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Migration : Garantir l’accès, la dignité, le respect de la diversité et l’intégration sociale Document de référence www.ifrc.org Sauver des vies, changer les mentalités.

Migration : Garantir l’accès, la dignité, le respect de la ......avec les communautés migrantes et avec les communautés d’accueil pour promouvoir le respect de la diversité,

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  • Migration : Garantir l’accès, la dignité, le respect de la diversité et l’intégration socialeDocument de référence

    www.ifrc.orgSauver des vies, changer les mentalités.

  • Auteurs : Susan Martin et Hamutal Bernstein, Université de Georgetown

    Le Secrétariat de la Fédération internationale a demandé cette étude indépendante afin de disposer d’une analyse de référence qui permettra d’élaborer une résolution sur la migration lors de la Conférence internationale de 2011. Les opinions exprimées dans ce document sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement les positions institutionnelles des composantes du Mouvement. Ce document sera transmis aux membres du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et aux États afin qu’ils comprennent mieux ce qui est en jeu, mais cela ne signifie pas que les personnes intéressées l’approuvent.

    © Fédération internationale des Sociétés de la Croix- Rouge et du Croissant-Rouge, Genève, 2011.

    La présente publication peut être photocopiée en partie ou dans sa totalité à condition que la source soit indiquée. La Fédération internationale apprécierait d’être informée de toute utilisation faite de ce document. Les demandes de reproduction à des fins commerciales doivent être adressées à la Fédération internationale, à l’adresse suivante: [email protected].

    Case postale 372 CH-1211 Genève 19 Suisse Téléphone: +41 22730 4222 Télécopie: +41 22733 0395 Courriel: [email protected] Site Internet: www.ifrc.org

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    Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge

    Migration : Garantir l’accès, la dignité, le respect de la diversité et l’intégration sociale Document de référence

    Contents

    Objet de ce document de référence 5

    Activités des Sociétés nationales 8

    Défis et perspectives 16Accès des Sociétés nationales aux migrants vulnérables 17

    Insuffisances dans l’assistance et la protection fournies aux migrants 19

    Discrimination, exclusion et violence 30

    Partenariats conclus pour conduire les activités et surmonter les obstacles 34

    Conclusion 38

    Annexe 1. Évolution des politiques du Mouvement relatives à la migration internationale 41

    Annexe 2. Causes, tendances et impacts de la migration internationale touchant au travail du Mouvement 43

    Nature de la migration 44

    Tendances futures de la migration internationale 47

    Impacts de la migration 52

    Annexe 3. Enquête sur les activités des Sociétés nationales 59

  • 1

    5

    Ce rapport se concentre sur les tendances et les défis actuels des activités relatives à la migration et en particulier sur les besoins et les préoccupations que connaîtront les migrants les plus vulnérables, quel que soit leur statut juridique, ces prochaines décennies.

    (Pour plus d’informations sur les précédentes discussions du Mouvement et les faits nouveaux en matière de migration internationale, voir l’annexe 1.)

    La migration internationale est un phénomène vaste et grandissant qui touche presque tous les pays, qu’il s’agisse de pays d’origine, de transit ou de destina-tion. De nombreux migrants partent de leur plein gré, en quête de perspectives économiques et de meilleures conditions de vie à l’étranger. D’autres sont obligés de fuir de chez eux en raison d’un conflit, d’une répression, de persécu-tions, d’une catastrophe naturelle, de la dégradation de l’environnement, de la pauvreté et d’une gestion déficiente des affaires publiques. Trop souvent, les migrants font face à de grands dangers au cours de leur voyage, connaissant l’horreur du banditisme, de la piraterie et des viols, trouvant même parfois la mort en haute mer, dans les déserts, dans les montagnes ou dans d’autres environnements hostiles. L’exploitation et les abus ne sont pas rares durant le voyage et à leur arrivée à destination.

    Objet de ce document de référence

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    IFRC

    Deux jeunes garçons jouent dans la zone familiale du camp de transit du Croissant-Rouge tunisien et de la Fédération internationale, près de la frontière tuniso-libyenne, en attendant de rentrer au Tchad.

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  • Privés de leurs systèmes traditionnels de soutien, les migrants font face à des problèmes socio-économiques et juridiques importants. Il arrive qu’ils perdent tout contact avec leur famille et leur communauté, qu’ils soient victimes de trafic ou de traite d’êtres humains, ou soient exploités dans des emplois informels. Dans le cadre du processus de migration, ils peuvent être détenus ou privés de liberté, sans possibilités de recours juridique. Ils doivent souvent surmonter des défis tels que les barrières culturelles et linguistiques, la discrimination et l’exclusion, voire la violence. Parmi les migrants, les femmes, les enfants et les mineurs non accompagnés peuvent être par-ticulièrement vulnérables. Plusieurs facteurs (par exemple conflits armés et violence généralisée, criminalité organisée – notamment trafic et traite d’êtres humains –, renforcement des con-trôles aux frontières, politiques sécuritaires, etc.) exacerbent la vulnérabilité des migrants. Ceux-ci sont directement touchés par diverses situations dangereuses au cours du processus migratoire, notamment le retour forcé potentiel vers leur pays d’origine ou un pays de transit. Pour une

    étude plus détaillée des causes, des tendances et des conséquences de la migration internationale, voir l’annexe 2.

    Les migrants qui se trouvent dans cette position vulnérable sont au cen-tre de l’attention du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Les Principes fondamentaux d’humanité et d’impartialité du Mouvement exigent de s’occuper des personnes vulnérables de la société. Du fait de son engagement à l’égard de l’humanité, le Mouvement « tend à protéger

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    « Ensemble pour l’humanité »

    En 2007, la Déclaration « Ensemble pour l’humanité » admettait que la migration était un défi humanitaire global : « Nous sommes particulièrement préoccupés par le fait que les migrants, quel que soit leur statut, vivent parfois en marge des systèmes sanitaires, sociaux et juridiques conventionnels, et que, pour diverses raisons, ils peuvent ne pas avoir accès aux moyens qui garantissent le respect de leurs droits fondamentaux »1.

    Par conséquent, la XXXe Conférence internationale demandait de « renforcer la coopération internationale à tous les niveaux pour répondre aux préoccupations humanitaires causées par la migration internationale ».

    Énumérant plusieurs sujets de préoccupation spécifiques, la résolution de la Conférence soulignait encore le « rôle du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge » et, en conclusion, reconnaissait qu’il appartenait en particulier aux Sociétés nationales de « fournir une assistance humanitaire aux migrants vulnérables, quel que soit leur statut juridique ».

    1 Déclaration « Ensemble pour l’humanité », XXXe Conférence internationale, Genève, Suisse, novembre 2007.

    Source : Division de la Population des Nations Unies

    Nombre de migrants internationaux

    0

    50

    100

    150

    200

    250

    1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010

    (en Millions)

  • la vie et la santé ainsi qu’à faire respecter la personne humaine »1. Dans l’esprit d’impartialité, le Mouvement « ne fait aucune distinction de nationalité, de race, de religion, de condition sociale et d’appartenance politique »2. Sur cette base, le Mouvement joue un rôle important dans la fourniture de protection et d’assistance aux migrants, car ses composantes travaillent tout le long des voies migratoires, dans les pays d’origine, de transit et de destination. Guidé uniquement par les besoins des migrants, quel que soit leur statut juridique, le Mouvement est résolu à alléger leurs souffrances. Les Sociétés nationales mènent une vaste gamme d’activités d’assistance et de protection humanitaires afin d’aider les migrants en grand danger. Dans le cadre de leurs activités visant à répondre aux besoins des migrants, elles travaillent avec les communautés migrantes et avec les communautés d’accueil pour promouvoir le respect de la diversité, la non-violence et l’inclusion sociale. De nombreuses activités découlent du rôle d’auxiliaires des pouvoirs publics des Sociétés nationales, comme l’a relevé la résolution du Conseil des Délégués de 2007 : « en agissant en leur qualité d’auxiliaires, les Sociétés nationales seront en mesure de fonder leurs services strictement sur la vulnérabilité et les besoins humanitaires et de conserver en tout temps leurs indépendance et leur impartialité »3 sans avoir à participer aux débats sur les aspects poli-tiques, économiques et de sécurité de la migration.

    La présente étude complète le document de référence « Migration : garantir l’accès, la dignité, le respect de la diversité et l’intégration sociale », produit pour la XXXIe Conférence internationale qui aura lieu en novembre 2011. Ils visent ensemble à définir les défis qui empêchent le Mouvement de remplir avec efficacité sa mission humanitaire à l’égard des migrants vulnérables. Le présent document décrit tout d’abord les activités actuelles de protection et d’assistance humanitaires des Sociétés nationales, qui sont nombreuses et variées, mais dont l’approche n’est pas toujours globale. Il s’intéresse ensuite aux défis que rencontre le Mouvement en répondant aux besoins en assis-tance et en protection humanitaires des migrants, en se concentrant sur les politiques extérieures et sur les contraintes internes. Puis le document étudie les partenariats que les Sociétés nationales ont conclus pour conduire leurs activités relatives à la migration. Enfin, il conclut par des questions à examiner lors de la XXXIe Conférence internationale en novembre 2011.

    1 Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Les 7 Principes, Humanité, disponible sur : http://www.ifrc.org/fr/vision-et-mission/vision-et-mission/les-7-principes----les-7-principes/humanity/.

