans les 3premiers mois sans donner de raison. Chose trèssimple à faire avec Fimbry, car comme il avait déjàaccompli son service national, l’armée n’aurait mêmepas eu à le garder pour qu’il effectue celui-ci.

Alors, on ne me fera pas croire que ce Fimbryn’était pas en "contact" (pour ne pas dire plus...)avec la DPSD!

En outre, il était sous-officier instructeur, ce qui mesemble étrange vu sa personnalité, du moins celleaffichée au Tribunal lors du procès de 1997 (mais ilfaisait peut-être le demeuré!). Car il donnait l’imaged’un simplet, particulièrement benêt, qui ne savaitmême pas ce qu’il y a eu le 8 mai 1945, ni ce qu’estle 14 juillet… Ce qui fait difficilement crédible! Car jeme demande bien comment il a pu passer les testsde sélection pour être sous-officier, étant entenduqu’il faut un "NG" d’au moins 14/20 pour accéder àce rang. Qui plus est, pour être sous-officierinstructeur, il faut avoir soi-même une certaineinstruction!

Alors Fimbry a forcément dû soit passer par uneécole militaire (Saint-Maixent) ; soit être plus que"pistonné" par la DPSD pour se retrouver à ce poste.Il faut bien voir qu’avec le chômage de l’époque,l’armée des années 80 et du début des années 90,regardait un peu qui elle engageait et elle pouvait sepermettre de sélectionner…

Dans la carpentrasserie, tout le monde est biend’accord pour y voir l’implication de la police politique,mais tous regardent du côté des RG. Ce qui est, làaussi, à mon humble avis, une très grosse erreur.Seule la revue Révision et Alain Guionnet ontprécisé qu’il faudrait enquêter du côté de ce Fimbry,militaire assez spécial… Tellement spécial qu’ilpourrait bien être membre d’un service de la mêmetexture!

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Je pourrais citer d’autres exemples que ceux de laSONACOTRA et de Carpentras, ce n’est pas ce quimanque! Dans toutes les affaires médiatisées àoutrance ces dernières années, et utilisées entreautres contre le Front National, l’implication de lapolice politique militaire apparaît!

Tout cela démontre que penser obtenir la révisionde mon procès, c’est se bercer d’illusions! Nousvenons de voir que si l’on commence à "sortir" monaffaire, toutes les autres sont à "ressortir"! Pasuniquement les affaires d’extrême-droite, car, enface, chez nos camarades de la gauche antisioniste,il y a aussi un tas de "cellules de manipulation" quisont actives.

Par ailleurs, certaines personnes, après avoir luun premier tirage du mémoire, m’ont suggéréqu’Arcini aurait pu être manipulé par un groupesioniste opérant au sein du Ministère de l’Intérieur29.

C’est possible. Je n’ai pas à rejeter cettehypothèse. Arcini était un agent, c’est évident, maisde quel service précisément? Il était du Ministère del’Intérieur, mais c’est vague! Et ce n’est pas parcequelqu’un est du Ministère de l’Intérieur qu’il netravaille pas en fait pour les services spéciaux del’armée. Je sais que cela peut sembler étonnant,surtout lorsque l'on connaît la rivalité entre ces deuxservices. Je vais donc démontrer que ce n'est pasparce qu'Arcini était officiellement fonctionnaire duMinistère de l'intérieur qu'il n'était pas, en réalité, unebarbouze de celui de la Défense:

En février/mars 1998, il y a eu une affaire qui adéfrayé la chronique puisqu’elle intervenait, commepar hasard, peu de temps avant les électionsrégionales. Il s’agit de Frédéric Jamet, président-fondateur du syndicat Front National Police, qui futinterpellé, en compagnie d’autres, puis mis en mis enexamen pour des actes relevant pour certains de laCour d’Assises: braquages (pour, semble-t-il, financerdes activités barbouzardes) détention d’armes,d’explosifs, liens avec ce qui furent les GAL, etc, etc,la liste était très longue…

