88
1 UNIVERSITÉ PIERRE ET MARIE CURIE (PARIS 6) FACULTE DÉ MÉDECINE PITIÉ-SALPÊTRIÈRE ANNÉE 2007-2008 THÈSE N° 2008PA06S013 DOCTORAT EN MÉDECINE SPÉCIALITÉ : MALADIES INFECTIEUSES ET TROPICALES PAR Loïc EPELBOIN Né le 17 avril 1979 à Clamart ______________ PRESENTÉE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT LE 6 MAI 2008 ATTEINTES CARDIAQUES DES HELMINTHIASES : À PROPOS DE DEUX CAS DE MYOCARDITE AIGUË AU COURS DE LA BILHARZIOSE INVASIVE DIRECTEUR DE THÈSE : Monsieur le Professeur Éric CAUMES PRÉSIDENT DE THÈSE : Monsieur le Professeur Martin DANIS MEMBRES DU JURY : Monsieur le Professeur Olivier BOUCHAUD Monsieur le Docteur Stéphane JAURÉGUIBERRY

(PARIS 6) FACULTE DÉ MÉDECINE PITIÉ …fulltext.bdsp.ehesp.fr/Individuel/Memoires/2008/Epelboin.pdf · langeron olivier anesthesiologie lazennec jean-yves anatomie / chirurgie

Embed Size (px)

Citation preview

1

UNIVERSITÉ PIERRE ET MARIE CURIE (PARIS 6)

FACULTE DÉ MÉDECINE PITIÉ-SALPÊTRIÈRE

ANNÉE 2007-2008 THÈSE N° 2008PA06S013

DOCTORAT EN MÉDECINE

SPÉCIALITÉ : MALADIES INFECTIEUSES ET TROPICALES

PAR

Loïc EPELBOIN Né le 17 avril 1979 à Clamart

______________

PRESENTÉE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT LE 6 MAI 2008

ATTEINTES CARDIAQUES DES HELMINTHIASES :

À PROPOS DE DEUX CAS DE MYOCARDITE AIGUË

AU COURS DE LA BILHARZIOSE INVASIVE

DIRECTEUR DE THÈSE : Monsieur le Professeur Éric CAUMES PRÉSIDENT DE THÈSE : Monsieur le Professeur Martin DANIS MEMBRES DU JURY : Monsieur le Professeur Olivier BOUCHAUD

Monsieur le Docteur Stéphane JAURÉGUIBERRY

2

TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS……………………………………………………………………. p.4 PROFESSEURS DES UNIVERSITÉS DE LA PITIÉ-SALPÊTRIÈRE……………. p.5 ABRÉVIATIONS……………………………………………………………………….. p.8 VALEURS NORMALES DES PARAMÈTRES BIOLOGIQUES………………….. p.9 INTRODUCTION………………………………………………………………………. p.10 CAS CLINIQUES……………………………………………………………………….. p.12

Cas Clinique n° 1 Cas Clinique n° 2

DISCUSSION …………………………………………………………………….. p.20

I. GÉNÉRALITÉS SUR LA BILHARZIOSE…………………………………….p.20 A. HISTORIQUE…………………………………………………………. p.20 B. ÉPIDÉMIOLOGIE…………………………………………………….. p.21

1. Bilharziose endémique 2. Bilharziose invasive

C. PARASITOLOGIE……………………………………………………..p.27 1. Transmission

2. Cycle évolutif D. PRÉSENTATION CLINIQUE……..………………………………….p.30

1. Manifestations immédiates 2. Bilharziose invasive a. Présentation habituelle

b. Neurobilharziose aiguë 3. Quelques notions concernant la bilharziose chronique

E. DIAGNOSTIC MICROBIOLOGIQUE……………………………….. p.35 F. TRAITEMENT………………………………………………………… p.37

II. DONNÉES CARDIOLOGIQUES…………………………………………….. p.37

A. CŒUR ET BILHARZIOSE CHRONIQUE…………………………... p.37 1. HTAP et CPC

2. Myocardite bilharzienne chronique 3. Autres causes de myocardite au cours de la bilharziose chronique 4. Cœur éosinophilique chronique

B. MYOCARDITE AIGUË………………………………………………. p.44

III. ATTEINTE CARDIAQUE DE LA BILHARZIOSE INVASIVE……………p.48 A. ANALYSE DES 2 CAS CLINIQUES…………………………………p.48

B. MYOCARDITE AIGUË DE LA BILHARZIOSE INVASIVE.……... p.51 C. HYPOTHÈSES PHYSIOPATHOLOGIQUES………………………...p.53

3

1. La théorie mécanique 2. La théorie immunologique a. Myocardite aiguë et éosinophiles b. Myocardite aiguë auto-immune c. Conséquences thérapeutiques

D. CŒUR ET AUTRES HELMINTHIASES AIGUËS………….. ………p.66 1. Atteintes cardiaques au cours de la trichinellose invasive 2. Atteintes cardiaques au cours de la toxocarose 3. Atteintes cardiaques au cours de l’anguillulose maligne 4. Atteintes cardiaques au cours des filarioses 5. Autres helminthiases CONCLUSION………………………………………………………………………….. p.71 ANNEXES (Tableaux récapitulatifs) ……………………………………………………. p.75

Annexe n°1 : Principaux caractères différentiels des espèces de schistosomes Annexe n°2 : Causes de myocardite aiguë Annexe n°3 : Causes d’élévation de la troponine Annexe n°4 : Atteintes cardiaques au cours des protozooses Annexe n°5 : Atteintes cardiaques au cours des helminthiases

BIBLIOGRAPHIE….…………………………………………………………………... p.80 RÉSUMÉ ET MOTS-CLÉS…………….. ………………………………….…….. p.88

4

REMERCIEMENTS A Monsieur le Professeur Eric Caumes, Directeur de cette thèse, fervent combattant

des maladies tropicales, fléaux de l’humanité, qui a su me guider dans la rédaction

de cette thèse, par ses conseils avisés et sa disponibilité.

A Monsieur le Professeur Martin Danis, l’un des derniers samouraïs de la

parasitologie clinique, qui m’a fait l’honneur d’accepter de présider cette thèse.

A Monsieur le Professeur Olivier Bouchaud, fin connaisseur de l’Afrique et des

Africains, qui m’a fait l’honneur de participer au jury de cette thèse.

A Monsieur le Docteur Stéphane Jauréguiberry, pour avoir orienté mon travail, et

fait part de ces connaissances sur la bilharziose, qui m’a fait l’honneur de participer

au jury de cette thèse.

A M le Professeur Laurent Fourcade, Marseille, Mme le Docteur Tiphaine Gaillard,

Toulon, M. le Professeur Louis V. Kirchhoff, Iowa City, USA, M. le Professeur

Joseph E. Parrillo, Camden, New Jersey, USA, Mme Isabelle Borloz, de la Société

de Pathologie exotique, pour leur aide et leurs réponses aussi promptes à mes

sollicitations électroniques.

5

ET AUSSI, ET SURTOUT…. À Sihem, ma princesse, pour son soutien, tant bien que mal, pendant cette période

délicate. Ton tour viendra… après Mayotte.

À mes parents, Sylvie et Alain, pour leur relecture attentive de mon travail.

À Jb, son aide précieuse d’expert ès cardiologie, vive Golgi.

À Renaud, qui m’a fait économiser de précieuses heures de travail.

À Mao, mi hermano colombiano, et ses conseils informatiques, à Rachel.

À Laurent Big L, pour son aide en Anglais.

À mes petits frères, Mic et Nouk, que la fuerza sea con ellos.

Aux amis de Médecine, dont les chemins se suivent depuis tant d’années.

À mon binôme, Binbin ADLB, sans qui je ne serais pas ici aujourd’hui.

À Didimo, à la musique gnawa-brésilienne, la vie hors de l’hôpital.

À Abdel et à tous les Guyanais.

À mes grands-mères, Madeleine et Mamé, et à feux mes grands-pères.

À ma chaleureuse belle-famille de Bab Ezzouar, Alger.

À mon filleul, Erwan, son frère Matéo, son père Jose el feo.

À ceux du laboratoire de microbiologie de Saint Joseph.

À mes tuteurs sud-américains, Messieurs les Professeurs Sergio Mollinedo, La Paz,

Bolivie, et Amarilio Macedo, Porto Alegre, Brésil, um abraço.

….JE DÉDIS CE MODESTE TRAVAIL, QUI ME FAIT DOCTEUR.

6

PROFESSEURS DES UNIVERSITÉS

Nom et Prénom Discipline universitaire

ACAR Christophe CHIRURGIE THORACIQUE ET CARDIO-VASCULAIRE AGID Yves FEDERATION DE NEUROLOGIE AGUT Henri BACTERIOLOGIE-VIROLOGIE-HYGIENE ALLILAIRE Jean-François PSYCHIATRIE D’ADULTES AMOURA Zahir MEDECINE INTERNE ASTAGNEAU Pascal EPIDEMIOLOGIE/SANTE PUBLIQUE AURENGO André BIOPHYSIQUE et MEDECINE NUCLEAIRE AUTRAN Brigitte IMMUNOLOGIE BAILLET François RADIOTHERAPIE BARROU Benoît UROLOGIE BASDEVANT Arnaud NUTRITION BAULAC Michel ANATOMIE / NEUROLOGIE BAUMELOU Alain NEPHROLOGIE BELMIN Joël MEDECINE INTERNE BENHAMOU Albert CHIRURGIE VASCULAIRE BENVENISTE Olivier MEDECINE INTERNE BERGER Geneviève BIOPHYSIQUE et MEDECINE NUCLEAIRE BERTRAND Jacques-Charles STOMATOLOGIE ET CHIRURGIE MAXILLO-FACIALE BITKER Marc Olivier UROLOGIE BODAGHI Bahram OPHTALMOLOGIE BOISVIEUX Jean-François BIOSTATISTIQUES et INFORMATIQUE MEDICALE BOURGEOIS Pierre RHUMATOLOGIE BRICAIRE François MALADIES INFECTIEUSES - MALADIES TROPICALES BRICE Alexis GENETIQUE BRUCKERT Eric ENDOCRINOLOGIE ET MALADIES METABOLIQUES CABANIS Emmanuel RADIOLOGIE et IMAGERIE MEDICALE CACOUB Patrice MEDECINE INTERNE CALVEZ Vincent VIROLOGIE ET BACTERIOLOGIE CAPRON Frédérique ANATOMIE ET CYTOLOGIE PATHOLOGIQUE CATALA Martin CYTOLOGIE ET HISTOLOGIE CATONNE Yves CHIRURGIE ORTHOPEDIQUE ET TRAUMATOLOGIQUE CAUMES Eric MALADIES INFECTIEUSES - MALADIES TROPICALES CESSELIN François BIOCHIMIE et BIOLOGIE MOLECULAIRE CHAMBAZ Jean BIOLOGIE CELLULAIRE CHARTIER-KASTLER Emmanuel UROLOGIE CHASTRE Jean REANIMATION MEDICALE CHERIN Patrick MEDECINE INTERNE CHIGOT Jean-Paul CHIRURGIE GENERALE CHIRAS Jacques RADIOLOGIE et IMAGERIE MEDICALE III CLEMENT-LAUSCH Karine NUTRITION CLUZEL Philippe RADIOLOGIE ET IMAGERIE MEDICALE II COHEN David PEDO-PSYCHIATRIE COHEN Laurent NEUROLOGIE CORIAT Pierre ANESTHESIOLOGIE et REANIMATION CHIRURGICALE CORNU Philippe NEURO-CHIRURGIE COURAUD François BIOCHIMIE et BIOLOGIE MOLECULAIRE DANIS Martin PARASITOLOGIE DARBOIS Yves GYNECOLOGIE – OBSTETRIQUE DAVI Frédéric HEMATOLOGIE BIOLOGIQUE DAUTZENBERG Bertrand PNEUMOLOGIE DEBRE Patrice IMMUNOLOGIE DELATTRE Jean-Yves NEUROLOGIE DERAY Gilbert NEPHROLOGIE DERENNE Jean-Philippe PNEUMOLOGIE DOMMERGUES Marc GYNECOLOGIE - OBSTETRIQUE DORMONT Didier NEURO-RADIOLOGIE DUBOIS Bruno NEUROLOGIE DURON Jean-Jacques CHIRURGIE DIGESTIVE DUYCKAERTS Charles ANATOMIE et CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES EYMARD Bruno NEUROLOGIE FAUTREL Bruno RHUMATOLOGIE FERRE Pascal BIOCHIMIE et BIOLOGIE MOLECULAIRE FONTAINE Bertrand FEDERATION DE NEUROLOGIE FOSSATI Philippe PSYCHIATRIE D’ADULTES FOURET Pierre ANATOMIE et CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES GANDJBAKHCH Iradj CHIRURGIE THORACIQUE et CARDIO-VASCULAIRE. GIBERT Claude REANIMATION MEDICALE GIRERD Xavier THERAPEUTIQUE / ENDOCRINOLOGIE

7

GONZALES Jacques BIOLOGIE du DEVELOPPEMENT et de la REPRODUCTION GRENIER Philippe RADIOLOGIE et IMAGERIE MEDICALE II GRIMALDI André ENDOCRINOLOGIE ET MALADIES METABOLIQUES HAERTIG Alain MEDECINE LEGALE / UROLOGIE HANNOUN Laurent CHIRURGIE GENERALE HAUW Jean-Jacques ANATOMIE et CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES HELFT Gérard DEPARTEMENT DE CARDIOLOGIE HERSON Serge THERAPEUTIQUE /MEDECINE INTERNE HEURTIER Agnès ENDOCRINOLOGIE ET MALADIES METABOLIQUES HOANG XUAN Khê NEUROLOGIE ISNARD-BAGNIS Corinne NEPHROLOGIE JARLIER Vincent BACTERIOLOGIE-HYGIENE JOUVENT Roland PSYCHIATRIE D'ADULTES KATLAMA née WATY Christine MALADIES INFECTIEUSES ET TROPICALES KHAYAT David ONCOLOGIE MEDICALE KIEFFER Edouard CHIRURGIE VASCULAIRE KLATZMANN David IMMUNOLOGIE KOMAJDA Michel CARDIOLOGIE et MALADIES VASCULAIRES KOSKAS Fabien CHIRURGIE VASCULAIRE LAMAS Georges OTO-RHINO-LARYNGOLOGIE LANGERON Olivier ANESTHESIOLOGIE LAZENNEC Jean-Yves ANATOMIE / CHIRURGIE ORTHOPEDI QUE LEBLOND née MISSENARD Véronique HEMATOLOGIE CLINIQUE LECHAT Philippe PHARMACOLOGIE LE FEUVRE Claude DEPARTEMENT DE CARDIOLOGIE LEFRANC Jean-Pierre CHIRURGIE GENERALE LEHERICY Stéphane RADIOLOGIE et IMAGERIE MEDICALE LEHOANG Phuc OPHTALMOLOGIE LEMOINE François IMMUNOLOGIE LUBETZKI ép. ZALC Catherine FEDERATION DE NEUROLOGIE LYON-CAEN Olivier FEDERATION DE NEUROLOGIE MALLET Alain BIOSTATISTIQUES ET INFORMATIQUE MEDICALE MARIANI Jean BIOLOGIE CELLULAIRE/MEDECINE INTERNE MAZERON Jean-Jacques RADIOTHERAPIE MAZET Philippe PEDO-PSYCHIATRIE MAZIER Dominique PARASITOLOGIE MEININGER Vincent NEUROLOGIE MENEGAUX Fabrice CHIRURGIE GENERALE MERLE-BERAL Hélène HEMATOLOGIE BIOLOGIQUE METZGER Jean-Philippe DEPARTEMENT DE CARDIOLOGIE MONTALESCOT Gilles CARDIOLOGIE ET MALADIES VASCULAIRES OPPERT Jean-Michel NUTRITION PAVIE Alain CHIRURGIE THORACIQUE et CARDIO-VASCULAIRE. PERRIGOT Michel REEDUCATION FONCTIONNELLE PETITCLERC Thierry BIOPHYSIQUE / NEPHROLOGIE PIERROT-DESEILLIGNY Charles NEUROLOGIE PIETTE François MEDECINE INTERNE PIETTE Jean-Charles MEDECINE INTERNE POIROT Catherine CYTOLOGIE ET HISTOLOGIE POYNARD Thierry HEPATO-GASTRO-ENTEROLOGIE PUYBASSET Louis ANESTHESIOLOGIE REANIMATION CHIRURGICALE RATIU Vlad HEPATO - GASTRO - ENTEROLOGIE RICHARD François UROLOGIE RIOU Bruno ANESTHESIOLOGIE/URGENCES MEDICO-CHIRURGICALE RIXE Olivier ONCOLOGIE MEDICALE ROBAIN Gilberte REEDUCATION FONCTIONNELLE ROUBY Jean-Jacques ANESTHESIOLOGIE ET REANIMATION CHIRURGICALE SAMSON Yves NEUROLOGIE/URGENCES CEREBRO-VASCULAIRES SIMILOWSKI Thomas PNEUMOLOGIE SOUDANT Jacques OTO-RHINO-LARYNGOLOGIE SPANO Jean-Philippe ONCOLOGIE MEDICALE THOMAS Daniel CARDIOLOGIE ET MALADIES VASCULAIRES TOUITOU Yvan NUTRITION / BIOCHIMIE VAILLANT Jean-Christophe CHIRURGIE GENERALE VAN EFFENTERRE Rémy NEURO-CHIRURGIE VERNANT Jean-Paul HEMATOLOGIE CLINIQUE VERNY Marc MEDECINE INTERNE WILLER Jean-Vincent PHYSIOLOGIE ZELTER Marc PHYSIOLOGIE / EXPLORATIONS FONCTIONNELLES

8

ABRÉVIATIONS

AC/FA Arythmie cardiaque par fibrillation auriculaire

ALAT (=SGOT) Alanine Amino Transférase

ASAT (=SGPT) Aspartate Amino Transférase

BAV Bloc auriculo-ventriculaire

CHU Centre Hospitalo-Universitaire

CK-MB Fraction MB de la Créatine Kinase

CMH Complexe Majeur d’Histocompatibilité

CMV Cytomégalovirus

CPC Cœur pulmonaire chronique

CPK Créatine PhosphoKinase

EBV Epstein-Barr Virus

ECG Electrocardiogramme

ELISA Enzyme-Linked ImmunoSorbent Assay

EPC Endocardite pariétale chronique

EPF Endocardite pariétale fibroblastique

FEM Fibrose endomyocardique

FLAIR FLuid Attenuation Inversion Recovery

HTA Hypertension artérielle

HTAP Hypertension artérielle pulmonaire

IRM Imagerie par résonance magnétique

GGT Gamma Glutamyl transferase

LDH Lactate Déshydrogénase

HHV6 Human Herpes Virus 6

MBP Major Basic Protein

MMS Mini Mental Status

NFS Numération Formule Sanguine

OMS Organisation mondiale de la Santé

PAL Phosphatase Alcaline

ECP Eosinophilic cationic protein

SCA Syndrome coronarien aigu

SHE Syndrome hyperéosinophilique idiopathique

SIRS Syndrome de réponse inflammatoire systémique

9

VALEURS NORMALES DES PARAMÈTRES BIOLOGIQUES

Unités

Valeurs normales

ASAT

U/l 20-32

ALAT

U/l 16-35

GGT

U/l 11-49

PAL

U/l 40-120

LDH

U/l 11-49

Bilirubine

µmol/l 2-17

CPK

U/l 25-195

CK-MB

µg/l < 5

Troponine

µg/l < 0,2

Eosinophiles

/mm3 0-500

Leucocytes totaux

/mm3 2000-7500

CRP

mg/l < 5

10

INTRODUCTION

La schistosomose ou bilharziose est un problème de santé publique mondial de premier ordre.

Elle représente la deuxième parasitose mondiale, après le paludisme, avec, selon l’OMS [1],

environ 200 millions de personnes infectées, dont 120 millions sont symptomatiques et 20

millions présentent une forme grave invalidante. Les répercussions socio-économiques dans les

pays en voie de développement sont majeures, en dépit de nombreux programmes de lutte contre

son extension. La maladie est endémique sur tous les continents, dans plus de 76 pays, mais on

estime que plus de 85% des cas sont concentrés en Afrique, souvent dans les pays où l’on

retrouve une incidence élevée pour le VIH, la tuberculose et le paludisme [2].

La bilharziose humaine est une helminthiase de type zoonose, dont cinq espèces sont pathogènes

pour l’homme, chacune ayant une répartition spécifique sur le globe : Schistosoma hæmatobium,

S. mansoni, S. japonicum S. mekongi et S. intercalatum. La forme chronique des maladies liées à

ces différentes espèces est bien connue depuis le milieu du XIXème siècle, depuis que Theodor

Bilharz décrivit pour la première fois, en 1851 S. hæmatobium dans les veines mésentériques

d’un Égyptien. La bilharziose chronique touche majoritairement les personnes vivant en zone

d’endémie. En revanche, la forme aiguë de la maladie, récemment regroupée sous le terme de

bilharziose invasive - ou acute schistosomiasis en anglais - est plus rare. Sa physiopathologie est

mal connue et les premières descriptions hors du Japon n’apparaissent que dans les années 1980

[3]. A part en Asie où sévit S. japonicum, elle est rarement observée dans les populations

subissant une exposition chronique au parasite, et est principalement décrite chez les voyageurs.

Elle survient généralement plusieurs semaines après la contamination et s’accompagne souvent,

quand elle est symptomatique, d’un cortège de signes cliniques dus à une réaction

d’hypersensibilité liée à la migration du parasite, à type de fièvre, asthénie, myalgie, éruption

urticarienne, symptomatologie respiratoire et digestive [4]. La guérison est généralement

11

spontanée en quelques jours, mais des atteintes sévères ont été décrites. La littérature récente

s’est particulièrement intéressée aux atteintes neurologiques de la bilharziose invasive [5, 6],

mais les atteintes cardiaques existent et sont très peu connues, contrairement à celles de la

bilharziose chronique.

Nous décrirons ici deux cas d’atteinte cardiaque au cours de bilharzioses invasives chez des

voyageurs de retour d’Afrique hospitalisés respectivement en 2004 et 2006 dans le service de

Maladies Infectieuses et Tropicales du Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière.

Après avoir rappelé les données récentes de la littérature concernant la bilharziose, nous nous

attarderons sur les atteintes cardiaques connues de la forme chronique de la maladie, bien décrites

en Afrique dans les années 1980. Nous tenterons ensuite de comprendre les mécanismes

physiopathologiques de l’atteinte cardiaque au cours de la bilharziose aiguë, en nous appuyant,

d’une part, sur les données existant pour les atteintes cardiaques au cours de réaction

d’hypersensibilité et, d’autre part, au cours d’autres helminthiases aigues.

12

CAS CLINIQUES

Cas Clinique n° 1

Monsieur N., 16 ans, lycéen sans antécédent, d’origine franco-équatorienne, ayant séjourné un

an en Équateur, a voyagé du 27 juillet au 24 août 2006 au Burkina Faso et au Mali. La

chimioprophylaxie anti palustre par méfloquine a été bien observée et les vaccinations pour les

hépatites A et B, la typhoïde et la fièvre jaune sont à jour. Il relate s’être baigné dans une cascade

au Mali, dans le Pays Dogon, les 15 (J0) et 16 août 2006. Il ressent une asthénie intense

accompagnée de nausées à partir du 18 août (J3) qui cèdent spontanément au retour en France le

24 août (J9). A partir du 8 septembre (J24), il ressent à nouveau une grande fatigue, et une fièvre

à 39°C apparaît le 10 septembre (J26), associée à des myalgies et des douleurs dorsales et

abdominales diffuses. Ces plaintes le conduisent à se rendre à la consultation des voyageurs le 11

septembre (J27). En dehors de la constatation d’une hyperthermie à 39,2°C, l’examen clinique

est sans particularité. La NFS et l’ionogramme sanguin sont normaux, la CRP à 22 mg/l. La

bandelette urinaire et la recherche de paludisme sont négatives. Malgré un traitement

antipyrétique, la fièvre persiste, et le 13 septembre (J29) apparaît une toux productive. Le

lendemain, son médecin généraliste diagnostique une bronchite aiguë devant une radiographie

pulmonaire normale. Dans la nuit du 14 au 15 septembre (J31), surviennent une gêne respiratoire

et une douleur thoracique à l’inspiration, suivies, le matin, d’une éruption prurigineuse à type de

lésions papuleuses érythémateuses migratrices, contemporaines de la disparition de la fièvre.