    2 Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Les 7 Principes, Impartialité, disponible sur : http://www.ifrc.org/fr/vision-et-mission/vision-et-mission/les-7-principes----les-7-principes/impartiality/.

    3 Conseil des Délégués du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Genève, Suisse, 23-24 novembre 2007, résolution 5 : Migration internationale.

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    http://www.ifrc.org/fr/vision-et-mission/vision-et-mission/les-7-principes----les-7-principes/humanity/http://www.ifrc.org/fr/vision-et-mission/vision-et-mission/les-7-principes----les-7-principes/humanity/http://www.ifrc.org/fr/vision-et-mission/vision-et-mission/les-7-principes----les-7-principes/impartiality/http://www.ifrc.org/fr/vision-et-mission/vision-et-mission/les-7-principes----les-7-principes/impartiality/

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    Pour élaborer cette analyse du rôle que jouent les Sociétés nationales dans la réponse aux besoins des migrants vulnérables, une enquête a été menée en juin 2011 auprès des Sociétés nationales afin de recueillir des informations sur les programmes destinés aux populations migrantes et sur les obstacles s’opposant à un plus grand engagement. Les résultats de l’enquête, qui com-prennent les réponses de 87 Sociétés nationales (voir l’annexe 3), ont révélé un intérêt général pour la question de la migration, mais aussi l’existence de nombreux défis et obstacles qui entravent l’accès et les programmes1.

    Les Sociétés nationales devaient répondre à cinq questions clés :

    1. La Société nationale a-t-elle accès aux migrants dans son pays, quel que soit leur statut juridique ? En cas de réponse négative, quels sont les principaux obstacles auxquels elle se heurte ?

    2. La Société nationale fournit-elle des services humanitaires et de pro-tection aux migrants dans votre pays ? En cas de réponse positive,

    1 Les Sociétés nationales étaient invitées à soumettre leurs réponses et des documents supplémentaires soit en ligne, soit par courrier électronique. Le questionnaire était disponible en anglais, en français, en espagnol et en arabe. Voir les annexes pour un aperçu des réponses et la liste des Sociétés nationales ayant participé. Quelques pays n’ont pas répondu mais ont été inclus dans les comptes rendus sur l’enquête, sur la base d’informations sur leurs programmes tirées d’autres sources, notamment de précédents processus de cartographie conduits par le CICR.

    Activités des Sociétés nationales

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    Des volontaires de l’équipe de secours du Croissant-Rouge tunisien se

    préparent à nettoyer une partie du camp et des tentes après que certains migrants ont quitté le camp de transit

    pour rentrer dans leur pays.

  • veuillez établir une liste de tous les services humanitaires et de pro-tection fournis aux migrants.

    3. La Société nationale a-t-elle établi des partenariats avec d’autres organ-isations (gouvernement, organisations non gouvernementales, associa-tions de migrants ou autres) pour renforcer les services humanitaires et de protection fournis aux migrants ? En cas de réponse positive, veuillez donner une liste représentative des partenaires.

    4. La Société nationale a-t-elle procédé à un examen des politiques de son pays en matière de contrôles frontaliers pour déterminer si elles contien-nent des garanties suffisantes pour préserver la sécurité, le bien-être, la dignité et au besoin la protection des migrants ? En cas de réponse affirmative, quelles ont été les principales conclusions de cet examen ?

    5. La Société nationale a-t-elle entrepris des activités spécifiques pour combattre la xénophobie et la stigmatisation des migrants ? En cas de réponse affirmative, veuillez donner des exemples de ces activités.

    La Politique de la Fédération internationale relative à la migration souligne que les Sociétés nationales devraient déployer des efforts soutenus pour veiller à ce que les migrants aient accès à l’assistance humanitaire, aux services essentiels et à un appui juridique. Elles devraient en outre s’employer à obte-nir un accès effectif et inconditionnel à tous les migrants, quel que soit leur statut juridique. La formulation de la Politique précise en outre que l’accès humanitaire ne se limite pas à une assistance matérielle, mais couvre une vaste gamme de préoccupations. Elle établit que le degré d’assistance, de services et de soutien juridique dont peuvent bénéficier les migrants est un critère clé pour évaluer leur vulnérabilité.

    L’immense majorité des Sociétés nationales fournissent aux migrants des services humani-taires d’une forme ou d’une autre, mais nombre d’entre elles incluent si nécessaire les migrants dans leurs programmes généraux de soutien humanitaire, plutôt que d’élaborer des pro-grammes destinés spécifiquement aux migrants. Les services humanitaires ciblent les migrants quel que soit leur statut et à toutes les étapes du processus de migration – demandeurs d’asile et migrants arrivés par bateau dans les centres d’accueil, personnes qui rentrent dans leur pays, avant et après leur retour, réfugiés réinstallés, migrants sans papiers en détresse, mineurs non accompagnés et séparés de leur famille, victimes de catastrophes, victimes de trafic, etc. L’aide va de la réponse d’urgence aux besoins essentiels (vivres, abris, articles non ali-mentaires) aux services de santé et de santé mentale, ainsi qu’au soutien et aux conseils en matière de retour volontaire et de réinsertion, et aux conseils et orientations d’ordre juridique. Un autre programme clé est le rétablissement des liens familiaux, qui aide les personnes déplacées à renouer des liens avec les membres de leur famille.

    Les Sociétés nationales font face à des mouvements de population internes et internationaux, provoqués par des catastrophes environnementales et des conflits internes ou des situations instables, comme les Sociétés nationales du Burkina Faso, du Ghana, de Guinée et du Mali, qui ont récemment aidé les Ivoiriens qui fuyaient au Libéria. La Fédération internationale a préparé des

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    IFRC

    Volontaire de la Croix-Rouge bolivienne

    Services humanitaires fournis par les Sociétés nationales :•assistance humanitaire (vivres, hébergement, articles non

    alimentaires)•services de santé et de santé mentale (services médicaux directs,

    médicaments, conseils et orientation, soutien psychosocial)

    Bénéficiaires :•demandeurs d’asile et migrants arrivés par bateau (centres d’accueil)•personnes rentrées chez elles• réfugiés réinstallés•mineurs non accompagnés et séparés de leur famille•victimes de catastrophes•victimes de trafic

    Source : Enquête auprès des Sociétés nationales

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  • stocks de secours d’urgence et conduit des activités d’approvisionnement en eau et d’assainissement en réhabilitant et en construisant des points d’eau et des latrines. Les volontaires ont en outre suivi une formation pour pouvoir mener des séances de promotion de l’hygiène et d’éducation sanitaire dans les communautés d’accueil au Libéria.

    La Société de la Croix-Rouge colombienne fournit également une assistance humanitaire et une aide à la réintégration aux réfugiés et aux personnes déplacées, tout comme la Croix-Rouge croate, qui mène depuis l’an 2000 un programme de prise un charge des personnes rentrées chez elles après la signature de l’Accord de Dayton. Ses activités consistent à fournir une assis-tance humanitaire et des services communautaires aux personnes vulnérables qui rentrent en Croatie durant leur processus de réintégration. Le projet est centré sur la création de conditions de base propices à un retour durable et sur le renforcement des capacités des communautés locales de réintégrer les familles les plus vulnérables.

    Dans les pays de transit, les Sociétés nationales accueillent les migrants vul-nérables et répondent à leurs besoins humanitaires à court terme, tout en les informant des conditions dans les États d’accueil et de leurs droits juridiques en matière de protection internationale et autres avantages. Malte, par exem-ple, se trouve à un carrefour majeur pour les migrants d’Afrique sub-sahari-enne en quête de sécurité et d’une vie meilleure en Union européenne (UE). À Malte, la Société nationale organise des cours d’anglais pour les demandeurs d’asile et les aide à accéder aux services et à trouver un emploi. Au Belize, la Société nationale est activement intervenue pour protéger les migrants vul-nérables en détention. Avec l’aide du HCR, elle a défendu les droits en matière de protection internationale d’un groupe de familles cubaines retenues par les forces de police du Belize en se rendant dans le camp des forces de défense où elles étaient détenues et en veillant à ce que les migrants bénéficient de conditions adéquates en matière de soins médicaux, de vivres, d’eau et de contact avec leur famille. La Croix-Rouge mexicaine, avec le soutien du CICR,

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    Société nationale en évidenceSociétés du Croissant-Rouge d’Afrique du Nord

    Les Sociétés nationales d’Afrique du Nord sont déterminées à améliorer, par le biais de leurs services sociaux, de leur soutien aux opérations et de leur sensibilisation, les conditions de vie des migrants, où qu’ils se trouvent dans le processus de migration.

    Les activités visant à améliorer et à protéger la vie des migrants internationaux, ainsi que des migrants refoulés ou en transit, et ceux que la migration en Afrique du Nord a rendus vulnérables, comprennent :• la sensibilisation à la question

    de la migration afin de créer un environnement plus sûr sur la base des principes d’humanité et d’impartialité, et de valeurs humanitaires telles que la tolérance, la diversité, le respect et la non-discrimination ;

    • le soutien par le biais de programmes communautaires appuyant une réponse ciblée aux besoins des migrants (accès aux informations essentielles, santé, soutien),

    • la sensibilisation à la protection et à l’intégration des personnes les plus vulnérables, y compris les migrants.

    Source : Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, Tendances mondiales 2010.

