Nouvelles technologies et évaluation de la sécurité chimique

Embed Size (px)

Citation preview

N ouvelles

techNologies et valuatioN

de la scurit chimiqueLe comit dexperts sur les tests intgrs pour les pesticides

Le savoir au service du public

Nouvelles techNologies et valuatioN de la scurit chimique Le comit dexperts sur les tests intgrs pour les pesticides

ii

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

le coNseil des acadmies caNadieNNes 180, rue elgin, ottawa (ontario) canada K2P 2K3 AVIS : Le projet sur lequel porte ce rapport a t entrepris avec lapprobation du conseil des gouverneurs du Conseil des acadmies canadiennes (CAC). Les membres de ce conseil des gouverneurs sont issus de la Socit royale du Canada (SRC), de lAcadmie canadienne du gnie (ACG) et de lAcadmie canadienne des sciences de la sant (ACSS), ainsi que du grand public. Les membres du comit dexperts responsable du rapport ont t choisis par le CAC en raison de leurs comptences spcifiques et en vue dobtenir un quilibre des points de vue. Ce rapport a t prpar pour le gouvernement du Canada la demande du ministre de la Sant, qui a dpos une requte cet effet au nom de lAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire et par lintermdiaire du ministre de lIndustrie. Les opinions, constatations, conclusions et recommandations prsentes dans cette publication sont celles de leurs auteurs, savoir des membres du comit dexperts sur les tests intgrs pour les pesticides, et ne reprsentent pas ncessairement la position des organismes auxquels ils sont affilis ou dont ils sont employs. Catalogage avant publication de Bibliothque et Archives Canada Conseil des acadmies canadiennes. Comit dexperts sur les tests intgrs pour les pesticides Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique [ressource lectronique]/ Comit dexperts sur les tests intgrs pour les pesticides. Publ. aussi en anglais sous le titre: Integrating emerging technologies into chemical safety assessment. Comprend des rf. bibliogr. et un index. Monographie lectronique en format PDF. Publ. aussi en format imprim. ISBN 978-1-926558-40-0 1. Pesticides Toxicit. 2. Pesticides Politique gouvernementale Canada. I. Titre. SB959.6.C6814 2012 632.95 C2011-907918-6

Avis de non-responsabilit : Les donnes et informations tires du rseau Internet qui figurent dans le prsent rapport taient exactes, notre connaissance, la date de publication du rapport. En raison de la nature dynamique du rseau, les ressources qui sont gratuites et accessibles au public peuvent par la suite faire lobjet de restrictions daccs ou exiger des frais, et lemplacement des lments dinformation peut changer lorsque les menus et le contenu des sites font lobjet de modifications. 2012 Conseil des acadmies canadiennes Imprim Ottawa, Canada

Cette valuation a t rendue possible grce au soutien du gouvernement du Canada.

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

iii

le conseil des acadmies canadiennesLe savoir au service du public

Le Conseil des acadmies canadiennes (CAC) est un organisme indpendant but non lucratif qui soutient des valuations scientifiques, effectues par des experts, qui alimentent llaboration de politiques publiques au Canada. Dirig par un conseil de 12 gouverneurs et conseill par un comit consultatif scientifique de 15 membres, le CAC a pour champ daction la science prise au sens large, qui englobe les sciences naturelles, les sciences humaines, la sant, le gnie et les lettres. Les valuations du CAC sont effectues par des comits pluridisciplinaires indpendants dexperts venant du Canada et de ltranger. Ces valuations visent faire connatre les problmes nouveaux, les lacunes des connaissances, les points forts du Canada, de mme que les tendances et les pratiques internationales dans les domaines tudis. Ces tudes fournissent aux dcideurs gouvernementaux, aux universitaires et aux parties prenantes linformation de grande qualit dont ils ont besoin pour laborer des politiques publiques claires et innovatrices. Toutes les valuations du CAC subissent un examen formel par des pairs. Elles sont publies en franais et en anglais, et accessibles au public sans frais. Des fondations, des organismes non gouvernementaux, le secteur priv ou tout palier de gouvernement peuvent soumettre au CAC des questions susceptibles de faire lobjet dvaluations. Le CAC bnficie du soutien de ses trois acadmies membres fondatrices : La Socit royale du Canada (SRC) est le principal organisme regroupant dminents scientifiques, chercheurs et gens de lettres au Canada. La SRC a pour objectif premier de promouvoir lacquisition du savoir et la recherche en arts et en sciences. Elle est compose de prs de 2000 membres, hommes et femmes, choisis par leurs pairs pour leurs ralisations exceptionnelles en sciences naturelles, en sciences humaines et en arts. La SRC sattache reconnatre lexcellence, conseiller les gouvernements et les organisations, ainsi qu promouvoir la culture canadienne. LAcadmie canadienne du gnie (ACG) est lorganisme national par lentremise duquel les ingnieurs les plus chevronns et expriments du Canada offrent au pays des conseils stratgiques sur des enjeux dimportance primordiale. LACG est un organisme indpendant, autonome et but non lucratif qui a t fond en 1987. Les membres de lACG sont nomms et lus par leurs pairs titre de membres honoraires, en fonction de leurs ralisations exceptionnelles et de leurs longs tats de service au sein de la profession dingnieur. Les membres

iv

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

de lACG sengagent faire en sorte que les connaissances expertes en gnie du Canada soient appliques pour le plus grand bien de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes. LAcadmie canadienne des sciences de la sant (ACSS) reconnat des personnes qui ont leur actif de grandes ralisations savantes dans le domaine des sciences de la sant au Canada. LACSS fournit en temps voulu des valuations claires et indpendantes sur des questions urgentes qui touchent la sant des Canadiens et des Canadiennes. De plus, lACSS reprsente le Canada au sein de lInterAcademy Medical Panel (IAMP), consortium mondial dacadmies nationales des sciences de la sant qui vise allger le fardeau des soins de sant des peuples les plus pauvres du monde, renforcer les capacits scientifiques dans le domaine de la sant, ainsi qu fournir aux gouvernements nationaux et aux organisations internationales des avis scientifiques indpendants sur la promotion des sciences de la sant et sur les politiques de soins de sant.

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

v

le comit dexperts sur les tests intgrs pour les pesticidesLeonard Ritter (prsident) Directeur gnral, Rseau canadien des centres de toxicologie; professeur de toxicologie, Universit de Guelph, Guelph (Ontario) Christopher P. Austin Directeur, Centre de gnomique chimique, Instituts nationaux de la sant (NIH) des tats-Unis, Bethesda (Maryland) John R. (Jack) Bend Professeur distingu, Dpartement de pathologie, Dpartement de physiologie et de pharmacologie, Dpartement de pdiatrie, cole de mdecine et de mdecine dentaire Schulich, Universit Western Ontario, London (Ontario) Conrad G. Brunk Professeur de philosophie, Universit de Victoria, Victoria (Colombie-Britannique) Timothy Caulfield, MSRC, MACSS Professeur, Facult de droit et cole de sant publique, directeur de recherche, Institut du droit de la sant, et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit et en politique de la sant, Universit de lAlberta, Edmonton (Alberta) Vicki L. Dellarco Conseillre scientifique, Bureau des programmes sur les pesticides, Agence amricaine de protection de lenvironnement, Washington (District de Columbia) Paul A. Demers Directeur, cole de sant environnementale, Collge dtudes interdisciplinaires; professeur, cole de sant de la population et de sant publique, Facult de mdecine, Universit de la Colombie-Britannique, Vancouver (Colombie-Britannique) Warren Foster Professeur, Dpartement dobsttrique et de gyncologie, Universit McMaster, Hamilton (Ontario) Claire Infante-Rivard Professeure, Dpartement dpidmiologie, de biostatistique et de sant au travail, Facult de mdecine, Universit McGill, Montral (Qubec) Catherine Jumarie Professeure, Dpartement des sciences biologiques, Universit du Qubec Montral, Montral (Qubec) Sam Kacew Directeur adjoint, Toxicologie, Centre R. Samuel McLaughlin dvaluation du risque sur la sant des populations, Institut de recherche sur la sant des populations, Universit dOttawa, Ottawa (Ontario) Robert J. Kavlock Directeur, Centre national de toxicologie informatise, Agence amricaine de protection de lenvironnement, Durham (Caroline du Nord)

vi

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

Daniel Krewski Directeur, Centre R. Samuel McLaughlin dvaluation du risque sur la sant des populations, Institut de recherche sur la sant des populations, Universit dOttawa, Ottawa (Ontario) Paul G. Mezey Titulaire de la Chaire de recherche du Canada en modlisation et simulation scientifiques, Universit Memorial de Terre-Neuve, St. Johns (Terre-Neuve-et-Labrador) Terry W. Schultz Professeur mrite, Dpartement de mdecine compare, Collge de mdecine vtrinaire, Universit du Tennessee, Knoxville (Tennessee)

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

vii

lettre du prsident du comit dexpertsCe rapport sur les tests intgrs pour les pesticides rsulte des efforts et de la contribution de 15 experts qui ont enrichi cette valuation de leur exprience, de leurs connaissances et de leurs points de vue. Dabord et avant tout, je suis sincrement et profondment reconnaissant envers mes collgues du comit dexperts, qui ont travaill pendant des heures, des jours et des semaines, afin que nos conclusions soient pertinentes, opportunes et claires. Quils sachent que leur dvouement cette tche nest pas pass inaperu. Ce fut un grand plaisir et un immense privilge de diriger un tel groupe de personnes minentes lors de nombreuses discussions animes et dans les bauches du rapport. Je les remercie de mavoir fourni cette occasion. Jai galement une dette de reconnaissance envers le personnel du CAC pour son soutien et son aide, et notamment pour avoir veill ce que nous soyons au bon endroit au bon moment et que nous respections les pratiques et les politiques du CAC. Je voudrais mentionner nommment Renata Osika, Christina McMahon et Michael Tyshenko. Je tiens remercier dune manire toute particulire Maria Trainer, directrice de programme au CAC et principale responsable des travaux du comit dexperts. Ds ma premire rencontre avec elle en rponse linvitation de prsider ce comit, jai t conquis par son enthousiasme et sa fougue. Pendant les dix-huit mois quont dur les travaux du comit, elle a fait preuve dune rare combinaison de talent, dattention, de discipline, ainsi que dune nergie sans borne, pour accomplir une tche colossale. Je sais que mes collgues du comit se joignent moi pour remercier du fond du cur cette jeune scientifique dexception. Enfin, je remercie personnellement Elizabeth Dowdeswell, prsidente du CAC, de sa confiance et de son soutien des plus apprcis. Le prsident du comit dexperts sur les tests intgrs pour les pesticides, Leonard Ritter

viii

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

Personnel responsable du projet au conseil des acadmies canadiennesCoordination de lvaluation : Maria A. Trainer, directrice de programme Christina McMahon, coordonnatrice de programme Renata Osika, directrice de programme Michael G. Tyshenko, rvision du contenu Joanna Ordowaz, rvision stylistique du texte anglais Accurate Communications, conception graphique Benot Thouin, TETRACOMM inc., ralisation de la version franaise Mary-Christine Thouin, TETRACOMM inc., relecture du texte franais