Ce Jamet, au moment de son arrestation, était,officiellement , fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur

29 C'est aussi l'hypothèse qui est développée dans le livre L commeLajoye – Analyse d'un complot d'État (voir bas de page 55 de ce documentpour avoir l'adresse de l'éditeur). Henri de Fersan y écrit qu'Arcini a puêtre sous les ordres de Sarah Ouaknine (qu'il désigne, pour éviter lesprocès, sous le pseudonyme de "Champagne"). Cette fille et sœur derabbin, commissaire aux RG, dirigeait au Ministère de l'Intérieur les"Libertés Publiques", c'est-à-dire en bon français: le service de la censured'État (interdiction de livres, revues, mouvements politiques, etéventuellement actions/provocations pour monter l'opinion contre lespartis nationalistes…). Elle a finalement démissionné (des états d'âme?)de son poste pour devenir juge à l'application des peines à Châteauroux.Elle y est morte peu après (en janvier 1999), renversée en plein jour parun "chauffard" qui n'était pas ivre, dont on connaît le nom et qui, à maconnaissance, n'a jamais été poursuivi pour ce "Crime contrel'Humanité". Cette mort est quand même étrange, car elle fut à peinerelatée par la presse locale (un petit entrefilet qui jouxtait la rubrique"fourre-tout" encore appelée "chiens écrasés"). Or, compte tenu desfonctions qu'avait occupées l'écrabouillée (de ses origines!), cela auraitdû faire un "certain bruit", y compris (surtout!) dans la presse"parisienne". On a semble-t-il ordonné de ne point parler de ce qui semblebien être une "liquidation" de quelqu'un qui en savait trop sur 15 ans debarbouzeries en France, et qui semblait devenue "psychologiquementfragile"…

puisque policier au "prestigieux" OCTRIS (brigadeanti-stupéfiants).

Or, par la suite, il fut découvert que le présidentdu FNP était en réalité un agent des servicesspéciaux de l’armée!

Dès lors, avec cet exemple, nous voyons qu’unfonctionnaire du Ministère de l’Intérieur peut serévéler être, au final, un agent de la DGSE/DPSD. Etforce est de constater qu’Arcini est le clone parfait deJamet!

Que l’on en juge par les similitudes: au momentde son arrestation, Jamet était fonctionnaire duMinistère de l’Intérieur (comme Arcini!) ; chargéd’infiltrer l’extrême-droite (comme Arcini!) ; passé parl’Œuvre Française (comme Arcini!) et non couvertsuite à une mission un peu plus pourrie que lesautres (comme Arcini!).

Je sais en outre que les deux agents se sontcôtoyés. Dans le chapitre 1, à la fin de la section 4,j’ai évoqué ma présence, en octobre 1984, dans uncamp "paramilitaire" (si je puis dire...) qui étaitorganisé en forêt de Fontainebleau. Je m’étais renduà ce rassemblement en compagnie d’Arcini, qui y aretrouvé quelqu’un qu’il connaissait apparemmentbien. Cette personne m’était à l’époque inconnue,mais j’ai pu l’identifier, 13 ans plus tard, grâce à unephoto parue dans National Hebdo, qui consacrait unarticle au FNP: il s’agissait de Frédéric Jamet!

Par conséquent, Arcini/Jamet, Jamet/Arcini, sontinterchangeables. Même si l’un a été plus malin queson collègue, puisque Jamet fut remis en libertécourant 1999 (après plus d’une année de détentionpréventive). Il a visiblement su se garder par deverslui des garanties pour négocier une "libérationprovisoire" en attentant un hypothétique procès quin’aura, sans doute, jamais lieu!