Le patient consulte à nouveau son médecin traitant qui lui prescrit un bilan sanguin qui retrouve

le 16 septembre (J32) un taux d’éosinophiles à 558/mm3, une recherche de paludisme négative,

une CRP à 26 mg/l et une hypertransaminasémie avec ASAT = 162 U/l et ALAT = 219 U/l. Un

traitement par anti-histaminiques et amoxicilline est mis en place. Le 17 (J33), devant la

13

persistance de la toux, de la dyspnée, une majoration de l’éruption cutanée et l’apparition d’un

œdème de la lèvre supérieure et des paupières, il consulte aux urgences de la Pitié-Salpêtrière.

L’examen clinique du patient apyrétique ne révèle qu’une sensibilité isolée de l’hypocondre droit.

Le nouveau bilan biologique montre une NFS normale, malgré un taux d’éosinophiles à la limite

supérieure de la normale (558/mm3) [cf. figure 1], une CRP à 9, une altération du bilan

hépatique (ASAT 113 U/l, ALAT 222 U/l, GGT 160 U/l, PAL 276 U/l) et un frottis - goutte

épaisse négatif. Le patient rentre à domicile, tout traitement arrêté, et est adressé en consultation

de Maladies Infectieuses le lendemain pour suspicion d’hépatite virale. Le 17.09.06, la relecture

de la lame de frottis goutte épaisse retrouve une parasitémie positive < 0,01% avec présence de

trophozoïtes de Plasmodium falciparum.

Le patient est alors hospitalisé. L’examen clinique d’entrée est inchangé et l’éruption d’allure

urticarienne est toujours présente. Les examens paracliniques objectivent les constatations

suivantes : NFS normale hormis une éosinophilie à 522/mm3 (11,5%) ; CRP 8 mg/l ;

ionogramme sanguin et fonction rénale normale, bilan hépatique en amélioration (ASAT 148

U/l ; ALAT 182 U/l; GGT 148 U/l) LDH 532 U/l (1,4N) ; CPK 76 U/l ; troponine < 0,04 µg/l ;

l‘immunodiagnostic bilharziose et l’examen parasitologique des urines sont négatifs.

L’échographie hépatique est normale en dehors d’un ganglion de 9,5 mm du hile hépatique. La

radiographie pulmonaire est normale. Le patient bénéficie d’un traitement par atovaquone-

proguanil, et, devant une amélioration des symptômes, rentre à domicile.

Le diagnostic confirmé est celui de paludisme. L’autre diagnostic suspecté est celui d’un

syndrome de Löffler ou d’une bilharziose invasive. Le 22 septembre (J38), l’éruption, la toux et

la dyspnée ont complètement disparu, mais apparaissent des céphalées frontales intenses,

accompagnées de phosphènes, de nausées et de vomissements associés à une douleur thoracique

rétrosternale, irradiant dans le dos, à type de serrement survenant de façon intermittente. Le 23

14

septembre (J39) le patient est réhospitalisé : la troponine est élevée à 1,50 µg/l et l’ECG montre

des troubles de repolarisation aspécifiques dans le territoire antéro-latéral [cf. ECG n°1]. Par

ailleurs, le reste du bilan montre un bilan hépatique (ASAT 53 U/l ; ALAT 71 U/l), CPK 209 U/l

(N<195 U/l), et un taux d’éosinophiles à 510/mm3 (6%). Il est alors transféré en Unité de Soins

Intensifs Cardiologiques pour suspicion de myocardite aiguë ou vascularite coronaire et

cérébrale. L’échographie cardiaque transthoracique montre une minime hypokinésie du tiers

apical et moyen antérieur, une fraction d’éjection du ventricule gauche et une tension artérielle

pulmonaire normale. Un nouvel ECG retrouve un sous-décalage du segment ST en apico-latéral

en en inférieur [cf. ECG n°2] ; la troponine s’élève jusqu’à 4,5 µg/l, puis diminue. L’IRM

cérébrale réalisée le 25 septembre (J41) est normale et on constate une séroconversion pour les

anticorps anti- S. mansoni.

Devant la suspicion de myocardite ou de vascularite coronarienne compliquant une bilharziose

invasive aiguë, un traitement par corticoïdes est initié en bolus, relayé par une corticothérapie

orale (1 mg/kg/j soit 50 mg/j, avec diminution progressive), associée à un traitement β-bloquant

(acébutolol) et un inhibiteur de l’angine de conversion de l’angiotensine (ramipril). Le 27

septembre (J43) le patient est retransféré en salle, devant l’amélioration clinico-biologique et la

normalité de l’IRM cardiaque réalisée. La poursuite de l’amélioration clinique est telle qu’il

rentre à domicile le 1er octobre.

Le patient est revu régulièrement en consultation de Maladies Infectieuses et de cardiologie après

sa sortie. Il décrit la persistance d’une dyspnée d’effort, mais l’examen clinique est normal, la

troponine se négative à partir du 5 octobre (J51) et la sérologie bilharzienne reste stable. Le 14

octobre (J60), il est décidé de la poursuite de la diminution des corticoïdes à 15 mg/j et de l’arrêt

du ramipril. La biologie montre une absence d’hyperéosinophilie, et les examens parasitologiques

des urines sont négatifs. Début novembre, le patient arrête de lui-même la corticothérapie devant

15

une restitution ad integrum de son état antérieur. On constate alors une réascencion des

éosinophiles jusqu’à 3000/mm3. Un traitement par praziquantel à la dose de 40 mg/kg soit 2400

mg est donc instauré à 3 mois de l’épisode aigu malgré la négativité de l’examen parasitologique

des urines. Ce traitement permet une disparition progressive de l’éosinophilie. Dans les suites, le

patient est revu à deux reprises en consultation, ne se plaignant que d’une asthénie résiduelle et

d’une petite toux sèche chronique. Un an plus tard son état de santé est parfaitement satisfaisant.

Figure 1: Courbe chronologique des éosinophiles et de la troponine de M. N.

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

3500

11/9

/06

16/9

/06

18/9

/06

19/9

/06

23/9

/06

24/9

/06

24/9

/06

24/9

/06

25/9

/06

26/9

/06

27/9

/06

28/9

/06

29/9

/06

30/9

/06

1/10

/06

3/10

/06

30/1

0/06

14/1

1/06

4/1/

07

31/1

/07

23/2

/07

27/1

2/07

Tau

x d

'éo

sin

op

hile

s (

/mm

3)

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

Tro

po

nin

e (

µg

/l)

Eosinophiles Troponine

Introduction des corticoïdes

Arrêt des corticoïdes

Douleur thoracique

16

ECG n°1 23/9 18h30 (Troponine = 1,5 µg/l) Onde T négative en V1 et sous-décalage du ST en V2

Ischémie sous-épicardique + lésion sous-endocardique septales

ECG n°2 : 23/9 21h Sous-décalage du segment ST en V4, V5, V6 + DII

Lésion sous-endocardique apico-latérale et inférieure

17

Cas Clinique n° 2

Monsieur F., 21 ans, étudiant en commerce, Parisien, sans antécédent, a voyagé en groupe

touristique au Mali, dans le pays Dogon, du 15 juillet au 19 août, et s’est baigné durant 30

minutes dans le lac Banani le 14 août (J0). Au cours du bain et dans les heures qui vont suivre, il

a ressenti un prurit intense suivi d’une éruption maculo-papuleuse touchant l’abdomen et la face

interne des bras, régressive en 24 heures. Plusieurs membres de son groupe ont présenté les

mêmes symptômes au décours de cette baignade collective.

Il consulte dans le service de Maladies Infectieuses et Tropicales de la Pitié-Salpêtrière à son

retour le 25 août, et un traitement préventif par praziquantel est instauré devant la suspicion de

bilharziose en incubation. Les examens biologiques (examen parasitologique des selles, frottis

sanguin - goutte épaisse, NFS, notamment et sérologie bilharzienne) sont normaux. L’examen

parasitologique des urines des compagnons de voyage retrouvera plus tard des œufs de

Schistosoma hæmatobium.

Progressivement, une asthénie s’installe, accompagnée d’une toux sèche, de céphalées, de

myalgies, et d’une fièvre, oscillant entre 38 et 38,9°C. Monsieur F. note un épisode d’œdème

palpébral isolé vers le 10 septembre (J27), spontanément résolutif en 24 heures. Il est alors

hospitalisé dans le Service de Maladies Infectieuses et Tropicales le 17 septembre (J34).

L’examen clinique, notamment cardio-pulmonaire et cutané, est normal. Un bilan biologique est

réalisé, qui montre une hyperéosinophilie à 2024/mm3 (22%), une troponine à 13,9 µg/l [cf.

Figure 2], des CK-MB à 6,6 µg/l, et une altération mixte du bilan hépatique (ASAT 114 U/l,

ALAT 225 U/l, PAL 347 U/l, GGT 382 U/l et bilirubine totale/conjuguée à 25/5). On observe

une séroconversion bilharzienne : immunofluorescence indirecte (antigène Schistosoma

mansoni®) à 0/100, et hémagglutination (Cellognost schistosomiasis ®, Behring) à 32.

L’électrocardiogramme montre des troubles de repolarisation aspécifiques en latéral (sous-

18

décalage du segment ST en V4), et l’échocardiographie cardiaque transthoracique est normale

avec une bonne fonction ventriculaire gauche, un ventricule gauche normal et un péricarde sec.

Devant ces signes de souffrance myocardique, un nouveau traitement par praziquantel est

institué. Le patient est gardé en hospitalisation 24 heures et finalement autorisé à sortir le 19

septembre (J36) devant la diminution de la troponine (5,1 µg/dl) et la normalisation de l’ECG.

Aussitôt rentré chez lui, il présente des troubles du comportement, décrits par sa compagne, à

type d’oublis (non-fermeture du réfrigérateur), de contact bizarre et de rires immotivés.

Il est réhospitalisé dans le service le 20 septembre (J37). L’examen clinique cardiaque et

neurologique est sans particularité, mais on note des hémorragies en flammèche sous-unguéales

au niveau des doigts et des orteils, et le score MMS est à 27/30 (dyscalculie). Le scanner cérébral

sans et avec injection est normal, mais l’IRM montre des hypersignaux diffus périventriculaires

de la substance blanche en séquences Diffusion et FLAIR touchant les zones jonctionnelles

hémisphériques droites et gauches (fosse postérieure, territoire jonctionnel médullaire. Cet aspect

évoque des micro-infarctus compatibles avec une vascularite cérébrale. L’examen

parasitologique des selles et des urines est toujours négatif, et l’hyperéosinophilie persistante.

L’ECG montre des troubles de repolarisation aspécifiques persistants et l’échographie cardiaque

est toujours normale. Un scanner cardiaque revient normal (myocarde régulier, péricarde fin),

malgré des images très artéfactées. Un bilan auto-immun, réalisé devant un allongement isolé du

TCA, retrouve des anticorps anti-cardiolipine de type IgM (28 U MPL), le reste du bilan étant

négatif par ailleurs. Devant la forte suspicion de vascularite cérébrale dans un contexte de

bilharziose invasive, un traitement par corticoïdes est instauré à la dose d’1 mg/kg/j le 22

septembre (J39). On constate alors une rapide disparition des troubles du comportement et une

chute du taux d’éosinophiles (291 /mm3 le 24/09), qui autorisent la sortie du patient sous

corticothérapie le 30 septembre (J47). Un contrôle d’IRM le 3 octobre (J50) montre une

19

régression des lésions, l’absence de signes d’angéite et la persistance d’images séquellaires de

micro-infarctus. La troponine du 6 octobre (J53) est toujours positive à 1,2 µg/l puis se négative

définitivement, de même que, progressivement, le taux d’éosinophiles. On propose une

décroissance progressive des corticoïdes et leur arrêt définitif mi-novembre, après réalisation

d’un test au synacthène. Une IRM cardiaque, réalisée en décembre 2003, à 3 mois du début de la

symptomatologie, montre des fonctions globale et segmentaire normales des deux ventricules, un

retard discret de la perfusion myocardique eu niveau du septum, avec cependant une possible

prise de contraste sous-endocardique limitée « pouvant correspondre avec une fibrose

endocardique ». Le nouveau scanner cardiaque est normal.

Par la suite, les consultations montrent un bon état de santé ; les examens biologiques confirment

la normalisation de la troponine et la stabilité de la sérologie. Une nouvelle cure de praziquantel

est administrée en janvier 2004 à distance de la phase invasive, afin de compléter le traitement, ce

qui permet la normalisation de l’éosinophilie qui était remontée après l’arrêt des corticoïdes.

Figure 2: Courbe chronologique des éosinophiles et de la troponine de M. F.

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

25/8

/03

16/9

/03

17/9

/03

19/9

/03

20/9

/03

22/9

/03

24/9

/03

6/10

/03

11/1

0/03

20/1

0/03

14/1

1/03

9/1/

04

25/2

/04

21/5

/04

6/10

/04

24/1

2/04

2/9/

06

Tau

x d

'éo

sin

op

hiles

(/m

m3)

0

2

4

6

8

10

12

14

16T

rop

on

ine

g/l

)

éosinophiles troponine

Introduction des corticoïdes

Arrêt des corticoïdes

1er cure de praziquentel

2ème cure de praziquentel

Apparition des troubles neuro

20

1 DISCUSSION

I. GÉNÉRALITÉS SUR LA BILHARZIOSE

A. HISTORIQUE

On datait initialement les premières allusions à la bilharziose vers -1500 ans avant notre ère sur

les hiéroglyphes de l’époque pharaonique des papyrus d’Ebers*, lesquelles portaient des

descriptions d’hématurie chez des hommes. L’analyse plus récente de momies remontant à

l’époque prédynastique chinoise (3200 ans avant notre ère) a permis de retrouver des œufs et des

antigènes de schistosomes [7]. En outre, des études archéologiques menées en Chine ont permis

de retrouver des oeufs de S. japonicum dans le cadavre d’une femme exhumé en 1971 dans la

province de Hunan en Chine, identifié comme contemporain de la dynastie Han Occidentaux** il

y a environ 2100 ans. Par ailleurs on retrouve, dans de vieux traités de médecine chinois

remontant à - 400 du calendrier grégorien, la description des symptômes cliniques ressemblant au

syndrome de Katayama [8]. Alors qu’on retrouve plusieurs descriptions d’hématurie attribuées à

la bilharziose (« pissements de sang » décrits par les médecins arabes chez des caravaniers

revenant de Tombouctou, « l’hématurie d’Egypte » décrite par les chirurgiens de l’armée

Napoléonienne), ce n’est qu’en 1851 que Theodor Bilharz découvre et décrit Schistosoma

hæmatobium dans les veines mésentériques d'un égyptien [9]. Les autres espèces seront

découvertes successivement au XXème siècle : S. mansoni en 1904, par Sir Patrick Manson et S.

japonicum au Japon. S. intercalatum au Zaïre, en 1934, et enfin S. mekongi, en 1957, à Paris chez

un patient originaire du Laos [10].

* Le papyrus d'Ebers, découvert et traduit par l’égyptologue allemand Georg Moritz Ebers, (1837-1898), date du début de la XVIIIème dynastie des Pharaons (1500 avant JC), mais dont on pense qu’il est la copie de documents plus anciens, remontant au début du troisième millénaire avant JC (2670-2160). C'est le plus ancien des traités scientifiques connus et il contient des notions d'anatomie, un exposé de cas pathologiques et les traitements correspondants, ainsi que sept cents recettes de médicaments. ** La dynastie Han régna sur la Chine de 206 avant. JC à 220 après JC. Fondée par Liu Bang, chef de guerre d'origine paysanne révolté contre la dynastie Qin, elle compta vingt-huit empereurs. Première dynastie impériale par sa durée, elle se divise en Han occidentaux (206 av. J.-C. - 9), et Han orientaux (25 - 220). (cf. Wikipédia)

21

B. ÉPIDÉMIOLOGIE

Les bilharzioses sont des zoonoses liées à la pollution de l’eau par des urines et des selles

humaines contaminées, et aux mollusques qui en sont les hôtes intermédiaires. C'est la deuxième

endémie parasitaire mondiale après le paludisme, avec près de 650 millions d’individus exposés,

200 millions de personnes atteintes à travers 75 pays dans les régions tropicales et subtropicales,

dont 120 millions symptomatiques, et 20 millions sous une forme grave. L’Afrique regroupe à

elle seule plus de 85% des cas, et la presque totalité des formes sévères. Enfin, dans les zones

d’endémie, les enfants âgés de 5 à 15 ans présentent le taux d’infection et la charge parasitaires

les plus élevés [1, 2, 11].

1. Bilharziose endémique

S. hæmatobium, agent de la bilharziose uro-génitale, est retrouvé dans 53 pays, principalement en

Afrique et au Moyen-Orient, mais également dans l’Océan Indien et sur le sous-continent indien.

S. mansoni, agent de la bilharziose intestinale, est rapporté en Afrique, au Moyen Orient et dans

certaines régions d’Amérique latine (essentiellement au Brésil) et des Caraïbes [cf. Figure 3]. S.

japonicum et S. mekongi sont responsables de la bilharziose artério-veineuse et sévissent en Asie

du Sud-Est et en Extrême Orient. S. intercalatum, est à l'origine de la bilharziose rectale dans

certains pays d'Afrique Centrale. Les grands flux de population, des campagnes, où la maladie est

endémique, vers les villes, ainsi que les déplacements de population liés aux conflits armés,

favorisent la dissémination de la maladie, en Afrique, en Amérique du Sud [12], comme en Asie

[8].

Paradoxalement, le développement semble favoriser l’extension de l’épidémie : les travaux

hydrauliques entrepris pour l’irrigation ou le développement de l’électricité ont provoqué

l’apparition de nouveaux écosystèmes aquatiques favorables à la multiplication des hôtes

22

intermédiaires, à l’origine d’une augmentation de la transmission de la schistosomose. Ainsi, on a

constaté l’apparition de nouveaux foyers de bilharziose urinaire en Afrique subsaharienne, suite à

la construction de barrages [2, 13]. De même, en Egypte, alors que la classique infection par S.

hæmatobium avait quasiment disparu (de 74% à 3.2% entre 1935 et 1979), grâce à l’usage massif

du praziquantel, on a observé un accroissement majeur de la prévalence des infections à S.

mansoni au cours de la deuxième moitié du XXème siècle (de 3,2% à 73% entre 1935 et 1979). Ce

phénomène a été relié à la construction du barrage Aswan High Dam, qui aurait favorisé la

prolifération de Biomphalaria, le mollusque vecteur de S. mansoni [14, 15]. Des programmes

d’éradication de la bilharziose par le praziquantel, promus par l’OMS, ont été mis en place à

partir des années 1980, après un demi - siècle de recherche d’une thérapie efficace [16].

Cependant, si plusieurs régions ont connu un succès certain dans cette lutte (le Maroc, Puerto

Rico, l’Arabie Saoudite, la Tunisie et le Venezuela sont proches de l’éradication ; le Brésil, la

Chine, l'Egypte et les Philippines ont réduit remarquablement la prévalence de la maladie),

l’incidence n’a cessé d’augmenter en Afrique, malgré les efforts développés, et le retentissement

socio-économique y est majeur.

2. Bilharziose invasive

La bilharziose était jusqu’à récemment une pathologie concernant essentiellement les populations

vivant dans des zones d’endémies, et la plupart des études étaient menées dans ces régions où les

individus sont exposés en permanence et présentent un état de semi-immunité [11, 17].

Avec les migrations massives de ressortissants d’Afrique subsaharienne, dans les années 1970-

1980, la pathologie devient de recherche courante dans les services spécialisés, parfois même

dans des consultations de stérilité. En revanche, les cas de bilharziose invasive rapportés chez des

migrants africains issus de zones d’endémie sont très rares. Une étude espagnole a étudié

23

rétrospectivement les motifs de consultations des migrants d’origine africaine consultant dans

l’unité de Médecine tropicale et d’Immigration de Barcelone: le diagnostic de bilharziose a été

porté chez 15% des consultants (200 sur 1321) et aucune bilharziose aiguë n’a été décrite [18].

Les patients traités pour une forme chronique de la bilharziose rapportent rarement une histoire

antérieure de bilharziose aiguë [19, 20], sauf dans le cas d’une étude réalisée au Nigéria où

auraient été relatés des signes de bilharziose aiguë par 44% des 89 patients suivis pour fibrose

endomyocardique [21]. Il n’y a pas de description de la primo-infection bilharzienne chez

l’enfant en zone d’endémie. Peut-être ces épisodes passent-ils inaperçus, à l’occasion d’éruption

ou de fièvre non étiquetées de l’enfant.

Avec la fin du XXème siècle et l’avènement de l’écotourisme et des voyages « d’aventure » en

pays tropicaux, le nombre de cas importés de bilharziose aiguë par des voyageurs occidentaux

augmente de façon notable dans les zones non endémiques, l’Europe tout particulièrement [22,

23]. La littérature médicale des 20 dernières années foisonne d’articles rapportant des petites

épidémies ou des cas sporadiques de bilharziose invasive, essentiellement chez des touristes, des

humanitaires ou des militaires au retour d’Afrique [24-27]. La plupart de ces épidémies sont

survenues au décours d’un bain dans une eau contaminée par des cercaires bilharziens: Lac

Malawi [25, 27, 28], cascade de Banani au Pays Dogon au Mali [5, 29-32], rivière Zambezi en

Zambie, lac Victoria en Tanzanie [26], Rivière Pipi en Centrafrique, Rivière Volta au Burkina

Faso [33], au Congo, au Niger, rivière Omo en Ethiopie [3, 34], delta de l’Okavango au

Botswana [24]… Quelques cas ont également été décrits au retour d’Amérique du Sud

(Amazonie), d’Irak, et d’Asie du Sud Est (fleuve Mékong) [34, 35]. Les taux d’attaque sont

élevés chez les touristes, de 69 à 100% après un bain dans une eau contaminée, ce qui explique

les petites épidémies dans des groupes de voyageurs [30, 31]. Certains sports aquatiques sont

associés à un risque accru de contraction de la bilharziose : canoë-kayak, rafting, plongée, ski

24

nautique…[36, 37]. Il existe beaucoup de mythes concernant le risque de contracter la bilharziose

et certaines situations sont dites à tort sûres [38]: eaux vives, nage autour d’îles désertes des

Grands Lacs Africains, baignade avec combinaison, propreté apparente des eaux, conseils de

guides locaux « assermentés »…

La bilharziose invasive est fréquente en Asie avec S. japonicum : on y observe régulièrement des

épidémies dans des zones d’endémie et chez des populations exposées chroniquement, souvent à

l’occasion de catastrophes naturelles. Ce phénomène est une spécificité épidémiologique de S.

japonicum par rapport à S. mansoni ou S. hæmatobium, dont les sujets infectés ne redéveloppent

généralement jamais de formes invasives [8, 37].

La schistosomose aiguë est rapportée sporadiquement au Brésil où la bilharziose chronique à S.

mansoni est une maladie endémique des classes sociales basses des zones rurales. Sa répartition

géographique a été modifiée par les vagues migratoires vers les mégalopoles. Récemment, ont été

décrites plusieurs épidémies, dont certaines à l’occasion d’inondations, dans le Nordeste

brésilien, où a eu lieu une épidémie touchant 662 individus d’une région non endémique [39]. De

plus, plusieurs épidémies de petite taille chez des individus des classes moyennes et hautes ont

été décrites suite à des bains contaminants, à l’occasion de week-ends ou de vacances en zone

rurale [12, 40].

