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1 Programme « L’Etat local, la gouvernance quotidienne et les réformes du service public » Financement DDC La gouvernance de la santé dans la région de Sikasso Laurence Touré Avec la participation de Youssouf T. Sanogo Mars 2011

miseli-mali - La gouvernance de la santé dans la région de ......VII Conclusions 7.1 Peut-on parler de coproduction de services publics sanitaires dans le système actuel ? 111 7.1.1

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    Programme « L’Etat local, la gouvernance quotidienne et les réformes du service public »

    Financement DDC

    La gouvernance de la santé dans la région de Sikasso

    Laurence Touré

    Avec la participation de Youssouf T. Sanogo

    Mars 2011

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    ACRONYMES AMM Association des municipalités du Mali AMCCR Association malienne des collectivités cercle et région ANICT Agence nationale des investissements des collectivités territoriales APE Association de parents d’élèves AR Assemblée régionale ASACO Association de Santé Communautaire CADD-MS Cellule d’appui à la décentralisation et la déconcentration du ministère de la Santé CAM Convention d’assistance mutuelle CC Conseil de cercle CCC Centres de conseils communaux CCDSES Centre Communal de Développement Social et de l’Economie Solidaire CD Collectivité décentralisée COGES Comité de gestion CPM Chef de poste médical (au niveau du CSCOM) CPN Consultations prénatales CROCEP Comité Régional d’Orientation, de Coordination et d’Evaluation des Programmes sanitaires et sociaux (PRODESS) CSCOM Centre de Santé Communautaire CSREF Centre de santé de référence CT Collectivité territoriale DNCT Direction nationale des collectivités territoriales DNDS Direction Nationale du Développement Social DNPSES Direction Nationale de la Protection Sociale et de l’Economie Solidaire DNS Direction Nationale de la Santé DRC Dépôt Répartiteur de Cercle DRDSES Direction Régionale du Développement Social et de l’Economie Solidaire. DRS Direction Régionale de la Santé DS Développement Social DV Dépôt de Vente. EDS-M Enquête Démographique et de Santé (du Mali) EPH Etablissement Public Hospitalier ESS Ecole secondaire de la santé ESSC Équipe socio-sanitaire de cercle FELASCOM Fédération locale des associations de santé communautaire FENASCOM Fédération nationale des associations de santé communautaire FERASCOM Fédération régionale des associations de santé communautaire IEC Information, éducation et communication IO Infirmière Obstétricienne IDE Infirmier d’Etat ISP Infirmier de santé Publique MATCL Ministère de l’Administration Territoriale et des Collectivités locales MS Ministère de la Santé OMD Objectifs du Millénaire pour le développement

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    ONG Organisation non gouvernementale PARAD Programme d’appui à la réforme administrative et la décentralisation PDDSS Plan Décennal de Développement Sanitaire et Social PDSC Plan de Développement Sanitaire de Cercle PDSEC Plan de développement socio-économique et culturel de la commune PMA Paquet Minimum d’Activités PO Plan Opérationnel (annuel) PPTE Pays Pauvres Très Endettés PRODESS Programme de Développement Sanitaire et Social PTF Partenaires Techniques et Financiers SDA/ME Schéma Directeur d’Approvisionnement en Médicaments Essentiels SECOM Services communs aux collectivités territoriales communes et cercles SF Sage Femme SIEC-S Système d’information essentielle pour la commune/le secteur de la santé SLIS Système local d’information sanitaire SNIS Système national d’information sanitaire SNV Organisation néerlandaise de développement SLIS/SNIS Système Local/National d’Informations Sanitaires SP Santé Publique ST Service technique TDRL Taxe de développement et de recouvrement local TS Technicien Sanitaire

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    Sommaire Introduction p 9 I Problématique 9 1.1 Finalité de la recherche 9 1.2 Justification du thème retenu 10 1.2.1 Un enjeu politique et social considérable 10 1.2.2 Un double intérêt scientifique 11 1.2.3 Un contexte favorable à la réalisation de cette recherche 12 1.3 Méthodologie 12 1.3.1 Un contexte urbain 12 1.3.2 Une approche résolument qualitative et anthropologique 12 1.3.3 Une perspective comparatiste 13 1.3.4 Une démarche centrée autour des deux études de cas en milieu urbain 13 II Présentation du contexte : les réformes de décentralisation et le contexte géographique et sanitaire 15 2.1 La réforme sectorielle santé 15 2.1.1 Rappel historique 15 2.1.2 La participation communautaire comme axe majeur de cette politique 15 2.1.3 La réorganisation du système sanitaire 19 2.1.4 L’approche sectorielle 18 2.2 La réforme de décentralisation institutionnelle 19 2.2.1 Historique de la réforme et son contenu 19 2.2.2 Le transfert de compétence du domaine de la santé aux collectivités 21 2.2.3 Une nécessaire relecture et opérationnalisation des textes 23 2.3 Quelques éléments significatifs concernant ces deux politiques 26 2.4 Le contexte géographique et sanitaire de la région de Sikasso 27 2.4.1 Les données démographiques et administratives de la région de Sikasso, cercles de Sikasso et de Kadiolo 27 2.4.2 Les données sanitaires 27 2.5 Les acteurs de la santé dans la région de Sikasso, dans ce contexte de double décentralisation 28 2.5.1 Les acteurs de la santé au niveau régional 28 2.52 Les acteurs de la santé au niveau cercle 30 2.5.3 Les acteurs de la santé au niveau commune 32

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    III La gouvernance « réelle » de la santé dans la région de Sikasso : le point de vue des acteurs locaux sur la décentralisation et le transfert de compétence 34 3.1 La décentralisation de la santé : un principe imposé mais un changement nécessaire 34 3.2 Une trop grande improvisation dans la mise en œuvre de ces réformes et leur difficile articulation 35 3.3 Des résultats palpables mais un scepticisme ambiant 35 3.4 Le devenir de la décentralisation 36 3.5 Ce que transfert de compétence veut dire…. 37 IV La gouvernance « réelle » de la santé dans la région de Sikasso : l’application des textes concernant le transfert de compétence et la déconcentration 38 4.1 Le transfert des équipements 38 4.2 La gestion des ressources financières 38 4.2.1 Une faible déconcentration de la gestion des ressources 38 4.2.2 Un non transfert des ressources aux collectivités 39 4.2.3 Une implication peu visible des collectivités 39 4.3 La gestion des ressources humaines 40 4.3.1 Un pilotage bamakois des RH 40 4.3.2 Une contribution partielle des collectivités 41 4.3.3 Le cas problématique du personnel sur fonds PPTE 41 4.4 La fonction politique et technique de planification 42 4.4.1 Une programmation top down 42 4.4.2 Une participation très formaliste des élus aux rencontres de planification 42 4.4.3 L’exemple de la préparation du CROCEP 2008 43 4.5 La fonction de suivi et de contrôle des collectivités 44 4.5.1 L’arbitrage des conflits 44 4.5.2 La participation des élus aux instances des services de santé : formaliste et non systématique 45 4.6 Le cas particulier des hôpitaux 47 4.7 Conclusions 48 4.7.1 Une déconcentration qui s’amorce difficilement 48 4.7.2 Une application imparfaite et superficielle du transfert de compétences aux collectivités 48

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    V L’expérimentation du transfert des ressources aux collectivités : quel impact sur la Gouvernance réelle de la santé aux échelles cercle et région ? 49 5.1 Introduction 49 5.2 La coopération suisse à Sikasso : un acteur présent depuis longtemps 49 5.2.1 Le programme santé avant 2000 49 5.2.2 Une évolution du contexte et de la stratégie d’intervention du Buco 50 5.2.3 L’évolution du programme santé à Sikasso 51 p 20 5.3 Présentation du nouveau programme santé PSDS 52 5.3.1 Présentation générale 52 5.3.2 L’accueil réservé localement à ce nouveau programme 53 5.3.3 Un nouveau dispositif institutionnel et financier 54 5.3.4 Le programme d’activités du PSDS 57 5.4 L’élaboration des plans opérationnels (PO) annuels 57 5.4.1 Le dispositif prévu pour l’élaboration des PO santé des collectivités 57 5.4.2 La préparation des PO 2008 santé 58 5.4.2 Les activités proposées dans les PO 2008 60 5.5 L’élaboration d’une politique régionale de santé 66 5.5.1 Le contexte général de la planification dans le domaine sanitaire 66 5.5.2 L’élaboration d’une politique régionale santé en réponse à ces constats 69 et appréciation 38 5.5.3 La démarche adoptée 71 5.5.4 Le bilan 72 5.5.5 Conclusions 74 5.6 La révision de la carte sanitaire de la région 75 5.6.1 Une question d’actualité pertinente 75 5.6.2 L’atelier d’échange sur le processus de révision des cartes sanitaires 76 5.6.3 La question du pilotage de cette révision 77 5.6.4 Conclusions 78 5.7 Conclusions 78 5.7.1 Une expérience concrète mais d’une portée locale 78 5.7.2 Une expérience très révélatrice 79 5.7.3 Un véritable besoin de médiation et d’encadrement 82 5.7.4 La coopération suisse : un grand écart dans les logiques d’intervention, du niveau international au niveau national 83 VI Bilan de l’étude de cas sur la gouvernance de la santé à l’échelle communale ? 86 6.1 Introduction 86

