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Douleurs, 2007, 8, 1 43 Ils considèrent en effet que la recherche n’a pour le moment qu’effleuré la question… RÉFÉRENCES 1. Poireaudeau S, Rannou F, Baron G et al. Fear-avoidance beliefs about back pain in patients with subacute low back pain. Pain 2006;124:305-11. 2. Coudeyre E, Rannou F, Tubach F et al. General practitionners’ fear-avoidance beliefs influence their management of patients with low back pain. Pain 2006;124:330-7. 3. Diagnostic, prise en charge et suivi des malades atteints de lombalgie chroni- que. Recommandations pour la pratique clinique. ANAES décembre 2000. www.anaes.fr 4. Prise en charge diagnostique et thérapeutique des lombalgies et lomboscia- tiques communes de moins de trois mois d’évolution. Recommandations pour la pratique clinique. ANAES, février 2000. www.anaes.fr 5. Vlaeyen JWS, Linton SJ. Are we “fear-avoidant”? Editorial. Pain 2006;124:240- 1. Florentin Clère Comment améliorer l’observance dans un contexte de chronicité ? Le numéro 2006/9 de la revue Médecine, en s’appuyant sur la publication d’un article sur le sujet, a choisi de porter en couverture le titre suivant « Une bonne observance s’expli- que autant par la prescription que par le suivi ». Pourquoi s’intéresser à ce sujet ? Parce que l’observance thérapeuti- que, définie par l’exécution des prescriptions, médicamen- teuses ou non, du médecin, n’est que de 50 % dans un contexte de chronicité. Il s’agit d’un processus complexe, multifactoriel, dépendant : – du médecin : qualité de l’information, de la relation théra- peutique ; – du patient et de son entourage : des croyances inappro- priées, des troubles du comportement, la dépression, les conflits familiaux et la solitude sont des facteurs péjoratifs ; – de la maladie : gravité, déni, effets secondaires… Les auteurs de cet article développent 4 axes à privilégier pour améliorer cette observance : – adapter les modalités de traitement à chaque situation sin- gulière : réduire au minimum les prises médicamenteuses, proposer un pilulier, prendre en compte le bénéfice réel apporté, l’espérance de vie et les préférences du patient, surtout s’il est âgé ; – améliorer et renforcer la relation médecin-patient, savoir par- ler d’adhésion avec son patient : « comment vous organisez- vous avec ce traitement ? », « avez-vous trouvé des astuces pour ne pas oublier ou vous tromper ? » ; – développer l’éducation du patient et de sa famille : cela nécessite d’abandonner le modèle du médecin « ordon- nant » en replaçant le patient au cœur du projet théra- peutique, afin d’évoluer d’une observance passive vers une adhésion active ; – mettre en place un suivi régulier, en s’appuyant sur l’ensem- ble des professionnels de santé : médecins traitants, spécialis- tes, infirmières, pharmaciens. En effet l’observance augmente nettement pendant les 5 jours qui suivent une consultation. Il est donc fort logique que les auteurs concluent à la néces- sité d’un concept bien connu des soignants impliqués dans la prise en charge de la douleur : la pluridisciplinarité ! RÉFÉRENCE Gallois P, Vallée JP, Le Noc Y. L’observance des prescriptions médicales : quels sont les facteurs en cause ? Comment l’améliorer ? Médecine (De la méde- cine factuelle à nos pratiques) 2006;2:402-6. Florentin Clère Opioïdes forts et douleur chronique L’éditorial du numéro de novembre 2006 de la revue Pain [1] se propose de faire le point sur l’utilisation des opioïdes forts dans un contexte de douleur non cancéreuse. Son auteur se remémore les grands espoirs fondés sur la libéra- lisation des morphiniques : enfin l’« opiophobie » allait être vaincue et les patients douloureux chroniques retrouver une bonne qualité de vie. Qu’en est-il réellement ? Si les essais randomisés ont pu confirmer l’efficacité des opioïdes forts sur la plupart des douleurs chroniques, peu d’informa- tions ont pu être collectées sur le long terme. C’est donc vers le Danemark, pays ou la consommation de morphini- ques par habitant est la plus élevée d’Europe, que la revue a choisi d’orienter son regard en publiant l’étude épidémio- logique d’Eriksen et al [2]. Un panel de 10 000 personnes a pu être interrogé, au sein duquel 1 906 douloureux chroni- ques ont été identifiés. 228 d’entre eux (soit 12 %) utilisaient un opioïde fort : la satisfaction de ces patients vis-à-vis de leur traitement était la même que dans le groupe qui utili- sait un antalgique des autres paliers de l’OMS. Si l’intensité douloureuse était plus élevée dans le groupe « opioïde fort », leur traitement n’a pas démontré de supériorité pour 3 critères fondamentaux : le soulagement, le retentissement fonctionnel et la qualité de vie. Les auteurs en concluent que les bénéfices apportés par l’utilisation des opioïdes forts sont certains à court terme, mais s’épuisent fréquem- ment sur le long terme. Leurs effets peuvent même devenir délétères, ce qui va dans le sens de la « spirale infernale » décrite il y 14 ans par Schofferman [3]. Comme le rappelle l’éditorialiste, nous connaissons tous des patients doulou- reux chroniques dont la vie a été changée par l’utilisation prolongée de morphiniques et nul ne songerait à interrompre