    Nombre de réfugiés parpays d’asile

    0 500 000 1 000 000 1 500 000 2 000 000

    Royaume-Uni

    Etats-Unis d’Amérique

    Chine

    Tchad

    Kenya

    Jordanie

    Allemagne

    Rép. Arabe de Syrie

    Rép. Islamique d’Iran

    Pakistan

  • prête également une assistance active aux migrants dans les zones frontalières et à ceux qui se blessent au cours du processus de migration, notamment en fournissant des services et des conseils médicaux par le biais de dispensaires mobiles. La Croix-Rouge du Guatemala gère un projet de dispensaire semblable, aussi avec l’appui du CICR, à la frontière mexicaine. Le CICR coordonne en outre la « cadena humanitaria » (chaîne humanitaire), un service d’ambulances, avec les Sociétés nationales de la région, pour porter assistance aux migrants malades ou blessés en détresse à la frontière. Le CICR soutient en outre un projet pour les migrants amputés en fournissant des matières premières et des compétences spécialisées pour les orthoprothésistes. À Thiaroye-sur-Mer, près de Dakar, au Sénégal, il aide les familles des migrants portés disparus alors qu’ils tentaient de rejoindre l’Europe, à faire face aux conséquences de ces disparitions. Il les aide à reconstruire leur vie et à obtenir des certificats de décès pour leurs proches, et collabore avec les Sociétés nationales d’Afrique du Nord pour rechercher les migrants portés disparus.

    Dans les pays de destination, de nombreux programmes visent à prêter assis-tance aux migrants et aux réfugiés à leur arrivée, souvent en partenariat avec les gouvernements nationaux. Les Sociétés nationales européennes ont conclu des accords avec les gouvernements nationaux pour administrer des services d’accueil et/ou de réinstallation pour les demandeurs d’asile, notamment au Danemark, en Belgique, en Autriche et en Islande.

    Depuis plus de 10 ans, la Croix-Rouge autrichienne administre ACCORD, le seul service de recherches et d’informations sur l’asile et les pays d’origine du Mouvement. Le but de cette activité est de fournir à toutes les parties à la procédure d’asile des informations objectives, pertinentes, actuelles et indépendantes sur les pays d’origine des demandeurs d’asile, améliorant ainsi la qualité et l’efficacité de la procédure et des décisions en matière d’asile. En plus de répondre à des demandes individuelles des services d’asile, des demandeurs d’asile, de leurs représentants et d’ONG, ACCORD gère aussi www.ecoi.net, une plate-forme Internet qui contient actuellement des informations détaillées sur plus de 160 pays d’origine.

    Certaines Sociétés nationales notamment en Espagne, en Suède et en Suisse, aident en outre les migrants vulnérables à rentrer dans leur pays, en fournis-sant une aide au voyage, des consultations et des conseils et/ou en assurant un suivi dans le pays de retour, parfois en partenariat avec les Sociétés natio-nales qui y travaillent.

    Parfois, l’assistance est temporaire, répondant à un afflux soudain de migrants, comme le soutien de la Croix-Rouge de Roumanie à 38 réfugiés birmans arrivés de Malaisie, alors que d’autres Sociétés nationales ont mis en place des projets à long terme et noué des liens forts avec les gou-vernements nationaux en tant que fournisseurs auxiliaires de services essentiels.

    Une activité qui couvre la totalité du processus migratoire est le rétablissement des liens famil-iaux (RLF). La Stratégie RLF pour le Mouvement de 2007 réitère l’engagement des composantes du Mouvement à mener des activités de RLF chaque fois et aussi longtemps qu’il le faut, afin d’aider ceux qui sont sans nouvelles de leurs proches ou séparés de leur famille par suite de situa-tions spécifiques, telles que les mouvements de

    11

    La Croix-Rouge du Kenya travaille dans la communauté d’accueil à l’intérieur et aux alentours de Dadab, une zone où les réfugiés sont plus nombreux que les membres de la communauté locale. Actuellement, le camp abrite 440 000 personnes et 1 200 à 1 600 nouveaux réfugiés arrivent chaque jour. Le CICR et la Croix-Rouge du Kenya gèrent un service de rétablissement des liens familiaux (service de recherches) dans les camps de Dadab. De nombreux réfugiés perdent tout contact avec leur famille durant leur déplacement.

    Les activités de rétablissement des liens familiaux liées à la migration comprennent :• le maintien et le rétablissement des liens entre les membres d’une

    famille (appels téléphoniques, messages Croix-Rouge, accès Internet) ;• la recherche de proches ;• la facilitation du regroupement familial ;• l’émission de documents de voyage ;• la facilitation de la gestion adéquate des dépouilles mortelles des migrants ;• l’identification des migrants décédés en route.

    Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge

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    http://www.ecoi.nethttp://www.ecoi.net

  • population, notamment les migrations internationales. La nécessité d’adopter une approche plus uniforme et systématique des activités de RLF liées à la migration dans les pays d’origine, de transit et de destination a poussé le CICR à élaborer de nouvelles lignes directrices en la matière (Lignes directrices rela-tives à la fourniture de services de rétablissement des liens familiaux aux personnes séparées par suite de migration, 2010).

    Un exemple récent a démontré la valeur humanitaire des recherches. Un bateau contenant un groupe de migrants clandestins a chaviré en traversant la rivière Tisa, sur la frontière serbo-hongroise. Plusieurs corps ont été retrou-vés, mais certains des passagers étaient toujours portés disparus. Peu après, les proches d’un des migrants portés disparus ont demandé à la Croix-Rouge néerlandaise de les aider à faire la lumière sur son sort. Avec l’assistance de la Croix-Rouge hongroise et de la Croix-Rouge de Serbie, la Croix-Rouge née-rlandaise a réussi à localiser le migrant et a communiqué ces informations à sa famille aux Pays-Bas.

    En avril 2009, plusieurs migrants du Bangladesh, espérant se rendre en Thaïlande en quête d’une vie meilleure, ont été retrouvés dans de petites embarcations à la dérive dans le Golfe du Bengale. La marine indienne les a emmenés jusqu’aux Îles Andaman, en Inde. Durant la longue période passée en mer, ils n’avaient pas pu communiquer avec leur famille restée au Bangladesh. Le Croissant-Rouge du Bangladesh a recueilli des messages Croix-Rouge auprès des familles des migrants, et les a transmis à la Croix-Rouge de l’Inde, qui, avec le CICR, a réussi à voir les migrants et leur a distribué les messages. Avec l’assistance du Réseau des liens familiaux, les familles restées au pays ont pu envoyer des documents officiels, notamment des copies des cartes d’identité, et des certificats de naissance et de citoyenneté.

    L’utilité du Réseau des liens familiaux du Mouvement a été clairement prou-vée dès le début de la crise libyenne en 2011, lorsque des dizaines de mil-liers d’étrangers, principalement des travailleurs migrants et des migrants en

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    Melania Tumaini et Helena Ntamakiriro, avec son fils Niyonyishu Ezekiel, sont réunies à Melbourne, en Australie. Les deux sœurs ne s’étaient plus revues depuis qu’elles avaient été séparées au cours de la violente guerre civile qui a déchiré le Burundi en 1993. Melania a passé 11 années solitaires dans un camp de réfugiés en Tanzanie, avant de migrer en Australie en 2005. Grâce aux services de recherches de la Croix-Rouge, Melania a récemment retrouvé sa mère, trois frères et deux sœurs, qui vivaient dans un autre camp de réfugiés en Tanzanie.

  • situation irrégulière, ont fui la violence et le conflit. Des services de RLF ont été mis en place pour aider les migrants à rétablir et à maintenir le contact avec leur famille. Souvent, les services de RLF étaient combinés avec d’autres services humanitaires offerts aux migrants, comme la gestion des camps, les services de santé, le transport, les interventions de sécurité alimentaire, et les activités d’approvisionnement en eau et d’assainissement. Les Sociétés nationales de Tunisie, d’Égypte, d’Algérie, du Tchad et du Niger et le CICR ont permis aux personnes arrivant à la frontière de passer plus de 120 000 appels téléphoniques.

    Dans plusieurs pays d’origine (Philippines, Indonésie, Guinée, Gambie, Turquie, etc.), les Sociétés nationales et les délégations du CICR offrent des services semblables, accueillant les migrants renvoyés chez eux par leurs autorités ou par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Par exemple, en mars 2011, le Croissant-Rouge du Bangladesh, avec le soutien du CICR, a mis en place un centre de services comprenant des équipes médicales et de RLF à l’aéroport international de Dhaka, pour les Bengalis rentrant de Libye. Avec l’aide de volontaires, ce centre de services a fourni des services médicaux/d’ambulances à quelque 1 700 personnes rentrées au pays, permis à plus de 12 500 de ces personnes de passer des appels en leur fournissant des téléphones portables, et a retrouvé 12 personnes suite à des demandes de recherches déposées par des familles au Bangladesh.

    En assurant une présence à la frontière libyenne, le CICR et la Société du Croissant-Rouge égyptien ont aidé les missions consulaires à délivrer des documents de voyage pour 3 225 personnes, et le CICR a lui-même issu des documents de voyage pour 27 personnes. En réaction à la crise, la Société de la Croix-Rouge de Malte a intensifié ses services de recherches pour les migrants arrivant sur l’île. La Croix-Rouge italienne a commencé à offrir des services de RLF à Lampedusa et à Crotone.

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    Ras Jedir, Tunisie. 4 Mars 2011. Le personnel du CICR aide les réfugiés du camp à contacter leur famille avec des téléphones cellulaires.