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    6.2 La gestion d’un CSCOM dans un contexte décentralisé : le cas de S. 86 6.2.1 Historique 86 6.2.2 Les organes constitutifs de l’Asaco de S. et son fonctionnement 87 6.2.3 Présentation du CSCOM 89 6.2.4 Les activités de suivi et de supervision 93 6.2.5 La gestion d’une situation de crise 95 6.3 La gestion d’un CSCOM. Le cas de W 96 6.3.1 Historique 96 6.3.2 Les organes constitutifs de l’Asaco de W. et son fonctionnement 97 6.3.3 Présentation du CSCOM 99 6.3.4 Les activités de suivi et de supervision 102 6.3.5 La gestion d’une situation de crise 102 6.4 Conclusions : quelle gouvernance de la santé à l’échelle communale ? 105 6.4.1 Une situation de « moins d’Etat » 105 6.4.2 Une légitimité diversement appréciée des acteurs communautaires 107 6.4.3 Une gestion communautaire sans communauté 108 6.4.4 La gestion des ressources humaines des CSCOM : une parfaite illustration de la gouvernance réelle de la santé à l’échelle communale 108 6.4.5 Une dilution des responsabilités dans cette gestion pluri acteurs 110 VII Conclusions 7.1 Peut-on parler de coproduction de services publics sanitaires dans le système actuel ? 111 7.1.1 Cohabiter oui, collaborer non : une logique de confiscation du pouvoir plus que de partage de responsabilité 111 7.1.2 Les acteurs de l’ombre et la mise en œuvre des logiques verticales 116 7.1.3 L’élimination orchestrée d’u acteur gênant, potentiellement tout puissant : les usagers/citoyens 119 7.1.4 Un bilan très mitigé 121 7.2 Les politiques de décentralisation favorisent-elles la promotion du développement local et l’expression d’un pluralisme d’opinions et de visions sanitaires ? 121 7.2.1 Les enjeux autour desquels se cristallise l’attention des acteurs locaux concernent les questions de pouvoir et d’accès aux ressources 122 7.2.2 Les résultats limités et certaines conséquences préjudiciables 122 7.2.3 Les politiques de décentralisation soutiennent mal le principe de démocratisation de la santé ? 123 7.3 La contre performance des élus locaux en termes d’innovation 124 7.3.1 La condition d’élu 124 7.3.2 La faible valorisation du pouvoir des urnes et la tentation d’un pouvoir fort 127 7.3.3 Une culture du consensus omniprésente 132 7.3.4 Un dispositif législatif et des conditions d’accompagnement peu soucieux du renforcement de la démocratie locale 134

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    7.3.5 Une culture médicale corporatiste difficile à contester et une légitimité à intervenir des profanes difficile à acquérir 138 7.3.6 Conclusion 139 7.4 Des tentatives d’innovations dans le domaine de la santé 140 7.4.1 Un scepticisme généralisé 140 7.4.2 Les leaders des syndicats inter collectivités 141 7.4.3 L’Asaco de S. à Sikasso 143 7.4.4 Une innovation de la coopération suisse : La définition concertée d’une politique régionale de santé 143 7.5 La restitution des conclusions de la recherche et son impact sur la gouvernance locale 144 7.6 Le volet action Bibliographie 145

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    Introduction Cette étude s’inscrit dans le cadre d’un programme de recherche action intitulé « L’Etat local, la gouvernance quotidienne et les réformes du service public ». Mené dans 4 pays simultanément1, ce programme part d’un double constat :

    - les réformes décidées à l’échelle nationale donnent rarement les effets escomptés et aucune analyse approfondie des conditions de leur mise en œuvre locale ne vient informer sur les causes de ces échecs ou échecs partiels

    - les innovations visant une amélioration des services publiques ont de plus fortes chances de pérennité si elles sont initiées localement en tenant compte des réalités du milieu et des acteurs.

    Doublement innovant, - il propose de développer des études empiriques sur le fonctionnement ordinaire des

    services publics en Afrique, et plus généralement la délivrance des biens publics. - il prévoit une articulation de la recherche et de l’action, l’action étant définie comme

    un accompagnement des réformateurs locaux identifiés lors de la phase de recherche.

    Au Mali, le BUCO a choisi les domaines de la santé et du développement social pour la mise en œuvre de ce programme, et a proposé la région de Sikasso. I Problématique Dans le cadre de ce programme, nous avons choisi ici de nous intéresser au double mouvement de décentralisation qui concerne le secteur de la santé au Mali depuis plus d’une décennie et de chercher à comprendre le nouveau mode de gouvernance de la santé qui en résulte. 1.1 Finalité de la recherche La finalité de cette recherche est d’étudier comment se dessine, dans ce domaine très corporatiste de la santé, une coproduction de services publics en matière de santé, consécutive au double mouvement de décentralisation sectoriel et administratif Dans un contexte où l’Etat n’a plus le monopole de la délivrance de services publics, et où associations, collectivités décentralisées, structures privés représentent maintenant autant d’acteurs intervenant dans la production de services publics, nous parlerons ici de gouvernance de la santé, « définie ici loin de toute acception normative, comme l’exercice d’un pouvoir caractérisé par l’interaction de multiples acteurs. »2 Les textes législatifs permettent de se faire une idée de ce que peut être la gouvernance officielle de la santé dans un contexte de décentralisation. Une étude des interactions entre

    1 Projet expérimental de recherche-action, Etat local, gouvernance quotidienne et réformes du service public

    dans quatre pays africains (Bénin, Burkina Faso, Mali, Niger) 2 La gouvernance au quotidien en Afrique : les services publics et collectifs et leurs usagers, G Blundo (ed),

    Apad bulletin n°23-24 ; De la nouvelle anthropologie du développement à la socioanthropologie des espaces

    publics africains, Jean-Pierre OLIVIER DE SARDAN N° 191, juill-sept2007 - p. 1-10 - REVUE TIERS

    MONDE

  • 10

    les acteurs met au jour leurs pratiques réelles et les normes pratiques auxquelles ils se réfèrent. Or, « Etudier la gouvernance, c’est étudier la gouvernance réelle, et non la gouvernance idéelle, autrement dit s’intéresser aux écarts entre normes officielles et normes pratiques. »3 Nous nous baserons sur une étude des interactions pour ce qu’elles nous enseignent sur le positionnement des acteurs localement, mais également sur leur intégration dans des logiques plus verticales. Deux questionnements sont au centre de cette recherche :

    - Quelle appropriation les acteurs locaux font-ils de cette double politique de décentralisation ?

    - Est-ce que cette relecture des réformes de décentralisation par les acteurs locaux ouvre la porte à des innovations, et si oui, lesquelles ?

    1.2 Justifications du thème retenu 1.2.1 Ces réformes de décentralisation représentent un enjeu politique et social

    considérable La décentralisation sectorielle de la santé a été introduite en Afrique dans le cadre des principales réformes des systèmes de santé, décidées lors des grandes conférences internationales (Ottawa, Toronto, etc.) Cette ouverture de la santé à d’autres acteurs, profanes, permet d’envisager une certaine démocratisation du secteur ce qui parait doublement salutaire : - les analyses scientifiques, techniques convergent pour reconnaitre que les

    dysfonctionnements dans le domaine sanitaire doivent être attribués autant à une mauvaise gestion des ressources humaines et matérielles disponibles qu’à leur pénurie.4

    - On observe un décalage croissant entre les propositions des professionnels et responsables des politiques de santé publique et les attentes des populations. C’est particulièrement vrai en Afrique où, le système biomédical s’est construit parallèlement et en concurrence aux dispositifs de soins existants. Comme ailleurs, les déterminants politiques et socioéconomiques de la santé deviennent des déterminants majeurs de la santé des populations, y compris pour des pathologies infectieuses. Or, les professionnels de santé sont peu préparés à la prise en compte de tous ces aspects.

    Face à cette réalité, la décentralisation offre théoriquement l’opportunité : - d’évoluer vers une nouvelle forme de gouvernance de la santé, pluri-acteurs - de passer d’une gestion sectorielle, nationale, corporatiste des affaires de santé à

    une gestion locale, transversale et pluridisciplinaire. - de faire de la santé une « chose » publique, un objet de débats publics, cruellement

    absents jusque là.

    3 A la recherche de normes pratiques de la gouvernance réelle en Afrique, Jean pierre Olivier de Sardan,

    Working Paper for APPP 4 J.F Médard, in Apad n°21, p 31

  • 11

    1.2.2 L’étude de ces réformes présente un double intérêt scientifique - Pour mener à bien l’étude d’une réforme des politiques publiques, plusieurs

    éléments d’analyse sont à prendre en compte5 : o le contenu de la réforme, o les modalités de sa mise en œuvre, o le contexte dans lequel elle se déroule o et enfin le rôle des principaux acteurs qui peuvent influer sur sa mise en

    œuvre. Les deux premières étapes mobilisent généralement l’attention des cadres nationaux et experts internationaux chargés de leur élaboration. En revanche, la réalité de la mise en œuvre locale de cette réforme, la perception du processus par les acteurs locaux et leur appropriation de la réforme, sont peu traités. De plus, le résultat des politiques publiques mises en œuvre dépend étroitement du contexte dans lequel elles prennent place et des modalités de mise en œuvre. V. Ridde montre ainsi que l’émergence et la formulation de la réforme qu’il étudie au Burkina Faso, « l’Initiative de Bamako, « sont largement exogènes et sont l’aboutissement d’un processus de consultations internationales »6 mais que les conditions de son implantation et de sa mise en œuvre en revanche sont influencées par de multiples facteurs qu’il convient d’étudier avec précision.

    - Sur le plan universitaire, et depuis les années 90, la décentralisation en Afrique

    représente un thème d’étude important en anthropologie du développement. Les chercheurs se sont intéressés particulièrement à la mise en œuvre de la décentralisation administrative, et notamment l’articulation entre ce nouveau pouvoir issu des urnes et les pouvoirs locaux existants.7 Dans le domaine de la santé, peu d’études anthropologiques viennent documenter de manière empirique les conditions de mise en œuvre concrète d’une double réforme de décentralisation. Or, l’introduction de nouveaux acteurs dans le domaine sanitaire modifie inévitablement la gouvernance de la santé. Les réformes de décentralisation institutionnelle et sectorielle conjuguées font de la santé aujourd’hui au Mali, un objet de négociation, de conflits, entre acteurs, internationaux, nationaux et locaux. Les multiples conflits de compétence, les atermoiements actuels du gouvernement autour du transfert des ressources et le positionnement ambigu des partenaires au développement témoignent de cette réalité.