Opioïdes forts et douleur chronique

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Douleurs, 2007, 8, 1

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Ils considèrent en effet que la recherche n’a pour le momentqu’effleuré la question…

RÉFÉRENCES

1.

Poireaudeau S, Rannou F, Baron G

et al.

Fear-avoidance beliefs about backpain in patients with subacute low back pain. Pain 2006;124:305-11.

2.

Coudeyre E, Rannou F, Tubach F

et al.

General practitionners’ fear-avoidancebeliefs influence their management of patients with low back pain. Pain2006;124:330-7.

3.

Diagnostic, prise en charge et suivi des malades atteints de lombalgie chroni-que. Recommandations pour la pratique clinique. ANAES décembre 2000.www.anaes.fr

4.

Prise en charge diagnostique et thérapeutique des lombalgies et lomboscia-tiques communes de moins de trois mois d’évolution. Recommandationspour la pratique clinique. ANAES, février 2000. www.anaes.fr

5.

Vlaeyen JWS, Linton SJ. Are we “fear-avoidant”? Editorial. Pain 2006;124:240-1.

Florentin Clère

Comment améliorer l’observance dans uncontexte de chronicité ?

Le numéro 2006/9 de la revue

Médecine

, en s’appuyant surla publication d’un article sur le sujet, a choisi de porter encouverture le titre suivant « Une bonne observance s’expli-que autant par la prescription que par le suivi ». Pourquois’intéresser à ce sujet ? Parce que l’observance thérapeuti-que, définie par l’exécution des prescriptions, médicamen-teuses ou non, du médecin, n’est que de 50 % dans uncontexte de chronicité. Il s’agit d’un processus complexe,multifactoriel, dépendant :

– du médecin : qualité de l’information, de la relation théra-peutique ;

– du patient et de son entourage : des croyances inappro-priées, des troubles du comportement, la dépression, lesconflits familiaux et la solitude sont des facteurs péjoratifs ;

– de la maladie : gravité, déni, effets secondaires…

Les auteurs de cet article développent 4 axes à privilégierpour améliorer cette observance :

– adapter les modalités de traitement à chaque situation sin-gulière : réduire au minimum les prises médicamenteuses,proposer un pilulier, prendre en compte le bénéfice réelapporté, l’espérance de vie et les préférences du patient,surtout s’il est âgé ;

– améliorer et renforcer la relation médecin-patient, savoir par-ler d’adhésion avec son patient : « comment vous organisez-vous avec ce traitement ? », « avez-vous trouvé des astucespour ne pas oublier ou vous tromper ? » ;

– développer l’éducation du patient et de sa famille : celanécessite d’abandonner le modèle du médecin « ordon-nant » en replaçant le patient au cœur du projet théra-

peutique, afin d’évoluer d’une observance passive vers uneadhésion active ;– mettre en place un suivi régulier, en s’appuyant sur l’ensem-ble des professionnels de santé : médecins traitants, spécialis-tes, infirmières, pharmaciens. En effet l’observance augmentenettement pendant les 5 jours qui suivent une consultation.Il est donc fort logique que les auteurs concluent à la néces-sité d’un concept bien connu des soignants impliqués dansla prise en charge de la douleur : la pluridisciplinarité !