Ce qui me fait croire que le procès ne s’ouvrirajamais, c’est qu’il s’est déroulé quelque chose designificatif et qui démontre la puissance des services:lors de l’arrestation de Jamet, en février/mars 1998, lapresse grand public avait quand même copieusementparlé de ce "policier ripoux", président-fondateur duFNP (mais en se gardant bien de préciser qu’enréalité Jamet était un agent de la DGSE/DPSD,chargé d'infiltrer le FN!). Cette médiatisation allait desoi, puisqu’il fallait bien nuire un peu, juste avant lesélections régionales de mars 1998, à ce qui était àl’époque le FN unifié. Et, ce qui est révélateur, c’estque des personnes ont voulu aller rechercher, à mademande, sur les sites Internet des agences depresse et des journaux qui en avaient parlé àl’époque, les dépêches et articles divers concernantce policier. Mais… de Jamet, il n’y a point, ou plusexactement: il n’y a plus!

Non seulement il a été remis en liberté, mais BigBrother a gommé la tache, car si on consulte lesarchives Internet de la presse de l’époque, il n’y ajamais eu d’"Affaire Jamet"!

Quoi qu’il en soit, partant du fait où Jamet est leclone parfait d’Arcini, bien malin celui qui pourrait direpour quel Ministère, Intérieur ou Défense, travaillaitmon co-accusé! Il était d’un service, c’est évident.Mais est clair qu’il n’était pas du service lui assurant

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une totale impunité puisqu’il s’est retrouvé en tôle ety est encore! A-t-il fait du zèle? A-t-il pris desinitiatives personnelles qu'on ne lui a paspardonnées? A-t-il commis une "bavure" inexcusableen abattant Moussaoui au lieu de Rahmani? Lemystère demeure entier!

Cependant, Arcini était d’un service qui l’a faitbénéficier d’un arrangement. Car après l’attentat dejuin 1987, il s’est fait arrêter, mais il fut relâchécomme l’a précisé la presse locale de décembre1987! Ils l’ont arrêté, mais lui ont "arrangé le coup"en échange d’une aide pour me "faire tomber"!

Ce qui expliquerait, de ce fait, ses menaces defaire des "révélations" qu’il a agitées régulièrement…

En effet, au procès de Caen, la pression a montéde part et d’autre. Ceux qui tenaient Arcini en laissevoulaient bien lui faire comprendre que s’il "faisait lecon", s’il "mangeait le morceau", il allait "morfler"!Pour ce faire, on aurait ressorti ses autres affairespuisque je suis persuadé qu’il en a commis d’autres,et que s’il n’avait pas "joué le jeu", on le jugerait pourtout! Dès lors, il aurait été condamné à au moins 4 à5 fois (si ce n’est plus!) perpétuité avec 30 ans desûreté à chaque fois.

Mais Arcini, loin d’être un idiot, a aussi fait monterla pression de son côté lors du procès de Caen! Àplusieurs reprises il a agité le « je pourrais faire desrévélations » en se mettant à parler de "groupessionistes" avec qui il était en contact, et d’origine deses actions qui prennent leurs sources dans lesattentats commis à Paris en 1986… Qu’est-ce qu’ilvoulait dire par là? Que ces attentats n’ont pas étécommis par ceux qu'on a désigné comme coupables?

Mon co-accusé faisait, sans doute, cela pour bienmontrer à ceux qui le tenaient en laisse que s’ils netenaient pas parole (sur le "petit arrangement"...), ilallait tout déballer! Il a brandi cette menace de"révélations" à plusieurs reprises, de façonrécurrente: dès que cela sentait le roussi pour lui…C’était donnant-donnant: « Verdict clément ou jebalance tout »!

Cependant, il ne peut être exclu qu’Arcini ait été,au final, le dindon de la farce kashère… Il est plusque probable que "l’arrangement" prévoyait, outre unverdict mesuré, une discrète libération une foisl’affaire tassée. Mais il l’attend toujours! Ce quiconfirmerait que, comme l’a si bien dit Pasqua quiétait le ministre de tutelle d’Arcini au moment de cesattentats: « Les promesses n’engagent que ceux quiles reçoivent »!

