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Partie II Les bases de la nutrition

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Partie IILes bases de la nutrition

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On dit souvent “On est ce que l’onmange”, voulant dire par là que la com-position de notre corps dépend dans unelarge mesure de ce que nous consom-mons. Les nombreux composants chi-miques du corps humain existent princi-palement sous forme d’eau, de pro-téines, de graisses, de sels minéraux etde glucides dans les proportions présen-tées au tableau 8. Tout corps humain estconstruit à partir d’aliments contenantces cinq éléments, ainsi que des vita-mines.

L’alimentation sert surtout à la crois-sance, à la fourniture d’énergie, et à lacicatrisation, l’entretien et la protectiondu corps. La nourriture est aussi unesource de plaisir et de stimulationpuisque manger et boire font partie desplaisirs de la vie dans le monde entier.Les aliments nourrissent l’âme et lecorps. Même si les techniques actuellesparvenaient à mettre au point un régimeparfait en termes de composition, il luimanquerait toujours la saveur d’uncurry ou le goût d’un café brûlant.

On ne connaît pas encore parfaitementles mécanismes de l’appétit et de la sen-sation de faim. L’hypothalamus y joueun rôle, de même que d’autres élémentsdu système nerveux central. D’autresfacteurs interviennent probablement,tels que le taux de sucre dans le sang,différentes hormones, la masse grasse,de nombreuses maladies, les émotions,et, évidemment, les types d’aliments dis-ponibles, les goûts personnels et enfin lecontexte social dans lequel les repas sontconsommés.

LES ÉLÉMENTS ET LES FONCTIONS DES ALIMENTS

Le tableau 9 présente une classificationsimplifiée des constituants des aliments.

L’être humain consomme des alimentset non des éléments nutritifs isolés. Lamajorité des aliments, dont des denréesde base comme le riz, le maïs et le blé,fournissent principalement des glucides,sources d’énergie, mais aussi des quanti-tés non négligeables de protéines, un peude lipides et d’autres nutriments utiles.Les céréales fournissent une partie deséléments nécessaires à l’énergie, à lacroissance et à la cicatrisation, et à l’en-tretien de l’organisme. Le lait maternelprocure la totalité des macro et micronu-triments nécessaires au nourrisson jus-qu’à six mois. Le lait de vache contient,lui, tous les éléments nécessaires auveau.

L’eauOn peut considérer l’eau comme l’élémentprimordial. L’homme peut survivre sansmanger pendant 20 à 40 jours, mais sanseau, il meurt en quatre à sept jours. L’eauconstitue plus de 60 pour cent du poids ducorps, dont 61 pour cent intracellulaire etle reste extracellulaire. L’eau provient, saufcirconstances particulières comme une ali-mentation parentérale, des aliments et desboissons que nous consommons. La quan-tité d’eau ingérée varie considérablementd’un individu à l’autre et dépend de nom-breux facteurs, dont le climat et la culture.Les aliments solides peuvent fournir jus-qu’à un litre et les boissons en apportent 1à 3 litres. L’eau provient aussi, mais pour

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Chapitre 8

Composition du corps humain, fonctions des aliments, métabolisme et énergie

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moins de 10 pour cent habituellement, del’oxydation de macronutriments à l’inté-rieur du corps.

L’eau est éliminée principalement sousforme d’urine par les reins. Les reins régu-lent l’élimination de façon à maintenir unéquilibre; si l’apport de boissons diminue,les reins concentrent l’urine pour enexcréter moins. En climat chaud, la quan-tité d’eau éliminée par la sueur et la respi-

ration peut être équivalente ou mêmesupérieure à celle éliminée par les reins.Enfin, une quantité bien plus faible est éli-minée dans les selles, sauf en cas de diar-rhée, où cette quantité peut devenir trèsimportante.

L’eau corporelle conditionne le métabo-lisme du sodium et du potassium, appelésélectrolytes. Le sodium est surtout dans lesliquides extracellulaires, alors que lepotassium est surtout intracellulaire.L’alimentation apporte habituellement desquantités suffisantes de ces électrolytes.Mais, en cas de perte liquidienne, par diar-rhée ou hémorragie, l’équilibre sanguinpeut être perturbé. L’apport d’eau etl’équilibre électrolytique sont particulière-ment importants chez le nourrisson mala-de. Chez un nourrisson en bonne santé, lelait d’une mère en bonne santé apportesuffisamment d’eau et d’électrolytes pen-dant six mois et l’enfant n’a pas besoin desuppléments d’eau, même en pays chaud.Par contre, en cas de diarrhée ou d’autresmaladies, l’enfant a besoin de boissonssupplémentaires.

Alors que l’apport alimentaire est régulépar l’appétit et la disponibilité des ali-ments, l’apport de liquides dépend de lasensation de soif, qui a plusieurs origines.En cas de déshydratation, la soif est due àla sécheresse de la bouche mais aussi à dessignaux du même centre de satiété hypo-thalamique que celui qui contrôle la faim.Le chapitre 37 s’étend davantage sur ladéshydratation, élément majeur de la diar-rhée.

La rétention d’eau dans l’organisme,appelée œdème, est due à un excès deliquide extracellulaire. Deux maladies decarence comportent des œdèmes majeurs:le kwashiorkor (voir chapitre 12) et le béri-béri humide (voir chapitre 16). Cet excèsde liquide est lié à des perturbations élec-trolytiques et à une rétention d’eau dans lesecteur intracellulaire exclusivement. Cequi signifie qu’une personne peut avoir

92 Composition du corps humain, fonctions des aliments, métabolisme et énergie

TABLEAU 8

Composition chimique du corps humain(sujet de 65 kg)

Elément Pourcentage du poids du corps

Eau 61,6

Protéines 17

Lipides 13,8

Sels minéraux 6,1

Glucides 1,5

TABLEAU 9

Classification simple des constituants alimentaires

Elément Rôle

Eau Fournit les liquides du corps et contribue â la régulation thermique

Glucides Energie servant au travail et aumaintien de la température

Lipides Energie et acides gras essentiels

Protéines Croissance et cicatrisation

Minéraux Formation des tissus, métabolisme et protection

Vitamines Métabolisme et protection

Eléments non digestibles et non absorbables dont fibres

Véhicule pour d’autresnutriments, volume, habitat de la flore bactérienne, contribue à une bonne élimination des déchets

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des œdèmes et une déshydratation pardiarrhée en même temps. Cela peut entraî-ner une défaillance cardiaque. L’eau peutaussi s’accumuler dans la cavité péritonéa-le à cause d’une affection hépatique; onappelle cet œdème une ascite.

COMPOSITION DU CORPS HUMAINOn divise souvent le corps humain en troiscompartiments, dont voici les proportionsrespectives chez un adulte bien portant desexe masculin:

• Masse cellulaire, 55 pour cent;• Tissu de soutien extracellulaire,

30 pour cent;• Masse grasse, 15 pour cent.La masse cellulaire est constituée de

muscles, d’organes (cerveau, foie, intes-tins) et de sang. Elle est impliquée dans lemétabolisme, les différentes fonctions ducorps, le travail, etc.

Le tissu de soutien extracellulaire com-prend les liquides extracellulaires (commele plasma sanguin qui sert de soutien auxcellules sanguines) et le squelette et autresstructures de soutien.

La masse grasse se trouve presque entiè-rement sous la peau (graisse sous-cutanée)et autour d’organes comme les intestins etle cœur. Elle sert notamment d’énergie deréserve. On en trouve une petite quantitédans la paroi des cellules et des nerfs.

Les physiologistes ont mis au point plu-sieurs méthodes d’estimation de la com-position du corps, notamment de lamasse liquidienne et de la densité. Onestime souvent la masse maigre de l’orga-nisme. Ces mesures sont de difficultévariable, et les plus simples sont lesmoins précises. Les mesures du poids, dela taille, de l’épaisseur du pli cutané etder circonférences du corps sont relative-ment faciles à mettre en œuvre et très bonmarché et procurent une estimationapproximative de la masse maigre et de lacomposition du corps. Par contre, lesméthodes qui ont recours à l’impédance-

métrie, à la tomodensitométrie et à larésonance magnétique nucléaire sontonéreuses et nécessitent un personnelentraîné.

Le liquide intracellulaire contient surtoutdes ions potassium alors que le liquideextracellulaire contient du chlorure desodium, parmi d’autres ions bien sûr. L’eautotale peut être estimée par différentesméthodes, dont les techniques de dilutionqui mesurent le volume plasmatique.

On peut recourir à différentesméthodes pour la masse grasse. Commela graisse est surtout sous-cutanée, onpeut mesurer l’épaisseur du pli cutané al’aide d’un compas en différents points(voir chapitre 33). On peut aussi peser lapersonne normalement puis sous l’eauavec un appareil spécial. Cette dernièreméthode donne une bonne estimation dela densité.

Toutes ces méthodes sont décrites endétail dans des manuels de physiologieou de nutrition (voir bibliographie).

La composition du corps est largementinfluencée par l’alimentation. L’amaigris-sement du marasme (voir chapitre 12) et del’inanition (voir chapitre 24) d’une part, et lasurcharge pondérale de l’obésité (voir cha-pitre 23) en constituent deux exemplesextrêmes. Elle varie aussi avec le sexe etlégèrement avec la race. Aux Etats-Unis, ona montré par exemple que les Noirs avaientdes squelettes plus lourds que les Blancs àtaille égale. Enfin, la composition du corpsvarie avec la grossesse et l’allaitement.

Chez l’enfant, elle dépend bien sûr del’âge et de la croissance. Des carencesnutritionnelles perturbent la croissance etaltèrent la composition du corps, la tailled’ensemble et même la taille des organes.

MÉTABOLISME ET ÉNERGIELe terme de métabolisme recouvre tous lesprocessus chimiques effectués par les cel-lules du corps. Le processus le plus impor-tant est l’oxydation ou combustion des ali-

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ments qui fournit de l’énergie. Il est simi-laire au principe du moteur de voiture quibrûle de l’essence pour faire avancer levéhicule. En général, toute combustion,humaine ou automobile, produit de la cha-leur en plus de l’énergie.

Les physiciens avaient coutume de direque l’énergie ne pouvait être ni créée nidétruite. Bien que cela ne soit pas tout àfait exact (comme le montre la conversionde matière en énergie dans un réacteurnucléaire), cette affirmation reste valabledans la plupart des cas. Les trois macronu-triments – glucides, protides et lipides –produisent de l’énergie. L’énergie utiliséepar l’organisme provient de l’alimentationet, en cas de jeûne, n’est produite que parla consommation de ses propres tissus.

Toutes les formes d’énergie peuvent êtreconverties en chaleur. On peut mesurer lachaleur produite par la combustion d’unlitre d’essence par exemple. De la mêmefaçon, on mesure l’énergie produite par lacombustion des aliments et on l’exprimeen énergie calorifique. L’unité de mesureest la kilocalorie (kcal) égale à 1 000 fois lacalorie utilisée en physique. Mais on tendà la remplacer par le joule (J) ou le kilojou-le (kJ). Une kilocalorie est la chaleur néces-saire pour faire passer un litre d’eau de14,5 à 15,5 degrés Celsius. Alors que lacalorie est une unité de chaleur, le joule estune véritable unité d’énergie: c’est l’éner-gie dégagée par le déplacement d’un poidsd’un kg sur une distance d’un mètre parune force d’un Newton. En nutrition, onutilise le kilojoule: 1 kcal correspond à4,184 kJ. Ces unités mesurent l’énergie,tout comme les litres mesurent une quan-tité et les mètres, une longueur. Dans lesjournaux scientifiques, les kJ tendent àremplacer les kcal (voir table de conver-sion à l’annexe 5), mais le grand public etla plupart des professionnels de santécontinuent à préférer les kcal; c’est pour-quoi nous utiliserons cette unité dans cemanuel.

Le corps a besoin d’énergie pour assurertoutes ses fonctions, notamment le travail,le maintien de la température corporelle etle fonctionnement continu du cœur et despoumons. Chez l’enfant, l’énergie estindispensable à la croissance. Elle est aussinécessaire à la destruction, à la réparationet au renouvellement des tissus. Ce sontdes processus métaboliques, et on appellemétabolisme de base (MB) le rythmeauquel ces fonctions s’effectuent.

Métabolisme de baseLe métabolisme de base (MB) d’un sujetcorrespond à l’énergie en kcal ou méga-joules (MJ) qu’il consomme en une journéealors qu’il est au repos complet à la foisphysique (en position couchée) et mental.On peut aussi l’exprimer en kcal par heureou par kg de poids. Cette énergie sert aumaintien de la température, au travail desorganes comme les battements cardiaquesou les muscles respiratoires ainsi qu’aufonctionnement du foie, des reins et ducerveau.

Le MB varie d’un individu à l’autre enfonction de son poids, de son sexe, de sonâge et de son état de santé. La compositiondu corps joue aussi un rôle, notamment laproportion de muscles et de graisse, doncde protéines et de lipides. En simplifiant,une personne de forte corpulence, muscléeet ayant des organes plus gros aura un MBplus élevé qu’une personne menue. Le MBdiminue avec l’âge et est plus faible chezles femmes, rapporté au poids. Il existebien sûr des exceptions à ces règles géné-rales.

Le MB joue un rôle majeur dans lesbesoins énergétiques. Le tableau 10 pré-sente le MB d’hommes et de femmesadultes en fonction de leurs poids et taille,en consommation totale d’énergie par jouret rapporté au kg de poids. Chez unefemme de 30 à 60 ans, le MB va de 1 190 à1 420 kcal par jour. C’est l’énergie consom-mée par le corps au repos complet. Dans

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les pays en développement, beaucoup defemmes sont plus petites que 1,40 m etpèsent moins de 41 kg, leur MB peut doncêtre un peu plus faible que 1 190 kcal.

Besoins en énergieLe tableau 11 présente les besoins énergé-tiques journaliers moyens d’hommes et defemmes adultes effectuant un travailconsidéré comme léger, modéré et dur,exprimés en multiples du MB. On voit parexemple qu’une femme faisant un travaildur a besoin de 1,82 fois son MB. Si elle a25 ans, mesure 1,40 m et pèse 41 kg, sonMB est de 1 100 kcal par jour, et ses besoinsénergétiques sont donc de 1 100 x 1,82, soit2 002 kcal par jour.

Il est souvent utile de mesurer les

besoins énergétiques correspondant à plu-sieurs activités effectuées pendant une cer-taine durée. On multiplie alors un facteurd’activité (qui varie selon l’activité) par leMB du sujet. Le tableau 12 présente cesdifférents facteurs permettant de calculerl’énergie approximative dépensée selonl’activité effectuée.

