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Armand Colin PRÉSENTATION Author(s): Jean Dubois Source: Langages, No. 5, Pathologie du langage (MARS 1967), pp. 3-5 Published by: Armand Colin Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41680613 . Accessed: 28/11/2014 13:19 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Armand Colin is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Langages. http://www.jstor.org This content downloaded from 155.97.178.73 on Fri, 28 Nov 2014 13:19:01 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Pathologie du langage || PRÉSENTATION

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Armand Colin

PRÉSENTATIONAuthor(s): Jean DuboisSource: Langages, No. 5, Pathologie du langage (MARS 1967), pp. 3-5Published by: Armand ColinStable URL: http://www.jstor.org/stable/41680613 .

Accessed: 28/11/2014 13:19

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PRÉSENTATION

La pathologie du langage se définit comme l'étude des troubles de la communication intersubjective. Les énoncés pathologiques se distinguent de l'ensemble des énoncés standards par des règles systématiques définis- sant ces divergences qui peuvent être ramenées à deux types de rapports fondamentaux. Le sujet pariant, par suite d'une lésion organique, ou en raison d'une perturbation du système de communication, se trouve situé en face de ses interlocuteurs dans une relation différente de celles qu'ont les autres membres de la communauté linguistique. Le rapport du sujet à son langage et à ses énoncés en est modifié et son discours se carac- térise par des traits distinctifs qui déterminent son appartenance à un groupe non adapté à la communication ordinaire ou rejeté par la société.

Dans la mesure où cette science est « pathologie », elle pose la ques- tion de la relation qui existe entre l'énoncé désorganisé et l'énoncé reconnu comme normal. Le linguiste est confronté avec la délicate définition du normal et du pathologique; car les formes de désorganisation repérées se retrouvent, mais moins nombreuses ou moins systématiques, dans le langage commun. Il sera alors conduit à définir le pathologique en par- tant soit des performances enregistrées (en évaluant des seuils quanti- tatifs) soit des modifications structurelles posées comme hypothèses et en ramenant les énoncés produits à des manifestations plus ou moins constantes d'une mutation des rapports fondamentaux.

Mais les désorganisations du comportement verbal, ou la non-adap- tation de la communication aux conditions que requiert la situation, se présentent sous tant d'aspects divers qu'il est impossible de les considérer comme un tout analysable selon les mêmes méthodes. Trois grands types de troubles se dégagent, que distinguent à la fois des critères extralin- guistiques et les typologies linguistiques :

a) Les troubles de la parole résultent d'une lésion des appareils sensori- moteurs qui permettent l'émission ou la réception physique des signes verbaux. Ils résultent de lésions des organes périphériques, du bulbe ou du cervelet; celles-ci entraînent la paralysie des organes phonateurs, et produisent des dystaxies ou des ataxies (autrement dit une désorganisa- tion dans la synergie des organes moteurs). La réception des signes ver- baux est perturbée par les troubles de l'oreille interne, par une élévation des seuils de perception, etc. Le caractère linguistique qui oppose ces troubles aux troubles du langage est la forme relativement constante des règles de divergence. L'incidence des troubles périphériques sur le déve- loppement du langage chez l'enfant permet de constater qué de tels déficits relèvent aussi du domaine de la linguistique.

b) Les troubles du langage , définis sous le terme générique «d'apha- sie » par des critères extralinguistiques, cliniques et anatomiques, résultent

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de lésions localisées dans l'hémisphère gauche des droitiers et varient selon cette localisation. Dans une zone lésionnelle déterminée apparaissent, soit isolément soit conjointement avec d'autres perturbations intéressant ou non des fonctions symboliques, et parallèlement à des déficits sensitifs et moteurs, des troubles à l'émission et/ou à la réception des signes ver- baux. L'unité des aphasies est trouvée dans une référence anatomique et se fonde sur le fait que, dans ces syndromes, les troubles du langage sont dominants par rapport aux autres déficits, la réorganisation générale du comportement se faisant par rapport à ce trouble majeur. Elle relève donc de deux critères, l'un extralinguistique, l'autre résultant d'une hiérarchie opérée a priori sur l'ensemble des performances de l'aphasique. Le lin- guiste accepte comme une donnée, qu'il ne remet généralement pas en cause, la détermination d'une telle classe de désorganisations; mais le fait de considérer les distinctions anatomo-cliniques comme un acquis, sur lequel se fondent ses analyses, risquent de faire de celles-ci une tautologie ou un artefact. En revanche, les vérifications anatomo-cliniques lui per- mettront de confirmer ses propres hypothèses en lui proposant une « prévision » des erreurs.

