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44-369 Entorses graves de l’articulation métacarpophalangienne du pouce E. Roulot, J. Chino Les entorses de la métacarpophalangienne (MP) du pouce sont fréquentes et intéressent surtout des patients jeunes et sportifs. Leurs conséquences peuvent être sévères en cas d’entorse grave, dont le traitement est souvent chirurgical. Ces entorses peuvent se présenter sous trois formes : les entorses graves récentes qui datent de moins de trois semaines concernent principalement le plan latéral ulnaire lorsqu’elles résultent d’un mécanisme en valgus-flexion, ou moins fréquemment le plan radial pour les traumatismes en varus-flexion, avec possible association à une lésion de la capsule dorsale. Les ruptures du ligament collatéral ulnaire (LCU) requièrent, en principe, un traitement chirurgical du fait de l’interposition fréquente de l’expansion de l’adducteur du pouce, alors que les ruptures du ligament collatéral radial (LCR) peuvent le plus souvent être traitées orthopédiquement. Les instabilités chroniques, qui sont souvent la conséquence du traitement inadapté d’une entorse fraîche, justifient une ligamentoplastie de stabilisation sauf s’il existe une arthrose ou une raideur chez un travailleur de force, imposant alors une arthrodèse. Enfin, les entorses de la plaque palmaire, qui sont la conséquence d’un traumatisme en hyperextension, autorisent un traitement orthopédique dans les formes récentes en l’absence de subluxation résiduelle et si seules les structures stabilisatrices passives sont atteintes, sinon une réparation chirurgicale dans tous les autres cas. © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : Traumatisme du pouce ; Entorse métacarpophalangienne ; Réparation ligamentaire ; Ligamentoplastie Plan Introduction 1 Entorses graves récentes des ligaments collatéraux ulnaire et radial 1 Rappel anatomique 1 Indications thérapeutiques 2 Instabilités chroniques des ligaments collatéraux ulnaire ou radial 5 Indications 5 Techniques opératoires des instabilités par lésion du ligament collatéral ulnaire 5 Instabilités par lésion du ligament collatéral radial 6 Arthrodèse métacarpophalangienne 7 Lésions de la plaque palmaire 7 Conclusion 9 Introduction Les lésions traumatiques de l’appareil capsuloligamentaire de l’articulation métacarpophalangienne (MP) du pouce sont fréquentes, en particulier chez le sujet jeune et lors de pratique sportive. Elles exposent à de graves séquelles fonctionnelles, liées à l’instabilité de la pince pollicidigitale. On distingue les entorses récentes, c’est-à-dire celles qui sont vues au plus tard trois semaines après l’accident, les insta- bilités chroniques, généralement secondaires à l’absence ou à l’inadaptation du traitement initial d’une entorse fraîche et, enfin, les lésions de la plaque palmaire. Entorses graves récentes des ligaments collatéraux ulnaire et radial Rappel anatomique Leur compréhension nécessite un bref rappel anatomique. L’articulation MP est stabilisée dans le plan frontal par les liga- ments latéraux radial et ulnaire. Chacun de ces ligaments est composé de deux faisceaux : l’un, principal, est un fort ligament, dirigé de la tête du premier métacarpien (M1) à la base de la première phalange (P1) (Fig. 1) ; il est tendu en flexion et se relâche en extension de la MP ; EMC - Techniques chirurgicales - Orthopédie-Traumatologie 1 Volume 9 > n 3 > septembre 2014 http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0467(14)61776-1 © 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 02/09/2016 par Fournie Anne-Elisabeth (211439)

métacarpophalangienne du pouce

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� 44-369

Entorses graves de l’articulationmétacarpophalangienne du pouce

E. Roulot, J. Chino

Les entorses de la métacarpophalangienne (MP) du pouce sont fréquentes et intéressent surtout despatients jeunes et sportifs. Leurs conséquences peuvent être sévères en cas d’entorse grave, dont letraitement est souvent chirurgical. Ces entorses peuvent se présenter sous trois formes : les entorsesgraves récentes qui datent de moins de trois semaines concernent principalement le plan latéral ulnairelorsqu’elles résultent d’un mécanisme en valgus-flexion, ou moins fréquemment le plan radial pour lestraumatismes en varus-flexion, avec possible association à une lésion de la capsule dorsale. Les ruptures duligament collatéral ulnaire (LCU) requièrent, en principe, un traitement chirurgical du fait de l’interpositionfréquente de l’expansion de l’adducteur du pouce, alors que les ruptures du ligament collatéral radial (LCR)peuvent le plus souvent être traitées orthopédiquement. Les instabilités chroniques, qui sont souvent laconséquence du traitement inadapté d’une entorse fraîche, justifient une ligamentoplastie de stabilisationsauf s’il existe une arthrose ou une raideur chez un travailleur de force, imposant alors une arthrodèse.Enfin, les entorses de la plaque palmaire, qui sont la conséquence d’un traumatisme en hyperextension,autorisent un traitement orthopédique dans les formes récentes en l’absence de subluxation résiduelle etsi seules les structures stabilisatrices passives sont atteintes, sinon une réparation chirurgicale dans tousles autres cas.© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Traumatisme du pouce ; Entorse métacarpophalangienne ; Réparation ligamentaire ;Ligamentoplastie

