33
par KABASELE NZEMBELE Conseiller à la Cour d’Appel MONUC/SECTION PROTECTION DE L’ENFANT Ministère de la Justice SERVICE DE DOCUMENTATION ET D’ETUDES

par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

  • Upload
    lehanh

  • View
    220

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

par KABASELE NZEMBELE

Conseiller à la Cour d’Appel

MONUC/SECTION PROTECTION

DE L’ENFANT

Ministère de la Justice

SERVICE DE DOCUMENTATION

ET D’ETUDES

Page 2: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

1

I. Introduction

Dans toutes les causes concernant l’enfant en conflit avec la loi,

le juge pour enfants exécute sa mission de dire le droit en rendant des

décisions.

Certaines de ces décisions revêtent un caractère provisoire,

tandis que d’autres sont rendues à titre définitif.

Dans le premier cas, le juge prend des mesures provisoires par

voie d’ordonnance sur la situation provisoire du mineur en attendant le

résultat des enquêtes préalables d’un assistant social ou de tout autre

expert régulièrement requis.

Dans le second cas, après l’examen au fond, le juge, en tenant

compte du seuil de l’âge minimum fixé par la loi, rend des mesures

définitives en rapport avec les faits reprochés au mineur.

Dans toutes ces hypothèses, le juge est tenu de prendre des

décisions en conformité avec la législation en vigueur.

A l’heure actuelle, la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant

protection de l’enfant (LPPE) constitue le texte de référence pour

l’administration de la justice pour mineurs dans notre pays.

Rejoignant les instruments internationaux ratifiés par la

République Démocratique du Congo (RDC), la loi précitée recommande

au juge, dans la prise de décision, de tenir également compte de la

condition de l’enfant en raison de sa vulnérabilité, de sa dépendance

par rapport au milieu, de son manque de maturité physique,

intellectuelle et émotionnelle, nécessitant des soins spéciaux et une

protection particulière (Exposé des motifs de la Loi portant Protection

de l’Enfant).

Page 3: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

2

Pour ce faire, toute décision à l’égard de l’enfant en conflit avec la

loi doit viser avant tout l’intérêt supérieur de celui-ci grâce aux

mesures éducatives susceptibles de garantir son redressement, sa

resocialisation, et ce, quelles que soient la gravité des faits et les

conséquences qui peuvent en résulter (art.6 de la Loi portant

Protection de l’Enfant).

Le juge siège toujours avec le concours du Ministère public ;

mais, il est admis, en ce qui concerne les mesures provisoires, que le

juge peut prendre une ordonnance dans son cabinet en l’absence de

l’officier du Ministère public, pour besoin de célérité, mais aussi si ce

dernier ne peut être atteint dans le temps requis.

Les modalités d’exécution des décisions du juge se rapportent,

d’une part, à la personne de l’enfant mis en cause, et, d’autre part, à la

réparation du préjudice causé à la victime par le fait de l’enfant en

conflit avec la loi.

A cet égard, la loi portant protection de l’enfant prévoit, pour

l’exécution des mesures susvisées, différents intervenants selon que

l’enfant est placé en milieu familial ou selon qu’il est placé en

institution. Elle prévoit également les personnes responsables de la

réparation du dommage causé à la victime ainsi la procédure pour y

parvenir.

La loi précitée et les instruments internationaux privilégient

autant que possible le maintien de l’enfant dans un environnement

familial, à titre provisoire ou à titre définitif, le placement dans les

EGEE et les ERE étant une mesure à prendre en dernier ressort et pour

une durée la plus courte possible.

Il est important de signaler que le fonctionnement et l’organisation

de l’établissement de garde et d’éducation de l’Etat (EGEE) ainsi que de

Page 4: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

3

l’Etablissement de Rééducation de l’Etat (ERE) seront fixés par décret

du Premier ministre, délibéré en conseil des ministres.

Toutefois, en attendant le décret susvisé, il est admis que

l’exécution des décisions du juge visant le placement s’effectue

conformément à l’ordonnance n° 13/140 du 23 avril 1954 portant

régime des établissements de garde et d’éducation de l’Etat (EGEE)

avec cette précision que l’enfant ne peut y être placé que par décision

du juge compétent.

Le présent module comporte deux chapitres : le premier est

consacré aux décisions du juge pour enfants et le second aux modalités

d’exécution des décisions du juge pour enfants.

Page 5: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

4

Chapitre 1 : Les décisions du juge pour enfants

Le juge pour enfants peut prendre à l’égard de l’enfant en conflit

avec la loi, selon les circonstances et la gravité des faits, deux sortes

de mesures.

Pendant l’enquête, le juge prend des mesures provisoires, tandis

qu’il prend des mesures définitives à la fin de l’instruction.

Section 1 : Les mesures provisoires (art 106 et 108 LPPE)

En application des articles 106 et 108 de la LPPE, le juge pour

enfants peut, avant de statuer sur le fond, prendre par voie

d’ordonnance, quatre types de mesures provisoires.

Ces mesures sont prises en tenant compte de l’intérêt supérieur

de l’enfant et de l’adéquation de son milieu d’accueil sur proposition de

l’assistant social régulièrement requis.

Ainsi, le juge peut ordonner soit de placer l’enfant en famille sous

l’autorité de ses père et mère ou de ceux qui en ont la garde, soit de

l’assigner à résidence sous la surveillance de ses père et mère ou de

ceux qui en ont la garde, soit de le soustraire de son milieu et le confier

provisoirement à un couple de bonne moralité ou à une institution

publique ou privée agréée à caractère social (Article 106 alinéa 1

points1et 2et alinéa 3 de la LPPE), soit le placer préventivement dans

un établissement de garde et d’éducation de l’Etat (article 108 alinéa 1

de la LPPE).

Page 6: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

5

§1. Le placement en famille (art 106 al1.1)

Pendant le déroulement de l’enquête, le juge peut décider de

placer en famille l’enfant en conflit avec la loi sous l’autorité de ses

père et mère ou de ceux qui en ont la garde au moment des faits.