    5 V. Ridde, in Kingston à Bamako : conceptualiser l’implantation d’une politique publique de santé en Afrique », in politique et sociétés, 23(2 -3), 2004 6 V. Ridde, in Kingston à Bamako : conceptualiser l’implantation d’une politique publique de santé en Afrique »,

    in politique et sociétés, 23(2 -3), 2004 ; 7 L’Etat en Afrique : entre le global et le local, J du bois de Gaudusson et JF Médard, Afrique contemporaine,

    trimestriel n°199, juillet sept 2001 ; Décentralisation, pouvoirs sociaux et réseaux sociaux, G. Blundo et R.

    Mongbo (eds), APAD bulletin n°16, Décentralisation et pouvoirs en Afrique, C. Fay, Y Koné et C. Quiminal,

    2006 ; La décentralisation au Mali : Etat des lieux, Bréhima Kassibo, APAD bulletin n° 14 ; Bierschenk, T. &

    Olivier de Sardan, J.P. (eds), 1998, Les pouvoirs aux villages : le Bénin rural entre démocratisation et

    décentralisation, Paris : Karthala

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    1.2.3 Un contexte favorable à la réalisation de cette recherche a) Une période propice - On dispose d’un recul de 15 ans, suffisant pour faire de l’application de cette réforme

    et de son appropriation un objet d’étude. - Après une phase très active de mise en œuvre de la réforme, la période actuelle se

    caractérise plutôt par un certain flottement et on observe même actuellement un recul de l’Etat, assez prévisible face aux nouveaux enjeux considérables et à la complexité de leur mise en œuvre (transfert de ressources). La réforme est à un tournant décisif :

    o soit un retour en arrière avec balisage étroit et verrouillage du transfert de compétence par les services de l’Etat

    o soit un pas en avant décisif, vers l’effectivité du transfert des ressources et une responsabilisation accrue des collectivités.

    b) La cohérence créée par le double mouvement de décentralisation, institutionnelle et sectorielle Le ministère de la Santé a initié une décentralisation sectorielle depuis une quinzaine d’année et la décentralisation administrative est venue s’articuler, non sans difficulté, à cette réforme sectorielle et lui offrir un contexte institutionnel cohérent.

    c) Un contexte géographique intéressant - La région de Sikasso est une région phare du Mali. A ce titre, elle souffre ou bénéficie,

    selon le point de vue, d’une attention particulière de la capitale et des instances nationales.

    - Région cotonnière, elle a bénéficié des efforts importants de mobilisation et d’organisation communautaire des populations (mise en place d’AV, de syndicat) qui familiarisent les habitants avec ces notions de participation, de mobilisation autour d’enjeux collectifs.

    - Certaines innovations locales intéressantes y ont pris place, ainsi que l’enquête collective Ecris, menée dans la région en juin 07, l’a révélée : expérimentation du transfert de ressources aux collectivités par la coopération suisse, élaboration d’une politique régionale de santé, etc.

    1.3 Méthodologie 1.3.1 Un contexte urbain Le programme Etat local dans lequel cette recherche prend place concerne le milieu urbain. Outre le niveau régional, nous avons retenu les cercles de Sikasso et de Kadiolo pour illustrer la gouvernance de la santé à ces niveaux de décentralisation. Et c’est la commune de Sikasso qui a été choisie pour une étude de cas concernant le niveau le plus périphérique de la pyramide sanitaire mais également le plus poussée de la décentralisation. 1.3.2 Une approche résolument qualitative, anthropologique Pour cette recherche, nous avons privilégié une approche qualitative sur la base d’entretiens, souvent répétés, avec les acteurs clefs, aux différents échelons de la pyramide

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    sanitaire. Nous avons ainsi réalisé plus d’une centaine d’entretiens, pour la plupart avec les acteurs locaux (agents de la DRS et de la DRDES, de l’hôpital, du CSREF, des CSCOMs, membres des bureaux des Asaco et de leur fédération locale ou régionale, élus de la commune, du conseil de cercle, de l’Assemblée régionale, du Buco, du syndicat inter collectivités, d’acteurs de la société civile) mais également avec quelques responsables nationaux (cellule décentralisation du ministère de la Santé, Fenascom, DNCT). Ces entretiens ont été complétés par l’observation des interactions entre acteurs lors de rencontres ou réunions auxquelles nous avons participé : rencontres autour des programmes opérationnels (PO) des collectivités, réunions du CROCEP, assemblée générale des Asaco, etc. Enfin, nous avons procédé à l’analyse des documents disponibles : textes législatifs, rapports, contrats, etc. 1.3.3 Une perspective comparatiste Nous avons choisi de développer cette recherche aux différents niveaux de décentralisation car chacun présente des spécificités qu’il nous a paru intéressant de faire ressortir et de comparer. En particulier, la marge de manœuvre des acteurs locaux dépend du poids et de l’ancienneté de la présence de l’Etat central, variable selon qu’on se situe au niveau communal, cercle ou région. - Au niveau communal, l’intervention de l’Etat dans les questions de santé est

    indirecte et le dispositif communautaire (Asaco) a précédé la décentralisation administrative donc l’instauration des communes. L’implication financière faible de l’Etat offre une plus grande marge de manœuvre aux acteurs locaux et ouvre potentiellement la porte à des initiatives locales.

    - A l’échelle du cercle, le rôle de l’Etat s’est toujours imposé et les autres acteurs peinent à s’y faire une place.

    - Enfin, au niveau régional, les textes ne prévoient pas de transfert de compétence à l’Assemblée régionale. Cette institution a en revanche un devoir de mise en cohérence, dont l’imprécision laisse une marge d’initiative importante aux acteurs locaux.

    De même, dans nos entretiens, nous avons retenu comme interlocuteurs des représentants des services techniques de la santé et du développement social dans la mesure où ces deux domaines sont généralement étroitement associés (y compris dans les études de cas que nous avons retenues) et peuvent avoir des points de vue différenciés sur ces questions. 1.3.4 Une démarche centrée autour de deux études de cas en milieu urbain Outre l’étude des perceptions et de l’application des textes, nous avons centré notre travail d’enquête autour d’études de cas, afin d’apprécier les pratiques et les interactions entre acteurs autour d’enjeux concrets (ressources financières, humaines, information) et les situations conflictuelles et/ou de collaboration qui en résultent. a) L’expérimentation suisse du transfert de ressources aux collectivités Notre première étude de cas concerne l’initiative de la coopération suisse qui expérimente, à travers un financement local, le transfert de ressources aux Conseils de Cercle de Kadiolo et de Sikasso et à l’Assemblée régionale de Sikasso.

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    b) La gestion de deux CSCOM dans la ville de Sikasso Cette étude de cas permet d’illustrer comment se matérialise la gouvernance locale de la santé à l’échelle communale. Elle porte sur la gestion de CSCOM, piliers de la décentralisation sanitaire, structures de santé périphériques, associatives et donc privées, gérées par des associations de santé communautaire. Plus que financier, l’enjeu autour duquel s’organisent les différents acteurs est la gestion des ressources humaines.

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    II Présentation des réformes de décentralisation et du contexte géographique et sanitaire Nous présenterons ici successivement, et chronologiquement les deux réformes de décentralisation qui concernent le champ de la santé, réformes nationales, l’une et l’autre impulsées et largement financées par la communauté internationale. 2.1 La réforme sectorielle santé La réforme de décentralisation de la santé a précédé la réforme institutionnelle. Les professionnels de santé expriment d’ailleurs une certaine fierté à avoir été pionniers en la matière. Ils regrettent que la réforme administrative n’ait pas mieux pris en compte leur expérience, au moment de légiférer sur le transfert de compétences dans le domaine de la santé, pour une meilleure articulation des deux politiques 2.1.1 Rappel historique De la colonisation, le Mali a hérité un système de santé pyramidal et hospitalo-centré, organisé essentiellement autour de la lutte contre la maladie à travers la mise en œuvre de programmes verticaux. A la fin des années 70, les faibles performances du système de soins (faible taux d’utilisation des services, médiocre qualité des soins et faible disponibilité des médicaments) conduisent le pays à amorcer une réforme dans le sens d’une décentralisation des structures de santé. Les recommandations internationales, à travers le concept de soins de santé primaires (SSP), invitent en effet à un renforcement du niveau périphérique et à une implication communautaire forte. Les SSP se matérialisent sous la forme de travailleurs communautaires bénévoles, hygiénistes-secouristes et accoucheuses traditionnelles, rapidement formés et chargés d’assurer les premiers soins. Les prestations qu’ils offrent dépassent rapidement leur cadre normal d’intervention (pratiques de consultations, actes infirmiers tels que les injections, vente de médicaments) sans satisfaire pour autant les besoins des usagers. L’adoption en 1990 par le gouvernement du Mali de la politique sectorielle de santé et de population constitue une étape majeure dans le développement sanitaire. Dans le cadre de l’IB (Initiative de Bamako), il est envisagé plusieurs stratégies novatrices :

    - Le renforcement de la participation communautaire - L’extension des services de santé périphériques et l’augmentation de la couverture

    sanitaire - L’assurance de la disponibilité et de l’accessibilité des médicaments essentiels - La mobilisation des ressources nécessaires au financement de la santé. Cette

    dernière stratégie introduit le recouvrement des coûts et comprend la rationalisation de l’utilisation de ces ressources à tous les niveaux

    2.1.2 La participation communautaire comme axe majeur de cette politique Pour améliorer la viabilité des structures périphériques et l’accessibilité géographique, le pays est divisé en aires de santé selon des critères techniques spécifiques (784 aires de santé sont ainsi prévues dans le plan décennal de développement sanitaire 1998-2007). Chaque aire de santé doit être dotée d’un CSCOM, en respectant les critères suivants :

  • 16

    - La viabilité économique (autofinancement des activités) donc un minimum de 5 000 habitants par aire et l’absence de toute offre de santé équivalente dans le même périmètre

    - Une distance maximale de 15 km entre tout village adhérent de l’aire et le site du CSCOM (accessibilité géographique),

    - Une adhésion d’au moins 10 % de la population à l’ASACO et l’acceptation du site de construction du CSCOM.