L’homme moyen ne dépense l’énergiecorrespondant à son métabolisme basalque lorsqu’il est au repos complet. Lesmoindres mouvements de la vie quoti-dienne requièrent une énergie supplémen-taire, et un travail physique encore plusbien sûr. Le tableau 13 présente lesdépenses d’un homme sain dont le MB estde 1 kcal par minute et qui effectue un tra-vail léger.

La nutrition dans les pays en développement 95

TABLEAU 10

Métabolisme basal chez l’homme et la femme adultes en fonction de leur taille et du poidsadmissible correspondant

Taille Poidsa 18-30 ans 30-60 ans Plus de 60 ans(m) (kg)

kcal (kJ)b/kg/j kcal (kJ)/j kcal (kJ)/kg/j kcal (kJ)/j kcal (kJ)/kg/j kcal (kJ)/j

Hommes1,5 49,5 29,0 (121) 1 440 (6,03) 29,4 (123) 1 450 (6,07) 23,3 (98) 1 150 (4,81)

1,6 56,5 27,4 (115) 1 540 (6,44) 27,2 (114) 1 530 (6,40) 22,2 (93) 1 250 (5,23)

1,7 63,5 26,0 (109) 1 650 (6,90) 25,4 (106) 1 620 (6,78) 21,2 (89) 1 350 (5,65)

1,8 71,5 24,8 (104) 1 770 (7,41) 23,9 (99) 1 710 (7,15) 20,3 (85) 1 450 (6,07)

1,9 79,5 23,9 (100) 1 890 (7,91) 22,7 (95) 1 800 (7,53) 19,6 (82) 1 560 (6,53)

2,0 88,0 23,0 (96) 2 030 (8,49) 21,6 (90) 1 900 (7,95) 19,0 (80) 1 670 (6,99)

Femmes1,4 41 26,7 (112) 1 100 (4,60) 28,8 (120) 1 190 (4,95) 25 (105) 1 030 (4,31)

1,5 47 25,2 (105) 1 190 (4,98) 26,3 (110) 1 240 (5,19) 23,1 (97) 1 090 (4,56)

1,6 54 23,9 (100) 1 290 (5,40) 24,1 (101) 1 300 (5,44) 21,6 (90) 1 160 (4,85)

1,7 61 22,9 (96) 1 390 (5,82) 22,4 (94) 1 360 (5,69) 20,3 (85) 1 230 (5,15)

1,8 68 22,0 (92) 1 500 (6,28) 20,9 (87) 1 420 (5,94) 19,3 (81) 1 310 (5,48)

Source: OMS, 1985.aPoids admissible correspondant; indice de masse corporelle = 22 chez l’homme et 21 chez la femme (voir chapitre 23).bLes kJ sont indiqués entre parenthèses.

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S’il s’agit, au lieu de huit heures debureau, de lourds travaux des champscomme le labour à la houe qui consomme8 kcal par minute, il faut se référer autableau 14.

Si le sujet du premier exemple consom-me exactement 2 640 kcal, son poids serastable et il travaillera normalement. Parcontre, s’il entreprend les activités del’exemple du tableau 14 sans augmenterson apport alimentaire, son poids va pro-gressivement diminuer car il devra brûlerses propres réserves d’énergie, c’est-à-direson organisme. Cependant, il serait rapide-ment amené à limiter son activité pourarrêter ce processus. Par exemple, il tra-vaillerait moins dur en labourant et nedépenserait plus que 3,2 kcal par minuteau lieu de 8. Il serait aussi plus fatigué enfin de journée et pourrait dormir plus long-temps en réduisant ses autres activités. Sesbesoins énergétiques redescendraient alorsà 2 646 kcal comme le montre le tableau 15.

Ce n’est là qu’un exemple. La plupart dutemps, lorsque les gens augmentent leurdépense d’énergie, ils ont davantage faimet accroissent leur consommation d’ali-ments de base comme le riz, le mil, le maïsou le manioc.

Les besoins énergétiques sont détermi-nés par plusieurs facteurs dont voici lesplus importants:

• La taille du corps. Une personnemenue a besoin de moins d’énergiequ’une personne de forte corpulence.

• Le MB. Le métabolisme de base estvariable et affecté par différents fac-teurs, notamment les problèmes thy-roïdiens

• L’activité. Plus le sujet effectue d’ef-forts physiques, qu’il s’agisse de tra-vail ou de loisirs, plus il a besoind’énergie.

• La grossesse. Une femme enceinte abesoin de plus d’énergie pour le déve-loppement du fœtus et à cause de saprise de poids.

96 Composition du corps humain, fonctions des aliments, métabolisme et énergie

TABLEAU 11

Besoins énergétiques journaliers moyens par catégorie d’activité, exprimés

en multiples du MB

Catégorie Homme Femmed’activité

Léger 1,55 1,56

Modéré 1,78 1,64

Dur 2,10 1,82

TABLEAU 12

Facteurs de calcul de l’énergie(à multiplier par le MB)

Activité Homme Femmeadulte adulte

Sommeil 1,0 1,0

Position couchée 1,2 1,2

Position assise 1,2 1,2

Position debout 1,5 1,5

Marche lente 2,8 2,8

Marche normale 3,2 3,3

Marche rapide en montée 7,5 6,6

Cuisine 1,8 1,8

Travail de bureau avec petits déplacements 1,6 1,7

Conduite d’un camion 1,4 1,4

Travail aux champs 5,2 4,4

Coupe de la canne à sucre 6,5 –

Traction d’une charrettechargée 5,9 –

Football 6,6 6,3

Corvée d’eau au puits – 4,1

Mouture de céréales – 4,6

Source: OMS, 1985.Note: Ces valeurs sont des moyennes approximatives quine s’appliquent qu’au temps réellement passé àtravailler, et non aux pauses. En effet, les personnes quiaccomplissent un travail très dur prennent fréquemmentun moment de repos.

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La nutrition dans les pays en développement 97

TABLEAU 13

Dépense énergétique d’une journée moyenne chez un homme en bonne santé

Activité Temps Dépense Calcul Dépense(heures) d’énergie totale

(kcal/min) (kcal)

Sommeil 8 1 (= MB) 8 x 60 x 1 480

Travail léger: garder un troupeau 8 2,5 8 x 60 x 2,5 1 200

Activités diverses et position assise 8 2 8 x 60 x 2 960

Total 24 2 640

TABLEAU 14

Dépense énergétique lorsque la même personne effectue trois heures de travail dur

Activité Temps Dépense Dépense(heures) d’énergie totale

(kcal/min) (kcal)

Sommeil 8 1 480

Travail léger: garder un troupeau 5 2,5 750

Travail dur: labour 3 8 1 440

Activités diverses et position assise 8 2 960

Total 24 3 630

TABLEAU 15

Dépense énergétique lorsque la même personne adapte son travail à une alimentation insuffisante

Activité Temps Dépense Dépense(heures) d’énergie totale

(kcal/min) (kcal)

Sommeil 10 1 600

Travail léger: garder un troupeau 5 2,5 750

Travail dur: labour 3 3,2 576

Activités diverses et position assise 6 2 720

Total 24 2 646

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• Allaitement. Une femme qui allaite abesoin d’énergie pour produire un laitde bonne qualité. La durée prolongéede l’allaitement dans de nombreuxpays d’Afrique et d’Asie expliquequ’une large proportion de femmes ades besoins énergétiques augmentés.

• L’âge. Les nourrissons et les enfantsont besoin de plus d’énergie pour leur

croissance et leur activité. Par contre,chez les personnes âgées, les besoinsdiminuent à cause d’une réduction del’activité et du MB.

• Le climat. Dans les pays chauds, c’est-à-dire la majorité des pays de la zonetropicale, il faut moins d’énergie pourmaintenir la température du corps quedans les climats froids.

98 Composition du corps humain, fonctions des aliments, métabolisme et énergie

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GLUCIDESLa principale source d’énergie de la plu-part des Africains, des Asiatiques et desSud-Américains est constituée de glucidesqui peuvent atteindre 80 pour cent de leurration. Dans les pays industrialisés, parcontre, les glucides ne constituent que 45 à50 pour cent de la ration quotidienne.

Les glucides sont composés de carbone,d’hydrogène et d’oxygène dans les pro-portions 6:12:6. Leur métabolisme produitde l’énergie et libère du dioxyde de carbo-ne (CO2) et de l’eau (H2O). Dans l’alimen-tation humaine, les glucides sont surtoutreprésentés par l’amidon et différentsautres sucres. On peut les diviser en troisgroupes:

• Les monosaccharides comme le gluco-se, le fructose et le galactose;

• Les disaccharides comme le saccharo-se (sucre de table), le lactose et le mal-tose;

• Les polysaccharides comme l’amidon,le glycogène et la cellulose.

MonosaccharidesLes glucides les plus simples sont lesmonosaccharides ou sucres simples. Ilstraversent la barrière intestinale sans êtremodifiés par les enzymes digestives. Lesplus courants sont le glucose, le fructose etle galactose.

Le glucose, appelé aussi dextrose, setrouve notamment dans les fruits, lespatates douces et les oignons. La majoritédes autres glucides, comme les disaccha-rides et l’amidon, sont convertis en gluco-se par les enzymes digestives. Le glucoseest oxydé pour produire de l’énergie et du

dioxyde de carbone qui est rejeté par larespiration.

Comme le glucose est le sucre présentdans le sang, c’est celui qu’on utilise leplus pour fournir de l’énergie en alimenta-tion intraveineuse. Il s’agit généralementde glucose dissous à 5 ou 10 pour centdans de l’eau stérile.

Le fructose se trouve dans le miel et lesfruits. Le galactose résulte de la digestiondu lactose, sucre du lait, qui se scinde engalactose et glucose.

DisaccharidesLes disaccharides, composés de deuxsucres simples, doivent être scindés enmonosaccharides avant de pouvoir êtreabsorbés par l’intestin. Ce sont le saccha-rose, le lactose et le maltose. Le sucrose ousaccharose est le nom du sucre de table(qui sert par exemple à sucrer le café). Il estextrait de la canne à sucre ou des bette-raves sucrières. On le trouve aussi dans lescarottes et l’ananas. Le lactose se trouvedans le lait animal et humain; sa saveur estbeaucoup moins sucrée. Le maltose setrouve dans les graines germées.

PolysaccharidesLes polysaccharides sont les sucres lesplus complexes. Ils sont habituellementinsolubles dans l’eau et quelques-uns seu-lement sont utilisables par l’homme. Cesont par exemple l’amidon, le glycogène etla cellulose.

L’amidon est une source d’énergiemajeure que l’on trouve surtout dans lesgraines de céréales et dans les racinescomme les pommes de terre et le manioc.

La nutrition dans les pays en développement 99

Chapitre 9

Les macronutriments: glucides, lipides et protéines

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L’amidon est libéré par la cuisson sous l’ef-fet de la chaleur qui fait éclater les gra-nules.

Le glycogène est fabriqué par l’organis-me; on l’appelle aussi amidon humain. Ilest constitué de monosaccharides produitspar la digestion de l’amidon de l’alimenta-tion. Dans l’intestin, l’amidon du riz ou dumanioc, par exemple, est scindé en mono-saccharides qui passent dans le sang. Lesmonosaccharides en excédent qui ne sontpas utilisés immédiatement pour produirede l’énergie sont réunis pour former duglycogène. Le glycogène est stocké dansles muscles et le foie en petites quantités.

Tous les glucides digestibles qui sontconsommés en quantité supérieure auxbesoins immédiats de l’organisme sonttransformés en graisse et stockés dans letissu adipeux sous-cutané ou ailleurs.

La cellulose, l’hémicellulose, la lignine,la pectine et les gommes sont parfoisappelées glucides non assimilables, carl’homme ne peut pas les digérer. La cellu-lose et l’hémicellulose sont des polymèresvégétaux qui constituent la base desparois cellulaires. Ce sont des substancesfibreuses. La cellulose qui est un polymèredu glucose est l’une des fibres des plantesvertes. L’hémicellulose est habituellementun polymère d’hexose et de pentose. Lalignine est le principal constituant du bois.Les pectines se trouvent dans les tissusvégétaux et la sève et sont des polysaccha-rides colloïdaux. Les gommes sont desglucides visqueux extraits de plantes. Lespectines et les gommes sont utilisées parl’industrie alimentaire. Le tube digestifhumain ne peut pas les décomposer oules utiliser pour produire de l’énergie.Par contre, le bétail possède des bactériesintestinales qui permettent de décompo-ser la cellulose et de produire de l’éner-gie. Chez l’homme, ces substances nonassimilables traversent le tube digestif etconstituent la majeure partie du volumeet du ballast des selles, c’est pourquoi on

les appelle néanmoins “fibres alimen-taires”.

Les fibres font l’objet d’un intérêt crois-sant, car on considère à présent lesrégimes riches en fibres comme favorablesà la santé. Le premier avantage de cesrégimes riches en fibres est de réduire l’in-cidence de la constipation. Le volume ali-mentaire produit par les fibres contribuesans doute à la sensation de satiété etdevrait permettre de réduire les excès ali-mentaires et l’obésité. La présence de cesfibres accélère le transit des aliments etcontribue donc au bon fonctionnement del’intestin. Enfin, les fibres se lient à la biledans l’intestin grêle.

On admet à présent que la richesse enfibres de la majorité des alimentations tra-ditionnelles contribuerait largement à laprévention de nombreuses maladies quisont beaucoup plus fréquentes dans lespays industrialisés. En facilitant le passagerapide des aliments à travers le tube diges-tif, les fibres pourraient contribuer à limi-ter les appendicites, les diverticulites, leshémorroïdes et peut-être même l’athéro-me, cause des maladies coronariennes, etcertains cancers.

La consommation régulière de glucidescollants et fermentescibles peut favoriserles caries dentaires surtout en cas d’hygiè-ne insuffisante. Le fluor sous forme oraleou en application locale constitue alors lameilleure protection (voir chapitre 21).

LIPIDESDans la plupart des pays en développe-ment, les lipides ne constituent qu’unefaible part de la ration énergétique, sou-vent 8 à 10 pour cent seulement. Dans lespays industrialisés, au contraire, cette pro-portion est bien plus élevée. Aux Etats-Unis, elle est en moyenne de 36 pour cent.

