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Outil 5 Comprendre les désordres structurels

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I. La connaissanceOutil 5 Comprendre les désordres structurels

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Le comportement et la durabilité des éléments structurels du bâtitraditionnel sont intimement liés aux matériaux utilisés et auxformes de construction propres aux environnements urbains etruraux qui le composent. Il convient donc en premier lieu deconnaître lesdits matériaux et lesdites typologies structurellesavant d’élaborer un quelconque diagnostic des altérations et desdommages de toute nature qui affectent les bâtiments. Il est à cetitre essentiel de disposer de toute l'information sur lesmodifications et/ou interventions réalisées au fil des ans, sansoublier les divers usages auxquels est destiné le bâtiment.Il est important de disposer d'une représentation graphique ou aumoins d'une trace écrite de l'information contenue dans les plans,les coupes et les élévations du bâtiment dans le but de pouvoirétablir un lien de cause à effet entre l’emplacement desdommages et les éléments structurels et la structure en elle-même, cloisons comprises. Il est également nécessaire deconnaître les différentes modifications de la distribution ou de lavolumétrie, qu'il s'agisse des agrandissements ou des élévationsréalisées dans le temps, qui s'avèrent être un élément importants'agissant de bâtiments anciens ou historiques.Au vu de ce qui précède, nous nous intéresserons ci-après audiagnostique des pathologies des systèmes structurels les plusfréquents, en faisant le distinguo entre les éléments supportantdirectement les charges mécaniques dues à l’action de la gravité,du vent ou des mouvements sismiques, à savoir, les murs, lespiliers et les fondations, et les planchers, les voûtes et les coupolesen tant qu'éléments structurels de couverture les plus courants.

1. La pathologie structurelle des bâtiments aux murs épais

La structure verticale des bâtiments auxquels nous nous référonsse compose généralement de murs construits avec les matériauxprésents sur la zone. À l’exception des murs végétaux et des mursà ossature de bois, tous les murs recensés sont considérés commedes murs épais, où la terre, la brique et la pierre constituent lematériel de base. Ces murs sont réalisés selon des procédésancestraux avec, par exemple, l'utilisation de coffrage dans le casdes murs de pisé et le recours au liant de terre ou de mortier dechaux afin d’assurer l’adhérence des différentes pièces, bien qu'ilsoit également possible de les monter par simple contact et calagedes différents éléments –la pierre dans ce cas–, ce que l'on appellecommunément la maçonnerie de pierre sèche. Il importe ici de

définir la mécanique des murs ainsi construits dans la mesure oùelle constitue un élément essentiel de leur propre stabilité, capabled’absorber les charges inhérentes à leur propre poids, cellestransmises par les planchers et les couvertures et celles provenantdes vents propres au lieu, en les transmettant aux fondations,généralement formées avec des semelles continues rigides, peuprofondes et de même largeur ou sensiblement supérieure à celledu mur. Ils assurent l'équilibre même de l’ouvrage, tant au niveaude sa largeur que de son faible élancement, dès lors qu’elles sontutilisées dans les constructions à deux ou trois étages, en adoptantles formes géométriques des corps fermés qui tendent à sesoutenir les uns avec les autres à des niveaux différents, enfonction de leur séparation et de la rigidité des points de raccordmurs-planchers. Sur la base de ces principes mêmes, c’estlorsqu’une ou plusieurs des caractéristiques précédemmentmentionnées sont insuffisantes ou anomales qu'apparaissent lespathologies, telles que les fissures, les lézardes ou les déformationsdont la formation, la localisation et la dynamique constituent lesdonnées essentielles du diagnostique.Bien que l’expression « murs épais » fasse ici référence aux mursd’une seule fouille, il importe de tenir compte, à des fins dediagnostic intégré, que ces murs manquent parfoisd’homogénéité dans leur partie interne, ce qui est notamment lecas des murs de maçonnerie, non seulement de ceux montés selonla méthode romaine où le matériau de remplissage est coulé entredeux rangées de moellons mais également de ceux dont laconstruction s’apparente à une fouille et pour lesquels l'élévationverticale des parements avec des moellons plus gros crée deszones intérieures plus désagrégées et déformables et, parconséquent, moins résistantes.Il est à souligner en outre que les formes de fracture de la plupartdes murs épais et anciens témoignent d’une corrélation certaineavec le modèle élastique, notamment dans le cas des charges lesplus courantes, bien qu’il soit évidemment nécessaire de mieux enconnaître les caractéristiques et les actions qui en découlent afinde procéder à leur diagnostique. Dans le but de faciliter tant la description que l’analyse despathologies structurelles les plus courantes, il convient dedistinguer les fractures coplanaires des murs de celles qui seforment dans les parties centrales ou qui résultent desdéformations transversales de leurs parements. C’est sur cettebase que sont détaillés les différents types de fractures ainsi queleurs principales caractéristiques.

Les désordres structurels desbâtiments dans l’architecturetraditionnelle méditerranéenne

César Díaz GómezArchitecteProfesseur titulaire, Département de Constructionsarchitecturales I de l'École technique supérieure d'architecture deBarcelone (Université polytechnique de Catalogne), Espagne

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1.1/ Pathologie coplanaire des parements du mur

Leur principale caractéristique réside dans le fait que les dommages, sous forme de lézardes, de fissures ou de tassements, apparaissentsur les parements superficiels et traversent généralement un élément de part en part. De tels désordres se distinguent donc de cellesd’origine non structurelle.

1.1.a/ Pathologie due à une trop forte compression sur une large partie du mur

La localisation des fissures ou des lézardes coïncide avec la direction des lignes isostatiques à compression correspondant à un élémentvertical d’un matériau élastique, homogène et isotrope recevant la charge verticale de son propre poids et celle des planchers, cettedernière étant supposée être répartie de manière uniforme. Les fractures se forment généralement au niveau des parties supportant laplus forte charge, coïncident avec la partie inférieure du mur et se forment, généralement, au niveau des zones pleines où les pousséesde charge entre les ouvertures sont à leur maximum. Leur présence témoigne du dépassement de la tension de compression admissibleau niveau de la zone fracturée, dont les effets peuvent être multiples en terme de sécurité du bâtiment, en fonction de la capacité deredistribution des tensions du mur lui-même ou de l’ensemble de l’appareil. Dans le cas des maçonneries en pierre taillée équarrie, de type orthogonal, les premiers symptômes de la fracture sont l’affaissement oula détérioration des joints horizontaux lorsque l’élasticité du mortier est beaucoup plus faible que celle des moellons ou des briques, cequi est souvent le cas des murs anciens. S’ensuit généralement la fracture verticale des moellons du fait des tensions auxquelles sontsoumises les portées rasantes horizontales des points de contact mortier-moellon jusqu’à former un faisceau continu de fissures verticales.Dans le cas de la maçonnerie en pierre brute hourdée, ce phénomène n’apparaît pas de manière aussi évidente car, même s'il existe, lesfissures zigzaguent entre les joints de mortier en suivant leur trace.

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1.1.b/ Désordres dues à des charges ponctuelles

Les fissures sont inclinées par rapport aux côtés de l’élément à l'origine de la charge –généralement une poutre ou une poutrelle– oubien elles suivent une ligne verticale sous l'élément en question. Comme dans le cas précédent, leur gravité dépend des possibilitésexistantes de redistribution des tensions de l'élément concerné, lesquelles sont nombreuses dans les cas les plus courants mais sont plusrares dans le cas des piliers libres où des solutions de renfort doivent être envisagées.

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1.1.c/ Pathologie due à des manques de rigidité des éléments collaborant

La déformabilité de certains éléments qui, théoriquement et en comparaison avec le modèle élastique, sont censés être d'une extrêmerigidité, est la cause de la formation de schémas singuliers de fracture, différents de ceux qui devraient se produire en l'absence d'unetelle situation. Les tableaux reproduits ci-après indiquent les fissures dues, dans un premier cas, à un linteau déformable en boisprovoquant la décompression d'une partie du mur et la formation de fissures suivant un arc de décharge, puis l’effet de la chargeponctuelle de la poutrelle ; et, dans un second cas, les fissures de la déformabilité des fondations sous l’effet des poussées de charge dumur de façade entraînant des cas de fracture par cisaillement ou par flexion, en fonction de la taille des baies et de la ductilité desmatériaux du mur.

1.1.d/ Pathologie due à des différences de charges entre les murs transversaux

La formation d’une fracture verticale dans l’angle formé par le mur supportant la charge des planchers et le mur transversal est unphénomène fréquent. La perte de continuité des murs entraîne une baisse de leur monolithisme, dont les effets devront êtrespécifiquement évalués en fonction de l’incidence des actions horizontales du vent et des mouvements sismiques éventuels.

