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Islam et intégrisme islamiste, paix et violence par Charles VAN DER VAEREN 3 Cahier

par Charles VAN DER VAEREN Cahier - … · délivrés qui sont venus en abroger d'autres qui avaient précédé. (…) Le Coran explique lui-même : " Si nous abrogeons un ver-set

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Islam et intégrisme islamiste,paix et violencepar Charles VAN DER VAEREN 3Cahier

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Islam et intégrisme islamiste, paix et violence

Université de Paix - février 2005c

AVERTISSEMENT :Les présentes notes de lecture ontété puisées à des sources récentessérieuses, musulmanes et nonmusulmanes. Elles ne prétendentnullement être exhaustives maisont été récoltées sans parti-pris.Elles sont complétées par quelquesnotes personnelles de l'auteur, sansnom. Elles sont un instrument detravail pour commencer à com-prendre les relations entre l'islam,l'intégrisme radical islamiste, lapaix et la violence, ainsi que pouresquis-ser les conditions d'un dia-logue socialement constructif entremusulmans et non-musulmans.

Sommaire :

1. Les fondements et les variations de l'islamSources de l'islam : le coranAmbiguïté des sourcesEvolution de la révélationInterprétation du coranIslam " oral " et islam " textuel "Origine de l'islamConstitution d'une " vraie religion " définitiveDevoir de réflexion sur les sources : ijtihadDéficit d'auto-critiqueIslam et libre pensée

2. Le contenu essentiel de l'islamIslam et soumissionValeurs essentielles de l'islamIslam et absence de doute existentielIslam et recherche scientifiqueResponsabilité du croyantSens de la communautéLa chari'aOrigine et valeur de la chari'aApplication de la chari'aReligion et politiqueIslam et arabiteChiismeTraditionalisme salafisteHanbalisme et wahhabismeFondamentalismeVocation universelle de l'islam

3. Islam et tolérance / intolérance religieuse Tolérance et agressivité dans le coranMohamet et mansuétudes / violenceSituations et évolutions historiquesIslam et apostasieIslam et mysticismeCertains martyrs au sein de l'islam

Charles van der Vaeren

Président du Conseil Académique

Travail réalisé dans le cadre de laréflexion consacrée à l’Islam

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4. Islam et droits de l'hommeReligion et droits de l'hommeIntégrisme et droits de l'hommeLa déclaration universelle et les pays islamiquesDroits et obligationsLes droits de l'homme et la shari'aLiberté et justiceLa peine de mortIslam et égalité

5. Islam et pacifisme/violence Fondements de l'agressivité humaineViolence et religion en généralTolérance et respect en généralSources coraniquesL'exemple de MahometViolence à l'égard des incroyantsHistoire de la violence en islamConquêtes arabes en OccidentQuelques faits récents de violenceDjihad intérieur et extérieurLe djihad intérieur et citoyenDjihad interne à l'islamDjihad de conquêteDjihad : obligation collective ou individuelle ?Le martyre en islamLa récompense du djihadConditions de la violence en islam

6. Attitude socio-culturelle des musulmans à l'égard des "occidentaux"

Histoire et situation du monde musulmanVision binaire anti-occidentaleViolence et rejet de la modernitéEducation islamiqueLe "grand satan"Perte de statut et de repèresAcculturation des "musulmans diasporiques"Le dilemme de la sexualitéIslam et complot anti-islamiqueIntégration possibleShari'a et loyauté civiqueIslam et terrorisme politico-religieux

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7. Histoire des frustrations arabes face à l'occident Contacts historiques entre l'islam et l'occidentAttitude permissive des gouvernements occidentauxFacteurs négatifs internes au monde arabe

8. Islam et intégrisme islamiste Intégrisme en généralNotion d'"islamisme""Islamisme" / intégrisme radical islamiqueLe religieux et le politique selon les islamistesL'islamisme et le retour à l'origineLa prédication salafisteAspects sociologiques

9. Le terrorisme d'inspiration islamiste Buts et méthodesCausesTerrorisme islamiste et terrorisme nationalisteIslamisme et terrorisme anti-impérialisteTerrorisme et médiasLe cas d'Al quaïdaJustifications religieuses des attentats-suicidesSentiment de non-culpabilité des terroristesSens des attentats du 11 septembre 2001Sens des décapitations d'otagesQuelques déclarations et actions agressives de responsables et militants islamistes

10. Le dialogue islam-occident Dialogue interreligieux et interculturel en généralMéthode du dialogueLa question des valeursLa question de la véritéSources coraniques du nécessaire dialogueSituation des interlocuteursDiscrimination à l'égard des musulmans en occidentResponsabilité des musulmans dans les sociétés occidentalesIntégration des musulmans dans les sociétés occidentalesCulture occidentaleApports positifs des musulmansPoints de convergence

Références citées - Autres références bibliographiques récentes

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Notamment en tant qu'ils con-cernent la relation entre l'islamet le terrorisme

SOURCES DE L'ISLAM : LE CORAN

Ysé TARDAN-MASQUELIER,"Mises au point", in : Le Mondedes Religions, n°1 Les rénova-teurs de l'Islam, sept.-oct.2003, pp. 28-29

Selon les musulmans,"Mahomet réceptionne leCoran qui "descend" sur lui."Cependant, "la tradition musul-mane la plus stricte sait que leCoran a été l'objet d'un travailrédactionnel jusqu'au temps dutroisième calife." … "Il y a unconstant va-et-vient entre l'écritet l'oral dans toutes les religionsdu monde, même si certainesont fait du Livre le symbole deleur identité, le condensé deleur mémoire, le lieu de leurvérité."

M. KAZIMIRSKI, Le Koran, t. 1,nouvelle édition (Paris,Bibliothèque-Charpentier, 1925)

" Le Koran est un assemblage(…) de préceptes moraux,religieux, civils et politiques,mêlés d'exhortations, depromesses et de menaces rela-tives à la vie future, et de récitsempruntés, avec plus ou moinsde fidélité, à l'antiquitébiblique, aux traditions arabes

et même à l'histoire des premiers siècles du christianisme. On ytrouve aussi des allusions à des événements contemporains, auxefforts que la nouvelle religion faisait pour conquérir l'ascen-dant sur le culte idolâtre et aux luttes qu'elle avait à soutenir ;mais ces allusions sont toujours conçues en des termes tellementgénéraux et vagues, que leur sens et leur portée nous échap-peraient souvent si nous n'avions pas pour guides les commen-tateurs du Koran et les récits historiques de l'établissement del'islam. " (p. I)

Rachid BENZINE, Les nouveaux penseurs de l'Islam, (Paris, AlbinMichel, 2004)

"Le passé des musulmans ne doit pas être considéré comme unehistoire sacrée, mais comme une partie de l'histoire de l'huma-nité. Une histoire fondée sur des facteurs sociaux, économiqueset politiques. [Les nouveaux penseurs] appellent aussi à sereposer sur la distinction si souvent faite entre l'islam et lesmusulmans, distinction qui est utilisée pour présenter l'islamcomme une forme pure et abstraite, parfaite, située en toutesécurité au-dessus des terrains accidentés et des pirouettes de lagéographie et de l'histoire. (…) Ce n'est pas l'islam pris commeune entité supérieure abstraite qui enseigne (…), mais ce sonttoujours des musulmans qui parlent. De même on ne peut pasdire de manière objective que le Coran parle car ce sont lesgens qui le font parler. (…) D'où l'importance que revêt (…) laremise en valeur de l'herméneutique, cette discipline de com-préhension des textes qui nous rappelle que tout lecteur estmarqué par sa subjectivité. Une herméneutique qui impliqueune approche historique des textes religieux." (pp. 22-23)

AMBIGUÏTÉ DES SOURCES

Rainer BRUNNER, "Pacifique ou non pacifique ? Pour une con-frontation critique avec l'islam", in : Goethe Merkur (N° 633,janvier 2002), pp. 62-65

Sur la base des mêmes sources islamiques (Coran et Sunna), cer-tains présentent l'islam comme essentiellement pacifique ;d'autres, comme intrinsèquement violent. " Aucune hiérarchiedes érudits ne s'est jamais formée dans l'islam, qui aurait

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1. Les fondements et les variations de l’islam

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formulé une opinion doctrinaleabsolument obligatoire, ou dumoins obligatoire pour desgroupes confessionnels parti-culiers. La question se posedonc de savoir qui, en cas depropos contradictoires, estcensé déterminer ce qu'est le "véritable " islam. Cela a-t-ilseulement un sens de reprocheraux fondamentalistes leur lec-ture sélective du Coran, qui seconcentre sur les versets " inam-icaux " - et de faire la mêmechose qu'eux, mais en se can-tonnant aux passages " amicaux" ? "

Ibn WARRAQ, Pourquoi je nesuis pas musulman, (Lausanne,L'âge d'homme, 1999)

" On peut sans hésiter affirmerqu'à La Mecque Muhammadétait tout à fait sincère lorsqu'ilcroyait avoir conversé avecDieu. Mais il ne peut aucune-ment être nié qu'à Médine soncomportement et la nature deses révélations ont changé. (…)Il a sciemment fabriqué desrévélations, souvent pour saconvenance personnelle, pourrésoudre ses problèmes domes-tiques. " (p. 409)

Mark A. GABRIEL, Islam andTerrorism (Florida, CharismaHouse, 2002)

"Islamic scholars had to deter-mine (…) which verses to

follow in the case of a contradiction [ between various versesof the Coran]. This was accomplished by the principle of nashk.Nashk is based on the fact that the quran was revealed toMuhammad at different times over a period of about 22 years.(…) To solve a contradiction they decided that new revelationswould override (nasikh) previous revelations. [ Exemple: lesnombreux versets qui parlent d'amour, de paix, de pardon, sontannulés par le verset de l'épée (IX, 5), selon lequel tout musul-man doit combattre et exterminer les incroyants qui refusent dese convertir] " (p. 30)

Rachid BENZINE, " Le Coran entre Transcendance et Histoire ",in : Les Nouveaux Penseurs de l'Islam, cahier hors-série n° 54 duNouvel Observateur, pp. 68-71

" En bien des instants de la révélation, on note un véritablesouci de traiter les multiples questions à l'ordre du jour dans lasociété de l'époque du Prophète. A tel point que, avec la pro-gression de la communauté croyante, des versets ont étédélivrés qui sont venus en abroger d'autres qui avaient précédé.(…) Le Coran explique lui-même : " Si nous abrogeons un ver-set quelconque ou que Nous le fassions oublier, Nous en appor-tons un meilleur, ou un semblable… " (II, 106). Cela a donnénaissance à la science islamique de l'abrogeant et de l'abrogé(an-nasikh wal mansukh) qui s'efforce de déterminer le momentet le sens de telle ou telle abrogation et les conséquences -surtout juridiques - qui en résultent quant à l'application desnormes coraniques. "

Abdelwahab MEDDEB, " L'islam a besoin de mauvais musul-mans ", in Le Monde de l'Education, janvier 2004, pp. 80-85.

" Une des techniques des intégristes, qui historicisent la révéla-tion et généralisent une disposition théologique et juridique,réside notamment dans une lecture simplificatrice des " versetsqui abrogent ". (…) Ils le font notamment dans le domaine dela guerre sainte. " Car les versets de l'époque médinoise qui laconcernent sont plus tardifs que les versets mecquois qui, eux,appellent à la discussion, à la controverse civile, à la reconnais-sance de l'autre, au refus d'exercer la contrainte en matière dereligion… "

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" Le recours aux versets quiabrogent (…) n'a pas pour seulcritère la chronologie. [Sinon]la moitié du Coran seraitabrogée. (…) Nous assistons auretour de débats anciens afinde lutter contre le littéralisme(…) parce que même le dis-cours le plus clair laisse infiniel'interprétation et exige l'é-clairage par le contexte. Unverset célèbre dit même que leCoran est composé de versetsclairs et d'autres ambigus(Coran, III, 7), dont l'interpré-tation est recommandée à " ceux qui sont enracinés dansla science ".

Bernard LEWIS, The Crisis ofIslam (London, Weidenfeld &Nicolson, 2003)

The extremist radical (and vio-lent) Islamic groups "sanctifytheir action through pious re-ferences to Islamic texts, notablythe Qur'an and the traditionsof the Prophet (…). They are,however, highly selective intheir choice and interpretationof sacred texts. In consideringthe sayings of the prophet, forexample, they discard the time-honored methods developedby the jurists and theologiansfor testing the accuracy andauthenticity of orally transmit-ted traditions, and insteadaccept or reject even sacredtexts according to whether they support or contradict their own

dogmatic and militant positions. Some even go so far as to dis-miss some Qur'anic verses as "revoked" or "abrogated". Theargument used to justify this is that verses revealed during theearly years of the prophet's mission may be superseded by later,presumably more mature revelations." (p. 108)

Farid ESACK, op. cit., p. 180.

"Parmi ce qu'il y a de plus vertueux dans la connaissance duCoran, on trouve ce qui concerne sa révélation et la chronolo-gie de ce qui fut révélé à La Mecque et ce qui fut révélé àMédine, les révélations qui ont eu lieu à La Mecque mais con-cernant Médine, celles révélées à Médine mais concernant LaMecque, les révélations mecquoises concernant les habitants deMédine et les révélations médinoises concernant les habitantsde La Mecque, les révélations qui ressemblent à des révélationsmecquoises mais qui furent en fait révélées à Médine, et cellesqui ressemblent à des révélations médinoises mais furent en faitrévélées à La Mecque, les révélations qui eurent lieu à Al-Jahfa,à Jérusalem, à Ta'if et à Hudaybiyya, les révélations qui eurentlieu de nuit et celles qui eurent lieu de jour, celles qui se pro-duisirent quand Muhammad était avec un groupe et celles quise produisirent quand il était seul, les versets médinois au seind'une sourate mecquoise et les versets mecquois au sein d'unesourate médinoise. (…) Quiconque n'est pas versé dans cesvingt-cinq aspects et est incapable de faire la distinction entreeux est inapte à parler du Livre de Dieu. " (Traduction du livrede Ghazi INAYAT, Huda al-Furqan fi Ulum al-Qur'an, Beyrouth,'Alam al-Kutub, 1996, I, 171)

EVOLUTION DE LA REVELATION

Mark A. GABRIEL, op.cit. 1

Comparaison schématique de la vie de Mahommed à LaMecque et à Médine, avec l'évolution correspondante du con-tenu des versets du Coran :" - Mecca : He invited people to be part of Islam by

preaching ;Medina: He persuaded people to convert by the sword.

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1Les textes cités sont repris dans la liste des sources, pp. 86-90

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- Mecca: He acted like a priest, living a life of prayer, fasting and worship;Medina: He behaved like a military com-mander, personallyleading 27 attacks.

- Mecca: He had onlyone wife, Khadija, for those 12 years;Medina: He married 12more women in 10 years.

- Mecca: He fought against idol worship;Medina: He fought against People of the Book (Jews and Christians).Muhammad's move from Mecca to Medina changed Islam into a political movement." (pp. 69-70)

Rachid BENZINE, " Une moder-nité islamique ", in : Les nou-veaux penseurs de l'islam,numéro hors- série n° 54 duNouvel Observateur (avril-mai2004)

" Si le Coran est toujours l'ex-pression de la révélationdivine, il est également un do-cument historique qui engagedes rapports de force sociopolitiques, tout comme iltémoigne des structures cul-turelles propres à une époque.Les nouveaux penseurs insistentainsi sur la nécessité de consi-dérer chaque interprétationcomme le fruit de conjonctures

particulières et ils démontrent que l'islam comme entité pure,déracinée, a-historique, " hors-sol" n'existe pas. " (p. 7)

Alfred-Louis de PREMARE, " L'Historien et le Coran ", in : LesNouveaux Penseurs de l'Islam, cahier hors-série n° 54 duNouvel Observateur, p. 66

" Des manuscrits concurrents et divergents circulent encore endehors de l'Arabie dans les territoires de la conquête jusqu'à lafixation de la version unique du Coran à Bagdad dans la pre-mière partie du Xème siècle. (…) Ce texte unique fut déterminépar un corps de clercs, et le vizir du calife intervint par la forcecontre les derniers opposants à l'unification totale. "

INTERPRETATION DU CORAN

Tariq RAMADAN, " Entre les religions : franc dialogue, questionsensible ", in : Conférence sur le dialogue interculturel, 20-21mars 2002 (Commission européenne, 2003)

" En ce qui concerne le texte lui-même, nous ne pouvons fairel'économie de son étude, car il est le fondement même de toutela religion musulmane. Ce n'est qu'en ayant étudié et comprisces textes que nous pourrons en déterminer la latitude d'inter-prétation. Si d'aucuns tentent de renier l'existence de certainstextes ou de les ignorer, dans l'optique d' " édulcorer " la tradi-tion musulmane, de cacher certains aspects " gênants ", nous nepouvons aujourd'hui faire preuve d'hypocrisie. (…) Nousdevons avant tout nous référer au texte pour comprendre cequ'il signifie et l'adapter à notre réalité si besoin est, mais nousne pouvons partir de ce que nous voulons en terme d'idée oude vision et ne prendre du texte que ce qui nous intéresse enoccultant le reste. " (p. 113)" Parmi les textes de la révélation il en est qui ont été spéci-fiquement envoyés pour le prophète Muhammad et ses com-pagnons, qui ne s'appliquaient qu'au contexte dans lequel ilsont été révélés. C'est le cas, par exemple, des versets concernantla bataille de Badr [contre certaines tribus juives]… Le Coran estun pour toutes les époques et pour tous les peuples. Il nechange pas et ne tolère aucune modification. Cependant, la lec-ture qu'on en fait, elle, peut évoluer, s'adapter, se contextualiser.

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Depuis des siècles (…) dessavants et des spécialistes duCoran se sont appliqués à don-ner l'interprétation du texte quiépouse le mieux les réalités ducontexte. " (pp. 123-124)

Mohamed ARKOUN, " UnIslam des Lumières ", in : Lesnouveaux penseurs de l'islam,cahier hors-série n° 54 duNouvel Observateur (avril-mai2004)

En 813, Al-Mamun, l'un des filsde Harun al-Rashid, arrive aupouvoir à Bagdad. Il incarnera,pendant plus de 30 ans " unetolérance du pouvoir califal quia permis l'épanouissementd'une école de théologie inno-vante, surtout au sujet du statutcognitif du Coran : il s'agit dumutazilisme, qui a introduit lathéorie du Coran créé, opposéeà celle du Coran incréé.Accepter l'idée du Coran créépermet d'inscrire la révélationdans l'histoire des hommes, cequi change les conditions de l'exégèse et de l'élaboration dudroit. (…) Mais l'islam pluspopulaire, encadré par l'écolehanbalite, refuse cette granderéforme religieuse [dès l'avène-ment du nouveau calife, Al-Mutawakkil, en 1848. Il réagitcontre la place prise par la cul-ture philosophique qu'on com-mence à disqualifier sous lenom de " sciences étrangères ouintruses "]. La bataille doctrinale

se poursuit jusqu'en 1017, lorsque le calife Al-Qadir interditdéfinitivement l'école mutazilite. (…) Les juristes prennent lepas sur les théologiens et élimineront à terme l'humanismephilosophique. " (p. 9)

Rachid BENZINE, op.cit. 2

Selon le dogme de l'inimitabilité (ijaz) du Livre révélé, le Coran est " pure parole de Dieu ", une sorte de dictée divinedescendue dans le cœur du prophète Muhammad à travers -notamment - la médiation de l'ange Gabriel, et délivrée fidèle-ment à l'humanité par le prophète. (…) Pour la tradition, lesversets exprimés en arabe sont les mots originaux de Dieu, l'ar-ticulation syntaxique de Dieu lui-même.Dès les débuts de l'islam, de ce fait, (…) le discours religieuxs'est vite opposé à ce que le Coran soit regardé comme un textelittéraire. Dès lors, l'approche littéraire et l'approche historiqueont été reléguées dans le monde de l'impossible. (…)Cependant, au cours des différentes étapes du développementhistorique de leur religion, les musulmans ont compris demanières diverses la dimension éternelle de la parole coranique.Les premiers musulmans, ainsi, étaient bien conscients que larévélation reçue et transmise à son auditoire par le prophèteMuhammad se saisissait en permanence des événements de lavie du Prophète et de sa communauté. (…) Si le Coran n'est pas producteur de normes originales et va-lables pour tous les temps, quelle est, dès lors, son utilité ? (…)Selon Mohamed Talbi, " Il convient de faire une lecture vecto-rielle du texte coranique mettant en relief les objectifs suprêmesde la révélation. " Pour lui, le Coran indique de grandes direc-tions et, parce que les dispositions qu'il édicte sont à compren-dre en relation avec le temps [et le lieu !] où elles ont été énon-cées, elles peuvent faire l'objet d'adaptations, d'actualisations. "

Ibn WARRAQ, op.cit.

L'auteur cite un nombre important de versets, et même desourates tout entières, à commencer par la sourate d'introduc-tion, la Fatihah, qui " ne peuvent manifestement pas êtreattribués à Dieu et sont vraisemblablement dits par Muhammadou par l'ange Gabriel. (…) Il ne s'agit donc pas d'une révélation

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que Dieu donne à Muhammadmais d'une prière queMuhammad adresse à sonDieu, en lui demandant secourset assistance. Certains ont faitremarquer qu'il suffirait d'a-jouter l'injonction " dis " audébut de la sourate pour éli-miner cette contradiction. Defait, le verbe " dire " à l'impératifest répété 350 fois dans le Coranet il est évident que ce mot aété inséré par des compilateurstardifs pour supprimer les diffi-cultés du même ordre. "De même, le Coran contientcertaines malédictions adresséespar Mahomet à des ennemispersonnels, comme son oncleAbu Lahab (sourate CXI) ; ilcontient aussi des passages oùMahomet jure " par Dieu "(LXXV.1 et XC.1), ainsi qued'autres où ce sont manifeste-ment des anges qui parlent, etnon Dieu lui-même (XIX.64 etXXXVI.164-166) (pp. 141-144)

ISLAM " ORAL " ET ISLAM " TEXTUEL "

Ziad HAFEZ, " De nouveauxpenseurs ", in : Islam contreislam, Manière de Voir, n° 64(juillet-août 2002) pp. 89-93.

" ...Importante distinction entreislam " oral ", qui préconise lesvertus de tolérance, une libertéde pensée, ainsi que des valeurscommunes au judaïsme et auchristianisme, et un islam

"textuel", tel que promulgué par les jurisconsultes, oulémas, aya-tollahs et autres " professionnels religieux ", à savoir un islamsclérosé, intolérant et misogyne. " [Exemple : statut de la femme] "...La perception modernisantede l'islam commence (...), et est intimement liée, à la naissancedu mouvement de la libération de la femme arabo-musulmane."

[Importance des travaux de certains jurisconsultes musulmanscontemporains, sur la base d'une lecture du texte coranique "selon les principes de la linguistique, de la sémiologie et des sciences sociales modernes, pour arriver à une lecture scientifiqueet contextuelle du Texte " : Nasser Abou Zeyd en Egypte,Mohammad Chahrour en Syrie, Mohammed Tahab au Soudan(exécuté par pendaison le 18 janvier 1985), etc.] " La portée decette approche linguistique est fondamentale, car elle permet deremettre en question les diverses interprétations jurispruden-tielles qui constituent le corpus du droit canonique. Ainsi, lesinterprétations transmises depuis des siècles, relatives àl'héritage, au divorce, au statut familial, etc. seraient tronquéespar une mauvaise connaissance de la langue arabe. (...)Chahrour effectue une distinction fondamentale entre laProphétie et le Livre. Le contenu de la Prophétie serait vrai etimmuable, tandis que celui du Livre, donc du Message, relatif etcirconstancié. "

Olivier ROY, L'islam mondialisé (Paris, Seuil, 2002)

"Les phénomènes de globalisation, d'individualisation et d'occi-dentalisation touchent aussi les formes d'islam populaire. Lareformulation religieuse fonctionne sur le registre de l'appel àl'éthique et de la référence au salut, voire du bonheur, depréférence à un discours de défense de l'oumma et de la charia.On assiste à un retour de formes populaires de religiosité, ren-forçant des modes traditionnels et locaux d'expression de l'is-lam, qui avaient été l'objet de vives critiques des islamistes (aunom du primat du politique) ou des fondamentalistes (pourleur peu de rapport avec l'islam "authentique")". (p.126)

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ORIGINE DE L'ISLAM

Daniel SIBONY, Nom de Dieu(Paris, 2002) , chap. III " Islam "

D'après l'analyse de DanielSibony, Mohamet a fondél'Islam sur la recherche d'uneidentité pour le peuple arabepar opposition au peuple juif(et accessoirement aux chré-tiens), qui aurait menti à Dieuen prétendant lui être soumissans reconnaître son dernierprophète, Mohamet lui-même." Dieu a donc suscitél'hypocrisie dans leurs coeursjusqu'au jour où ils Le rencon-treront [jour du jugement],parce qu'ils n'ont pas accomplice qu'ils avaient promis à Dieuet parce qu'ils mentaient. "(Coran, IX,77).L'Islam serait donc le parachève-ment de la révélation divine. "Seuls sont vraiment croyantsceux qui croient en Dieu et enson Prophète " (Coran,XXLIX,15). Le croyant doitrejeter ceux qui ne veulent passe soumettre à Dieu en recon-naissant le message deMohamet. " O vous qui croyez,ne prenez pas pour amis lesjuifs et les chrétiens (...). Celuiqui parmi vous les prend pouramis est des leurs - Dieu nedirige pas le peuple injuste. "(Coran, V,51)

Bruno ETIENNE, Islam, les Questions qui fâchent, (Paris,Bayard, 2003)

" Selon le Coran, l'islam ne doit rien aux autres cultures ou reli-gions. La contradiction est double, parce que le Coran faitréférence à tous les prophètes passés et affirme en même tempsqu'il annule tout ce qui a été dit.De plus, Mohammed, avant d'être " missionnaire ", a voyagé etconnaissait assez bien les chrétiens et les juifs. (…) Dans ses con-troverses avec les juifs de la région de Yatrib/Médine, on sentbien que ses connaissances sur les deux religions juive et chré-tienne sont évidentes. " (p. 48)

CONSTITUTION D'UNE " VRAIE RELIGION " DEFINITIVE

Rochdy ALILI, " Une orthodoxie inoxydable ", in :Panoramiques, n° 50 (1er trimestre 2001), pp. 126-132.

" Dans la mesure où les hérétiques musulmans étaient souventinstallés dans des territoires qu'ils contrôlaient, les oppositionsavec les tenants d'une religion califale longtemps mal assuréeprirent l'aspect de guerres ouvertes pendant les premiers sièclesde l'islam. Il était malaisé d'ailleurs de faire la part de l'opposi-tion politique et de l'opposition religieuse dans ces affronte-ments, qui se déroulèrent aussi bien aux marges de l'empiremusulman que dans ses régions centrales et sa capitale. La ques-tion cruciale pendant les premiers siècles de l'islam fut en per-manence celle de la profusion des expressions religieuses erra-tiques et incontrôlables, presque toujours dangereuses pour l'or-dre public et les pouvoirs établis. Aussi, le souci de tous les ca-lifes pendant trois cents ans fut d'établir une religion officiellestable et contrôlable. (...) Au terme de cette longue évolution,un système normatif clos put exister. Il consacra une construc-tion doctrinale touchant aux bases scripturaires de l'islam, à leurlecture et leur exégèse, aux pratiques jurisprudentielles,cultuelles et d'une certaine manière à la théologie. "

Bruno ETIENNE, op. cit.

Selon les musulmans, le Coran clôture la prophétie ; donc l'islam apréséance sur les autres religions, comme " la dernière des traditionsmonothéistes révélées par le Dieu unique de Jacob. " (p. 54)

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DEVOIR DE REFLEXION SUR LES SOURCES : IJTIHAD

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

"L'ijtihâd, en tant que troisièmesource du droit et de lajurisprudence islamiques, estfard kifâya, une obligation col-lective. Les conditions [pourêtre un mujtahid qualifié] sontexigeantes, (…) mais [elles]n'ont jamais été hors de laportée des oulémas au coursdes époques tardives et jusqu'àl'époque contemporaine. Lesprogrès enregistrés dans ledomaine de l'authentificationdes ahâdîth [paroles rapportées(ou inventées) du Prophète],l'accès plus facile aux ouvragesde référence et la classificationinformatisée facilitent le travaildu mujtahid et le rendent plusefficace. (…) Al-ijtihâd demeurel'instrument le plus importantlivré aux mains des oulémaspour réaliser la vocation uni-verselle de l'islam, grâce à unedynamique constante d'adapta-tion faite à la lumière del'époque et du contexte." (p. 91)

Mezri HADDAD, "Le politiqueest coupable, pas le religieux",in: Panoramiques, n° 50 (1ertrimestre 2001), pp. 113-125.

"...L'Islam mystique a étéharcelé, extirpé même, parl'Islam politico-orthodoxe; (...)

l'Islam intellectuel des philosophes a été stigmatisé par l'Islamjuridico-théologico-dogmatique, d'ailleurs souvent inféodé à l'instancetemporelle. C'est le conflit entre les tenants d'un Islam intégral,figé dans la littéralité du texte, et les avocats d'un Islam du forintérieur et ouvert à la libre interprétation (ijtihâd)." p. 115

DEFICIT D'AUTO-CRITIQUE

Bruno ETIENNE, op. cit.

" Obstacle à l'utilisation de la raison critique… : les musulmanscroient en l'inimitabilité et au miracle du texte révélé, incréé, àsa perfection liée à une langue " claire et évidente ". Certainsversets du Coran le qualifient de sublime, glorieux, noble, sage,plein de signes clairs, insurpassable. Il est lumière, direction…Cette foi en l'inimitabilité du Coran explique la quasi-impossibi-lité de contester ou de critiquer le texte de la vulgate établiepar Othman Ibn Khattab, le troisième successeur du prophète, àpartir de la version de Zahid ben Thabit, et cela dans des condi-tions qui font encore l'objet de discussions. " (pp. 60-61)

Tariq RAMADAN, op. cit.

" Le déficit d'auto-critique est toujours patent et, dans l'esprit debeaucoup de musulmans, il demeure que " critiquer un musul-man, c'est critiquer l'islam " ou encore, presque plus gravement," faire le jeu de l'ennemi, de l'Occident ". (p. 187)

Jochen HÖRISCH, " La communication grotesque de l'après 11septembre 2001 ", in : Goethe Merkur, n° 641-642 (septembre-octobre 2002), pp. 50-57

" Dans l'islam, et contrairement à ce qui se passe dans la tradi-tion occidentale chrétienne, l'auto-critique n'a pas une valeurélevée. Le type de l'hérétique non conventionnel, du marginal,du rebelle qui rit à la face des autorités dominantes détient,dans la tradition grecque comme dans la tradition judéo-chré-tienne, un prestige dangereux et des perspectives impression-nantes de passer pour la figure fondatrice d'un nouveau para-digme victorieux … (parfois post mortem).

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" Les gens qui croient détenir laparole de Dieu par transmissionimmédiate peuvent bien sedécrire eux-mêmes commeceux qui se soumettent à Dieu(musulman) - ils courent legrand risque, non pas de sesoumettre au Dieu unique, maisde soumettre ce Dieu à eux-mêmes. "

ISLAM ET LIBRE PENSEE

Walid Al-KACHAB, " Nous neverrons pas un islamrespectueux de la liberté denotre vivant... ", in :Panoramiques n° 50 (1ertrimestre 2001), pp. 82-88.

" En islam, comme dans toute tradition à caractère médiéval,c'est toujours la communauté qui décide, et son bien est lafinalité ultime des actions des individus. La tradition de l'Ijma(unanimité) est fondamentale aussi bien en théologie et enjurisprudence qu'en politique. C'est ainsi que prend tout sonsens l'affirmation du Coran : " Vous êtes la meilleure des nationsque les hommes aient connues. " C'est l'Umma (nation) et leCoran qui parlent et qui pensent. La libre pensée n'a donc pasde sens, puisque l'instance de la pensée n'est pas l'individu. " (p.86.)

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Bernard LEWIS, op. cit.

"Islam is not only a matter offaith and practice; it is also anidentity and a loyalty - formany, an identity and a loyaltythat transcend all others." (p. 13)

Jacques BERQUE, L'islam auDéfi, (Paris, Gallimard, 1980)

" Mise en communication de latranscendance totale avecl'homme intégral : voilà lastructure de base propre à l'is-lam. Totale, cette transcen-dance, ramenée à son unicité,farouchement exclusive depaliers et de médiateurs.Intégral cet homme, poursuividans sa plénitude corporelle,spirituelle et sociale. D'elle à Luila transmission ne se diffuse nise médiatise (…) Et non plus nese concrétise : pas d'images, pasd'objets du culte. Les rites, ou'ibadat, sont réduits au mini-mum. Une telle acceptionentend néanmoins être la plusexigeante de toutes, et que sacomplétude soit à la mesure desa vacuité. "(p. 112)

" Ce qui constitue la qualité demusulman, dit la Baqara(Coran II,3), ce sont troischoses : 1) la croyance, doncune intériorité, un rapport dis-symétrique avec le ghayb, c'est-à-dire avec le mystère de l'ar-rière-monde, du cosmos et, audelà du cosmos, avec Dieu ;

2) l'hommage gestuel et mental de la prière ; 3) une gratitudeactive et généreuse qui répercute sur les gens et la Nature lesbienfaits reçus du Créateur. " (p. 141)

Jean PRIEUR, Muhammad, Prophète d'Orient et d'Occident,(Ed. du Rocher 2003)

"La piété musulmane (...) consiste en 5 points:Croire au Dieu unique, au seul vrai Dieu, qui s'était

déjà révélé à Noé, à Abraham, Ismaël, Moïse et Jésus. Elle estcontenue dans la shahâd: "Il n'existe pas d'autre dieu que Dieuet Muhammad est son prophète".(...)

Croire au dernier jour, lequel (...) a 2 aspects:Résurrection et Jugement dernier (Coran LXXXI, début) (...)

Croire aux anges, donc à l'autre vie: "L'autre mondevaut mieux pour toi que celui-ci. Dieu te le donnera et tu serasheureux". (Coran XCIII, 3-4).

Croire au Livre, (...) le Coran; mais, dit Mahomet, ilfaut croire aussi au Pentateuque (Thora), aux Psaumes (Sabor) età l'Evangile (Injil).[Mais, en même temps, Mahomet affirme queles chrétiens ont déformé le message divin.]Croire aux prophètes: (...) Adam, Noé, Abraham, Moïse, Jésus,Muhammad: "On n'a fait descendre l'Ecriture que sur deux col-lectivités avant nous, et en vérité, nous avons été dans l'igno-rance de ces communautés!" (Coran VI, 157)

"Les obligations du croyant sont aussi au nombre de cinq:Donner l'aumône, réserver une part de ses biens pour

ses proches, pour les orphelins, les captifs et les pauvres (...) et,en général, pour quiconque demande.

Pratiquer cinq fois par jour la prière canonique, dif-férente de la prière de demande et de la prière pour les morts.

Etre fidèle à ses serments, respecter la parole donnée[au moins à d'autres musulmans.].

Etre patient dans l'indigence, la détresse et les tempsde violence.

Observer le jeûne du Ramadan et, si possible, lepèlerinage à La Mecque."

N.B. L'auteur prétend, par ailleurs, que "l'Esprit de Dieu chargeaMuhammad de trancher d'un coup le noeud gordien de laTrinité" (p. 36), se référant à certaines interprétations données

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2. Le contenu essentiel de l’islam

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par des Pères de l'Eglise chré-tienne aux trois personnagesapparus à Abraham au Chênede Mambré. Il conclut: "Il estdifficile de pousser plus loin lacrédulité, l'obscénité, le ridiculeet le blasphème". On est trèstenté d'ajouter l'adjectif "stu-pide", pour qualifier ce genrede jugement caricatural de JeanPrieur (oh! orgueil immense del'intelligence humaine!), et defournir à celui-ci quelquesréférences d'ouvrages solides etsérieux sur l'exégèse de la Bibleet le contenu du christianisme!Cependant, l'auteur admet, plusloin (p. 103), que "Mahomet atoujours pris la notion de filsau sens le plus concret, le pluslittéral. De même, il a cru quela Trinité se composait de Dieu,du Christ et de la Vierge." Sarévélation flanchait parfois aumoins autant que celle des pre-miers conciles, contre lesquelsJean Prieur vitupère tant!