Dès lors, qu’Arcini ait été manipulé par desgroupes sionistes, c’est fort possible. Il a lui-mêmemanipulé, c’est clair! Puisque pour me "faire tomber",il a fallu qu’il participe activement. Mais lemanipulateur a pu se faire manipuler par plusvicieux…

Et pour éclairer le comportement de mon co-accusé, je signale que, même en prison, il n’estapparemment pas dégoûté du tout de sesmésaventures, puisqu’il continue à servir!

C’est indéniable puisque je peux démontrer qu’ila, depuis son lieu de détention, tenté de piéger des

militants, et cela avec le concours des services qui letiennent toujours!

Ce dont il s’agit est "banal": Arcini a fait parvenirun message à "quelqu’un". Ce document, bel et bienrédigé par celui qui fut mon camarade, disait qu’ilfallait aller récupérer des armes et des explosifs dansune cache clairement mentionnée sur un plan quiétait joint.

Or, ladite cache en question fut vidée le samedi12 décembre 1987, lors de la garde-à-vue (cf.chapitre 9, section 1 de ce mémoire).

Donc, elle ne pouvait plus contenir d’armes etd’explosif après! Sauf… si la police politique en aremis dans le but de servir de gruyère pour attraperquelques souris…

Aucune confusion n’est possible: c’est bien Arciniqui a fait parvenir le message et le plan! Il ne s’agitpas de gens qui se sont fait passer pour lui. Il a étédéterminé de façon irrécusable, qu’il y a eu complicitéactive de sa part dans cette tentative visant à "fairetomber" des militants!

Dans le cas de cette "récupération" d’armes etd’explosif demandée par certains , via Arcini, je peuxprédire ce qui se serait sans doute déroulé:

Soit une fois le matériel récupéré les militants seseraient fait appréhender. Dans ce cas, je suispersuadé que les armes que les services avaientremis dans cette cache sont celles qui ont servi àd’autres actions, idem pour les explosifs (lot identiqueà celui utilisé lors de certains attentats). De ce fait, les"récupérateurs" se seraient fait imputer ces affairescriminelles, puisque qu’interpellés avec l’armementayant servi à les perpétrer.

Soit, c’était plus subtil! Car cette récupérationdevait fournir, à un "commando", le matériel pourpermettre "l’exfiltration" d’Arcini, ainsi que celle d’undroit-commun détenu avec lui. Si cela s’étaitconcrétisé, sans doute que cette libération auraitréussi (certains services auraient tout fait pour lafaciliter!), l’oiseau se serait envolé, mais pas le"commando" (et sans doute le "droit-co") qui, eux,auraient été arrêtés.

Ainsi les services s’en sortaient "avec le culpropre", leur agent était "exfiltré", et en prime ilsfaisaient mettre en taule des militants, et surtout unen particulier qui était visé par ce piège!

Car ce dernier avait bien pour but de faire mettreen prison une personne précise! Heureusement, lesactivistes contactés, par Arcini (et ses complices!)pour constituer le "commando", ont flairé lamanipulation.

Avec cette affaire de récupération, nous avonsquand même bien la preuve, qu’une fois en prison,ou plus exactement: que même incarcéré, l’agent-provocateur Arcini continue (contre quoi? Quelsavantages? Quelles promesses?) a être un zéléserviteur des services! Quelle abnégation de la partde celui qui fut mon compagnon d’armes!

Pour conclure, je vais parler un peu de ce quis'est déroulé durant ma détention. Dans le chapitre9, à la fin de la section 3, j'ai évoqué rapidement lesrecours déposés devant la juridiction administrative.

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Mémoire de Michel Lajoye page 95

Je vais détailler, car c'est lié à mon affaire, et cela àsa place dans ce mémoire.