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1.1.e/ Pathologie due à des différences de rigidité entre les matériaux composant les murs mixtes

Dans le cas des murs à double parement ou associant des matériaux coplanaires de différentes rigidités, l’un d’eux –le plus rigide–formant des pilastres apparents et l'autre formant le mur proprement dit, il est possible d'observer la formation de lézardes dues auxefforts de cisaillement qui se produisent au niveau des parties où toute déformation du matériau ou de l’ouvrage de plus faible rigiditéest empêchée par celui de plus grande rigidité (les pilastres). Ces fractures ont peu d’incidence sur l’équilibre des murs épais, elles sontcependant fréquentes dans le cas des murs associant les briques et le pisé ou dans le cas des maçonneries de pierre brute hourdée.

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1.1.f/ Pathologie due aux mouvements différentiels des fondations

Les mouvements de terrain constituent une des causes les plus fréquentes des fissures et des lézardes des murs traditionnels. De telsmouvements peuvent avoir de multiples causes, certaines sont intrinsèques au terrain (humidification des sols cohésifs, versants instables,etc.), d’autres sont en lien direct avec les caractéristiques des fondations existantes dans la construction du bâtiment en question ou avecl’action des constructions proches. Souvent –mais pas toujours– les dommages apparaissent progressivement, de telle sorte qu’il estpossible de disposer de l’information nécessaire quant à leur évolution et aux mesures préventives adoptées en conséquence.La reconnaissance visuelle des mouvements est possible à l’aide des tableaux des fissures et autres désordres reproduits ci-après enfonction des différents types de mouvement (descente ou glissement), de la zone du bâtiment concernée (angle ou partie centrale) ainsique des caractéristiques particulières du bâtiment (mur avec ou sans fenêtres). Comme nous l’avons précédemment souligné, cesschémas se basent sur l'hypothèse selon laquelle les murs se comportent mécaniquement comme des éléments élastiques et rigides,présentant très rarement une déformation plastique avant la fracture, et sont en outre homogènes et isotropes. Il est évident que plusles caractéristiques d’un mur se rapprochent de celles du mur précité, plus les références aux types de fracture fournies pour le modèleélastique seront valides, bien qu’il faille toujours prendre en compte le fait que les points de fracture prioritaires coïncident généralementavec la position des sections qui absorbent plus difficilement les tensions de traction générées par le mouvement, ce qui semble logiquesi l'on considère la faible résistance à ce type de sollicitation des matériaux qui composent les murs dont il est question ici.

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1.2/ Pathologie constatée sur le plan transversal aux parements du mur

Ces pathologies se caractérisent par le fait qu’elles sont invisibles au niveau des parements extérieurs du mur et qu'elles apparaissentsous forme de déformations transversales desdits parements.

1.2.a/ Fractures verticales au niveau des sections internes des murs

Un excès de compression sur un mur épais peut entraîner une fracture verticale interne qui, suivant la ligne de compression isostatiquepassant par le point de dépassement de la tension de rupture du matériau, tend progressivement à partager le mur en deux, en réduisantd'autant son élancement et sa capacité portante. Ce type de fracture est fréquent dans le cas des murs dont l’intérieur n’est pashomogène et dont les sections internes sont faibles en raison de la disposition des moellons ou des pièces céramiques exigée par les

1.1.g/ Pathologie due aux mouvements sismiques

La construction de l’architecture traditionnelle à base de murs de terre, de pierre ou de brique –les deux premiers matériaux étant lesplus fréquents– offre peu de résistance aux mouvements sismiques, compte tenu de sa faible résistance aux tensions de traction, decoupe, et de sa faible ductilité à apporter une réponse aux sollicitations multidirectionnelles introduites par ces mouvements. Lesymptôme visuel qui permet le mieux d’identifier cette pathologie est la présence de fissures en croix au niveau des pans situés entre lesouvertures, qui témoignent de la fracture due à un effort par cisaillement sur ces pans de mur du fait de la secousse bidirectionnelle(droite-gauche, horizontale-verticale) pratiquement simultanée, caractéristique du mouvement sismique. D’autres effets visibles tels queles fissures au niveau des points de changement d’inertie ou résultant des trop fortes poussées créées par les secousses sont égalementfréquentes, et il en est de même de la formation de dommages invisibles à l'œil nu, à l'intérieur des murs (désolidarisation, microfissures,etc.) qui réduisent leur capacité portante.

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références fixes des plans verticaux des parements. Cette forme de rupture est celle qui présente le plus de risques parmi toutes cellesqui sont répertoriées ici, dans la mesure où elles ne sont généralement pas visibles, qu’elles progressent à l’intérieur des murs anciensjusqu’à provoquer la chute de l’élément, sans qu’à aucun moment la déformation dudit élément n’ait été perceptible. Par conséquent,tant leur présence que leur détection exigent de prendre, à court terme, des mesures destinées à renforcer les éléments endommagés,tant dans le cas des murs que dans celui des piliers libres.

1.2.b/ Écrasements et bombements des façades

Ils sont généralement la conséquence de longs processus de déformation dus aux effets prolongés des sollicitations verticales ouhorizontales sur les matériaux des murs et découlent de ceux liés à leur rhéologie propre, qui conduit à des modifications de leurscaractéristiques mécaniques au fil du temps. À ce stade avancé de déformation, il est nécessaire de procéder à des étayages ou deprendre les mesures de conservation nécessaires. Les écrasements dus aux poussées des couvertures, aux déplacements des fondationsou aux effets de l'humidité et de la température sont les plus fréquents, tandis que les processus rhéologiques de déformation lente sousl'effet de charges centrées ou décentrées transmises par la toiture et par les planchers sont la cause des bombements.

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1.2.c/ Poussée des voûtes

Les éléments voûtés produisent des poussées, au niveau de leurs points de raccord avec les murs du périmètre, qui doivent êtrecompensées par l’épaisseur et par la masse de ces murs, parfois à l'aide de contreforts. L'insuffisance de la compensation des pousséesentraîne la formation de fissures et d’autres déformations qui peuvent affecter non seulement les murs mais également la voûte elle-même, soumise à un effet de décompression.

2. Pathologie structurelle des planchers, des voûtes, des coupoles des bâtiments aux murs épais

L’élément de couverture le plus couramment utilisé dans l'architecture méditerranéenne est le plancher constitué de poutrelles de boiset d’un remplissage de divers matériaux : lattis de roseaux, entablement, radier de carreau céramique, hourdis de ce même matériel ouà base de liants ou d'agrégats divers, etc. Les voûtes et les coupoles sont en revanche moins courantes et leur application plus spécifique;elles sont généralement construites avec les mêmes matériaux que les murs et les techniques s'adaptent aux particularités de chaque lieu.

2.1/ Pathologie des planchers faits de poutres et de poutrelles

Les poutres et les poutrelles de bois qui constituent les éléments structurels porteurs du plancher présentent trois types de pathologiesaux caractéristiques distinctes : les déformations, les attaques biotiques et les lézardes, également appelées fentes lorsqu’il s’agit du bois.

2.1.a/ Les déformations

Il n’est pas rare que les planchers des bâtiments anciens soient fortement gondolés du fait de la forte fluence à laquelle sont soumis leséléments en bois qui les composent. La fluence n'est rien d’autre que la qualité d'un matériau à se déformer progressivement sous l'effet

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2.1.b/ La présence de fissures

Bien que la présence de fissures ne soit généralement pas due aux actions mécaniques supportées par le plancher, mais davantage à descauses en rapport avec le processus de séchage du bois ou aux cycles d’humidité ambiante, il convient de vérifier leur origine et d’évaluerleurs répercussions sur l’inertie des éléments affectés, dans la mesure où, si la cause de ces fissures est d’origine mécanique, leur présencepeut présager d’une rupture prochaine ou de l'éboulement de l'élément en question.

des charges supportées, sans qu'il ne soit nécessaire que ces charges augmentent. Ce phénomène est typique du bois qui travaille et quigondole, ce qui a pour conséquence de diminuer la capacité de résistance de l’élément qui compose le plancher, et cette diminution doitêtre évaluée au cas par cas en fonction des caractéristiques mécaniques du bois, de la charge supportée par le plancher et de la flècheexistante.

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2.1.c/ Les attaques biotiques

La putréfaction du bois due à la présence de champignons ou d'insectes xylophages tels que les termites ou les vrillettes entraîne unediminution de la surface utilisable, ce qui implique, comme dans l'exemple précédent, d'évaluer avec soin chaque bâtiment concerné. Ladétection de zones endommagées et leur intensité sont des éléments indispensables afin d’effectuer un diagnostic intégré de ceséléments.