Avec la participation de :

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

ix

examen du rapportCe rapport a t examin, ltat dbauche, par les personnes mentionnes ci-dessous. Celles-ci ont t choisies par le Conseil des acadmies canadiennes (CAC) en raison de la diversit de leurs points de vue, de leurs domaines de spcialisation et de leurs origines dans les secteurs de la recherche, de lentreprise prive, des politiques et des organisations non gouvernementales. Ces examinateurs ont valu lobjectivit et la qualit du rapport. Leurs avis qui demeureront confidentiels ont t pleinement pris en considration par le comit dexperts, et la plupart de leurs suggestions ont t incorpores dans le rapport. Nous navons pas demand ces personnes dapprouver les conclusions du rapport, et elles nont pas vu la version dfinitive du rapport avant sa publication. Le comit dexperts sur les tests intgrs pour les pesticides et le CAC assument lentire responsabilit du contenu dfinitif de ce rapport. Le CAC tient remercier les personnes suivantes davoir bien voulu examiner le rapport : Pierre Ayotte Professeur agrg, Dpartement de mdecine sociale et prventive, et membre de lunit de recherche en sant publique du Centre hospitalier universitaire de Qubec, Universit Laval, Ste-Foy (Qubec) Alan R. Boobis Professeur, Dpartement de mdecine, Collge imprial de Londres, Londres (Royaume-Uni) Gail Charnley Directrice, HealthRisk Strategies, Washington (District de Columbia) Mark Cronin Professeur, cole de pharmacie et de chimie, Universit JohnMoore, Liverpool (Royaume-Uni) Julia Fentem Gestionnaire principale, Centre de la scurit professionnelle et environnementale (SEAC), Unilever, Bedfordshire (Royaume-Uni) Claire A. Franklin Administratrice, The LifeLine Group, Annandale (Virginie) Thomas Hartung Directeur, Centre pour les solutions de rechange aux tests sur les animaux (CAAT), cole Bloomberg de sant publique, Universit JohnsHopkins, Baltimore (Maryland)

x

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

Michael P. Holsapple Directeur gnral, Institut de la sant et des sciences de lenvironnement, Institut international des sciences de la vie (ILSI-HESI), Washington (District de Columbia) Kannan Krishnan Professeur, Dpartement de sant environnementale et sant au travail, Facult de mdecine, Universit de Montral, Montral (Qubec) Martin Stephens Associ de recherche principal, Centre pour les solutions de rechange aux tests sur les animaux (CAAT), Universit Johns-Hopkins, Baltimore (Maryland) Andrew Worth Directeur du projet de toxicologie informatise, Institut pour la sant et la protection des consommateurs, Commission europenne, Ispra (Italie) La procdure dexamen du rapport a t supervise, au nom du conseil des gouverneurs et du comit consultatif scientifique du CAC, par la Dre Judith Hall, professeure de pdiatrie et de gntique mdicale lUniversit de la Colombie-Britannique. Son rle tait de sassurer que le comit dexperts prenne en considration de faon entire et quitable les avis des examinateurs. Le conseil des gouverneurs du CAC nautorise la publication du rapport dun comit dexperts quune fois que la personne responsable du contrle de lexamen du rapport confirme que le rapport satisfait bien aux exigences du CAC. Le CAC remercie la Dre Hall davoir supervis consciencieusement lexamen du rapport. La prsidente-directrice gnrale du Conseil des acadmies canadiennes, Elizabeth Dowdeswell

Rsum

xi

rsumi N tr o d uc t i oN

Les pesticides sont trs utiliss en agriculture, ainsi que pour des applications industrielles comme lentretien de corridors pour les lignes de transport dlectricit ou, jusqu rcemment, de terrains en zone urbaine. Linnocuit des pesticides a fait lobjet dnormment dattention, notamment quant leur utilisation dans les villes et les zones rsidentielles, et de nombreuses provinces ont dj mis en place ou envisagent des restrictions ce sujet. Au Canada, linnocuit des pesticides en gnral et lvaluation de cette innocuit par des organismes gouvernementaux tels que lAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) proccupent de nombreux citoyens sur les plans de la sant et de lenvironnement. Les pesticides sont gnralement forms de deux composantes : un ingrdient actif qui agit contre le parasite vis, ainsi quun mlange de solvants et dadjuvants dans lequel lingrdient actif est dissout et qui favorise souvent son action.In vivo Dans un organisme vivant. Se dit par exemple de tests de toxicit mens sur des modles animaux. In silicio Dans un ordinateur ou par simulation informatique. In vitro Dans un milieu biologique artificiel, lextrieur dun organisme vivant. Point limite dun mcanisme daction Point limite qui peut tre mesur laide dun test conu pour valuer une raction cellulaire ou physiologique donne. Le mcanisme daction prcis dpend du niveau dorganisation biologique auquel le phnomne est observ.

Les ingrdients actifs des pesticides font partie des composs les plus svrement rglements disponibles dans le commerce. Lvaluation toxicologique (tests de laboratoire) dun ingrdient actif suit un protocole semblable celui de lvaluation prclinique de linnocuit dun mdicament. Les donnes toxicologiques sur les pesticides servent valuer les risques cologiques, les risques pour la sant humaine (y compris ceux lis la prsence de rsidus dans les aliments), de mme que les risques lis lexposition professionnelle ou autre. Par contre, cette valuation approfondie des ingrdients actifs contraste avec les donnes exiges propos des autres composantes des pesticides. Ces produits de formulation,

xii

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

ajouts dans les pesticides pour en amliorer les proprits physico-chimiques, en faciliter lutilisation ou en accrotre la stabilit, ne sont gnralement pas soumis une batterie complte de tests de toxicit, et lon dispose souvent de donnes limites leur sujet. Par consquent, un pesticide commercialis contient souvent une combinaison de composs bien documents et dautres sur lesquels peu de donnes sont disponibles. Le degr variable de documentation des composantes dun pesticide reflte la situation de la plupart des produits chimiques industriels. Alors que dnormes quantits de donnes sont disponibles pour certaines substances (p. ex. les ingrdients actifs de pesticides et les mdicaments), on possde trs peu de donnes lheure actuelle, nous narrivons pas sur la grande majorit des produits exploiter de manire efficace les dcouvertes chimiques industriels. En effet, scientifiques pour en dduire des traitements. selon des estimations rcentes, les Nous narrivons pas non plus utiliser donnes de toxicit sont absentes pleinement nos connaissances pour assurer pour 87 % des produits chimiques linnocuit des aliments et des produits commercialiss (voir Hartung, mdicaux. Il nous faut des mthodes du 2009). Mme si des organismes XXIe sicle pour les produits et les problmes de rglementation sintressent du XXIe sicle... cette question partout dans le monde, il est impossible dvaluer La plupart des outils toxicologiques qui linnocuit de milliers de composs servent aux valuations rglementaires font laide des mthodes actuelles de appel de fortes doses administres des tests de toxicit in vivo. Les efforts dharmonisation entre les pays membres de lOrganisation de coopration et de dveloppement conomiques (OCDE) ont conduit la dfinition de jeux de donnes normaliss qui doivent tre soumis avec toute demande dhomologation dun pesticide. Le comit dexperts en a conclu que les pesticides constituent un excellent groupe modle de produits pour llaboration dun plan ou dun cadre dintgration de nouvelles techniques de test dans les mthodes actuelles.animaux ainsi qu des procdures implicites dextrapolation. Ces outils ont relativement peu volu depuis des dcennies, malgr les rvolutions scientifiques du dernier demi-sicle. Pour raliser des conomies de temps et dargent, il nous faut de meilleurs modles prdictifs, afin de cerner les sujets de proccupation plus tt dans le processus de mise au point des produits. Nous devons aussi moderniser les outils qui nous permettent dvaluer les nouveaux risques potentiels lis lexposition aux aliments et dautres produits...

Traduit de Margaret A. Hamburg (commissaire lAdministration des aliments et drogues des tats-Unis), 2010. Advancing regulatory science , Science, vol. 331, no 6020, p. 987.

