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U NIVERSITE P IERRE M ENDES F RANCE I NSTITUT D ’U RBANISME DE G RENOBLE New York City Public Plazas La rue, d’un corridor utilitaire à un espace de vie à part entière. Master II Sciences du Territoire Spécialité Urbanisme, Habitat et Coopération Internationale Septembre 2012 Directeur de mémoire Teodoro Vales Michaëlle Policard Maître de stage Elena Madison

New York City Public Plazas - La rue, d’un corridor utilitaire à un espace de vie à part entière

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Mémoire et projet de fin d'étude. -Master II Science du Territoire, spécialité Urbanisme, Habitat et Coopération internationnale. -Structure d'accueil de stage : Porject for Public Spaces, New York, NY.

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U N I V E R S I T E P I E R R E M E N D E S F R A N C E

I N S T I T U T D ’ U R B A N I S M E D E G R E N O B L E

New York City Public Plazas La rue, d’un corr idor uti l i tai re à un espace de vie à par t entière.

Master II Sciences du Territoire

Spécialité Urbanisme, Habitat et Coopération Internationale

Septembre 2012

Directeur de mémoire

Teodoro Vales

Michaëlle Policard

Maître de stage

Elena Madison

Notice Analytique

AUTEUR Michaëlle Policard

TITRE DU MEMOIRE New York City Public Plaza

La rue, d’un corridor utilitaire à un espace de vie à part entière.

DATE DE SOUTENANCE 12 Septembre 2012

ORGANISME D’AFFILIATION Institut d’Urbanisme de Grenoble – Université Pierre Mendès France

DIRECTEUR DE MEMOIRE Teodoro Vales

COLLATION 96 pages – 10 annexes – 18 références bibliographiques

MOTS-CLES Rue, Espace Public, Plaza, Placemaking, évaluation.

MOTS-CLES GEOGRAPHIQUES Amérique du Nord, Etats-Unis, New York City.

RESUME EN FRANÇAIS

Les « public plazas » se multiplient dans le paysage urbain New-Yorkais. Ces petites

places atypiques prennent forme là où l’exclusivité de l’utilisation de la rue en

faveur de l’automobile n’est pas pertinente. Ainsi, parkings et portions de route

sous-utilisées sont fermés à la circulation, piétonnisés et ouverts au public. Ces

plazas participent à l’évolution du rôle de la rue – d’un corridor utilitaire à un

espace de vie à part entière – en redonnant légitimité au piéton dans l’espace

public.

Elles s’inscrivent également dans une politique urbaine plus large de New-York qui

vise l’amélioration du cadre de vie de ses habitants, de ses travailleurs et de ses

visiteurs. La ville mise principalement sur l’amélioration de la qualité de ses rues

qu’elle veut à la fois support de la mobilité et support de la vie sociale.

Une évaluation menée au cours de 4 mois de stage à Project for Public Spaces à

New York met en évidence le succès de ces plazas et l’efficacité du programme

dont elles sont issues. Cet exemple New-Yorkais met en lumière l’intérêt et la

capacité de ces petites interventions sur l’espace public à faire évoluer les

mentalités au regard du rôle de la rue et à faire évoluer les pratiques dans les

modes de penser et de faire la ville.

Les concepts utilisés et les outils développés par la ville de New-York s’avèrent

quant à eux adaptables et transposables aux villes Françaises. Ils leur permettraient

de revitaliser, de dynamiser et d’animer leurs rues jusque-là peu exploitées comme

espace public et support de la vie sociale.

ENGLISH SUMMARY

The "public plazas" are more and more famous in New York City. These small public

spaces are carved out of streets formerly dedicated to vehicular traffic or parking.

These plazas lead to re-imagine Streets as lively public places rather than vehicular-

oriented by reintroducing some room for pedestrians in the public realm.

They also are part of a wider New York City urban policy. The city wants to improve

the inhabitants, workers and visitors daily quality of life. NYC mainly relies on

improving the quality of its streets by making them both for mobility and social life.

An evaluation conducted during a 4 months internship at Project for Public Spaces

in New York highlights the success of these plazas and the efficiency of the

program in which one they are part of. This example shows that small interventions

on the public realm can change what people think about streets and change

urban design approaches.

The concepts and tools developed by the City of New York are potentially

adjustable to French cities. By embracing them they could revitalize and enliven

their streets which are not really exploited as public spaces.

New York City Public Plazas

La rue, d’un corr idor uti l i tai re à un espace de vie à part entière .

Michaelle Policard

Septembre 2012

« Street is the river of life of the city. » « La rue est le fleuve de vie de la ville. »

William H. Whyte.

Remerciements

Ce mémoire marque le retour d’un stage de 4 mois à New-York au sein de Project for Public

Spaces. Je tiens à remercier toute l’équipe de PPS pour leur accueil, leur enthousiasme et leur

partage d’expérience et plus particulièrement encore Elena Madison et Pippa Brashear qui

m’ont guidée et soutenue dans mon projet.

Je remercie également Teodoro Vales, mon tuteur universitaire à l’Institut d’Urbanisme de

Grenoble, ainsi que Marcus Zepf pour m’avoir fait découvrir PPS et pour ses conseils.

Je tiens également à remercier tous ceux qui ont rendu mon voyage à New-York possible :

Monique Monin, Hubert et Régine Policard et Thibaut Caselli. Ainsi que tous ceux qui l’on rendu

inoubliable : Zuzana Zuziova, Charlotte Vonberg, Sebastien Laye, la famille Jackman et tous les

inconnus que j’ai croisé dans les rues New-Yorkaises.

SOMMAIRE

INTRODUCTION : REDECOUVERTE DE LA RUE A DIMENSION HUMAINE ------------------ 13

1 – QUELLE IDENTITE POUR LA RUE NEW-YORKAISE? -------------------------------------- 19

1.1 – ENTRE DECLIN ET PENSEE NOUVELLE ------------------------------------------------------------------- 20

1.2 – EVOLUTION DU ROLE DE LA RUE ----------------------------------------------------------------------- 25

1.3 – LIVABLE STREET : UNE NOUVELLE VISION POUR NEW YORK ----------------------------------------- 30

2 – REVITALISER LA RUE AVEC LE CONCEPT DE PLACEMAKING -------------------------- 39

2.1 – « PLAZA PROGRAM » : UN OUTIL AU SERVICE DU PLACEMAKING --------------------------------- 40

2.2 – NEW YORK CITY PUBLIC PLAZAS : « PLACEMAKING ÉVALUATION » ------------------------------ 44

2.3 – LA RUE, DES DESTINATIONS – RESULTATS DE L’EVALUATION ---------------------------------------- 49

3 – QUEL AVENIR POUR LA RUE ? ---------------------------------------------------------- 65

3.1 – CHANGEMENT DE REGARD SUR LA RUE --------------------------------------------------------------- 66

3.2 – VERS UNE PRIVATISATION DE LA RUE ? ---------------------------------------------------------------- 68

3.3 – DES CONCEPTS TRANSPOSABLES ? -------------------------------------------------------------------- 72

CONCLUSION GENERALE ------------------------------------------------------------------ 81

Bibliographie, 85

Table des illustrations, 86

Crédits photographiques, 88

Liste des sigles, 89

Table des matières, 90

Tables des annexes, 92

13

INTRODUCTION : REDECOUVERTE

DE LA RUE A DIMENSION HUMAINE

Les villes Américaines du 21ème siècle affichent une ambition forte : revitaliser et dynamiser

leurs centres-villes afin d’attirer à nouveau la population qui les avait délaissés pour les

suburbs1. L’enjeu est de taille lorsque l’on considère que les suburbs font parties intégrante de

l'American way of life, symbolisant la réussite, le rêve américain, la tranquillité, et la sécurité.

Néanmoins ce modèle social tend à évoluer et en parallèle le modèle de développement

urbain se diversifie face aux leçons tirées de l’urbanisme fonctionnaliste.

La ségrégation de l’espace et la séparation des fonctions et des usages de la ville ont mené

à un développement urbain fort consommateur d’espace où l’automobile est devenue

quasiment indispensable pour le moindre déplacement. Aux Etats-Unis, plus qu’ailleurs dans

le monde, on se rend compte aujourd’hui des externalités négatives qui en découlent

notamment sur l’environnement et sur la santé des populations.

Du point de vue de la santé publique, bien qu’aucune étude officielle n’ait encore réussi à

prouver la corrélation entre l’utilisation de l’automobile et l’obésité, beaucoup la considère

comme une évidence. Lorsque l’on

prend le problème dans le sens

inverse, des études nous prouvent

cette fois que la pratique de la

marche, du vélo ou encore

l’utilisation des transports publics est

quant à elle un facteur de réduction

du taux d’obésité. Ainsi, les Etats-Unis,

pays totalement dépendant de

l’usage de l’automobile, compte le

taux d’obésité le plus élevé au

monde avec 35.7% d’adultes et 17%

d’enfants obèses en 20102.

Illustration 1 : Corrélation entre le taux d’obésité et taux

de pratique de la marche, vélo et transport public par

pays. Source: Transportation Alternatives, 2007.

1 Une suburb est le nom donné aux États-Unis pour décrire les banlieues périphériques relativement récentes des

villes. 2 National Obesity Trends.

14

Sur le plan écologique « les transports aux Etats-Unis sont responsables à eux seuls du tiers des

émissions de dioxyde de carbone (CO2) du pays et en produisent plus que n'importe quelle

autre économie au monde »3.

Illustration 2 : Emissions de CO2 totales et par tête du secteur des transports par pays. Source :

www.earthtrendsdelivered.org.

Dans ce contexte les réflexions se tournent de plus en plus vers une réduction de la place et

de l’utilisation de l’automobile couplée à un développement urbain de proximité afin de

favoriser des déplacements d’une distance plus courte exécutables notamment à pied, à

vélo ou tout autre type de mode de transport considéré comme doux4. Il s’agit donc de sortir

du modèle urbain basé sur l’urbanisme fonctionnaliste et de revenir à un modèle favorisant la

mixité des fonctions et des usages que ce soit à l’échelle du quartier, de la ville ou de la

métropole.

Le premier lieu d’expression de cette mixité urbaine peut être considéré comme étant la rue.

Elle est la structure fondamentale de la ville et la forme la plus visible des espaces urbains. Elle

est un lieu de vie sociale, un lieu où s'écoulent les flux de la ville et également un lieu de

changements et de perpétuelles évolutions. Cependant, au même titre que la mixité des

fonctions, les modes de circulation ont été remis en cause par l’urbanisme fonctionnaliste et

la pensée moderniste. Le rôle traditionnel de mise en relation des lieux, des fonctions et des

groupes sociaux de la rue s’est vu limité à la fonction principale de circulation automobile

pendant plusieurs décennies réduisant par la même la qualité de vie de proximité. Quant à

3 Centre américain de recherches PEW, 2003. 4 Les transports doux caractérisent tous les modes de transports sans moteurs, qui ne génèrent pas de pollution ou

de gaz à effet de serre.

15

son caractère d’espace public en tant qu’espace pour tous et espace de vie, il s’est vu

relégué au second plan.

Comme le montre l’enquête menée par Denis Pingaud5 sur la perception des espaces

publics, la rue n’est que peu appréhendée comme tel par les usagers eux-mêmes.

Seulement 17% d’entre eux considèrent la rue comme un espace public alors que les

espaces verts représentent 69% des perceptions. Il s’agit donc d’agir sur la rue afin de lui

redonner son caractère d’espace public à la fois en tant que support de la mobilité et de

lieu de vie.

Illustration 3 : Interprétation graphique des données statistiques de l’enquête menée par Denis Pingaud.

On considère ici le mot « rue » comme la traduction du mot « street » en anglais.

Alors qu’en France et plus généralement en Europe le mot « rue » se limite à

l’appellation d’une voie à l’échelle du piéton aux Etats-Unis la « street » est un mot

commun pour nommer un rue, une avenue, un boulevard, en d’autres termes toutes

voiries comprenant des trottoirs6.

5 « Comment les habitants perçoivent-ils les espaces publics? » Enquête dans quatre grandes métropoles

Européennes menée par Denis Pingaud, membre du comité scientifique de La Fabrique de la Cité. 6 The American Heritage, dictionary of the English language.

69%

24% 17%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

Espaces verts Lieux culturels Rue et zones piétonnes

Comment les habitants perçoivent-ils

les espaces publics?

% des personnesintérrogées

16

Dans certaines villes Américaines quelques initiatives innovantes sont déjà mises à l’œuvre.

San Francisco est l’une des premières villes à avoir mis en place un programme municipal

visant à améliorer la qualité de vie dans ses rues.

Le programme nommé « Pavement to parks » a pour objectif de se réapproprier des places

de parking de manière temporaire ou permanente et d’en faire des « Parklets », sorte de

terrasses souvent agrémentées de végétation et proposant des bancs, des tables et chaises.

Ces parklets sont ouverts au public et mis gratuitement à disposition des passants.

Dans le même esprit New York cherche aujourd’hui à revitaliser ses centres afin de les rendre

attractifs. Il s’agit alors d’améliorer la qualité de vie de proximité en répondant aux nouvelles

exigences des villes du 21ème siècle et aux besoins et attentes des citadins.

Pour se faire, New York mise principalement sur la renaissance de ses rues. Tiré de l’anglais

« Street renaissance » l’idée est de redécouvrir la rue à échelle humaine et de faire ressortir

son potentiel en tant que support d’un espace public à part entière et non uniquement en

tant que voirie pensée pour et dédiée à l’automobile.

Le nouveau schéma de rue vers lequel tend la ville de New York est celui d’une rue à la fois

support de la mobilité en favorisant le partage de la voirie entre les différents modes de

déplacement et également support de la vie sociale en favorisant des espaces de vie

adaptés aux besoins locaux et où l’on se sent en sécurité.

C’est dans ce contexte que la ville de New York a mis en place une variété d’actions et de

programmes visant à répondre à ses nouveaux objectifs.

Le « Plaza program » est l’un d’entre eux et c’est sur celui-ci que va s’appuyer le contenu de

ce travail. Brièvement, la démarche du programme s’appuie sur un partenariat public/privé

qui vise à faire émerger des petites places publiques – que l’on nommera « plaza » –

temporairement construites sur des portions de voirie ou des parkings sous utilisés. Il s’agit

donc de se réapproprier des espaces anciennement dédiés exclusivement à l’automobile

au profit des piétons.

Ces plazas, s’inscrivent tout à fait dans la démarche New-Yorkaise puisqu’elles ont pour

vocation de favoriser un rééquilibrage du partage de la voirie en offrant un environnement

plus propice à la pratique de la marche. Elles visent également à améliorer le cadre de vie

de proximité en créant de réelles destinations locales.

En vue de ce type particulier de places publiques il est intéressant de se demander si ces

plazas viennent à être perçues comme des espaces publics traditionnels tout comme les

parcs et espaces verts. Est-ce que ces plazas trouvent leur place dans des rues parfois

démesurées en faveur de la circulation routière ? Qui sont les usagers et quels sont les usages

pratiqués au sein de ces places publiques spécifiques? Est-ce que la population (visiteurs,

résidents, travailleurs) s’approprie réellement ces nouveaux lieux au caractère encore

17

singulier? Comment ces plazas, à priori temporaire, peuvent-elles évoluer dans le temps en

terme de forme, d’activité ou encore de pérennité? Dans le pays de l’automobile, comment

est perçue la volonté de diminuer l’espace qui lui est dédié au profit d’autres usages.

Comment un partenariat public/privé sur un projet d’espace public se met-il en place et

peut-il être durable dans le temps? Le désengagement partiel de la ville en tant que secteur

public dans la mise en œuvre de ces plazas est-il un frein à un développement équilibré sur

l’ensemble de son territoire?

Ce sont les grandes questions auxquelles nous nous efforcerons de répondre tout au long de

cette étude avec comme ligne directrice la question de l’amélioration de la qualité du

cadre de vie.

Ainsi dans une première partie nous nous attacherons à comprendre l’évolution de la rue

américaine entre corridor utilitaire et espace de vie sociale. Ce sera également l’occasion

d’expliquer en quoi et comment la ville de New York fait de la reconquête de ses rues un fer

de lance pour améliorer la qualité de vie quotidienne de ses citadins.

La seconde partie, davantage concrète, présentera une manière de revitaliser la rue en

s’appuyant sur l’évaluation des plazas New-Yorkaises menée dans le cadre d’un stage de 4

mois au sein de Project for Public Spaces, un organisme à but non lucratif basé à New York

City. Cet organisme propose à l’ensemble des acteurs de l’espace public son expertise et le

fruit de 35 années d’observation, d’expérimentation et d’intervention dans les espaces

publics nord-américains.

La troisième partie, quant à elle, proposera un retour critique sur le « Plaza program » et

l’évolution induite par la politique de la ville de New York. Elle mettra aussi en relief les

pratiques et concepts New-Yorkais qu’il serait judicieux de tester dans nos villes.

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1 – QUELLE IDENTITE POUR

LA RUE NEW-YORKAISE?

La morphologie urbaine de New York fait que plus d’un quart (26.6%) du territoire de la ville

est constitué de rues. Elles représentent l’essentiel de l’espace public et sont, depuis

l’élaboration de la « grille » en 1811, un élément majeur dans la politique publique urbaine de

la ville. Les évolutions technologiques et les courants de pensées ont eu des impacts

importants sur la forme et les fonctions que les rues ont tenues au fur et à mesure des

décennies. Alors qu’aujourd’hui on les considère comme l’un des éléments essentiels dans la

qualité du cadre de vie de proximité il est primordial de mettre en lumière leur évolution.

Illustration 4 : Répartition de l’utilisation des sols de la ville de New York, en pourcentage. « Streets make

up over a quarter of the City’s land area. » (Source : PlaNYC Sustainable Stormwater Managment Plan,

2008).

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1.1 – ENTRE DECLIN ET PENSEE NOUVELLE

New York est une ville de toutes les extravagances, son architecture et ses espaces publics

ont connu un certain nombre de visages au fil du temps. Néanmoins le 20ème siècle a plus

particulièrement marqué la transformation des rues New-Yorkaises et l’évolution du regard

porté sur ces dernières. Ainsi, l’urbanisme fonctionnaliste et la pensée moderniste ont orienté

la « renaissance urbaine » de New York et façonné ses rues pendant plusieurs décennies et

ce jusqu’à l’apparition de nouveaux idéaux sur la nature même de la rue.

LE MODELE URBAIN NEW-YORKAIS DES ANNEES 1930 A 1970.

Cette ville, en constante évolution, et encore plus ces dernières années après les

évènements du 11 Septembre 2001, n’a pas toujours été une ville où il faisait bon flâner dans

les parcs, les squares et les rues. Dans les années 1960, la majorité des centres des villes Nord-

Américaines ont accusé le coup d’un rejet de leurs habitants au profit des « suburbs ». A New

York comme dans le reste de l’Amérique du Nord, cette phase de déclin des centres-villes a

eu notamment pour conséquence un abandon des espaces publics et notamment des rues.

Pour mieux comprendre le rejet des centres-villes par leurs habitants il est important de savoir

que l’on ne parle pas de centre-ville en Amérique du Nord comme on en parle en Europe.

