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La Chouette dé chaî né e Retour les pieds sur TERRE Modélisation du virus Les coulisses du JTS le nucléaire qui divise un génie aux 250 ans 13 Mai 2020 - N° 15 Le magazine annuel de l’ISAE Supaéro campus Isae pandémie énergie Beethoven 4 10 28 37

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La Chouettedéchaî née

Retour les piedssur TERRE

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un génie aux 250 ans

13 Mai 2020 - N° 15

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La Chouette/Édito

Rappelons-nous, il y a tout au plus quelques semaines seule-ment. Nous avions «en même temps»un pied dans le confine-ment et ... une main dans l’urne. C’était précisément le soir du15 mars. Depuis, le macabre décompte des morts fait état de

275000 décès dans le monde au soir du 8 mai, dont26000 en France. L’Espagne, l’Italie et l’Angleterre endéplorent quelques centaines, voire quelques milliersde plus. Mais surtout, un chiffre dépasse les craintes lesplus vives en France, celui des Ehpad, qu’on avait toutsimplement oubliés : 13000 disparus que notre sociétéa, en quelque sorte, abandonnés à la mort. Une sépara-tion tra gique que les familles auront du mal à faire cica-triser. Notre pays n’arrive décidément pas à «gérer» cequ’il est convenu d’appeler notre pudique quatrièmeâge. De quoi donner des arguments à ce cher BernardPivot «national» pour apostropher cette société quivoudrait confiner «ses vieux» sine die. L’Angleterre nous fournit un autre symbole, celui de

ce Premier ministre, un brin hâbleur quand il serretoutes les mains qui se tendent dans le Royaume de SaMajesté. Las, de bonnes âmes l’ont sauvé in extremisdesbrumes du Styx. Et les masques alors? Ah ces masques qui devaient

resurgir par millions sur un claquement de doigt duprince et qui ont alimenté la chronique des ministères enpanne d’idées, et des médias oublieux des années

passées. Une comédie qui repart comme un boomerang à la face de la grande distribution, accusée par les phar-maciens d’avoir discrètement constitué des stocks au mépris des besoins des soignants. Voilà pour les symboles.

Gutenberg au secours de la NationEt les actes? Il nous suffira d’admirer le courage, l’abnégation, la compétence, le sang-froid, l’imagination, la déter-

mination, l’empathie, la bienveillance et le désintéressement de chefs de services, de médecins et internes, d’infir-mièr.e.s, d’aides-soignant.e.s, de tous les employés qui assurent l’activité hospitalière, des personnels trop souventoubliés des Ehpad ou des centres pour handicapés. C’est eux, avant tout, qui ont géré la crise récente, enautonomie, pour ne pas perdre de temps avec des représentants de la haute-administration visiblement hors-sol oudes dignitaires politiques totalement dépassés. Le pays ne s’y est pas trompé, qui ne cesse d’applaudir les garants dela santé ... et de notre démocratie. Et nous y associons très volontiers, les acteurs des filières agro-alimentaires et dela distribution, dont les employé.e.s affecté.e.s aux caisses et aux rayonnages.

Au chapitre des actes, nous n’omettrons surtout pas ces milliers de gestes de solidarité : entre voisins, entrejeunes et moins jeunes, entre bénévoles et SDF ou sans statut, entre élus et administrés, entre enseignants et étu-diants, entre les dispersés d’une même famille, entre collègues de travail... Plus que des milliers de gestes, des mil-lions en fait.Ce 11 mai, l’économie, percluse d’arthrose après deux mois d’arrêt total, va se réveiller cahin-caha, en lui souhai-

tant de se redynamiser sur de meilleures bases : la relocalisation, la mise en avant des secteurs les plus essentiels, larecherche d’une véritable transition écologique... C’est la même filière agro qui a soufflé l’idée à un trio génial de larégion angevine d’ajouter à leur activité industrielle la production massive de ... masques (encore eux!). Ils viennentde penser le projet en 3 semaines, obtenu les brevets et certificats en quatre jours pour mettre en route des unitéset produire, tenez-vous bien, 300 millions de masques par semaine, en équipant 200 lignes de rotative de presse eten utilisant des matériaux polyester recyclé à 50%, pour des masques aux normes UNS1 ou UNS2. La DGA et lamairie de Paris qui ont flairé le changement de dimension ont déjà passé commande. Merci Gutenberg!Ce dernier, près de 600 ans après son invention, aurait pu observer, avec délice, la ténacité des 12 apprentis rédac-

trices et rédacteurs de l’ISAE-Supaéro (en séminaire d’Art et Culture, 1ère année). Alors que tout était organisé enconférence de rédaction le 11 mars, ils ont dû improviser avec l’ac tualité, changer leurs sujets, jouer du téléphonesouvent, du mail toujours ... jusqu’à finaliser leurs articles sans jamais faillir. Ils ont rédigé leurs sujets en faisant l’étatdes lieux, en ouvrant des horizons et en traçant des perspectives. Presque comme des pros. Et avec talent. Qu’ilsen soient félicités.

Bertrand THOMAS

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La ChouetteDéchaînéeMagazine annuelédité par ISAE-SUPAERO

AtelierARTS et CULTURE1A 2019-2020« Informer par l’écritureet la mise en page »

Rédaction en chefet mise en pageBertrand THOMAS, Journaliste

ReprographieISAE Supaero10 avenue E. Belin31400 TOULOUSE

Des symboles et des actes

Photos ci-dessus et Photode Une. ©AFP

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RÉDACTION/La Chouette

La rédaction de la Chouette en confinement

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Dans l’ordre d’apparition de gauche à droite et de haut en bas ...

Benoît BIELOOSEROFF Anaïs BOUCHET Paul CAMPANARO

Nathan COISNE Charlotte DELMAS Julie EIMER

Matis GABRYSIAK Eliott GUIRA Alexandre ICHÉ

Ludwig ROBIN Thibaud STRASSER Isaac ZIDOUM

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L es pays, de toutesparts dans le monde,ont imposé des

mesures de distanciationsociale ou de quarantaine et,pourtant, malgré les effortslittéralement héroïques demilliers de soignants, lenom bre de morts dû aucoro navirus explose defaçon exponentielle. De l'au -tre côté, la communauté desscientifiques cherche destraitements ou un vaccin. Lesmédias ne parlent plus que dece défi alors que les dif-férentes analyses s'accumu-lent dans tous les sens. Enbref, nous sommes à la fois àun tournant historique et dansune période de grande confu-sion.

Comment cela va-t-ilévoluer?Pour comprendre le mo -

ment présent, il faut s'in-téresser aux paramètres quijouent un rôle fondamentaldans les conséquences del'épidémie. Le premier paramètre con-

cerne le nombre moyen d’indi-vidus que chaque personneinfectera en étant malade :c'est le "taux de reproductionde base" ou R0. Ce taux estévidemment très fluctuant enfonction du contexte et descomportements de la popula-tion. Dans un contexte derassemblements de masse, ilexplose alors que si tout lemonde reste chez soi sanscroiser personne, il s'écroule.L’important est de compren-

dre qu’en-dessous d'un R0de 1, la maladie disparaîtd'elle-même mais au-dessusde 1, elle progresse de façonexponentielle. Le R0 du coro-navirus serait situé, sansmesures particulières, entre 2et 3 selon l'OMS.

Sans intervention, lapandémie provoqueraitdeux millions de mortsLe deuxième paramètre

important tient au nombre depersonnes qui ont besoind'être hospitalisées. Lessymptômes, dus au virus, ontété étudiés sur des patientschinois et cela nous informede la chose suivante : chez lespersonnes qui présentent dessymptômes, 20% ont besoind'une hospitalisation et 5% ontbesoin d'être en réanimation.Sur toutes ces personnes quiprésentent des symptômes,les premières estimations unpeu brutes indiquaient que3,4 % en mouraient. Lesdernières tendent plutôt versle chiffre d’1,5 %. Il s’agit ici dutroisième paramètre : le tauxde mortalité.Partons d’un modèle neu-

tre, sans aucune prétentionprédictive, où on laisse

l'épidémie se propager sansrien faire. Ce modèle postuleque chaque personnetombant malade va transmet-tre le virus à un nombre donnéd'autres personnes, puisguérir et être immunisée con-tre la maladie, ou alors mourir.Il s’avère alors que le nombrede malades augmente puisdiminue pour arriver à peuprès à deux millions de mortsà la fin du processus, sanscontrainte répétons-le sur lescontacts entre personnes.Près de 90% de la populationfinit par contracter le virus et lenombre de malades passepar un pic qui se mesure enmillions. Cette méthode pourgérer une épidémie reposesur l'idée que si une assezgrande partie de la populationcontracte le virus, elle ne pour-ra pas le recontracter. Cette"assez grande" partie de lapopulation tourne, pour lecoronavirus, autour de 60 à80 % pour que l'immunité col-lective fonctionne. Mais cetteméthode pose deux prob-lèmes : premièrement, lenombre très élevé de morts etdeuxièmement, elle met lesystème de santé à genoux.Et lorsque nous mettons un

Pandémie

Le virus en modélisation

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CORONAVIRUS/La Chouette

La pandémie de coronavirus, quel'humanité devra affronter encoredurant plusieurs mois, va bousculer à la fois notre perception du risquemicrobiologique, la façon dont nousgérons ces crises et même notre rapport à la nature.

L'Éthiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur de l’OMS, n’a cessé de le dire : il faut réduire le taux de reproduction de base à -1 par personne pour éradiquer la pandémie, et une seule solution pour celà,le confinement.©AFP

Spécialiste de positions iconoclastes pour nombre de sesconfrères, le docteur Raoult, directeur de l’IHU deMarseille, est assuré que la pandémie arrive à sonterme, et que le recours à la chloroquine représente unebonne prescription dans l’attente d’un vaccin. ©AFP

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La Chouette/CORONAVIRUS

système de santé à genoux,celui-ci ne peut plus soignercorrectement les patientsentraînant l’explosion du tauxde mortalité. Une simulation de l'Impérial

College London a montré àquel point cette méthodeserait une catastrophe. Laligne rouge représente le nom-bre de lits capables d'accueillirdes patients en état critique etla ligne noire indique le nombrede personnes qui en aurontbesoin à un instant T donné, sinous ne faisons rien. Ce quiest apparu très vite commeune évidence était l’instaura-tion de mesures pour aplatircette courbe et faire en sorteque le même nombre de cass'étale sur une durée pluslongue. Si nous reprenons lemodèle, nous voyons quediminuer le nombre de person-nes que chaque individu con-tacte dans sa journée changetout à la dynamique del'épidémie.

La fin du confinement? Considérons que guérir du

SARS-COV-2 nous immunisecontre lui. Dans cette situation,l'épidémie ne sera pas ter-minée tant qu'une proportionconséquente de la populationn'aura pas été infectée pourdévelopper une immunité ouque nous n'aurons pas trouvéun remède. Cela veut aussidire que, tant que nousn'avons pas de traitement oude vaccin, relâcher lesmesures de distanciationsociale, dont le confinementfait partie, revient très précisé-ment à laisser l’épidémierepartir de plus belle. Cepen-dant le confinement nous

donne du temps et il s’agit d'uningrédient essentiel dans unprocessus à croissance expo-nentielle. Le vaccin peutnécessiter un an, voire un an etdemi, pour être développé,peut-être plus. Il faut doncimaginer des solutions pourendiguer les contaminations etgagner du temps.

Le «marteau» desmesures contraiganteset la «danse» desajustements

Dans une série d'articles quiont eu un franc succès, TomasPueyo parle du marteau et dela danse pour décrire les moisqui viennent. Le marteau desmesures contraignantes dedistanciation sociale est làpour arrêter brutalement lapropagation dans sa course etéviter de saturer le système desanté. Et ensuite, la danse, enajustant les mesures pourgarder l'épidémie sous con-trôle. Dès que nous enregis -trons une recrudescence descas, remise en place du con-

finement : fermeture desécoles, des commerces puisréouverture et ainsi de suite...Cette méthode bien qu’effi-

cace engendrerait à l’évidencedes conséquences désas-treuses sur l’économie. Malgrétout, l'un des rares avantagesd'une pandémie est que nousne sommes pas seuls. Dessolutions sont testées ailleurset nous pouvons nous eninspirer. Le temps offert par leconfinement et la réduction dela contagion ouvrent à la miseen place d’autres solutions Parexemple, Singapour a servi demodèle dans la lutte contrecette maladie. Le pays, quiavait le souvenir de lapandémie du SRAS de 2003,était déjà prêt et a réagi trèsvite dès que les premiers caschinois ont émergé. Il a testé àgrande échelle sa populationpour détecter les porteurs duvirus sans symptômes, pouravoir la vision la plus claire surle nombre de personnes infec-tées qui soit proche de la réa -lité. De plus les autorités sin-gapouriennes ont retracé les

malades et leurs contacts pourarrêter le plus rapidement pos-sible la diffusion du virus. Toutcela en imposant que toutepersonne qui présente dessymptômes reste à l'hôpital,séparée des gens sains, et enmenant en parallèle un suivides personnes qui avaient étéen contact avec ces conta -minés, quitte à les obliger auconfinement chez eux s'ilsn'ont pas encore de symp-tômes. Résultat : ce pays aréussi à ne pas imposer deconfinement à toute sa popu-lation et dans le même temps àéviter un grand nombre demorts.

L’absence coupabled’anticipation des gouvernantsCette procédure pourrait

être reproduite en Francedurant l'année à venir, le tempsque les autorités s'organisent.Et dans le cadre de la "danse",elle pourrait remplacer le con-finement total actuel. Certes, cette méthode pose

des questions de toutessortes : le retraçage desmalades via leur téléphone, etla vérification qu'ils jouent le jeuest une restriction forte de la li -berté individuelle. Les autorités doivent aussi

gérer la pénurie de masquespour le personnel soignant etrattraper leur absence de pré-paration, mais ceci est unautre débat, bien nationalcelui-là qui a démontré l’ab-sence coupable d’anticipationpar nos gouvernants.

Eliott GUIRA

La ligne rouge repré-sente le nombre delits capables d'ac-cueillir des patientsen état critique et laligne noire indique lenombre de per-sonnes qui en aurontbesoin à un instant Tdonné.L’objectif ultime étaitl’instauration demesures pour aplatirla courbe noire et lafaire correspondre àla ligne rouge.

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L’Océan Indien dans la tourmente

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Les îles de l’Océan indienne sont pas épargnéespar le coronavirus : lesSeychelles, Madagascar,l’île Maurice ainsi quel’île de La Réunionsouffrent également de lapandémie. Des questionslégitimes se posent quantaux conséquences pourl’économie des mesuresde confinement, de lafermeture des frontièresainsi que deschangements de rythmeen matièred’import/export ?

Des millions de roupies de pertes chaque jourpour l’île MauriceL’île Maurice comptait, le 14 avril,

324 cas confirmés et 9 décès dusau virus. Avec les mesures de con-finement et surtout la fermeturedes frontières, le secteur touris-tique est fortement menacé par lecoronavirus. Concrètement,chaque jour coûte des millions deroupies aux groupes hôteliers,mais également aux restaurateurset autres acteurs de l’industrie dutourisme. En effet, bien que l’îleMaurice ait diversifié sonéconomie, l’hôtellerie reste un deses piliers. À lui seul, il a rapporté64 milliards de roupies (1,5 milliardd’euros) en 2018. Plus inquiétant,le tourisme comptabilise 120 000emplois directs ou indirects. Enfinle fait que la matière première pro -vienne en majorité de Chine etmanque à l’appel vient égalementparalyser le peu d’industrieindépendante du tourisme.

Les Seychelles prennentde nouvelles mesures face à la pandémieL’archipel des Seychelles ne

comptait que 10 cas confirméscourant avril. Néanmoins propor-tionnellement à ses 96 000 habi-tants cela fait, de ce petit pays, l'un

des plus touchés de la zone océanIndien. De nouvelles mesures sontappliquées pour faire face au coro-navirus comme la fermeture deslieux ouverts au public et desécoles. S’appuyant sur l’industriede la pêche et du tourisme, l’îleconnaît un ralentissement impor-tant de son activité économiquereprésentant un manque à gagnerde 3.5 millions d’euros. Le secteurde la pêche est directementtouché, car celui de l’hôtellerie n’aplus besoin d’être approvisionnéen poissons. Le gouvernementseychellois a annoncé le reportdes paiements d’impôts dus enmars à septembre et encourage lapopulation à consommer les pro-duits de la mer pour soutenir lesecteur de la pêcherie.