Dans la pratique, lorsque les parents sont connus, il ne se pose

aucun problème. Le juge prend une ordonnance de placement en vertu

de laquelle l’enfant reste chez ses parents ou chez un autre membre de

la famille en attendant le rapport de l’assistant social.

Cette mesure est cependant difficile à envisager lorsque l’enfant

est en rupture familiale. C’est le cas lorsqu’il s’agit des enfants séparés

et/ou des enfants déplacés tels que définis à l’article 2 points 2 et 7 de

la LPPE).

Elle est également difficile à prendre devant le refus de l’enfant

lui-même ou en cas de refus des parents et membres de famille qui

doivent l’accueillir.

C’est pour cette raison que le juge doit, avant d’en décider ainsi,

être rassuré qu’il n’y a aucun obstacle à le faire et se fier ainsi au

rapport de l’assistant social qui a procédé à l’enquête préalable du

milieu de vie de l’enfant.

Dans ce cas, le juge qui est convaincu de l’existence d’un quelconque

obstacle à remettre l’enfant à ses parents ne peut pas recourir à une

telle mesure au risque d’aggraver davantage sa situation.

Bien au contraire, il sera tenu de recourir à d’autres mesures.

§2. : L’assignation à résidence (art. 106 al1.2 de la LPPE)

Cette mesure figure parmi les innovations apportées par la loi

portant protection de l’enfant en matière d’administration de la justice

pour mineurs.

Page 7: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

6

Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence

comme une mesure consistant pour un individu faisant l’objet des

poursuites judiciaires de demeurer dans son milieu naturel et de ne

s’en éloigner que sous escorte des agents de l’ordre commis à l’effet de

le surveiller (1).

En matière de justice juvénile, l’assignation à résidence de

l’enfant peut consister à confier l’enfant à ses parents avec injonction

de l’accompagner partout où il peut se rendre selon les nécessités de

ses besoins vitaux ;par exemple,l’accompagner chaque jour à l’école, à

l’hôpital…

§3. Le placement chez un couple ou en institution ( art 106 al1.3de la LPPE)

Il s’agit de soustraire l’enfant de son milieu familial et de le placer

dans une autre famille ayant bonne moralité ou dans une institution

publique ou privée à caractère social.

La loi ne détermine pas les raisons qui peuvent amener le juge à

prendre une telle mesure.

Néanmoins, la déchéance de l’autorité parentale, la perversité des

parents, la maltraitance de l’enfant par ses parents,l’abandon et le

rejet de l’enfant sont, parmi tant d’autres, les raisons liées à

l’irresponsabilité des parents et pour lesquelles le juge peut ordonner

pareille mesure.

La décision du juge ne s’impose pas. Elle ne peut intervenir

qu’après concertation menée par l’assistant social en accord avec ces

milieux d’accueil.

(1)Raymond Guillien et Jean Vincent : Lexique des termes juridiques,

Dalloz, 10è éd., Paris, 1995

Page 8: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

7

Il peut arriver que ces structures d’accueil refusent d’accepter

l’enfant que le juge se propose de leur confier, soit en raison de sa

dangerosité et sa perversité notoire, soit pour cause d’insuffisance des

moyens financiers et logistiques disponibles. En pareille circonstance, le

juge n’a d’autres alternatives que de placer l’enfant en garde

préventive dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat

(EGEE).

§4. Le placement dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat

(art.108 al.1 de la LPPE)

L’article 108 al1 de la LPPE dispose : « Si les mesures prévues à

l’article 106 ne peuvent être prises parce que l’enfant est présumé

dangereux et qu’aucun couple ou aucune institution n’est en mesure de

l’accueillir, l’enfant peut être préventivement placé dans un

établissement de garde et d’éducation de l’Etat pour une durée ne

dépassant pas deux mois ».

Le caractère dangereux du mineur doit être explicité par le juge.

Très souvent, le juge retient qu’un enfant est dangereux lorsqu’il

manifeste une tendance persistance à la délinquance, c’est-à-dire,

lorsque l’enfant s’inscrit dans un processus de récidive.

Si le juge considère que l’enfant est dangereux, il doit étayer son

opinion par des faits probants et objectifs.

Par ailleurs, si le juge déclare que nul particulier ou nulle institution n’a

pu accueillir l’enfant, il doit démontrer qu’il a fait la demande de

placement auprès de ceux-ci et produire la preuve de leur refus.

Signalons qu’il existe très peu d’établissements de garde et

d’éducation de l’Etat en RDC. Et là où ils existent, l’on constate que les

conditions d’hébergement ne répondent pas aux normes édictées par

les instruments internationaux et par la législation nationale en cette

matière.

Page 9: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

8

En attendant le décret du Premier ministre sur les EGEE, les

mineurs vicieux et présumés dangereux, qui ne sont acceptés ni par un

couple, ni par une institution publique ou privée, ou qui ne peuvent pas

être placés en famille, sont gardés dans un quartier spécial réservé aux

enfants dans la prison.

Dans la pratique, le juge prend une ordonnance de garde

préventive et place l’enfant pour une durée ne dépassant pas deux

mois. En fait, le mineur placé en garde préventive est privé de liberté.

La décision de garde préventive doit être une mesure de dernier

ressort et d’une durée la plus courte possible.

En effet, à l’article 1 des Règles des Nations Unies pour la

protection des mineurs privés de liberté, il est stipulé : « La justice

pour mineurs devrait protéger les droits et la sécurité et promouvoir le

bien-être physique et moral des mineurs. L’incarcération devrait être

une mesure de dernier recours ».

L’article 17 de cet instrument international insiste sur ce fait en

ces termes : « La détention avant jugement doit être évitée dans la

mesure du possible et limitée à des circonstances exceptionnelles. Par

conséquent, tout doit être fait pour appliquer d’autres mesures ».

Dans le même ordre d’idées, à l’ article 13.1 de l’Ensemble des

règles minima des Nations Unies concernant la justice pour mineurs

(Règles de Beijing), il est précisé que « La détention préventive ne peut

être qu’une mesure de dernier ressort et sa durée doit être aussi courte

que possible ».