Ce qui a motivé ces recours administratifs, ce sontdes censures arbitraires sur mon courrier. Desdétournements, pour ne pas dire des vols, decorrespondance. Pour sa défense, notammentdevant la Cour administrative d'Appel de Nancy, leMinistre de la Justice a présenté des "notes" quidatent de 1992. On y apprend ainsi que le directeurde cabinet du Ministre de l'Intérieur a demandé à sonhomologue de la Justice de mettre en place unecensure sur mon courrier. Fichtre! Depuis quand leMinistre de l'Intérieur demande à son directeur decabinet de contacter son alter ego de la Justice pourinterférer sur les conditions de détention d'undétenu? Cela laisserait à penser que mon courrierportait (porte!) atteinte à la sécurité dudit Ministère del'Intérieur (ou de ceux qui lui donnent des ordres…)!Mais qu'est-ce que ces gens ont à cacher? Craignait-on que je ne découvre quelque chose de gênantpour eux ?

Quant aux critères de cette censure politique (ilfaut appeler ça par son nom!), ils ont été transmisverbalement, par téléphone, si l'on en croit lecontenu d'un document produit par la défense duGarde des Sceaux devant la Cour administratived'Appel de Nancy. C'est dire si ces critères sontgênants puisque le Ministère ne voulait pas en laisserde trace écrite. En 1992, on s'est contenté detéléphoner au directeur de la prison d'Ensisheim, oùje suis détenu, pour lui "expliquer" ce qu'il ne devaitpas laisser "passer" dans mon courrier.

Officiellement, cette censure fut demandée pourm'empêcher d'écrire des articles dans diversesrevues. Ce qui n'est pas crédible, car la prisondétournait plus fréquemment ce qui venait del'extérieur que ce que je voulais y envoyer. C'est-à-dire qu'il semble plus que ce qu'on voulait, c'estm'empêcher d'apprendre quelque chose en lerecevant…

Par ailleurs, cette censure renforcée (mon courrierétait contrôlé par la direction même de la prison!), n'aété demandée qu'au second semestre de 1992,alors que je suis en prison depuis 1987 et que j'aitoujours écrit des articles depuis mes lieux dedétention. Certains furent même primés par diverstribunaux, puisque olivier Devalez, directeur despublications qui en publiaient, a été condamné àplusieurs reprises à de la prison ferme. Je n'avais pasété poursuivi à l'époque par le Parquet puisquel'auteur d'un article n'est que le complice. C'est leresponsable juridique de la revue qui est pénalementconsidéré comme auteur principal du délit de presse.

Par conséquent, dès 1989, et encore plus en1990, le Ministère de le Justice savait que j'écrivaisdes articles depuis ma cellule, puisque le MinistèrePublic diligentait des poursuites, et condamnaitrégulièrement à de la prison ferme Olivier Devalez quiles publiait. Ce n'est donc pas ça qui a fait que,subitement en 1992, le directeur du cabinet duMinistre de l'Intérieur a pris la plume pour contacterson confrère de la Justice. Surtout qu'en 1992 je

n'en avais pas plus écrit que lors des précédentesannées!

En revanche, dans divers numéros de la revueL'Empire Invisible parue tout au long de 1992, il yavait des articles qui revenaient sur mon affaire. Pourla première fois, l'hypothèse de la manipulation d'Etatétait avancée publiquement. Ces articles accusaientdes institutions, notamment les Ministères del'Intérieur (tiens, tiens!) et de la Défense,

Et, comme par hasard, c'est peu de temps aprèsces parutions, que le directeur de cabinet du Ministrede l'Intérieur réclama une stricte censure sur moncourrier selon des critères tellement inavouables qu'ilsn'ont pas été transmis par écrit, mais par téléphone…Difficile de ne pas y voir un lien de cause à effet!