Plan

■ Introduction 1■ Entorses graves récentes des ligaments collatéraux ulnaire

et radial 1Rappel anatomique 1Indications thérapeutiques 2

■ Instabilités chroniques des ligaments collatéraux ulnaireou radial 5Indications 5Techniques opératoires des instabilités par lésion du ligamentcollatéral ulnaire 5Instabilités par lésion du ligament collatéral radial 6Arthrodèse métacarpophalangienne 7

■ Lésions de la plaque palmaire 7■ Conclusion 9

� IntroductionLes lésions traumatiques de l’appareil capsuloligamentaire

de l’articulation métacarpophalangienne (MP) du pouce sont

fréquentes, en particulier chez le sujet jeune et lors de pratiquesportive. Elles exposent à de graves séquelles fonctionnelles, liéesà l’instabilité de la pince pollicidigitale.

On distingue les entorses récentes, c’est-à-dire celles qui sontvues au plus tard trois semaines après l’accident, les insta-bilités chroniques, généralement secondaires à l’absence ou àl’inadaptation du traitement initial d’une entorse fraîche et, enfin,les lésions de la plaque palmaire.

� Entorses graves récentesdes ligaments collatéraux ulnaireet radialRappel anatomique

Leur compréhension nécessite un bref rappel anatomique.L’articulation MP est stabilisée dans le plan frontal par les liga-ments latéraux radial et ulnaire. Chacun de ces ligaments estcomposé de deux faisceaux :• l’un, principal, est un fort ligament, dirigé de la tête du premier

métacarpien (M1) à la base de la première phalange (P1) (Fig. 1) ;il est tendu en flexion et se relâche en extension de la MP ;

EMC - Techniques chirurgicales - Orthopédie-Traumatologie 1Volume 9 > n◦3 > septembre 2014http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0467(14)61776-1

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Figure 1. Le faisceau principal du ligament latéral de la métacarpopha-langienne se tend en flexion et se détend en extension de l’articulation(A, B). Le faisceau accessoire subit des tensions inverses.

• l’autre, accessoire, métacarposésamoïdien, est tendu en exten-sion et se relâche en flexion de la MP.Cela explique que la rupture ligamentaire soit produite par un

mouvement forcé de latéralité sur un faisceau principal déjà misen tension par la flexion de l’articulation. C’est ce qui se produitlors des accidents de ski, bien connus pour être la cause la plusfréquente de ces entorses par traction de la dragonne du bâton ou,plus fréquemment, lors d’une chute amortie par la neige, pouceécarté.

Les ligaments sont recouverts par une lame aponévrotiquetriangulaire, expansion du court abducteur du côté radial, del’adducteur du pouce du côté ulnaire. Ces deux dossières s’insèrentsur le tendon du long extenseur du pouce (extensor pollicis longus[EPL]), à la face dorsale de la MP et de P1. Lors du traumatisme, quise produit en valgus-flexion, la dossière glisse distalement, entraî-née par le tendon du long extenseur, et l’expansion aponévrotiquede l’adducteur découvre complètement le ligament collatéralulnaire (LCU). Celui-ci se rompt en règle distalement [1]. Lorsque lepouce revient en position normale, l’expansion repousse le moi-gnon proximal du ligament et vient s’interposer entre ce dernieret son lieu d’insertion distale, interdisant tout espoir de cicatri-sation par simple immobilisation. Cette interposition, décrite parStener en 1962 [2], est présente dans au moins deux cas sur troisdes entorses graves récentes du LCU et peut être palpable dans lesformes vues tôt. Elle est en revanche beaucoup plus rare dans lesruptures du ligament collatéral radial (LCR) secondaires à un trau-matisme en varus-flexion, en raison de l’obliquité plus importantedu bord libre de son expansion aponévrotique et de la fréquencedes désinsertions proximales du LCR sur M1, exceptionnelle pourle LCU.

Ainsi, l’intervention est fréquemment nécessaire en cas de rup-ture fraîche du LCU, tandis que les entorses isolées récentes duLCR peuvent être pour la plupart traitées orthopédiquement.

Examen clinique

Le patient, à la suite d’un traumatisme (luxation réduite oumouvement de fort valgus), se présente avec une douleur et uneaugmentation de volume de la première MP. On peut précocementretrouver une petite masse palpable en amont de l’expansion dor-sale de l’adducteur du pouce correspondant au ligament rompurétracté proximalement (effet Stener).

L’examen dynamique permet de tester les deux faisceaux liga-mentaires, en flexion de 30◦ pour le propre et en extension pourl’accessoire. On imprime un mouvement de varus puis de valgussur la première phalange.

Figure 2. Position dos-plaque pour radiographie dynamique.

Le diagnostic de lésion sévère du ligament collatéral ulnaire estporté pour un angle de laxité en inclinaison radiale supérieur à35◦ [3, 4] ou de plus de 10◦ par rapport au côté sain [5].

Ce testing peut être réalisé sans appréhension, car il a été montréque l’on ne pouvait pas créer de lésion de Stener iatrogène si celle-ci n’a pas été provoquée par le traumatisme initial [6].