Le centre-ville Européen est caractérisé par son historicité, sa densité et par son caractère

central au sein de la ville. Il est également le principal lieu de concentration des activités

culturelles et sociales. En opposition, le centre-ville Nord-Américain, du fait de la relative

courte période historique des villes sur le continent, est quant à lui assimilé au Central Business

District (CBD) représenté par ses gratte-ciels imposants. Les espaces urbains associés à la

notion « Européenne » de « centre » se trouvent être des lieux d’activité ou des lieux

économiques et non des lieux de vie populaire.

Cette absence d’un centre unique comme support de la vie sociale se traduit à New York

par un territoire fragmenté en plusieurs quartiers. Chacun possède une atmosphère propre et

la plupart du temps ils sont facilement identifiables à la communauté majoritaire qui les

habite (quartier des affaires, quartier chinois, quartier des artistes, quartier noir, etc.) Autant

d’entités autonomes ou de « petits villages » qui créent non pas une centralité unique mais

une multiplicité de centralités qui s’appuient sur la morphologie même de la ville, basée sur

une grille datant de 1811 et planifiant la ville bien avant la construction du premier

immeuble.

21

Illustration 5 : The Commissioners' Plan of 1811, John Randel, Jr. Source: Exposition temporaire, The

Greatest Grid: The Master Plan of Manhattan, 1811-201, 6 Decembre 2011 – 15 Julliet 2012, Museum of

the City of New York.

Alors que la notion de centre ne semble pas être déterminante dans la culture urbaine

américaine, il n’est pas surprenant de voir la population urbaine quitter la ville pour la

périphérie, et ce dès le début du XXème siècle. Cette vie périurbaine correspond à un idéal

de vie américain qui prône un rapprochement vers la nature et qui peut aller jusqu’à rejeter

l’idée même de la ville. On le voit notamment avec l’apparition du mouvement idéologique

d’architecture organique porté notamment par le très reconnu architecte Frank Lloyd Wright

(1867 – 1959) et ses « maisons de prairie », construites au début du XXème siècle dans les

prairies de la périphérie de Chicago.

Dans les années 1960, 1970, le départ pour la périphérie déjà engagé quelques décennies

auparavant, va s’accélérer avec la démocratisation et la généralisation de l’automobile et

avec la construction d’infrastructures routières pour adapter les rues à la circulation de

masse. Ce passage d’une vie urbaine à une vie périurbaine est symptomatique de la pensée

moderniste et fonctionnaliste qui rejette la ville traditionnelle et pour laquelle elle réserve

davantage de place à la voiture qu’au piéton. Ce mouvement a accordé peu

d’importance à l’espace public (aux places et aux rues), en conséquence de quoi l’intérêt

qu’on lui a porté en termes d’aménagement urbain a fini par diminuer. Les pouvoirs publics

ont alors consacré l’essentiel de ces espaces aux nécessités grandissantes de la mobilité et

de l’amélioration de la circulation automobile. Les lieux destinés à la représentation sociale, à

la mise en scène des individus, comme les rues, ont ainsi été fortement négligés.

Dans le cas de la ville de New York, cette transformation s’est traduite à travers la pensée

d’un homme : Robert Moses (1888 – 1981). A partir de 1930 et jusque dans les années 1970 il

aura été l’artisan de la rénovation urbaine de New York. Son influence a entrainé un

urbanisme très critiqué aujourd’hui pour sa démesure envers l’automobile et son manque de

prise en compte de la qualité de vie des habitants. Ses actions marquées par l’urbanisme

moderne et fonctionnaliste qui correspondent au mouvement de pensée dominant de

l’époque vont mener entre autre au développement d’un grand réseau de transport avec la

22

création d’autoroutes urbaines déchirant le tissu urbain ancien afin d’étendre la ville vers la

périphérie et détruisant les quartiers traditionnels.

Illustration 6 : Robert Moses and the Modern City, Brochure cover,

November 12, 1959. Source : Courtesy of MTA Bridges and Tunnels

Special Archive.

« L’association de la politique de renouvellement urbain de Robert Moses et le chantage

auprès de la population populaire ont rendu notre départ inévitable7 ». Cette phrase écrite

par Roberta Brandes Gratz dans son livre « The battle for Gotham » montre la pensée

sélective de R. Moses à travers laquelle seuls ceux ayant accès à une voiture individuelle et à

une maison peuvent accéder aux espaces en dehors de la ville reliés par le nouveau réseau.

Ce phénomène de développement de la ville en périphérie va, au détriment de l’espace

public traditionnel, s’accompagner de nouveaux lieux de loisirs, et de nouvelles pratiques en

terme d’espace public avec par exemple l’émergence de centres commerciaux comme

nouveaux lieux « publics ». En conséquence les rues des centres-villes vont se vider de leurs

activités et de leur vie pour n’être plus que support du déplacement.

7 Gratz R., « The battle for Gotham », 2010, p.5: “The combination of Robert Moses Urban Renewal and the

underworld shakedowns made our departure inevitable”,

23

LE RETOUR A LA RUE, OU LA VISION DE JANE JACOBS

Au cours de cette période critique des années 1960 les villes Nord-Américaines s’engagent

dans une rénovation urbaine suivant les principes de l’urbanisme moderne et fonctionnaliste

et rejettent la ville traditionnelle. Au même moment la journaliste et théoricienne américaine

Jane Jacobs (1916 - 2006) publie en 1961 son premier ouvrage intitulé « The Death and Life of

Great American Cities » traduit dans plusieurs langues et notamment en français en 1991

(Déclin et survie des grandes villes américaines). Elle y dénonce la méconnaissance des

urbanistes et l’incompétence des concepteurs de la ville, et pose un regard sévère sur la

pensée moderniste qui tend à rejeter la ville ancienne. La réduction exclusive de l’utilisation

de la rue en faveur de l’automobile est l’une des conséquences contre laquelle l’auteur se

bat et à laquelle elle oppose sa réflexion basée sur une mixité des usages et une

compréhension des rapports sociaux qui évoluent dans des espaces comme la rue.

A travers « The Death and Life of Great American Cities » Jane Jacobs propose une autre

vision de la ville qui s’appuie sur l’observation et la compréhension du vécu des

communautés. A contrario des urbanistes et architectes issus du mouvement moderniste,

Jane Jacobs s’intéresse avant tout à la ville, non pas comme objet scientifique et théorique,

mais comme terrain de la quotidienneté et des rapports sociaux. Elle va notamment

développer son approche, essentiellement basée sur l’étude des comportements et sur les

usages, dans la ville de New York où elle vivra durant 34 ans. A partir de son propre vécu et

de ses observations personnelles elle va procurer une analyse de certains espaces tels que la

rue et le quartier.

Alors que les grandes interventions de rénovation urbaine contribuaient à vider les quartiers

de leurs habitants au profit de nouveaux espaces de vie aseptisés et promu par les

modernistes, Jane Jacobs va montrer l’importance du rôle que joue la rue dans la

fabrication de la vie urbaine.

Des rues vivantes et animées garantes de la sécurité urbaine et du lien social

Selon Jane Jacobs, « les rues et les trottoirs, en tant que principaux espaces publics de la ville,

sont ses organes vitaux. Pensez à une ville, et que vient-il à l’esprit ? Ses rues. Si les rues d’une

ville ont l’air intéressantes, la ville semble intéressante, au contraire si les rues ont l’air mornes,

la ville semble morne 8».

Quant aux réformateurs de l’époque, ils considèrent que les personnes qui flânent dans les

rues, passent du temps chez le marchand ou à la sortie des cafés ont un comportement

8 Jacobs J., “The Death and Life of Great American Cities”, 1961, p.29:“Streets and their sidewalks, the main public

spaces of a city, are its most vital organs. Think of a city and what comes to mind ? Its street. If a city’s street look

interesting, the city looks interesting, if they look dull, the city look dull.”

24

« déplorable » et affirment que « si ces personnes disposaient de logements décents et d’un

espace extérieur privé suffisant et tranquille, ils ne resteraient pas dans la rue9. »

Pour la théoricienne c’est une manière erronée de percevoir et d’appréhender la ville. Selon

l’auteur, il est important de ne pas vider les rues de leurs habitants sans quoi cela ne ferait

qu’augmenter l’insécurité dans la ville.

La différence entre le sentiment d’insécurité et de sécurité qui peut régner dans la rue

dépend notamment de la manière dont les individus tendent à « auto-contrôler » l’espace

public. C’est ce que Jane Jacobs appelle « eyes upon the street » traduit littéralement par les

« yeux de la rue ».

Ces yeux sont ceux des « propriétaires » de la rue : ceux qui y habitent et ceux qui y

travaillent. Leur présence rend l’espace plus sûr mais aussi plus accueillant. En ce sens, il est

nécessaire de mettre en place les conditions suffisantes pour générer la présence des

« yeux ». Il s’agit donc d’animer la rue en favorisant la présence et la création d’activité

comme des commerces, des vendeurs ambulants, des cafés ainsi que des activités

nocturnes par exemple. L’activité générée va attirer des gens qui eux même vont attirer

d’autres gens et ainsi renforcer le sentiment de sécurité. Les usagers de la rue deviennent

ainsi des « participants actifs » à la création d’une vie de communauté.

La rue est également pour Jane Jacobs le support des contacts humains. Elle joue un rôle

important dans la vie urbaine quotidienne mais n’est que très peu prise en compte comme

telle par les urbanistes qui lui sont contemporains et qui préfèrent nier les interactions sociales

qui se créent dans l’espace public. Ces interactions peuvent tendre vers des liens, des

échanges, ou au contraire une certaine forme d’indifférence. Dans tous les cas elles tendent

vers la mise en place d’un climat de confiance entre les individus dans la rue et se

construisent à partir de nombreux petits contacts sur le trottoir («many little sidewalk

contact»). Ces contacts, viennent ainsi enrichir l’expérience de vie urbaine mais aussi le

sentiment de sécurité dans l’espace décrit plus tôt.

Cette apologie de la rue en tant que lieu générateur de sociabilité et de sécurité va à

l’époque à l’encontre totale des courants de pensée dominants. Alors que les politiques en

cours cherchent à rendre l’espace plus neutre et lisse, Jane Jacobs prétend au contraire

qu’il est important de le « remplir » de gens, d’activités et de vie. Seulement, il faudra

attendre une dizaine d’années pour qu’elle commence à avoir un impact sur

l’environnement urbain New-Yorkais.

Néanmoins, avec de tels écrits Jane Jacobs s’est très rapidement révélée comme

l’opposante principale à la philosophie de Robert Moses et à ses projets de rénovation

urbaine engagés depuis les années 1930. Le combat pour la préservation du quartier de

9 Jacobs J., “The Death and Life of Great American Cities”, 1961, p.55.

25

SoHo face au projet d’autoroute urbaine de R. Moses est le plus représentatif de la vision

antagoniste des deux personnages. La bataille aura duré 10 années (1959 – 1969) et c’est sa

victoire en 1969 face à Robert Moses qui va déclencher un intérêt pour ses dires.

On a vu que l’impact du mouvement moderniste et la domination de l’ingénierie des

transports ont façonné les rues New-Yorkaises en faveur de l’unique usage de l’automobile

sans prendre en compte les autres usagers et les autres modes de déplacements et en

mettant de côté le caractère « humain » de la rue. Cette citation en est une illustration : « son

[Robert Moses] seul objectif : efficacité de la circulation automobile. Il pensait que les villes

devaient servir la circulation10 ».

Jane Jacobs et ses semblables ont beau gagner du terrain, le pouvoir décisionnel est quant

à lui toujours influencé par l’urbanisme fonctionnaliste et moderniste. Elle exprime son

impuissance face à cette mainmise : « L’autoroute urbaine était inévitable. Tous les élus,

conscient de l’impopularité d’un tel projet, étaient contre, mais ils ne faisaient jamais rien

pour l’arrêter et faisaient preuve de défaitisme ». Tant que la sphère décisionnelle ne

s’engage pas dans un changement de position il est difficile de mettre en route une

quelconque transformation des modes de faire et de penser la rue.

1.2 – EVOLUTION DU ROLE DE LA RUE

Comme on l’a vu plus tôt, le modèle de développement urbain des années 1930 à 1970

environ a mené à une déqualification des rues en mettant l’espace public au service de la

voiture, il devient alors principalement système de circulation et de stationnement.

L’émergence de nouvelles réflexions et représentations sur la ville va avoir lieu en opposition

à ce phénomène, et concrètement, cela va se traduire par la remise en cause des modes

de faire et de penser la ville, avec un intérêt particulier pour l’espace public et plus

particulièrement les rues.

La rue en tant qu’espace du mouvement, c’est-à-dire en tant que support du déplacement,

est une idée acquise pour le public, pour la classe décisionnelle comme pour les théoriciens

et qui plus est renforcée par le mouvement moderniste. La rue en tant qu’espace de vie est

quant à elle une idée qui fait débat. Des auteurs, comme Jane Jacobs à New York, se sont

pleinement investis dans la critique de ce mode de faire la rue et de faire la ville. Il va

néanmoins falloir attendre quelques années pour que ces écrits soient pris en considération

et que l’on commence à parler de la rue en tant que support du cadre de vie.

10 Gratz R., « The battle for Gotham », 2010, p.101: « His only goal: efficancy for moving automotive traffic. Cities, he

believed, should serve traffic”.

26

LA RUE COMME SUPPORT DU CADRE DE VIE: « NEW YORK CITY STREETS RENAISSANCE »

En Janvier 2005 trois organisations – Project for Public Spaces, The Open Planning Project,

Transportation Alternatives – cofondent la campagne « New York City Streets Renaissance ».

Elle a pour objectif de promouvoir la rue en tant qu’espace public conçue pour tous et non

uniquement pour l’automobile et ce, en incitant une évolution dans la politique de transport

de la ville.

Cette campagne s’articule principalement autour de la mise en évidence du potentiel des

rues New-Yorkaises à devenir plus que de simples voies de déplacement dédiées et pensées

pour l’optimisation de la circulation routière. Néanmoins, il ne s’agit en aucun cas de bannir

l’automobile de la ville mais plutôt de rééquilibrer les usages.

La campagne s’engage sur quatre objectifs : « Educate, Promote, Demonstrate, Tap »

- « Éduquer » les New-Yorkais à propos des éventuels changements de politique de

transport qui permettront d'améliorer la qualité de vie dans la ville.

- Promouvoir un rééquilibrage de cet espace public en limitant la domination des

véhicules privés et en favorisant les besoins de la communauté.

- Démontrer l'appui généralisé de la population aux pouvoirs publics afin de mettre en

marche une réforme sur ces questions.

- S’appuyer sur le potentiel des New-Yorkais à ré-imaginer leurs propres rues.

Pour y parvenir la campagne s’appuie sur l’actuelle domination de l’usage de la voiture et

des conséquences que cela peut entraîner : problème de pollution environnementale,

visuelle, sonore, problème de sécurité pour les piétons et cyclistes qui s’aventurent sur la

voirie. Elle tente par la suite de montrer qu’il est possible de faire autrement et les bienfaits

que cela pourrait engendrer avec en ligne de mire l’amélioration de la qualité de vie locale.

La campagne dresse un tableau sur la « réalité » du trafic routier à New York et permet ainsi

de démystifier toute évolution en faveur de rues vivantes et vivables. Elle met ainsi en

évidence que le fait de conduire est un choix et non une nécessité en affirmant que 90% des

personnes effectuant des trajets domiciles-travail ont une alternative existante à l’automobile

comme les transports en commun. 30 à 60% des voitures qui entrent dans Manhattan à mi-

niveau (59ème rue) traversent seulement le quartier et n'ont pas d’impact sur la vie

économique. Enfin, 69% des déplacements effectués en dessous de la 59ème rue se font à

pied.

Ainsi la campagne a pour but de faire prendre conscience aux New-Yorkais et New-

Yorkaises qu’il est possible de vivre les rues en tant qu’espace public mixte et accessible à

tout un chacun et qu’il est possible de se réapproprier les rues et d’en faire des lieux où l’on

peut circuler à pied, en vélo, où l’on peut jouer, et où l’on peut se regrouper en toute

sécurité.

27

Pour porter leur message jusque dans la sphère politique locale les associations co-

fondatrices de la campagne ont mis sur pied en Janvier 2006 une exposition au Municipal Art

Society (MAS).

L'exposition portait sur les problèmes, les mythes, et le potentiel de rues de New York alors

dominées quasiment exclusivement par le trafic. Il s’agissait de montrer comment les villes du

monde se penchent sur des questions similaires. L’exposition, très visuelle, proposait des

montages photos associant l’ « avant » et le potentiel « après » de la transformation des rues,

ainsi que la méthodologie et les résultats envisageables avec un processus basé sur une

vision communautaire des espaces publics.

Illustration 7 : Photomontage Avant/Après, West Midtown, Manhattan, New York. Source: Project for

Public Spaces.

Nous retiendrons plus

particulièrement ici notre attention

sur la proposition d’aménagement

de la célèbre avenue de Broadway.

Ce n’est pas un choix fait au hasard.

Il s’agit de convaincre les pouvoirs

publics avec un exemple de ce qui

pourrait être l’accomplissement

d’actions innovantes majeures à

l’échelle de la ville et qui, en

conséquence de la renommée de

l’avenue, pourrait avoir un impact

médiatique mondial profitant à

l’image de la ville et à son

attractivité.

Illustration 8 : Destination : Broadway. Tête d’affiche de la campagne “New York City Streets

Renaissance” lors de l’exposition au MAS en 2006. Source : Project for Public Spaces.

28

La campagne « New York City Streets Renaissance » montre que la rue, en tant qu’espace

public, fait aujourd'hui l’objet de sollicitations nombreuses et pressantes. La conception des

espaces publics ne doit plus se limiter à une approche essentiellement fonctionnelle au

détriment de la vie locale et du cadre urbain. La rue apparait désormais comme le support

du cadre de vie des citadins et le lieu des innombrables pratiques de la vie urbaine :

commerce, détente, rencontre, etc.

LA RUE ET SES NOUVEAUX ENJEUX

L’évolution de la rue en tant que support du cadre de vie s’accompagne dans le même

temps d’une prise de conscience de la part de la sphère politique. Face au problème de

déplacement des populations des centres-villes vers les périphéries, la ville traditionnelle fait

l’objet d’un regain d’attention de la part des pouvoirs publics. Par ailleurs la prise de

conscience des citadins les pousse vers plus d’exigence en matière de conception des

espaces publics qui se doivent maintenant de concilier fonctionnalité, accessibilité, sécurité,

confort, esthétique, etc. La rue est aujourd’hui devenue un espace complexe où se mêle

attentes et besoins des citadins, choix politiques et limites des pouvoirs publics, prise en

compte du développement urbain durable en d’autres mots de nouveaux enjeux voient le

jour.

Enjeu économique

Le financement de l’aménagement de l’espace public repose traditionnellement sur le

secteur public et plus particulièrement sur la ville. Le citoyen, qui paye des taxes, est quant à

lui de plus en plus intéressé par la bonne gestion des dépenses publiques. De plus, le

contexte de crise du secteur public est également d’actualité aux Etats-Unis limitant ainsi sa

marge de manœuvre. Comme on l’a vu plus tôt les rues représentent la grande majorité de

l’espace public de New York, il s’agit donc pour la ville de maitriser ses coûts.

