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10 ÉLECTRICITÉ QUÉBEC / Avril 2010 Qu’est-ce qu’un système d’éclairage efficace ? C’est un système qui tire profit au maximum de l’éclairage naturel tout en tenant compte de l’occupation, de façon à minimiser l’utilisation d’un éclairage artificiel de plus en plus efficace. Il ne s’agit donc pas d’une simple mesure appliquée hors contexte. Il ne suffit pas d’utiliser les dernières technologies de contrôle, ni même d’installer les appareils les plus efficaces sur le marché. En effet, un bâtiment mal orienté ne saurait tirer profit d’un système de gradation par détection de luminosité ; de même, un bâtiment où tous les murs sont peints en bleu marine n’échappera pas aux lois physiques de l’absorption de la lumière, etc. Concevoir un système d’éclairage efficace peut sembler un défi important, mais des sources efficaces d’éclairage contrôlées intelligemment constituent un bon point de départ. SOURCES EFFICACES Comme nous le savons, le fluorescent a encore la cote… mais soyons réalistes ! Il ne peut être utilisé dans toutes les applications. La diode électrolumines- cente (DEL), technologie fantastique toujours à l’état embryonnaire, n’est malheureusement pas encore la marathonienne que certains prétendent. Les halogénures métalliques, sources que l’on associe systématiquement à de l’éclairage haute puissance, concurrencent maintenant les lampes incandescentes- Au Québec, nous avons consommé en 2007 environ 198,2 milliards de kWh, dont 50 % sont attribuables aux secteurs résidentiel et commercial 1 . Selon Ressources naturelles Canada, dans ces secteurs, 15 à 22 % de l’électricité consommée sert à l’éclairage, ce qui représente 21,5 milliards de kWh, soit plus d’un milliard de dollars annuellement. Doit-on encore se poser la question sur la nécessité d’un effort dans la conception de systèmes d’éclairage efficaces ? Poser les bases d’un éclairage durable ! EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE – BÂTIMENT VERT Par Mathieu Leclerc, ing., PA LEED ® , Pageau Morel Image Copyright Carmen Martínez Banús, 2010

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10 ÉLECTRICITÉ QUÉBEC / Avril 2010

Qu’est-ce qu’un système d’éclairageefficace ? C’est un système qui tireprofit au maximum de l’éclairagenaturel tout en tenant compte de l’occupation, de façon à minimiserl’utilisation d’un éclairage artificielde plus en plus efficace.

Il ne s’agit donc pas d’une simplemesure appliquée hors contexte. Il ne suffit pas d’utiliser les dernières technologies de contrôle, ni mêmed’ins taller les appareils les plus efficacessur le marché. En effet, un bâtiment

mal orienté ne saurait tirer profit d’unsystème de gradation par détection deluminosité ; de même, un bâtiment oùtous les murs sont peints en bleu marinen’échappera pas aux lois physiques del’absorption de la lumière, etc.

Concevoir un système d’éclairageefficace peut sembler un défi important,mais des sources efficaces d’éclairagecontrôlées intelligemment constituentun bon point de départ.

SOURCES EFFICACES

Comme nous le savons, le fluorescent aencore la cote… mais soyons réalistes !Il ne peut être utilisé dans toutes lesapplications. La diode électrolumines-cente (DEL), technologie fantastiquetoujours à l’état embryonnaire, n’estmalheureusement pas encore lamarathonienne que certains prétendent.Les halogénures métalliques, sourcesque l’on associe systématiquement à del’éclairage haute puissance, concurrencentmaintenant les lampes incandescentes-

Au Québec, nous avons consommé en 2007 environ 198,2 milliards de kWh, dont 50 %sont attribuables aux secteurs résidentiel et commercial1. Selon Ressources naturellesCanada, dans ces secteurs, 15 à 22 % de l’électricité consommée sert à l’éclairage, ce qui représente 21,5 milliards de kWh, soit plus d’un milliard de dollars annuellement.Doit-on encore se poser la question sur la nécessité d’un effort dans la conception desystèmes d’éclairage efficaces ?

Poser les basesd’un éclairagedurable !

EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE – BÂTIMENT VERTPar Mathieu Leclerc, ing., PA LEED®, Pageau Morel

Image Copyright Carmen Martínez Banús, 2010

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EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE – BÂTIMENT VERT

halogènes dans les applications esthé-tiques tout en les supplantant en duréede vie et en efficacité (dommagequ’elles soient difficiles à moduler). Lesoleil, grand oublié, reste et resteratoujours la source d’éclairage la plusefficace, mais encore faut-il pouvoirgérer les gains de chaleur et l’éblouisse-ment qu’il engendre.

Il est bien délicat et certainementpérilleux de choisir une source sim-plement pour ses caractéristiquesintrin sèques. En effet, les lampes sontgénéralement installées dans un appa -reil qui joue un rôle important dans laquantité de lumière qui est réellementémise vers la tâche. De par sa concep-tion, une partie de la lumière émise parla source sera perdue à jamais dans l’appareil lui-même… la réflectance desa peinture, la transmittance de sondiffuseur, les trous dans son boîtier nesont que quelques-unes des causes deperte de lumière. Il est donc importantde bien choisir non seulement la source,mais aussi l’appareil qui filtre et trans-forme la lumière que cette dernière émet.

Ainsi, le choix de l’appareil d’éclairageest souvent l’objet de discussions et,parfois, de compromis entre les dif-férents intervenants. Une collaborationactive réunissant très tôt dans un projetles architectes, ingénieurs, entrepre-neurs et utilisateurs permet d’optimiserles systèmes. Cette synergie se nommela conception intégrée. Elle est, aumême titre que la qualité des sources,un facteur important de la spécificationd’un système d’éclairage efficace.