2.2/ Pathologie des voûtes et des coupoles

Le comportement mécanique et structurel des voûtes se reconnaît normalement au point de superposition de la courbe directrice del’élément avec la ligne de pression correspondante. Plus on s'éloigne de cette ligne directrice, plus le risque de fissuration oud'écrasement est important, compte tenu du fait que ces points coïncident avec les zones soumises aux plus fortes tensions de tractionet de compression.Les schémas de fracture des voûtes diffèrent de ceux des coupoles, étant donné que ces dernières sont de véritables structures spatialesdont l'interprétation exige nécessairement une étude tridimensionnelle complexe, qui explique certains des schémas classiques derupture. Quoi qu’il en soit, pour ces deux éléments, l'origine des dommages est due à la décompression générée par le mouvement desmurs, des piliers ou des pilastres qui reçoivent leurs poussées, tant sous l'effet de l'écrasement latéral des murs eux-mêmes que sousl'effet de l'affaissement de l'assise différentielle des fondations, bien que l’excès de charge ou leur propre faiblesse puisse également êtrela cause directe des pathologies constatées. Les fractures les plus courantes sont reproduites sur les schémas ci-contre.

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53. Particularités du comportement des colombages

Le comportement mécanique et structurel des colombages traditionnels diffère de celui des murs épais auxquels nous avons fait référenceprécédemment dans la mesure où les principaux éléments de résistance sont les pièces linéaires de bois composant le pan de bois, tandisque les remplissages de pisé, d'adobe ou de brique ont pour fonction subsidiaire d'éviter leur affaissement, en absorbant, dans tous lescas, un pourcentage variable des efforts de compression. Il s’agit par conséquent de structures portiques soutenues partiellement par lespans massifs. Les planchers sont généralement faits de poutres et de poutrelles de bois posées en appui sur les éléments mêmes des pansou sur des piliers internes.Il s’agit de structure dont le comportement est très complexe et déterminé, en grande partie, par la différence de rigidité entre lesmatériaux qui le composent, par la relation entre l'épaisseur du mur et la distance entre les étais, ainsi que par la disposition des piècesdu colombage, souvent très différente d'un cas à l'autre, avec parfois la présence d’éléments diagonaux plus ou moins nombreux. Danstous les cas, un des aspects importants, voire décisif du point de vue de la durabilité de ce type de mur, est la détérioration progressivedu bois en l'absence de tout entretien, ce qui se traduit par une diminution progressive de sa capacité portante.

Bibliographie

DIVERS AUTEURS (1998), Tratado de rehabilitación. Patología y técnicas de intervención. elementos estructurales (Traité de réhabilitation et techniques d’intervention : élémentsstructurels), Département de Construction et Technologie architectonique, Université polytechnique de Madrid, Editorial Munilla-Lería, Madrid.

DIVERS AUTEURS (1995), Manual de diagnosi i intervenció en sistemas estructurals de parets de càrrega (Manuel de diagnose et d’intervention dans les systèmes structurels desmurs porteurs), Col·legi d’Aparelladors i Arquitectes Tècnics de Barcelona, Barcelone.

MASTRODICASA, S. (1978), Dissesti statici delle strutture edilizie (Déséquilibres statiques des structures des bâtiments), Hoepli Ed., (6e édition), Milan.

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L’important facteur de risque sismique du bassin méditerranéenprovient de ses caractéristiques géomorphologiques ettectoniques. En effet, cette région se trouve à l’ouest de la chaînedes Alpes et de l’Himalaya, où l’interaction entre la plaqueeurasiatique et les plaques d’Afrique, d’Arabie et d’Inde provoqueun système de collision complexe. Elle a donc souffert depuistoujours de l’activité sismique, qui s’est traduite par denombreuses conséquences désastreuses en termes de vieshumaines, ainsi que de dommages plus ou moins importants dupatrimoine architectural sur les bâtiments, les grands immeubles,les centres historiques et l’environnement dans sa totalité(environnement naturel et construit). Ces répercussions ont parfoismis en péril le témoignage historique et l’identité même d’un lieu. L’architecture méditerranéenne traditionnelle est d’autant plusvulnérable qu’elle subit fréquemment d’importants effets destremblements de terre, différents en fonction des caractéristiquesde la structure et des matériaux des bâtiments. Les ouvrages enmaçonnerie sont communément considérés comme moinsrésistants aux séismes que les structures modernes en bétonrenforcé. Cependant, les bâtiments en maçonnerie construits etentretenus correctement peuvent résister à des tremblements deterre de grande intensité –comme cela est démontré par lesmonuments ayant surmonté de difficiles épreuves– grâce auxtechniques et aux matériaux employés ainsi qu’à un entretienrégulier effectué dans les règles de l’art. Par ailleurs, des étudesanalytiques plus exhaustives effectuées sur les dommagesprovoqués par les séismes (grâce aux meilleures possibilitésactuelles de regrouper et de traiter les informations) ont démontrérécemment la capacité « naturelle » des murs, des planchers etdes plafonds réalisés en maçonnerie d’absorber les vibrations, àcondition qu’ils soient construits, reliés et entretenuscorrectement. En outre, la restauration et le renforcement desbâtiments en maçonnerie, même de ceux qui présententd’importantes fissures, permettent de les conserver en perdantuniquement la géométrie originale. En revanche, même en cas dedéformations minimes, les bâtiments en béton renforcé doiventêtre démolis si leur géométrie est atteinte. Comme nous l’indiquerons par la suite, les caractéristiquesparticulières des tremblements de terre, telles que leur intensité etleur intermittence, n’ont pas permis de comprendreprofondément le phénomène et ses causes. Par conséquent,contrairement à la culture de construction traditionnelle, aucunetechnique ni caractéristique structurelle n’a encore été développéeà partir de l’expérience.

Caractéristiques structurelles des bâtiments et tremblements de terre au cours de l’histoire

Les tremblements de terre ont été historiquement interprétés avecbeaucoup d’imagination et de façon apocalyptique. Lacompréhension humaine était même considérée commeinappropriée à cause de l’absence d’une approche scientifiquedans la culture pré-moderne.L’échec de la théorisation des causes permet d’expliquer, d’unepart, l’absence de solution structurelle antisismique et, d’autrepart, l’idée que toutes les structures, même solides, ne pouvaientpas résister à la nature indomptable et menaçante destremblements de terre (souvent perçus comme une punitiondivine).Par ailleurs, le fait que ce phénomène tellurique ne se produit pasà intervalles rapprochés n’a pas contribué à l’approfondissementdes connaissances relatives au risque sismique et aux éventuellessolutions à apporter. En réalité, les effets destructeurs d’untremblement de terre tombent progressivement dans l’oubli au fildes générations. L’humanité s’est protégée des effets continuelsde l’environnement naturel au moyen de toitures, de murs, deplanchers et de très nombreux autres éléments, qui ont étéprogressivement améliorés. En revanche, elle n’a pas pu rendre lesbâtiments résistants aux pressions dynamiques. La mémoirehistorique de l’événement destructeur a persisté dans laconscience populaire mais elle a été chargée de superstitions etliée à des événements surnaturels.

Gravure représentant un tremblement de terre biblique : selon les anciennescroyances, les bâtiments et le sol sont en colère.

Risque sismique dans l’architecturetraditionnelle

Giambattista De TOMMASIIngénieurProfesseur à plein temps de Réhabilitation des bâtiments,Politecnico de Bari, ItalieCollaborateurs : groupe de travail de recherche (Fabio Fatiguso, Mariella De Fino et Albina Scioti)