    Conformément au décret N°05/299 de 2005, fixant les conditions de création et les principes fondamentaux de fonctionnement des centres de santé communautaires, les CSCOM sont des structures privées à but non lucratif et sont gérées par des associations de santé communautaires (ASACO). Une communauté désireuse d’obtenir un CSCOM doit d’abord former une ASACO. L’ASACO crée ensuite un CSCOM. La gestion rigoureuse par l’ASACO des fonds générés par le biais du système de recouvrement des coûts constitue un aspect important pour la disponibilité permanente des médicaments et la viabilité à long terme du CSCOM. En effet, un tel recouvrement permet au CSCOM de pouvoir fonctionner moyennant une subvention du ministère de la Santé. L’ASACO est autorisée à recruter et à payer du personnel, à gérer des ressources financières et à posséder des bâtiments. L’adhésion à une ASACO est facultative, individuelle ou collective (village, fractions ou familles). A sa création, une ASACO élit en assemblée générale les membres de son conseil d’administration, du comité de gestion chargé du suivi quotidien des activités du CSCOM et du comité de surveillance. Le chef de poste du CSCOM est membre de droit du comité de gestion de l’ASACO. Les membres des organes de gestion de l’ASACO sont des personnes bénévoles. L’État quitte son rôle de prestataire direct des services de santé de base. Un partenariat basé sur la contractualisation est donc érigé comme principe de la politique nationale de santé. Il est applicable à l’ensemble du système malien de soins de santé primaires, ce qui implique une révision en profondeur des rôles de l’État et des populations. Le partage des responsabilités et des engagements financiers entre population et l’État est formalisé dans la convention d’assistance mutuelle. La convention fixe les modalités par lesquelles le ministère de la santé va exercer son contrôle de tutelle, par l’intermédiaire de l’équipe-cadre de cercle (district), et les dispositions prévues en cas de non-respect des engagements ou de dénonciation de la convention. En 1994, se tient le premier congrès de la Fenascom (Fédération Nationale des Associations de santé communautaire), de manière plutôt informelle, puis un congrès par cercle pour mettre en place les Felascom puis les Ferascom. Ce n’est qu’en 1997 que peut se tenir légalement le congrès constitutif de la Fenascom. La Fédération nationale des associations de santé communautaire du Mali est reconnue d’utilité publique depuis 2002. 2.1.3 La réorganisation du système de la santé Suite à cette réforme organisationnelle en vue de décentraliser et déconcentrer les responsabilités aux échelons inférieurs, la répartition des responsabilités et des tâches entre les trois niveaux se fait de la manière suivante :

  • 17

    - L’administration centrale (ministère, services centraux, services personnalisés et rattachés) est chargée de la conception, de la coordination et du contrôle de la mise en oeuvre de la politique générale, de l’allocation des ressources. Elle décide de la délégation des tâches et des responsabilités aux échelons inférieurs du ministère. Ce niveau est également chargé de la gestion des hôpitaux nationaux spécialisés.

    - Le niveau régional a comme principales tâches de fournir un appui technique aux

    cercles (formation, supervision, monitorage, suivi-évaluation et mobilisation de ressources). Cet échelon est chargé de veiller au respect de la politique et des normes et directives nationales. Dans le cadre de cette politique de décentralisation sectorielle, le principe de délégation est appliqué aux hôpitaux, auxquels sont transférés des responsabilités gestionnaires (autonomie de gestion). Ils deviennent des établissements publics hospitaliers.

    - Le cercle est doté d’un Centre de Santé de Référence et propose des services de

    santé intégrés, sous contrôle communautaire. Chaque CSREF est en effet piloté par un conseil de gestion (COGES) chargé d’examiner son bilan et de planifier les activités. Les CSCOM réfèrent aux Centres de santé de référence (CSREF) qui assurent les soins du second niveau et réfèrent eux-mêmes aux hôpitaux régionaux et nationaux. Le district sanitaire devient le maillon fort de la pyramide sanitaire et constitue l’unité opérationnelle de planification. Il correspond à un cercle et regroupe un certain nombre d’aires de santé. L’équipe socio sanitaire du cercle (ESSC) élabore des plans de développement sanitaire de cercle (PDSC), veille et participe à leur application par les CSCOM sur l’ensemble du cercle. Elle est chargée en outre de l’appui technique aux CSCOM et de leur supervision.

    - Le CSCOM est la structure de premier contact de la population. Le chef de poste doit

    être au minimum infirmier et un paquet minimum d’activités est défini. Le principe de recouvrement des coûts est retenu et justifié, comme la première et principale manifestation de cette implication communautaire. L’apport de l’Etat se limite à la dotation initiale en médicaments et en équipements, à la formation du personnel et à la supervision des centres, quelquefois à l’affectation d’un fonctionnaire en tant que chef de poste. L’Etat peut également affecter dans les CSCOM du personnel rétribué sur fonds PPTE. Il met à leur disposition un système d’approvisionnement en médicaments génériques. Pour leur fonctionnement courant, les CSCOM disposent essentiellement des fonds générés par le recouvrement de coût et l’appui éventuel de partenaires locaux.

    Un système de référence-évacuation est mise en place pour la prise en charge des urgences obstétricales mais n’est pas toujours fonctionnel.

  • 18

    2.1.4 L’approche sectorielle8 Le plan décennal de développement sanitaire et social (PDDSS) dont la tranche quinquennale constitue le PRODESS (programme décennal de développement sanitaire et social) sert de cadre de référence à la mise en œuvre de la politique sectorielle de santé. Le décret 01-115 du 27 février 2001 fixe la création des organes d’orientation, de coordination et d’évaluation du PRODESS, au niveau national (comité de suivi et comité technique), régional (comité régional d’orientation de coordination et d’évaluation du PRODESS (CROCEP) et local (comité de gestion de cercle). Il prévoit une participation de la société civile à toutes ces instances. Le CROCEP, organisé annuellement, est chargé d’examiner et de valider les plans et programmes de développement sanitaire et social des cercles et de la région. Le système de planification passe par plusieurs niveaux d’arbitrage. Un premier plan est élaboré au niveau de l’aire de santé (le micro-plan) par l’ASACO et le personnel du CSCOM qui s’assurent de la conformité des propositions avec les orientations nationales et les directives régionales. Ces micro-plans sont ensuite présentés, discutés, consolidés et validés par le conseil de gestion du CSREF donnant ainsi le plan opérationnel du cercle (PO) qui tient compte des limites budgétaires. Ce plan de cercle est ensuite transmis au niveau régional et validé lors du Comité régional d’orientation, de coordination et d’évaluation du PRODESS (CROCEP) conformément aux orientations nationales (politique et allocation budgétaire). Une fois approuvé, le plan régional est envoyé au niveau central. Ce niveau élabore le plan national global, qui sera soumis au Comité de suivi pour approbation, après validation par le Comité technique. Cette chaîne de décision, depuis le micro-plan jusqu’à l’approbation finale, prend plusieurs mois. L’approche sectorielle définit aussi la collaboration entre l’État malien et les partenaires techniques et financiers (PTF). Un bon nombre de programmes et de projets, opérationnalisés au niveau régional ou local, ont été intégrés dans la politique sectorielle. Une vision stratégique précise, qui est décrite dans un énoncé de politique sectorielle dûment approuvé par le gouvernement, guide le développement du secteur. Elle est accompagnée d’une enveloppe budgétaire clairement définie et suivie. Dans le budget alloué aux ministères de la Santé et du Développement social, des dispositions particulières distinguent les fonds propres de l’Etat et ceux de l’aide budgétaire appelés « fonds PRODESS ». Chaque fonds est géré suivant des modalités distinctes, dispositions de la loi des finances (fonds propres Etat) et du PRODESS (fonds de l’aide budgétaire). Les fonds du PRODESS échappent ainsi aux contraintes comptables de la loi des finances et sont plus avantageux pour les agents : montant des per diem largement supérieur à ce que prévoit la loi des finances par exemple (15 000 au lieu de 4000 FCFA). Cette réforme sectorielle se traduit rapidement par une amélioration sensible de la couverture sanitaire et des principaux indicateurs de santé, comme le montrent les enquêtes démographiques et de santé Mali réalisées en 2001 et 2006. On reconnait également aux équipes cadres de district sanitaire une certaine fonctionnalité, se traduisant par un soutien effectif aux centres de santé de premier niveau (médicaments, formations, système

    8 Pour cette partie, nous nous sommes largement inspirés de la présentation proposée dans le bulletin 383,

    « Réaliser le transfert de compétences dans le domaine de la santé »

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    d’évacuation) et la mise à disposition de médicaments génériques, ce qui fait baisser considérablement le montant moyen de l’ordonnance. 9 En revanche, et après une augmentation sensible, les taux d’utilisation des services curatifs de soins se stabilisent à un niveau qui reste assez bas (taux d’utilisation en consultation curative de 0,26 en 2006). De même, les évaluations restent nuancées quant à l’amélioration de la qualité des soins prodigués et à l’organisation de la référence, encore peu fonctionnelle.

    C’est dans ce contexte d’ouverture du secteur de la santé que s’annonce et vient prendre place la réforme de la décentralisation institutionnelle.