Le présidentde Madagascar promet unremède au coronavirus à base d’artemisia

La nouvelle a fait le tour dumonde. A Antananarivo, le 20 avril2020, le président malgacheAndry Rajoelina vante le Covid-Organics qui serait un traitementpréventif et curatif contre le coro -

navirus à base d’artémisia. Mada-gascar est le premier exportateurmondial de cette plante. Sondérivé chimique, l’artemisinine, estutilisé pour lutter contre les fièvrespaludéennes. Ce traitement con-siste en une tisane à base defeuilles séchées d’artemisia, pro-duit par l’Institut malgache derecherche appliquée (IMRA) etvendue à la population malgache.Le chef de l’État a décidé que les

enfants du primaire au secondaireauront l’obligation de consommercette tisane. Ce remède n’aévidemment pas été avalisé parl’Organisation mondiale de la santé(OMS). En effet aucun essai cli -nique fiable prouvant les vertus del’artémisia contre le virus n’a étémis en place.La gestion du Covid-19 se

retrouve à Madagascar à l’inter-section du scientifique et de lacroyance. Au plan politique, elles’est caractérisée par une com-munication très personnalisée duprésident de la République. Finale-ment il est triste de constater quemême dans un contexte de crisepandémique comme celui-ci, cer-tains systèmes politiques gardentla main mise sur la santé de leurscitoyens.

Un enseignantinvite à boire,au début ducours, unebouteille deCovidOrganics, unetisane, pré-sentée par leprésident mal-gache AndryRajoelinacomme unremède puis-sant contre leCOVID-19.Lycée J.J.Rabearivelodans lecentre-villed’Antanana -rivo, 23 avril2020.©RIJASOLO /AFP

CORONAVIRUS/La Chouette

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La controverse des cas«importés» à La Réunion

Le jeudi 2 avril 2020 le Piton de laFournaise était en éruption. Con-trairement à leurs habitudes lesRéunionnais n’ont pas pu aller voirde leurs propres yeux les couléesde lave. En effet depuis que le pre-mier cas de coronavirus a été iden-tifié le 11 mars sur le sol réunion-nais, l’épidémie n’a pas cessé dese développer. De nombreusesmesures ont été mises en place :vols restreints avec la métropole,quarantaine stricte pour les

voyageurs, confinement commepartout en France. Malgré tout, leconstat reste relativement encou -rageant par rapport à la métropole.La mise en place préventive duconfinement, par rapport au nom-bre de cas, a permis de contenirl’épidémie et de ne pas submergerle système hospitalier. NéanmoinsLa Réunion compte un lit pour en -viron 7700 habitants, contre un litpour environ 4600 habitants danstoute la France. Il est donc primor-dial de contrôler efficacement laprolifération du virus. Heureuse-ment aucun décès n'est pour

l'instant à déplorer dans l'île peu-plée de près de 860 000 habi-tants. Au nombre des mesuresplus radicales, les autorités ontimposé un renforcement de la pé -riode de confinement auxvoyageurs arrivant à La Réunion.Désormais ils sont hébergés dansdes lieux réquisitionnés par lePréfet et ne pourront plus rentrer àleur domicile. Cette mesure faitsuite à la décision de réduire àseulement trois, par semaine, lesliaisons entre Paris et La Réunion,contre 30 par semaine en tempsnormal. Cependant un événement est

venu fragiliser la confiance desRéunionnais envers l’Agencerégionale de santé (ARS) pourrépondre correctement àl’épidémie. En effet plus de 36000masques FFP2, provenant du« stock régional » ont été livrés le 24mars par l'ARS de La Réunion auxpharmaciens. Mais, dès le lende-main, certains d’entre eux ontalerté l’Agence sur le nombreimportant de masques présentantdes traces de moisissures. L'ARSa donc demandé aux profession-nels de santé de procéder sansdélai à leur destruction.Après cinq semaines de con-

finement, permettant d'endiguer lapropagation à 400 cas à la mi-avril,un relâchement est observable,sans doute en écho à l'annoncedu gouvernement sur le décon-finement progressif et le faiblenombre de cas positifs dépistés.La grande majorité des cas decoronavirus sont des cas« importés », notamment de métro-pole. De ce fait la question de laréouverture à la normale de l’aéro-port Roland Garros, seul aéroportde l’île, est un sujet controverséchez les Réunionnais car, pourbeaucoup, elle est synonymed’une nouvelle exposition de lapopulation au virus.La zone économique que

représente l’Océan Indien naviguepour l’heure un peu à l’aveuglette.Face à cette situation inédite, lesgouvernements tentent de garderla tête hors de l’eau afin que leurspays respectifs souffrent le moinspossible une fois sortis de la crisedu coronavirus.

Eliott GUIRA

La plage vide de L’ermitage à Saint-Gilles fin avril. ©Richard BOUHET/AFP

Le traficaérien entrel’île de LaRéunion et lamétropoleest passé de30 vols heb-domadaires à 2.©AFP

La Chouette/CORONAVIRUS

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C'est l'indifférence qui ad'abord prévalu. Dedécembre à fin févrierpersonne ne semblait

vraiment s’inquiéter de ce virus.Très peu de spécialistes tiraient lasonnette d’alarme, pas même laministre de la Santé. Qui pouvait eneffet s’inquiéter d'un virus surgis-sant à l'autre bout du monde, décritcomme « pas plus méchant que lagrippe » par les docteurs, les jour-naux, avec un argument fatal« puisqu’il ne tue que les plusâgés».

A cela s'ajoute l'absence deréactions et de mesures fortes pourempêcher le virus d'arriver dans lespays de la part des différents gou-vernements à travers le monde, cequi a sans nul doute renforcé lesFrançais dans leur sérénité. Mêmel'Organisation Mondiale de la Santén'a pas déclenché l'état d'urgencesanitaire ni même déclaré lapandémie alors que le virus étaitdéjà présent sur tous les continentsdu globe. Et plus localement, legouvernement français, lui aussi,laisse imaginer qu'il ne faut pass'inquiéter : les seules mesurespréventives pour limiter l'apparitiondu virus dans le pays se limitent à lamise en place, dans les aéroports,d'affiches conseillant de se laverles mains. Les frontières ne sontpas fermées, le stade 3 n’est pasdéclenché pour ne pas « abîmer »l'économie. Et le premier tour desélections municipales, certesessentiel dans le fonctionnementdémocratique du pays, est main-

tenu sous la pression deslistes candidates et des partispolitiques au terme d’unecampagne forcément ardue.

Puis, vient la fermeture desécoles en France vers le 16mars et très rapidement leconfinement généré par cettepetite « épidémie de grippe »prend des allures d'apoca-lypse. Soudainement, la peurl'accompagne. La peur demanquer pour certains, à encroire les files d'attentesinterminables et les rayonsdévalisés dans les super-marchés. Et cette peur demanquer des uns, laprovoque par effet boule deneige chez les autres, quivoient les rayons se vider etagissent donc en conséquence. Il ya bien sûr la peur du virus lui-même, et chacun commence à sedire que finalement ce n'est pasjuste une grippe … que la mise enquarantaine de villes entières enChine était peut-être justifiée.

Le sentiment, soudain,de grande peur

Plus dramatique, les expertsmédicaux découvrent et média-tisent les conséquences insoup -çonnées de ce virus. Sur internet,les fake news fusent, à coup devidéos des rues chinoises où lesgens semblent mourir soudaine-ment du virus. A côté de nous, l'Ita -lie est dépassée : les malades semultiplient et les morts s’amoncel-

lent. Dans les médias, on entendtout et son contraire. Un jour, lalétalité du virus est de 3%, un autrejour il est de 1.5%. Parfois, la con-tagiosité passe de 1,5 à 4 avant derevenir à 2, tout cela sans savoirpourquoi, sans réellement savoir cequi est vrai. A cela s'ajoute lesmédecins qui comparaient endébut d’année le virus à une grippeet qui font marche arrière, commel’incontournable télévisuel MichelCymes qui avait déclaré le 10 marssur le plateau de « Quotidien :«c'est un virus un peu plus cognéque la grippe, mais ça reste unemaladie virale comme on en atous les ans », et qui regrette«avoir trop rassuré les Français ».Tout démontre l'incertitude et l'in-connu qui plane autour de ce virus,renforçant le sentiment de peur.

Mais cette peur n'affecte pastous les Français de façon égale.C'est ainsi qu'on a pu voir, aprèsl'annonce de la fermeture des barspar le Premier ministre EdouardPhilippe, certains Français seregrouper pour prendre un dernierverre, d’autres déclarant n'être detoute façon ni concerné par cevirus, ni en danger car trop jeune, etce, malgré les consignes de distan-ciation sociale et le passage austade 3 décrétés par le gouverne-ment. Des images ont révélé,encore plus avant dans le confine-ment, que le nombre de joggeursn'a jamais été aussi élevé alorsmême que les plus légitimes à con-

tinuer à courir, c'est-à-dire lesmarathoniens et les sportifs profes-sionnels français, se privaient d’en-traînement et sommaient lescoureurs du dimanche d'en faire demême. C'est ainsi qu'on a pu voirdes images de joggeurs s'entasser,notamment à Paris où une interdic-tion d'aller courir entre 10h et 19hprovoquait un phénomène d’étran-glement horaire.

Et depuis la dernière conférencedu président Macron le 13 avril, lerelâchement s’observe de plus enplus. Pas surprenant à vrai dire,alors que le président annonce ledéconfinement, synonyme pourbeaucoup de fin de crise, et qu’ilfélicite les Français pour leur com-portement … irréprochable ! Passurprenant, mais inquiétant, quandon observe la courbe des décèsjournaliers révélant clairement quela fin de la pandémie n'est pas touteproche, bien au contraire. Encoreplus inquiétant, quand on se com-pare avec la Chine, qui après avoirvu son nombre de cas repartir à lahausse après l'annonce du décon-finement, a choisi de reconfiner unepartie de sa population.

Quoi qu'il en soit, les Françaispourront tout de même se féliciter,alors que l'on connaît leur amourpour les manifestations, de ne pasavoir lancé de mouvement deprotestation anti-confinement con-trairement à nos semblables …Américains.

Benoît BIELOOSEROFF

Alors que le COVID-19 paralyse aujourd'hui de nombreux pays dans le monde, lecomportement des Français a particulièrement évolué tout au long de la crise.

Réactions au Covid

Le mépris, puis la peur, et voilà l’insolence

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Ce n’est pas «juste une petite grippe».

Des Français félicités pour leur comportement irréprochable!Mais des joggeurs en nombre, sauf les vrais marathoniens. AFP

CORONAVIRUS/La Chouette

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C’est le concoursC e n t r a l e -Supélec, le 19

mars, qui ouvre lamarche en réflé chis santà un report desépreuves écrites. Unesemaine plus tard, lemême concours con-firme le « report desépreuves écrites à partirde mi-juin » (site :https://www.concours-centrale-su pelec.fr ) .Conséquen ce : la ses-sion 2020 des concourspost-classe prépara-toire sera dépourvued’é preu ves orales ! Lasi tu ation est tout à faitdé sta bilisante pour lesprofesseurs mais sur -tout pour les élèves quiont passé deux, voiretrois ans à se préparer aux oraux.

Respecter l’équité et les effortsdes élèvesLe Concours Commun Mines-Ponts

(CCMP) explique sur son site(https://www.concoursminesponts.fr) :«Le CCMP considère que les épreuvesorales permettent aux candidats dedémontrer pleinement l'ensemble deleurs compétences et de valoriser leurpréparation de plusieurs années. Mal-heureusement, le calendrier tenant

compte du contexte sanitaire et le posi-tionnement de ses écrits en fin deséquence, ne permettent pas au CCMPd'organiser ces épreuves orales dansdes conditions acceptables. Le con-cours CCMP 2020 sera donc réduit, defaçon tout à fait exceptionnelle, à sesseules épreuves écrites ». Ainsi, toutesles banques s’entendent là-dessus : lesépreuves écrites sont, certes, reportéesmais doivent se dérouler dans un formatinchangé par rapport à celui qui étaitprévu initialement pour ne pas encoreplus pénaliser les élèves les plus sérieux.

La suppression mal reçue des oraux La majorité des élèves de class-

es préparatoires fournissent degrands efforts en continu depuisplusieurs années, notammentdans l’objectif de passer desépreuves orales. C’est pourquoinombre d’entre eux signent despétitions sur internet dans l’espoirqu’une autre solution soit adoptée; ils proposent par exemple desimplement reporter les épreuvesorales. « Une sélection seule-ment composée d’épreuvesécrites, dans un concours oùdes qualités d’expression et derelationnel sont si mises en

avant, ne peut pasêtre juste », expliqueun élève faisant satroisième année enclasse PT au lycéeJean Mermoz à Mont-pellier. Mais la difficultén’est pas ano dine :cette décision entraî -nerait un report de larentrée à fin septem-bre, voire début octo-bre, dans toutes lesécoles.

Tensions et désaccords entre les élèvesLes contestations

émises par les élèvessont différentes enfonction de leurstatut : celui des élè -

ves 5/2 relève de l’injustice par rapportaux mesures actuelles. En effet, ils sontpunis par un malus sur leurs points auxconcours pour compenser leur année depréparation supplémentaire mais ils esti-ment que, vu le temps non négligeable derévision gagné par tous les élèves grâceau report des épreuves écrites, initiale-ment prévues début mai, ce malus n’estplus justifié.A l’opposé, les élèves 3/2 justifient le

maintien de ce malus par l’arrêt prématurédes cours, certaines classes ayant ratéjusqu’à un mois de cours : « on a l’im-pression d’être un peu abandonnéssans nous avoir donné tous les cours lesplus importants », explique un élève 3/2du lycée Joffre à Montpellier. L’arrêt descours a aussi suscité des objections ducôté des élèves des lycées moins côtés,ceux-ci se trouvant « désavantagés parrapport aux autres qui ont déjà fini cinqfois le programme depuis janvier »,explique un autre élève du lycée Joffre. Cependant, les élèves s’accordent sur

un point : tous espèrent que des mesuressupplémentaires reportant encore lesépreuves écrites ne seront pas prises.Trois mois de révision en autonomie, c’estdéjà assez long ! et tous vont devoir s’ef-forcer de garder un rythme de travailintensif durant plusieurs mois supplémen-taires.

Nathan COISNE

L’éducation et la scolarité n’ont pas fini d’être impactées par l’épidémie actuelle.Après l’arrêt des cours en présentiel en mars et l’annulation des épreuves dubaccalauréat, remplacées par un contrôle continu, ce sont maintenant les concourspost-classe préparatoire qui sont touchés.

Confinement

Le casse-tête des concours des classes prépa

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La plupart des concours aux grandes écoles seront réduits aux écrits, augrand dam des élèves des classes prépa. ©AFP

Les protocolessanitairesvont logiquement déstabiliserun peu plusles candidats,après unlong confinement.

La Chouette/CORONAVIRUS

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CAMPUS/La Chouette

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Le JTS (Journal Télévisé de Supaéro) est l’un des clubsles plus connus de l’école, et pour cause, ce sont sesmembres qui filment et photographient les évènementsles plus importants de la vie du campus, du week-endd’intégration à la cérémonie de remise des diplômes.Ils ont aussi pour mission de créer les fameux « JT », quiréunissent les étudiants pour voir ou revoir des imagesde soirées qu’ils auraient oubliées, des chutesimprobables lors de la semaine ski ou encore dessketchs en rapport avec la vie étudiante. Mais sesréalisations vont plus loin encore, car ses membrescréent de nombreux court-métrages, participentrégulièrement à des concours, et reçoivent aussi denombreux prix ! Moteur ... Action !Zoom (-rires-) sur Raphaël Estournet, membre du club depuisle début de l’année scolaire.

Pourquoi as-tu intégré le JTS ?Avais-tu déjà de l’expérience dansl’audiovisuel ?Oui, j’en avais. Depuis 2011, jetourne des films, certes moinsambitieux que ceux du JTS. J’é-tais parti sur un long métrage quis’est étalé sur plusieurs années,dans lequel je faisais jouer mesamis. J’ai réalisé un film qui a faitle tour de plusieurs lycées d’Eu-

rope, autour de la promotion demon lycée et de ma ville. J’ai inté-gré le JTS pour prolonger cetteexpérience après la prépa, durantlaquelle je n’ai pas fait grand-chose.

Quel est ton rôle dans le club ?Officiellement, je suis respon -sable du matériel : je gère tout lematériel image et son. Mais c’est

Les coulisses du JTS

seulement mon poste dans leclub ; sur des films, les postessont variables. On peut occuperdifférents postes sur un film. Il fautl’écrire, puis préparer le tournage,puis le tourner, le monter, l’étalon-ner et le mixer.