Tariq RAMADAN, LesMusulmans d'Occident etl'Avenir de l'Islam (Actes Sud,2003)

" Quatre éléments tracent letableau adéquat de ce que sontles fondements de l'identitémusulmane, individuelle etsociale : (…) le noyau de la foi, avec la pra-tique et la spiritualité, est lalumière par laquelle la vie et lemonde sont perçus ;

l'intelligence des Textes et du contexte permet de structurer sonesprit vis-à-vis de soi et de son environnement ;l' éducation et la transmission permettent tout à la fois de fairedon du dépôt de la foi et de transmettre le message ;l'action et la participation sont la manifestation accomplie decette identité à travers la manière dont on se comporte poursoi, envers autrui et la Création (action) et avec ses concitoyenset l'humanité entière (participation).(…) La grande responsabilité des musulmans en Occident estd'habiller ces quatre dimensions de leur identité d'une " cultureoccidentale " fidèle aux sources islamiques qui, quant à leur con-ception de la vie, de la mort et de la Création, demeurent laréférence fondamentale. " (pp. 145-146)

ISLAM ET SOUMISSION

Mohammed TALBI (et Gwendoline JARCZYK), Penseur libre enIslam, (Paris, Albin Michel 2002)

" On parle toujours de l'islam comme d'une religion de lasoumission, ce qui est inexact ; c'est une religion qui consisteessentiellement à s'en remettre à Dieu, avec amour et confiance.Le mot " islam " signifie d'ailleurs s'en remettre à Dieu volon-tairement, après réflexion, en toute confiance et amour. " (p.110)

Anne-Marie DELCAMBRE, L'Islam des Interdits (Paris, Descléede Brouwer, 2003)

" La préoccupation constante de l'Islam, c'est de " civiliser "l'homme, de l'éduquer, que l'homme ne se comporte pas enanimal. (…) L'homme se distingue de l'animal parce qu'il estdoué de raison et le bon usage de cette raison ne peut que leconduire vers Dieu, à la soumission à Dieu. La vraie, la pre-mière nature de l'homme, c'est d'être soumis à Dieu (muslim),donc d'être musulman si on joue sur le mot muslim ! " (pp. 79-80) " Aussi la conversion à l'Islam est considérée comme un retourpur et simple [de l'homme] à son identité originelle, tandis quetout abandon de l'Islam est (…) une perversion par rapport audroit naturel. (…) Pour l'islam juridique il mérite [donc] la mort. "(p. 92)

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" Certains musulmans pensentde bonne foi qu'ils ont touteliberté de croire ou de ne pascroire, ce qui est faux. Le " point de contrainte en religion "(Coran II, 256) ne les concernepas ; il s'agit du respect desautres religions … " (p. 91)

VALEURS ESSENTIELLES DE L'ISLAM

Rachid BENZINE, op.cit. 3

Selon Farid Esack, les valeursessentielles sont : " la Taqwâ(intégrité et prise de con-science), le Tawhid (le dogmede l'unicité de Dieu), al-nass (lesgens), Al-mustad'afûn fi l-ard(les opprimés de la terre), 'Adlet Quist (équité et action juste)et Jihâd (la lutte et la praxis).

" La TAQWA : C'est unesorte de " conscience de Dieu "qui permet de comprendre quele Seigneur connaît tous lespenchants des hommes, et quechacun est comptable de tousses actes devant Lui. (…) Elleconduit à la piété, renforce l'in-tégrité et la force de caractère.(…) Elle aboutit à un processusde transformation personnelle,car le changement ne doit passeulement être celui des struc-tures injustes, mais aussi celuides gens qui combattent cesstructures. "

" Le TAWHID : C'est ledogme central de l'islam, celuide l'unicité de Dieu. (…) Cela

doit conduire à rejeter toute idolâtrie (…) : l'amour de larichesse, du succès, de soi… (…) Le Coran lui-même fait le lienentre le refus d'accorder la charité et le refus d'adorer Dieu. "

" Al-NASS : désigne les hommes en tant que collectif ;cette désignation est associée à leur dignité de représentants deDieu sur terre. (…) Tout ce qui va contre le respect de la per-sonne humaine fait injure à Dieu, et les gouvernants sontcomptables devant le Seigneur de la manière dont ils traitentceux qui sont sous leur pouvoir. (…) Cela entraîne deux impli-cations herméneutiques. Premièrement, il est indispensable quele Coran soit interprété d'une façon qui bénéficie à la majoritédes gens, et particulièrement aux pauvres, aux exclus.Deuxièmement, l'interprétation coranique ne peut qu'êtrefaçonnée par l'expérience et par les aspirations de l'humanité. "

" Al-MUSTAD'AFUN fi l'ARD: désigne les spoliés, ceuxqui ont été appauvris par les mustakbirûn, c'est-à-dire les arro-gants et les puissants. (…) Selon Fard Esack, il est clair que leCoran dénonce les puissants qui tiennent les opprimés en otageset qui se comportent comme des dieux sur terre. "

" QIST et ADL : Qist veut dire " donner à quelqu'un sondû, tandis qu'Adl suggère une action juste et droite. En perma-nence le Coran exhorte les croyants à se lever et à portertémoignage de la justice quand ils sont confrontés à l'injustice.(…) Ce sens de l'équité et de l'action juste ne peut pas se li-miter, comme toute une lecture traditionnelle est tentée de lefaire, à la " guerre contre les incroyants ".

" Le JIHAD : (…) Dans le contexte coranique, il désignel'effort, ou le combat mené dans le sentier de Dieu. Il concerneautant l'action militaire pour la défense de la communauté etdes idées de l'islam, que le combat spirituel. (…) Farid Esack(…) conçoit le jihâd comme une " praxis ", c'est-à-dire commeune démarche où réflexion et action sont liées, la réflexionprenant sa source dans l'action, ce qui conduit à une action deplus en plus consciente. " (pp. 267-271)

ISLAM ET ABSENCE DE DOUTE EXISTENTIEL

Henri WIBAULT, op.cit.

" Tariq Ramadan [montre] que la paix partagée, la fraternité defoi - fondation de l'islam - est opposée à toute idée de con-science tragique. Il n'y a aucune expression de doute, a fortiori

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dans un sens cartésien ou exis-tentialiste. Il n'est jamais ques-tion d'interroger la transcen-dance. Une expérience dudoute conçue comme pouvantêtre positive ne relève pas de laconception musulmane. Il n'y aaucune pensée de caractèreeschylien à propos du rapportentre l'homme et le divin chezles grands penseurs musulmans.Après avoir étudié diverspenseurs musulmans eteuropéens, Tariq Ramadan enconclut: il existe de claires dif-férences d'essence entre lesdeux mondes. Le mythe deProméthée agit sur ce pointcomme un révélateur. Cettedimension, généralement nonabordée dans les colloques -nous dit l'auteur - explique, enplus d'autres raisons, la naturede la résistance de l'islam à l'oc-cidentalisation. Deux 'cultures'se font face. "

ISLAM ET RECHERCHE SCIENTIFIQUE

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Au cœur même de larecherche scientifique et de sonapplication, la conscience ducroyant devra répondre auxtrois questions morales fonda-mentales dans l'universislamique de référence :1.Quelles sont mes intentionsen m'engageant dans l'étude decette science ? (…)

2. Quelles sont les limites éthiques que je me dois de respecter[selon les] sources scripturaires.3. Quelles sont les finalités de mes recherches ? Il s'agit de l'inté-gration de l'activité scientifique dans la " Voie de la fidélité ", du" chemin vers la Source ".(…) Le plus grand défi [de la présence musulmane dans les sci-ences] étant de préserver la centralité de l'essentiel, le lien à laSource, la conscience de la responsabilité et l'entretien du " besoin de Lui ", parent de l'humilité. " (pp. 110-111)

Bernard LEWIS, op. cit. 2

"Non contents de collecter et de préserver, les savants musul-mans du Moyen-Age développèrent une méthode quasimentinconnue des Anciens: l'expérimentation. Grâce à cetteapproche et à d'autres ils furent à l'origine d'avancées décisivesdans presque toutes les disciplines scientifiques.L'essentiel en fut transmis à l'Occident médiéval, dont les étu-diants avides d'apprendre allaient s'instruire dans les grands cen-tres intellectuels musulmans d'Espagne et de Sicile, tandis qued'autres traduisaient d'arabe en latin des traités scientifiquesoriginaux ou adaptés d'anciens textes grecs." (p. 105)

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

" La raison raisonnante ne s'est jamais vraiment épanouie enterre d'Islam, considérée comme innovation blâmable (bid'at),hérésie. (…) L'âge d'or de l'Islam n'avait rien d'exclusivementmusulman : il fut le fait d'un cosmopolitisme, d'apportsétrangers dus à [la Grèce antique], à l'Inde, à la Perse, à laChine. (…) La brillante civilisation qui s'élabora entre le IXèmeet le XIIème siècle dans les cours des métropoles commeBagdad, le Caire, Ispahan, Cordoue, avec l'encouragement demécènes riches et nobles (califes, vizirs, émirs et même simplesnotables) était largement étrangère à la religion…Selon les juristes traditionnels de l'Islam, la culture islamiqueprécieuse, c'est celle élaborée à Médine sous la houlette duProphète : comment faire les ablutions, comment manger, com-ment prier, comment se comporter dans telle ou telle circon-stance. (…) Ce qui n'est absolument pas toléré, c'est la remiseen question, le doute, la recherche critique… " (pp. 72-73)

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RESPONSABILITE DU CROYANT

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Avec la conscience du divin,face à l'univers, l'individu sepense d'abord comme un êtrede responsabilité. La foi et l'hu-milité qui enveloppent cettedernière notion le portent àcomprendre le sens de ses obli-gations avant la seule affirma-tion de ses droits. C'est le senspremier du concept de " gérance " en islam : " C'est Luiqui a fait de vous ses gérants(khalâ'ifa) sur la terre. " (Coran,VI ,165). Il appartient auxhommes de gérer le monde surla base d'une éthique durespect de la création, nonseulement car celle-ci n'est pasleur possession, mais, plus pro-fondément et plus spirituelle-ment, parce qu'elle est en soiune éternelle célébrationadressée au Très-Haut. " (p. 40)

SENS DE LA COMMUNAUTE

Anne-Marie DELCAMBRE, op.cit.

" Personne n'effacera de lamentalité du musulman le senti-ment de responsabilité qu'iléprouve vis-à-vis des autresmusulmans. Tout musulmanressent une vraie fierté d'ap-partenir à la Oumma duProphète. " (p. 89)

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" La prière établit des liens avec notre voisin musulman, en unlieu précis ; tandis que la zakât [aumône] élargit le cercle denotre relation sociale, car le montant doit être dépensé pour lesnécessiteux dans la région où il est prélevé. Le jeûne développeun sentiment plus large encore puisque nous sommes, par lejeûne et la pensée, en communion spirituelle avec les pauvresdu monde entier. Cette communion trouve enfin une réalisationtangible et physique avec le pèlerinage à La Mecque, lieu sacrédu rassemblement de millions de musulmans, symbole de l'um-ma. (p. 157) (…) Etre musulman, où que ce soit dans le monde,signifie ressentir et développer ce sentiment d'appartenir à l'um-ma comme si on était un organe d'un immense corps. " (p. 158)

Mais fragmentation des musulmans immigrés en Occident

" Certains immigrants sont arrivés en Occident avec l'idéologied'un mouvement de pensée particulier lequel, parfois, était enconflit avec une autre école : souvent, ils ont (…) importé leursanciennes disputes en Europe et aux Etats-Unis. On y assiste defait à des conflits de courants idéologiques - dont on ne saitplus toujours très bien l'origine ou le sens -, à la multiplicationd'organisations concurrentes, à des disputes relatives à lareprésentation des musulmans, etc. "Deux autres types de cloisonnement non moins opérants : - " l'enfermement ethnique ", d'où " des mosquées pour lesMarocains, d'autres pour les Algériens, les Pakistanais, lesAfricains de l'Ouest,(…) les Arabes du Moyen-Orient, etc. "- " fréquentes ruptures entre les classes sociales : les musulmansconfortablement installés ont de moins en moins de contactavec leurs coreligionnaires plus modestes ou carrément pauvres." D'où 2 types d'appartenance : (a) " un islam " très sophistiqué" issu des universités ou des leaders des organisations ayantpignon sur rue " ; (b) un islam " où s'exprime une affirmationplus revendicatrice (…) pour développer des solidarités socialeset des dynamiques de mobilisation souvent en confrontationavec le système politique et social. " (…) C'est aux Etats-Unisque cette rupture " est clairement consommée entre l'islam dit " éduqué " et celui des moins nantis qui refusent (…) qu'on lestraite comme des musulmans de seconde catégorie qui n'au-raient pas compris " la sagesse du message de l'islam ". D'aucunsrépondent qu'il y a loin entre la " sagesse " et les réalités de " la

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compromission " ou de " ladémission " dont font preuvecertains musulmans nantis etbien installés. " (pp. 183-184)

Stefano ALLIEVI, "Multiculturalism in Europe ", in: Muslims in Europe, post 9/11,Conference Report, St Antony'sCollege & Princeton University,25-26 April 2003, p. 7

"Properly, community and indi-vidual are concomitant. Debateon multiculturalism or Muslimsin Europe should therefore beformulated as being aboutcommunitarianism or individualintegration, but about commu-nitarianism and individual inte-gration."

LA CHARI'A

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Si l'idée d' " établir des règles "est effectivement contenuedans la notion de shari'a (…)cette traduction ne donne pasla plénitude de son acception sil'on ne mentionne pas son sensplus général, et en cela fonda-mental : " le chemin qui mèneà la source ". (…) La shari'a est,non seulement l'expression desprincipes universels de l'islam,mais le cadre et la pensée deleur actualisation dans l'histoirehumaine. Pas de shari'a sans uncorps de principes fondamen-taux qui fixent, au delà des

contingences du temps, un référentiel de fidélité au vouloirdivin. (…) [Ces principes universels et atemporels] n'empêchentpas la raison d'être active et créatrice, [mais ils] la protègent des'embourber dans les contradictions et les incohérences de l'ab-solue relativité de tout. " (pp. 62-63)

Champs d'interprétation

" Dans le domaine du culte, ce sont les textes qui sont l'ultimeet unique référence, car le rituel révélé est fixe et n'est passoumis à la rationalité humaine : ici, on ne peut faire que ce quiest fondé sur un texte et la marge d'interprétation des sourcesest quasi nulle. Dans le domaine plus large des affaireshumaines et sociales, la méthodologie fixée est exactementinverse : compte tenu du regard positif et confiant que le mes-sage coranique ( …) porte sur l'univers et les êtres humains,tout ici est permis sauf ce qui est explicitement (ou reconnucomme tel par les spécialistes) interdit par un texte. (…) Leshommes [y] ont toute latitude pour expérimenter, progresser,réformer tant qu'ils demeurent en deçà de l'interdit (A la lecturedes textes, on apprend que ces prescriptions sont peu nom-breuses, même si, dans certains domaines, elles sont très préci-ses). " [N.B. Beaucoup de ces prescriptions sont positives, et nesont pas des interdits ! Ne faut-il donc respecter que celles quiinterdisent formellement quelque chose ? TR reste ainsi souventdans le vague, sans donner d'application aux cas difficiles. P. ex.dans son chapitre sur les prescriptions discriminatoires à l'égarddes femmes, " Naissance d'un féminisme islamique ", il évitetoute référence précise aux prescriptions coraniques qui fontproblème pour les femmes d'aujourd'hui !]

" Il existe bien une différence, dans l'islam, entre le dogme et larationalité, le privé et le public, le religieux et le politique. (…)Les versets et les traditions prophétiques très précis et très con-traignants, dans l'ordre de la relation à Dieu et de la pratiquecultuelle, se distinguent de ceux qui, dans les affaires du monde,fixent les principes universels et généraux, les finalités idéalesque le fidèle doit essayer, du mieux qu'il peut, de réaliser dansle devenir. (…) La " Voie de la fidélité " nous apprend que l'is-lam repose sur trois sources : le Coran, la Sunna et l'état dumonde ou de notre société. (…) Il s'agit bien d'un chemin, d'unchemin vers l'idéal, au long duquel l'être humain est invité à unconstant effort de réforme à la lumière de l'universel, sansjamais prétendre qu'il détient à lui seul la Vérité de l'universel. "(pp. 68 et 71)

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ORIGINE ET VALEUR DE LA CHARI'A

Sadok BELAÏD, op. cit.

(Texte de Henri WIBAULT) " Les réflexions de Talbi et deBelaïd portent, à une bonnegénération de distance, sur lamême problématique historique :comment aborder ce droitmusulman légué par l'histoire?Pour Belaïd, la question cen-trale est si le droit musulmandes savants traditionnalistes, lesulémas, a réellement expriméune traduction fidèle du mes-sage coranique.

Pour l'auteur, qui s'inscrirait enfaux contre toute la doctrinedes droits de l'homme et con-damnerait pour apostasie toutepersonne qui remettrait enquestion les principesimmuables de l'orthodoxieislamique et de la Shari'asacrée? Evidemment personne,du moins personne de senséayant devant lui les réalités duprésent et un minimum de sensde l'avenir. Belaïd précise - ettel est le centre de sa réflexion -que toute connaissance certainede la législation posée par leCoran doit, d'abord et avanttoute chose, être tirée duCoran lui-même, de tout leCoran, et rien qu'à partir duCoran.L'auteur énonce en quelquesorte les termes d'une ruptureentre le texte du Coran, auquel

le plus grand respect est dû, [et] la Sunna, sujette à une entre-prise critique. Ce type d'entreprise, où l'on fait porter la respon-sabilité des dérives de la Sunna en général à l'Iman al-Shâfi'î (767-820 ), n'est pas propre à Belaïd.

On peut établir qu'il existe un fossé béant, une ligne de ruptureprofonde, entre deux réalités couvertes par le terme Shari'a.D'une part, il y a un contenu législatif originel propre au mes-sage coranique. On peut, en ce sens utiliser le terme Shari'a etparler de Shari'a coranique. En revanche et d'autre part, lesdogmes imputés au message par les traditionalistes de tousbords et qu'ils appellent la Shari'a islamique relèvent d'un autreordre. Une confusion entre ces deux conceptions a été sciemmententretenue pendant des siècles. Ce type d'amalgame a été faci-lité par la forte liaison entre le juridique et le religieux existanten Islam. Il y a, en effet, une filiation certaine entre la règle dedroit islamique et la source de la foi islamique, le Coran. SelonSadok Belaïd, la rigueur scientifique veut que, pour la connais-sance du contenu législatif précis du Coran, la précédence soitrésolument donnée à ce dernier et non point à l'œuvre desinterprètes. Ce principe a été affirmé depuis longtemps: la con-naissance la plus valable du contenu précis de l'Ecriture doit con-sister à tirer la connaissance à partir de l'Ecriture elle-même. "

APPLICATION DE LA CHARIA

Mohammed CHARFI, "Le dialogue interculturel entre l'Europeet le monde musulman ", in : Conférence sur le dialogue inter-culturel, 20-21 mars 2002 (Commission européenne, 2003)

" Sur les 57 membres de l'Organisation de la ConférenceIslamique, qui regroupe tous les Etats musulmans, 48, soit les 5sixièmes en nombre d'Etats et aussi en importance démo-graphique, ont abandonné la charia (droit musulman classique)en matière pénale et d'organisation des pouvoirs publics, ce quiconstitue un pas important mais non décisif vers la modernité… "(p. 143)

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PENSEE MUSULMANE : MODERNISATION - TRADITION

Rachid BENZINE, op. cit. 3

"Après le décès du Prophète, lesmusulmans ont dû trouver desréponses aux nouveaux défisqu'ils rencontraient, et fournirdes solutions aux problèmes quisurvenaient dans leur quotidi-en. Pour cela ils ont interprétéle message ; mais, devant lapluralité et la contradiction desinterprétations, ils ont limité leschamps de l'exégèse en institu-tionnalisant la religion, et ilsont progressivement remplacéle message par une interpréta-tion officielle, consensuelle,institutionnelle. C'est ainsiqu'une culture de la tradition -l'orthodoxie - s'est bâtie, endehors de laquelle on n'a plusvu de salut possible. Mais cesystème religieux traditionnel(…) est désormais incapable defaire face aux défis de lamodernité. " (pp. 222-223)

Jacques BERQUE, Refuser la ten-tation de l'insularité, in : Islamcontre Islam, Manière de voir n°64, juillet-août 2002, pp. 76-77

" Reconnaissons que la penséemusulmane, sous la forme tra-ditionaliste ou sous la formemoderniste, ne marque plusguère de véritable féconditésociale ni culturelle. Les derniers

grands " cheikhs " se sont éteints à Al Azhar du Caire, à laQuarawiyin de Fès comme à la Zeytouna de Tunis. Ce que dis-pensent commentateurs et prédicateurs est pure littérature decombat. De quoi, certes, soulever les foules à l'occasion, maissans renouveau doctrinal...L'islamisme dans son ensemble s'enchante de son altérité parrapport à l'adversaire, au lieu d'opposer à celui-ci la seuleréponse qui serait valable : une créativité propre. "

Tariq RAMADAN , Le temps de la réforme, in : Islam contreIslam, Manière de voir n° 64, juillet-août 2002, pp. 84-88.

" Le monde musulman traverse une réelle crise en matière derenouveau intellectuel, de projet social comme politique. Laseule opposition à l'Occident et/ou à l'occidentalisation ne suffitpas à construire une alternative. Une réforme s'impose donc, eten profondeur...Les tendances traditionalistes, littéralistes ou totalement poli-tisées opèrent comme des minorités actives et répandent l'idéeque tout projet de réforme est en fait une " occidentalisation ",une perte d'identité, voire une trahison ; les tensions internessont profondes et le dialogue intracommunautaire quasimentabsent. En temps de crise, le discours, fortement diffusé etfinancé par les Etats du Golfe, invitant au repli identitaire et à laconcentration sur le rituel et les limites (licite, illicite ; halal,haram) est très efficace... Si l'on ajoute, pour la quasi-totalitédes musulmans, l'expérience de la dictature, de la discriminationou de la marginalisation (en Europe et aux Etats-Unis), on com-prend mieux les raisons de cette tentation de retrait au coeurd'une tradition islamique fermée et perçue comme protectrice.(...)

[Exemple : statut de la femme] " Remettre en cause les lecturespatriarcales des cultures du Sud, quant au statut de la femmepar exemple apparaît être, pour les courants traditionalistes etlittéralistes comme une remise en cause des principes mêmes del'islam, désormais confondus avec les cultures arabe ou asiatiqueau nom d'une soi-disant résistance à l'Occident, et qui est en faitun isolement. "

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[Exemple : vie politique] "L'affirmation récurrente qu' " iln'y a pas de différence en islamentre religion et politique " estl'une des causes, somme toutegrave, de cette quasi paralysiede la pensée musulmane enmatière de science sociale etpolitique. Pourtant, si lesréférences scripturaires sont lesmêmes, les deux sphères dudroit musulman opèrent selondes méthodologies exactementopposées. Sur le plan religieuxproprement dit (ibadât), larègle stipule que l'on ne peutfaire que ce qui est permis parl'autorité d'un texte ; sur leplan des affaires sociales etpolitiques (mu'âmalât), tout estpermis, à l'exception de ce quiest explicitement interdit. " (...)

" Au fond, il s'agit aussi d'unequestion de confiance en soi eten ses valeurs : le sentimentd'être dominés, constammentattaqués, voire méprisés, large-ment répandu parmi les musul-mans, produit un réflexe dedéfense qui consiste à se pensercontre l'autre. La réforme del'intérieur est alors difficile,voire impossible, et toute ten-tative d'autocritique est perçuecomme une trahison, unealliance avec l'ennemi. " (...)

" Une véritable ijtihâd devraitconcerner une formulationnouvelle des référenceislamiques dans les domaineséconomique, politique, social, à

partir de la lecture normative des sources orientées vers l'extrac-tion des principes universels et des objectifs généraux. "

[Limites de fait] " Beaucoup de penseurs prônant la réformesont totalement déconnectés des communautés musulmanes,non pas toujours à cause du caractère radical de leurs proposi-tions, mais plus simplement parce que leur pensée est, soit horsdes références islamiques (ou perçue comme telle), soit en totaldécalage, au niveau de la formulation, avec le vécu des popula-tions. "

Abdelwahab MEDDEB, " L'islam a besoin de mauvais musulmans ",in Le Monde de l'Education, janvier 2004, pp. 80-85

" Le Coran comporte un certain nombre de considérations devenues détestables lorsqu'on les confronte à l'évolutionsociale et politique qu'a connue l'humanité dans les temps modernes (telle l'inégalité des femmes, la haine des juifs, lessanglantes prescriptions pénales concernant l'adultère, le vol,etc.). Il faut donc renouer avec le processus culturel qu'avaitconnu l'âge classique de l'islam pour que la lettre coranique soitabsorbée par le fait civilisateur. "

RELIGION ET POLITIQUE

Bernard LEWIS, op. cit. 1

"In the experience of the first Muslisms, as preserved andrecorded for later generations, religious truth and politicalpower were indissolubly associated." (…) [According to mostMuslims] "God is concerned with politics, and this belief is con-firmed by the shari'a, which deals extensively with the acquisi-tion and exercise of power, the nature of legitimacy andauthority, the duties of ruler and subject, in a word, with whatwe in the West would call constitutional law and political phi-losophy." (p. 6)"From the days of the Prophet, the Islamic society had a dualcharacter. On the one hand, it was a polity - a chieftaincy thatsuccessively became a state and an empire. At the same time,on the other hand, it was a religious community, founded by aprophet and ruled by his deputies." (p. 8)

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Bruno ETIENNE, Islam, lesQuestions qui Fâchent, (Paris,Bayard, 2003)

" Dès la prise du pouvoir parles Omeyyades [en 661], lepolitique domina le religieux.L'imam, sauf dans le chiisme,n'est que le conducteur de laprière et ne saurait se mêler depolitique sans s'attirer lesfoudres du pouvoir. Le penseurle plus célèbre auquel seréfèrent volontiers lesislamistes, Inb Taymiyya, a,pour cette raison, passé lamoitié de sa vie en prison.… Tout au long de l'histoiremusulmane, de nombreuxclercs ont essayé de récupérerdes pouvoirs religieuxautonomes, s'appuyant pourcela sur les aspects normatifs duCoran et de la chari'a. Ilsopposèrent à l'ordre public lanécessité de gérer la morale, lafamille, c'est-à-dire en fait toutun pan du droit privé. Pardessus tout ils arguèrent du faitque le pouvoir politique devaitassurer à chaque musulman lapossibilité d'accomplir ses obli-gations religieuses.Cette stratégie est encore celledes " islamistes " contempo-rains… [Ceux-ci] n'ont aucunedifficulté, lors de grandes crises,à démontrer que la situation estgrave parce que ceux quiavaient en charge la sécurité dela " maison de la soumission "(dar el islam) ont trahi la causesacrée. (…) Pour la commu-

nauté musulmane, mise en garde sur ce point par le Coran lui-même, le désordre doctrinal est la pire des calamités (fitna). Ence cas ultime, les hommes politiques au pouvoir sont dénoncéscomme prévaricateurs, puis comme infidèles. (…) Ils peuventalors être excommuniés et même éradiqués par tous lesmoyens. " (pp. 77-79)

Financial Times, 8 mars 2004, p.2

" Les islamistes de l'opposition en Malaisie ont lancé uneattaque personnelle contre le Premier Ministre Abdullah Badawiet sa famille, en vue des élections générales de ce mois ; ils ontmis en doute son adhésion à la foi musulmane. (…) Nik AzizNik Mat, chef spirituel du PAS (Parti Islamique de Malaisie), aproclamé que les gens qui voteront pour le PAS iront au ciel,tandis que ceux qui soutiendront le Gouvernement " nonislamique " iront en enfer ".

ISLAM ET ARABITE

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Il ne faut pas, par une perversion des ordres, qu'une culturespécifique soit tellement confondue avec les principes qu'elletrouble l'adaptation à un autre contexte ou encore, plus perni-cieusement, qu'elle s'octroie une prétendue légitimité dereprésenter la seule façon d'être authentiquement musulman,comme c'est parfois [souvent ?] le cas de la culture arabe." (p.139)

CHIISME

SHAYEGAN

(Texte de Henri Wibault)" La civilisation musulmane est tombée dans le cercle vicieuxsuivant: pour bien faire il faudrait que cette culture puisse béné-ficier des avantages de la démocratie. Mais dans l'histoire occi-dentale, un homme autonome a historiquement précédé ou dumoins accompagné la naissance de cette vision démocratique.

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Il n'y aurait donc plus pourl'homme musulman qu'à sedélivrer de l'égocentrisme déli-rant qui lui est propre et luisuggère que le monde com-mence et finit avec l'islam. Ortoute conscience d'un musulmanchiite vit dans l'attente de laParousie de l'Imân, sauveur dumonde. Mais cette vision estprécisément faite pour voiler leréel et découvrir ce qui au delàdu réel semble véritablementessentiel. Ce passage, l'Occidentl'a effectué, par delà la sclérosescolastique, comme une arrivéedans le domaine du social et del'histoire. Un monde est mani-festement remplacé par unautre. Shayegan estime, à cetégard, qu'Octavio Paz aprocédé au même jugementdans le cas de l'Amériquelatine.

TRADITIONALISME SALAFISTE

Ali SHARIATI

(Texte de Henri Wibault)" L'islamisme révolutionnaire seveut un retour à l'Origine de laTradition des Ancêtres, soitcelui des Pieux Devanciers (salaf ) qui ont vécu le Tempsd'avant, antérieur à toute his-toire. Dans une telle concep-tion, l'histoire ne peut doncêtre vue que comme trahisonet déviation. C'est pourquoi lemonde des mollahs flotte,

selon Shayegan, tel un radeau en détresse au milieu d'unedévastation qui n'épargne aucun secteur de la vie, fût-il le plustraditionnel.

Olivier ROY, op. cit.

"Deux éléments définissent ... le néo-fondamentalisme ousalafisme: son scriptualisme théologique et son anti-occidenta-lisme culturel. Le néo-fondamentalisme représente une visiontrès stricte et littéraliste du message coranique, dans la traditionhanbalite (...): tout se ramène au Coran, à la sunna duprophète et à la charia. [Il rejette tout œcuménisme : ] "(hostil-ité au christianisme et au judaïsme). ... Il refuse de s'intéresser àla philosophie et à la science politique (alors que les islamistessont de grands lecteurs, même critiques, de la philosophie occi-dentale). Il utilise les catégories juridiques et politiques tradi-tionnelles sans effort pour les moderniser, mais surtout sansadmettre qu'il y ait du nouveau."... Le néo-fondamentalisme ... refuse le soufisme. Il récuse aussila division entre les grandes écoles juridiques de l'islam..."Ce qui permet aux néo-fondamentalistes de penser le refus del'Occident, c'est en fait le refus du concept de culture au profitde celui de religion, ramené à une foi qui s'exprime dans unsimple code (le licite et l'illicite)..." (pp. 134-135)

HANBALISME ET WAHHABISME

Gilbert ACHCAR, Le Choc des barbaries: Terrorisme et désordremondial, (Paris, Complexe, 2002)

" Le " hanbalisme " est l'une des 4 doctrines reconnues de l'islamorthodoxe sunnite, ainsi appelé par référence à son fondateur,Ahmed Ben Hanbal (8e-9e siècle). Le hanbalisme se distinguepar son dogmatisme intolérant et son hostilité à l'innovation enmatière de religion. Le " wahhabisme " (...) est une versionextrême du hanbalisme. " (p. 82)" La montée du nationalisme arabe républicain et progressiste,dans les années 1950 - sous la direction du charismatique GamalAbdel-Nasser, qui avait renversé la monarchie égyptienne en1952 - et son alliance avec l'Union soviétique à partir du milieu dela décennie " allaient renforcer l'institution wahhabite, qui "apparut

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dès lors comme le meilleurrempart idéologique et socialde la monarchie saoudiennecontre l'anti-impérialisme arabe,accusé d'adhérer au " commu-nisme athée ". (...)Dès lors, l'intégrisme islamique -la plupart de ses variantesayant été fédérées par les wah-habites - deviendra l'instrumentidéologique principal de la lutteanticommuniste et antinationa-liste dans l'ensemble du mondemusulman, que Washingtonorchestrera en s'appuyant surRiyad. " (pp. 53-54)

FONDAMENTALISME

Bernard LEWIS, op. cit.

"Muslims fundamentalists arethose who feel that the trou-bles of the Muslim world at thepresent time are the result, notof insufficient modernization,but of excessive modernization,which they see as a betrayal ofauthentic Islamic values. Forthem the remedy is a return totrue islam, including the aboli-tion of all the laws and othersocial borrowings from theWest and the restoration of theIslamic Holy law, the shari'a, asthe effective law of the land.(…) Their most dangerous ene-mies, as they see it, are thefalse and renegade Muslimswho rule the countries of theIslamic world and who haveimported and imposed infidelways on Muslim peoples." (p. 103)

VOCATION UNIVERSELLE DE L'ISLAMMawlana Abul Ada MAWDUDI

"Islam is not a normal religion (…) and Muslim nations are notlike normal nations. Muslim nations are special because they havea command from Allah to rule the entire world and to be overevery nation in the world.Islam is a revolutionary faith that comes to destroy any govern-ment made by man. Islam doesn't look for a nation to be in bet-ter condition than another nation. Islam doesn't care about theland or who owns the land. The goal of Islam is to rule the entireworld and submit all of mankind to the faith of Islam. Any nationor power in this world that tries to get in the way of that goal,Islam will fight and destroy.In order for Islam to fulfill that goal, Islam can use every poweravailable every way it can be used to bring worldwide revolution.This is jihad.Islam is not just a spiritual religion; Islam is a way of life. It is aheavenly system (…) and the responsibility of Muslims is todestroy any other system in the world and to replace it with theislamic system."(Cité par Mark A. Gabriel, Islam and Terrorism (2002), pp. 81-82)

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TOLERANCE ETAGRESSIVITÉ DANS LE CORAN

Les textes ou extraits des versetsdu Coran sont cités dans l'ordrede leur apparition dans le Livre,et non dans celui de leur " descente " dans l'esprit deMahomet. Nous n'avons pastrouvé de source permettant dedéterminer si certains de cestextes ont été ou non abrogéset supplantés par d'autres plusrécents ; mais, de toutes façons,ils sont tous révélés par Dieu,selon la foi musulmane, etdonc pleinement valablescomme tels.

Coran, II, 256-257 : " Point decontrainte en religion, car levrai se distingue du faux. (…)Dieu est le maître des croyants.Il les mène des ténèbres auxlumières. "Coran, IV, 89: "Ne prenez pasd'amis chez eux [les infidèles]avant qu'ils émigrent dans lesentier de Dieu. S'ils tournent ledos, saisissez-les, tuez-les oùque vous les trouviez. (…) "Coran, IV, 90 : " S'ils se tien-nent à l'écart, s'ils ne combat-tent pas contre vous et vousoffrent la paix, Dieu ne vousdonne aucun droit sur eux."Coran V, 33 : " La " récom-pense " de ceux qui font laguerre contre Allah et Son messager, et qui s'efforcent de semer le scandale

sur la terre, c'est qu'ils soient tués ou crucifiés, ou que soientcoupés leur main et leur pied opposé, ou qu'ils soient expulsésdu pays. Ce sera pour eux l'ignominie ici-bas ; et dans l'au-delàil y aura pour eux un énorme châtiment. "Coran V, 73: "En vérité, ceux qui sont croyants [ les musul-mans], et ceux qui sont juifs, et les sabéens [disciples de saintJean], et les chrétiens, et quiconque croit en Dieu et au JourDernier, et quiconque pratique le bien, il n'y aura pas de craintepour eux et ils ne seront pas affligés."Coran VIII, 59-60 : " Que les incroyants ne pensent pas vousdevancer ; ils ne sauraient vous échapper. Tenez prêt contre euxce que vous pouvez de forces et de chevaux pour effrayer l'en-nemi de Dieu et votre ennemi… "Coran, IX, 7: "Tant qu'ils se montrent loyaux, agissez de mêmeenvers eux."Coran XVIII, 29 : " L'homme est donc libre de croire ou pas,mais il doit en assumer les conséquences… "Coran, LX, 8: "Dieu ne vous interdit pas d'être bons et justesenvers ceux qui respectent votre religion et ne vous chassentpas de vos foyers."Coran CIX : " Dis : ô infidèles, ô mécréants, je n'adorerai pointce que vous adorez, pas plus que vous n'adorez ce que j'adore.Je n'ai jamais adoré ce que vous adorez et vous n'avez jamaisadoré ce que j'adore. A vous votre religion, à moi la mienne. "(sourate tout entière révélée à La Mecque).Coran LX, 4: "Nous nous séparons de vous [idolâtres]. Quel'inimitié et la haine règnent entre nous jusqu'à ce que vousayez cru en un seul Dieu."Coran XCVIII, 6 : " Les infidèles, parmi les gens du Livre, ainsique les Associateurs, iront au feu de l'Enfer, pour y demeureréternellement. "Autres passages d'intolérance: Coran V, 72, VIII, 13-14 et 55, IX,7, LXIII, 23.Anti-sémitisme: Coran V, 6 et 65.Coran XVII, 4: "Quand vous rencontrez des infidèles, tuez -lesjusqu'à en faire un grand carnage et serrez les entraves des cap-tifs que vous aurez faits." [Selon Rudolph Peters (Jihad in Classical and Modern Islam,Princeton 1996), de tels versets (voir aussi Coran VII, 65 et 67,IX, 73 et 123, XXV, 52) ont été interprétés, du vivant duprophète, comme des commandements inconditionnels decombattre les incroyants et abrogeaient en quelque sorte les

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3. Islam et tolérance / intolérance religieuserelations avec le christianisme, le bouddhisme et autres "mécréances"

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versets précédents qui prônentune cohabitation avec les non-musulmans.]" Le plus noble d'entre vous estcelui qui se protège le mieux dumal. Un Arabe ne dépasse unnon-Arabe que par ce mérite. "(extrait du dernier sermon, dit " de l'adieu ", en 632, authentifiépar la plupart des traditiona-listes.)