Les lipides, comme les glucides, com-portent du carbone, de l’hydrogène et del’oxygène. Ils sont insolubles dans l’eaumais solubles dans des solvants chimiques

100 Les macronutriments: glucides, lipides et protéines

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comme l’éther, le chloroforme et les ben-zènes. Le terme “lipides” englobe toutesles graisses comestibles de l’alimentationhumaine, qu’elles soient solides à tempé-rature ambiante comme le beurre ouliquides comme les huiles d’arachide oude graines de coton. (Dans certains cas, lemot “huile” désigne les graisses liquides àtempérature ambiante, alors que le mot“matières grasses” est réservé aux autresgraisses.)

Les graisses de l’organisme se répartissenten deux groupes: les graisses structurelles etles graisses de réserve. Ces dernières consti-tuent, comme leur nom l’indique, une réser-ve d’énergie alors que les lipides de structu-re font partie intégrante des membranes cel-lulaires, des mitochondries et de certainsorganites intracellulaires.

Le cholestérol se trouve dans toutes lesmembranes cellulaires. Il joue un rôleimportant dans le transport des lipides etil est le précurseur des sels biliaires et deshormones surrénaliennes et sexuelles.

Les lipides alimentaires consistent sur-tout en triglycérides. Ceux-ci peuvent êtrescindés en glycérol et en acides gras quisont des chaînes de carbone, d’hydrogèneet d’oxygène. Cette scission ou digestiondes lipides se fait dans l’intestin humainsous l’action d’enzymes appelées lipasesprovenant du pancréas ou des sécrétionsintestinales. Les sels biliaires, fabriquéspar le foie, émulsifient les acides gras pourles rendre plus solubles dans l’eau et plusfacilement absorbables.

Les nombreux acides gras de l’alimenta-tion humaine se répartissent en deuxgroupes: saturés et insaturés. Ces dernierspeuvent être poly ou monoinsaturés. Lesacides gras saturés possèdent le nombremaximal d’atomes d’hydrogène que leurstructure chimique autorise. Toutes lesgraisses alimentaires sont un mélanged’acides gras saturés et insaturés. En sim-plifiant, les graisses provenant d’animauxterrestres (viande, beurre et ghee) contien-

nent plus d’acides gras saturés que lesgraisses d’origine végétale. Les graissesprovenant de végétaux et, jusqu’à un cer-tain point, de poissons contiennent plusd’acides gras insaturés et surtout polyinsa-turés (AGPI). Il y a bien sûr des exceptionscomme l’huile de coco, qui est riche enacides gras saturés.

Cette classification est primordiale enmatière de santé car la consommationexcessive de graisses saturées est l’un desfacteurs de l’athérome et des maladiescoronariennes (voir chapitre 23). Les AGPIauraient au contraire un rôle protecteur.

Les AGPI comprennent deux acides grasappelés essentiels car nécessaires à unebonne santé: les acides linoléique et linolé-nique. Ils jouent un rôle majeur dans lasynthèse de structures cellulaires et denombreux composés biologiques impor-tants. Des études récentes ont aussi mis enévidence les bénéfices d’acides gras à chaî-ne plus longue dans la croissance et ledéveloppement des jeunes enfants. L’acidearachidonique et l’acide docosahexaé-noïque seraient essentiels à la croissance etau développement des jeunes enfants. Desexpériences réalisées sur des animaux etdes études effectuées chez l’homme ontmis en évidence des altérations de la peau,de la croissance et du fonctionnement vas-culaire et neurologique en l’absence de cesacides; de plus, ils sont sans aucun douteessentiels à la nutrition des cellules et tis-sus de l’organisme.

Les lipides sont indispensables pourdonner un goût agréable aux aliments. Ilsapportent aussi 9 kcal/g, soit près dudouble des calories apportées par les glu-cides et les protéines (environ 4 kcal/g); ilspermettent donc de réduire le volume desaliments. Une personne qui accomplit untravail très dur surtout en climat froid,peut avoir besoin de 4 000 kcal par jour.Dans ce cas, il est indispensable qu’unelarge proportion de la ration proviennedes lipides pour éviter un volume excessif.

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Le volume de la ration constitue souventun grave problème chez les jeunes enfants.Il est donc souhaitable d’augmenter dansdes limites raisonnables le contenu engraisse ou en huile de leur alimentationafin d’augmenter la densité énergétiqued’une alimentation à base de glucidesvolumineux.

Les lipides servent aussi de véhicule autransport des vitamines liposolubles (voirchapitre 11).

Les lipides, certains lipides surtout, sontdonc indispensables à la santé. Maispresque tous les types d’alimentation enfournissent suffisamment.

Les graisses stockées dans l’organismeservent d’énergie de réserve. C’est unefaçon pratique de stocker de l’énergie car,à poids égal, les lipides en produisentdeux fois plus que les glucides. Sous lapeau, la graisse sert d’isolant thermique etelle sert de tissu de support à plusieursorganes dont le cœur et l’intestin.

Toutes les graisses de l’organisme neproviennent pas nécessairement degraisses alimentaires. Les calories excé-dentaires provenant des glucides et desprotéines du maïs, du manioc, du riz oudu blé peuvent être converties en graissedans l’organisme.

PROTÉINESTout comme les glucides et les lipides, lesprotéines contiennent du carbone, de l’hy-drogène et de l’oxygène, mais aussi del’azote et souvent du soufre. L’azote est unélément primordial nécessaire à la crois-sance et à la cicatrisation. Les protéinessont les principaux constituants structu-rels des cellules et des tissus et constituent,avec l’eau, la majeure partie des muscles etdes organes. Elles varient d’un tissu àl’autre selon qu’elles sont dans le foie, lesang ou des hormones.

Elles sont nécessaires pour:• la croissance et le développement du

corps;

• l’entretien, la cicatrisation et le rempla-cement de tissus usés ou endomma-gés;

• la production d’enzymes métabo-liques et digestives;

• la constitution des hormones commela thyroxine et l’insuline.

Bien que les protéines puissent aussifournir de l’énergie, elles sont surtout desconstituants essentiels des cellules. Toutesles cellules doivent être remplacées à unmoment ou un autre et ce remplacementnécessite des protéines.

Les protéines consommées en excès de laration nécessaire à la croissance, au renou-vellement des cellules et des liquides bio-logiques et à diverses autres fonctionsmétaboliques, sont transformées en glu-cides et stockées comme réserve d’énergie.Si l’apport calorique des glucides et lipidesde la ration est insuffisant, une partie desprotéines sera transformée en énergie etdonc indisponible pour la croissance, lerenouvellement cellulaire et les autresbesoins métaboliques. Cela est particuliè-rement important pour les enfants qui ontbesoin de plus de protéines pour grandir.S’ils ne reçoivent pas assez de nourriturepour leurs besoins en énergie, une partiedes protéines consommées sera détournéepour fournir de l’énergie.

Acides aminésLes protéines sont des grosses moléculesfaites de chaînes d’acides aminés reliés pardes liaisons peptidiques. Les différentesprotéines correspondent à des acides ami-nés différents liés d’une manière différen-te. Le nombre élevé d’acides aminés per-met un grand nombre de combinaisons,donc de protéines différentes.

Lors de la digestion, sous l’action desenzymes protéolytiques gastriques et intes-tinales, les protéines sont scindées en pep-tides et en acides aminés de la même façonque les amidons sont scindés en monosac-charides et les lipides en acides gras.

102 Les macronutriments: glucides, lipides et protéines

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Les végétaux sont capables de synthéti-ser des acides aminés à partir de sub-stances chimiques inorganiques. Les ani-maux n’ont pas cette capacité; les acidesaminés dont ils ont besoin proviennenttous de la consommation de plantes oud’autres animaux. Comme les protéinesdes animaux consommés par l’hommeviennent des plantes consommées par cesanimaux, tous les acides aminés humainsont une origine végétale.

La capacité de convertir un acide aminéen un autre varie chez les animaux et esttrès limitée chez l’homme. Cette conver-sion a lieu essentiellement dans le foie. Sila possibilité de conversion était illimitée,cela simplifierait considérablement le pro-blème de la ration protéique et de la pré-vention des carences. Il suffirait de fournirune quantité suffisante de n’importe quel-le protéine sans tenir compte de sa qualité,c’est-à-dire de sa composition en acidesaminés.

Parmi les nombreux acides aminés, 20sont communs aux plantes et aux ani-maux. Parmi eux, huit sont considéréscomme indispensables à l’homme et sontappelés essentiels: la phénylalanine, letryptophane, la méthionine, la lysine, laleucine, l’isoleucine, la valine et la thréoni-ne. Un neuvième acide aminé, l’histidine,est indispensable à la croissance et estdonc essentiel pour les enfants; il pourraitaussi être nécessaire à la cicatrisation. Lesautres acides aminés sont: la glycine, l’ala-nine, la sérine, la cystine, la tyrosine, l’aci-de aspartique, l’acide glutamique, la proli-ne, l’hydroxyproline, la citrulline et l’argi-nine. Chaque protéine comporte unmélange spécifique d’acides aminés quicontiennent ou pas les huit acides aminésessentiels.

Qualité et quantité des protéinesPour évaluer la valeur protéique d’un ali-ment, il faut savoir combien de protéinestotales il contient et quels acides aminés,

notamment essentiels, et dans quelles pro-portions. On connaît bien à présent lavaleur protéique de la plupart des ali-ments. Certains protéines ont un mélanged’acides aminés plus intéressant que lesautres; on dit qu’elles ont une valeur bio-logique élevée. L’albumine de l’œuf et lacaséine du lait, par exemple, contiennentles huit acides aminés essentiels dans debonnes proportions et sont supérieures àla zéine du maïs, qui contient peu de tryp-tophane et de lysine, ou à la protéine dublé, qui contient très peu de lysine. Il nefaut pas pour autant considérer que lesprotéines du blé et du maïs sont sansvaleur: elles contiennent une certainequantité des acides aminés essentiels etd’autres acides aminés. Leurs insuffi-sances peuvent être compensées si on lesconsomme avec d’autres protéines quicontiennent une plus grande quantité desacides aminés déficients. Deux alimentsqui ont une valeur protéique basse peu-vent ainsi aboutir à un mélange d’excel-lente qualité s’ils sont consommésensemble.

L’homme, et surtout l’enfant, quiconsomme une nourriture carencée enprotéines animales a besoin d’un ensemblevarié d’aliments d’origine végétale et passeulement d’un aliment de base. Dans denombreux plats traditionnels, des légumi-neuses (arachides, haricots, pois chiches,etc.), bien que pauvres en acides aminéssoufrés, complètent parfaitement lescéréales, pauvres en lysine. Un mélange deprotéines végétales, surtout si elles sontconsommées lors du même repas, peutdonc remplacer les protéines animales(photo 12).

La FAO a produit des tableaux du conte-nu en acides aminés essentiels de diffé-rents aliments qui permettent de voirquelles sont les associations les plus favo-rables. Il reste cependant à vérifier que laquantité totale de protéines et d’acidesaminés est suffisante.

La nutrition dans les pays en développement 103

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La qualité d’une protéine dépend dansune large mesure de sa composition enacides aminés et de sa digestibilité. Si unou plusieurs acides aminés essentielsmanquent, sa qualité diminue. L’acideaminé essentiel le plus déficient est appe-lé “acide aminé limitant”. C’est lui quidétermine le rendement de l’ensemble dela protéine. Mais, comme les humainsconsomment généralement des platscontenant un ensemble de protéines etnon des protéines isolées, les nutrition-nistes s’intéressent à la qualité de l’en-semble du repas et non à celle d’un ali-ment isolé. Si l’alimentation habituelle estdéficiente en un acide aminé essentiel,cette carence limite l’utilisation des autresacides aminés pour construire de nou-velles protéines.

Les lecteurs qui souhaitent se familiari-ser avec la détermination de la qualité desprotéines trouveront plus de détails dansles ouvrages de nutrition cités dans labibliographie. Une méthode consiste àmesurer la croissance et la rétentiond’azote du jeune rat. Une autre repose surla détermination d’un score d’acides ami-nés ou score chimique qui consiste à com-parer le rendement protéique de l’alimentconsidéré avec celui d’une protéine degrande qualité comme l’œuf.

On peut donc définir ce score comme lerendement de l’aliment protéique consi-déré, par rapport à celui des protéines del’œuf. L’utilisation protéique nette (UPN)mesure le pourcentage de protéine utilisépar rapport à la quantité consommée. Letableau 16 présente le score et l’UPN desprotéines de cinq aliments courants.

Il n’est pas facile et habituel de calculerl’UPN chez l’homme; on le fait donc leplus souvent chez le rat. Le tableau 16suggère qu’il existe une bonne corrélationentre le rat et l’enfant et que le score chi-mique constitue une estimation accep-table de la qualité de la protéine.

Pour les professionnels de la nutrition,

qu’il s’agisse d’un diététicien dans unhôpital, d’un ingénieur agronome oud’un éducateur en nutrition, la notionimportante est que la valeur protéique estvariable et que le mélange de plusieursaliments améliore la qualité protéique desrepas. Le tableau 17 indique le contenuprotéique et le score d’acides aminés limi-tants de quelques aliments végétaux cou-rants. On y trouve également le score dela lysine, car c’est l’acide aminé le plussouvent déficient.

Digestion et absorption des protéinesLes protéines de l’alimentation subissentune série de modifications chimiquesdans le tube digestif. La physiologie decette digestion est complexe: les protéinessont hydrolysées en acides aminés sousl’action de la pepsine et de la rénine gas-triques, de la trypsine pancréatique et del’érepsine intestinale. La majorité desacides aminés est absorbée dans l’intestingrêle et passe dans le courant sanguinpour gagner le foie et les autres organes.Tout excédent d’acides aminés est scindéen deux parties: le groupement amine(NH2) sera excrété dans l’urine sousforme d’urée et le reste transformé en glu-cose. On a maintenant des preuvesqu’une petite fraction des protéinesgagne certaines cellules de la paroi intes-tinale. Certaines pourraient jouer un rôledans la transmission de l’immunité de lamère à son nouveau-né.

Une faible partie des protéines et acidesaminés libérés dans l’intestin n’est pasabsorbée. Elle forme l’azote fécal avec lescellules desquamées des villosités intesti-nales remaniées par les bactéries et lesdifférents microorganismes intestinaux.

La majorité des protéines humaines setrouve dans les muscles. Il n’existe pas devéritable système de stockage des pro-téines comme il en existe un pour lesgraisses et le glycogène. Mais on est cer-tain à présent qu’un individu bien nourri

104 Les macronutriments: glucides, lipides et protéines

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a suffisamment de protéines dans sonorganisme pour rester en bonne santémême si son apport alimentaire de pro-téines est interrompu quelques jours.

