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A178 67 e congrès de la Société nationale franc ¸ aise de médecine interne – 5, 6 et 7 juin 2013, Marseille / La Revue de médecine interne 34S (2013) A85–A186 diabétique ou vasculaire, une hypovolémie intrinsèque ou favorisée par les diurétiques, les bloqueurs du système rénine-angiotensine ou les anti-inflammatoires, un index de masse corporelle bas et les antécédents de pathologies digestives chroniques inflamma- toires ou occlusives. La prévention passe par une reconnaissance de ces facteurs de risque et la stricte limitation de la prescription aux patients non à risque, en insistant sur le respect des condi- tions d’utilisation. Toutefois, la prescription n’est pas formellement contre-indiquée en cas de traitements associés à risque tels qu’ils ont été définis ci-dessus, et relève alors seulement d’une précaution d’emploi. Conclusion.– La néphropathie aiguë aux phosphates est une compli- cation méconnue et grave des produits à base de phosphate de sodium comme en témoigne notre observation. L’identification des facteurs de risque doit être systématique et conduire à une stricte restriction d’utilisation des produits de préparation colique à base de phosphate de sodium aux patients jeunes, sans co-morbidités. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2013.03.205 CA201 Œdème bradykinique induit par la prise d’inhibiteur de la dipeptidylpeptidase IV S. Gayet a , S. Martinez b , M.-J. Jean-Pastor c , N. Monnier d , C. Drouet e , J.-R. Harlé f a Centre de compétence angiœdèmes non histaminiques, hôpital de la Conception, Marseille, France b Service d’accueil des urgences, hôpital Nord, Marseille, France c Centre régional de pharmacovigilance, hôpital Sainte-Marguerite, Marseille, France d Biochimie et génétique moléculaire, CHUG/DBTP, Grenoble, France e Centre d’exploration de l’angiœdème, hôpital Michallon, Grenoble, France f Centre de compétence angiœdèmes non histaminiques, service de médecine interne, hôpital de la Conception, Marseille, France Introduction.– L’association d’un inhibiteur de la dipeptidylpepti- dase IV (gliptine) avec un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IEC) est connue pour majorer le risque d’angiœdème bradykinique induit par les IEC. Nous rapportons un cas d’angiœdème grave apparu après prise de gliptine sans asso- ciation avec un IEC. Cas clinique.– Un patient âgé de 59 ans est admis aux urgences pour œdème de la face. La langue a commencé à gonfler une heure avant. À l’examen, il existe un œdème important de la langue, du plancher buccal, de la lèvre inférieure, de l’hémiface droite et du cou, blanc, douloureux, non prurigineux avec hypersialorrhée. Il n’y a pas d’urticaire associée ni de détresse hémodynamique. Le traitement mis immédiatement en place a comporté : corticothéra- pie, antihistaminique et aérosol d’adrénaline. Vingt minutes après, une injection d’adrénaline est réalisée devant l’augmentation de l’œdème, une impossibilité de parler, une gêne à respirer. Trente minutes après l’injection d’adrénaline, en l’absence d’amélioration, un angiœdème bradykinique est suspecté. Le patient rec ¸ oit alors 1500 unités de concentrés de C1-inhibiteur et 1 gramme d’acide tranexamique. Le patient ressent un arrêt de la progression de l’œdème 30 minutes après la perfusion de C1-inhibiteur et 60 minutes après il est constaté un début de régression de l’œdème. L’œdème disparaîtra complètement dans les 36 heures suivantes. Dans les antécédents sont retrouvés un diabète traité par met- formine avec ajout de sitagliptine six mois avant, un tabagisme actif. L’épouse signale deux épisodes spontanés d’œdème des lèvres 15 et 30 ans auparavant, régressifs en quelques heures. Aucune prise d’IEC ni d’autre traitement n’est retrouvée à l’interrogatoire. Il n’existe pas d’antécédent familial connu. Le bilan permet d’éliminer : un déficit en C1 inhibiteur, un déficit en aminopep- tidase P ou en enzyme de conversion de l’angiotensine. Il existe un déficit partiel en carboxypeptidase N. De plus, il est trouvé une mutation ponctuelle Thr328Lys à l’état hétérozygote dans le gène du facteur XII de la coagulation. Cette mutation est responsable d’œdèmes angioneurotiques héréditaires non liés à un déficit en complément. La même mutation sera finalement retrouvée chez une des filles du patient. Cette personne âgée de 27 ans présente, depuis une année, un tableau d’œdème de Quincke à répétition non connu par le père. Discussion.