La complexité du secteur de l’aménagement urbain, constitué de plusieurs acteurs et ce de

la programmation à la gestion de l’espace public et en passant par la conception et la

réalisation d’un projet, pousse la ville à travailler en concertation. Une bonne gouvernance

est alors garante de la cohérence des interventions entreprises.

Enjeu social et culturel

En tant qu’espace public, la rue devient un espace pour tous. Le fait de la définir comme

support du cadre de vie implique une nécessaire attention à un certain équilibre des usages

qui s’y déroulent. Il s’agit de permettre à l’ensemble des usages d’exister de façon

harmonieuse et d’éviter d’alimenter les conflits sociaux.

29

La rue en tant que cadre de vie de proximité est également un catalyseur pour le maintien

ou la création d’une identité locale favorisant le sentiment d’appartenance et ainsi le

respect pour son environnement de vie.

Enjeu environnemental

L’aménagement de la rue, en tant que support de la mobilité, joue un rôle important dans la

problématique environnementale. A l’échelle locale un aménagement bien pensé qui met

en place les conditions pour l’utilisation d’une variété de mode de déplacement (marche,

cycle, transport en commun, véhicule motorisé, etc.) favorise un meilleur cadre de vie. C’est

un moyen de diminuer les pics de pollution et la nuisance sonore ainsi que de végétaliser les

rues.

A une échelle plus large c’est également un moyen de lutter contre le tout-automobile et les

externalités négatives qu’il induit sur l’environnement tel que l’étalement urbain et ses

conséquences.

Enjeu esthétique

La qualité de vie véhiculée par l’espace public et par les rues qui constituent le territoire,

contribue fortement à l’image d’un quartier et même de la ville. L’espace public constitue

un élément déterminant du paysage urbain en agissant notamment sur les ambiances.

L’esthétique de la rue est donc un levier d’action pour l’amélioration de la qualité du cadre

de vie.

C’est également un moyen pour la ville de communiquer sur son image. Proposer des rues

offrant un cadre de vie de qualité c’est bien se placer dans la compétition urbaine qui

s’opère entre les villes dans le but d’attirer entreprises et population. La rue devient alors un

objet du marketing urbain.

Autrefois l’enjeu lié à la rue était très lisible : à savoir maximiser l’efficacité du système de

circulation. Aujourd’hui une multitude d’enjeux et de sous-enjeux se recoupent et viennent

complexifier le rôle de la rue. En conséquence un nombre plus élevé d’acteurs différents

s’approprie la rue. Commerçants et entreprises, habitants, militants et la ville elle-même

portent un intérêt particulier à la rue la rendant ainsi de moins en moins lisible.

A mesure que l’on considère la rue en tant que support du cadre de vie celle-ci se

complexifie. De nouveaux enjeux apparaissent venant alimenter les challenges auxquels

doivent faire face les décideurs. Face à l’évolution des fonctions de la rue le rôle principal

revient désormais aux décideurs. C’est maintenant à eux d’en prendre pleinement

conscience. Il s’agit notamment de se positionner politiquement face aux nouveaux enjeux

afin de faire évoluer les processus de fabrication de la ville et permettre aux aménageurs et

concepteurs des rues d’intervenir de manière efficace.

30

1.3 – LIVABLE STREET : UNE NOUVELLE VISION POUR NEW YORK

Aujourd’hui la campagne « New York Street Renaissance » a pris racine et a servie à la

réorientation politique de la ville en termes d’aménagement urbain. Tout comme d’autres

actions volontaristes elle a permis de participer à l’évolution des processus de fabrication de

la ville et à l’institutionnalisation du mouvement dans un nouveau contexte politique New-

Yorkais.

UN VOLONTE POLITIQUE FORTE

La politique de la ville de New York a pris un nouveau tournant sous l’investiture du Maire

Michael R. Bloomberg (2002 à aujourd’hui). En 2007 est publié le PlaNYC qui regroupe les

orientations et objectifs promus pour la ville à l’horizon 2030. L’élaboration d’un tel plan est

une première à New York City et c’est également une initiative plutôt innovante à l’échelle

des Etats-Unis où les villes sont rarement dotées de plans d’orientations à long termes.

Illustration 9 : Page de couverture,

PlaNYC Progress Report 2012.

Illustration 10 : Illustration de PlaNYC: The Making of a

Greener, Greater New York City, Avril 2012.

L’objectif principal recherché par la réalisation de ce plan est de renforcer l’économie, de

lutter contre le changement climatique et d’améliorer la qualité de vie de tous les New-

Yorkais tout en préparant la ville à l’arrivée de nouveaux habitants estimés à plus d'un million

de personne. La réalisation du Plan a réuni plus de 25 agences publiques locales travaillant

conjointement sur la vision d'une ville évoluant sur le long terme.

Pour le Maire il s’agit de mettre en place une politique de vigilance en ce qui concerne la

protection et la maitrise des ressources dans le but d’assurer un développement durable de

la ville de New York.

31

Deux objectifs spécifiques de ce plan servent directement la campagne « New York City

Streets Renaissance ». Il s’agit d’une part de l’attention portée au développement d’un choix

multiple en matière de transport durable. La ville de New York s’engage à fournir des

alternatives à l’usage de l’automobile à travers plusieurs objectifs : Réduire les congestions,

étendre les nombre de kilomètres de voie cyclable sécurisée, augmenter la performance des

transports en communs et enfin améliorer et sécuriser l’environnement piéton. D’autre part, il

s’agit d’améliorer la qualité de vie quotidienne en procurant un lieu public (parc, place,

plaza ou encore espace naturel) à tous les New-Yorkais dans un rayon de 10 minutes à pied.

La ville de New York considère que plus les habitants sont proches d’un lieu public plus ils

seront connectés à leur environnement quotidien et plus ils seront investis dans leur

communauté. L’accès à un parc ou un espace naturel de proximité est aussi un moyen de

garder les familles en ville et sert donc leur politique d’attractivité.

Dans la foulée du PlaNYC l’administration du maire Michael R. Bloomberg va connaitre un

renouveau. En 2007, il s’entoure de Janette Sadik-Khan qui est alors portée à la direction du

Département des Transports (NYCDOT). C’est un tournant pour la politique des transports de

la ville et surtout une révolution dans la manière de concevoir les rues de New York. Plusieurs

plans, manuels et guides vont être élaborés afin d’orienter les acteurs de l’aménagement

urbain. Des programmes vont être mis en place non seulement dans le but de concevoir des

rues adaptées à tous les usagers mais aussi dans le but de concevoir des rues en tant

qu’espace public répondant aux besoins de la communauté.

Illustration 11 : Pages de couverture des documents World Class Streets, Sustainable Streets

Index et NYC Street Design Manual.

Avec la publication de « World Class Streets », « Sustainable Streets Index » et « NYC Street

Design Manual » la ville de New York cherche à établir une idée directrice forte pour une

politique de transport durable. Cette politique tente à la fois de mettre en place les

conditions pour un usage équilibré de la voirie en termes de mode de déplacement et

également de penser la rue comme lieu de vie à part entière.

32

Pour s’assurer que les projets mis en place dans le contexte de cette nouvelle politique

répondent bien aux besoins et aux attentes des communautés la ville de New York s’appuie

également sur un processus participatif des plus complets. En effet, il ne s’agit pas seulement

de faire la ville avec la population (habitants, commerçants, entreprises, etc.) mais il s’agit de

laisser l’opportunité aux communautés de lancer leur projet et d’être les propres fabricants

de leur espace de vie. Ainsi, dans un processus participatif classique, la population et les

acteurs peuvent être introduits à différentes étapes du projet (début, milieu, fin) allant de la

simple consultation des avis à la concertation et prise de décision commune. La méthode

New-Yorkaise applique ce processus classique, mais elle va également plus loin. La ville a

ainsi mis en place des programmes spécifiques pour améliorer les rues. Ces programmes, sont

construits comme des outils au service des communautés et leur donnent l’opportunité de

construire leur propre vision pour leur environnement de vie et par la suite de la mettre en

œuvre en intégrant le programme qui lui correspond. Ainsi la population n’intègre pas le

projet à un moment donné mais elle en est en fait à l’origine.

New York fait preuve d’une volonté politique forte en ce qui concerne l’aménagement et le

processus de conception de ses rues. C’est une étape essentielle sans laquelle l’évolution de

l’espace public et des modes de faire la ville n’aboutiraient pas. Et c’est ce qui permet

aujourd’hui aux rues d’évoluer.

RE-IMAGINER L’ESPACE PUBLIC DE LA RUE

Comme on l’a vu précédemment le renouveau des rues de New York se joue sur la politique

de transport de la ville. L’objectif est double. D’une part il s’agit de répondre aux nouveaux

besoins des citadins en respectant les contraintes liées au développement durable et les

contraintes budgétaires qui se font de plus en plus sentir au niveau des pouvoirs publics.

D’autre part il s’agit d’ouvrir la voie à l'évolution des rues et de convaincre les plus réticents.

Dans ce contexte, la politique de transport de la ville a tentée de mettre en place une

stratégie innovante de programmation, de conception et de gestion des rues qui s’appuie

sur des actions locales à petite échelle et qui impliquent directement les communautés.

Afin de se donner les moyens de réussir cette politique s’articule autour de trois domaines

d’action. Pour montrer les possibilités d’évolution des rues la ville mise sur l’évènementiel. Pour

en montrer les bienfaits la ville mise sur des interventions à petite échelle dans l’espace

comme dans le temps. Enfin, pour assurer la pérennité des changements elle s’appuie sur la

requalification de l’espace dans les rues.

33

Miser sur l’évènementiel

L’évènementiel est une stratégie très utilisée en Amérique du Nord et plus généralement

dans les pays où les rues sont dominées par l’usage de l’automobile. C’est une manière de

redonner temporairement un usage non exclusif de la rue et c’est également un moyen de

montrer qu’il est possible de faire autrement sans pour autant trop brusquer. Quelques

exemples viennent illustrer cette stratégie.

Summer Streets New York

Illustration 12 : Park Avenue, Summer Streets, 4 Août 2012.Source : http://nyc.gov/summerstreets

Pour la cinquième année consécutive le Département des Transports de la ville de

New York organise la « Summer Streets ». C’est une manifestation qui se déroule trois

Samedi durant l’été. Un peu plus de dix kilomètres de rue sont fermés à la circulation

automobile et ouverts au public. Il est possible de flâner, de faire du vélo, de courir ou

encore de faire du roller sans avoir à s’inquiéter de la présence des voitures. Les

diverses organisations associées au projet proposent des activités et des animations

gratuitement mises à disposition du public. On y trouve entre autres des cours de

Yoga, de l’escalade ou la possibilité de participer à un pique-nique collectif.

Pour la ville c’est un moyen de promouvoir la marche, le vélo et des rues conviviales

pour les habitants comme pour les touristes. Ce type d’évènement révèle ô combien

la rue peut être perçue et utilisée différemment.

-Williamsburg walk 2012 : Rethink your public space.

Cet évènement est basé sur le même format que la « Summer Street ». Trois Samedi

de suite en Juin la rue Bedford dans le quartier de Williamsburg (Brooklyn, New York)

est fermée à la circulation automobile et ouverte au public. La manifestation est

cette fois organisée par une association locale : Neighbors Allied for Good Growth

(NAG).

34

Illustration 13 : Scrabble géant, Williamsburg walk: Rethink your public space, 16 Juin 2012.

Ici le NYCDOT s’associe au projet principalement en tant que responsable de la

fermeture de la rue. L’objectif est de donner aux locaux l’opportunité de repenser leur

rue et de la vivre autrement ainsi que de mettre en avant le quartier auprès des

visiteurs. Les animations sont basées sur le bénévolat et sur la participation des

habitants et visiteurs. Il est par exemple possible de jouer à des jeux de société, de

peindre ou encore d'assister à des concerts improvisés d’artistes locaux.

L’aménagement de la rue est également un aspect important puisqu’il est mis en

place des carrés d’herbes sur lesquels les gens peuvent s’installer, ainsi que des

chaises et des tables amovibles.

Inspirés par les réussites locales et aussi par les réussites dans d’autres grandes villes du monde

ces évènements se développent de plus en plus dans la ville de New York. Ils ont ici le

support de la population et des commerçants pourtant souvent réticents à l’idée de

supprimer ou limiter le trafic automobile.

Qu’elle soit organisatrice ou qu’elle soit « simple » support, la ville donne l’opportunité aux

habitants comme aux visiteurs de s’approprier les rues New-Yorkaises et démontre ainsi qu’il

est possible de les vivre autrement.

De petites interventions et le principe « Lighter, Quicker, Cheaper »

La ville de New York s’engage sur des interventions très localisées, à l’échelle des micro-

quartiers de la ville (quelques blocks de superficie) et dans l’action rapide. C’est un moyen

pour elle de montrer concrètement et dans un temps relativement court les bienfaits de sa

politique et ainsi de maintenir l’intérêt et la participation de la population et des acteurs.

New York s’appuie sur l’idée qu’une multitude de petits résultats positifs sert davantage la

communauté et favorise donc son support. C’est un principe inspiré par celui promu par

Project for Public Spaces : « Lighter, Quicker, Cheaper » (LQC).

35

Lighter, Quicker, Cheaper

Il s’agit de créer une dynamique de revitalisation de l’espace public à partir d’actions sur le

court terme, peu coûteuses et qui impliquent les communautés locales. C’est une manière

de limiter les risques et de susciter l’adhésion du public en faveur de l’innovation et de

l'expérimentation des solutions plutôt que des solutions toutes faites. Par la suite l’objectif est

de se servir de ces petites interventions pour alimenter une stratégie à moyen et long termes

afin de construire un cadre d'orientation pour le développement et les investissements futurs.

-Pop-up Park

Le NYCDOT a mis en place en 2010 le programme « Curbside Public Seating

Platforms » afin d’offrir à la population davantage de lieux où il est possible de s’assoir

en extérieur pendant la saison chaude lorsque la demande de passer du temps

dehors augmente. En remplaçant temporairement des places de stationnement par

des plates-formes munies de quelques tables et chaises, ces interventions « légères »

permettent à leur utilisateurs de manger, lire, travailler, rencontrer un ami, ou de

prendre du repos. Elles participent aussi à embellir le paysage urbain grâce à un

aménagement paysager attrayant.

Pour la ville c’est une manière de montrer que

l’espace aujourd’hui alloué aux places de

stationnement peut être utilisé pour d’autres

activités. C‘est également un moyen de tester

concrètement les impacts de telles interventions

sur le trafic routier et de récolter l’avis de la

population afin de peut-être envisager une

pérennisation et une stratégie de diminution du

nombre de places de stationnement en faveur

de l’amélioration de l’espace public de la rue.

Illustration 14 : Popup Park, Sponsorisé par « le pain quotidien », East 44th Street, Manhattan, Source:

New York City Department of Transportation, Curbside Public Seating Platforms sponsored by local

businesses, 2011 Pilot Program Evaluation Report.

A travers ce principe, « Lighter, Quicker, Cheaper », il y a un réel enjeu de réappropriation de

la rue. En ce sens il devient plus qu’un principe, c’est un outil pour favoriser l’évolution des

mentalités et des modes de concevoir l’espace public.

36

Requalification de l’usage des rues

Au-delà des interventions évènementielles et « légères » la ville de New York cherche à faire

évoluer le visage de ses rues et ré-imagine l’espace public en pourvoyant certaines zones

d’une réglementation spécifique. Cette requalification officielle permet à la ville de montrer

son engagement à agir pour des rues durables et attractives.

-Neighborhood Slow Zones

Illustration 15 : Entrée d’une zone à 20mph, Claremont, Bronx, New York. Source : NYCDOT.

Neighborhood Slow Zones est un programme mis en place par le DOT. Il permet

d’aménager des zones définies et de leur appliquer une vitesse limite de 20mph soit

l’équivalent de 30km/heure. L’objectif pour le DOT est double. D’une part c’est un

moyen d’augmenter la sécurité routière en réduisant la vitesse et en poussant les

automobilistes à changer de comportement. D’autre part c’est une opportunité pour

améliorer le cadre de vie de proximité en réduisant notamment les nuisances sonores

liées à la circulation et en favorisant la sécurité piétonne. La création de ces zones

s’appuie sur l’implication de la population. En effet le DOT les créer en réponse à la

candidature des communautés elles-mêmes. Si le dossier est recevable et si l’autorité

locale (comité de quartier) approuve, la candidature entre dans le programme.

Pour la ville de New York ce programme est un réel moyen d’améliorer l’habitabilité

des quartiers majoritairement résidentiels et ainsi leur permettre de garder leur

population et même d’en attirer d’avantage.

-Piétonnisation de la rue : « NYC Public Plaza Program »

Le programme « NYC Public Plaza Program » mis en place en 2008 et qui a fait l’objet

d’une évaluation décrite dans la deuxième partie de ce document est un outil qui

permet de réintroduire légitimement le piéton dans les rues New-Yorkaises en créant

des espaces qui lui sont dédiés. Ce programme s’appuie sur la réappropriation

d’espaces anciennement dédiés à l’automobile (route sous-utilisée, parking ou zone

37

très fréquentée par les piétons, etc.) pour la création de plazas : petits espaces

piétonnisé et aménagé pour le confort des piétons. L’aménagement récent de Times

Square est l’un des exemples les plus marquants.

Illustration 16 : Times Square avant (à gauche) – après (à droite). Source: NYCDOT

Dans un premier temps temporaire, l’aménagement de Times Square à aujourd’hui

vocation à devenir « définitif ». Un projet de piétonisation permanente est

actuellement en cours d’élaboration.

Ce programme est un outil mis en place par le DOT et qui permet à la ville de tendre

vers une requalification de l’espace public de ses rues en faveur des piétons.

A travers l’ensemble de ces exemples on remarque que la ville démontre son engagement

pour la création de rues dynamiques et attrayantes. Que ce soit par l’évènementiel, par des

interventions « légères » ou par la requalification le DOT fait preuve d’une réelle stratégie

dans la programmation, la conception et la gestion de la rue.

38

CONCLUSION PARTIELLE

Les efforts fait au cours des 80 dernières années pour améliorer les flux de circulation ainsi que

les influences de l’urbanisme fonctionnaliste et moderniste ont produit des rues

majoritairement dédiées à l’automobile en négligeant les besoins des autres usagers (piétons

et cyclistes entre autres) et ont dégradé leur valeur en tant qu’espace public et espace de

vie quotidien.

Dès lors, des auteurs tels que Jane Jacobs ont écrit sur le sujet montrant avec bon sens que la

rue pouvait fournir plus qu’un simple axe de communication pour relier les communautés de

New York les unes aux autres. Ainsi, des actions localisées ont été entreprises au profit de la

réappropriation des rues en tant que support de la vie des communautés et ont marqué le

début de la transformation des rues New-Yorkaises.