En Afrique, par contre, la bilharziose aiguë S. hæmatobium et S. mansoni est une maladie

nouvellement décrite chez des sujets non immunisés, et elle concerne principalement l’expatrié

européen ou nord-américain. Cette nouvelle épidémiologie de la bilharziose du voyageur

« vierge » a même permis d’identifier de nouveaux gîtes bilharziens, dans des zones où l’on

croyait la maladie absente, et de susciter de nouvelles investigations. C’est le cas du Lac Malawi,

où l’ouverture récente aux activités touristiques a révélé la présence de bilharziose dans la partie

sud-est du lac, en contradiction avec les affirmations de la plupart des guides touristiques [27].

25

Des publications hollandaises et espagnoles, rapportant la présence de S. intercalatum dans la

région de Bandiagara et de Bankass au Mali ont été à l’origine du déplacement d’une équipe de

chercheurs deux ans plus tard, dans le but de vérifier sa transmission dans la population [41].

Cette nouvelle façon d’aborder la pathologie tropicale, par le biais des touristes, s’inclut dans

cette conception nouvelle du touriste comme « observatoire sentinelle » des maladies tropicales,

et la médecine des voyages comme antenne épidémiologique, permettant d’identifier de

nouvelles dynamiques de transmission d’espèces dans des aires géographiques précises [11, 17,

42].

Plusieurs études récentes ont mis l’accent sur la place prépondérante prise par la bilharziose

invasive au sein des diagnostics à évoquer lors de fièvres au retour de zone tropicale. Dans une

étude rétrospective menée dans le Service de Maladies Infectieuses et Tropicales de la Pitié-

Salpêtrière sur 622 patients consultant au retour de pays tropicaux, la bilharziose arrivait au 5ème

rang des étiologies de fièvre (7,2% des consultations), après les maladies de peau, les troubles

digestifs, les infections des voies aériennes supérieures et le paludisme [43]. La bilharziose a

représenté 1,7% des 1640 fièvres prises en charge dans le département de médecine tropicale

d’Anvers en Belgique entre 2000 et 2004 [44]. Le réseau européen de surveillance des maladies

infectieuses importées (TropNetEurop) a rapporté 412 consultations pour schistosomose parmi

les 51000 consultants sur la période de 1999 à 2001 et 333 cas de bilharzioses hospitalisés dans

11 hôpitaux européens sur 4 ans [22]. Près de 90% d’entre eux avait contracté la maladie en

Afrique subsaharienne.

26

Figure 3 : RÉPARTITION MONDIALE DES CINQ PRINCIPALES ESPÈCES DE SCHISTOSOMES (D’après Blanchard TJ in Travel Medecine and Infectious Disease 2004[38])

Distribution globale de S. hæmatobium, S. japonicum et S. mekongi.

Distribution globale de S.mansoni et S. intercalatum.

27

C. PARASITOLOGIE

1. Transmission

La bilharziose est due à un parasite du genre Schistosoma sp. (du Grec schistos = fendu et soma =

corps) de l’embranchement des plathelminthes (vers plats), de la classe des trématodes. Les vers

adultes, hématophages, mesurent 6 à 20 mm de long, ont des sexes séparés et vivent dans le

système veineux mésentérique ou splanchnique de l’hôte. Le mâle, plus court et plus trapu que la

femelle, loge celle-ci dans une fente dite canal gynécophore [45].

L'infestation de l'homme par les schistosomes s'effectue par contact avec de l'eau contaminée par

des furcocercaires nageants infectants qui pénètrent activement à travers la peau. Les gîtes de

transmission de la maladie sont constitués par les eaux stagnantes, les bords des rivières, les

berges de lacs, les canaux d'irrigation... Les pêcheurs, les cultivateurs, les riziculteurs et les

ouvriers qui entretiennent les canaux d'irrigation sont les personnes à risque. Les femmes, en

raison de leur fréquentation quotidienne de lieux à risque pour les tâches ménagères, sont plus

atteintes que les hommes. Enfin, les enfants sont bien plus touchés que les adultes [1], car ils se

baignent et jouent plus souvent dans les marigots, notamment aux heures chaudes où l'émission

cercarienne est la plus intense.

2. Cycle évolutif

Le cycle est indirect et fait intervenir un hôte définitif qui est en général l'homme, et un hôte

intermédiaire qui est un gastéropode d'eau douce. Les bulins, mollusques à coquille globuleuse,

sont les principaux hôtes intermédiaires de S. hæmatobium et S. intercalatum en Afrique [cf.

Annexe 1]. Biomphalaria glabrata est une planorbe d'eau douce, hôte intermédiaire de S.

mansoni en Amérique. Oncomelania nasophora est l'hôte intermédiaire de S. japonicum en Asie

[46].

28

L'élimination des œufs se fait par les urines pour S. hæmatobium ou par les selles pour les autres

espèces. Leur éclosion libère dans l’eau un miracidium qui pénètre le mollusque dans lequel il se

transforme en larves : les furcocercaires. Ces larves vont être libérées dans le milieu aquatique et

vont infester l'homme par pénétration transcutanée active lors d'un contact avec de l'eau douce.

Ce contact avec l'eau, même court (parfois à peine 5 minutes) est ainsi nécessaire pour

l’infection. L’être humain n’est pas le seul hôte définitif des schistosomes, et divers

mammifères peuvent servir de réservoirs, tels que chiens, chats, rongeurs, porcs, chèvres, buffles,

et vaches [38].

Seule la tête des cercaires pénètre et donne un schistosomule qui gagne par voie sanguine et

lymphatique le poumon, le cœur gauche, puis le foie. Cette étape correspond à la phase

d’invasion de la maladie. Les vers deviennent adultes et s’accouplent dans le système porte, dans

différentes localisations selon l’espèce. Les femelles migrent ensuite vers les veinules du système

porte ou périvésicaux et pondent des œufs qui percent la paroi des capillaires sanguins et gagnent

l'intestin ou la vessie pour être finalement rejetés avec les urines et les selles [10]. La durée totale

du cycle chez le mollusque est d'un mois. La durée de vie des furcocercaires dans l'eau est de 24 à

72 heures. Les vers peuvent vivre en moyenne 5 ans dans l’organisme humain, mais ont parfois

été retrouvés jusqu’à 30 ou 40 ans après l’infestation chez des patients issus de zones d’endémie

[19].

Pour résumer, le cycle du parasite a 3 phases dans le corps humain, qui correspondent aux 3

phases cliniques. La première phase est la pénétration du cercaire dans l’hôte, qui correspond à la

dermite cercarienne, la seconde phase est la migration dans les tissus et la maturation des

schistosomules, qui correspond à la phase dite invasive, et enfin la troisième phase correspond à

la production endovasculaire d’œufs, avec les lésions d’organes progressives liées à la formation

des granulomes de la bilharziose chronique.

29

.

Figure 4 : Cycle parasitaire de Schistosoma sp. D’après Ross, N Engl J Med, 2002[47].

Les miracidiums pénètrent

dans le mollusque Oeufs

Les miracidiums se

transforment en

sporocystes puis en

cercaires

Les cercaires sont

relargués dans l’eau

fraiche

Eau fraiche

Œufs excrétés

dans les selles ou

les urines

Les vers migrent vers les

vaisseaux mésentériques de

l’intestin ou de la vessie où les

femelles pondent les oeufs

Vers matures et

accouplés

Larves matures dans le foie

Les larves migrent vers le

cœur gauche et dans la

circulation

Bilharziose chronique

Les cercaires deviennent

schistosomules

Les larves migrent vers les

poumons puis dans la circulation

veineuse

Les cercaires

pénètrent

dans la peau

Œufs retenus

dans les tissus

30

D. PRÉSENTATION CLINIQUE

1. Manifestations immédiates

C’est la dermatite cercarienne ou démangeaison du nageur (swimmer’s itch en anglais). Une

éruption maculo-papuleuse se développe à partir du site de pénétration du cercaire. Chez les

sujets non immuns, cette éruption très prurigineuse survient généralement au cours du bain

contaminant ou dans les minutes ou les heures qui suivent, mais peut parfois apparaître plus

d’une semaine après. Cette éruption est souvent fugace (moins de 24 heures), parfois inapparente

ou oubliée, et est rapportée de façon très variable par les patients, selon les études (5 à 100 % des

cas) [31, 33, 34, 39, 40, 48, 49]. En pratique, elle donc rarement vue par le clinicien.

Cette dermatite peut être rencontrée avec des schistosomes parasites d‘autres espèces animales,

dont l’infection va se limiter à cette première phase, l’être humain étant une impasse parasitaire.

Ainsi, la dermatite du nageur est bien connue des baigneurs de certains lacs d’Europe, comme le

lac Léman ou le lac d’Annecy, et due à la pénétration de furcocercaires de Trichobilharzia du

canard colvert [50].

2. Bilharziose invasive

a. Présentation habituelle

Antérieurement appelée fièvre de Katayama en Asie, car elle avait été décrite pour la première

fois au Japon avec S. japonicum, et fièvre des safaris en Afrique avec S. mansoni et S.

hæmatobium), ou fièvre de primo-infection bilharzienne, elle est actuellement regroupée sous le

terme de bilharziose invasive, ou schistosomose aiguë (acute schistosomiasis en anglais). Elle est

commune aux différentes espèces de schistosomes mais d’intensité variable selon les espèces [4].

Elle correspond à une réaction d’hypersensibilité immédiate liée à la migration du schistosomule

dans l’organisme. Elle est parfois inapparente, mais s’exprime dans 53 à 100% des cas selon les

31

études [12, 30, 31, 33, 40, 48, 49]. Quand elle survient, la période d’incubation est de 14 à 84

jours [47]. Le début de la maladie est en général brutal, et il existe tout un cortège de symptômes

peu spécifiques de la série atopique: fièvre (54 à 100% des cas), asthénie, céphalées (31 à 93%),

myalgies diffuses (43 à 74%), éruption urticarienne (13 à 47%). On peut rencontrer des troubles

digestifs à type de vomissements, des douleurs abdominales diffuses, (0 à 93%) ou localisées à

l’hypocondre droit, et parfois des diarrhées (14 à 81%). Une hépatomégalie (0 à 75%), et moins

fréquemment une splénomégalie, sont décrites. Les signes respiratoires sont fréquemment

rapportés avec une toux sèche (17 à 91%) et une dyspnée (70%), plus fréquents lors des

infections à S. mansoni qu’à S. hæmatobium, avec des opacités alvéolo-interstitielles diffuses à la

radio de thorax [28].

La symptomatologie est généralement peu sévère, mais certains patients développent parfois des

tableaux plus marqués avec altération de l’état général et perte de poids, dyspnée importante,

diarrhée profuse, douleurs abdominales diffuses et/ou éruption cutanée généralisée. Enfin, des

tableaux mettant en jeu le pronostic vital ont été rapportés, avec des atteintes neurologiques et

cardiaques sur lesquelles nous reviendrons.

La durée des symptômes est généralement de 1 à 10 semaines, en général courte pour la fièvre et

l’urticaire (1 à 2 semaines), et plus longue pour les signes respiratoires (6 semaines en moyenne)

[4, 34].

Chez les personnes vivant en zone d’endémie, S. hæmatobium et S. mansoni provoquent rarement

un syndrome de Katayama, du fait d’une immunité partielle. Des facteurs génétiques, dont

certains liés aux gènes du CMH, ont été identifiés qui expliqueraient la variabilité d’expression et

de gravité d’un sujet à l’autre [51]. On suggère qu’à l’instar du paludisme, il existe une immunité

de réinfection longue à acquérir, qui conduirait à un état de semi-immunité, et qui diminuerait la

sévérité des symptômes chez les adultes en zones d’endémie, notamment en Afrique. Pourtant,

32

l’acquisition d’une immunité effective est difficile à prouver, car la diminution du taux

d’infection après l’adolescence, peut aussi être expliquée par un contact diminué avec l’eau [37].

En outre, il n’a pas été décrit de cas de schistosomose aiguë chez des individus originaires

d’Afrique vivant en pays tempérés et retournant secondairement en zones d’endémie. On pourrait

imaginer que, comme pour la malaria, la perte d’exposition chronique au parasite fasse perdre

l’immunité acquise, ce qui provoquerait des nouvelles « primo-infections » lors d’une

réexposition. Enfin, on ne retrouve pas plus de notion de bilharzioses invasives chez des enfants

d’immigrés se rendant au pays pour la première fois. Un seul cas clinique rapporte une

symptomatologie compatible avec une bilharziose invasive à l’introduction d’un traitement

prophylactique par praziquantel, chez un enfant originaire du Congo ayant vécu 8 ans dans un

camp de réfugiés en Tanzanie, et récemment immigré en Australie [52].

Le syndrome de Katayama du à S. japonicum, par contre, n’est pas limité à la primo-infection, et

peut survenir chez des patients vivant en zone d’endémie avec des antécédents d’infections

antérieures. Ainsi, a-t-on décrit en Chine des épidémies de bilharziose invasive suite à des

inondations dans des communautés vivant en régions d’endémie [8].

b. Neurobilharziose aiguë

Les atteintes neurologiques au cours de la bilharziose surviennent classiquement au cours de la

bilharziose chronique. Ils sont liés à la réaction granulomateuse provoquée par la présence d’œufs

dans le système nerveux central [53-55].

Les troubles neurologiques au cours de la bilharziose aiguë, bien que souvent sévères, sont plus

rarement décrits, dans 3 à 4.3% des cas [53]. Les premières descriptions ont été faites par des

médecins militaires lors de la seconde guerre mondiale, au cours d’une épidémie majeure (1500

cas) d’infection S. japonicum chez des soldats américains en opération aux Philippines [56, 57].

33

On retrouve, de plus, des cas d’atteintes neurologiques au cours de la bilharziose aiguë chez des

voyageurs au retour d’Afrique, et particulièrement depuis 2003 [5, 6, 27, 58-60]. Les atteintes

décrites sont de deux ordres :

§ Des atteintes encéphalitiques diffuses, avec céphalées, troubles des fonctions supérieures

(confusion, ralentissement psychomoteur), des crises comitiales tonico-cloniques

partielles ou généralisées, et des troubles de conscience allant jusqu’au coma.

§ Des signes focaux cérébraux ou médullaires, pouvant se traduire par une hémianopsie

latérale homonyme, une dysarthrie, une ataxie, une incontinence urinaire, un déficit

moteur (mono-, hémi-, para-, tétraplégie ou parésie).

Ces troubles ont été rapportés principalement pour S. japonicum, S. mansoni et S. hæmatobium.

La localisation aberrante des œufs est une explication qui n’est pas satisfaisante pour expliquer

ces troubles. En effet, ces manifestations surviennent au cours de la phase invasive, soit 2 à 6

semaines après la contamination, et les œufs n’ont pas encore été pondus. Plusieurs mécanismes

explicatifs ont été proposés. Dans l’observation de Sarazin et coll. où l’on observe une atteinte

cérébrale concomitante à une atteinte cardiaque, un mécanisme de thrombose artérielle à partir

d’un thrombus intra-cardiaque provoqué par la fibrose endomyocardique a été suggéré[61]. Le

mécanisme physiopathologique qui semble cependant le plus plausible pour expliquer la

symptomatologie est une toxicité des éosinophiles induisant une vascularite et une thrombose des

petits vaisseaux du SNC [6, 58, 59]. Nous aurons l’occasion de revenir plus longuement sur ces

phénomènes.

3. Quelques notions concernant la bilharziose chronique

La bilharziose chronique, sur laquelle nous ne nous attarderons pas, résulte de la réponse

immunitaire de l’hôte aux œufs de schistosome dans les tissus, et à la réaction granulomateuse

34

provoquée par les antigènes qu’ils sécrètent [37]. L’intensité et la durée de l’infection

déterminent la quantité d’antigène relarguée et la sévérité de la maladie chronique fibro-

obstructive. En effet, la réaction granulomateuse détruit les œufs mais provoque une fibrose

importante dans les tissus de l’hôte [10].

S. hæmatobium, dont les œufs sont déposés dans la paroi vésicale, est à l’origine de la bilharziose

urinaire chronique. Elle survient classiquement 10 à 12 semaines après l’infection. Les

manifestations les plus fréquemment retrouvées à la phase précoce sont la dysurie et l’hématurie.

A la phase tardive, on peut observer protéinurie, hématuries itératives, calcifications vésicales,

obstruction urétérale, colique néphrétique, hydronéphrose, insuffisance rénale aiguë obstructive,

surinfections bactériennes vésicales, stérilité (par lésions ou obstruction tubaires), et parfois,

dégénérescence carcinomateuse [19, 38].

Dans le cas de S. mansoni, S. intercalatum et S. japonicum, la fibrose se développe aux dépends

de l’intestin et du foie. La bilharziose rectale, qui résulte de la présence d’œufs dans la paroi

intestinale, va alors se manifester par des diarrhées, des rectorragies, des sténoses digestives, et

une polypose colique. L’embolisation d’œufs de S. mansoni et S. japonicum dans le foie va

provoquer une inflammation pré-sinusoïdale et une fibrose péri-portale. A long terme, peuvent se

développer une hépatomégalie jusqu’au stade de cirrhose avec hypertension portale,

hypersplénisme et varices oesophagiennes [47].

On peut parfois observer une migration aberrante des vers dont la ponte va être à l’origine de

granulomes ectopiques dans de nombreux organes avec des symptomatologies spécifiques - peau,

poumon, cerveau, surrénales, muscles … Si elle concerne principalement les migrants originaires

de zones d’endémie, elle peut également toucher des voyageurs, avec ou sans signes antérieurs de

bilharziose invasive (57 vs 43%) et survenant de 4 mois à 3 ans après la contamination [34].

35

E. DIAGNOSTIC MICROBIOLOGIQUE

Des méthodes directes et indirectes permettent le diagnostic de bilharziose.

Parmi les méthodes directes, le « gold standard » du diagnostic de la bilharziose est l’examen

parasitologique des excreta, selles et /ou urines [47]. Les œufs sont faciles à détecter et à

identifier en microscopie optique, de par leur taille et leur éperon typique latéral ou terminal. En

cas de négativité, on peut utiliser des méthodes de concentration pour détecter les œufs en faible

quantité. Il est également recommandé de demander des prélèvements répétés 3 jours de suite.

Cette méthode ne permet pas de diagnostic précoce, puisque que les œufs ne seront pondus par

les vers qu’après leur maturation, c'est-à-dire souvent 2 à 3 mois après la contamination. De plus,

elle peut manquer de sensibilité en cas d’infestation modérée [37, 46].

L’examen parasitologique des urines permet essentiellement d’identifier les oeufs de S.

hæmatobium. Il se fait sur des urines de 24h, recueillies si possible après un effort physique

prémictionnel (marche à pied, montée d’un escalier, sautillement…), ce qui améliore la

sensibilité de l’examen. Les urines sont centrifugées après avoir décanté pendant 24 heures. On

utilise alors une technique de filtration sur membrane qui permet d’augmenter la sensibilité et la

spécificité, et de faire une évaluation quantitative (nombre d’oeufs par litre d’urine). L’examen

parasitologique des selles permet de retrouver les œufs des 5 espèces de schistosomes. Sur le

terrain, on utilise généralement la méthode de Kato-Katz qui permet une estimation semi-

quantitative de la concentration en œufs. On peut également y associer la technique de libération

des miracidiums, qui permet de différencier les œufs morts des oeufs vivants, et d’affirmer une

guérison après traitement [46].

En cas de négativité de ces examens, des biopsies ciblées en fonction de la clinique, vésicales,

rectales, hépatiques, ou d’un autre organe, peuvent être proposées pour examen parasitologique et

36

anatomopathologique, L’examen anatomopathologique peut retrouver des oeufs plus ou moins

calcifiés avec une réaction granulomateuse et de nombreux éosinophiles [20].

La sérologie présente un intérêt dans de nombreuses situations cliniques, notamment en cas de

négativité des examens parasitologiques. Un de ses inconvénients est qu’elle reste positive

longtemps après l’infection, même traitée. Actuellement, la technique de référence est

l’association d’un test d’hémagglutination indirecte utilisant des antigènes de vers de S. mansoni

(WA/IHA), et d’une détection des antigènes d’œufs de S. mansoni par ELISA (SEA/ELISA) ;

elle est utilisée pour les 5 bilharzioses [62]. Cette association procure une sensibilité de 98,7% et

96% respectivement pour S. mansoni et S. hæmatobium avec une spécificité de 97,2%.

L’hyperéosinophilie sanguine est un élément important du diagnostic. Elle apparaît à la phase

d’invasion, souvent très élevée, avec des taux pouvant monter jusqu’à 40 à 70% des leucocytes

totaux. À la période d’état, le taux se situe aux environs de 10 à 20 %.

Le diagnostic de la bilharziose chronique est donc évoqué sur plusieurs éléments d’orientation. Il

associe une géographie médicale évocatrice, concernant un migrant en provenance d’une zone

d’endémie bilharzienne et présentant une clinique évocatrice (hématurie, rectorragies…) et un

bilan biologique montrant une hyperéosinophilie (inconstante) et la présence d’œufs dans les

excréta. La sérologie peut être utile pour le diagnostic, mais ne permettra ni de différencier une

schistosomose guérie ou active, ni de déterminer l’espèce. On peut alors s’aider, en fonction du

tableau clinique, de l’histologie, avec des biopsies vésicales et rectales, et de l’imagerie.

Le diagnostic de bilharziose invasive est moins aisé à faire. En effet, à l’apparition des

symptômes, le bilan biologique est souvent normal avec une sérologie et des examens

parasitologiques directs négatifs. La séropositivité, comme l’hyperéosinophilie, n’apparaissent

qu’environ 6 semaines après le bain contaminant (25 à 100 jours) [30, 31], alors que les signes

37

cliniques débutent en général 3 semaines après l’infection (15 à 24 jours). L‘examen

parasitologique direct est rarement positif à ce stade, et ne se positive que 196 jours en moyenne

(124-330) après la contamination [31]. D’autres anomalies biologiques peuvent être retrouvées au

cours de la bilharziose invasive telles qu’une hypertransaminasémie, en règle inférieure à 5N

(40% des cas), une thrombopénie (10%), ou un syndrome inflammatoire modéré. On peut

également retrouver une hypergammaglobulinémie polyclonale avec des faux-positifs pour

différentes sérologies virales [38]. Ainsi, devant l’absence d’examen biologique spécifique, il

faut savoir penser à une bilharziose invasive chez tout patient présentant une fièvre avec des

signes cliniques et biologiques évocateurs, au retour d’une zone d’endémie.

F. TRAITEMENT

Le traitement anti-parasitaire de référence de la bilharziose est le praziquantel (Biltricide®), qui

est actif sur toutes les espèces de schistosomes, ainsi que sur d’autres helminthes (téniases et

cysticercose à Tænia saginata, T. solium et diverses distomatoses hépato-biliaires et

pulmonaires). C’est un dérivé de la pyrazino-isoquinoléine qui ne tue que les formes adultes du

schistosome : il est donc sans effet sur les cercaires et les schistosomules. Son mécanisme

d’action est inconnu. La posologie habituelle est de 40 mg/kg/j (sauf pour S. japonicum 60

mg/kg/j) en 1 à 2 prises le même jour (comprimés à 600 mg). En fonction de la localisation et de

l’efficacité clinique, on peut être amené à renouveler plusieurs fois le traitement à quelques

semaines d’intervalle. En cas de bilharziose chronique, les effets secondaires sont modérés,

incluant nausées, vomissements, malaise et douleurs abdominales [37].

Un vaccin est actuellement à l’étude, dont les premiers résultats semblent encourageants. Il s’agit

d’un vaccin recombinant basé sur le principes de microparticules biodégradables, dont

38

l’utilisation serait particulièrement adaptée aux pays peu développés : il conférerait une immunité

durable sans nécessité de rappels, et serait administrable par voie orale [63].