Rsum

xiii

le c o N te x t e

Traditionnellement, la toxicologie rglementaire fait appel des tudes effectues sur des animaux de laboratoire et des estimations de lexposition humaine pour dfinir les dangers et les risques lis des substances chimiques. Les rgles actuelles concernant les tests des ingrdients actifs des pesticides exigent une batterie de tests considrable, qui produit des donnes sur les effets nocifs potentiels pour une vaste gamme de points limites, chez diverses espces, pour diffrentes expositions, et ce des stades et pour des processus cruciaux de la vie. Les donnes des tests sur des animaux servent dterminer les effets nocifs potentiels et laborer des relations dose-effet que lon combine avec des modles destimation (ou des mesures) de lexposition humaine, afin dobtenir une valuation des risques correspondant divers scnarios dutilisation des pesticides. Depuis plusieurs dcennies, les ingrdients actifs des pesticides ont fait lobjet de tests approfondis, de sorte quils font partie des produits chimiques commercialiss pour lesquels on possde le plus de donnes. Par contre, le schma actuel de test des pesticides est coteux en temps et en argent, et il est donc impossible en pratique de lappliquer aux milliers de substances chimiques que les gouvernements du monde entier doivent maintenant tudier. Il y a donc un cart important entre les besoins et les capacits en matire de tests de toxicit. Pour un grand nombre dentre eux, les tests toxicologiques actuels ont t mis au point il y a plus de trente ans. Comme lensemble de la science, nos connaissances en physiologie ont volu au cours des dernires dcennies. Mais ces progrs ne se sont pas traduits par des modifications la batterie de tests de toxicit exigs pour les dcisions en matire de rglementation (voir Seidle et Stephens, 2009). Beaucoup des tests normaliss utiliss lheure actuelle, mme sils taient jour au moment de leur cration, ... ont relativement peu volu depuis des dcennies, malgr les rvolutions scientifiques du dernier demi-sicle. Pour raliser des conomies de temps et dargent, il nous faut de meilleurs modles prdictifs, afin de cerner les sujets de proccupation plus tt dans le processus de mise au point des produits. Nous devons aussi moderniser les outils qui nous permettent dvaluer les nouveaux risques potentiels lis lexposition aux aliments et dautres produits... (traduit de Hamburg, 2010). De plus, les protocoles traditionnels en toxicologie nont pas t conus pour produire (ou intgrer) des donnes relatives aux mcanismes molculaires et aux voies de signalisation. Les problmes inhrents aux mthodes actuelles sont donc de deux ordres : combler le manque de donnes de toxicit concernant la grande majorit des produits chimiques industriels; reconnatre que les dcisions de rglementation

xiv

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

doivent tre fondes sur les meilleures connaissances scientifiques disponibles. Par consquent, afin de mieux valuer les risques pour la sant humaine, il faut de nouvelles mthodes qui soient davantage prdictives, plus fiables, plus rapides, moins coteuses, et qui donnent des renseignements fonds sur les mcanismes de toxicit de chaque substance. Forte des progrs raliss en sciences de linformation, en biologie (molculaire, cellulaire et des systmes), ainsi que dans la mise au point de tests de criblage haut dbit pour la dcouverte de mdicaments, la toxicologie est en passe dintgrer la connaissance des voies biologiques par lesquelles les produits chimiques exercent des effets nocifs sur la sant. Cela permettra dvaluer un plus grand nombre de substances et de mieux comprendre les proprits toxicologiques intrinsques de divers produits chimiques. En plus de leur application des substances prcises, ces nouvelles mthodes fourniront aussi de nouveaux moyens dvaluer les effets de combinaisons de produits et de nouvelles manires de caractriser lexposition ces produits.aPProches iNtgres eN matire dessais et dvaluatioN

Les approches intgres en matire dessais et dvaluation (en abrg IATA pour Integrated Approaches to Testing and Assessment ) constituent un paradigme fondamentalement nouveau dans le domaine des tests rglementaires de toxicit. Avec les IATA, les tests de toxicit uniformes actuellement exigs pour des substances propos desquelles on dispose de beaucoup de donnes pourraient tre remplacs par une stratgie de tests raffine et cible. Cette stratgie serait adapte au profil de toxicit et lutilisation prvue de chaque produit et serait suffisamment souple pour traiter les nombreuses substances pour lesquelles les donnes de toxicit sont limites ou inexistantes.

IATA : Ensemble progressif de mthodes de collecte de donnes, de test et dvaluation qui intgre divers types de donnes (dont des proprits physico-chimiques et autres proprits chimiques, de mme que des donnes de toxicit in vitro et in vivo). Combines de manire approprie des estimations dexposition, les IATA permettent de prdire les risques. Les substances qui ne conviennent pas sont exclues ds les premires tapes du processus, ce qui diminue le nombre de substances soumises la batterie complte de tests rglementaires. Des hypothses plausibles et vrifiables sont formules sur la base de linformation disponible ou de linformation tire des tests des premires tapes, et seuls des tests cibls sont effectus par la suite. Une substance qui ne satisfait pas aux exigences en matire de toxicit lors des premires tapes est exclue des tapes subsquentes.

Rsum

xv

Fondes sur des hypothses, les IATA peuvent intgrer, de manire transparente et scientifiquement crdible, de nouvelles connaissances dans les tests de toxicit existants. Elles reposent sur une varit doutils et de techniques (in vitro, in vivo et in silicio) afin que les ressources de test soient concentres sur les points limites de toxicit proccupants. La force des IATA rside dans ltendue de linformation utilise pour comprendre le profil toxicologique dun produit chimique. Au bout du compte, lensemble de cette information permet dclairer de manire plus fiable une dcision de rglementation.la q ue s ti oN P os e au cac

En mai 2009, le gouvernement du Canada, par le truchement de lAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Sant Canada, a demand au Conseil des acadmies canadiennes de former un comit dexperts, afin de rpondre la question suivante : Quel est ltat des connaissances scientifiques qui sous-tendent lutilisation de stratgies de tests intgrs pour lvaluation rglementaire des risques humains et environnementaux lis aux pesticides? Le mandat du comit a t prcis dans les sous-questions suivantes 1 : Quel est ltat des connaissances scientifiques en ce qui concerne les outils et les sources de donnes associs des stratgies de tests intgrs? Quel est ltat actuel du recours des stratgies de tests intgrs pour lvaluation des risques des pesticides, produits pharmaceutiques, produits chimiques industriels et autres substances chimiques par des organismes de rglementation dans le monde? Si des stratgies de tests intgrs taient mises en uvre, quelles consquences cela pourrait-il avoir sur la perception et la confiance du public envers lvaluation rglementaire et les dcisions de gestion des risques lis aux pesticides?

1

Mme si lvaluation des risques pour la sant humaine et lvaluation des risques pour lenvironnement ont en commun plusieurs proprits fondamentales, elles prsentent des diffrences substantielles quant leur porte et la philosophie sous-jacente. Par consquent, les comptences requises pour rpondre la question sont trs diffrentes selon que lon adopte le point de vue des risques pour la sant humaine ou celui des risques environnementaux. Pour cette raison, et tant donn son domaine dexpertise, le comit a choisi de sintresser principalement aux mthodes de test qui sont la base de lvaluation des risques pour la sant humaine. Le prsent rapport naborde pas explicitement la comprhension des voies de toxicit en fonction de la biologie des espces vises par les tests dcotoxicit, mais il y a nanmoins des recoupements, et le rapport tente dtablir des liens avec cet aspect lorsque cest possible.

xvi

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

les co N c lus i o N s

Quel est ltat des connaissances scientifiques qui sous-tendent lutilisation de stratgies de tests intgrs pour lvaluation rglementaire des risques humains et environnementaux lis aux pesticides?

Jusqu ce jour, les mthodes de la toxicologie informatise Nous proposons de remplacer les tests (en remplacement des tests in vivo sur des animaux par des tests in vitro, traditionnels sur des animaux) des tests in vivo sur des organismes infrieurs, ont surtout servi soutenir des ainsi que des modles informatiss dvaluation dcisions de rglementation de la toxicit. concer nant des produits Traduit de Francis Collins (alors directeur de lInstitut national chimiques, par exemple des amricain de recherche sur le gnome humain, actuellement produits de formulation de directeur des NIH Instituts nationaux de la sant des tats-Unis), 2008. Toxicology: Transforming environmental pesticides, pour lesquels peu health protection , Science, vol. 319, no 5865, p. 906-907. de donnes taient disponibles. Le comit na pas connaissance dun jeu complet de mthodes qui pourrait aujourdhui remplacer lensemble des tests traditionnels (mme dans le cas de substances pour lesquelles on dispose de peu de donnes), mais ltat de la science volue rapidement. Avec la mise au point de tels outils et mthodes, le comit sattend ce que les stratgies de tests intgrs jouent un rle de plus en plus important dans le processus dcisionnel, avec une adaptation dans le cas des produits pour lesquels il y a beaucoup de donnes. Ajouts aux donnes existantes, ces nouveaux moyens permettront de mieux rpondre aux exigences de la rglementation et aideront assurer la transition vers des tests et valuations fonds sur des hypothses.Quel est ltat des connaissances scientifiques en ce qui concerne les outils et les sources de donnes associs des stratgies de tests intgrs?

Avec les approches intgres en matire dessais et dvaluation (IATA), la toxicologie deviendra davantage pragmatique et consistera moins dcrire ce qui se passe, mais plutt comment cela se passe. Il nexiste toutefois pas dIATA universelle. Toute IATA repose fondamentalement sur lexistence dune voie deffets nocifs (VEN) qui dfinit une relation de cause effet entre des vnements cls survenant divers niveaux dorganisation biologique et un point limite in vivo rglementer. Les progrs de nombreuses disciplines scientifiques contribuent lvolution rapide doutils nouveaux et pertinents. Les domaines de la biologie des systmes et de la toxicologie informatise sont au cur de cette volution.

Rsum

xvii

Les IATA font appel des outils de nombreuses disciplines. Ces outils sont des stades diffrents davancement et voluent constamment. Certains dentre eux utilisent des mthodes calculatoires pour exploiter des donnes de toxicit existantes; dautres mettent laccent sur la production de nouvelles donnes laide de diverses mthodes fondes sur les progrs rapides de la biologie des systmes. Un engagement concret de la part des organismes de rglementation lchelle internationale, ainsi que des tudes de validation de principe permettant de connatre les nouvelles mthodes et de leur faire confiance, feront en sorte que ces outils deviendront plus acceptables et applicables dans un contexte de rglementation. Au cours des cinq dernires annes, dimportants efforts de recherche ont t consacrs llaboration de mthodes et de modles de toxicologie prdictive et de solides tudes de validation de principe. Ces dernires tudes ont mis en lumire limportance de donnes exhaustives sous forme lectronique et ont dmontr la valeur des donnes patrimoniales dans lvolution de la toxicologie prdictive. Grce ces tudes, on peut maintenant se servir doutils dIATA pour prdire des points limites de toxicit aigu. Dautres outils dIATA permettant dvaluer des effets locaux critiques seront probablement disponibles dans un avenir rapproch (dici un deux ans). La dtermination de points limites long terme (cancrognicit, toxicit pour la reproduction) sans recourir des animaux pose des dfis plus importants. Il faudra probablement attendre au moins une dcennie avant que de telles mthodes soient utilisables dans un contexte de rglementation. On peut galement recourir des outils dIATA dans un contexte de rglementation pour combler les lacunes des donnes disponibles sur certains produits chimiques. lheure actuelle, les dcisions de rglementation concernant ces produits sont prises partir de peu de (ou sans) donnes primaires.Quel est ltat actuel du recours des stratgies de tests intgrs pour lvaluation des risques des pesticides, produits pharmaceutiques, produits chimiques industriels et autres substances chimiques par des organismes de rglementation dans le monde?