Le JTS réalise des courts-métrages complets. Commenttrouvez-vous les décors, les

L’acteur révisant son texte juste avant l’audition, sans oublier le vaporisateur pour ajouter aux effets spéciaux.

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La Chouette/CAMPUS

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acteurs…? Qui s’en occupe ?Tout le monde participe à tout, çamarche beaucoup par contact.Quelquefois c’est un membre quipropose la maison d’une amie…Quant aux acteurs des quatrefilms cette année, un seul a ététourné avec des acteursextérieurs à l’école. Ils venaientde l’École de l’Acteur deToulouse. Sinon, c’était des per-sonnes de Supaéro, du club ouextérieures au club. Avant dechercher des acteurs, on a uneidée du rôle que l’on veut donner,car le scénario est déjà écrit. Oncherche parmi les gens ayantdéjà une expérience d’acteur,comme ceux du club d’improvi-sation ou du club théâtre, ou alorsquelqu’un qui joue bien. Çamarche par casting. Et si tu peuxdélivrer telle ou telle émotion,alors le rôle t’est confié.

Comment se passe un tournage ?Une journée typique, c’est de 10hà 2h du matin sur des concoursen temps limité. Bref, des grossesjournées en général. A la fin, tu astous les rushs nécessaires. Pourl’organisation, nous avons despostes précis : un cameraman,un chef opérateur (qui gère lematériel technique autour de lacaméra) pour l’image. Pour leson, il y a deux postes : l’ingénieurdu son, le perchiste. Impossibled’oublier le directeur de la pho-tographie qui choisit les plans, lesmouvements de caméra exé-cutés par le cameraman. Il y aenfin le réalisateur avec le derniermot : à chaque fin de prise, ildécide s’il faut la refaire ou non. Ily a encore d’autres personnespour l’éclairage (projecteurs,panneaux LED). Pour les concours à contrainte detemps, il y a une journée de tour-nage maximum, avec en généralhuit heures de tournage pour uncourt-métrage final de trois mi -nutes. Après ça dépend de lacomplexité des plans. Pour deschamps contre-champs c’estrapide, mais pour des mouve-ments de caméra avec un décoret un éclairage minutieusementgérés, ça prend beaucoup plusde temps. Ça dépend de l’ambi-tion de ton film. Pour le plus grosprojet, c’est deux semaines detournage, et il n’est pas encoreachevé.

Et une fois le tournage terminé ?C’est le temps de la post-produc-tion qui est très longue. Parfois ongalère au montage parce qu’on aeu la flemme d’enlever une chaisedu cadre, au tournage. C’est plusfacile de corriger les choses autournage en faisant le moins depost-prod possible. Le montageest très organisé : on commencepar le dérushage, où on coupetout le superflu (les “ça tourne”,etc…). On ne garde que 25 % dutemps initial du rush. Sur les filmshollywoodiens, ils passent uneheure pour cinq secondes de film,en moyenne bien sûr. Après onsélectionne les meilleurs rushs,on les monte… On réécrit le filmau montage en fait. Le réalisateurvient régulièrement valider le tra-vail effectué par le monteur. Vientle temps de l’étalonnage, où l’ongère les couleurs des images,l’humeur du film. (Eh oui, une

caméra a une façon d’enregistrerles couleurs). Après il faut finaliser le générique,le titre, les derniers découpages ;revoir ce qui marche ou pas… etfaire le mixage du son, qui estenregistré séparément, et qu’ilfaut synchroniser. Sur un court-métrage, toute cette post-prodprend environ 50 % du temps.

Pourrais-tu nous parler deschallenges auxquels vous avezparticipé ? Nous en avons fait quatre cetteannée, le cinquième a été annuléà cause du coronavirus.Il y a eu les Cours de Novembre, àl’invitation d’une autre écoled’ingénieurs de Toulouse. Lacontrainte : seuls des élèves depremière année participent. Onavait un mois pour faire le film,mais on l’a fait en 48h, car onavait les campagnes (ndlr : celles

L’équipe duJTS relit lestoryboardavant de

commencerle tournage

de «Acte V».

Derniersréglages de caméra.

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CAMPUS/La Chouette

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du bureau des élèves) en mêmetemps. On a finalement gagné leprix du meilleur montage. C’estgratifiant quand on réalise un filmd’obtenir des prix, parce que defait, ton film est apprécié. Engénéral, comme ce sont des prixtechniques, on se dit que ça, onsait faire, on maîtrise : c’est hypergratifiant !Puis il y eu le Rush, le plus grosconcours de cette année, orga -nisé par CentraleSupélec. Pour lasélection, on a dû faire un film enun mois : c’était le pré-Rush. On abouclé le Rush aussi en 48h car ily avait la semaine ski. L’avantagedu Rush, c’est la remise des prix àCanal+. On a rencontré ledirecteur de studio Bagel, leschargés de production… On étaitdans les studios et c’était assezimpressionnant. Au pré-Rush, ona gagné le prix du meilleur film, etle prix de la meilleure photogra-phie au Rush.

Ça fait quoi de gagner ces prix ?Bah ! ça fait un objet de plus àmettre sur notre étagère quoi(rires). Blague à part, ça montrequ’on sait faire des choses. Avoirle prix de la meilleure image, c’estque tu maîtrises l’image, et si tu lamaîtrises, c’est que tu sais faireune bonne partie des com-posants d’un film. Et puis, il y a leprix en lui-même. Lors de la céré-monie, c’est génial quand tumontes sur scène avec l’équipeet que tout le monde applaudit. Eten plus, au Rush, le prix n’est pasremis par des personnesanodines : juste Guillaume Des-

jardins, le directeur de la pho-tographie de Kaamelott… il yavait la crème de la productionvidéo. Et beaucoup de beaumonde à Canal+, c’était incro y-able. Et dire qu’on a gagné le pré-Rush, ça ouvre des portes.

Justement, qu’est-ce que çaapporte à un futur ingénieur de participer à tout cela ?Déjà, faire un film, c’est une ges-tion d’équipe, car si ce n’est pasbien huilé, ton film sera moinsbon. Il faut bien s’entendre avec

son équipe : c’est une sorte demanagement, même si je n’aimepas ce mot. Nous, on rigole àchaque fois et ça fait toujours desbons moments. L’entente est pri-mordiale sur le tournage. Çaapporte beaucoup à un ingénieurdans l’audiovisuel, ce qui m’in-téresse.

Quels sont les futurs projets du club ?On a fait un concours pendant leconfinement. On n’arrête pas enfait ! Certains sont restés sur lecampus et ont écrit le scénariopar Zoom ou Skype. Sinon on tra-vaille sur l’autre facette du JTS, leJT. Ou bien on s’adonne à lapost-prod. Le seul moment où onest tous là, c’est le tournage. Carpour le reste, comme l’écriture,c’est hyper facile avecZoom/Skype.

Propos recueillis par Matis GABRYSIAK

Julie EIMERLudwig ROBIN

Photos duRush 2020

Pour nous faire découvrir lescoulisses de la réalisation d’uncourt-métrage, Raphaël a acceptéde partager des photos prises parPics (l’association photo de Cen-traleSupélec) pendant le tournaged’Acte V, film réalisé en 36 heureslors du concours Rush 2020 àCentraleSupélec. Le club y a rem-porté le prix de la photographie.

Premièrescène, où leprotagonisteattend sontour pourune auditionde théâtre.

Remise des Prix, durant laquelle

l’équipe reçoit le Prix de la

photographie.

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Projet étudiant

L’accès de lieux publics aux handicapés

L e pôle sportif de l’ISAE-Supaéro, doté d’installa-tions sportives particulière-

ment diversifiées et de grandequalité, est situé à l’extrémité ducampus, du côté de l’ENAC. Ilaccueille des rencontres spor tivesentre étudiants, de différentsniveaux, toute l’année. C’est aussiun lieu faisant partie intégrante dela vie de l’école, avec une grandeconvivialité, ce qui favorise les ren-contres et le plaisir de sedépenser. Ainsi, dès la période del’intégration en août jusqu’en juin,sportifs amateurs, compétiteurs etsupporters ont l’habitude de seretrouver autour d’un terrain, de lapiscine et souvent… finalementd’un bon barbecue pour clôturer lemoment partagé.Cependant, ce bâtiment pré -

sen te un défaut majeur : il nerespecte pas les normes dictéespar la loi d’accessibilité aux per-sonnes à mobilité réduite (PMR).Cette situation est assez embar-rassante pour nombre d’usagers :étudiants, professeurs et person-nels ou personnes externes àl’établissement (certaines installa-tions comme la piscine sontlouées à des clubs et structuresextérieurs).

Un bâtiment de 1975inadapté aux nouvelleslois d’accessibilité

La construction date de 1975. Ilentre donc dans la catégorie desbâtiments anciens, avec desrègles moins contraignantes quecelles en vigueur pour la construc-tion des nouveaux bâtiments. Unprogramme de rénovation du cam-pus a permis de remettre à neufprogressivement les résidencesuniversitaires, le restaurant et unegrande partie des bâtiments d’en-seignement. Le pôle sportif devra

patienter...Sans attendre, un groupe de 4

étudiants de première année s’estintéressé plus spécifiquement auxvestiaires de la piscine, endroit dif-ficile d’accès aux PMR. A ce sujet,Victorien Hannequin nous confie :« Nous nous sommes renducompte au cours de notreenquête de terrain que la piscinen’était plus utilisée par les per-sonnes à mobilité réduite. Pourune personne en fauteuil roulant,l’accès à la piscine est un vérita-ble parcours du combattant. Del’entrée à la sortie des vestiaires,tout est compliqué ».Les 4 étudiants se sont lancé le

défi : se rendre au bassin en simu-lant le déplacement d’une person-ne à mobilité réduite. L’expérienceest saisissante, elle nous permetde comprendre les obstacles etproblèmes d’aménagement. Par-mi les deux vestiaires attribués auxutilisateurs de la piscine, le premierest inutilisable : il faut un escalier de5 marches pour rejoindre lebassin. Nous poursuivons par le second

vestiaire, composé de cabinesindividuelles pour respecter l’inti -mité. Les 13 cabines présentes,dont aucune n’est de taille suf -fisante, nous obligent à rebrousserchemin pour revenir nous changer

CAMPUS/La Chouette

Le program-me de réno-vation a prio-risé les rési-dences étu-diantes,lerestaurant,les pôlespédago-giques. Les pôlessportifs doi-vent doncpatienter.©D.R.

Des étudiants de l’ISAE-Supaéro s’inventent architectes et proposent des innovationstechniques pour permettre à tous de profiter de la piscine de l’ISAE-Supaéro.

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dans le premier vestiaire visité.Nous retrouvons notre lieu dedemi-tour en maillot et passons la

double porte battante pouraccéder à l’espace douches-toi-lettes. Ici, même constat : les qua-tre douches, les deux toilettes etles lavabos ne nous sont pasaccessibles : trop étroits, impossi-ble donc de bénéficier de cescommodités. Afin de contournerl’escalier qui mène aussi aubassin, nous nous dirigeons aupied de la rampe d’accès dédiée.Bien loin d’être une facilité, cette

rampe présente une pente de 17%(à titre de comparaison, c’est lepourcentage de pente le plus

élevé lors de l’ascensionde l’Alpe d’Huez, colmythique du Tour deFrance), bien loin des 6%réglementaires. Aprèsavoir sollicité une aideextérieure, nous arrivonsenfin au bord du bassin…et nous rencontrons, bienentendu, les mêmesembûches à la fin de labaignade.

Investi également dans legroupe d’étudiants, Aymar LeQuéré nous résume ce parcours :« Nous avons calculé que pour untemps total dédié à la pratique dela natation de 2 heures, une per-sonne à mobilité réduite ne passeque 25 minutes dans l’eau, telle-ment elle perd de temps pourpouvoir accéder au bassin ».L’objectif du groupe a donc été

d’améliorer l’expérience des uti -

lisateurs. Après avoir cerné lesproblématiques et les besoins, lesétudiants ont donc pu proposer unsystème innovant permettant d’a-grandir la taille des cabines. Bap-tisé Modular Changing Room, leurconcept permet de déplacer lacloison séparant deux cabinesvoisines pour les fusionner et per-mettre d’accueillir les PMR. MariusChaumier nous présente sonfonctionnement : « La cloison serainstallée sur des rails pour faciliterson déplacement et un systèmed’affichage lumineux permettrad’indiquer la disponibilité simul-tanée des deux cabines individu-elles concernées. Nous avonssouhaité que les cabines puissentêtre séparées pour conserver lacapacité d’accueil du vestiaire,cette demande a été formulée parles groupes qui arrivent nom-breux et par à-coups. » En com-plément de cette techniqueingénieuse, des propositions defusion de douches et toilettes ontégalement été proposées, tou-jours pour permettre l’accès auxpersonnes en fauteuil roulant.

Un projet économique etrapide à mettre en œuvreAvec une volonté d’améliorer

l’expérience générale de tous lesutilisateurs, les apprentis archi-tectes d’intérieur se sont égale-ment intéressés à l’hygiène au sol.Ils ont proposé un nouvel itinérairedans le premier vestiaire collectifpour mieux délimiter la zone dedéchaussage. Le placementactuel de celle-ci donne lieu à dessituations étonnantes : comme elleest dans le passage, mal indiquéeet non respectée, une personneen tenue de ville et chaussurespeut être plus proche des dou -ches qu’un nageur en maillot etpieds-nus. Les jours de pluie, le soldevient un mélange de terre, d’eauet de saletés diverses, pasfranchement bienvenues. Lamaquette proposée montre que lesimple déplacement de quelquesmobiliers peut être une solutionefficace au problème de l’hygiène.L’initiative des étudiants s’inscrit

dans la lancée d’amélioration desinfrastructures du campus. Leurprojet, en plus d’être économique,offre une mise en œuvre rapide et àcourt-terme, sans attendre unerénovation institutionnelle plusglobale.

Alexandre ICHÉ

CAMPUS/La Chouette

Les «apprentisarchitectes»proposent defusionner deuxcabines voisines pouraccueillir lesPMR, par unsimple dépla-cement sur railde la cloison,qui peut ainsiretrouver saposition initiale.©DR.

«Pour une personneen fauteuil roulant,

l'accès à la piscine estun véritable parcours

du combattant »

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DOSSIER/La Chouette

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Quartier de Borderouge au Nord-Est de Toulouse, les immeubles de l’écoquartier prennent leurs aises. ©AFP

L’écologie accélère son entrée en villeLes militants Verts ne l’avaient pas prévu de cette façon. Et pourtant, ledéconfinement ouvre, encore plus grande, la brèche pour développer despratiques écologiques urbaines. La plupart des métropoles françaises ontimaginé, ces dernières semaines, des pistes cyclabes temporaires pourprévenir les engorgements automobiles après le 11 mai. Voilà un urbanismetactique, pour s’adapter aux circonstances, qui pourrait bien durer...Les initiatives écologiques foisonnent : les jardins partagés qui surgissent, àl’instar de celui d’une résidence, avenue de Grande-Bretagne, qui faitpousser les légumes sous les fenêtres des immeubles ; les moutons qu’on faitpaître jusque dans les enclos universitaires voisins de Paul Sabatier ; lesétudiants en Grandes Écoles qui développent le réseau «T4E» poursensibiliser aux comportements vertueux; sans oublier la mise en route,certes retardée, du téléphérique qui devrait alléger la pression automobiledans la partie Sud-Ouest de Toulouse.

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Les Toulousains redécouvrent la nature, après l’ouverture de plus d’une vingtaine dejardins partagés en centre-ville et en périphérie.

La nouvelle mode des jardins partagés

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les enfants découvrent, de façonludique, la nature. Créateurs deliens sociaux entre habitants d’unmême quartier, qui se croisentsans cesse sans jamais se parler,ces jardins sont des supports con-crets d’éducation au respect del’environnement, et au manger bioet local.

L’endroit est devenu unvéritable jardin familial,Le but de ces espaces verts

consiste aussi à renforcer l’impli-cation des habitants dans la viepublique de leur propre quartier.Les résidents sont assez libres,mais des règles sont tout demême mises en place pour le bonfonctionnement de ces lieux. AToulouse, une charte des jardinspartagés a été écrite pour donnerun cadre commun aux différentesinitiatives des habitants. Chaque

DOSSIER/La Chouette

Vous les avez sûrement déjàaperçus en vous baladanten centre-ville, en photo

sur les réseaux sociaux, ou dansune simple conversation. Lesjardins partagés fleurissent unpeu partout dans la Ville rose,offrant aux habitants d’apparte-ments sans jardin une évasiondans la nature à deux pas dechez eux. Ce sont des espacesverts aménagés et utilisés collec-tivement par les habitants duquartier. Libres à eux de s’y ren-dre lorsqu’ils le souhaitent pourfaire pousser toute sorte delégumes, fruits, aromates etautres plantes. Plus qu’un espace de jardinage,

le jardin partagé est un véritablelieu de rencontres, d'événementset de festivités. Des rendez-voushebdomadaires sont organiséspour du jardinage collectif, maisaussi pour des échanges convi -viaux et un apprentissage destechniques basiques de jardinageet de permaculture. Les plusexpérimentés partagent leurs con-naissances avec les amateurs, lesvoisins se rassemblent pour mettreles mains dans la terre, tandis que

jardin a ses règles spécifiquesafin de définir son fonction-nement, et pour que chacunpuisse y apporter sa pierre.Les usagers peuvent ainsichoisir leurs plantations àcondition que le jardin s’intè-gre harmonieusement dans lepaysage urbain.