MAHOMET ET MANSUETUDE /VIOLENCE

Rohan GUNARATNA, op.cit.

" J'ai été envoyé avec l'épée enmain pour assurer que nulautre que Dieu ne sera adoré,Dieu qui a placé ma vie à l'om-bre de ma lance et qui infligel'humiliation et le mépris à ceuxqui désobéissent à mes œuvres." (Hadith de Mahomet citédans la Déclaration de guerre… du Front islamique mondialpour le jihad contre les juifs etles croisés, p. 106)

Ibn WARRAQ, op. cit.

" Muhammad était le premierdes Mecquois qui avait dit à sessemblables et aux maîtres dudésert d'Arabie que le pardonn'était pas de la faiblesse maisune vertu, et que pardonnerl'injustice dont on est victimen'était pas contraire auxnormes de la vraie muruwwa

(vertu). C'était la plus grande muruwwa - c'était emprunter lechemin d'Allah.C'est en insistant sur le pardon que Muhammad a pu convain-cre les tribus qui avaient été divisées par des siècles d'ani-mosités, de vendettas, de revanches, que l'islam, et non plusl'appartenance au clan, serait désormais le principe unificateurde la société. Muhammad enseigna l'égalité de tous les croyantsdevant Allah. Malheureusement, la théorie est une chose et lapratique en est une autre. Tout d'abord le prophète n'a pas misen pratique ce qu'il prêchait. Bien trop souvent, dans son atti-tude envers les juifs, les Mecquois et ses rivaux, Muhammaddonna libre cours à sa cruauté, sans manifester la moindre man-suétude. " (p. 407)

Sir W. MUIR, The Life of Muhammad (Edimburg, 1923)

" La magnanimité ou la modération ne sont nulle part discer-nables dans la conduite de Muhammad envers tel ou tel ennemiqui avait tardé à faire acte d'allégeance. Il exultait avec une satisfaction sauvage au-dessus des corps des Qoraychites quiétaient tombés à la bataille de Badr et plusieurs prisonniers quin'étaient accusés d'aucun crime, si ce n'est de scepticisme etd'opposition politique, furent délibérément exécutés sur sesordres. " (pp.497-498) (Cité par Ibn Warraq, op. cit., p. 408)

SITUATIONS ET EVOLUTIONS HISTORIQUES

Bernard LEWIS, op. cit. 2

" S'agissant de la plupart des critères de la tolérance, l'islam, surle plan doctrinal comme sur le plan des pratiques, se comparedéfavorablement aux démocraties occidentales telles qu'elles sesont développées au cours des deux ou trois derniers siècles,mais très favorablement à la plupart des autres pays chrétiensou post-chrétiens. [mais quid des non chrétiens?] Dans l'histoiremusulmane, il n'y a rien qui ressemble à l'émancipation, à l'ac-ceptation et à l'intégration de croyants différents ou de non-croyants comme en Occident; toutefois, il n'y a rien qui ressem-ble à l'expulsion des juifs et des musulmans hors d'Espagne, àl'Inquisition, aux autodafés [vraiment? même sous certains califes?], aux guerres de religion [sublime paix entre sunnites et

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chiites!], sans parler de crimesplus récents, commis ou accep-tés en silence. De temps entemps il y avait des persécu-tions [ah! quand même!]; liéesà des circonstances locales etparticulières, elles étaient rareset, généralement, ne duraientpas. A l'intérieur de limites don-nées et sous certaines condi-tions, les gouvernements musul-mans étaient prêts à tolérerd'autres religions monothéistesrévélées, mais pas leur propaga-tion. Ils passèrent avec succèsun test encore plus difficile, entolérant des formes divergentesde la leur propre. Quoiquecondamnés à choisir entre laconversion et l'esclavage, selonla stricte interprétation de laloi, même les polythéistesfurent en fait tolérés, tandisque les musulmans étendaientleur domination à presque toutle sous-continent indien. Seull'incroyant complet - l'agnos-tique ou l'athée - ne rentraitpas dans le cadre de latolérance, mais généralementcette exclusion n'était appliquéeque lorsque l'outrage devenaitpublic et faisait scandale. (...)Lamême règle s'appliquait auxformes déviantes de l'islam.

Dans les temps mo-dernes, la tolérance musulmanes'est quelque peu réduite. " Lamontée en puissance des paysoccidentaux non musulmans acommencé, surtout à partir duXVIIe siècle, à menacer le senti-ment de supériorité du mondemusulman. "

Le danger représenté par la chrétienté n'était plus seulementmilitaire et politique; il commençait à ébranler les fondementsmêmes de la société musulmane. (...)

L'ancien ordre pluraliste, multiconfessionnel et pluri-eth-nique craquait de toutes parts; le contrat social sur lequel ilreposait était violé par les deux parties. Gagnées à l'idéal occi-dental d'autodétermination, les minorités chrétiennes n'étaientplus disposées à accepter le statut de sujets tolérés maisinférieurs que leur concédait l'ordre ancien et faisaient entendrede nouvelles exigences: l'égalité des droits au sein de la nation,ou le droit à l'indépendance nationale (...). Se sentant en dan-ger mortel, la majorité musulmane avait de plus en plus de malà leur accorder ne fût-ce que le degré de tolérance qui avaittoujours été le sien. Triste paradoxe, dans certains Etats-nationsà demi laïcisés de l'époque moderne, si sur le papier elles jouis-sent d'une complète égalité de droits, dans les faits les minoritésnon musulmanes se heurtent à des obstacles et à des dangersbeaucoup plus grands que sous l'ordre ancien, musulman maispluraliste. " (pp. 158-159)

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

" L'attitude de Mahomet envers les juifs à Médine allait pesertrès lourd sur le droit musulman futur et les dispositions concer-nant les dhimmis - les protégés juifs et chrétiens.En 640, le deuxième calife, Omar Ibn al-Khattâb, chassa les juifset les chrétiens, exauçant ainsi le désir exprimé par le prophète :" Deux religions ne doivent pas coexister en Arabie. " Un siècleaprès la mort du prophète de l'Islam, les jurisconsultes musul-mans fixèrent le sort des juifs et des chrétiens des pays conquisen s'appuyant sur les révélations du Coran mais aussi sur lecomportement de Mahomet à Médine. Le principe de " protec-tion " se traduisit par des impôts que devaient payer les juifs etles chrétiens : une capitation (jizya) et un impôt foncier(kharaj). Cela représentait le rachat à la communauté du droitde vivre du non-musulman en terre d'Islam. (…) Trop longueserait la liste des interdictions et des humiliations découlant dece rapport protection-rançon. Interdiction de posséder deslivres religieux musulmans, d'en discuter avec des musulmans,d'avoir des serviteurs musulmans, car un musulman ne sauraitêtre soumis à un non-musulman. Le mariage et les relations sexuelles d'un juif ou d'un chrétien avec une musulmane étaientpunis de mort… " (p. 50-51)

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ISLAM ET APOSTASIE

Leïla BABES , " Incroyance,apostasie et hérésie ", in :Panoramiques, n° 50, 1ertrimestre 2001, pp. 106-111),

Dans le Coran, XVI,106, l'apos-tat est menacé d'un châtimentqui n'aura lieu que dans l'autremonde; mais, selon la tradition,Ibn Abbas transmet cette paroledu prophète: "Tuez celui quichange de religion." Coran, II,217 : " Qui d'entre vous apos-tasierait, qu'il périsse en tantque dénégateur ! Ceux-là, leursactions crèvent d'enflure dansce monde et dans la viedernière. ". " Le Coran n'ac-compagne cependant cette con-damnation par aucune peineparticulière [sauf de " périr "!],en vertu du principe selonlequel la foi, comme tout cequi concerne le for intérieur, estdu domaine exclusif de Dieu.Or, le droit musulman prévoitla peine de mort pour l'apostat,se basant en cela sur deuxhadiths dont l'authenticité n'estpas avérée. (...) Le premierhadith, qui dit " celui quichange de religion, tuez-le ", estrapporté par Bukhari, mais nonpar Muslim (les deux grandsexégètes consacrés par la tradi-tion sunnite). (...) Le deuxièmehadith parle de l'apostat quirompt avec sa communauté, cequi introduit un élément deconflit et de rébellion, et donne

à la question toute son ampleur politique. "(...) Le totalitarisme [dans la suppression des hérétiques et

apostats] n'est pas une simple dérive d'extrémistes, mais bienune tendance qui s'enracine dans une tradition politique et dessources théologico-canoniques."

ISLAM ET MYSTICISME

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

" Le mysticisme, la mystique individuelle furent toujours proscritscomme totalement hérétiques. En effet, pour les juristes del'Islam, le Coran est avant tout un message d'ordre éthique etsocial. Or 'Ayn Al-Quzât Hamadanî, mystique persan du XIIème siècle, fut écorché vif, pendu et jeté au feu, le 7 mai 1131.(…) Son seul crime était d'être mystique. (…) Cet amour foupour Dieu, dans une relation privilégiée, individuelle, qui netient pas compte de la société, de la communauté, est le plusgrave des péchés car il apparente l'Islam au christianisme desermites. Ceux qui sont mystiques répandent le mensonge sur laterre.Mais l'Islam a cependant toléré les mystiques en groupe, dansdes confréries, des mystiques actifs… " (pp. 103-105)

CERTAINS MARTYRS AU SEIN DE L'ISLAM

Paul BALLANFAT, " Panorama de la Pensée musulmane ", in :Les nouveaux penseurs de l'Islam, cahier hors-série n° 54 duNouvel Observateur (avril-mai 2004), pp. 14-17

Plusieurs grands théologiens soufis ont été exécutés en raison deleur " déviance " religieuse : " Husayn Al-Hallaj, décapité à Bagdad le 27 mars 922Ayn al-Qudat Hamadani, martyrisé en 1131Shihab al-Din Yahya al-Suhrawardi, exécuté le 29 juillet 1191 àl'âge de 36 ansLe prince Dara Shikuh, exécuté en 1659 à cause de sa volontéde donner une place à la spiritualité hindoue.

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RELIGION ET DROITSDE L'HOMME

Rachid BENZINE, op. cit. 3

Selon Abdul Karim Soroush,"Les droits politiques font partiedes droits attribués auxhumains, et ils forment unpréalable à la foi car la foi nepeut être imposée contre lavolonté de l'individu. Lesvaleurs centrales de la démo-cratie que sont la justice et laliberté sont extrareligieuses,même si elles doivent êtresoutenues par le systèmereligieux. La nature de l'Etat, lesvaleurs et les modes de gou-vernement pour administrer la viepublique, ne sont pas affaire de jurisprudence religieuse maisrelèvent de la philosophie poli-tique. Tout ce qu "on peut trou-ver dans la religion à leur sujet,notamment dans le fiqh, est "minimaliste, contingent. Pourêtre compatible avec la démo-cratie, l'approche religieuse abesoin d'accepter comme pri-mordiales les valeurs de larationalité, de la justice, de laliberté, des droits del'homme… " Soroush précise : " Les musul-mans ont toujours parlé desdevoirs de l'homme : nousdevons aussi parler des droits.(…) Sommes-nous nos propresmaîtres, ou sommes-nousprédéterminés à certains com-portements ? Ce n'est pas unequestion à laquelle vous

pouvez répondre par la doctrine. Vous devez décider si vousêtes une personne libre ou si vous êtes programmé. De lamême façon, l'idée des droits de l'homme se discute en dehorsde la religion parce qu'elle précède la croyance. Avant de suivreune religion particulière, la liberté d'exercer cette option doitvous être ouverte. " (pp. 79-81)

INTEGRISME ET DROITS DE L'HOMME

Rostane MEHDI, Rapport introductif à la Conférence sur leDialogue interculturel, organisée par la Commissioneuropéenne, 20-21/03/02

" La prégnance des préceptes religieux est absolue [chez les inté-gristes], car ils étalonnent tous les droits et libertés énoncés.L'attribution de droits s'effectue donc par référence à une appar-tenance exclusivement religieuse et selon un raisonnement sub-stantiellement discriminatoire. Toute cette construction reposesur l'idée centrale que les hommes devront être distingués sur labase de leur religion et soumis de ce fait même à des régimesque l'on sait éventuellement différenciés. Cet étrange paradoxequi consiste à n'accorder de droits à l'homme que restrictive-ment " situé " traduit le refus de la prévalence de normesmatériellement universelles sur des normes formellement sin-gulières dans leur expression mais d'essence divine dans leursoubassement. Si un conflit vient à surgir, il ne peut naturelle-ment être dénoué qu'au profit des secondes, les seules à puiserleur autorité dans la transcendance divine. " (p. 91)

LA DECLARATION UNIVERSELLE ET LES PAYS ISLAMIQUES

Henri WIBAULT, op. cit.

" Lorsqu'il fut question de discuter de projets de textes de laDéclaration universelle de 1948, il n'y avait guère d'Etats de cul-ture musulmane, membres des Nations Unies. Il y avait trèspeu de pays de culture musulmane à être des Etats indépen-dants, condition première pour être membre des Nations Unies.

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4. Islam et droits de l’homme

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Dans le cadre des discussionspréparatoires de ce qui allaitdevenir la Déclaration de 1948,l' Irak et la Syrie, ainsi que lePakistan et l'Afghanistan,avaient présenté un amende-ment. Celui-ci ne visait pas àinterdire la religion ou la con-viction de chacun, mais bien lechangement de religion ou deconviction par un individudéterminé [apostasie]. Cetteproposition visait, bien enten-du, à transposer dans le projetde texte des conceptions pro-pres à l'islam.

A l'époque néanmoins, ces Etatsadoptèrent, lors du vote finalportant sur l'ensemble du texte,la disposition actuelle de laDéclaration faisant mention dudroit pour chaque être humainde changer de religion. Cettedisposition était l'une de cellesqui instaurait clairement le rôleprééminent de l'autonomie del'individu vis-à-vis de son Etatet de la société, conçue commeune obligation communautairedans ce domaine profond desreligions et des convictions.Cette difficulté en terre d'islamexiste toujours, dans la plupartdes milieux religieux etphilosophiques totalitaires etbien entendu dans les milieuxislamistes qui s'opposent àplusieurs principes des droits del'homme de la Déclaration de1948. (…). Une telle probléma-tique avait déjà été soulevéepar le Brésil lors des travaux

[préparatoires] de la Déclaration de 1948. Ce que l'on saitmoins c'est que le rejet de cette proposition est venu d'Asie. Le représentant de la Chine, qui n'était pas encore communisteà l'époque, fit remarquer qu'une telle référence ne correspondaitpas à la culture de son pays. Une proposition qui fut aussi faitepar l'Inde. Il n'est donc pas historiquement exact d'affirmer queles droits de l'homme de 1948 aient été élaborés dans un con-texte culturel strictement occidental. Assez curieusement, onvoit souvent des milieux européens considérer que les droits del'homme de 1948 relèvent de la culture européenne et, enmême temps, refuser de reconnaître que déjà, dans laDéclaration de 1948, la présence de l'Asie, largement extrin-sèque aux trois monothéismes, est effective. La Déclaration de1948 s'avère avoir été plus pluraliste et planétaire qu'on ne lepense. Elle se voulait, en effet, d'esprit universel...

Il n'en demeure pas moins que le monde musulman était trèsfaiblement représenté aux Nations Unies en 1948. Par ailleurs,en raison de l'inscription d'un droit pour tout individu, dechanger de religion, l'Arabie saoudite décida de s'abstenir.Cette prise de position passa quasi inaperçue à l'époque, dumoins dans les milieux non musulmans. Quant au Yémen, il neparticipa pas au vote. La question musulmane de l'apostasieétait au cœur de ces refus du texte de la Déclaration [qui futquand même votée par l'Egypte, le Liban et la Syrie, selonMohammed Charfi].

L'importante question du droit, pour une personne, de changerde religion ou de conviction fut abordée, de nouveau, à l'occa-sion des travaux qui devaient conduire à la Déclaration de 1981sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discri-minations fondées sur la religion et la conviction. Les travauxpréparatoires de cette Déclaration furent particulièrement ardus.(…) L'Assemblée générale avait, en effet, pris sa décision d'abor-der une Déclaration dans ce domaine dès 1962. La Déclarationde 1981 reprend, dans son article premier, le texte de l'article 18de la Déclaration universelle, sauf précisément le droit de toutindividu à changer de religion et de conviction.

Faut-il en conclure que le droit de changement de religion oude conviction ait été remis en cause à cette occasion?

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M. Abdelfattah Amor,Rapporteur Spécial de laCommission des droits del'homme depuis 1995, tient àsouligner, à nouveau, que ledroit de changer de religion entant que dimension juridique-ment nécessaire est impliquéepar la liberté religieuse.

Le Rapporteur spécial avaitrésumé son argumentaire dansles points 70 à 79 ci-dessous. Point 70. La Déclaration uni-verselle des droits de l'hommede 1948 a posé, en son article18, le principe selon lequeltoute personne a droit à la li-berté de pensée, de conscienceet de religion et, en termesclairs, a précisé que ce droitimplique la liberté de changerde religion ou de conviction,ainsi que la liberté de mani-fester sa religion ou sa convic-tion, seul ou en commun, tanten public qu'en privé, par l'en-seignement, les pratiques, leculte et l'accomplissement desrites.

71. La Convention interna-tionale sur l'élimination detoutes les formes de discrimina-tion raciale de 1965 et le Pacteinternational relatif aux droitscivils et politiques de 1966,tout en s'inscrivant directementdans le prolongement de laDéclaration de 1948, n'ont pasrepris explicitement le droit dechanger de religion.

72. L'article 18 du Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques reconnaît de manière générale le droit d'avoir oud'adopter une religion de son choix.

73. La Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'in-tolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la con-viction de 1981 admet, elle aussi, de manière générale, la libertéd'avoir une religion ou n'importe quelle conviction de sonchoix. Elle ne spécifie pas, tout comme le Pacte internationalrelatif aux droits civils et politiques, de manière formelle etexplicite, le droit de changer de religion, sans que cela puisseêtre analysé comme l'expression d'une volonté d'atténuer lateneur des dispositions de la Déclaration de 1948.

74. La Conférence de Vienne sur les droits de l'homme ( juin1993 ), tout en reconnaissant les préoccupations tenant aux spé-cificités et en appelant aux législations nationales, a affirmé avecforce l'universalité des droits de l'homme.

75. Les variations formelles, qui ont entouré la reconnaissanceet le développement de la liberté religieuse, ne peuvent pasconduire à la méconnaissance du droit de changer de religion.

76. Finalement, on constate des variations multiples sur unthème unique. Ces variations ont fait douter des fondements dela liberté religieuse et ont conforté la position de ceux qui esti-ment que la liberté religieuse ne peut aller jusqu'à la reconnais-sance du droit de changer de religion.

77. Il est établi, aujourd'hui, que la liberté religieuse est indisso-ciable de la liberté de changer de religion.

78. Déjà, en 1986, Elisabeth Odio Bénito écrivait, en ce quiconcerne les dispositions des déclarations de 1948 et de 1981,ainsi que celles du Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques, que tout en étant libellées différemment, ellestendaient, finalement, toutes au même objectif, à savoir quetoute personne avait le droit d'abandonner une religion ou uneconviction et d'en adopter une autre ou de n'en adopteraucune. C'est, ajoutait-elle, le sens implicite de la notion dedroit à la liberté de pensée, de conscience, de religion et deconviction, quelle que fut la forme sous laquelle se présentaitcette notion.

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79. Le comité des droits del'homme, dans son ObservationN°22 ( 48 ) du 20 juillet 1993sur l'article 18 du Pacte interna-tional relatif aux droits civils etpolitiques, aboutit à la mêmeconclusion. Le Comité faitobserver, en effet, que la libertéde choisir une religion ou uneconviction, comprend notam-ment le droit de substituer à saconviction actuelle une autreconviction ou d'adopter uneposition athée, ainsi que ledroit de conserver sa religionou conviction.

La Conférence de Vienne

En 1993, la question des droitsde l'homme fut globalementrediscutée par la Conférencemondiale des droits del'homme. Le thème de droits del'homme spécifiquementislamiques et de droits del'homme spécifiquement asia-tiques furent au centre desdébats. Finalement, après delongues discussions, les disposi-tions de la Déclaration uni-verselle furent acceptées à nou-veau par un consensus de tousles Etats membres des NationsUnies, y compris donc l'ArabieSaoudite et le Yémen.

La Déclaration de Vienne con-tient notamment les affirma-tions suivantes:-Le caractère universel de cesdroits et libertés est incon-testable (I.1 )

-Tous les droits de l'homme sont universels, indissociables, inter-dépendants et intimement liés ( I.5 )-La démocratie est fondée sur la volonté, librement exprimée,du peuple qui détermine le système politique, économique,social et culturel qui sera le sien et sur sa pleine participation àtous les aspects de la vie de la société ( I.8 ) "

DROITS ET OBLIGATIONS

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

Pour les musulmans, " l'homme n'est pas, par lui-même, sujet dedroits. Cette conception de l'homme sans relation à Dieu, quipourrait avoir des droits simplement parce qu'il est homme, estinconcevable et insupportable pour l'Islam. C'est le fait d'êtrecroyant musulman qui lui donne le droit d'être respecté. " (p.107)

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Si, sur le fond, l'exposé de l'universalité des droits humains nefait pas de problème, c'est davantage les modalités de leur for-mulation et de la structure de leur exposé qui peuvent être dis-cutées : la conscience musulmane aurait naturellement ajouté,avant l'énoncé des droits universels, une série d'articles contrai-gnants sur les responsabilités et les obligations des êtres humains. "(p. 41)

LES DROITS DE L'HOMME ET LA SHARI'A

Henri WIBAULT, op. cit.

" Les droits de l'homme constituent donc un problème sur cer-taines questions dans le cadre de l'islam. Cette situation a con-duit à la rédaction de déclarations islamiques des droits del'homme. Il en existe plusieurs. La plus importante est laDéclaration des droits de l'homme en Islam rédigée au niveaudes Ministres des affaires étrangères des pays de l'Organisationde la Conférence Islamique (OCI- OIC en anglais) Cette déclara-tion a été proclamée au Caire le 5 août 1983.

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Ce texte énonce un ensemblede droits tout en les soumettantaux principes de la shari'a parle biais notamment de deuxarticles balais en fin de déclara-tion.

Article 27. Aucun des droits etlibertés prévus dans ce docu-ment ne doit porter préjudicelors de son exercice. Ils sontsoumis aux dispositions de laShari'a islamique ainsi qu'auxobjectifs de celle-ci.

Article 28 La Shari'a islamique,dans ses sources essentielles etaccréditées, est la seuleréférence pour expliquer ouéclaircir tout article de ce docu-ment en cas de différends dansl'interprétation; la seuleréférence est celle des expertsen la matière.

Le problème posé par l'islamrésulte généralement de ce queles positions contraires auxdroits de l'homme sont justi-fiées par une référence à lashari'a islamique et/ou par desconceptions islamiques de l'Etatqui remontent en principe à laprise de Médine en 622, datechoisie par Omar 1er pour fairedébuter l'an I de l'ère lunairehégirienne. Les textes islamiquesen matière de droits del'homme reviennent le plussouvent à présenter les idéestraditionnelles sous une formejuridique internationale ( arti-cle, paragraphe, etc. ).

Les auteurs musulmans considèrent souvent que le texte de laDéclaration de 1948 et autres textes similaires n'ont pas de forceobligatoire. Mais, lorsqu'il apparaît, avec le temps, que certainesdispositions acquièrent la force d'un droit positif, un autre pro-blème apparaît.Quelle est la justification de ce droit positif ? En effet, si ce droitpositif est manifestement une création liée à l'histoire, il perd deson efficacité aux yeux de certains.Or, il est de plus en plus difficile de contester le processus mani-festement historique de la mise en oeuvre des droits del'homme. Le problème dépasse le fait d'un accord sur un droit,il porte sur le fondement de celui-ci. Une telle interrogationn'est pas propre au monde musulman, même si elle se pose enpratique particulièrement dans celui-ci. Le refus musulman del'histoire peut donc rencontrer le même refus dans d'autres cul-tures et bien entendu dans la culture européenne. Dans unetelle perspective, il semble utile de valoriser le facteur histoire .

Maududi se propose de restaurer les valeurs musulmanes touten acceptant la modernité. Il s'agit donc d'islamiser la moder-nité et de refuser une modernisation de l'islam. Ainsi, pour neciter qu'un exemple, Maududi rappelle à son lecteur les faits his-toriques suivants: les peines corporelles de la sharí'a ont été sup-primées en Inde par les Anglais dès 1791. En 1884, l'Egypte avaitadopté le code Napoléon. L'Albanie encore ottomane avaitsupprimé la polygamie sous l'influence européenne. La Turquieen avait fait de même pour les lois musulmanes sur le divorceet l'héritage. En fait, écrit Maududi, il n'y a plus que l'Arabiesaoudite et l'Afghanistan pour encore considérer la shari'acomme étant la seule loi pour un Etat musulman.

Maududi écrit: "The conservative approach, represented by theorthodox ulama, is unrealistic. It fails to take note of the factthat life is ever-changing. Historys moving ahead and the socie-ty is being molded into newer shapes. New situations are ari-sing, new relationships are being formed and new problems areemerging. It is imperative to take note of this change and seehow the tenets of Islam can be applied to these new condi-tions. It would be futile to try to put a brake upon change. Itwould be still more futile to ignore the change altogether anddo noting to meet its demands. This approach which fails tograpple with the problems of the day is bound to fail. It cannotbut drive religion out of the flux of life and confine it to the

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sphere of private life. Andwhen an estrangement is affec-ted between religion and life,then even the private life can-not remain religion-preserved."( 11 ).

Toujours selon Maududi, dansun tel Etat musulman, personnene peut considérer comme per-sonnelle et privée une partie desa sphère d'activité. Considérésous cet aspect, écrit Maududi,l'Etat islamique peut, d'une cer-taine manière, être comparéaux Etats [totalitaires], fascisteset communistes. En effet, l'Etatislamique se pose comme étantl'Etat de l'islam et a pour objec-tif son établissement.Néanmoins cet Etat ne peutêtre uniquement perçu demanière idéale. Il applique saloi sur un territoire. La Vice-Régence sur ce territoire estconfiée à la seule communautémusulmane. En conséquence,seules les personnes en accordavec l'idéologie de l'Etatislamique, les seuls musulmans,ont la charge de participer à sadirection. Les non-musulmanssont dispensés de cette charge.Ils bénéficient, malgré tout, del'avantage d'une protection dela part de la communautémusulmane. Mais, en échangede ce service, ils se doiventd'acquitter un impôt spécial.

La position de Talbi est mar-quée par sa reconnaissance,non seulement de la réalité

mais aussi de la valeur du pluralisme. Citons: " La question dupluralisme, pourtant imposée par la réalité, est par exempleencore un tabou pour certains. " L'islam affronte aujourd'hui ledéfi du pluralisme, qui est lié à la question de la shari'a face àla cité. Dès lors, il se prononce pour l'abrogation du statut del'islam comme religion d'Etat en Tunisie. Il considère aussi que lestatut de la dhimmia est historiquement obsolète, il se prononceen conséquence pour l'abrogation de l'article 1er de la constitu-tion tunisienne au motif qu'il n'y a pas à entériner une confu-sion entre umma et Etat. Pour Talbi, l'umma est une réalité mys-tique et n'a pas à appliquer une législation sur un territoire. Lapositition de Talbi s'avère donc antithétique à celle de Maududi,dont il récuse les positions, ainsi qu'à celles des ulémas d'ElAzhar pour qui toute mise en cause de la shari'a constitue unebida ( hérésie ).

Talbi2 aborde deux questions particulièrement cruciales auregard des droits de l'hommes actuels, celles des dhimmis et del'apostasie. Il reconnaît qu'historiquement la situation des dhim-mis se détériore à partir du règne de al-Mutawakkil ( 847-861),pour atteindre un paroxysme sous le règne de al-Hakim (996 -1021). Talbi prend aussi position sur la question de l'apostasie.Le hadith autorisant la peine de mort n'est pas à proprementparlé mutawatir . Selon Talbi, ce hadith n'engage par con-séquent personne selon le système traditionnel du hadith. Deplus, ce hadith peut et doit être remis en cause dans une pers-pective actuelle. Il se pourrait même, ajoute Talbi, qu'il ait étéfabriqué de toute pièce, peut-être sous l'influence du Lévitiqueet du Deutéronome par l'intermédiaire de juifs et de chrétiensconvertis à l'islam. Mohammed Talbi se prononce, sur base decette analyse, pour la liberté religieuse. Cette liberté ne cons-titue nullement une récusation de l'islam dans sa véritéthéologique (13)

La Tunisie est le premier pays du monde arabe à avoir abolil'esclavage en 1846. Mais, de manière amusante, comme Belaïdtient à le mettre en évidence, le Préambule du décret beylical -pris après consultation des muftis de rite hanéfite et malékite -déclare que l'esclavage est, dans son principe, parfaitementlégitime. Toutefois, compte tenu des circonstances, il ne peutplus se justifier dans les nouvelles conditions de vie de lasociété! "

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2Mohamed Talbi, Plaidoyer pour un Islam moderne, (Desclée De Brouwer, 1998)

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LIBERTE ET JUSTICE

Bernard LEWIS, op. cit.

"Dans le discours islamique clas-sique, le contraire de la tyran-nie n'était pas la liberté mais lajustice. Et, dans ce contexte, lajustice signifiait essentiellementdeux choses: que le souverainétait légitime et non un usurpa-teur, et qu'il gouvernait confor-mément à la loi divine ou dumoins conformément à desprincipes juridiques et morauxreconnus." (p. 75)

LA PEINE DE MORT

Farid ESACK, Coran, Moded'emploi, (Paris, Albin Michel,2004)

Selon le Coran (XVII, 70) " toute vie humaine est sacrée, etpersonne n'est autorisé à pren-dre la vie d'autrui, si ce n'est àbon droit (VI, 151). Ce point esthabituellement interprétécomme voulant dire qu'il estpermis de tuer pendant uneguerre juste, pour se défendreou après une procédure dejugement en bonne et dueforme dans un systèmejuridique juste. [C'est-à-dire laseule chari'a, fondée sur leCoran et la Sunna ?].L'affaiblissement causé à l'hu-manité entière par le meurtred'une seule personne est mis enavant (Coran V, 32).

Conformément aux pratiques sociales de l'Arabie préislamique,le Coran reconnaît la loi du talion en cas de meurtre et desautres blessures aux membres. Il précise cependant que cela doitêtre fait avec justice, et que l'exonération de la sentence demort est une " source de miséricorde venant de Dieu " (CoranII, 178). " (pp. 255-256)

Henri WIBAULT, op. cit.

" L'Arabie saoudite et l'Iran appliquent la peine de mort et exer-cent une influence en ce sens sur divers pays de culture musul-mane. Ces deux pays sont responsables, avec la Chine et lesEtats Unis, de 85% des peines de mort résultant d'une décisiondes autorités publiques.

Dans le domaine de la peine de mort, l'Islam rencontre des dif-ficultés qui lui sont propres. En effet, le droit musulman prévoitla peine de mort dans différents cas et notamment en cas d'a-postasie du fidèle musulman. Dans le cas d'une fatwa lancée parun dignitaire religieux musulman, il peut arriver que soit annon-cé publiquement que l'assassinat de telle ou telle personne neconstituera pas une action punissable et qu'elle sera même unebonne action.

Ainsi, suite aux propos tenus par le pasteur américain protestantbaptiste Farewell - celui-ci a récemment affirmé que le ProphèteMahomet n'était finalement qu'un terroriste - ces propos ontfait l'objet d'une analyse par plusieurs membres du clergé shiiteiranien. Pour Mohsen Mojtahed Shabestari, qui a pris la paroleà ce sujet à Tabriz le vendredi 11 octobre 2002, Farewell est unmercenaire et doit être tué : " La mort de cet homme est undevoir religieux, mais ce cas ne doit pas être lié à la commu-nauté chrétienne " ( voir l'article de Hussein Dakroub, journa-liste d'Associated Press, 12 oct. 2002 ).

Ce cas montre que la peine de mort peut être associé en islam àune fatwa (…) Le système de la fatwa constitue une particula-rité théologique propre à la religion musulmane .Elle témoigneaussi du fait spécifique que l'islam n'est pas une religion forte-ment structurée sur le plan organisationnel. Toutefois, le lance-ment d'un droit de tuer un individu par le biais d'une fatwa estfortement critiqué par certains auteurs musulmans.

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Il en est de même dans le casde pratiques comme l'excisiondes femmes, ou des amputa-tions des membres. Ces pra-tiques sont considérées commedes traitements inhumains etdégradants.

ISLAM ET EGALITE

Farid ESACK, op. cit.

" Le Coran adopte le point devue selon lequel tous sontégaux devant Dieu et devant laloi. Aucun être humain ne sedistingue par une supérioritéintrinsèque vis-à-vis des autressur la base de la lignée ou de larace. Il reconnaît et tolèrepourtant la différence, la dif-férenciation ou la discrimina-tion fondées sur le sexe, la reli-gion, la connaissance et lapiété. Etant donné que ces qua-tre catégories sont très impor-tantes, et que leur définition estdifficile à valider et à estimerempiriquement, il est douteuxqu'on puisse réellement utiliserle Coran comme une normepour justifier les conceptionscontemporaines sur l'égalitésociale et les droits de l'homme. "En effet, si le Coran contientdeux versets affirmant l'égalitéoriginelle de tous les humains(IV, 1 et IL, 13), il " contientégalement une foule d'injonc-tions détaillant les façons dif-férentes de traiter les esclaveset les personnes libres, les

hommes et les femmes, ceux qui appartiennent à la commu-nauté des croyants et ceux qui sont en dehors, ceux qui saventet les ignorants. " (pp. 259-260)

Mezri HADDAD, op. cit.

Hadith: "Les hommes sont égaux entre eux comme les dents dupeigne; pas de différence entre un blanc et un noir, entre unarabe et un non-arabe, si ce n'est par leur degré de piété." p.126Hadith: "S'il m'était donné d'ordonner à quelqu'un de seprosterner devant quelqu'un d'autre que Dieu, j'aurais assuré-ment ordonné à la femme de se prosterner devant son mari."Voir aussi Coran, IV, 38, V, 6, XXXIII, 30-31.

Ghassan ASCHA, Du statut inférieur de la femme en Islam,(Paris, L'Harmattan,1987)

[Ceci est l'ouvrage scientifique de base en la matière. Il exposesi complètement l'inégalité de statut de la femme en islam, parrapport à l'homme, dans les sources coraniques et la réalitésociale, qu'il faudrait presque le citer en entier. Il démontre aussil'hypocrisie des auteurs musulmans qui, en dépit de l'évidencedes textes et des faits, prétendent que l'islam a libéré la femmeet lui a concédé l'égalité.]

Fethi BENSLAMA, La psychanalyse à l'épreuve de l'Islam, (Paris,Aubier, 2002)

" La construction métapsychologique de l'islam (…) paraît han-tée par une contradiction paroxystique entre un féminin quiaffole l'identité masculine et en même temps qui lui permetd'entendre raison, en assurant son ouverture au Tout-Autre.L'ampleur qu'a prise la mystique en islam (…) nous semble cor-respondre à la tentative de répondre à (de) cette contrainte, àlaquelle est confronté le narcissisme masculin. Elle est l'aventured'une recherche par le féminin en soi comme voie d'accès àcette essence de l'absence qui est le désir de l'Autre. Le soufismea ouvert à l'expérience de soi un vaste désert où la jouissancephallique théologique épuise ses repères et rencontre l'exil

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langagier du manque de Lui(huwa), là où son institutionrendait la femme coupable dece manque (cfr. Le hadith : " Lesfemmes manquent de raison etde religion.) " (p. 253)

Farid ESACK, op. cit.