Il y a un certain nombre dexemples dutilisation de composantes dIATA dans un contexte de rglementation de produits chimiques industriels et de produits pour les soins personnels. Par contre, on ne connat aucun cas de dploiement hirarchique complet dIATA dans un contexte de rglementation.

xviii

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

Le comit prvoit que le dploiement de stratgies dIATA dans un contexte de rglementation dpendra du type de produit chimique et de la nature du processus dcisionnel. Dans les cas o peu de donnes sont disponibles, le manque de donnes lappui dhypothses rationnelles sur un potentiel toxicologique plausible pourrait susciter ladoption dune nouvelle approche. Les substances pour lesquelles on possde beaucoup de donnes sont dj soumises une batterie complte de tests de toxicit. La pertinence de nouvelles mthodes pourrait donc tre plus longue tablir et dpendre de la confiance envers ces mthodes. Mme si ladoption de stratgies dIATA peut affiner et simplifier les tests de ces produits chimiques et augmenter la fiabilit des rsultats, le comit ne prvoit pas dans leur cas un dploiement important des IATA court terme. Les IATA sont fondes sur lutilisation de toutes les donnes disponibles afin de dterminer les lacunes des connaissances et clairer le processus dcisionnel. La notion dIATA reposant sur une comprhension des mcanismes biologiques qui expliquent les effets toxicologiques pourrait rsulter en une stratgie de test plus efficace, qui nexigerait pas dvaluer laide dun test in vivo tous les points limites de toutes les substances. En raison de la nature dynamique des La raison pour laquelle de nouveaux IATA, il faut une nouvelle approche concepts, peu importe le domaine de llaboration et de lapprobation scientifique, sont difficiles saisir est rglementaire de tests. Les mthodes toujours la mme : les scientifiques de remplacement (quelles reposent daujourdhui essaient de les reprsenter ou non sur des tests) ciblent partir dides du pass. gnralement des ractions cellulaires ou physiologiques prcises et excluent Traduit de Freeman Dyson, 1958. de ce fait une validation un pour un laide de donnes obtenues in vivo. La mthode des voies deffets nocifs (VEN) permet dutiliser un ensemble de modles ou de tests (et les bases de donnes qui en rsultent) visant des tapes donnes dune voie spcifique. Chaque test ou donne dun ensemble dinformation est utilis au cours de la prochaine tape dune IATA ou dans le cadre dune stratgie globale de tests intgrs. La justification scientifique dune mthode de remplacement doit donc mettre laccent sur la relation entre les rsultats dun test et ce que lon connat dune VEN sur le plan biologique. Le comit estime donc que la validation scientifique dune nouvelle mthode de test doit reposer sur une comprhension de la VEN biologique ou du mode daction (MA) de la substance. Des tests de remplacement seraient donc valids au regard de points

Rsum

xix

limites lis des mcanismes daction et non au regard dun protocole in vivo actuel qui pourrait ne pas prdire de manire valable les effets nocifs dans des populations humaines. Llaboration de tests doit reposer sur une collaboration fonctionnelle entre organismes de rglementation et scientifiques, afin que les tests soient mis au point en fonction des besoins. Avant dtre approuve, toute nouvelle mthode doit faire lobjet dune valuation et dun examen par des pairs quant ses hypothses, sa pertinence, sa fiabilit, sa sensibilit et sa spcificit. Paralllement cela, il faut renforcer les capacits du milieu de la rglementation, afin que ses acteurs soient laise avec les concepts scientifiques qui sous-tendent les nouveaux tests et quils soient familiariss avec les donnes rsultant de ces tests.Si des stratgies de tests intgrs taient mises en uvre, quelles consquences cela pourrait-il avoir sur la perception et la confiance du public envers lvaluation rglementaire et les dcisions de gestion des risques lis aux pesticides?

De telles consquences ne font aucun doute. Une question majeure qui sera souleve par la mise en uvre des nouveaux outils dIATA dans le systme de rglementation sera de savoir si ces modifications amlioreront la capacit de dterminer les risques les plus importants pour la sant humaine et pour lenvironnement ou si elles compromettront cette capacit au profit dautres valeurs sociales et conomiques. Le public exigera probablement lassurance que les nouvelles mthodes diminuent de manire gnrale les incertitudes dans lvaluation des risques chimiques et que, lorsque de nouvelles incertitudes sont introduites, elles sont traites avec au moins autant de prcautions que dans le systme actuel (voir le chapitre 5). Le grand public est particulirement proccup par les risques lis aux pesticides chimiques, et les modifications des processus rglementaires soulveront coup sr des inquitudes. Les organismes de rglementation devront assurer au public que ces modifications visent fournir des valuations plus fiables des risques pour la sant et pour lenvironnement plutt qu simplifier les processus et sacrifier la scurit au profit de bnfices sociaux ou conomiques. Mme si le grand public ne comprend pas en profondeur les forces et les faiblesses du systme actuel dvaluation des risques chimiques, les parties prenantes concernes valueront probablement tout changement au regard de cet talon

xx

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

historique, peu importe ses limites intrinsques. Les organismes de rglementation devront probablement aborder les questions suivantes : Les nouveaux outils dIATA vont-ils complter (et donc renforcer) le systme actuel ou vont-ils le remplacer? Quelles incertitudes scientifiques du systme actuel de gestion des produits chimiques sont diminues par la mise en uvre de nouveaux outils dIATA? Quelles incertitudes nouvelles sont introduites par le recours ces outils? Comment les modifications des incertitudes scientifiques seront-elles traites dans le processus de rglementation? Les marges de scurit actuellement utilises dans le systme de tests de toxicit in vivo seront-elles rduites? Les normes de scurit relatives certains types de produits chimiques serontelles abaisses? Le comit est davis que les nouveaux outils dIATA peuvent et doivent tre introduits dans le systme de rglementation uniquement titre de moyens supplmentaires. Il est aussi davis que cela peut se faire dune manire qui augmente la capacit du systme de dterminer de faon plus fiable les risques les plus importants, notamment dans le cas des produits chimiques pour lesquels on dispose de peu de donnes. Cette faon de faire permettra de rpondre aux proccupations du public rsumes ci-dessus dune manire qui maintiendra, et mme renforcera, la confiance du public envers la rglementation des pesticides chimiques. La transparence est cruciale pour btir la confiance du public envers le systme de rglementation au moment de la mise en uvre doutils dIATA. Il est important dexpliquer lutilisation des nouveaux outils avec le plus de clart et de prcision possible, et de montrer distinctement comment les nouvelles certitudes et incertitudes scientifiques seront traites.

Rsum

xxi

s yN th s e

Tous les modles sont errons,

Selon des estimations rcentes, les donnes mais certains sont utiles. de toxicit sont absentes pour 87 % des Traduit de George Box, 1987. produits chimiques commercialiss (voir Hartung, 2009). Alors que linnocuit de certains produits chimiques tels que les ingrdients actifs des pesticides sappuie sur une quantit considrable de donnes toxicologiques qui ont grandement contribu notre comprhension de la toxicologie de ces produits, il est impossible en pratique dtudier de la mme manire les dizaines de milliers de substances que les agences de rglementation du monde entier doivent maintenant catgoriser. Par consquent, les possibilits de test de toxicit sont loin de combler les attentes, et il y a un besoin urgent de nouvelles mthodes qui soient davantage prdictives, plus fiables, plus rapides, moins coteuses, et qui donnent des renseignements fonds sur les mcanismes de toxicit de chaque substance, afin de mieux valuer les risques pour la sant humaine. En mai 2009, lAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Sant Canada, a demand au Conseil des acadmies canadiennes de former un comit dexperts pour rpondre la question suivante : Quel est ltat des connaissances scientifiques qui sous-tendent lutilisation de stratgies de tests intgrs pour lvaluation rglementaire des risques humains et environnementaux lis aux pesticides? Mme sil nexiste pas encore de jeu complet de mthodes qui pourrait aujourdhui remplacer lensemble du systme de tests actuel, la science progresse rapidement et le comit sattend une volution gnrale vers le recours des stratgies de tests intgrs dans le processus dcisionnel. Il prvoit aussi que, au cours des 2 10 prochaines annes, cela clairera mieux les dcisions concernant les produits chimiques, peu importe la quantit de donnes que lon possde leur sujet. Le comit prvoit que le dploiement de stratgies dapproches intgres en matire dessais et dvaluation (IATA) dans un contexte de rglementation dpendra du type de produit chimique et de la nature du processus dcisionnel. Les risques potentiels associs lexposition des pesticides sont dj une source de beaucoup dinquitude pour bien des gens, et il est presque certain que ladoption de nouvelles stratgies dIATA dans les processus de rglementation soulignera et exacerbera encore davantage ces proccupations. Les organismes de rglementation doivent reconnatre le besoin dinviter le public un vritable dialogue, afin de donner lassurance que non seulement les nouvelles IATA visent diminuer les incertitudes lies lvaluation des risques chimiques, mais que ces changements donneront des valuations plus fiables des risques potentiels pour la sant humaine et lenvironnement, plutt que de seulement simplifier les processus et sacrifier la scurit au profit de bnfices sociaux ou conomiques.

xxii

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

table des matires

1

Introduction ................................................................................xxx

1.1 Le mandat du comit dexperts .......................................................... 1 1.2 Les travaux du comit ........................................................................ 1 1.3 Dfinition du problme abord par le comit .................................... 2 1.3.1 Que sont les approches intgres en matire dessais et dvaluation?...................................................................... 3 1.3.2 Pourquoi les pesticides? ......................................................... 3 1.3.3 Pourquoi maintenant? ........................................................... 5 1.4 Structure du prsent rapport .............................................................. 62 Approche actuelle des tests et de lvaluation des risques dans un cadre rglementaire .....................................7