    2.2 La réforme de décentralisation institutionnelle 2.2.1 Historique de la réforme et son contenu « Inscrite dans les différentes Constitutions du pays depuis l’indépendance, la décentralisation n’avait jusque là connu que de timides concrétisations. La première République de Modibo Keita (1961-1968) et la Seconde République de Moussa Traoré (1968-1991) furent en effet marquées par une centralisation extrême. »10. Les événements de mars 1991 constituent un tournant décisif dans l’évolution politique du pays. Après la Conférence nationale, la décentralisation est inscrite dans la nouvelle Constitution de 1992. Imposée par les difficultés croissantes de l’Etat à faire face à ses obligations et impulsée par les instances internationales dans un contexte d’ajustement structurel, cette réforme suppose une disparition progressive de la « structure tunnel » « dans laquelle le pouvoir s’exerce verticalement du sommet à la base et l’uniformisation des pratiques devient la règle générale. »11 Le cadre légal de la décentralisation est décrit dans la loi-cadre no. 93-008, qui stipule les conditions de libre administration des collectivités territoriales à travers des organes délibérants et exécutifs. La loi prévoit la mise en place de quatre types de collectivités territoriales, gérées par des conseils élus, toutes dotées de leurs propres organes délibérants et exécutifs. Il n’y a pas de principe de subordination hiérarchique entre les collectivités décentralisées et la réforme ne prévoit pas le village comme entité juridique reconnue. Au niveau national, le Haut Conseil des Collectivités a une mission de plaidoyer et un rôle purement consultatif dont il se satisfait mal. Bien qu’il ne soit pas une revendication populaire, le processus de décentralisation rencontre néanmoins une large adhésion, d’autant que la démarche se veut participative et que la constitution des communes se fait sur la base d’un regroupement volontaire de villages, autant d’originalités de cette voie malienne de décentralisation.

    9 Qualité de la prescription et de la dispensation des médicaments au Mali. OMS, M. Maiga, A. Maiga et

    Diawara D, Direction de la pharmacie et du médicament. Avril 2005 10 Mali : la politique de décentralisation à l’heure de l’agenda de Paris pour l’efficacité de l’aide ». Sonia

    Languille. In Politique africaine, N°120 déc. 2010 11 Expression d’un ministre de la troisième république du Mali cité par B Kassibo, p3, in La décentralisation au

    Mali : Etat des lieux ; Bréhima Kassibo (ed), Apad n°14

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    Néanmoins, l’ampleur de la réforme (elle concerne toute l’étendue du territoire) et les modalités de sa mise en œuvre suscitent quelques inquiétudes ou réticences. Certains craignent un éclatement de l’unité nationale et l’affaiblissement de l’Etat central. Le processus de décentralisation est fortement appuyé par les partenaires techniques et financiers de l’Etat, surtout pendant la première décennie de sa mise en place, période pendant laquelle la volonté politique des responsables maliens (2 gouvernements successifs d’Alpha Oumar Konaré) imprime un rythme soutenu à la réforme. La Mission de décentralisation et de réformes institutionnelles (MDRI), rattachée au Premier ministre, pilote la phase de conception de la réforme (cadre législatif, découpage territorial, préparation des élections, politique d’information). Elle est remplacée en 1998, par le ministère de l’Administration territoriale et des collectivités locales qui pilote désormais le processus. Le processus de décentralisation aboutit finalement à la création de 703 communes, de 49 cercles, de 8 régions et d’un district (Bamako) à l’issue des élections organisées en 1999. Le domaine de compétences des collectivités territoriales est un ensemble de missions et de responsabilités qui leur sont conférées par la loi. Elles sont responsables de l’élaboration et de la mise en oeuvre des programmes de développement économiques, sociaux et culturels sur leur territoire pour la population en général et pour les groupes défavorisés en particulier. Leur proximité avec les bénéficiaires doit permettre de mieux cibler et d’adapter les services et les investissements aux besoins locaux des populations. Les ressources matérielles et financières pour l’exercice de ces compétences sont à transférer concomitamment. Les collectivités restent soumises à la tutelle de l’État qui se résume à des missions d’appui conseil et de contrôle de légalité. Un dispositif d’appui technique (centre de conseil communal ou CCC) et financier (ANICT ou Agence nationale d’investissement des collectivités territoriales) est rapidement envisagé pour répondre au double problème auquel les collectivités sont confrontées :

    - un déficit en aptitudes techniques et administratives - un manque de disponibilité de moyens techniques et financiers.

    Prévu au départ pour 4 ans puis reconduit jusqu’en fin 2007, il constitue une solution transitoire. Le dispositif d’appui technique aux collectivités décentralisées prend fin en décembre 2007. Plusieurs dispositifs sont alors envisagés :

    - La création de syndicats inter communaux (SECOM). Ces syndicats concernent toutes les communes du cercle et le Conseil de cercle. Leur fonctionnement doit être assuré par les cotisations des collectivités membres (2% de la TDRL collectée par tous les membres) et par les frais d’adhésion. Les élus espèrent également pouvoir disposer de la dotation d’appui technique prévue pour les collectivités sur fonds ANICT.

    - La création de pool des services techniques (services déconcentrés) se mettant à la disposition des collectivités contre rémunération et à la demande de celles-ci.

    C’est finalement la première option qui est retenue, grâce au soutien des PTF. La création et le transfert du matériel des CCC aux syndicats créés s’opèrent souvent contre le gré de l’administration.

  • 21

    2.2.2 Le transfert de compétence du domaine de la santé aux collectivités Le transfert de compétences prévoit 12: - De supprimer la base légale de la gestion par l’État dans un domaine d’activité. - D’organiser légalement la prise en charge de cette compétence par le nouveau

    destinataire. - De transférer les biens, les ressources financières et le personnel affectés à la fonction. Les compétences d’administration générale (fonctions d’état civil, recensement, police administrative, hygiène et assainissement, archives et documentation, etc.) sont transférées depuis 1999. A l’issue d’un long processus de concertation et d’études, piloté par la Commission interministérielle de pilotage du transfert de compétences à travers le ministère de l’Administration territoriale et des collectivités locales (MATCL), le gouvernement signe les décrets de transfert de compétences dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de l’hydraulique en juin 2002. Ainsi, au niveau des communes et des cercles, les maires et les Présidents des conseils de cercle deviennent les premiers responsables de la santé. Le décret 314 du 4 juin 2002 fixe les détails des compétences importantes transférées de l’Etat aux communes en matière de santé :

    - Élaboration et mise en oeuvre du plan de développement de la santé. - Subvention financière aux travaux de construction et à l’équipement des CSCOM. - Autorisation de création des centres de santé communautaire. - Signature de la convention d’assistance mutuelle avec les ASACO. - Subventions des activités des ASACO. - Contribution à la prise en charge du salaire de certains agents. - Mise en place d’un stock de roulement initial de médicaments essentiels. - Lutte contre la vente illicite de médicaments. - Information, éducation et communication en santé. - Lutte contre les épidémies et catastrophes. - Mobilisation sociale autour des objectifs socio-sanitaires. - Suivi et contrôle de la gestion des ASACO. - Suivi et contrôle de la transmission effective des données d’information, y

    compris les données financières au médecin chef du cercle. La commune délègue la gestion quotidienne du CSCOM à l’ASACO qui doit lui rendre compte et l’associer étroitement à la gestion des questions de santé. La signature de la convention d’assistance mutuelle intervient désormais entre la commune et l’ASACO, sans implication de l’État. Le décret 314 précise également les compétences transférées aux collectivités « cercle » :

    - Elaboration et mise en œuvre du plan de développement socio sanitaire de cercle (PDSC)

    - Recrutement du personnel - Construction, réhabilitation et équipement des CSREF - Mise en œuvre des politiques et stratégies nationales de prévention et de lutte

    contre les maladies

    12

    Source : MS/groupe décentralisation, 2005.

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    - Le décret 314 précise que les compétences transférées aux collectivités « cercle » sont les suivantes :

    - Elaboration et mise en œuvre du plan de développement socio sanitaire de cercle (PDSC)

    - Recrutement du personnel - Construction, réhabilitation et équipement des CSREF - Mise en œuvre des politiques et stratégies nationales de prévention et de lutte

    contre les maladies - Lutte contre la vente illicite de médicaments - Hygiène et salubrité publique - Elaboration et révision de la carte sanitaire de cercle - Allocation de subventions aux CSREF - Contrôle du respect des engagements des Asaco du cercle - Suivi et contrôle de la transmission effective des données d’information y compris les

    données financières aux DRS L’équipe cadre du district doit rendre compte au conseil de cercle et l’associer étroitement aux activités de planification. Le président du conseil de cercle préside le conseil de gestion du CSREF. Les maires des communes du cercle sont également membres ainsi que les autres acteurs de la santé au niveau du cercle. Le conseil se réunit au moins deux fois par an sur convocation du président. L’équipe cadre du CSREF reste responsable du suivi des CSCOM (tutelle technique) et la relation de référence dans la fourniture de services est maintenue. En fait, le système déconcentré ne change pas, mais l’appui technique par l’équipe socio sanitaire du cercle (ESSC) s’étend vers la commune. Les infrastructures et matériels des CSREF sont dévolus aux cercles par décision du haut commissaire de la région. En revanche, les textes ne prévoient pas de transfert de compétence aux régions, si ce n’est la responsabilité des infrastructures régionales (hôpital, école). Le rôle de mise en cohérence des politiques de développement prévu dans les textes est de nature plus politique que technique. Au niveau du ministère de la Santé, un point focal « décentralisation » est nommé en 2004. En 2005, un groupe thématique décentralisation est créé au niveau du ministère qui développe un plan d’action 2005-2007 pour l’opérationnalisation du transfert de compétences. Ce plan propose la création d’une Cellule d’appui à la décentralisation et à la déconcentration (CADD) au sein du ministère de la Santé, chargée d’élaborer des propositions pour le transfert des ressources financières, matérielles et humaines et d’initier des approches d’accompagnement. Il s’agit, entre autres, de définir les modalités d’une «gestion partagée » des services de santé. Une cellule d’appui à la décentralisation du ministère de la Santé est créée en décembre 2005 avec pour mission d’assurer la décentralisation et la déconcentration du ministère de la Santé, la décentralisation devant être effective à la fin du PRODESS 2. Le transfert de ressources retenu dans le schéma d’opérationnalisation avancé en 2004 a connu un retard dans sa mise en œuvre.