"En général, on perçoit une ten-dance très forte à l'égalitarismequand le Coran traite desresponsabilités éthiques etreligieuses et de la rétributiondes croyants, et une tendancediscriminatoire quand il s'agitdes obligations sociales etjuridiques des femmes. (…) Ontrouve des déclarations denature générale aussi bien pouraffirmer que pour nier l'égalitédes sexes et, ensuite, quand desinjonctions spécifiques sonténoncées, elles sont en généraldiscriminatoires pour lesfemmes.En matière sociale ou juridique,le Coran procure un ensembled'injonctions et d'exhortationsoù les femmes sont habituelle-ment et en même temps infan-tilisées et misessur un piédestal - afin d'êtreprotégées, et économiquementassistées par les hommes, maisaussi réprimandées et punies sielles désobéissent. " (pp. 265-266)

La question du " voile islamique "

Cheikh Khaled BENTOUNES, " La musulmane est libre de sevoiler, mais ce n'est pas une obligation religieuse ", in : LeMonde des Religions, n°1 (sept.-oct. 2003) : Les rénovateurs del'Islam, (p. 33)

" La première évocation du voile se trouve dans le Coran (LIX,3 ?) : " Prophète, dis à tes épouses, à tes filles, aux femmes descroyants de revêtir leur mante (djilbab) : d'échapper à touteoffense. " (…) A notre époque, le mot djilbab (vêtement) esttotalement méconnu. Et l'on ignore le plus souvent que leCoran a parlé du djilbab et non du hidjab qui signifie voile,rideau. Le mot hidjab se trouve dans la sourate concernant lesfemmes du Prophète (Coran XXXIII, 53). A l'époque, la maisonet la mosquée du prophète Mohamed communiquaient, seule-ment séparées par un rideau. Le verset spécifie de tirer le hidjab(rideau) afin de préserver l'intimité des femmes et celle duProphète, marquant ainsi une nette séparation entre la vieprivée et la vie publique. A l'origine le mot hidjab désigne doncun rideau et il a fini par s'appliquer à un vêtement aux couleursidéologiques que l'on sait.A aucun moment il n'est mentionné dans la chari'a la moindresanction à l'encontre de celles qui ne portent pas le voile. (…)Lors du pèlerinage à La Mecque (…), au cours duquel hommeset femmes se côtoient, il est exigé que la femme enlève sonvoile. "

Fethi BENSLAMA, op. cit.

" Le voile est devenu l'un des emblèmes de la conquête de l'es-pace public par l'islamisme. " (p. 196)

" … L'interdit du voile trouve sa raison dans la menace la plusgrave que fait courir l'extrémité du désir humain sur l'ordresocial. L'énoncé [du Coran] suppose, certes, une incriminationde la femme, de sa beauté ou de sa monstration ; mais il nerecèle pas moins l'indication d'une position passive de l'homme-pupille qui serait, en quelque sorte, incapable de maîtriser safocale. (…) Tel un orifice visuel incontrôlable, [l'homme] estpénétrable par les monstrations féminines qui le possèdent et lesubjuguent, au point de lui faire oublier sa loi. " (p. 211)

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Hasan BOUSETTA, in : Compterendu du colloque de laFondation Roi Baudouin sur " Ceci n'est pas un voile ",

30/03/04, p. 8

" Il est symptomatique de con-stater que les écoles où la ques-tion du voile s'est posée avec leplus d'acuité sont des établisse-ments où se concentre unepopulation très défavorisée. Onpeut dès lors penser que lefoulard islamique est instrumen-talisé par une partie de lajeunesse : il ne revêt pas néces-sairement une significationreligieuse, mais traduit plutôtun malaise identitaire provoquépar une précarité socio-économique. "

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en particulier, sens du DJIHAD

FONDEMENTS DE L'AGRESSIVITE HUMAINE

Erich FROMM, La Passion deDétruire (Anatomie de ladestructivité humaine), traduc-tion française, (Paris, RobertLaffont, 1975)

Selon Fromm, il faut distinguerl'agressivité défensive et l'agres-sivité destructrice (ou " destruc-tivité ". L'agressivité défensive(dite bénigne) est innée ; elleest répond aux besoins desurvie de l'individu ou dugroupe.L'agressivité destructrice (ditemaligne), elle, est d'origine cul-turelle. " L'agressivité humainene serait pas due à un plusgrand potentiel d'agressivité[que les animaux], mais au faitque les conditions productricesd'agressivité seraient beaucoupplus fréquentes pour leshumains que pour les animauxvivant dans leur habitatnaturel. (…) La destructivité etla cruauté peuvent faire éprou-ver [à l'homme] un profondsentiment de satisfaction ; desmasses humaines peuventsoudain être saisies par la soifdu sang. Des individus et desgroupes peuvent avoir unestructure de caractère qui leurfait espérer avec impatience - ou même créer - des situationsqui leur permettent d'exprimerleur besoin de destructivité. "(pp. 201-202)

" L'agressivité maligne n'est donc pas indéracinable (…) ; elle estplus qu'un modèle acquis de comportement, qui est prêt à dis-paraître aussitôt que de nouveaux modèles seront créés. " (p. 203)" La destructivité vindicative est une réaction spontanée à unesouffrance intense et injustifiée infligée à une personne ou à desmembres d’un groupe. Ce type d'agressivité diffère de deux façonsde l'agressivité défensive, normale : 1) elle intervient après quele dommage a été causé et, par conséquent, n'est pas unedéfense contre un danger menaçant. 2) Elle est beaucoup plusintense et souvent, elle est cruelle, libidineuse et insatiable. Lelangage exprime de lui-même cette qualité de la vengeance parl'expression " soif de vengeance ". (…) L'homme semble prendrela justice en main quand Dieu ou les autorités séculières sontdéfaillantes. (…) L''acte de vengeance peut être son plus grandmoment, précisément à cause de cette élévation de son propremoi. " (pp. 285-287)

Agressivité, narcissisme et fanatisme

" L'individu narcissique éprouve souvent un besoin de sécurité àpartir de la conviction, totalement subjective, qu'il a de sa per-fection, de sa supériorité sur les autres, de ses extraordinairesqualités (…) Il a besoin de s'en tenir à l'image narcissique qu'ilse fait de lui-même et sur laquelle il fonde le sentiment de savaleur aussi bien que de son identité. Si son narcissisme estmenacé, il se sent lui-même menacé dans une zone d'impor-tance vitale. Quand des tiers blessent son narcissisme (…), lenarcissique réagit d'ordinaire par une colère ou une rage inten-ses qu'il ne montre pas forcément et dont il n'est pas toujoursconscient. (…) Il éprouve souvent un désir de vengeance quiserait beaucoup moins violent si c'était son corps ou ses biensqui étaient attaqués. " (p. 217)

" Dans le narcissisme de groupe (…) affirmer que " mon pays ",ou " ma nation ", " ma religion ", est le plus cultivé, le plus puis-sant, le plus pacifique, etc. ne semble pas dément ; au contraire,ce langage sonne comme l'expression du patriotisme, de la loy-auté, de la fidélité. Il semble aussi porter un jugement de valeurréaliste et rationnel, parce qu'il est partagé par de nombreuxmembres du même groupe. Le narcissisme de groupe (…) favorise d'abord la solidarité et lacohésion du groupe et il facilite les manipulations en faisantappel aux préjugés narcissiques. En outre, il est très important

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5. Islam et pacifisme / violence

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en tant qu'élément susceptiblede procurer des satisfactionsaux membres du groupe, et enparticulier à ceux qui ont peud'autres occasions de se sentirfiers et respectables. (…) Enconséquence, le niveau de nar-cissisme du groupe est propor-tionnel à l'absence de véritablessatisfactions dans la vie.(…) Lefanatisme est un trait caractéris-tique du narcissisme de groupe.Ceux dont le narcissisme se rap-porte à leur groupe plutôt qu'àeux-mêmes en tant qu'individussont tout aussi susceptibles quele narcissiste individuel ; ilsréagissent avec colère à lamoindre blessure, réelle ouimaginaire, infligée à leurgroupe. On peut même direqu'ils réagissent plus intensé-ment et certainement plus con-sciemment. " (pp. 218-219)" Le narcissisme de groupe est unedes sources les plus importantes del'agressivité humaine. " (p. 220)

VIOLENCE ET RELIGIONEN GENERAL

Rainer BRUNNER, op. cit.

" L'islam en soi n'est pas vérita-blement pacifique, il n'est pasnon plus véritablementbelliqueux - en réalité il n'a riende " véritable ". Car on peutsoupçonner que la lecture duCoran permet de justifier aussibien la tolérance que la vio-lence. L'islam n'est pas du tout

le seul dans ce cas. On peut faire appel à n'importe quelle reli-gion lorsqu'on a besoin de justifier la violence. (…) Toute reli-gion n'a jamais que la tolérance qu'accordent ses adeptes dansun lieu donné et dans des circonstances données. "

Jean FLORI, Interview dans Le Point du 22/04/04, pp. 61-62

" L'idée de guerre sainte se trouve pour la première fois exposéedans l'Ancien Testament : l'Etat d'Israël est une théocratie quijustifie le combat par les armes pour la défense du " peuple deDieu ". Mais, avec le message évangélique, le christianismeétablit une rupture radicale en prônant la non-violence. Laguerre sainte est le contraire du pacifisme du Christ et l'idée decroisade est totalement absente du christianisme originel. Enrevanche, l'appel au djihad guerrier, c'est-à-dire au combat parles armes pour l'expansion de l'empire musulman, fait partie desenseignements du Coran. Le djihad est le moteur de l'extraordi-naire expansion de l'islam au lendemain de la mort duprophète Mahomet, pendant tout le VIIIème siècle. La guerresainte appartient à l'islam originel, tandis que, pour le christia-nisme, elle est le fruit d'une révolution doctrinale. (…) Jusqu'auIXème siècle encore, lorsqu'un soldat chrétien tue un ennemi, ildoit faire pénitence. Le martyr est celui qui meurt sans sedéfendre. Or 2 siècles plus tard, combattre l'infidèle est devenuun acte de pénitence en soi. La croisade ne se contente plus delégitimer le combat pour la cause du christianisme : elle fait dela guerre sainte elle-même une action procurant indulgences etrécompenses spirituelles. (…) La sacralisation de la guerre saintes'est faite par petites touches successives, en partie par réactionau djihad. Rome ayant notamment été pillée par les musulmansau milieu du IXème siècle. (…) Les croisades sont d'abord uneentreprise de reconquête des lieux saints et des routes de pèleri-nage vers Jérusalem. Elles sont une riposte militaire à l'occupa-tion musulmane des terres chrétiennes et correspondent, auProche-Orient, à la Reconquista espagnole en Occident. "

TOLERANCE ET RESPECT EN GENERAL

Mohammed TALBI (et Gwendoline JARCZIK), op. cit.

" Je suis (...), non pas tolérant - je n'aime pas la tolérance que jetrouve infériorisante et insultante, une générosité de mauvais

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aloi en regard de l'autre - maisprofondément acquis à lareconnaissance de l'autre (...),c'est-à-dire le respect de cetautre tel qu'il est et qu'il désireêtre, et quel que soit ce désir.(...) Personne n'a à tolérer quique ce soit, mais chaque per-sonne a le devoir de recon-naître l'autre et de le respecter,de même chacun a le droitd'exiger le respect et la recon-naissance de l'autre. C'est à ceprix que l'humanité a quelquechance d'être vraimenthumaine, sans hypocrisie - unehumanité où les hommes s'ac-ceptent tels qu'ils sont, serespectent d'un respect pro-fond, d'un respect tel que,accordé à l'autre, il me revientà moi-même. Dès lors que je nerespecte pas l'autre, je donne àl'autre le droit de ne pas merespecter, ce qui aboutit à unesociété de conflits et de confla-grations. " (p. 69)

Certitude et agressivité :" ...L'intégrisme est une maladiede la foi, laquelle, par peur detrébucher, reste obstinément surplace et se réfugie dans lepassé, un passé souvent imagi-naire. " (p. 71)

" Toute certitude doit êtrevécue dans le détachement.C'est le correctif nécessaire pourque la certitude ne deviennepas agression et agressivité. (...)Les certitudes trop fortes sontdes certitudes maladives qui

font qu'on ne respecte plus l'autre. L'autre se trouve évincé aunom même de la certitude ou de la vérité. (...) Si je m'appro-prie cette vérité, si je transforme la certitude qui est mienne - etqui donc est subjective - pour faire d'elle la vérité pure et sim-ple, il y a aussitôt danger que soit supprimée d'abord toutepensée, et bientôt toute personne qui refuserait cette vérité. "(p. 77)

SOURCES CORANIQUES

Coran, II, 190-191 : " Combattez au sentier de Dieu ceux quivous combattent, mais ne soyez pas transgresseurs (…). Tuez-lesoù que vous les trouviez, chassez-les d'où ils vous chassaient. Lapersécution (des croyants) est pire que le meurtre. (…) S'ils vouscombattent, tuez-les, c'est le salaire des incroyants. (…) S'ilss'arrêtent, ne combattez plus, ne combattez que les coupables. "[Selon Bruno Etienne, " ces versets concernent le moment où leprophète va reconquérir La Mecque par la force contre sa pro-pre tribu : ils concernent les seuls Koraïchites qui l'ont trahi ! "]Coran, IV, 74 : " Que combattent dans le chemin d'Allah, ceuxqui troquent la vie immédiate contre la Vie Dernière. A ceuxqui combattent dans le chemin d'Allah, sont tués ou sont vain-queurs, Nous donnerons une rétribution immense. "Coran, IV, 89-90: "S'ils [les infidèles] tournent le dos [au lieu dese convertir], saisissez-les, tuez-les où que vous les trouviez. (…)S'ils se tiennent à l'écart, s'ils ne combattent pas contre vous etvous offrent la paix, Dieu ne vous donne aucun droit sur eux."Coran, V, 32 : " C'est pourquoi Nous édictâmes à l'intention desFils d'Israël que tuer une âme non coupable du meurtre d'uneautre âme ou de dégâts sur la terre, c'est comme d'avoir tuél'humanité entière, et que faire vivre une âme c'est comme defaire vivre l'humanité entière. "Coran VIII, 61 : " Et s'ils [les mécréants] inclinent à la paix,incline vers celle-ci [toi aussi] et place ta confiance en Allah… "Coran, IX, 7: "Tant qu'ils se montrent loyaux, agissez de mêmeenvers eux."Coran IX, 29 : " Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu niau Jour dernier, qui n'interdisent ce qu'interdisent Dieu et Sonenvoyé et qui, parmi ceux qui ont reçu l'Ecriture, ne suivent pasla religion du Vrai… "Coran, IX, 123 : " Croyants, combattez les incroyants qui sontdans vos parages, et qu'ils vous trouvent durs. "

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Coran, IX, 111 : " Certes, Allah aacheté des croyants, leurs per-sonnes et leurs biens enéchange du paradis. Ils combat-tent dans le sentier d'Allah : ilstuent et se font tuer. C'est unepromesse authentique qu'Il aprise dans la Thora, l'Evangileet le Coran. (…) Réjouissez-vous donc de l'échange quevous avez fait : et c'est là le trèsgrand succès. "Coran, X, 99 : " Si ton Seigneurl'avait voulu, tous ceux qui sontsur la terre auraient cru. Est-ceà toi de contraindre les gens àdevenir croyants ? "Coran, XVI, 126 : " Si vouschâtiez, châtiez comme on vousa châtiés. Mais si vous êtespatients, c'est mieux d'êtrepatient. "Coran, XVII, 33 : " Ne tuezpersonne. Dieu l'interdit, saufen juste cause. Quiconque esttué injustement, nous donnonsdroit de vengeance à sonproche, mais qu'il n'excède pasles limites du meurtre et il serasecouru. "Coran, XVIII, 29 : " Quiconquele veut, qu'il croie, etquiconque le veut, qu'ilmécroie. "Coran, XXII, 39-40 : "Combattre est permis à ceuxqui sont lésés, parce qu'ils sontattaqués (…), à ceux qui sont àtort chassés de leur maisonpour avoir dit : Notre Seigneurest Dieu. Si Dieu n'avaitrepoussé certains hommes pard'autres, les ermitages seraient

détruits, les synagogues, les oratoires, les mosquées où le nomde Dieu est invoqué si souvent, mais Dieu vient au secours deceux qui viennent à son secours. "Coran, XLVII, 4 : " Quand vous rencontrez des incroyants,frappez leur la nuque jusqu'à les abattre et liez les bien fort.Puis, quand cesse le fardeau de la guerre, libérez-les ou exigezune rançon. "Coran, LX, 8: "Dieu ne vous interdit pas d'être bons et justesenvers ceux qui respectent votre religion et ne vous chassentpas de vos foyers."Coran LX, 4: "Nous nous séparons de vous [idolâtres]. Quel'inimitié et la haine règnent entre nous jusqu'à ce que vousayez cru en un seul Dieu."Autres passages d'intolérance: Coran V, 72, VIII, 13-14 et 55, IX,7, LXIII, 23.Anti-sémitisme: Coran V, 6 et 65.Coran XVII, 4: "Quand vous rencontrez des infidèles, tuez -lesjusqu'à en faire un grand carnage et serrez les entraves des cap-tifs que vous aurez faits."

Selon Rudolph Peters (Jihad in Classical and Modern Islam,Princeton 1996), de tels versets (voir aussi Coran VII, 65 et 67,IX, 73 et 123, XXV, 52) ont été interprétés, du vivant duprophète, comme des commandements inconditionnels decombattre les incroyants et abrogeaient en quelque sorte lesversets précédents qui prônent une cohabitation avec les non-musulmans.

Farhad KHOSROKHAVAR, op. cit.

" Il existe donc dans le Coran des sourates contre la guerre etpour la paix comme il en existe pour le djihad et contre la paixperçue comme avilissante pour les croyants. C'est par la tradi-tion (sunna) et les récits attribués aux disciples immédiats duProphète (hadith) ou rapportés par des témoins plus ou moinséloignés et par le consensus des ulémas (idjma') que l'on pallie àl'absence de règles explicites à ce sujet. Les interprétationschangent avec les situations socio-historiques et l'appel au dji-had se transforme selon les circonstances historiques et l'émer-gence de nouveaux groupes plus ou moins combatifs.Le problème essentiel qui occupe les exégètes du Coran est demontrer la compatibilité de ces diverses sourates et leur

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hiérarchisation lorsqu'une con-tradiction semble en opposercertaines à d'autres. (…) Cettehiérarchisation signifie qu'untexte coranique ne doit pas êtrecité et appliqué sans précautionet indépendamment d'autrescitations et références.Il existe un consensus chez denombreux ulémas sur la naturedéfensive du djihad. Le pro-blème réside dans le fait que lesconditions restrictives (commel'attaque par les non-musul-mans ou leur oppression) peu-vent s'interpréter selon des pers-pectives différentes. Dans lescourants radicaux (…), ondonne un sens large à la répres-sion. Aussi, dans la périodecontemporaine, la présence desInfidèles sur la terre sainte deJérusalem ou en Arabie saou-dite est considérée comme uneagression de la part de certainsgroupes sunnites. De même, l'a-gression culturelle (tahâdjomfarhangi) par l'Occident contreles sociétés musulmanes estbrandie par les islamistes chiitescomme un casus belli. " (pp.30-32)

Bruno ETIENNE, op. cit.

" Si on lit le texte du Coranattentivement, on s'aperçoitque la violence n'est pasinhérente à l'islam. La réalité estplus complexe et plus nuancée,même si la religion musulmanesubit et inflige de grandes violences

dès son apparition. (…) On trouve un appel à la retenue dansla vengeance dans les sourates XVI, 126 et XVII, 33. "" Le suicide est interdit par le Coran et par plusieurs hadith. Uneopération suicide ne mène pas au paradis. Le suicidé ne peutpas être considéré comme témoin de la foi (chahid) car Dieuseul décide de l'heure. " (pp. 118-119)

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

" …Les versets " colériques " (…) contiennent de virulentesapostrophes, des malédictions prononcées dans la véhémence,des menaces redoutables, des invectives, des expressions vin-dicatives, tout ceci pour semer la terreur chez les ennemis del'Islam. " (p. 37)

Abdelwahab MEDDEB, op. cit.

" On peut dire que le fanatisme est une prédisposition dans l'is-lam. C'est pour cela qu'il est important pour le croyant demaintenir un écart avec la lettre. Et cet écart implique un cer-tain nombre de dispositifs théologiques, comme l'interprétationet la contextualisation. Une des sciences du Coran s'appelle " lesraisons de la descente " et étudie les raisons mondaines qui ontamené à ce que tel verset - selon le mythe islamique - descenditdu ciel afin d'éclairer le prophète sur des événements qu'ilaffrontait dans sa vie publique et privée. " Les versets les plusagressifs " sont inséparablement liés au contexte socio-politiquede l'époque médinoise : guerre contre les païens, opposition deceux qui, dans le milieu d'origine du prophète, contestaient saprédication, etc. "

L'EXEMPLE DE MAHOMET

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

" Toute la construction de l'Islam politique, avec le califat,toute l'organisation juridique et pratique de la communauté(…) prennent comme modèle la période de Médine entre 622et 632. Si certains musulmans s'autorisent à " liquider " les im-pies, c'est que, non seulement le Coran a des versets extrêmement

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durs pour les ennemis d'Allah, maisle Prophète lui-même a montrél'exemple en incitant parfois sespartisans à commettre desassassinats pour le bien de lacommunauté. " (p. 18 ; voiraussi p. 26)" En fait, l'assassinat fait partiedes moyens utilisés parMahomet pour émerger danscette politique tribale et arriverà être suffisamment puissantpour qu'on ne songe pas à tirervengeance de lui et de sesfidèles. Des partisans fanatiquesentourent le Prophète, prêts àexécuter les basses besognes ;mais c'est Mahomet qui " lancele contrat ". Faire peur, si peurque personne n'osera plus riententer contre lui (…) ; maisfaire peur seulement quand ilfaut. " (p. 33)

Ibn WARRAQ, op. cit.

" Muhammad était le premierdes Mecquois qui avait dit à sessemblables et aux maîtres dudésert d'Arabie que le pardonn'était pas de la faiblesse maisune vertu, et que pardonnerl'injustice dont on est victimen'est pas contraire aux normesde la vraie muruwwa (vertu).C’était (…) emprunter lechemin d'Allah " (IgnazGoldziher, Muslim Studies(London, 1967-71), vol. 1, p.25)C'est en insistant sur le pardonque Muhammad a pu convaincre

les tribus qui avaient été divisées par des siècles d'animosités, devendettas, de revanches, que l'islam, et non plus l'appartenanceau clan, serait désormais le principe unificateur de la société.Muhammad enseigna l'égalité de tous les croyants devant Allah.Malheureusement (…) le prophète n'a pas mis en pratique cequ'il prêchait. Bien trop souvent, dans son attitude envers lesjuifs, les Mecquois et ses rivaux, Muhammad donna libre coursà sa cruauté, sans manifester la moindre mansuétude.Il exultait avec une satisfaction sauvage au-dessus des corps desQoraychites qui étaient tombés à la bataille de Badr et plusieursprisonniers qui n'étaient accusés d'aucun crime, si ce n'est descepticisme et d'opposition politique, furent délibérément exé-cutés sur ses ordres. " (pp. 407-408)Selon D. S. Margoliouth, " les expériences de la vie duprophète, les tueries répétées qui ont marqué sa carrière àMédine, semblent avoir convaincu ses partisans que répandre lesang est une clef qui ouvre les portes du paradis. " (p. 411)

VIOLENCE A L'EGARD DES INCROYANTS

Daniel SIBONY, op. cit.

Le croyant doit rejeter ceux qui ne veulent pas se soumettre àDieu en reconnaissant le message de Mohamet. " O vous quicroyez, ne prenez pas pour amis les juifs et les chrétiens (...)Celui qui parmi vous les prend pour amis est des leurs - Dieu nedirige pas le peuple injuste. " (Coran, V,51). Le Coran crée doncun problème du rapport aux " autres " ... et le résout par lerejet, sauf s'ils se soumettent. (Sibony, p. 102)Le rejet va jusqu'au saint combat, au djihad, contre lesmécréants. " Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu, audernier jour, qui ne considèrent pas comme illicite ce que Dieuet son prophète ont déclaré illicite, ainsi que ceux qui, parmi lesgens du Livre, ne pratiquent pas la religion de la vérité, jusqu'àce qu'ils paient, humiliés, et de leurs propres mains, le tribut "(Coran, IX,29). Et " Lorsque vous rencontrerez ceux quimécroient, alors frappez au col. Puis, quand vous aurez do-miné, alors serrez le garrot " (Coran, XLVII,4). Ou encore, etplus fort " Tuez les infidèles partout où vous les trouverez "(Coran, IX,5).

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Le djihad est donc, dans leCoran, non seulement un effortintérieur, mais aussi une vérita-ble guerre vers l'extérieur. " Cen'est pas seulement si l'on estattaqué qu'on riposte par le dji-had ; on est, en principe, dèsqu'on le peut, en état de luttecontre l' "insoumis ". Exemple :Coran, XLVII,4 et CoranXLVII,35 : " Ne faiblissez pas !Ne faites pas appel à la paixquand vous êtes les plus forts. "(cité dans Sibony, pp. 146-147)Sibony ajoute que " Les tenantsdu djihad sont sûrs d'être justeset s'appuient sur le Texte : " Vous formez la meilleurecommunauté suscitée pour leshommes : vous ordonnez cequi est convenable, vous inter-disez ce qui est blâmable, vouscroyez en Dieu (III,110) " ... Enun sens l'intégriste incarne laplénitude originelle. " (Sibony,p.114)

Bernard LEWIS, op. cit. 1

"In Islam, the struggle of goodand evil acquired, from thestart, political and even militarydimensions. Muhammad (…)was not only a prophet and ateacher, (…) he was also a rulerand a soldier. Hence his strug-gle involved a state and itsarmed forces. If the fighters inthe war for Islam, the holy war"in the path of God" are figh-ting for God, it follows thattheir opponents are fighting

against God. (…) The duty of God's soldiers is to dispatchGod's enemies as quickly as possible to the place where Godwill chastise them, that is to say in the afterlife." (p. 20)

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

" Aujourd'hui encore, en 2003, l'université islamique d'Al-Azhar,en Egypte, tient un discours de guerre. Cette prestigieuse institu-tion a fait paraître une fatwa énonçant la nécessité, pour lanation musulmane, de posséder des armes nucléaires. " (p. 23)

Ibn WARRAQ, op. cit.

" L'humanité est divisée en deux groupes : les musulmans et lesautres. Les musulmans sont membres de la communautéislamique, l'ummah, qui possède des territoires dans le Dar-al-Islam, la terre de l'islam, où les édits de l'islam sont promulguésdans leur totalité. Les non-musulmans sont les Harbis, les gensdu Dar-al-Harb, le pays des guerres, en fait n'importe quel paysqui appartient aux infidèles et qui n'a pas été soumis à l'islammais qui, malgré tout, est destiné à passer sous son contrôle,soit par conversion, soit par la guerre. Tous les actes de guerresont autorisés dans le Dar-al-Harb. " (pp. 270-271)

HISTOIRE DE LA VIOLENCE EN ISLAM

Mark A. GABRIEL, op. cit.

"Disagreements and misunderstandings often led to terrorist actsamong the pre-islamic Arabic people due to their predispositionto act emotionally and violently as a whole.Because Islam entitled them to the defeated enemies' posses-sions, the constant struggle for power among Arab tribes grewstronger and more brutal. Not only did they attack non-Muslims, but the early Muslim tribes also attacked each other.This culture readily accepted the philosophy of jihad that wasrevealed to Muhammad. These were progressive revelations ofQuranic verses over a period of about twenty-two years. Theprogressive steps were:1. Fight those who persecuted you (in Medina);

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2. Conquer those who rejectIslam in your region (theArabian Desert);3. Conquer the world in thename of Islam."

Henri WIBAULT, op. cit.

" (Dans le Nouvel Observateur,4 oct. 2001) Tariq RAMADANévoque la question de la vio-lence en Islam. Celle-ci s'étaitprésentée dès l'apparition dumouvement des kharidhites. Ala bataille de Nahrawân entreAli et les Khâridhites, cesderniers chargèrent furieuse-ment en poussant un cri deguerre qui devait devenirfameux:' Le départ! Le départpour le paradis!' Pour TariqRamadan un évènementcomme les attentats du 11 sep-tembre doit conduire lesMusulmans à une relecture deleur propre histoire. Il estimequ'en tant que réformiste et euégard à leur situation enOccident, les musulmansdoivent mettre en avant lenécessaire apport de la ratio-nalité.

En réponse, SHAYEGAN estimeque cette violence est surtoutun échec de l'islam, au motifque celui-ci est resté à l'écartdes grands moments de l'his-toire. L'Empire ottoman n'a paspris conscience des réformes, ycompris religieuses, qui traver-saient l'Occident. La révolutiondes Lumières fut ignorée.

Le monde musulman a fantastiquement régressé et se comportecomme si Avicenne, Averroes, Ibn Khaldun, Ibn Arabi n'avaientjamais existé. Et si le monde musulman a eu au XIXème siècle lanadha - la renaissance - il a aussi la thawra - la violence quicommence au milieu du XXème. Shayegan voit donc une forterésurgence du sacré, qui s'accompagne de structures fortes de laviolence. Or cette violence existe bel et bien dans le Coran..L'Islam n'est devenu une civilisation, selon Shayegan, qu'avecl'arrivée au pouvoir des Ommeyyades et des Abbassides. Noussommes en présence maintenant de pôles de ressentiment. "

Jean-Claude GUILLEBAUD, Le Goût de l'Avenir (Paris, Seuil,2003)

" Dans la mesure où, lorsque Mahomet scelle une alliance, en629, avec Abou Sofyân, qui représente les chefs païens venusde La Mecque, on peut dire que l'islam reprend à son compteles traditions belliqueuses des " idolâtres " prestement convertis.(…) L'armée de dix-mille hommes aussitôt levéeentrera bientôt dans La Mecque, sabres brandis, abattra les ido-les païennes et " islamisera " l'ancien sanctuaire païen de laKa'aba. (…)Très vite, l'expansion de la nouvelle religion prendra l'allured'une chevauchée guerrière. Elle permettra aux musulmans deconquérir en vingt années un immense empire allant d'un boutà l'autre de la Méditerranée. Ce bellicisme des premiers tempsse renforcera encore à partir du IXème siècle, au moment del'assaut livré à l'Empire byzantin par les Turcs seljoukides. Cettemilitarisation et ces conquêtes s'appuieront (…) sur une réinter-prétation du concept de jihad qui, à l'origine, n'avait pas forcé-ment de signification agressive. " (pp. 306-307)

Walid Al-KHACHAB, op. cit.

" Dans Les guerres de l'Etat du Prophète, Sayed al-Qimmy abien montré que les opposants politiques de Mohammadétaient taxés de Kafers, c'est-à-dire de mécréants. Au sein de lacommunauté musulmane, ceux que le Coran appelle lesMounafiks, les hypocrites, ont été en réalité la première opposi-tion. Tel fut qualifié le chef médinois Abdullah Ibn Oubaï quiprônait la résistance aux armées des Quoraïch depuis les

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remparts de Médine. Leprophète en ayant décidéautrement perdit la bataille deOhud. Ibn Oubaï est désormaisappelé hypocrite. Quant aux " intellectuels " de l'époque, laplupart des poètes qui tour-naient Mohammad en dérision: les Ka'b Ibn al-Achraf, SallamIbn Abil Haqiq et Asma BentMarwan, ils ont été assassinéspar des commandos musul-mans. Purement et simplement. "(pp. 87-88)

Bernard LEWIS, op. cit. 1

" The practice and then the the-ory of assassination in theIslamic world arose at a veryearly date, with disputes overthe political headship of theMuslim community. Of the firstfour caliphs of Islam, threewere murdered, the second bya disgruntled Christian slave,the third and fourth by piousMuslim rebels who saw them-selves as executioners carryingout the will of God. (…)Islamic law and tradition arevery clear on the duty of obe-dience to the Islamic ruler. Butthey also quote two sayingsattributed to the Prophet:"There is no obedience in sin"and "Do not obey a creatureagainst his creator". If a rulerorders something that is con-trary to the law of God, thenthe duty of obedience isreplaced by a duty of disobe-dience." (p. 112)

Leïla BABES, op. cit.

Violence exercée contre les poètes, les mystiques, les hérétiqueset les libres penseurs : nombreuses exécutions, surtout dans lespremiers siècles. " les raisons ont souvent été d'ordre politiqueet non religieux, l'accusation en hérésie constituant un excellentinstrument d'élimination de rivaux, d'opposants ou de fauteursde trouble. Le risque d'éclatement, la nécessité de consolider l'u-nité de la communauté, sont une autre raison qui explique laviolence exercée à l'égard de la libre critique. " (p. 111)

CONQUÊTES ARABES EN OCCIDENT

Jean PRIEUR, op. cit.

" Les Arabes s'étaient confortablement et, pensaient-ils, durable-ment installés en Septimanie [au VIIIème siècle]. (…) LaSeptimanie arabe comprenait sept villes principales : Agde,Maguelonne, Elne, Uzès, Nîmes, Narbonne et Carcassonne. (…)Comme les occupants venaient de la mer, ils avaient établi leurtête de pont dans le Massif des Maures (…). De là ils rayon-naient dans l'arrière-pays, remontant et saccageant la vallée duRhône jusqu'à Lyon, comme ils avaient remonté la vallée de laGaronne jusqu'à Bordeaux. Le temps des conquêtes tranquillesde Muhammad et des premiers califes était bien passé.

Par les vallées de la Durance et de l'Isère, ils s'aventu-raient jusque dans les Alpes, allant terroriser les paisiblesHelvètes.

Après la prise de Lyon, ils se hasardèrent dans la valléede la Saône, investirent Mâcon, bifurquèrent sur la gauche,franchirent les Monts du Charolais… et se retrouvèrent à Autun.Cette fois, il ne s'agissait plus de guerre sainte, destinée àcoraniser la Gaule, mais de razzias et d'incursions, accompa-gnées d'atrocités.(…) Révolu le temps de la tolérance ! (…) Cent ans après lamort de Muhammad, les musulmans ne disaient plus les Gensdu Livre, mais les Infidèles. Et les catholiques leur renvoyaient lapolitesse. Tout était prêt pour le futur affrontement descroisades.

Comme l'appétit vient en mangeant, les Arabes qui nerencontraient pas de résistance montaient semer l'épouvante àla fois dans le Massif central (…) et jusque dans les Alpes (…) etle Valais [jusqu'au Xème siècle].

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S'ils avaient debons capitaines, l'islam d'alorsmanquait de grandes et fortespersonnalités spirituelles (…).Les nouveaux califes, ceux deBagdad et de Cordoue,n'avaient plus la simplicité demœurs, la solide foi et lalargeur d'esprit de leursprédécesseurs. Seules les intéres-saient les conquêtes qui pou-vaient leur rapporter puissanceet richesse. " (pp. 203-205)

Bernard LEWIS, op. cit. 1

The Muslims never use theterm "imperialism" regarding"the great Muslim empires - thefirst one founded by the Arabs,the later one by the Turks, whoconquered vast territories andpopulations and incorporatedthem in the House of Islam. Itwas perfectly legitimate forMuslims to conquer and ruleEurope and Europeans and thusenable them - but not compelthem - to embrace the truefaith. It was a crime and a sinfor Europeans to conquer andrule Muslims and, still worse,to lead them astray. In theMuslim perception, conversionto Islam is a benefit to the con-vert and a merit in those whoconvert him." (p. 43)

QUELQUES FAITS RECENTS DE VIOLENCE

En 2000, incendie de 19 églises chrétiennes en Indonésie, pardes commandos musulmans.

Dans les îles Moluques, l'exode risque d'être le seulmoyen de survie pour les chrétiens minoritaires, menacés parles milices islamistes.

Au Pakistan, en 1998, le village chrétien de Schantinagar futentièrement détruit. En octobre 2001, 18 chrétiens furent mas-sacrés dans leur église. En août 2002, une attaque armée contreune école chrétienne fit 6 morts à Muree ; une autre tua 3 infir-mières et blessa 23 personnes dans un hôpital chrétien. ADaska, durant la messe de Noël 2002, 3 jeunes filles ont trouvéla mort et 13 personnes ont été blessées par une grenade.

En Irak, le 19 août 2003, un attentat au camion piégé détruitpartiellement le bureau des Nations-Unies à Bagdad, faisant 24victimes, dont l'envoyé spécial du Secrétaire général. Cet attentat a été revendiqué par écrit par un groupe s'appelant " les Avant-gardes armées de la 2ème armée de Mohammed ",en disant : " Nous sommes fiers de dire que nous n'avons pashésité un seul moment à tuer le sang de Croisés ".

Expérience de Irshad Manji (journaliste et essayiste canadienne,née ougandaise de parents d'origine indienne) : " Mon livre Musulmane mais libre m'a exposée à la colère, à lahaine et au vitriol. Parce que je pose des questions que nousautres musulmans ne pouvons plus esquiver. Pourquoi, parexemple, gaspillons-nous les talents de la moitié des créaturesde Dieu, les femmes ? Comment expliquer l'opiniâtre com-posante d'antisémitisme qui parcourt l'islam d'aujourd'hui ?Surtout, comment même des musulmans modérés peuvent-ilsfaire une lecture littérale du Coran alors qu'il abonde, commetous les textes sacrés, en contradictions et ambiguïtés ? (…) Jereçois régulièrement des menaces de mort sur mon site. Certainsde mes assassins en puissance exaltent les vertus du martyre, etveulent me précipiter dans les flammes de l'enfer en échange de72 vierges. " (Le Monde, 7-8/XI/2004)

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DJIHAD INTERIEUR ET EXTERIEUR

Bernard LEWIS, op. cit. 1

"One of the basic tasksbequeathed to Muslims by theprophet was jihad. This wordcomes from an Arabic root j-h-d with the basic meaning ofstriving or effort. It is oftenused in classical texts with theclosely related meaning ofstruggle, and hence also offight.. It is usually cited in theQur'anic phrase "striving in thepath of God" (…) and has beenvariously interpreted to meanmoral striving and armed strug-gle. (…) In the early chapters[of the Qur'an], dating fromthe Meccan period, when theProphet was the leader of aminority group strugglingagainst the dominant pagan oli-garchy, the word often has themeaning, favored by modernexegetists, of moral striving. Inthe later chapters, promulgatedin Medina, where the prophetheaded the state and com-manded its army, it usually hasa more explicitly practical con-notation. In many, the militarymeaning is unequivocal." [E.g.in IV, 95; VIII, 72; IX, 41, 81,88; LXVI, 9]"According to Islamic law, it islawful to wage war againstfour types of enemies: infidels,apostates, rebels and bandits.Although all four types of warsare legitimate, only the first

two count as jihad. Jihad is thus a religious obligation.For most of the fourteen centuries of recorded Muslim history,jihad was commonly interpreted to mean armed struggle forthe defense or advancement of Muslim power. (…) The pre-sumption is that the duty of jihad will continue, interruptedonly by truces, until all the world either adopts the Muslimfaith or submits to Muslim rule." (pp. 23-25)

Abderrahman MOUSSAOUI, " De la violence au djihad enAlgérie ", in : La Lettre du Forum de Delphes, Démocratie etDéveloppement, n° 16 (août-septembre '96), pp.2-3.