Cette initiative est trèsappréciée des citadins. Oncompte aujourd’hui plusd’une vingtaine de jardinspartagés dans Toulouse et sapériphérie. Des associations de quar -

tier se développent toujoursplus pour la gestion de cesespaces, et de nombreuxhabitants prennent part auxactivités proposées. « J’aivoulu lancer cette initiativedans mon quartier car jesouhaitais installer un com-

post mais je n’avais nijardin, ni balcon »,nous explique un habi-tant du centre deToulouse, engagéécologiquement. «Trèsvite, l’endroit estdevenu un véritablejardin familial. Des

voisins à qui je n’avais jamais par-lé montraient leur curiosité, etvenaient m’aider ». Ce phéno -mène a très vite pris de l’ampleur,et de nombreux Toulousains ontrejoint le mouvement, qu’ils soientétudiants ou retraités. « La prise deconscience écologique est gran-dissante, et les habitants se met-tent à changer leurs habitudes, àse nourrir autrement », pense unétudiant jardinant au pied de sarésidence. Un site internet a même été mis

en place afin de trouver les jardinsles plus proches de chez vous :partageonslesjardins.fr. Finies lesheures en voiture pour se rendredans la nature, le rendez-vous està cinq minutes seulement, et àpied ! A vos pelles et râteaux pourdéguster les tomates de la saisonprochaine, jardinées par vos soins.

Charlotte DELMAS

Les lieux envogue de productionsmaraîchères,de rencontres mais aussi de dégustations.©AFP

Renforcer l’implication des habitants

dans la vie publique de leur propre quartier

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De décembre à janvier 2020, une expéri mentation d’éco-pâturage en milieuurbain s’est tenue sur le campus de Rangueil de l’Université Paul Sabatier, attirant lacuriosité des étudiants et autres promeneurs.

L’éco-pâturage moderne, une tradition vieille de 5000 ans…

de nombreux insectes et petitsanimaux. Avec les moutons, finisles tracteurs-tondeuses, les pro-duits chimiques et le bruit.La présence de ces laineux

dans notre quotidien est une belleoccasion pour se reconnecter à lanature, pour mieux la comprendreet la contempler. Nombreux sontceux qui venaient photographier letroupeau, voir le berger au travailou lire les panneaux explicatifs.

Un modèle à la mode…La campagne et la ferme sont

tendance et gagnent petit à petitles centre-ville. Les méthodesalternatives de culture et d’occu-

La Chouette/DOSSIER

Ce sont 2 hectares d’es -paces verts situés entrela bibliothèque universi-

taire et une résidence étudiantequi ont été entretenus pendant 2mois par 6 moutons de l’associa-tion lesdebroussailleuses.org.

Des atouts écolos…Les écologistes sont unanimes

sur le sujet, les animaux n’appor-tent que des bienfaits aux espacesverts urbains. Ils permettent unretour de la biodiversité naturelle etfertilisent les sols avec leurs déjec-tions. Ils évitent aussi l’usage desmoyens conventionnels de tontemécanique qui détruisent l’habitat

pation de l’espace urbain sedéveloppent : un peu partout, desjardins partagés poussent, desassociations de petits producteurslocaux (AMAP) fleurissent, descueillettes libres en fermesbiologiques s’organisent... lesmoutons en éco-pâturage sontdonc dans l’air du temps. Plusbesoin de se ruer au Salon de l’A-griculture pour les entendre bêlerou les voir paître.

Un retour au bercail…A trop compter les moutons, on

en oublierait presque que cettepratique expérimentale de dé -veloppement durable, favo risant labiodiversité et la transitionécologique existe depuis la nuitdes temps. Déjà à l’Antiquité, avecson chien, le berger menait sontroupeau. Au XXIe siècle, cedernier perpétue la tradition de latranshumance avec son Kangoo.

Alexandre ICHÉ

«Saute-moutons» devant la bibliothèqueuniversitairede PaulSabatier. © DR

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Depuis juillet 2019 etle lancement sym-bolique des travaux,

le chantier progresse avecl'installation des fondationsdes futures stations Univer-sité Paul Sabatier (30 000étudiants), CHU Rangueil200000 consultations/an) etOncopôle, bassin de 12000emplois dans les milieuxmédicaux et de la recher -che. Pour le moment, des

navettes "Téléo" sont misesen place et réalisent par laroute une partie du futur trajetdu téléphérique, afin d'inviterles usagers à utiliser letéléphérique dans le futur. Celui-ci permettra en effet

un gain de temps non négli -geable car il reliera en 10 min-utes la plateforme multi-modale Université PaulSabatier et les deux centreshospitaliers, pour le momentséparés par 40 minutes detrajet aux heures de pointe. Lahaute fréquence de départdes 15 cabines de 34 places(toutes les 90 secondes)offrira une solution face auxdifficultés de déplacement surla rocade. Par ailleurs, l'étudea sollicité une forte résistanceau vent et seuls des vents deplus de 108km/h provo-queront la mise à l'arrêt, ce qui

devrait assurer une fiabilitéélevée.La mise en service, prévue

initialement fin 2020, serarepoussée de quelques moisen raison du confinement liéau COVID-19 et du ralentisse-ment des travaux dus auxcontraintes sanitaires. Maissans aucun doute les futurs« supaériens » auront l'occa-sion de l'utiliser et de profiterde ce qui sera l’une desmeilleures vues sur Toulouseet ses environs. Cependant, le projet est à

l’origine de vives protestationsnotamment de la part de lacommunauté du Lycée Belle-vue, dont le parc de 35hectares devrait être survoléquotidiennement de 5 heuresà minuit par les câbles et lescabines du téléphérique, etamputé d’un espace dédié àl’installation d’un pylône.

Pierre Laurens, Proviseur dulycée Bellevue, répond auxquestions de La Chouette :

Dans quelle mesure le lycéea-t-il été sollicité dans lechoix du trajet etl’implantation de la futurestation ?Aucunement. Nous avonspris part à des réunions d’in-formation au cours des -

quelles le projet validé par lepréfet a été décrit. On nous aalors présenté, à titre infor-matif, le tracé, l’implantationdes pylônes et des stations.L’information était descen-dante et nos demandesn’ont pas été prises encompte. Le projet a bougé, aumoment où les premiersplans sont sortis, la garedevait être à la place de laloge du lycée puis a étédéplacée en face, côté uni-versité Paul Sabatier. Con-trairement à ce qui a pu êtredit, ce sont pour des raisonsd’impossibilité de construireen zone inondable que cechangement a eu lieu, et nonpour satisfaire les demandesque nous avons formulées.

Avez-vous été invité à cesréunions avant ou pendant lapériode de consultationpublique ?La période de consultationpublique, qui s’est dérouléeaprès l’approbation dupréfet, est délimitée dans letemps par des textes et c’estau cours de celle-ci que nousa été présenté l’ensemble duprojet.

Quel est le ressenti desusagers du lycée :enseignants, élèves,personnels sur le projet ?Très mauvais. Le projet estrejeté par le lycée dans saglobalité. Au niveau desélèves, ils ont manifesté leuropposition pendant la pé -riode de consultation publi -que et ont pris la parole lorsde la réunion publique quis’est tenue à l’Université PaulSabatier. Ils étaient tellementnombreux qu’ils faisaientmême la queue pour s’ex-primer ! L’équipe péda-gogique s’est aussi opposéeau projet avec commecraintes les nuisancessonores liées au passagedes cabines et au vent dansles câbles.

Vous dites que la majorité desusagers du lycée s’oppose àl’implantation prévue dutéléphérique, les deuxinstitutions liées au lycée quesont le Rectorat [pourl’enseignement] et la Région[pour le patrimoine] ont-ellesaidé le lycée à défendre sesintérêts ?Le projet ayant été reconnud’utilité publique, celui-ci

Téléphérique urbain toulousain

Le démarrage attendu par les uns, la grogne des autres

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DOSSIER/La Chouette

Toulouse se dote actuellement d'unnouveau transport en commun pourrésoudre enfin les bouchons aux heuresde pointe sur le périphérique extérieurentre l'embranchement avec l'A64 et lasortie 23 direction Rangueil. Le choixs’est porté sur un moyen assez inhabituelen milieu urbain : le téléphérique.

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La Chouette/DOSSIER

devait se faire, en particulieraprès avoir reçu l’approba-tion de Monsieur le Préfet.Pour sa part, le Rectorat n’apas vocation à soutenir ou às’opposer au projet. LaRégion, quant à elle est favo -rable au projet [la RégionOccitanie finance 8 % du pro-jet avec un apport de 6,6 mil-lions d’euros]. La Rectrice aseulement obtenu de Tisséola tenue d’une réunionpublique au cours de la con-sultation publique à l’Univer-sité Paul Sabatier et donc àproximité du lycée afin que lesusagers du lycée puissentvenir s’informer et donner leuravis.

Vous dites ne pas avoir punégocier le tracé etl’implantation desinfrastructures, mais est-ceque des mesurescompensatoires ont étéobtenues de votre part ?Non, aucune. Pour lemoment, rien ne nous a étéaccordé. Il a été convenuavec Tisséo qu’une fois lelancement du téléphériqueeffectué, des accords pour-raient être trouvés, mais rienn’a été signé. Des propositions ont étéavancées puis retirées. Parexemple, nous avons soulevéle problème de violation del’intimité du lycée, lereprésentant de la mairie a

proposé une solution pouropacifier les vitres des ca -bines lors du survol du lycéepar le téléphérique. C’est lecas pour le téléphérique deBrest. L’idée a été retirée enraison du coût engendré parl’installation de cette tech-nologie sur une quarantainede cabines. A l’instant où jevous parle il n’y a aucunemesure de compensation,d’aucune sorte.

Malgré tout, est-ce que leprojet apporte des plus-valuesau lycée, notamment enfacilitant le transport despersonnels et élèves ?Le téléphérique reliera l’Uni-versité Paul Sabatier à l’On-copôle en passant par le CHUde Rangueil : ce n’est ni lazone de développement dulycée, ni la zone de prove-nance des élèves qui habitenten direction de Castanet etPouvourville. Les professeursn’estiment pas non plus quele futur téléphérique puissefaciliter leur venue au lycée.De plus, le fonctionnementéducatif du lycée n’amènepas à se rendre au CHU ou àl’Oncopôle. Cependant, leprojet a été reconnu d’utilitépublique afin de désengorgerle périphérique toulousain etla liaison Nord/Sud de celui-ci.

Propos recueillis parAlexandre ICHÉ

Les travaux deconstruction dela station CHURangueil arrêtéspar le confinement enmars dernier.©DDM

Page de gauche :vue d’architectede la stationOncopole.©DR

Toulouse varejoindre leclub desvilles équipéesd’un téléphérique,après Brestet Grenoblequi se sontlancées avecsuccès dansl’aventure en2017 et2018. ©AFP

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Pouvez-vous nous présenterT4E et son histoire ? T4E est une association,plutôt appelée réseau, quiest née en 2018 à l’ÉcoleCentrale de Nantes àl’époque où il n’y avait pasencore de marches pour leclimat, ni de mouvementsestudiantins. Des étudiantsont voulu ainsi créer unréseau d’associations et demobilisations en France pours’entraider, échanger desbonnes pratiques et avancerensemble partout sur le terri-toire national. Cela permetaussi aux jeunes de s’appro-prier la question environ-nementale et d’avoir lalégitimité de parler de cessujets-là. Pour agrandir ce réseau petità petit, d’autres villes ont étésollicitées et notammentToulouse qui a été l’une despremières antennes de T4E.Aujourd’hui nous comptons5 antennes en France :Nantes, Bordeaux, Toulouse,Saint-Etienne et Paris-

Saclay, regroupant 60 asso-ciations qui traitent à la foisdes questions environ-nementales mais aussi desujets sociaux et solidaires. Sa raison d’être aujourd’huiest vraiment de rassemblerles étudiants et les associa-tions étudiantes à échellelocale pour agir collective-ment à grande échelle. Lesprojets inter-écoles ont ainsiun impact démultiplié grâceau nombre de personnesengagées.

Y a-t-il d’autres mouvementsétudiants de ce type en France ? En 2018, il y en avait peu.C’est en 2019 que leur nom-bre a explosé, ce qui est unetrès bonne chose. Il y a deplus en plus de mouvementsétudiants qui se positionnentsur la question de l’écologie.Par exemple Use for Climate(mouvement local qui organ-ise surtout des mobilisationset manifestations), leREFEDD (qui regroupe plus

de 130 associations, il estsurtout basé à Paris et agit auniveau des ministères) ouencore Pour Un RéveilÉcologique (qui travaille avecles entreprises et les institu-tions).

Qui sont les acteurs de T4E ? Les acteurs sont principale-ment les associations étu -diantes elles-mêmes. Il y abeaucoup d’écoles d’in -génieurs, car ce mouvementest né dans l’une d’entreelles mais une puissantestratégie est en place pour sedévelopper dans les écolesde commerces, les univer-sités et même les IUT/DUT. Malheureusement aujour-d’hui ce sont trop souvent lesétudiants des grandesécoles qui sont sensibilisés àces sujets et qui ont l’occa-sion de pouvoir s’engagerdans une association de leurécole. Nous avons vraimentenvie de nous diversifier pourne pas rester élitiste car lecombat pour l’environ-nement n’est pas un combatélitiste, c’est un combat pourtout le monde. Aller chercher ces étudiantsde toutes provenances meparait primordial pour notrelégitimité et notre réseau quise veut diversifié et à l’écoutede tous. Quels sont les projets menés

par T4E ? L’organisation des grèves duvendredi pour le climat a éténotre premier projet àToulouse, la réponse a été àla hauteur puisque beaucoupd’étudiants étaient là. Nousavons également organiséune grande « clean walk »avec la mairie de Toulouse unvendredi : c’était très chou-ette, et à l’évidence l’un desplus gros projets de l’andernier. Cette année, à Toulouse, ilssont en train d’écrire unguide des bons plans« verts » : « le petit tou écolo ».Ils sont aussi en lien avec « LaFresque du Climat » etessayent de former les étu -diants pour en animer dansles différentes écoles. Enfinils travaillent, avec l’Atécopol,pour peut-être organiser desateliers et conférences lorsdes marches du vendredi àpartir de l’an prochain et ren-dre actifs les étudiants au-delà d’une marche. Les panoplies d’activitéssont différentes selon lesantennes, les projets varientde l’une à l’autre. T4E Bor-deaux organise par exempledes maraudes et des col-lectes de vêtements tandisque T4E St Etienne a mis enplace un jardin partagé. AT4E Saclay, ils animent desconférences inter-écoles et

Together for Earth

« Un réseau étudiant national pour s’approprier la question environnementale »

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DOSSIER/La Chouette

Les étudiants savent aussi semobiliser pour les grandescauses, notamment celle del’urgence climatique et sociale.Le réseau Together For Earthregroupe des étudiant.e.s etassociations étudiantes quiveulent agir collectivement àl’échelle locale pour influer surnotre environnement. JuliePasquet, 22 ans est étudiante endouble diplôme à Sciences-poToulouse et à Toulouse businessSchool. Elle vient d’être élue à la présidencenationale de T4E, pour coordonner lastratégie globale avec un bureau de septétudiants. Julie revient sur son parcoursdepuis qu’elle animait l’antenne deToulouse, la première de France.

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La Chouette/DOSSIER

ont mis en place une épiceriecommune…Au plan national, nousessayons de créer de nou-velles antennes dans d’autresvilles comme Brest, Lille, Lyonou Marseille.

Comment est-ce que vouscréez une nouvelle antenne ? D’abord il faut se baser sur lesassociations déjà membresqui n’ont pas d’antenne dansleur ville et leur proposer ceprojet. Ensuite il faut aller

trouver une multiplicitéd’autres écoles, en essayantde repérer si des initiativesécolos existent pour les faireparticiper. Enfin, j’ai remarqué que pourlancer une antenne, il fallaitdéjà une idée de projet, unprojet qui plait et autourduquel tous vont se réunir. Tout cela continue à fonction-ner grâce aux rencontres,apéros et réunions infor -melles car les projets naissentsouvent d’amitiés.