2.1 Brve introduction aux tests et la rglementation sur les pesticides ............................................................................... 10 2.1.1 Limportance de la rglementation ...................................... 11 2.1.2 Comptences concernant la rglementation des pesticides au Canada ..................................................... 12 2.2 Collaboration internationale en matire de rglementation des pesticides ...................................................... 20 2.2.1 LOrganisation de coopration et de dveloppement conomiques .......................................... 21 2.2.2 LOrganisation des Nations Unies ....................................... 22 2.2.3 LAutorit europenne de scurit des aliments................... 25 2.2.4 Le Groupe de travail technique de lAccord de libre-change nord-amricain sur les pesticides .............. 25 2.2.5 Le rle du Canada dans la collaboration internationale en matire de rglementation des pesticides ........................ 26 2.3 valuation et gestion des risques lis aux pesticides ......................... 26 2.3.1 valuation des risques lis aux pesticides au Canada .......... 30 2.4 Le systme actuel de tests de toxicit................................................ 33

Table des matires

xxiii

2.5 Critique du systme actuel de tests de toxicit ................................. 38 2.5.1 Prdictivit et pertinence pour ltre humain ...................... 39 2.5.2 Incapacit valuer des mlanges de produits chimiques .......................................................... 41 2.5.3 Couverture limite de lunivers des produits chimiques prsents dans lenvironnement............................ 44 2.5.4 Le dfi des donnes pidmiologiques ................................. 44 2.5.5 Incapacit valuer effectivement les mcanismes de toxicit ............................................................................ 51 2.5.6 Effets endocriniens possibles des produits chimiques prsents dans lenvironnement............................................. 52 2.5.7 Valeur des analyses rtrospectives des stratgies de tests actuelles................................................................... 54 2.5.8 Rsum du systme actuel de rglementation ..................... 55 2.6 Approches intgres en matire dessais et dvaluation .................. 563 Outils et sources de donnes associs des stratgies de tests intgrs .........................................................61

3.1 Introduction aux approches intgres en matire dessais et dvaluation .................................................................................. 65 3.2 Ltat des connaissances scientifiques en matire de nouvelles mthodes de test .......................................................... 68 3.2.1 Voie deffets nocifs (VEN) .................................................... 70 3.2.2 Approche fonde sur le mode daction (MA) ....................... 75 3.2.3 Mieux comprendre les ractions biologiques : biologie des systmes et biologie calculatoire ....................... 78 3.2.4 Toxicologie informatise ...................................................... 88 3.3 Ltat des connaissances scientifiques en matire de nouveaux outils de test et de sources de donnes ........................ 96 3.3.1 Le seuil de proccupation toxicologique .............................. 96 3.3.2 Relations structure-activit et catgorisation des produits chimiques ........................................................ 99 3.3.3 Modles pharmacocintiques fonds sur la physiologie ......... 112 3.3.4 Criblage haut dbit (HTS) pour les tests rglementaires de toxicit .................................................. 116 3.3.5 Cration de tissus virtuels .................................................. 126

xxiv

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

Rsum des principaux outils de modlisation de la toxicit ...................................................................... 130 3.4 Dfis scientifiques et occasions de recherche .................................. 131 3.4.1 laboration de tests in vitro et dHTS ............................... 131 3.4.2 pidmiologie molculaire et dtermination de biomarqueurs appropris .............................................. 135 3.4.3 Ralisation de bases de connaissances intgres et interactives...................................................... 139 3.4.4 Modernisation des pratiques de laboratoire ...................... 140 3.4.5 Validation et approbation de nouvelles mthodes de test......... 142 3.5 Transition vers lavenir ................................................................... 143 3.6 Rsum du chapitre ....................................................................... 1444 Ltat du recours des stratgies de tests intgrs pour lvaluation des risques ....................................................147

3.3.6

4.1 Applications actuelles des IATA au Canada, aux tats-Unis et en Europe ................................................................. 149 4.1.1 Le Canada ......................................................................... 150 4.1.2 LUnion europenne .......................................................... 155 4.1.3 Les tats-Unis ................................................................... 164 4.1.4 Utilisations actuelles du seuil de proccupation toxicologique des fins de rglementation dans divers pays ................................................................. 177 4.1.5 Rsum de ltat de mise en uvre des IATA dans la rglementation ...................................................... 181 4.2 Validation scientifique et approbation de tests dIATA .................. 183 4.2.1 Lapproche actuelle de la validation .................................. 183 4.2.2 Des normes fondes sur le rendement au lieu dun remplacement un pour un ......................................... 186 4.3 Rpondre aux besoins des organismes et du processus de rglementation : le besoin dun engagement fonctionnel ..............190 4.3.1 Les trois principaux domaines dactivit de lvaluation des risques chimiques ................................ 190 4.3.2 Limportance dune collaboration fonctionnelle ................ 193 4.3.3 Des mthodes dvaluation pralable aux outils de test de toxicit ............................................................... 195 4.4 Rsum du chapitre ....................................................................... 199

Table des matires

xxv

5

Rpercussions possibles sur la perception et la confiance du public envers lvaluation rglementaire des risques ..................................................................................203

5.1 La perception de ce quest un risque acceptable ............................ 205 5.1.1 Facteurs critiques qui influent sur la perception dun risque acceptable ....................................................... 206 5.1.2 Limportance de la perception des risques ......................... 212 5.2 Consquences en ce qui concerne ladoption doutils dIATA pour lvaluation des risques lis aux pesticides ............................. 213 5.2.1 Bref rappel de lvaluation des outils dIATA par le comit ...................................................................... 214 5.2.2 Profil des risques lis aux pesticides chimiques et de la gestion des risques ..................................................... 215 5.3 Communications dans le contexte de la gestion des risques chimiques ..................................................................... 224 5.4 Rsum du chapitre ....................................................................... 2306 Intgration de nouvelles technologies dans lvaluation de la scurit chimique .........................................232

6.1 Lavenir : volution des IATA, du concept scientifique lapplication dans un contexte de rglementation ....................... 234 6.1.1 tablissement des fondements ncessaires ......................... 236 6.1.2 volution des fondements scientifiques.............................. 238 6.1.3 volution des sources de donnes et des outils .................. 240 6.1.4 Un nouveau rle pour la sant des populations ................. 242 6.1.5 volution du processus de rglementation......................... 244 6.2 volution des IATA : Intgration de la science et de la rglementation ................................................................... 245 6.3 Rsum du chapitre ....................................................................... 246Appendices .........................................................................................247

Appendice A : Glossaire technique ......................................................... 248 Appendice B : Exigences relatives aux tests ............................................ 262Rfrences .........................................................................................268

xxvi

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

sigles et abrviations utiliss dans le rapportAAAS AAC ACIA ACP ACToR ADME ADN AHS ALENA AMD aPAD AR ARLA ARN ARNm ASPC BC BD BPL CASRN CAVB CCA CCRP Ceq CE50 CEVMA CL50 CMEO CODO cPAD CPE CSEO DARf DAVB DAVBi

American Association for the Advancement of Science Association amricaine pour lavancement de la science Agriculture et agroalimentaire Canada Agence canadienne dinspection des aliments Amplification en chane par polymrase Aggregated Computational Toxicology Resource Base de donnes consolide de lEPA sur la toxicit chimique Absorption, distribution, mtabolisme et excrtion Acide dsoxyribonuclique Agricultural Health Study tude sur la sant en milieu agricole aux tats-Unis Accord de libre-change nord-amricain Acceptation mutuelle des donnes Acute Population-Adjusted Dose quivalent de la dose aigu de rfrence pour lEPA Androgen Receptor Rcepteur des andrognes Agence de rglementation de la lutte antiparasitaire Acide ribonuclique Acide ribonuclique messager Agence de la sant publique du Canada Base de connaissances Base de donnes Bonne pratique de laboratoire Chemical Abstract Services Registry Number Numro dinscription du Service des rsums analytiques de chimie Concentration dactivation dune voie biologique Commission du Codex Alimentarius Comit du Codex sur les rsidus de pesticides Concentration ltat dquilibre Concentration efficace mdiane Centre Europen pour la validation de mthodes alternatives Concentration ltale mdiane Concentration minimale avec effet observ Code de donnes Acute Population-Adjusted Dose quivalent de la dose chronique de rfrence pour lEPA Concentration prvue dans lenvironnement Concentration sans effet observ Dose aigu de rfrence Dose daltration dune voie biologique Dose daltration dune voie biologique Borne infrieure de lintervalle de confiance

Abrviations couramment utilises dans ce rapport

xxvii

DCCA DD DJA DMENO DMEO DP DRf DSENO DSEO DSETO DSSTox

Acide (2,2-dichlorovinyl)-2,2-dimthylcyclopropane carboxylique Dbit de dose Dose journalire acceptable Dose minimale avec effet nocif observ Dose minimale avec effet observ Donnes probantes Dose de rfrence Dose sans effet nocif observ Dose sans effet observ Dose sans effet transcriptionnel observ Distributed Structure-Searchable Toxicity Database Rseau de bases de donnes de lEPA sur la toxicit, consultable partir de la structure des molcules European Chemicals Agency ECHA Agence europenne des produits chimiques Endocrine Disruptor Screening Program EDSP Programme de lEPA pour le dpistage des perturbateurs endocriniens Endocrine Disruptor Screening and Testing Advisory Committee EDSTAC Comit consultatif sur le dpistage et les tests de perturbateurs endocriniens European Food Safety Authority EFSA Autorit europenne de scurit des aliments Environmental Protection Agency EPA Agence de protection de lenvironnement des tats-Unis Estrogen Receptor ER Rcepteur des strognes ERE valuation des risques environnementaux ERSH valuation des risques pour la sant humaine ECVAM Scientific Advisory Committee ESAC Comit consultatif scientifique du CEVMA ESB Encphalopathie spongiforme bovine Embryonic Stem cell Test EST Test sur des cellules souches embryonnaires Food and Agricultural Organization FAO Organisation des Nations Unies pour lalimentation et lagriculture Food and Drug Administration FDA Administration des aliments et drogues des tats-Unis Federal Insecticide, Fungicide, et Rodenticide Act FIFRA Loi fdrale amricaine sur les insecticides, les fongicides et les rodenticides FPT Fdral, provincial et territorial FPT-CLAP Comit fdral, provincial et territorial sur la lutte antiparasitaire et les pesticides FTSS Fiche technique sant-scurit FTSSe Fiche technique sant-scurit tendue GTTP Groupe de travail technique sur les pesticides HHG Hypothalamo-hypophyso-gonadique HHT Hypothalamo-hypophyso-thyrodien