" Le musulman ne se sent en paix avec Dieu et avec lui-mêmequ'après avoir combattu les impuretés qui l'assaillent conti-nuellement. (...) Il combat ses désirs en y résistant. (...) Le com-bat armé, le djihad, ne vient qu'en seconde position. Ce n'estqu'un petit combat, un dérivé secondaire de la philosophie exis-tentielle du musulman. " Mais aussi, " l'Islamisme se considère,en tant que défenseur de l'ordre divin, plus en droit d'exercer laviolence que ceux qui, à ses yeux, ne défendent qu'un ordreterrestre. "

Bruno ETIENNE, op. cit.

" Le mot jihad signifie, avant tout autre sens, " effort ". Dieuréclame aux croyants 5 types d'efforts :1. Dominer ses instincts, ses passions, donc l'effort sur soi-même.2. Présenter à tous le " beau modèle ", le comportement du vraimusulman imitant le prophète.3. Diffuser le message dans un souci de prosélytisme, par leverbe et par l'écrit, et d'abord auprès des mauvais musulmans.4. Rechercher la paix et les meilleures relations avec les non-musulmans.5. Mener un combat défensif contre ceux ou contre les actionsde ceux qui menacent le fidèle, donc d'abord contre les mau-vais musulmans. Le combat doit ensuite être livré contre les ten-tatives qui menacent la communauté musulmane en tant qu'en-tité, la 'Umma . " (pp. 121-122)

" Le vrai combat est d'abord le grand jihad contre soi-même etensuite seulement celui destiné à rétablir l'ordre public (S. IX,

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v.5). La légitime défense vientensuite (S. II, v. 194). La guerreest toujours détestable, " vousl'avez en aversion " (S. II, v.216). (…) De nombreux versetsrappellent qu'après le combatlégitime et après les hostilités,l'ennemi doit être traité avecéquité (S.V, v. 2), respect (S.VI, v. 109) et miséricorde (S. II,v. 195)." Il ne fait pas de doute, cepen-dant, que la guerre puisse être " juste " (…) Elle est impitoyablecontre les incrédules et les hy-pocrites (S. IX, v. 5 et 73 entreautres). Toutefois, il est prescritde ne pas tuer injustementpuisque, par 2 fois au moins, leCoran renvoie au crime contrel'humanité tout entière (S. VI, v.51 et S. V, v. 32). Plus encore,pendant le jihad il n'est paspermis d'utiliser la traîtrise ou lasurprise : le Coran lui-mêmel'interdit (S. XXXII, v. 38), ainsiqu'un hadith du prophète, bienque quelques exemples con-traires nous soient rapportéspar les chroniqueurs et que 3des successeurs de Mohammedaient été assassinés ! (pp. 123-125)

Roger GARAUDY, Promesses del'Islam, (Paris, Seuil, 1981)

" Al-jihâd-al-akhbar, ou le grandjihâd, est la lutte intérieure con-tre tout désir détournantl'homme de son centre, et lepetit jihâd, c'est l'action pourl'unité et l'harmonie de la

communauté musulmane contre toutes les formes d'idolâtrie depouvoirs, de richesses, de faux savoirs, qui l'écarteraient duchemin de Dieu. " (p. 47)

LE DJIHAD INTERIEUR ET CITOYEN

Tariq RAMADAN , op. cit. 2

" L'engagement multidimensionnel des musulmans afin d'appli-quer concrètement les enseignements de la " Voie de la fidélité "nécessitent un effort permanent et circonstancié qui se traduiten arabe par le terme jihâd. La Voie, as-sharî'a (…) exige desefforts individuels et collectifs, des jihâd, à mener à différentsniveaux et dans différents domaines. Dans l'intimité, c'est le tra-vail sur soi, la maîtrise de ses égoïsmes et de sa propre violence ;sur le plan social, c'est la lutte pour plus de justice , contre lesdiscriminations, le chômage ou le racisme ; sur le plan poli-tique, c'est la défense des responsabilités et des droits citoyens,la promotion du pluralisme, de la liberté d'expression et desprocessus démocratiques (mais pourquoi ces valeurs seraient-elles réservées aux occidentaux ?) ; sur le plan économique,c'est l'engagement contre la spéculation, les monopoles et lenéocolonialisme ; sur le plan culturel, c'est la promotion desarts et des modes d'expression respectueux de la dignité de laconscience et des valeurs humaines, etc. Ce sont là des jihâd àmener au nom de la citoyenneté active et responsable. " (p. 197-198)

DJIHAD INTERNE A L'ISLAM

Bernard LEWIS, op. cit 2

Le djihad doit s'attaquer d'abord aux musulmans qui pactisentavec les ennemis de l'islam, comme les laïcistes.Dans une brochure largement diffusée, Al-Fareda Al-Gaaba (TheMissing Commitments) due (vers 1982) à Muhammad 'Abd al-Salam Faraj, guide spirituel du groupe qui assassina le présidentAnouar el-Sadat:" Il est plus important de combattre l'ennemi proche que l'enne-mi lointain. (...) Une question se pose, cependant: cette victoiresert-elle un Etat islamique ou bien le régime infidèle en place?

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Vient-elle consolider les fonde-ments de ce régime qui viole laloi divine? Ces dirigeants nefont que saisir l'occasion queleur offrent les idées nationa-listes prônées par certainsmusulmans pour poursuivre desobjectifs qui n'ont rien demusulman, malgré desapparences contraires. (...)Si l'impérialisme s'est installé enterre d'islam, c'est justement àcause de ces dirigeants. Entamerle combat contre l'impérialismene serait ni glorieux ni utile,mais seulement une perte detemps. Nous devons concentrernos efforts sur notre causeislamique, ce qui signified'abord et avant tout instaurerla loi divine dans notre proprepays et faire en sorte que laparole de Dieu y règne sanspartage. Le premier terrain delutte du djihad est, sans con-teste, l'extirpation de ces lea-ders infidèles, et leur remplace-ment par un ordre authentique-ment islamique. De là viendrala délivrance. " (p. 148)

Farid ESACK, op. cit.

"Pour de nombreux musulmans,le jihâd est le paradigmeislamique de la guerre delibération, et le fait que la jus-tice - plutôt que la mise enplace de l'islam comme systèmereligieux - soit l'objectif dujihâd constitue un thème récur-rent du discours musulman

progressiste. Des chercheurs musulmans récents affirment que lajustice ne peut être établie qu'à travers la mise en place d'unordre islamique, d'où l'assimilation du jihâd aux moyens pro-pres à fonder un gouvernement islamique. " (p. 263)

DJIHAD DE CONQUETE

Mark. A. GABRIEL, op. cit.

"Abd al-Salam [voir source ci-dessus] attacked the Muslims whobelieved that jihad was just to defend Islam. He aggressivelyemphasized that jihad is not negotiable - nor can it be compro-mised. Jihad is the call to all Muslims. To support his point ofview, he gave the examples of the prophet Muhammad's lettersto the kings of countries, of how the early Muslims fought andof how Islam spread by the sword. He said that Islam shouldbe spread this way to-day." (pp. 149-150)

" Shokri Ahmad Mustapha [who founded the Al-Takfir wal-Hijra(Repentance and Holy Flight) movement in Egypt], declaredduring his trial: Each member of our movement would be wil-ling to sacrifice his own life to fulfill the responsibility that Allahput on our shoulders. The responsibility is to spread the mes-sage of Islam across the earth and reinforce it with the sword."(p. 127)

DJIHAD : OBLIGATION COLLECTIVE OU INDIVIDUELLE ?

Olivier ROY, op. cit.

" La tradition a toujours considéré que [l'obligation de jihad]était collective (fard al kifaya), c'est-à-dire limitée dans le tempset dans l'espace et incombant à ceux qui sont menacés par l'en-nemi. Loin d'être une expression communautaire, la violenceexercée au nom de l'islam aujourd'hui se dit et se pratique sur labase d'un engagement individuel. Ce surinvestissement du jihadest récent : il remonte à Saïd Qotb (mort en 1966) et aux grou-puscules égyptiens des années 1970. (...) La frange néo-fonda-mentaliste qui partage cette idée est qualifiée de jihadiste, parexemple celle de Bin Laden. "

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LE MARTYRE EN ISLAM

Farhad KHOSROKHAVAR, LesNouveaux Martyrs d'Allah,(Paris, Flammarion, 2002)

" Les nouveaux martyrs sont(…), parfois sous une formeexcessive, voire pathologique,les figures nouvelles de l'affran-chissement vis-à-vis de la tradi-tion. Ils le font en épousant desformes de légitimité qui seréclament officiellement decette tradition tout en la mar-ginalisant dans les faits. Noussommes face au paradoxe (…)d'une nouvelle religiosité quiintroduit une rupture au nomd'une version plus " authen-tique " d'un islam des origines.(p. 13)

" Dans les modalités de l'action,deux types de martyre sont àrelever. Le premier est un mar-tyre défensif. Il s'agit non pasde lutter avec violence contrel'hérétique ou l'oppresseur, maisde témoigner, jusqu'à la mort,de la justesse de sa cause en luiopposant une attitude de définon violent. Tel est le cas dumartyr chrétien [ou boud-dhiste]. Le second type de mar-tyre est de caractère offensif. Ilimplique la lutte active, aubesoin violente, contre ceuxque l'adepte considère commeoppresseurs et hérétiques. Lesacrifice de soi implique lavolonté d'annihiler l'ennemidans une lutte où l'un ou l'autre

peut avoir le dessus. " (p. 14) " La spécificité de l'islam est derendre légitime la mort sacrée au service de la communauté,l'umma, insérée dans la trame d'une guerre qui bénéficie de lalégitimité religieuse, le djihad. " (p. 88)

" Dans le cas d'Al Qaeda, la mort est le signe (…) d'un senti-ment de dépossession de soi chez ceux qui vivent " virtuelle-ment " le désespoir des autres et qui se donnent par procura-tion le rôle de redresseurs de torts, moins pour restaurer lemonde dans ses équilibres perdus, pour engendrer une huma-nité nouvelle ou créer une nouvelle nation que pour étendre lesens de leur combat au monde entier. " (pp. 110-111). [Ce typede martyr] revendique la réalisation d'une communauté mondi-ale incarnée par l'universalisme islamique en brisant la puissancedu Mal qui s'y oppose : l'Occident… (p. 329)

LA RECOMPENSE DU DJIHAD

Mark. A. GABRIEL, op. cit.

"When a person dies in jihad, a different burial procedure isfollowed. After a regular person dies, his body is washed anddressed nicely, as if going to the mosque. When a person dies injihad (…) [ his body] goes into the coffin as he died. The bloodis a witness for him in front of Allah… Muslims believe theangels will treat him as a special person to Allah. (…) Dying injihad is the only way a Muslim can be assured of enteringParadise at all. This is why you see Muslims leaving their ownnations to fight jihad in other countries." (pp. 28-29)

CONDITIONS DE LA VIOLENCE EN ISLAM

Mohammed TALBI, op. cit.

" ...En cas de menace, le Coran autorise la guerre. La guerreétait interdite aux musulmans ; [mais] elle fut autorisée par troisversets qui en fixèrent les conditions, et que l'on peut dater dudébut de l'hégire (622), c'est-à-dire du début de la guerre quiopposa le prophète à sa ville natale [La Mecque] :" Permission de se défendre est donnée aux victimes d'agression(yuqutaluna) car elles sont l'objet d'injustice (zulimu), et Dieu,

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pour les secourir, a toute puis-sance.A ceux qui ont été expulsés deleurs maisons, en violation detout droit, tout simplementparce qu'ils disent : NotreSeigneur est Dieu. En effet, siDieu ne contenait pas leshommes, les uns par les autres,que d'ermitages (sawami'u),que de synagogues (biya'un),que de lieux de prière(salawatun), que de mosquées(masajidu), où le nom de Dieuest invoqué, n'auraient étédémolis. Dieu secourt toujours

celui qui le secourt.Il secourt ceux qui, s'ils sont solidement établis - par Nous - surterre, célèbrent la prière (salat) ; s'acquittent de l'aumône légale(zakat) ; ordonnent le convenable et s'opposent à l'inconve-nable ; et, en fin de compte, c'est à Dieu que revient la décisionfinale. " Coran XXII,39-40. Toute guerre qui ne répond pas à ces critères n'est pas jihad, etest strictement interdite. La seule guerre permise est la guerredéfensive, la guerre contre l'injustice et le mal. (...) Le jihadpeut à la rigueur être qualifiée de " guerre humanisée " enquelque sorte, pour autant aussi qu'il interdit de s'attaquer àceux qui ne combattent pas. " (pp. 190-191)

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HISTOIRE ET SITUATION DU MONDEMUSULMAN

Henri WIBAULT, op. cit.

" Depuis le 11 septembre 2001,le monde musulman est entréavec violence dans l'actualité.D'entrée de jeu mettons cer-taines choses au clair. Les paysde culture musulmane sont despays pauvres. Cet ensemblehumain qui tend à représenterun peu moins d'un quart del'humanité n'a pas à être jugéau vu des dépenses de lafamille royale saoudienne et dequelques autres fortunes prin-cières aux dépenses ostenta-toires.Pour reprendre un critère d'é-valuation de la surface finan-cière des pays et surtout de leurcrédibilité et stabilité on peutse référer à divers systèmes derating. Le système dénommé ' Institutional Investor' présentel'avantage de tenter uneapproche individualisée de tousles pays jusqu'au plus démuni.Sur cette base, la place des paysde culture musulmane, mêmeles riches monarchies du Golf,est fort moyenne. Ainsi, si laSuisse est encore première,malgré les déboires de son sys-tème financier et d'assurances,avec 96,2 sur 100, les Pays-Bastroisième avec 94,6, et lesEtats-Unis sixième avec 93,1, ilfaut aller à la 31ème place pour

trouver le premier Etat musulman. Le Koweit. se situe ainsidirectement derrière Chypre! Mais ce qui est plus important, auniveau absolu de confiance et non au niveau relatif, est qu'àcette place aujourd'hui le taux n'est que de 62,9. Autant direque les conditions financières faites à un tel rating sont déjàdures. Le second pays de culture musulmane est un autre petitpays du Golf , le Quatar . Ce pays est 37ème, derrière l'im-mense Chine, qui n'a guère de pétrole et cependant ne cesse deprogresser à la fois sur le plan absolu et relatif. L'ArabieSaoudite, le plus grand exportateur de pétrole et leader del'OPEP, n'est que 39ème. Ce pays est endetté. Sa population de18 millions d'habitants s'interroge aussi sur les dépenses de lafamille princière plus qu'auparavant. Les femmes y sont trans-portées en voitures personnelles car elles ne sont pas autoriséesà conduire. Cette situation commence à peser sur l'économie dupays. Il est maintenant question de réserver certaines profes-sions aux nationaux pour donner du travail aux jeunes et ren-voyer les travailleurs étrangers chez eux. Après ces trois pays,on trouve Oman, la Malaysie, Bahrain, la Tunisie. Les paysmusulmans à populations importantes sont placés plus loinencore. Ainsi le Maroc est 52ème, l'Egypte 58ème , l'Iran70ème. Et parmi les 10 pays considérés comme les plus en diffi-culté on compte l'Irak, le Soudan et l'Afghanistan, qui ferme lamarche à la 151ème place dans cette liste qui laisse de côté lesmicro-Etats.

La richesse de l'Arabie Saoudite est surévaluée depuislongtemps. Ce pays retire moins de la vente de son pétrole quela France de l'imposition des produits pétroliers consommésdans le pays. Des pays comme l'Iran ou l'Algérie parviennent àpeine à payer leurs importations de nourriture avec les revenusde leurs exportations de pétrole et de gaz. L'économie del'Algérie est dans une situation telle qu'il est même question defermer la bourse d'Alger, ce qui permettait au journal El Watand'affirmer que l'économie algérienne était à l'agonie. Et que direde la pauvreté de pays à population très importante comme leBangladesh - le plus grand pays PMA - et le Nigéria.

Les pays musulmans souffrent, pour un grand nombre d'entreeux, de conditions climatiques très défavorables, de conflitsinternes importants, d'insuffisances graves dans le domaine del'instruction, en particulier de celle des femmes, etc. (…) Mêmeavec un prix de l'or noir fixé par le marché approchant les 30 $

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6. Attitude socio-culturelle des musulmansà l’égard des “occidentaux”

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(prime de risque de guerrecomprise) cette matière énergé-tique de base est loin d'avoirsuivi la hausse des prix industriels. Le monde musulman a, commetout ensemble humain, le droità un légitime espoir. Or il estmanifeste qu'il est en criseinterne depuis des siècles et enparticulier depuis la chute del'Empire ottoman en 1922, sui-vie de la chute du Califat en1924. Les pays musulmans ontaussi été quasi tous colonisés[soit par les Turcs, soit par despays européens]. La plupart deces pays vivent dans le cadrede pouvoirs moins que trans-parents et les oppositions sontrarement animées d'intentionsdémocratiques.

Les derniers reculs de l'EmpireOttoman et l'abolition duCalifat ( 1924 )

Un des problèmes parmi lesplus difficiles à aborder est constitué par les relations his-toriquement conflictuelles entrele monde européen et lemonde musulman. Si l'Europe asa mémoire - songeons à latransformation de l'insuccèsd'une razzia arabe en 732 àPoitiers en une véritable nais-sance de l'Europe - le souvenirdes Croisés hante encore l'imag-inaire du Proche-Orient. L' Espagne et les Balkans sontaussi des hauts-lieux de lamémoire d'un conflit his-torique. Néanmoins, on peut

avancer que la chute du Califat représente toujours la sourceprofonde du traumatisme qui secoue la culture musulmane.

L'Empire Ottoman a dirigé le monde musulman pendant dessiècles. Vers la fin des années 1680, il doit subir un premierrecul en Europe centrale. Celui-ci se poursuivra dans les Balkanset en Grèce. A partir de 1830, la pression européenne s'exercesur les possessions ottomanes en Afrique du Nord. La Frances'empare de l'Algérie et de la Tunisie. Pendant un court momentce pays se donne une constitution, en 1861, résultat d'un espritréformiste. Mais la constitution fut suspendue en 1864, (…)suite à la prise de contrôle du pays par la France. Quant à laGrande-Bretagne, elle s'installe en Egypte et au Soudan. LaLibye devient italienne en 1911. Néanmoins la défaite politiquedu sultan, suivie de l'abolition du califat, devait constituer lechoc culturel et religieux par excellence pour le monde musul-man. Ce dernier perdait son empire et ses institutions. La gardedes lieux saints musulmans fut abandonnée à l'Arabie saoudite.Mais le Royaume-Uni obtient le protectorat sur la Palestine oùs'exerce l'implantation sioniste. Celle-ci contrôle Jérusalem etdonc la troisième mosquée de l'islam. La France et la Grande-Bretagne se partagent l'ensemble du Proche et Moyen-Orient etprivent de ce fait les peuples du monde arabe de la satisfactiond'être libérés de la tutelle turque qui avait pris la succession despremiers empires arabes.

Avant même la chute du Califat, le recul de l'Empire ottoman etde l'islam avait suscité des réactions animées par des penseurscomme le pan-islamique Jamal al-Din al-Afghani ( 1883-1887 )et le poète pakistanais Mohammed Iqbal. Mais après la chutede l'Empire ottoman et l'abrogation du Califat, l'université alAzhar , et surtout le mouvement des Frères musulmans deHassan al Banna, tentent de réagir. Dès 1928, le mot d'ordred'al Banna définit bien le but poursuivi:' Dieu est notre but, leProphète notre modèle, le Coran notre loi (shari'a ), le jihadnotre chemin, le martyre notre désir.

Le choc créé par la fin du grand empire musulman doit aussiêtre apprécié compte tenu des nombreuses mesures prises par lenouveau régime d'Ataturk: le remplacement de l'alphabet arabepar l'alphabet latin, avec pour conséquence que l'alphabet duCoran n'est plus celui du pays, l'adoption sur une grande échelledes principes du droit européen en lieu et place du droit musul-man, l'interdiction du port des vêtements traditionnels.

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" Nous avons manqué le ren-dez-vous de l'histoire. " Cecirésulterait, selon Shayegan, dela conception messianique dumusulman. Celle-ci le conduit àestimer que, le christianismeétant une religion dépasséepour ne pas dire obsolète, iln'avait pas à se soucier vérita-blement des entreprises con-duites par les Européens. Cetteattitude a conduit l'EmpireOttoman à sa perte. PourShayegan, l'Islam en tant que ' Totalité socio-politique' est belet bien révolu. Et ce n'est pasl'expérience concrète deplusieurs années de révolutionkhomeyniste qui soit susceptiblede modifier ce jugement, bienau contraire. "

Daniel SIBONY, op.cit.

L'intégrisme violent n'est pastout l'Islam, tant s'en faut,même s'il en fait fondamentale-ment et essentiellement partie.Sibony fait une analyse subtiledes rapports entre la Oummaet ses intégristes. " En fait, unefois l'origine établie, une foisque la greffe a " pris " et que laOumma [la communauté descroyants] est bien parée de saVérité, elle n'a plus à toujoursfustiger l' " autre ". Ces parolescontre lui, elle a tendance à lesentendre comme un fond sym-bolique et non pas comme unprogramme, comme un ensem-ble de vérités mais qui ne sont

pas exécutables (...) La plénitude que la Oumma acquiert grâceà son Texte et à l'idée de " soumission " l'apaise et lui donnel'envie de vivre et d'accepter son destin que d'aller casser de l' " insoumis ". (...) Comme si entre la lecture mortifère [desintégristes pratiquant le djihad ] et la vie toute simple, laOumma optait pour la vie. Les fondamentalistes la ramènentaux fondements, mais la valeur de ceux-ci était plutôt dedéclencher un processus identitaire. Une fois celui-ci déclenché ,on " oublie " les fondements et la manière dont ils règlent leurscomptes aux " autres ". ( pp. 104-105)Qu'en est-il, alors, des rapports entre cette Oumma plutôttolérante et les intégristes en son sein et de la non-dénonciationpar elle de leurs violences ? " La Oumma fustige ses intégristesquand elle est seule avec eux, mais quand un tiers étranger estimpliqué (...), c'est plus complexe. Parfois le nombre de ceuxqui les soutiennent grossit beaucoup, pour baisser à nouveauquand l'étranger s'éloigne. C'est donc une dialectique à trois,qui interdit de croire que les intégristes militants soient une " mince frange ", sans qu'ils soient pour autant majoritaires. Leurproportion est variable selon le rapport au tiers. Cela dit,quand ils passent à l'acte, ils expriment dans le réel des énoncés" fondateurs " mais un peu " oubliés " dans le halo musical quiles enveloppe et le rythme harmonieux qui les transmet. ( pp.105-106)Qu'en est-il, en particulier, à l'égard de l'Occident, à l'époqueactuelle ? Selon Sibony, " Les pays de l'Islam ont des problèmesà résoudre, comme l'Occident, et ils ont moins que lui lesmoyens de le faire ; car la pression religieuse, d'emblée poli-tique, les empêche d'avoir ces moyens, qui exigent une certaineliberté. De sorte que des gens fragilisés par l'entre-deux moder-nité-religion, qu'ils échouent à gérer, basculent dans la violence.Cette violence est le symptôme où l'Autre-Occident est perçucomme une menace, laquelle ravive la vieille menace de l'Autre- juif et chrétien - contre qui l'Origine s'est édifiée. (...)Aujourd'hui, " face " à l'Occident, la Oumma ne se vit pascomme heureuse et souveraine. " (pp. 150-151). Ce profond ressentiment - et même cette haine lorsqu'il s'agitdes Etats-Unis - a été accentué, ces dernières années, par unesérie d'actions de violence, de la part de pays occidentaux à l'é-gard de pays musulmans : notamment les sanctions américainescontre la Syrie, la Libye, l'Iran et le Soudan, les sanctions inter-nationales contre l'Irak, l'oppression israélienne contre lesPalestiniens, etc. Mais il s'agit là de l'exaspération d'une blessure

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d'orgueil bien plus ancienne,d'un " ressentiment profondque le monde arabe n'est pasl'acteur géopolitique qu'il sesentirait en droit d'être. Lablessure est aggravée par unsouvenir historique degrandeur, de l'expansion del'Islam à partir de l'Arabie, au7ème siècle, qui a conquis leLevant, l'Afrique du Nord et unegrande partie de l'Europe... ".4

Selon John Esposito, directeurdu Center for Muslim-ChristianUnderstanding à l'Université deGeorgetown, " Beaucoupd'arabes et de musulmanspensent qu'ils ont eu 10 sièclesde grandes réalisations cul-turelles, qui se sont soldés parle colonialisme européen.Maintenant, ils se sententimpuissants. Ils ont l'impressionque l'Occident les considèrecomme arriérés et n'estintéressé que par leur pétrole.Leur sens de leur valeur person-nelle et leur dignité sontblessés. " 5 C'est pourquoi lemessage de Ben Laden, à la foisintégriste et violent, est accueilliavec fierté par de nombreuxmusulmans, surtout arabes.Dans un enregistrement vidéodu début de 2001, il disait à sesdisciples : " J'ai la vision deSaladin [qui a libéré Jérusalemdes Croisés] descendant desnuages. Notre histoire est entrain d'être réécrite. " 6

Comment résoudre cette oppo-sition fondamentale ?L'Occident, inconsciemment

terrifié, " en a fait un problème économique, car, dans cechamp au moins, on " peut faire quelque chose ". L'écart entrepays riches et pays pauvres, on connaît (...) ; on va intégrer lesplus pauvres au petit jeu économique, et les plus riches augrand jeu. Mais (...) l'idée se révèle fausse, car, avant de fonc-tionner, avant de jouer le jeu de la gestion, il faut s'identifier,prendre place symboliquement face à l'être et à l'autre, avoir l'i-dentité assez sereine pour pouvoir s'en éloigner sans la " trahir " ;pouvoir penser et parler sans trop de double langage. Le rapportà l'Autre conditionne pour le sujet son rapport à l'économie, saprise de part au jeu social et matériel. " (pp. 151-152)

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" L'ensemble du monde islamique est sous la tutelle de l'é-conomie de marché. Les pays les plus apparemment islamiquessur le plan des lois (surtout répressives) et du gouvernement, àl'exemple de l'Arabie Saoudite et autres pétromonarchies, sontles plus intégrés économiquement au système néolibéral fondésur la spéculation et noyé dans les transactions avec intérêts.Impossible de tracer une ligne entre " le monde des pratiquesislamiques " et celui de ses transgressions. (…) C'est d'ailleursdans le domaine de l'économie, plus que dans tout autre, queles anciennes catégories de dâr el-harb (monde de la guerre) etde dâr el-islâm (monde de la paix) … sont fondamentalementcaduques et totalement inopérantes. " (p. 295)" Le monde entier, en ce qui concerne l'activité économique, vità l'heure de la spéculation, des transactions avec intérêts, aucœur des logiques financières et bancaires les plus complexes etles plus sophistiquées. Or, ces pratiques sont en totale contradic-tion avec les principes islamiques en la matière, et la Révélationcoranique est explicite : celui qui s'engage dans la spéculationou la pratique de l'intérêt financier entre en guerre avec leTranscendant (Coran II, 278-279). " (p. 296)

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4Extrait de l’article “Why the Hate”, in : TIME, oct.1, 2001, p.54.5Ibidem6Ibidem

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VISION BINAIRE ANTI-OCCIDENTALE

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Ce qui est occidental est anti-islamique " ou " L'islam n'a rienà voir avec l'Occident " . Cettevision binaire est très répandueet donne à certains musulmansune impression de force, depuissance, de légitimité dansl'altérité. Or (…) dans les faits,les musulmans qui soutiennentces thèses ne font que s'isoler,se marginaliser et parfois mêmeont-ils, par leur excessif enfer-mement émotionnel, intel-lectuel et social, alimenté lalogique du système dominantdont la force, par contraste, estde se présenter invariablement,comme ouvert, pluriel etsurtout rationnel. " (p. 18)" Confondant " la communautéde foi " (…) avec le repli com-munautaire, (…) certainsmusulmans vivent totalementen marge de la société et n'in-teragissent jamais avec elle. EnOccident hors de l'Occident, ilsne se définissent que dans ladifférence, l'altérité, voire laconfrontation. (…) Le " ghetto "est autant intellectuel que socialet les indicateurs de ce prob-lème épineux peuvent déjà êtreidentifiés dans les types d' " éducation islamique " proposésaux musulmans en Occident etjusqu'aux motivations qui ontconduit à l'émergence de cer-taines structures scolaires

présentant leurs particularités davantage sous l'angle de la dif-férence que sous celui de l'originalité. " (…) Tout se passecomme s'il s'agissait de construire la personnalité du musulmanoccidental autour de sa seule conscience minoritaire et (…) touts'en ressent désormais : le discours, les revendications sociales etpolitiques, qui n'expriment presque jamais le sens d'une réelleappartenance à la citoyenneté commune, voire à l'universalitédes valeurs, mais se réduisent simplement à l'affirmation de lasingularité, de la protection, d'une action en réaction. " (pp.185-186)

" Aux Etats-Unis comme dans tous les pays d'Europe, leslibrairies dites " islamiques " n'offrent que des livres écrits pardes musulmans (souvent sélectionnés selon la sensibilité des pro-priétaires des lieux) , publiés par des musulmans, pour un lec-torat musulman dans un espace que ne fréquenteront pratique-ment que des musulmans. (…) Dans les mosquées ou les associ-ations, les activités sont pensées en marge de la société et sou-vent dans une autre langue, avec une fâcheuse tendance à con-fondre, par exemple, l'importance d'apprendre l'arabe pourcomprendre le Coran et le fait de chanter en arabe pour restermusulman. Les activités culturelles gardent, insensiblement, ungoût prononcé pour l'Orient. "" Les paroles des chants " islamiques ", les types de sorties ou dejeux [proposés aux jeunes], voire les débats organisés vont tousdans ce sens : espérer, contre l'ordre des choses, que l'adoles-cent va rester un enfant imperméable à la culture occidentale. "(pp. 363-364)

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

" … Dans le monde musulman occidentalisé, le musulman estdéchiré entre l'attrait de l'Occident et le désir de rester un boncroyant pour aller au Paradis. Non seulement l'Occidentprésente la séduction de la technique, de l'argent, du sexe, maisil valorise des valeurs [sic !] diamétralement opposées auxvaleurs de l'Islam : les valeurs de changement, d'évolution, deréforme, de progrès, de modernisation. Les valeurs de l'Islamattachent à la tradition une importance extrême au point d'enfaire la deuxième source. Tout changement est une innovationblâmable, une hérésie (…) Moderniser l'Islam est violemmentrefusé. " (pp. 11-112)

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Bernard LEWIS, op. cit. 1

"…There are growing numbersof Muslims (…) who desirenothing better than a closerand more friendly relationshipwith the West and the develop-ment of democratic institutionsin their own countries. But (…)in recent years, there havebeen some changes of percep-tion and, consequently, of tactics among Muslims. Someof them still see the West in gene-ral and its present leader, theUnited States, in particular asthe ancient and irreconcilableenemy of Islam, the one seriousobstacle to the restoration ofGod's faith and law at homeand their universal triumph. Forthese there is no way but warto the death, in fulfillment ofwhat they see as the command-ments of their faith. There areothers who, while remainingcommitted Muslims and wellaware of the flaws of modernWestern society, neverthelesssee also its merits - its inquiringspirit (…), its concern for free-dom (…). These, while retai-ning their own beliefs and theirown culture, seek to join us inreaching toward a freer andbetter world. There are someagain who, while seeing theWest as their ultimate enemyand as the source of all evil, arenevertheless aware of its powerand seek some temporaryaccommodation in order betterto prepare for the final struggle."(p. 21)

Center for the Study of Islam and Democracy, Workshops onIslam and Democracy: Morocco, Egypt, Yemen (October 2002)

"The majority of residents in nine Muslim countries surveyed ina recent (March 2002) Gallup poll said that western nations donot care about the Islamic world and are not willing to sharetheir technology with them. They said that western nations donot respect Islamic values, do not support Arab causes, and donot exhibit fairness toward Muslim/Arab countries in general.On the other hand respondents believe that citizens of westernnations do have equal rights and duties. They admire the Westfor its scientific and technological achievements, its respect forhuman rights, freedom and democracy, and most significantlyits political values and structures." (p. 5)

VIOLENCE ET REJET DE LA MODERNITE

Farhad KHOSROKHAVAR, op. cit.

" Un problème hante Qutb, tout comme Shariati: la présenced'un Occident impérialiste et arrogant qui pervertit les sociétésmusulmanes de l'intérieur et les domine de l'extérieur, dénatu-rant l'islam, brisant les communautés musulmanes et faisant deses membres des êtres diminués qui ont perdu le respect de soien renonçant à leur identité islamique. (…) L'absence de touteéthique qu'il place au cœur du système occidental lui faitrechercher une communauté dotée de sens, qu'il découvre dansl'islam. (…) Le vide occidental (…) lui paraît une inventionmaléfique où le progrès matériel et technique va de pair avecune nature diabolique susceptible de pervertir les pays musul-mans après la destruction morale des société occidentales. Leurmonstruosité s'accroît au prorata de leur immoralité. " (pp. 91-92)" L'individu défini par les islamistes est fasciné par celui auquel ils'oppose : l'homme occidental. (…) L'Occident n'est plusuniquement présent en tant que puissance dominante, il s'estdésormais incrusté dans l'imaginaire des sociétés musulmanespar la constitution d'une cinquième colonne, les occidentalisés,mais plus profondément encore, par l'émergence de nouvellescouches sociales qui déclinent leur identité à l'aune d'unemodernité où l'islam joue un rôle de plus en plus marginal. (..)Il s'agit d'un Occident qui pervertit de l'intérieur les sociétés

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musulmanes où leur jeunessecherche à se réaliser selon sonmodèle impie et son imaginairedépravé. " (p. 95)

" Dans l'islamisme radical, lerapport à autrui, en particulierà l'Occidental, est dominé parune haine qui destitue autrui etle diabolise. " (p. 97)

" Religion de la naturehumaine, l'islam est le remède àla vie épuisante dans unesociété où il n'existe plusaucune norme centrale et oùtoutes les normes semblentréduites à l'impuissance parcette tolérance qui met sur lemême plan le vrai et le faux, lejuste et l'injuste. Une société detolérance absolue exclut toutenorme, et l'équivalence de tousles principes normatifs signifiel'évacuation de la vérité duchamp de la vie. Or, l'un desprincipes auxquels croit lamodernité tardive est celui durejet de la violence. La réintro-duction de celle-ci dans sa ver-sion légitime et divinement cau-tionnée est l'une des causes dela nature rassurante que revêtla religion d'Allah dans unmonde sans âme qui vit de lanostalgie de son âme perdue. "(p. 313)

EDUCATION ISLAMIQUE

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Ce que l'on appelle désormais l' " éducation islamique " estconfiné à l'apprentissage très technique de versets du Coran, detraditions prophétiques et de règles sans réelle dimension spi-rituelle. L'apprentissage du rituel verse dans le ritualismemécanique et l'on présente un enseignement totalement décon-necté des réalités américaines ou européennes. Tout se passecomme si les enfants vivaient encore " là-bas ", et si l'on seréfère à " ici ", c'est surtout pour insister sur la méfiance que lesjeunes doivent entretenir à l'endroit d'une société qui n'est aufond pas la nôtre, pas la leur. On trouve ainsi, dans cetenseignement, deux travers (…) : la réduction de la spiritualitéau rituel technique et l'approche binaire et manichéenne fondéesur " nous " par rapport à " eux ". (…) Dans certaines mosquéesou structures islamiques, il faut se taire et écouter, il n'y a pas deplace pour la discussion, l'échange et le débat. De nombreuxjeunes sont invités à gérer une sorte de dédoublement de per-sonnalité, une schizophrénie malsaine, par laquelle ils appren-nent à s'exprimer sur tous les sujets avec des " non-musulmans "et à devenir muets (…) quand il s'agit de parler d'islam ou d'in-teragir avec leurs enseignants de religion ; (…) Ce que l'onappelle une " éducation " est en fait (…) une simple transmis-sion d'un savoir fondé sur des principes, des règles, des obliga-tions, des interdits souvent présentés froidement, de façonrigide et austère, sans âme ni humanité. (…) On apprend parailleurs au jeune musulman à valoriser sa différence à travers, leplus souvent, un discours critique et dépréciatif à l'endroit de l' " autre ", l'Occidental, auquel " il ne faut jamais ressembler ".Ce semblant de valeur, alimenté pendant le week-end par lapromotion du sentiment d'absolue altérité, se transforme, pen-dant la semaine, dans la vie de tous les jours, au contact de cet" autre " justement, en non-être et en complexe d'inférioritépresque impossible à vivre. " (pp. 217-219)

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LE "GRAND SATAN"

Bernard LEWIS, op. cit. 1

"The term "Great Satan" appliedto the United States by the lateAyatollah Khomeini refers to"Satan as depicted in theQur'an": he is "neither an impe-rialist nor an exploiter. He isthe seducer, "an insidioustempter who whispers in thehearts of men" (Qur'an CXIV, 4-5)." It thus refers to what theysee as the degeneracy anddebauchery of the Americanway of life." (p. 61)

Ibn WARRAQ, op. cit.