Dès lors, il semble bien qu'après la publicationd'articles dans L'Empire Invisible, on ait eu peurque je ne me mette à collecter des renseignements.Et, effectivement, cette censure politique, qui meprivait de la réception d'une grande partie de moncourrier (contenant "certaines informations"…), m'apénalisé. Ce fut une véritable atteinte aux droits de ladéfense, car on m'empêchait de communiquer avec"certaines personnes", et l'on m'interdisait, ni plus nimoins, de recevoir "certaines lettres et documents"!

À cause de cette censure politique, ce n'est qu'en1997 que j'ai pu produire la première édition de cemémoire. Sans les ordres ministériels de détournerune partie de mon courrier, c'est sans doute dès1993 que j'aurais pu produire une première mouturede ce document!

Et encore, si ce mémoire a pu être rédigé, c'estparce Maître Éric Delcroix (qui est mon avocat depuis1995) a "dégagé la voie". C'est lui qui a, en effet,engagé des procédures contre ces censuresarbitraires en assignant le Ministre de la Justice. Celas'est soldé par deux condamnations du Garde desSceaux prononcées par le Tribunal administratif deStrasbourg. La première fut rendue le 20 février 1998(audience du 19 précèdent); la seconde le 15septembre 2000 (audience du 30 juin de la mêmeannée). Dans le premier cas, il me fut octroyé 8000de dédommagement + 5000 francs pour les frais;dans le second 5000 francs pour les frais.

Dès fin 1995, dès 1'ouverture des procédures parMaître Delcroix, les censures avaient quasiment prisfin, car on se méfiait de ce recours qui était instruitpar le Tribunal administratif. Cette pause dans lesdétournements de courrier m'a permis de collecterune bonne partie des renseignements (mais pastous!) dont j'avais besoin pour écrire ce présentmémoire. Mais ça et là, de fin 1995 et début 1998, laprison pratiquait encore 1'arbitraire et retenait deslettres et documents très importants, au risqued'aggraver leur cas compte tenu de la procédureadministrative qui était en cours! C'est la premièrecondamnation du 20 février 1998 (à me verser untotal de 13 000 francs) prononcée contre le Ministrede la Justice qui a mis fin à toutes ces pratiquesarbitraires.

Ce qui veut dire que depuis février 1998 je suis undétenu libre… de faire rechercher des informationssur ce qui a abouti à sa condamnation! Mais pour en

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arriver à ce qui est un droit élémentaire de ladéfense, il a fallu que Maître Delcroix fassecondamner, en personne, le Ministre de la Justice!C'est dire si ce mémoire que vous avez lu contientdes informations qu'on ne voulait pas me voir

découvrir! Pour les obtenir il a fallu livrer une lutteacharnée afin de vaincre une censure politique, miseen place, je le rappelle, par décision ministériellespéciale !

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Voilà pour "l’Affaire Lajoye". Dans ce mémoire, je n’ai fait que relater ce que j’ai commis,ce qui s’est déroulé en parallèle, ce que j’ai vu et entendu au procès de Caen en juin 1990.Je ne prétends pas détenir toute la vérité. Certains pans de cette affaire ont pu m’échapper,d’autres ont pu être mal interprétés.

Mais, sur le fond, il est impossible de balayer tout cela! Les faits parlent d’eux-mêmes!Ces derniers doivent, surtout, avoir des vertus pédagogiques afin de montrer qu’ ils nouslivrent une lutte à mort et qu’ ils nous mènent cette guerre en utilisant tous les moyens!

Version Digitale 2.8 © Michel Lajoye, août 2001Reproduction autorisée et encouragée, revente interdite

Édité et mis en ligne par:

L'Église Mondiale du CréateurP.O. Box 2002USA – East Peoria, IL 61611http://www.creator.orghttp://www.wcotc.com/France

Achevé en avril 2001, à la Maison Centrale d'Ensisheim(Haut-Rhin), dans ma 14ème année de détention…

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La Santé, le 12 octobre 1999à Michel Lajoye

Cher Camarade,

Je viens d'entrer dans ma 50ème année.Peu avant minuit, j'ai regardé sur la chaîne câblée sioniste "Planète", un reportage sur

le "Che" en Bolivie, qui m'a plongé dans une courte rêverie, nostalgique de monadolescence, quand j'achevais de charger, dans l'exemple du "guerrillero heróico", mesbatteries révolutionnaires, lesquelles fonctionnent toujours à fond, renouvelant leur énergiedans l'inépuisable source qui jaillit de l'esprit de chaque vrai militant de la Révolution.