xxviii

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

HPTE HTRA HTS IATA ICCVAM

IOMC ITS JECFA JMPR kg LAD LAPI LCPE LEP LIS LLNA LMR LPAP MA MAQT ME mg MS g M NCBI NCGC NHANES NIEHS NIH

2,2-bis-(p-hydroxyphnyl)-1,1,1-trichlorothane High-Throughput Risk Assessment valuation haut dbit des risques High-Throughput Screening Criblage haut dbit Integrated Approaches to Testing and Assessment Approches intgres en matire dessais et dvaluation Interagency Coordinating Committee on the Validation of Alternative Methods Comit de coordination interagences du gouvernement des tats-Unis sur la validation des mthodes alternatives Inter-Organization Programme for the Sound Management of Chemicals Programme interorganisations pour la gestion rationnelle des produits chimiques Integrated Testing Strategies Stratgies de tests intgrs Joint FAO/WHO Expert Committee on Food Additives Comit mixte FAO/OMS dexperts des additifs alimentaires Joint FAO/WHO Meeting on Pesticide Residues Runion conjointe de la FAO et de lOMS sur les rsidus de pesticides Kilogramme Loi sur les aliments et drogues Lutte antiparasitaire intgre Loi canadienne sur la protection de lenvironnement Loi sur les espces en pril Liste intrieure des substances Test du ganglion lymphatique local Limite maximale de rsidu Loi sur les produits antiparasitaires Mode daction Matire active de qualit technique Marge dexposition Milligramme Marge de scurit Microgramme Micromole National Center for Biotechnology Information Centre national dinformation en biotechnologie des tats-Unis NIH Chemical Genomics Center Centre de gnomique chimique des NIH National Health and Nutrition Examination Survey Programme national dtudes sur ltat de sant et ltat nutritionnel de la population des tats-Unis National Institute of Environmental Health Sciences Institut national des sciences de la sant environnementale des tats-Unis National Institutes of Health Instituts nationaux de la sant des tats-Unis

Abrviations couramment utilises dans ce rapport

xxix

NRC NTP OCDE OIT OMS ONG ONU PAP PBT PC PCFP PGPC PISSC PMN p.p. 106 p.p. 109 qHTS R(Q)SA REACH RSA RSAB RSC SE SGH SGP SMILES SPT TR TSCA UE UV VEN vMCJ VTG

National Research Council Conseil national de recherche des tats-Unis National Toxicology Program Programme national de toxicologie des tats-Unis Organisation de coopration et de dveloppement conomiques Organisation internationale du travail Organisation mondiale de la sant Organisme non gouvernemental Organisation des Nations Unies Produit antiparasitaire Polybrominated terphenyl Terphnyle polybrom Physicochimique Pharmacocintique fonde sur la physiologie Plan de gestion des produits chimiques Programme international sur la scurit des substances chimiques PreManufacturer Notification Avis pralable du fabricant Partie par million Partie par milliard Quantitative High-Throughput Screening Criblage quantitatif haut dbit Relation (quantitative) structure-activit Rglement sur lenregistrement, lvaluation, lautorisation et les restrictions des substances chimiques Relation structure-activit Relation structure-bioactivit Rapport sur la scurit chimique Scnario dexposition Systme gnral harmonis Sous-groupe sur les pesticides Simplified Molecular Input Line Entry Specification Spcification linaire simplifie de molcules Seuil de proccupation toxicologique Thyroid Hormone Receptor Rcepteur de lhormone thyrodienne Toxic Substances Control Act Loi des tats-Unis sur le contrle des substances toxiques Union europenne Rayons ultraviolets Voie deffets nocifs Variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob Vitellognine

xxx

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

1introduction Lemandatducomitdexperts Lestravauxducomit D finitionduproblmeabord par le comit Structureduprsentrapport

Chapitre 1 Introduction

1

1

introduction

Les pesticides sont trs utiliss en agriculture, ainsi que pour des applications industrielles comme lentretien de corridors pour les lignes de transport dlectricit ou, jusqu rcemment, de terrains en zone urbaine. Linnocuit des pesticides a fait lobjet dune attention mondiale, notamment dans les villes. Elle est le sujet de centaines de rapports scientifiques publis, de nombreuses confrences internationales et dexamens par des experts dorganismes internationaux respects tels que lOrganisation mondiale de la sant. Elle relve en outre de la responsabilit juridique de nombreux gouvernements nationaux. Au Canada, lvaluation de linnocuit des pesticides par des organismes gouvernementaux de rglementation tels que lAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) est une question importante pour de nombreux citoyens.1 .1 le m aNdat du com i t dex Perts

En mai 2009, le gouvernement du Canada, par le truchement de lAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Sant Canada, a demand au Conseil des acadmies canadiennes (CAC) de former un comit dexperts ( le comit ) afin de rpondre la question suivante : Quel est ltat des connaissances scientifiques qui sous-tendent lutilisation de stratgies de tests intgrs pour lvaluation rglementaire des risques humains et environnementaux lis aux pesticides? Le mandat du comit a t prcis dans les sous-questions suivantes : Quel est ltat des connaissances scientifiques en ce qui concerne les outils et les sources de donnes associs des stratgies de tests intgrs? Quel est ltat actuel du recours des stratgies de tests intgrs pour lvaluation des risques des pesticides, produits pharmaceutiques, produits chimiques industriels et autres substances chimiques par des organismes de rglementation dans le monde? Si des stratgies de tests intgrs taient mises en uvre, quelles consquences cela pourrait-il avoir sur la perception et la confiance du public envers lvaluation rglementaire et les dcisions de gestion des risques lis aux pesticides?1 .2 le s t r avau x du com i t

Pour rpondre la question qui lui a t pose, le CAC a constitu un comit dexperts provenant du Canada et des tats-Unis. Ses membres sont des spcialistes minents des sciences de la vie ainsi que des aspects pertinents de linformatique, de lthique, du droit, de lvaluation des risques et des politiques publiques.

2

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

Le comit a tenu six runions doctobre 2009 avril 2011. Il a men ses travaux en tenant compte de trs nombreuses publications pertinentes. Il a aussi demand lavis dune grande varit dintervenants, sous forme de mmoires ou loccasion de consultations. Le comit a examin les donnes probantes fournies par ces groupes et les a prises en considration dans ses dlibrations. Il a en outre tenu compte dune valuation de ltat de la question ltranger. Comme pour toutes les valuations menes par le CAC, lbauche du rapport du comit a fait lobjet dun processus rigoureux dexamen par 11 spcialistes dont les domaines dexpertise correspondaient ceux du comit et dont les membres du comit ne connaissaient pas lidentit.1.3 d fi N i ti o N du P rob l m e ab ord Par le c omit

Le domaine de la toxicologie se distingue par le fait quil chevauche deux mondes dont les philosophies fondamentales sont presque diamtralement opposes et qui fonctionnent sous des contraintes trs diffrentes. En tant que discipline de recherche, la toxicologie fondamentale repose sur des analyses rationnelles et des jugements techniques. Elle cherche nous faire mieux comprendre les relations entre exposition et effets, grce un processus itratif fond sur des hypothses. Lincertitude est inhrente ce domaine et constitue la base des recherches subsquentes mener. Par contre, la toxicologie rglementaire recherche une certitude prdictive prescrite par le processus lgislatif, afin dclairer le processus dcisionnel en matire de rglementation et de protger la sant du public. En toxicologie rglementaire, les recherches dcoulent souvent de problmes multidimensionnels et sont dictes par des processus lgislatifs et politiques. La toxicologie rglementaire joue depuis plusieurs dcennies un rle important dans la gestion des produits chimiques ainsi que dans la protection de la sant humaine et de lenvironnement. Dans ce contexte, le terme produits chimiques englobe une grande varit de substances qui pourraient tre absorbes par des organismes vivants et qui constituent un risque pour la sant; ce sont entre autres les produits pharmaceutiques, les produits chimiques industriels et les produits utiliss en agriculture. Les donnes produites lors des tests rglementaires de toxicit alimentent une valuation des risques qui doit tenir compte la fois de la sant humaine et de facteurs environnementaux. Mme si lvaluation des risques pour la sant humaine et lvaluation des risques pour lenvironnement ont en commun plusieurs proprits fondamentales, elles prsentent des diffrences substantielles quant leur porte et la philosophie sous-jacente. Par consquent, les comptences requises pour rpondre la question sont trs diffrentes selon que lon adopte le point de

Chapitre 1 Introduction

3

vue des risques pour la sant humaine ou celui des risques environnementaux. Pour cette raison et tant donn son domaine dexpertise, le comit a choisi de sintresser principalement aux mthodes de test qui sont la base de lvaluation des risques pour la sant humaine. Il fait toutefois remarquer quun effort semblable est ncessaire pour rvaluer les outils de tests actuellement disponibles en cotoxicologie2.1.3.1 Que sont les approches intgres en matire dessais et dvaluation?

Les approches intgres en matire dessais et dvaluation (en abrg IATA pour Integrated Approaches to Testing and Assessment) constituent un paradigme fondamentalement nouveau dans le domaine des tests de toxicit. Avec les IATA, les tests de toxicit uniformes utiliss depuis des dcennies (et prsents plus en dtail au chapitre 2) sont remplacs par une stratgie de tests raffine et cible, adapte au profil de toxicit et lutilisation prvue de chaque produit. Une stratgie dIATA comporte plusieurs tapes; au dbut du processus, on compile toutes les donnes disponibles sur une substance, afin de dterminer les lacunes de ces donnes et les mthodes de test qui seraient les plus appropries pour connatre le profil toxicologique prcis de la substance. Les IATA reposent sur une multitude doutils et de techniques de nombreuses disciplines scientifiques. Leur force rside dans ltendue de linformation utilise pour comprendre le profil toxicologique et dexposition dun produit chimique. Au bout du compte, une dcision de rglementation est claire par lensemble de cette information.1.3.2 Pourquoi les pesticides?