" L'intellectuel arabe moderneinfluence ses coreligionnaires defaçon négative : " Il est qui ilest à cause de qui il hait, pas àcause de celui qu'il aime ou decelui qu'il mène. "Naturellement, ce même intel-lectuel et son auditoire créduleglorifient un passé mythique,une sorte d'âge d'or où " unmusulman pouvait vaincre à luitout seul une centaine d'in-fidèles " ; " Son peuple seraitglorieux, son pays serait tout-puissant, si ce n'était la machi-nation des impérialistes (ou duGrand Satan, ce qui revient aumême) ". (p. 262)

PERTE DE STATUT ET DE REPERES

Gilbert ACHCAR, op. cit.

" Le discrédit idéologique mondial des valeurs socialistes pourcause d'effondrement du système stalinien; la faillite spécifiqueou la marginalité de l'ensemble des courants de gauche dans lemonde musulman; la pente de l'intégrisme islamique bienhuilée par Washington et Riyad; un contexte de criseéconomique et d'insécurité sociale croissante, sur fond de déré-glementation néolibérale à l'échelle mondiale; le tout aggravépar l'affront subi au quotidien par les populations musulmanes[plutôt arabes?], qui s'identifient aux Palestiniens ou aux Irakiens- tous ces facteurs conjugués ont produit un mélange hautementexplosif sous la forme de la contestation islamique anti-occiden-tale la plus virulente. (...) Les couches plébéiennes, ainsi que lesclasses moyennes, qui sont d'autant plus enragées qu'elles subis-sent une perte douloureuse de statut et de repères, consti-tuèrent le vivier naturel de cette manifestation de la hainesociale, nationale et culturelle. " (p. 5)

Farhad KHOSROKHAVAR, op. cit.

[La majorité des musulmans vivant en Occident] " subissentdonc à un moment une rupture existentielle, insignifiante pourd'autres personnes se trouvant dans leur situation, qui déclenchechez eux un puissant rejet de l'Occident qui incarne désormais àleurs yeux le mal absolu. S'enclenche alors un processus qui apour conséquence la suppression du malaise de la modernité(…) par l'avènement d'une transparence absolue. Celle-ci offreune conviction inébranlable, une logique d'action et une unitédu Moi qui se décline à travers une distinction claire du sacré etdu profane, du permis et du prohibé. " (p.243)

" Dans les sociétés complexes où les modes d'inscription dans laréalité sociale deviennent de plus en plus difficiles et exigentune révision et une réadaptation constantes, la réalité se donnecomme un tout opaque et illisible. Pour ceux qui viennent d'unautre monde, elle est non seulement incompréhensible maisdémoniaque. L'opacité est interprétée comme une tentativedélibérée de refuser l'accès à la transparence à ces musulmansen quête de chaleur humaine et d'hospitalité.

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Monde étrangement inamicaloù l'anonymat et la froideur seconjuguent au caractèreindéchiffrable des attitudes, à la" réflexivité " de cesOccidentaux qui se méfient desautres et dont le refus de s'ou-vrir est perçu comme signe d'ar-rogance et de mépris. (…) Nonseulement [les musulmans] nesont pas accueillis à la hauteurde leur espérance, mais on lesmet à l'écart, on ne tisse aucunlien social avec eux, l'islamfaisant peur et la méfiance desgens s'accentuant par ailleursproportionnellement auxméfaits attribués à l'islamismedans les médias occidentaux. "(pp. 281-282)

ACCULTURATION DES " MUSULMANS DIASPORIQUES "

Farhad KHOSROKHAVAR, op. cit.

" La grande majorité des immi-grés épouse les orientations cul-turelles de la société d'accueil, àpartir d'une acculturation oùl'école et la télévision jouent unrôle essentiel. Une partieépouse de nouvelles formes deradicalisme, en partie parcequ'elle se sent économiquementmarginalisée par l'exclusion etculturellement stigmatisée parle racisme. Parmi ceux qui s'in-tègrent, les réactions identi-taires se font jour auprès d'uneminorité : le besoin de se

différencier, la nécessité de s'inscrire symboliquement dans uneorigine susceptible de conférer un sens à l'existence dans dessociétés de plus en plus vouées à l'anomie, et l'aspiration àavoir un groupe restreint de référence pour ressentir unechaleur humaine dans des ensembles de plus en plus " froids ".[La clôture identitaire et la fermeture sur soi ] présentent deuxtypes majeurs : (…) la constitution d'une néo-umma paisiblemais introvertie, ou bien la rupture avec la société et la forma-tion d'une néo-umma guerrière. " (pp. 234-235)

LE DILEMME DE LA SEXUALITE

Farhad KHOSROKHAVAR, op. cit.

"En Occident, où la libération sexuelle s'est produite historique-ment dans la dénonciation du puritanisme chrétien, l'homosexu-alité s'est dotée de normalité par la perte des normes centraleset, en particulier, celle de la famille patriarcale, ainsi que par lesmouvements des femmes qui ont brisé le modèle dissymétriquede famille dominé par la figure écrasante du mari et du père.Dans (…) l'islam, la sexualité normale des hommes n'a jamaisété accompagnée de sentiment de culpabilité tel que l'instillaitle puritanisme chrétien. La normalité de la sexualité masculinese déclinait avec la polygamie qui autorisait (…) sa satisfactionpar le mariage contracté avec quatre femmes légales et plusieursautres, lors d'unions temporaires. Dans l'imaginaire musulman,la polygamie (…) garde une prégnance et donne un sens de dis-symétrie profonde du rapport entre hommes et femmes,puisque le premier peut avoir plusieurs femmes alors que l'in-verse est prohibé. Ces hommes qui se trouvent au contact de lapromiscuité occidentale se convainquent de la supériorité de l'is-lam en matière de sexualité. " (pp. 282-283)

ISLAM ET COMPLOT ANTI-ISLAMIQUE

Beaucoup de penseurs islamistes contemporains, notammentl'Egyptien Al-Ghazali, affirment que l'arriération économique,culturelle et militaire des musulmans, par rapport aux pays occi-dentaux (ou à certains pays asiatiques), résulte d'un complotourdi par les juifs et les chrétiens contre l'islam. Si les musul-mans n'ont pas su résister à ce complot, ce

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serait parce qu'ils ont abandon-né l'islam authentique, celui desorigines. Il faut donc qu'ils re-viennent à un islam intégristepour rattraper leur retard ( etretrouver, probablement, leursuprématie dans le monde). Ledjihad anti-occidental et anti-juif vise donc à combattre lasource-même du complot anti-musulman supposé et, à la fois,les influences perverses(économiques, sociales,philosophiques, culturelles)induites par ces sociétés enne-mies, qui détournent les musul-mans de leur religion pure etvraie, telle que la conçoiventles Abdel Wahhab, Hanbali,Khomeini, etc. Nous nous trouvons doncdevant une réelle paranoïa col-lective ...Ou bien est-ce un dis-cours paranoïaque inspiré parla haine

Lord Nazir AHMED, in :Muslims in Europe, post 9/11,Conference Report, St Antony'sCollege & Princeton University,25-26 April 2003, p. 28

"Since 9/11, all Muslims havehad their loyalties questionedand have found themselvesunder the spotlight and subjectto demonisation. (…) Muslimshave felt that both themselvesand their religion have beendemonized. Many have alsofelt it unfair that as Muslimsthey have been under pressure

to prove their moderacy and to condemn terrorist acts commit-ted by a very small minority."But who has started treating the USA and the Americans of"Great Satan". Isn't that, Lord Nazir, outrageous demonisation?

INTEGRATION POSSIBLE

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Tout se passe comme si les musulmans devaient se cantonner àdevenir étrangers dans une société de laquelle, d'ailleurs, ils sesont mis en marge. L'universalité de l'islam et le principe d'inté-gration qui en est le cœur nous invitent à intégrer tout le posi-tif, à procéder par sélection et à agir de l'intérieur, commemembres à part entière de nos sociétés, pour promouvoir lebien, réformer les injustices et les discriminations et développerdes alternatives qui ne confinent pas le fiqh en Occident à sepenser sur la défensive, en démarche protectrice, qui appelle " allégements ", ce qui, à long terme, pourrait prendre des allures de démissions. [Ceci demande une] révolution intellectuelle (…)pour passer de l'intégration à la contribution, de l'adaptation àla réforme et à la transformation. " (p. 102)

SHARI'A ET LOYAUTE CIVIQUE

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Le droit et la jurisprudence islamiques commandent à l'indi-vidu musulman de se soumettre au cadre du droit positif envigueur dans son pays de résidence au nom du pacte moraltacite qui déjà sous-tend sa seule présence. (…) Appliquer lashari'a, pour un citoyen ou un résident musulman en Europe,c'est explicitement respecter le cadre constitutionnel et légal dupays dont il est citoyen. (…) La loyauté à sa foi et à sa con-science impose une ferme et honnête loyauté à son pays. (p.166)" S'il arrivait qu'un clair conflit de conscience apparaisse, situa-tion au demeurant très rare, alors une étude spécifique doit êtreeffectuée par le juriste musulman afin de déterminer (…) lestypes d'adaptation possible qui puissent offrir au musulman unesolution satisfaisante, aussi bien en tant que croyant pratiquant

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qu'en tant que résident et/oucitoyen. (…) Il est [donc]illicite, pour un musulmanvivant en Occident, à lalumière des référencesislamiques, d'agir contre les lois,de commettre des abus ou desmalversations ou de frauder.Une fois l'accord conclu, agirconformément à la loi est ensoi une forme d'adoration deDieu. (…) Pour le citoyen, pourle résident, agir avec hon-nêteté, rectitude et dignité estle meilleur moyen de protégeret d'affirmer son identité demusulman et de témoigner dumessage islamique de justiceparmi ses concitoyens et sesvoisins. " (pp. 167-168)

ISLAM ET TERRORISME POLITICO-RELIGIEUX

La chaîne qatarie Al-Jezira a dif-fusé, le 12/11/02, une bandesonore attribuée à Ousama BenLaden, dans laquelle celui-cicautionne les actes terroristescommis au cours de cesderniers mois, notamment enIndonésie, au Yémen, auPakistan, en Tunisie, au Koweitet à Moscou. Toutes ces opéra-tions seraient, selon lui, "lariposte de musulmans soucieuxde défendre leur religion." Ilsseraient la représaille contre lesassassinats et bombardementsinfligés, par les Etats Unis etleurs alliés ("la GrandeBretagne, la France, l'Italie, le

Canada, l'Allemagne et l'Australie") à des musulmans enAfghanistan, en Irak, en Palestine, en Tchétchénie et ... au TimorOriental [sic !]. Il s'agit de "rétablir l'équilibre" des "massacres,destructions, dispersion, orphelinat, veuvage." C'est pour celaque de jeunes musulmans "se sont engagés devant Dieu à pour-suivre le Djihad."

L'amalgame politico-religieux est patent dans cette déclaration.Ben Laden ne dit ni où ni comment la religion islamique auraitété attaquée comme telle. Mais cette religion est présentée,primo, comme étant l'apanage commun des victimes des Etats-Unis et de leurs alliés occidentaux (les alliés non occidentaux nesont étrangement pas mentionnés!), mais quid des musulmansqui sont aussi les victimes des attentats terroristes (à New York,Bali, Karachi, etc.) dont Ben Landen fait l'apologie? Secundo,une certaine conception de la religion islamique est la source demotivation des auteurs d'attentats anti-occidentaux. Les ressortsprofonds de ce terrorisme sont cependant bien politiques:depuis les attentats de New York et Washington, les Etats-Unissont visés comme puissance économique et politique ayant unrayonnement mondial ; comme si cette puissance faisait obsta-cle aux rêves avortés d'expansionnisme politico-religieux de l'is-lam intégriste d'inspiration wahhabite. D'ailleurs, si le mollahOmar et les autres responsables talibans n'avaient pas protégéOusama Ben Laden et ses acolytes d'Al Quaeda, après les atten-tats-suicides du 11 septembre 2001, les Etats-Unis et leurs alliésn'auraient eu aucun prétexte pour envahir l'Afghanistan et met-tre fin au régime obscurantiste des talibans - et ils ne l'auraientprobablement pas fait. C'est donc bien d'une lutte contre le ter-rorisme islamiste qu'il s'agit, du côté "occidental", et non d'uneguerre contre la religion musulmane.

Quant à la très dure répression israélienne contre le terrorismepalestinien - le terrorisme du désespoir - elle n'est pas non plusune lutte d'inspiration religieuse, mais bien politique. De même,les guerres arabes contre Israël et les intifadas palestiniennes nesont pas dirigées contre le judaïsme, mais bien contre la non-acceptation du partage de la Palestine et de l'occupation brutalede terres dites arabes. Que les Etats-Unis ne fassent pas suffisam-ment pression sur Israël pour qu'il n'abuse pas de la force parun vrai contre-terrorisme contre les populations palestiniennesn'est pas du tout inspiré par des motifs religieux, anti-musul-mans. L'argument d'Ousama Ben Laden est, ici aussi, de mau-vaise foi, pour manipuler religieusement des musulmans contreles objectifs politiques - ou politico-économiques - occidentaux.

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CONTACTS HISTORIQUES ENTRE L'ISLAM ET L'OCCIDENT

Bernard LEWIS, op. cit. 2

Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, ily avait beaucoup de contactsdes marchands, savants etdiplomates occidentaux avecles pays musulmans, mais peude visites de musulmans enpays occidentaux. La doctrineislamique voulait qu'un musul-man devait vivre dans un paysmusulman ." Parmi le très petit nombre devoyageurs du Moyen-Orientqui se rendaient en Occidentpour cause de diplomatie ou decommerce, une proportionimportante n'était pas desmusulmans mais des membresdes différentes minoritésreligieuses: des Juifs, et plussouvent des chrétiens d'orient,grecs ou arméniens, que lesOttomans considéraient commerelativement fiables. " (p.54)

" Pour les hindous, les bou-dhistes, les confucéens et biend'autres, le christianisme et lachrétienté étaient desphénomènes nouveaux etinconnus. (...) Pour les musul-mans, le christianisme, et doncimplicitement tout ce qui luiétait associé, était connu, fami-lier et méprisé. Le christianismeet le judaïsme étaient desprécurseurs de l'islam, et lessaintes écritures découlaient de

révélations authentiques; toutefois, incomplètes et corrompuespar leurs indignes gardiens , celles-ci avaient été supplantées parla révélation parfaite et définitive accordée à Mahomet. L'islamavait préservé ce que le christianisme renfermait de vrai. Lereste était faux. (...) Entre l'islam et le christianisme il existait unlourd contentieux, absent des relations que l'un ou l'autre pou-vait entretenir avec les civilisations, plus lointaines, d'Asie. " (pp.53-54)

Sélim NASSIB, " Pour en finir avec le monde arabe ", Le Mondediplomatique, mars 2003, pp. 12-13

" Dans l'une de ses cassettes, Ousama Ben Laden affirmait (…)que le monde arabe était en déclin " depuis quatre-vingts ans ".(…) Cela nous ramène au début des années 1920, (…) l'écroule-ment de l'Empire ottoman, la prise en charge de la région parles Anglais et les Français. A cette date, les Arabes sont sortis de4 siècles de tutelle turque pour être désormais gouvernés pardes infidèles. Le fait explique la remarque de Ben Laden : pointde salut hors du gouvernement musulman (le califat). "

" Les intellectuels arabes, eux, avaient réalisé quel'Empire ottoman déclinait inéluctablement au profit d'unOccident à la supériorité et aux appétits manifestes. Pourrelever le défi, ils avaient été à l'initiative, dès la fin du XIXèmesiècle d'un grand mouvement de renaissance culturel et poli-tique, la Nahda, où se mêlaient la volonté de réformer l'islam,de transformer la société et de retrouver les sources vives quipermettraient enfin aux Arabes de faire partie du monde. Latraduction politique en était la nécessité de se libérer de ladomination ottomane. Cette émancipation ne pouvant êtremenée sous la bannière de l'islam (l'Empire turc étant lui-mêmemusulman), elle devait forcément l'être au nom d'un nationa-lisme arabe en gestation, regroupant musulmans, chrétiens etlaïques. "

" En 1948, quand l'Etat d'Israël est proclamé, les Arabesont l'impression d'être une nouvelle fois mis hors du monde. Lahonteuse compromission de Hadj Amine el-Husseini, alors chefdes Palestiniens, avec Hitler pendant la guerre mondiale les adéconsidérés. (…) La sympathie (…) internationale estnaturellement allée aux survivants de l'Holocauste, et pas dutout à la population palestinienne, dont les trois quarts ont plusou moins été forcés à l'exil du fait de la création d'Israël. (…)

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7. Histoire des frustrations arabes face à l’Occident

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Partie de la Nahda, laRenaissance, la première grandetentative arabe de faire partiedu monde s'est cassée les dentssur la Nakba, la catastrophepalestinienne. "

" Le coup d'envoi duchambardement est donné parl'Egypte, où la révolution porteau pouvoir des militaires dirigéspar Gamal Abdel Nasser. (…)Le monde arabe devient bipo-laire, avec, d'une part, l'Egyptealliée de l'Union soviétique et,de l'autre, l'Arabie saouditealliée de l'Amérique. "

" La lutte contre le com-munisme étant à l'époque leurobsession, les Etats-Unis pren-nent un peu partout l'habitudede jouer stratégiquement l'islamle plus fondamentaliste contreles " progressistes ", présentéscomme des mécréants, descommunistes, des athées et desennemis de Dieu. "Le mouvement lancé parNasser a sans doute échouépour toutes sortes de raisons,mais l'opinion arabe n'enretient (…) qu'une seule : laNaksa, la défaite militaire his-torique subie lors de la Guerredes Six-Jours, en juin 1967.Chassés du monde encore unefois, les Arabes vivent de nou-veau Israël comme la source detous leurs échecs et de tousleurs malheurs, ce qui leurépargne par ailleurs de seremettre en question eux-mêmes. "

" L'avènement de Ben Laden comme figure d'oppositionreprésente un tournant capital. Avec lui, il ne s'agit plus decourir en vain pour essayer de rattraper le " monde moderne ",mais de s'en venger en le détruisant - pour reconstruire sur sesruines la nation musulmane idéale. "" Au final, le sentiment d'être arabe et d'appartenir vaille quevaille à la communauté [musulmane] se révèle plus fort quel'aspiration démocratique, perçue comme un rêve inaccessible. "

" Pour dénouer cette région, il aurait fallu commencerpar résoudre, avec un minimum de justice et d'humanité, sonproblème mythologique central : la Palestine. Cela n'aurait sansdoute pas suffi, (…) mais cela aurait ôté toute justification auxdictatures, à la pensée communautaire, au repli sur soi, au senti-ment d'exclusion et à l'explication-réflexe qui est à la source detous les maux : c'est la faute aux autres. "

KEDOURIE, in B. Lewis (ed.), The World of Islam (London1976), cite dans Ibn WARRAQ, op. cit.

"Les succès politiques légitimaient l'islam, et le déroulement del'histoire prouvait la vérité de la religion. Les musulmans se bat-taient pour repousser les frontières de l'islam et pour mortifierles incroyants. La guerre était sainte et la félicité éternelleattendait ceux qui tombaient au champ d'honneur. Une tellecroyance, que l'histoire de l'islam elle-même semblait confirmer,donnait aux musulmans un sentiment de supériorité et d'assu-rance. En conséquence, une longue série de défaites face auxchrétiens européens ne pouvait que miner l'amour-propre desmusulmans et aboutir à une profonde crise morale et intel-lectuelle. Car la défaite militaire n'était pas seulement unedéfaite matérielle ; elle jetait aussi la suspicion sur la vérité ducredo musulman.Dans ce contexte, il n'est pas étonnant que les intellectuelsmusulmans (…) aient tout fait pour inculquer aux peuplesislamisés une haine farouche de l'Occident qui, à long terme,retardera l'expression du besoin de réformes, de changements,l'adoption des droits de l'homme, le règne de la loi ; enrésumé, toutes les idées qui viennent de l'Occident et qui sontconsidérées comme des traits distinctifs des civilisations occiden-tales. " (p. 261)

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ATTITUDE PERMISSIVE DES GOUVERNEMENTS OCCIDENTAUX

Bernard LEWIS, op. cit. 1

"The "devil-you-know" principleseems to underlie the foreignpolicy of many Western go-vernments toward the peoplesof the Islamic world. This atti-tude is sometimes presentedand even accepted as anexpression of sympathy andsupport for the Arabs and theircauses, apparently in the beliefthat by exempting Arab rulersand leaders from the normalrules of civilized behavior [sic!]we are somehow conferring aboon on the Arab peoples. Infact this exemption is (…) atthe very best a quest for a tem-porary alliance based on ashared self-interest and directedagainst a common enemy (…).At a more profound level ofreality, it is an expression ofdisrespect and unconcern."Arab rulers are thus able toslaughter tens of thousands oftheir people, as in Syria andAlgeria, or hundreds of thou-sands, as in Iraq and Sudan, todeprive men of most andwomen of all civil rights, andto indoctrinate children in theirschools with bigotry and hatredagainst others, without incur-ring any significant protest fromliberal media and institutions inthe West, still less any hint ofpunishments (…). This so-to-

speak diplomatic attitude toward Arab governments has in rea-lity been profoundly harmful to the Arab peoples, a fact ofwhich they are becoming painfully aware." (p. 81)

FACTEURS NEGATIFS INTERNES AU MONDE ARABE

Tariq RAMADAN, Interview dans Le Point du 22/04/04, pp.68-69

" Aujourd'hui, dans le monde musulman, il y a une confusioncaricaturale entre Occident et chrétienté. Des décisions de droit local, émanant d'Etats, sont très vite vuescomme des attaques contre l'islam…Les Etats-Unis, au niveau international, et Israël, au niveau local,sont perçus comme des pays dominateurs. Et les musulmans sevoient comme résistants à cette domination. "

Fethi BENSLAMA, op. cit.

" S'il est vrai que les masses dans le monde arabe endurent,depuis des dizaines d'années, une condition dégradante sur tousles plans, en réduire les ressorts à l'humiliation par l'Occident oules Etats-Unis, c'est commettre une imposture intellectuellequant aux mécanismes qui ont abouti à cette condition. (…)Depuis plus de vingt ans, l'actualité nous a fourni, sur tous lesfronts, les signes d'un délabrement politique profond du mondearabe, qui a atteint ses structures anthropologiques fondamen-tales. (…) La destruction du politique engendre une cruauté quiruine la dignité des hommes.(…) A une génération d'hommes politiques courageux qui ontamené leurs peuples à affronter les puissances coloniales, àarracher leur émancipation et à gagner le respect de tous a suc-cédé une clique de " mal venus " qui se caractérisent, à quelquesexceptions près, par une combinaison de traits infâmes : ils sontsouvent incultes, corrompus, tyranniques.(…) La richesse du monde arabe est détenue par 200 famillesrégnantes, y compris dans les pseudo-républiques. La principaled'entre elles, la plus paradigmatique de cet état, est la familleSaoud, qui assimile tout un pays à ses campements.[Pour détourner l'attention de leurs peuples sur leur responsabi-lité, ils ont propagé l'idée que les responsables sont les Etats-Unis

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et l'Occident.] Ces puissances,sans la complicité desquelles cesrégimes n'auraient pas survécu,ont montré le peu de casqu'elles faisaient des intérêts despeuples que leurs protégés sontsupposés représenter.[Mouvement de Renaissance dumonde arabe (nahda), à partirde la moitié du XIXème siècle,jusqu'à l'émancipation du colo-nialisme ; mais les dirigeantsarabes ont alors senti le dangerque représentait pour eux cetteRenaissance, qu'ils ont contréeen finançant] " l'émergence desmouvements islamistes radicauxpour détruire les forces de li-berté, suspendre l'interprétationdes textes anciens et diffuserleurs propres valeurs. (…) Unefois la gauche détruite, larevendication politique n'a plusd'autre possibilité que de passerpar la formation la plus arméeémotionnellement, l'idéologiereligieuse mâtinée de nostalgie

de l'Age d'Or. Elle convertit l'exclusion des masses en un puis-sant ressentiment contre la modernité. (…) Issu d'une factionqui prône un puritanisme rigoriste (le wahhabisme), qui répudiel'islam des Lumières, [le pouvoir saoudien] diffuse, à travers lesmouvements islamistes, une conception littérale de la religion,hantée par un Dieu vengeur qui demande toujours plus derenoncement (…) [Ainsi], l'une des branches ultraminoritairesde l'islam (…) parvient, par les moyens que lui donne larichesse du pétrole et avec le soutien de son protecteur améri-cain, à transformer l'anomalie en une idéologie dominante. "(pp. 108-111)

Abdelwahab MEDDEB, op. cit.

" … Aujourd'hui, le monde islamique est inconsolé de sa desti-tution. Très souvent le sujet d'islam ou le sujet arabe se déres-ponsabilise. Il attribue son mal aux autres, à la longue série his-torique de ceux qui lui ont fait mal. Le premier, c'est le croisé.Le deuxième, c'est le Mongol. Le troisième, c'est le Turc, lecolonisateur de l'intérieur (…). Le quatrième, c'est bien sûr lecolon occidental. Le cinquième, c'est Israël et son allié améri-cain. "

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INTEGRISME EN GENERAL

Rostane MEHDI, Dialogueinter-religieux, in : InterculturalDialogue, Brussels 20-21 March2001, pp. 90-94.(L'auteur vise implicitement l'is-lamisme)

" La stagnation, voire la régres-sion, guette une civilisationlorsque celle-ci se sent (plusqu'elle ne l'est réellement) me-nacée de l'extérieur et de l'in-térieur par un adversaire fantas-matique qui le dénierait radi-calement. Elle est alors tentéede se replier sur elle-mêmepour résister et est ainsiempêchée d'évoluer avec sontemps.Que dire, en effet, de ces inté-gristes de tous bords qui, con-fits dans la célébration d'un âged'or mythique, s'acharnent parle feu et par le sang à imposerau monde un projet dont l'i-nanité est pourtant saisissante.Vecteurs d'une foi littéralliste,les radicalismes, en rejetanttoute herméneutique, signent letriomphe d'une ignorance quifait, à son tour, le lit d'unemeurtrière intolérance. "

NOTION D' " ISLAMISME "

Olivier ROY, op. cit.

"Nous appelons "islamistes" les mouvements qui voient dans l'is-lam une idéologie politique et qui considèrent que l'islamisationde la société passe par l'instauration d'un Etat islamique, et passeulement par la mise en oeuvre de la charia. (...) Trois grandestendances se dégagent. [1] D'une part, la pression islamiste,combinée avec la volonté des régimes en place de se donnerune légitimité religieuse, a partout entraîné une réislamisationde la société sous des formes conservatrices (portant sur le droitet les mœurs); or cette réislamisation échappe aujourd'hui tantaux islamistes qu'aux gouvernements, car elle a permis l'émer-gence de nouveaux acteurs qui ne s'inscrivent pas dans la pers-pective d'une gestion du pouvoir étatique (notables, prédica-teurs, mais aussi terroristes). ( ...) [2] D'autre part, les mouve-ments islamistes sont aujourd'hui dans une logique d'intégrationau champ politique national: devenus " islamo-nationalistes ", ilssont confrontés à la nécessaire reformulation idéologique quileur permettrait d'entrer de plain pied dans le jeu politique;lorsque celui-ci n'est pas verrouillé par des dictatures. [3] Enfin,(...) la radicalisation islamique et le terrorisme se sont déplacésaux marges du monde musulman, à la fois géographiquementet sociologiquement, sous la forme d'un fondamentalisme sun-nite, idéologiquement très conservateur mais politiquementradical. (...) L'islamisme offre toujours la seule idéologie demobilisation populaire protestataire, nourrie par le déficitdémocratique et l'hostilité croissante de l'opinion publiqueenvers les Etats-Unis." (pp. 29-31)

"Bin Laden a intitulé son mouvement "Front islamique de luttecontre les juifs et les croisés", c'est-à-dire les chrétiens." (p. 98)

Farid KHOSROKHAVAR, op. cit.

"Si par islamisme on entend les courants qui cherchent à associerétroitement le politique et le religieux, leur histoire remonte(…) aux premiers siècles de l'islam. Les tendances minoritairesvoulaient, à chaque fois, réaliser la société idéale du prophète,à la fois dirigeant politique et religieux.Si on entend par islamisme un courant politico-religieux qui vise

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8. Islam et intégrisme islamiste

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à s'approprier le pouvoir enjustifiant un recours éventuel àla violence afin d'instaurer demanière autoritaire un régimeselon la shari'a (…), en mo-dernisant de manière ambiguël'islam sans l'avouer explicite-ment et en islamisant demanière tout aussi tacite lamodernité en insistant parti-culièrement sur l'opposition àl'Occident, alors l'islamisme estun phénomène relativementmoderne qui date des années1930 (Frères musulmans enEgypte) et dont l'apogée sesitue dans le dernier tiers duXXe siècle.L'une des caractéristiquesimportantes de la plupart descourants islamistes est la cen-tralité qu'ils accordent, dansleur production doctrinale, auxnotions de djihad et de mar-tyre. " (pp. 60-61)

" ISLAMISME " / INTEGRISME RADICAL ISLAMIQUE

Gilbert ACHCAR, op. cit.

Avec Maxime Rodinson, Achcarcondamne l'expression " islamisme ", à cause de la con-fusion fréquente avec islam. Le terme " intégrisme ", définicomme " l'aspiration à résoudreau moyen de la religion tousles problèmes sociaux et poli-tiques et, simultanément, derestaurer l'intégralité de la

croyance aux dogmes et aux rites (...) a le grand avantage (...)de permettre de souligner le fait que cette utilisation de la reli-gion n'est pas l'apanage exclusif de l'Islam, mais qu'il existe aussides intégrismes catholique, protestant, juif, hindou, etc., mêmesi chaque intégrisme est, bien sûr, spécifique. " (p. 84-85)

Anne-Marie DELCAMBRE, op. cit.

" L'islamisme n'est pas la maladie de l'Islam. Il est l'intégralité del'Islam. Il est la lecture littérale, globale et totale de ses textesfondateurs. L'islam des islamistes, c'est tout simplement l'Islamjuridique qui colle à la norme. " (…) C'est donc, en fait, " ledésir d'application totale du Coran et de la Sunna à la lettre ".(p. 11)

Bruno ETIENNE, op. cit.

" Les différents mouvements de réislamisation, au delà de leurdiversité, sont porteurs d'une contestation, d'une rupture avecla société occidentale et avec les valeurs fondatrices du systèmesocial issu de la décolonisation (tiers-mondisme, socialismearabe, etc.). Ils prétendent s'opposer à un islam de compromis-sion qui se serait accommodé d'une modernité portée par lasécularisation ; ils affirment leur volonté de ressusciter l'âge d'orde l'islam, et leur mot d'ordre, implicite ou explicite, est sansambiguïté : " le Coran est notre Constitution ". Mais il s'agitd'un slogan, pas d'une nouvelle théologie. " (pp. 82-83)" L'islamisme a mis en avant ce qui est intrinsèque, propre etessentiel à l'islam, ce qui constitue un facteur d'unité de la com-munauté arabo-islamique. (…) L'islamisme est donc l'utilisationpolitique de l'islam par les acteurs d'une protestation percevantla modernité comme portant atteinte à leur identité à la foisnationale et religieuse. (pp. 86-87)" L'islamisme radical est une protestation anti-moderne. " (p. 144)

Mohammed CHARFI, op. cit.1

" Les intégristes font vibrer la fibre religieuse pour reconquérir lepouvoir, s'opposent à l'évolution et cherchent à revenir sur lesacquis de la modernité. " (p. 143)

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Lucette VALENSI, " Modèleenvié et haï ", in : Les nou-veaux penseurs de l'islam,numéro hors-série du NouvelObservateur n° 54 (avril-mai2004)

" L'expansion de l'islamismeradical dans les années 1970correspond, d'une part, aureflux du nationalisme arabe età l'essoufflement du nationa-lisme dans chaque pays ;d'autre part, à la puissancematérielle acquise par l'ArabieSaoudite, pays qui s'est attachéà financer la diffusion de laforme la plus rigoriste de l'islam, le wahhabisme. " (p. 24)

LE RELIGIEUX ET LE POLITIQUE SELON LES ISLAMISTES

Bruno ETIENNE, op. cit.

" L'islamisme contemporain estné de cette affirmationthéorique : " l'ordre transcen-dantal des choses est : la reli-gion, le monde, le pouvoirpolitique ; la religion (dîn) pré-vaut sur le séculier (dunya), etla forme du pouvoir politique(dawlat) est secondaire. " …Il s'agit, à mon sens, plusd'un réveil politique s'effectuantà travers une lecture politiquede l'islam que d'un renouveaureligieux. " (pp. 79-80)

Mohamed CHARFI, " Faire sauter les verrous intellectuels ", inPanoramiques n° 50 (1er trimestre 2001), pp. 181-187.

" Dans le Coran, Dieu s'adresse au prophète en disant : " Tu n'eslà que pour rappeler la parole de Dieu. Tu n'as aucun pouvoircontraignant à exercer... " Dieu dénie au prophète la qualité deCommandeur, celui qui donne des ordres. Il ne peut pas êtrechef d'Etat. " Pourtant, Mahomet, à Médine..." Après la mort du prophète, le khalifa s'est constitué. C'était lenoyau d'un Etat qui commençait à naître. Celui-ci avait trouvéune légitimité à confisquer la religion. Il l'a ainsi instrumenta-lisée pour se donner un sens, une philosophie et une idéologiepouvant servir de ciment. Ce fut l'œuvre d'Abou Bakr àMédine. (...) Il y a eu une collaboration entre les ulamas et lesgouvernements. Et, ce faisant, on a cédé aux ulamas - théolo-giens - le pouvoir législatif. (...) L'idée ... s'est incrustée dans latête des musulmans ... que l'islam n'est pas seulement une reli-gion mais une identité et un droit, c'est-à-dire un Etat. (...) Lesintégristes veulent toujours confondre charîa et religion etespèrent revenir à la soi-disant pureté de l'islam des quatre pre-miers califes, etc. "

Rainer BRUNNER, op. cit.

" Le fondamentalisme islamique a une double nature : c'est unphénomène politique autant que religieux. Politique parce qu'ilréagit à la situation politique et sociale dans le monde islamiqueet à la politique de l'Occident ; religieux, parce que l'image del'histoire qu'ont les fondamentalistes, ainsi que leur argumenta-tion, sont résolument islamiques. On ne peut pas affirmer demanière globale que, dans l'islam, toute séparation entre lasphère religieuse et la sphère politique est impossible - car, aucours de l'histoire, elle a pratiquement été la règle. "

Henri WIBAULT, op. cit.

" Mohammed TALBI est conduit à aborder le problème récur-rent, propre à l'islam contemporain, du mouvement du retouractuel à un islam régressif [et agressif]. Il écrit:'A partir de lacolonisation, le monde musulman s'est mis en quête d'uneidéologie mobilisatrice lui permettant de résister, de récupérer

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son être. Or la seule idéologiemobilisatrice disponible étaitl'islam. Le trio Afghani-Abdou-Riddha a cru, au début duXXème siècle, trouver la solu-tion dans un réformisme musul-man. L'échec de ce réformismepacifique et la débâcle dumonde arabe face à Israël en1948 ont favorisé la naissancede l'intégrisme avec les Frèresmusulmans égyptiens. Pendantun temps, l'intégrisme politiquefut supplanté par le nationa-lisme arabe nassérien, délig-itimé à son tour par le désastrede 1967. Nasser tente alors deretrouver une légitimité en s'ap-puyant sur l'islam. SaddamHussein a fait la même chosedeux décennies plus tard enmenant la guerre du golfe aunom de l'islam. Les pouvoirsont donc toujours tenté d'utili-ser la religion comme forcemobilisatrice."