Besoins en protéinesLes besoins des enfants sont supérieurs àceux des adultes à cause de la croissance.Lors des premiers mois, les nourrissons

La nutrition dans les pays en développement 105

TABLEAU 16

Score chimique et utilisation protéique nette de quelques aliments

Aliment Score chimique UPN chez l’enfant UPN chez le rat

Œuf entier 100 87 94

Lait humain 100 94 87

Riz 67 63 59

Maïs 49 36 52

Blé 53 49 48

Source: Adapté de FAO/OMS, 1973.

TABLEAU 17

Contenu en protéines, score des acides aminés limitants et score de la lysine de quelques aliments végétaux

Aliment Protéines (%) Score des acides Scoreaminés limitants de la lysine

CéréalesMaïs 9,4 49 (lysine) 49

Riz blanc 7,1 62 (lysine) 62

Farine de blé 10,3 38 (lysine) 38

Mil 11 33 (lysine) 33

LégumineusesHaricots 23,6 100 118

Pois secs 23,5 100 117

Arachides 25,8 62 (lysine) 62

LégumesTomate 0,9 56 (leucine) 64

Potiron 1,2 70 (thréonine) 95

Poivron 0,9 77 (lysine-leucine) 77

Manioc 1,3 44 (leucine) 56

Pomme de terre 2,1 91 (leucine) 105

Source: Adapté de Young et Pellett, 1994.

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ont besoin de 2,5 g par kg de poids et parjour. Entre 9 et 12 mois, le besoin diminueà 1,5 g. Cependant, les protéines ne sontutilisées pour la croissance que si l’apporténergétique global est satisfaisant. Unefemme enceinte a besoin d’un supplé-ment de protéines pour le développementdu fœtus. De même, une femme qui allai-te a besoin de plus de protéines pourcompenser celles excrétées dans le lait.Dans certains pays, les mères peuventallaiter jusqu’à deux ans; il leur faut doncdes protéines supplémentaires pendantneuf mois plus deux ans pour chaqueenfant qu’elles mettent au monde.

Les besoins en protéines et les dosesrecommandées ont fait l’objet derecherches, de débats et de nombreuxdésaccords au cours des 50 dernièresannées. La FAO et l’OMS rassemblentrégulièrement des experts pour faire lepoint des connaissances et publier desdirectives. Les recommandations les plusrécentes émanent d’une réunion entreexperts de la FAO, de l’OMS et del’Université des Nations Unies (UNU) àRome en 1985. La dose journalière de sécu-rité a été fixée à 1,5 g par kg pour unenfant de 1 an, puis à 1 g pour un enfantde 6 ans. Les apports recommandés par lesAméricains sont un peu plus élevés: 1,75 gà un an et 1,2 g à 6 ans. Chez les adultes,les recommandations FAO/OMS/UNUsont de 0,8 g/kg pour les femmes et0,85 g/kg pour les hommes.

Ces valeurs ainsi que les recommanda-tions aux femmes enceintes et allaitantessont reprises dans l’annexe 1. Elles sontfournies pour deux types d’alimentation:un régime riche en fibres composé princi-palement de céréales, de racines et de légu-

mineuses avec peu d’aliments d’origineanimale, et, d’autre part, une alimentationplus variée avec moins de fibres et plus deprotéines complètes. Par exemple, unefemme non enceinte pesant 55 kg a besoinde 49 g de protéines dans le premier cas etde 41 g dans le second. En effet, les fibresréduisent l’utilisation des protéines.

Un apport protéique insuffisant compro-met la croissance et la cicatrisation. Il estparticulièrement préjudiciable à l’enfant,non seulement parce qu’il grandit maisaussi parce que le risque infectieux est spé-cialement élevé dans l’enfance. De même,un apport insuffisant d’énergie compro-met la croissance, car une partie de l’ap-port protéique sera détournée en fournitu-re d’énergie et indisponible pour la crois-sance.

Dans de nombreux pays en développe-ment, mais pas tous, l’apport protéiqueest souvent faible et surtout d’originevégétale. Ce n’est pas par choix que lesaliments d’origine animale font défaut:pour la majorité des Africains et des Sud-Américains défavorisés, ils sont plus dif-ficiles à se procurer, à produire, à stockeret surtout plus chers. Dans les payspauvres, les régimes pauvres en viande,poisson et laitages sont courants.

Les infections induisent une perted’azote de l’organisme qui doit être com-pensée par un apport protéique alimentai-re. Les personnes souvent malades ontdonc des besoins protéiques plus élevés. Ilfaut garder cet élément à l’esprit, car beau-coup d’enfants dans les pays en dévelop-pement souffrent d’une série pratique-ment ininterrompue de maladies infec-tieuses; ils ont souvent la diarrhée et ontdes parasites intestinaux.

106 Les macronutriments: glucides, lipides et protéines

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PHOTO 12Une femme et un enfant récoltent des arachides, alimentriche en lipides, protéines et vitamines B; l’adjonctiond’une poignée d’arachides chaque jour à l’alimentation detous les Africains pourrait pratiquement éliminer lamajorité des malnutritions

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Les minéraux ont plusieurs fonctions dansl’organisme. Le sodium, le potassium et lechlore sont présents sous forme de selsdans les liquides biologiques où leur rôleconsiste à maintenir la pression osmo-tique. Ils sont également présents dans denombreux tissus. Par exemple, le calciumet le phosphore se combinent dans les ospour donner une rigidité au corps toutentier. Les minéraux se trouvent dans lesliquides acides et basiques: le chlore estdans l’acide chlorhydrique gastrique. Cesont aussi des constituants essentiels decertaines hormones comme l’iode de lathyroxine produite par la glande thyroïde.

Les principaux minéraux du corpshumain sont le calcium, le phosphore, lepotassium, le sodium, le chlore, le soufre,le cuivre, le magnésium, le manganèse, lefer, l’iode, le fluor, le zinc, le cobalt et lesélénium. Le phosphore est si abondantdans le règne végétal qu’une carence estpratiquement impossible. Le sodium, lepotassium et le chlore sont facilementabsorbés et ont un rôle plus important quele phosphore. Le soufre est consomméessentiellement sous forme d’acides ami-nés soufrés; une carence éventuelle ensoufre est donc liée à une carence pro-téique. Les carences en cuivre, manganèseet magnésium ne paraissent pas fré-quentes. Les minéraux les plus importantsen nutrition humaine sont le calcium, lefer, l’iode, le fluor et le zinc, et eux seulsseront vus en détail. Certains minérauxsont nécessaires en quantité infime maisont une importance cruciale dans les pro-cessus métaboliques; on les appelle oligo-éléments.

La table de composition des alimentsfigurant à l’annexe 3 montre la teneur enminéraux de différents aliments.

CALCIUMLe corps d’un adulte de taille moyennecontient environ 1 250 g de calcium dont99 pour cent se trouvent dans les os et lesdents, combinés au phosphore sous formede phosphate de calcium, substance durequi confère au corps sa rigidité. Toutefois,aussi dur qu’il soit, le squelette n’est pas lastructure fixe qu’il paraît être. En fait, lesos sont une matrice cellulaire et le calciumest en permanence capté par les os et resti-tué à l’organisme. Les os constituent ainsiune réserve de calcium.

Le calcium se trouve également en faiblequantité (10 mg par 100 ml de sérum) dansle sang où il joue un rôle important ainsique dans les liquides intracellulaires et lestissus mous (environ 10 g).

Propriétés et fonctionsChez l’homme et les autres mammifères, lecalcium et le phosphore ont un rôle majeurdans la constitution du squelette, maisaussi dans diverses fonctions métabo-liques comme l’activité musculaire, les sti-muli nerveux, les activités enzymatiqueset hormonales et le transport d’oxygène.On trouvera des détails sur ces fonctionsdans des manuels de physiologie et denutrition.

Le squelette d’un être vivant est diffé-rent d’un squelette mort dans un cimetièreou un musée. Les os sont des tissusvivants constitués principalement d’unesubstance protéique et collagénique

La nutrition dans les pays en développement 109

Chapitre 10

Les minéraux

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minéralisée. Chez l’être vivant, ce calciumest constamment renouvelé. A tout âge,l’os est détruit et résorbé. Les cellulesosseuses appelées ostéoclastes détruisentl’os alors que les ostéoblastes en recons-truisent. Les cellules du collagène miné-ralisé sont appelées ostéocytes.

Jusqu’à la fin de la croissance, entre 18et 22 ans, l’os nouvellement formé sertsurtout à augmenter la taille du squelette.A l’âge adulte, la taille du squelette restefixe en dépit d’un renouvellement osseuxcontinu. A un âge avancé par contre, lamasse squelettique diminue légèrement.

Un système complexe maintient destaux de calcium et de phosphore adé-quats, sous le contrôle des hormonesparathyroïdiennes comme la calcitonineet la forme active de la vitamine D (1,25dihydroxycholécalciférol).

Le calcium se trouve également dansles liquides extracellulaires, notammentle plasma sanguin et diverses cellules.Dans le sérum, le calcium est soit ionisésoit lié à des protéines. Les laboratoires nemesurent généralement que le calciumtotal, qui est de 8,5 à 10,5 mg/dl (2,1 à 2,6mmol/litre). Une chute en dessous de2,1 mg est appelée hypocalcémie et induitdivers symptômes. La tétanie (à ne pasconfondre avec le tétanos dû au bacilletétanique), qui se traduit par des spasmeset parfois des convulsions, résulte d’unechute du calcium ionisé dans le sang.

Sources alimentairesTout le calcium de l’organisme, sauf celuihérité de la mère, vient de l’alimentationet de l’eau consommées. L’apport de cal-cium est particulièrement crucial pen-dant la croissance, phase de développe-ment des os. Les besoins nutritionnels dufœtus sont généralement satisfaits; eneffet, sur le plan nutritionnel, le fœtus secomporte comme un parasite. Si l’ali-mentation maternelle est pauvre en cal-cium, celui-ci sera fourni par les réserves

osseuses. Un nourrisson exclusivementallaité aura assez de calcium tant que levolume de lait maternel sera suffisant.Contrairement à une croyance populaire,le taux de calcium du lait varie peu:100 mg de lait, même si la mère est malnourrie et a un régime très pauvre en cal-cium, apportent autour de 30 mg de cal-cium (tableau 18). Une femme qui allaiteet fournit un litre de lait à son enfantperd donc 300 mg de calcium par jour.

Le lait de vache est bien plus riche encalcium que le lait humain, puisqu’unlitre contient 1 200 mg de calcium contre300 mg pour le lait humain. Cette diffé-rence est due au fait que le petit veaupousse beaucoup plus vite que le petitenfant et a besoin de beaucoup de cal-cium pour le développement rapide deson squelette. Il en va de même pour lesautres mammifères. Cela ne signifie pasqu’il serait meilleur pour un enfant deboire du lait de vache, car celui-cicontient plus de calcium que l’enfantn’en requiert et l’excédent serait excrété,donc inutile. L’enfant ne pousserait pasplus vite pour autant.

On trouve beaucoup de calcium dansles dérivés du lait comme le fromage et leyaourt. Les petits poissons de mer ou derivière comme les sardines et les spratssont également une bonne source de cal-cium, car on les consomme généralemententiers, y compris les os. Les petits pois-sons séchés appelés dagaa enRépublique-Unie de Tanzanie, kapentaen Zambie et chela en Inde sont unebonne source de calcium (photo 13). Leslégumes et les légumineuses en appor-tent également une certaine quantité.Bien que les céréales et les racines encontiennent peu, ils en constituent sou-vent la source principale dans les paystropicaux en raison de l’importantequantité consommée.

Le contenu de l’eau de boisson varie etaugmente avec la dureté de l’eau.

110 Les minéraux

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Absorption et utilisationL’absorption est variable et généralementassez faible. Elle est liée à celle du phos-phore et des autres minéraux qui consti-tuent l’os. La vitamine D est indispensableà l’absorption. En cas de carence en vita-mine D, le calcium sera faiblement absor-bé, même s’il est consommé en abondance,et sera insuffisant. L’absorption est égale-ment réduite par la présence dans l’ali-mentation de phytates, d’oxalates et dephosphates.

L’absorption paraît également meilleurechez les personnes dont l’apport alimen-taire est relativement faible. Le calciumnon absorbé est excrété dans les selles. Lecalcium en excédent est excrété dans l’uri-ne et la sueur.

BesoinsLes besoins humains sont difficiles à défi-nir avec précision car l’absorption du cal-cium dépend de plusieurs facteurs, et lespertes varient considérablement d’un indi-vidu à l’autre.

Les besoins augmentent pendant la gros-sesse, l’allaitement et la croissance ainsiqu’en cas de régime hyperprotéiné. Voiciles apports journaliers recommandés:

• adulte: 400 à 500 mg;• enfant: 400 à 700 mg;

• femme enceinte ou allaitante: 800 à1000 mg.

CarencesLes maladies liées à une carence d’apport encalcium sont rares. Il n’est pas vraimentprouvé que les régimes de beaucoupd’adultes des pays en développement limi-tés à 250 ou 300 mg de calcium aient uneinfluence néfaste sur leur état de santé. Onprésume que les adultes parviennent àmaintenir l’équilibre quand leurs apportssont bas. Les femmes qui subissent une sériede grossesses et de périodes d’allaitementprolongées et perdent beaucoup de calciumont un risque d’ostéomalacie. Mais il s’agitsouvent plus d’une carence en vitamine Dqu’en calcium.

Le rachitisme des enfants résulte d’unecarence en vitamine D et non en calcium,bien que les besoins de l’enfant soient plusimportants. On n’a pas démontré d’effetnégatif sur la croissance d’une carence cal-cique chez l’enfant.

L’ostéoporose est une maladie fréquentedu vieillissement, surtout chez la femme(voir chapitre 23). Le squelette se déminéra-lise, ce qui aboutit à une fragilité osseuse etsouvent à des fractures du col fémoral oudes vertèbres, surtout à un âge avancé. Unapport élevé de calcium est généralementrecommandé mais n’a pas fait ses preuvescomme moyen de prévention ou de traite-ment de l’ostéoporose. L’exercice physiquesemble réduire les pertes de calcium et celaexplique pourquoi l’ostéoporose est moinsfréquente dans les pays en développementoù les femmes font davantage d’efforts phy-siques. On sait aussi maintenant que l’ap-port d’œstrogènes après la ménopauseréduit la perte osseuse et l’ostéoporose.

FERLa carence en fer a une influence néfaste surla santé dans le monde entier. Un organismeadulte ne contient que 3 à 4 g de fer, maiscette petite quantité est vitale.

La nutrition dans les pays en développement 111

TABLEAU 18

Contenu en calcium de différents laitsconsommés dans les pays

en développement.