Néanmoins, ce n’est que depuis quelques années qu’une évolution dans la manière de

concevoir les rues est identifiable. Cette évolution est en grande partie liée à une prise de

conscience des enjeux du développement urbain durable – réduction de la place de

l’automobile – ainsi qu’aux enjeux sanitaires et sociaux urbains – réduction de la part des

personnes obèses et amélioration de la santé générale de la population en augmentant la

part des déplacements actifs (marche, vélo, transport en commun…).

Aujourd’hui l’idée forte pour la ville de New York est donc de redonner à la rue son caractère

d’espace public de proximité. Il s’agit de rendre la rue à l’ensemble de ses usagers en créant

un environnement propice et adapté aux différentes pratiques dont elle peut être le

support : mobilité douce, lieu de récréation et de loisir, lieu de sociabilité, etc. Ainsi, la ville

concentre une bonne partie de ses efforts sur l’amélioration de ses corridors autrefois pensés

pour – et de fait « réservés » à – l’usage de l’automobile.

La rue New-Yorkaise apparait alors comme un nouveau « terrain d’expérimentation ». Les

quelques années de recul qui sont d’ores et déjà atteintes rendent les premières études et

évaluations pertinentes comme celle menée sur le « Plaza Program » et décrite dans la partie

suivante.

39

2 – REVITALISER LA RUE AVEC

LE CONCEPT DE PLACEMAKING

[ P L A C E M A K I N G ]

Le placemaking est à la fois une philosophie et un processus pour améliorer un quartier, une

ville ou une région. En Français on peut littéralement le traduire par « fabrication d’espace »,

certain lui préfère l’expression « création de destination ». Il tient ses origines aux Etats-Unis

dans les concepts mis en place par Jane Jacobs et William H. White qui ont proposé dès les

années 1960 des idées novatrices sur la conception des villes répondant aux besoins et désirs

de la population et non uniquement aux voitures et aux centres commerciaux.

Le placemaking s’inscrit dans une logique de projet participatif, de la programmation à l’a

gestion d’un espace en passant par sa conception. Il prend racine dans la compréhension

des usages d’un lieu et des besoins d’une population. En d'autres termes, il s'agit de regarder,

d'écouter, et de poser des questions aux personnes qui vivent, travaillent et se récréent dans

un espace particulier et de découvrir leurs besoins et leurs désirs. Cette information est

ensuite utilisée pour créer et porter une vision commune.

La valeur ajoutée du placemaking se traduit par un principe nommé « Start with the

petunias »11. Il s’agit de mettre en œuvre cette vision commune en commençant par de

petites interventions et améliorations rapides et peu couteuses. L’objectif sous-jacent est

d’apporter concrètement des avantages aux espaces publics et aux personnes qui les

utilisent et dans un laps de temps relativement court.

11 “Start with the petunias” est le 9ème des 11 principes de placemaking décrit par l’organisation Project for Public

Spaces.

40

2.1 – « PLAZA PROGRAM » : UN OUTIL AU SERVICE DU PLACEMAKING

Le « Plaza Program » est un programme du Département des Transports de la ville de New

York qui suit les principes du placemaking. Depuis 2008 il est à l’initiative de la création d’une

douzaine de plazas et d’une quinzaine actuellement en l’état de projet ou en cours de

construction.

Ces plazas s’inscrivent dans une vision globale de la ville qui est de réintroduire le partage de

la voirie dans ses rues en mettant en place les conditions nécessaires à la pratique d’autres

modes de déplacement que l’automobile. Ainsi ces plazas ont pour caractéristique d’être

construites sur des portions de voirie ou de parking sous utilisées.

Illustration 17 : Représentation graphique du concept du “Plaza Program”. Source : NYC Plaza Program

Application guidelines 2012, NYC, 2012.

Pour la ville de New York il s’agit donc de se réapproprier des espaces anciennement dédiés

exclusivement à l’automobile au profit notamment des piétons. Le parti pris est de penser

que l’amélioration de la qualité de l’aménagement des rues en faveur des piétons est

propice à l’augmentation de la marche en tant que mode de déplacement.

C’est également l’occasion de donner une nouvelle dimension d’usage à la rue. En plus

d’avoir un impact sur la rue en tant que support des déplacements, ces plazas mettent en

valeur la rue en tant qu’espace où l’on s’arrête et où l’on vie, en d’autres mots c’est la mise

en valeur de la fonction sociale de la rue.

Afin de répondre à ces enjeux, le programme se construit autour de la philosophie du

placemaking. Il s’agit de se donner les moyens de révéler le potentiel d’un lieu et d’en faire

une réelle destination. Le programme présente alors quatre points clés qui rendent ces plazas

innovantes et attrayantes.

41

LA DYNAMIQUE D’UN PARTENARIAT PUBLIC – PRIVE

Chacune des places créées dans le contexte du Plaza Program sont le fruit d’un partenariat

public/privé associant le DOT et une organisation à but non lucratif locale. Les organisations

qui prennent part aux projets sont principalement des Business Improvement District, très

répandues dans la ville de New York. Elles peuvent également être des organisations ou

associations représentant une communauté, un quartier ou encore une plaza elle-même.

[ Business Improvement District dans le contexte New-Yorkais ]

Un Business Improvement District est une organisation composée de propriétaires et de

locataires commerciaux qui se consacrent au développement économique et à

l'amélioration de la qualité de vie d’une zone géographique définie. Généralement il s’agit

de zones relativement petites qui peuvent être un quartier ou simplement une rue. Un BID

offre des services complémentaires à ceux fournis par la ville tels que les services aux

visiteurs, le marketing urbain et les programmes promotionnels ainsi que des actions sur

l’aménagement urbain et l'embellissement dans les limites de son périmètre. Un BID peut

également renforcer ou se substituer aux services déjà fournis par la ville en assurant

l'entretien de l’espace public et la sécurité publique. Le financement de ces services sont

rendus possible par une cotisation spéciale versée par les propriétaires fonciers situés dans

les limites de la zone géographique concernée.

Ce partenariat s’organise autour d’un partage des fonctions et des responsabilités entre le

DOT et l’organisme à but non lucratif.

- Le DOT prend la responsabilité de financer la conception et la construction de la

plaza. Il prend à sa charge l’organisation et la mise en œuvre du processus de projet.

Le DOT finance également les aménagements urbains de base qui seront présent sur

la plaza.

- L’organisme à but non lucratif s’engage quant à lui à exploiter, maintenir et gérer la

plaza. D’un point de vue financier, il doit avoir la capacité budgétaire pour maintenir

la plaza ainsi que pour l’animer.

A travers ce partenariat le programme tente de transformer des portions de rue sous-utilisées

en espaces publics dynamiques et accueillants. Sans l’intégration du secteur privé dans le

financement et à la gestion de ces plazas l’exploitation de la rue en tant que lieu public ne

pourrait peut-être pas autant se développer.

42

IMPLICATION CONTINUE DE L’ENSEMBLE DES ACTEURS

La notion de participation et d’implication des acteurs concernés s’applique à toutes les

échelles du projet ainsi bien avant, pendant qu’après.

L’avant-projet

Le programme est pensé et construit de telle manière qu’il est un outil au service de la

communauté dans le but de construire des plazas. Ainsi le DOT met en place des réunions

d’information tout au long de l’année dans chacun des cinq boroughs12 de la ville et par la

suite c’est à l’organisation à but non lucratif de faire le premier pas pour intégrer le

programme. Certaines exceptions existent néanmoins, dans les espaces à fort impact

médiatique c’est généralement la ville qui va au-devant des organisations, principalement

des BIDs au budget important, afin de les convaincre d’intégrer le programme. C’est le cas

par exemple pour l’aménagement piétonnier de Times Square et les multiples plazas tout au

long de la très connue avenue de Broadway.

Exceptions mis à part, cette particularité du programme permet de répondre à des besoins

suscités par la communauté elle-même.

Le projet

En ce qui concerne la programmation et la conception d’une plaza, le processus est

caractérisé par une implication d’un maximum d’acteurs autour d’ateliers publics. On

retrouve principalement le DOT, une équipe professionnelle d’architectes du paysage et

bien évidemment l’organisation partenaire. L’ensemble des New-Yorkais est également

convié néanmoins cela se réduit généralement à la population riveraine de la future place.

Dans ce contexte le rôle du DOT est de mettre en place les ateliers et d’assurer leur bon

déroulement. Le rôle de l’organisation est d’inciter à une participation active de la

population lors des ateliers.

Enfin, le DOT tente de fournir un aménagement le plus approprié possible au contexte du

quartier, l’organisation partenaire est donc très sollicitée pour collecter des données

pertinentes et elle est également attendue sur l’ensemble des ateliers pour participer au

processus de décision avec le DOT et l’équipe de designers.

L’après-projet

Une fois la plaza opérationnelle le projet n’est pas fini. Le partenariat public/privé mis en

place a pour caractéristique d’engager la responsabilité de l’organisation sur la

maintenance et sur l’animation de la plaza. Ainsi l’organisation installe un rapport régulier

avec la population riveraine et avec les usagers de la place. Cette communication permet

de faire remonter les problèmes ou simplement les suggestions et il est ainsi possible

d’apporter des ajustements afin d’améliorer la plaza.

12 Un Boroughs est l’équivalent d’un arrondissement. New York en compte cinq : Manhattan, Brooklyn, Queens, Bronx

et Staten Island.

43

DE TEMPORAIRE A PERMANENT

Le but du programme est de construire, dans

un premier temps, des plazas à caractère

temporaire. Si les plazas n’ont pas d’impact

négatif sur le trafic et sur le quartier et

qu’elles obtiennent le support de la

population alors elles peuvent devenir

permanente.

Afin de rendre cela possible le programme se

base sur le concept « Lighter, Quicker,

Cheaper ». La construction de ces plazas ne

nécessite ni d’investissement financier

important ni d’aménagements conséquents

ce qui rend les projets adaptables et même

réversibles. De manière générale une plaza

nécessite de bloquer l’accès aux voitures par

de simples blocs de granite, des plantes en

pot et par une peinture de couleur différente

au sol.

Illustration 18 : Pearl Plaza, premier aménagement de cette place temporaire en 2007. Source :

dumbonyc (on Flickr).

FLEXIBILITE DES AMENAGEMENTS

Les plazas issues du programme sont facilement reconnaissables grâce à leur aménagement

et grâce à un mobilier urbain spécifique qui assure la flexibilité de ces lieux.

A l’origine les plazas sont construites sur des portions de route dédiées à l’automobile. Afin de

créer une démarcation dans l’espace les surfaces allouées aux plazas sont modifiées pour

qu’elles deviennent visuellement différentes de la route. Le sol peut alors être peint dans une

couleur ou sa texture peut être modifiée par l’ajout de graviers compactés. Dans le but

d’encore mieux définir les limites des plazas, et notamment pour une raison de sécurité – ces

plazas sont proche du trafic routier, l’aspect sécuritaire est donc un point important à

prendre en compte – des blocs de granite et des pots plantés sont placés sur les bords.

Afin de procurer un environnement plaisant et attrayant des bacs extérieurs accueillent des

arbres et des plantations feuillues et fleuries.

44

L’ensemble de ce mobilier urbain est amovible. La configuration d’une plaza peut être

facilement modifiable pour accueillir un évènement ou des activités spécifiques.

Enfin, les plazas sont caractérisées par la mise en place journalière de tables et de chaises

amovibles. Pour certaines d’entre elles on note également la présence de parasols. Ces

aménagements spécifiques sont gérés par les organisations à but non lucratif, responsables

de la maintenance et de l’animation des plazas. Ils sont pour la plupart saisonniers. Les

chaises et tables amovibles qui rendent ces plazas utilisables sont principalement mises en

place durant les saisons chaudes – d’Avril à Septembre environ.

Les quatre points évoqués précédemment sont des éléments clés dans le processus du

« Plaza Program ». Avec cette démarche la ville de New York ne cherche pas simplement à

créer davantage d’espace public mais elle tente d’apporter un outil à ses habitants pour

qu’ils aient la possibilité de construire leurs propres lieux de vie.

2.2 – NEW YORK CITY PUBLIC PLAZAS : « PLACEMAKING EVALUATION »

Alors que le « Plaza Program » s’inscrit dans les principes du « placemaking » une évaluation a

été menée pour mesurer à la fois le succès des plazas elles-mêmes mais aussi celui du

programme.

Cette évaluation s’inscrit dans le cadre d’un stage de quatre mois à Project for Public

Spaces, un organisme à but non lucratif basé à New York. Cet organisme propose à

l’ensemble des acteurs de l’espace public son expertise et le fruit de 35 années

d’observation, d’expérimentation et d’intervention dans les espaces publics nord-américains.

Si PPS s’est lancé dans l’évaluation du « Plaza Program » et des plazas elles-mêmes c’est

parce qu’il a cœur de montrer l’intérêt du placemaking. C’est également parce que le

programme reprend le concept « Lighter, Quicker, Cheaper » dont il est à l’origine.

45

APPROCHE ET OBJECTIFS DE L’EVALUATION

L’étude tente de documenter les places issues du « Plaza Program » afin de créer de

l’information sur ces plazas. L’idée est de produire des points de référence pour plus tard

mais aussi de partager l’expérience des plazas avec qui le souhaiterait. Le second objectif

est de commencer à évaluer chaque plaza individuellement afin de comprendre leur

fonctionnement et proposer des axes d’amélioration. Enfin, le troisième objectif est d’évaluer

le programme lui-même et de transmettre les remarques au DOT. C’est également un moyen

de mettre en place une sorte de guideline dans le cas où ces plazas ou le programme

venaient à être répliqués ailleurs.

Cette évaluation complète et aux triple objectifs est basée sur la philosophie du

placemaking. Le schéma suivant, élaboré par PPS, illustre l’approche choisie et fournit un

angle particulier pour évaluer la « performance » d’un lieu.

Illustration 19 : The Place diagram, what makes a great place? Source: Project for Public Spaces

Chacune des sections suivantes : « Sociabilité », « utilisations et activités », « confort et image »

et « accès et connectivité » représentent une dimension spécifique d’un lieu. Pour qu’une

place, un parc, en somme pour qu’un espace public fonctionne correctement et qu’il soit

« réussi » selon les critères de PPS, il faut que l’ensemble de ces quatre dimensions soient

présentes.

46

METHODOLOGIE EMPLOYEE

Sélection des plazas pour l’évaluation

La ville de New York compte 16 places ouvertes

qui suivent les principes du « Plaza Program » et 26

de plus en cours de construction. Uniquement 12

des 16 places ouvertes font effectivement parties

du programme.

Dans le but de conduire une étude dans un laps

de temps de 4 mois, le projet s’est focalisé sur

l’évaluation d’un nombre limité de plazas. Une

liste de critère de sélection a été élaborée et cinq

plazas parmi les 12 listées ici ont été retenues.

Critères utilisé pour sélectionner les plazas :

Taille : sélection de plazas relativement petites ou

sélection d’une portion de plaza plus complexe.

Durée d’ouverture : sélection de plazas ouvertes

depuis au moins plus d’une année afin d’avoir un

minimum de recul.

Localisation : sélection de plazas situées dans

différents contextes (quartier à tendance

résidentiel, commercial, touristique).

Forme : sélection de plazas présentant différentes

formes dans le but de montrer la diversité qui

existe bien que ces plazas soient toujours

construites dans une même idée : se réapproprier

une portion de rue anciennement dédiée à

l’usage de l’automobile.

Illustration 20 : Les cinq différentes formes de plazas observées sur le terrain.

Manhattan:

Gansevoort Plaza, meatpaking district, 2008

Location: Ninth Avenue at Gansevoort Street

Managed By: Meatpacking District Improvement

Chelsea Plaza, Chelsea, 2009

Location: Ninth Avenue at 14th Street

Managed By: Chelsea improvement compagny

Flatiron Plaza, Flatiron district

Location: Broadway at 22nd Street, 2008

Managed By: Flatiron 23rd Partnership

Union Square North, Flatiron district, 2010

Location: Broadway between 17th and 18th Street

Managed By: Union Square Partnership

34th Street Plaza, Midtown, 2009

Location: Broadway at 34rd Street

Managed By: 34th Street Partnership

Bogardus Plaza, Tribeca, 2010

Location: Hudson Street at Chambers Street

Managed By: Friends of Bogardus Garden

Water-Whitehall Plaza, Financial District, 2010

Location: Water Street at Whitehall Street

Managed By: Alliance for Downtown New York

Louise Nevelson Plaza, Financial District, 2009

Location: William Street at Liberty Street

Managed by: Federal Reserve Bank of New York

Brooklyn:

Pearl Street Plaza, DUMBO, 2007

Location: Pearl Street at Water Street

Managed By: Dumbo Improvement District

Putnam Triangle, 2001

Location: Fulton Street at Putnam Avenue

Managed By: Fulton Area Business Alliance

New Lots Triangle, 2011

Location: New lots Avenue at Livonia Avenue

Bronx:

Roberto Clemente Plaza, 2009

Location: Willis Av. between148th and 149th Street

List of 12 completed plazas of

the DOT Plaza Program

June 2012

47

Les cinq plazas sélectionnées :

Union Square

NorthPlaza

Union Square

Chelsea Plaza

Chelsea

Bogardus Plaza

Tribeca

Whitehall Plaza

Financial District

Pearl Plaza

DUMBO

48

Méthodologie utilisée pour l’évaluation

L’évaluation a porté à la fois sur un travail de terrain et sur un travail de recherche.

Le travail de recherche a été effectué dans le but de comprendre les objectifs et le

fonctionnement du Plaza Program ainsi que pour comprendre le contexte de

développement de chaque projet des cinq plazas sélectionnées.

Le travail de terrain a quant à lui été conduit les jours de semaine, chaque plaza a été

observée un jour entier de 8h à 20h ainsi que lors de plusieurs autres observations partielles.

L’objectif était de récolter des données permettant de déterminer qui utilise ces plazas,

quand et pour quel type d’activité ainsi que de connaitre les perceptions des utilisateurs et

des commerçants à proximité des plazas évaluées.

Afin de collecter ces données différents outils ont été élaborés sur les bases des principes de

PPS :

User analysis13

Cet outil est une grille d’analyse permettant de mettre à jour les comportements des

utilisateurs et les activités qu’ils pratiquent tout au long d’une journée. C’est un outil

d’observation basé sur le « behavior mapping14 » et réinterprété pour correspondre à l’objet

d’étude : les plazas. Au total, un millier de personnes ont été « observées ».

Comptage15

Le comptage a été utilisé pour connaitre le nombre d’utilisateurs présents sur chaque plaza

pour un jour entier et afin d’être capable d’isoler des pics de fréquentation dans une

journée.

Enquête16

Dans le but d’obtenir la perception de la population deux formulaires de questions ont été

élaboré, l’un pour les utilisateurs des plazas, l’autre pour les commerçants adjacents. 30

utilisateurs par plazas ont été interrogés soit 150 au total, ainsi que 19 commerçants.

En ce qui concerne l’enquête auprès des utilisateurs le formulaire a été construit de manière

à ce qu’il soit le plus court et concentré possible afin de ne pas déranger les gens trop

longtemps. Cette enquête a permis de connaitre le sentiment des gens par rapport à

chacune des plazas évaluées et également de collecter un complément d’information sur

les utilisateurs eux-mêmes.

Concernant l’enquête auprès des commerçants, elle a permis de connaitre leur point de vue

sur les plazas et les retombées sur leur commerce.