– L’accumulation de bradykinine est responsable des angiœdèmes décrits dans les œdèmes angioneurotiques hérédi- taires et dans les angiœdèmes liés à la prise d’inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine. La dipeptidylpeptidase IV (DPP- IV), l’enzyme de conversion de l’angiotensine, l’aminopeptidase P et la carboxypeptidase N, participent à l’inactivation de la bradykinine. Dans un contexte de production excessive de bra- dykinine, comme dans les œdèmes angioneurotiques héréditaires, l’apparition d’un déficit du catabolisme conduit à majorer le risque d’apparition d’œdème. Chez notre patient présentant un œdème angioneurotique héréditaire, non connu, la prise de gliptine asso- ciée à un déficit en carboxypeptidase N a pu entraîner cet épisode d’angiœdème sévère. Comme déjà rapporté dans la littérature, mal- gré l’absence de déficit en C1-inhibiteur, la perfusion de concentrés de C1-inhibiteur est efficace dans les crises sévères d’œdème bra- dykinique, d’origine héréditaire ou d’origine médicamenteuse. Conclusion.– Tout comme la prise d’IEC est contre-indiquée chez les patients souffrant d’œdème angioneurotique héréditaire, devant le risque de majorer les épisodes d’angiœdème, la prise d’inhibiteur de la DPP-IV doit être aussi évitée chez ces patients. Pour en savoir plus Brown NJ, et al. Hypertension 2009;54:516–23. Gelée B, et al. Rev Med Int 2008;29:516–9. Vitrat-Hincky V, et al. Allergy 2010;65:1331–6. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2013.03.206 CA202 Acidose métabolique par excès d’acide pyroglutamique : un effet indésirable exceptionnel du paracétamol B. Hermann a , M. Roumier a , A.-M. Piette a , O. Bletry a , A.G. Si Larbi b , I. Marroun a , T. Sené a , F. Ackermann c , J.-E. Kahn a a Service de médecine interne, hôpital Foch, Suresnes, France b Réanimation, hôpital Foch, Suresnes, France c Médecine interne, hôpital Bicêtre, Kremlin-Bicêtre, France Introduction.– Les acidoses métaboliques normochlorémiques à trou anionique élevé sont liées à un excès d’acides indosés, exogènes (alcool, éthylène glycol, acide acétyl salicylique...) ou endogènes (acide lactique et acétique principalement). L’excès d’acide pyroglutamique est une cause rare, le plus souvent liée à la prise de paracétamol. Patients et méthodes.– Un homme de 38 ans a comme antécédent une cytopathie mitochondriale suspectée devant l’association d’une surdité de perception bilatérale, d’un diabète, d’une myé- lodysplasie, d’une ophtalmoplégie externe progressive et d’une myopathie périphérique. En 2010, le diagnostic est prouvée histo- logiquement (fibres rouges déchiquetées à la biopsie musculaire) et génétiquement (délétions multiples de l’ADN mitochondrial sur la biopsie musculaire). Cas clinique.– Le patient bénéficie de la pose d’implants cochléaires fin août 2011 pour sa surdité. Quelques jours après, apparaissent une asthénie, une prostration et des troubles de la marche, sui- vis par l’installation d’une respiration rapide et bruyante et d’une confusion. Aux urgences : score de Glasgow à 12 sans signes de localisation, survenue d’une crise convulsive généralisée tonico- clonique régressive, avec aggravation des troubles de la vigilance au décours (Glasgow 10), polypnée ample à 26/min avec tirage, oxymétrie à 100 % en air ambiant, tachycardie à 134/min, tension artérielle à 156/109, température à 36 C. Le reste de l’examen cli- nique est sans particularité. La glycémie capillaire est à 8,7 mmol/L et la bandelette urinaire ne retrouve ni cétonurie ni glyco-