Si le testing n’est pas concluant (patient douloureux, douteclinique), on peut s’aider d’un testing sous anesthésie ou d’unexamen échographique, qui peut montrer une rupture partielleou totale du ligament et confirmer la présence ou non d’un « effetStener ».

Le bilan radiologique d’une entorse de la MP du pouce doit êtreréalisé avant tout testing afin d’éliminer un arrachement osseuxnon déplacé, il comporte [3] :• des radiographies standard, qui permettent de diagnostiquer

sur le cliché de face un arrachement osseux de l’insertion pha-langienne du ligament. Cela contre-indique la réalisation declichés dynamiques et l’importance du déplacement confirmele caractère grave de l’entorse. De profil, l’existence d’une sub-luxation palmaire de la MP signe la déchirure ligamentaire etson prolongement jusqu’à la capsule dorsale [7] ;

• des radiographies dynamiques qui sont surtout utiles dans lesformes chroniques (Fig. 2), mais peuvent être parfois réali-sées dans les formes récentes pour prouver la laxité (incidencemédicolégale éventuelle). Elles doivent être pratiquées sur unearticulation MP demi fléchie, posée dos-plaque, en abductionen cas d’entorse du LCU, en adduction en cas d’entorse du LCR :l’entorse grave se traduit par une laxité supérieure à au moins30◦ par rapport au côté opposé.

Indications thérapeutiquesEn présence d’un arrachement osseux non déplacé, le traite-

ment est orthopédique par gantelet plâtré ou en résine, laissantlibre le poignet et les doigts longs, immobilisant la MP en exten-sion, afin de détendre le faisceau principal et ce pendant un mois.Si le fragment est déplacé même faiblement (moins de 2 mm), letraitement chirurgical s’impose du fait de la rotation associée dufragment.

En présence d’une entorse bénigne (clichés dynamiques nor-maux), on réalise le même type d’immobilisation pour unepériode d’un mois.

En présence d’une entorse grave du LCR [8], on doit évaluerl’instabilité en adduction et dans le plan antéropostérieur. S’il

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Figure 3. Incision cutanée.

existe une rupture totale du ligament principal et accessoireexterne ainsi que de la capsule dorsale, on retrouve une laxitéen adduction supérieure à 30◦ souvent associée à une luxationpalmaire (significative quand de plus de 3 mm). Dans ce cas,la réparation chirurgicale s’impose sous peine de retrouver lesmêmes complications que les ruptures du ligament collatéralulnaire [9]. Dans les autres cas, on réalise une immobilisation plâ-trée pendant six semaines.

En présence d’une entorse grave du LCU, avec ou sans arrache-ment osseux déplacé, l’intervention s’impose, et il s’agit de décrireici la technique de réparation d’une rupture du LCU.

Technique opératoire de réparation du ligamentcollatéral ulnaire

Cette intervention est réalisée sous anesthésie générale oumieux locorégionale, avec un garrot pneumatique à la racine dubras, et le plus souvent en chirurgie ambulatoire.

Voie d’abord (Fig. 3)Elle est commune à toutes les techniques :

• incision latérale interne en V (aile de mouette), centrée sur laMP, évitant que son sommet n’atteigne la crête de la premièrecommissure pour prévenir toute bride ;

• le rameau dorsal ulnaire sensitif du nerf radial à destinée dupouce est soigneusement repéré puis écarté ;

• l’expansion aponévrotique de l’adducteur est alors exposéedepuis son bord libre proximal.C’est à ce stade de l’intervention que l’on retrouve générale-

ment d’emblée le moignon proximal du LCU, rétracté au-dessusdu bord libre de l’expansion aponévrotique (Fig. 4A). Celle-ci doitêtre incisée longitudinalement, à 2 ou 3 mm de son insertion surle tendon du long extenseur du pouce (Fig. 4B). Il peut être utilede placer deux fils repères au niveau de l’angle proximal des deuxberges aponévrotiques afin d’éviter tout décalage au moment de lafermeture, ce qui pourrait entraver la mobilité interphalangienne.Afin d’éviter ce risque, Maneaud et Littler [10] proposent une inci-sion aponévrotique en L (Fig. 4C) qui respecte le bord libre del’expansion.

Exploration (Fig. 5)Elle doit vérifier :

• les surfaces articulaires, que l’on peut exposer en faisant bâillerl’articulation par traction sur le pouce, en valgus-flexion etextension ;

• la partie dorsale de la capsule articulaire, souvent rompue, ensoulevant délicatement le tendon long extenseur ;

• la plaque palmaire visible par la brèche capsuloligamentaire :elle peut être également palpée à l’aide d’un instrument mousseet sa rupture se traduirait cliniquement par une instabilité enhyperextension associée de la MP ;

• le faisceau accessoire métacarposésamoïdien, dont les fibresproximales siègent en amont du faisceau principal, et qui peutêtre parfois désinséré du métacarpien ;

• enfin, le faisceau principal dont on recherche le siège précis dela lésion : généralement, il s’agit soit d’une rupture « en pleincorps », plus volontiers distale, soit d’une désinsertion de P1 auras de l’os.Plus rarement, on retrouve un fragment osseux, arraché de

la phalange, appendu à l’extrémité distale du ligament. Il n’est

Figure 4. Voie d’abord. Lerameau dorsal cubital à destinéedu pouce de la branche sensitivedu nerf radial est repéré au-dessusdu tendon du long extenseur dupouce. Le moignon proximal duligament collatéral ulnaire rompuest rétracté au-dessus du bordlibre de l’expansion aponévro-tique de l’adducteur (A). Cettedernière peut être incisée de deuxmanières (B, C).

pas toujours facile de retrouver le siège précis, très palmaire, del’insertion phalangienne de ce ligament, imposant de porter lepouce en pronation forcée pour le mettre en évidence.