Avez-vous déjà dû faireface à des critiques, desoppositions ? Pour l’instant nousavons de très bons relaismédiatiques. Nousavons même eu des arti-cles à notre sujet dansLe Monde et dans LesEchos qui ont généré debons effets. En général, il

y a peu de critiques. Le seuldébat, qui s’est posé un jour,concernait la légitimité deT4E : est-ce que T4E a dusens et sert à quelquechose? Y a-t-il une véritableplus-value par rapport auxassociations membres ?Pour l’instant la réponse estoui. Après une longue réfle -xion avec le REFEDD etPURE, ceux qui nousressemblent le plus, nousavons conclu que nousavions notre place et que

nous apportions quelquechose à toutes ces associa-tions étudiantes.

Au planu national, quels sontvos projets en cours et pour le futur ? Nous sommes en train deredynamiser les réseaux. Ilfaut les mobiliser en faisantsavoir que T4E peut les aideren les mettant en lien avecd’autres associations pourprofiter de leur expérience.Pour cela on les contacte aucas par cas pour échanger etmettre en commun des idées. Pendant le confinement, on alancé le hashtag « #con-finéavecdesidées » pourgarder une énergie positivemalgré l’arrêt des activités :on partage ainsi chaque jourdes initiatives qui ont été pri -ses un peu partout en Francecette année.Un autre gros projet pour larentrée consiste à introduire« la Fresque du Climat » dansles processus d’intégrationdu plus grand nombre d’é-coles possibles. Enfin nous sommes en traind’organiser le week-end T4Equi rassemblera toutes lesassociations membres enoctobre/novembre prochain.

Propos recueillis par Anaïs BOUCHET

Julie EIMER

Un ateliersur la

Fresque duClimat àl’ESCPEurope@AFP

Julie PASQUET,nouvelle présiden-te nationale etétudiante à l’IEPde Toulouse, veutactiver lesréseaux et créerdes antennesdans plusieursvilles universi-taires©DR

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Le 8 avril, le sénateur Bernie Sanders, alors candidat pour le présidentielles 2020 desÉtats-Unis, annonçait la fin de sa campagne, laissant ainsi la place à son adversaireJoe Biden.

Primaires démocrates aux USA

Bernie Sanders, le candidat trop en avance pour son pays

Il semblait inarrêtable fin février,aux élections primaires duNevada à Las Vegas. Fort deses victoires dans l’Iowa et leNew-Hampshire, Sanders

avait surpassé son concurrentprincipal, ancien vice-présidentd’Obama, Joe Biden, le 10 fé -vrier dans les sondages d’inten-tion de vote. Sa campagne, annoncée le 19

février 2019 était la première àavoir reçu des donations de plusd’un million d’individus (une partie

importante des élections auxÉtats-Unis), avec une cagnottedépassant les 75 millions de USD. Sa volonté de centrer son dis-

cours sur les problèmes ignoréspar les nombreux autres candidatsattire alors les minorités his-paniques et les jeunes ralliés à sacause. Le soutien de la jeune élue au

Congrès américain, AlexandriaOscario-Cortez, leader de la jeuneAmérique démocratique, faitd’ailleurs démarrer sa candidatureau quart de tour.

Véritable candidat du change-ment, Sanders s’occupait surtoutdu contenu de ce qu’il proposait.Pendant que les autres candidatss’attachaient avec leurs équipes àmodifier le discours pour s’adapteraux velléités de l’électorat. San -ders pensait que la nécessité derestructurer le système américainserait suffisante pour déclencherune vague de jeunes votants etporter sa candidature. Trop con-centré sur sa lutte contre l’esta -blishment, il en a oublié de lutter

contre ses adversaires. Le problème avec cette

stratégie réside dans le profondsentiment anti-travailliste de lamajorité votante. En effet, lesÉtats-Unis adoptent une politiqueplutôt antisociale, dépensant plusde moitié moins que les Françaisen pourcentage de leur budgetpour les aides sociales.En effet la majorité des votant

modérés, c’est-à-dire la base cru-ciale à son élection, le considéraittrop à gauche. Ses promessesélectorales telles que le Medicare

pour tous ou la création d’univer-sité publique gratuite vont à l’en-contre du votant américain mo -déré.Face à la multitude d’idées qui

semblent révolutionnaires auxÉtats-Unis, Joe Biden fait figured’option plus sûre : démocrateaguerri par son mandat auprèsd’Obama, et aux idées plus tradi-tionnelles.Même affilié au parti démocrate,

Sanders, indépendant à la base,ne partage pas les mêmes idéesque le Democratic National Comi-tee, entité chargée du partidémocrate à l’échelle nationale.Celui-ci aurait probablement toutfait pour empêcher sa nominationen tant que candidat officiel du par-ti démocrate. L’affiliation deSanders au parti démocrate étaitsurtout une façon de profiter deson électorat et de la force defrappe du parti.

Des mesures-choc pourcapter l’électorat SandersC’est ainsi que le 3 mars, lors du

super Tuesday alors que sedéroulaient les primaires dans 15États, la campagne de Sanders abasculé, perdant 10 des 15 Étatsau profit de Joe Biden. Un véritablebâton dans les roues de la cam-pagne de Sanders incapable deconserver les États qu’il avait sifacilement gagnés lors des cam-pagnes de 2016, tels le Maine oule Minnesota. Une perte amèrepour le camp Sanders.Bernie n’ayant pas le vote des

communautés afro-américainesdans les états du sud-Alabama,des Carolines, du Mississippi et dela Virginie, ces états basculentégalement du côté de Biden, con-firmant alors la tendance.La perte, à 1% près, de l’État de

Washington qui était selon JohnWyble, un conseiller démocrate duWashington, « un des derniersÉtats ou Bernie pouvait montrersa force » a parachevé la défaite . L’annonce enfin du confinement

MONDE/La Chouette

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Représen -tation desrésultats desprimairesdémocrates.©Tony Patt

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La Chouette/MONDE

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a été le dernier clou dans le cer-cueil de la campagne de Sanderscassant totalement l’énergie desjeunes votants qui portaientjusqu’alors sa campagne. Bernien’avait d’autre alternative que d’an-noncer alors la fin de sa campagnele 8 Avril.Tout en annonçant son soutien

pour la campagne de Joe Biden,Sanders souhaite amasser dusoutien pour mettre la pression surson concurrent lors de la conven-tion nationale du parti démocrate.

C’est-à-dire que pour séduirel’électorat de Bernie Sanders,Biden va devoir proposer desmesures-choc pour montrer unesorte d’entente entre les camps.Ce compromis sera crucial face àla campagne que mène le prési-dent Trump.Bien sûr, la pandémie du Covid-

19 va jouer un rôle crucial dansl’élection, avec plus de 18 millionsd’Américains ayant perdu leuremploi à la date du 29 avril, mettantainsi en avant les inégalités et les

lacunes du système social enplace dénoncées par Sanders.Par ailleurs, la décision du NewYork state Board of Elections d’an-nuler le vote dans l’état de New-York, qualifiée d’une « atteinte à ladémocratie américaine » par lecamp Sanders.Cependant la course de

Sanders pour être candidatdémocrate aura permis plusieursavancées : un mouvement du par-ti démocrate vers la gauche et unerévolution dans la méthode de le -vée de fond s’appuyant davantagesur les petits donateurs plutôt quesur les grands contributeurs.

Isaac Zidoum

L’électorat de Sanders se dessine dans ce gra-phique de la proportion de votant selon latranche d’âge dans la primaire au Nevada. © New York Times

Sandersdevant leIowaDemocratsHall of Fameen Juin 2019©LorieShaull

Biden devraproposer desmesures-chocpour séduirel’électorat ducandidatSanders©AFP

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L’utilisation du chlordécone en Mar-tinique et en Guadeloupe est unscandale sanitaire sans précé-

dent. Il a été produit et répandu dans lebut de lutter contre la prolifération ducharançon noir, un insecte particulière-ment nuisible pour les bananiers, maisen rendant ceux-ci très sensibles auxphénomènes climatiques tropicauxentre autres. L’économie agricole deces deux îles repose sur la culture de labanane et son exportation en Francemétropolitaine. De ce fait, les dirigeantsde plantations, et l’État par le biais duministère de l’Agriculture, ont fortementfavorisé l’utilisation du pesticide. C’estainsi qu’entre 1972 et 1993, près de300 tonnes de chlordécone ont été uti -lisées aux Antilles, soit un sixième detoute la production mondiale.Or, depuis les années 70, la toxicité et

surtout la rémanence de ce produit sontconnues. Ce pesticide empoisonnera lessols où il a été répandu pendant 700 ans,et 90 % de la population de ces îles est

,contaminée. L’utilisation du chlordéconea aussi eu un impact sur l’économie deces deux îles, que ce soit dans l’agricul-ture ou la pêche. En effet, la diminutiond’exploitants agricoles et de pêcheursobservée à l’échelle du pays a été accen-tuée par les premières mesures sanitairesprises lorsque la contamination des eauxet des sols a été pour la première foisclairement démontrée.

Une réaction très lente des autoritésMalgré les premières traces de pesti-

cides relevées dans certaines rivières deMartinique et de Guadeloupe dès ledébut des années 90, il a fallu attendre1999 pour que le chlordécone soit spéci-fiquement recherché lors de tests effec-tués sur les eaux. Elles présentaient unfort taux de concentration de ce pesticidetel que des sources et des rivières ont étéinterdites d’extraction. C’est pourtantseulement en 2003 que des actions con-

ce r téespar desautoritésont étémenées,d’abordp a rl ’obl iga-tion detester lessols avant la mise en culture de légumesracines et en 2004 par l’interdiction depêcher dans certaines zones du littoral. En 2008, l’État présente son premier

plan d’action. Les principales mesuresvont promouvoir des solutions sanitaires àcourt terme. Parmi les plus importantes :la mise en place d’un registre des cancersen Guadeloupe (il en existait déjà un enMartinique) et la mise en place du Pro-gramme « Jardins Familiaux ». Ce pro-gramme permet de communiquer auxhabitants les types de plantes à cultiveren fonction du taux de contaminationd’une parcelle (en effet, le chlordécone,même dans une parcelle très conta -minée, n’agit que sur les légumes et fruitspoussant près du sol). Le plan chlordécone II sera lui aussi très

axé sur la prévention des risques sani-taires à court terme et ce n’est que le planIII qui développera des actions de préven-tion des risques sanitaires à plus longterme et une meilleure prise en comptedes problèmes économiques et sociaux.Cependant, la mise en place de cesplans et leur réalisation font encoreaujourd’hui l’objet de nombreuses cri-tiques.

Des décisions trop éloignéesdes réalités du terrainUne des premières critiques émise par

les personnes auditionnées dans la com-mission d’enquête concerne le pilotagedes trois premiers plans. Trois orga -nismes été chargés du pilotage de cesplans jusqu’en 2014 : la Directiongénérale de la santé, celle de l’Outre-meret le ministère de l’Intérieur pour le suivi

Le 27 septembre 2018, le Président de la République areconnu la responsabilité de l’État dans le scandale sanitairedu chlordécone en Guadeloupe et en Martinique. Unecommission d’enquête parlementaire a rendu son rapport ennovembre 2019 visant à établir l’historique de l’utilisation dece pesticide dans ces territoires, et dressant un bilan sur lesdifférentes actions mises en place par l’État depuis 2008.

Martinique-Guadeloupe

Chlordécone : la faillite de l’État

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DOM/La Chouette

Le président Macron, lors d'une visite d'une ferme centrée sur la pollutiondes sols par le chlordécone, le 27 septembre 2018. ©Thomas SAMSON/AFP

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budgétaire. Ce n’est que lorsdu plan III que la coordinations’est faite localement, via lespréfectures. Sans compterque les habitants n’ont jamaisété consultés lors de la miseen place des trois premiersplans. Cela explique peut-êtrela léthargie des administra-tions centrales dans la miseen place du premier plan entre2003 et 2008, et le sentimentde discrimination qu’ont puressentir les Martiniquais etGuadeloupéens : l’État aurait-il mis autant de temps à réagirsi cette crise s’était dérouléesur un territoire métropolitain ?La gestion du financement a aussi été

critiquée, car les fonds alloués par l’Étatn’ont jamais été totalement utilisés etsurtout parce qu’aucun financementeuropéen n’a été demandé. La communi-cation autour de ces plans est aussidéplorée, jugée peu efficace ou trop an -xiogène, et les volets économiques ontété très peu pris en compte.

De nombreuses pistesd’améliorationL’État veut rendre justice aux travailleurs

de la banane. Des plaintes contre X ontété déposées depuis le début du siècle,mais elles n’ont jamais abouti au lance-ment d’une enquête. Les victimes duchlordécone ne pourront jamais con-damner les exploitants agricoles respon-sables de sa diffusion et les distributeursde ce produit, à cause du délai de pres -cription de dix ans, mais l’État a reconnu

sa responsabilité et un fond d’indemnisa-tion des victimes devait être créé.L’implication des citoyens dans la mise

en place des plans est repensée, toutcomme la communication et les con-séquences économiques vont êtreétudiées pour pouvoir soutenir lespêcheurs et tous les exploitants agricolespour pallier les manquements liés à lacontamination des sols par le chlordé-cone. La cartographie des sols contaminés

s’accélèrera : aujourd’hui seulement 6,3% des surfaces agricoles en Guadeloupeet 16,8 % en Martinique ont été testés.

Un nouvel obstacle

Ainsi, le rapport de la commission d’en-quête propose 49 recommandationspour améliorer la gestion de cette crisesanitaire grave, et les nombreuses erreurscommises par l’État dans le passé sem-

blent avoir été prises en compte. Cepen-dant, avec l’arrivée du Covid-19 dans lepays et son impact sur la santé publique,mais aussi sur l’économie, les proposi-tions vont-elles être mises en œuvre ? Leplan chlordécone IV de 2020 est censéprendre en compte les pistes d’actionsdonnées par cette commission et attendleurs concrétisations. La crise sanitaireactuelle va-t-elle occulter celle, plus insi-dieuse, du chlordécone ? L’espoir que lespropositions se transforment en acte esttoujours permis… pour l’instant.

Matis GABRYSIAK

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La Chouette/DOM

Des militantsanti-chlordéconeont bloqué l'en-trée du palais dejustice après latenue d'un pro-cès à haute ten-sion de sept mili-tants, à Fort-de-France, enMartinique,le 13 janvier2020.©AFP

Le chlordécone(ci-dessous lamolécule) est un pertur-bateur endocrinienavéré, un neurotoxiqueclassé cancérogènepossible en1979.©DR

Historique de la crise

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Le Splendid fermé, dans le quartier des Brotteaux.

Leparcde laTêted’Orauxcou-leursduprin-temps.

CORONAVIRUS

Lyon confinéLes Lyonnais respectent globalement

le confinement. Tout juste croise-t-on des cyclistes,

des joggeurs et les passants lestésdes sacs de provisions. Tous restent

à distance les uns des autres.

Reportage photos dans les rues de LyonCharlotte DELMAS

Les berges du Rhône vides,si prisées habituellement.

Les pentes de la Croix-Rousse désertées.

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Les oies baguenaudent sans être dérangées.

La Chouette/PORTFOLIO

Le parc de la Tête d’Or, grande ressourcenaturelle du quartier, fermé.

La place des Brotteaux, avec quelques habitants du quartier.

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Fessenheim : les conséquencesde la fermeture

La fermeture de la plus ancienne descentrales nucléaires françaises n’aurapas été sans sacrifices de la part de l’Etat.Celui-ci a dû consentir à verser uneindemnité de 400M€ à EDF pour fermer lacentrale, dont la fin de vie théorique étaitinitialement prévue en 2041. Il a égale-ment dû s’engager à poursuivre la con-struction de l’EPR de Flamanville et àautoriser le redémarrage du réacteur n°2de la centrale de Paluel (qui avait étéarrêté en 2016 suite à un incident demanutention à l’arrêt).

De son côté, RTE (Réseau de transportd’électricité) déclare que cette fermeturene sera pas sans conséquences : pour larégion Grand Est, elle signifie notammentà court terme un plus grand recours à la

production allemande(dont le gaz et le charbonreprésentaient 53,2% dela production d’électri -cité en 2012).