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Aristote, l’un des premiers philosophes des sciences de la terre,écrivit : « […] ce n’est ni l’eau ni le feu, mais la vapeur qui serait àl’origine des tremblements de terre, lorsqu’elle dirige versl’intérieur de la terre ce qu’elle exhale généralement versl’extérieur […] »1 . Sénèque, dans le sixième livre des Questionsnaturelles intitulé Du mouvement de la Terre, décrivitcorrectement les effets des tremblements de terre, mais il les reliaità l’eau ou à l’air tourbillonnant dans des cavités souterraines etproduisant les tremblements sismiques. De même, Pline, dans sonouvrage Histoire naturelle, mentionnait un vent à l’intérieur de laTerre qui serait exhalé par « des égouts et des puits profonds »2 .Les explications proposées au cours des siècles suivants, bien quesensiblement les mêmes, sont toutefois difficiles à présenter dansle détail. Dans tous les cas, aucune n’a fait preuve d’une intuitionadéquate à propos de ce phénomène et toutes tentaient parfoisde l’expliquer par la magie et/ou la sorcellerie. Par ailleurs, la définition des causes des tremblements de terre n’apas progressé, bien que les processus entraînant l’effondrementdes bâtiments en maçonnerie aient été compris (nous disposonsd’innombrables plans, dessins et descriptions de ces processus). Enoutre, les premières découvertes scientifiques enthousiastesréalisées au début du siècle des Lumières ont contribué à accroîtrela confusion au lieu de fournir des solutions, comme cela s’estproduit dans le cas des phénomènes électriques : « […]l’enthousiasme soulevé par les phénomènes électriques a conduità penser que tous les événements inexplicables étaient attribuésaux fluides, pour reprendre le terme de cette époque, à la vapeurélectrique, et que les tremblements de terre étaient considéréscomme des phénomènes causés par l’électricité […] »3 . C’estdans cet esprit que Valadier conçut les tours antisismiques à Riminivisant à répandre l’électricité de la terre dans l’atmosphère.Au XVIIIe siècle, des progrès qualitatifs furent réalisés lorsque les

expériences et les observations scientifiques4 permirent à Bottaride comprendre le phénomène, comme il l’indique dans sonouvrage Three lessons on the earthquake (Trois leçons sur letremblement de terre), publié à Rome : « Les entrailles de la terresont traversées à de nombreux endroits par des vents sulfureux etbitumineux mêlés à du salpêtre ou d’autres substances et quis’enflamment, se dilatent dans les cavités où ils se trouvent, etbrisent ou tentent de briser les obstacles existants, provoquant lestremblements de la terre […] »5 . La sismologie moderne vitégalement le jour au XVIIIe siècle. Les études réalisées par Mallet6 ,le sismographe de Mine et l’échelle de Mercalli permettant demesurer l’intensité sismique furent des étapes importantes ayantouvert la voie à la recherche du XXe siècle (depuis les recherchesréalisées par Baratta et Wegner), qui est parvenue à expliquer lescauses des tremblements de terre et les contre-mesures à adopter. En ce qui concerne les solutions techniques, soulignons quedepuis des temps anciens, de nombreuses mesures techniques etstructurelles ont été prises, en particulier après des tremblementsde terre très dramatiques. Ces mesures, intéressantes et plus oumoins efficaces, étaient développées très rapidement et tombaienttout aussi rapidement dans l’oubli.En Italie, au IVe siècle av. J.-C., dans les colonies grecques deMétaponte et Paestum, les constructeurs jetaient les fondationsdes bâtiments dans des tranchées creusées dans la roche, puiscomblées avec du sable. Au nord de la Syrie, au IIe siècle av. J.-C.,les ouvrages de maçonnerie étaient dotés d’une structure en bois.Après le tremblement de terre qui détruisit Pompéi et une partiede la ville de Naples en l’an 63, un règlement antisismiqueempêchant la construction de bâtiments de plus de deux étagesfut imposé, diffusé et transmis jusqu’à la Renaissance. À cepropos, aucune innovation technique et structurelle necorrespondait au développement de ce règlement, à l’exception

Conséquences du dramatique tremblement de Friuli (Italie), 1976. Représentation du tremblement de terre de Rhodes, 1495. Les plus hautes tourscirculaires de la muraille de la ville se sont écroulées, alors que les tours les plusbasses sont intactes.

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des résidences d’Ercolano, dont la structure en bois (opusgraticium) était remplie de pierres broyées, de boue et d’unecharpente en rotin.Néanmoins, après le dramatique tremblement de terre quidétruisit une grande partie de la ville de Lisbonne en 1755 et dontles secousses furent senties dans toute l’Europe, il fut décidé demettre en pratique des mesures appropriées afin de réduire leseffets sismiques destructifs (même si les causes étaient malcomprises). Pour la reconstruction, certains règlements furentlancés pour la première fois dans l’Histoire concernant la hauteurdes bâtiments, la largeur des rues et, en particulier, la structure desnouveaux bâtiments. Plus précisément, les murs devaient secomposer d’une structure en bois (qui allait par la suite porter lenom de cage Pombal, du nom du marquis Pombal chargé de lareconstruction) pouvant supporter les étages et la toiture en casde tremblement de terre.La cage Pombal située à l’intérieur des murs se composait d’uneossature contreventée contenant des pieux et des traverses. Cesdernières étaient reliées aux murs par le biais de lambris d’appuidont la partie supérieure était reliée par des poutres, par deschambranles et des chevrons. La structure élastique en bois et lesclameaux flexibles fournissaient une grande résistance aubâtiment. Les importantes solutions techniques mentionnées menèrent à desapplications plus complexes après le tremblement de terre deMessine, en Calabre, en 1783, avec un type de constructionantisismique de nature particulière. La « casa baraccata » (hutte)décrite par Vivenzio7 se composait d’une structure porteuse en

bois dotée de poutres horizontales et verticales encastrées sur despieux. Un grand progrès fut réalisé vers l’établissement de bonnesrègles de construction, soutenues par une compréhension plusapprofondie des phénomènes telluriques. En réalité, lecomportement homogène et unitaire du bâtiment en cas desecousses sismiques était assuré par des barres en acier placées àl’intérieur des murs et par des entraits et des contreforts reliantplus solidement les structures. Les autorités encouragèrent mêmel’oscillation des bâtiments. En Italie, en 1854, le gouvernement deBourbon retira les taxes grevant le fer utilisé pour cela. Danscertaines régions d’Italie, des pièces de sécurité étaient utilisées,ainsi que des pièces renforcées par des lames en fer doux en formede croix de Saint-André placées entre le mur et le plâtre. Les mursainsi renforcés étaient très courants, en particulier après letremblement de terre de Messine en 1908, et il en existaitplusieurs versions, dont certaines brevetées, allant du simplerenforcement au moyen d’entraits en acier à des systèmesmodulaires composés de briques creuses de différentes formes etavec plusieurs fentes reliées par des filets en fer zingué.

L’importance des connexions pour la résistance sismique

Dans chaque région méditerranéenne, l’art de la construction s’estspécialisé pour réaliser des ouvrages en maçonnerie de lameilleure façon possible en utilisant des matériaux disponibles surplace et viables du point de vue économique. Ainsi, un mur debonne qualité peut être composé de divers matériaux et présenter

Gravure du XVIIIe siècle représentant un tremblement de terre provoqué parl’exhalation de vapeurs souterraines.

Tours antisismiques conçues par Valadier à Rimini.

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des caractéristiques structurelles différentes en fonction desrégions, alors que les règles de la construction sontessentiellement les mêmes (dimension des éléments, qualité ettype de réalisation, texture des façades, qualité et quantité desmortiers, connexions et homogénéité).La nature monolithique des murs creux fournit une bonnerésistance aux pressions dynamiques. En réalité, chaque partie doitêtre reliée à une autre afin d’avoir un comportement de type «boîte » évitant les glissements verticaux qui réduisentgénéralement la capacité de stabilisation du poids contre lapoussée horizontale.Outre les connexions réalisées entre chaque élément de laconstruction, de bonnes connexions entre les divers élémentsdoivent être effectuées dans l’ensemble de la structure (mur-mur,mur-plancher, mur-toiture) afin de limiter les déformations en casde pressions et d’éviter les battements provoqués par lebalancement des structures, à un moment différent pour chacune.Selon Rondelet, « les naturistes ont remarqué qu’en essence lescorps des êtres humains sont disposés de sorte que les os ne sedétachent jamais les uns des autres. De même, les ossaturesdoivent être reliées à d’autres ossatures et renforcées par des nerfset des ligaments. De la sorte, chacune des ossatures peut résisterpar elle-même, grâce à la solidité de sa propre membrane, mêmesi un autre élément est défaillant. »8

En cas de secousse sismique, ces « ligaments » servent à donner àl’ouvrage de maçonnerie un comportement de type « boîte »(pour utiliser une définition moderne), essentiel pour renforceret/ou améliorer la résistance sismique. Le comportement de typeboîte, également assuré par des connexions des partiessupérieures (bandeaux saillants), peut permettre aux différentséléments de résistance d’échanger les pressions sismiqueshorizontales et à l’ensemble du bâtiment de réagir de façon

globale grâce à la collaboration et la distribution des pressionsexercées sur les différentes parties. En réalité, les connexions servent à freiner la rotation des murs(façades des bâtiments) et à transmettre l’action aux mursperpendiculaires afin qu’ils se lézardent dans leur plan.Si les règles habituelles de construction ne permettent pas deréaliser ces connexions, l’utilisation d’entraits métalliques peuts’avérer très utile. Militia indique qu’« Autrefois, les murs étaientmaintenus en place au moyen de longues poutres en bois lestraversant et fonctionnant en chaîne sur l’épaisseur de laconstruction. Ainsi, le mur était renforcé par lui-même et reliésolidement aux autres murs. Le bois d’olivier, qui ne s’endommagepas avec le passage du temps, était très utilisé pour cette fonction.En effet, il est plus efficace que les chaînes en fer largementutilisées de nos jours. »9 Dans le cadre des bonnes techniques deconstruction, l’efficacité des entraits métalliques indique lacapacité de créer ou de recréer une connexion solide entre les

La « hutte » de Vivenzio.