Ta première carte postale (du caricaturiste Konk) était datée du 24 décembre 1997,immédiatement après le verdict programmé des Assises de Paris. S'en est suivi unecorrespondance régulière après ma brève enquête de moralité sur toi, auprès deconnaissances mutuelles.

Je découvre qu'un garçon de 20 ans fut condamné à la perpétuité avec 18 ans desûreté, pour avoir déposé un pétard dans un café maure de Petit-Quevilly, sans avoir fait deblessé, ni causé de dégât.

Or, ce jeune homme termine ses missives avec des sonores "amitiés Nationales-Socialistes".

À priori, il doit être une sorte de "cuir" ivrogne au crâne rasé, tatoué et "piercé",consommateur de substances interdites, mal lavé et mal rasé, sadomasochiste bisexuel,maniaque du fouet, sataniste profanateur de tombes israélites... ouf!

Mais, il était soldat, agent de la Sécurité Militaire en action commandée!Il paraît être un vrai nazi ; à son âge?L'image de feu mon beau-père Otto Kopp m'apparaît, d'après les monologues de sa

fille favorite, la cadette, mon épouse Magdalena, gauchiste allemande aujourd'hui devenuerepentie, qui ne pouvait s'empêcher d'aimer son père, nazi dès ses 16 ans, "Partei Genosse"avant 1933, un des premiers 100 mille (son svastika d'or l'atteste), ancien du "SturmAbteilung" des temps durs, grand blessé au front russe, vétéran des transmissions, qui aterminé en poste au centrale téléphonique d'Ulm, et est sorti indemne de l'occupation ; cethomme doux, chef pâtissier de formation, qui n'aurait fait de mal à personne, chaque soir à la"fermeture" du "Kneipe" de sa propriété dans la banlieue d'Ulm, restait avec ses camaradesdu coin (policiers en ronde nocturne inclus) pour ressasser leurs exploits de jeunesse et lesbons jours de fraternité, avec soirée bien arrosée les 20 avril.

Pour nous, les communistes, le nazisme est l'ennemi, ou plus exactement, il l'était.Mon père a bien caché un client escroqué par un curé indigne, en découvrant que c'était

un Allemand recherché, et lui a fait passer la frontière vers la Colombie avec un garde-du-corps croate et un chien berger allemand.

En 1965 est tombé héroïquement en Saint-Dominique, sous le feu des Yankees, leCapitaine italien Ilio Capozzi, qui fut détaché auprès des nageurs de combat des "Waffen SS"et portait leur tatouage fièrement sous l'aisselle ; réfugié chez le dictateur Trujillo, il fonde,entraîne et commande le corps des hommes-grenouilles, meilleure unité de commandosd'Ibéroamérique. à la tête de ses hommes, il défendit la Révolution Constitutionnaliste,payant de sa vie sa dette de gratitude envers le peuple dominicain, sans renier ses idéaux dejeunesse.

Des anciens "Frei Arab" ont combattu à nos cotés en Jordanie en 1970/71, ils gardaientintacte leur mystique guerrière.

Mes relations avec mon cher camarade disparu François Genoud, appartiennent àl'Histoire, il s'est battu pour les bonnes causes sans renier ses idéaux.