Enfin l’impactéconomique risque dese faire sentir localement: en effet ce ne sont pasmoins de 2100 salariésqui vivent de l’activité dela centrale dont 1100 quitravaillent directement sur le site. Et bienque l’Etat se soit déjà engagé à apporter30M€ pour financer une trentaine de pro-jets en vue de la reconversion du site, lemaire de Fessenheim, Claude Brender,dénonçait en 2019 un manque de prépa-ration sur le plan économique, et l’ab-sence de remplacement des emploisperdus dans l’immédiat. A Fessenheimpar exemple ce sont en effet 300 des2300 habitants de la commune qui tra-vaillent directement sur le site, et le mairea déjà déclaré que « la survie de 29 com-munes et d’une intercommunalité sont enjeu ».

La stratégie française pour la transition énergétique

La décision de fermer le site de Fes-senheim s'inscrit dans la volonté de laFrance de réduire la part du nucléairedans sa production d'énergie de 75% à50% en moyenne annuelle d'ici 2025,volonté qui a été établie dans la Program-mation Pluriannuelle de l'Énergie (PPE). Acette fin, celle-ci prévoit notamment la fer-meture de quatre à six réacteurs d'ici2028, dont ceux de Fessenheim.

Plus précisément, la ministre de l'Envi-ronnement, Elisabeth Borne, confirmevouloir réduire la part du nucléaire à 50%,seulement d'ici 2035 (un écart de 10 anspar rapport au PPE), consacrer 1,8 mil-liard d'euros supplémentaires au biogazet augmenter de près de 40% la capacité

éolienne en mer. A long terme, l'objectifde la France est donc d'atteindre la neu-tralité carbone d'ici 2050.

La volonté de la France d'atteindre laneutralité carbone s'inscrit dans le cadrede la stratégie européenne sur les émis-sions de gaz à effet de serre. En effet, fin2019, la Commission européenne aprésenté le Pacte vert pour l'Europe, unensemble de mesures extrêmementambitieuses qui devraient permettre àl'Europe de devenir le premier continent"neutre en carbone" au monde d'ici 2050.

Dans ce contexte, le paquet climat-énergie de l'Union européenne pour2020 prévoit pour la France et l'Alle-magne une réduction des émissions degaz à effet de serre d'au moins 20 % parrapport à 1990. Alors que l'objectif ducadre climatique et énergétique pour2030 prévoit, quant à lui, une réductiondes émissions de gaz à effet de serre d'aumoins 40 % par rapport à 1990.

Ces objectifs sont particulièrementambitieux pour l'Allemagne qui, en 2017,était le 9e plus grand émetteur de CO2par habitant (avec 8,7 tonnes/hab/ancontre 4,56 tonnes/hab/an pour laFrance, qui se situe au 18e rang).

Les engagements allemands

Afin de limiter l'impact du réchauffe-ment climatique, l'Allemagne, toutcomme la France, s'est engagée, parl'accord de Paris de 2015, à réduire ses

Promise par François Hollande en 2012,Emmanuel Macron l’a fait : dans la nuit du22 au 23 février, le réacteur n°1 de lacentrale de Fessenheim était mis à l’arrêt,initiant la fermeture du site qui sera actéeen juin avec l’arrêt du réacteur n°2.Pourtant, bien que les Français aientsoutenu largement cette fermeture avec65% d’opinions favorables en 2014 (Ifop),on peut encore aujourd’hui s’interroger surle caractère fondé de cette décision.

Nucléaire

Cohérence écologique

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ÉNERGIE/La Chouette

Sécurité : l’avis de l’ASN

Selon le rapport de l’ASN (La sûreténucléaire et la radioprotection en France en2018), la centrale nucléaire de Fessenheimcomprend deux réacteurs à eau sous pres-sion d’une puissance unitaire de 900 MWe,qui produisent l’équivalent de la consomma-tion d’électricité de l’Alsace (de l’ordre de 12TWh annuels). Elle est située à 1,5 km de lafrontière allemande et à 30 km environ de laSuisse. Les deux réacteurs, ont été mis enservice en 1977.L’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) consi -dère que les performances en matière desûreté nucléaire du site de Fessenheim, dansla continuité des années précédentes, se dis-tinguent de manière favorable par rapport àla moyenne du parc. En matière de protec-tion de l’environnement, le site reste à unbon niveau. Enfin, dans le domaine de laradioprotection, le site rejoint l’appréciationgénérale portée sur EDF.”

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émissions de gaz à effet de serre.D’ailleurs, les deux pays se sont engagésà procéder à une transformation majeurede leurs systèmes énergétiques. En ter-mes d'objectifs, il est intéressant de noterla forte convergence des stratégiesfrançaises et allemandes.

La transition énergétique de l'Alle-magne repose essentiellement sur leconcept énergétique du gouvernementde septembre 2010 (BMWi et BMU2010), à la différence qu'en 2010, lenucléaire devait encore être considéré entant que technologie de transition. La pre-mière loi sur les énergies renouvelablesest entrée en vigueur en 2000 afin decréer un cadre favorable à la productiond'électricité à partir de sources renouve-lables grâce à un tarif de rachat sur 20 anset à l'obligation pour les gestionnaires deréseau d'acheter cette électricité en prio -rité. Cette loi a été régulièrement adaptéepour ajuster les objectifs de développe-ment des secteurs des énergies renouve-lables. Deuxièmement, la "loi atomique2011" (AtG 2011) du 6 août 2011 con-firme la fermeture immédiate et définitivede 8 réacteurs. Pour les 9 réacteursrestants, un retrait progressif avec unedate limite est prévu. Les derniers réac-teurs seront définitivement fermés à la finde l'année 2022.

Le 14 novembre 2016, le gouverne-ment allemand a adopté le Plan Climat2050 (Klimaschutzplan 2050) par lequell'Allemagne pourrait atteindre ses objec-

tifs de réduction desémissions de gaz à effetde serre pour 2050, soitune réduction de 80 à95% de CO2� par rap-port à 1990. En outre, laloi fédérale fixe desobjectifs juridiquementcontraignants en matièred'émissions de gaz àeffet de serre pourchaque année et pourchaque secteur éco -nomique et augmentel'objectif de « neutralitécarbone ».

Suite aux recomman-dations de la « Commis-sion du charbon » de jan-vier 2019, le Conseil desministres a adopté leprojet de loi sur l'élimina-tion progressive descentrales électriques aucharbon et au lignite.L'Allemagne vise à éli -miner progressivementces centrales d'ici 2038au plus tard. Dans lemême temps, elle fer-mera ses centrales au

lignite, avec une compensation de 4,35milliards d'euros pour les centralesdéclassées avant 2030.

La part des énergiesrenouvelables dans laconsommation d'énergie

Le nouvel objectif de l'UE pour 2030 estde porter la part des énergies renouve-lables à au moins 32 % de la consomma-tion finale d'énergie, avec une clause derévision à la hausse d'ici 2023. L'objectifde l'Allemagne pour 2030 est de 30 %,tandis que la France vise une part de33 %. Cette augmentation des énergiesrenouvelables est prévue dans tous lessecteurs (solaire, éolien, hydraulique)mais devrait être particulièrement mar-quée dans la production d'électricité.

Le pilier majeur de l'efficacité énergétique

En ce qui concerne la réduction de laconsommation et de la diminution de l'in-tensité énergétique ou de l'augmentationde la productivité énergétique, les objec-tifs sont assez similaires et conformes auxobjectifs de l'Union européenne visant àaméliorer l'efficacité énergétique de 20 %.Pour 2030, l'objectif de l'Unioneuropéenne est d'augmenter l'efficacitéénergétique d'au moins 32,5 %, c'est-à-dire une diminution de la consommationd'énergie dans la même mesure par rap-

port au scénario de base de 2007. LaFrance a fait une première estimation desa contribution à l'objectif européen deréduction de la consommation finaled'énergie, c'est-à-dire après transforma-tion des ressources, d'ici 2030, soit117,6 Mtep (une réduction d'environ 20% par rapport aux 149,3 Mtep de 2012).L'Allemagne, pour sa part, a fixé un objec-tif de réduction de 30 % de la consomma-tion d'énergie primaire d'ici 2030 et de 50% d'ici 2050 par rapport à 2008.

Le choix purement national de l’énergie nuclaire

L'objectif initial de la France de réduirela part du nucléaire à 50 % (contre plus de70 % aujourd'hui) de l'électricité produiteen 2025 a été reconnu comme irréalistepar les autorités politiques. Pour réduire laproduction d'énergie nucléaire, la feuillede route énergétique française prévoit lafermeture de 4 à 6 réacteurs nucléairesd'ici 2028 (y compris ceux de Fessen-heim) et de 14 des 58 réacteursnucléaires au total d'ici 2035. Celareprésente la fermeture d'un quart desréacteurs en exploitation, contrairement àl'Allemagne, où l'abandon définitif dunucléaire d'ici 2022 est considérécomme irréversible.

Malgré un développement exception-nel des énergies renouvelables, l'Alle-magne est sur le point de manquer la plu-part des objectifs qu'elle s'était fixés dansle cadre de sa transition énergétiquelancée en 2011. En dépit d'une diminu-tion des émissions de gaz à effet de serredepuis 2018, l'objectif phare de « Réduc-tion de ces émissions de l’ordre de 40 %par rapport à 1990 » a peu de chancesd'être atteint, à moins d'une baisseexceptionnelle des émissions, notam-ment en raison de l'épidémie de coro -navirus. Par ailleurs, dans son rapportspécial, la Cour des comptes allemandecritique vivement le pilotage de la transi-tion énergétique par le ministère fédéralde l'économie et de l'énergie. La perfor -mance de la transition énergétique diffèrefortement des objectifs fixés.

Les mesures prises actuellement, enparticulier l'accent mis sur le secteur del'électricité, se sont révélées insuffisantes.Dans les années à venir, peu de progrèsseront réalisés dans la réduction desémissions de CO2 dans le secteur del'énergie, même si d'ici 2022, l’Allemagneétait en mesure de remplacer les 75 TWhrestants de production d'énergienucléaire à faible teneur en carbone pardes sources d'énergie renouvelables.

Lorsque l'abandon définitif de l'énergienucléaire d'ici 2022 a été décidé en 2011après l'accident de Fukushima, l'opinionmajoritaire était que le nucléaire et le char-

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contre idéologie politique

La Chouette/ÉNERGIE

La centrale deFessenheim©AFP

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bon ne pouvaient être éliminés en mêmetemps sans compromettre la sécurité del'approvisionnement dans les situationsde faible production éolienne et photo-voltaïque. Par la suite, en signant l'accordde la Conférence sur le climat en 2015 àParis, l'Allemagne s'est engagée à réduireles émissions de gaz à effet de serre, cequi a mis les décideurs politiques souspression concernant leur politique demaintien de la production d'électricité àpartir de charbon et de lignite.

Deux piliers de la production d'électri -cité conventionnelle seront donc sup-primés dans les années à venir avec l'a-bandon progressif de la productiond'électricité à partir de charbon/lignite etdu nucléaire. En conséquence, l'Alle-magne perdra d'un seul coup plus de 20GW de capacité contrôlable d'ici la fin de2022, y compris l'énergie nucléaire. D'ici2038, c'est-à-dire en moins de 20 ans,plus de 50 GW de capacité contrôlabledevraient être remplacés par rapport à2019, soit la moitié de la capacité con-ventionnelle actuelle.

Le nucléaire exclu de la solution

Le rejet du nucléaire par l’Allemagnedans l’équation de la transitionécologique et de la réduction des gaz àeffet de serre, provient de la défiance queporte une part de la population vis-à-visde cette énergie. Pour les mêmesraisons, l’Ifop évaluait à 47% la part de lapopulation favorable à la fermeture descentrales nucléaires en France.

Pourtant, de nombreux arguments desanti-nucléaires sont à nuancer, voire àréfuter :• Un parc nucléaire vieillissant

Avec une moyenne d’âge de 35 ans, ilest vrai que plusieurs réacteurs françaisont vu leur durée de vie initiale de 40 ansprolongée, cela ne s’est pas fait au détri-ment de la sécurité : ainsi en 2015 le PDGd’EDF Jean-Bernard Levy annonçait unplan de modernisation de 55 milliards sur10 ans afin de prolonger la durée de viedes réacteurs en service à 50 voire 60ans.

Si l’enjeu financier est indéniable (unréacteur devenant rentable en généralpassé 25-30 ans d’exploitation), ce pro-longement de la durée de vie permetégalement d’assurer la transition avec lesréacteurs de 4ème génération dont l’EPRde Flamanville doit être le précurseur.

Quoi qu’il en soit, le maintien en fonc-tionnement d’un réacteur reste condition-né au parfait état de ses installations, con-trôlées régulièrement par l’ASN. Leséléments les plus inaccessibles (cuve,circuit primaire, etc) font également l’objetd’un contrôle rigoureux lors de la visite

décennale obligatoire durant laquelle leréacteur est mis hors service.

Si les conséquences liées à une catas-trophe nucléaire sont importantes, et bienque le risque zéro n’existe pas, la proba-bilité d’une catastrophe nucléaire enFrance reste quasi nulle, tant par le con-trôle qui est apporté aux installations, quepar l'exécution stricte des procédures etla faible intensité des évènements clima-tiques et sismiques sur le territoire.

Si la sécurité du parc nucléaire françaisest solide, on peut s'interroger enrevanche sur les projets de nucléaire civildans certaines régions, notamment enAfrique et au Moyen-Orient où l’instabilitégéopolitique et les standards de sécuritépeuvent justifier une forte inquiétude.

• Une source importante de pollutionIl n’est pas inutile de faire un rappel.

Contrairement à ce que déclaraient 69%des Français en 2019 (sondage BVA), lenucléaire ne participe pas au dérègle-ment climatique. En effet il émet, à pro-duction égale, la même quantité de gaz àeffet de serre qu’une éolienne, du fait dutransport des matières premières et desactivités de maintenance.

Le nucléaire émet néanmoins desdéchets radioactifs dont la dangerosité etla durée de vie rend le traitement délicat.Les centrales sont la principale source dedéchets à haute activité et longue duréede vie, qui représentent 0,2% du volumede déchets et concentrent 96% de laradioactivité. Ces derniers nécessitent unstockage dans des installations très pro-

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ÉNERGIE/La Chouette

Les Allemandsmilitants de latransition éco-logique nedésarment paspour obtenir lafermeture descentrales àcharbon et descentralesnucléaires. Ilscomptent bienmaintenir lapression sur lesdécideurs politiques©AFP

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fondes, et sont,malgré les précau-tions prises, la source légitime de nom-breuses inquiétudes à très long terme.

• Une source d’électricité coûteuseLà encore, bien que 68% des Français

considèrent qu’il s’agisse d’une énergiechère à produire, le nucléaire est l’unedes sources d’énergie les moins chères,soit environ 60€ le MWh.

Ce prix, qui a augmenté afin de financerle prolongement de la durée de vie descentrales, reste cependant bien inférieurau coût de l’éolien, situé autour de 80-90€ le MWh.

Sur ce point, les seules sources d’é -nergie plus compétitives que le nucléairesont le gaz (60€/MWh) et surtout l’hy-

draulique (15-20€/MWh). Cependant lespossibilités de constructions de grandesinstallations hydrauliques sont limitées etde plus en plus rares en France.

Le prix de l’électricité d’origine nucléairedevrait cependant encore augmenter,notamment à cause du vieillissement duparc, mais aussi à cause du retard dans laconstruction de l’EPR de Flamanville dontle coût est passé de 3,3 milliards à 10,9milliards en 2019.

Cohérence écologique contre idéologie politique : il faut choisir

La transition énergétique est un sujetdes plus importants, demandant la mise

en place d’un plan à très long terme, etdont l’objectif prioritaire doit être la réduc-tion de nos émissions de gaz à effet deserre.

Le nucléaire, pâtissant de sa tristeréputation acquise suite à trois catastro-phes, est de plus en plus marginalisé.Néanmoins, ce rejet est bien plus souventporté par des politiciens surfant sur lescraintes de la population, que par des scientifiques qui se limitent généralementà souligner les dangers et la prudenceavec laquelle nous devons exploiter cettesource d’énergie.

Généralement présentée comme unexemple, l’Allemagne nous donne unavant-goût d’une transition énergétiquequi se passerait du nucléaire. Pour cer-tains, c'est un modèle à suivre, pourd'autres, c'est un véritable fiasco. Carselon des observations attentives, ilapparaît que l'Allemagne n'atteint pas derésultats satisfaisants en matière de tran-sition énergétique. On ne peut que constater la schizophrénie du gouverne-ment allemand qui, en s'engageant à lafois dans les accords de Paris de 2015 eten promettant une sortie du nucléaire d'ici 2022, se trouve dans une positiondélicate.