Source du lait Contenu en calcium (mg/100 ml)

Femme 32

Vache 119

Chamelle 120

Chèvre 134

Bufflonne 169

Brebis 193

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Propriétés et fonctionsLa majorité du fer se trouve sous formed’hémoglobine dans les globules rouges;presque tout le reste se trouve dans lamyoglobine (en majorité musculaire) ousous forme de réserves (ferritine) dans lefoie, la rate et la moelle osseuse. Des quan-tités infimes sont liées à des protéines plas-matiques ou font partie d’enzymes respi-ratoires.

La fonction essentielle et vitale du fer estle transport de l’oxygène dans tout l’orga-nisme. L’hémoglobine est le pigment desglobules rouges qui transporte l’oxygènedes poumons dans tout l’organisme. Lamyoglobine du cœur et des muscles accep-te l’oxygène de l’hémoglobine. Le fer estégalement présent dans plusieursenzymes comme les peroxydases, les cata-lases et les cytochromes.

Le fer n’est jamais détruit dans un orga-nisme en bon état de fonctionnement.Contrairement à d’autres minéraux, iln’est pas nécessaire à l’excrétion et on n’entrouve que des quantités infimes dansl’urine et la sueur. Des quantités minimessont perdues dans les cellules desquaméesde la peau et de l’intestin, dans les che-veux et les ongles ainsi que dans la bile etd’autres liquides biologiques. L’organismeest très économe et conservateur en ce quiconcerne le fer. Le fer des vieux globulesrouges est récupéré lors de leur destruc-tion et indéfiniment réutilisé pour la fabri-cation de nouveaux globules rouges. Dansdes circonstances normales, seulement1 mg de fer est perdu quotidiennementdans l’intestin, l’urine, la sueur ou les che-veux et les cellules épithéliales.

Grâce à cette économie, les besoinsnutritionnels d’hommes adultes en bonnesanté ou de femmes ménopausées sonttrès faibles. Par contre, les femmes en âgede procréer doivent remplacer le fer perdulors des menstruations et des accouche-ments et faire face aux besoins supplémen-taires de la grossesse et de l’allaitement.

Les enfants ont également des besoins éle-vés, non seulement pour la croissance ducorps mais aussi pour l’accroissement duvolume sanguin.

Sources alimentairesLe fer est présent dans de nombreux ali-ments d’origine animale ou végétale. Lesaliments les plus riches sont la viande(surtout le foie), le poisson, les œufs, leslégumineuses (haricots secs, pois secs, etc.)et les légumes à feuilles vertes. Lescéréales comme le maïs, le riz ou le blé encontiennent peu mais comme ce sont desaliments de base consommés en grandequantité dans les pays en développement,elles constituent souvent la source princi-pale de fer. L’utilisation de casseroles enfer contribue également à l’apport alimen-taire.

Le lait, malgré sa réputation d’alimentparfait, est pauvre en fer: 2 mg par litrepour le lait humain et la moitié pour le laitde vache.

Absorption et utilisationL’absorption se fait essentiellement dans laportion proximale de l’intestin grêle. Lamajorité du fer passe directement dans lesang et non par le système lymphatique.Cette absorption est de toute évidencerégulée jusqu’à un certain point par lesbesoins physiologiques: elle est plus effica-ce et plus abondante chez les personnescarencées.

D’autres facteurs modifient l’absorptiondu fer. Par exemple, les tanins, les phos-phates et les phytates de l’alimentation laréduisent alors que l’acide ascorbique lafavorise. Le jaune d’œuf, malgré sa riches-se en fer, inhibe l’absorption non seule-ment de son propre fer mais du fer desautres aliments.

Une personne en bonne santé absorbeenviron 5 à 10 pour cent du fer contenudans ses aliments alors qu’un sujet carencépeut en absorber jusqu’au double. Si l’ali-

112 Les minéraux

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mentation contient 15 mg de fer, le sujetnormal va en absorber 0,75 à 1,5 mg, alorsqu’un sujet déficient en absorbera jusqu’à3 mg. L’absorption est généralement plusélevée pendant la croissance et la grosses-se, après une hémorragie ou dans d’autrescirconstances où les besoins en fer s’élè-vent.

La disponibilité du fer contenu dans lesaliments varie considérablement.L’absorption du fer héminique des ali-ments d’origine animale (viande, poisson,volaille) est habituellement très élevée,alors que celle du fer non héminique desaliments d’origine végétale (céréales,légumes, racines, fruits) est faible.

Cependant, un repas est généralementconstitué de plusieurs types d’aliments, etla présence d’une petite quantité de ferhéminique favorisera l’absorption de toutle fer non héminique. L’adjonction d’unpeu de viande ou de poisson à une grosseration de riz ou de maïs permettra unemeilleure absorption du fer contenu dansl’aliment de base. Si le repas comporteaussi des fruits ou des légumes, la présen-ce de vitamine C va elle aussi favoriserl’absorption du fer. Par contre, si ce repass’accompagne de thé, les tanins du thévont réduire l’absorption du fer.

BesoinsLes besoins alimentaires correspondentapproximativement à 10 fois les besoinsphysiologiques. Si un homme ou unefemme ménopausée a besoin de 1 mg parjour en raison de ses pertes de fer, il devratrouver 10 mg dans son alimentation.Cette recommandation comporte unemarge de sécurité puisque l’absorptionaugmente avec les besoins.

Les pertes menstruelles équivalent àpresque 1 mg par jour toute l’année.L’apport alimentaire d’une femme en âgede procréer doit donc être d’environ 18 mgpar jour.

Pendant la grossesse, le développement

du fœtus et des tissus annexes ainsi quel’augmentation de volume du sang mater-nel requièrent 1,5 mg par jour, surtout pen-dant les deuxième et troisième trimestres.

Lors de l’allaitement, une femme perdenviron 2 mg de fer par litre de lait. Cetteperte est partiellement compensée, aumoins pendant les 6 à 15 premiers moisd’allaitement, par l’absence de règles.

Les nouveau-nés naissent avec unnombre élevé de globules rouges (polycy-thémie) et une hémoglobine élevée quiconstituent une réserve de fer. Cette réser-ve plus le fer contenu dans le lait maternelest habituellement suffisante pendant lesquatre à six premiers mois, après quoi uneautre source alimentaire devient nécessai-re.

Les prématurés et les bébés de petitpoids ont un stock de fer plus faible et ris-quent davantage d’être carencés.

Un apport excessif et prolongé de ferpeut aboutir à une maladie appelée sidé-rose ou hémochromatose. Cette affectiontouche surtout les grands consomma-teurs de boissons alcoolisées brasséesdans des cuves de fer, particulièrementen Afrique du Sud. Chez les alcooliques,la sidérose qui provoque des dépôts defer au niveau du foie peut s’associer àune cirrhose.

L’annexe 1 indique les apports de fermoyens sans danger.

CarencesSi l’on considère les besoins en fer et lecontenu moyen des aliments courants, onpeut imaginer que les carences sont rares,mais ce n’est pas vrai. La raison principaleest que l’absorption du fer alimentaire estmédiocre. Comme le fer est peu éliminédans les selles ou l’urine, les carences sontgénéralement associées à un accroisse-ment des besoins, lié à une grossesse, unehémorragie ou un accroissement du volu-me sanguin pendant la croissance. Lescarences affectent donc essentiellement les

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enfants, les femmes en âge de procréer etles personnes souffrant de pertes de sangchroniques.

La carence en fer aboutit à une anémiedécrite en détail au chapitre 13, tandis quesa prévention est traitée au chapitre 39.

Les ankylostomiases, très fréquentesdans de nombreux pays, entraînent uneperte chronique de sang qui aboutit fré-quemment à une anémie. Dans certainspays tropicaux, la schistosomiase est éga-lement responsable de pertes chroniquesde sang et d’anémie.

IODEL’organisme d’un adulte contient enmoyenne 20 à 50 mg d’iode, en majeurepartie dans la glande thyroïde. L’iode estindispensable à la synthèse des hormonesthyroïdiennes.

Propriétés et fonctionsChez l’homme, l’iode est un composantessentiel des hormones fabriquées par laglande thyroïde qui se trouve à la base ducou. Ces hormones, notamment la thy-roxine ou T4, ont un rôle crucial dans larégulation du métabolisme. Chez l’en-fant, elles contribuent à la croissance phy-sique et au développement des capacitésmentales.

L’iode est absorbé dans l’intestin sousforme d’iodure, et tout excès est éliminédans l’urine. Lorsque l’apport d’iode estsuffisant, une thyroïde adulte capte envi-ron 60 µg d’iode par jour pour fabriquerles quantités d’hormones requises. Sil’apport d’iode est insuffisant, la thyroïdeva travailler plus pour tenter d’en capterdavantage. Elle augmente alors de volu-me, c’est ce qu’on appelle un goitre, etson contenu en iode diminue considéra-blement.

La TSH, l’hormone hypophysaire quirégule la sécrétion de thyroxine et la cap-ture d’iode, augmente tandis que la thy-roxine diminue.

Sources alimentairesL’iode est largement présent dans lesrochers et la terre. Sa concentration dansles plantes dépend du sol sur lequel ellesont été cultivées. Cela n’a donc pas de sensde fournir la concentration en iode des ali-ments puisqu’elle varie considérablement.L’iode tend à être chassé des sols et, au fildes siècles, se retrouve surtout dans lamer. C’est pourquoi les poissons de mer,les algues et les plantes cultivées près de lamer sont de bonnes sources d’iode. L’eaude boisson en fournit, mais rarement enquantité suffisante pour les besoinshumains.

Dans de nombreux pays où le goitre estfréquent, les autorités ont entrepris l’ioda-tion du sel, stratégie qui a permis de rédui-re les troubles liés au déficit en iode. Cetiode est ajouté au sel sous forme d’iodurede potassium, mais l’iodate de potassiums’est avéré plus stable en climat chaud ethumide. Le sel iodé constitue alors la prin-cipale source d’iode alimentaire.

CarencesLa carence en iode entraîne plusieurstroubles, dont le goitre, très fréquent dansde nombreux pays. Bien qu’un goitre puis-se avoir plusieurs causes, le déficit en iodeest de loin la plus courante. Une carencependant la grossesse peut provoquer uncrétinisme, c’est-à-dire un ensembled’anomalies, notamment un retard mentalchez l’enfant. On sait maintenant qu’enplus du goitre et du crétinisme la carenceen iode réduit les capacités mentales, pro-blème particulièrement grave (voir cha-pitre 14).

Le trouble de carence en iode, autrefoisfréquent en Europe, en Amérique et enAustralie, se voit surtout maintenant dansles pays en développement, particulière-ment dans les zones montagneuses commeles Andes ou l’Himalaya et les hauts pla-teaux éloignés de la mer. Par exemple, uneétude réalisée par l’auteur sur les hauts pla-

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teaux Ukinda de République-Unie deTanzanie a montré que 75 pour cent de lapopulation présentaient un goitre.

FLUORLe fluor se trouve surtout dans les dents etle squelette. Sa présence à l’état de tracesdans les dents contribue à les protéger descaries. Le fluor consommé durant l’enfancedevient partie intégrante de l’émail dentai-re et le rend plus résistant aux acides orga-niques d’origine alimentaire qui adhèrentaux dents ou se logent entre elles. Cettestratégie réduit considérablement lesrisques de carie. Des études ont même sug-géré que le fluor pourrait également conso-lider le os et empêcher le développementde l’ostéoporose à un âge avancé.

Sources alimentairesLa source principale de fluor est l’eau deboisson. Un apport d’une particule parmillion (ppm) suffit à protéger les dents.Mais, la plupart du temps, la concentra-tion dans l’eau est bien inférieure. Commele fluor se trouve dans les os, la consom-mation de petits poissons entiers enapporte, ainsi que celle de thé. Peud’autres aliments contiennent du fluor.

CarenceSi la concentration dans l’eau de boissonest inférieure à 0,5 ppm, la prévalence descaries a des chances d’augmenter.

Le taux recommandé est de 0,8 à1,2 ppm. Dans certains pays où le taux defluor est initialement inférieur à 1 ppm, ilest devenu courant d’ajouter du fluor dansle réseau d’eau potable. Cette pratique,très recommandable, n’est pas réalisabledans la majorité des pays en développe-ment où peu de gens ont accès à l’eau cou-rante. L’adjonction de fluor aux dentifricescontribue également à prévenir les caries.Le fluor n’évite pas totalement les caries,mais il peut en réduire l’incidence de 60 à70 pour cent.

ExcèsUn apport excessif de fluor provoque unefluorose dentaire qui tache les dents. Celaest généralement lié à la consommationd’une eau excessivement fluorée. Danscertaines régions d’Afrique et d’Asie, leseaux de source contiennent 4 ppm defluor. La fluorose entraîne également unesclérose osseuse, des calcifications desinsertions musculaires et des exostoses.Une enquête réalisée par l’auteur enRépublique-Unie de Tanzanie a mis en évi-dence de nombreuses modificationsosseuses (visualisées par des radios) chezdes personnes âgées ayant consommé uneeau à plus de 6 ppm de fluor. On a décritdes phénomènes semblables en Inde. Cettefluorose du squelette peut entraîner desdouleurs très vives.

ZINCLe zinc est un élément essentiel en nutri-tion humaine et il a fait récemment l’objetd’une attention soutenue. Le zinc est pré-sent dans beaucoup d’enzymes essen-tielles au métabolisme. L’organisme adulteen contient 2 à 3 g et a besoin d’un apportde 15 mg par jour. La majorité du zinc setrouve dans le squelette, mais il y en aaussi dans d’autres organes, notamment lapeau, les cheveux et la prostate.

Sources alimentairesOn trouve du zinc dans la plupart des ali-ments animaux et végétaux, mais lesmeilleures sources sont des aliment pro-téiques comme la viande, les fruits de meret les œufs. Dans les pays en développe-ment où peu de gens consomment ces ali-ments, le zinc est apporté par les céréaleset les légumineuses.

Absorption et utilisationTout comme le fer, l’absorption du zinc estinhibée par les phytates, les oxalates et lestanins. Il n’existe pas de test simple pourmettre en évidence une carence en zinc

La nutrition dans les pays en développement 115

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chez l’homme. Les indicateurs de carencecomprennent la notion d’un apport ali-mentaire faible, un taux sérique bas et uneconcentration faible dans les cheveux.