Influencé par la pensée freu-dienne, Talbi estime que: tantque notre subconscient n'aurapas été libéré, nous ne pour-rons pas créer notre moderniténous permettant, comme l'occi-dent, d'être en relation dialec-tique avec notre histoire et deretrouver une santé pour vivrepleinement notre présent sansdouleur, sans déchirure, etassumer le futur sans peur.Nous devons nous libérer decette peur affreuse, que nousavons, de ce qui va nous arriver. "

Fethi BENSLAMA, op. cit.

" Nommer le désespoir des masses dans le monde islamiquec'est dire que l'Etat moderne aux mains d'une élite postcolonialea (à l'exception d'un Bourguiba) déclenché un processus incon-trôlable de destruction insue de l'ordre ancien des identifica-tions primaires, pour mettre à sa place un simulacre de cons-truction, sans parvenir à réaliser autre chose qu'une série dedésarticulations. L'immédiateté de la tradition elle-même estrompue et dessaisie de sa conscience (…). L'idéologie islamisteest la réponse en mixte d'illusions à la révocation subjective quecette césure a effectuée en masse. " (p. 104)

" Venus avec un langage de prédication proche du corps et dessoucis de l'existence, [les islamistes] dressèrent un islam mono-lithique qui ne souffre pas la contradiction interne, polarisèrentl'opposition entre Islam et Occident, et proclamèrent le projetd'une restitution du propre (au double sens de l'exclusif et del'immaculé) à travers un autre genre d'immédiateté, celle del'accès à la plénitude originelle du politique. C'est la promessedu retour à l'âge d'or de la fondation islamique, où le com-mencement et le commandement étaient réunis en un mêmeprincipe, entre les mains du prophète-fondateur-législateur, puisde ses quatre successeurs ; temps supposé d'une justice idéalesur terre, avant la chute dans la division et la sédition interne(fitna) que connaîtra par la suite la communauté. " (pp. 21-22)

Dans l' " islamisme " il faut distinguer (a) " le courant fondamen-taliste, qui a existé de tout temps et qui prône la stricte applica-tion des prescriptions islamiques en référence au message ori-ginel. C'est l'islam conservateur et rigoureux qui se veut intem-porel, qui refuse la littérature, la musique, la poésie, qui necherche pas à s'emparer de l'appareil étatique mais prône aucontraire la distanciation, voire la séparation avec lui. " (b) " Lesmouvements d'action politique qui veulent s'accaparer l'Etat,considérant que l'islam n'est pas seulement une religion, maisqu'elle [sic !] est aussi une idéologie et un système de gouverne-ment. Leur projet vise l'islamisation totale de la société et lacréation d'un Etat islamique. Ce sont ces mouvements plus oumoins radicaux, plus ou moins violents, qui se sont imposés surla scène publique au cours des années soixante-dix. " (pp. 24-25)

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L'ISLAMISME ET LE RETOUR A L'ORIGINE

Fethi BENSLAMA, op. cit.

" Evénement inouï que nousappellerions l'abrogation de l'o-rigine qui a eu lieu lorsque lesbases théoriques de l'islamismeont été jetées à la fois enEgypte (Hassan Al-Banna, 1906-1949) et en Afghanistan (AbûAlâ Mawdûdî, 1903-1976) audébut du siècle dernier. C'estl'Egyptien Sayyid Qutb qui arepris ces bases et les a consti-tuées en une doctrine dontl'idée centrale est que lesmusulmans seraient revenus autemps de la jâhiliya, c'est-à-direà l'époque qui précède la fon-dation islamique. " D'après lui,les sociétés musulmanes " nesont plus gouvernées par la loiislamique (chari'a) dans lamesure où elles ont adoptél'Etat moderne et le droit quilui correspond, inventé parl'Occident laïque. Donc, con-trairement aux apparences, cessociétés ne sont plus musul-manes : (…) elles ont régressévers l'époque de la barbarie etde l'ignorance de la loi divine,c'est-à-dire vers l'anté-islam.(…) Il faut [donc] " ré-islamiser" les musulmans. (…) Les mou-vements islamistes se don-neront en conséquence pourtâche (…) de faire repasser lesmusulmans par l'origine. (…)Cette théorie (…) autorise parailleurs les groupes extrémistes

violents à tuer et à massacrer sans scrupule, comme en Algérie,en répétant l'argument de la régression : ce sont des apostats,pis, des simulacres de musulmans dont la mort rendrait serviceà l'islam. Davantage encore, leur meurtre les absoudrait de leurpéché d'avoir régressé vers la pré-origine et d'être devenu desmusulmans en apparence. " (pp. 51-52)

Sayyid QUTB, Ma'alim fi el-Tareek (Signs along the Road), citepar Mark. A GABRIEL, op. cit.

"The way that life is lived to-day is an insult to Allah and hisauthority on earth. It contradicts godly principles. This idola-trous world gives the authority of Allah to humans as if theywere God. (…) To-day's heathens reverence and honor man-made constitutions, laws, principles, systems and humanisticmethods. They disregard Allah's law and his constitution forlife. We should immediately eliminate this pagan influence and theheathen pressure on our world. We must overturn this currentsociety with its culture and leadership of infidels.Demolish all governments and organizations that are esta-blished by man. (…) The return of God's kingdom can only beestablished by a movement of power and sword." (pp. 118-119)

LA PREDICATION SALAFISTE

Bernard DELATTRE, " Les imams salafistes dévoilent leur jeu ",in La Libre Belgique 21/04/04, p. 10Voir aussi Le Monde du 22/04/04, p. 11

Abdelkader Bouziane, imam de Vénissieux (Rhône), a publié unentretien dans le mensuel de Lyon " Lyon Mag " d'avril 2004,dans lequel il affirme que " battre une femme, c'est autorisé parle Coran, mais dans certaines conditions, notamment si lafemme trompe son mari. " Mais il ne faut pas frapper n'importeoù : " pas au visage, mais viser le bas, les jambes ou le ventre. Ilpeut frapper fort pour faire peur à la femme, afin qu'elle nerecommence plus. " Il justifie aussi la lapidation, récuse l'idéeque la femme soit l'égale de l'homme, justifie la polygamie,rabaisse la musique à un péché et prône l'instauration d'unerépublique islamique en France. [Abdelkader Bouziane a ensuite

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prétendu, évidemment, que sesparoles avaient été déformées]D'autres imams, notamment deVénissieux et de Brest, ont aussieu maille à partir récemmentavec la justice française parcequ'ils prêchaient un islam radi-cal et violent.

ASPECTS SOCIOLOGIQUES

Dounia BOUZAR, " La socialisa-tion des jeunes beurs à l'écolerépublicaine influence leur rap-port à Dieu ", in : Le Mondedes Religions, n°1 (sept.-oct.2003) : Les rénovateurs del'Islam.

" La réappropriation des textesmusulmans [Coran et Sounna]dans le contexte laïc et une cul-ture qui donne la primauté àl'épanouissement de l'individuest un moyen pour [certains ]jeunes de se sentir françaiscomme les autres tout enrestant liés à leur histoire.(…)Mais, certains jeunes, souffrantd'une situation d'exclusion,recherchent dans les écritsreligieux une légitimation deleur haine et des argumentspour l'alimenter. Ils se pensentexclus parce qu'ils sont musul-mans et leur projet de résis-tance face à la société ambianteest donc de devenir encore plusmusulmans. C'est ainsi qu'ilsvont chercher les versets et leshadith dans l'intention de

justifier des codifications inhérentes au groupe auquel ils appar-tiennent et de se différencier le plus possible des autres. (…) Lalecture des textes se fait alors avec l'unique perspective d'être " fidèles au comportement du Prophète. " (p. 31)

Farhad KHOSROKHAVAR, op. cit.

" Pour comprendre l'univers de représentation des nouveauxmartyrs d'Al Qaeda, il faut prendre en considération deux idéesmajeures : d'une part le sentiment d'humiliation qu'ils éprou-vent, d'autre part celui de l'arrogance occidentale. Plusieurstypes d'humiliation sont en jeu, dont trois revêtent une signifi-cation particulière (…). En premier lieu, celle que l'on éprouvedans la vie quotidienne, soit parce qu'on se trouve dans une si-tuation de marginalisation économique et d'infériorité sociale(…). En second lieu, le sentiment que l'on vit, par médias inter-posés, l'humiliation du monde musulman en Bosnie, enAfghanistan, en Irak ou en Palestine, sentiment intériorisé pardes mécanismes d'identification. Enfin, l'idée parfois ressentieque l'immersion dans le monde occidental a souillé l'individu.Avoir quitté son pays d'origine (…) engendre ce sentiment des'être indûment dérobé au malheur de ses coreligionnaires dansles sociétés musulmanes. Participer à l'action d'un groupe quiopère en Occident pour combattre son hégémonie et son arro-gance rehausse l'individu à ses propres yeux et lui rend une di-gnité perdue. " (pp. 238-239)

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BUTS ET METHODES

Mark A. GABRIEL, op. cit.

Depuis le début des années1970, le terrorisme islamiste amodifié ses cibles et ses objec-tifs. Auparavant, il visait cer-tains individus en vue : diplo-mates, militaires gradés, politi-ciens ; depuis, il vise le publicen général. Son but est main-tenant de semer la peur sur unegrande échelle, afin d'obtenirun plus grand pouvoir de négo-ciation pour atteindre sesobjectifs. (pp. 175 et 180)

CAUSES

Yudishthir Raj ISAR, " The inter-cultural challenge : an impera-tive of solidarity ", in :Conférence sur le dialogueinterculturel, 20-21 mars 2002(Commission européenne,2003)

" Terrorism emerges from blindhatred of the " Other ", andthat in turn is the product ofthree factors : fear, rage andincomprehension - fear of whatthe Other might do to you,rage at what you believe theOther has done to you, andincomprehension about who orwhat the Other really is. " (p. 169)

TERRORISME ISLAMISTE ET TERRORISME NATIONALISTE

L'analyse psychanalytique et socio-religieuse de Daniel SIBONYsur le phénomène du terrorisme islamiste montre bien qu'il fautdistinguer tout à fait le terrorisme islamiste de celui desPalestiniens à l'égard des Israéliens, qui est d'inspiration avanttout politique - tout comme l'était le terrorisme juif à l'égard dela puissance de tutelle de la Palestine avant l'indépendance del'Etat d'Israël. Le point de rencontre de ces deux terrorismes sesitue dans les motivations religieuses qui encouragent desacteurs palestiniens à recourir aux attentats-suicides, qui sontparticulièrement " efficaces " contre les populations civiles. Lesennemis politiques des Palestiniens étant des non-soumis, desjuifs " menteurs et pervers " (selon le Coran), le djihad contreeux est une guerre sainte, dont les victimes musulmanes sontdes " martyrs " (shahidin), auxquels la récompense paradisiaqueest assurée sans délai par le Coran7. Il n'en reste pas moins quece terrorisme palestinien n'a rien à voir " avec les agissementsdes talibans, [ou avec le terrorisme anti-chrétien au Pakistan, enEgypte, en Irak et en Indonésie,] ni avec le phénomène d'AlQaïda, qui a développé sa dynamique propre avec la mondiali-sation et la modernisation. " (Azmi BISHARA, " Terrorisme etrésistance ", in Le Monde, 26/02/02).L'inspiration essentiellement politique du terrorisme palestinienest explicitée comme suit par Georges BENSOUSSAN (du Centrede documentation juive contemporaine) : " Ici, [dans les atten-tats-suicides palestiniens], la priorité est l'assassinat et non le sui-cide. Mue, non tant par le désespoir que par le refus rémanentd'ordre social et culturel, (...) d'ordre politique, voire quasimétaphysique (" Reconnaître Israël, ce serait reconnaître le non-être arabe ", déclarait jadis Ahmed Ben Bella). " (" Force dufaible, faiblesse du fort ", in Le Monde, 2/06/02). La citation de Ben Bella introduit une nouvelle dimension ànotre problème : dans quelle mesure la relation à l'Autre-Occident est-elle vécue de façon particulièrement traumatisantepar la nation arabe, en plus de sa composante religieuse ? Carl'Islam paraît bien avoir été instauré par Mohamed avec l'idée,consciente ou inconsciente, d'asseoir la suprématie arabe.

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9. Le terrorisme d’inspiration islamiste

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1Cet amalgame politico-religieux est bien illustré par les déclarations de Mohammed Tantawi, cheikh de l'université Al-Azhar au Caire : dansun de ses prêches, rapporté par le New York Times, il déclarait que les " opérations martyrs " des Palestiniens étaient " la forme la plus hautede la guerre sainte ". Et le grand mufti d'Egypte, Ahmed Tayeb, cité par le même journal, voit dans la prolifération des attaques-suicides, "qui sèment la terreur chez les ennemis d'Allah (...), la solution à la terreur israélienne ". (Voir Le Monde, 19/04/02, p. 19)

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ISLAMISME ET TERRO-RISME ANTI-IMPERIALISTE

Jean-Claude GUILLEBAUD, op. cit.

" Les mouvements fondamen-talistes et terroristes du nou-veau siècle (…), loin d'être leshéritiers d'une tradition etd'une foi vivante, sont les pro-duits d'une révolte qui procèdede la modernité elle-même, etde son nihilisme. " (p. 244)

Olivier ROY, op. cit.

" Toute aggravation du conflitpalestinien, toute interventionmilitaire américaine dans larégion ne peuvent que ren-forcer un anti-américanismepartagé désormais par toutesles couches de la populationmusulmane, ce qui explique lepassage à l'acte de ses mem-bres. Mais cette violence n'estpas islamique : elle est anti-impérialiste...Il y a chez Bin Laden à la foisune profonde nouveauté et unecertaine tradition... La nou-veauté est dans les formes decombat : l'action du kamikaze.Elle est complètement absentede la tradition islamique ortho-doxe (le martyr est celui quimeurt au combat, et non pascelui qui cherche délibérémentla mort) et est apparue dans lesannées 1980, dans les mouve-ments chi'ites comme le

Hezbollah libanais, avant de s'étendre tout récemment aux sun-nites. Mais ce type de terrorisme n'est pas propre au mondeislamique... (p. 22).On ne peut comprendre le mouvement [de Bin Laden] que sion l'inscrit dans une double filiation, tout aussi occidentale quemusulmane : celle d'un discours islamique radical de ruptureavec les sociétés existantes jugées corrompues (celui que tien-nent les Talibans), mais aussi un anti-impérialisme tiers-mondisteexacerbé et qui ne se reconnaît pas dans le mouvement actuelanti-globalisation, perçu sans doute comme réformiste, pacifisteou trop occidental. " (p. 25)

TERRORISME ET MEDIAS

Bernard LEWIS, op. cit. 1

"Thanks to the rapid development of the media, and especiallyof television, the more recent forms of terrorism are aimed notat specific and limited enemy objectives but at world opinion.Their primary purpose is not to defeat or even to weaken theenemy militarily but to gain publicity and to inspire fear." (p. 114)

LE CAS D'AL QUAÏDA

Gilbert ACHCAR, op. cit.

" Le réseau d'Al Quaïda représente la frange la plus fanatiqueet la plus violente de l'intégrisme islamique international, frangenaguère enrôlée pour dix ans de combat sans merci, enAfghanistan, contre une armée soviétique ne faisant elle-mêmepas de quartier.Fanatiques illuminés ou délinquants (re)convertis, de nombreuxmembres du réseau Al-Quaïda, une fois démobilisés enAfghanistan à la fin de la guerre contre les Soviétiques et leursalliés, ont tourné leurs armes contre les gouvernements de leurspays d'origine: Algérie, Arabie " saoudite ", Chine, Egypte,Ouzbékistan, Philippines, Russie, Tadjikistan, Tchétchénie,Tunisie, etc. Ils ont rejoint ou contribué à fonder, dans chacunde ces pays, des réseaux locaux, adeptes de la lutte armée et decet assassinat de civils à des fins politiques ou idéologiques quel'on appelle communément " terrorisme ". Financés durant la

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guerre d'Afghanistan par dessources à la fois étatiques etprivées [(Etats-Unis, Arabiesaoudite, autres monarchiespétrolières et pays musulmans,donateurs privés)], les réseauxdu fanatisme islamique arméont vu se tarir leurs sources definancement étatiques après lafin de leur mission anticommu-niste.Dans la poursuite de leur com-bat, cette fois contre des gou-vernements alliés de l'Occident,ils ont réussi à maintenir (...)une partie du financementprivé dont ils bénéficiaient [enutilisant diverses méthodesoccultes que la CIA leur avaitapprises au cours de la guerreantisoviétique]. (pp. 44-45)Le réseau Al-Quaïda n'est quel'un des avatars enragés d'unemouvance politique entretenuepar Washington depuis plusd'un demi-siècle: l'intégrismeislamique. " (p. 46)

Oussama Ben Laden, loin d'êtrel'expression d'une révolte pro-gressiste (…) contre la monar-chie saoudienne et ses pro-tecteurs, est le porte-drapeaude l'idéologie wahhabite la plusréactionnaire, c'est-à-dire de laversion extrême de l'idéologiedominante du royaume. Certesson positionnement - très médi-atique - comme ennemi publicnuméro un des Etats-Unis luivaut l'allégeance ou la sympa-thie d'un nombre considérablede " damnés de la terre " et de

personnes détestant légitimement l'hégémonie américaine et sesrelais locaux, dans l'ensemble du monde musulman (...) et bienau delà. " (p. 74)

Multiples attentats d'Al-Quaïda contre les intérêts américainsdepuis 1995. En février 1998, Ben Laden " proclamera un "Front islamique mondial pour le djihad contre les juifs et lescroisés [c'est-à-dire les chrétiens et, par extension, lesOccidentaux]", dont la première déclaration présente commelégitime et impératif, au nom de la religion islamique, de " tuerles Américains et leurs alliés, militaires et civils ". On y trouveles thèmes plusieurs fois réitérés depuis lors: la triple condamna-tion de la présence des troupes états-uniennes sur le territoiresacré de la péninsule arabique, de l'embargo meurtrier contre lapopulation musulmane irakienne et du massacre de la popula-tion musulmane palestinienne par l' " alliance entre les croisés etles sionistes ". (pp. 76-77)" La haine d'Oussama Ben Laden pour les Etats-Unis n'a d'égaleque sa haine de la monarchie saoudienne. (...) Son combatvisait donc, au premier chef, à forcer le retrait des troupesaméricaines du royaume saoudien et à mettre fin à la protec-tion qu'ils accordent à son régime exécrable. (...) " (p. 92)Explication des attentats du 11/09/2001: " Pour Ben Laden, ils'agissait de créer une situation telle que la population améri-caine - excédée de faire les frais de l'engagement de son gou-vernement dans une région du monde à laquelle elle n'est pasplus attachée qu'elle ne l'était au Vietnam naguère ( !?) - fassepression dans le sens du désengagement et du retrait. (...) Erreurfatale que commettent de la même façon les kamikazes pales-tiniens du Hamas: dans un cas comme dans l'autre, les actionsterroristes touchant les civils ne font que rallier les populationsvisées aux politiques les plus réactionnaires et les plus brutalesde leurs gouvernants. Si les [communistes] Vietnamiens ontréussi à obtenir le retrait des troupes états-uniennes de leur solen 1973, c'est en combinant une lutte militaire incontestable-ment légitime dans ses modalités (...) avec un discours adresséau peuple américain, faisant appel à son sens de la justice etnon à sa peur. " (p. 96)

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François BURGAT, Al Qaeda,fille naturelle de tous leségoïsmes du monde, (Institutde Recherche et d'Etudes sur leMonde arabe et musulman,Aix-en Provence, 2004, 3pages)

" Je vois à l'émergence de lagénération Al-Qaeda trois sériesde causes.La première tient aux méthodesqu'emploient les Etats-Unis enparticulier et l'Occident engénéral pour mettre en œuvrece qu'ils appellent " la défensede leurs intérêts " au Proche-orient et dans le monde arabe.(…)La seconde [cause] tient au ca-ractère non démocratique etrépressif de la majorité desrégimes arabes sur lesquels ils[les puissances occidentales]s'appuient pour ce faire. (…) La" formule politique arabe " secaractérise avant tout par leprimat de la répression sur lareprésentation. (…) Cettecomédie démocratique ne pro-duit pas la moindre protesta-tion occidentale. (…)La troisième [cause] est liée àl'évolution interne du courantislamiste. L'épisode afghan et ladéfaite infligée à l'URSS ad'abord donné l'occasion à unegénération d'activistes de pren-dre conscience de sa force et del'efficacité d'une guérilla con-duite fût-ce contre une grandepuissance. Les terribles contra-dictions de la " formule poli-

tique arabe " ont parallèlement contribué à discréditer lesréférences modernisatrices et les stratégies légalistes et modéréesdont la composante majoritaire du courant islamiste, représen-tés par les Frères Musulmans, s'était faite le défenseur. Lesdynamiques de modernisation politique et sociale (…) promuespar les Frères Musulmans sont apparues comme d'autant moinslégitimes que les frères avaient obtenu fort peu de résultats con-crets. (…) Les stratégies plus radicales des jihadistes s'en sontlogiquement trouvées confortées. "

Rohan GUNARATNA, Al-Qaida, au cœur du premier réseau ter-roriste mondial, (Ed. Autrement, 2002)

" Al-Qaïda a fait passer le terrorisme du statut de technique deprotestation et de résistance à celui d'instrument de défi contrel'influence occidentale dans le monde musulman. " L'objectif des fondateurs d'Al-Qaïda al-Sulbah (la Base solide)était de créer des sociétés reposant sur les plus stricts principesislamistes. L'idéologue jordano-palestinien Abdullah Azzam aconceptualisé Al-Qaïda en 1988 (…) : " Tout principe a besoind'une avant-garde qui le porte plus loin et, tout en s'intro-duisant dans la société, accepte de lourdes tâches et d'énormessacrifices. Aucune idéologie, céleste ou terrestre, ne peut se dis-penser de cette avant-garde qui donne tout ce qu'elle possèdeafin d'assurer la victoire de l'idéologie en question (…), jusqu'aumoment où elle atteint concrètement sa destination, puisqueAllah a voulu qu'elle y parvienne pour se rendre manifeste.C'est Al-Qaïda al-Sulbah qui constitue cette avant-garde pour lasociété espérée. " (Al-Jihad, n° 41, avril 1988, p. 46) (pp. 5-8)

Oussama BEN LADEN, " Les raisons demeurent pour ce qui s'estpassé ", Passages traduits de la vidéo diffusée par la chaîne Al-Jazira le 29/X/2004, (Le Monde, 31/X-1/XI/2004)

" O peuple américain (…) si nous vous avons combattus, c'estparce que nous sommes libres, nous ne fermons pas les yeux surles valeurs, nous voulons rendre la liberté à notre nation. De même que vous attentez à notre sécurité, nous attentons àla vôtre…[Concernant l'attentat du 11 septembre 2001] " après avoir vul'injustice et l'arbitraire de l'alliance américano-israélienne contre

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nos frères en Palestine et auLiban, cette idée m'est venue àl'esprit. Les événements quim'ont ému d'une façon directeremontent à 1982, lorsquel'Amérique a donné le feu vertaux Israéliens pour qu'ilsenvahissent le Liban (…). En cesmoments pénibles j'ai ressenti(…) un grand sentiment derejet de l'injustice et une fortedétermination à punir lesinjustes. "N.B. Contrairement à de nom-breuses déclarations antérieuresd'Oussama Ben Laden, il n'estplus question ici du djihad pourdéfendre la religion contre ceux" qui veulent détruire l'islam " !

JUSTIFICATIONS RELIGIEUSES DES ATTENTATS-SUICIDES

Rohan GUNARATNA, op. cit.

" Les privilèges d'un martyr sontgarantis par Allah; le pardonvient dès que son sang com-mence à couler, on lui montresa place au Paradis, on ledécore des bijoux d'Imaan [lafoi], il est marié à l'une desbelles, protégé de l'épreuve dela tombe, sa sécurité estgarantie pour le jour duJugement, il reçoit la couronnede la dignité, (…) il est uni àsoixante-douze des pureshouris, et son intercession enfaveur de soixante-dix de sesparents sera acceptée. (…) Ces

jeunes gens savent que leur récompense, s'ils vous combattent,vous, les Etats-Unis, sera double de celle que leur vaudrait lalutte contre d'autres que ceux du peuple du Livre. Leur seuleintention est d'entrer au Paradis en vous tuant. Un infidèle, unennemi de Dieu comme vous, ne peut se trouver dans le mêmeenfer que le noble bourreau. " (Déclaration de guerre lancéepar Ousama ben Laden avec les chefs du Front islamique mon-dial pour le jihad contre les juifs et les croisés)." Plus que dans tout autre groupe islamiste, la culture du mar-tyre est au cœur de la psyché collective. Le terroriste convaincucherche à infliger le maximum de dommages à la cible ennemieen la frappant sans crainte, quitte à se détruire lui-même. (p. 12)

SENTIMENT DE NON-CULPABILITE DES TERRORISTES

Farhad KHOSROKHAVAR, op. cit.

" Si, dans les actes [de violence aveugle] des membres d'AlQaeda il n'y a pas de sentiment de culpabilité vis-à-vis des vic-times innocentes des attentats, c'est qu'il n'y a pas, dans cettepartie du monde, d'innocents à proprement parlé. Ils sont " coupables " dans le sens d'une totalité organique dont lesmembres ne sont pas des individus mais des parcelles liéesétroitement les unes aux autres. A l'individu occidental onriposte par le déni d'individualité des sociétés que l'on combat.Il n'y a pas d'individu, il n'y a qu'un ordre inhumain quiopprime les musulmans (…). Ainsi s'ouvre un gouffre entre laréalité telle qu'elle est vécue par l'Occidental et la vision unifiante ettotalisante que l'islamiste plaque dessus. " (p. 280)

SENS DES ATTENTATS DU 11 SEPTEMBRE 2001

Gilles KEPEL, " Le nouveau chaos du monde musulman ", in :Nouvel observateur n° 2078 (2 septembre 2004)

" Ben Laden et ceux qui se réclament de lui ont utilisé la vio-lence pour essayer de contrôler l'expression de l'islam aujour-d'hui. Ils ont déclenché le 11 septembre dans ce but. (…) Ils ontdéclenché les attentats parce qu'ils considéraient que les mouve-ments islamistes radicaux djihadistes des années 1990 avaientessuyé partout un échec : en Algérie, en Egypte, en Bosnie, et

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aussi au Cachemire. Ils ontdonc choisi de changer destratégie et de lancer la guerrecontre l' "ennemi lointain ",c'est-à-dire les Etats-Unis. (…)Des petits groupes de terroristes(…) vont, par la répercussionde l'acte spectaculaire à traversles médias avoir un effet dechoc qui, espèrent-ils, auradeux conséquences. La pre-mière, la plus opérationnelle,de servir à recruter plus de par-tisans. Leur " exploit " serarelayé par l'internet, il circuledans le cercle des sympathisantsqui pourront devenir des mili-tants activistes. La seconde, c'estla répercussion à travers lestélés, (…) qui, elles, s'adressentà la fois au monde musulmanet à ses " ennemis ". Bref, le butest d'emplir de joie les bonscroyants et de crainte les " méchants ".

Jochen HÖRISCH, " La commu-nication grotesque de l'après 11septembre 2001 ", in GoetheMerkur, n° 641-642 (septembre-octobre 2002), pp. 50-57

" Ce n'est pas un hasard si lesterroristes du 11 septembre sontdes théoriciens du complot ets'ils prennent des dimensionstemporelles et globales sansprécédent : depuis des siècles setrame, selon eux, un complotglobal contre l'islam, qui s'in-tensifie pour prendre aujour-d'hui une tournure dramatique.

[De même,] les nazis voulaient obtenir une victoire finale surune prétendue conjuration juive mondiale censée durer depuisdes millénaires. "Dans l'attentat du 11 septembre 2001, " plusieurs milliers de per-sonnes des deux sexes, de toutes les couleurs de peau, de toutesles religions et de tous les âges ont perdu la vie. C'est précisé-ment cette cible qui détient une force symbolique compréhensi-ble de tous et pratiquement indépassable : ce qui constitue,pour tout fondamentaliste, l'horreur pure et simple (…) Si l'onsuit la logique symbolique de la terreur fondamentaliste, on a ledroit, et même le devoir, de tuer ce genre de personnes. Dansle " guide spirituel " remis aux auteurs des attentats-suicides, onpeut lire : " Toutes les civilisations occidentales qui jouissent deleur pouvoir ont une grande faiblesse interne. N'aie donc pasde peur ni de crainte si tu es un croyant, car les croyants necraignent que le Dieu Tout-puissant qui détient le pouvoir surtoute chose. Les croyants croient en ayant confiance dans le faitqu'à la fin l'incroyant sera vaincu. Rappelle-toi que Dieu abattraet vaincra les incroyants… Et comme l'a dit Moustafa, l'un desadeptes du Prophète, tue et ne pense pas aux biens de ceux quetu tueras. Car cela te détournera de la finalité véritable de tonacte… ".

" Dieu soit loué, aucun esprit occidental, aussi humilié et provo-qué soit-il, ne cède sérieusement à la tentation d'entrer dans lalogique symbolique religieuse et brutale des terroristes qui con-sisterait à aller détruire la Kaaba à La Mecque. Puisque ce dontles islamistes prêts à la terreur soupçonnent " l'Occident " n'existe pas, il faut manifestement le provoquer par des attentatsterroristes systématiques : la haine de l'Occident contre l'islam,et l'envie irrésistible de mener une croisade contre lui. (…) " Et pourquoi, du reste, l'Occident devrait-il haïr l'islam ? Pourdes raisons facilement compréhensibles, cela fait des siècles qu'ilne perçoit chez lui aucun défi. Car une culture qui, vers l'anMille, était à maints égards et depuis trois bons sièclessupérieure à la culture chrétienne occidentale, s'est transforméeen une entité tristement figée, suscitant plus la compassion quela haine. (…) Le monde islamique est remarquablement peuproductif depuis plus de cinq siècles - ce qui ne constituerait pasun grand problème s'il n'entretenait pas une image de lui-mêmequi souligne sa supériorité dynamique et missionnaire surd'autres religions et cultures. "

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" Le point commun desmouvements qui militent con-tre les temps modernes et lamodernité, c'est le fait qu'ilsn'admettent pas ce qui rend lestemps modernes et la moder-nité tellement irrésistibles : l'au-to-critique et la dissensioninterne, qui sont le revers del'humour et du comique. "

Herfried MÜNKLER, " Le ter-rorisme comme stratégie politi-co-militaire ", in GoetheMerkur, n° 633 (janvier 2002),pp. 5-9

" La stratégie du terro-risme repose moins sur les con-séquences physiques de l'usagede la violence que sur les effetspsychologiques qui endécoulent : elle ne mesure pasle succès de ses attaques auxdommages matériels et aunombre des morts qu'elles ontprovoqués, mais à la peur et laterreur, et vraisemblablementaussi à l'encouragement et l'es-poir que ces agressions appor-tent à son propre parti. "

Au sujet des attentats-suicides du 11 septembre 2001 :- D'une part, ils recelaientun message adressé aux massesdu monde islamique : (a) " mal-gré leur immense supérioritétechnologique, économique etmilitaire, les Etats-Unis n'étaientpas invulnérables, on pouvaitles attaquer à n'importe quelmoment, pourvu que l'on choi-

sisse la bonne stratégie et que l'on dispose de combattants prêtsà mourir. " et (b) " il fallait augmenter l'espoir et la confiance ensoi du monde islamique, lui montrer qu'un conflit global avec lemonde occidental, même mené par des moyens violents, n'étaitpas dénué de perspectives de succès, malgré la supériorité con-sidérable de l'Occident. "- D'autre part, " il n'est pas invraisemblable que cetteattaque ait eu pour cible principale le tissu fragile de la psy-chologie économique capitaliste. (…) Les dégâts causés par leseffets psychiques des attentats ont sans doute été plusieurs foissupérieurs à ceux provoqués par les destructions immédiates. "

SENS DES DECAPITATIONS D'OTAGES

Henri TINCQ , " La décapitation, un rituel de mort pour les ter-roristes islamistes ", in : Le Monde, 25 septembre 2004, p. 4

" Le rituel macabre de l'exécution des otages est respecté avec leplus extrême raffinement. Les images de la décapitation desdeux Américains - et d'autres avant eux - prouvent que leurmise à mort est conçue comme un cérémonial de type religieux.(…) Sur les écrans [le monde] voit le bourreau, après la lecturedu communiqué de condamnation, se précipiter sur sa victime.Il la jette au sol et lui tranche la gorge aux cris d' "Allah akbar "lancés par ses complices (…). La tête est ensuite détachée dureste du corps. Elle est brandie comme un trophée, puis placéesur le dos de la victime, selon une liturgie minutieusement pré-parée et accompagnée de psalmodies du Coran. Cette mise enscène sacralisée fait partie du meurtre lui-même. Elle lui donneson sens le plus profond. (…)La décapitation, dans les pays d'islam - après égorgement,étranglement ou brûlure sur le gril - et l'exposition de la têteremontent à la plus ancienne tradition khalifale. Plus précisé-ment (…) à ce tournant de 661 quand a eu lieu la premièrerupture entre les dynasties ommeyade et abbasside. Ou plusencore au moment de l'assassinat des deux fils d'Ali, Hassan etHussein, lors de la fameuse bataille de Kerebala (680) à l'ori-gine du schisme chiite. (…)Les khalifes despotiques et sanguinaires qui se sont succédé, àBagdad ou Damas, ont tous réglé leurs comptes de cettemanière. "

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QUELQUES DECLARA-TIONS ET ACTIONS AGRESSIVES DE RESPONSABLES ET MILI-TANTS ISLAMISTES

Abdel MZOUDI, marocain,accusé par la justice allemandede complicité dans les attentatsdu 11/09/2001 et de soutien àune organisation terroriste :dans une cassette saisie dansson appartement, il chante etinvite les musulmans à mettreun terme au règne des " infidèles ", à tuer leurs enfants, à capturer leurs femmes et àdétruire leurs maisons. (Le Monde, 14/08/03, p. 4)

Abou Bakar BAACHIR, chefspirituel présumé de la JemaaIslamiyah, réseau régional ter-roriste du Sud-Est asiatique,arrêté par la police indonési-enne et traduit en justice pouravoir commandité plusieursattentats en 1999 et 2000, ainsique ceux contre un hôtel à Balile 12/10/2002 et l'hôtelMarriott à Djakarta le5/08/2003, a déclaré devantses juges qu'il faut " se battrecontre les infidèles qui oppri-ment les musulmans.Combattre est une obligationchaque fois que l'occasion s'enprésente. "Les accusés du procès de Balitiennent un discours de luttecontre les " infidèles ", les " Blancs " et les " juifs ",

sans parler du vœu de mourir en " martyr ". (Le Monde,12/08/03, p. 3)

Cas d'Imam SAMUDRA, un des islamistes condamnés à mort àla suite de l'attentat commis à Bali en octobre 2002 : " Il estentré dans le djihad en suivant la voie de la vengeance dumonde musulman écrasé en Afghanistan et en Palestine. Alorsles bombes explosent partout, loin de l'Afghanistan, jusqu'àfinalement pulvériser 202 âmes à Bali. " (Courrier international,n° 680, p. 53)

En janvier 2000, dans le village d'Al-Kosheh, en Haute-Egypte,21 chrétiens, hommes, femmes et enfants furent mutilés, tor-turés et/ou tués par des militants musulmans : certains furentbrûlés vifs, d'autres furent d'abord ouverts verticalement depuisla gorge, d'autres encore furent amputés d'un bras et de lajambe opposée avant d'être renvoyés dans leur village pour ysemer la peur. Ceci en application du Coran, sourate V, 33.(Rapporté par Mark. A. Gabriel, dans Islam and Terrorism, p.182)

Attentat du 29 mai 2004 à Khobar (Arabie saoudite), relaté aujournal Sawt Al-Jihad (identifié comme lié à Al-Qa'ida), par lechef du commando islamiste, Fawwaz bin Muhammad Al-Nashami : Exécution d'un Britannique, directeur de l'Arab Oil InvestmentCompany : " Nous avions attaché l'infidèle par une jambe der-rière la voiture. (…) Les habits de l'infidèle étaient en lambeauxet il était nu dans la rue. La rue était pleine de gens, car c'étaitpendant les heures de travail, et chacun a pu voir l'infidèle sefaire traîner, éloge et gratitude à Allah. "" Nous ne sommes pas venus pour cibler des musulmans mais,selon la volonté de notre prophète Mahomet, pour purger lapéninsule arabe des infidèles et des polythéistes, qui tuent nosfrères en Irak et en Afghanistan. "Nous avons tranché la gorge de plusieurs " infidèles ", améri-cains, sud-africains, suédois, philippins, indiens hindous, italiens,etc. " Nous avons demandé à Allah d'accepter cet acte de dévo-tion de notre part, de sa part. " (cité dans " Terrorisme etfanatisme ", in : Foi et Sagesse, n° 11 (juin 2004), pp. 23-37)

Al-Quaïda : Déclaration de guerre lancée par Ousama benLaden avec les chefs du Front islamique mondial pour le jihad

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contre les juifs et les croisés,Afghanistan, 23 février 1998)" Avec l'aide de Dieu, nousappelons tous les musulmansqui croient en Dieu et souhai-tent être récompensés à exé-cuter l'ordre de Dieu, à tuer les

Américains et à s'emparer de leurs biens partout et chaque foisqu'ils le peuvent. Nous appelons aussi les oulémas, les chefs, lesjeunes et les soldats à lancer l'assaut contre les troupessataniques des Etats-Unis et contre les suppôts du diable qui leurservent d'alliés, à chasser ceux qui les soutiennent, pour leurdonner une leçon. "

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DIALOGUE INTERRE-LIGIEUX ET INTERCUL-TUREL EN GENERAL

CONSEIL OECUMENIQUE DESEGLISES, Déclaration sur la plu-ralité religieuse : perspectives etaffirmations théologiques

" Nous considérons la pluralitédes traditions religieusescomme étant à la fois le résul-tat des manières diverses dontDieu est entré en relation avecpeuples et nations et une mani-festation de la richesse et de ladiversité de l'humanité. Nousaffirmons que Dieu a été aveceux dans leur recherche et leurdécouverte, que là où il y avérité et sagesse dans leursenseignements, amour et sain-teté dans leur vie, cela, commetoute forme de sagesse, intuition,connaissance, amour et saintetéqui se trouve parmi nous, est ledon de l'Esprit Saint (II, §4)" De plus, nous affirmons quec'est sous la guidance de l'EspritSaint que nous pourrons être àmême d'interpréter la vérité etla bonté des autres religions etde discerner " les choses qui dif-fèrent ".