On notera notamment que la lenteur dedéveloppement du réseau a provoquéune hausse importante des interventionsdes gestionnaires des réseaux allemandspour éviter les coupures de courant. Deplus les ménages allemands payent unkWh parmi les plus chers en Europe(0,3088 € TTC/kWh contre 0,1765 €TTC/kWh en France) tandis que l’industrieélectro-intensive est protégée sous laforme d'un dégrèvement partiel du sou-tien aux énergies renouvelables et con-serve un tarif compétitif à l'international.L'objectif national d'une réduction de 40%des gaz à effet de serre par rapport à1990 est hors de portée. En effet, selonun rapport du ministère de l’environ-nement, révélé par la presse allemande etcité par Le Monde, “ le fossé qui sépare leniveau des émissions actuelles à l’objectifest bien plus profond que prévu. Sanscorrection, la réduction à la date prévuene sera que de 32,5 %, au pire de 31,7 %.

Ainsi, les objectifs environnementauxdeviennent difficiles, voire impossibles àatteindre et le nucléaire apparait de faitcomme une étape obligatoire de la transi-tion énergétique, qui ne peut être éclipséeau profit de manœuvres politiciennes. Enoutre, force est de constater que la fer-meture d'une centrale nucléaire a desimplications bien plus importantes que lasimple réorientation de la productiond'électricité, remettant parfois en cause lefonctionnement de tout un territoire. Enfin,si une grande prudence est recom-

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La Chouette/ÉNERGIE

Le nouvelobjectif de l'UEpour 2030 estde porter la

part des énergies

renouvelablesà au moins 32

% de laconsommation

finale d'énergie,

Cette augmen-tation est pré-vue dans tousles secteurs

(solaire, éolien,hydraulique,

biogaz)mais devrait

être particulière-

ment marquéedans la produc-

tion d'électricité.

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Tout d’abord, qu’est-ce que le lithium ?C’est le plus léger des métaux,qui sans être rare, n’est pas très

abondant dans la croûte terrestre (33e

élément le plus abondant). Ce sont sespropriétés électrochimiques qui le ren-dent intéressant : les batteries lithium-ion (ou accumulateurs lithium-ion) sontavantageuses en électronique, et trèsutilisées aujourd’hui dans les systèmesembarqués. Cependant, leurs coûtsde production sont élevés, ce qui limiteleur propagation à d’autres domainesde l’électronique. Mais ces dernièresannées, la demande de lithium aexplosé, et l’investissement dans larecherche de lithium a doublé en 2017.

Quels pays dans le monde possèdent desréserves de lithium, qui en produit ? Selonl’United States Geological Survey de cedébut d’année (USGS), les ressourcesultimes (c’est-à-dire présentes dans lesol) s’élèvent à 80 millions de tonnes,dont 58 % dans le Triangle du lithium(Bolivie, Argentine, Chili), 8 % en Australieet 6 % en Chine. En revanche en 2018,55 % de la production de lithium étaitassurée par l’Australie (58 800 tonnes sur77 000), suivie par le Chili et la Chine. Desprojets d’exploitation impliquant desentreprises étrangères sont en cours enArgentine ; au Chili la Société chimique etminière du Chili (SQM) et l’américainAlbermarle gèrent les mines de lithiumdans le Salar d’Atacama ; et en Bolivie, legouvernement a créé une compagniepublique pour exploiter le lithium du Salard’Uyuni. Le lithium pourrait donc biendevenir l’or blanc des années à venir, eten posséder se révéler être un atoutimportant.

Quelle est la situation de la France ?Aujourd’hui, la France ne produit presquepas de lithium. Le Bureau des Recher -ches Géologiques et Minières (BRGM)éva luait en décembre 2018 les réserves

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ÉNERGIEÉ/La Chouette

Zone de production de lithium en Bolivie,qui exporte notamment vers la Chine.

mandée en ce qui concerne le nucléaire,tant les conséquences d’un accidentpeuvent être désastreuses, les critiquesles plus répandues reposent bien sou-vent, et malheureusement, sur la confu-sion des Français sur le caractère polluantde ce mode de production.

N’est-il pas utile de rappeler que, dansson rapport de 2015, le GIEC base sesscénarios à 1,5°C sur une augmentation

de 800% du parc nucléaire mondial. Afinde tenir un carnet de route ambitieux sur latransition énergétique, véritable enjeux du21e siècle, l’énergie nucléaire se doitdonc d’être considérée, si ce n’estcomme une énergie d’avenir, tout dumoins comme une énergie de transition.

Paul CAMPANEROThibaud STRASSER

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Capacité de production(en MW) du parc français

Installé au 1/02 2020

PPE 2023 PPE 2028

Bioénergies 2119 2119 2119

Fioul 2912 2912 2912

Charbon 2997 2997 2997

Solaire 9284 13926 18568

Gaz 12191 12191 12191

Éolien 16512 24768 33024

Hydraulique 25427 38140 50854

Nucléaire 63130 61330 58630

Total 134572 158383 181295

Total Renouvelables / Proportion

51223 / 38% 76834 / 49%102446 / 57%

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en carbonate de lithium à 66 000 tonnesen France. Cependant, le 8 novembre2019, Electricité de Strasbourg (ES) etFonroche Géothermie ont révélé avoirdétecté du lithium en quantités significa-tives dans de l’eau remontée du sous-solalsacien. C’est en effectuant des relevéspour construire une centrale géother-mique à Vendenheim (Bas-Rhin) que Fon-roche Géothermie a confirmé des résul-tats obtenus par Electricité de Strasbourg,filiales d’EDF, qui avait réalisé uneéchographie du terrain plus tôtdans l’année. Le lithium,habituellement contenu dansdes roches granitiques commele spodumène et la pétalite, setrouve ici dans de l’eau situéeentre 3 000 et 6 000 mètres deprofondeur. L’installation d’une centralegéothermique moyenne pourrait produirejusqu’à 1 500 tonnes par ans, selon Fon-roche Géothermie, ce qui représente10 % de la consommation françaiseannuelle pour le moment.

Peut-on extraire le lithium d’une manièreéconomiquement viable ? Pour extraire lemétal, il ne suffira pas de construire unemine comme au Chili ou en Bolivie. Filtrerle lithium depuis de l’eau nécessite l’utili-sation d’une technique nouvellement miseau point par deux entreprises françaises.« Il faudrait donc construire dix centralesgéothermiques utilisant ce procédé pourcouvrir l’intégralité des besoins françaiset supporter la viabilité économique inté-grant les coûts d’extraction », estimeJean-Jacques Graff, président de l’Asso-ciation françaises des professionnels de

la géothermie (AFPG). Les réserves alsa-ciennes sont de plus estimées à plus decent ans d’exploitation. Tout cela entreraen compte dans la décision de l’Etat d’ac-corder ou non un soutien à la filière de lagéothermie, que celle-ci lui demande. Eneffet, la filière est en difficulté depuisplusieurs années, la production d’électric-ité des centrales géothermiques, mar-ginale en France, jouant un grand rôledans leur stabilité économique. « Ce n’estpas le lithium qui va sauver la géother-mie, mais la géothermie qui va permettrele développement de la production delithium en France », résume Jean-Jacques Graff.

Le lithium est-il une filière d’avenir ? Au-delà des nombreux avantages présentéspar les batteries lithium-ion sur le plan del’économie d’énergie (qui pourraientéquiper les voitures par exemple), sonextraction et son exploitation sur le longterme pourraient poser de nombreuxproblèmes. Sur le plan environnementald’abord : l’extraction de lithium dans lesmines traditionnelles utilise un procédétrès polluant car consommant du carbu-rant et relâchant du dioxyde de carbonetout en affectant durablement la zoned’extraction. Sur le plateau tibétain, lespopulations sont victimes d’une multipli-cation des cancers, et dans le désert d’At-acama, la biodiversitéest sérieusement im -pactée (disparition visi-

ble et progressive des flamants roses),notamment par la surconsommationd’eau. Cette pollution joue en défaveur dudéveloppement des voitures électriques,une des utilisations les plus importantesdu lithium. En effet, toute seule, la fabrica-tion de la batterie (lithium-ion ou autre) pol-lue autant qu’une voiture classique ayantparcouru 30 000 km. La pollution est sim-plement délocalisée. Heureusement pourla France, l’extraction se ferait au niveaude failles préexistantes ne communiquantpas avec les nappes phréatiques, limitantainsi la pollution. Mais cet impact pourraitde toute façon n’être que temporaire, carla pénurie de lithium est déjà annoncée.

Les réserves limitées qui ne serenouvellent pas, l’augmentationde l’utilisation et de la production,le recyclage encore rare ayant uncoût réputé élevé font que l’onrisque de rapidement avoir à trou-ver un nouveau composant pour

nos batteries. Il n’est même pas possiblede remplacer les batteries du parc mon -dial actuel de voitures, selon le cabinetMeridian International Research. Ainsi,Philippe Chalmin, économiste desmatières premières et professeur d’his-toire économique à l’Université Paris-Dauphine, ne croit pas totalement à l’ex-ploitation du lithium en France. « Est-ceque dans 20 ans, le lithium-ion ne serapas remplacé par l’hydrogène dans lesbatteries ? » prévient-il.

Rien n’est fait pour le moment, et uneindustrialisation du lithium en France pou-vant prendre de nombreuses années,mieux vaut rester prudent.

Nathan COISNE, Ludwig ROBIN

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En novembre 2019, Fonroche Géothermie et Electricité deStrasbourg (ES) ont annoncé la découverte de lithium dans desnappes d’eau profondes, près de Strasbourg. On parle déjà dunouveau pétrole français, mais pourquoi le lithium attire-t-il tantles industriels ? Quels avantages la France pourrait-elle obtenir dela production de lithium ? Reprenons depuis les bases.

Le lithium en France, une filière d’avenir ?La Chouette/ÉNERGIE

C’est la géothermie qui va permettrele développement de la production

de lithium en France.

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8h00Arrivée à l’aérodrome de

Pamiers, les Pujols, situé à 40 mnau sud de Toulouse. Le soleildonne tout leur brillant aux 2 avionsde type « Pilatus » posés sur le tar-mac. Ces engins modifiés, avecune porte coulissante transparentesur le côté, sont capables de mon-ter jusqu’à 4000m en l’espaced’une dizaine de minutes.A peine le seuil du club SkyDrive

Paradise franchi, l’équipe mixtefrançaise de vol relatif (VR), aussiappelée le « huit de France », semet au travail.

8h15 Une fois les sacs posés pour le

week-end, l’équipe se réunit letemps d’un court briefing suivid’exercices au sol. Des sortes deplanches à roulettes sur lesquellesles équipiers se placent à plat ven-tre permettent d’imiter la situationde chute. L’équipe se met alors àrépéter les figures de la journée,exécutant figure après figure enétant agrippés entre eux soit parles poignets soit par les talons, et

évoluant gracieusement d’uneposition à une autre, formant unesorte de toile en métamorphosepermanente. La régularité, le nom-bre et la précision des enchaîne-ments confirment, si besoin était,la notoriété mondiale de cetteéquipe nationale.

8h45L’écran, qui affiche les avions

prêts au départ ainsi que les para-chutistes à bord, s’allume. Le « huitde France » est déjà marqué surtous les avions de la journée, c’est-à-dire 14 sauts. Alors que desamateurs s’équipent dans la sallevoisine, le « huit de France » sedirige vers le hangar adjacent quifait directement face aux avions.Une fois sur place, ils sortent leursdeux parachutes. Ils se dirigentalors vers la réplique de la ported’avion pour s’entrainer unedernière fois sur la sortie d’avions.En effet sortir à 8 d’une porte quifait 1m50 sur 1m à plus de 4000mça ne s’improvise pas.

9h

Départ du premier avion. Pen-dant que les amateurs s’installentau fond de l’avion, le « huit » fait unevérification de leurs parachutes : lapoignée de l’extracteur qui permetde libérer la voile principale, lespoignées de secours qui permet-tent en cas de mauvaise ouverturede la première voile de libérer unevoile de secours, et enfin lemécanisme de secours. Celui-cilibère le parachute de secours s’ildétecte que le parachutistedescend sous une certaine alti-tude seuil à une vitesse tropélevée.

9h12L’avion atteint 3000m, le « huit »

fait une dernière vérification suiviede signes d’encouragement entreéquipiers.

9h15L’avion atteint les 4 000m. Il

effectue alors une forte décéléra-tion et la porte s’ouvre. Immédiate-ment la pression et la température

CULTURE/La Chouette

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Sortie del’avion duVR8 deFrance à plusde 4 000m

Une journée avec

Photos©FédérationFrançaise deParachutisme

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La Chouette/SPORTS

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chute dans l’appareil. Le corps semet alors en mode instinct pourgérer la montée soudaine d’adré-naline avec le bruit du moteur etl’air se précipitant à plus de 200km/h sur les côtés de l’avion, quienvahit et sature les sens. Le « huit » se trouve dans son

élément et sans la moindre hésita-tion se met en place à la porte.Pendant que certains descoéquipiers s’accrochent à l’ex-térieur de l’avion, les autres seplace directement au-dessus duvide avec vue sur les Pyrénéesdont les plus hauts sommets sesituent bien en-deçà de l’altitudede l’avion. Le caméraman del’équipe se met en place et l’équipeenchaîne sa sortie. L’avion basculelégèrement suite à la libération dupoids. Pendant ce temps-là, le« huit » qui chute alors à plus de150 km/h exécute ses figuresavec précision et agilité, se mou-vant comme si naviguer dans l’airn’était pas plus difficile que de sedéplacer dans l’eau. C’est ce quel’on appelle le vol relatif : la chute deplusieurs personnes qui naviguent

entre elles pour former des figures.

9h17Après plus d’une minute de

chute, l’altimètre des sauteursaffiche 1000m et le chef de groupecommunique à travers des signesde « break » à ses coéquipiers. Les« huit » se séparent et s’éloignentalors chacun dans une directiondifférente pour ouvrir leur para-chute en sécurité. Au sol, les observateurs voient

alors 8 parachutent s’ouvrir, for-

mant un cercle à plus de 700m au-dessus de leurs têtes. Du fait de leur maîtrise impres-

sionnante, les membres du « huit »de France (dont certains cumulentplus de 11 000 sauts) sontéquipés de voile avec une petitesurface. Ils descendent alors trèsvite, annonçant leur arrivée avecun sifflement de voile caractéris-tique de leur très grande vitessed’atterrissage, qu’ils exécutent l’unaprès l’autre avec perfection justedevant leur hangar.

Des étudiants de l’ISAE, adeptes des vols en parachute depuis la base de Pamiers n’yrencontrent pas que des amateurs. C’est même le meilleur poste d’observation pourcroiser l’équipe de France et ses prouesses hors normes. Reportage.

Dernièresvérificationset mise aupoint avantle décollage

l’équipe de France de vol relatif

Figure en formationdu 8VR de France

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A peine revenu sur terre, lesmembres du « huit » se pressentdéjà vers le hangar pour changerde parachute alors que des plieurscommencent à recompacter leurparachute utilisé.

9h30L’avion vient à peine d’atterrir

que le « huit », muni de leurs nou-veaux parachutes, se presse pourmonter à bord pour effectuer ledeuxième saut de la journée.

11h45Après avoir exécuté plus de 5

sauts à la suite, le « huit » se posepour avaler un rapide repas collec-tif dans les locaux.

13h50Départ du premier avion de

l’après midi avec à bord …le « huitde France ».

18hFin de la journée, après exécu-

tion de 7 sauts dans l’après-midi,organisés d’une façon méticu-leuse. Le « huit »a ainsi changé deparachutes autant de fois tout aulong de l’après-midi, alternant avec

ceux confiés aux plieurs à l’issuede chaque atterrissage. L’équipese retrouve dans une salle pourdébriefer les sauts de l’après-midiavec les vidéos prises tout au longde la journée.

20hAprès un repas convivial le

« huit » se prépare à se coucherpour recommencer l’entraînementavec le même rythme endiablé.Rendez-vous le lendemain à8h00. Le statut de champion inter-national n’attend pas.

IsaacZIDOUM

le huit VR de France

avec de gauche à droite :

KevinMansion,

DamienGouriou,Aurélien

Lemarie,Gaelle

Giesen,Christine

Malnis, Alban

Rumolo,Clémentine

Le Bohec,Sophia

Pecout.

Le VR8 de France en pleine formation, avec lesPyrénées enarrière-plan.