Il n’y a pas de consensus en ce qui concerne le traitement de la bilharziose invasive et la prise en

charge est sujette à controverse. Le praziquantel devrait être contre-indiqué à cette phase de la

maladie [58, 59] car il est non seulement inefficace mais il aggrave les signes dans 40% des cas

[31, 34, 52]. Il ne tue pas le parasite au stade de schistosomule, mais seulement les vers adultes,

d’où son inefficacité, mais il existe, en plus, un risque de réaction paradoxale à l’introduction du

traitement anti-parasitaire, comme ce fut le cas du patient n°1. Cette réaction paradoxale, qui se

traduit par l’exacerbation des signes préexistants ou par l’apparition de nouveaux signes

témoignant d’une atteinte occulte (neurologique ici), a déjà été décrite au cours d’autres

helminthiases, comme la cysticercose, et serait due à une exacerbation de la symptomatologie

anaphylactique liée au relargage d’antigènes parasitaires lors de la lyse du ver [64]. L’efficacité

d’une corticothérapie à ce stade a été démontrée dans cette situation, par le biais de son effet anti-

inflammatoire. Dans le cas de la bilharziose invasive, les recommandations varient selon les

auteurs, qui proposent soit un traitement combiné par praziquantel et corticoïdes [18, 49], soit une

corticothérapie seule initiale, et traitement par praziquantel décalé ou carrément à distance [5, 40,

48, 58].

L’artémether semble également être un traitement préventif ou curatif d’avenir, seul ou en

association avec le praziquantel. Il possède une activité in vivo chez l’animal sur les formes

jeunes, et a prouvé son efficacité dans la prévention de l’infection à S. japonicum et S. mansoni

[65, 66]. Cependant, son utilisation à grande échelle pourrait induire une résistance antipaludique

tout à fait délétère, qui doit faire envisager son usage avec prudence [65]. D’autres produits sont

également à l’épreuve tels que l’oxamniquine pour S. mansoni, et le metrifonate pour S.

hæmatobium, non disponibles à l’heure actuelle [16].

39

II. DONNÉES CARDIOLOGIQUES

A. CŒUR ET BILHARZIOSE CHRONIQUE

Au même titre que les atteintes du système nerveux central, les atteintes cardiaques myocardiques

de la bilharziose chronique sont dues à la présence aberrante d’œufs de schistosomes au sein du

myocarde.

En 1939, dans les Annales de Médecine et de Pharmacie Coloniales, Lavier écrit [67]:

« Les œufs peuvent infiltrer le myocarde et y provoquer une myocardite chronique avec

dégénérescence fibrillaire et fibrose. […]La bilharziose détermine au même titre que la syphilis

une myocardite chronique. Mais les lésions cardiaques sont le plus souvent indirectes et

déterminées […] par les troubles de la circulation pulmonaire. »

Dans les années 70-80, des médecins français exerçant en Afrique de l’Ouest ont amplement

décrit cette pathologie. Plusieurs atteintes cardiaques sont actuellement reconnues au cours de la

bilharziose chronique :

- Le cœur pulmonaire chronique lié à l’hypertension artérielle pulmonaire de la bilharziose.

- La myocardite bilharzienne chronique et les autres causes de myocardite.

- Les entités entrant dans le cadre du cœur hyperéosinophilique : l’endocardite pariétale

fibroblastique de Loeffler et la fibrose endomyocardique de Davies.

1. Hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) et cœur pulmonaire chronique (CPC)

L’HTAP est l’atteinte cardiaque la plus classique de la bilharziose chronique [68]. La bilharziose

est une cause majeure d’HTAP dans les régions d’endémie, bien qu’elle semble bien plus

fréquente au Brésil qu’en Afrique subsaharienne [69-72]. Cette HTAP est présente selon les

études, cliniques, échocardiographiques ou hémodynamiques chez 2% à 40% des patients [68,

40

70, 73, 74]. Inversement, parmi 123 patients tout venants suivis pour HTAP dans 2 centres de

référence à São Paulo, au Brésil, 30% présentaient une bilharziose chronique [71].

L’HTAP de la bilharziose résulte de la migration des œufs vers le poumon. Les œufs de S.

hæmatobium et, dans une moindre mesure, ceux de S. intercalatum, y parviennent directement

par la veine cave inférieure et le cœur droit à partir des plexus périvésicaux, tandis que ceux de S.

mansoni l’atteignent par la voie indirecte des anastomoses porto-caves. Parvenus aux poumons,

les œufs entraînent la production d’un granulome susceptible d’évoluer vers la fibrose. On

observe également une altération des parois des artérioles avec un aspect d’endartérite

inflammatoire ou fibreuse. Ces lésions vasculaires d’endartérite pulmonaire oblitérante vont

réaliser une HTAP de type pré-capillaire qui va conduire à une insuffisance ventriculaire droite.

Les remaniements vasculaires et parenchymateux sont également à l’origine de shunts droite-

gauche (entre artère et veine pulmonaire) et shunts gauche - droite (entre artère bronchique et

artère pulmonaire), qui sont néanmoins peu incriminés dans la physiopathologie [75].

À coté de ce mécanisme majoritaire, un autre mécanisme d’HTAP est décrit. L’infection

chronique par S. hæmatobium et S. mansoni conduit à une fibrose hépatique sévère, puis à la

cirrhose. Dans les zones d’endémie, la bilharziose constitue l’une des principales causes de

cirrhose (avec l’éthylisme chronique et les hépatites virales) et peut être à l’origine, après 4 à 7

ans d’évolution, d’une hypertension porto-pulmonaire. Cette HTAP est due à la fois aux shunts

porto-systémiques classiques dans l’hypertension portale de la cirrhose, et aux embolisations

d’œufs chez des patients présentant des infestations répétées et prolongées en zones d’endémie

[76].

L’HTAP va parfois aboutir au stade de cœur pulmonaire chronique, caractérisé par un syndrome

infundibulo-pulmonaire avec une dyspnée, des signes de surcharge droite et un claquement du B2

à l’auscultation [69, 77]. Cette atteinte, résultant d’une évolution occulte de la maladie méconnue

41

et non traitée, présente un pronostic défavorable, avec décès dans les 2 à 10 ans par insuffisance

ventriculaire droite réfractaire [73, 78]. Enfin, il existe un risque de cœur pulmonaire aigu en cas

d’embolisation massive des œufs, ainsi que des troubles du rythme, pouvant provoquer une mort

subite[75].

2. Myocardite bilharzienne chronique

Cette atteinte est beaucoup plus rare. Elle semble exister chez des sujets jeunes fortement

parasités [79]. Dans une série autopsique de 30 patients atteints de bilharziose chronique parue en

1953, aucun œuf de bilharzie n’a été retrouvé dans le myocarde, ce qui est en faveur de son

caractère peu fréquent [80]. Une équipe brésilienne a récemment décrit un granulome

myocardique bilharzien retrouvé en post-mortem chez une jeune fille de 14 ans décédée d’un

choc cardiogénique d’origine indéterminée [81].

Deux écoles s’opposent quant au mécanisme physiopathologique de l’atteinte myocardique de la

bilharziose chronique.

La première est en faveur d’un processus mécanique. Histologiquement, les lésions myocardiques

se présentent comme des granulomes inflammatoires centrés par des œufs avec congestion

vasculaire et œdème interstitiel ou avec altération myofibrillaire. Ces lésions peuvent évoluer

vers la fibrose cicatricielle [82]. L’acheminement des œufs jusqu’au myocarde, par le territoire

coronaire s’explique soit par la présence de shunts droite - gauche au niveau de lésions

bilharziennes du poumon, soit par la persistance d’un foramen ovale perméable avec pressions

auriculaires droites élevées.

Le second processus proposé est immunologique. Dès 1978, il est envisagé qu’un mécanisme

humoral, en réponse à la présence des œufs de schistosome, soit à l’origine d’une atteinte

inflammatoire du myocarde [75].

42

Comme nous le verrons un peu plus loin, et ce, jusqu’à une période très proche, le diagnostic de

myocardite était difficile, tant les examens cliniques et paracliniques disponibles étaient peu

spécifiques. Il reposait sur un faisceau d’argument à savoir : présence d’une insuffisance

cardiaque congestive (chez un sujet jeune surtout) ou de signes ECG (BAV, inversions de l’onde

T) associés à une absence d’HTAP et de toute autre cause décelable dans un contexte de

bilharziose active [83-85].

3. Autres causes de myocardite au cours de la bilharziose chronique

Enfin, selon E. Bertrand, [85] les manifestations cardiaques les plus fréquente au cours de la

bilharziose invasive sont reliées à la maladie de manière indirecte : myocardite anémique (sur des

anémies ferriprives par saignement digestifs et urinaires), myocardite iatrogène (thérapeutiques

anti-parasitaires dont l’usage a été supprimé) et myocardiopathie hypertensive (HTA secondaire à

une néphropathie bilharzienne chronique).

Depuis la fin des années 70 et les recherches des cardiologues français en Côte d’Ivoire, on ne

retrouve plus aucune publication concernant les atteintes cardiaques de la bilharziose en dehors

de l’HTAP.

4. Cœur éosinophilique chronique

Un autre type de pathologie cardiaque se doit d’être évoqué : il s’agit des atteintes cardiaques

causées par l’hyperéosinophilie prolongée de la bilharziose chronique et regroupées sous

l’appellation d’endocardite pariétale chronique (EPC). Le lien de causalité n’a pourtant pas été

définitivement établi entre l’EPC et la bilharziose chronique. L’EPC regroupe deux entités,

l’endocardite pariétale fibroblastique de Loeffler (EPF), et la fibrose endomyocardique de Davies

(FEM) -ou maladie de Davies [86-90]. Ces deux pathologies ont en commun une atteinte fibreuse

43

de l’endocarde, une infiltration myocardique à éosinophiles, et des thrombus muraux

intraventriculaires. Les conséquences en sont un syndrome hémodynamique restrictif et une

insuffisance valvulaire mitrale et/ou tricuspidienne [86, 87]. L’expression clinique varie selon la

localisation de la fibrose avec des formes ventriculaires droites pures, gauches pures ou mixtes.

Classiquement, on dit que l’EPF est une maladie de l’adulte des pays tempérés, liée à une

hyperéosinophilie importante, pouvant s’inscrire dans le cadre d’une hémopathie à éosinophile,

d’un contexte atopique, d’un syndrome de Churg et Strauss ou d’un syndrome

hyperéosinophilique essentiel, alors que la FEM est une maladie de l’adolescent des pays

tropicaux (Afrique, Inde, Brésil). La FEM est responsable de 15 à 20% des décès par insuffisance

cardiaque dans ces régions. L’hyperéosinophilie est souvent modérée, voire absente. Les

helminthiases sont incriminées dans l’étiologie de cette pathologie, notamment les filarioses et les

schistosomoses [91].

On s’accorde à dire dorénavant que l’EPF et la FEM sont une seule et même entité à un stade

évolutif différent du cœur éosinophilique, et que l’absence d’hyperéosinophilie dans la FEM

serait expliquée par sa disparition au stade tardif des helminthiases. Dans les deux pathologies, on

observe la survenue à court terme d’un choc cardiogénique ou d’une cardiomyopathie dilatée

hypokinétique, causes de décès chez la majorité des patients [90]. La corticothérapie à forte dose

permet parfois de ralentir l’évolution, mais une sanction chirurgicale est souvent nécessaire, par

endocardectomie ou par transplantation cardiaque [92], évidemment plus délicate à mettre en

place dans les pays en développement. La preuve n’a pas véritablement été faite du lien entre

bilharziose et FEM. En 1938, une série autopsique sur 282 patients égyptiens infectés par la

bilharziose retrouve 2,1% de cœur pulmonaire chronique, mais aucun cas de FEM [74]. Toujours

en Egypte, dans une série autopsique réalisée en 1978 sur 225 cadavres infectés par S.

hæmatobium ou S. mansoni, aucune allusion n’est faite à la FEM [78]. En revanche, une étude

44

clinique publiée, cette fois-ci en 1995, décrit une série de 10 000 patients suivis pour bilharziose

à S. mansoni, parmi lesquels 15 présentaient une fibrose endomyocardique, exclusivement

localisée au ventricule droit [91]. Aucun d’entre eux ne présentait d’hyperéosinophilie. Andy et

coll., dans une étude prospective menée au Nigéria sur 89 patients souffrant de FEM, démontrent

la diminution progressive de l’hyperéosinophilie, tout au long de l’évolution de la maladie, et

extrapolent en concluant que l’hyperéosinophilie, et donc la FEM, sont induites par les

helminthes éosinophilogènes locales, telles que filariose ou schistosomose [21]. Pourtant, une

étude réalisée au Brésil dans le département du Minas Gerais, de forte endémie pour la

bilharziose, ne retrouve aucun cas de FEM chez les 226 patients explorés dans ce sens [93].

B. MYOCARDITE AIGUË

Les 2 cas cliniques présentés ici sont les premiers cas décrits de myocardite aiguë au cours de la

bilharziose invasive. Contrairement à la bilharziose chronique, les descriptions d’atteinte

cardiaque au cours de la phase invasive sont extrêmement rares.

La myocardite est une atteinte inflammatoire aiguë, subaiguë ou chronique, diffuse ou localisée

du myocarde. Il s’agit d’une nécrose myocytaire associée à un infiltrat inflammatoire sans lésion

coronaire. Il n’existe pas de corrélation entre la définition anatomopathologique et la clinique, et

le diagnostic positif est souvent difficile à établir, car la présentation clinique est polymorphe,

allant de formes complètement asymptomatiques jusqu’à des tableaux d’insuffisance cardiaque

globale mortelle [94]. Les causes des myocardites sont de deux ordres, infectieux et non

infectieux.

§ Parmi les causes infectieuses, les virus sont les agents les plus souvent incriminés, notamment

en Europe et en Amérique du Nord. En Amérique du Sud, Trypanosoma cruzi, protozoaire

responsable de la maladie de Chagas, représente la principale cause de myocardite [95]. De

45

nombreux autres agents, viraux, bactériens, parasitaires et fongiques peuvent être à l’origine

de tableaux de myocardite.

§ Parmi les causes non infectieuses, on retrouve les causes toxiques (médicamenteuses ou

non), allergiques, les rejets de greffe et enfin les atteintes du myocarde au cours de maladies

de système [cf. Annexe n°2].

Les signes cliniques les plus fréquemment rencontrés au cours de la myocardite aiguë sont les

douleurs thoraciques, les signes d’insuffisance cardiaque congestive, les palpitations, en rapport

avec un trouble du rythme ventriculaire ou supra-ventriculaire, les lipothymies ou syncopes par

bloc auriculo-ventriculaire. Elle se présente parfois d’emblée comme un tableau d’état de choc

cardiogénique aigu. La fièvre est fréquente. Néanmoins, la myocardite est très souvent

asymptomatique, et la plupart des données épidémiologiques proviennent de séries autopsiques.

Enfin, plusieurs études montrent que la myocardite serait la principale cause de mort subite

(~20% des cas) chez les adultes de moins de 40 ans, les jeunes athlètes et les recrues de l’US Air

Force [96-99].

La myocardite aiguë, principalement d’origine virale, évolue généralement spontanément vers la

guérison, mais peut également conduire dans 5 à 10% des cas à une cardiomyopathie dilatée

chronique, par des mécanismes encore mal élucidés. L’électrocardiogramme n’est que peu utile

dans le diagnostic des myocardites, car il n’existe aucun signe spécifique. Les signes ECG les

plus fréquemment retrouvés sont des troubles de la repolarisation, diffus ou localisés, pouvant

mimer un infarctus du myocarde ou une péricardite [100]. En outre, la plupart des troubles de

conduction et des troubles du rythme on été décrits (tachycardie supraventriculaire, bloc auriculo-

ventriculaire…). Jusqu’à récemment, la biopsie endomyocardique était l’examen de référence

pour le diagnostic des myocardites. Cependant, outre le caractère invasif et le risque lié à ce

geste, le faible nombre de diagnostics histologiques par biopsies dans de grandes cohortes de

46

patients suspects de myocardite, et la discordance fréquente entre les résultats histologiques et

cliniques, rendent cette méthode diagnostique peu pratique au quotidien [101].

Les enzymes cardiaques sont fréquemment élevées dans la myocardite, notamment la fraction

MB de la créatine-kinase (CK-MB). Le dosage de la troponine I est accessible en routine en

France depuis quelques années. Le relargage sérique de cette protéine du cardiomyocyte est

proportionnel à l'étendue de la souffrance myocardique, quelle qu'en soit son origine (ischémique,

traumatique, inflammatoire). L’apparition de cet examen a été une vraie révolution dans la prise

en charge des douleurs thoraciques et la troponine est dorénavant le dosage de référence pour le

diagnostic des syndromes coronariens aigus (SCA), pour lesquels elle a montré une sensibilité

supérieure aux autres enzymes cardiaques (ASAT, LDH, CK-MB). La troponine s’est avérée

également plus sensible dans le diagnostic de myocardite, et elle est dorénavant

systématiquement recommandée devant toute suspicion clinique [102]. Cependant, la troponine

doit être utilisée avec circonspection, car elle est peu sensible pour le diagnostic de myocardite :

sa sensibilité est de 34 à 53% selon les études, alors que sa spécificité est bonne allant de 89 à

94% [103], même s’il existe d’autres causes à son élévation et des faux positifs [cf. Annexe n°3].

Plusieurs études ont évalué l’intérêt de l’échographie cardiaque dans la myocardite aiguë, mais

aucun signe spécifique n’a été décrit. La dysfonction ventriculaire gauche globale est le signe le

plus fréquemment retrouvé (50 à 70 % des cas). On retrouve également dans plus de la moitié des

cas des troubles de la cinétique segmentaire, souvent localisés au septum interventriculaire et à

l’apex. Enfin, certaines études retrouvent de façon usuelle une dysfonction ventriculaire droite

(20 à 30%), et un épanchement péricardique localisé ou circonférentiel. Le manque de spécificité

de ces signes fait de l’échographie-Doppler cardiaque un mauvais examen diagnostique pour la

myocardite aiguë, même si elle peut apporter des informations pronostiques intéressantes [104].

Plusieurs types d’examens morphologiques sont dorénavant disponibles pour le diagnostic de

47

myocardite aiguë. En effet, la situation la plus préoccupante en pratique courante est celle des

patients se présentant pour une douleur thoracique, parfois atypique, associée à des troubles de

repolarisation et à l’ECG et une élévation des enzymes cardiaques, notamment la troponine,

comme dans le cas de Monsieur N. Une situation telle que celle présentée par Monsieur F. se

rencontre aussi fréquemment : élévation isolée de la troponine sans signe cardiaque ni facteur de

risque cardio-vasculaire, chez un patient pris en charge pour une pathologie non cardiaque. Chez

ces patients il est parfois très difficile de faire la part des choses entre une myocardite aiguë et un

infarctus du myocarde : jusqu’à récemment, en France, seule la coronarographie permettait

d’exclure une étiologie coronaire.

La scintigraphie myocardique aux anticorps antimyosine, parfois couplée à une scintigraphie au

thallium a montré des résultats intéressants, mais son usage est encore loin d’être courant.

L’imagerie par Résonance Magnétique (IRM) semble être l’un des examens les plus prometteurs

actuellement [105]. Elle permet de mettre en évidence les territoires myocardiques sièges d’une

nécrose et d’une inflammation par un hypersignal. Une étude récente à l’hôpital Bichat a comparé

deux groupes de patients pris en charge pour douleur thoracique aiguë avec des signes ECG

compatibles avec un infarctus, différenciant ceux présentant une anomalies à la coronarographie,

et ceux à coronaires saines, donc avec un diagnostic probable de myocardite aiguë [106]. Elle a

montré les bonnes performances de l'IRM cardiaque pour distinguer SCA et myocardite aiguë.

Dans la myocardite qui résulte d'un processus inflammatoire, les lésions sont plutôt superficielles

et sous-épicardiques, alors qu'elles se situent plus en profondeur, en sous-endocardique, dans

l'infarctus. Cependant, il faut faire l'IRM au cours des cinq jours qui suivent l'apparition de la

douleur, car les signes de myocardite peuvent être ultérieurement plus trompeurs. En effet,

l’hypersignal est initialement focal, plus ou moins nodulaire, puis s’étend de façon diffuse à tout

le myocarde après la première semaine. Une équipe allemande a ainsi montré en 2004 que le

48

succès des biopsies myocardiques est de l'ordre 90 %, lorsqu'elles sont faites dans une zone en

hypersignal en IRM, alors que l'on obtient moins de 10 % de résultats positifs quand les biopsies

sont effectuées dans une zone sans lésions IRM apparentes [107]. L’IRM est donc l’examen de

référence dans la prise en charge diagnostique et pronostique des myocardites aiguës.

Néanmoins, d’autres études récentes [108, 109] ont montré que le scanner cardiaque multicoupes

synchronisé sur l'ECG avec injection de produit de contraste était également un bon outil dans

cette indication. Ce dernier permet la visualisation des artères coronaires et l'étude de la prise de

contraste myocardique. Dans l’étude menée par Dambrin et coll., une IRM et un scanner

cardiaques ont été réalisés chez 11 patients pris en charge pour myocardite aiguë. Le scanner a

ainsi montré, sur des clichés tardifs, une prise de contraste myocardique focale ou diffuse dont

l’étendue et la localisation étaient corrélées de façon significative aux données de l’IRM chez

tous les patients [108].

III. ATTEINTE CARDIAQUE DE LA BILHARZIOSE INVASIVE

A. ANALYSE DES 2 CAS CLINIQUES

Nous présentons ici deux cas cliniques atypiques. Il s’agit, sans doute possible, de deux cas de

myocardite aiguë au cours de la phase invasive de bilharziose, probablement à S. hæmatobium.

Bien que, chez aucun des deux patients, la preuve parasitologique directe n’ait pu être faite, la

séroconversion a confirmé secondairement le diagnostic de bilharziose aiguë. Ce dernier est

également basé sur des arguments épidémiologiques, cliniques et parasitologiques : l’infestation

concomitante d’autres membres du groupe (œufs de S. hæmatobium retrouvés chez les

compagnons de Monsieur F.) et le lieu - le lac Banani au pays Dogon - bien connu, à la fois des

guides touristiques et des épidémiologistes.. Ceci permet de proposer avec certitude un diagnostic

de schistosomose à S. hæmatobium.

49

Monsieur F., a décrit une éruption au sortir du bain, typique de dermatite cercarienne comme 17

de ses 18 compagnons de voyage [31]. Il a présenté ensuite un tableau de bilharziose invasive à

partir de J18 après le bain contaminant, associant fièvre oscillante, asthénie, toux, algies diffuses,

alors même que la sérologie bilharziose et l’éosinophilie étaient absentes. Le tableau cardiaque

est survenu alors que le patient a été hospitalisé pour bilan de cette bilharziose invasive, mais

qu’il ne présentait aucune symptomatologie cardiaque. La troponine, faite de façon systématique

dans le bilan d’entrée a montré des chiffres très élevés (~14 µg/l). De façon concomitante le reste

du bilan biologique a montré une hyperéosinophilie importante à 2000/mm3, absente sur les

bilans précédents et un début de séroconversion bilharziose. Le bilan cardiologique n’a retrouvé

que des signes aspécifiques, à savoir des troubles de repolarisation de type de lésion sous-

endocardique en latéral, et une échographie normale. Le scanner cardiaque réalisé quelques jours

plus tard était également normal. Devant ce tableau, les cliniciens n’ont pu trancher entre un

diagnostic de vascularite coronaire et une myocardite aiguë asymptomatique et un traitement par

antiparasitaire a été instauré, peut-être à tort. À peine le patient était-il sorti, qu’il a présenté un

tableau neuropsychique aigu et a été réhospitalisé. L’IRM cérébrale a alors montré des micro-

infarctus multiples touchant les zones de jonctions hémisphériques. L’association de la

symptomatologie cardiaque (myocardite aiguë ou vascularite coronaire), cutanée (hémorragie en

flammèche sous-unguéale) et cérébrale (anomalies jonctionnelles), et ce, à la suite de

l’introduction d’un traitement antiparasitaire au cours d’une bilharziose invasive, ont fait évoquer

le diagnostic de vascularite et un traitement par corticoïdes a été instauré. L’amélioration a été

immédiate. Dans les suites, le patient s’est progressivement amélioré au plan neurologique. Il

n »aura jamais été symptomatique au plan cardiaque, mais l’IRM cardiaque réalisée à 3 mois de

l’épisode aigu a retrouvé des anomalies de perfusion myocardique possiblement en rapport avec

des lésions séquellaires de myocardite ou une fibrose endomyocardique débutante. On a observé

50

une décroissance immédiate des éosinophiles à l’introduction de la corticothérapie, qui

remonteront à l’arrêt de celle-ci. C’est le traitement antiparasitaire qui aura permis leur

normalisation définitive, par guérison de la parasitose.