Il en est également ainsi de l’article 37.b de la Convention

relative aux droits de l’enfant qui dispose : « … Nul enfant ne soit privé

de liberté de façon illégale ou arbitraire. L’arrestation, la détention ou

l’emprisonnement d’un enfant doit être en conformité avec la loi, n’être

Page 10: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

9

qu’une mesure de dernier ressort, et d’être d’une durée aussi brève

que possible ».

Sur le plan interne, cette recommandation faisant de la détention

une mesure de dernier ressort est consacrée par l’article 106 alinéa 4

de la LPPE qui dispose : « Le placement dans une institution publique

ou privée agréée à caractère social ne peut être envisagée que comme

mesure de dernier recours ».

En d’autres termes, la garde préventive est à éviter dans la

mesure du possible afin de préserver l’enfant du danger de contagiosité

criminelle.

Dans tous les cas, lorsque le juge ordonne la garde préventive, il

devra en déterminer la durée et indiquer que le mineur sera séparé des

adultes et des autres mineurs faisant l’objet d’une mesure définitive.

Après enquête, le juge est tenu de prendre des mesures

définitives à l’égard de l’enfant déféré devant lui.

Section 2 : Les mesures définitives

Les mesures définitives interviennent après enquête et à l’issue

d’une instruction suffisamment menée.

Elles sont rendues dans les huit jours qui suivent la prise en délibéré de

la cause (art.113 al.1 de la LPPE).

Guidé par son intime conviction, le juge statue sur le fond et

prend l’une des mesures prévues par les articles 96,113 et 117 de la

LPPE.

De la combinaison des dispositions précitées ,il résulte que le

juge peut décider, soit de relaxer l’enfant, soit de le réprimander et de

Page 11: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

10

le rendre à ses parents ou aux personnes qui exerçaient sur lui

l’autorité parentale en leur enjoignant de mieux le surveiller à l’avenir,

soit de le confier à un couple de bonne moralité ou soit de le mettre

dans une institution publique à caractère social, soit de le placer dans

un centre médical ou médico-éducatif, soit de le mettre dans un

établissement de rééducation de l’Etat, soit de le placer dans un

établissement de garde et d’éducation de l’Etat.

Comme il sied de le constater, la loi portant protection de l’enfant

n’a pas repris la mesure tendant à mettre l’enfant à la disposition du

gouvernement, laquelle mesure a été consacrée par le décret du 06

décembre 1950.

§1. La relaxe (art 96 LPPE)

La relaxe est définie par le lexique des termes juridiques comme

étant la décision d’une juridiction répressive autre que la Cour

d’Assises, déclarant non coupable le prévenu traduit en justice (2)

D’après la définition contenue dans le Recueil sur la minorité, on

entend par ‘’Relaxe’’, la décision du juge de paix qui déclare le mineur

prévenu non coupable des faits qui lui étaient reprochés (3).

Ces deux définitions ne permettent pas, cependant, une bonne

compréhension de l’esprit de la loi portant protection de l’enfant.

En effet, dans le cadre de la loi précitée, la mesure de relaxe

n’est pas ordonnée, ni par une juridiction répressive, ni pour déclarer le

mineur non coupable des faits lui reprochés.

Elle est prise automatiquement et uniquement par le juge pour

enfants à l’égard de l’enfant âgé de moins de 14 ans ayant commis un

manquement qualifié d’infraction par la loi pénale.

L’article 96 al.1 de la LPPE dispose à ce propos : « Lorsque

l’enfant déféré devant le juge a moins de 14 ans, celui-ci le relaxe

comme ayant agi sans discernement et ce, sans préjudice de la

réparation du dommage causé à la victime ».

Page 12: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

11

Cette décision consiste pour le juge de soustraire l’enfant de son

milieu familial et de le confier à un assistant social et/ou à un

psychologue qui prend des mesures d’accompagnement appropriées.

La mesure de relaxe ne doit pas préjudicier l’action civile de la

victime.

Dans la pratique, le juge saisi des manquements commis par un

enfant âgé de moins de 14 ans devra le relaxer et se prononcer ensuite

sur la réparation du préjudice causé à la victime.

Est pris en considération, l’âge de l’enfant au moment de la

commission des faits (art 98 LPPE).

Ainsi, si les faits ne sont pas prescrits et que l’enfant a déjà

atteint sa majorité au moment où le tribunal est saisi, le juge doit le

relaxer en considérant l’âge de moins de 14 ans qu’il avait lors de la

commission desdits faits.

Dans ces conditions, le juge pour enfants n’a pas de raisons de se

dessaisir au profit du juge pénal (juge pour adultes) en se déclarant

incompétent ratione personae.

L’enfant ainsi relaxé est placé dans une famille d’accueil ou dans

une institution privée agréée à caractère social autre que celle

accueillant des enfants en situation difficile (art 96 al3 de la LPPE).

Quid alors, si les faits ne sont pas établis dans le chef d’un tel

enfant ou dans celui de tout autre mineur ?

Nous pensons qu’en pareille circonstance, le juge aura également à

relaxer l’enfant et pourra se déclarer incompétent pour statuer sur les

dommages et intérêts.

§2. La réprimande et la remise de l’enfant à ses p arents ou aux personnes

qui exerçaient sur lui l’autorité parentale (art 11 3 al 1.1 LPPE)

Page 13: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

12

La réprimande consiste en un reproche, un blâme, un

avertissement, une remontrance que l’on adresse à quelqu’un qui a

commis une faute (Dictionnaire Petit Larousse,éd. 2008).

La loi ne prescrit pas une formule spéciale pour le faire.

Le juge réprimande l’enfant ayant commis un manquement

qualifié d’infraction par la loi pénale en lui faisant savoir sa faute et les

conséquences y relatives, et le met en garde pour que pareil

comportement ne se répète.

La décision prévue à l’article 113 al1 point2 de la loi portant

protection de l’enfant comporte deux volets : la réprimande, d’abord,

et, ensuite la remise aux parents ou aux personnes qui exerçaient sur

l’enfant l’autorité parentale avec injonctions de mieux le surveiller.

Ces deux volets sont cumulatifs.