RÉFÉRENCE

Gallois P, Vallée JP, Le Noc Y. L’observance des prescriptions médicales : quelssont les facteurs en cause ? Comment l’améliorer ? Médecine (De la méde-cine factuelle à nos pratiques) 2006;2:402-6.

Florentin Clère

Opioïdes forts et douleur chronique

L’éditorial du numéro de novembre 2006 de la revue

Pain

[1] se propose de faire le point sur l’utilisation des opioïdesforts dans un contexte de douleur non cancéreuse. Sonauteur se remémore les grands espoirs fondés sur la libéra-lisation des morphiniques : enfin l’« opiophobie » allait êtrevaincue et les patients douloureux chroniques retrouverune bonne qualité de vie. Qu’en est-il réellement ? Si lesessais randomisés ont pu confirmer l’efficacité des opioïdesforts sur la plupart des douleurs chroniques, peu d’informa-tions ont pu être collectées sur le long terme. C’est doncvers le Danemark, pays ou la consommation de morphini-ques par habitant est la plus élevée d’Europe, que la revuea choisi d’orienter son regard en publiant l’étude épidémio-logique d’Eriksen

et al

[2]. Un panel de 10 000 personnes apu être interrogé, au sein duquel 1 906 douloureux chroni-ques ont été identifiés. 228 d’entre eux (soit 12 %) utilisaientun opioïde fort : la satisfaction de ces patients vis-à-vis deleur traitement était la même que dans le groupe qui utili-sait un antalgique des autres paliers de l’OMS. Si l’intensitédouloureuse était plus élevée dans le groupe « opioïdefort », leur traitement n’a pas démontré de supériorité pour3 critères fondamentaux : le soulagement, le retentissementfonctionnel et la qualité de vie. Les auteurs en concluentque les bénéfices apportés par l’utilisation des opioïdesforts sont certains à court terme, mais s’épuisent fréquem-ment sur le long terme. Leurs effets peuvent même devenirdélétères, ce qui va dans le sens de la « spirale infernale »décrite il y 14 ans par Schofferman [3]. Comme le rappellel’éditorialiste, nous connaissons tous des patients doulou-reux chroniques dont la vie a été changée par l’utilisationprolongée de morphiniques et nul ne songerait à interrompre

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leur traitement. Cependant tous les patients ne sont pasdans ce cas : une approche « prudente, structurée et sélec-tive » s’impose. Les données actuelles de la littérature confir-ment donc bien que les opioïdes forts ne constituent pas lapanacée face à la douleur chronique non cancéreuse.

RÉFÉRENCES

1.

Ballantyne JC. Editorial. Opioids for chronic pain: taking stock. Pain 2006;125:3-4.

2.

Eriksen J, Sjogren P, Bruera E, Ekholm O, Rasmussen NK. Critical issueson opioids in chronic non-cancer pain: an epidemiological study. Pain2006;125:172-179.

3.

Schofferman J. Long-term use of opioid analgesics for the treatment ofchronic pain of non-malignant origin. J Pain Symptom Manage 1993;8:257-64.

Florentin Clère

Pour qui et comment prévenir les douleurspost-zostériennes ?