Le zinc a fait l’objet, depuis 20 ans, denombreuses recherches qui ont considéra-blement accru nos connaissances sur sonmétabolisme et les carences chez l’animalet l’homme. Nous avons peu de preuvesque la carence en zinc soit un problème desanté publique majeur dans beaucoup depays, industrialisés ou non. Cependant, lesplus récentes recherches semblent montrerque le déficit en zinc est responsablenotamment d’un ralentissement de lacroissance et d’une diminution de l’appé-tit. La carence en zinc pourrait ainsi contri-buer à la malnutrition protéino-énergé-tique (MPE).

La carence en zinc est également respon-sable d’une affection congénitale rareappelée acrodermatite entéropathique quirépond à l’apport de zinc. De même, cer-tains patients sous nutrition parentéraleexclusive développent des lésions cuta-nées qui réagissent aussi favorablement àl’apport de zinc. Au Proche-Orient, parti-culièrement en République islamiqued’Iran et en Egypte, on voit de jeunes ado-lescents atteints de nanisme, d’hypotro-phie des organes génitaux et de retard dudéveloppement pubertaire. Il semble quecette affection réagisse favorablement auzinc.

On a également décrit des déficits enzinc comme secondaires, ou faisant partiede divers syndromes tels que la MPE,diverses malabsorptions, l’alcoolisme aveccirrhose hépatique, des maladies rénales etdes troubles métaboliques.

AUTRES OLIGO-ÉLÉMENTSBien d’autres minéraux sont présents dansle corps humain pour lesquels il n’existepas de preuves évidentes que leur déficitconstitue un problème de santé publiquemajeur dans le monde. Certains de ces

minéraux ont un rôle majeur dans le méta-bolisme ou dans la composition d’un tissu.Ils ont fait l’objet d’études et de descrip-tions biochimiques. Des déficits expéri-mentaux ont été créés chez des animauxde laboratoire, mais l’alimentation humai-ne, même très pauvre, ne semble pasinduire de carences importantes. Ils n’ontdonc pas une grande importance en santépublique. D’autres minéraux existent dansle corps mais n’ont pas de rôle connu.Certains, comme le plomb et le mercure,intéressent beaucoup les personnels desanté car leur ingestion excessive pro-voque des signes d’intoxication.

Le cobalt, le cuivre, le magnésium, lemanganèse et le sélénium méritent d’êtrecités à cause de leur rôle nutritionnel, et leplomb et le mercure à cause de leur toxici-té. On trouvera plus de détails à leur sujetdans des ouvrages de nutrition plusexhaustifs.

CobaltL’intérêt du cobalt réside dans le fait qu’ilconstitue 4 pour cent de la vitamine B12(cyanocobalamine). Mais il ne joue aucunrôle dans l’anémie liée à un déficit en vita-mine B12.

CuivreUne carence en cuivre provoque une ané-mie chez le bétail, mais on ne connaît pasde risque similaire chez l’homme. Ilsemble cependant qu’un déficit en cuivreinduise une anémie chez les prématurés,les sujets atteints de MPE et ceux sousnutrition parentérale exclusive. Il existeune affection congénitale rarissime, appe-lée maladie de Menkes, due à un défautd’absorption du cuivre.

MagnésiumLe magnésium se trouve surtout dans lesos, mais aussi dans la majeure partie destissus de l’organisme. La plupart desrégimes alimentaires contiennent suffi-

116 Les minéraux

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samment de magnésium, mais en cas dediarrhée ou de MPE, par exemple, lesdéperditions sont importantes et peuventinduire une faiblesse, des troubles du com-portement et parfois des convulsions.

SéléniumLes carences et les excès de sélénium onttous deux été décrits chez le bétail. Dansune région de Chine où le sol est pauvre ensélénium et l’alimentation aussi par voiede conséquence, on a décrit la maladie deKeshan qui affecte le muscle cardiaque.Les chercheurs chinois estiment que l’ap-port de sélénium alimentaire la prévien-drait. Le déficit en sélénium a aussi étéaccusé de favoriser certains cancers.

PlombLe plomb a une importance majeure ensanté publique à cause de sa toxicité. Onne connaît en revanche pas de carence

chez l’homme. L’intoxication par leplomb est un problème urbain quiconcerne surtout les enfants. Elle induitdes troubles mentaux et neurologiques etune anémie. Elle est liée soit à une inges-tion de plomb provenant de canalisationsd’eau ou de peintures anciennes, soit àl’inhalation de plomb atmosphérique dueaux émissions de gaz d’échappement desvoitures.

MercureOn ne connaît pas de déficit chez l’hom-me. Le problème tient à la toxicité du mer-cure. Le poisson concentre le mercure quipollue l’eau et contamine ceux qui leconsomment. En Asie, en Amérique latineet au Proche-Orient, on a décrit des intoxi-cations dues à l’application d’un fongicideau mercure sur des graines. L’intoxicationse traduit par des symptomes neurolo-giques graves et une paralysie.

La nutrition dans les pays en développement 117

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PHOTO 13Les petits poissons, mangés entiers, constituent une bonne source decalcium

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Les vitamines sont des substances orga-niques présentes dans les aliments à dosesinfimes et nécessaires au métabolisme. Onles regroupe, non pas parce qu’elles sontchimiquement proches ou ont des rôlesphysiologiques similaires, mais parce que,comme leur nom l’indique, ce sont des fac-teurs vitaux de l’alimentation et qu’ellesont été découvertes lors des recherches surles maladies résultant de leur carence.Enfin, elles ne peuvent se rattacher àaucun autre groupe d’aliments (glucides,lipides, protéines ou minéraux).

Lors de leur première classification, lesvitamines ont reçu chacune le nom d’unelettre de l’alphabet. Ultérieurement, on estrevenu aux noms chimiques. L’usage de cedernier se justifie lorsque la formule chi-mique est connue comme c’est le cas desvitamines B. Néanmoins, il reste intéres-sant de regrouper certaines vitaminesmême si elles n’ont pas de parenté chi-mique, car on les trouve généralementdans les mêmes aliments.

Dans ce livre, seules la vitamine A, cinqvitamines du groupe B (thiamine, ribofla-vine, niacine, B12 et acide folique), la vita-mine C et la vitamine D seront étudiées endétail. Les autres vitamines qui ont un rôlecrucial pour la santé sont l’acide pantothé-nique (dont la carence provoque le syn-drome des pieds brûlants mentionné plusloin), la biotine (ou vitamine H), l’acideparaminobenzoïque, la choline, la vitami-ne E et la vitamine K (antihémorragique).Ces dernières ne feront pas l’objet d’unedescription détaillée pour l’une ou l’autredes raisons suivantes:

• on ne connaît pas de déficience chez

l’homme dans des circonstances nor-males;

• les déficiences sont rares même en casd’alimentation très médiocre;

• la carence n’entraîne de maladie qu’enassociation avec d’autres affectionsdécrites dans les manuels médicaux;

• leur rôle en nutrition humaine n’estpas encore totalement élucidé.

Aucune d’elles n’est importante pour lespersonnes qui travaillent en nutritioncommunautaire dans les pays en dévelop-pement. Ceux qui veulent en savoir pluspeuvent se référer à des livres médicauxou à des ouvrages de nutrition plusdétaillés. Un résumé des principaux syn-dromes carentiels est fourni au chapitre 33,tableau 37.

VITAMINE A (RÉTINOL)La vitamine A a été découverte en 1913quand des chercheurs ont constaté unarrêt de la croissance de rats dont le seulapport lipidique était du gras de porc alorsque leur croissance reprenait normalementsi l’on substituait du beurre, au lard, lereste de l’alimentation étant inchangé. Desexpériences ultérieures ont montré que lejaune d’œuf et l’huile de foie de moruecontenaient le même facteur vital que l’ona appelé vitamine A.

On a remarqué plus tard que de nom-breux aliments d’origine végétale avaientles mêmes propriétés que la vitamine A dubeurre. Ces aliments contiennent un pig-ment jaune appelé carotène, dont une par-tie est convertie en vitamine A dans l’orga-nisme.

La nutrition dans les pays en développement 119

Chapitre 11

Les vitamines

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PropriétésLe rétinol est la forme principale de vita-mine A dans l’alimentation humaine (réti-nol est le nom de son dérivé alcoolique etc’est l’appellation habituelle). Dans saforme cristalline, c’est une substancejaune-vert pâle, soluble dans la graissemais insoluble dans l’eau, qui existe uni-quement dans les produits d’origine ani-male. Il existe d’autres formes de vitamineA qui ont une structure moléculaire légè-rement différente et sont moins actives,donc moins importantes en nutritionhumaine.

Les carotènes qui jouent le rôle de provi-tamines ou précurseurs de la vitamine Asont des substances jaunes largementrépandues dans les végétaux. Dans cer-tains aliments, leur couleur jaune est mas-quée par la couleur verte de la chlorophyl-le, souvent associée aux carotènes. Il existeplusieurs carotènes, dont le bêtacarotènequi est la source de vitamine A la plusimportante dans les pays non industriali-sés. Les autres carotènes ou caroténoïdesont peu d’importance en nutrition humai-ne. Les analyses réalisées autrefois ontrarement fait la distinction entre le bêtaca-rotène et les autres carotènes.

La vitamine A est un composant essen-tiel du pourpre rétinien et sa déficienceréduit la vision en lumière atténuée ou cré-pusculaire. C’est ce qu’on appelle héméra-lopie ou cécité nocturne. Le mécanismebiochimique des autres symptômes causéspar une déficience en vitamine A ne sontpas encore totalement élucidés. Sur le planhistologique, la modification principale estune métaplasie kératinisante qui affectedifférents épithéliums. La vitamine Asemble nécessaire à la protection des tissusde surface.

Plusieurs études ont démontré qu’unapport adéquat de vitamine A réduisait lamortalité des enfants dans certaines popu-lations. Une supplémentation en vitamineA réduit le taux de mortalité de la rougeo-

le. En ce qui concerne la diarrhée et lesinfections respiratoires, par contre, il n’y apas de preuve formelle de réduction deleur incidence ou de leur durée.

Comme la vitamine A cristalline pure,appelée rétinol, est maintenant disponible,l’activité de la vitamine A dans les ali-ments est largement exprimée et mesuréeen équivalents de rétinol (ER) plutôt qu’enunités internationales (UI) utilisées aupa-ravant. Une UI de rétinol équivaut à 0,3ER.

La vitamine A provient soit de vitamineA préformée soit de carotènes convertis enrétinol dans l’organisme. Le bêtacarotèneest le plus important des carotènes pourl’alimentation humaine et le plus aisémentconverti en rétinol. Il faut six molécules debêtacarotène pour aboutir à une moléculede rétinol, donc 6 µg de bêtacarotène pourobtenir 1 µg de rétinol ou 1 ER.

Sources alimentairesLa vitamine A proprement dite ne se trou-ve que dans les aliments d’origine anima-le, principalement le beurre, les œufs, lelait, la viande (surtout le foie) et certainspoissons. Mais, dans les pays en dévelop-pement, la majorité de la population nepeut compter que sur le bêtacarotènecomme source de vitamine A. On le trouvedans de nombreuses plantes. Les feuillesvert foncé de l’épinard, de l’amarante, despatates douces ou du manioc sont unemeilleure source que les feuilles vert clairde la laitue ou du chou. On en trouve éga-lement de bonnes quantités dans des fruitset légumes colorés comme les mangues,les papayes et les tomates ainsi que dansles patates douces de couleur jaune et dans

120 Les vitamines

Calcul du contenu en vitamine A des aliments

1 UI de rétinol = 0,3 µg de rétinol = 0,3 ER 1 ER = 3,33 UI rétinol 1 ER = 6 µg de bêtacarotène

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des légumes jaunes comme le potiron. Lescarottes sont aussi une excellente source,ainsi que le maïs jaune, seule céréale àcontenir du bêtacarotène. En Afrique del’Ouest, la principale source est l’huile depalme, largement utilisée pour la cuisson.La culture du palmier à huile s’est mainte-nant répandue à d’autres pays tropicaux.En Malaisie, il est largement cultivé maissurtout pour l’exportation de ses produits.

Le carotène comme la vitamine A tolè-rent relativement bien les températures decuisson usuelles. Par contre, le séchage ausoleil des feuilles vertes et autres alimentsréduit considérablement leur teneur encarotène. Or, c’est là une méthode tradi-tionnelle de conservation des feuilles sau-vages ou des légumes dans de nombreuxpays arides. Il est donc important de déve-lopper d’autres méthodes dans ces paysoù les déficits en vitamine A sont courants.

Absorption et utilisationLa conversion du bêtacarotène en vitami-ne A se fait dans la paroi de l’intestin.L’intestin le plus performant ne peutcependant en convertir qu’une fraction;c’est pourquoi il faut 6 mg de bêtacarotènesous forme d’aliment pour aboutir à 1 mgde rétinol. En l’absence de consommationde produits d’origine animale, il faut doncconsommer une grande quantité de bêta-carotène pour couvrir les besoins en vita-mine A.

L’utilisation du bêtacarotène estmédiocre lorsque l’alimentation estpauvre en graisses et les régimes carencésen vitamine A sont souvent aussi défi-cients en lipides. Des affections intesti-nales comme la dysenterie, la maladiecœliaque et la sprue réduisent l’absorptionde la vitamine A et la conversion du bêta-carotène. Les syndromes de malabsorp-tion et les infestations notamment parascaris, fréquentes sous les tropiques,réduisent également la capacité de conver-sion du bêtacarotène en vitamine A.

Les sels biliaires sont nécessaires à l’ab-sorption, donc une obstruction des voiesbiliaires la compromet et peut induire undéficit. Quant aux enfants, même dans descirconstances idéales, ils ne convertissentpas aussi aisément le bêtacarotène en vita-mine A que les adultes.

Le foie est le principal lieu de stockagede la vitamine A chez l’homme et la plu-part des vertébrés, ce qui explique pour-quoi l’huile de foie de poisson est si richeen vitamine A. Le rétinol est transporté dufoie vers les autres organes par une protéi-ne porteuse appelée Retinol BindingProtein (RBP). C’est pourquoi un déficitprotéique peut compromettre le métabo-lisme de la vitamine A en réduisant la syn-thèse de cette protéine.

Stockage dans l’organismeLe stockage hépatique est très importantcar, dans de nombreux pays tropicaux, lesaliments contenant de la vitamine A ou ducarotène ont une disponibilité saisonnière.Si on les consomme en quantité suffisantelorsqu’ils sont disponibles, généralementpendant la saison des pluies, le stockagepeut permettre de traverser au moins enpartie la saison sèche sans carence. Lacourte saison des mangues, par exemple,constitue une excellente occasion pour lesjeunes de récolter ces fruits pour reconsti-tuer leur stock hépatique.