La remise du mineur à ses parents ou à toute autre personne

s’accompagne toujours des injonctions données par le juge à ces

derniers de mieux le surveiller à l’avenir.

D’après le rapport du Conseil colonial relatif au Décret du 6

décembre 1950 sur l’Enfance délinquante, « l’injonction qui sera

adressée aux parents devrait l’être hors de la présence du mineur : les

parents étant les éducateurs naturels de l’enfant, il faut éviter toute

attitude inconciliable avec leur prestige paternel. Si l’on veut les

amener à coopérer au bon fonctionnement de la nouvelle juridiction, il

faut non seulement user du tact, mais inspirer confiance ». (1)

(1)Rapport du Conseil colonial, cité par Cécile KIALA dans son module sur la Protection pénale de l’enfant en

conflit avec la loi, in Recueil de modules de formation en matière de protection légale de l’enfant, Kinshasa,

juillet 2005, p. 108, inédit.

Page 14: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

13

La loi ne définit pas les cas pour lesquels le juge peut prendre

une telle décision.

Nous osons croire qu’elle intervient pour des faits de moindre

gravité aussi bien à l’égard de l’enfant qu’à celui de la victime et pour

lesquels le Président du Tribunal pour enfants peut ordonner la

médiation conformément à l’article 136 de la LPPE.

Cette mesure peut paraître utopique et inopérante lorsque les

parents ne sont pas connus. Elle l’est également lorsque les parents

sont connus, mais refusent d’accueillir leur enfant, de même que

lorsque celui-ci refuse de retourner en famille.

C’est pourquoi, l’intervention de l’assistant social s’avère

indispensable pour déterminer, par une enquête préalable, qu’il n’y a

pas désaccord entre l’enfant et ses parents.

Dans l’hypothèse où le rapport de l’assistant social fait état d’un

refus de part et d’autre, le juge est tenu de réprimander l’enfant et de

le soustraire de son milieu familial pour le placer dans une autre famille

d’accueil ou dans une institution préalablement consultée à cet effet.

§3. Le placement chez un couple ou dans une institu tion privée (art 113 al.1

point 2 LPPE)

Le placement de l’enfant chez un couple de bonne moralité

privilégie le maintien de l’enfant dans un environnement familial qui

soit favorable à son éducation. Ce choix est opéré après rapport de

l’assistant social.

La condition requise est qu’il doit s’agir d’un couple, c’est-à-dire

de deux personnes de sexes opposés légalement mariées et jouissant

d’une bonne moralité.

Page 15: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

14

Contrairement à l’article 106 al1.3 qui se limite à dire que l’enfant

est confié provisoirement à un couple ou à une institution privée, la

durée du placement en tant que mesure définitive ne doit pas dépasser

la dix-huitième année d’âge de l’enfant.

L’institution privée dont il est question peut être un orphelinat,

une maison de charité…

§4. Le placement dans une institution publique à ca ractère social (art 113

al1 point 3 LPPE)

Aux termes de l’article 67 de la loi portant protection de

l’enfant,on entend par institution publique, « une structure ou un

établissement de garde et d’éducation créé par l’Etat, placé sous la

tutelle du ministère ayant les affaires sociales dans ses attributions en

collaboration avec celui ayant la justice dans ses attributions avec

comme objectif la garde, la rééducation et la réinsertion sociale des

enfants en situation difficile ou en conflit avec la loi, ayant entre autres

comme agents les assistants sociaux qui y sont employés ».

La durée du placement dans une institution publique ne doit pas

dépasser la dix-huitième année d’âge de l’enfant (art.113 al1 point 3

LPPE).

Cette mesure ne s’applique pas à l’enfant âgé de plus de seize

ans (art 113 al 2 LPPE).

§5. Le placement dans un centre médical ou médico-é ducatif approprié (art

113 al1.4 LPPE)

La loi portant protection de l’enfant qui prévoit le placement de

l’enfant dans un centre médical ou médico-éducatif n’en détermine pas

Page 16: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

15

la durée parce que tout dépendra du rapport médical qui sera établi par

le médecin auquel le juge doit recourir.

La loi ne détermine pas non plus les cas pour lesquels le juge peut

la prendre.

Nous pensons que cette mesure vise les enfants en conflit avec la

loi souffrant d’une maladie et/ou d’une déficience mentale et dont l’état

de santé exige des soins médicaux spéciaux et une éducation

permanente.

§6. Le placement dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat

(art 113 al1.5 LPPE)

La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant

prévoit, en son article 113 alinéa 1 point 5, le placement de l’enfant

dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat ; mais, elle

n’énumère pas les faits pour lesquels l’enfant qui les commet devra

faire l’objet de cette mesure.

Néanmoins, le législateur a pris soin de considérer le taux de la

peine prévue par la loi pénale comme critère déterminant de la mesure

de placement dans un EGEE.

C’est ainsi qu’aux termes de l’article 115 alinéa 1 de la LPPE, «

en cas de manquement qualifié d’infraction à la loi pénale punissable

de plus de cinq ans de servitude pénale principale et qui n’est pas

punissable de la peine de mort ou de la servitude pénale à perpétuité,

le juge qui a pris cette mesure pourra la prolonger pour un terme qui

ne peut dépasser la vingt-deuxième année d’âge de l’enfant ».

Par ailleurs, le juge pourra prolonger la mesure susvisée au-delà

de la dix-huitième année d’âge de l’enfant pour un terme de dix ans au

maximum, si le manquement est punissable par la loi pénale de la

Page 17: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

16

peine de mort ou de la peine de servitude pénale à perpétuité (art.116

al.1 LPPE).

Dans les deux cas prévus aux articles 115 et 116 de la loi,

l’intéressé qui atteint sa dix-huitième année d’âge, devra être séparé

des enfants au sein du même établissement de garde et d’éducation de

l’Etat, sur décision du juge, à la demande de l’autorité de

l’établissement de garde (art.115 al.2 et 116 al.2 LPPE).

.