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  • Dans certains cas, le RLF fait le lien avec d’autres activités d’assistance et de protection destinées aux migrants. Par exemple, la Croix-Rouge britannique a signé un protocole d’accord avec l’Agence britannique pour la gestion des frontières, pour offrir des services de RLF dans les centres d’expulsion. Du point de vue de la Croix-Rouge britannique, ce protocole d’accord permet en outre aux responsables de l’Agence britannique pour la gestion des frontières et à la Croix-Rouge britannique d’entretenir un dialogue constructif et confi-dentiel sur des sujets de préoccupation humanitaire touchant des questions politiques spécifiques et générales. Les services de RLF sont en outre combi-nés avec d’autres services humanitaires proposés aux migrants, tels que la gestion de camps, les services de santé, les transports, les interventions en matière de sécurité alimentaire, et les activités d’approvisionnement en eau et d’assainissement dans les centres d’accueil.

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    Source : Organisation internationale pour les migrations, disponible sur : http://iom.int/jahia/webdav/shared/shared/mainsite/media/docs/reports/IOM-sitrep-MENA.pdf (en anglais).

    Tripoli

    LIBYE

    TUNISIE297 198

    ALGÉRIE13 962

    NIGER80 329

    TCHAD51 190

    SOUDAN2 800

    ÉGYPTE223 135

    Nombre de réfugiéspar pays d’asile

    http://iom.int/jahia/webdav/shared/shared/mainsite/media/docs/reports/IOM-sitrep-MENA.pdfhttp://iom.int/jahia/webdav/shared/shared/mainsite/media/docs/reports/IOM-sitrep-MENA.pdf

  • 15

    En 1990, Isha Munya a fui la Somalie déchirée par la guerre avec son mari et cinq enfants. Après une séparation déchirante, elle a laissé Faduma, sa fille aînée, en Somalie avec sa propre mère, Akrabo. Pendant huit ans, Isha a vécu au Kenya voisin, dans quatre camps de réfugiés différents. En 1998, elle est partie pour l’Australie avec son mari et leurs enfants, afin de commencer une nouvelle vie à Adélaïde, loin du conflit. Cependant, Isha souffrait d’être séparée de sa fille et de sa mère.En 2006, Isha a demandé de l’aide à la section de la Croix-Rouge à Adélaïde, qui a ouvert un dossier pour retrouver sa fille et sa mère. Par l’intermédiaire du réseau mondial de la Croix-Rouge, des personnes du monde entier séparées de leurs proches par la guerre, les conflits ou les catastrophes, peuvent demander au Service international de recherches de la Croix-Rouge d’essayer de retrouver des personnes et de leur faire parvenir des messages.La recherche d’Isha a été fructueuse. Par le biais des services de recherches de la Croix-Rouge, elle a retrouvé sa mère et sa fille et elles ont pu se transmettre d’autres messages. Finalement, en 2009, Faduma a migré en Australie et a retrouvé Isha. « C’était le plus beau jour de ma vie, déclare Isha. C’était tellement émouvant, vous pouviez le sentir dans l’air. J’ai vu Faduma descendre de l’avion. Je ne pouvais pas retenir mes larmes. » Isha continue de communiquer avec sa mère par le biais de la Croix-Rouge et s’accroche à l’espoir de pouvoir la revoir un jour.

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    Bien que de nombreuses Sociétés nationales mènent diverses activités en faveur des migrants vulnérables, peu d’entre elles disposent de programmes globaux pour répondre à tous les besoins humanitaires. Elles rencontrent, tout comme les migrants qu’elles desservent, d’importants obstacles pour mettre en place des programmes d’assistance et de protection qui bénéficient à tous les migrants vulnérables à toutes les étapes du processus de migration. Les sections suivantes sont structurées autour de quatre défis principaux : l’accès des Sociétés nationales aux migrants ; les insuffisances dans la protection et l’assistance humanitaires relatives aux politiques gouvernementales ; les questions de discrimination, d’exclusion et de violence ; et les partenariats entre les Sociétés nationale et d’autres organisations travaillant avec ou pour les migrants vulnérables. Chaque section étudie les obstacles qui s’opposent à une action efficace et présente des exemples de programmes entrepris par les Sociétés nationales afin de les surmonter.

    Défis et perspectives

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    Nul ne sait combien de migrants sont décédés au cours des dix dernières

    années en essayant d’atteindre les îles Canaries dans de petites embarcations

    depuis le Sahara occidental, la Mauritanie et, tout récemment, le

    Sénégal. La Croix-Rouge espagnole prête assistance à ceux qui

    parviennent jusqu’aux Canaries en leur fournissant une aide d’urgence et des

    vêtements propres et secs.

  • Accès des Sociétés nationales aux migrants vulnérablesLa Politique de la Fédération internationale relative à la migration souligne que les Sociétés nationales doivent déployer des efforts soutenus pour veiller à ce que les migrants aient accès à l’assistance humanitaire, aux services essentiels et à un appui juridique, et qu’elles devraient s’employer à obtenir un accès effectif et inconditionnel à tous les migrants, quel que soit leur statut juridique. La Politique précise en outre que l’accès humanitaire ne se limite pas à l’assistance matérielle, mais couvre une vaste gamme de préoccupa-tions. Malgré la grande variété des activités décrites ci-dessus, les Sociétés nationales n’ont souvent qu’un accès limité pour fournir des services sociaux, de santé et d’éducation aux migrants dans les pays de destination et de transit, où ceux qui sont qualifiés d’« illégaux » ou de « clandestins » n’ont souvent même pas accès à l’assistance humanitaire la plus essentielle.

    Les obstacles découlant de décisions législatives ou administratives des auto-rités gouvernementales restreignent l’accès des migrants à de nombreux ser-vices. Dans certains pays, des dispositions juridiques pénalisent la fourniture d’aide humanitaire à ces individus ou groupes. Même quand il n’existe pas de dispositions juridiques spécifiques empêchant expressément les Sociétés nationales de mener des activités d’assistance ou de protection humani-taire, des politiques plus générales applicables aux Sociétés nationales et à d’autres acteurs limitent le droit de fournir une assistance. Par exemple, le paragraphe 120, alinéa 3, point 2 de la loi autrichienne sur la police des étrang-ers prévoit des amendes administratives pour quiconque facilite consciem-ment la résidence d’un étranger sans autorisation sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne. Plusieurs États et localités des États-Unis ont adopté une législation qui rend illégal l’accueil ou le transport de personnes résidant illégalement aux États-Unis. Plusieurs des Sociétés nationales ayant répondu à l’enquête ont relevé qu’elles ont accès aux migrants mais qu’elles doivent souvent passer par l’intermédiaire des forces du gouvernement et que ce sont ces dernières qui décident d’autoriser ou non l’intervention de la Croix-Rouge. Il arrive que le personnel n’ait qu’un accès limité aux centres de rétention ; il ne peut parfois accéder aux migrants qu’à certains moments, ou à une fréquence déterminée, ou à certains stades du processus de migration1.

    Dans d’autres cas, les autorités ne disent pas aux migrants qu’ils peuvent demander des services aux Sociétés nationales lorsqu’il en existe. Même quand cet accès est autorisé, les ressources et les informations peuvent être limitées, et il peut être illégal de dépenser des fonds publics pour aider les migrants. Dans de nombreux pays, la crise économique a entraîné des coupures dans les programmes de protection sociale, touchant en particulier les populations vulnérables, notamment les migrants. Les migrants, quel que soit leur statut juridique, peuvent avoir cruellement besoin d’une assistance pour faire face aux faibles revenus, aux problèmes de santé, à leurs mauvaises conditions d’hébergement, aux obstacles à l’éducation et aux autres problèmes qu’ils rencontrent lorsqu’ils migrent. Certains de ces besoins peuvent être aigus, en particulier si les migrants ont été victimes de traite ou de trafic, souff-raient déjà de problèmes de santé, de santé mentale ou de nutrition liés à un conflit, à l’insécurité alimentaire ou à d’autres conditions qu’ils ont fui, ou ont fait un voyage long et dangereux pour atteindre leur destination. Du fait

    1 Plusieurs de ces lois sont actuellement examinées par les tribunaux.

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    Le Croissant-Rouge tunisien distribue des vivres et de l’eau depuis le début de la crise à la frontière tuniso-libyenne. Ici, des hommes d’Afrique sub-saharienne font la queue en attendant d’être servis.

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  • de l’exposition potentielle des migrants à la tuberculose, au VIH et au sida et à d’autres maladies, il est particulièrement important de garantir des tests de dépistage et un traitement adéquats dans les structures d’accueil et les centres de rétention, ainsi que dans les communautés, mais ce type de tests ne devrait pas être utilisé comme critère d’expulsion. Les migrants peuvent aussi avoir besoin d’aide pour retrouver des membres de leur famille dont ils ont été séparés suite aux événements qui ont causé leur départ, ou durant la migration elle-même.

    Certaines Sociétés nationales profitent de leur accès privilégié à leur gouverne-ment pour promouvoir des changements et l’amélioration des institutions et des lois qui réglementent l’immigration et l’asile en menant des activités de diplomatie humanitaire. La Croix-Rouge de Norvège, par exemple, a joué un rôle capital en plaidant en faveur d’un changement dans la législation natio-nale, afin de dépénaliser l’assistance humanitaire à tous les migrants, quel que soit leur statut juridique. La Croix-Rouge autrichienne participe régulière-ment à des procédures de consultation au sujet de la révision de la législation autrichienne relative à l’asile et aux étrangers, plaidant en faveur des droits des migrants et émettant des déclarations publiques pour les migrants vul-nérables si nécessaire.