Les ingrdients actifs des pesticides font partie des produits chimiques les plus svrement rglements disponibles dans le commerce. Lvaluation toxicologique (tests de laboratoire) dun ingrdient actif suit un protocole semblable celui de lvaluation prclinique de linnocuit dun mdicament. Les donnes toxicologiques sur les pesticides servent valuer les risques cologiques, les risques pour la sant humaine (y compris ceux lis la prsence de rsidus dans les aliments), de mme que les risques lis lexposition professionnelle qui pourraient rsulter2 Le comit note lexistence dune tude du Conseil national de recherches des tats-Unis, subventionne par lEPA, sur la science de lexposition des tres humains et de lenvironnement des substances au XXIe sicle. Cette tude cherche laborer une vision long terme de cette science ainsi quune stratgie (comportant des objectifs gnraux et spcifiques) de mise en uvre de cette vision au cours des 20 prochaines annes. Pour de plus amples renseignements ce sujet, voir la page http://dels.nationalacademies.org/Study-In-Progress/Human-EnvironmentalExposure-Science/DELS-BEST-09-02.

4

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

de lhomologation au Canada dune telle substance. Par contre, cette valuation approfondie des ingrdients actifs contraste avec les donnes exiges propos des autres composantes des pesticides. Ces produits de formulation, ajouts dans les pesticides pour en amliorer les proprits physico-chimiques, en faciliter lutilisation ou en accrotre la stabilit, ne sont gnralement pas soumis une batterie complte de tests de toxicit, et lon dispose souvent de donnes limites leur sujet. Par consquent, beaucoup de pesticides commercialiss contiennent une combinaison de composs bien documents et dautres sur lesquels peu de donnes sont disponibles. Le degr variable de documentation des composantes dun pesticide reflte la situation de la plupart des produits chimiques industriels. Alors que dnormes quantits de donnes sont disponibles pour certaines substances (p. ex. les ingrdients actifs de pesticides et les mdicaments), il y a trs peu de donnes sur la grande majorit des produits chimiques industriels. En effet, selon des estimations rcentes, les donnes de toxicit sont absentes pour 87 % des produits chimiques commercialiss (voir Hartung, 2009). Mme si des organismes de rglementation commencent sintresser cette question partout dans le monde, on reconnat gnralement que les mthodes actuelles de tests de toxicit in vivo ne permettent pas de satisfaire aux nouvelles exigences de la rglementation en matire de tests3,4. Ces observations ainsi que les efforts dharmonisation entre les pays membres de lOrganisation de coopration et de dveloppement conomiques (OCDE), qui ont conduit la dfinition de jeux de donnes normaliss soumettre avec toute demande dhomologation dun pesticide amnent le comit conclure que les pesticides constituent un excellent groupe modle de produits pour llaboration dun plan ou dun cadre dintgration de nouvelles techniques de test dans les mthodes actuelles. Le comit a dcid de concentrer ses travaux sur trois axes principaux, afin de fournir des opinions claires, fondes sur des donnes probantes, en rponse la question principale et aux sous-questions de son mandat : distinguer autant que possible les produits chimiques selon que lon dispose de beaucoup ou de peu de donnes;3 4 Il aurait t trop long dinclure ici une liste exhaustive des mesures lgislatives et des rapports pertinents, mais un grand nombre dentre eux seront cits tout au long du rapport. Le comit reconnat que lvaluation des ingrdients actifs dun produit antiparasitaire ne constitue pas en soi un goulot dtranglement. Ce sont plutt les autres substances entrant dans la composition des pesticides qui devront faire lobjet dvaluations plus pousses dans lavenir. Il nen reste pas moins que des outils fonds sur une connaissance des mcanismes chimiques et biologiques en cause seront galement utiles pour lvaluation de linnocuit des ingrdients actifs.

Chapitre 1 Introduction

5

inclure autant que possible des tudes de cas, pour donner un contexte rel; prsenter autant que possible des options court, moyen et long terme5.1.3.3 Pourquoi maintenant?

tant donn les progrs raliss dans la comprhension des processus fondamentaux qui rgissent la raction physiologique une exposition, les nouvelles initiatives en matire de tests de toxicit visent de moins en moins lobservation de points limites apicaux6 dans des modles animaux et davantage des tudes fondes sur les mcanismes cellulaires de ltre humain. Mme si ces nouvelles techniques en sont leurs balbutiements, elles correspondent au besoin de faire en sorte que la toxicologie rglementaire puisse exploiter les progrs rapides des sciences fondamentales, afin dassurer que les dcisions de rglementation soient fondes sur les meilleures connaissances scientifiques disponibles. Dans lavenir, les tests de toxicit pourraient tre tous effectus in vitro et in silicio, peu de tests ou aucun test sur des animaux tant ncessaires. Cela ne se ralisera toutefois que par des avances progressives sur les plans scientifique et rglementaire. Il sagit dune vision davenir qui ne se ralisera pas compltement avant de nombreuses annes. Ayant cela lesprit, le comit a choisi de concentrer son attention sur les progrs scientifiques et les modifications de la rglementation qui sont possibles au cours de la prochaine dcennie. Le comit croit que lintgration progressive de nouvelles connaissances scientifiques dans le processus de rglementation facilitera lvolution conjointe des tests de toxicit et de leur approbation. Une telle volution conjointe sera ncessaire pour rpondre aux nouvelles exigences lgislatives en matire de donnes de toxicit pour les produits chimiques qui ne sont pas actuellement soumis des tests approfondis avant leur mise en march. De plus, lintgration de nouvelles mthodes de test sajoutant aux tests de toxicit actuellement exigs favorisera lacceptation par le public de ces nouvelles approches.

5 6

cet gard, le comit considre que le court terme correspond moins de deux ans, le moyen terme environ cinq ans, et le long terme environ dix ans. Un point limite apical est dfini comme un rsultat empirique observable dans une tude sur des animaux.

6

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

1.4

s tr uc tur e du P r s e Nt raP P ort

Au chapitre 2, le comit fait une description critique du cadre rglementaire actuel des pesticides, afin de fournir un contexte suffisant pour rpondre aux questions de son mandat. Le chapitre 3 donne un portrait complet de ltat des connaissances scientifiques qui sous-tendent la mthodologie des IATA. Il prsente aussi un certain nombre dexemples dIATA pertinents pour des tests rglementaires de toxicit. Le chapitre 4 prsente des utilisations actuelles des IATA ou de composantes dune stratgie intgre pour clairer des valuations des risques dans un contexte de rglementation. Le chapitre 5 aborde les perceptions des risques dans le public et met en lumire limportance de la communication et de lengagement des parties prenantes. Le chapitre 6 rsume les constatations du comit et prsente ses conclusions propos de lvolution des IATA dans un contexte de rglementation au cours de la prochaine dcennie. Chaque chapitre est rdig de manire pouvoir tre lu comme un document indpendant ou comme une partie du rapport. La toxicologie est un domaine intrinsquement interdisciplinaire et technique. Afin daider le lecteur comprendre certains termes spcialiss utiliss dans le rapport, des termes cls et leur dfinition figurent au dbut des chapitres 2 5, et lappendice A donne un glossaire technique plus complet. Une liste dabrviations importantes est fournie la fin du rsum, immdiatement avant le dbut du prsent chapitre.

Chapitre 2 Approche actuelle des tests et de lvaluation des risques dans un cadre rglementaire

7

2chapitre 2 C ollaborationinter nationale en matire de rglementation des pesticides

a po ha t eld se tedl au to d si q ed nu c de l m nar p r c ecu le et sst e v l ai n ers u s a s na rr ge e t ie

2

approche actuelle des tests et de lvaluation des risques dans un cadre rglementaireB rveintroductionauxtestsetla rglementation sur les pesticides

valuationetgestiondesrisques lis aux pesticides Lesystmeactueldetestsdetoxicit C ritiquedusystmeactueldetests de toxicit A pprochesintgresenmatire dessais et dvaluation

8

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

2

approche actuelle des tests et de lvaluation des risques dans un cadre rglementaireliste de termes cls*

Bonnes pratiques de laboratoire (BPL) Selon la dfinition de lOCDE, les BPL forment un systme de garantie de qualit portant sur le mode dorganisation des tudes de scurit non cliniques ayant trait la sant et lenvironnement et sur les conditions dans lesquelles ces tudes sont planifies, ralises, contrles, enregistres, archives et diffuses. (OCDE, 2004f). Les contrles mis sur pied en vertu des BPL sont conus et appliqus afin dassurer la constance, la fiabilit et la reproductibilit des rsultats. Danger Toxicit inhrente un produit chimique. Il sagit dune proprit intrinsque de la substance. Dose chronique de rfrence Dose maximale laquelle une personne pourrait tre expose pendant toute sa vie sans quil ny ait deffet nocif prvisible sur sa sant. Lquivalent pour lEPA est dsign par le sigle cPAD (Chronic Population Adjusted Dose). Dose sans effet nocif observ (DSENO) Degr dexposition pour lequel il ny a pas daugmentation statistiquement ou biologiquement significative des effets nocifs dans la population expose par rapport la population tmoin approprie. pigntique tude des changements dus des mcanismes autres que des modifications de la squence dADN. Un tel changement peut persister dans la division cellulaire, et mme tre transmis aux gnrations subsquentes, mais il ny a aucune modification de la squence dADN de lorganisme. Ingrdient actif Composante dun produit antiparasitaire laquelle les effets viss de ce produit peuvent tre attribus. Il sagit de lingrdient qui lutte contre le parasite et qui doit tre clairement identifi sur ltiquette du produit. In silicio Dans un ordinateur ou par simulation informatique. In vitro Dans un milieu biologique artificiel, lextrieur dun organisme vivant. In vivo Dans un organisme vivant. Se dit par exemple de tests de toxicit mens sur des modles animaux.suite la page suivante

*Termes cls employs par le comit dans tout le rapport. Dautres termes sont numrs dans le glossaire technique de lappendice A.