RéparationTrois situations peuvent se présenter.Il existe un fragment osseux de taille suffisante pour être ostéo-

synthésé. La réduction s’obtient en portant la MP en extensionafin de détendre le ligament, puis une broche fine (de calibre 8/10ou 10/10), placée perpendiculairement au trait de fracture, assurela fixation du fragment. Il est utile de la faire dépasser sous la peauen dehors, alors qu’elle est coupée en dedans au ras de l’os (Fig. 6).Cela facilite son ablation, réalisée sous anesthésie locale, par unecourte incision externe, au 30e jour. Une scopie de contrôle per-opératoire vérifie la qualité de la réduction et de l’ostéosynthèse.L’alternative au brochage est le vissage du fragment par une micro-vis (diamètre : 1,3 mm) à condition de ne pas fracturer le fragmentosseux et d’obtenir une bonne tenue de vis.

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Figure 5. Exploration.

Figure 6. Ostéosynthèse par broche d’un arrachement osseux devolume suffisant.

Il existe suffisamment « d’étoffe » ligamentaire ou périostée surla phalange pour permettre une suture directe. On place d’abordun point en cadre au Nylon monobrin 4/0 ou au PDS 4/0 surle faisceau principal et éventuellement un deuxième cadre surle faisceau accessoire que l’on peut compléter par des pointsd’affrontement supplémentaires au 5/0 (Fig. 7).

La lésion est une désinsertion distale, obligeant à une réin-sertion osseuse à l’aide d’une ancre, (type Mini Mitek® ou

Figure 7. Réinsertion du ligament collatéral ulnaire. Noter la brèchecapsulaire dorsale qui doit être réparée simultanément.

Figure 8. Deux types d’ancres pour réinsertion d’une avulsion du liga-ment collatéral ulnaire.

équivalent) [11, 12]. Le premier temps consiste, lorsque l’on est enprésence d’une avulsion ligamentaire, à aviver la zone d’avulsionpour favoriser la cicatrisation ligamentaire sur l’os. Puis l’onmêche un tunnel borgne dans lequel l’ancre doit se fixer à l’aided’un foret à butée calibré au diamètre et à la longueur de l’ancre,qui est livrée avec son matériel ancillaire. Ce tunnel doit impéra-tivement se positionner au niveau du point d’insertion théoriquedu ligament latéral sur P1, un peu à distance de la surfacecartilagineuse articulaire (environ 2 mm) et être orienté perpen-diculairement à la corticale osseuse pour permettre aux ailettesde l’ancre de se déployer correctement. Celles-ci sont de nombreet de forme variables mais ne permettent une bonne tenue quesi elles traversent complètement la corticale sur la face profondede laquelle l’ancre prend appui pour se déployer (Fig. 8). Un petitmouvement de traction sur le fil de l’ancre est le plus souvent sou-haitable pour assurer ce déploiement et constater sa bonne tenue.Ensuite, le fil de suture solidaire de l’ancre est lacé en cadre dansle ligament et noué en position de flexion de 30◦ de l’articulationMP.

Lorsqu’il persiste un reliquat ligamentaire, il n’est plus néces-saire d’aviver la zone de fixation de l’ancre, mais l’on peut enrevanche faufiler ce reliquat avec le fil de suture pour permettreun meilleur affrontement des extrémités du ligament.

L’existence d’un fragment osseux, trop petit pour être ostéo-synthésé, doit être assimilée, après excision de ce fragment, à unedésinsertion distale [13].

Une fois la cicatrisation ligamentaire acquise, ces ancresne nécessitent pas leur ablation puisqu’elles sont entièrementintraosseuses.

FermetureEn cas de rupture intéressant la partie dorsale de la capsule arti-

culaire, la brèche capsulaire est refermée à l’aide d’un fil résorbable4/0. L’expansion de l’adducteur est ensuite réparée à l’aide d’unNylon monobrin 5/0 par un surjet sans décalage.

Soins postopératoiresDans tous les cas, l’immobilisation est assurée par un gante-

let plâtré ou en résine prenant la première phalange du pouceet laissant l’interphalangienne libre. La MP doit être maintenueen extension sans valgus ni varus, afin de soulager la suture,et le pouce en opposition pour éviter toute rétraction de la

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première commissure. Dans les cas où la réparation semble fra-gile, il peut être nécessaire de bloquer l’articulation MP par unebroche d’arthroryse pour une durée de quatre semaines.