§7. Le placement dans un établissement de rééducatio n de l’Etat (art 117)

L’article 117 al.1 de la LPPE prévoit, au titre de mesure définitive,

le placement dans un établissement de rééducation de l’Etat (ERE)

dans deux hypothèses :

- L’enfant doit avoir commis un manquement qualifié d’infraction à

la loi pénale punissable de plus d’un an de servitude pénale ;

- L’enfant doit être d’une perversité caractérisée ou récidiviste.

La durée de placement dans un ERE est d’une année au moins et de

cinq ans au plus (art.117 in fine LPPE). Cette décision n’est pas

applicable aux enfants âgés de moins de quinze ans (art.117 al.2

LPPE).

Un décret du Premier Ministre délibéré en conseil des ministres

fixera l’organisation et le fonctionnement de l’établissement de

rééducation de l’Etat.

Mais à ce jour, le décret susvisé n’est pas encore pris ; et, en

attendant, l’enfant faisant l’objet de la mesure de placement dans un

ERE, sera placé dans un EGEE.

Page 18: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

17

Section 3 : Les mesures complémentaires.

Le juge pour enfants peut, pour telle ou telle autre raison,

assortir sa décision définitive d’une mesure complémentaire.

Il peut, soit ordonner le placement avec sursis, soit soumettre l’enfant

au régime de la liberté surveillée.

§1. Le placement avec sursis (art 114 LPPE)

Le sursis ou la condamnation conditionnelle est une mesure de

dispense de l’exécution de la peine que le juge a la faculté d’accorder

aux courtes peines pendant une durée d’épreuve qui ne dépassera pas

cinq ans. (2)

En matière d’enfant en conflit avec la loi, le sursis consiste en ce

que l’enfant ayant fait l’objet d’une mesure de placement dans un

établissement de garde et d’éducation de l’Etat soit dispensé de

l’exécution de cette mesure pour une période qui n’excède pas sa

majorité, c’est-à-dire sa dix-huitième année, et pour le manquement

qualifié d’infraction à la loi pénale punissable au maximum de cinq ans

de servitude pénale principale (art 114 al1 LPPE).

Il en résulte que le sursis n’est concevable que dans les

hypothèses suivantes :

- la mesure principale doit consister en un placement dans un

établissement de garde et d’éducation de l’Etat ;

- la durée du sursis ne peut pas dépasser la dix-huitième année

d’âge de l’enfant ;

- le manquement commis par l’enfant doit être punissable par la loi

pénale au maximum de cinq ans de servitude pénale principale.

2 NYABIRUNGU MWENE SONGA : Droit Pénal Général Zaïrois, éd. Droit et Société « DES », Kinshasa, 1989, p.

339

Page 19: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

18

Les conditions du sursis ne sont pas déterminées par la

loi comme c’est le cas en matière pénale; c’est une question de fait

laissée à l’appréciation du juge pour enfants (art 114 al2 LPPE).

Les conditions du sursis peuvent varier selon la personnalité du

mineur (par ex. délinquance primaire), la nature des faits commis (par

ex. bénignité des faits) et les circonstances de la commission des faits

(par ex. la provocation de la victime).

C’est pour cela qu’il est recommandé au juge de motiver

suffisamment sa décision en précisant les raisons qui l’ont amené à

prononcer le sursis.

A cet égard, il détermine les conditions que l’enfant doit

raisonnablement respecter, par exemple, ne pas récidiver, ne pas

fréquenter telle personne ou tel milieu à telle heure.

§2. La liberté surveillée (art 118 LPPE)

C’est une mesure complémentaire que le juge peut prononcer à

l’égard de l’enfant qui n’a pas fait l’objet de placement ou dont le

placement a été levé.

Sa durée ne doit pas dépasser la dix-huitième année d’âge de

l’enfant.

En fait, cette mesure peut être prononcée dans tous les cas

prévus à l’article 113 al.1, 2, 3, 4 à l’exception du point 5 de cette

disposition.

La liberté surveillée ne peut pas être prononcée lorsque le juge décide

du placement dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat.

Page 20: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

19

La raison est que dans les EGEE il existe déjà des agents de l’Etat

chargés de la surveillance de l’enfant qui y est placé.

La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant

ne donne pas des précisions sur le statut des personnes chargées de

surveiller l’enfant lorsque ce dernier a fait l’objet d’une mesure autre

que celle de placement dans un EGEE.

Par contre, le décret du 06 décembre 1950 sur l’enfance

délinquante, en son article 13 alinéa 3 confiait la surveillance de

l’enfant en liberté surveillée à des personnes qui portaient le nom

de’’Délégués à la protection de l’enfance’’.

Au regard de la loi du 10 janvier 2009, la liberté surveillée est

assurée par les assistants sociaux.

Section 4 : Les spécificités des décisions du juge pour enfants

Il ressort de l’économie des textes protecteurs des droits de

l’enfant que les mesures du juge pour mineurs sont spécifiques en ce

que :

- elles ont une portée éducative et non pas répressive ;

- elles se fondent sur l’intérêt supérieur de l’enfant en vue de sa

resocialisation, son redressement et sa réinsertion et non pas

nécessairement le rétablissement de l’ordre public (art.6 al.1

LPPE) ;

- elles sont toujours rendues contradictoirement à l’égard du

mineur, la procédure par défaut étant exclue (art.104 point 2 et

art.110 al.5 LPPE) ;

- elles sont rendues en tenant compte de l’âge de l’enfant au

moment de la commission des faits et non pas au moment de la

saisine du juge (art.98 LPPE) ;

- elles sont obligatoirement sujettes à révision tous les 3 ans par le

juge (art.127 LPPE) ;

Page 21: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

20

- elles sont prises par le juge en concertation avec l’assistant

social ;

- elles ne peuvent pas consister en la peine de mort ni la servitude

pénale à perpétuité (art.9 al.2 LPPE).

Chapitre 2 : Les modalités d’exécution des décisions du

juge pour enfants

L’article 128 de la LPPE dispose : « A moins que le juge

n’en décide autrement, la décision est exécutoire sur minute dès le

prononcé en ce qui concerne la mesure prise à l’endroit de l’enfant » ;

et l’article 129 d’ajouter, « Le juge veille à l’exécution de toutes les

mesures qu’il a prises à l’égard de l’enfant.Il est aidé par l’assistant

social territorialement compétent ».