Chapitre 2 Approche actuelle des tests et de lvaluation des risques dans un cadre rglementaire

9

liste de termes cls* (suite) Modle animal Animal de laboratoire utilis la place dun tre humain pour dterminer les effets nocifs potentiels de lexposition une substance toxique. Neurotoxicit Capacit dune substance de causer des effets nocifs sur le systme nerveux. Parasite Tout insecte, champignon, bactrie, virus, mauvaise herbe, rongeur, ou autre plante ou animal nuisible, nocif ou gnant. Pesticide Produit antiparasitaire prt lemploi. Un pesticide comprend gnralement un ingrdient actif et des produits de formulation. Point limite apical Rsultat exprimental observable dans une tude sur des animaux et qui sert dindicateur de toxicit. Ce peut tre entre autres un dfaut de croissance, un problme de dveloppement, la formation dune tumeur, la progression dune maladie ou la mortalit. Les tests portant sur les points limites apicaux valuent le rsultat final dune exposition, mais ne donnent que peu ou pas dinformation sur les mcanismes de la raction de lorganisme. Produit antiparasitaire (PAP) Tout produit, dispositif, organisme, substance ou autre objet fabriqu, prsent, distribu ou utilis comme moyen de lutte direct ou indirect contre les parasites par destruction, attraction ou rpulsion, ou encore par attnuation ou prvention de leurs effets nuisibles, nocifs ou gnants (Gouvernement du Canada, 2002a). Tout PAP vendu au Canada doit porter une tiquette contenant des renseignements prcis sur les ingrdients actifs, la formule et lutilisation vise du produit, ainsi que sur lidentit du dtenteur de son homologation. Cette tiquette est un document impos par la loi qui doit respecter un format normalis7. Produit de formulation Ingrdient non actif ajout un produit antiparasitaire, gnralement pour en amliorer les proprits. Risque Probabilit quun sujet subisse du tort ou prouve un effet nocif sil est expos un danger particulier. Le risque est une fonction la fois du danger intrinsque que prsente une substance et de la probabilit dexposition cette substance.suite la page suivante

7

La page http://www.cchst.ca/oshanswers/chemicals/pesticides/labels.html donne une description des tiquettes des pesticides.

10

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

liste de termes cls* (suite) Toxicologie informatise Utilisation de modles mathmatiques et informatiques pour prdire des effets nocifs et pour mieux comprendre les mcanismes par lesquels une substance donne produit un effet. La bio-informatique est une discipline laquelle on a recours dans ce domaine.

2.1

b r ve i N trodu ct i oN au x t e s t s et la r g le m e Ntat i oN s u r l e s P e s t i c ides

Les ingrdients actifs des pesticides constituent lun des groupes de substances commercialises les plus svrement rglements. Lvaluation toxicologique (tests de laboratoire) dun ingrdient actif suit un protocole semblable celui de lvaluation prclinique de linnocuit dun mdicament. Les donnes toxicologiques servent valuer les risques cologiques, les risques pour la sant humaine (y compris ceux lis la prsence de rsidus dans les aliments) et les risques lis lexposition professionnelle, avant quun pesticide puisse tre homologu pour la vente ou lutilisation au Canada. Pour obtenir lhomologation dun pesticide pour son utilisation au Canada, un demandeur (le fabricant du produit) doit soumettre lAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Sant Canada les rsultats dtudes scientifiques dtailles qui prouvent linnocuit et lutilit du produit (ARLA, 1999)8. Avant quun produit puisse tre homologu pour la vente ou lutilisation au Canada, ces donnes servent tablir avec une certitude raisonnable quil ne prsente aucun risque pour la sant humaine, les gnrations futures ou lenvironnement sil est utilis conformment au mode demploi sur ltiquette (ARLA, 2009b). Le fabricant effectue une batterie de tests de toxicit et dtudes dexposition obligatoires, afin de produire des donnes utilises par lARLA dans une valuation des risques indpendante (voir ARLA, 2009b). Ce processus dvaluation des risques prend en considration non seulement le profil toxicologique du produit (tel quil est tabli par les donnes des tests de toxicit), mais aussi les modalits

8

Les demandeurs produisent les donnes scientifiques ncessaires pour satisfaire aux exigences de lhomologation. En tant que signataires de laccord de lOrganisation de coopration et de dveloppement conomiques (OCDE) relatif lacceptation mutuelle des donnes (OCDE, 1983), chaque organisme de rglementation dun pays de lOCDE effectue une valuation indpendante dun ensemble prescrit de donnes de tests produites conformment aux BPL (ARLA, 2005). De plus, chaque pays mne indpendamment son propre examen des donnes et nest pas li par les conclusions de lexamen de toxicit effectu par tout autre pays.

Chapitre 2 Approche actuelle des tests et de lvaluation des risques dans un cadre rglementaire

11

dutilisation prvues et lefficacit du produit (ARLA, 2000). Une fois lvaluation des risques termine, le pesticide est homologu pour la vente ou lutilisation au Canada, ou la demande dhomologation est rejete9. Ce processus dvaluation de linnocuit a volu pour devenir ce que lon appelle aujourdhui lvaluation et la gestion des risques. Le prsent chapitre rsume le cadre dvaluation des risques utilis pour la rglementation des pesticides et prsente lensemble actuel des tests de toxicit sur lesquels la rglementation et les dcisions concernant les risques sont fondes10.2.1.1 Limportance de la rglementation

La dcision dutiliser un pesticide suppose de prendre en considration les risques que le pesticide peut prsenter pour la sant humaine et lenvironnement, de mme que les problmes qui pourraient survenir si on ne luttait pas contre le parasite11. Tout pesticide a le potentiel de plus ou moins nuire lenvironnement ou la sant humaine. Cest aussi le cas des parasites : la prolifration non contrle de certains parasites peut avoir des consquences dsastreuses. Utiliss avec prcaution, les pesticides peuvent tre des outils efficaces de lutte contre des parasites nuisibles avant quils ne constituent une menace. De fait, la raison principale de lutilisation de pesticides au Canada et ailleurs dans le monde est la lutte contre des parasites qui pourraient autrement compromettre la production daliments, la scurit et la sant publique (Hillebrandt, 1960; Pretty, 2008). Mme si les cots de mise au point de nouveaux ingrdients actifs de pesticides augmentent fortement depuis la priode de croissance soutenue de ce secteur dans les annes 1970 et 1980, de nouvelles substances font chaque anne leur apparition sur le march12. Tous ces produits font lobjet dtudes et dvaluations par divers gouvernements nationaux, pour assurer leur conformit avec les normes actuelles en matire de sant, denvironnement et de scurit.

9

Il est important de noter que la dcision dhomologation prcise les cultures et les parasites pour lesquels le produit peut tre utilis. Des restrictions supplmentaires peuvent tre imposes en fonction des rsultats de lvaluation des risques. 10 Le comit reconnat lexistence de plusieurs catgories de pesticides, dont les pesticides biologiques. Ce rapport se concentre toutefois sur lvaluation des pesticides chimiques. 11 Noter que le comit mentionne ici spcifiquement la dcision d utiliser un pesticide, et non la dcision dun organisme de rglementation d homologuer le pesticide. 12 De 1997 2009, 109 nouveaux ingrdients actifs de pesticides ont t homologus aux tats-Unis (EPA, 2010g). En 20082009, 14 nouveaux ingrdients actifs de pesticides ont t homologus au Canada (ARLA, 2009b).

12

Nouvelles technologies et valuation de la scurit chimique

2.1.2

Comptences concernant la rglementation des pesticides au Canada

La lgislation en matire denvironnement au Canada relve de la Loi constitutionnelle13. En vertu de cette loi, le gouvernement fdral a le pouvoir de lgifrer, pour la paix et lordre au Canada ainsi que pour son bon gouvernement , alors que les provinces ont juridiction en matire de proprit et de droits civils, denvironnement de travail, ainsi que dlimination des dchets (Gouvernement du Canada, 1982). Mme si le gouvernement fdral est responsable de lhomologation des produits antiparasitaires au Canada, les trois paliers de gouvernement (fdral, provincial ou territorial, municipal) ont un rle jouer dans la vente et lutilisation de ces produits (voir le tableau 2.1). Il sagit dun systme complexe de comptences soumis une varit de lois, lignes directrices, directives et rglements aux divers paliers de gouvernement.Rglementation fdrale : lAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA)

Au Canada, les pesticides sont rglements depuis 1927 par une loi sur les poisons conomiques en agriculture (Dominion du Canada, 1927), qui a servi en 1939 de fondement la premire loi sur les produits antiparasitaires (Dominion du Canada, 1939). Les premires lois visaient garantir que les produits soient correctement tiquets et ne soient pas volontairement frelats. Le cadre rglementaire a chang progressivement en rponse lvolution de lintrt et des valeurs du public ainsi qu une prise de conscience croissante des facteurs qui ont des rpercussions sur la sant environnementale, conomique et humaine (voir la figure 2.1). Cela se reflte dans la version actuelle de la Loi sur les produits antiparasitaires (LPAP), qui vise mieux protger la sant humaine et lenvironnement, rendre le systme de rglementation plus transparent pour le public et renforcer la surveillance des pesticides aprs leur homologation (Gouvernement du Canada, 1969, 2002a).

13 La Loi constitutionnelle a dabord t une loi du Parlement britannique, intitule Acte de lAmrique du Nord britannique de 1867. Elle est devenue la Loi constitutionnelle lorsquelle a t rapatrie au Canada en 1982. Elle porte le titre officiel de Canada Act 1982, c. 11 (Parlement du Royaume-Uni, 1982).

Tableau 2.1 Rsum des diverses comptences qui concernent lhomologation, la vente et lutilisation des pesticides au CanadaRle dans la rglementation des pesticides

chelon gouvernemental

Sant Canada est responsable de la recherche sur les taux acceptables de pesticides dans les aliments prpars, ainsi que des tudes et recherches de biosurveillance.

Fdral

LAgence de rglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) est une agence de Sant Canada. LARLA est responsable : de lapplication de la Loi sur les produits antiparasitaires (LPAP); de lhomologation de nouveaux pesticides et de la rvaluation des pesticides existants (cycle de 15 ans); de lvaluation des effets sur la sant et la scurit humaines, y compris ltablissement des limites maximales de rsidus (LMR) en vertu de la Loi sur les aliments et drogues (LAD); de lvaluation des impacts environnementaux; de lvaluation de la valeur et de lefficacit; de llaborati