La durée de l’immobilisation est de quatre semaines en casd’arrachement osseux, délai nécessaire à sa consolidation, et desix semaines dans les autres cas, suivie d’une rééducation toujoursutile en particulier pour la récupération de la mobilité de la MP etde l’interphalangienne.

Technique arthroscopique de réparationdu ligament collatéral ulnaire

Une levée de l’interposition de la dossière de l’adducteur entreles deux extrémités du ligament rompu est réalisable par arthro-scopie.

On injecte dans la MP du pouce 2 ml de sérum à l’aide d’uneaiguille de 20 G puis on réalise la première voie d’abord radio-dorsale par laquelle on introduit l’arthroscope de 1,7 mm avecune orientation à 15◦. L’examen des surfaces articulaires permetd’éliminer une fracture. On réalise alors la deuxième voie palmairepar rapport au ligament collatéral radial. On fait la synovectomiede l’articulation à l’aide du full radius cutter 2,0 mm.

On introduit le palpeur que l’on glisse le long de la tête dupremier métacarpien sous l’aponévrose de l’adducteur jusqu’aubord proximal, puis on le retire dans l’articulation en rame-nant l’extrémité distale du ligament latéral ulnaire jusqu’à soninsertion sur la base de P1. Cette réduction permet la cica-trisation dirigée du ligament. On immobilise l’articulation àl’aide d’une broche d’arthroryse à 20◦ de flexion pendant quatresemaines [14].

Technique de réparation du ligament collatéralradial

Elle est parfaitement identique en symétrique de la réparationinterne.

� Instabilités chroniquesdes ligaments collatéraux ulnaireou radial

Elles sont généralement secondaires à une entorse récente négli-gée ou mal traitée [15].

Les patients se plaignent de douleurs à l’effort, d’une diminu-tion de la force de serrage de la main et d’une instabilité de lapince pollicidigitale, essentiellement dans les prises cylindriques(« test de la bouteille » : difficulté à tenir une bouteille d’un litre)ou en fin de course d’opposition. Le diagnostic, facile, est affirmépar la recherche passive de la laxité frontale, MP en demi-flexion,comparée au côté sain. Il est confirmé par un examen radio-graphique comportant des clichés standard et dynamiques.L’incidence de face montre souvent une angulation spontanée dela MP, en particulier en cas de lésion du LCR. Le profil retrouve unesubluxation palmaire fréquente de P1. Surtout, ces radiographiespermettent de rechercher des signes d’arthrose dont la présence,même débutante, représenterait une contre-indication à la recons-truction ligamentaire. Enfin, les clichés dynamiques authentifientla laxité.

IndicationsEn l’absence d’arthrose, l’indication doit être discutée en fonc-

tion des activités socioprofessionnelles et de la mobilité de la MP,très variable d’un sujet à l’autre. On est d’autant plus enclin àproposer une arthrodèse que cette mobilité est peu importante,en particulier chez le travailleur de force.

En présence d’une arthrose même modérée, la recons-truction ligamentaire est formellement contre-indiquée. Si latolérance fonctionnelle est mauvaise, on propose une arthrodèseMP.

Figure 9. Technique de Littler : incision de l’expansion aponévrotiquede l’adducteur et préparation des deux tunnels transosseux.

Techniques opératoires des instabilitéspar lésion du ligament collatéral ulnaire

De nombreuses techniques de ligamentoplastie ont été décritesavec différentes configurations : en 8, parallèle, triangulaire à baseproximale ou distale.

Parmi les nombreuses techniques décrites [16], la plus employéeest celle de Maneaud et Littler [10]. Il s’agit d’une ligamentoplastiepassive utilisant un greffon tendineux de long palmaire (palmarislongus).

Technique de LittlerVoie d’abord

Elle est habituelle avec section en L de l’expansion aponévro-tique de l’adducteur (cf. « Entorses graves récentes des ligamentscollatéraux ulnaire et radial »).

Reconstruction ligamentaireLes reliquats fibreux du LCU sont soigneusement excisés pour

bien exposer la face latérale de l’articulation. Un tunnel osseuxest creusé verticalement au niveau de la base de P1 à l’aide d’unepointe carrée fine, puis d’une petite curette (Fig. 9), émoussant lesdeux orifices d’entrée, tout en conservant un pont osseux suffisantet non fragilisé. Un deuxième tunnel est foré transversalement auniveau de la tête du métacarpien : l’orifice interne doit être situéau niveau de l’insertion proximale du paléoligament, c’est-à-direlégèrement dorsal. Le petit palmaire est prélevé sur environ 10 cmde sa portion tendineuse, par deux courtes incisions transver-sales dont la distale correspond au pli de flexion du poignet. Enl’absence de long palmaire, on peut prélever un hémifléchisseurradial du carpe, le plantaire grêle ou un extenseur d’orteil. Le gref-fon est d’abord passé dans le canal osseux phalangien, puis sesdeux extrémités sont successivement introduites, après passagesous les fibres verticales de l’expansion aponévrotique, dans letunnel métacarpien, pour être enfin extériorisées à la peau au bordradial du pouce (Fig. 10). On peut aussi fixer les deux extrémitéssur la face latérale du métacarpien à l’aide d’une ancre résorbableMini Mitek®.