ToxicitéLa vitamine A est toxique si elle estconsommée en excès. L’effet le plus remar-quable est l’épaississement de certains oslongs, accompagné de céphalées, de vomis-sements, d’hépatomégalie, d’altérationscutanées et de chute des cheveux. Les effetstoxiques surviennent rarement à cause d’unapport alimentaire mais constituent unrisque en cas de supplémentation. En outre,une supplémentation administrée avant laconception ou pendant la grossesse peutinduire des anomalies congénitales.

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Besoins humainsL’apport recommandé par la FAO etl’OMS est de 750 µg de rétinol par jourchez l’adulte; une femme qui allaite doitaugmenter l’apport de 50 pour cent, et unenfant le réduire. Cela est valable pourune alimentation diversifiée comportantà la fois de la vitamine A et du bêtacaro-tène. Si l’alimentation est d’origine entiè-rement végétale, un apport plus impor-tant de bêtacarotène est recommandépour compenser la faible conversion envitamine A.

CarenceUne carence se traduit par une sécheressepathologique de l’œil aboutissant à unexérophtalmie et parfois une kératomala-cie et une cécité. D’autres tissus épithé-liaux peuvent être affectés; la peau peutprésenter une kératose folliculaire. Cesaffections sont décrites en détail au cha-pitre 15.

THIAMINE (VITAMINE B1)Dans les années 1890, le HollandaisChristiaan Eijkman avait remarqué que,lorsque ses poulets recevaient la mêmealimentation que ses patients atteints debéribéri, ils développaient une faiblessedes membres inférieurs et d’autres signessimilaires à ceux du béribéri. Or, l’alimen-tation de ces patients consistait essentiel-lement en riz poli, très raffiné. QuandEijkman remplaça ce dernier par du rizentier, les poulets guérirent. Il montraalors qu’il y avait une substance dansl’enveloppe et le germe du grain de rizqui protégeait les poulets du béribéri.

Les chercheurs essayèrent d’isoler lacause des différences entre ces deux rizmais, malgré de nombreuses tentatives,ce n’est qu’en 1926 que la vitamine B1 afinalement été isolée sous sa forme cris-talline. Elle a été synthétisée 10 ans plustard et on l’appelle maintenant plutôtthiamine.

PropriétésC’est l’une des vitamines les plusinstables. Sa structure est assez lâche etse décompose rapidement en milieualcalin. La thiamine est très soluble dansl’eau et résiste à des élévations de tem-pérature jusqu’à 100 ºC mais est rapide-ment détruite au-delà (par exemple dansune poêle à frire ou un autocuiseur).

Les propriétés physiologiques et bio-chimiques de la thiamine ont fait l’objetde nombreuses recherches. On a montréque la thiamine avait un rôle très impor-tant dans le métabolisme des glucides,notamment dans leur oxydation et dansle métabolisme de l’acide pyruvique.

L’énergie consommée par le systèmenerveux dérive entièrement des glu-cides, et un déficit en thiamine bloque laphase finale de leur utilisation, d’où uneréduction de l’énergie disponible et desaltérations des tissus nerveux et du cer-veau. Comme la thiamine est impliquéedans le métabolisme des glucides, unedéficience est davantage susceptibled’apparaître chez des sujets pour qui lesglucides constituent la source d’énergieprincipale. C’est pourquoi les besoins enthiamine sont souvent exprimés en fonc-tion de la consommation de glucides.

La thiamine est à présent synthétisableet mesurée en mg.

Sources alimentairesLa thiamine est largement répanduedans les aliments qu’ils soient d’originevégétale ou animale. Les céréales et leslégumineuses en sont la meilleure sour-ce. Les légumes verts, le poisson, la vian-de, les fruits et le lait en contiennent tousdes quantités non négligeables. Dans lesgrains de céréales, la thiamine se trouvesurtout dans le germe et dans l’envelop-pe, dont la majeure partie est perdue lorsde la mouture (voir chapitre 32). Le sonde riz ou de blé notamment sont trèsriches en thiamine, de même que la levu-

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re. Par contre, les racines en contiennenttrès peu: le manioc n’en renferme pasplus que le riz poli. Il est surprenant queles populations d’Afrique, d’Asie etd’Amérique latine dont le manioc est unaliment de base ne souffrent pas davan-tage de béribéri.

Comme elle est très soluble dans l’eau,la thiamine risque d’être perdue en casde lavage prolongé ou de cuisson dansune grande quantité d’eau qui n’est pasconsommée. Pour les consommateurs deriz, il est important de le cuire avec justela quantité d’eau requise qui sera absor-bée lors de la cuisson ou de consommercette eau sous forme de soupe ou deragoût puisqu’elle renferme de la thia-mine et d’autres substances intéres-santes.

Le contenu en thiamine des céréales etdes légumineuses est stable pendant unan au moins dans de bonnes conditionsde conservation, mais il diminue pro-gressivement en cas d’attaque bactérien-ne ou fongique ou d’infestation par desinsectes.

Absorption et stockage dans l’organismeLa thiamine est facilement absorbée maispeu stockée. Des preuves expérimentalesmontrent que la quantité stockée suffitpour six semaines. La concentration dethiamine est plus élevée dans le foie, lecœur et le cerveau que dans les muscleset les autres organes. En cas d’apport ali-mentaire abondant, le surplus est excrétédans l’urine. L’organisme n’en contientque 25 mg environ.

Besoins humainsUn apport journalier de 1 mg suffit à unhomme modérément actif et 0,8 mg suffi-sent à une femme modérément active. Lebesoin est probablement supérieur pourune femme enceinte ou allaitante. LaFAO et l’OMS recommandent 0,4 mgpour 1 000 kcal.

CarencesLa carence en thiamine est à l’origine dubéribéri qui, à un stade avancé, entraîneune paralysie des membres inférieurs.Chez les alcooliques, le déficit en thiamineprovoque le syndrome de Wernicke-Korsakoff. Tous deux sont décrits au cha-pitre 16.

RIBOFLAVINE (VITAMINE B2)Les premiers travaux effectués sur les pro-priétés des vitamines de la levure etd’autres aliments ont montré que les fac-teurs antinévritiques qu’ils contenaientétaient détruits par un chauffage excessif,alors que le facteur de croissance ne l’étaitpas. Ce facteur était la riboflavine ultérieu-rement isolée de la fraction thermostableet synthétisée en 1935.

PropriétésLa riboflavine est une substance cristallinejaune. Elle est beaucoup moins soluble dansl’eau et plus résistante à la chaleur que lathiamine. Elle est par contre sensible à lalumière, si bien que le lait exposé à la lumiè-re perd rapidement des quantités considé-rables de riboflavine. Elle agit comme coen-zyme dans les processus d’oxydation destissus. On la mesure en mg.

Sources alimentairesLes principales sources de riboflavinesont le lait et ses dérivés. Les légumesverts, la viande (surtout le foie), le pois-son et les œufs en contiennent des quanti-tés intéressantes. Pour les populationsasiatiques, africaines et sud-américainesqui consomment peu de ces aliments, lescéréales et les légumineuses sont la sour-ce principale de riboflavine. Tout commela thiamine, la quantité de riboflavine estréduite par le procédé de polissage descéréales. Les aliments à base d’amidoncomme le manioc, le plantain, lesignames et les patates douces en contien-nent très peu.

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Besoins humainsPour un adulte moyen, 1,5 mg suffisentlargement tandis qu’une femme enceinteou allaitante doit en consommer un peuplus. La FAO et l’OMS recommandent 0,55mg par 1 000 kcal.

CarenceUne carence en riboflavine se traduit parune chéilite (inflammation des lèvres) etune stomatite angulaire. Ces manifesta-tions sont décrites au chapitre 22. C’estune carence répandue mais elle ne met pasla vie en danger.

NIACINE (ACIDE NICOTINIQUE, NICOTINAMIDE, VITAMINE PP)

De la même façon que l’histoire de la thia-mine est liée au béribéri, celle de la niacineest liée à la pellagre. Le béribéri est uneaffection de l’Orient liée à la consomma-tion de riz poli, alors que la pellagre estune maladie de l’Ouest liée à la consom-mation de maïs. Une alimentationmédiocre a été mise en cause il y a plus dedeux siècles par le physicien espagnolGaspar Casal. On a d’abord évoqué undéficit protéique, car une alimentationenrichie en protéines permettait de le gué-rir. Puis on a montré qu’un extrait de foie,quasiment exempt de protéines, amenaitégalement la guérison. En 1926, aux Etats-Unis, J. Goldberger a montré qu’un extraitde levure contenait un facteur de préven-tion de la pellagre, non protéique, qu’on adonc appelé PP. En 1937, le nicotinamide aété isolé et on a découvert qu’il guérissaitune affection canine similaire à la pellagre,la maladie de la langue noire.

Comme la pellagre frappait surtout lespopulations dont l’aliment de base était lemaïs, on a estimé que le maïs était particu-lièrement pauvre en niacine. On a montrédepuis lors que le pain blanc était bienplus pauvre en niacine que le maïs. Mais laniacine du maïs est peu disponible car elles’y trouve sous forme liée.

La découverte de l’effet préventif del’acide aminé tryptophane sur la pellagrechez des animaux de laboratoire a encorecompliqué les choses jusqu’à ce que l’ondécouvre que le tryptophane se conver-tissait en niacine dans l’organisme. Celaexpliquait comment une alimentationriche en protéines pouvait guérir la pel-lagre. Enfin, le fait que la zéine, la protéi-ne du maïs, soit très pauvre en trypto-phane achève d’élucider le lien entre maïset pellagre. On a aussi montré qu’une ali-mentation riche en leucine, comme unrégime à base de sorgho, interférait avecle métabolisme du tryptophane et de laniacine et pouvait donc entraîner une pel-lagre.

PropriétésLa niacine, dérivée de la pyrimidine, estune substance cristalline blanche, solubledans l’eau et très stable. Elle a été synthé-tisée. Son rôle principal concerne l’oxyda-tion des tissus. Elle existe sous deuxformes, l’acide nicotinique et le nicotina-mide. Elle est mesurée en mg.

Sources alimentairesLa niacine est largement répandue dansles aliments d’origine animale et végétale.Les meilleures sources sont la viande (sur-tout le foie), les arachides et le son ou lesgermes de céréales. Comme pour lesautres vitamines B, l’aliment de base tendà être la source principale. Les céréalesentières ou légèrement polies, bienqu’elles ne soient pas très riches en niaci-ne, en contiennent beaucoup plus que descéréales très polies. Les racines amylacées,les bananes plantains et le lait en contien-nent très peu. Les haricots, les pois et lesautres légumineuses en contiennentautant que les céréales.

Bien que la niacine du maïs ne soit pastotalement utilisable, le traitement du maïsavec un liquide alcalin comme le jus decitron vert, méthode traditionnelle au

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Mexique notamment, augmente sa disponi-bilité.

La cuisson, la conservation et le stockagecausent peu de déperditions.

Besoins humainsUn apport suffisant est de 20 mg par jour.Les besoins varient avec la quantité detryptophane de l’alimentation et selonl’aliment de base (maïs ou autre céréale).La FAO et l’OMS recommandent 6,6 mgpar 1 000 kcal.

CarenceUne carence se traduit par la pellagre, lamaladie des 3D: diarrhée, dermatose etdémence (voir chapitre 17). Elle débutepar des troubles cutanés et, en l’absence detraitement, s’aggrave au fil des années.

VITAMINE B12 (CYANOCOBALAMINE)L’anémie pernicieuse, appelée ainsiparce qu’elle était toujours fatale, étaitconnue bien avant que sa cause ne soitélucidée. En 1926, on a constaté que lesmalades amélioraient leur état en man-geant du foie cru. On a alors fabriquédes extraits de foie dont l’injection gué-rissait la maladie. En 1948, les cher-cheurs ont isolé du foie une substancequ’ils ont appelée vitamine B12. Injectéeen très faible quantité, elle guérissaitl’anémie pernicieuse.

PropriétésLa vitamine B12 est une substance cristalli-ne rouge contenant du cobalt. Elle est indis-pensable à la production des globulesrouges. Un apport supplémentaire de cettevitamine ou d’aliments qui en contiennentbeaucoup stimule la croissance chez les ani-maux de laboratoire. On la mesure en µg.

Sources alimentairesLa vitamine B12 n’existe que dans les ali-ments d’origine animale. Mais elle peutêtre synthétisée par de nombreuses bacté-

ries. Les animaux herbivores comme lebétail fabriquent leur vitamine B12 grâce àl’action des bactéries sur l’herbe dans leurestomac. Ce processus ne fonctionne paschez l’homme. Par contre, des alimentsvégétaux fermentés pourraient fournir dela vitamine B12.

Besoins humainsLes besoins humains sont faibles, proba-blement autour de 3 µg pour l’adulte. Unapport inférieur ne semble pas entraînerde maladie.

CarenceL’anémie pernicieuse n’est pas due à undéfaut d’apport alimentaire en vitamineB12, mais à une incapacité à utiliser cettevitamine à cause du déficit d’un facteurintrinsèque dans les sécrétions gastriques.Il est possible qu’un processus auto-immun limite l’absorption. Dans l’anémiepernicieuse, les globules rouges sont degrande taille (macrocytose) et la moelleosseuse contient de nombreuses cellulesanormales appelées mégaloblastes. Cetteanémie macrocytaire et mégaloblastiques’accompagne d’un manque d’acide chlor-hydrique dans l’estomac. Après un certaintemps d’évolution, des altérations de lamoelle épinière entraînent des symptômesneurologiques. En l’absence de traitement,le malade meurt.

Le traitement consiste à injecter desdoses massives de vitamine B12. Quandles analyses de sang sont redevenues nor-males, il suffit habituellement d’une injec-tion de 250 mg toutes les deux à quatresemaines pour garder le patient en bonnesanté.

La vitamine B12 guérit aussi l’anémiequi accompagne la sprue, maladie tropica-le qui compromet l’absorption de la vita-mine B12, de l’acide folique et d’autresnutriments.

Le ténia Diphyllobotrium latum, acquispar consommation de poisson peu ou pas

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cuit, vit dans l’intestin et a tendance àdétourner la vitamine B12 des aliments.L’anémie mégaloblastique qui en résultese traite par injection de vitamine B12 etélimination du parasite.

Il existe aussi des médicaments quiinterfèrent avec l’absorption de la vitami-ne B12.

En dehors de ces cas particuliers, unecarence ne survient qu’en cas de régimevégétarien strict. Mais, même dans ce cas,l’anémie macrocytaire n’est pas fréquenteet ne constitue pas un problème majeur desanté publique.