13 Voir annexe n°1 14 Inspiré du « behavior mapping tool » tiré de l’ouvrage “How to turn a place around”, écrit et publié par Project for

Public Spaces en 2000 et inspiré des travaux de William H. Whyte. 15 Voir annexe n°2 16 Voir annexe n°3 et n°4

49

RETRANSCRIPTION DES RESULTATS

Les résultats ont été retranscrits sous deux formes distinctes.

Tout d’abord, chacune des plaza a fait l’objet d’un rapport détaillé17. C’est une sorte de

fiche d’identité très illustrée présentant le contexte et les caractéristiques de chaque plaza et

mettant en évidence qui les utilise, quand et pour quel type d’activité. Ces fiches

retranscrivent également la perception des utilisateurs et des commerçants adjacents et

donnent des axes d’amélioration propres à chaque plaza.

Un rapport général d’évaluation18 a par la suite été élaboré. Il présente les résultats de

manière globale et s’appuie sur une agrégation des données récoltées pour l’ensemble des

cinq plazas évaluées.

2.3 – LA RUE, DES DESTINATIONS – RESULTATS DE L’EVALUATION

Les résultats présentés ici reprennent le rapport général d’évaluation élaboré dans le cadre

d’une mission d’étude de 4 mois à PPS19. Ils donnent une image globale du fonctionnement

des plazas et du programme dont elles sont issues. Il s’agit donc de présenter comment ces

plazas fonctionnent, à savoir qui les utilisent, à quel moment de la journée elles sont

fréquentées, pour quel type d’activité et comment ce type d’espace est géré par les

organisations à but non lucratif. Les résultats de l’évaluation des cinq plazas à titre individuel

ont permis de savoir ce que pensent les utilisateurs et les commerçants. L’homogénéité des

avis permet ici de dresser des conclusions plus générales sur leur perception des plazas.

L’analyse des résultats de l’évaluation a quant à elle permit de proposer des axes

d’amélioration basés sur les principes de PPS.

Afin de bien interpréter ces résultats il est important de garder en tête que ces plazas sont

pour la plupart saisonnières du fait que les tables et chaises amovibles qui les rendent

utilisables sont mises en place uniquement durant la saison chaude – d’Avril à Septembre

environ. Cette évaluation ne prend donc pas en compte l’utilisation des plazas durant l’hiver.

De plus, comme beaucoup d’espaces publics extérieurs, la présence d’utilisateurs dépend

fortement du temps. Ainsi les résultats correspondent principalement à une évaluation des

plazas pendant des jours ensoleillés.

17 Voir annexes n°5, n°6, n°7, n°8 et n°9. 18 Voir annexe n°10. 19 Le rapport d’évaluation PPS a été rédigé et illustré par l’auteur de ce mémoire.

50

COMMENT LES PLAZAS FONCTIONNENT-ELLES ?

QUI LES UTILISE / QUAND EST-CE QUE LES GENS LES UTILISENT / COMMENT LES GENS LES UTILISENT

L’analyse des données collectées fait ressortir deux caractéristiques principales que l’on peut

allouer à ces plazas. Elles sont notamment des lieux de proximité et des lieux où l’on vient se

restaurer.

Un lieu de proximité

L’un des principaux aspects qui ressort de cette

évaluation est le fait que ces plazas sont des lieux

de proximité. A proximité du travail, du lieu de

résidence ou encore à proximité d’une attraction

touristique. L’aire d’attractivité des plazas est

relativement faible. La majorité des utilisateurs

vient de moins de 5 blocs20 (66%).

En conséquence la grande majorité des

utilisateurs rejoint les plazas à pied (73%).

Illustration 21 : Distance

parcourue depuis la destination

précédente.

Illustration 22 : Mode de transport utilisé pour rejoindre la plaza.

20 La ville de New York est constituée d’un réseau viaire en grille, « grid plan », formant des blocs. La notion de « 5

blocs » représente une distance qui se parcours entre 5 et 10 minutes à pied.

51

Un lieu pour se restaurer

L’autre grande conclusion de cette évaluation est que ces plazas sont des lieux pour

déjeuner. Les pics de fréquentation mis en évidence par le comptage montrent que les

plazas sont le plus utilisées entre midi et 15h. Les tables et chaises amovibles en font des lieux

propices et confortables pour prendre et apprécier son déjeuner à l’extérieur. C’est à

l’occasion de cette tranche horaire qu’elles atteignent même le maximum de leur capacité

d’accueil en conséquence de quoi il n’y a plus de chaises et de tables disponibles pour ceux

et celles qui souhaitent s’installer.

Illustration 23 : Nombre de personnes comptées à Chelsea Plaza durant une journée.

Deux autres pics de fréquentation sont repérables pour la plupart des plazas. Le premier, en

milieu d’après-midi, peut correspondre à l’heure de la pause ou de sortie d’école. Le

second, en début de soirée, peut quant à lui correspondre à un moment de transition entre

la fin de journée de travail et le retour au domicile. Néanmoins ce pic de fréquentation n’est

pas présent dans toutes les plazas, il dépend principalement de l’heure de retrait des chaises

et tables. Sur certaines plazas, comme Pearl Plaza, ces aménagements sont retirés aux

alentours de 16h ne permettant pas son utilisation plus tard dans la soirée.

Lunch

Time

Break

Time

After

Work

Chelsea Plaza à l’heure du déjeuner, 13h10 Chelsea Plaza l’après-midi, 16h20

52

Ces plazas peuvent être caractérisées comme

des lieux où les gens viennent pour partager un

repas, un café ou un verre avec leurs collègues

ou leurs amis. En effet, les gens s’y retrouvent

principalement en groupe (60%).

Illustration 24 : Distribution des personnes selon qu’ils

soient en groupe ou seul.

C’est encore plus marquant lors des pics de fréquentation. La venue en groupe est d’autant

plus possible que les chaises sont amovibles, les personnes peuvent en prendre le nombre

adapté à leur besoin et les déplacer comme cela les arrange.

Illustration 25 : Répartition des personnes en groupe et seules sur une journée.

En tant que lieu principalement utilisé pour le

déjeuner le temps moyen passé sur place est

d’environ une demi-heure (64%). Un bon nombre

de personne ne reste également que quelques

minutes (24%) et les observations sur le terrain

montrent que cela correspond majoritairement

aux autres pics de fréquentation de la journée

dédiés par exemple à une pause.

Illustration 26 : Temps moyen passé sur place par

personne.

53

En tant que lieu de proximité les utilisateurs les

plus représentés sont les travailleurs (45%) qui

travaillent dans les environs. Ils choisissent d’aller

dans ces plazas car elles sont proches de leur

lieu de travail et parce qu’elles fournissent des

tables ce qui est pratique lorsqu’ils souhaitent

prendre leur déjeuner en extérieur. Les touristes

(21%) et les visiteurs venant d’une autre partie

de la ville (13%) sont aussi bien représentés. Ils

utilisent principalement les plazas pour prendre

une pause entre deux destinations.

Illustration 27 : Statut des utilisateurs.

Le statut de visiteur représente les personnes résidant

à New York mais dans un quartier différent des plazas.

Illustration 28 : Fréquence d’utilisation des plazas.

En conséquence les plazas sont à la fois des lieux où les personnes viennent régulièrement

(47%) à savoir plusieurs fois par semaine, et des personnes qui viennent pour la première fois

(32%).

Les résidents (17%) arrivent en troisième position ce qui peut être quelque peu surprenant

lorsque l’on considère que ces plazas sont des lieux de proximité. Une réponse pourrait être

le fait que les tables et les chaises soient mise en place pendant la journée, au même

moment où les résidents sont au travail ailleurs, et qu’elles soient rangées le soir avant que les

résidents ne rentre du travail. En somme, les plazas ne semblent pas spécialement organisées

pour les résidents.

54

La répartition des âges dépend très

fortement des destinations et des activités

aux alentours des plazas. Dans certaines

plazas on note la présence d’enfants et

d’adolescents ce qui est à mettre en

relation avec la présence d’écoles dans

les environs.

De manière plus générale, la majorité des

utilisateurs sont des adultes (46%) et jeunes

adultes (40%) ce qui correspond à la

tranche d’âge des travailleurs qui est la

catégorie la plus représentée.

Illustration 29 : Distribution des âges.

En ce qui concerne la répartition homme/femme au sein des plazas on remarque que les

hommes sont plus nombreux, 54% (homme) contre 46% (femme). Néanmoins sur le terrain

cette différence ne se fait pas ressentir. Les plazas ne semblent pas dominées par un genre

ou un autre.

C’est un critère important du point de vue de PPS qui considère que plus il y a de femmes

dans un lieu plus ce lieu est réussi du fait que les femmes auraient davantage tendance à

être pointilleuses sur le lieu qu’elles choisissent d’utiliser21.

21 Project for Public Spaces, “How to turn a place around”. Project for Public Spaces Inc., USA, 2000. 125 p.

54%

46%

55

L’évaluation a également porté sur les usages. Cinq activités principales ont été observées :

se sociabiliser, se restaurer et se désaltérer, utiliser un téléphone portable ou autre objet

électronique de communication, et enfin observer d’autres personnes. La fréquence de ces

activités diffère selon les plazas mais elles sont toujours dans les cinq premières loin devant les

autres.

Illustration 30 : Répartition des activités à Union Square North Plaza.

Ce que l’on peut rajouter grâce aux observations sur le terrain c’est que le fait de se

sociabiliser, de partager un repas ou un verre est plus le fait des personnes en groupe alors

que l’utilisation du téléphone portable ou le fait d’observer les autres personnes est

davantage fréquent chez les personnes seules.

Chelsea Plaza Pearl Plaza

56

Les plazas proposent des activités et évènements en plus des usages observés et cités plus

tôt. Leur fréquence varie en fonction des programmes mis en place par les organisations

responsables de la gestion et de l’animation des plazas.

Certaines plazas donnent lieu à seulement quelques évènements au cours de l’été tels que

des marchés extérieurs, des expositions d’artistes, des évènements commerciaux ou encore

des plantations saisonnières. D’autres, proposent un programme beaucoup plus conséquent

tout au long de l’année ainsi qu’un calendrier d’activités durant la saison chaude.

[ Chelsea Plaza ]

Le cas de Chelsea Plaza est très

représentatif de l’investissement que

peut porter une organisation dans

l’animation d’une plaza. La « Chelsea

Improvement Compagny » qui est en

charge de Chelsea Plaza organise des

évènements annuels et des activités

saisonnières.

Les évènements annuels prennent

place au cœur de la plaza tout au long

de l’année. Pour la plupart se sont des

évènements commerciaux mettant en

lumière les commerçants locaux.

« Chelsea Improvement Compagny »

développe également un calendrier

d’activités saisonnières qui prennent

place chaque semaine de l’été à partir

de 18h. Tout le monde peut

gratuitement participer à des cours de

Salsa, de Capoeira ou encore de Self

defense.

« Chelsea Improvement Compagny »

joue également avec les plantations, et

profite de l’espace pour scénariser la

plaza au rythme des saisons.

Illustration 31 : Evènements, animations et activités proposés par Chelsea Improvement Compagny à

Chelsea Plaza. Source : Page Facebook de Southwest Chelsea : facebook.com/SWChelseaNYC.

Sephora + Pantone Universe Color Pop-Up, Mars 2012

Salsa, tous les Jeudi à 18h30

de Juin à Septembre.

Salsa, tous les Mercredi à

18h30 de Juin à Septembre.

Plantation saisonnière, Automne 2011.

57

LA PERCEPTION DES UTILISATEURS ET DES COMMERÇANTS

Les utilisateurs

Chaque plaza a fait l’objet de 30 entretiens auprès des utilisateurs. Un total de 150 a été

mené et a permis de mettre en évidence ce que les gens pensent de ces plazas.

Lorsqu’il a été demandé aux utilisateurs de spontanément décrire les plazas le mot le plus

fréquent a été « convenient » qui se traduit littéralement par « pratique ». C’est une

description qui correspond tout à fait à l’activité principale observée sur les lieux : prendre

son repas dans un lieu proche du travail et où l’on peut profiter de la présence de tables et

de chaises en extérieurs.

Ce nuage de mot a été obtenu en demandant aux utilisateurs de donner spontanément

trois mots pour décrire les plazas. Ce nuage de mot est une visualisation de la fréquence des

mots en utilisant une méthode de pondération.

58

En demandant plus précisément aux utilisateurs ce qu’ils aiment dans les plazas, plusieurs

commentaires en communs ressortent.

Tout d’abord, les plazas, en procurant des aménagements tels que les tables et les chaises

permettent aux gens de s’assoir dehors ce qui n’est pas chose facile dans la ville de New

York à l’exception des parcs. Les utilisateurs sont reconnaissants d’avoir un lieu où s’arrêter

dans la rue, que ce soit pour manger ou pour une simple pause de quelques minutes. Pour

eux c’est un bon moyen de ressentir et de profiter de la ville. La plupart des personnes

interrogées aime l’environnement urbain qui caractérise ces plazas. Le trafic, le bruit de la

ville, la foule, les immeubles, etc… rendent ces plazas dynamiques et les gens peuvent y

sentir l’effervescence New-Yorkaise. Ainsi, des mots comme « Noisy » (Bruyant) et « Busy »

(bondé) mis en évidence dans le nuage de mot n’ont pas une valeur négative. Au contraire

c’est en partie ce que les gens viennent chercher dans ces lieux.

Les personnes interrogées apprécient particulièrement la petite échelle de ces plazas. Pour

les travailleurs et les résidents les plazas sont des lieux du quotidien à proximité du travail, de

la maison et des magasins et boutiques. Pour les touristes les plazas leur permettent de

ressentir la vie quotidienne au cœur de la ville. Le sentiment de proximité est très important

pour les utilisateurs.

Il y a aussi un très fort sentiment de fierté. Pour beaucoup d’utilisateurs et notamment les

travailleurs et les résidents ces plazas représentent l’image novatrice de New York.

Enfin, les utilisateurs apprécient réellement

le fait que les aménagements tels que les

chaises et les tables soient mobiles. Ils

peuvent les déplacer là où cela les

arrangent. Les utilisateurs peuvent ainsi

s’approprier plus aisément l’espace. La

végétalisation des plazas est également

très appréciée puisque selon les

personnes interrogées cela permet de

renforcer le sentiment de tranquillité et

d’espace privilégié au milieu du trafic.

Illustration 32 : Jeune femme déplaçant des

chaises pour profiter du soleil de fin de

journée, Bogardus Plaza, Juin 2012.

Chelsea Plaza, a pedestrian island that « allows you to relax

despite being in the middle of the city. » “Chelsea Plaza, un îlot qui permet de se

relaxer tout en étant au milieu de la ville”.

Citation d’un utilisateur.

59

Les requêtes et recommandations des utilisateurs

Les principales demandes des utilisateurs sont l’ajout de tables et de chaises lorsque l’espace

le permet et le renforcement de l’aspect végétal des plazas. La plupart des utilisateurs

exprime également le besoin de plus d’ombre et plus spécialement lorsque les jours sont

beaux et chaud.

A cela s’ajoute deux enjeux importants soulevés régulièrement par les personnes interrogées.

Il s’agit notamment de la propreté et de la sécurité dans le sens où les utilisateurs attendent

des lieux bien maintenus et où ils se sentent en sécurité, encore plus particulièrement en ce

qui concerne le trafic routier à proximité.

Illustration 33 : Des poubelles qui débordent et qui dérangent, Bogardus Plaza.

Les commerçants

Un échantillon des commerçants adjacents aux plazas a été interrogé : trois restaurants, huit

fast food et fast drink et 8 épiceries ou boutiques.

Les commerçants qui ont été interrogés pensent que les plazas sont une bonne chose pour

leur quartier. De manière générale ils ont un avis positif et certains des commerçants utilisent

eux-mêmes les plazas durant leurs pauses.

Ils pensent également, de manière subjective, que l’arrivée de ces plazas à proximité de leur

commerce est bonne pour leur affaire. Les plazas attirent les gens et surtout elles leur

permettent de rester à proximité des commerces.

Ces plazas sont manifestement bénéfiques pour les commerces vendant de la nourriture ou

des boissons, mais aussi pour les autres commerces dans le sens où lorsque les gens ont la

possibilité de s’arrêter et de se relaxer dans un lieu, ils sont plus à même de voir les enseignes

autour d’eux et peuvent être tentés d’aller à l’intérieur.

60

Illustration 34 : Abords commerçants de Union Square North Plaza.

C’est un point clé de l’évaluation puisque l’un des principaux freins à la diminution de la

place de la voiture dans les rues New-Yorkaises restent les commerçants qui bien trop

souvent encore pensent que moins de voitures est synonyme de moins de clients. Les résultats

obtenus ici avec les entretiens des commerçants sont plutôt encourageants et peuvent ouvrir

la voie vers plus d’acception pour les projets visant à réduire la place de l’automobile.

PROPOSITIONS D’AMELIORATION BASEES SUR LES PRINCIPES DU PLACEMAKING ET DE PPS.

De manière générale les places

évaluées fonctionnent bien et

les gens sont contents d’avoir

ce type d’espace à leur

disposition. Néanmoins, du

point de vue de PPS et de son

schéma il est possible de

proposer des recommandations

pour rendre ces plazas encore

plus réussies.

Sociability

Uses

& Activities

Comfort

& Image

Access

& Linkages

61

Utilisations et activités

> Programmer davantage d’activités et d’évènements variés afin de diversifier l’utilisation des

plazas. Ces activités ou évènements peuvent être des expositions, des évènements

commerciaux. Ils peuvent impliquer la population, les commerces, les associations ou encore

les artistes locaux.

> Connecter les plazas à leur environnement direct. Il s’agit d’impliquer davantage les

propriétaires et commerçants adjacents aux plazas et de travailler avec eux pour animer et

rendre plus vivants les abords des plazas en créant par exemple des vitrines attractives.

> Augmenter le nombre d’aménagement au service des utilisateurs lorsque l’espace le

permet. En tant que lieu majoritairement utilisé pour se restaurer et également en raison de la

présence de visiteurs et touristes il serait bien d’ajouter des fontaines d’eau potable et des

kiosks vendant nourritures et boissons. Ces derniers peuvent être des extensions des

commerces locaux et servir en partie à alimenter le budget de l’organisme de gestion.

Pearl Plaza, conditions existantes. Pearl Plaza, Proposition d’aménagement.

Whitehall Plaza, conditions existantes. Whitehall Plaza, Proposition d’aménagement.

62

Confort et image

> Répondre davantage à la demande en termes de besoins en chaises et tables. En ajouter

lorsque l’espace le permet.

> Ajouter des assises permanentes tout en étudiant leur position pour ne pas entraver la

flexibilité des plazas qui est un réel atout. Ces assises permanentes peuvent être des bancs

circulaires autour des pots ou par exemples des bancs ou chaises conçus par des artistes

locaux.

> Penser à ombrager les plazas par l’ajout de parasol ou d’arbres plus grands ou plus feuillus.

L’ombre est un enjeu important puisque les places sont le plus utilisées entre midi et 14h

lorsque l’exposition au soleil est la plus forte.