Par ailleurs, la loi précitée stipule à son article 119 : « Si

le manquement qualifié d’infraction est établi, le juge met les frais à

charge des personnes civilement responsables et, s’il y a lieu, les oblige

aux restitutions et aux dommages et intérêts ».

Il résulte de ce qui précède que les décisions du juge pour

enfants s’exécutent, d’une part, par rapport à l’enfant qui en fait

l’objet, et, d’autre part, par rapport aux réparations civiles au profit de

la victime.

Section 1 : L’exécution des décisions par rapport à l’enfant en

conflit avec la loi.

Page 22: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

21

La décision du juge pour enfants peut consister, comme

nous l’avons examiné précédemment, soit à maintenir l’enfant en

conflit avec la loi dans son milieu familial ou dans une famille de

substitution, soit à le placer dans une institution, sous l’autorité des

particuliers ou des personnes publiques investis légalement des

pouvoirs de surveillance, de garde et d’éducation.

§1.Le rôle des intervenants dans l’exécution des décisions du

juge pour enfants en milieu familial.

Les parents, tout comme les autres personnes exerçant sur l’enfant

l’autorité parentale ou tutélaire , ainsi que les couples auxquels

l’enfant est confié sont les principaux intervenants pour l’exécution

des décisions en milieu familial. Ceux-ci, de même que le juge,

bénéficient, en toute circonstance, de l’appui technique de l’assistant

social à qui incombe la charge du suivi permanent.

1. Les parents et les particuliers personnes physiqu es.

Lorsque la loi parle de la remise de l’enfant à ses parents, il faut

considérer qu’il s’agit des ses père et mère biologiques ; les oncles, les

tantes et les autres membres de la famille peuvent être mis dans la

catégorie de « ceux qui en ont la garde » ou de « ceux qui exerçaient

sur lui l’autorité parentale ». Cela paraît plus clairement à l’article 106

al1.1 de la LPPE lorsque, s’agissant d’ « une mesure provisoire, l’enfant

est placé sous l’autorité de ses père et mère… », tandis que le couple

de bonne moralité fait partie de ceux qui sont qualifiés de ‘’particulier’’.

L’obligation qui incombe aux parents et/ou à toutes personnes

civilement responsables, consiste à surveiller l’enfant dans tous ses

mouvements en vue de l’empêcher à se livrer de nouveau à des actes

qui soient de nature à porter atteinte à l’ordre public et aux droits

d’autrui.

En milieu familial, la loi n’a pas prévu la possibilité de séparer

l’enfant en conflit avec la loi avec les autres enfants, ni avec les autres

Page 23: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

22

membres de la famille ; les parents ne peuvent pas adopter pareille

attitude, du reste, stigmatisante et frustrante à son égard, car elle ne

favorise pas l’amandement de l’enfant, ni sa réinsertion sociale.

Les parents et les particuliers dont il est question sont également

tenus, sous peine d’encourir les sanctions prévues à l’article 131 al.1

point 1 de la LPPE, de maintenir l’enfant dans ce milieu et de s’abstenir

de le soustraire ou de tenter de le soustraire à la procédure intentée

contre lui.

Il y a lieu de noter que, lorsque la mesure du juge consiste à placer

l’enfant chez un couple, la charge des frais d’entretien et d’éducation

de cet enfant, résultant des mesures prononcées par le tribunal,

incombent aux personnes qui lui doivent des aliments, si elles sont

solvables, ou, à défaut, à charge de l’Etat (art.121 de la LPPE).

Pour se rassurer de la meilleure observance des mesures ayant trait

au placement en milieu familial, le juge devra recourir au service de

l’assistant social (art.129 LPPE).

2. L’assistant social.

L’assistant social jouit des prérogatives très étendues dans

l’exécution des décisions rendues par le juge pour enfants.

A l’égard du juge, il vient en appui dans toutes les décisions que

celui-ci prend envers le mineur.

A l’endroit de l’enfant, son rôle consiste à prendre des mesures

d’accompagnement visant la sauvegarde de l’ordre public et la sécurité

de l’enfant et tenant compte de la réparation du préjudice causé (art

96 al. 2 LPPE).

Vis-à-vis du milieu, il veille sur les conditions de vie de l’enfant,

des parents et des personnes qui en ont la garde.

A cet effet :

-il recueille l’histoire de vie de l’enfant ;

-il examine les conditions socio-économiques de la famille ;

-il examine le climat relationnel et affectif dans la famille ;

Page 24: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

23

-il se renseigne sur les projets de chacun concernant l’enfant ;

-il identifie les facteurs facilitant et les freins à son épanouissement ;

-il recueille avec beaucoup de prudence des informations auprès de

l’entourage sur le comportement de l’enfant et celui de ses parents…

Par ailleurs, l’assistant social, en procédant à la collecte des

informations concernant la conduite et le comportement de l’enfant

(art. 109 LPPE), peut saisir le juge en vue de la révision des mesures

prises à l’égard de l’ntéressé (art 125 al 1 in fine LPPE).

3. Le juge

L’article 129 al 1 de la LPPE dispose : « Le juge veille à

l’exécution de toutes les mesures qu’il a prises à l’égard de l’enfant ».

En matière de justice juvénile, le prononcé de la décision ne

dessaisit pas le juge qui l’a rendue comme il en est le cas pour la

justice des adultes. Bien au contraire, il est très actif et assure le suivi

des mesures qu’il a lui-même prises ou, s’il est empêché pour le faire,

un autre juge peut y pourvoir.

Grâce à son pouvoir de suivi même en milieu familial, et

conformément à l’article 125 de la LPPE, le juge peut être amené à

réviser sa décision, soit en la renforçant, soit en l’adoucissant. La

révision est obligatoirement envisagée tous les trois ans (art 127

LPPE), mais le juge peut intervenir avant l’expiration de cette période

grâce au rapport sur le dossier de la personnalité de l’enfant.

§2. L’exécution des décisions du juge pour enfants en milieu

institutionnel.