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    « Sur le budget de l’État, les fonds liés aux compétences ne sont pas estimés et l’évaluation doit être faite par la Direction administrative et financière du ministère de la Santé en collaboration avec le ministère des Finances. Quant au fonds des partenaires, une convention est signée par le ministère de la Santé avec l’ANICT pour le volet des investissements aux collectivités. Cette convention transfère la maitrise d’ouvrage aux collectivités communes. C’est un début de transfert des fonds de l’État aux collectivités pour l’exécution des projets de santé. Il y a un début de transfert des fonds sectoriels du PRODESS vers les collectivités à travers une convention signée entre le ministère de la Santé et l’ANICT. Il s’agit notamment des fonds des Pays-Bas et de la Suède dont le montant annuel est fonction du nombre d’infrastructures de santé à réaliser. Concernant le choix des infrastructures et équipements qui seront financés, le ministère de la Santé fournira une liste avec le nombre et les sites des CSCOM à construire. Le ministère donnera aussi les paramètres techniques de la construction à l’ANICT. Cette liste sera établie sur la base du plan opérationnel du cercle basé sur les PDESC des communes conformément à la carte sanitaire. La commune assure la maîtrise d’ouvrage du projet et elle est responsable de la passation des marchés publics, sous l’égide de l’ANICT. »13 Le système de planification et les procédures du PRODESS 1 ne tiennent pas compte au départ des fonctions des collectivités territoriales dans le domaine de la santé, puisque celles-ci n’existaient pas en 1998. L’existence de deux systèmes parallèles de planification et le manque de synchronisation entre le processus de décentralisation et l’approche sectorielle posent problème. En 2004, le PRODESS fait donc l’objet d’une révision (PRODESS-2) qui tient compte cette fois des responsabilités des collectivités territoriales. Actuellement, il est maintenant question d’organiser le transfert des fonds des programmes verticaux. « Je pense que s’il y a eu un ralentissement ces dernières années, c’était pour donner le temps de digérer les choses car on a avalé beaucoup d’émotions en même temps. Déjà, on a digéré, on a vu clair, on a maintenant le courage de foncer encore un peu et on va évaluer. Le transfert global décidé par l’Etat va se faire inévitablement mais il faut des mesures d’accompagnement.» Cellule décentralisation, ministère de la Santé, février 08 2.2.2 Une nécessaire relecture et opérationnalisation des textes Malgré la lenteur du transfert des ressources, l’exercice de compétences connaît un début d’exécution par les collectivités. Pour les communes, il s’agit entre autres :

    - de la signature de la convention d’assistance mutuelle commune-ASACO - de la subvention des activités de santé notamment la référence évacuation, les

    activités du PMA en stratégie avancée et le recrutement du personnel pour les CSCOM.

    Le financement des activités provient des budgets communaux, du recouvrement de coûts pratiqué dans les CSCOM mais aussi des initiatives de l’État et des partenaires. Au niveau du cercle, un grand nombre de conseils de cercle ont également pris en charge le recrutement du personnel, la subvention des activités de santé, l’élaboration et la révision

    13 Bulletin 383, Réaliser le transfert de compétence dans le domaine de la santé, T Hilhorst, E lodenstein

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    de la carte sanitaire et la mise en place des comités de lutte contre les épidémies et catastrophes. Malgré l’absence de texte de transfert des compétences au niveau régional, les assemblées régionales fournissent des appuis financiers et matériels aux établissements publics hospitaliers des régions et autres activités de promotion de santé. Des investissements importants ont été réalisés dans le domaine de la santé. Par exemple, entre 2001 et 2007, et sur l’ensemble du Mali, les collectivités territoriales ont construit 269 nouvelles infrastructures, maternités, dispensaires, centres de soins dotés d’équipements sanitaires.14 En revanche, on constate de très faibles avancées sur le transfert de ressources aux collectivités. Fin 2008, le transfert de ressources lié aux compétences transférées aux collectivités territoriales n’est toujours pas effectif, malgré les multiples effets d’annonce. L’Etat semble actuellement très conscient des problèmes que pose la responsabilisation de nouveaux acteurs. Il n’est pas possible non plus de différer éternellement le transfert de ressources. Si la réforme apparait aujourd’hui inéluctable, l’infléchissement dans sa mise en œuvre depuis 2003 est partout constaté. La volonté politique très forte pendant les premières années a fait place au scepticisme. De nombreux acteurs s’accordent sur la nécessité de temporiser pour mesurer la portée des dispositions déjà prises, mieux évaluer la complexité de leur application et prévoir les ajustements nécessaires. On constate que les textes sont difficilement opérationnalisables, sources à diverses interprétations et présentent certaines incohérences d’une réforme à l’autre. Ils suscitent de multiples conflits de compétence et des situations de blocages importantes. Des questions simples ne trouvent pas de réponse :

    - Qui est l’autorité responsable de l’élaboration du Plan de développement sanitaire du cercle (PDSC) : le Conseil de cercle ou le CSREF ?

    - Qui doit sanctionner une Asaco qui ne remplit pas ses obligations, un président qui ne rend pas compte aux autres membres ou qui détourne ?

    - Comment un élu ou une Asaco peuvent-ils contraindre les services techniques à rendre des comptes ?

    - Comment agir en tant que Conseil de cercle sur des collectivités, les communes, qui ne reconnaissent pas son autorité ? Comment articuler des actions, les programmations, en l’absence de subordination hiérarchique entre les collectivités décentralisées ?

    - Qui doit payer l’organisation d’un conseil de gestion de CSREF : le CSREF ou le Conseil de cercle ?

    Après plusieurs années de mise en application de ce transfert, une relecture et une révision des textes s’impose, la conception d’outils permettant de mieux les opérationnaliser et d’éviter ainsi les conflits de compétence, également. Les nouveaux textes s’articulent autour de trois préoccupations centrales :

    - Opérationnaliser les décrets existants par la réalisation et diffusion de guides - Harmoniser les réformes de décentralisation sectorielle et administrative et régler la

    question de la difficile adéquation entre le système pyramidal et hiérarchique de la

    14

    ANICT, 2007ANICT, 2007. Réalisations dans le secteur de la santé. http://www.anict-mali.org/realisation_sante.htm.

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    pyramide sanitaire d’une part et la libre administration de chaque niveau de collectivité

    - Préparer le transfert de ressources aux collectivités La révision des textes et l’élaboration de guides d’opérationnalisation dans le cadre du transfert de compétence sont en cours, sur la base d’une relecture du décret 314 et de la loi 115, notamment :

    - La révision du statut des Asaco, associations donc institutions privées, dont dépendent les CSCOM. Bien que l’investissement de l’Etat dans ces structures ait été conséquent, l’Etat ne peut théoriquement disposer des CSCOM et les transférer aux communes. Il est donc envisagé de faire des Asaco des structures d’utilité publique ou de reconsidérer leur statut de structures privées pour en faire des structures semi publiques.

    - La relecture de la loi 115, sous la pression du syndicat des préfets. Ces derniers demandent que les conseils de gestion par cercle se tiennent sous la présidence des préfets et non des présidents de conseils de cercle. En effet, selon les constats de la cellule de décentralisation de la santé, le système de santé doit fonctionner en articulant les différents niveaux de la pyramide sanitaire. Une cohérence d’ensemble ne peut être obtenue que par l’instauration de relations hiérarchiques entre différents niveaux (droit à intervenir sur le niveau inférieur, etc.). Or, selon le syndicat, les conseils de cercle ne peuvent revendiquer aucune prérogative sur ce qui se passe à l’échelle communale, raison pour laquelle ils doivent être dessaisis de ce rôle leader au profit des préfets qui jouent le rôle de tutelle et doivent vérifier la cohérence entre politique locale et politique nationale.

    - La relecture du décret 314 devrait permettre de combler le vide laissé au niveau régional en matière de transfert aux collectivités.

    - La représentation des Fédérations des associations communautaires dans les différents organes du CROCEP doit être prévue dans les textes

    - La législation sur la gestion du personnel doit être précisée : statut du personnel recruté sur fonds PPTE ; statut des fonctionnaires mis à disposition des collectivités

    - L’obtention de titres fonciers pour toutes les infrastructures sanitaires à transférer - La déconcentration et le renforcement des services déconcentrés pour limiter les

    interventions du niveau national et régional puisqu’il faut maintenant superviser l’ensemble des structures de santé mais également toutes les collectivités

    - L’harmonisation des processus de planification : il s’agirait de faire des micro planifications au niveau CSCOM pour coller aux réalités de la décentralisation (selon le PRODESS, le lieu de planification est le cercle) et de s’assurer que les directives nationales soient prises en compte dans les programmations des collectivités, cercles ou communes.