En ce qui concerne Monsieur N., les signes de bilharziose invasive ont débuté à J 24 du bain

contaminant dans la même région que le précédent patient. Le tableau présenté était également

typique avec fièvre, toux, algies diffuses, éruption cutanée, témoignant de la réaction

d’hypersensibilité explosive. En revanche, il a décrit d’emblée des douleurs thoraciques un peu

atypiques, attribuées à la symptomatologie pulmonaire. Le bilan biologique réalisé à ce moment-

là était peu contributif : enzymes cardiaques, éosinophilie et sérologie bilharziose. Une

hyperéosinophilie modérée est apparue progressivement (~560/mm3 ; 12,7%), et les signes

cliniques se sont amendés spontanément. C’est à J38, alors que la symptomatologie allergique

était en train de rentrer dans l’ordre, qu’est survenue brutalement la douleur thoracique

accompagnée de dyspnée. Le diagnostic de myocardite aiguë a été posé sur l’élévation modérée

de la troponine (1,5 µg/l), les troubles de la repolarisation et une échocardiographie qui a

objectivé une minime hypokinésie du tiers apical et moyen antérieur. Bien que peu élevée en

chiffre absolue, l’hyperéosinophilie était cependant notable puisqu’elle se situait autour de 12%.

L’IRM cardiaque réalisée à 48h du début des douleurs thoraciques est revenue strictement

normale, notamment sans aucune anomalie du signal au niveau myocardique. Malgré la normalité

de l’IRM, le patient a été pris en charge de façon maximale pour la myocardite aiguë, et surveillé

quelques jours en Unité de Soins Intensifs de Cardiologie, avec traitement cardiologique maximal

(IEC et ß-bloquants) et corticothérapie. On a assisté à une amélioration rapide du patient au plan

cardiaque, avec disparition des symptômes en quelques heures après l’instauration du traitement.

Comme pour le premier patient, on a observé une décroissance immédiate des éosinophiles à

l’introduction des corticoïdes, dont l’arrêt a provoqué une réascencion à des taux très élevés. Ils

51

ont disparu ensuite progressivement grâce au traitement antiparasitaire à distance de l’épisode

aigu.

B. MYOCARDITE AIGUË DE LA BILHARZIOSE INVASIVE

Nous avons décrit ici deux cas de myocardite aiguë au cours d’épisodes de bilharzioses invasives.

Un cortège de symptômes sont connus pour accompagner la phase invasive de la bilharziose, qui

est une réaction d’hypersensibilité immédiate en réponse à la présence d’antigènes parasitaires,

conséquences de la migration des schistosomules dans la circulation sanguine. La littérature

médicale est extrêmement pauvre en ce qui concerne les atteintes cardiaques au cours de la

bilharziose aiguë, alors qu’elle est bien plus fournie, bien qu’anciennement, en ce qui concerne

ces troubles au cours de la bilharziose chronique. Nous essaierons ici d’expliquer la nature de ces

troubles, en essayant d’une part d’établir un lien avec les atteintes mieux connues de la forme

chronique de la maladie, et d’autre part en mettant en parallèle ces atteintes avec des tableaux

similaires retrouvés au cours de réactions d’hypersensibilité et au cours de la phase invasive

d’autres helminthiases.

Lors de la Seconde Guerre Mondiale, des médecins militaires ont réalisé des ECG systématiques

chez plusieurs centaines de soldats lors de l’épidémie de bilharziose invasive à S. japonicum, aux

Philippines, dont nous avons déjà parlé. Des anomalies variées ont été retrouvées, dont les plus

fréquentes étaient des anomalies de l’onde T (99%) ou des anomalies du segment ST (52%) sur

les 317 ECG réalisés. Les auteurs ont constaté le peu de corrélation avec la symptomatologie

cardiaque des patients et leur évolution. Enfin, ils ont concédé que l’étiologie et la signification

de ces anomalies leur sont inconnues mais pourraient être attribuées à des lésions du myocarde

induites par les traitements par dérivés de l’antimoine [57].

52

Après ces publications, il faudra attendre plus de 50 ans avant de retrouver de nouvelles données

concernant les atteintes cardiaques au cours de la schistosomose aiguë. On ne retrouve que trois

références dans la littérature récente. L’une d’entre elles correspond à l’un des patients décrits

ici [5, 31]. Le second cas est cité dans l’article de Sarazin et coll. illustrant la découverte d’une

fibrose endomyocardique associée à des troubles neurologiques chez une patiente de 25 ans au

retour de Madagascar [61]. À l’exception d’une seule observation, il n’a été décrit de

symptomatologie cardiaque dans aucune des nombreuses épidémies de schistosomose aiguë [23,

25, 28, 29, 32, 34, 44, 110] chez des voyageurs (essentiellement de retour d’Afrique), et les

nombreuses revues de la littérature américaines ou européennes ne font aucune allusion à cette

atteinte possible [4, 11, 36-38, 47].

À propos de la bilharziose et de ses troubles cardiaques, Kirchhoff, dans sa revue sur les maladies

parasitaires du cœur, écrit : « l’infection par Schistosoma sp. peut être à l’origine d’une HTAP et

d’un cœur pulmonaire sans infecter directement le myocarde » [95]. La seule revue à évoquer le

risque d’atteinte cardiaque au cours de la bilharziose invasive est celle de Jauréguiberry, en

langue française, dans laquelle il évoque « des complications myocardiques [qui] peuvent être

mortelles », et cite la fibrose endomyocardique avec insuffisance cardiaque, ainsi que des cas de

péricardites. A notre connaissance, seule l’étude de De Jésus et coll. décrit des atteintes

cardiaques au cours d’une épidémie à S. mansoni dans l’état du Sergipe, dans le Nordeste

brésilien [40]. Parmi les 31 patients ayant contracté le parasite au décours d’un bain dans le lac

d’Abaís, près d’Aracaju, la capitale de l’état, 12 (38,7%) ont présenté une douleur thoracique et 6

(19%) ont eu une péricardite retrouvée à l’échographie. Il n’est pas dit dans l’article si les patients

se plaignant de douleurs thoraciques ont pu bénéficier d’un dosage des enzymes cardiaques et/ou

d’un ECG, et si le diagnostic de myocardite a été évoqué. En revanche, tous les patients

présentaient une hyperéosinophilie entre 540 et 7380/mm3.

53

C. HYPOTHÈSES PHYSIOPATHOLOGIQUES

Nos observations sont donc à prendre en considération dans la mesure où, si elles sont les

secondes à décrire avec précision une atteinte cardiaque au cours de la bilharziose invasive, il

s’agit certainement des premiers cas de myocardite aiguë dans ce contexte. Plusieurs hypothèses

peuvent être évoquées pour expliquer l’origine de cette atteinte cardiaque aiguë. Elles se classent

en deux grandes catégories : la théorie « mécanique » et la théorie « immunologique » [59].

1. La théorie mécanique

La théorie dite mécanique semble la moins probable. Elle reposerait sur la présence de vers dans

le cœur par migration aberrante, ou par la présence d’œufs à l’origine d’un granulome au sein du

myocarde. Comme nous l’avons vu précédemment, ce mécanisme a été amplement décrit et

prouvé sur des séries autopsiques pour décrire les différentes atteintes cardiaques de la

bilharziose chronique. La présence d’œufs au sein de la circulation sanguine pulmonaire peut

déterminer une HTAP à l’origine d’un cœur pulmonaire aigu ou chronique, et leur présence au

sein de la circulation myocardique provoquer l’apparition d’un granulome myocardique à

l’origine de la symptomatologie décrite. Cette hypothèse nous semble peu appropriée aux cas

décrits ici. En effet, les patients se trouvent à quelques semaines (J30 en moyenne) du bain

contaminant, en pleine phase invasive, qui correspond à la migration des schistosomules. Ces

vers immatures sont en train de migrer dans la circulation sanguine, vers le système porte, ne se

sont donc pas encore accouplés et par conséquent aucun œuf n’a encore été pondu. Cette

hypothèse ne parait donc pas satisfaisante.

2. La théorie immunologique

Plusieurs hypothèses immunologiques sont proposées.

54

Comme nous l’avons dit plus haut, la phase invasive de la bilharziose est liée à des phénomènes

immunologiques complexes et mal compris, provoqués par la migration des schistosomules dans

la circulation sanguine. Elle ferait intervenir plusieurs phénomènes distincts dont découlent les

deux processus explicatifs que nous allons évoquer.

a. Myocardite aiguë et éosinophiles

L’hypothèse la plus évidente est celle de la toxicité des éosinophiles. De longue date

l’hyperéosinophilie est connue pour sa toxicité cardiaque [86], et l’interaction a été

particulièrement bien étudiée dans deux cadres nosologiques : celui de la myocardite à

éosinophiles des allergies médicamenteuses, et celle du syndrome hyperéosinophilique essentiel

ou idiopathique (SHE) [111, 112]. De plus, nous avons vu précédemment les atteintes cardiaques

décrites dans les hyperéosinophilies chroniques, et nous tenterons de faire le lien entre les

symptômes décrits par nos patients et les endocardites pariétales chroniques :.

La myocardite à éosinophiles regroupe plusieurs entités distinctes, notamment la myocardite

d’hypersensibilité, dont la description ressemble fortement à celle de nos patients, et la

myocardite aiguë nécrosante à éosinophiles [111].

La myocardite d’hypersensibilité a été décrite pour la première fois dans les années 40 sur une

série autopsique de patients traités par sulfonamides [113]. Le mécanisme, qui avait alors été

imputé est une réaction d’hypersensibilité, et non pas un effet toxique du médicament. Depuis, de

nombreux médicaments ont été incriminés dans la genèse de cette pathologie (sulfamides,

pénicilline, diurétiques…). Les patients peuvent présenter des signes d’anaphylaxie de quelques

jours à quelques mois après l’instauration d’un médicament, tels que fièvre, signes respiratoires,

urticaire, hyperéosinophilie, mais le diagnostic de myocardite est rarement fait, car les patients

présentent une symptomatologie cardiaque peu parlante et aspécifique. Les anomalies ECG

55

généralement rencontrées sont des troubles du rythme divers, et des troubles de la repolarisation

aspécifiques pouvant parfois mimer un syndrome coronaire aigu. On retrouve un taux non

négligeable de décès par morts subites chez ces patients. Deux séries post mortem de

myocardites d’hypersensibilité ont été publiées [114, 115]. Tous les patients autopsiés avaient des

médicaments potentiellement incriminables. Ils présentaient en général en pre mortem une

élévation modérée des enzymes cardiaques et une hyperéosinophilie. A l’examen

anatomopathologique, on retrouvait une infiltration inégale périvasculaire et interstitielle par des

éosinophiles, avec, dans une moindre mesure, une infiltration lymphohystiocytaire. Une

myocytolyse sans nécrose myocardique franche a été retrouvée, et certains patients présentaient

une infiltration éosinophilique diffuse des autres organes.

Au total, le diagnostic de myocardite d’hypersensibilité doit être envisagé chez des patients

présentant des symptômes allergiques systémiques, et recevant un médicament potentiellement

imputable, des signes cardiaques à type de douleur thoracique ou d’insuffisance cardiaque aiguë,

présentant des anomalies ECG et échographiques aspécifiques avec une élévation inconstante des

enzymes cardiaques. Le risque potentiel de mort subite doit faire conduire chez ces patients à

l’arrêt immédiat des médicaments imputables, la prise en charge de l’insuffisance cardiaque et la

mise en place d’une corticothérapie.

La myocardite aiguë nécrosante à éosinophiles est une forme sévère de cardiopathie aiguë médiée

par les éosinophiles. Les patients présentent de façon brutale une douleur thoracique, fièvre,

éruption cutanée et signes d’insuffisance cardiaque. A l’ECG, on retrouve des troubles de

repolarisation diffus, pouvant mimer un infarctus, et dans le sang, une hyperéosinophilie associée

à une élévation des enzymes cardiaques, notamment la troponine. La radiographie thoracique

peut montrer une cardiomégalie modérée parfois associée à une pneumopathie interstitielle

diffuse [116]. L’échographie cardiaque peut monter, soit des signes de cardiomyopathie dilatée

56

avec hypokinésie ventriculaire, soit un épaississement des parois évocateurs de cardiomyopathie

restrictive [90, 117]. En l’absence de traitement, le pronostic peut être rapidement fatal en

quelques jours dans un tableau d’insuffisance cardiaque réfractaire. L’histologie de ces

myocardites diffère de celle des myocardites d’hypersensibilité : on retrouve un infiltrat

myocardique diffus et intense à éosinophiles et lymphocytes, auquel s’ajoute une nécrose

myocytaire de degré variable. Certains auteurs pensent que cette entité serait une forme

particulièrement sévère de la myocardite d’hypersensibilité [117, 118]. La myocardite aiguë

nécrosante à éosinophiles est généralement de cause médicamenteuse, mais elle a également été

décrite, parfois même révélatrice, au cours d’hémopathies à éosinophiles [119], de cancer, et de

connectivite (Churg et Strauss)…

Les tableaux de myocardite aiguë présentés par nos patients sont tout à fait compatibles avec la

myocardite à éosinophiles d’hypersensibilité aux médicaments décrite ci-dessus. On se trouve

dans des situations identiques de phénomènes anaphylactiques, dans un cas en réaction à un

médicament, dans l’autre à la migration d’un corps étranger parasitaire dans l’organisme. Le

cortège de signes associés est identique dans les deux cas et s’accompagne d’une

hyperéosinophilie pas toujours très élevée. En outre, la mortalité associée aux myocardites à

éosinophiles nous inspire d’entreprendre des explorations plus poussées et de surveiller de près

les patients en cours de bilharziose invasive avec des arguments pour une myocardite. Ainsi, la

myocardite aiguë découverte chez nos patients pourrait-elle être une myocardite à éosinophiles

d’hypersensibilité, liée à la migration des schistosomules.

Il serait alors intéressant de savoir s’il existe un lien entre les myocardites décrites ici et les

atteintes myocardiques chroniques liées aux hyperésinophilies profondes et prolongées des

helminthiases.

57

Nous avons décrit, plus haut, l’endocardite pariétale fibroblastique de Loeffler (EPF) et la fibrose

endomyocardique de Davies (FEM). Ces atteintes cardiaques des hyperéosinophilies chroniques,

notamment la fibrose endomyocardique, ont été classiquement décrites dans le syndrome

hyperéosinophilique.

Le syndrome hyperéosinophilique idiopathique (SHE), ou syndrome de Chusid, est une maladie

lymphoproliférative d’étiologie inconnue, avec hyperproduction d’éosinophiles et

hyperéosinophilie sanguine et médullaire, qui touche principalement l’homme jeune entre 20 et

50 ans. Selon Chusid, trois critères sont nécessaires pour le définir [112] :

ü une hyperéosinophilie supérieure à 1500/mm3 et évoluant depuis plus de 6 mois

ü les autres causes d’hyperéosinophilies doivent avoir été éliminées (maladie allergique,

parasitaire ou d’hémopathie maligne)

ü l’existence d’une atteinte viscérale

Les patients présentant une hyperéosinophilie d’origine indéterminée cliniquement bénigne sont

exclus de la définition. L’atteinte cardiaque est la principale cause de morbidité et de mortalité au

cours du SHE, et elle survient dans 48 à 75% des cas [120]. D’autres organes sont également

atteints, de façon moins fréquente : système nerveux central et périphérique, peau, tube digestif,

rate, foie et poumon. L’atteinte cardiaque liée aux éosinophiles évolue classiquement en 3 stades.

§ Le premier est le stade nécrotique précoce. Il est caractérisé sur le plan histologique par une

inflammation et infiltration endocardique et myocardique à éosinophiles et lymphocytes

associée à une des lésions myofibrillaires et une nécrose et une apoptose myocytaire. On

observe également des lésions de l’endocarde et de l’endothélium vasculaire [121]. Cette

étape, qui survient tôt dans l’évolution de la maladie, en moyenne 5,5 semaines, correspond à

une myocardite éosinophilique aiguë plus ou moins symptomatique selon les patients, et peut

être associée à des réactions d’hypersensibilité. Des formes plus sévères, jusqu’à la

58

myocardite nécrotique à éosinophiles, parfois mortelle, ont été décrites. L’échographie et la

coronarographie sont généralement normales et seule la biopsie endomyocardique permettait

de faire le diagnostic à ce stade. La corticothérapie est recommandée pour limiter l’évolution

vers la fibrose.

§ Le second stade est le stade thrombotique tardif, et survient en général après 10 mois

d’évolution de l’hyperéosinophilie. Il est caractérisé par la formation de thrombus le long de

l’endocarde endommagé de l’un ou des deux ventricules, plus rarement les oreillettes.

§ La troisième et dernière étape est le stade fibrotique tardif, rencontré en moyenne 24,5 mois

après le début de la maladie, c’est la fibrose endomyocardique de Davies [89].

Anatomiquement, on retrouve des altérations des valves mitrale et/ou tricuspide avec

régurgitation, ainsi qu’une fibrose endomyocardiaque à l’origine d’une cardiomyopathie

restrictive. Sur le plan anatomopathologique, il n’y a aucune différence entre la fibrose

endomyocardique de Davies et l’endocardite pariétale fibroblastique de Loeffler attribuée aux

helminthiases éosinophilogènes chroniques. Comme on l’a déjà vu, l’absence d’éosinophilie

au cours de l’EPF est attribuée au fait que les patients sont vus à un stade tardif de l’évolution

de l’helminthiase, et que l’hyperéosinophilie a disparu.

Dans la mesure où l’EPF et l’EFM ont été décrites dans les helminthiases chroniques, notamment

bilharziose et filariose, attribuées à l’hyperéosinophilie chronique, on est tenté de faire le

parallèle entre la myocardite aiguë du stade précoce du SHE, et la myocardite décrite dans nos

cas cliniques, et qui serait le stade initial vers les cœurs éosinophiliques tardifs qu’ils auraient

développé en l’absence de traitement. La patiente décrite dans l’article de Sarazin et coll. a

présenté une fibrose endomyocardique précoce, alors qu’elle revenait d’un séjour de 3 mois à

Madagascar, où elle a probablement contracté la bilharziose [59, 61]. Ce cas clinique nous

conforte dans l’hypothèse d’une continuité entre des phénomènes cardiaques plus ou moins

59

symptomatiques au cours de la phase aiguë de la schistosomose et l’apparition secondaire de

cardiopathies éosinophiliques. En ce qui concerne cette patiente, elle avait été vue à un stade plus

tardif où la fibrose avait déjà commencé à se développer.

La faible éosinophilie décrite chez Monsieur N. nous a semblé exclure le diagnostic de

myocardite à éosinophiles. De plus dans les deux cas, l’hyperéosinophilie est récente, et de toute

façon inférieure aux 5,5 semaines de la myocardite aiguë. Il ne semble pas pour autant que cette

donnée aille à l’encontre de notre hypothèse, et certains auteurs avancent que le risque de

développer une maladie cardiaque au cours du SHE n’est pas corrélé avec l’importance et la

durée de l’hyperéosinophilie [122]. Enfin, au Japon, Morimoto et coll. ont montré que sur 8

patients hospitalisés entre 1988 et 1995 pour myocardite à éosinophiles prouvée

histologiquement, 4 d’entre eux avaient un taux d’éosinophiles < 500/mm3 à l’apparition des

signes cardiaques, et 3 d’entre eux un taux d’éosinophiles entre 500 et 1000/mm3 (55-1312)

[123]. Parmi ces patients, pour qui l’origine de l’éosinophilie était d’origine allergique pour 4

d’entre eux, parasitaire pour un seul, et idiopathique pour les autres, tous sauf un ont développé

une hyperéosinophilie supérieure à 500/mm3 et 6 une hyperéosinophilie de plus de 800/mm3

(495-9024).

Chez ces patients au diagnostic de myocardite à éosinophiles prouvée, la question de l’absence

d’hyperéosinophilie dans le sang périphérique est particulièrement troublante. L’explication la

plus probable est que les éosinophiles sanguins migrent vers les tissus, et que la moelle n’est pas

en mesure de répondre immédiatement par une augmentation de la production. Ce phénomène

expliquerait alors l’éosinopénie transitoire paradoxale constatée. Ces cas montrent que, même en

l’absence une hyperéosinophilie périphérique marquée au début de l’évolution de la maladie, les

éosinophiles peuvent causer des lésions myocardiques.

60

Les polynucléaires éosinophiles sont les cellules-clés de la défense anti-parasitaire et de

l'inflammation allergique. Ils participent également au remodelage tissulaire et à l’angiogénèse

[90]. Ils représentent de 2 à 5% des leucocytes circulants (~0 à 500/mm3) et leur répartition est

surtout tissulaire, la fraction sanguine ne représentant que 1% du nombre total. Ils ont un rôle

modulateur dans les phénomènes d’hypersensibilité immédiate. Ils limitent les manifestations

allergiques consécutives à la dégranulation des mastocytes et des basophiles en neutralisant les

molécules médiatrices de l’anaphylaxie grâce au contenu de leurs granules [124]. En outre, ils ont

un rôle lytique direct sur certains parasites dont les schistosomes et notamment les

schistosomules [125]. On a également montré un lien significatif entre l’absence de réinfection

par S. haematobium et S. mansoni et le taux d’éosinophiles [126, 127]. L’adhésion de

l’éosinophile au parasite provoque sa dégranulation avec libération de molécules responsables de

la lyse du parasite, telles que la MBP et la ECP. La protéine basique majeure - ou MBP (major

basic protein) - joue à la fois un rôle de modulation sur les basophiles et les mastocytes, et une

fonction cytotoxique sur le parasite. La protéine cationique de l’éosinophile - ou ECP

(Eosinophilic Cationic Protein) - joue un rôle important en activant les facteurs de

coagulation par activation du facteur XII et du plasminogène et neutralisation de l’action

anticoagulante de l’héparine.

À coté de ce rôle bénéfique, l’éosinophile peut également se révéler toxique pour l’hôte et être à

l’origine, entre autre, de lésions cardiaques. Trois mécanismes différents sont incriminés dans la

toxicité de l’éosinophile : la cytotoxicité directe, les dommages tissulaires liés à l’infiltration des

organes et des phénomènes thromboemboliques causés par l’hypercoagulabilité qu’il induit

[128]. Il semble néanmoins que le mécanisme le plus délabrant soit la toxicité corrélée au

relargage des substances des granules. Par un phénomène non connu, les éosinophiles subissent

un phénomène d’adhérence par le biais d’immunoglobulines de surface et de molécules

61

d’adhésion qui conduisent à leur activation et leur dégranulation au niveau de l’endocarde. La

MBP et l’ECP sont alors libérées et vont avoir un effet cytotoxique localement. La MBP a un

effet cytopathogène sur les cellules endothéliales et les cardiomyocytes, mais peut aussi initier un

processus direct de fibrose interstitielle myocardique [129], tandis que l’ECP va induire des

phénomènes de thrombose avec développement de thrombus pariétaux. L’ensemble de ces

phénomènes est une explication possible aux lésions myocardiques à l’origine du tableau de nos

patients. Ainsi, ces lésions vont-elles aboutir à la formation de thrombus muraux et d’une fibrose

au niveau du l’endocarde et du myocarde, pour donner à long terme la cardiopathie restrictive de

la fibrose endomyocardique. Cette pathogénie est encore mal connue. Tous les types

d’hyperéosinophilies sont cependant susceptibles d’induire ce phénomène de toxicité.