L’exécution des décisions du juge pour enfants peut être également

assurée par les institutions, privées ou publiques, et ce, dans le respect

de la réglementation en la matière.

Page 25: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

24

§1. Les institutions privées

Il s’agit des établissements et des organisations à caractère social

et éducatif, créés par des particuliers en vue de l’encadrement des

jeunes enfants, en général, et des enfants en situation difficile en

particulier. Les institutions privées les plus répandues à l’heure actuelle

prennent la forme des organisations non gouvernementales agréées

par l’Etat. Les orphelinats privés font également partie des institutions

privées.

Dans ces institutions privées, le personnel qui y travaille est doté

des compétences qui lui permettent de veiller à l’encadrement psycho-

affectif de l’enfant, à lui assurer les moyens nécessaires pour son

développement physique, mental et moral, son éducation… La liberté

du mineur se retrouve restreinte. Il y apprend des métiers et des

activités récréatives, culturelles, sportives…..

Par ailleurs, il est permis à l’enfant de fréquenter l’école ou de

faire un travail rémunéré.

Les institutions privées sont des milieux semi-ouverts dotés d’un

personnel qualifié et capable de surveiller l’enfant. Elles doivent remplir

les conditions suffisantes d’hygiène et de prise en charge médicale de

l’enfant.

§2. Les institutions publiques à caractère social

Il s’agit des établissements ou des services de l’Etat qui sont

chargés habituellement de l’encadrement des jeunes.

On peut citer, notamment, les orphelinats de l’Etat, les Centres

de Promotion Sociale de l’Etat placés sous l’autorité du Ministre ayant

les Affaires sociales dans ses attributions…

Page 26: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

25

Ce sont des milieux semi-ouverts.

L’enfant placé dans une telle institution apprend les métiers et

peut aussi fréquenter l’école.

Il convient de noter que les établissements de garde et

d’éducation de l’Etat et les établissements de rééducation de l’Etat sont

aussi des institutions publiques ; mais, elles fonctionnent selon un

régime particulier.

§3. Les établissements de garde et d’éducation de l ’Etat (EGEE)

A titre de rappel, il sied de signaler que le décret du Premier Ministre

délibéré en conseil des Ministres fixera l’organisation et le

fonctionnement des établissements de garde et d’éducation de l’Etat.

Mais, en attendant, l’exécution des décisions du juge ayant trait à cette

mesure repose sur l’ordonnance n° 13/140 du 23 avril 1954 portant

régime des établissements de garde et d’éducation de l’Etat.

En vertu de l’article 1 de l’Ordonnance précitée, l’institution

susvisée est destinée à ne recevoir que les enfants en conflit avec la loi

qui font l’objet d’une mesure de garde, d’éducation et de réinsertion

prise par le juge pour enfants.

Il n’est, donc, pas normal que dans ces établissements, destinés

uniquement aux enfants placés par le juge à la suite d’une décision de

justice, on y trouve, de nos jours, les enfants provenant d’autres

milieux, tels que les services de sécurité…

Dans les EGEE, les mineurs privés de liberté sont soumis à

l’autorité d’un agent de l’Etat appelé Directeur, chargé de prendre

toutes les mesures de sûreté et précautions pour empêcher lesdits

mineurs de se soustraire à sa surveillance et à l’exécution de la

Page 27: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

26

décision prise à leur égard. Leur vie privée y est garantie en ce sens

qu’ils ont le droit de conserver leurs effets personnels.

Le personnel des EGEE, constitué des éducateurs, des travailleurs

sociaux, des psychologues, des psychiatres, des infirmiers, des

moniteurs d’enseignement… doit, dans l’exercice de ses fonctions,

respecter et protéger la dignité humaine et les droits individuels

fondamentaux de tous les mineurs. Il lui est interdit de recourir à la

force et aux moyens de contrainte physique pour maintenir la

discipline, sauf pour des cas exceptionnels et lorsque les autres moyens

pour le faire se sont avérés inefficaces.

Chaque mineur placé dans un EGEE dispose d’un dossier personnel

contenant les pièces de procédure, les certificats médicaux, les notes

relatives à sa conduite, les notes relatives aux résultats scolaires, aux

travaux d’atelier et aux sanctions disciplinaires, et éventuellement les

correspondances échangées à son sujet.

Le dossier personnel du mineur doit être gardé de manière à ne

pas y donner accès au public. Il est confidentiel par souci de préserver

sa vie privée, mais peut être consulté par des personnes dûment

habilitées.

Toutefois, il est recommandé que tous les rapports et tous les

autres documents ayant trait à la personnalité de l’enfant placé dans

un EGEE soient transmis au juge pour enfants avec avis du Directeur

de l’Etablissement.

Le mineur placé dans un EGEE a droit :

- à une formation morale, scolaire et professionnelle assurée de

préférence hors de l’établissement, dans des écoles

communautaires ;

- a un travail propre à préparer son retour dans la société ;

Page 28: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

27

- à une rémunération équitable s’il travaille ;

- aux soins médicaux et à la nourriture ;

- aux activités récréatives et culturelles ;

- aux visites et aux correspondances ;

- à l’éducation religieuse selon sa foi ;

- à porter ses propres habits pour éviter l’humiliation et la

stigmatisation.

§4. Les établissements de rééducation de l’Etat (ER E)

Ces établissements concernent les enfants en conflit avec la loi et

qui ont commis les faits punissables par la loi pénale de plus d’un an de

servitude pénale, lesquels faits sont doublés d’un état de perversité

caractérisée du mineur.

Les établissements de rééducation n’ont jamais été organisés en

RDC, faute de décret y relatif.

Nous pensons que pour de tels cas, la décision du juge s’exécute

conformément à la législation sur les établissements de garde et

d’éducation de l’Etat.

Section 2 : L’exécution des décisions par rapport à la victime.

Dans la plupart des cas, la perpétration des manquements

qualifiés d’infraction par la loi commis par un enfant cause souvent

préjudice à la personne qui en est victime directe ou indirecte.

A cet égard, il importe de déterminer, d’une part, la personne

responsable de la réparation du dommage causé à la victime, et d’autre

part, d’indiquer la modalité d’exécution.