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" On a, sur le plan nationalcomme international, unpaysage très contrasté : le dia-logue est bien engagé entre des

spécialistes plutôt ouverts de chacune des religions, le commundes fidèles se rencontre peu et, enfin, ceux dont les positionssont les plus tranchées ou radicales ne prennent jamais langue.(…) Le cercle est vicieux : c'est justement parce que l'on s'ignoreou que l'on se rejette que le dialogue est impossible. (…) Il s'agit d'écouter l'autre, de l'interpeller et de le questionner pourmieux comprendre, et s'engager en aval à travailler, à l'intérieurde sa propre communauté, à informer, à expliquer, voire àenseigner. " (p. 335)

Jean-Claude GUILLEBAUD, op. cit.

" Des croyances raffermies dialoguent plus aisément entre ellesque des " religions " inquiètes ; la foi s'ouvre d'autant plusnaturellement à l'autre qu'elle est vivante, non routinière etmieux assurée d'elle-même. Le dialogue véritable (…) exige quechacun définisse préalablement, à visage découvert, la nature desa foi, de son agnosticisme ou de son athéisme. " (p. 325)

François BURGAT, " Les non-dits du " dialogue des cultures " :portée et limites du traitement culturaliste de la violence poli-tique " (Rabat, 11-13/12/03)

Sur la " velléité d'attirer l'autre dans son univers de croyance " : " l'autre, pour devenir vraiment fréquentable et accepté,autrement dit universel, doit non point tant souscrire auxvaleurs humanistes que nous partageons que faire sien mon sys-tème symbolique d'expression de ces valeurs. Il ne m'importepas qu'il soit juste, honnête, respectueux de l'autre " à samanière " ; il doit l'être " à l'identique ". (…)C'est à la tâche très ambitieuse d'identifier les innombrablesmanières qu'ont dogmes et doctrines de dénier à la culture del'Autre la capacité d'exprimer une référence universelle qu'unefficace " dialogue des cultures " devrait pouvoir s'atteler. " (p. 8)

Rostane MEHDI, op. cit.

" En acceptant les différences culturelles (lato sensu) tout en sereconnaissant comme membre d'une commune humanité et enidentifiant des valeurs communes sur le plan politique, il

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10. Dialogue islam-occident

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devient possible de vider cesdifférences de leur substanceéventuellement délétère… " (p.90)L'échange mettra en évidence lefait que la fracture, que d'au-cuns se plaisent à décrirecomme inévitable, divise peut-être moins les religions ou lescivilisations elles-mêmes que lespartisans d'une vision obscuran-tiste du monde et les personnesassumant un patrimoine devaleurs. A cet égard, il me sem-ble qu'une civilisation quin'aspirerait pas à l'œcuménismeet qui choisirait de s'engagerdans la voie de la confronta-tion, péricliterait et s'éteindrait.L'ouverture à l'autre apparaîtbien ainsi comme une exigencevitale. " (p. 91)

Marie ARENA, op. cit.

" Le dialogue interculturel doitdéboucher sur un pacte social,axé sur trois valeurs centrales :- L'insertion sociale : nousdevons nous mobiliser pour lut-ter contre toutes les formesd'inégalité, car la précarité etl'exclusion sont le lit de toutesles manipulations et, à terme,d'un repli identitaire dont nousne voulons pas. Cette lutte con-tre l'exclusion sociale (…) doits'appuyer localement sur desassociations représentatives descommunautés étrangères, maisà condition de travailler dansun esprit d'ouverture : le but

est que chaque minorité (…) participe à la construction d'unesociété multiculturelle.- La citoyenneté : (…) Dans un monde où la mobilité n'ajamais été aussi grande et où des personnes peuvent changer depays à plusieurs reprises au cours de leur existence, il faut pou-voir exercer sa citoyenneté là où l'on vit, sans devoir forcémentse faire naturaliser. En contrepartie, il est important pour lasociété d'accueil de définir les acquis démocratiques (et un soclede valeurs communes) qui ne peuvent pas être remis en causepar l'exercice de cette citoyenneté plus large.- L'interculturalité, qui est depuis toujours un des fonde-ments de l'histoire et de la construction européennes. Nousdevons prôner un brassage des différentes cultures dans lerespect de la spécificité de chacun. (…) On ne peut pas s'é-panouir en reniant ses racines, mais on ne peut pas non plusconstruire quelque chose de neuf en restant confiné dans uncommunautarisme étroit. Le tissu associatif est un partenaireimportant pour faire ce lien entre la culture d'origine et celle dupays d'accueil. "

METHODE DU DIALOGUE

Albert GUIGUI, Le Dialogue interreligieux entre Défis etRéalités, (Conférence sur le Dialogue interculturel, 20-21 mars2002, Commission européenne, 2003)

" Les débats dans lesquels les différentes religions tombent trèsvite d'accord reposent généralement sur des démissions et descompromis. C'est en toute lucidité et en toute franchise que ledébat doit être entrepris, dût-il se prolonger longtemps, dût-ilaboutir à une impasse. Il vaut mieux se respecter dans la diver-gence que se rencontrer dans la démission.Dialoguer avec autrui consiste à le connaître et à le reconnaîtredans la plénitude de sa responsabilité et à l'accueillir comme unachèvement de nous-mêmes plutôt que comme un adversaire,concurrent ou ennemi. Cela ne peut se faire qu'à l'abri des idéespréconçues, des intérêts et des égoïsmes de toutes sortes. Dansun tel climat, le dialogue devient une richesse partagée sans quel'un des partis ait à renoncer à son identité et à son patri-moine…Cette découverte de l'autre, son écoute attentive nous permetde mieux connaître notre héritage et nos valeurs spirituelles.

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L'autre nous contraint àchercher notre propre essenceet notre vrai visage…Le vrai dialogue implique lacompréhension, l'effort decomprendre le partenaire enses termes plutôt que simple-ment dans les nôtres. Ilimplique le partage, l'apport audialogue de nos convictions lesplus profondes, même si ellessont potentiellementdouloureuses pour l'autre. Maispour cela il ne faut pas sous-estimer ou atténuer les dif-férences. Dialoguer signifiedonc introduire les différencesdans des relations de respect etde confiance mutuelles. L'autre, lorsqu'il est accueilli etécouté en vérité vient renou-veler, élargir notre appréhen-sion du mystère de l'homme.(…) Il y a là - pour chaque per-sonne et pour chaque tradition- la possibilité d'un accroisse-ment de sens, d'un renouvelle-ment en profondeur, d'unefécondation et donc d'undynamisme neuf. " (P. 105)

Tariq RAMADAN, op. cit. 1

" Définir une tradition religieuserevient donc à traduire ce qu'ilen est de Dieu, des prophètes,des messages, mais aussi de cequ'est l'homme au sein de cettetradition, de ce que sont sesresponsabilités, ses devoirs, sonidentité, ses droits, etc. la con-ception de l'homme doit donc

faire l'objet d'une étude minutieuse et rigoureuse ; il s'agit dereplacer l'homme au centre d'un système philosophique etreligieux, ce qui est en soi fondamental si l'on veut vivre sa reli-gion avec épanouissement et sérénité. " (p. 117)

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" On peut tolérer un individu en l'ignorant. L'objectif est, aufond, le respect. On ne respecte vraiment l'autre que lorsquel'on vit et que l'on échange avec lui en développant unemeilleure connaissance mutuelle. Il faut (…) que nos différencesconnues et reconnues nous interpellent mutuellement : raisonpour laquelle les musulmans d'Occident doivent normaliser leurprésence sans la banaliser. (…) Au cœur de cette stimulationmutuelle, les musulmans ne peuvent que retrouver les dimen-sions universelles du message qui est le leur et essayer d'en êtreles témoins. (…) Etre soi non pas contre autrui mais à côté delui, avec lui, en gérant nos différences dans la proximité proac-tive et non dans les espaces reclus de nos ghettos intellectuels etsociaux. " (p. 190)

Tariq RAMADAN, op. cit. 1

" On ne peut entamer de dialogue sérieux sans les bases d'unprofond respect. Et le sens du respect s'articule dans la com-préhension exigeante de la vision de l'autre. S'entêter à limiterune tradition religieuse à un bloc monolithique, qui ne connaîtni dynamisme ni réflexion, limite considérablement la com-préhension mutuelle. " (p. 126)

LA QUESTION DES VALEURS

Olivier TINLAND, " Des valeurs en conflit ", in : Les NouveauxPenseurs de l'Islam, numéro hors-série n° 54 du NouvelObservateur, p. 26.

" En dernier ressort, le choix d'agir ainsi - ou autrement - relèved'une décision proprement injustifiable du point des valeursmises en jeu : s'il est impossible de justifier nos valeurs, c'est pré-cisément parce que les valeurs constituent la condition de possi-bilité de toute justification. "

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Marie-José LALOY, " Entre inté-grisme et intégration, Islam etMusulmans dans l'espaceeuropéen ", in : La Pensée et lesHommes (Ed. Espaces de lib-ertés), n° 52, pp. 95-96

" L'intégration d'un individuc'est aussi l'intégration, par lasociété, des valeurs de cet indi-vidu lorsqu'elles enrichissent lepatrimoine commun. "

LA QUESTION DE LA VERITE

Hans UCKO, " Vérité ou Vérités", in : Voies de l'Orient, n° 93(octobre-novembre-décembre2004), pp. 2-11

" La vérité considérée dans unsplendide isolement, séparée etsans lien avec la complexité dela vie, risque de devenir abu-sive, dominatrice, exclusive etdénigrante. S'accrocher à unevérité pour elle-même nonseulement risque de deveniridolâtrique, mais entraîne unedévalorisation de la respon-sabilité. Nous risquons de nouscacher derrière la Vérité, refu-sant le devoir d'être respon-sables. " (p. 7)Rechercher la vérité dans lepassé peut être agréable, par-courant les avenues de lamémoire, mais cela revient àchercher la neige de l'hiverpassé. " (p. 9)

SOURCES CORANIQUES DU NECESSAIRE DIALOGUE

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

Coran IV, 35 : " Si Dieu l'avait voulu, Il les (êtres humains)aurait réunis dans la Direction ; ne sois donc pas au nombre designorants. " La diversité est donc voulue par le Transcendant.Coran X, 99 : " Si ton Seigneur l'avait voulu, tous ceux qui sontsur la terre croiraient. Est-ce à toi de contraindre les gens jusqu'àce qu'ils soient croyants ? " La contrainte en matière de religionest donc interdite.Coran V, 48 : " Si Dieu l'avait voulu, Il aurait fait de vous uneseule communauté, mais il en est ainsi afin de vous éprouver ence qu'Il vous a donné. Rivalisez donc dans le bien. "Coran II, 251 : " Si Dieu ne repoussait pas certains hommes pard'autres, la Terre serait corrompue. Mais Dieu est Celui qui dis-pense la grâce aux mondes. " L'être humain a besoin de laprésence de l'autre pour contenir ses velléités d'expansion et dedomination.Coran XXII, 40 : " Si Dieu ne repoussait pas certains hommespar d'autres, les ermitages seraient démolis, ainsi que les syna-gogues, les oratoires et les mosquées où le nom de Dieu estfréquemment invoqué. " Si diversité des religions il y a, c'estbien dans le but de les protéger respectivement.Coran XXIX, 46 : " Ne discutez avec les gens du Livre que de lameilleure des manières, sauf ceux d'entre eux qui ont étéinjustes. Dites : Nous croyons en ce qui nous a été révélé et ence qui vous a été révélé. Notre Dieu et le vôtre ne sont qu'unseul et même Dieu et nous lui sommes entièrement soumis. "Coran XLIX, 13 : " Ô vous les gens, (…) Nous vous avonsrépartis en nations et tribus pour que vous vous connaissiezmutuellement. " La connaissance de l'autre est donc le passageobligé qui permet de dépasser la crainte de la différence et par-venir au respect mutuel. (pp. 337-339)

Certains versets semblent aller à l'encontre de ceux mentionnésci-dessus, notamment ceux qui définissent les juifs et les chré-tiens comme des kuffar, que l'on traduit le plus souvent par " infidèles " ou " mécréants " :Coran V, 17 : " Ils sont certainement en état de négation(kafara) ceux qui ont dit que Dieu était le Messie fils de Marie. "

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Coran III, 85 : " Celui qui désireune autre religion que l'islamne se verra point accepté et ilsera, dans l'au-delà, au nombredes perdants. " Contra ( !):Coran II, 62 : " Certes, ceux quiont cru, les juifs, les chrétiens etles sabéens, tous ceux qui ontcru en Dieu et au jour duJugement dernier et qui ont faitle bien ; ceux-là auront leurrécompense auprès de Dieu, ilsn'auront point peur et ils neseront point attristés. "Coran II, 120 : " Et les juifs etles chrétiens ne seront pas satis-faits de toi tant que tu ne sui-vras pas leur religion. " Du hautdes estrades (minbar) desmosquées, lors de conférencesou de séminaires, on entend ceverset qui est censé expliquerl'attitude des juifs ou des chré-tiens vis-à-vis des musulmans,leur " rejet " de l'islam, leurméfiance, voire leur double jeu,et la colonisation, et le prosé-lytisme, et les guerres, …[Or]on peut sentir et manifester unrespect sincère et profond à l'é-gard d'un être humain aveclequel on ne partage pas unepleine communion spirituelle.(p. 346)Coran III, 28 : " Que les croy-ants (musulmans) ne prennentpas pour alliés des négateurs(kâfirîn) à la place (à l'encon-tre) des croyants ; ceux quiagissent ainsi ne recevrontaucune aide de Dieu, sauf sivous craignez d'eux un danger. "

" De nombreux musulmans utilisent le terme kufr ou kâfir enOccident comme une insulte quasi définitive. (…) [Certes] lesjuifs et les chrétiens nient la véracité du message et de sonprophète, mais cela ne nous permet pas de les appeler " mécréants " au sens où on ne leur reconnaîtrait aucune foi enDieu (ce qui est faux). (pp. 342-344)

Tariq RAMADAN, op. cit. 1

" Si les textes ne changent pas, les regards peuvent différer selonles différentes traditions. Entre les regards de fusion dans les tra-ditions mystiques [notamment soufie], ceux de distanciationdans les traditions littéralistes et ceux de pondération dans lestraditions réformistes, chacun tente d'appliquer le texte selon sacompréhension et la lecture qu'il en fait. Le dialogue interre-ligieux doit, en ce sens, être d'une exigence extrême et doit per-mettre de mettre en place une éthique de la divergence. " (p.125)

SITUATION DES INTERLOCUTEURS

Tariq RAMADAN, op. cit. 1

" On ne peut plus (…) considérer les propos d'un musulman,comme de toute autre personne d'ailleurs, sans faire l'analyse deses références mais aussi du contexte dans lequel il vit, de laréalité politique et sociale qu'il peut subir parfois (…) Sanschercher à l'excuser, ce que peut dire parfois un musulman defaçon virulente, voire violente, s'affilie aussi foncièrement aucontexte qui l'entoure et qui peut le pousser à adopter de tellesdémarches… Il s'agit donc de (…) savoir qui est l'autre, quellessont ses références, d'où il parle, pour savoir ce qui le pousse àdire ce qu'il dit : telle doit être notre démarche, loin des préci-pitations médiatiques et des réflexions arbitraires. " (pp. 126-127)

Mohammed TALBI.

Il y a 20 ans déjà il écrivait: " Il faut surmonter les obstaclesénormes des complexes et du triomphalisme. L'Islam se présenteen effet trop souvent comme passéiste parce qu'il est complexé,

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et il est complexé parce qu'ilappartient, dans son intégralité,à son sous-développement.L'Occident, pour des raisonsévidentes inverses, est toujoursplus ou moins ouvertement tri-omphaliste. Il en résulte unblocage très sérieux sur lechemin du dialogue. Les motsne passent pas. Les termes dudiscours ne sont pas les mêmeset les intérêts sont souvent dra-matiquement opposés. Pourrompre ce cercle vicieux, il estnécessaire que l'Occidentprenne conscience de ses li-mites, et l'Islam de ses possibil-ités "

Rostane MEHDI, op. cit.

" La stagnation, voire la régres-sion, guette une civilisationlorsque celle-ci se sent (plusqu'elle n'est réellement) me-nacée de l'extérieur et de l'in-térieur par un adversaire fantas-matique qui la dénierait radi-calement. Elle est alors tentéede se replier sur elle-mêmepour résister et est ainsiempêchée d'évoluer avec sontemps. " (p. 90)

Joseph MAILA : L'Orientraisonne en termes religieux ",in : Le Figaro, 7-8 août 2004

" La principale cause de rupturecommunicationnelle entrel'Orient et l'Occident s'expliquepar de profondes divergences

en matière de Weltanschaung… L'Orient suspecte l'Occidentd'ambition hégémonique et traduit cette suspicion en termesreligieux. (…) Délesté d'un tropisme théocentrique par un longprocessus de sécularisation, des Lumières au post-modernisme,l'Occident semble avoir perdu les clefs nécessaires à la com-préhension d'un monde où la norme reste religieuse. "

DISCRIMINATIONS A L'EGARD DES MUSULMANS EN OCCIDENT

Obstacle au dialogue

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" L' influence de la situation politique des pays musulmans, lesintérêts en présence et parfois les manipulations des gouverne-ments jettent un jour très négatif sur les musulmans vivant enOccident et animent toute une série de préjugés et d'idées pré-conçues sur l'islam et les musulmans. [Et l'attitude de ces musul-mans à l'égard des non-musulmans, n'a-t-elle pas aussi unimpact ?] (…) L'expérience quotidienne de milliers de musul-mans en Occident [est qu'ils] sont plus confrontés à la visionprésente dans l'imaginaire de leurs interlocuteurs qu'ils ne seheurtent aux constitutions et aux lois. (…) Depuis le 11 septem-bre 2001 et les attentats aux Etats-Unis, les choses se sontaggravées et placent désormais le problème du " vivre ensemble "dans les sociétés pluralistes de l'Occident davantage sur le plande la " représentation " que sur celui de la religion et des lois. "(p. 127)

Gebran TUENI et Ural MANCO, " Chrétiens du Proche-Orient,Musulmans d'Europe, quel Dialogue de Cultures ? " in : Cahierde MEDEA 2002, pp. 34-38

" Une certaine islamophobie ambiante fait parfois obstacle audialogue des autorités publiques, de la société civile et desautochtones avec les communautés musulmanes. Aux yeux debeaucoup de responsables politiques belges et de professionnelsdu monde éducatif, médiatique, juridique et policier, les musul-mans apparaissent encore souvent comme des personnes inca-pables d'être les acteurs de leur émancipation : ils sont supposésêtre sous la domination d'un obscurantisme religieux et d'une

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communauté oppressante oud'un patriarcat archaïque. Ladifférence culturelle des musul-mans semble toujours souffrird'une diabolisation qui, enretour, sert de justification àleur exclusion sociale. " (p. 35)

RESPONSABILITÉ DES MUSULMANS DANS LES SOCIETES OCCIDEN-TALES

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Dans le nouvel ordre mondialactuel, qui semble oublier leCréateur et qui repose sur unelogique presque exclusivementéconomique, les musulmans,affirmatifs et sûrs d'eux, doiventrappeler Dieu et la spiritualitéaux gens qui les entourent et,en ce qui concerne les affairessociales, ils doivent s'engagerpour un supplément de valeurset de morale, de justice et desolidarité. " (p. 130)

" Porter la shahâda [professionde foi musulmane] signifie êtreengagé dans la société danstous les domaines où le besoinse fait sentir : le chômage, lamarginalisation, la délinquance,etc. Cela signifie être engagédans le processus qui pourraitconduire à une réforme posi-tive aussi bien des institutionsque des systèmes juridiques,économiques, sociaux et poli-

tiques afin d'apporter davantage de justice et une réelle partici-pation populaire. " (p. 133) [Oui, mais jusqu'où ? Jusqu'à essay-er de substituer la chari'a à l'ordre juridique local ? Ne devrait-ce pas être le cas en principe, de manière à incarner la valeuruniverselle de l'islam ?]

" Pour les musulmans, au cœur de l'Occident, il s'agit (…) detrouver des partenaires décidés, comme eux, à opérer une sélec-tion dans ce que produit la culture occidentale, afin de pro-mouvoir ses apports positifs et de résister à ses dérives destruc-trices, au niveau humain comme au niveau écologique. Plusgénéralement, il s'agit d'œuvrer pour la promotion d'un vérita-ble pluralisme religieux et culturel sur le plan international. " (p.136) [Mais quels seront les critères permettant de juger ce quiest " positif " dans la culture occidentale ? Le Coran et la Sunna?] " S'ils sont vraiment avec Dieu, alors leur vie [des musulmans]doit être le témoignage permanent d'un engagement et d'undon de soi infini pour la justice sociale, le bien-être deshommes, l'écologie et la solidarité sous toutes ses formes. " (p. 137)

INTEGRATION DES MUSULMANS DANS LES SOCIETES OCCIDENTALES

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" La " Voie de la fidélité " impose de déterminer le cadre de l' " intérêt public " dans une société donnée, de dynamiser enpermanence " l'effort critique d'élaboration juridique " et enfind'énoncer des " avis juridiques " [fatwa] en phase avec les nou-velles réalités du monde. Il ne peut y avoir de fidélité dans letemps que si la raison humaine, au moyen des outils mis à sadisposition, est active et créatrice dans l'énoncé de propositionsoriginales, adaptées, en phase avec l'époque et le lieu. (…) Iln'est point de fidélité sans renouveau. (…) Il s'agit à termed'éviter une intégration appuyée sur une compilation d'avisjuridiques de protection, mais bien de proposer une voie quipermette un enracinement épanoui, confiant, ouvrant auxmusulmans les portes de la contribution. " (pp. 112-113)

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Ali DADDY, Le Coran contrel'intégrisme, (Castels, Labor,2000)

" L'islam européen (…) ne peutêtre qu'un Islam contemporain,c'est-à-dire un Islam tourné versson avenir et non pas conti-nuellement rattaché à une formede son passé et par conséquentpiégé par ce passé.Jamais l'Islam n'a eu à se con-fronter à un milieu industrielsemblable à celui de l'Europeoccidentale : les oulémasdevront, soit laisser pendantesles questions nouvelles qui seposent à eux, soit trouver dessolutions adaptées à la sociétéindustrielle dans laquelle lesmusulmans sont minoritaires.L'Islam n'a jamais prévu ce cas.Il lui appartient de fournir l'ef-fort théorique pour assumercette situation inédite, demême que le christianisme enAmérique latine a développéune théologie de la libération.(…) L'Islam européen ne peutse concevoir qu'en tant quereligion affranchie de ses servi-tudes à l'égard d'un droit etd'une tradition figés. Aveccomme corollaire un textereligieux dont l'interprétationpeut dès lors tendre à s'inscriredans la tradition culturelle del'Occident, avec ce que celui-ciconsidère comme préalables àtout développement : la cri-tique, les lumières et la laïcité.(…)

Qu'il [l'Islam] se veuille conjointement valable pour dîn (ledomaine religieux) et dunyâ (le domaine mondain) ne veut pasdire qu'il le veuille confusément. Il invite au contraire à coor-donner ces concepts (…) plutôt qu'à les mêler. "Un Islam européen doit également impliquer une éducation demasse qui puisse rester démocratique et offrir au plus grandnombre de jeunes garçons et filles un accès à une interprétationd'une grande acuité du texte coranique. (…) Une évolutiondécisive ne peut être impulsée que par une approche globale durapport même à la religion, et que le seul lieu qui permette unetelle approche - en dehors de la cellule familiale et de lamosquée - demeure l'école (…) : faire entrer le Coran à l'écolecomme objet d'étude intégré aux savoirs culturels contempo-rains, (…) afin de l'extraire de son statut de " discours exotique "exclusivement destiné à " l'autre " et à " sa " culture et de le sor-tir des lectures réductrices qu'on en fait trop souvent.L'Islam a un rôle autocritique à jouer : menacé de caricature parles expériences historiques des régimes saoudiens, iranien ouafghan entre autres, il doit soigner son image en toute trans-parence et veiller à se mettre en accord avec lui-même, c'est-à-dire avec les préceptes de son texte fondateur. " (pp. 158-162)

CULTURE OCCIDENTALE

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Les " sociétés développées " ne nous donnent apparemmentque deux choix pour dépasser le mal-être : soit le plongeon,corps et âme, dans l'univers des sensations et des émotions lesplus intenses qui, si elles ne sont pas toujours vraies ni pro-fondes, nous donnent en tous cas le sentiment d'exister ; soitune sorte d'exil qui, pour une heure ou pour la vie, nouséloigne du monde pour exister à l'intérieur, dans l'introspection(psychologique ou mystique), la méditation, à l'écoute de soi,de son être et/ou de ses sentiments. (…) La sécularisation dessociétés a renforcé ce phénomène et l'on a grandement besoinde se ressourcer dans la sphère privée et intime, loin duvacarme de la vie publique. " (p. 203)

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Jean-Claude GUILLEBAUD, op.cit.

L'autonomie personnelle à l'é-gard du bien et du mal" Fidèle à ses origines, ladémocratie moderne, issue desLumières européennes, se veutrésolument optimiste et plura-liste. Sa confiance affichée dansle progrès, son désir de bon-heur terrestre et d'apaisementdes mœurs, sa volonté derespecter la diversité des opi-nions et des croyances, toutcela lui interdit par principe detenir un discours autoritaire-ment normatif. (…) Les sociétésmodernes ne se contentent pasd'ignorer communément laquestion du bien et du mal,elles la tiennent pour archaïqueet sans objet. (…) Il nousparaissait entendu que la défini-tion du mal n'était plus l'affairede tous, mais de chacun. (…)Notre modernité croyait avoiratteint un " ailleurs " indéfinis-sable où l'ontologie du bien etdu mal n'avait plus cours. Cequi était revendiqué, c'était ledroit imprescriptible de jugerpar soi-même. Une espèce desolipsisme déclamatoire s'étaitsubstitué à ce que l'on n'oseplus appeler l'intersubjectivitéde la morale. " (pp. 39-40)Or, " le lien n'est pas le con-traire du sujet autonome : il leconstitue. Voilà la vérité mini-male que la pensée modernefait mine d'oublier. Le lien(avec l'autre) ne vient pas

empiéter sur la souveraineté du moi : il permet au moi lui-même d'exister. " (p. 122 )

La tolérance et le scepticisme" A la croyance exclusive, quelle qu'elle soit, nous préférons lescepticisme ou la dérision légère. Aux crédulités pourvoyeusesd'orages et d'intolérance, nous tentons de substituer le savoirrationnel et le pragmatisme expérimental. L'héroïsme du " con-naître " doit remplacer la faiblesse du " croire " (…) La sociétéoccidentale assure préférer le fluctuant, l'indécis, l'inachevé, lenégociable. " (p. 234)

La démocratie laïque" La démocratie moderne a inscrit symboliquement le pouvoiren un " lieu vide " de toute croyance. (…) Ce vide inaugural(…) est seul gage de tolérance (…) et garant de toutes les croy-ances…Or les sociétés humaines répugnent d'instinct à cette indétermi-nation concernant leurs valeurs et leurs croyances communes.Elles y voient, à terme, un mécanisme désintégrateur. L'interprétation moderne de la démocratie (…) conduit néces-sairement à relativiser la croyance au profit du savoir. " (pp.236-238)

Léonce BEKEMANS, " Globalisation and Solidarity : Europe'sduty in intercultural dialogue ", in : Conférence sur le dialogueinterculturel, 20-21 mars 2002 (Commission européenne, 2003)

" The western provenance of the process of global culture hasgiven credibility to the frequent charge that it is part of westernimperialism, trying to force " western " values on societies withdifferent traditions. The alleged difference between "western"and "eastern" values is centered on the understanding of theindividual's place in society. The "west" is interpreted as exag-gerating the autonomy of the individual, as having institutiona-lized an abstract and mechanical concept of society, and asbeing taken by a spiritually impoverished materialism. Againstthis, the "east" is characterized as having a more correct view ofthe individual embedded in society, valuing tradition and hie-rarchy, holding an organic and thus more natural concept ofsociety, and as retaining a spirituality that limits exaggeratedforms of materialism." (p. 159-160)

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APPORTS POSITIFS DES MUSULMANS

Tariq RAMADAN, op. cit. 2

" Des communautés deplusieurs millions d'âmes dontun très grand nombre estattaché à la foi en Dieu, à laspiritualité et aux valeurs de lavie, de la justice et de la soli-darité humaine ne peuvent quefaire du bien à des sociétés oùla tentation consumériste sem-ble parfois avoir pris lapréséance sur toute autre con-sidération. Observer desfemmes et des hommes quiprient cinq fois par jour, quis'attachent à promouvoir desvaleurs éducatives, quimesurent leur consommationjusqu'à jeûner un douzième dechaque année, évitent la con-sommation d'alcool et ses excèset développent, malgré tout,des liens de solidarité familiauxet communautaires très forts ;tout cela ne peut compter pourrien. Pour les croyants commepour les consciences huma-nistes, cette présence est untémoignage et une richesse. "(pp. 191-192) [Oui, à conditionde ne pas considérer tous lesautres comme de méprisablesmécréants !] " Si les musulmans, nourris parleur foi, habillés par leursvaleurs et animés par leur con-science d'avoir accès à une spiri-tualité vivante et active, à uneéthique exigeante et solidaire

au vrai sens de la différence et à la conscience du Sud exigeantune équité économique et politique ; alors leur présence estune richesse et un cadeau. " (p. 193)" La spiritualité musulmane (…) est exigeante et touche, par lesvertus de l'enseignement islamique, toutes les dimensions de lavie. A l'origine, il s'agit de retrouver en soi, au moment mêmeoù l'on prend conscience de ses responsabilités humaines devantDieu et devant les hommes, le " besoin de Lui ". (…)Le retour àsoi engendre le sentiment d'humilité qui caractérise l'êtrehumain avec Dieu. Cette humilité devrait rayonner largement eten profondeur dans toutes les sphères de la vie : dans chacunedes étapes du travail sur soi, il s'agit de lutter contre la suffi-sance, l'orgueil ou la prétention humaine (…) de " réussir seul ",par ses seuls moyens. Cet exercice (…) devrait être visible danschacune des dimensions de la vie. Dans la façon de traiter soncorps, de gérer ses biens, d'exercer une activité professionnelle,de vivre avec autrui, d'interagir avec la création dans sonensemble. "" Habitée par le " besoin de Lui ", forte de cette humilité dansl'action et au cœur de sa vie professionnelle ou sociale, la con-science musulmane devrait établir une correspondance entre l'é-tat du cœur et le sens de l'action. (…) La séparation, dans lessociétés sécularisées, entre l'espace public et privé n'empêche pascet exercice qui permet à notre spiritualité, en toutes circons-tances, d'inspirer notre façon d'être et d'agir. " (pp. 210-211)

POINTS DE CONVERGENCE

Tariq RAMADAN, op. cit. 1

" Ce qui unit les religions du Livre s'inscrit avant tout dans lareconnaissance de Dieu, dans Son unicité et dans Sa proximitéavec l'homme. " (p. 113)

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Rohan GUNARATNA, Al-Quaida - Au cœur du premier réseau terroriste mon-dial, (Autrement, 2002)

Dictionnaire Mondial de l'Islamisme (Plon, 2002)

J. L. BRUNIN, L'islam… tout simplement ( Ed. de l'Atelier)

LE POINT, n° 1649 (22 avril 2004) : Des croisades au conflit irakien, Islam etOccident.

Felice DASSETTO, La rencontre complexe Occident et islams (Louvain-la-Neuve, Edit. Academia Bruylant, 2004)

Issili KHALID, " Les facteurs de repliement ", in : Les Nouveaux penseurs del'Islam, cahier hors-série n°54 du Nouvel Observateur, p. 56

Claude GILLIOT, " L'Origine syro-araméenne du Coran ", in : Les Nouveauxpenseurs de l'Islam, cahier hors-série n°54 du Nouvel Observateur, pp. 64-65

(Un grand nombre d'expressions réputées obscures du Coran s'éclairent si l'on retraduit certains mots apparemment arabes à partirdu syro-araméen, la langue de culture dominante au temps de Mahomet).

Muhammad SAI Al-ASHWAMY, L'islamisme contre l'Islam, (La Découverte,2001)

Malek CHEBEL, Manifeste pour un islam des Lumières, (hachette, 2004)

Alfred-Louis de PREMARE, Les Fondations de l'Islam - Entre Ecriture etHistoire, (Seuil, 2002)

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Autres références bibliographiques récentes

Université de Paix - février 2005c

Page 101: par Charles VAN DER VAEREN Cahier - … · délivrés qui sont venus en abroger d'autres qui avaient précédé. (…) Le Coran explique lui-même : " Si nous abrogeons un ver-set

Abdul Karim SOROUSH, Reason, Freedom and Democracy in Islam, (OxfordUniversity Press, 2000)

Atilla YAYLA (ed.), Islam, Civil Society and Market Economy, (Liberte, Ankara,2002)

Abdelmajid CHARFI, L'islam entre le Message et l'Histoire, (Paris, AlbinMichel, 2004)

Frithjof SCHUON, Comprendre l'islam (Seuil, coll. Points)

Tariq RAMADAN et Jacques NEYRINCK, Peut-on Vivre avec l'Islam (Favre)

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Université de Paix - février 2005c

Page 102: par Charles VAN DER VAEREN Cahier - … · délivrés qui sont venus en abroger d'autres qui avaient précédé. (…) Le Coran explique lui-même : " Si nous abrogeons un ver-set

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Fondée en 1960 par DominiquePire (Prix Nobel de la Paix),pluraliste depuis sa fondation,l'Université de Paix est uneorganisation de jeunesse recon-nue par la Communautéfrançaise de Belgique.

L'Université de Paix propose untravail d'éducation à la paix ettransmet des savoirs liés auxcompétences et à leur applica-tion dans des activités tant dela vie quotidienne (à la maison,en famille, à l'école, dans lequartier,…) que professionnelle.Cette transmission s'orienteautour de " savoirs sociaux " etde " savoir-être " ; les habiletésainsi privilégiées sont entreautres : l'autonomie, les rela-tions aux autres, la communica-tion, la construction de lacoopération, le respect desrègles,…

Pour gérer efficacement les conflits, l'Université de Paix propose :

des formations ponctuelles (assertivité, communication,coopération, négociation, médiation, etc.)des interventions et formations personnalisées en association (la formation d'enfants médiateurs, de délégués de classe, etc.)des animationsdes conférencesdes journées pédagogiquesun certificat de base en gestion positive des conflits interpersonnelsdu matériel pédagogique (toiles de parachute pour animation, cassettes audio et vidéo, BD, livres, dossiers,...) pour la formation et l'animationUniversité de Paix, revue trimestrielle à caractère politique et pédagogique

Sur simple demande, vous pouvez recevoir gratuitement notreprogramme d'activités.

Et en plus…

Université de Paix on-line est un site associatif, apparu sur latoile en juin 1999 pour présenter l'association, son projet, saphilosophie, son équipe, ses activités,… valoriser ses formations,ses réalisations,… et améliorer ses échanges. Ce site est destiné àtoute personne -jeunes et adultes ayant en charge l'éducation etla socialisation des enfants et adolescents- qui recherche desinformations sur des modes alternatifs de prévention et de ges-tion de conflits. Vous pouvez consulter le résultat de ce travailsur www.universitedepaix.org

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Université de Paix

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Cahier 0 :L'Université de Paix, son histoire, sa démarche

par Mireille JACQUET

6, 50 €

Cahier 1 :Regards sur le conflit et sa gestion constructive

par François BAZIER

3, 00 €

Cahier 2 :L’Islam radical et sa présence en Belgique

par Alain GRIGNARD

5, 50 €

Cahier 3 :Islam et intégrisme islamiste, paix et violence

par Charles vAN DER VAEREN

13, 00 €

Collection de cahiers

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Notes

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