A côté des aphasies, qui résultent de lésions focalisées, les démences , qui se manifestent au cours des lésions diffuses, posent aussi le problème de la désorganisation du langage à l'intérieur et en relation avec la tota- lité du comportement démentiel.

c) Les troubles de V énoncé résultent des modifications générales du comportement du sujet vis-à-vis du monde. Il existe des troubles du lan- gage consécutifs à ce qui est en fait une perturbation de la communication intersubjective, prise en son sens le plus large. Le comportement verbal des psychotiques est sous-tendu par des structures qui définissent d'une manière spécifique sa relation avec son langage et avec la situation de communication. Il y a chez eux une utilisation particulière des règles du code : ces règles se définissent par substitution, surimposition, exclusion, modification hiérarchique des rapports, etc. En ce sens, on peut parler de « néo-codes » psychotiques. Les langages des psychotiques se définissent comme autant de modèles de locuteurs, où les règles seraient trouvées dans l'organisation de l'énoncé lui-même. C'est aussi à ce niveau que peuvent être définis les modèles névrotiques.

Mais dans chacun des trois champs ainsi définis les variétés sont si nombreuses que la classification opérée et l'unité trouvée sont sans cesse remises en cause. Pour nous borner à l'exemple de l'aphasie, les formes sont ici multiples. Il est des aphasiques qui ont des difficultés insurmon- tables pour émettre un seul mot et d'autres au contraire qui ont un dis- cours fluent ou logorrhéique, que les substitutions rendent souvent incom- préhensible. Pour maintenir l'hypothèse unitaire d'un langage comme une totalité, on a considéré qu'il s'agissait alors de deux pôles entre lesquels se situaient toutes les autres variétés, mais cette unité est dans le prin- cipe de l'analyse et non dans les formes décrites. Il convient aussi de

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tenir compte dans l'analyse linguistique des réactions du sujet parlant en face de son propre déficit. Ce que l'on connaît de l'aphasique, c'est le comportement verbal subsistant utilisé pour communiquer. Autrement dit le linguiste devra tenir compte du système de compensation inhérent à la désorganisation elle-même. Il y a chez certains aphasiques un contrôle de l'émission et une reconnaissance des difficultés qui leur font adopter une économie de détresse. Cette forme d'adaptation dépend d'abord du déficit primaire reconnaissable par la corrélation avec les autres formes conjointes de désorganisations, mais aussi du niveau socio-culturel, des variables personnelles. Elle dépend encore de la cause de la lésion : il existe en effet des formes lentes (certaines tumeurs) qui permettent une adaptation progressive aux déficits; il y a des formes brutales (lésions vasculaires) qui provoquent des réactions comportementales et des sys- tèmes de compensation différents. Si l'on ne tenait pas compte de ces faits, on courrait alors le risque de dégager non des variétés d'aphasies, mais seulement des différences entre les structures psychologiques et les relations spécifiques instituées entre le sujet et son déficit.

Les problèmes ainsi posés pour l'aphasie se retrouvent sous d'autres formes pour toutes les désorganisations du langage : description synchro- nique et diachronique, corrélation entre les mécanismes physiologiques et les modèles pathologiques ou entre ces mêmes modèles et les structures psychologiques qu'ils déterminent ou qui les sous-tendent. Aussi la patho- logie du langage ne peut-elle être le domaine du seul linguiste, elle est l'objet de l'étude conjointe du psychologue, du neurologue et du psy- chiatre. Dès l'instant où se créent des disciplines nouvelles comme la neurolinguistique, c'est que les anciennes frontières tracées au xixe siècle entre des sciences humaines tendent à disparaître car elles ne correspon- daient plus au niveau atteint par l'objet de la recherche.

Mais la pathologie ne demande pas seulement à la linguistique des hypothèses de fonctionnement du langage, des méthodes et des techniques d'analyse d'énoncés, elle lui offre aussi un des moyens, parmi d'autres, d'assurer son statut de science expérimentale.

Afin de donner à ce numéro de la revue Langages une unité nécessaire et d'offrir un tableau aussi vaste que possible des domaines de la pathologie du langage, il a été fait appel à des articles origi- naux qui, issus des mêmes équipes de recherche, évoqueront les problèmes de l'aphasie, de la psychose, de la démence, de la névrose et ceux que posent les troubles du geste *.

Jean Dubois.

1. Travaux réalisés par les Recherches coopératives sur Programme, n° 41, du C. N. R. S., avec l'aide de l'I. N. S. E. R. M.; observations des psychotiques faits à l'hôpital Saint-Anne (service du docteur Daumezon).

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