ACIDE FOLIQUE OU FOLATESEn 1929, Lucy Wills a décrit aux Indes uneanémie macrocytaire fréquente chez lesfemmes enceintes. Cette anémie s’amélio-rait avec certaines préparations de levuremais ne répondait pas au fer ni aux autresvitamines connues. Cette substance conte-nue dans la levure a d’abord été appeléefacteur de Wills. En 1946, on a isolé desfeuilles d’épinard une substance appeléeacide folique qui s’est avérée avoir lemême effet.

PropriétésLe terme “acide folique” ou “folates”recouvre plusieurs composés cristallins decouleur jaune dérivés de l’acide ptéroglu-tamique. L’acide folique est impliqué dansle métabolisme des acides aminés. L’acidefolique des aliments est facilement détruitpar la cuisson. On le mesure en mg.

Sources alimentairesLes aliments les plus riches sont leslégumes à feuilles vert foncé, le foie et lesrognons. Les autres légumes et les autresmorceaux de viande en contiennent enplus petites quantités.

Besoins humainsL’apport journalier recommandé a été fixéà 400 µg aux Etats-Unis.

CarenceUne carence est habituellement due à unapport alimentaire insuffisant, mais cepeut aussi être une malabsorption. Ellepeut être induite par des traitements anti-épileptiques. Elle entraîne une anémiemacrocytaire. C’est la deuxième anémienutritionnelle après la carence en fer.

Pendant la grossesse, cette carenceentraîne des défauts de fermeture du tubeneural du nouveau-né. Le rôle de l’acidefolique dans la prévention des cardiopa-thies ischémiques a également fait l’objetrécemment d’une attention renouvelée.

L’usage thérapeutique principal de l’aci-de folique réside dans le traitement del’anémie macrocytaire de la grossesse et dela petite enfance et dans la prévention desdéfauts de fermeture du tube neural. Ladose recommandée pour un adulte est de5 à 10 mg par jour.

Bien que l’administration d’acidefolique améliore les constantes sanguinesd’un patient atteint d’anémie pernicieuse,il ne peut ni prévenir ni améliorer lestroubles neurologiques. C’est pour cetteraison qu’il ne faut pas administrer d’aci-de folique dans le traitement de l’anémiepernicieuse sauf en association avec lavitamine B12.

VITAMINE C (ACIDE ASCORBIQUE)La découverte de la vitamine C est asso-ciée au scorbut qui a été rapporté en pre-mier par les navigateurs au long cours. En1497, Vasco de Gama a décrit le scorbut ausein de l’équipage de son voyage histo-rique d’Europe aux Indes via le cap deBonne-Espérance; plus de la moitié del’équipage en est morte. On a progressive-ment réalisé que le scorbut atteignait lespersonnes qui ne consommaient pas d’ali-ments frais. Ce n’est qu’en 1747 que JamesLind, en Ecosse, montra que la consomma-tion d’agrumes prévenait ou guérissait lescorbut. Cette découverte amena les capi-taines à inclure des aliments frais, notam-

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ment des agrumes, dans les rations deséquipages. Et le scorbut devint beaucoupplus rare.

Cependant, au XIXe siècle, le scorbutréapparut chez des nourrissons qui rece-vaient, au lieu de lait maternel ou de laitde vache frais, du lait concentré, devenutout récemment disponible. En effet, leprocessus de conservation par le chauffa-ge, s’il laissait intact le contenu en glu-cides, lipides et protides, détruisait la vita-mine C.

On découvrit ensuite que la vitamine Cn’était autre que l’acide ascorbique quiavait été identifié dans l’intervalle.

PropriétésL’acide ascorbique est une substance cris-talline blanche, hautement soluble dansl’eau et facilement oxydable. Il n’est pasaltéré par la lumière mais détruit par laforte chaleur surtout en solution alcaline.C’est un agent réducteur et antioxydantpuissant capable de limiter les effets nocifsdes radicaux libres. Il facilite aussi l’ab-sorption de fer non héminique des ali-ments végétaux.

L’acide ascorbique est nécessaire à la for-mation et à la conservation du matérielintercellulaire, en particulier du collagène.Pour simplifier, il est essentiel à la produc-tion d’une partie des substances qui lientles cellules entre elles comme le cimentmaintient des briques. Chez une personnecarencée en acide ascorbique, les cellulesendothéliales sont moins résistantes et depetites hémorragies sont fréquentes. Demême, la dentine des dents et le tissuostéoïde sont altérés. Cette propriété deliant cellulaire explique aussi les difficul-tés de cicatrisation et la lenteur de guéri-son des plaies manifestes chez les per-sonnes carencées.

Beaucoup de gens, y compris des scien-tifiques, pensent que des doses massivesde vitamine C préviennent le rhume et enatténuent les symptômes. Cela n’a pas été

prouvé. Une vaste étude a suggéré uneréduction de la gravité, mais la vitamine Cn’a pas empêché la survenue du rhume. Iln’est pas recommandé de prendre desdoses massives pendant une période pro-longée.

Sources alimentairesLes sources principales sont les fruits, leslégumes et diverses feuilles (photo 14).Pour les populations pastorales, le lait estsouvent la source principale. Les bananesplantains ou fruits sont les seuls alimentsde base à contenir une quantité intéressan-te de vitamine C. Les feuilles vert foncé del’amarante ou de l’épinard en contiennentbeaucoup plus que les feuilles plus clairesdu chou et de la laitue. Les racines commeles pommes de terre en contiennent desquantités faibles mais non négligeables. Lejeune maïs en contient un peu, de mêmeque les céréales et les légumineuses ger-mées. Les produits animaux comme laviande, le poisson, les œufs et le lait encontiennent de faibles quantités.

Besoins humainsLes opinions divergent considérablementsur ce sujet. Il semble qu’au moins 75 mgpar jour soient nécessaires pour que l’or-ganisme reste saturé. Cependant, desapports aussi faibles que 10 mg par jour nesemblent pas compromettre la santé. Ilsemble donc raisonnable de recommander25 mg pour un adulte, 30 mg pour un ado-lescent, 35 mg pendant la grossesse et 40mg pendant l’allaitement.

CarenceLe scorbut et les autres manifestations cli-niques de carence sont décrites au chapitre19. Le scorbut est rare de nos jours.Néanmoins, des “épidémies” de scorbutsont survenues récemment dans des zonesde famine et dans des camps de réfugiésen Afrique.

Au stade initial, la carence se traduit par

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un saignement des gencives et une lenteurde cicatrisation.

VITAMINE DLa vitamine D est associée à la préventiondu rachitisme et de son équivalent adulte,l’ostéomalacie (un ramollissement desos). On a longtemps soupçonné le rachi-tisme d’être dû à une carence nutrition-nelle, et l’huile de foie de morue était uti-lisée dans certains pays pour le guérir.Mais ce n’est qu’en 1919 que Sir EdwardMellanby a démontré de manière indiscu-table chez des chiots que le rachitismeétait bien d’origine nutritionnelle et quel’huile de foie de morue agissait par lebiais de la vitamine D qu’elle contient. Ona montré ultérieurement que l’effet durayonnement solaire sur la peau était àl’origine d’une production de vitamine Dpar l’organisme.

PropriétésPlusieurs composés, tous des stérols appa-rentés au cholestérol, ont des propriétésantirachitiques. Certains stérols qui nepossèdent pas initialement cette propriétél’acquièrent sous l’action de la lumièresolaire. Les deux principaux stérols activéssont la vitamine D2 (ergocalciférol) et lavitamine D3 (cholécalciférol).

Chez l’homme, quand la peau est expo-sée aux rayons ultraviolets du soleil, unstérol est activé pour former de la vitami-ne D, qui est alors disponible pour l’orga-nisme tout comme le serait la vitamine Dprovenant des aliments. Cette dernièren’est absorbée dans l’intestin qu’en pré-sence de bile.

La fonction de la vitamine D est de per-mettre l’absorption du calcium. La vitami-ne D, qu’elle soit alimentaire ou synthéti-sée dans la peau, agit comme une hormo-ne sur le métabolisme du calcium. Lerachitisme et l’ostéomalacie ne sont pasdus à un défaut d’apport alimentaire decalcium mais à un manque de vitamine D

qui ne permet pas l’utilisation correcte ducalcium alimentaire absorbé.

On la mesure habituellement en unitésinternationales; une UI équivaut à 0,025 µgde vitamine D3.

Sources alimentairesLa vitamine D n’existe à l’état naturel quedans les graisses de certains produits ani-maux. Les œufs, le fromage, le lait et lebeurre en sont de bonnes sources. La vian-de et le poisson contribuent modestement.Les huiles de foie de poisson sont trèsriches. Il n’y a pas du tout de vitamine Ddans les céréales, les légumes et les fruits.

Stockage dans l’organismeLa capacité de stockage dans les graisses etle foie est considérable. Ce stock est parti-culièrement important chez une femmeenceinte pour prévenir les risques derachitisme chez l’enfant.

Besoins humainsIl n’est pas possible de définir des besoinsalimentaires puisque la vitamine D pro-vient à la fois de l’alimentation et de l’ex-position au soleil. Pour les adultes quis’exposent raisonnablement au soleil, unapport alimentaire est inutile; de même, lamajorité des enfants d’Asie, d’Afrique etd’Amérique latine vivent très bien sansapport alimentaire notable de vitamine D.Pour les enfants non exposés au soleil, unedose d’huile de foie de morue équivalant à400 UI (10 µg) suffit à prévenir le rachitis-me avec une marge de sécurité.

CarenceLe rachitisme et l’ostéomalacie sont décritsau chapitre 18. Puisque la vitamine D pro-vient de l’action du soleil sur la peau, lescarences sont très rares dans les pays tro-picaux, bien que la production de vitami-ne D soit limitée par une moindre pénétra-tion du rayonnement solaire à travers unepeau pigmentée. Le rachitisme et l’ostéo-

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malacie ne se voient que dans les régionsoù les femmes et les enfants sont confinésà l’intérieur pour des raisons culturelles.De nombreux cas ont par exemple étésignalés au Yémen et en Ethiopie. Lesprincipales manifestations sont des altéra-tions du squelette.

ToxicitéComme les autres vitamines liposolubles,la vitamine D consommée en excès est dif-ficilement éliminée. Une surconsomma-tion, liée notamment à un apport excessifd’huile de foie de morue aux enfants, peutdonc être toxique. L’excès de vitamine Dpeut induire une hypercalcémie avec uneperte d’appétit et de poids, suivie deconfusion mentale et, enfin, d’unedéfaillance rénale. Quelques décès ont étérapportés.

AUTRES VITAMINESLes vitamines décrites ci-dessus sont cellespour lesquelles les carences sont les plusfréquentes, donc celles qui sont impor-tantes sur le plan de la santé publiquedans les pays non industrialisés. Les cinqvitamines qui font l’objet des paragraphessuivants ont une importance vitale entermes de santé mais sont rarement l’objetde carence dans les régimes alimentaires.

Vitamine B6 (pyridoxine) La vitamine B6 est soluble dans l’eau ettrès répandue dans les aliments d’origineanimale autant que végétale. Elle a unefonction importante de coenzyme dans denombreux processus métaboliques. Lescarences primaires sont rares, mais denombreuses carences secondaires ontaffecté les patients tuberculeux traités parisoniazide. Cette carence a entraîné destroubles neurologiques et, parfois, uneanémie et une dermatose. Maintenant cespatients reçoivent tous en principe 10 mgde vitamine B6 chaque jour en mêmetemps que l’isoniazide. Mais cette vitami-

ne est chère et augmente le coût du traite-ment antituberculeux.

BiotineLa biotine est une autre vitamine hydroso-luble du groupe B. Elle est largementrépandue dans les aliments et les carencessont très rares, mais elle a un rôle trèsimportant dans divers processus biochi-miques et métaboliques. L’avidine dublanc d’œuf cru empêche son absorptionchez l’animal et l’homme. Un rat ne rece-vant que du blanc d’œuf comme sourceprotéique maigrit et souffre de troublesneurologiques et cutanés. Des carencesexceptionnelles ont été rapportées chezdes personnes consommant surtout dublanc d’œuf et chez des patients souffrantde malabsorption sous alimentationparentérale.

Acide pantothéniqueL’acide pantothénique est une vitaminehydrosoluble présente en quantité suffi-sante dans la plupart des alimentationshumaines. Elle a des fonctions biochi-miques très importantes dans plusieursréactions enzymatiques, mais les déficitssont très rares. Une affection neurologiqueappelée “syndrome des pieds brûlants” aété rapportée chez des prisonniers deguerre détenus par les japonais entre 1942et 1945 et attribuée à une carence en acidepantothénique.

Vitamine E (tocophérol)Liposoluble, la vitamine E se trouve sur-tout dans les graisses végétales et lescéréales entières. On l’a appelée “vitamineantistérilité” ou “vitamine du sexe”, car lesrats soumis à une alimentation carencée envitamine E ne peuvent plus se reproduire:les testicules des mâles deviennent anor-maux et les femelles avortent spontané-ment.

A cause de son rapport avec la fertilité etdes effets des carences chez l’animal, la

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vitamine E est largement consommée enautomédication ou prescrite pour toutessortes de problèmes. Cependant, lescarences véritables sont rares et ne sur-viennent généralement que dans uncontexte de malabsorption grave (avecmalabsorption des graisses), d’anémiegénétique (dont le déficit en Glucose-6Phosphate Déshydrogénase) ou parfoischez des bébés de très petit poids de nais-sance.

Comme la vitamine C, la vitamine Eest un antioxydant et c’est à cause decette aptitude à réduire les radicauxlibres qu’elle est souvent recommandéeen prévention de l’athérome et du can-cer. Sa présence dans l’huile contribue àempêcher l’oxydation des acides grasinsaturés.

Vitamine KOn l’appelle la vitamine de la coagulation àcause de sa relation avec la prothrombine etle processus de coagulation et parce qu’ellepermet de guérir la maladie hémorragiquedu nouveau-né. La vitamine K provient enpartie de l’alimentation, et le reste est syn-thétisé dans l’intestin sous l’action des bac-téries. Cette dernière possibilité n’existe paschez le bébé à la naissance puisque sonintestin est exempt de bactéries. On admetmaintenant que des patients en alimenta-tion parentérale ou en situation de faminerecevant des antibiotiques à large spectrequi tuent les bactéries intestinales puissentsaigner par manque de vitamine K. Dans laplupart des hôpitaux, on donne de la vita-mine K aux nouveau-nés pour éviter lamaladie hémorragique.

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PHOTO 14Parmi tous les fruits sauvages comestibles, celui dubaobab est particulièrement riche en vitamine C

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