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La Paresse comme vérité effective de l’homme

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La Paressecomme vérité effective de l’homme

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La Paressecomme vérité effective de l’homme

ED I T I ON S A L L I A

, RUE CHARLEMAGNE, PARIS IVe

Traduit du russe par

RÉGIS GAYRAUD

KAZIMIR MALEVITCH

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TITRE ORIGINAL

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La Paresse comme vérité effective de l’homme a été rédigée

en .

© Editions Allia, Paris, , , . KAZIMIR MALEVITCH

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La paresse comme vérité effective de l’homme.Le travail comme moyen d’atteindre la vérité.

La philosophie de l’idée socialiste.

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J ’A I toujours ressenti une impressionétrange en entendant ou en lisant des pro-pos réprobateurs sur la paresse avérée detel ou tel, membre du gouvernement ousimple parent. “La paresse est la mère detous les vices” – c’est ainsi qu’on a stigma-tisé, que l’humanité entière, toutes nationsconfondues, a stigmatisé cette activité par-ticulière de l’homme. Cette accusationportée contre la paresse m’a toujours sem-blé injuste. Pourquoi le travail est-il à cepoint exalté, porté sur le trône de la gloireet des louanges, quand la paresse estclouée au pilori, pourquoi les paresseuxdans leur ensemble sont-ils couverts d’op-probre, marqués du sceau de l’infamie, dusceau de la mère-paresse, quand le moin-dre travailleur est voué à la gloire, auxhonneurs, aux récompenses ? J’ai toujourspensé que ce devait être exactement lecontraire : le travail doit être maudit,comme l’enseignent les légendes sur le

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à chacun. C’est, me semble-t-il, ce quis’est passé avec la paresse. Sur un couver-cle, il y avait écrit : “La paresse est la mèrede tous les vices”. On en a recouvert unpot au hasard et jusqu’à ce jour, on croitque ce pot contient l’infamie et le vice.Certes, l’usage du mot “paresse” pourcaractériser l’homme est très dangereux.Pour l’homme, il n’y a rien de plus dange-reux au monde ; il suffit de songer que laparesse est la mort de “l’être”, c’est à direde l’homme, qui ne trouve son salut quepar la production, par le travail – s’il netravaille pas, le pays tout entier ira à lamort, le peuple entier est menacé de mort.En conséquence, il est clair que cet étatdoit être combattu comme un état mortel.Afin d’échapper à la mort, l’hommeinvente des systèmes de vie où tous tra-vailleraient et où il n’y aurait pas un seulparesseux. Voilà pourquoi le système dusocialisme, menant au communisme, flé-trit tous les systèmes qui ont existé avantlui, pour que l’humanité tout entière suiveun seul chemin laborieux et qu’il ne reste

paradis, tandis que la paresse doit être lebut essentiel de l’homme. Mais c’est l’in-verse qui s’est produit. C’est cette inver-sion que je voudrais tirer au clair. Etcomme toute explication passe par la miseen évidence de symptômes, d’états exis-tants, que toute analyse ou toute conclu-sion est fondée sur ces symptômes, je veuxdans cette étude expliquer le sens querecèle le mot “paresse”.De nombreux mots recouvrent fré-

quemment des vérités que l’on ne peutpas exhumer. Il me semble que l’homme aagi avec les vérités de façon étrange,à la manière d’un cuisinier qui disposede nombreux pots emplis de nourrituresdiverses. Bien sûr, chaque pot a reçu soncouvercle propre, mais par distraction, lecuisinier a refermé les pots en mélangeantles couvercles, et maintenant, il est impos-sible de deviner ce qu’il y a dans les pots.Il s’est produit la même chose avec lesvérités : sur de nombreux vocables, sur denombreuses vérités, il y a des couvercles,et ce qu’il y a sous le couvercle paraît clair

LA PARESSE COMME VÉRITÉ EFFECTIVE DE L’HOMME

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tel système socialiste du travail a en pro-jet, dans son action bien sûr inconsciente,de mettre au travail toute l’humanité,pour accroître la production, pour garan-tir la sécurité, pour renforcer l’humanitéet par sa capacité de production affirmerson “être”. Certes, ce système, qui ne sesoucie pas de l’individu, mais de toutel’humanité, est incontestablement juste.Mais le système capitaliste aussi. Il offre lemême droit au travail, la même liberté dutravail, d’accumulation de l’argent dansles banques pour se garantir la “paresse”dans l’avenir, et présuppose donc que lamonnaie est ce signe qui séduira parcequ’il apportera la félicité de la paresse àlaquelle, en réalité, chacun songe. Envérité, telle est la raison d’être de la mon-naie. L’argent n’est rien d’autre qu’unpetit morceau de paresse. Plus on en auraet plus on connaîtra la félicité de laparesse. Les gens d’idées, qui se préoccu-pent du peuple, n’ont bien sûr pas vu,consciemment, ce principe et ce sens. Ilsont toujours été solidaires pour penser

plus un seul inactif. Voilà pourquoi la loila plus cruelle de ce système humain sti-pule : “Qui ne travaille pas ne mangepas”, voilà pourquoi il est hanté par lecapitalisme, parce que celui-ci engendredes “paresseux” et que l’argent conduit àcoup sûr à la paresse. De sorte que lamalé diction jetée par Dieu sur les hom-mes avec le travail reçoit dans les systèmessocialistes la plus haute bénédiction. Toutun chacun doit se ranger sous cette béné-diction, sous peine de mourir de faim. Telest le sens qui se cache dans le systèmeouvrier. Ce sens réside en ceci : sous tousles autres régimes, jamais l’homme n’au-rait ressenti la proximité de la mort de lacommunauté et n’aurait vu que la pro-duction engendre du bien non seulementpour la communauté dans son ensemblemais pour chacun en particulier. Dans lesystème laborieux commun, chacun setrouve confronté à la mort, chacun n’aqu’un seul objectif : trouver une planchede salut dans le travail, la production dutravail, sous peine de mourir de faim. Un

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