    Parallèlement à cette relecture des textes, la cellule de décentralisation du Ministère de la Santé a engagé la conception d’outils d’opérationnalisation du transfert de compétence sous la forme de guides de gestion du CSCOM, du CSREF, outils sensés préciser aux acteurs le rôle de chacun et le périmètre de leur intervention. Ces guides prévoient un positionnement en retrait des communes, chargées uniquement d’appuyer les Asaco pour maîtriser la planification et mobiliser des ressources. L’Asaco ne deviendrait plus seulement une association chargée de gérer un centre de santé

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    communautaire mais se verrait confier la mise en œuvre de toute la politique de santé à l’échelle de l’aire de santé. Au niveau des CSREF, il est envisagé à travers le guide de gestion des CSREF « d’éviter que le président du Conseil de cercle outrepasse ses droits, veuille occuper le bureau du médecin chef. Il est important de tout préciser, comment il doit gérer le personnel fonctionnaire, comment il doit recruter, qui il doit recruter. » Cellule de décentralisation Il est prévu enfin un guide d’opérationnalisation du transfert de compétences (du décret 314), pour aider à la planification globale (au-delà de ce qui est financé par la collectivité) puisque avec le transfert de ressources de l’Etat aux collectivités, tous les financements doivent transiter par les collectivités. « Il faut faciliter l’exercice des fonctions et éviter les conflits de compétences. Il faut aussi que l’Etat, lorsqu’il aura transféré les compétences, sache comment apprécier l’effectivité de l’exercice des compétences. Ce sont aussi des outils pour évaluer les acteurs, pour apprécier si chacun fait ce qu’on attend de lui pour que le système marche puisque malheureusement maintenant le système est multi acteurs et que les responsabilités sont partagées. Les collectivités ont la première responsabilité mais les autres acteurs sont incontournables pour la mise en œuvre du système. » Cellule de décentralisation, ministère de la Santé La procédure d’adoption de ces textes est longue : chacun d’entre eux doit être approuvé par diverses instances (différents cabinets, AMM, DNCT, HHC, comité de pilotage du transfert des ressources) avant d’être adopté par le cabinet du ministère de la Santé. Un atelier national a été organisé en décembre 2008 pour permettre aux acteurs nationaux concernés d’en apprécier le contenu. 2.3 Quelques éléments significatifs concernant ces deux politiques

    Ces deux réformes présentent des points communs qu’il convient ici de souligner :

    - Elles ont été pensées et portées par des institutions internationales ou des coopérations

    - Elles ont suscité l’une et l’autre des réticences importantes au niveau national - Elles ont été pilotées par l’Etat central, de manière assez peu consensuelle - Elles ont suscité à la base beaucoup d’incompréhension et de scepticisme par

    manque d’information et d’implication directe des acteurs locaux dans leur genèse, et d’outils permettant leur application

    - Elles traversent toutes les deux une zone de turbulence : o La réforme de décentralisation sanitaire est aux prises avec une gestion

    toujours insatisfaisante des Asaco, et est confrontée à la question d’accessibilité financière aux soins suite à l’introduction du recouvrement des coûts

    o La décentralisation institutionnelle peine à concrétiser un véritable transfert de compétence aux collectivités et à s’extraire des différents blocages auxquels elle est confrontée, avec la tentation forte, au niveau central, d’un retour en arrière.

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    2.4 Présentation du contexte géographique et sanitaire dans la région de Sikasso 2.4.1 Les données démographiques et administratives de la région de Sikasso La région de Sikasso s’étend sur une superficie de 76 480 km² soit 5,7 % du territoire national pour une population estimée à près de 2 300 000 habitants en 200715. La région de Sikasso a été érigée en région économique juste après l’indépendance. Depuis la réforme de décentralisation administrative, elle compte sept cercles (Sikasso, Bougouni, Kadiolo, Kolondiéba, Koutiala, Yanfolila et Yorosso), trois communes urbaines (Sikasso, Bougouni, Koutiala), 144 communes rurales et 1 831 villages. Le cercle de Sikasso compte 43 communes dont une urbaine et 489 villages officiels pour une population estimée à près de 650 000 habitants en 2007. Ce cercle se caractérise par une multitude de micro-communes dont la viabilité reste incertaine. Le cercle de Kadiolo compte 9 communes pour une population totale estimée à près de 185 000 habitants. La population de la commune urbaine de Sikasso est estimée16 en 2007 à 170 000 habitants. Les villages et quartiers sont administrés par des chefs de villages et de quartiers. La commune urbaine de Sikasso est dirigée par un conseil communal de 41 conseillers, issus de différents partis politiques. Aucune majorité politique ne se dégage clairement. Le bureau communal est composé du maire et de ses 5 adjoints. A ce niveau la TDRL recouvrée est inférieure à 2 % du montant attendu, ce qui montre le faible taux de mobilisation des ressources financières internes sans lesquelles le fonctionnement lui-même devient difficile. La commune urbaine abrite les services déconcentrés de l’Etat (régionaux et locaux). 2.4.2 Les données sanitaires La région de Sikasso, la plus importante démographiquement à l’échelle du pays, est une région phare sur le plan sanitaire et ses indicateurs influent de manière significative sur les indicateurs nationaux. Les autorités nationales sont donc particulièrement attentives aux performances ou contre performances qui y sont réalisées et l’œil de Bamako est toujours présent. Sur le plan sanitaire17, cette région présente des indicateurs souvent supérieurs à la moyenne nationale mais on constate de nombreuses disparités selon les cercles :

    - Le taux d’utilisation des centres de santé (CSREF et CSCOM), est de 0,33 nouveaux cas par an et par habitant en 2007, avec des variations significatives d’un cercle à l’autre (TU de 0,42 pour le cercle de Sikasso contre TU de 0,34 pour le cercle de Kadiolo, par exemple).

    - Cette région compte le plus grand nombre de CSCOM. La population vivant à plus de 15 km d’un centre de santé est passée de 8,6% en 2006 à 10,5 % en 2007.

    - Le cercle de Sikasso comprend 46 aires de santé dont 39 disposant d’un potentiel complet (Asaco fonctionnelle, personnel minimum requis disponible, PMA complet). Il dispose de 34% du personnel qualifié de toute la région (médecins, infirmiers obstétriciens, infirmiers d’Etat et sages-femmes). 38 aires de santé ont un bassin de

    15 source RGPH 1998 actualisée 16 Plan de développement économique social et culturel 2008-2012 (PDESC) de la commune urbaine de Sikasso,

    juin 08 17 Outils bilan santé 2007, RA 2007, base de données des ressources humaines au 12 août 2008, DRS Sikasso

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    population supérieur ou égal à 15 000 habitants conformément aux critères de viabilité des aires de santé. Les données fournies par le cercle en 2007 ne font pas état de personnel pris en charge par les Asaco ou collectivités.

    - Le cercle de Kadiolo compte 16 aires de santé fonctionnelles mais aucune ne dispose d’un potentiel complet. Seulement 3 aires de santé comptent 15 000 habitants. Le cercle bénéficie de 4,4% du personnel qualifié de la région.

    - Le montant total effectivement reçu par la région pour la santé est d’un peu plus de 4 600 000 000 FCFA dont environ 3 461 503 000 FCFA pour la DRS (et presque 2 200 000 000 FCFA pour le fonctionnement).

    - Le cercle de Sikasso a bénéficié d’un montant d’environ 200 000 000 FCFA dont 18% sont assurés par l’Etat, 8% par le recouvrement des coûts, 1% par les communautés, 4% par les collectivités et le reste par les partenaires financiers. Lorsqu’on attribue la contribution suisse aux collectivités (ce qui devrait être fait puisque les fonds suisses transitent par les collectivités), leur contribution représente alors 6,6% du total.

    - Le cercle de Kadiolo a bénéficié d’un montant total de 120 000 000 FCFA dont 35% assurés par l’Etat, 12% par le recouvrement, 1,5% par la communauté, 1,5% par les collectivités et 50% par les partenaires financiers. La contribution des collectivités passe à 8,6% si l’on comptabilise ici le financement suisse.

    2.5 Les acteurs locaux de la santé dans ce contexte de double décentralisation Les deux réformes de décentralisation ont fait apparaitre de nouveaux acteurs aux différents niveaux de collectivités et un nouveau partage des responsabilités. Nous allons les présenter successivement à l’échelle régionale et locale et communale, en intégrant les acteurs du développement social, du fait de leur implication dans les questions de santé. 2.5.1 Les acteurs de la santé au niveau régional La Direction Régionale de la Santé (DRS) La DRS a pour principales fonctions de veiller à ce que les grandes orientations nationales soient prises en compte localement et d’assurer la formation et la supervision des équipes de cercle. Elle joue un rôle de courroie de transmission entre Bamako et le niveau opérationnel. Concernant le système d’information, le niveau régional est chargé de collecter les informations, de les épurer et de les transmettre à Bamako qui en fait l’analyse. La tendance observée est pourtant une implication du niveau régional dans l’opérationnel en substitution aux cercles (participation presque systématique d’agents de la DRS dans toutes supervisions des CSCOM). Le personnel de la DRS est relativement stable puisque composé de personnes ayant déjà bénéficié de formations et de promotions avant d’atteindre ces postes enviés. Néanmoins, à Sikasso, l’équipe dirigeante de la DRS a été presque entièrement renouvelée en 2005 (directeur, responsable de la division santé et planificateur ont reçu de nouvelles affectations en même temps, décision irresponsable selon certains, qui a fragilisé le service pendant plusieurs mois Le directeur régional de la santé à Sikasso (en poste depuis 2006) est un chirurgien, originaire de la région de Mopti mais longtemps en service à l’hôpital de Sikasso. Il est aussi un élu local à l’Assemblée régionale, au conseil de cercle de Sikasso et président des commissions santé de ces différentes collectivités. Sa nomination au poste de DRS est