Modèle d’une cage Pombal.

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structures horizontales et verticales, ce qui peut également êtreobtenu grâce à une disposition appropriée et une structurationcorrecte des planchers. Les murs et les planchers en bois ou en ferdoivent être reliés pour que les poutres puissent réaliser une actionde connexion et ainsi empêcher les murs de tourner versl’extérieur, et pour que les étrésillons permettent d’éviter que lesmurs ne s’écroulent vers l’intérieur. Par ailleurs, les planchersdoivent être suffisamment rigides pour distribuer uniformémentleur poids sur les murs et pour répartir les pressions sismiquesproportionnellement à la rigidité des ouvrages en maçonnerie.Une connexion efficace entre les éléments porteurs et les murs, aulieu d’un simple support provoquant le non-filetage et lebattement des murs, peut permettre d’obtenir ce résultat.

Réferénces

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1 (“… così adunque né l’acqua, né il fuoco, ma il vapore sarebbe cagione deiterremoti, quando accade che scorra al di dentro ciò che esala al di fuori …”).

2 (“fogne e spessi pozzi”).

3 A. Favaro, “Intorno ai mezzi usati dagli antichi per attenuare le disastroseconseguenze dei terremoti”, Tip. Grimaldo, Venezia 1874. (“… l’entusiasmodestato dall’aspetto dei fenomeni elettrici fece sì che tutto ciò di cui non si sapevadare una adeguata spiegazione, venisse attribuita al fluido, o come si diceva alloraal vapore elettrico, e quindi anche i terremoti venissero riguardati come unfenomeno, la cui causa era da riconoscersi esclusivamente nell’elettricità …”).

4 Menées par Leibnitz, Kepler et Newton.

5 (“… le viscere della terra in molti punti inzuppate di aliti sulfurei e bituminosi i qualimescolati col nitro o in altra guisa prendono fuoco e si dilatano in forma che nonpotendo capire, in quelle cavità dove si ritrovano, inchiusi a principio spezzino otentino di spezzare gli opposti ostacoli il che da cagione al tremore del terreno …”).

6 Mallet, “Il grande terremoto napoletano del 1857”.

7 G. Vivenzio, “Istoria e teoria de’ tremuoti, ed in particolare di quelli della Calabriae di Messina del 1783”, Naples 1783.

8 J. Rondelet, Traité théorique et pratique de l’art de bâtir, Paris 1802. (“i naturistihanno notato che in natura i corpi degli esseri animati risultano strutturati inmodo tale che le ossa non restino in nessun punto staccate tra loro. Allo stessomodo le ossature saranno da riunire alle ossature, ad esse tutte da rafforzare nelmodo più opportuno con nervi e legamenti; sicchè la successione delle ossature,collegate tra loro, risulti tale da resistere da sola, quand’anche ogni altro elementovenisse a mancare, perfettamente conchiusa nella solidità della suamembranatura”).

9 F. Milizia, Principi di architettura civile, Finale Ligure 1781, parte III, chap. I, p. 102.(“gli antichi per meglio mantenere i muri li attraversavano di tratto in tratto conlunghi travi di legno, che servivan da catene, le quali prendevano tutta lagrossezza del muro, che rimaneva perciò fortificato in se stesso e meglio collegatoagli altri muri. Si adoperava a questo effetto legno di ulivo, che non viene comegli altri danneggiato dalla calce, e sembra preferibile alla catene di ferro, di cui sifa ora tanto abuso”).

Mécanismes types de bâtiments dans les centres historiques (Giuffrè, 1993).

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Le danger sismique est défini comme étant le niveau probable detremblement du sol associé à la récurrence des tremblements deterre. L’évaluation du danger sismique est le premier pas dansl’évaluation du risque sismique, obtenue par la combinaison dudanger sismique, des conditions locales du sol et des facteurs devulnérabilité (type, valeur et âge des bâtiments ou infrastructures,densité de population, usage de la terre). Les tremblements deterre fréquents et importants dans des zones lointaines et isoléesrésultent en un grand danger sismique mais ne présente pas derisques ; au contraire, les tremblements de terre modérés dans deszones densément peuplées présentent peu de danger mais desrisques élevés.La minimisation de la perte de la vie, des dommages causés auxpropriétés ainsi que des ruptures sociales et économiques dus auxtremblements de terre dépend des estimations sérieuses quipeuvent être faites du danger sismique. Les gouvernementsnationaux, régionaux et locaux, les preneurs de décisions, lesingénieurs, les planificateurs, les organisations de réponse auxurgences, les constructeurs, les universités ainsi que le grandpublic ont tous besoin d’évaluations sérieuses quant au dangersismique pour la planification de l’usage des terrains,l’amélioration de la conception et de la construction des bâtiments(y compris l’adoption de codes de construction), pour les plans del’état de préparation des réponses aux urgences, pour lesprévisions économiques, pour les décisions quant au logement età l’emploi ainsi que pour beaucoup d’autres types d’atténuationdes risques.Les éléments de base de l’évaluation des probabilités du dangersismique moderne peuvent être regroupés en quatre catégoriesprincipales : Catalogue de tremblements de terre, Modèle desource de tremblements de terre, Grands mouvements sismiquesdu sol, Évaluation du danger sismique.Le danger sismique décrit les niveaux de mouvements du solchoisis qui devraient probablement, ou ne devraient pas, êtredépassés dans des temps d’exposition spécifiques. Les cartes dedanger spécifient habituellement 10 % de possibilités dedépassement (90 % de possibilités de non dépassement) decertains paramètres de mouvement du sol pour un tempsd’exposition de 50 ans, correspondant à une période de retour de475 ans. La carte des dangers sismiques dans la région euro-méditerranéenne qui a été publiée présente le pic d’accélérationdu sol avec 10 % de possibilités de dépassement en 50 ans pourune condition de sol ferme. Le pic d’accélération du sol, paramètrede mouvement du sol à courte période qui est proportionnel à la

force, est le paramètre de mouvement du sol le pluscommunément élaboré et les codes de construction actuels quicomprennent des dispositions antisismiques spécifient la forcehorizontale qu’un bâtiment devrait être capable de supporterpendant un tremblement de terre. Les mouvements du sol àcourte période affectent les structures avec des vibrations derésonnance à courte période correspondante (c’est-à-dire desbâtiments de un à trois étages, soit la plus grande classe destructures au monde).Les couleurs de la carte choisies pour indiquer le dangercorrespondent grossièrement au niveau réel du danger ; lescouleurs les plus froides représentent les plus faibles dangers alorsque les couleurs les plus chaudes représentent les dangers les plusimportants. Plus précisément, les couleurs allant du blanc au vertcorrespondent à un faible danger (0-8 % g, où g est égal àl’accélération de la gravité), jaune et orange au danger modéré (8-24 % g), et les rouges au danger le plus élevé (> 24 % g).Le modèle unifié de danger sismique CSE-SESAME est le résultatdes efforts combinés de groupes de recherche multidisciplinairessur les sismotectoniques, les catalogues de tremblement de terre,et l’évaluation du danger pendant plus de dix ans au sein d’uncadre de projets, de programmes et d’initiatives de coopération àniveau international.La carte est l’un des résultats possibles qui peut être généré parune procédure homogène pour l’évaluation du danger sismiquepour la région euro-méditerranéenne telle qu’elle est développéedans deux principaux projets : le Programme international decorrélation (UNESCO IGCP-382 projet SESAME) et la Commissionsismologique européenne (CSE). Ce modèle de danger sismiqueunifié CSE-SESAME permet aussi de définir différents mouvementsde sol et d’accélération spectrale correspondant à des portions dela longueur de bande d’énergie émise par un tremblement deterre et pour différentes périodes de retour et de conditions du sol.Le pic d’accélération du sol tel qu’il est décrit dans la carte et 0,2d’accélération spectrale correspondent à de l’énergie à courtepériode qui aura les pires effets sur les structures de périodecourte (les immeubles allant jusqu’à sept étages environ). Lescartes d’accélération spectrale de plus longues périodes (1,0 s, 2,0s, etc.) indiqueraient le niveau de tremblement de terre qui aura leplus grand effet sur des structures de plus longue période(immeuble de dix étages et plus, ponts, etc.).Le modèle unifié CSE-SESAME permet aussi de générer des cartespour différentes périodes de retour, par exemple 72 ans (50 % /50 ans) qui est une estimation non prudente qui est souvent