    Cependant, de nombreuses Sociétés nationales n’ont pas suffisamment de fonds pour organiser des programmes relatifs à la migration, bien qu’elles essaient de fournir des services aux migrants dans le cadre de leurs activités humanitaires ou d’organiser des interventions d’urgence en cas de crise ou d’afflux (comme le Croissant-Rouge de Somalie, qui a fourni des premiers secours aux réfugiés éthiopiens après l’explosion d’une bombe). Les Sociétés nationales de Chypre, d’Indonésie, du Népal, de Guinée, du Zimbabwe, de Mauritanie et de Côte d’Ivoire déclarent toutes qu’elles fournissent certains programmes visant à répondre aux besoins des migrants, mais qu’elles ont besoin de plus de fonds pour soutenir leurs efforts. La Croix-Rouge de Côte d’Ivoire a fait une remarque semblable au sujet du soutien qu’apportent les Sociétés espagnole et française de la Croix-Rouge à des projets visant à accroître la cohésion sociale et à atténuer les tensions entre les groupes. Le manque de fonds a été cité parmi les obstacles par les Sociétés nationales hongroise, ukrainienne et hellénique, cette dernière relevant que des retards dans l’arrivée des fonds de l’Union européenne entravent son travail à l’appui des mineurs non accompagnés et de l’intégration des réfugiés.

    Un autre obstacle majeur à l’accès aux migrants est la difficulté d’obtenir leur confiance pour qu’ils osent demander de l’aide. De crainte d’être expulsés et par peur des autorités publiques, de la discrimination et de la violence, de nombreux migrants vulnérables préfèrent rester dans l’ombre plutôt que de demander de l’aide. De nombreuses réponses à l’enquête ont soulevé ce point, notamment le rapport sur le projet en Asie centrale, qui relevait que, souvent, dans le pays de destination, les migrants en situation irrégulière sont réticents à demander de l’aide au Croissant-Rouge de crainte d’être découverts, déte-nus, expulsés, ou raccompagnés à la frontière par les autorités de l’État, et en raison de la barrière de la langue. Afin de surmonter ce problème la Société du Croissant-Rouge du Kazakhstan a continué de mener de vastes campagnes publiques, le personnel a visité des endroits où des migrants seraient vraisem-blablement employés et distribué des prospectus au sujet des activités du Croissant-Rouge pour sensibiliser les bénéficiaires et les partenaires. Les ini-tiatives de ce type, qui consistent à informer les migrants sur le terrain, sur leurs lieux de travail ou de loisirs, et la coopération avec des organisations

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  • de confiance et les migrants, sont essentielles pour atteindre des populations difficiles d’accès.

    La Croix-Rouge portugaise a déclaré avoir réussi à surmonter ce défi, relevant que ses projets menés dans un nombre croissant de villes pour informer, conseiller et aider les migrants, lui ont permis d’obtenir la confiance de la communauté, contrairement aux services des frontières ou à la police, dont les migrants se méfient fortement. Cela reflète la position particulière de la Croix-Rouge, qui peut accéder à des populations vulnérables qui seraient autre-ment ignorées et ne recevraient pas de soins.

    Insuffisances dans l’assistance et la protection fournies aux migrantsÀ chaque phase du cycle de la migration et tout au long des voies migratoires, des obstacles entravent l’accès des migrants à l’assistance et à la protection humanitaires. Nombre de ces obstacles émanent des politiques gouverne-mentales visant à empêcher ou à décourager la migration internationale irrégulière. Tous les pays ont le droit et la responsabilité de déterminer qui peut pénétrer sur leur territoire, mais ils ont aussi l’obligation de veiller à ce que ces décisions soient prises conformément au droit international des droits de l’homme et au droit des réfugiés. La migration internationale, en particulier ce qu’on appelle la « migration mixte » des demandeurs d’asile et des migrants économiques, pose des problèmes aux États qui ont un objec-tif politique double : empêcher les migrants de franchir clandestinement la frontière et protéger toutes les personnes contre tout danger, en particulier celles qui fuient les persécutions et autres graves dangers. Le Groupe mondial sur la migration, qui représente des organismes des Nations Unies, l’OIM et la Banque mondiale, relève que, trop souvent, les États ne s’attaquent à la migration irrégulière que sous l’angle de la souveraineté, de la sécurité des frontières ou de l’application de la loi, parfois sous la pression de forces poli-tiques nationales hostiles, ajoutant que la situation irrégulière dans laquelle les migrants internationaux peuvent se trouver ne devrait pas les priver de leur humanité ou de leurs droits. Cette section étudie trois mécanismes qui posent des problèmes particuliers pour les migrants et nuisent à la capacité des Sociétés nationales de fournir des services humanitaires et de protec-tion : les politiques d’interception visant à empêcher l’arrivée des migrants, notamment des demandeurs d’asiles qui cherchent à pénétrer sur le territoire d’un État, la détention de ceux qui atteignent ce territoire et le rapatriement inapproprié ou prématuré.

    Politiques visant à dissuader ou à intercepter les migrantsLes gouvernements prévoient souvent les départs, en particulier en cas de conflit, de catastrophe naturelle ou d’autre crise, et élaborent des politiques pour dissuader ou intercepter les migrants qui quittent les pays d’origine ou de transit. Une pratique courante consiste à exiger des visas en cas de risque de départs massifs. Les visas sont utilisés pour filtrer ceux qui ont l’intention d’entrer en qualité de touristes ou d’hommes d’affaires, mais de rester plus longtemps. Les transporteurs aériens ou autres ont la responsabilité de véri-fier que les voyageurs internationaux possèdent les documents requis avant

    19

    Une embarcation transportant des migrants nord-africains approche du port de Lampedusa. L’île compte désormais plus de 7 000 migrants, dont beaucoup dorment à l’extérieur près du débarcadère, sans aucune couverture ni abri.

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  • de pouvoir monter à bord de l’avion ou du bateau. Les exigences relatives aux visas et les sanctions pour les transporteurs touchent généralement tant les migrants économiques potentiels que les réfugiés.

    En l’absence d’alternative juridique qui leur permettrait d’obtenir accès au territoire de pays de transit ou de destination potentiels, les migrants essaient d’entrer clandestinement, en franchissant les frontières terrestres ou mari-times. De leur côté, les gouvernements essaient souvent de décourager les mouvements clandestins et d’empêcher les migrants d’atteindre leur territoire. Les États-Unis, l’Australie et les pays de l’Union européenne interceptent les bateaux qui se dirigent vers leurs côtes, mais l’interception n’est pas propre aux pays développés. En 1996, par exemple, des agents de la Côte d’Ivoire ont refusé l’entrée à un bateau, le Bulk Challenge, qui transportait plusieurs mil-liers de réfugiés libériens.

    Souvent, les embarcations interceptées ne sont pas en état de naviguer et con-stituent un danger pour les migrants. Cette question est clairement ressortie au sujet des départs en bateau d’Afrique du Nord pour les côtes européennes. Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), quelque 20 000 Libyens et 24 000 Tunisiens auraient atteint le sud de l’Europe, la plu-part arrivant à Malte ou en Italie. Comme l’a déclaré le HCR, le nombre de vies perdues en mer ne sera jamais connu2. On se demande cependant ce qu’il advient de ceux qui sont interceptés en haute mer ou à la frontière. Dans ses recommandations à l’Union européenne, le HCR a relevé que les flux migra-toires doivent être régulés, mais que cela ne doit pas détourner l’attention de

    2 HCR, « UNHCR’s Recommendations to Poland for its EU Presidency, July – December 2011 », disponible en anglais sur : http://www.unhcr.org/4df8d00f9.html.

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    Frontex, Rapport 2011 d’analyse des risques

    Détection aux frontières extérieuresde l’Union Européenne

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    5 000

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    15 000

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    35 000Dix nationalités lesplus représentées

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    http://www.unhcr.org/4df8d00f9.html

  • l’obligation, pour les États membres de l’UE, de fournir une protection inter-nationale à ceux qui en ont besoin. Par ailleurs, la réalité des flux mixtes ne devrait pas non plus détourner de l’obligation fondamentale de sauver ceux qui sont en détresse en mer, ou de les débarquer en un lieu sûr, où leurs besoins en matière de protection internationale peuvent être correctement évalués3.

    Un moyen que les gouvernements ont utilisé pour essayer d’équilibrer la dis-suasion et la protection est de mettre en place des structures d’accueil/de rétention extraterritoriales pour ceux qui sont interceptés. Par exemple, dans les années 90, les États-Unis ont utilisé la base navale de Guantanamo pour héberger les Haïtiens et les Cubains, plutôt que de les renvoyer vers des condi-tions instables ou de les autoriser à entrer sur le territoire américain. La majorité des Haïtiens sont rentrés chez eux une fois que le président Aristide a retrouvé son poste, et la plupart des Cubains sont finalement entrés aux États-Unis, mais seulement après la négociation d’un accord relatif à la migration entre les États-Unis et Cuba, limitant les départs en bateau et instaurant de nouveaux mécanismes de demande d’admission aux États-Unis directement depuis Cuba.