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    largement attribuée à son appartenance politique d’autant qu’il n’a pas bénéficié de formation en santé publique, indispensable pour occuper ce type de poste habituellement. La Direction Régionale du Développement Social et de l’Economie Solidaire Les services du développement social, autrefois intégrés au ministère de la Santé, sont organisés de manière indépendante. A l’image de la DRS, la DRDE ES assure une mission de formation, de suivi et de supervision pour les services sociaux de cercle. En poste depuis quelques années à Sikasso, le directeur a été muté fin 2008 pour Bamako. Le budget du développement social est faible, comparativement au budget de la santé et au regard de l’ampleur des besoins. Leurs activités les mieux financées restent celles qui concernent aussi le domaine de la santé (suivi des Asaco et des mutuelles de santé par exemple) et une synergie s’impose entre les deux domaines. L’hôpital Avec la réforme hospitalière, l’hôpital régional est devenu l’hôpital de Sikasso et bénéficie du statut d’EPH (établissement public hospitalier) depuis 2006. Cela lui donne une certaine autonomie financière. Les textes de la réforme hospitalière contredisent en cela ceux de la décentralisation qui placent les hôpitaux régionaux sous la responsabilité et le contrôle des Assemblées régionales. Cette réforme hospitalière est venue en outre interrompre une dynamique de collaboration locale entre les services et notamment entre l’hôpital et la DRS. Ainsi, la supervision des hôpitaux relève maintenant directement du secrétariat général du ministère. De même, les fonds destinés à l’hôpital ne transitent plus par la DRS, qui n’est donc plus impliquée dans la gestion courante du personnel (congés, etc.). L’Assemblée Régionale de Sikasso. Mise en place depuis 1999, elle est effectivement fonctionnelle depuis fin 2000. Le deuxième mandat des élus régionaux, comme ceux des cercles et des communes, se termine mi 2009. L’Assemblée est composée de 24 élus régionaux et elle dispose d’un bureau de 3 membres, d’un président et deux vice-présidents. Le président était déjà dans l’ancien bureau18. Ces trois élus sont tous des techniciens, deux vétérinaires et un enseignant. Le premier vice-président est théoriquement chargé des questions de santé mais le président s’implique beaucoup dans toutes les activités financées par la coopération suisse, dont la santé. L’Assemblée Régionale dispose d’une équipe composée de 30 agents non qualifiés et d’un pool de techniciens assez conséquent, résultat de l’appui de la coopération suisse dans le cadre du renforcement de compétence : secrétaire général, régisseurs, conseiller filière, conseiller santé, conseiller formation professionnel, secrétaires, etc. A Sikasso, le budget de l’Assemblée Régionale dépend largement de la coopération suisse, principal bailleur et partenaire (près de 60%) même si la tendance actuelle est la diversification des financements avec en perspective à très court terme, un fonds de l’AFD et de la BAD. Son PDSEC a été élaboré en 2001 et doit être renouvelé. L’Assemblée Régionale de Sikasso est particulièrement active dans le domaine économique avec le développement des filières

    18 Depuis, les élections de mai 2009 ont entraîné un renouvellement complet du bureau de l’AR.

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    agricoles. La santé est un des domaines d’intervention soutenu par les Suisses depuis 2005. Avant cela, l’AR intervenait peu dans le domaine de la santé. Le gouvernorat Premier représentant de l’Etat au niveau de la région, il représente la tutelle des conseils de cercle de la région. Il n’y a pas de lien institutionnel entre l’Assemblée Régionale et le gouvernorat puisque la tutelle de l’AR est le ministère de l’Administration territoriale et des Collectivités décentralisées. Le partage des prérogatives du gouvernorat et celles de l’Assemblée Régionale n’est pas clairement établi dans les textes. Les deux institutions sont toutes deux responsables du développement de la région. La personne au poste de gouverneur depuis plusieurs années a été remplacé mi 2008 et son successeur a une réputation d’ordre et de rigueur. Le PARAD (programme d’appui régional à la décentralisation) est domicilié au niveau du gouvernorat et le chef de ce programme est le conseiller aux affaires juridiques et administratives du gouverneur. Il a pour objectifs d’amener les collectivités à gérer, à programmer, à exécuter et à évaluer les activités de développement de leurs localités, à définir les activités prioritaires pour le financement ANICT. Des commissions santé ont été créées dans les cercles et le médecin chef fournit les données dont l’évaluation a besoin. La Ferascom La Ferascom est la fédération régionale des associations de santé communautaire, auxquelles elle fournit un appui conseil. Créée à Sikasso en 1997, elle supervise les 43 Asaco actuelles. Son conseil d’administration compte 25 membres et son conseil de surveillance 5 membres. Elle ne dispose d’aucun financement et ses activités prévisionnelles ne sont pas intégrées dans les PO préparés lors des CROCEP et cela malgré les demandes réitérées de sa présidente, très active sur la scène locale. La cellule de la coopération suisse à Sikasso La coopération suisse, par l’intermédiaire de sa cellule, est un partenaire incontournable dans le domaine de la santé dans la région de Sikasso. Les orientations de ses programmes successifs et le contenu des activités développées dans ce secteur seront présentés plus loin. 2.5.2 Les acteurs de la santé du niveau Cercle La préfecture Elle représente l’organe de tutelle des communes du cercle et dépend hiérarchiquement du gouvernorat. Le CSREF Installé dans la capitale régionale, le CSREF de Sikasso présente une configuration particulière avec plusieurs unités de soins héritées de la période coloniale, dispersées dans la ville et dont certaines fonctionnent de manière assez autonome. Le CSREF est géré par un conseil de gestion, présidé par le Conseil de cercle. A Sikasso, le conseil n’est pratiquement pas fonctionnel, le médecin chef en poste jusqu’en juillet 08 refusant de rendre compte au Conseil de cercle. Une seule réunion a été tenue en mars 2008 pour valider le bilan 2007. Le Conseil de cercle n’a pas participé à cette réunion

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    Le CSREF dispose d’un personnel qualifié bien plus important que celui des CSREF des autres cercles de la région. A Kadiolo, le conseil de gestion du CSREF est fonctionnel depuis l’arrivée du nouveau médecin chef qui a accepté de composer avec le Conseil de cercle. L’implication de cette collectivité, bien que très récente, est plus évidente qu’à Sikasso. Ainsi, les conseils se tiennent régulièrement. Le service social de cercle Il a en charge la mise en œuvre de toutes les activités concernant le développement social dans le cercle. En effet, et contrairement à la santé, il n’existe pratiquement pas de personnel des services sociaux au niveau communal. La région de Sikasso est d’ailleurs pilote puisque des agents ont été recrutés et mis à disposition de certaines communes. L’opérationnalité de ces agents est rendue difficile par le fait qu’ils ne disposent d’aucun moyen de fonctionnement, ni de la part des communes concernées, ni de la part du service de développement social qui n’assure que leur salaire. Dans le domaine socio-sanitaire, les services sociaux ont pour mission de superviser les associations de santé communautaires et les mutuelles, et de veiller au respect des dispositions statutaires les concernant. Ils participent ainsi aux missions de supervision organisées par la santé. Le Conseil de cercle En matière de santé, le Conseil de cercle est la collectivité responsable du centre de santé de référence et de tout ce qui concerne la santé à l’échelle du cercle. A Sikasso, le Conseil de cercle est composé de 93 conseillers. Le bureau est formé d’un président et de deux vice-présidents (2 enseignants et un homme d’affaires)19. C’est le président qui s’occupe directement des questions de santé bien que le responsable en la matière soit le premier vice-président. L’équipe technique est restreinte et limitée à un secrétaire général et à deux régisseurs A Kadiolo, le bureau du Conseil de cercle est formé d’un président et de deux vice-présidents, dont 2 gestionnaires de dépôts de médicaments au CSREF et un agent commercial.20 C’est le président qui s’occupe directement des questions de santé. Il a imposé l’ouverture d’un compte en banque pour le CSREF dont il est un des signataires et a interpellé le CSREF sur certains aspects de son organisation : tickets d’entrée, échographe privé, etc. Cependant, pour le président du Conseil de cercle « Les finances du CSREF sont encore comme tabou pour moi. » La Felascom (fédération locale des associations de santé communautaire) Elle a été mise en place en même temps que la Ferascom et n’a pas de budget de fonctionnement, ni à Sikasso, ni à Kadiolo. A Sikasso, la présidente est également présidente de la Ferascom. Dans les deux cercles, les Felascom se plaignent d’être très peu associées aux activités de la santé.

    19 Le Président de CC a été reconduit à son poste en juillet 09 20 Le président n’a pas été reconduit en 2009

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    Les syndicats inter collectivités Ces syndicats, mis en place suite à la dissolution des CCC (centres de conseil communaux) sont animés par un bureau élu par les collectivités membres. Ils disposent d’un Secom (service commun), équipe technique recrutée pour mettre en œuvre des services de formation ou de prestations pour les collectivités. Leur fonctionnement doit être assuré par les cotisations payées par les collectivités membres (communes et Conseil de cercle) et par les fonds d’appui aux collectivités, domicilié à l’ANICT. Dans la région de Sikasso, la mise en place de ces syndicats a donné lieu à une partie de bras de fer entre les élus, soucieux de leur mise en place, et l’administration déconcentrée plutôt favorable à la constitution de pools des services techniques, en appui aux collectivités. A Sikasso, Kene syndicat a été créé début 2008. Il dispose d’un local dans les bureaux de l’Assemblée Régionale et vient de recruter une partie de l’équipe de techniciens du CCC du cercle de Sikasso. A Kadiolo, le syndicat (SYKA) a été finalement mis en place et sa création approuvée par la préfecture en décembre 07. La récupération du matériel du CCC n’a pas être réalisée qu’en mai 08. Ce matériel est entreposé au Conseil de cercle puisque le syndicat ne dispose ni de local ni de budget de fonctionnement. La cellule du BUCO Elle intervient également à l’échelle des cercles de Sikasso et de Kadiolo selon des modalités qui seront développées ultérieurement. 2.5.3 Les acteurs de la santé à l’échelle communale La commune urbaine de Sikasso21 Sur le plan sanitaire, la commune de Sikasso compte 5 CSCOM et 4 centres secondaires. Dans son plan élaboré en 2008, la commune de Sikasso se fixe les objectifs suivants en matière de santé :

    - Augmenter le nombre de CSCOM de la commune de 5 à 10 d’ici à 2012 - Rehausser le taux de couverture des prestations suivantes : CPN ; accouchement

    assisté ; consultations curatives ; Planification Familiale ; l’indice d’assiduité à la CPN - Réduire le taux d’incidence des maladies prioritaires - Maintenir le taux de couverture vaccinale des enfants de 12 mois à au moins

    98%.pour les différents antigènes - Réduire le nombre de décès maternel et néo-natal de 50%

    Les Asaco Les asaco sont les associations ayant mis en place les CSCOMs dont elles assurent la gestion, avec l’appui du chef de poste. L’équipe socio-sanitaire de cercle : elle est chargée de la formation et supervision des CSCOMs. Elle fournit également un appui et des directives pour la planification des activités.

    21

    Plan de développement économique social et culturel 2008-2012 (PDESC) de la commune urbaine de Sikasso, juin 08

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    Le service social de cercle Il est chargé de réaliser les démarches communautaires lors de la création de nouveaux CSCOM et de réaliser des supervisions afin de mesure