La carte euro-méditerranéenne des dangers sismiques

María-José JiménezDocteur chercheurInstitut des Sciences de la Terre Jaume Almera – C.S.I.C.,Barcelone, Espagne

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utilisée pour la durée de vie d’utilisation d’un immeuble ou lapériode de retour de 4275 ans (2 % / 50 ans) qui est le standardrécemment établi pour les codes de construction et qui comprendde très rares tremblements de terre importants. Les valeurs de lapériode de retour 475 (10 % / 50 ans) telles qu’elles sontprésentées dans la carte reflètent un degré standard de prudencequi comprend de rares tremblements de terre importants et a étéemployé de manière presque universelle par les codes deconstruction au cours de ces dernières décennies.Le modèle unifié de danger sismique CSE-SESAME pour l’Europeet la Méditerranée constitue un cadre de danger sismique pour larégion en termes de pic d’accélération du sol et d’accélérationspectrale dont les séismologues, les géologues, les ingénieurs destremblements de terre et les architectes peuvent en tirer profitcomme lignes directrices générales. Cependant, il faut insister surle fait que les évaluations des mouvements du sol dans la carte desdangers sismiques euro-méditerranéenne fournissent une vued’ensemble raisonnable et cohérente des dangers sismiques àl’échelle de la région mais ne fournissent pas de détails adéquatspouvant servir de base pour concevoir des valeurs ou desstratégies et des décisions d’atténuation locale.La carte (http://wija.ija.csic.es/gt/earthquakes/) a reçu le Prixd’Excellence en Cartographie 2003 de l’International CartographicAssociation (ICA), dans la section des cartes scientifiques del’Exposition internationale des Cartes au 21e Congrèscartographique international qui s’est tenu à Durban, en Afriquedu Sud, du 10 au 16 août 2003.

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I. La connaissanceOutil 5 Comprendre les désordres structurelsLe comportement sismique des constructions traditionnelles de murs de maçonnerie

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Introduction

Les constructions de murs porteurs constituent une partie trèssubstantielle du patrimoine architectural et culturel. Dans cecontexte, ce ne sont pas seulement les bâtiments classés commeéléments du patrimoine architectural qui sont importants, lesensembles de bâtiments des noyaux anciens ou historiquesprésentent aussi une grande importance dans la mesure où ilscontribuent à enrichir l’identité culturelle d’un village ou d’unescène urbaine. Y compris lorsque ces ensembles ne disposent pasd’une mention explicite en tant que patrimoine architectural, ilfaut reconnaître leur contribution à l’héritage culturel et leurcapacité à contribuer, de même que les monumentsemblématiques, à l’apparition d’une importante économiesecondaire associée au tourisme culturel. En plus de cela, lesconstructions de murs porteurs se maintiennent en usage et sesont pleinement insérées dans l’économie du logement.L’implantation de critères de durabilité et de respect del’environnement (en rendant préférable la réhabilitation parrapport à la construction neuve dans la mesure où elle supposeune consommation bien moindre de ressources non renouvelableset une moindre production de déchets) a donné lieu à unerevalorisation économique et sociale de ces constructions.Tous les pays de la Méditerranée sont sujets, dans une plus ou moinsgrande mesure, à un certain danger sismique. De ce fait, il estnécessaire d’analyser la capacité des ouvrages de maçonnerie àrésister aux tremblements de terre et d’entrevoir, en cas de besoin,de possibles stratégies pour améliorer leur réponse sismique. Dansle cas de bâtiments de valeur patrimoniale, les principes de laconservation architecturale rendent préférables les formesd’intervention respectueuses de la morphologie et de la naturerésistante de la structure. C’est la raison pour laquelle, la possiblerestauration ou réhabilitation de ces bâtiments doit prendre encompte des formes d’intervention qui concilient, dans la mesuredu possible, l’amélioration du comportement avec le maintien descaractéristiques matérielles et structurelles originales du bâtiment.

Le comportement sismique des bâtiments de murs de maçonnerie

Le bâtiment de structure de murs porteurs constitue un systèmecomplexe dont la stabilité vis-à-vis des actions verticales ethorizontales est le résultat du travail d’ensemble de divers

éléments constructifs (murs porteurs, murs de liaison etplanchers). Ces éléments collaborent de manière non redondanteà la stabilité globale, de telle manière que la défaillanceindividuelle de l'un d’entre eux peut facilement affecter les autreséléments en produisant un effondrement en cascade de tout oupartie de la structure. Les murs porteurs présententhabituellement une sveltesse importante ou même (comme dansla zone de l’« Eixample » de Barcelone) extrêmement importante.Dans la plupart des cas, les murs ne sont pas stables par eux-mêmes et ils ont besoin de l’action stabilisante des murs de liaisonainsi que des planchers pour se maintenir debout. La défaillanceindividuelle d’un ou de plusieurs murs porteurs, ou la chute desplanchers, peut avoir pour résultat immédiat la déstabilisation etla chute des autres murs porteurs ou de liaison. La défaillance d’unou de plusieurs murs porteurs entraîne comme conséquence lachute des planchers, ce qui à son tour peut être la cause de ladéstabilisation d’autres murs préalablement appuyés sur lesplanchers. Le système structurel résultant est délicat etcertainement vulnérable aux actions extraordinaires telles que lesincendies, les tremblements de terre, les ouragans ou lesexplosions. En cas d’entretien déficient ou même d’abandon, ladétérioration des planchers (par pourriture dans le cas des poutresde bois ou par corrosion dans celui des poutres métalliques) peut

1. Possibles mécanismes de défaillance dans un bâtiment de maçonnerie caractériséspar (a) l’effondrement de la façade, (b) l’effondrement d’un angle, (c) la fissurationdiagonale des rebords, (d) la fissuration de contreforts verticaux, (e) la séparation dela base des murs (mécanisme de balancement ou rocking motion) et (f) la séparationou la fissuration dans l’union entre les bâtiments.

Le comportement sismique des constructions traditionnelles de murs de maçonnerie

Pere Roca FabregatDocteur ingénieur des Ponts et ChausséesProfesseur au Département d’Ingénierie de la Construction à l’Écoletechnique supérieure des Ingénieurs des Ponts et Chaussées de Barcelone (Université polytechnique de Catalogne), Espagne

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aussi occasionner leur défaillance et, en conséquence, la perte deleur action stabilisante sur les murs porteurs et de liaison.Face aux actions horizontales des séismes et des ouragans, lesmurs peuvent répondre en développant des efforts de cisaillementdans leur plan dans tous les cas où ils sont stabilisés de manièreadéquate grâce aux murs de liaison et aux planchers. Cetterésistance demeure sensible y compris après la fissuration et leglissement le long des joints de mortier grâce au frottementrésiduel qui se développe dans ceux-ci.L’union entre le plancher et les murs se produit par appui direct, etil n’existe normalement aucun type d’ancrage ni de renfort quiempêche la séparation ou le glissement entre les deux ; le seulmécanisme qui empêche le glissement, dans la pratique, est lefrottement qui peut se développer à la surface de contact.Même lorsque le système de murs sollicités par le cisaillement dansle plan est suffisant pour résister au tremblement de terre, uneunion déficiente entre murs et plancher peut être à l’origine d’uneffondrement précoce faisant suite à la déstabilisation d’un murperpendiculaire au plan d’action des forces horizontales. La chutede ce mur entraînera l’effondrement des planchers et, enconséquence, la déstabilisation des murs parallèles aux mursporteurs, générant ainsi un effondrement complet.Une union bien stabilisée entre murs perpendiculaires estessentielle pour garantir le maintien de la stabilité des murssollicités par le cisaillement dans le plan pendant le séisme.Cependant, cette union est fragile et elle peut se romprefacilement du fait d’effets thermiques, d’assises différentielles, ou

pendant le séisme lui-même. Dans certains cas (comme dans denombreux immeubles de l’« Eixample » de Barcelone), les mursperpendiculaires ont été construits sans liaison effective,maintenant entre eux un contact simple « en butoir », qui n’estpas pleinement efficace face à un tremblement de terre.Ces considérations entraînent à imaginer ce type de bâtimentscomme des systèmes spécialement délicats et vulnérables àl’action sismique. De ce point de vue, il faut remarquer que lesnormes sismiques de nombreux pays (et notamment laréglementation espagnole NCSE-02) introduisent des conditions trèsstrictes par rapport à l’usage de cette typologie structurelle dans lesendroits sensiblement sismiques (par exemple, en limitant le nombrede hauteurs à 4 pour l’accélération sismique de base de 0,08 g et àseulement 2 pour l’accélération sismique égale ou supérieure à0,12 g) en plus d’exiger la disposition de détails constructifscontraignants ou étrangers à la construction traditionnelle.