Œdème bradykinique induit par la prise d’inhibiteur de la dipeptidylpeptidase IV

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Page 1: Œdème bradykinique induit par la prise d’inhibiteur de la dipeptidylpeptidase IV

A178 67e congrès de la Société nationale francaise de médecine interne – 5, 6 et 7 juin 2013, Marseille / La Revue de médecine interne 34S (2013) A85–A186

diabétique ou vasculaire, une hypovolémie intrinsèque ou favoriséepar les diurétiques, les bloqueurs du système rénine-angiotensineou les anti-inflammatoires, un index de masse corporelle bas etles antécédents de pathologies digestives chroniques inflamma-toires ou occlusives. La prévention passe par une reconnaissancede ces facteurs de risque et la stricte limitation de la prescriptionaux patients non à risque, en insistant sur le respect des condi-tions d’utilisation. Toutefois, la prescription n’est pas formellementcontre-indiquée en cas de traitements associés à risque tels qu’ilsont été définis ci-dessus, et relève alors seulement d’une précautiond’emploi.Conclusion.– La néphropathie aiguë aux phosphates est une compli-cation méconnue et grave des produits à base de phosphate desodium comme en témoigne notre observation. L’identification desfacteurs de risque doit être systématique et conduire à une stricterestriction d’utilisation des produits de préparation colique à basede phosphate de sodium aux patients jeunes, sans co-morbidités.

http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2013.03.205

CA201Œdème bradykinique induit par la prised’inhibiteur de la dipeptidylpeptidase IVS. Gayet a, S. Martinez b, M.-J. Jean-Pastor c, N. Monnier d,C. Drouet e, J.-R. Harlé f

a Centre de compétence angiœdèmes non histaminiques, hôpital de laConception, Marseille, Franceb Service d’accueil des urgences, hôpital Nord, Marseille, Francec Centre régional de pharmacovigilance, hôpital Sainte-Marguerite,Marseille, Franced Biochimie et génétique moléculaire, CHUG/DBTP, Grenoble, Francee Centre d’exploration de l’angiœdème, hôpital Michallon, Grenoble,Francef Centre de compétence angiœdèmes non histaminiques, service demédecine interne, hôpital de la Conception, Marseille, France

Introduction.– L’association d’un inhibiteur de la dipeptidylpepti-dase IV (gliptine) avec un inhibiteur de l’enzyme de conversionde l’angiotensine (IEC) est connue pour majorer le risqued’angiœdème bradykinique induit par les IEC. Nous rapportons uncas d’angiœdème grave apparu après prise de gliptine sans asso-ciation avec un IEC.Cas clinique.– Un patient âgé de 59 ans est admis aux urgencespour œdème de la face. La langue a commencé à gonfler une heureavant. À l’examen, il existe un œdème important de la langue, duplancher buccal, de la lèvre inférieure, de l’hémiface droite et ducou, blanc, douloureux, non prurigineux avec hypersialorrhée. Iln’y a pas d’urticaire associée ni de détresse hémodynamique. Letraitement mis immédiatement en place a comporté : corticothéra-pie, antihistaminique et aérosol d’adrénaline. Vingt minutes après,une injection d’adrénaline est réalisée devant l’augmentation del’œdème, une impossibilité de parler, une gêne à respirer. Trenteminutes après l’injection d’adrénaline, en l’absence d’amélioration,un angiœdème bradykinique est suspecté. Le patient recoit alors1500 unités de concentrés de C1-inhibiteur et 1 gramme d’acidetranexamique. Le patient ressent un arrêt de la progressionde l’œdème 30 minutes après la perfusion de C1-inhibiteur et60 minutes après il est constaté un début de régression de l’œdème.L’œdème disparaîtra complètement dans les 36 heures suivantes.Dans les antécédents sont retrouvés un diabète traité par met-formine avec ajout de sitagliptine six mois avant, un tabagismeactif. L’épouse signale deux épisodes spontanés d’œdème des lèvres15 et 30 ans auparavant, régressifs en quelques heures. Aucuneprise d’IEC ni d’autre traitement n’est retrouvée à l’interrogatoire.Il n’existe pas d’antécédent familial connu. Le bilan permetd’éliminer : un déficit en C1 inhibiteur, un déficit en aminopep-tidase P ou en enzyme de conversion de l’angiotensine. Il existeun déficit partiel en carboxypeptidase N. De plus, il est trouvé unemutation ponctuelle Thr328Lys à l’état hétérozygote dans le gène