FermetureL’expansion aponévrotique de l’adducteur est suturée au PDS

3/0. La voie d’abord interne est refermée par des points séparés.

Réglage de la tensionEn l’absence de fixation par ancre, les deux extrémités du gref-

fon tendineux sont soit extériorisées comme dans la techniqueoriginale sur un bouton ou un petit cylindre en caoutchouc,soit de préférence fixées en sous-cutané au fil non résorbable surl’aponévrose du court abducteur.

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Figure 10. Technique de Littler : mise en place du greffon de petitpalmaire.

Soins postopératoriesUn gantelet plâtré ou en résine assure l’immobilisation de la

colonne du pouce, MP en extension, pendant six semaines, et pré-vient tout risque de rétraction de la première commissure. Uneradiographie de contrôle vérifie systématiquement la bonne posi-tion de la MP dans le plan frontal.

Autres techniquesTechnique statique

Technique de Smith [7]. Elle utilise également un greffon ten-dineux (Fig. 11) : voie d’abord dorso-ulnaire, centrée sur la MP,avec section de l’expansion aponévrotique de l’adducteur ; creu-sement d’un tunnel osseux transversal à la base de la premièrephalange. Le greffon tendineux est passé à travers ce tunnel.Son extrémité distale est fixée au bord radial du pouce, par unesuture en pull out. Son extrémité proximale est faufilée dans le reli-quat proximal du LCU, lorsque celui-ci paraît suffisamment solide(Fig. 11A). Dans le cas contraire, le greffon est passé dans un tun-nel osseux vertical foré au niveau de la face interne de la tête dumétacarpien : il est alors suturé à lui-même (Fig. 11B).

Techniques dynamiquesTechnique de Sakellarides [17]. Cette technique de stabilisa-

tion active utilisant un transfert tendineux de court extenseurdu pouce est réalisée par voie d’abord dorso-ulnaire. L’expansionaponévrotique est sectionnée au ras du tendon du long exten-seur du pouce. On dissèque le tendon du court extenseur, situéen dehors de celui du long extenseur (Fig. 12), aussi loin quepossible, en proximal et en distal, pour le désinsérer distalement.L’articulation est abordée et nettoyée. Un tunnel osseux est foré(Fig. 13) à la base de P1 : son point d’entrée est dorsal, sa directionest oblique à 45◦ par rapport à la surface articulaire, pour abou-tir au point d’insertion normal du LCU, sur la face interne de laphalange. L’extrémité distale du tendon court extenseur est pas-sée dans ce tunnel, d’arrière en avant, puis suturée au moignonproximal du LLI (Fig. 14). Si ce dernier est insuffisant, la fixationau métacarpien est assurée par une suture sur une ancre type MiniMitek®.

Technique de Neviaser [18]. Cette technique de stabilisa-tion dynamique de l’articulation par transfert du tendon del’adducteur du pouce utilise la voie d’abord dorsale. L’expansionaponévrotique est réclinée distalement, le tendon de l’adducteurdu pouce est désinséré au ras du sésamoïde. Un lambeau rectan-gulaire à base métacarpienne est disséqué dans le tissu cicatricielsitué à la face interne de l’articulation. Il est retendu distale-ment et suturé au niveau de la base de la phalange. On foreun trou dans la corticale interne de la phalange proximale, 1 cmau-delà de l’interligne articulaire, sur le bord ulnaire. Le tendonde l’adducteur est alors avancé distalement et réinséré dans cetorifice, à l’aide d’une mini ancre ou par une suture en pull out(Fig. 15).

Figure 11. Technique de Smith :fixation distale du greffon surun bouton (A). La fixation proxi-male se fait soit sur le moignonproximal du ligament collatéralulnaire (B) lorsqu’il est suffisant,soit en le suturant à lui-mêmeaprès passage dans un tunnelosseux métacarpien (C).

Instabilités par lésion du ligament collatéralradial

Une stabilisation passive selon la technique de Maneaud et Lit-tler [10] peut parfaitement être effectuée par voie externe. L’incisioncutanée est pratiquée à la jonction des peaux palmaire et dorsale,centrée sur la MP. L’expansion aponévrotique du court abducteurest dégagée après dissection de la branche sensitive externe du nerfradial destinée au pouce, puis sectionnée parallèlement au tendoncourt extenseur, à 3 ou 4 mm de ce dernier. L’intervention est alorsmenée selon la technique décrite pour les instabilités ulnaires.

La technique de Camp [19] est dérivée de la technique deNeviaser [18]. La seule différence notable est liée à l’insertion

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Figure 12. Technique de Sakellarides : dissection du tendon du courtextenseur du pouce, poussée aussi loin que possible (en trait pointillé).

Figure 13. Technique de Sakellarides : après section de l’expansionaponévrotique de l’adducteur, le tendon court extenseur du pouce estdésinséré, puis passé sous le tendon du long extenseur. Le tunnel osseuxphalangien est pratiqué au niveau de la base de P1.

du tendon du court abducteur, qui se fait exclusivement surla phalange et non sur le sésamoïde comme l’adducteur dupouce.