J'ai reçu pendant des années des renseignements des services de police régionale("LKA") d'Allemagne Fédérale, grâce à des anciens des "Waffen SS" qui avaient gardé uneprofonde sympathie pour la Cause Palestinienne, suite à leur compagnonnage d'armes avec

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les fidèles du grand Mufti de Jérusalem, Hajj Amine El Hesseini. Et là je suis tombé sur unobstacle insurmontable: toutes nos tentatives d'établir in situ un système permanent decommunications avec ces vieux militants nationaux-socialistes, ont été infructueuses devantles réactions de quasi-hystérie de nos camarades et sympathisants légaux en Allemagne.Quel gâchis!

La guerre s'est terminée en 1945, et par héritage, j'appartiens au camp des vainqueurs.Je ne suis pas la mode en reniant mes idéaux communistes, je les revendique.Je n'arrive pas à comprendre le volet raciste de l'idéologie nationale-socialiste.Aujourd'hui les peuples d'Ibérie et d'Amérique célèbrent le "Jour de la Race", en

référence à notre métissage amérindien-africain-ibérique, dans chaque anniversaire de ladécouverte de l'Amérique.

Je ne connais qu'une seule race, la race humaine, composée d'ethnies plus ou moinsmélangées.

Je suis internationaliste et "fédayi" palestinien, tout en étant patriote vénézuélien, et jelutte pour que les peuples puissent sublimer leurs cultures, espoirs et ambitions, dans desstructures nationales historiques, égales en droits et en devoirs, devant Dieu et les hommes.

J'ai vécu en Algérie, et j'aime son peuple fier et courageux. Je comprends la déchiruredes mal-nommées rapatriés, puisque la plupart n'ont pas de liens ethniques avec la France ;mais je dois te rappeler l'évidence que la Guerre d'Algérie est finie depuis 1962, et ses cruelscombats en kaléidoscope, doivent servir à nourrir la réflexion des anciens combattants quimilitent encore pour une cause.

Tu t'étais trompé de guerre, ce qui a servi à te manipuler par les ennemis de la France,qui sévissent dans les services plus ou moins spéciaux (foi de l'affaire de la rue Toullier), etdans tout l'appareil d'État et du pouvoir réel.

Un phénomène similaire afflige la gauche révolutionnaire, de manière moins encadréeinstitutionnellement.

Nos erreurs sont excusables seulement si elles servent à corriger nos actions futures.

Je disais souvent aux miens qu'il nous faut arrêter de refaire en boucle les batailles deMadrid et de Stalingrad, pour nous concentrer sur celles d'aujourd'hui et de demain.L'homme a besoin de mythes fondateurs pour se structurer, encore plus s'ils ont des baseshistoriques récentes.

Préservons volontiers notre folklore cérémonial, nos traditions ancestrales dans cequ'elles ont d'héroïques et de spirituelles, et ces dates de souvenir qui nous font vibrer dutréfonds de notre âme. Gardons nos spécificités et idiosyncrasies, mais unissons nous pourle bien commun, contre l'ennemi de l'humanité, celui d'aujourd'hui et de toujours:l'impérialisme yankee, le sionisme et leurs séides.

Ouvrons nos esprits à ceux qui doivent se trouver du même côté du front que nous.Ton erreur et ton sacrifice ne doivent pas être en vain, tu dois sortir libre, en homme

plus sage et en militant plus décidé, sans sectarisme autodestructeur.

J'entre dans l'âge de la sagesse, avec cette lettre politiquement incorrecte selon lescanons de la mode, mais pour moi de grande humilité symbolique, parce qu'elle n'est pasadressée à un grand de ce monde (et j'en connais...), mais à un jeune et méconnuprisonnier, voué aux gémonies nazies ; un combat par avance perdu... non! Sauf si la Franceest, elle, irrémédiablement perdue.

Le peuple français est loin d'avoir épuisé ses réserves humaines, je suis optimiste, ilmarchera triomphant à côté d'autres grands peuples, pour le bien de l'humanité toute entière,c'est son destin historique ; c'est le tien, c'est le nôtre, vers la Liberté.

Amitiés révolutionnaires,Carlos