du facteur XII de la coagulation. Cette mutation est responsabled’œdèmes angioneurotiques héréditaires non liés à un déficit encomplément. La même mutation sera finalement retrouvée chezune des filles du patient. Cette personne âgée de 27 ans présente,depuis une année, un tableau d’œdème de Quincke à répétition nonconnu par le père.Discussion.– L’accumulation de bradykinine est responsable desangiœdèmes décrits dans les œdèmes angioneurotiques hérédi-taires et dans les angiœdèmes liés à la prise d’inhibiteur de l’enzymede conversion de l’angiotensine. La dipeptidylpeptidase IV (DPP-IV), l’enzyme de conversion de l’angiotensine, l’aminopeptidaseP et la carboxypeptidase N, participent à l’inactivation de labradykinine. Dans un contexte de production excessive de bra-dykinine, comme dans les œdèmes angioneurotiques héréditaires,l’apparition d’un déficit du catabolisme conduit à majorer le risqued’apparition d’œdème. Chez notre patient présentant un œdèmeangioneurotique héréditaire, non connu, la prise de gliptine asso-ciée à un déficit en carboxypeptidase N a pu entraîner cet épisoded’angiœdème sévère. Comme déjà rapporté dans la littérature, mal-gré l’absence de déficit en C1-inhibiteur, la perfusion de concentrésde C1-inhibiteur est efficace dans les crises sévères d’œdème bra-dykinique, d’origine héréditaire ou d’origine médicamenteuse.Conclusion.– Tout comme la prise d’IEC est contre-indiquée chez lespatients souffrant d’œdème angioneurotique héréditaire, devant lerisque de majorer les épisodes d’angiœdème, la prise d’inhibiteurde la DPP-IV doit être aussi évitée chez ces patients.Pour en savoir plusBrown NJ, et al. Hypertension 2009;54:516–23.Gelée B, et al. Rev Med Int 2008;29:516–9.Vitrat-Hincky V, et al. Allergy 2010;65:1331–6.

http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2013.03.206

CA202Acidose métabolique par excès d’acidepyroglutamique : un effet indésirableexceptionnel du paracétamolB. Hermann a, M. Roumier a, A.-M. Piette a, O. Bletry a,A.G. Si Larbi b, I. Marroun a, T. Sené a, F. Ackermann c, J.-E. Kahn a

a Service de médecine interne, hôpital Foch, Suresnes, Franceb Réanimation, hôpital Foch, Suresnes, Francec Médecine interne, hôpital Bicêtre, Kremlin-Bicêtre, France

Introduction.– Les acidoses métaboliques normochlorémiques àtrou anionique élevé sont liées à un excès d’acides indosés,exogènes (alcool, éthylène glycol, acide acétyl salicylique. . .) ouendogènes (acide lactique et acétique principalement). L’excèsd’acide pyroglutamique est une cause rare, le plus souvent liée àla prise de paracétamol.Patients et méthodes.– Un homme de 38 ans a comme antécédentune cytopathie mitochondriale suspectée devant l’associationd’une surdité de perception bilatérale, d’un diabète, d’une myé-lodysplasie, d’une ophtalmoplégie externe progressive et d’unemyopathie périphérique. En 2010, le diagnostic est prouvée histo-logiquement (fibres rouges déchiquetées à la biopsie musculaire)et génétiquement (délétions multiples de l’ADN mitochondrial surla biopsie musculaire).Cas clinique.– Le patient bénéficie de la pose d’implants cochléairesfin août 2011 pour sa surdité. Quelques jours après, apparaissentune asthénie, une prostration et des troubles de la marche, sui-vis par l’installation d’une respiration rapide et bruyante et d’uneconfusion. Aux urgences : score de Glasgow à 12 sans signes delocalisation, survenue d’une crise convulsive généralisée tonico-clonique régressive, avec aggravation des troubles de la vigilanceau décours (Glasgow 10), polypnée ample à 26/min avec tirage,oxymétrie à 100 % en air ambiant, tachycardie à 134/min, tensionartérielle à 156/109, température à 36 ◦C. Le reste de l’examen cli-nique est sans particularité. La glycémie capillaire est à 8,7 mmol/Let la bandelette urinaire ne retrouve ni cétonurie ni glyco-