Trois mois après un zona, 20 à 30 % des patients présententdes douleurs neuropathiques dans le territoire de l’érup-tion : on parle alors de douleurs post-zostériennes (DPZ).Afin de réduire leur incidence, l’équipe de Wood [1] a tentéde dégager des facteurs de risque de développer des DPZ,en se basant sur les essais contrôlés publiés. D’après leursrésultats, l’utilisation des antiviraux se justifie après 50 anset/ou si l’intensité de la douleur est d’emblée sévère. Lesauteurs anglais d’un article récemment publié [2] ont tentéde vérifier la pertinence de ces facteurs de risque en éva-luant la situation de 280 patients au cours d’une étude pros-pective de 4 ans. L’âge supérieur à 50 ans associé à uneintensité douloureuse initiale supérieure à 5/10 sur uneéchelle visuelle analogique permettant de repérer tous lespatients chez qui la douleur persiste à 3 mois de l’éruption.Si la sensibilité de ces critères est excellente, leur spécificitéest par contre mauvaise dans la mesure où plus de 80 % despatients considérés comme à haut risque guérissent sponta-nément à 3 mois. Une éruption dans le territoire du nerfophtalmique de Willis constitue un facteur prédictif indé-pendant de persistance de la douleur à 6 mois.

En guise de conclusion, les auteurs confirment l’existencede facteurs de risque cliniques de développer des DPZ.Cependant, du fait d’une faible sensibilité, ils ne permettentpas d’établir de recommandations pour l’utilisation précocedes antiviraux.

Rappelons qu’en France les indications de l’aciclovir par voieorale sont la prévention des douleurs associées au zona chezle sujet immunocompétent de plus de 50 ans et la préventiondes complications oculaires du zona ophtalmique chez le

sujet adulte immunocompétent. Le traitement doit être admi-nistré précocement, au plus tard avant la 72

e

heure suivantl’apparition des premières manifestations cutanées.

RÉFÉRENCES

1.

Wood MJ, Kay R, Dworkin RH, Soong SJ, Whitley RJ. Oral acyclovir therapyaccelerates pain resolution in patients with herpes zoster: a meta-analysis ofplacebo-controlled trials. Clin Infect Dis 1996;22:341-7.

2.

Coen PG, Scott F, Leedham-Green M

et al.

Predicting and preventing post-herpetic neuralgia: Are current risk factors useful in clinical practice? Euro-pean Journal of Pain 2006;10:695-700.

Florentin Clère

Douleur et responsabilité civile professionnelle

Durant l’année 2005, Le Sou Médical a couvert en res-ponsabilité civile 116 778 médecins, qui ont adressé2 125 déclarations concernant des dommages corporels,soit 1,82 déclarations pour 100 médecins. Le hors-série denovembre 2006 du périodique

Responsabilité

, revue deformation sur le risque médical, présente un inventairecomplet de ces déclarations. Après lecture fine, il s’avèreque 9 dossiers concernent la douleur, toujours dans uncontexte post-opératoire :

– Neurochirurgie (4) : aggravation des douleurs antérieuresaprès chirurgie du rachis (2 dossiers), récidive de névralgiedu trijumeau après thermocoagulation, douleurs neuro-pathiques attribuées à un retard de la chirurgie d’un syn-drome de la queue-de-cheval ;

– ORL (1) : douleurs cervicales persistantes 2 ans après unebiopsie-exérèse de ganglions cervicaux ;

– Orthopédie (4) : douleurs post-opératoires après menis-cectomie du genou, acromioplastie, neurolyse du nerf radialau canal carpien, ligamentoplastie de la cheville. De plus5 dossiers ont été ouverts dans le cadre du développementd’une algodystrophie après chirurgie de membres.

Le rapport du conseil médical du Sou Médical ne fait pasécho des résultats de ces procédures. Si la douleur ne consti-tue le principal préjudice que dans moins d’1 % des cas, sonapparition et sa persistance en période post-opératoire peu-vent parfaitement être à l’origine de litiges entre médecinset patients.

RÉFÉRENCES

3.

Sicot C. Responsabilité civile professionnelle : rapport du Conseil médicaldu Sou Médical – Groupe MACSF sur l’exercice 2005. Responsabilité2006;HS:6-32.

Florentin Clère