Bogardus Plaza, conditions existantes. Bogardus Plaza, Proposition d’aménagement.

Bogardus Plaza, conditions existantes. Bogardus Plaza, Proposition d’aménagement.

63

> Ajouter davantage de verdure dans les plazas afin de les rendre plus attrayantes.

> Créer un environnement plus agréable et plus sûr en réduisant le volume du trafic ou en

abaissant sa vitesse là où c’est possible. Il est aussi imaginable de marquer d’avantage les

abords des plazas avec l’ajout d’objets incitant les automobilistes à ralentir.

> Ces plazas de proximité sont un catalyseur pour créer une identité unique et propre au lieu

et au quartier. Il s’agit de garder et d’entretenir le sentiment de plaza locale en impliquant la

communauté locale et en mettant en valeur les commerçants, entreprises et écoles locales.

Accès et connectivité

> Rendre ces plazas plus visibles et plus identifiables en tant que lieu pour les piétons en

ajoutant de la végétation et notamment des arbres plus hauts ou des éléments verticaux tels

que des statues.

> Penser à l’ajout de panneaux d’orientation pour les piétons indiquant les plazas depuis les

stations de transports ou les attractions touristes les plus proches.

> Ajouter des kiosks d’information dans les plazas renseignant et mettant en valeur le quartier

ou sur les principales directions à suivre pour les touristes et visiteurs.

Sociabilité

> Programmer davantage d’évènements et d’activités dans les plazas pour attirer une

population variée et en particulier les résidents, les jeunes, les enfants et les personnes âgées

qui sont jusque-là sous représentées.

Whitehall Plaza, conditions existantes. Whitehall Plaza, Proposition d’aménagement.

64

Les résultats de l’évaluation donnent un bilan positif sur les plazas et sur le programme lui-

même. L’ensemble des données statistiques obtenues lors des observations et des enquêtes

ont permis de dresser un tableau complet et représentatif du fonctionnement des plazas.

Leur analyse a également permis de mettre en évidence les améliorations susceptibles de

rendre le programme encore plus performant et les plazas plus attrayantes.

CONCLUSION PARTIELLE

Cette évaluation basée notamment sur les usages et plus généralement sur les principes du

placemaking cherche à déterminer si oui ou non ces plazas fonctionnent c’est à dire si oui

ou non elles sont performantes en termes d’attractivité.

En plus de dresser un tableau de ces plazas cette évaluation tend à comprendre les failles, à

en analyser les sources et à proposer des axes d’amélioration.

De manière quasiment unanime, ces plazas sont appréciées à la fois des locaux, des touristes

et des commerçants qui se trouvent à proximité. Pour les personnes qui les utilisent ces plazas

sont perçues comme de réels espaces publics qui leur donnent l’opportunité de s’assoir, de

faire une pause ou tout simplement de vaquer à leurs occupations. Pour les New-Yorkais

c’est une nouveauté. Jusque-là les rues n’ont jamais été aménagées pour le confort des

piétons, les espaces de détente et de repos ont toujours été concentrés dans les parcs.

L’aménagement de ces plazas dans un environnement à priori démesuré en faveur de

l’automobile et peu propice au piéton est finalement une réussite. Les utilisateurs, en dépit

d’être « au milieu du trafic » se sentent au cœur de la ville, ce qui permet aux locaux comme

aux visiteurs de vivre et de ressentir l’effervescence de « New York ».

C’est d’autant plus vrai que les utilisateurs de ces plazas (visiteurs, résidents, travailleurs, etc.)

s’approprient réellement ces nouveaux lieux de vie de proximité notamment parce qu’ils

offrent des services qui ne se trouvent pas ailleurs ou pas aussi près du lieu de travail ou

encore du lieu de vie.

Ces services, comme les tables et les chaises amovibles mènent à des pratiques spécifiques

comme le montre les pics de fréquentation lors de l’heure du déjeuner et des pauses. Mais

aussi à des usages plus ludiques et originaux comme des cours de salsa ou des évènements

type marché et exposition artistique.

Bien qu’un nombre minime d’améliorations puisse être apportées aux plazas comme au

programme, ces places font preuve d’une réelle richesse en termes d’usages et elles ont un

succès notable auprès des utilisateurs et des commerçants qui les jouxtent.

65

3 – QUEL AVENIR POUR LA RUE ?

On l’a vu, les rues New-Yorkaises sont des lieux qui ont connu beaucoup de changements

ces dernières décennies et qui tendent aujourd’hui encore à évoluer. La ville de New York

s’engage à améliorer la qualité de vie de ses citadins avec comme principal outil la

requalification de ses rues. A l’image du « Plaza Program », la ville opte pour la multiplicité des

interventions à petite échelle émanant principalement de la population. On va voir

maintenant en quoi ces lieux – qui offrent les conditions pour de nouveaux usages – peuvent

avoir un impact sur la rue et sur la perception que les gens en ont.

Les principes et concepts mis en place par la ville de New York et illustrés dans ce document

par le « Plaza Program » s’inscrivent dans un contexte spécifique à l’Amérique du nord.

Certains d’entre eux présentent des limites et nécessiteraient une attention particulière pour

qu’il ne s’opère pas de dérive. Néanmoins, d’autres méritent l’attention et pourraient tout

aussi bien être appliqués en France afin de dynamiser nos rues et de revitaliser certains de

nos espaces publics.

66

3.1 – CHANGEMENT DE REGARD SUR LA RUE

Les portions de rue concernées par la réalisation d’une plaza ne sont plus des lieux que l’on

emprunte seulement pour se déplacer d’un point à un autre mais des espaces où l’on

s’arrête, où l’on reste pour un moment, ce sont des espaces où l’on vie. C’est en ce sens que

ces plazas participent à l’évolution des mentalités et des pratiques en termes de

déplacement et d’usage de l’espace public. Elles donnent l’exemple et montrent qu’il est

possible de faire autrement.

C’est la démarche spécifique du programme qui favorise ce changement de regard sur la

rue. Il est pensé de telle manière qu’il met en place les conditions pour l’acceptation des

projets, pour l’appropriation des lieux et pour l’animation des plazas.

ACCEPTATION DU PROJET

Les projets de plazas conçus à travers le « Plaza Program » ne nécessitent pas

d’investissements financiers lourds (Concept « Lighter, quicker, cheaper »). Ils ne nécessitent

pas non plus une trop longue attente entre le lancement et la réalisation. Les résultats sont

rapidement visibles, à la fois pour les acteurs engagés dans le projet et pour la population

concernée par la future plaza. Le caractère temporaire des plazas laisse quant à lui la

possibilité de revenir en arrière si ça ne convient pas. L’ensemble de ces conditions facilite la

tentative et l’innovation. Elle donne la possibilité de tester sans engagement lourd et avec

une porte de sortie. Auprès des acteurs du projet c’est un moyen de s’engager plus

facilement et pour les communautés concernées il est plus aisé d’accepter un projet dans un

contexte où elles ne se sentent pas dos au mur.

APPROPRIATION DU LIEU

La flexibilité des aménagements mis à disposition au sein des plazas permet aux utilisateurs

de s’approprier les lieux. Les tables et les chaises ne sont pas fixées au sol et sont relativement

légères. Ce type de mobilier est facilement déplaçable et les gens peuvent l’agencer

comme ils le souhaitent. Les tables et chaises mobiles sont l’un des principaux atouts de ces

plazas. En plus de permettre aux utilisateurs de faire « comme chez eux », ce type de mobilier

permet un nombre important de configuration en termes de nombre de places assises et de

choix de disposition dans l’espace. Un couple pourra choisir de s’isoler légèrement du reste

des utilisateurs. Le fait d’être au soleil ou à l’ombre ne dépend pas de là où se trouve la

place mais du choix de l’utilisateur. La plaza peut s’adapter à un groupe de plusieurs

personnes, il leur suffit de récupérer une chaise pour en obtenir le nombre nécessaire. Ainsi

une plaza peut être une destination de choix, d’une part parce qu’on se l’approprie plus

facilement et d’autre part parce qu’elle est adaptable aux besoins.

67

Illustration 35 : Plaza de Times Square avec ses tables et chaises amovible. Février 2012.

La flexibilité des aménagements donne aussi la possibilité d’héberger une variété importante

de type d’événement. En plus de s’adapter aux besoins les plazas peuvent s’adapter aux

usages. Ainsi, tables et chaises peuvent être mises de côté, les pots de végétation peuvent

être déplacés et redessiner l’espace pour laisser place à une exposition, un marché, un

kiosque, etc.

ANIMATION DES PLAZAS

L’animation des plazas est également un outil pour faire évoluer le regard qu’on porte sur la

rue et sur ce qu’elle peut proposer localement.

L’animation des plazas fait partie du contrat établi entre le DOT et une organisation à but

non lucratif. C’est cette dernière qui en est la responsable. En d’autres termes, l’organisation

a pour rôle de faire vivre sa plaza et de la rendre attractive. Ce concept, peu développé en

France, permet de rendre un lieu davantage dynamique que s’il était simplement mis en

libre accès comme tout autre espace public et simplement maintenu par les services publics

uniquement en termes de propreté et de sécurité.

L’animation des plazas, en s’appuyant sur la communauté (artiste locaux, commerces de

proximité, population environnante, etc.) permet de développer une identité locale forte et

un sentiment d’appartenance.

Avec ces plazas et les conditions mises en place par le programme, la rue devient un lieu

d’intégration, un lieu où l’on se sent « chez soi » et un lieu où l’on se sait « chez tout le

monde ». Transportation alternative est l’une des associations cofondatrice de la campagne

« New York City Streets Renaissance ». Elle a participé à la promotion des plazas à travers

l’exposition de 2006 qui proposait une suite d’aménagements similaires le long de l’avenue

Broadway. Dans une interview récemment donnée au New York Times, le responsable de

Transportation alternative, Mr. White, exprimait sa confiance face à l’évolution du visage des

68

rues. « Maintenant que la ville a fait de votre vision sa politique – incluant les plazas pour les

piétons et le vaste réseau de voies cyclables – comment pouvez-vous continuer à être

alternatif ? Beaucoup, a répondu Mr. White. Nous voyons ceci comme le début plutôt que

comme un but déjà atteint. Dans une interview en Mai il avait rajouté : Maintenant, nous

avons un large public. »22

Le regard sur la rue continue d’évoluer au rythme où les changements s’opèrent et montrent

que cette espace peut être le support de la vie urbaine.

3.2 – VERS UNE PRIVATISATION DE LA RUE?

Depuis les années 1980 la ville de New York s’appuie sur des partenariats public/privé pour

assurer le développement économique et la revitalisation urbaine de ses quartiers. Dans ces

partenariats le secteur privé prend le plus souvent la forme de Business Improvement Districts

dont l’organisation et les rôles ont brièvement été expliqués plus tôt (voir p38).

Ce partenariat peut sembler très séduisant car il est un moyen de contrer les limites

budgétaires du secteur public et un moyen de prendre en compte les initiatives privées.

C’est une opportunité pour les habitants, les entreprises et les commerçants de s’impliquer

davantage dans la vie de leur quartier. Néanmoins il y a un risque à ne pas négliger, celui de

la privatisation de l’espace public, et en ce qui nous concerne le risque de la privatisation de

la rue avec pour conséquence un accès inégal à un cadre de vie de qualité.

LIMITE DU PARTENARIAT PUBLIC / PRIVE

New York est la ville qui compte le plus de BIDs aux Etats-Unis avec un total de 45 en 2011 et

leurs investissements annuels auprès des quartiers de la ville représentent 100 millions de

dollars. L’objectif premier de ce partenariat est d’assurer le développement économique des

quartiers face à la limite budgétaire de la ville si bien que tout un pan de l’activité des BIDs se

dirige donc vers l’aide au développement des activités économiques et l’aide à l’emploi.

Néanmoins, pour susciter l’attractivité d’un quartier les BIDs ont tout intérêt à également

investir dans l’amélioration de l’environnement urbain. C’est ainsi que les services et

22 The New York Times, “For Bike Advocates, Delayed Gratification”, 10 Août 2012. L’association Transportation

Alternative est interviewée par le New York Times: « But when the City of New York has made your agenda its official

policy — including pedestrian plazas and a vast bike-lane network — how alternative can you continue to be?

Very, Mr. White said. “We see this as the beginning rather than a culmination,” he said in a May interview. “Now we

have a mainstream audience. ».

69

améliorations fournis par les BIDs sont pour la plupart en relation avec l’aménagement et la

gestion de l’espace public.

La liste non exhaustive des services et améliorations rendus par les BIDs montre cette

particularité :

Illustration 36 : What does a bid do? Starting a Business Improvement District, a step-by-step guide.

Source: NYC Small Business Services, http://www.nyc.gov.

En France comme aux Etats-Unis le contexte de crise a durci les limites budgétaires du

secteur public. On pourrait alors penser que la ville de New York à tendance à se reposer

davantage sur les BIDs pour assurer les services publics et pour satisfaire son objectif

d’amélioration du cadre de vie de la ville. Si une plus vaste ou totale délégation du public

vers le privé venait à se confirmer des problèmes pourraient émerger. En faisant basculer des

missions et services du public dans le privé il faut se méfier de la privatisation de ceux-ci et

des risques que cela peut provoquer.

Rappelons que le budget des BIDs est principalement alimenté par un système de taxes

prélevées chez les propriétaires fonciers, dont les commerçants et entreprises. Plus la zone

dans laquelle se trouve un BID est riche plus son budget va être élevé et plus il va être en

mesure d’apporter des améliorations au sein de son périmètre d’action. C’est ainsi que les

BIDs situés à Manhattan ont généralement une trésorerie plus élevée que les BIDs situés dans

le Bronx où à Brooklyn. Alors que ces derniers se focalisent essentiellement sur les actions

sociales, les BIDs situés à Manhattan peuvent quant à eux investir de l’argent dans

l’amélioration de l’espace public.

Dans le cas des plazas on peut alors se poser la question d’un accès équilibré à un espace

public de qualité. En effet, le programme nécessite un BID – ou autre association – afin

d’assurer et de financer le maintien, la gestion et l’animation des plazas. C’est un

Maintenance

Street/sidewalk cleaning

Graffiti removal

Public Safety/Hospitality

Public safety officers

Visitor assistance

Business Development

Commercial vacancy reduction

Business mix improvement

Marketing

Special events

District public relations

Promotional materials

Holiday decorations

Capital Improvements

Improved streetlights

Custom trash receptacles

Directional street signage

Custom news boxes

Flower boxes

Landscaping

Planting trees/flowers

Tree pit maintenance

Community Service

Fundraising

Charitable events

Homeless and youth services

70

investissement minime pour un BID qui a un budget important, mais pour d’autre cela peut se

révéler impossible et ainsi empêcher la réalisation d’une plaza.

La carte si dessous affiche le nombre de plazas réalisées pour chaque borough (quartier) de

New York. On distingue très nettement un déséquilibre dans leur répartition sur le territoire.

Alors que Manhattan en compte huit, Brooklyn en possède trois et le Bronx une. Aucune

plaza issue du programme n’a encore été ouverte dans le Queens ou à Staten Island.

Illustration 37 : Nombre de plaza réalisées, par “boroughs” (quartiers).

Source : fond de carte : http://new york-guide.info

8

3

1

0

0

71

CLES POUR APPREHENDER CORRECTEMENT LES CHALLENGES DE LA PRIVATISATION DANS

UN PROGRAMME COMME LE « PLAZA PROGRAM ».

Dans le cadre du « Plaza Program » Il est possible de mettre des mesures en place pour limiter

les risques de la privatisation de l’espace public.

-Bien choisir l’emplacement des plazas

A l’heure actuelle le critère premier pour sélectionner l’emplacement des futures plazas se

limite à la disponibilité ou non d’une portion de route sous utilisée. L’idée est de sélectionner

un emplacement en fonction des besoins et pas seulement parce qu’il y a un espace

vacant sur la voirie.

Jusque-là ce sont les communautés déjà constituées en BID ou en association qui postulent

pour faire partie du programme. Ce sont donc des entités qui savent qu’elles ont les moyens

financiers et/ou humains de s’engager pour le maintien, la gestion et l’animation d’une

plaza. Il serait intéressant de compléter cette mesure par la recherche de potentiel

emplacement selon s’il manque des espaces pour se rassembler, pour se récréer, ou encore

s’il manque de parcs et de places publiques, etc.

-Localiser les plazas dans un réseau

Mettre en place une logique de mise en réseau. L’intérêt est d’intégrer les plazas dans un

système plus vaste d’espace public (parc, place publique) pour créer un maillage complet.

Localiser stratégiquement les plazas peut augmenter le nombre et la variété des espaces

publics disponibles dans la ville. Cela est encore plus significatif dans les zones où il y a peu

d’espaces publics disponibles ainsi que dans les quartiers populaires où la pauvreté de

l’espace public tend à impacter négativement le cadre de vie.

-Rééquilibrer la balance

Le management d’une plaza (maintien, gestion, animation) est une des clés de la réussite de

ce type de lieu. C’est encore plus important si la plaza est située dans une zone qui n’est pas

très fréquentée, en dehors des lieux touristiques ou des rues commerçantes par exemple.

Dans le cadre du « Plaza Program » le management est assuré par le BID ou l’association

partenaire. La plupart des tâches que ces organismes ont à gérer sont celles

traditionnellement opérées par le service public telles que le nettoyage des places ou

encore le ramassage des déchets. Le problème ne se pose pas tant dans les zones où les

BIDs ou associations ont effectivement les moyens financiers pour assurer ces tâches. Le

problème se pose davantage dans les quartiers populaires où les ressources financières

limitées des associations ne permettent pas la prise en charge de ces tâches et limite alors la

72

création de ce type de place par manque de moyens. C’est pourtant souvent là où les

besoins en terme de création et de revitalisation de l’espace public sont les plus fort.

L’objectif est donc d’assurer de manière efficace et suffisante un service de base fourni par

la ville. Ce serait une manière de promouvoir les plazas dans les zones qui en ont le plus

besoin mais pas les moyens. Ce serait également un moyen pour les organismes concernés

de se focaliser sur la gestion et l’animation des plazas qui sont des missions vitales pour le bon

fonctionnement de ces petits espaces publics spécifiques.

Le risque de privatisation de la rue est réel dans le sens où ceux qui profiteraient davantage

des améliorations du cadre urbain seraient dans les zones qui en auraient les moyens

financiers, alimentant ainsi un « cercle vicieux » pour les zones populaires et un « cercle

vertueux » pour les zones riches. En effet, plus une zone est dynamique économiquement

parlant, plus elle a les moyens d’agir sur l’amélioration du cadre urbain par l’intermédiaire

d’un BID, et plus le cadre et la qualité de vie augmente plus elle attire de nouveaux

habitants, de nouvelles entreprises et de nouveaux commerces, renforçant ainsi la

dynamique économique et augmentant le budget du BID. Pour que cet effet ne soit pas

profitable qu’aux zones riches il est essentiel que la ville reprenne ses responsabilités et assure

les services de base notamment dans les zones qui en ont le plus besoin pour ne pas être

freinées dans leurs initiatives.

3.3 – DES CONCEPTS TRANSPOSABLES ?