    L’Australie a adopté une législation qui fait de l’île Christmas un territoire extérieur chargé de gérer les arrivées de bateaux. Selon la politique actuelle, les personnes qui arrivent sans autorisation sur un territoire extérieur et dési-rent profiter de la protection que l’Australie est tenue de leur accorder en vertu de la Convention relative au statut des réfugiés ne peuvent pas déposer de demande de visa, car la loi de 1958 sur la migration les en empêche. Elles peu-vent cependant faire examiner leur demande de protection par le Département de l’immigration, conformément à la procédure d’évaluation du statut des

    3 Ibid.

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    Source : Gardes-côtes des États-Unis, migrants étrangers interceptés

    Interdiction des migrants sur merGardes-côtes des Etats-Unis

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  • réfugiés non statutaires. Les migrants bénéficient d’un représentant juridique qui les aide à préparer leur demande et peuvent faire appel d’un résultat négatif auprès d’un examinateur indépendant qui conseille le ministre, mais ils n’ont pas accès aux procédures d’appel en justice à la disposition de ceux qui demandent l’asile directement en Australie4.

    Dans d’autres cas, les gouvernements essaient de décourager les arrivées en concluant des accords avec des pays tiers5. En 2010, l’Union européenne a con-clu un accord avec la Libye afin de dissuader les migrants illégaux de traverser la Méditerranée. Selon l’accord, l’UE aiderait la Libye dans ses efforts visant à mettre en place un système de protection capable de prendre en charge les demandeurs d’asile et les réfugiés conformément aux normes internation-ales et en bonne coopération avec l’organisation internationale compétente. L’UE aiderait en outre les autorités libyennes à filtrer les migrants de façon à repérer ceux qui ont besoin d’une protection internationale et à faire face à la charge que représentent à la fois les réfugiés reconnus et les demandeurs d’asile déboutés, en réinstallant certains des réfugiés reconnus dans des États membres de l’UE, en soutenant le retour volontaire de certains des deman-deurs d’asile déboutés dans leur pays d’origine et en améliorant les capacités d’accueil offertes en Libye aux demandeurs d’asile et aux réfugiés.

    Le renforcement des capacités d’accueil dans les pays tiers ne garantit en aucun cas la protection des migrants, en particulier des demandeurs d’asile. Dès 2005, le Conseil européen sur les réfugiés et les exilés a formulé de séri-euses inquiétudes au sujet d’un accord consistant à confier à un pays connu pour avoir commis des violations graves des droits de l’homme et n’ayant jamais pris de mesures de protection pour les réfugiés, la responsabilité de décider d’accorder ou non le statut de réfugié : la Libye n’est pas partie à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et ne possède pas de système adéquat pour prendre en charge les demandeurs d’asile et les réfugiés, le HCR n’y a pas de statut officiel, les groupes d’immigrants illégaux sont expulsés sans aucune évaluation individuelle de leurs demandes d’asile, et les condi-tions dans les centres d’accueil sont extrêmement mauvaises6.

    De nombreux pays ont adopté dans leur droit de l’asile le principe général vou-lant que le premier pays où fuit un réfugié soit celui où il demande l’asile7. Ce principe est souvent contourné quand un demandeur d’asile essaie de rejoin-dre des membres de sa famille dans un pays sûr spécifique. Il a été initialement adopté par les États membres de l’UE afin d’empêcher les demandeurs d’asile de « faire la tournée » des pays d’asile : être rejetés dans un pays et tenter leur chance dans un autre État européen. Le Règlement Dublin II et la Convention d’application de l’accord de Schengen ont établi des règles pour déterminer quel pays est chargé de procéder à l’unique examen d’une demande d’asile pour tous les signataires, une décision que ceux-ci s’engagent tous à respecter. Les États-Unis et le Canada ont également négocié un accord relatif au pays de premier asile. Il existe une variation de ces pratiques : le principe du pays tiers

    4 Département de l’immigration et de la citoyenneté du gouvernement australien, Fact Sheet 75 - Processing Irregular Maritime Arrivals, disponible en anglais sur : http://www.immi.gov.au/media/fact-sheets/75processing-irregular-maritime-arrivals.htm.

    5 Certains gouvernements ont également conclu avec des pays d’origine et de transit des accords visant à promouvoir le développement économique et à fournir une coopération technique pour aider à gérer les flux migratoires. Voir annexe B pour plus d’informations sur les liens entre la migration et le développement.

    6 Conseil européen sur les réfugiés et les exilés, EU Cooperation With Libya: Open Letter to the EU Presidency, 1er juin 2005, disponible en anglais sur : http://www.ecre.org/topics/areas-of-work/access-to-europe/90-open-letter-to-eu-presidency-eu-cooperation-with-libya.html.

    7 Martin, Susan et Andrew I. Schoenholtz, « Asylum in Practice: Successes, Failures, and the Challenges Ahead », Georgetown Immigration Law Journal, Vol. 14, n° 589, 2000, p. 606-607.

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    http://www.immi.gov.au/media/fact-sheets/75processing-irregular-maritime-arrivals.htmhttp://www.immi.gov.au/media/fact-sheets/75processing-irregular-maritime-arrivals.htmhttp://www.ecre.org/topics/areas-of-work/access-to-europe/90-open-letter-to-eu-presidency-eu-cooperation-with-libya.htmlhttp://www.ecre.org/topics/areas-of-work/access-to-europe/90-open-letter-to-eu-presidency-eu-cooperation-with-libya.html

  • sûr, selon lequel un pays de destination peut expulser un demandeur d’asile vers un pays où il serait protégé contre tout renvoi vers son pays d’origine.

    Bien que ces accords ne violent pas nécessairement la lettre ou l’esprit de la Convention relative au statut des réfugiés, le HCR indique dans un rapport qu’il a à plusieurs reprises souligné que la Convention de 1951 interdit non seulement le renvoi direct vers le pays d’origine, mais aussi le renvoi indi-rect, ou « en chaîne », vers des pays tiers qui expulseront les migrants vers leur pays d’origine. La Commission européenne, le Conseil de l’Europe et la Chambre des Lords britannique ont tous accepté cette proposition8. Le HCR a défini un ensemble minimal de critères permettant de déterminer si le ren-voi vers le pays de premier asile ou un pays tiers sûr est conforme au droit international. Il faut notamment que le pays tiers aie ratifié et respecte les instruments internationaux relatifs aux réfugiés (en particulier le principe de non-refoulement) et les instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme, et qu’il soit disposé à accepter les demandeurs d’asile et les réfugiés déboutés, qu’il prenne des décisions équitables en matière d’asile ayant un effet suspensif et qu’il fournisse une protection efficace et adéquate9.

    Ce sont des critères très minimaux, cependant, qui ne signifient pas néces-sairement qu’un réfugié bénéficiera du même accès à la protection dans le pays tiers que dans le pays d’où il a été expulsé. Ces politiques partent du principe que tous les États parties à un accord relatif au pays de premier asile ou au pays tiers sûr utilisent les mêmes normes dans leur procédure d’octroi du statut de réfugié. Cependant, ces accords cachent souvent des différences majeures dans les pratiques nationales, en particulier concernant l’examen des demandes d’asile. Une récente affaire présentée devant la Cour europée-nne des droits de l’homme concernant le transfert d’un demandeur d’asile de Belgique à la Grèce a établi que la Grèce était en « violation de l’article 13 de la

    8 Stephen Legomsky, « Secondary Refugee Movements and the Return of Asylum Seekers to Third Countries: The Meaning of Effective Protection », HCR, 2003.

    9 Ibid.

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    Un migrant regarde vers les États-Unis d’Amérique. Les croix commémorent les migrants qui sont morts en essayant de franchir clandestinement la frontière.

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  • Convention combiné avec l’article 3 en raison des défaillances dans l’examen par les autorités grecques de la demande d’asile du requérant et du risque encouru par celui-ci d’être refoulé directement ou indirectement vers son pays d’origine, sans un examen sérieux du bien-fondé de sa demande d’asile et sans avoir eu accès à un recours effectif »10. De plus, même si les pays utilisent les mêmes critères dans leurs procédures d’examen des demandes d’asile, il se peut qu’ils diffèrent dans le type de protection complémentaire fournie aux personnes qui ne répondent pas à la définition de la Convention de 1951 mais ont d’autres raisons de craindre de rentrer dans leur pays d’origine.

    Certaines Sociétés nationales se sont associées à leur gouvernement pour trouver, sur leur propre territoire, des solutions assurent un meilleur équilibre de la gestion de la migration et de la protection des migrants. La Croix-Rouge de Norvège, par exemple, a examiné et soulevé la question des politiques rela-tives aux contrôles aux frontières avec les autorités norvégiennes. Une ques-tion centrale était l’obligation imposée par le gouvernement aux demandeurs d’asile de présenter des documents d’identité à leur arrivée. La Croix-Rouge de Norvège a déclaré que les demandeurs d’asile et les réfugiés ne devaient pas être soumis aux mêmes exigences en matière de documents que les autres migrants. La Croix-Rouge de Belgique a également plaidé la cause des migrants, en septembre 2010, en envoyant un livre blanc au gouvernement belge pour dénoncer le manque de structures d’accueil et l’absence d’aide sociale pour les demandeurs d’asile, qui étaient abandonnés dans les rues ou dans des hôtels sans aucun soutien. La Société nationale a demandé et obtenu la créa-tion de lieux d’accueil en Belgique. La section francophone de la Croix-Rouge de Belgique gère 15 centres d’accueil pour les demandeurs d’asile comptant 3 098 places, un centre spécial pour les demandeurs d’asile souffrant de pro-blèmes psychologiques et trois « camps » d’urgence de 1 295 places. La Société nationale, avec un groupe d’ONG, participe à des réunions régulières avec les autorités responsables des migrants, afin d’analyser et de commenter les derniers événements.