Arthrodèse métacarpophalangienneElle est pratiquée par une voie d’abord dorsale longitudinale

médiane ou curviligne (Fig. 16A), afin d’éviter tout contact dou-loureux de la cicatrice dans les prises de force de la main.

La capsule articulaire est abordée par arthrotomie longitudinaleentre les tendons court et long extenseurs (Fig. 16B). Les deuxextrémités ostéoarticulaires sont libérées en sous-périosté, au bis-touri et à la rugine. La surface métacarpienne est avivée à la pincegouge, en lui conservant une forme hémisphérique, tandis que labase de la première phalange est creusée en cupule, afin d’obtenirune large surface de contact et de permettre une compression etun réglage facile du positionnement de l’arthrodèse. La positionidéale de la MP est de 10◦ de flexion et de 10◦ de pronation,position adaptée à la prise pollicidigitale. Elle est maintenue

Figure 14. Technique de Sakellarides : le tendon court extenseur estpassé dans le tunnel, d’arrière en avant, puis suturé au moignon proximaldu ligament collatéral ulnaire.

par la mise en place de deux broches en croix, de calibre 12 à15/100, mises en va-et-vient et coupées au ras de l’os cortical(Fig. 16C).

En fin d’intervention, l’arthrodèse est protégée par un surjetd’adossement des tendons extenseurs du pouce, et la peau estsuturée par points séparés.

Les soins postopératoires comportent l’immobilisation dupouce dans un gantelet prenant métacarpo- et interphalangienneà conserver six à huit semaines jusqu’à fusion radiologique del’arthrodèse.

� Lésions de la plaque palmaireLes structures qui s’opposent au mécanisme d’hyperextension

de la MP sont constituées d’éléments actifs et passifs [20]. Les struc-tures passives sont les ligaments palmaires proximaux et distauxunissant le métacarpien à la phalange par l’intermédiaire dessésamoïdiens et de la plaque palmaire avec ses fibres directes etcroisées. Les structures actives sont l’insertion terminale du courtfléchisseur du pouce sur le sésamoïdien externe et le faisceauoblique de l’adducteur du pouce inséré sur le sésamoïdien interne.

Au cours d’un traumatisme violent en hyperextension aveccompression axiale, la plaque palmaire peut se distendre ouse rompre lorsqu’il se produit un effet came avec bâillementantérieur de l’articulation. Les faisceaux métacarpophalangiensdes ligaments latéraux peuvent alors également être lésés expli-quant l’instabilité lors des prises pollicidigitales. Les lésions d’uneentorse de la plaque palmaire sont souvent différentes de cellesobservées dans les luxations de la MP (luxation de Farabeuf) où laphalange glisse le long de la tête du métacarpien avec respect desfaisceaux métacarpophalangiens et métacarpoglénoïdiens laté-raux.

Un bilan radiographique est indispensable associant des radio-graphies statiques et dynamiques qui permettent, d’une part, deconfirmer l’instabilité en hyperextension et, d’autre part, de lesdifférencier en trois variétés :• les formes où les sésamoïdiens suivent la phalange dans son

mouvement d’hyperextension qui traduisent une rupture dela plaque palmaire en amont de la sangle sésamoïdienne avecdésinsertion des muscles intrinsèques (Fig. 17A) ;

• celles où les sésamoïdiens sont fracturés et où seuls leursfragments distaux suivent la phalange dans son déplacement(Fig. 17B) ;

• et, enfin, celles où les sésamoïdiens ne bougent pas lors du mou-vement d’hyperextension, traduisant une rupture de la plaque

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Figure 15. Technique de Neviaser : un lambeau rectangulaire à basemétacarpienne est disséqué dans le tissu cicatriciel puis suturé, sous ten-sion, au niveau de la base de P1. Le tendon de l’adducteur est réinséré entransosseux, après avancement de 1 cm (A,B).

palmaire en aval de la sangle sésamoïdienne (Fig. 17C) qui peutalors concerner les structures passives seules ou les structuresactives et passives.Les autres formes traduisent une lésion conjointe des structures

actives et passives de stabilisation de la plaque palmaire [21].Lorsque le diagnostic peut être fait en urgence, le traitement

reste orthopédique en l’absence de subluxation résiduelle et siseules les structures passives sont atteintes. Il repose sur uneimmobilisation par attelle MP stop ou un gantelet en résine nebloquant que la MP en extension zéro pendant six semaines. Lesautres formes sont plutôt chirurgicales avec réparation de toutesles structures lésées suivie d’une immobilisation postopératoirede quatre semaines. En cas de doute, un traitement orthopédiqueavec attelle MP stop peut être envisagée de prime abord suivi d’untesting à la cinquième semaine puis d’une stabilisation chirurgi-cale en cas de laxité résiduelle importante.

Certains patients, au décours d’un traumatisme en hyper-extension, se présentent avec un blocage en extension del’articulation MP alors que l’extension active reste possible. En casd’échec des tentatives de réduction orthopédique de ce blocageou d’incongruence après réduction, l’intervention chirurgicale

Figure 16. Arthrodèse métacar-pophalangienne.A. Incision cutanée.B. Voie d’abord entre tendonscourt et long extenseurs dupouce.C. Mise en place des deux brochesen croix après résection du carti-lage articulaire.

s’impose et est au mieux réalisée par voie palmaire. Elle permetde constater l’interposition articulaire d’une bandelette de liga-ment collatéral accessoire radial associée à une rupture proximalede la plaque palmaire [22]. La réduction de l’interposition est obte-nue par simple section de cette bandelette. Cette lésion sembleplus fréquente chez les sujets jeunes qui présentent une pro-éminence exagérée du condyle radial s’accompagnant en générald’une extension physiologique de la MP moindre que la popula-tion normale [23].