Bon nombre des concepts, principes et processus appliqués par la ville de New York ne sont

pas utilisés dans nos villes. Bien qu’il soit nécessaire de garder à l’esprit que nos villes

n’évoluent pas dans le même contexte et qu’elles n’ont pas la même histoire, il est

intéressant de se pencher sur quelques-unes des idées développées à New York. Leur

application dans nos villes pourrait être un plus dans la revitalisation de nos quartiers et dans

la création de nouveaux espaces publics réussis.

Les plazas sont à New York comme Paris-plage est à Paris. Il ne s’agit pas de faire du copier-

coller mais de réfléchir à une certaine adaptation de leur manière de penser la rue et de

faire l’espace public et la ville. Il est notamment intéressant de revenir sur les fondements et le

processus mis en place dans le « Plaza Program ». Bien que le partenariat public/privé soit à

risque et qu’il fasse actuellement débat dans la sphère urbaine, il peut redonner du souffle à

la ville. Enfin le concept « Lighter Quicker Cheaper » est une source de nouveauté qui

pourrait participer à l’évolution de nos villes.

73

PROGRAMME COMMUNAUTAIRE : UN OUTIL AU SERVICE DE LA COMMUNAUTE

Le « Plaza Program » tout comme d’autres outils développés par la ville de New York, est un

programme dit communautaire (« Community-based program »). Il a pour objectif de mettre

en place les conditions pour aménager la rue de manière à ce qu’elle reflète les besoins, les

usages et les envies de la communauté concernée. Cet objectif s’accompagne bien

entendu de la prise en compte des contraintes environnementales et des contraintes liées

aux coûts des projets.

En France aussi nous connaissons de plus en plus cette recherche de la compréhension et de

l’intégration des besoins de la population. La montée en puissance des processus de

participation et de concertation entre les acteurs impliqués et concernés au cours d’un

projet urbain en est la principale illustration. Néanmoins, le « Plaza Program » est construit

d’une manière spécifique qui est très peu ou pas utilisée dans nos villes en ce qui concerne

les projets d’aménagement de l’espace public.

Le « Plaza Program » est construit comme un outil mis à disposition des communautés pour

qu’elles puissent s’impliquer dans l’évolution de leur cadre de vie. Ce sont les communautés

qui décident de faire le pas et d’intégrer le programme si cela correspond à la vision qu’elles

ont développé. En France, en matière de projet d’espace public, bien que la population et

les acteurs soient intégrés au projet, dès le début dans le meilleur des cas, la volonté ne vient

pas directement du plus près du terrain. Elle ne vient pas des communautés elles-mêmes.

Avec le « Plaza Program » le secteur public met à disposition un outil – sous certaines

conditions – si l’envie, le besoin et l’engagement vient de la communauté. C’est une réelle

démarche « bottom-up ».

Illustration 38 : Schématisation du processus de programme communautaire.

Concrétisation

Communauté

Vision Communautaire

Programme

(Outil)

Secteur

Public Politique

Orientations

Projet

Concrétisation

Réalisation

74

L’intérêt d’une telle démarche est qu’elle est davantage facteur d’une bonne intégration du

projet au niveau local. De plus, c’est une démarche très flexible qui peut être appliquée à

des programmes différents : des évènements temporaires comme des expositions artistiques

ou encore des fermetures de rue à la circulation et ouvertes au public par exemple.

C’est aussi une démarche qui s’adapte aux interventions sur le moyen et long termes comme

le « Plaza Program » ou encore le « Neighborhood Slow Zones program » mis en place par la

ville de New York.

La mise en place de ce type de programme basé sur une démarche dite communautaire

serait pour les villes Françaises un moyen supplémentaire et complémentaire des dispositifs

existants de construire la ville avec la population qui la vie au jour le jour que ce soit pour

résider, pour travailler ou pour se récréer.

BUSINESS IMPROVEMENT DISTRICT : UNE NOUVELLE FORME DE GOUVERNANCE POUR

AMELIORER L’ESPACE PUBLIC

Comme on l’a vu plus tôt, les BIDs sont très répandus aux Etats-Unis, et New York est la ville qui

en compte le plus. Ce concept originaire du Canada est également très répandu au

Royaume Unis et quelques-uns ont fait leur apparition en Allemagne mais en France il n’est

pas développé.

Concrètement, l’intérêt des BIDs pour l’aménagement de l’espace public est de donner les

moyens à une zone définie de voir s’améliorer son cadre de vie par le biais d’actions

supplémentaires portées sur l’environnement urbain et sur les services proposés. C’est un outil

qui pourrait apporter du « sang neuf » à la France en terme de mode de faire la ville à

condition qu’il soit adapté au contexte du pays.

Contexte Français et implantation des BIDs

Alors qu’à l’origine les BIDs sont des structures mises en place dans des grandes villes et dans

des quartiers plutôt aisés et dynamiques d’autres commencent à voir le jour dans un

contexte d’agglomération ou même de village. En effet un BID n’a pas de superficie

minimale, il peut tout à fait ne concerner qu’une rue, comme la rue principale d’un village

qui est souvent commerçante. C’est un point positif pour les villes et villages de France qui

sont très nombreux mais pas très grands que ce soit en termes de superficie ou en termes de

nombre d’habitants.

75

De plus, en France, alors que les pouvoirs publics doivent faire des choix entre différents

projets car ils n’ont pas les moyens financiers et humains de tous les mettre en œuvre, la

constitution de BIDs pourraient être une solution. Ceci pourrait notamment permettre à

certains projets et à certaines améliorations de l’espace public de voir le jour.

Les avantages des BIDs dans le contexte Français

La mise en place d’une structure comme un BID encourage la population à s’investir dans sa

ville, dans son quartier. Mais là où le concept devient vraiment intéressant c’est qu’il ne

concerne pas seulement les habitants, mais aussi les commerçants et les travailleurs. Ces

personnes ne sont peut-être pas résidentes dans la zone mais elles y passent néanmoins le

plus clair de leur temps. Il est donc primordial de ne pas les oublier mais aussi de les rendre

conscients qu’ils ont un impact sur le quartier. Le BID joue ce rôle. Dans la zone délimitée les

commerces et entreprises réalisent qu’ils sont également responsables de la qualité de leur

environnement de travail et que d’agir concrètement pour son amélioration n’est pas

seulement bénéfique pour les habitants mais aussi pour leurs affaires dans le sens où un

cadre de vie agréable favorise l’attractivité.

Ce type de partenariat vient encourager et renforcer les initiatives privées et favorise ainsi le

sentiment d’appartenance à une communauté. Le fait de s’investir et de mettre en quelque

sorte sa « pierre à l’édifice » pour la construction d’un cadre de vie meilleur peut permettre

de susciter davantage d’estime et de respect pour un lieu et ainsi limiter les risques de

dégradation.

Le concept de BID permet également aux pouvoirs publics d’être plus proches de la réalité

du terrain. Le BID agit comme une structure relais entre les décideurs locaux et les

communautés. Il permet de faire remonter les informations, les attentes et les besoins de la

population (habitants, commerçants et entreprises) qui, grâce au partenariat mis en place,

vont avoir tendance à être davantage écoutés et pris en compte afin de sans cesse

adapter, ajuster et améliorer le cadre de vie de proximité.

Enfin, l’avantage d’un BID dans le contexte Français réside aussi dans le fait que les

interventions peuvent concerner tous type d’espace public. Un BID va intervenir sur des

espaces verts, sur des places mais aussi sur les rues. Ces interventions concernent à la fois le

maintien et la gestion mais également l’animation. Alors qu’en France les rues sont très peu

exploitées par le secteur public, les BIDs pourraient participer à leur dynamisme en proposant

des activités et des évènements qui prendraient place dans la rue et qui viendraient mettre

en valeur le contexte local. Pour faire référence à l’enquête menée par Denis Pingaud sur la

perception des espaces publics – déjà mentionnée dans l’introduction de ce document – la

mise en place d’un tel partenariat et les interventions que cela implique sur l’espace public,

76

pourraient mener à une prise de conscience de la rue en tant qu’espace public et support

de la vie sociale. Cette prise de conscience doit se faire au niveau de la population. Pour

rappel, selon Denis Pingaud seulement 17% de la population considère la rue comme un

espace public alors que les espaces verts représentent 69% des perceptions. Mais elle doit

également se faire au niveau des pouvoirs publics afin qu’ils exploitent davantage l’espace

offert par les rues pour la population et pour la vie urbaine.

Les limites des BIDs dans le contexte Français

Contrairement aux Etats-Unis la France n’est pas un pays qui mise sur les initiatives privées

dans le domaine de l’urbanisme et de l’aménagement de l’espace urbain. Les partenariats

public/privé ne sont que des exemples qui nous viennent d’ailleurs mais qui ne sont pas

historiquement ancrés dans nos modes de faire la ville. On ajoute à cela une vision du

secteur privé dans la sphère urbaine comme un « mal », visant le profit et n’assurant pas

l’intérêt général. Ce manque d’antécédent en matière de partenariat public/privé en

France pourrait mener à un blocage aussi bien du côté du secteur public que privé et

limiterait ainsi l’initiative et l’innovation sur nos espaces publics et plus particulièrement dans

la rue.

De plus, la France est un pays de contribuables. C’est un contexte totalement différent des

Etats-Unis. Ainsi, l’une des limites des BIDs pour la France pourrait justement venir des

contribuables qui verraient dans un BID une double taxe pour l’aménagement et la gestion

de l’espace public. En effet, cette mission revient, traditionnellement et dans les esprits des

Français, au secteur public qui profite déjà d’un budget notamment alimenté par les impôts

locaux.

L’enjeu se révèle ici au niveau législatif avec un important travail à fournir au niveau de la

définition des missions respectives des BIDs et du secteur public dans l’aménagement, la

gestion et l’animation de l’espace public. Un BID doit être un pourvoyeur de services urbains

supplémentaires, qui viennent s’additionner à ceux déjà fournis par la ville et financés par les

impôts locaux. Comme on l’a vu plus tôt, c’est également un impératif pour limiter les risques

de privatisation de l’espace public.

Le tableau suivant montre les atouts, les faiblesses, les opportunités et les menaces que

représente un BID. Il s’ajoute ici comme une sorte de résumé et s’appuie à la fois sur la partie

actuellement développée mais aussi sur la partie précédente concernant les risques de la

privatisation de la rue (partie 3.2 : Vers une privatisation de la rue, voir p65).

77

Atouts Faiblesses

-Apporte des services urbains

supplémentaires et performants qui

améliorent la zone définie.

-Encourage les initiatives privées.

-Concentre et soutient l’effort pour

l’amélioration d’une zone sur le long terme.

-Assure des ressources financières

supplémentaires pour l’amélioration du

cadre de vie.

-Double taxe pour les propriétaires des zones

concernées.

-Nécessite un gros travail de mobilisation des

propriétaires pour la mise en place de la

structure.

-Peu d’antécédent en matière de

partenariat public/privé en France qui peut

mener à un blocage.

Opportunités Menaces

-Encourage la responsabilité citoyenne.

-Améliore l’image de la zone et favorise

l’attractivité des entreprises, des commerces

et de la population.

-Encourage le sentiment d’appartenance à

la communauté et induit le respect de

l’espace public.

-Privatisation des missions du secteur public

et de l’espace public.

-Faire reposer trop de responsabilité sur les

propriétaires.

-Renforcement des quartiers déjà

dynamiques davantage en mesure de se

former en BID et de payer les taxes.

-Déplacer les problèmes et creuser les écarts

entre les quartiers d’une même ville.

Illustration 39 : AFOM : Atouts, Faiblesses, Opportunités, Menaces des Business Improvement Districts.

« LIGHTER, QUICKER, CHEAPER » : L’INNOVATION, LA TENTATIVE

Ce qui caractérise la ville de New York c’est sa politique osée. New York affiche une volonté

très forte en ce qui concerne l’amélioration de la qualité de vie de ses citadins à travers de

multiples interventions dans ses rues. Pour cela elle n’a pas peur d’essayer de nouvelles

choses et de bouleverser les modes de faire la ville qui étaient jusque-là dominants.

Bien que les grands projets d’aménagement urbain classiques soient toujours présents, la ville

de New York s’est engagée dans de nouvelles façons de faire qui encouragent l’innovation

et les tentatives. Les nouveaux outils mis en place favorisent la naissance de projet de

proximité et de petite envergure qui suivent pour la plus part le concept « Lighter Quicker

Cheaper ».

Faire évoluer le mode de faire le projet urbain

L’application de ce concept en France serait une réelle évolution dans la manière de faire la

ville et plus encore dans la manière de faire le projet urbain.

78

Les principes du concept incitent à tenter de nouvelles choses sur l’espace public puisque la

prise de risque est moindre. Comme expliqué plus tôt dans ce document (voir p32),

l’investissement financier est relativement faible et l’empreinte dans le tissu urbain est

réversible. Ainsi, dans un contexte où les villes Françaises sont sujettes à des limites

budgétaires de plus en plus contraignantes et confrontées au regard de plus en plus sévère

de la population sur les dépenses publiques, la mise en place d’outils incitant à des projets

« Lighter, Quicker, Cheaper » serait une aubaine pour l’innovation dans l’espace public et

pour la création et l’amélioration de nos lieux de vie.

Au-delà du contexte Français c’est également un concept intéressant car il met en place les

conditions pour l’adaptabilité et l’évolution d’un projet d’espace public dans le temps et

dans l’espace. Les projets sont réajustable à la fois en cours de route et également après,

sans avoir à tout recommencer si cela ne convient pas.

Un concept de marketing urbain

Enfin, ce concept, dans le sens où il favorise l’innovation, est également un moyen pour la

ville de se mettre en avant et de se construire une image dynamique. C’est d’autant plus

important de nos jours où les villes, qu’elles soient métropoles ou plus petites, sont entrées

dans une compétition qui vise l’attractivité des populations (habitants, commerces,

entreprises, etc.). Améliorer le cadre de vie d’une ville est une chose, mais le faire savoir en

est une autre. Ainsi les projets basés sur le concept « Lighter, Quicker, Cheaper » font parler

d’eux par leur originalité et participent à la visibilité d’une ville.

L’ensemble des concepts, principes, outils et processus évoqués précédemment et utilisés

dans le cadre de la politique de revitalisation urbaine New-Yorkaise sont adaptables et

transposables aux politiques publiques urbaines des villes Françaises. Ils permettraient de

dynamiser nos rues qui sont à l’heure actuelle peu reconnues par la population comme

espace public et peu utilisées comme tel par les pouvoirs publics. Tout comme les rues New-

Yorkaises, les rues de nos villes ont du potentiel, elles peuvent être davantage vivantes,

animées et support de la vie sociale.

79

CONCLUSION PARTIELLE

A travers sa politique et les outils innovants qu’elle développe la ville de New York a su faire

évoluer les fonctions et les formes de la rue. L’image renvoyée aujourd’hui est différente de la

rue d’il y a 20 ans à peine. La mixité des modes de déplacement et la mixité des usages

prennent place dans la rue et ce grâce à des processus innovants.

Les Etats-Unis ont su développer l’initiative privée dans le domaine de l’aménagement

urbain. New York n’est pas en reste puisqu’elle est la ville qui compte le plus de BID dans le

pays. Néanmoins, l’intégration du secteur privé dans le processus de projet urbain et dans la

gestion, maintenance et animation de l’espace public soulève un questionnement majeur, à

savoir celui du risque de privatisation de la rue. C’est un risque réel mais qui peut être limité

voir totalement contrôlé. L’impératif pour le secteur public est d’assurer les services

traditionnels en matière de gestion urbaine afin de limiter les injustices et les déséquilibres

entre les quartiers riches et les quartiers pauvres, ces derniers ne pouvant pas financièrement

se substituer aux responsabilités de la ville.

Avec un cadre bien définis les BID pourraient être un concept transposable dans les villes

Françaises. Leur importation nécessiterait la mise en vigueur d’un statut spécifique et adapté

au contexte Français mais elle permettrait à coup sûr de dynamiser la création et la

revitalisation de l’espace public. Nos rues sont aujourd’hui encore peu exploitées par les

services publics comme support de la vie sociale. Les limites budgétaires et le manque

d’engagement et d’innovation en matière de projet d’espace public de certaines équipes

municipales pourraient en effet être dopés par des initiatives privées encadrées. D’autres

outils tirés de l’expérience des plazas New-Yorkaises pourraient être transposables en France

et venir renforcer nos processus participatifs autour des projets urbains ainsi que l’image de

nos villes à travers le monde. C’est le cas des programmes communautaires et du concept

« Lighter, Quicker, Cheaper ».

81

Conclusion Générale

« If you plan cities for cars and traffic, you get cars and traffic. If you plan for people and

places, you get people and places. »

« Si vous planifiez les villes pour l’automobile et la circulation, vous obtiendrez des automobiles et de la

circulation. Si vous les planifiez pour les gens et les places, vous obtiendrez des gens et des places. »

Project for Public Spaces.

Les New York City Public Plazas pourraient être l’illustration de cette citation de l’organisme

Project for Public Spaces. « Image de marque » de la nouvelle politique urbaine de New York

ces plazas s’insèrent dans le réseau viaire et viennent dynamiser les rues en créant de

nouveaux usages et en amenant de nouveaux utilisateurs.

Mais comment de petites interventions dans l’espace public au caractère dans un premier

temps temporaire et « léger » comme les plazas, peuvent-elles participer à améliorer la

qualité du cadre de vie dans les rues ?

Depuis 2007 et la première édition du PlaNYC la ville de New York affiche une politique

publique urbaine forte : améliorer la qualité de vie de ses citadins. Si les plazas existent

aujourd’hui c’est parce qu’elles viennent servir cet objectif. En effet, pour atteindre cet

objectif, New York compte principalement sur l’amélioration de la qualité de ses rues et

s’appuie donc sur le Département des Transports pour mettre en place les outils nécessaires

à leur transformation. Rappelons que les rues New-Yorkaises ont été façonnées pendant

82

plusieurs décennies par les principes de l’urbanisme fonctionnaliste et par la pensée

moderniste. En conséquence de quoi, les rues New-Yorkaises se limitaient au rôle de support

de la circulation routière en écartant toute vie sociale. La politique actuelle de New York est

guidée par d’autres principes davantage tournés vers le partage de la voirie et la mixité des

usages, ce qui nous ramène entre autre aujourd’hui aux écrits de Jane Jacobs (1961).

Plus que les interventions elles-mêmes, ce sont les fondements des outils mis en place par le

DOT qui permettent à la rue de prendre petit à petit un autre visage. La temporalité des

projets qui proposent des résultats rapides et mesurables par les acteurs, par la population et

par les utilisateurs, tout comme la possible réversibilité des projets sont des atouts lorsque

l’objectif est de répondre aux besoins et aux attentes de la population. Ils permettent de

comprendre les usages, de s’adapter et de réajuster les projets si nécessaire. La structure

communautaire des programmes mis en place, comme nous l’avons vu avec le « plaza

program », vient renforcer le rôle de la population et surtout les initiatives privées qui, à travers

les BIDs, sont une réelle source de dynamisme pour les projets d’espace public de la ville.