    D’autres Sociétés nationales offrent des services importants aux demandeurs d’asile et aux migrants vulnérables que les gouvernements admettent sur leur territoire. La Croix-Rouge danoise gère des centres d’accueil pour les deman-deurs d’asile depuis 20 ans. Au Danemark, tous les demandeurs d’asile sont hébergés dans sept centres administrés par le département de la Société natio-nale chargé de l’asile (avec le financement de l’État) et deux municipalités. Les Sociétés nationales peuvent aussi prendre le relais lorsque le financement de l’État prend fin. C’est le cas de la Croix-Rouge bulgare, qui, en partenariat avec le service d’État chargé des réfugiés, aide les réfugiés quittant les centres d’accueil de l’État en les aidant à trouver un logement, ce qui est générale-ment difficile car les migrants sont stigmatisés par les propriétaires. Le pro-gramme de la Croix-Rouge suédoise se concentre sur la santé psychosociale des victimes de torture, tandis que les programmes des Sociétés française, autrichienne et hellénique de la Croix-Rouge ciblent les besoins spécifiques des mineurs non accompagnés.

    La Croix-Rouge suédoise a mis sur pied un projet, financé en grande partie par le Fonds européen pour les réfugiés, qui vise à améliorer la procédure d’asile en se concentrant sur les sexospécificités. Destiné aux responsables de la migra-tion, à la police des frontières et aux juristes spécialisés dans l’immigration,

    10 Affaire M.S.S. c. BELGIQUE et GRÈCE, disponible sur : http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=M.S.S.&sessionid=80382575&skin=hudoc-fr.

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    société nationale en évidenceCroix-Rouge hellénique : soutien aux mineurs non accompagnés•Soutien psychosocial•Fourniture d’un hébergement à

    court ou à long terme•Regroupement familial•Campagnes de sensibilisation

    communautaire•Conseils, orientation et

    assistance sociale•Liaison avec d’autres services•Soutien juridique•Programmes éducatifs (cours

    d’anglais et de grec, cours informatiques)

    •Activités sportives et interculturelles

    •Orientation et promotion sur le marché du travail.

    http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=M.S.S.&sessionid=80382575&skin=hudoc-frhttp://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=M.S.S.&sessionid=80382575&skin=hudoc-frhttp://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/view.asp?item=1&portal=hbkm&action=html&highlight=M.S.S.&sessionid=80382575&skin=hudoc-fr

  • ce projet vise à mieux faire connaître les phénomènes sexospécifiques à pren-dre en considération pour déterminer le statut des réfugiés. Le projet utilise comme outils méthodologiques des ateliers et des kits pédagogiques. Il a pour principal objectif d’améliorer la procédure d’examen des demandes d’asile des femmes et des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT). Par ailleurs, le projet vise à créer et/ou à renforcer les réseaux de femmes dans chacune des organisations partenaires.

    La Croix-Rouge hellénique plaide en faveur d’un accès à l’éducation par le biais d’un projet de recherche à grande échelle. Cette étude se concentre sur l’accès des jeunes demandeurs d’asile (15-18 ans) à l’éducation publique. Elle inclut la collecte d’informations et de meilleures pratiques, l’élaboration et la mise en œuvre d’un outil méthodologique permettant d’atteindre les demandeurs d’asile mineurs, ainsi que des ateliers et la diffusion des conclusions aux par-ticipants dans trois pays, ainsi qu’à la Commission européenne.

    La Croix-Rouge islandaise a publié en 2010 un rapport cartographiant la traite des êtres humains en Islande. La Croix-Rouge espagnole a effectué, avec le Croissant-Rouge mauritanien, une étude comprenant des interviews de 5 700 migrants interceptés sur la côte mauritanienne et cherchant à atteindre l’Europe. L’étude a démenti nombre des attentes les plus courantes des jeunes immigrants qui arrivent illégalement en Espagne par la mer.

    DétentionLa détention des migrants a cours dans le monde entier. C’est un mécanisme qui permet de garantir que les migrants ne s’enfuient pas pendant que des mesures sont prises pour vérifier leur identité et déterminer s’il est possible de les expulser, mais aussi un moyen de dissuader les futures arrivées sur le territoire d’un État. La détention de non citoyens est généralement consi-dérée comme une question administrative. La plupart des gouvernements fixent une limite spécifique au nombre de jours que les personnes peuvent passer en détention administrative, mais ils peuvent prévoir des exceptions. Le Mexique, par exemple, limite la détention administrative à 90 jours mais prévoit des exceptions : 1) en cas de poursuites pénales ; 2) lorsque les autori-tés ne peuvent pas identifier la personne ; 3) quand il est impossible d’obtenir des documents d’identité et de voyage ; 4) s’il faut plus de temps pour obtenir des documents du consulat concerné ; 5) lorsqu’il n’existe pas d’itinéraire possible pour expulser la personne ; 6) quand un pays tiers interdit le transit des étrangers ; 7) en cas d’obstacle juridique au renvoi ; 8) si la personne souf-fre d’un handicap ou d’une maladie d’ordre mental ou physique spécifique11.

    En tant qu’outil d’application de la loi, la détention a été critiquée sur plusieurs fronts, notamment pour des raisons pratiques et humanitaires. Le coût de la détention est considérablement plus élevé, en termes financiers et humains, que les autres solutions permettant de relâcher les migrants dans la commu-nauté. Une étude américaine comparant divers modèles visant à s’assurer que les migrants respectent les règles de leur libération, notamment leur présence lors d’audiences déterminant la nécessité de les expulser, a révélé un fort taux de respect des règles dans les programmes qui fixent des règles claires et des exigences de compte rendu, tout en soulignant que ces options sont moins

    11 Acuerdo por el que se emiten las normas para el funcionamiento de las estaciones migratorias del Instituto Nacional de Migración (2001) (Accord visant à établir des normes relatives au fonctionnement des centres de rétention de l’Institut national de la migration [ordre exécutif]).

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    http://www.cofemermir.gob.mx/uploadtests/15936.59.59.1.PROYECTO%20NEM%20FINAL%20COFEMER%2024%20JULIO%2008.DOC" \t "_blankhttp://www.cofemermir.gob.mx/uploadtests/15936.59.59.1.PROYECTO%20NEM%20FINAL%20COFEMER%2024%20JULIO%2008.DOC" \t "_blank

  • coûteuses que la détention12. Le HCR a défini plusieurs solutions potentielles, notamment l’utilisation de cautions ou de garanties, la libération sous sur-veillance ou la prise en charge des cas à base communautaire, l’assignation à résidence dans un centre d’hébergement spécifique, les bracelets électroniques ou les comptes rendus par voie électronique, et la surveillance par satellite et les couvre-feux13.

    Les conditions de détention sont un sujet d’inquiétude majeur. Une étude de 2011 de Médecins sans Frontières (MSF) sur les centres de rétention grecs a révélé que les conditions de vie et d’hygiène inhumaines des centres de rétention des migrants dans la région d’Evros font naître des préoccupations sanitaires majeures pour les migrants détenus. Selon les données médicales de MSF, plus de 60 % des problèmes de santé dont souffrent les migrants détenus sont la conséquence directe ou indirecte des conditions dégradantes dans lesquelles ils sont détenus14. Plus ils passent de temps en détention, plus ces problèmes s’aggravent. Un rapport de la Commission interaméricaine des droits de l’homme de 2011 sur la détention aux États-Unis a établi qu’il y avait deux principales causes à l’insuffisance chronique des soins médicaux dispen-sés aux migrants détenus : un système médical conçu pour le traitement des urgences à court terme ; et le fait que les dispensaires des centres de rétention ne sont pas suffisamment dotés en personnel et doivent constamment lutter pour retenir du personnel assez qualifié, notamment car plusieurs d’entre eux se trouvent dans des endroits isolés. En 2009, la Commission nationale des droits de l’homme de Corée (NHRCK) est arrivée à la conclusion que la Corée du Sud violait plusieurs traités internationaux15 durant la procédure d’arrestation et de détention des migrants clandestins en Corée du Sud (NHRCK, 2009).

    La détention empêche en outre les migrants de faire opposition aux ordres d’expulsion, y compris par le biais du système d’asile. Un récent rapport de Human Rights Watch a relevé le grand nombre de migrants transférés d’un centre à l’autre aux États-Unis. Tout en reconnaissant que certains transferts puissent être dus à des facteurs opérationnels (par exemple quand les migrants doivent apparaître à leurs audiences), le rapport soulevait des questions graves au sujet de l’impact de ces transferts sur la capacité des migrants à trouver et à conserver un représentant : de nombreux avocats volontaires ou bénévoles doivent abandonner une affaire car il leur devient impossible de représenter leur client à une si longue distance. De plus, de nombreux détenus ne parvi-ennent pas à trouver d’avocat avant leur transfert. Leurs chances de trouver un représentant sont souvent encore moins bonnes au nouvel endroit : la majorité des transferts entre États sont effectués vers la Louisiane, le Mississipi et le Texas, or ces États ont, collectivement, le plus mauvais rapport du pays

    12 Vera Institute of Justice, Testing Community Supervision for the INS: An Evaluation of the Appearance Assistance Program, New York, Vera Institute, 2000, disponible en anglais sur : http://www.vera.org/download?file=615/finalreport.pdf.