Une équipe japonaise a démontré qu’il existait des taux sanguins et tissulaires élevés d’ECP chez

des patients aux diagnostics de myocardites à éosinophiles posés sur des biopsies

endomyocardiques [130, 131]. Selon les auteurs, le taux sérique d’ECP pourrait être un bon

indicateur pour le diagnostic et le suivi de ces myocardites.

Le même type d’atteinte serait observé au niveau du système nerveux central, ce qui expliquerait

ainsi les lésions de type vascularite cérébrale retrouvée parallèlement aux atteintes myocardiques

chez Monsieur F. [59]. Enfin, il a été démontré le rôle crucial des éosinophiles dans la formation

des granulomes autour des œufs de S. mansoni, et par conséquent sa participation aux réactions

pathologiques induites par la bilharziose [125].

Le mécanisme que nous avons évoqué entre dans le cadre d’une théorie uniciste dite « d’Olsen »,

reliant myocardite à éosinophiles et EPC [132]. Dans le sens de cette hypothèse, une étude

nigériane prospective de suivi de FEM a retrouvé que 4 patients sur les 89 avaient présenté une

symptomatologie initiale compatible avec un tableau de myopéricardite aiguë, mais sans preuve

formelle [21]. Cependant, d’autres équipes proposent une théorie dite dualiste qui fait de cette

62

myocardite et de l’EPC deux entités distinctes [133]. La myocardite serait la résultante d’une

atteinte exclusive des myocytes par l’éosinophile, alors qu’au contraire, l’EPC serait due à une

atteinte unique des cellules endothéliales. Plusieurs arguments vont dans le sens de cette

hypothèse :

§ premièrement, dans l’EPC, l’atteinte myocardique est minime

§ deuxièmement la séquence des événements décrits plus hauts n’a jamais été démontrée sur

des études histologiques

§ enfin, une étude réalisée au Nigéria n’a pas montré de différence significative de taux

d’éosinophiles dégranulés entre un groupe de patients suivis pour FEM et un groupe témoin

[134].

Si les doutes persistent encore à l’heure actuelle dans le rôle joué par les éosinophiles et les

helminthes, notamment la bilharziose dans la genèse de l’EPC, ils sont évidemment majeurs en

ce qui concerne la myocardite aiguë.

b. Myocardite aiguë auto-immune

Si la théorie de la toxicité des éosinophiles est alléchante, certains auteurs semblent penser que

d’autres phénomènes sont prépondérants dans la physiopathologie des atteintes organiques au

cours de la bilharziose invasive.

Une étude immunologique menée au cours de deux épidémies brésiliennes de bilharziose aiguë à

S. mansoni impliquant 24 patients a montré plusieurs résultats intéressants [12]. Lors de la

première épidémie, les tests ont montré des taux d’IFNγ, d’IL4 et d’IL5 beaucoup plus élevés que

chez des patients présentant une bilharziose chronique. Lors de la seconde épidémie, les tests ont

montré une production accrue d’IFNγ et d’IL5, précocément après l’infection, en réponse aux

antigènes d’œufs solubles (SEA : soluble egg antigen) et aux antigènes solubles de vers adultes

63

(SWAP : soluble adult worm antigen). Ce profil cytokinique est caractérisé par une réponse

immunitaire mixte Th1 et Th2 (Th0). En outre, il a été démontré une coopération dans les

mécanismes de défense contre les helminthes, entre éosinophiles, IgE et des cytokines

activatrices, telles que IL4 et surtout IL5 [128]. On a aussi démontré le rôle essentiel des IgE dans

la défense contre la bilharziose. Ils coopèrent avec les phagocytes mononucléés, les plaquettes et

les éosinophiles pour tuer la larve de schistosome. Ils ont également un rôle essentiel dans la

résistance à la réinfection, démontré expérimentalement chez le rat et dans des études

sérologiques épidémiologiques [135]. D’ailleurs, les modèles de vaccins actuels exploitent cette

fonction des IgE, dirigés contre des antigènes de surfaces de schistosomes.

De Jesus et coll. ont montré que des phénomènes immunologiques indépendants de l’éosinophilie

intervenaient dans la genèse de la symptomatologie [40]. En effet, au cours de leur étude sur les

phénomènes immunologiques survenant chez les 31 patients, et pris en charge pour une

bilharziose aiguë, ils ont montré la présence de complexes immuns circulants (55 à 93% des

patients), la production importante de cytokines pro-inflammatoires IL1, IL6 et TNFα, IFNγ

(87% des patients) et une réponse Th1 prédominante, par rapport à la réponse Th2, normalement

observée dans les réactions de sensibilité immédiate pures [124]. De plus, les taux d’IgE

retrouvés n’étaient pas plus élevés chez ces patients en pleine phase invasive que chez les patients

présentant une bilharziose chronique. En outre, la réponse de type Th2 (IL4 et IL10),

n’apparaîtrait qu’à distance de l’épisode aigu chez ces patients et les protégeraient d’une nouvelle

schistosomose invasive à l’occasion d’une réinfestation.

Ainsi, les symptômes observés lors de la bilharziose aiguë, et notamment les atteintes cardiaques,

seraient-ils médiés par le dépôt de complexes immuns dans les tissus. Les cytokines pro-

inflammatoires secrétées en abondance lors de cette phase participeraient aux lésions d’organes.

Les auteurs appuient leur raisonnement sur la comparaison avec les atteintes retrouvées dans le

64

lupus érythémateux disséminé, notamment la vascularite pulmonaire et la péricardite, qui sont

médiées par les complexes immuns. En effet, l’atteinte cardiaque est l’une des principales

complications des maladies auto-immunes systémiques (lupus, pan-artérite noueuse, maladie de

Churg et Strauss…). Toutes les structures anatomiques du cœur peuvent être atteintes et des

mécanismes pathologiques multiples ont été décrits. Des autoanticorps non spécifiques d’organes

sont impliqués dans la formation de complexes immuns et leur dépôt à l’origine de processus

inflammatoires responsables d’endocardite (Libman-Sacks), myocardite et péricardite. Les

anticorps anti-phospholipides ont également été associés à des événements thrombotiques

coronaires et des vasculopathies intra-myocardiques. On décrit dans de nombreuses maladies

systémiques de type vascularites des atteintes myocardites par atteintes des gros vaisseaux

(coronaires) ou des petits vaisseaux myocardiques [136].

Cette hypothèse semble pouvoir s’appliquer aux deux cas présentés ici. En ce qui concerne

Monsieur F., l’atteinte cérébrale et l’hémorragie sous-unguéale en flammèches semblent

compatibles avec un diagnostic de vascularite induite par des complexes immuns. En outre, ont

été retrouvés chez lui, révélés par un allongement isolé du TCA, des anticorps anti-cardiolipides,

souvent présents, et parfois transitoirement, dans des contexte d’auto-immunité. On pourrait alors

supposer que l’atteinte cardiaque serait due à des dépôts de complexes immuns au niveau du

myocarde, comme le suggèrent De Jesus et son équipe [40], soit par un phénomène de vascularite

coronaire, soit par une vascularite des petits vaisseaux (veinules artérioles, capillaires) à l’origine

de la myocardite aiguë. Dans le cas de Monsieur N., les arguments pour un phénomène auto-

immun avec vascularite sont moindres, en dehors d’un TCA modérément allongé associé à une

diminution des facteurs XI et XII, sans anticoagulant circulant retrouvé. Comme dans le cas

65

précédent, l’atteinte myocardique serait rattachée à un phénomène de vascularite ou de dépôts de

complexes immuns dans le tissu myocardique.

Enfin, un article russe, dont malheureusement seul l’abstract est disponible en anglais, récuse le

rôle néfaste des éosinophiles au cours de la phase invasive des helminthiases [137]. Sa

démonstration repose sur l’étude des phénomènes immunologiques au cours de la phase invasive

de la trichinellose, de la toxocarose et de la paragonimose. Ainsi, les substances sécrétées par les

larves d’helminthes mimeraient-elles les protéines de l’hôte et sont-elles à l’origine d’une

réponse immunitaire spécifique, et non spécifique, dirigée contre le soi. Cette réponse

inflammatoire de type auto-immune serait à l’origine des lésions diverses observées au cours des

helminthiases invasives. Des myocardites d’hypersensibilité expérimentales ont été obtenues

chez des cochons d’Inde avec des antigènes de Trichina spiralis, stimulant la voie Th1 de

l’immunité. Enfin l’analyse du sérum de 22 patients à la phase active de trichinoses, toxocaroses

et opisthorchiases a montré des taux élevés d’IgG4 associés aux taux élevés d’éosinophiles et

d’IgE chez les patients présentant des lésions viscérales et des taux normaux d’IgG4 chez les

patients sans atteintes d’organes. Ils en concluent que les éosinophiles et les IgE, élevés chez ces

derniers patients, joueraient un rôle protecteur contre ces phénomènes auto-immuns au cours des

helminthiases invasives.

c. Conséquences thérapeutiques

La physiopathologie de la bilharziose invasive semble donc en rapport avec des phénomènes

immuno-allergiques, soit liés aux éosinophiles, soit liés à des mécanismes plus complexes. À

toutes fins utiles, la conséquence thérapeutique est la même dans tous les cas. La suspicion

clinique de myocardite au cours de la phase invasive de la bilharziose nécessite la mise en place

urgente d’un traitement par corticoïdes, pour lutter contre les phénomènes décrits plus tôt. C’est

66

également le traitement de référence des myocardites à éosinophiles d’autre étiologie (SHE,

Churg et Strauss, myocardites d’hypersensibilité) [92, 111, 112, 116]. La corticothérapie se

justifierait par son effet inhibiteur sur l’activation des éosinophiles, donc sur la dégranulation et la

cytotoxicité endothéliale. La corticothérapie s’est accompagnée d’une décroissance rapide des

éosinophiles chez nos deux patients, peut-être avec également comme conséquence, la chute du

taux sérique d’ECP, qui expliquerait la disparition des symptômes [130]. Enfin, le traitement

parasitaire doit être formellement contre-indiqué devant un tel tableau, faisant prendre le risque,

comme nous l’avons vu, non seulement d’un échec, mais surtout d’une réaction paradoxale.

D. CŒUR ET AUTRES HELMINTHIASES AIGUËS

Dans les revues de la littérature sur les cardiopathies infectieuses, les parasitoses sont souvent

citées comme causes possibles. Elles peuvent directement ou indirectement toucher des structures

anatomiques variées du cœur, telles que le myocarde, le péricarde et la circulation pulmonaire

[138-141]. Certaines protozooses sont bien connues pour leurs atteintes myocardiques, telles la

maladie de Chagas en Amérique du Sud (Trypanosoma cruzi), la trypanosomose africaine

(Trypanosoma brucei, rhodesiense ou gambiense), la toxoplasmose disséminée à T. gondii,

notamment chez l’immunodéprimé, voire les abcès myocardiques de l’amibiase. Nous ne

développerons pas les atteintes liées à ces protozoaires [cf. Annexe n° 4], qui sont des lésions de

type mécanique, par développement des parasites au sein du myocarde avec inflammation

réactionnelle à l’origine de la symptomatologie [95, 141]. Ce mécanisme n’est absolument pas

comparable à celui décrit chez nos patients.

En revanche, les helminthiases, bien que souvent citées comme causes classiques de myocardite

aiguë dans les listes d’étiologie, sont peu décrites dans la littérature. La revue des connaissances

sur ces atteintes permettra de conforter et d’élargir les hypothèses émises précédemment. Nous ne

67

citerons pas non plus les atteintes cardiaques au cours de la cysticercose (Taenia solium) et de

l’hydatidose (Echinococcus granulosus), qui résultent exclusivement du développement de kystes

au sein du myocarde [cf. Annexe n° 5].

1. Atteintes cardiaques au cours de la trichinellose invasive.

C’est l’atteinte cardiaque au cours des helminthiases la mieux étudiée. La trichinose (ou

trichinellose) est une helminthiase de type nématodose due le plus souvent à Trichinella spiralis

(mais aussi T. britovi, T. nativa, T. pseudospiralis) [46]. C’est une maladie cosmopolite, quoique

peu fréquente dans les pays industrialisés, due à la consommation de viandes animales parasitées

diverses mal cuites (porc, cheval, sanglier, ours…). Son expression clinique est variable, souvent

asymptomatique. La phase invasive, qui survient en général 10 à 20 jours après la contamination,

est caractérisée par de la fièvre, des myalgies importantes, un œdème de la face (périorbitaire

surtout), et, de façon inconstante une éruption urticarienne, une hémorragie sous-conjonctivale.

On retrouve également une hyperéosinophilie et une élévation des enzymes musculaires. Le

diagnostic est évoqué sur la sérologie qui se positive 2 à 3 semaines après la contamination [95].

La preuve formelle du diagnostic est apportée par la biopsie musculaire. Il existe de rares cas de

formes graves avec atteinte pulmonaire, neurologique ou surtout cardiaque. Les manifestations

cardiaques sont peu décrites bien que fréquentes, et leur incidence varie entre 21 et 75 % selon

les études. Les trois tuniques peuvent être atteintes, avec une prédominance des myocardites, puis

des péricardites, et de rares cas d’endocardites [142].

En 2005, une équipe croate a publié une étude rétrospective portant sur 154 cas de trichinellose

hospitalisés au CHU de Zagreb sur une période de 5 ans, avec une analyse systématique des

données cliniques et de l’ECG [143]. Quatre vingt-sept patients (56%), la plupart en phase

invasive de trichinellose, ont présenté des anomalies ECG. Les principales anomalies retrouvées

68

étaient les troubles de la repolarisation aspécifiques (modifications du segment ST et de l’onde

T), suivis des blocs de branches et de tachycardies sinusales. Dix-huit patients (12%) ont été

identifiés comme myocardite, le diagnostic étant posé sur des critères cliniques (douleur

thoracique, syncope), et/ou anomalies ECG et/ou élévation des CK-MB. Chez l’un des patients,

le diagnostic a été posé en post-mortem, après qu’il ait développé un infarctus myocardique dans

les suites de la myocardite. Les patients ont développé une myocardite dans les 8 à 28 jours

suivant le début des symptômes, et avaient en général une hyperéosinophilie importante (4800

éosinophiles/mm3), significativement plus élevée que chez les patients sans anomalie ECG. A

l’exception du patient décédé, l’évolution a été favorable sous corticothérapie et traitement anti-

parasitaire. Cette étude est particulièrement intéressante car elle montre la grande fréquence des

atteintes cardiaques asymptomatiques à l’origine de troubles ECG aspécifiques, jusqu’alors

rarement évaluées au cours de la phase invasive de la trichinose. Les auteurs insistent sur la

nécessité du dépistage systématique de la myocardite chez ces patients, du fait du risque de décès

par mort subite au cours des myocardites aiguës.

Une autre étude rétrospective de grande envergure, incluant 560 patients atteints de trichinose

hospitalisés sur une période de 29 ans, a retrouvé 10% d’atteinte myocardite [144]. En France, en

2007, trois cas cliniques étrangement comparables aux nôtres ont rapporté des cas de myocardites

aiguës asymptomatiques au cours de trichinoses aiguës [142, 145, 146]. Dans deux cas, le

diagnostic a été porté sur des anomalies ECG associées à une hyperéosinophilie et à une élévation

de la troponine. Dans deux des cas, le diagnostic a été confirmé par une IRM cardiaque. Une

biopsie endomyocardique a permis un examen anatomopathologique du cœur qui retrouve un

infiltrat interstitiel inflammatoire composé de lymphocytes, d’éosinophiles et de neutrophiles. Le

diagnostic de trichinellose a pu être porté sur les sérologies et/ou sur l’examen parasitologique de

la viande incriminée. Tous les auteurs s’accordent à dire que l’atteinte myocardique résulte, d’une

69

part, d’une atteinte pariétale vasculaire associée à une inflammation et une nécrose des cellules

musculaires dues à la migration des larves dans le myocarde et d’autre part d’un effet toxique

des éosinophiles locaux et circulants à l’origine d’un effet prothrombotique délétère.

Enfin, quelques cas rapportés dans la littérature semblent montrer une évolution vers une

endocardite fibroblastique de Loeffler au cours de l’évolution tardive de ces myocardites à

trichine accompagnées d’une hyperéosinophilie importante [145].

Au total, il semble que l’atteinte myocardique, souvent asymptomatique, soit extrêmement

fréquente au cours de la phase invasive de la trichinose, et que, du fait de sa gravité potentielle

(risque de décès par mort subite, évolution vers une fibrose endomyocardique) son dépistage

systématique par ECG et dosage de la troponine soit recommandé. Le traitement repose sur

l’albendazole associé à des corticoïdes.

2. Atteintes cardiaques au cours de la toxocarose.

Des atteintes cardiaques ont été décrites au cours de la toxocarose, principale étiologie du

syndrome de larva migrans viscéral. La toxocarose est une affection humaine cosmopolite liée à

la présence tissulaire de larves de Toxocara canis ou T. cati, parasites du chat ou du chien, en

impasse parasitaire chez l’homme. L’homme s’infeste en ingérant des oeufs soit directement au

contact des animaux, soit par des aliments souillés par les chiens et les chats. Les manifestations

cliniques correspondent à la présence et à la migration des larves : fièvre, signes pulmonaires,

manifestations cutanées telles que de l’urticaire. Des manifestations oculaires, cardiaques, une

hépatosplénomégalie peuvent survenir à distance de la contamination [46]. La myocardite a été

décrite dans 10 à 15% des cas de LVM, et est souvent accompagnée d’une hyperéosinophilie

importante [147]. Des modèles animaux d’hyperéosinophilie induite par une infection à

Toxoxara cants chez des rats ont montré l’apparition d’une dysfonction cardiaque et une

70

accumulation d’éosinophiles dans le myocarde [148]. Dans une étude espagnole rétrospective

portant sur 54 enfants hospitalisés pour toxocarose, l’un d’entre eux a présenté une myocardite

aiguë révélée par une insuffisance cardiaque aiguë et prouvée à la biopsie endomyocardique qui

montre une infiltration éosinophile intense [149]. Dans les quelques cas décrits, l’examen

anatomopathologique ne retrouvait aucun granulome mais une dégénérescence myocardique

extensive avec une infiltration éosinophilique massive. Selon les auteurs, l’atteinte myocardique

au cours de la LVM résulterait du passage de la larve à travers le myocarde et/ou d’une réaction

d’hypersensibilité aux parasites. Plusieurs cas d’endocardite pariétale de Loeffler ont été décrits

dans le cadre de bilan d’insuffisances cardiaques et/ou douleurs angineuses, et orientés par une

hyperéosinophilie importante attribuée à une toxocarose viscérale. [150].

3. Atteintes cardiaques au cours de l’anguillulose maligne

L’anguillulose intestinale est une helminthiase cosmopolite due à Strongyloides stercoralis, qui

infecte plus de 100 millions de personnes dans le monde. La maladie est la plupart du temps

asymptomatique, mais peut devenir dramatique en cas d’immunodépression, notamment au cours

des traitements par corticoïdes et immunosuppresseurs, même si l’exposition au parasite a eu lieu

des années auparavant [46]. On ne retrouve qu’un seul cas d’atteinte cardiaque au cours d’une

anguillulose maligne très sévère chez une jeune Australienne lupique de 18 ans. Cette myocardite

a été révélée par des anomalies ECG (ascension du segment ST), une élévation des enzymes

cardiaques (CK-MB, troponine), une hyperéosinophilie importante inhabituelle dans ce contexte,

avec échographique cardiaque et coronarographies normales [151]. On a également découvert ce

nématode dans le cœur d’un patient qui était décédé d’une strongyloïdose disséminée, mais sans

qu’un lien causal n’ait pu être établi avec le décès [152].

71

4. Atteintes cardiaques des filarioses :

Les filarioses, pourtant agents classiques des myocardites canines, n’ont jamais été incriminées

directement dans des atteintes myocardiques. Il y a eu cependant des controverses pour la loase,

avec une issue fatale attribuée à une fibrose endomyocardique compliquée de choc cardiogènique

chez un jeune garçon [153]. En revanche, l’hyperéosinophilie prolongée des filarioses

chroniques, à l’instar de la bilharziose chronique, est largement incriminée dans la genèse de

fibroses endomyocardiques tropicales [21], mais aussi dans le cœur pulmonaire chronique lié au

poumon éosinophile tropical des microfilaires [91, 139].

5. Autres helminthiases

De façon plus anecdotique, ont également été décrites des atteintes myocardiques au cours de

distomatose hépatique en phase invasive, pouvant se compliquer de fibrose endomyocardique

[141, 154, 155] et d’opisthorchiases super invasives en Russie [156]. Le mécanisme possiblement

incriminé serait immuno-allergique. Enfin, un diagnostic rétrospectif de cardiomyopathie dilatée

compliquant une myocardite à éosinophiles a été fait sur l’examen anatomopathologique post

transplantation cardiaque [118]. L’hyperéosinophilie a été remarquée secondairement et attribuée

à une oxyurose chronique chez cette jeune patiente polonaise de 23 ans.

72

CONCLUSION

Les cas décrits au cours de ce travail sont particulièrement informatifs. Il s’agit des premiers cas

décrits de myocardite aiguë compliquant la phase invasive d’une bilharziose chez de jeunes

voyageurs au retour d’Afrique subsaharienne.

La physiopathologie de ces myocardites est loin d’être évidente. Il parait difficile de trancher

catégoriquement entre un mécanisme lié à la cytotoxicité des éosinophiles ou à des réactions

auto-immunes et une toxicité des complexes immuns, liés à la réaction d’hypersensibilité

constatée au cours de la migration des formes jeunes du parasite. Cependant, l’hypothèse de la

toxicité des éosinophiles est plus alléchante car le tableau clinico-biologique de nos patients

semble tout à fait superposable à celui décrit au cours des myocardites d’hypersensibilité

médicamenteuse ou des myocardites à éosinophiles, lesquelles constituent la première étape des

atteintes cardiaques lors des grandes hyperéosinophilies. En outre, cette théorie permettrait de

faire le lien avec les fibroses endomyocardiques bien connues et décrites au cours des formes

évoluées de SHE et des formes tardives de bilharzioses aiguës et chroniques, comme cela a été

proposé par Oslen dans les atteintes cardiaques du SHE. La myocardite décrite chez nos patients

ne serait que le début du continuum entre ces différentes atteintes décrites. Enfin ces cas,

observés au cours d’une schistosomose invasive, semblent pouvoir être mis en parallèle avec les

atteintes cardiaques décrites au cours d’autres helminthiases aiguës. L’analyse des myocardites

décrites au cours de la phase invasive de la trichinellose et la toxocarose est en faveur de

mécanismes similaires d’origine immuno-allergique. Au cours de ces maladies, des études

électrocardiographiques systématiques ont permis de mettre en évidence la grande fréquence des

myocardites asymptomatiques. Si, dans le premier cas décrit, le diagnostic a été fait à la suite

d’une douleur thoracique, le diagnostic a été posé dans le second cas sur un dosage systématique

de la troponine. L’ECG réalisé chez ces patients retrouvait des anomalies peu spécifiques qui

73

n’attiraient pas particulièrement l’attention.. C’est pourquoi chaque patient pris en charge pour

une bilharziose aiguë devrait bénéficier d’un dosage de troponine et d’un ECG. Au moindre

doute, on devrait proposer une imagerie cardiaque (IRM de préférence) à la recherche de signes

de myocardite aiguë. Chez ces patients, des études épidémiologiques immunologiques

complémentaires seraient intéressantes afin d’essayer d’élucider le mécanisme

physiopathologique prépondérant dans ce phénomène.

