Michel OnfrayMichel OnfrayMichel OnfrayMichel Onfray

LLAA TTYYRRAANNNNIIEE DDEEMMOOCCRRAATTIIQQUUEE

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Pour les besoins dun travail en cours, je

reprends mes fiches sur Platon. Relisant mes notes

concernant La Rpublique, je tombe sur une critique

de la dmocratie qui me stupfie par sa vrit.

La dmocratie, cest sa nature, savre le

rgime le plus mme de donner ses chances

lexercice de la libert. Mais, anthropologie oblige, la

pente naturelle des hommes consiste vouloir

toujours plus de libert. Chacun veut pouvoir faire

ce quil veut, quand il veut, comme il veut, sans se

soucier dautrui. Lautorit passe pour une

contrainte inadmissible. Elle est vilipende, dteste,

dtruite. Si un chef nest pas assez docile aux

revendications de son peuple, il passe pour un

tyran, un dictateur, aujourdhui on dirait: un

fasciste, un stalinien

Platon crit quune cit de ce genre loue et

honore, dans le priv comme en public, les

gouvernants qui ont lair de gouverns et les

gouverns qui prennent lair de gouvernants

(562,d). Lactualit lui donne raison: Giscard se

faisant photographier torse nu et velu dans une

piscine, jouant au football avec une culotte

manches courtes, Sarkozy film lui aussi dans ce

genre de culotte devenue bouffante pour son format,

suant, transpirant, tremp dhumeurs montres

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comme les saintes huiles, Hollande se voulant un

prsident normal et photographi en short et polo

sur la plage ou arborant un sourire bat sous une

pluie battante pour montrer quil mouille sous

laverse comme chacun de ses lecteurs, nos

prsidents veulent montrer quils sont comme tout le

monde poilus, sportifs, en sueur, mouills par la

pluie

De mme les exemples de gouverns qui

prennent lair de gouvernants ne manquent pas: les

joueurs de foot dcrbrs, les comdiens incultes,

les acteurs narcissiques, les vedettes de tlvision,

les chanteurs de ritournelles deux neurones ou les

stars du rap se comportent dans la vie comme sils

taient des princes, des rois, des empereurs qui

tout est d.

Il en va de mme avec le quidam qui se

comporte avec ses semblables comme un Roi dans

son royaume: malpoli avec son tlphone portable

quand il nous inflige ses conversations indigentes,

fonant dans le troupeau pour sasseoir la

meilleure place en crasant un ancien ou en

pitinant une femme enceinte, passant devant tout

le monde dans une file dattente, se bfrant dune

poigne de cerises ou dun abricot pour goter avant

dacheter sans acheter, les exemples ne manquent

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pas.

Le rsultat, crit Platon, est que le pre

saccoutume traiter son fils comme son gal et

redouter ses enfants, que le fils sgale son pre et

na ni respect ni crainte pour ses parents, parce

quil veut tre libre, que le mtque devient lgal du

citoyen, le citoyen du mtque, et ltranger

pareillement (562 e - 563 a). Parce que le fils ne

craint plus le pre ni llve son matre, cest le pre

qui craint son fils et le matre son lve. La peur qui

existait de linfrieur au suprieur ne disparait pas,

elle sinverse: le suprieur se met alors craindre

linfrieur. Mais la crainte na pas disparu. Ainsi

lexcs de libert doit aboutir un excs de

servitude, et dans lindividu et dans lEtat (564 a).

La flatterie devient la rgle la dmagogie en est la

forme contemporaine. Petit petit, force de

dmocratie, le dmocrate fait le lit du tyran.

Impressionnant de vrit

La chronique mensuelle de Michel Onfray

No 112 Septembre 2014

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