Très fréquemment, les lésions de la plaque palmaire ne sontdiagnostiquées que tardivement au stade d’instabilité douloureusechronique dont le traitement est alors chirurgical. Les techniquesde réparation doivent idéalement reposer sur une réparation desstructures statiques par suture de la plaque palmaire [24] associéeà un renforcement des structures dynamiques réalisé pour nousà l’aide d’un transfert d’une partie de l’adducteur du pouce. Enpréopératoire, le bilan radiographique dynamique permet, touten confirmant l’instabilité en hyperextension, de déterminer letype de lésion de la plaque palmaire.

L’intervention se fait par une voie d’abord en zigzag palmairecentrée sur la MP du pouce.

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Figure 17. Les trois formes de lésion de la plaque palmaire.A. Les sésamoïdes suivent l’hyperextension de la phalange, traduisant ladésinsertion des muscles intrinsèques.B. Fractures des sésamoïdes.C. Rupture de la plaque palmaire en aval de la sangle sésamoïdienne.

L’accès à la plaque palmaire nécessite l’ouverture de la pou-lie A1 du canal digital (longitudinalement sur son bord radial)puis l’extériorisation du long fléchisseur du pouce (flexor pollicislongus [FPL]), récliné par un écarteur ou un lacs.

L’inspection de la plaque palmaire retrouve un cal fibreux inter-posé au niveau de la zone de rupture, lequel est excisé. En cas derupture proximale de la plaque palmaire, la plus fréquente, onretrouve en général des fibres transversales sur le col du métacar-pien qui vont permettre de réaliser sans point transosseux, unesuture satisfaisante de la plaque palmaire par deux solides pointsen U. Celle-ci doit être réalisée à 20◦ de flexion de la MP.

La poulie MP peut ensuite être reconstituée par une plastie [25]

détournant la partie terminale de l’insertion de l’adducteur dupouce passée en avant du FPL et suturée à la berge radiale restantede la poulie A1. Une immobilisation postopératoire de quatre àcinq semaines est ensuite nécessaire.

� ConclusionLes entorses graves de la MP du pouce sont fréquentes,

surtout dans certains sports (sports de balle et skieurs) et concer-nent principalement le ligament collatéral ulnaire. Pour ce

dernier, les entorses graves s’accompagnent d’une interpositionde l’expansion de l’adducteur du pouce entre les deux bergesdu ligament rompu empêchant tout processus de cicatrisationspontanée. Le traitement de ces formes est systématiquementchirurgical pour surtout lever l’interposition. Les laxités chro-niques des formes initialement mal prises en charge sont souventmal tolérées et source d’arthrose secondaire. Le traitement avantl’arthrose repose sur une ligamentoplastie de stabilisation et surl’arthrodèse de la MP du pouce lorsque l’arthrose est avérée. Lesentorses du LCR sont moins chirurgicales, car elles n’entraînentpas d’interposition. Cependant, les formes à forte laxité méritentd’être quand même opérées, car elles sont une source de laxité rési-duelle, parfois importante. Les ruptures de plaque palmaire sontla conséquence d’un mécanisme d’hyperextension isolé. Le trai-tement est parfois chirurgical quand les structures de stabilisationactive et passive sont atteintes et orthopédique dans les autrescas.

“ Points essentiels

• Il est impératif de réaliser des radiographies de la MP dupouce avant le testing afin d’élminer une fracture.• Définition d’une entorse grave du ligament collatéralulnaire : laxité de plus de 35◦ ou de plus de 10◦ par rapportau côté sain.• Toute entorse grave du ligament collatéral ulnaire de laMP du pouce doit être opérée en urgence du fait de lalésion de Stener.• L’existence d’une luxation palmaire associée à une laxitéen adduction de plus de 30◦ signe l’entorse grave du liga-ment collatéral radial et impose la réparation chirurgicale.• L’existence de lésions arthrosiques de la MP du poucedans un contexte d’instabilité chronique contre-indique laréalisation d’une ligamentoplastie et impose l’arthrodèse.

Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts enrelation avec cet article.

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E. Roulot, Ancien interne, ancien chef de clinique des Hôpitaux de Paris ([email protected]).Institut de la Main, 6, square Jouvenet, 75016 Paris, France.Centre chirurgical des Peupliers, 8, place de l’Abbé-Georges-Hénocque, 75013 Paris, France.

J. Chino, Interne des Hôpitaux de Paris.Institut de la Main, 6, square Jouvenet, 75016 Paris, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Roulot E, Chino J. Entorses graves de l’articulation métacarpophalangienne du pouce. EMC - Techniqueschirurgicales - Orthopédie-Traumatologie 2014;9(3):1-10 [Article 44-369].

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