§1. Les personnes responsables de la réparation du préjudice.

Page 29: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

28

Aux termes de l’article 258 du code civil congolais livre III,

« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage,

oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Il résulte de cette disposition que la victime d’un fait

dommageable a droit à la réparation du préjudice subi. Dans ce cas,

c’est l’auteur du fait incriminé qui est tenu directement de cette

réparation, sans préjudice des frais de justice entraînés par le procès.

C’est dans cette logique que le décret du 6 décembre 1954 sur

l’enfance délinquante a eu à condamner l’enfant aux frais et à le tenir

solidairement avec les civilement responsables aux dommages et

intérêts en réparation du préjudice causé à la victime.

Par contre, la loi portant protection de l’enfant, en son article

119 stipule : « Si le manquement qualifié d’infraction est établi, le juge

met les frais à charge des personnes civilement responsables et, s’il y a

lieu, les oblige aux restitutions et aux dommages et intérêts ».

La disposition légale précitée se rapproche de l’article 260 du

code civil congolais livre III qui dispose : « On est responsable non

seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore

de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre,

ou des choses que l’on a sous sa garde.

-Le père, et la mère après le décès du mari, sont responsables du

dommage causé par leurs enfants habitant avec eux.

-Les instituteurs et les artisans, du dommage causé par leurs élèves et

apprentis pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance… ».

De l’examen des dispositions légales précitées il ressort que l’enfant en

conflit avec la loi est hors cause pour la réparation du préjudice que

son fait aurait causé à la victime.

En revanche, sont tenus aux frais, aux dommages et intérêts et autres

réparations :

-Les parents, c’est-à-dire les père et mère, ou ceux qui exerçaient

l’autorité parentale ou tutélaire sur l’enfant ;

Page 30: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

29

- Les particuliers, tels que les couples et les institutions à qui le

juge a confié l’enfant ;

- et, dans une certaine mesure, l’Etat.

§2. Les personnes chargées de l’exécution des intérêts civils

de la victime et des réparations éventuelles.

En règle générale, lorsqu’une décision judiciaire comporte des

condamnations civiles, il est reconnu que la personne responsable peut

s’exécuter volontairement ; à défaut de l’exécution volontaire, il peut

être procédé par la voie forcée aux soins de l’huissier de justice.

Toutefois, au regard de la loi portant protection de l’enfant, il est

admis que le comité de médiation peut aussi parvenir à obtenir

réparation du préjudice au profit de la victime.

En effet, l’huissier exécute la décision du juge en recourant à la

procédure ordinaire prévue par le code de procédure civile.

Pour sa part, le comité de médiation, dûment saisi par le Président

du tribunal pour enfants, assure la réparation du dommage causé à la

victime en se conformant à l’un des procédés prévus à l’article 134 de

la loi portant protection de l’enfant, à savoir :

- l’indemnisation de la victime :

- la réparation matérielle du dommage ;

- la restitution des biens à la victime ;

- la compensation ;

- les excuses expresses présentées de façon verbale ou écrite à la

victime ;

- la réconciliation ;

- l’assistance à la victime

- le travail d’intérêt communautaire.

Il est bon de noter que la matière relative à la médiation fait l’objet

d’un module bien détaillé et nous conseillons aux lecteurs de s’y

référer.

Page 31: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

30

Table des matières

I. Introduction .............................................................................1

Chapitre 1 : Les décisions prononcées par le juge pour enfants ..........4

Page 32: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

31

Section 1 : Les mesures provisoires (art 106 et 108 LPPE) ..............4

§1. Le placement en famille (art 106 al1.1)................................5

§2. : L’assignation à résidence (art. 106 al1.2 de la LPPE)............5

§3. Le placement chez un couple ou en institution (art 106 al1.3de

la LPPE) ................................................................................6

§4. Le placement dans un établissement de garde et d’éducation de

l’Etat (art.108 al.1 de la LPPE)..................................................7

Section 2 : Les décisions ou mesures définitives ............................9

§1. La relaxe (art 96 LPPE) .................................................... 10

§2. La réprimande et la remise de l’enfant à ses parents ou aux

personnes qui exerçaient sur lui l’autorité parentale (art 113 al 1.1

LPPE).................................................................................. 11

§3. Le placement chez un couple ou dans une institution privée (art

113.2 LPPE)......................................................................... 13

§4. Le placement dans une institution publique à caractère social

(art 113 al1 LPPE) ................................................................ 14

§5. Le placement dans un centre médical ou médico-éducatif

approprié (art 113 al1.4 LPPE) ............................................... 14

§6. Le placement dans un établissement de garde et d’éducation de

l’Etat (art 113 al1.5 LPPE)...................................................... 15

§7. Le placement dans un établissement de rééducation de l’Etat

(art 117) ............................................................................. 16

Section 3 : Les spécificités des décisions du juge pour enfants....... 19

Chapitre 2 : Les modalités d’exécution des décisions du juge ........... 20

Section 1 : Structures d’exécution ........ Erreur ! Signet non défini.

§1. La famille....................................................................... 21

§2. Les particuliers .......................... Erreur ! Signet non défini.

§3. Les institutions privées .................................................... 24

§4. Les institutions publiques à caractère social ........................ 24

1°) Les établissements de garde et d’éducation de l’Etat (EGEE) .25

2°) Les établissements de rééducation de l’Etat (ERE) ............... 27

Section 2 : Le rôle des intervenants dans l’exécution des décisions en

matière de justice juvénile........................................................ 27

Page 33: par KABASELE NZEMBELE - ajpmonde.orgƒ©cisions-du... · Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence comme une mesure consistant pour un individu faisant

32

§1. Le rôle du juge .......................... Erreur ! Signet non défini.

§2. Le rôle de l’Officier du Ministère publicErreur ! Signet non

défini.

§3. Le rôle des parents ou tuteurs ..... Erreur ! Signet non défini.

§4. Le rôle de l’assistant social .......... Erreur ! Signet non défini.

§5. Le rôle du greffier ...................... Erreur ! Signet non défini.

Table des matières..................................................................... 30