Même si, à notre connaissance, il n’a pas été décrit d’évolution fatale au cours de schistosomoses

aigues, il existe un risque théorique non négligeable de complications brutales de la

myocardite telles que des troubles du rythme aigus, infarctus du myocarde, myocardite aiguë

nécrosante à éosinophiles, mort subite. Ceci est confirmé par la comparaison avec les

complications rares, mais graves, des myocardites d’hypersensibilité médicamenteuse, ou de

celles des myocardites aiguës au cours de la trichinose. Ainsi, comme il l’a été démontré au cours

des atteintes neurologiques des bilharzioses invasives, ces patients devraient-ils être traités par

corticoïdes seuls, le traitement par praziquantel n’étant délivré qu’à distance de l’épisode aigu.

La bilharziose invasive est une maladie de plus en plus fréquemment observée dans les pays

tempérés, chez les voyageurs au retour de pays tropicaux. De plus, dans les zones à risque, les

mouvements de population de la campagne, zones d’endémie, vers la ville, les bouleversements

écologiques liés à des catastrophes naturelles (inondations) ou artificielles (barrages) sont à

l’origine, comme en Chine ou au Brésil, d’épidémies dans des populations jusqu’à présent

épargnées. L’augmentation de la fréquence des voyages aventureux, de la « mondialisation », et

les phénomènes naturels et humains décrits rendent le risque théorique de survenue de

myocardites au cours de bilharziose aiguë de plus en plus élevé. La connaissance de ce risque

potentiel doit être connue à la fois des praticiens de la médecine des voyages, qui ont à leur

74

disposition des moyens exhaustifs, mais aussi des médecins qui travaillent dans des régions où

des épidémies peuvent survenir, et dont les moyens diagnostiques sont plus limités..

75

ANNEXE N° 1: PRINCIPAUX CARACTÈRES DISTINCTIFS DES SCHISTOSOMES HUMAINS

Schistosomes

Localisation des parasites

Voie d’élimination des oeufs

Nombre d’oeufs pondus par jour

Forme des oeufs

Prélèvements pour diagnostic direct

Répartition

Hôte intermédiaire

S.

hæmatobium

Plexus veineux urogénital

Vessie

20 à 200

Ovalaire à éperon terminal 150/60 µm

Urines, biopsies vésicales et rectales

Afrique, Moyen Orient

Bulinus (B. truncatus, tropicus, africanus)

S. mansoni

Veine mésentérique inférieure

Colon

100 à 300

Ovalaire à éperon latéral 140/60 µm

Selles, biopsies rectales

Afrique, Moyen Orient, Amérique du Sud, Antilles

Biomphalaria (B. glabrata)

S.

intercalatum

Plexus veineux périrectal

Rectum

Inconnu

Ovalaire à éperon terminal 200/65mm

Selles, biopsies rectales

Afrique Centrale

Bulinus (B. forskalii crystallinus globosus)

S. japonicum

Veine mésentérique supérieure

Intestin grêle

500 à 3500

Ovalaire à éperon latéral peu visible 70/50µm

Selles

Chine, Corée, Formose, Japon, Philippines

Oncomelania (O. nasophora)

S. mekongi

Veine mésentérique supérieure

Intestin grêle

Inconnu

Ovalaire à éperon latéral peu visible 60/40µm

Selles

Laos, Cambodge, Thaïlande

Tricula (T. aperta)

D’après ANOFEL 2006 [46]

76

ANNEXE N° 2 : CAUSES DE MYOCARDITE AIGUË

INFECTIEUSES IMMUNOLOGIQUES

Virales Entérovirus (Coxsackie B et A, poliomyélite, échovirus, VHA) Adénovirus, influenza, VRS (grippe) Paramyxovirus (oreillons, rougeole, VRS) Rhabdovirus (fièvre jaune, dengue) Herpes viridae (HHV6, EBV, CMV…) Parvovirus B19, VIH, VHB, VHC. Junin virus, oreillons, rougeole, rubéole, variole.

Bactériennes Streptocoque (RAA), pneumocoque, staphylocoque, diphtérie, gonocoque, méningocoque, brucellose, légionellose, salmonellose, Serratia, maladie de Whipple, choléra, syphilis, tuberculose, rickettsioses, maladie de Lyme, M. pneumoniae, rickettsies, actinomyces, nocardia.

Parasitaires Protozoaires : Toxoplasmose, trypanosomiases, paludisme. Helminthes : Trichinose, bilharziose, ascaris, hydatidose, paragonimose, cysticercose, toxocarose, filariose, distomatose, anguillulose, oxyurose.

Fungiques Candida, cryptocoque, aspergillus, histoplasmose, blastomyces, coccidioides, mucormycoses, sporothrix.

Allergènes Acétazolamide, amitriptyline, cefaclor, colchicine, furosemide, isoniazid, lidocaïne, méthyl-dopa, pénicilline, phénylbutazone, phénytoïne, réserpine, streptomycine, anatoxine tétanique, tétracycline, thiazidiques.

Alloantigènes Rejet de greffe cardiaque.

Autoantigènes Maladie de Chagas, Chlamydia pneumoniae, diabète de type I, myocardite à cellules géantes, lupus érythémateux disséminé, polyarthrite rhumatoïde, maladie de Wegener, périartérite noueuse, maladie de Kawasaki, Churg et Strauss, syndrome de Gougerot-Sjögren, maladie de Whipple, myasthénie grave,, dermatopolymyosite, sarcoïdose, sclérodermie, syndrome de l’intestin irritable, thyrotoxicose.

TOXIQUES

Médicaments et drogues Amphétamines, antidépresseurs tricycliques, anthracyclines, catécholamines, cocaïne, cyclophosphamide, éthanol, 5FU, hémétine, interleukine 2, quinine, trastuzumab.

Métaux lourds Cuivre, fer, plomb, mercure.

Agents physiques Choc électrique, hyperthermie, radiations.

Poisons Arsenic, azotés, piqûres de guêpe et d’abeilles, monoxyde de carbone, phosphorés, morsures de scorpion, de serpents, d’araignées.

Adapté de Ellis, Cardiology in Review 2007[100] et Feldman, N Engl J Med 2000 [101].

77

ANNEXE N° 3 : CAUSES D’ÉLÉVATION DE LA TROPONINE

DIAGNOSTIC MÉCANISME

« Ischémie de demande »

SIRS/Sepsis Hypotension Hypovolémie Tachycardie supraventriculaire et AC/FA Hypertrophie ventriculaire gauche

Dépression myocardique/déséquilibre offre-demande Diminution de la pression de perfusion Diminution de la pression de perfusion Déséquilibre offre-demande Ischémie sous-endocardique

Ischémie myocardique

Vasospasme coronarien Hémorragie intracrânienne/crise convulsive Ingestion d’agents sympathomimétiques

Ischémie prolongée avec vasospasme Déséquilibre du système nerveux autonome Effets adrénergiques directs

Lésion myocardique directe

Contusion cardiaque Choc électrique externe pour cardioversion Lésions cardiaques infiltratives Chimiothérapie Myocardite Péricardite Transplantation cardiaque

Traumatique Traumatique Compression des myocytes Toxicité cardiaque Inflammatoire Inflammatoire Inflammatoire/immunologique

Contrainte myocardique

Insuffisance cardiaque congestive (aiguë et/ou grave) Embolie pulmonaire HTAP ou emphysème Exercice laborieux

Étirement paroi ventriculaire Étirement ventricule droit Étirement ventricule droit Étirement ventriculaire

Insuffisance rénale aiguë ou chronique Inconnu

Faux-positifs

Anticorps hétérophiles Facteur rhumatoïde Thrombus fibrineux Microparticules Dysfonction de l’analyseur

Adapté de Jeremias, Ann Intern Med. 2005[103].

78

ANNEXE N° 4: ATTEINTES CARDIAQUES AU COURS DES PROTOZOOSES

PARASITOSE ATTEINTES CARDIAQUES DISTRIBUTION

GÉOGRAPHIQUE ET MODE DE TRANSMISSION

Maladie de Chagas (Trypanosomiase américaine) Trypanosoma cruzi

Phase aiguë : Myocardite ± péricardite aiguë Anomalies ECG non spécifiques Hyperparasitisme musculaire. Morbidité par choc cardiogénique sur myocardite fulminante ou trouble du rythme fatal. Phase chronique : Années ou décennies après l’infection. Dysfonction myocardique+++ Réaction inflammatoire due à la présence du parasite dans le myocarde. Divers troubles du rythme à l’origine de lipothymies, de syncopes et de mort subite. Fibrose et cardiomyopathie avec insuffisance cardiaque congestive.

Mexique, Amérique centrale, Amérique du Sud Pénétration transcutanée des déjections de réduves au cours de leur repas sanguin. Transfusion sanguine Transplantation d’organe Périnatale. Ingestion de déjections de réduves.

Trypanosomiase africaine

T. rhodesiense,

brucei, gambiense

Myocardite décrite à la phase initiale de la maladie. Possible décès par insuffisance cardiaque congestive ou trouble du rythme aigu.

Afrique (Soudan, Angola, Congo, Ouganda, Côte d’Ivoire, Tchad) Piqure de glossine (mouche Tsé-tsé)

Amibiase Entamoeba

histolytica

Péricardite amibienne (complication rare de l’abcès hépatique). (Aucun cas publié depuis plus de 15 ans). Tableaux insidieux avec douleur rétrosternale et insuffisance cardiaque jusqu’à la tamponnade et la perforation péricardique.

Cosmopolite. Pays en voie de développement ++ Féco-orale

Toxoplasmose Toxoplasma gondii

Chez l’immunodéprimé : VIH, greffe de moelle, syndrome myélodysplasique, leucémies… Myocardite avec infiltrat lymphocytaire et nécrose myocytaire accompagnant le parasite (tachyzoïte) Atteinte concomitante d’autres organes fréquente (SNC, poumon..) Toxoplasmose congénitale : Généralement asymptomatique avec seulement kystes et non tachyzoïtes dans le myocarde. Adulte immunocompétent : Asymptomatique, syndrome mononucléosique.. Possible survenue de myocardite, péricardite ou pancardite avec insuffisance cardiaque aiguë. Myocardite aiguë avec tachyzoïtes, inflammation focale et nécrose myocytaire. Tachyzoïtes parfois retrouvés dans l’épanchement ou les biopsies péricardiques. Épanchement péricardite chronique et péricardite constrictive toxoplasmiques décrits.

Cosmopolite Ingestion de viande infectée mal cuite. Féco-orale Transfusion sanguine Périnatale Transplantation

Adapté de Kirchhoff , Front Biosci. 2004 et de Franco-Paredes, Clin Cardiol. 2007[95, 138-141].

79

ANNEXE N° 5: ATTEINTES CARDIAQUES AU COURS DES HELMINTHIASES

PARASITOSE ATTEINTES CARDIAQUES DISTRIBUTION ET

TRANSMISSION Cysticercose Taenia solium

Kystes retrouvés de façon accidentelle dans le cœur : péricarde, myocarde des ventricules droit ou gauche, du septum. La dégénérescence des kystes aboutit à un la formation d’un granulome et d’une fibrose. Conséquences : troubles du rythme et de la conduction.

Cosmopolite. Zones rurales à faible niveau d’hygiène. Rare dans les pays non consommateurs de porc. Ingestion de nourriture contaminée par les œufs de T. solium. (légumes, salade.)

Hydatidose Echinococcus granulosus

Kyste hydatiques cardiaques (myocardique ou péricardique) isolé rarement décrits. Quelques case-reports et petites séries en Grèce et en Italie de patients avec hydatidose cardiaque.

Cosmopolite (zones rurales d’élevage++) Ingestion d’œufs à partir de chiens infectés.

Trichinellose ou trichinose Trichinella spiralis

Myocardite aiguë causée par la migration de la larve à travers le myocarde et l’hyperéosinophilie résultante. Péricardite. Anomalies ECG aspécifiques : troubles de la repolarisation, troubles du rythme et de la conduction. Tableau clinique varié : asymptomatique jusqu’à insuffisance cardiaque aiguë, infarctus du myocarde, troubles du rythme. Infiltrat inflammatoire composé de lymphocytes et d’éosinophiles.

Cosmopolite. Rare en France. Pays de l’Est, Amérique du Nord Consommation de viande mal cuite : domestique : porc, cheval ou gibier : sanglier, ours…

Toxocarose (Syndrome de larva migrans visceral) Toxocara canis, cati

Myocardite aiguë asymptomatique à insuffisance cardiaque aiguë 10 à 15% des cas de LVM Infiltration éosinophile intense Endocardite pariétale de Loeffler lors d’hyperéosinophilies prolongées.

Cosmopolite Ingestion d’œufs à partir de chats et chiens infectés.

Bilharziose Schistosoma mansoni, hæmatobium, intercalatum, japonicum et mekongi.

Phase chronique : Cœur pulmonaire chronique sur HTAP ou HTTP. Granulome myocardique bilharzien sur œufs. Endocardite pariétale chronique Phase invasive : myocardite aiguë.

Pénétration transcutanée dans une eau douce souillée. Afrique, Asie, Amérique du Sud

Anguillulose Strongyloides stercoralis

1 cas de myocardite décrit au décours d’une anguillulose maligne avec défaillance multiviscérale et hyperéosinophilie. 1 cas de larve intramyocardique autopsique

Pays non industrialisés, Antilles. Pénétration transcutanée.

Distomatose Fasciola hepatica

Fibrose endocardique/cardiomyopatie/myocardite ont été décrites. Origine immuno-allergique au cours de la myocardite.

Cosmopolite (zones d’élevage) Consommation de cresson sauvage cru, contaminé par moutons ou vaches

Hétérophyiose Heterophyes heterophyes

Distomatose intestinale, parfois responsable de myocardites Maghreb, Extrême Orient et Pérou Ingestion des poissons d'eau douce crus parasités

Opisthorchiase Opisthorchis viverrini et O. felineus

Douve du foie, parfois responsable de myocardite aiguë en cas d’infestation massive.

Europe de l’Est, Sibérie, Asie. Ingestion des poissons d'eau douce crus parasités

Filarioses Chronique : fibrose endomyocardique à éosinophiles. Myocardites à éosinophiles. Cœur pulmonaire chronique du au poumon éosinophile tropical

Oxyurose Enterobius vermicularis

1 cas décrit de fibrose endomyocardique attribué à l’hyperéosinophilie d’une oxyurose chronique.

Cosmopolite. Féco-orale interhumaine.

Adapté de Kirchhoff , Front Biosci. 2004 et de Franco-Paredes, Clin Cardiol. 2007.[95, 138-141]

80

BIBLIOGRAPHIE

1. WHO. Informal Consultation on Monitoring of Drug Efficacy in the Control of Schistosomiasis and Intestinal

Nematodes. in Report of the WHO 1999. Geneva

2. Chitsulo L, Engels D, Montresor A, et al. The global status of schistosomiasis and its control. Acta Trop. 2000;

77(1): 41-51.

3. Zuidema PJ. The Katayama syndrome; an outbreak in Dutch tourists to the Omo National Park, Ethiopia. Trop

Geogr Med. 1981; 33(1): 30-5.

4. Ross AG, Vickers D, Olds GR, et al. Katayama syndrome. Lancet Infect Dis. 2007; 7(3): 218-24.

5. Jauréguiberry S, Ansart S, Perez L, et al. Acute neuroschistosomiasis: two cases associated with cerebral

vasculitis. Am J Trop Med Hyg. 2007; 76(5): 964-6.

6. Granier H, Potard M, Diraison P, et al. Encéphalite aiguë contemporaine d'une primo-invasion bilharzienne à

Schistosoma mansoni. Med Trop (Mars). 2003; 63(1): 60-3.

7. Colley DG. Ancient Egypt and today: enough scourges to go around. Emerg Infect Dis. 1996; 2(4): 362-3.

8. Ross AG, Li YS, Sleigh AC, et al. Schistosomiasis control in the People's Republic of China. Parasitol Today.

1997; 13(4): 152-5.

9. Tan SY, Ahana A. Theodor Bilharz (1825-1862): discoverer of schistosomiasis. Singapore Med J. 2007; 48(3):

184-5.

10. Gentillini M, Bilharzioses, in Médecine Tropicale. 1993, Flammarion: Paris. p. 221-36.

11. Corachan M. Schistosomiasis and international travel. Clin Infect Dis. 2002; 35(4): 446-50.

12. Barbosa CS, Montenegro SM, Abath FG, et al. Specific situations related to acute schistosomiasis in

Pernambuco, Brazil. Mem Inst Oswaldo Cruz. 2001; 96 Suppl: 169-72.

13. Gryseels B, Stelma FF, Talla I, et al. Epidemiology, immunology and chemotherapy of Schistosoma mansoni

infections in a recently exposed community in Senegal. Trop Geogr Med. 1994; 46(4 Spec No): 209-19.

14. Abdel-Wahab MF, Strickland GT, El-Sahly A, et al. Changing pattern of schistosomiasis in Egypt 1935--79.

Lancet. 1979; 2(8136): 242-4.

15. El-Khoby T, Galal N, Fenwick A, et al. The epidemiology of schistosomiasis in Egypt: summary findings in

nine governorates. Am J Trop Med Hyg. 2000; 62(2 Suppl): 88-99.

16. Ribeiro-dos-Santos G, Verjovski-Almeida S, Leite LC. Schistosomiasis--a century searching for

chemotherapeutic drugs. Parasitol Res. 2006; 99(5): 505-21.

17. Corachan M. Médecine des voyages et veille épidemiologique: l'exemple de la bilharziose. Med Trop (Mars).

1998; 58(4): 345-6.

18. Roca C, Balanzo X, Gascon J, et al. Comparative, clinico-epidemiologic study of Schistosoma mansoni

infections in travellers and immigrants in Spain. Eur J Clin Microbiol Infect Dis. 2002; 21(3): 219-23.

19. Whitty CJ, Mabey DC, Armstrong M, et al. Presentation and outcome of 1107 cases of schistosomiasis from

Africa diagnosed in a non-endemic country. Trans R Soc Trop Med Hyg. 2000; 94(5): 531-4.

20. Bierman WF, Wetsteyn JC, van Gool T. Presentation and diagnosis of imported schistosomiasis: relevance of

eosinophilia, microscopy for ova, and serology. J Travel Med. 2005; 12(1): 9-13.

81

21. Andy JJ, Ogunowo PO, Akpan NA, et al. Helminth associated hypereosinophilia and tropical endomyocardial

fibrosis (EMF) in Nigeria. Acta Trop. 1998; 69(2): 127-40.

22. Grobusch MP, Muhlberger N, Jelinek T, et al. Imported schistosomiasis in Europe: sentinel surveillance data

from TropNetEurop. J Travel Med. 2003; 10(3): 164-9.

23. Agbessi CA, Bourvis N, Fromentin M, et al. La bilharziose d'importation chez les voyageurs: enquête en France

metropolitaine. Rev Med Interne. 2006; 27(8): 595-9.

24. Anonymous. Acute schistosomiasis in U.S. travelers returning from Africa. MMWR Morb Mortal Wkly Rep.

1990; 39(9): 141-2, 147-8.

25. Anonymous. Schistosomiasis in U.S. Peace Corps volunteers--Malawi, 1992. MMWR Morb Mortal Wkly Rep.

1993; 42(29): 565-70.

26. Outwater AH, Mpangala E. Schistosomiasis and US Peace Corps volunteers in Tanzania. J Travel Med. 2005;

12(5): 265-9.

27. Cetron MS, Chitsulo L, Sullivan JJ, et al. Schistosomiasis in Lake Malawi. Lancet. 1996; 348(9037): 1274-8.

28. Cooke GS, Lalvani A, Gleeson FV, et al. Acute pulmonary schistosomiasis in travelers returning from Lake

Malawi, sub-Saharan Africa. Clin Infect Dis. 1999; 29(4): 836-9.

29. Colebunders R, Verstraeten T, Van Gompel A, et al. Acute Schistosomiasis in Travelers Returning From Mali. J

Travel Med. 1995; 2(4): 235-238.

30. Jauréguiberry S, Perez L, Paris L, et al. Bilharzioses invasives. Presse Med. 2005; 34(21): 1641-5.

31. Grandiere-Perez L, Ansart S, Paris L, et al. Efficacy of praziquantel during the incubation and invasive phase of

Schistosoma haematobium schistosomiasis in 18 travelers. Am J Trop Med Hyg. 2006; 74(5): 814-8.

32. Cantiniaux S, Serratrice J, De Roux-Serratrice C, et al. Une fièvre collective: la fièvre des safaris. Rev Med

Interne. 2004; 25(12): 931-3.

33. Elcuaz R, Armas M, Ramirez M, et al. Brote de esquistosomiasis en un grupo de viajeros procedentes de

Burkina Fasso. Enferm Infecc Microbiol Clin. 1998; 16(8): 367-9.

34. Meltzer E, Artom G, Marva E, et al. Schistosomiasis among travelers: new aspects of an old disease. Emerg

Infect Dis. 2006; 12(11): 1696-700.

35. Jelinek T, Nothdurft HD, Loscher T. Schistosomiasis in Travelers and Expatriates. J Travel Med. 1996; 3(3):

160-164.

36. Joubert JJ, Evans AC, Schutte CH. Schistosomiasis in Africa and international travel. J Travel Med. 2001; 8(2):

92-9.

37. Gryseels B, Polman K, Clerinx J, et al. Human schistosomiasis. Lancet. 2006; 368(9541): 1106-18.

38. Blanchard TJ. Schistosomiasis. Travel Med Infect Dis. 2004; 2(1): 5-11.

39. Barbosa CS, Domingues AL, Abath F, et al. Epidemia de esquistossomose aguda na praia de Porto de Galinhas,

Pernambuco, Brasil. Cad Saude Publica. 2001; 17(3): 725-8.

40. de Jesus AR, Silva A, Santana LB, et al. Clinical and immunologic evaluation of 31 patients with acute

schistosomiasis mansoni. J Infect Dis. 2002; 185(1): 98-105.

82

41. De Clercq D, Rollinson D, Diarra A, et al. Schistosomiasis in Dogon country, Mali: identification and

prevalence of the species responsible for infection in the local community. Trans R Soc Trop Med Hyg. 1994;

88(6): 653-6.

42. Corachan M. Schistosomiasis in Travelers. J Travel Med. 1995; 2(1): 1-3.

43. Ansart S, Perez L, Vergely O, et al. Illnesses in travelers returning from the tropics: a prospective study of 622

patients. J Travel Med. 2005; 12(6): 312-8.

44. Bottieau E, Clerinx J, de Vega MR, et al. Imported Katayama fever: clinical and biological features at

presentation and during treatment. J Infect. 2006; 52(5): 339-45.

45. Nozais JP, Bilharzioses, in Traité de Parasitologie Médicale Nozais, J.P., Datry, A., and Danis, M., éd. Editors.

1996, Pradel: Paris. p. 729-77.

46. ANOFEL, Enseignement de Parasitologie et Mycologie. 2ème édition. 2006, Association Française des

Enseignants de Parasitologie et Mycologie.

47. Ross AG, Bartley PB, Sleigh AC, et al. Schistosomiasis. N Engl J Med. 2002; 346(16): 1212-20.

48. Visser LG, Polderman AM, Stuiver PC. Outbreak of schistosomiasis among travelers returning from Mali, West

Africa. Clin Infect Dis. 1995; 20(2): 280-5.

49. Doherty JF, Moody AH, Wright SG. Katayama fever: an acute manifestation of schistosomiasis. Bmj. 1996;

313(7064): 1071-2.