En résumé, choisir une source efficace,installée dans un appareil efficace, biensûr, permet déjà une certaine économiepar rapport à ce qu’on retrouve dans lesimmeubles typiques du parc immobilierquébécois. Il est question d’une diminu-tion de 10 % de la consommation totaledu bâtiment simplement par l’implanta-tion de cette mesure.

CONTRÔLES D’ÉCLAIRAGE

Maintenant que nous disposons d’unsystème d’éclairage artificiel efficace,encore faut-il en minimiser l’utilisation.Deux raisons fort logiques nous pous -

sent à éteindre ou à ne pas allumer leslumières. Premièrement, nous n’allu-mons pas ces lumières lorsque lespièces que nous utilisons baignent dansla lumière naturelle gracieusementofferte par le soleil. Deuxièmement,nous avons tendance à éteindre les

lumières lorsque nous quittons unepièce pour un certain temps.Cependant, nous avons plus souvent ceréflexe à la maison que n’importe oùailleurs. Ces comportements tout à faitlouables ne se traduisent pas vraimentdans les bâtiments commerciaux, insti-

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EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE – BÂTIMENT VERT

tutionnels, industriels, etc. – d’où lapréoccupation lors de la conception.

En effet, la grande majorité desbâtiments publics utilisent la techniquedu balayage qui consiste ni plus nimoins à allumer et éteindre l’éclairageartificiel à des heures prédéterminées,sans égard à l’occupation ni à l’apportde l’éclairage naturel. Il faut doncintégrer du contrôle dans le systèmed’éclairage, car aussi efficace soit-il, s’ilest utilisé pour éclairer des pièces videsou des aires déjà saturées en lumièrenaturelle, l’énergie reste gaspillée.

Il existe deux types de contrôles, unpour chacune des conditions mention-nées précédemment : le détecteur deprésence et le détecteur de luminosité.

Le détecteur de présence permet lafermeture des appareils qui y sontraccordés lorsqu’il ne perçoit aucuneprésence pendant un certain laps detemps. Il peut être ultrasonique ouinfrarouge, avec des applicationspropres dans chacun des cas. Ledétecteur ultrasonique est efficace dansles aires où l’on retrouve des obstaclestels que des partitions, des étagères, etc. Il n’est pas conseillé de l’utiliserdans des lieux bruyants ou prèsd’équipements en mouvement (parexemple, près d’une unité de climatisa-tion). Le détecteur infrarouge convient

mieux aux pièces fermées et dégagéestelles que les bureaux, les salles de con-férence, etc. Cette technologie est peurecommandable dans les endroitsencombrés ou lorsque située trop prèsde diffuseurs et de sources de chauffage.Ceci étant dit, en 2010, spécifier desdétecteurs muraux infrarouges dans lespièces fermées devrait être pratique-ment systématique. Ces détecteurspeuvent aussi engendrer des économiesadditionnelles en coupant ou réduisantl’air climatisé des locaux non occupés.

Pour ce qui est des détecteurs de lumi-nosité, deux stratégies sont possibles : onpeut soit éteindre et allumer complètementune partie ou la totalité des lampes d’unappareil, soit utiliser la gradation. Lesystème de gradation présente un avantageà deux niveaux par rapport à l’autrestratégie. Premièrement, il est définitive-ment souhaitable pour l’utilisateur d’avoirune variation subtile et continue du niveau

d’éclairage artificiel (tel que le permet lagradation) plutôt que de subir un change-ment brusque et agressant associé à unestratégie ouvert/fermé. L’autre raison estque le système de gradation offre unmeilleur potentiel d’économie d’énergieque sa contrepartie. Effectivement, ilpermet de moduler à volonté et d’unefaçon continue l’éclairage artificiel de 10 à 100 % de sa capacité, selon le niveaud’éclairage naturel disponible. Pour sa part,le système ouvert/fermé devra inévitable-ment être utilisé à pleine capacité lorsquela partie toujours allumée (généralement50 %) ne sera plus suffisante pour éclairerla tâche, et ce, même si de l’éclairagenaturel est encore disponible.

La conception intégrée joue un rôleimportant dans le contrôle. Parexemple, il sera difficile de profiterpleinement d’un système de gradationsi toutes les pièces aux périmètres d’unbâtiment sont des salles de conférenceset autres locaux à faible utilisation.L’implantation des deux principalesmesures de contrôle d’éclairage dans unbâtiment apportera typiquement deséconomies d’environ 40 % sur la con-sommation d’éclairage (± 8 % pour le bâtiment).

CONCLUSION

Le secret de l’élaboration d’un systèmeefficace, pas seulement en éclairage,réside dans la conception intégrée quipermet aux intervenants de toujoursgarder en tête que chacune de leursdécisions aura un impact sur le succèsmême des concepts qu’ils ont établis.N’oublions pas qu’un projet de développe-ment durable intègre des solutions au niveau de trois aspects : sociaux,économiques et écologiques. Un éclairageefficace permet sans nul doute derépondre à plusieurs préoccupationsreliées au développement durable !

K Par Mathieu Leclerc, ing., PA LEED®

M. Leclerc travaille pour Pageau Morel. Onpeut le joindre par téléphone au 514 382-5150.

TABLEAU 1 D CARACTÉRISTIQUES DES PRINCIPALES SOURCES D’ÉCLAIRAGE DISPONIBLES DE NOS JOURS

Une collaboration active réunissant très tôtdans un projet les

architectes, ingénieurs,entrepreneurs et utilisateurs permet

d’optimiser les systèmes.

Références1. Ministère des Ressources naturelles et de

la Faune du Québec et Statistique Canada.