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Pour la science 389 Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2008 - Vol. 2 - N°4 Images Pied de Charcot aigu S. Vinzio, F. Luca, M. Taquet, J.-L. Schlienger Service de médecine interne et nutrition, Hôpital de Hautepierre, Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, Strasbourg. Correspondance : Stéphane Vinzio Service de médecine interne et nutrition Hôpital de Hautepierre Hôpitaux Universitaires de Strasbourg Avenue Molière 67098 Strasbourg cedex [email protected] Le pied cubique de Charcot est l’archétype de la neuro-ostéo- arthropathie diabétique. Il est pour- tant souvent méconnu à la phase aiguë et peut survenir avant toute lésion ulcérative du pied. C ette complication aiguë particu- lièrement grave [1] se caractérise par une tuméfaction œdéma- teuse, érythémateuse et chaude du pied (figure 1). Elle peut être indolore du fait de la neuropathie qui est à l’origine de sa genèse. Le pied aigu de Charcot en impose volontiers pour une infection ou un phlegmon, d’autant que la radiogra- phie initiale peut être normale, contraire- ment au cas présenté ici (figures 2 et 3). Une crise de goutte ou une phlébite sont d’autres diagnostics différentiels. Un diagnostic retardé se fait au détriment de l’immobilisation qui est seule à même d’empêcher une évolution dramatique pouvant conduire à l’indication d’une amputation. La biologie est peu contributive au diagnos- tic positif. La protéine C réactive (CRP) peut être modérément augmentée. L’examen radiologique le plus intéressant, bien que peu accessible, est l’IRM lorsqu’elle per- met de visualiser des microfractures des os du tarse ou un œdème périosseux grâce à un rehaussement au gadolinium. La scintigraphie osseuse apporte un autre argument diagnostique. Instaurées précocement, l’immobilisation et la décharge absolue pendant deux à quatre mois à l’aide d’une botte plâtrée ou, mieux, d’une botte amovible pneu- matique, parviennent à éviter des lésions ostéoarticulaires majeures. Les biphos- phonates en parentéral auraient un effet favorable sur l’inflammation, la douleur et l’évolution lésionnelle (figure 4). Référence [1] Tan AL, Greenstein A, Jarrett SJ, McGonagle O. Acute neuropathic joint disease: a medical emergency? Diabetes Care 2006;28:2962-4. © 2008 - Elsevier Masson SAS - Tous droits réservés. Figure 1 : Pied de Charcot à la phase aiguë. Figure 2 : Pied de Charcot à la phase aiguë : radiographie comparative des deux pieds. Figure 3 : Pied de Charcot à la phase aiguë : radiographie de profil. Le pied de Charcot aigu est bien une urgence thérapeutique à laquelle il faut penser chez un patient diabétique en cas de pied inflammatoire. Les points essentiels Figure 4 : Aspect radiologique en charge un an après : traitement par décharge et immobilisa- tion (botte pneumatique) pendant quatre mois, perfusion d’acide pamidronique (2 x 60 mg IV à une semaine d’intervalle). On notera la média- calcose très marquée des artères, signe de neuro- pathie ancienne, très fréquente dans ce cas.

Pied de Charcot aigu

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Page 1: Pied de Charcot aigu

Pour la science 389

Médecine des maladies Métaboliques - Septembre 2008 - Vol. 2 - N°4

Images

Pied de Charcot aiguS. Vinzio, F. Luca, M. Taquet,

J.-L. Schlienger

Service de médecine interne et nutrition, Hôpital de Hautepierre, Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, Strasbourg.

Correspondance :

Stéphane VinzioService de médecine interne et nutritionHôpital de HautepierreHôpitaux Universitaires de StrasbourgAvenue Molière67098 Strasbourg [email protected]

Le pied cubique de Charcot est

l’archétype de la neuro-ostéo-

arthropathie diabétique. Il est pour-

tant souvent méconnu à la phase

aiguë et peut survenir avant toute

lésion ulcérative du pied.

C ette complication aiguë particu-lièrement grave [1] se caractérise par une tuméfaction œdéma-

teuse, érythémateuse et chaude du pied (figure 1). Elle peut être indolore du fait de la neuropathie qui est à l’origine de sa genèse. Le pied aigu de Charcot en impose volontiers pour une infection ou un phlegmon, d’autant que la radiogra-phie initiale peut être normale, contraire-ment au cas présenté ici (figures 2 et 3). Une crise de goutte ou une phlébite sont d’autres diagnostics différentiels.Un diagnostic retardé se fait au détriment de l’immobilisation qui est seule à même d’empêcher une évolution dramatique pouvant conduire à l’indication d’une amputation.La biologie est peu contributive au diagnos-tic positif. La protéine C réactive (CRP) peut être modérément augmentée. L’examen radiologique le plus intéressant, bien que peu accessible, est l’IRM lorsqu’elle per-met de visualiser des microfractures des os du tarse ou un œdème périosseux grâce à un rehaussement au gadolinium. La scintigraphie osseuse apporte un autre argument diagnostique.Instaurées précocement, l’immobilisation et la décharge absolue pendant deux à quatre mois à l’aide d’une botte plâtrée ou, mieux, d’une botte amovible pneu-matique, parviennent à éviter des lésions ostéoarticulaires majeures. Les biphos-phonates en parentéral auraient un effet favorable sur l’inflammation, la douleur et l’évolution lésionnelle (figure 4).

Référence

[1] Tan AL, Greenstein A, Jarrett SJ, McGonagle O. Acute neuropathic joint disease: a medical emergency? Diabetes Care 2006;28:2962-4.© 2008 - Elsevier Masson SAS - Tous droits réservés.

Figure 1 : Pied de Charcot à la phase aiguë.

Figure 2 : Pied de Charcot à la phase aiguë :

radiographie comparative des deux pieds.

Figure 3 : Pied de Charcot à la phase aiguë :

radiographie de profil.

Le pied de Charcot aigu est bien une

urgence thérapeutique à laquelle il faut

penser chez un patient diabétique en

cas de pied inflammatoire.

Les points essentiels

Figure 4 : Aspect radiologique en charge un an

après : traitement par décharge et immobilisa-

tion (botte pneumatique) pendant quatre mois,

perfusion d’acide pamidronique (2 x 60 mg IV

à une semaine d’intervalle). On notera la média-calcose très marquée des artères, signe de neuro-pathie ancienne, très fréquente dans ce cas.