50. Caumes E, Felder-Moinet S, Couzigou C, et al. Failure of an ointment based on IR3535 (ethyl

butylacetylaminopropionate) to prevent an outbreak of cercarial dermatitis during swimming races across Lake

Annecy, France. Ann Trop Med Parasitol. 2003; 97(2): 157-63.

51. Bethony JM, Quinnell RJ. Genetic epidemiology of human schistosomiasis in Brazil. Acta Trop. 2007.

52. Shorter D, Makone I, Elliott EJ. Fever and urticaria in an African refugee. J Paediatr Child Health. 2006;

42(11): 731-3.

53. Pittella JE. Neuroschistosomiasis. Brain Pathol. 1997; 7(1): 649-62.

54. Warren KS. The pathology, pathobiology and pathogenesis of schistosomiasis. Nature. 1978; 273(5664): 609-

12.

55. Lambertucci JR, Silva LC, do Amaral RS. Guidelines for the diagnosis and treatment of schistosomal

myeloradiculopathy. Rev Soc Bras Med Trop. 2007; 40(5): 574-81.

56. Kane CA, Most H. Schistosomiasis oh the central nervous system: experiences in World War II and a review of

the literature. Arch Neurol Psychiatr. 1948; 59: 141-83.

57. Most H, Kane CA, Lavietes PH, et al. Schistosomiasis japonica in American military personnel; clinical studies

of 600 cases during the first year after infection. Am J Trop Med Hyg. 1950; 30(2): 239-99.

58. Jauréguiberry S, Caumes E. Neurological involvement during Katayama syndrome. Lancet Infect Dis. 2008;

8(1): 9-10.

59. Jauréguiberry S, Manifestations neurologiques au cours des helminthiases invasives : à propos de 3 cas de

neurobilharziose, in Médecine. 2005, Rennes I. p. 63.

60. Clerinx J, van Gompel A, Lynen L, et al. Early neuroschistosomiasis complicating Katayama syndrome. Emerg

Infect Dis. 2006; 12(9): 1465-6.

83

61. Sarazin M, Caumes E, Cohen A, et al. Multiple microembolic borderzone brain infarctions and endomyocardial

fibrosis in idiopathic hypereosinophilic syndrome and in Schistosoma mansoni infestation. J Neurol Neurosurg

Psychiatry. 2004; 75(2): 305-7.

62. Van Gool T, Vetter H, Vervoort T, et al. Serodiagnosis of imported schistosomiasis by a combination of a

commercial indirect hemagglutination test with Schistosoma mansoni adult worm antigens and an enzyme-

linked immunosorbent assay with S. mansoni egg antigens. J Clin Microbiol. 2002; 40(9): 3432-7.

63. Capron A, Capron M, Riveau G. Vaccine development against schistosomiasis from concepts to clinical trials.

Br Med Bull. 2002; 62: 139-48.

64. Epelboin L, Klement E, Chemali N, et al. Neurocysticercose compliquant le traitement d'une cysticercose

cutanee chez un voyageur. Bull Soc Pathol Exot. 2004; 97(4): 250-2.

65. Utzinger J, N'Goran EK, N'Dri A, et al. Oral artemether for prevention of Schistosoma mansoni infection:

randomised controlled trial. Lancet. 2000; 355(9212): 1320-5.

66. Xiao SH, Booth M, Tanner M. The prophylactic effects of artemether against Schistosoma japonicum infections.

Parasitol Today. 2000; 16(3): 122-6.

67. Lavier G, Mémoires originaux. La pathologie des bilharzioses à Schistosoma hæmatobium et S. mansoni à la

lumière des travaux récents. , in Annales de médecine et de pharmacie coloniales, Nationale, I., éd. par. 1939:

Paris. p. 21.

68. Bertrand E, Renambot J, Dalger J, et al. Etude cardiologique systématique chez 37 malades bilharziens. Sem

Hop. 1978; 54(43-44): 1351-6.

69. Klotz F, Hovette P, Mbaye PS, et al. Les manifestations pulmonaires des schistosomiases. Rev Pneumol Clin.

1998; 54(6): 353-8.

70. Barbosa MM, Lamounier JA, Oliveira EC, et al. Pulmonary hypertension in schistosomiasis mansoni. Trans R

Soc Trop Med Hyg. 1996; 90(6): 663-5.

71. Lapa MS, Ferreira EV, Jardim C, et al. Caracteristicas clinicas dos pacientes com hipertensão pulmonar em dois

centros de referencia em São Paulo. Rev Assoc Med Bras. 2006; 52(3): 139-43.

72. Bertrand E, Barabe P, Carrie J, et al. Le coeur bilharzien a Abidjan. Arch Mal Coeur Vaiss. 1971; 64(5): 727-41.

73. Girgis B. Pulmonary heart disease due to Bilharzia; the bilharzial cor pulmonale a clinical study of twenty cases.

Am Heart J. 1952; 43(4): 606-14.

74. Shaw AFB, Ghareeb AA. The pathogenesis of pulmonary schistosomiasis in Egypt with special reference to

Ayerza disease. Joumal of Pathology and Bacteriology. 1938; 46: 401-24.

75. Bertrand E, Dalger J, Ramiara JP, et al. Coeur et bilharziose. Med Trop (Mars). 1978; 38(1): 19-26.

76. Ramanampamonjy RM, Razafimahefa SH, Rajaonarivelo P, et al. Hypertension porto-pulmonaire d'origine

bilharzienne chez deux patients malgaches. Bull Soc Pathol Exot. 2007; 100(1): 28-9.

77. Bertrand E, Barabe P. Les cardiopathies des bilharzioses. Incidence réelle à Abidjan. Presse Med. 1970; 78(54):

2426-8.

78. Cheever AW, Kamel IA, Elwi AM, et al. Schistosoma mansoni and S. haematobium infections in Egypt. III.

Extrahepatic pathology. Am J Trop Med Hyg. 1978; 27(1 Pt 1): 55-75.

79. Bertrand E. Les cardiomyopathies en region tropicale. Ann Cardiol Angeiol (Paris). 1986; 35(6): 305-10.

84

80. Gelfand M, Alves W, Woods RW. The frequency of schistosomal ovideposition in the heart. Trans R Soc Trop

Med Hyg. 1959; 53(3): 282-4.

81. Victor EG, Lira V, Arruda A, et al. Granulomas cardiacos a ovos de schistosoma e fibrose endomiocardica. Arq

Bras Cardiol. 1996; 67(4): 259-61.

82. Al-Zahawi S, Shukri N. Histopathology of fatal myocarditis due to ectopic schistosomiasis. Trans R Soc Trop

Med Hyg. 1956; 50(2): 166-8.

83. Bertrand E, Dalger J, Renabot J, et al. Les signes cardiaques dans la bilharziose en dehors de toute hypertension

artérielle pulmonaire. Arch Mal Coeur Vaiss. 1978; 71(6): 676-80.

84. de Lorbeau BM, Petit G. L'électrocardiogramme au cours de la bilharziose à Schistosoma mansoni. Arch Mal

Coeur Vaiss. 1978; 71(1): 95-103.

85. Charles D, Burdin J, Ekra A, et al. Les signes cardiaques au cours de la bilharziose. Med Trop (Mars). 1980;

40(3): 271-9.

86. Touze JE, Prigent D, Imbert P, et al. Le coeur et l'éosinophile. Sem Hôp Paris. 1987; 63(23): 1906-8.

87. Touze JE, Charles D, Prigent D, et al. L'endocardite pariétale fibroplastique. Med Trop (Mars). 1987; 47(2):

197-9.

88. Aubry P, Cardiopathies sous les tropiques. Actualités 2007. , Indien., D.d.m.t.d.p.d.l.O., Editor. 2007.

89. Davies JN, Ball JD. The pathology of endomyocardial fibrosis in Uganda. Br Heart J. 1955; 17(3): 337-59.

90. Touze JE, Fourcade L, Heno P, et al. Le coeur et l'éosinophile. Med Trop (Mars). 1998; 58(4 Suppl): 459-64.

91. Rashwan MA, Ayman M, Ashour S, et al. Endomyocardial fibrosis in Egypt: an illustrated review. Br Heart J.

1995; 73(3): 284-9.

92. Fourcade L, Heno P, Nguyen Hy Thuy G, et al. La myocardite aiguë à éosinophiles: une urgence diagnostique et

thérapeutique. Med Trop (Mars). 1998; 58(4 Suppl): 465-70.

93. Barbosa MM, Lamounier JA, Oliveira EC, et al. Short report: endomyocardial fibrosis and cardiomyopathy in

an area endemic for schistosomiasis. Am J Trop Med Hyg. 1998; 58(1): 26-7.

94. Boccara F, Cohen A, Myocardites, in Coeur et médecine interne Cohen, A. and Belmatoug, N., éd. Editors.

2002, Estem: Paris. p. 855-873.

95. Kirchhoff LV, Weiss LM, Wittner M, et al. Parasitic diseases of the heart. Front Biosci. 2004; 9: 706-23.

96. Wesslen L, Pahlson C, Lindquist O, et al. An increase in sudden unexpected cardiac deaths among young

Swedish orienteers during 1979-1992. Eur Heart J. 1996; 17(6): 902-10.

97. McCaffrey FM, Braden DS, Strong WB. Sudden cardiac death in young athletes. A review. Am J Dis Child.

1991; 145(2): 177-83.

98. Phillips M, Robinowitz M, Higgins JR, et al. Sudden cardiac death in Air Force recruits. A 20-year review.

Jama. 1986; 256(19): 2696-9.

99. Drory Y, Turetz Y, Hiss Y, et al. Sudden unexpected death in persons less than 40 years of age. Am J Cardiol.

1991; 68(13): 1388-92.

100. Ellis CR, Di Salvo T. Myocarditis: basic and clinical aspects. Cardiol Rev. 2007; 15(4): 170-7.

101. Feldman AM, McNamara D. Myocarditis. N Engl J Med. 2000; 343(19): 1388-98.

85

102. Roongsritong C, Warraich I, Bradley C. Common causes of troponin elevations in the absence of acute

myocardial infarction: incidence and clinical significance. Chest. 2004; 125(5): 1877-84.

103. Jeremias A, Gibson CM. Narrative review: alternative causes for elevated cardiac troponin levels when acute

coronary syndromes are excluded. Ann Intern Med. 2005; 142(9): 786-91.

104. Magnani JW, Dec GW. Myocarditis: current trends in diagnosis and treatment. Circulation. 2006; 113(6): 876-

90.

105. Skouri HN, Dec GW, Friedrich MG, et al. Noninvasive imaging in myocarditis. J Am Coll Cardiol. 2006;

48(10): 2085-93.

106. Laissy JP, Hyafil F, Feldman LJ, et al. Differentiating acute myocardial infarction from myocarditis: diagnostic

value of early- and delayed-perfusion cardiac MR imaging. Radiology. 2005; 237(1): 75-82.

107. Mahrholdt H, Goedecke C, Wagner A, et al. Cardiovascular magnetic resonance assessment of human

myocarditis: a comparison to histology and molecular pathology. Circulation. 2004; 109(10): 1250-8.

108. Dambrin G, Laissy JP, Serfaty JM, et al. Diagnostic value of ECG-gated multidetector computed tomography in

the early phase of suspected acute myocarditis. A preliminary comparative study with cardiac MRI. Eur Radiol.

2007; 17(2): 331-8.

109. Dambrin G, Wartski M, Toussaint M, et al. Anomalies de la prise de contraste myocardique mises en évidence

par le scanner cardiaque multicoupes au cours de myocardites aiguës. A propos de 2 cas. Arch Mal Coeur Vaiss.

2004; 97(10): 1031-4.

110. Corachan M, Ruiz L, Valls ME, et al. Schistosomiasis and the Dogon country (Mali). Am J Trop Med Hyg.

1992; 47(1): 6-9.

111. Ginsberg F, Parrillo JE. Eosinophilic myocarditis. Heart Fail Clin. 2005; 1(3): 419-29.

112. Weller PF, Bubley GJ. The idiopathic hypereosinophilic syndrome. Blood. 1994; 83(10): 2759-79.

113. French AJ, Weller CV. Interstitial myocarditis following the clinical and experimental use of sulphonamide

drugs. . Am J Pathol. 1942; 18: 109-21.

114. Fenoglio JJ, Jr., McAllister HA, Jr., Mullick FG. Drug related myocarditis. I. Hypersensitivity myocarditis. Hum

Pathol. 1981; 12(10): 900-7.

115. Burke AP, Saenger J, Mullick F, et al. Hypersensitivity myocarditis. Arch Pathol Lab Med. 1991; 115(8): 764-9.

116. Fourcade L, Heno P, Paule P, et al. Myocardite aiguë et pneumopathie à éosinophiles: évolution favorable après

traitement médical et suivi à long terme. A propos d'un cas. Arch Mal Coeur Vaiss. 2004; 97(1): 61-6.

117. Herzog CA, Snover DC, Staley NA. Acute necrotising eosinophilic myocarditis. Br Heart J. 1984; 52(3): 343-8.

118. Bilinska ZT, Bilinska M, Grzybowski J, et al. Unexpected eosinophilic myocarditis in a young woman with

rapidly progressive dilated cardiomyopathy. Int J Cardiol. 2002; 86(2-3): 295-7.

119. Aissi K, Rossi P, Le TB, et al. Myocardite nécrosante révélant une leucémie aiguë lymphoblastique

hyperéosinophilique. Rev Med Interne. 2006; 27(11): 869-73.

120. Assa'ad AH, Spicer RL, Nelson DP, et al. Hypereosinophilic syndromes. Chem Immunol. 2000; 76: 208-29.

121. Corradi D, Vaglio A, Maestri R, et al. Eosinophilic myocarditis in a patient with idiopathic hypereosinophilic

syndrome: insights into mechanisms of myocardial cell death. Hum Pathol. 2004; 35(9): 1160-3.

86

122. Bletry O, Scheuble C, Cereze P, et al. Manifestations cardiaques du syndrome hypereosinophilique. Interet de

l'echographie bidimensionnelle (12 observations). Arch Mal Coeur Vaiss. 1984; 77(6): 633-41.

123. Morimoto S, Kubo N, Hiramitsu S, et al. Changes in the peripheral eosinophil count in patients with acute

eosinophilic myocarditis. Heart Vessels. 2003; 18(4): 193-6.

124. Ponvert C, Jacquier JP. Mécanismes de la réaction allergique du type immédiat : les connaissances

indispensables. Rev Fr Allergol. 2003; 43(5): 327-9.

125. Capron M, Capron A. Effector functions of eosinophils in schistosomiasis. Mem Inst Oswaldo Cruz. 1992; 87

Suppl 4: 167-70.

126. Sturrock RF, Kimani R, Cottrell BJ, et al. Observations on possible immunity to reinfection among Kenyan

schoolchildren after treatment for Schistosoma mansoni. Trans R Soc Trop Med Hyg. 1983; 77(3): 363-71.

127. Hagan P, Wilkins HA, Blumenthal UJ, et al. Eosinophilia and resistance to Schistosoma haematobium in man.

Parasite Immunol. 1985; 7(6): 625-32.

128. Klion AD, Nutman TB. The role of eosinophils in host defense against helminth parasites. J Allergy Clin

Immunol. 2004; 113(1): 30-7.

129. Janin A. Eosinophilic myocarditis and fibrosis. Hum Pathol. 2005; 36(5): 592-3; 593.

130. Arima M, Kanoh T. Eosinophilic myocarditis associated with dense deposits of eosinophil cationic protein

(ECP) in endomyocardium with high serum ECP. Heart. 1999; 81(6): 669-71.

131. Arima M, Kanoh T, Kawano Y, et al. Serum levels of eosinophil cationic protein in patients with eosinophilic

myocarditis. Int J Cardiol. 2002; 84(1): 97-9.

132. Olsen EG, Spry CJ. Relation between eosinophilia and endomyocardial disease. Prog Cardiovasc Dis. 1985;

27(4): 241-54.

133. deMello DE, Liapis H, Jureidini S, et al. Cardiac localization of eosinophil-granule major basic protein in acute

necrotizing myocarditis. N Engl J Med. 1990; 323(22): 1542-5.

134. Freers J, Amandua J, Mugerwa R. Endomyocardial fibrosis and eosinophilia. Lancet. 1993; 342(8881): 1233.

135. Capron A, Dessaint JP, Capron M, et al. Vaccine strategies against schistosomiasis. Mem Inst Oswaldo Cruz.

1992; 87 Suppl 5: 1-9.

136. Tincani A, Rebaioli CB, Taglietti M, et al. Heart involvement in systemic lupus erythematosus, anti-

phospholipid syndrome and neonatal lupus. Rheumatology (Oxford). 2006; 45 Suppl 4: iv8-13.

137. Ozeretskovskaia NN. The organ pathology in the acute stage of tissue helminthiases: the role of eosinophilia of

the blood and tissues, blood immunoglobulins E and G4 and immune response-inducing factors. Med Parazitol

(Mosk). 2000(3): 3-8.

138. Franco-Paredes C, Rouphael N, Mendez J, et al. Cardiac manifestations of parasitic infections part 1: overview

and immunopathogenesis. Clin Cardiol. 2007; 30(4): 195-9.

139. Franco-Paredes C, Rouphael N, Mendez J, et al. Cardiac manifestations of parasitic infections. Part 2: Parasitic

myocardial disease. Clin Cardiol. 2007; 30(5): 218-22.

140. Franco-Paredes C, Rouphael N, Mendez J, et al. Cardiac manifestations of parasitic infections part 3: pericardial

and miscellaneous cardiopulmonary manifestations. Clin Cardiol. 2007; 30(6): 277-80.

87

141. Bouchaud O, Atteintes cardiaques des parasitoses, in Coeur et médecine interne Cohen, A. and Belmatoug, N.,

éd. Editors. 2002, Estem: Paris. p. 1873-80.

142. Gaillard T, Martinaud C, Kerebel S, et al. A propos de deux cas de trichinellose à Trichinella britovi. Ann Biol

Clin (Paris). 2007; 65(3): 308-12.

143. Puljiz I, Beus A, Kuzman I, et al. Electrocardiographic changes and myocarditis in trichinellosis: a retrospective

study of 154 patients. Ann Trop Med Parasitol. 2005; 99(4): 403-11.

144. Siwak E, Dron D, Pancewicz S, et al. Changes in ECG examination of patients with trichinosis. Wiad Lek. 1994;

47(13-14): 499-502.

145. Kerebel S, Paule P, Jego C, et al. Myocardite aTrichinella spiralis : à propos d'un cas. Ann Cardiol Angeiol

(Paris). 2007.

146. Lachkar S, Abboud P, Gargala G, et al. Myocardite asymptomatique au cours d'un cas de trichinellose : intérêt

du dosage de la troponine. Rev Med Interne. 2008; 29(3): 246-248.

147. Abe K, Shimokawa H, Kubota T, et al. Myocarditis associated with visceral larva migrans due to Toxocara

canis. Intern Med. 2002; 41(9): 706-8.

148. Schaffer SW, Dimayuga ER, Kayes SG. Development and characterization of a model of eosinophil-mediated

cardiomyopathy in rats infected with Toxocara canis. Am J Physiol. 1992; 262(5 Pt 2): H1428-34.

149. Altcheh J, Nallar M, Conca M, et al. Toxocariasis: aspectos clinicos y de laboratorio en 54 pacientes. An Pediatr

(Barc). 2003; 58(5): 425-31.

150. Prunier F, Delepine S, Victor J, et al. Endocardite fibroblastique de Löffler. A propos d'un cas compliquant une

toxocarose. Arch Mal Coeur Vaiss. 2001; 94(3): 226-30.

151. Potter A, Stephens D, De Keulenaer B. Strongyloides hyper-infection: a case for awareness. Ann Trop Med

Parasitol. 2003; 97(8): 855-60.

152. Lessnau KD, Can S, Talavera W. Disseminated Strongyloides stercoralis in human immunodeficiency virus-

infected patients. Treatment failure and a review of the literature. Chest. 1993; 104(1): 119-22.

153. Andy JJ, Bishara FF, Soyinka OO, et al. Loasis as a possible trigger of African endomyocardial fibrosis: a case

report from Nigeria. Acta Trop. 1981; 38(2): 179-86.

154. Potier JC, Khayat A, Foucault JP. Distomatose et cardiopathie. A propos de deux nouvelles observations. Essais

de classification et hypothèses pathogèniques. Arch Mal Coeur Vaiss. 1978; 71(11): 1299-1306.

155. Potier JC, Grollier G, Khayat A, et al. Distomatose et fibrose endomyocardique. Nouv Presse Med. 1982;

11(43): 3209.

156. Krylov GG. Cardiac syndrome in opisthorchiasis. Med Parazitol (Mosk). 2004(3): 27-9.

88

RÉSUMÉ La bilharziose est une parasitose d’importance majeure à l’échelle mondiale. Sa forme chronique concerne surtout

les pays non industrialisés, principalement d’Afrique. La bilharziose invasive survient environ 6 semaines après un

contact avec une eau contaminée. Sauf en Asie, elle se rencontre rarement chez les populations autochtones qui

subissent une exposition chronique. Elle est surtout décrite chez les voyageurs « occidentaux » en Afrique, et est

accompagnée d’une symptomatologie de type allergique, le plus souvent bénigne.

Nous décrivons ici deux cas de myocardite aiguë au cours de bilharzioses invasives chez des touristes français au

retour du Mali. Si l’un des cas a été révélé par une douleur thoracique et l’autre était asymptomatique, c’est le dosage

de la troponine et l’ECG qui ont permis d’orienter le diagnostic. Ces patients ont alors bénéficié d’une prise en

charge diagnostique spécifique et un traitement par corticothérapie. La physiopathologie de cette atteinte est

probablement immuno-allergique, par le biais d’une toxicité des éosinophiles. L’hyperéosinophilie réactionnelle à la

phase invasive de l’helminthiase serait à l’origine d’une myocardite d’hypersensibilité à éosinophiles, rattachable

aux cardiopathies des hyperéosinophilies prolongées de la bilharziose chronique : endocardite pariétale

fibroblastique de Loëffler et fibrose endomyocardique de Davies. À l’instar de la myocardite aiguë rencontrée au

cours d’autres helminthiases comme la trichinellose, un dosage de la troponine et un ECG devraient être réalisés

systématiquement en cas de schistosomose aiguë, pour prévenir des complications potentiellement graves d’une

myocardite aiguë.

MOTS-CLÉS : Schistosomose, Myocardite, Éosinophilie, Fibroélastose endocardique,

Voyages -- Aspect médical.

Schistosomiasis is a parasitic disease of major importance on a worldwide scale. Its chronic form relates to especially

the non-industrialized countries that are mainly in Africa. Acute schistosomiasis occurs approximately 6 weeks after

contact with contaminated water. Except in Asia, it is seldom contracted by the local population who undergo a

chronic exposure to the disease. It is especially found in travellers from non endemic areas in Africa, and is generally

revealed by allergic and usually benign features.

We report here two cases of acute myocarditis during acute schistosomiasis in French tourists returning from Mali,

West Africa. In both cases, troponin elevation and ECG abnormalities led to the diagnosis. Then, specific myocardial

imaging was performed and appropriated management was obtained with admission to the Cardiologic Intensive

Care Unit, and corticosteroids treatment. The physiopathologic mechanisms of these severe manifestations probably

have an immuno-allergic origin, due to eosinophils toxicity. Hypersensitivity phenomenon during invasive phase of

helminthiasis could be the cause of eosinophil-mediated myocarditis and thus, reliable to the known chronic

eosinophilic heart diseases induced by chronic schistosomiasis: Loeffler fibroblastic endocarditis and Davies

endomyocardial fibrosis. According to the example of acute myocarditis experienced during hypersensitivity

myocarditis or acute trichinellosis, troponin measurement and an ECG should be systematically performed in case of

acute schistosomiasis. It should prevent potential serious complications such as acute heart failure, acute necrotizing

myocarditis and sudden death.