    13 Alice Edwards, Back to Basics: The Right to Liberty and Security of Person and ‘Alternatives to Detention’ of Refugees, Asylum-Seekers, Stateless Persons and Other Migrants, Genève, HCR, 2011, disponible en anglais sur : http://www.unhcr.org/refworld/pdfid/4dc935fd2.pdf.

    14 Médecins sans Frontières, « Emergency Intervention in Migrants’ Detention Facilities in Evros », 2011, disponible en anglais sur : http://www.msf.org/msf/articles/2011/06/more-than-60-percent-of-the-medical-problems-faced-by-detained-migrants-in-greece-caused-by-inhumane-living-and-hygiene-conditions.cfm

    15 Article 9 de la Déclaration universelle des Droits de l’homme ; article 9, paragraphe 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; et article 10 de l’Ensemble de principes des Nations Unies pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement.

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    http://www.vera.org/download?file=615/finalreport.pdfhttp://www.unhcr.org/refworld/pdfid/4dc935fd2.pdfhttp://www.msf.org/msf/articles/2011/06/more-than-60-percent-of-the-medical-problems-faced-by-detained-migrants-in-greece-caused-by-inhumane-living-and-hygiene-conditions.cfmhttp://www.msf.org/msf/articles/2011/06/more-than-60-percent-of-the-medical-problems-faced-by-detained-migrants-in-greece-caused-by-inhumane-living-and-hygiene-conditions.cfmhttp://www.msf.org/msf/articles/2011/06/more-than-60-percent-of-the-medical-problems-faced-by-detained-migrants-in-greece-caused-by-inhumane-living-and-hygiene-conditions.cfm

  • pour ce qui est du nombre de migrants transférés par avocat spécialisé dans l’immigration (510 pour 1)16.

    L’utilisation de prisons pour y incarcérer les migrants et les demandeurs d’asile est un autre problème. Plusieurs groupes de défense des droits de l’homme en Afrique du Sud ont signalé des abus commis dans les cellules de détention provisoire des postes de police, notamment les expulsions sommaires des demandeurs d’asile, les mauvais traitements physiques, la détention à long terme, la détention de mineurs ou une nourriture inadéquate, selon le Global Detention Project17. La détention des migrants et des demandeurs d’asile avec des personnes qui ont été incarcérées pour des motifs criminels est une préoc-cupation supplémentaire. De plus, la corruption règne dans certains centres de détention : Human Rights Watch a déclaré que, dans certains pays, des migrants doivent verser environ 500 dollars américains de pots-de-vin pour être libérés. Un détenu a déclaré : « Les policiers ont dit qu’ils nous expulseraient, mais ils nous ont amenés à des passeurs qu’on a dû payer pour qu’ils nous emmènent à Tripoli. Ceux qui n’avaient pas d’argent sont restés à Kufra. J’ai payé. Ce n’est qu’une question d’argent »18.

    La détention des enfants est une question très préoccupante. Dans plusieurs pays, les mineurs non accompagnés et séparés de leur famille, ainsi que les enfants appréhendés par les services de l’immigration avec leurs parents, ris-quent la détention. En Malaisie par exemple, le Global Detention Project déclare que, selon le règlement relatif à l’immigration, la séparation des détenus en fonction de l’âge et du sexe est à la discrétion de l’agent responsable du cen-tre de détention des immigrés. Bien que le règlement prévoie que les enfants de moins de 12 ans doivent rester avec un de leurs parents en détention, il n’existe pas de disposition spécifique pour les adolescents ou les mineurs non accompagnés. En juin 2007, une délégation du gouvernement a signalé que 360 enfants étaient détenus dans des centres avec leur mère19. Même dans les pays qui interdisent officiellement la détention des enfants, il s’est révélé difficile de trouver d’autres solutions acceptables. En 2010, le Royaume-Uni a annoncé qu’il ne placerait plus les enfants en détention, mais des critiques ont relevé que l’alternative, l’« hébergement en vue du départ » (pre-departure accommodation) semble jouer le même rôle que la détention20.

    Plusieurs Sociétés nationales ont conclu avec leur gouvernement des accords qui leur permettent de visiter les centres de rétention afin de recenser les vulnérabilités et les besoins. Les Sociétés nationales des pays de transit et d’accueil fournissent une assistance humanitaire et des conseils juridiques aux détenus et plaident pour leur protection. Le projet australien sur la déten-tion communautaire est un exemple notable des services susmentionnés (voir ci-contre). La Croix-Rouge croate fournit un soutien psychosocial et une aide humanitaire aux demandeurs d’asile vulnérables et aux migrants en situation irrégulière en visitant les centres de rétention, comme le font la Croix-Rouge

    16 Human Rights Watch, « A Costly Move: Far and Frequent Transfers Impede Hearings for Immigrant Detainees in the United States », 2011, disponible en anglais sur : http://www.hrw.org/node/99660

    17 http://www.globaldetentionproject.org/fileadmin/docs/South_Africa_Detention_Profile_2009.pdf (en anglais).

    18 Human Rights Watch (HRW), 2009, Pushed Back, Pushed Around: Italy’s Forced Return of Boat Migrants and Asylum Seekers, Libya’s Mistreatment of Migrants and Asylum Seekers, Human Rights Watch, États-Unis, septembre 2009, disponible en anglais sur : www.hrw.org/en/reports/2009/09/21/pushed-back-pushed-around-0 (traduction Fédération internationale).

    19 http://www.globaldetentionproject.org/de/countries/asia-pacific/malaysia/introduction.html (en anglais).

    20 http://www.globaldetentionproject.org/countries/europe/united-kingdom/introduction.html (en anglais).

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    Société nationale en évidenceCroix-Rouge australienne : activités relatives à la détention•Protocole d’accord avec le

    gouvernement australien lui accordant accès à tous les migrants en détention.

    •Suivi de tous les centres de rétention de migrants

    •Assistance humanitaire aux demandeurs d’asile et aux personnes dont le statut n’est pas défini mais qui satisfont à certains critères en matière de vulnérabilité (problèmes de santé mentale ou physique, enfants, etc.).

    •Dans le cadre du programme de détention communautaire, la Croix-Rouge joue le rôle de chef de file pour fournir, avec 25 institutions partenaires à but non lucratif, des services de soutien aux clients, principalement en assurant une permanence de soins pour les mineurs non accompagnés, notamment concernant les soins quotidiens (mais pas de service de tutelle).

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    http://www.hrw.org/node/99660http://www.hrw.org/node/99660http://www.globaldetentionproject.org/fileadmin/docs/South_Africa_Detention_Profile_2009.pdfhttp://www.globaldetentionproject.org/fileadmin/docs/South_Africa_Detention_Profile_2009.pdfhttp://www.hrw.org/en/reports/2009/09/21/pushed-back-pushed-around-0" \t "_blankhttp://www.hrw.org/en/reports/2009/09/21/pushed-back-pushed-around-0" \t "_blankhttp://www.globaldetentionproject.org/de/countries/asia-pacific/malaysia/introduction.htmlhttp://www.globaldetentionproject.org/de/countries/asia-pacific/malaysia/introduction.htmlhttp://www.globaldetentionproject.org/countries/europe/united-kingdom/introduction.html

  • équatorienne, la Croix-Rouge de Norvège, et la Croix-Rouge d’Estonie. La Croix-Rouge des Bahamas se rend chaque semaine dans le centre de rétention afin de fournir des articles essentiels tels que kits d’articles d’hygiène, livres, vête-ments et chaussures, articles de literie, etc. La Société de la Croix-Rouge armé-nienne surveille les postes-frontières et l’aéroport, et dispense des formations aux gardes-frontières sur le droit des réfugiés et de l’asile. La présence de la Croix-Rouge française à l’aéroport Roissy Charles de Gaulle vise aussi à garan-tir qu’une protection internationale est assurée aux points de transit. Dans le cadre du programme de suivi des conditions de détention de la Croix-Rouge canadienne, la Société nationale a accès à toutes les personnes, quel que soit leur statut, détenues en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés dans les centres de rétention dépendant de l’autorité et de la gestion de l’Agence des services frontaliers du Canada.

    Rapatriement inapproprié et prématuréIl est essentiel pour toutes les activités liées au retour que le retour se fasse en toute sécurité, dans la dignité et avec des perspectives d’avenir21. La « sécu-rité » signifie que le retour doit se dérouler dans des conditions sûres sur les plans juridique, physique et matériel. La « dignité » signifie que le retour est entrepris, en principe, sans recours à la force (toute utilisation de mesures coercitives doit être limitée au minimum et conforme aux normes des droits de l’homme internationalement reconnues), que personne n’est arbitraire-ment séparé de sa famille et que ceux qui rentrent chez eux sont traités avec respect et pleinement acceptés par leurs autorités nationales22. Les directives élaborées par la Plate-forme de coopération de la Croix-Rouge européenne pour les réfugiés, les demandeurs d’asile et les migrants (PERCO) soulignent en outre qu’il faut accorder de l’attention aux perspectives d’avenir de la per-sonne qui rentre chez elle, ce qui signifie que les autorités qui organisent le retour devraient aussi veiller à ce que des mesures efficaces de réintégra-tion soient en place. Trop souvent, cependant, le rapatriement n’est ni sûr, ni digne, et les personnes qui rentrent ont peu de perspectives de réintégration économique ou sociale.

    Fin 2010 et début 2011, les autorités des États-Unis, de République dominic-aine et d’autres gouvernements ont décidé de reprendre les expulsions vers Haïti malgré la dévastation persistante du séisme de 2010 et l’épidémie de choléra, ce qui a fait naître de graves préoccupations au