Le comportement sismique des constructions traditionnelles

Les raisonnements précédents partent d’une compréhensionrationnelle de la relation qui existe entre les composantes de lastructure et leur réponse conjointe. Toutefois, ces argumentsignorent la réalité quant à l’exercice réel et aux possibilités derésistance effective démontrées par les constructionstraditionnelles. L’existence d’un héritage massif dans ce typestructurel, y compris dans des pays fortement sismiques tels quel’Italie ou la Grèce, entraîne logiquement à penser que, même

2. Possibles mécanismes de rupture dans des bâtiments faisant partie d’un ensemble(D’Ayala et Speranza, 2002).

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avec les faiblesses identifiées dans le chapitre précédent, cesbâtiments peuvent présenter des prestations relativementsatisfaisantes face au séisme. Entre autres aspects, il faut tenircompte de l’adaptation qui s’est produite, sans le moindre doute,en termes historiques, entre la sollicitation sismique et la capacitéà affronter une telle sollicitation de la part des types structurelslocaux. Divers paramètres tels que, en particulier, l’épaisseur desmurs, la hauteur des bâtiments, l’organisation structurelle del’ensemble ou les divers détails constructifs, ont évolué pourdonner lieu à une réponse adaptée à la sismicité de chaquelocalisation géographique.L’étude systématique détaillée de la réponse des structurestraditionnelles de maçonnerie en Italie, tout spécialement après letremblement de terre d’Umbria-Marche en 1997, a permis d’avoirune vision un peu plus précise quant au comportement véritablede ces structures. Cette expérience a permis de démontrer qu’ilexiste, effectivement, une certaine adaptation entre la technologieconstructive et la sollicitation sismique locale, dont la conséquenceest une capacité réelle des constructions traditionnelles à affronterles séismes d’intensité moyenne ou moyenne-forte sans subir dedestruction. Selon ce qui a été observé en Italie, après diverstremblements de terre, les bâtiments de facture traditionnelle quiont subi des dommages importants ou même une destructionavaient déjà, préalablement au séisme, des déficiences telles quedes défauts de construction, ou bien qu’ils se trouvaient dans unétat avancé de détérioration du fait de leur abandon, ou bienencore qu’ils avaient subi des transformations inadéquates. Lesstructures qui ont subi le tremblement de terre sans destruction etavec des dommages très limités présentaient en revanche unebonne facture et avaient conservé leurs traits constructifstraditionnels. Il semble que l’on puisse conclure qu’une structuretraditionnelle bien construite et bien entretenue, en cohérenceavec les techniques et les procédés traditionnels, peut résister àdes tremblements de terre de moyenne intensité.Toutefois, dans certains cas, la construction traditionnelle localepeut présenter des déficiences ou des insuffisances sismiques. Celapeut se produire, en particulier, dans des zones dans lesquelles nes’est pas consolidée une certaine mémoire relative aux événementsde ce type, ceux-ci ne s’étant produits que de manière très espacéedans l’histoire. Même dans ces cas-là, une certaine améliorationsismique est possible en introduisant des mesures correctrices qui,même si elles sont étrangères à la pratique traditionnelle locale,peuvent être réalisées au travers de procédures de bonne pratiquede la construction de maçonnerie traditionnelle ou historique.Dans les endroits seulement modérément sismiques, ou danslesquels les derniers séismes qui se sont produits ont eu lieu à desépoques très anciennes (ne parvenant pas à produire une mémoireainsi qu’un impact dans les techniques constructives), lesbâtiments peuvent présenter des limitations très importantes de larésistance comme résultat d’une technique constructive

3. (A) Mode fondamental de défaillance et (B) mode souhaitable dans desbâtiments ayant une façade fixée à l’aide de tirants (Carocci, 2001).

4. Types de dommages sismiques estimés pour un immeuble du centre historique dePalerme (Carocci, 2001).

5. Analyse à l’aide d’un modèle d’analyse informatique de la réponse sismique d’unbâtiment dans un ensemble de bâtiments du noyau historique de Baixa Pombalinade Lisbonne (Ramos et Lourenço, 2004). Estimation des déplacements maximums.

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traditionnelle ou historique qui ne prête pas une attention suffisante,malgré de possibles vertus, aux besoins de résistance latérale. Onpeut dire que c’est précisément le cas de nombreux bâtiments situésdans la péninsule Ibérique. Particulièrement, diverses études réaliséesen rapport avec les bâtiments de murs porteurs de l’« Eixample » deBarcelone ont montré qu’ils constituent des constructions hautementvulnérables même face à des tremblements de terre modérés enprincipe possibles sur le territoire catalan (Barbat et Cardona, 2002 ;Bonett et al., 2003 ; Penna et al., 2004).

Réponse de la résistance et modes de défaillance

Conformément à ce qu’écrit Carocci (2001), il est possible dereconnaître dans les structures traditionnelles un modèle impliciterésultant de l’expérience constructive d’une certaine période et dela culture locale. Le logement traditionnel se compose d’unestructure de maçonnerie organisée en cellules superposéesformant des unités de divers étages. La structure résulte de lajuxtaposition d’éléments constructifs simples ; le bâtiment(maison) peut être compris comme un assemblage de structuresgrossièrement superposées, de telle manière que les mursconstituent la cellule de maçonnerie et les éléments horizontauxdonnent les planchers et la couverture.Cette manière de juxtaposer est à l’origine d’un manque deconnexion robuste entre les parties ; la conséquence de ce défautest une fragilité de l’ensemble face à l’action sismique. Lescomposantes de forces horizontales dues à l’action sismiquepoussent les murs qui enveloppent le bâtiment vers l’extérieur, demanière orthogonale à son plan, et à partir d’une certaine valeur,pour provoquer sa rupture (Giuffrè, 1995).Ces constructions traditionnelles se caractérisent en outre par leurcapacité à s’adapter aux modifications. Cette capacité résulte ducaractère modulaire des matériaux les composant : tous cesmatériaux peuvent en effet être démantelés et substitués parparties, y compris les murs. Dans l’entretien de ces bâtiments, laréparation ou la substitution de pierres ou de blocs détériorés estune pratique normale.Ce modèle fondamental peut vivre des variations sensibles enfonction des matériaux localement disponibles, des aspectsculturels locaux, ou encore d’autres facteurs. Dans la constructionurbaine, ce modèle voit des transformations sensibles afin des’adapter à la complexité de la trame urbaine ou auxcaractéristiques morphologiques du terrain. Même de cettemanière, les systèmes constructifs tendent à reproduire desschémas et des comportements récurrents.Le mode de défaillance le plus fréquemment observé dans lesanalyses de bâtiments affectés par le séisme en Italie est constituépar l’effondrement des murs. C’est le mode qui détermine, enpremière instance, la vulnérabilité des constructions de ce type

(figure 3a). Ce mode de défaillance a été prévenu de tout tempspar l’amélioration des liaisons de la façade avec le reste de lastructure grâce à des tirants. Dans ce cas, la stabilité de la façadeen cas de séisme implique les murs qui lui sont perpendiculaires,lesquels résistent à l’action sismique en travaillant de manièreefficace dans son plan ; lorsque la résistance de ces murs estdépassée, des fissures diagonales apparaissent au traversdesquelles le système formé par la façade et le triangle supérieurde ces murs se sépare du reste de la structure (figure 3b). À ladifférence du premier mode de défaillance, qui entraîne toujoursl’effondrement, ce deuxième mode ne détermine pasnécessairement une défaillance complète, même s’il esthabituellement accompagné de dommages ostensibles.En fonction des caractéristiques matérielles et organisationnellespropres de chaque bâtiment, ainsi que des caractéristiques del’action sismique (direction d’incidence), d’autres formes de rupturesont possibles. À titre d’exemple, la figure 1 présente diversmécanismes réellement observés dans des bâtiments affectés par destremblements de terre en Italie (Binda et al., 1999 ; Binda et al., 2003).Dans les centres historiques, les bâtiments de maçonnerie tendentà former des systèmes structurels complexes formés par diversbâtiments structurellement connectés. Dans ces conditions,l’analyse d’un bâtiment isolé peut ne pas résulter suffisammentreprésentative, et il sera nécessaire de considérer, au moins, lesystème formé par le bâtiment en cours d’étude et ses bâtimentsmitoyens. Ce système permet d’entrevoir des modes de défaillancetels que ceux qui sont illustrés par la figure 2 (Carocci, 2001).