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La Chouette/CULTURE

N é à Bonn en 1770,Ludwig van Bee tho-ven commence à

perdre l’ouïe à l’âge de vingt-sept ans pour devenir défini-tivement sourd en 1820, leprivant de ce sens si pré-cieux qu’il avait tout particu-lièrement développé. « Il mesemble important d'insistersur la fameuse année 1802qui marque un tournantdécisif dans sa vie et sa pro-duction musicale, » me pré-cise Serge Chauzy. « C'estl'année au cours de laquellesa surdité l'a conduit au borddu suicide. […] C'est à partirde cette date que son stylemusical, précédemment im -prégné de l'héritage clas-sique (Haydn et surtoutMozart) ouvre la voie auromantisme avec en particu -lier la composition de saSymphonie n° 3 dite"Héroïque" qui révolutionnele langage symphonique del'époque. »

Beethoven écrit en effet en1802 le « Testament d’Heili-

genstadt », portant le nom dela petite ville où il s’était réfugié,près de Vienne. Il dévoile à sesfrères sa maladie et leurexplique comment celle-ci l’apoussé à se retirer, de peurqu’elle ne lui cause ce senti-ment d’humiliation en société.Il y révèle également son dé -ses poir, si profond qu’il esttenté de mettre fin à ses jours.Seul le besoin de créer l’enempêche : « Il me semblaitimpossible de quitter lemonde avant d'avoir fait

naître tout ce pour quoi jeme sentais disposé » écrit-il. Cette lettre apporte ainsiune réponse partielle à moninterrogation : sa volontéd’exprimer son art l’aencouragé à persévérerdans la composition musi-cale.

Une dimensionquantitative

Certains chercheurs pro-posent une alternativebeaucoup plus carté sienne

et évoquent une explicationmathématique. C’est le casde Natalya St. Clair, qui aanalysé la Sonate au Clair deLune, justement composéeen 1802. Elle y remarque unestructure musicale étonnantequ’elle rapproche de notionsmathématiques : une conso-nance, plaisante à l’oreille,due à la concordance deséries harmoniques, puis unedissonance, à l’inverse désa -gréable à entendre, due à unesuperposition de sons désyn-chronisés.

La succession de ces deuxphéno mènes crée unemélodie complexe et pleined’émotions. « Le lien avec lesmathématiques peut en effetexpliquer bien des choses »,souligne le météorologue,également professeur éméritede l’Université Paul Sabatier.« L'écriture musicale, lastructure d'une partitiondonnée, comporte unedimension quantitative évi-dente. On l'évoque surtout àpropos de Jean-SébastienBach (et sa pratique du con-trepoint) mais ce lien restetrès présent chez Beethovenqui excellait dans la forme dela variation sur un thème. »

Ainsi, le compositeur alle-mand a peut-être pu décernerl’harmonie mélodique due à

ces structures mathéma-tiques, même s’il ne pouvaitpas l’entendre.

Même en prenant encompte sa volonté salvatricede composer une possiblesensibilité harmonique, « lemystère de la poursuite deson travail de compositionmalgré une surdité probable-ment totale à partir de 1802reste néanmoins entier »,reconnaît Serge Chauzy.« C'est d'autant plus stupéfi-ant qu'il continuait à jouer dupiano, notamment ses con-certos, mais également qu'ildirigeait l'orchestre lors del'exécution de ses sym-phonies. »

Une exploration dessentiments humains

Beethoven s’éteint en 1827à Vienne, reconnu comme l’undes plus grands composi-teurs de l’histoire, voire un« mythe » ayant traversé denombreux genres musicaux.Au-delà de sa technique indé-niable, c’est la sensibilité émo-tionnelle, complexe et uni-verselle, transmise dans sescompositions, qui marque leplus le spectateur. Selon lemétéorologue, « l'écouteprio ritaire dont bénéficie tou-jours aujourd'hui l’œuvre deBeethoven est me semble-t-il liée au caractère volontaireet au large spectre expressifde sa musique. Du profonddésespoir à la joie extrême,sa musique explore l'ensem-ble des sentiments hu -mains. »

Trois siècles plus tard, lecompositeur est en effet tou-jours d’actualité, et sonanniversaire représente unincontournable rendez-vousculturel pour les amateurs.

Julie EIMER

L’anniversaire de la naissance de Beethoven cette année a été pourmoi l’occasion de redécouvrir le musicien allemand. De nombreuxconcerts, événements et rencontres ont été organisés pour célébrer

son génie. Malheureusement, le confinement a mis fin à toutes ces festivités, alors je me suisretrouvée avec une foule de questions sans occasion aucune d’aller à la rencontre d’artistes pourles leur poser. Mais c’était sans compter sur l’intervention d’experts, comme Serge Chauzy,météorologue spécialiste de l’orage et mélomane avéré, qui a bien voulu m’éclairer. Moninterrogation principale portait sur le paradoxe existentiel associé au musicien : ce génieexceptionnel a continué à composer malgré sa surdité envahissante.

Anniversaire

Le génie mathématique de Beethoven

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L’original duTestamentd’Heiligenstadt, villeoù il a rédigé, à sesfrères, une lettre deprofond désespoir.©DR

La succession de la consonance et de la dissonance pour-rait expliquer l’art de la mélodie complexe et pleined’émotions chère à Beethoven.©DR

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Déambuler

L’envie de déambuler dans les rues,de se perdre pour se retrouver face àune façade intrigante, et de découvrirde nouveaux quartiers coups decœur.De la même manière que Googlenous aide à nous repérer avec GoogleMaps ou à comprendre un texte enlangue étrangère avec Google Tra-duction, sa plateforme propose Arts &Culture qui donne accès à de nom-breuses visites virtuelles de musées etsites historiques grâce à différentsprocédés techniques. Il est ainsi possi-ble de se perdre dans la Galerie desGlaces du Château de Versailles ou dedéambuler dans les rues du centrehistorique de Naples grâce à desimages 360° et la fonction « streetview » aussi utilisée par Google Maps.Le Nafasi Art Space, à Dar es Salaamen Tanzanie, propose de plus unaperçu d’une quinzaine d’œuvres,

accompagnées de textes explicatifsqui mettent en valeur la culture et lessujets sociétaux abordés par lesartistes. Un autre format disponibleconcerne l’observation de tableauxpris en photo avec une qualitéextrême, de manière à pouvoirzoomer jusqu’à voir les craqueluresde la toile. Même si le relief associéaux craquelures n’est pas perceptible,le spectateur peut s’en approcherbien plus que la distance réglemen-taire pour protéger les œuvres dansles musées ne le permet habituelle-ment, le tout avec des commentairesqui attirent l’attention sur des détailsméconnus de l’œuvre. Ainsi lachanteuse franco-américaine LoloZouaï prête sa voix pour nousprésenter La Naissance de Vénus deSandro Boticelli en faisant des liensavec la culture populaire actuelle pourtoucher un plus large public.

Écouter

L’envie d’affûter ses sens, de voir,d’entendre, de goûter de nouvellessaveurs.

Le Museum of Modern Art de NewYork City, à l’image des podcasts quine cessent de se multiplier en ligneces derniers temps, propose unimportant contenu audio pouraccompagner ses expositions perma-nentes ou temporaires, pour enten-dre paradoxalement ce que noussommes habitués à voir. Ainsi la pageDorothea Lange Words & Picturesrevient sur une dizaine de photogra-phies de l’américaine, prises entre lesannées 1920 et 1950, mettant enlumière les vagues migratoires auxEtats-Unis, mais aussi sa vie privée.Les commentaires de la petite-fille deDorothea Lange, de spécialistes oud’autres artistes donnent vie auximages, en racontant des anecdotes

CULTURE/La Chouette

Il ne fallait pas manquer de créativité pour se cultiver en pleine activité de confinement ...et il en faudra encore, au grand désespoir des artistes et des lieux de culture.

Des idées pour conjurer les frustrations

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Visite virtuelle de laGalerie desGlaces auChâteau deVersailles, surGoogle Artsand Culture,où l’on voit le reflet durobot prenantles photos 3Dpour permettre lavisite à distance.©DR

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La Chouette/CULTURE

culturelles du temps présent

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sur la photographe ou la manièredont elle travaillait, ou encore dessouvenirs personnels réveillés par laphoto. De nombreux autres enreg-istrements audio sont disponibles,notamment pour retrouver certainesdes œuvres les plus connues duMoMA. Conservateurs et artistes,doublés par des voix françaises,expliquent La persistance de lamémoire de Salvador Dalí ou encoreA Lua de la peintre brésilienne Tarsilado Amaral, pour permettre à tousd’avoir accès à ces classiques du XXesiècle.

S’évader

L’envie de sortir et se rendre dans unesalle de spectacle, de s’asseoir dans unlieu rempli d’histoire et de talents, etde s’évader pour quelques heures.

L’Opéra de Paris permet la visualisa-tion en ligne de ballets et opéras com-plets, pour quelques jours seulementet spécialement pour cette périodede confinement. On y trouve parexemple le Lac des Cygnes mis enscène par le chorégraphe RudolfNoureev ou le cycle intégral des Sym-phonies de Tchaïkovski sous la direc-tion musicale de Philippe Jordan.Chaque spectacle est disponible enintégralité, avec une excellente qualitéd’image et des plans rapprochés surles chanteurs, sans oublier l’or -chestre, ce qui offre une expériencevisuelle très différente de celle possi-ble depuis son siège d’auditeur àl’opéra. Le seul (gros) bémol portesur les capacités sonores de nosenceintes personnelles qui n’é-galeront jamais l’acoustique d’unesalle de spectacle.Ce site offre également un contenuannexe varié, avec des interviews dedanseurs, chorégraphes et musiciens,des compléments sur le montage decertaines représentations, ou encoredes tutoriels techniques pour mieuxdécouvrir les métiers de l’opéra. Ainsile parcours inspirant du danseurfrançais Hugo Marchand, nomméÉtoile au ballet de l’Opéra de Paris en

2017, ou l’intervention de la choré-graphe américaine Crystal Pite poursa nouvelle création Body and Soulnous plongent dans leur univers.

Découvrir

L’envie d’en apprendre toujours plus,de satisfaire ses curiosités ou tout sim-plement de s’occuper.

Le premier réflexe consiste à seretourner vers ce bouquin du fin fondde la bibliothèque que l’on avait prévude lire depuis longtemps ou vers cettesérie que l’on gardait pour les soiréestranquilles. Une fois ce joker utilisé, leplus simple est de se plonger dans lesméandres d’Internet pour com-penser ses sorties. Le contenu déjà disponible en lignetraduit une véritable volonté departage et d’accès universel à la cul-ture. La plupart de ces adresses sontgratuites et offrent un contenu de trèsbonne qualité, nous permettant uneexpérience complémentaire à unevisite « en vrai » d’un musée ou unesortie à l’opéra, sans bien sûr les rem-placer. De nouvelles opportunités sont de

plus mises à disposition du grand pub-lic pour s’occuper en quarantaine. Denombreux artistes et organismes par-ticipent au mouvement« #restezchezvous » avec des con-certs, représentations et interviews àdomicile, pour divertir les amateurs etles inciter à ne pas quitter leur foyer.La Comédie française propose parexemple des spectacles en direct sursa chaîne YouTube avec notammentun programme familial dans l’après-midi. Enfin, pour accompagner votrebouquin rescapé de la bibliothèque,de nombreuses plateformes numé -riques comme la Fnac facilitent letéléchargement gratuit de milliers delivres.

Les possibilités de se distraire surInternet sont innombrables permet-tant ainsi d’apaiser les tensions liées àcette situation inédite de confine-ment. Les efforts des organisationsculturelles et des artistes pours’adapter et faciliter l’accès à leursreprésentations et œuvres ont réussià maintenir un lien entre le public et laculture. Ce lien a été magnifié par leprivilège de cette intimité inattenduedue à ce que les contraintes soientpartagées par tous et que la vie ait dûs’organiser depuis chez soi.

Ainsi il est toujours possible de déam-buler, écouter, s’évader, et découvrir!

Julie EIMER

le ballet‘Body and

Soul’ sur lesite de

l’Opéra deParis.©DR

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JEUX et PROPHÉTIES ... proposés par Charlotte DELMAS et Alexandre ICHÉ

SUDOKULe but du jeu estde remplirchaque caseavec les chiffresde 1 à 9, enveillant toujoursà ce qu’un chiffrene figure qu’uneseule fois parcolonne, parligne, et parcarré de 9 cases.

Bélier (21/03 - 19/04) : Signes compatibles : Gémeaux, Sagit-taire, Capricorne.Signe zéro chance : Poisson.Déterminé, charismatique, et ambitieux, leBélier a tout pour nous faire craquer. Quand ilveut, il fonce. Le Bélier aime mener la barqueet prend la séduction comme un jeu. Mon-trez-vous donc joyeux, plein de vie, et légère-ment inaccessible.

Taureau (20/04 - 20/05) : Signes compatibles : Cancer, Scorpion,Vierge.Signe zéro chance : Verseau.Le taureau est une personne douce, qui aimeles choses simples : câlins, petits bonheurs duquotidien. Il a donc besoin d’être entouré.Soyez là pour lui, et restez simple, mettez-leen confiance.

Gémeaux (21/05 - 20/06) : Signes compatibles : Lion, Balance, Béli-er.Signe zéro chance : Cancer.Le gémeaux passe son temps à cogiter, imag-iner, penser. Il adore analyser la vie, et a le sensdu détail. Essayez de garder le sourire à sescôtés, mais également de faire preuve d’opti-misme, car il a tendance à stresser trop.

Cancer (21/06 - 22/07) :Signes compatibles : Scorpion, Poisson,Capricorne.Signe zéro chance : Gémeaux.Le Cancer est un vrai romantique. C’est ungrand sensible, attaché aux valeurs familiales.Si le Cancer est quelqu’un de tendre, il vit aus-si dans sa bulle. Montrez donc l’intérêt quevous lui portez et soyez honnête avec lui.

Lion (23/07 - 23/08) : Signes compatibles : Gémeaux, Bélier,Sagittaire.Signe zéro chance : Poisson.Le Lion n’est pas simple à cerner. Il sait fairepreuve d’autorité et a tendance à tout con-trôler. Il a une forte estime de lui et sait ce qu’ilvaut. Pour le séduire, flattez-le, puis partez. Ilaime les défis et saura revenir vers vous.

Vierge (24/08 - 22/09) : Signes compatibles : Cancer, Taureau,Scorpion.Signe zéro chance : Bélier.La Vierge est méticuleuse et très ordonnée. Aupremier abord, elle parait très fermée, mais sarigidité ne l’empêche pas de profiter de la vie,bien au contraire. Soyez patients et attendezqu’elle s’ouvre à vous, puis séduisez-la.

Balance (23/09 - 22/10) : Signes compatibles : Balance, Gémeaux,Sagittaire.Signe zéro chance : Capricorne.La Balance a peur du conflit, et souhaite satis-faire tout le monde. Elle peut être manipula-trice sans s’en rendre compte. Soyez atten-tionné, chaleureux et investi pour la séduire.Elle aime être flattée.

Scorpion (23/10 - 21/11) : Signes compatibles : Cancer, Poisson,Sagittaire.Signe zéro chance : Capricorne.Le Scorpion est un passionné. C’estquelqu’un qui vit à fond, qui ne fait jamais leschoses à moitié. Mais il doute aussi beaucoup,et a besoin d’être rassuré. Même s’il paraîtinaccessible, son cœur est une guimauve.Alors, allez-y pas à pas.

Sagittaire (22/11 - 21/12) : Signes compatibles : Bélier, Lion, Bal-ance.Signe zéro chance : Cancer.Le Sagittaire est un optimiste heureux. Enamour, il est fidèle et très sérieux. Approchez-vous de lui avec le sourire et proposez lui dessorties hors du commun. Evitez de le faireattendre trop longtemps.

Capricorne (22/12 - 19/01) :Signes compatibles : Cancer, Vierge,Poisson.Signe zéro chance : Lion.Le Capricorne semble être coincé au premierregard. C’est une personne prudente qui nes’ouvre pas facilement. Soyez donc amusant,et tentez de le faire rire. Il aime sa zone deconfort, mais attend d’en sortir à votre bras.

Verseau (20/01 - 19/02) : Signes compatibles : Gémeaux, Balance,Lion.Signe zéro chance : Poisson.Le Verseau est penseur et a plein de projets. Ila du mal à apprécier les choses simples, etattend toujours mieux. N’attendez pas qu’ilfasse le premier pas, montrez lui l’intérêt quevous lui portez et faites preuve de curiosité.

Poisson (20/02 - 20/03) : Signes compatibles : Cancer, Vierge,Capricorne.Signe zéro chance : Bélier.Le Poisson est très émotif, et a un grand cœur.C’est quelqu’un d’assez fragile, qui se posebeaucoup de questions. Allez-y pas à pas pourlui laisser le temps de s’ouvrir à vous. Soyezromantique !

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