La transformation des rues New-Yorkaises est également assurée par la facilité

d’appropriation des projets. Les utilisateurs des plazas se sentent à l’aise et font le choix

d’aller dans ces lieux pour prendre un temps de repos ou pour déjeuner entre amis ou entre

collègues. L’image que les plazas renvoient est alors positive. Les locaux, résidents,

commerçants et travailleurs les apprécient laissant apparaitre un sentiment de fierté pour ces

plazas qui représentent l’évolution des rues et l’innovation urbaine actuelle de la ville de New

York.

Néanmoins, cette transformation n’est possible qu’avec une prise de conscience des

nouveaux enjeux urbains, qu’ils soient sociaux, environnementaux ou économiques et à

condition qu’elle s’accompagne d’une évolution dans les modes de faire la ville. Les

décideurs locaux doivent alors faire preuve d’une volonté politique forte concrétisée par la

mise en place d’un cadre d’action solide. New York s’inscrit dans ce contexte et l’image des

plazas, pionnières dans le domaine de l’aménagement et la reconquête des rues, viennent

l’illustrer.

Cette expérience, qui est jusque-là une franche réussite, pourrait être astucieusement

adaptée et transposée dans les villes Françaises, comme ailleurs dans le monde. Il serait en

effet intéressant pour nos villes et nos décideurs de se pencher sur les principes et concepts

qui guident les fondements des nouveaux outils et programmes urbains New-Yorkais. Le

« placemaking », principe en tête de la politique urbaine de New York, est un filon à exploiter

pour toutes les villes qui souhaitent donner davantage d’importance à l’amélioration de la

qualité de leurs lieux de vie dans le respect des besoins et des attentes des personnes qui y

vivent, y travaillent et les visitent.

83

La mise en valeur de l’initiative privée, par l’intermédiaire de la mise en place de structures

telles que les BIDs, est une manière d’assurer la dynamique de l’espace public et de venir

contrer les limites budgétaires actuelles du secteur public. Ce dernier est en effet, en France,

l’acteur et le financeur principal de l’aménagement urbain or ses capacités

d’investissements sont limitées. Néanmoins, cela ne doit pas engendrer un appauvrissement

du domaine public notamment à l’heure où les villes s’engagent les unes contre les autres

dans une compétition à l’attractivité des populations et des entreprises afin de gonfler leurs

revenus.

Dans ce contexte les BIDs sont une solution attrayante à condition qu’elle reste

complémentaire et non une solution de substitution au secteur public. Il en va de l’accès

équilibré à un espace public de qualité et de la garantie d’une amélioration généralisée du

cadre de vie urbain.

Néanmoins des questions perdurent. Le succès apparent des micro-interventions sur l’espace

public, comme la construction des plazas, donne lieu à des critiques. En participant à la

construction d’une image positive d’une rue, d’un quartier ou d’une ville ces interventions

sont souvent ciblées comme catalyseur du processus de gentrification. Le caractère

novateur des plazas et les impacts positifs qu’elles procurent tendent effectivement à

améliorer la qualité de l’espace public. Pour certains c’est une explication de la monté des

prix des logements et donc de l’évincement des catégories les plus modestes de la société.

Cependant, New York a inscrit dans sa politique la volonté de fournir un espace public (parc,

place, plaza, etc.) à tous les habitant dans la limite d’un rayon de 10 minutes à pied et ce sur

l’ensemble de son territoire. C’est une mesure encourageante qui devrait avoir tendance à

limiter les processus de gentrification lié à l’amélioration du cadre de vie si cette dernière se

fait de façon équilibrée sur le territoire.

Enfin, pour finir et se recentrer sur la rue, nous pouvons évoquer une des limites au partage de

la voirie et à la mixité des usages dans la rue. « De plus en plus de villes remplacent les places

de stationnement par des “mini-parcs”, est-ce une bonne idée ? Ou ne devraient-ils pas

plutôt les convertir en pistes cyclables?23 ». Avec cette interrogation, le collectif des villes

durables (Sustainable Cities Collective24) lance le débat sur la capacité de la rue à accueillir

l’ensemble des usagers et des usages mais aussi sur la question des conflits d’usage et

d’intérêt. Améliorer la qualité de nos rues, de notre espace public, oui ! Mais dans la limite de

quels usages s’ils ne peuvent pas tous être adoptés, et dans la limite de quels critères ?

23 Sustainable Cities Collective, publication facebook, 24 Août 2012 : « More and more cities are replacing parking

spaces with these mini parks - good idea? Or should they just convert them to bike lanes? » 24 Sustainable Cities Collective est un site web éditorial indépendant sur les thématiques de l’urbanisme :

http://sustainablecitiescollective.com/

85

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGE :

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Jacobs, Nation Books, Philadelphia, 2010.

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Bretagne, 2007. 136p.

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2000. 125 p.

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Public Spaces Inc., USA, 2008. 105 p.

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transportation planning. Project for Public Spaces Inc., USA, 2008. 40 p.

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Southworth M., Ben-Joseph E., Streets and the shaping of towns and cities. Island Press,

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125 p.

RAPPORT:

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Économie de l'Environnement, Aménagement et Innovation », Université Bordeaux IV

Montesquieu, 2004.

NYCDOT, World Class Streets: Remaking New York City’s Public Realm. NYCDOT, New York,

2009. 55 p.

NYCDOT, Sustainable Streets Strategic Plan for the New York City Department of

Transportation 2008 and Beyond. NYCDOT, New York, 2008. 74 p.

NYCDOT, Sustainable Streets 2009 Progress Report. NYCDOT, New York, 2009. 78 p.

Policard M., New York City Public Plaza – Placemaking evaluation, Compte rendu

d’évaluation, Project for Public Spaces, Juin 2012. 127p.

VIDÉOGRAMME :

H. Whyte W., The social life of small urban spaces. Direct Cinema Ltd, Los Angeles, 1988

©1979, Copie numérique, 58min. Disponibilité et accès : http://vimeo.com/6821934

ContextSensitiveSolutions.org, CSS Champions: Denver, Colorado. Aurash Khawarzad, New

York, 2012, 7min. Disponibilité et accès :

http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=NTI6qJeZzqM

86

TABLE DES ILLUSTRATIONS

Illustration 1 : Corrélation entre le taux d’obésité et taux de pratique de la marche, vélo et

transport public par pays. Source: Transportation Alternatives, 2007. ............................................ 13

Illustration 2 : Emissions de CO2 totales et par tête du secteur des transports par pays. Source :

www.earthtrendsdelivered.org............................................................................................................... 14

Illustration 3 : Interprétation graphique des données statistiques de l’enquête menée par

Denis Pingaud. ........................................................................................................................................... 15

Illustration 4 : Répartition de l’utilisation des sols de la ville de New York, en pourcentage.

« Streets make up over a quarter of the City’s land area. » (Source : PlaNYC Sustainable

Stormwater Managment Plan, 2008). .................................................................................................... 19

Illustration 5 : The Commissioners' Plan of 1811, John Randel, Jr. Source: Exposition temporaire,

The Greatest Grid: The Master Plan of Manhattan, 1811-201, 6 Decembre 2011 – 15 Julliet

2012, Museum of the City of New York.................................................................................................. 21

Illustration 6 : Robert Moses and the Modern City, Brochure cover, November 12, 1959. Source

: Courtesy of MTA Bridges and Tunnels Special Archive. ................................................................... 22

Illustration 7 : Photomontage Avant/Après, West Midtown, Manhattan, New York. Source:

Project for Public Spaces. ........................................................................................................................ 27

Illustration 8 : Destination : Broadway. Tête d’affiche de la campagne “New York City Streets

Renaissance” lors de l’exposition au MAS en 2006. Source : Project for Public Spaces. ............ 27

Illustration 9 : Page de couverture, PlaNYC Progress Report 2012. .................................................. 30

Illustration 10 : Illustration de PlaNYC: The Making of a Greener, Greater New York City, Avril

2012. ............................................................................................................................................................. 30

Illustration 11 : Pages de couverture des documents World Class Streets, Sustainable Streets

Index et NYC Street Design Manual....................................................................................................... 31

Illustration 12 : Park Avenue, Summer Streets, 4 Août 2012.Source :

http://nyc.gov/summerstreets ................................................................................................................ 33

Illustration 13 : Scrabble géant, Williamsburg walk: Rethink your public space, 16 Juin 2012. ... 34

Illustration 14 : Popup Park, Sponsorisé par « le pain quotidien », East 44th Street, Manhattan,

Source: New York City Department of Transportation, Curbside Public Seating Platforms

sponsored by local businesses, 2011 Pilot Program Evaluation Report. .......................................... 35

Illustration 15 : Entrée d’une zone à 20mph, Claremont, Bronx, New York. Source : NYCDOT. 36

Illustration 16 : Times Square avant (à gauche) – après (à droite). Source: NYCDOT ................. 37

87

Illustration 17 : Représentation graphique du concept du “Plaza Program”. Source : NYC

Plaza Program Application guidelines 2012, NYC, 2012. ................................................................... 40

Illustration 18 : Pearl Plaza, premier aménagement de cette place temporaire en 2007.

Source : dumbonyc (on Flickr). ............................................................................................................... 43

Illustration 19 : The Place diagram, what makes a great place? Source: Project for Public

Spaces ......................................................................................................................................................... 45

Illustration 20 : Les cinq différentes formes de plazas observées sur le terrain. ............................. 46

Illustration 21 : Distance parcourue depuis la destination précédente. ........................................ 50

Illustration 22 : Mode de transport utilisé pour rejoindre la plaza. .................................................... 50

Illustration 23 : Nombre de personnes comptées à Chelsea Plaza durant une journée............. 51

Illustration 24 : Distribution des personnes selon s’ils sont en groupe ou seul. ................................ 52

Illustration 25 : Repartition des personnes en groupes et seules sur une journée. ........................ 52

Illustration 26 : Temps moyen passé sur place par personne. ........................................................... 52

Illustration 27 : Statut des utilisateurs. ..................................................................................................... 53

Illustration 28 : Fréquence d’utilisation des plazas. ............................................................................. 53

Illustration 29 : Distribution des ages. ...................................................................................................... 54

Illustration 30 : Répartition des activités à Union Square North Plaza. ............................................. 55

Illustration 31 : Evènements, animations et activités proposes par Chelsea Improvement

Compagny à Chelsea Plaza. Source : Page Facebook de Southwest Chelsea :

facebook.com/SWChelseaNYC............................................................................................................. 56

Illustration 32 : Jeune femme déplaçant des chaises pour profiter du soleil de fin de journée,

Bogardus Plaza, Juin 2012. ....................................................................................................................... 58

Illustration 33 : Des poubelles qui débordent et qui dérangent, Bogardus Plaza. ....................... 59

Illustration 34 : Abords commerçants de Union Square North Plaza. .............................................. 60

Illustration 35 : Plaza de Times Square avec ses tables et chaises amovible. Février 2012. ........ 67

Illustration 36 : What does a bid do? Starting a Business Improvement District, a step-by-step

guide. Source: NYC Small Business Services, http://www.nyc.gov. ................................................. 69

Illustration 37 : Nombre de plaza réalisées, par “boroughs” (quartiers). Source : fond de carte :

http://new york-guide.info ....................................................................................................................... 70

Illustration 38 : Schématisation du processus de programme communautaire. .......................... 73

Illustration 39 : AFOM : Atouts, Faiblesses, Opportunités, Menaces des Business Improvement

Districts. ........................................................................................................................................................ 77

88

CREDITS PHOTOGRAPHIQUES

Toutes les photos sont de l’auteur à l’exception de :

P30 : Illustration 12, Park Avenue, Summer Streets, 4 Août 2012.Source :

http://nyc.gov/summerstreets

P32 : Illustration 14, Popup Park, Sponsorisé par « le pain quotidien », East 44th Street,

Manhattan, Source: New York City Department of Transportation, Curbside Public Seating

Platforms sponsored by local businesses, 2011 Pilot Program Evaluation Report

P33 : Illustration 15, Entrée d’une zone à 20mph, Claremont, Bronx, New York. Source :

NYCDOT.

P34 : Illustration 16, Times Square avant (à gauche) – après (à droite). Source: NYCDOT

P39 : Illustration 18, Pearl Plaza, premier aménagement de cette place temporaire en 2007.

Source : dumbonyc (on Flickr).

P52 : Illustration 31, Evènements, animations et activités proposes par Chelsea Improvement

Compagny à Chelsea Plaza. Source : Page Facebook de Southwest Chelsea :

facebook.com/SWChelseaNYC.

89

LISTE DES SIGLES

BID : Business Improvement District

CBD : Central Business District

DOT : Department Of Transportation

LQC : Lighter, Quicker, Cheaper

NYCDOT : New York City Department Of Transportation

PPS : Project for Public Spaces

90

TABLES DES MATIERES

INTRODUCTION : REDECOUVERTE DE LA RUE A DIMENSION HUMAINE ---------------------------------------- 13

1 – QUELLE IDENTITE POUR LA RUE NEW-YORKAISE? -------------------------------------------------------------------- 19

1.1 – ENTRE DECLIN ET PENSEE NOUVELLE -------------------------------------------------------------------------------- 20

Le modèle urbain New-Yorkais des années 1930 à 1970. --------------------------------------------------------- 20

Le retour à la rue, ou la vision de Jane Jacobs ---------------------------------------------------------------------- 23

1.2 – EVOLUTION DU ROLE DE LA RUE ------------------------------------------------------------------------------------ 25

La rue comme support du cadre de vie: « New York City Streets Renaissance » ------------------------ 26

La rue et ses nouveaux enjeux --------------------------------------------------------------------------------------------- 28

1.3 – LIVABLE STREET : UNE NOUVELLE VISION POUR NEW YORK ------------------------------------------------------- 30

Un volonté politique forte ---------------------------------------------------------------------------------------------------- 30

Ré-imaginer l’espace public de la rue ---------------------------------------------------------------------------------- 32

Conclusion partielle ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 38

2 – REVITALISER LA RUE AVEC LE CONCEPT DE PLACEMAKING --------------------------------------------------- 39

2.1 – « PLAZA PROGRAM » : UN OUTIL AU SERVICE DU PLACEMAKING ----------------------------------------------- 40

La dynamique d’un partenariat public – privé ----------------------------------------------------------------------- 41

Implication continue de l’ensemble des acteurs -------------------------------------------------------------------- 42

De temporaire à permanent ------------------------------------------------------------------------------------------------ 43

Flexibilité des aménagements ---------------------------------------------------------------------------------------------- 43

2.2 – NEW YORK CITY PUBLIC PLAZAS : « PLACEMAKING ÉVALUATION » -------------------------------------------- 44

Approche et objectif de l’évaluation ----------------------------------------------------------------------------------- 45

Méthodologie employée ---------------------------------------------------------------------------------------------------- 46

Retranscription des résultats ------------------------------------------------------------------------------------------------- 49

2.3 – LA RUE, DES DESTINATIONS – RESULTATS DE L’EVALUATION ------------------------------------------------------ 49

Comment les plazas fonctionnent-elles ? ------------------------------------------------------------------------------ 50

La perception des utilisateurs et des commerçants ---------------------------------------------------------------- 57

Propositions d’amélioration basées sur les principes du placemaking et de PPS. ----------------------- 60

Conclusion partielle ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 64

91

3 – QUEL AVENIR POUR LA RUE ? ------------------------------------------------------------------------------------------------ 65

3.1 – CHANGEMENT DE REGARD SUR LA RUE ---------------------------------------------------------------------------- 66

Acceptation du projet -------------------------------------------------------------------------------------------------------- 66

Appropriation du lieu ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- 66

Animation des plazas ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- 67

3.2 – VERS UNE PRIVATISATION DE LA RUE? ------------------------------------------------------------------------------ 68

Limite du partenariat public / privé --------------------------------------------------------------------------------------- 68

Clés pour appréhender correctement les challenges de la privatisation dans un programme

comme le « Plaza Program ». ----------------------------------------------------------------------------------------------- 71

3.3 – DES CONCEPTS TRANSPOSABLES ? --------------------------------------------------------------------------------- 72

Programme communautaire : un outil au service de la communauté ------------------------------------- 73

Business Improvement District : une nouvelle forme de gouvernance pour améliorer l’espace

public -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 74

« Lighter, Quicker, Cheaper » : l’innovation, la tentative --------------------------------------------------------- 77

Conclusion partielle ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 79

CONCLUSION GENERALE ------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 81

Bibliographie ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 85

Table des illustrations ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 86

Crédits photographiques ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- 88

Liste des sigles --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 89

Tables des matières------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 90

Table des annexes -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 92

92

TABLE DES ANNEXES

Annexe n°1 : User analysis

Outil élaboré dans le cadre de l’évaluation New York City Public Plaza –

Placemaking evaluation.

P93 / Accès web / CDROM : Annexe n°1

Annexe n°2 : Comptage

Outil élaboré dans le cadre de l’évaluation New York City Public Plaza –

Placemaking evaluation.

P94 / Accès web / CDROM : Annexe n°2

Annexe n°3 : Enquête utilisateurs

Outil élaboré dans le cadre de l’évaluation New York City Public Plaza –

Placemaking evaluation.

P95 / Accès web / CDROM : Annexe n°3

Annexe n°4 : Enquête commerçants

Outil élaboré dans le cadre de l’évaluation New York City Public Plaza –

Placemaking evaluation.

P95 / Accès web / CDROM : Annexe n°4

Annexe n°5 : Bogardus Plaza – Placemaking Evaluation - Individual Sheet

Rapport d’évaluation, Project for Public Spaces (Rédigé et illustré par

Michaelle Policard), Juin 2012.

Accès web / CDROM : Annexe n°5

Annexe n°6 : Chelsea Plaza – Placemaking Evaluation - Individual Sheet

Rapport d’évaluation, Project for Public Spaces (Rédigé et illustré par

Michaelle Policard), Juin 2012.

Accès web / CDROM : Annexe n°6

Annexe n°7 : Pearl Plaza – Placemaking Evaluation - Individual Sheet

Rapport d’évaluation, Project for Public Spaces (Rédigé et illustré par

Michaelle Policard), Juin 2012.

Accès web / CDROM : Annexe n°7

Annexe n°8 : Whitehall-Water Plaza – Placemaking Evaluation - Individual Sheet

Rapport d’évaluation, Project for Public Spaces (Rédigé et illustré par

Michaelle Policard), Juin 2012.

Accès web / CDROM : Annexe n°8

Annexe n°9 : Union Square North Plaza – Placemaking Evaluation - Individual Sheet

Rapport d’évaluation, Project for Public Spaces (Rédigé et illustré par

Michaelle Policard), Juin 2012.

Accès web / CDROM : Annexe n°9

Annexe n°10 : New York City Public Plaza – Placemaking evaluation

Compte rendu d’évaluation, Project for Public Spaces (Rédigé et illustré par

Michaelle Policard), Juin 2012.

Accès web / CDROM : Annexe n°10

93

Annexe n°1 : User analysis

Accès web / CDROM : Annexe n°1

94

Annexe n°2 : Comptage

Accès web / CDROM : Annexe n°2

95

Annexe n°3 : Enquête utilisateur

Accès web / CDROM : Annexe n°3

96

Annexe n°4 : Enquête commerçants

Accès web / CDROM : Annexe n°4