Techniques d’analyse

Il est nécessaire de tenir compte du fait que certaines techniquesconventionnellement utilisées pour le calcul de structures de mursporteurs peuvent ne pas être adéquates dans des bâtiments decaractère historique ou traditionnel. En particulier, la méthode deplans de rigidité, bien connue et jusqu’à présent très employéepour l’analyse de structures de maçonnerie (ou de béton armé)part de l’hypothèse que les planchers constituent des plans trèsrigides et parfaitement enlacés aux plans verticaux (murs porteursou écrans de béton). Dans les constructions de maçonnerie, cettehypothèse n’est réaliste que lorsque le plancher est formé par unedalle de béton ou bien lorsque, étant à base de poutrelles de boisou d’acier, il dispose d’une couche supérieure de béton d’uneépaisseur suffisante, adéquatement armée et liée aux élémentsverticaux. En général, cela n’est pas applicable aux bâtimentstraditionnels ou historiques de maçonnerie, dont les plancherssont de caractère peu monolithique et déformable dans le plan, enplus d'être appuyés de manière simple sur les murs.Une attitude commune, dans le passé, a consisté à modifier lastructure du bâtiment (en introduisant des chaînages et des

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couches supérieures de béton armé) dans le but d'adapter laconstruction aux hypothèses du modèle de calcul. Cela supposaitune forte transformation du bâtiment ainsi que l’inclusiond’éléments d’une rigidité très supérieure à celle des murs.Parallèlement, il faut savoir que cela pouvait être à l’origined’effets contreproductifs face au séisme. De nouveau,l’observation des effets des séismes qui se sont produits en Italie ily a peu de temps a permis de constater que ce type d’interventionpeut aussi augmenter la vulnérabilité sismique du bâtiment du faitdu risque que les planchers ne poussent les murs et ne précipitentleur déstabilisation.La visualisation des modes de défaillance réellement observéssuggère une approche distincte et plus cohérente avec la natureconstructive et résistante de ces bâtiments. Le bâtiment peut êtreanalysé sur la base de la considération et de la formulationmathématique des possibles mécanismes de dommages grâce à latechnique de l’analyse limite et à l’application des théorèmesplastiques. Étant donné l’expérience disponible (au moins enItalie), ces méthodes peuvent être calibrées en effectuant uneanalyse qualitative basée sur l’observation du comportement d’unnombre important de bâtiments de caractéristiques similaires(Binda et al., 1999 ; Binda et al., 2003). Cette méthode a d’ailleursété récemment incorporée dans la réglementation sismiqueitalienne O.C.P.M. (2005).L’étude d’ensembles formés par des bâtiments ou de tramesurbaines exige une approche plus générale du fait de la plusgrande complexité du problème. L’observation des altérations oudes irrégularités (comme les vides ou les changements de hauteur)est essentielle dans ce cas. On agit en général, dans ce contexte,en étudiant les possibles types de dommages dus auxtremblements de terre d’une magnitude donnée et en considérantles caractéristiques des bâtiments type ainsi que les possiblesvariations ou altérations de la trame. L’analyse peut être réalisée àpartir d’une approche qualitative (figure 4) ou bien à partir d’uncalcul détaillé basé, par exemple, sur les techniques de calculinformatique modernes (figure 5).

Amélioration du comportement sismique

Dans la pratique, l’adaptation complète des structurestraditionnelles aux standards de sécurité structurelle face auséisme que la réglementation exige pour les nouvellesconstructions en béton et en acier peut conduire à unetransformation et une défiguration très substantielle de lastructure originale. Dans le cas de constructions traditionnelles ouhistoriques, cette transformation peut résulter incompatible avecla conservation de la valeur historico-culturelle du bâtiment, et ellepeut être à l’origine d’une importante perte en termes d’héritageculturel. Cela se produit, en particulier, lorsque la structure

originale est renforcée grâce aux éléments de béton, d’acier oud’autres matériaux étrangers aux techniques constructivestraditionnelles ou historiques. Or, en de nombreuses occasions,ces renforts ont été implantés de manière invasive et nonréversible, et ils ont causé des dommages ainsi que des pertesirréparables dans la construction originale.D’autre part, et comme nous l’avons mentionné précédemment,l’étude du comportement sismique de bâtiments préalablementrenforcés, en Italie et après les tremblements de terre d’Umbría-Marche, a montré que les renforts de caractère étranger à lastructure originale ont souvent un effet contreproductif dû aucaractère hétérogène du complexe résultant. En particulier, on aobservé que la substitution de planchers traditionnels par desdalles de béton sur des chaînages de béton dans des murs demaçonnerie peut donner lieu à une forme de renforcement peuefficace. Par ailleurs, cela peut même précipiter l’effondrement dubâtiment pendant le tremblement de terre.Pour toutes ces raisons, la manière de comprendre l’améliorationsismique des bâtiments traditionnels a subi un importantchangement de modèle au cours de ces dernières décennies. Onconsidère actuellement que la restauration structurelle découle dela connaissance des techniques constructives locales et de lareconnaissance de leurs possibles déficiences. La connaissance desprocédés de construction locaux est fondamentale et doit guiderle choix des interventions. Étant donné que, dans de nombreusesrégions sismiques, les bâtiments de caractère traditionnelprésentent une certaine adaptation à la sollicitation sismiquelocale, il est en général préférable de baser le renforcementprécisément sur l’analyse des traits constructifs propres à cesconstructions et d’éviter ainsi des solutions de renforcement quileur seraient contraires. L’amélioration sismique est possible enréparant la détérioration et en récupérant la résistance originale,sans implanter d’éléments de renfort étrangers à la technologieconstructive traditionnelle.Dans certains cas, une certaine amélioration de la résistance auxséismes peut être nécessaire du fait du degré de détérioration atteintpar le bâtiment par manque d’entretien ou du fait d’une factureconstructive ou matérielle originellement déficiente. La nécessité durenfort peut aussi être due à ce que la tradition constructive localeignore les nécessités de résistance sismique (comme on peutl’observer dans différentes zones de la péninsule Ibérique).Même dans ces cas-là, des solutions de caractère compatible avec laconstruction traditionnelle ou historique et qui tendent à préserverune certaine homogénéité matérielle et organisationnelle sontpréférables. Il est souhaitable que les interventions, avant d’altérerprofondément la nature constructive et résistante des constructions,tendent plutôt à contrôler ou à relativiser les possibles faiblessesdu bâtiment. L’intervention peut être conçue, en cohérence avecles techniques constructives traditionnelles ou historiques, pourcontribuer à limiter les déformations subies au cours d’un tremblement

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de terre ou éviter la séparation excessive entre les parties.L’ancrage des façades ou bien l’union des murs aux planchers ouà d’autres murs à l’aide de tirants constitue, en particulier, unesolution de caractère historico-traditionnel très efficace pouraméliorer l’union entre les éléments sans produired’hétérogénéités ni de modifications substantielles de la rigiditédes éléments (figure 6). En général, les interventions doivent êtreorientée vers l’amélioration de la qualité des murs de maçonnerieet de leurs connexions (entre eux et avec les planchers), laréduction des poussées, la stabilisation des éléments vulnérables et laréduction des irrégularités structurelles. La technique qui consiste àrendre plus rigides les planchers afin qu’ils travaillent comme desdiaphragmes rigides doit être considérée avec beaucoup d’attention,et elle exige en tout cas une compréhension claire des effets qu’ellepeut produire dans le bâtiment. Conjointement à tout cela, il estessentiel de conserver une exécution très prudente et soignée.

Conclusions

L’étude des effets des séismes dans les constructionstraditionnelles de murs porteurs, développée tout particulièrementà l’occasion du tremblement de terre d’Umbria-Marche, en Italie,a démontré que ces bâtiments présentent une certaine adaptationentre la technologie constructive et la sollicitation sismique locale,dont la conséquence est une certaine capacité pour affronter desséismes d’une intensité moyenne ou moyenne-forte sans risquerde destruction.Toutefois, cette capacité peut être compromise lorsque lebâtiment présente des défauts constructifs ou matériels d’origineou bien un état avancé de détérioration dû à son manqued’entretien. D’autre part, il faut reconnaître que, dans certainesrégions géographiques (en particulier, dans la péninsule Ibérique),

la culture constructive locale ne possède pas les nécessités derésistance face aux séismes du fait d’un manque de mémoirehistorique en rapport avec la possible occurrence de tellescatastrophes. Dans ces cas-là, une amélioration de la résistancesismique peut être nécessaire. Y compris lorsque le bâtimentprésente des déficiences, il est fondamental de baser l’améliorationsur une connaissance des procédés constructifs traditionnels ouhistoriques, et il est préférable que les interventions, avant d’altérerprofondément la nature constructive et résistante du bâtiment,visent plutôt à contrôler ou à limiter leurs possibles faiblesses enmaintenant une homogénéité et une uniformité constructives.

6. Utilisation de tirants dans un bâtiment à Bergame, Italie.

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