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CHÔMAGE L’INVERSION, C’EST MAINTENANT PAGES 4-7 Vingt mille chômeurs de moins au mois d’octobre (-0,6%): la promesse de Hollande sur la baisse du nombre des demandeurs d’emploi avant fin 2013 prend forme. Même si toutes les catégories ne sont pas concernées. BOB WILSON BOB WILSON INVITÉ SPÉCIAL PUBLICITÉ 1,60 EURO. PREMIÈRE ÉDITION N O 10123 VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 WWW.LIBERATION.FR IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,70 €, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats-Unis 5$, Finlande 2,70 €, Grande-Bretagne 1,80 £, Grèce 2,70 €, Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 1,70 €, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays-Bas 2,30 €, Portugal (cont.) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 3,20 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000CFA.

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CHÔMAGEL’INVERSION,C’ESTMAINTENANT

PAGES 4­7

Vingt mille chômeurs de moins au mois d’octobre (-0,6%):la promesse de Hollande sur la baisse du nombre des

demandeurs d’emploi avant fin 2013 prend forme. Mêmesi toutes les catégories ne sont pas concernées.

BOB

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BOB WILSONINVITÉSPÉCIAL

PUBLICITÉ

• 1,60 EURO. PREMIÈRE ÉDITION NO10123 VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 WWW.LIBERATION.FR

IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,70 €, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats­Unis 5 $, Finlande 2,70 €, Grande­Bretagne 1,80 £, Grèce 2,70 €,Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 1,70 €, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays­Bas 2,30 €, Portugal (cont.) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 3,20 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000CFA.

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BOB WILSONINVITÉSPÉCIAL

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• 1,60 EURO. PREMIÈRE ÉDITION NO10123 VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 WWW.LIBERATION.FR

IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,70 €, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats­Unis 5 $, Finlande 2,70 €, Grande­Bretagne 1,80 £, Grèce 2,70 €,Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 1,70 €, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays­Bas 2,30 €, Portugal (cont.) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 3,20 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000CFA.

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Metteur en scènemondialement reconnuet artiste aux multiplestalents, Bob Wilson estcette année l’invité duFestival d’automne àParis, où nombre de sesspectacles sont donnésdans différents théâtres,en parallèle d’uneexposition au Louvreoù il présente sacollection personnelle etdes portraits vidéosrécemment réalisés avecLady Gaga (lire page 37).A cette occasion, il aaccepté d’être pour unjour le rédacteur en chefde Libération. Mettre enscène un journal est uneexpérience inédite pourcet esprit insatiable, et ils’y est investi avec uneformidable énergie etune immense générosité.Il a d’abord redessiné lestêtières de l’ensembledu journal et les lettrinesdans le styletypographique trèspersonnel qu’ilaffectionne pour seslettres. Il a ensuite choiside faire courir au bas despages des phrases d’untexte de son ami JohnCage. Enfin, il s’est frottéà l’actualité du jour, enpuisant des images danssa collection pourcomposer des pleinespages en regard et encontrepoint des grandssujets du Libération quevous tenez entre lesmains. Sylvain Bourmeau

BOB WILSONINVITÉSPÉCIAL

Here we are now at the beginning More and more I have the feeling

Dash Snow,Self­portrait,

2009.COLLECTIONPARTICULIÈRE

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 20134 •

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Le Président a fait preuve d’une prudence extrême, le jourmême où son engagement de l’inversion de la courbedes demandeurs d’emploi commence à se concrétiser.

François Hollande faittrembler le chômage

Il était 12h30 hier matin, au mi-nistère du Travail. Michel Sapin

est assis à la table de réunion deson bureau, rue de Grenelle. Il relit àhaute voix le projet de communiqué depresse que vient de lui faire passer sondirecteur de cabinet et qui sera envoyéà toutes les rédactions en milieud’après-midi. «Après un ralentissementprogressif depuis plusieurs mois, le chô-mage a reculé en octobre : -20 500 de-mandeurs d’emploi inscrits à Pôle Emploi,soit -0,6%.» Sapin marque un temps,puis relève la tête : «L’inversion de lacourbe du chômage, c’est aujourd’hui»,lâche-t-il avec un sourire qui a du malà cacher une vraie satisfaction.En septembre, Sapin avait prédit à ses

proches que la courbe du chô-mage s’inverserait pour la pre-mière fois en octobre. C’est fait.

Enfin partiellement fait, car uni-quement pour les chômeurs de catégo-rie A, c’est-à-dire ceux qui sont sansemploi (lire page 6). En revanche, si onprend en compte les catégories B et C(qui ont un emploi partiel ou tempo-raire), le chômage est toujours à lahausse avec, au total, 39600 nouveauxdemandeurs d’emploi, soit +0,8% parrapport au mois précédent.Sapin reprend la lecture de son commu-niqué: «L’inversion de la courbe du chô-mage des jeunes amorcée il y a six moisest déjà effective et s’inscrit désormaisdans la durée.» Son portable sonne.C’est François Hollande. C’est ladeuxième fois en dix minutes. Il se lève,ouvre la porte de son bureau et sort de-hors, dans le jardin. On n’entendra riende leur conversation. Sapin revient hi-lare :«Je l’adore.»

«LE TEMPS NÉCESSAIRE». Quelquesheures auparavant, pourtant, FrançoisHollande a réussi la prouesse de semerune splendide confusion. Comble del’ironie, le jour tant attendu par sa ma-jorité et son gouvernement, le chef de

l’Etat a, malgré lui, fait comprendre quenon seulement les chiffres d’octobrepourraient être mauvais, mais pire, queson engagement d’inverser la courbedu chômage avant la fin de l’année ris-quait de ne pas être respecté. Accom-pagné de Michel Sapin, il est à Auber-villiers dans les locaux de Solvay, ungroupe de chimie, pour faire la promo-tion des contrats de génération, quipeinent à décoller. Hollande introduitpar ces mots : «C’est vrai que j’ai fixél’objectif de l’inversion de la courbe duchômage, pour parler plus clair encore debaisse du chômage. C’est une bataille que

nous avons engagée, elle se fera mois parmois et nous devons y travailler sanscesse, et ça nous prendra tout le temps quiest nécessaire. Ce mois-ci comme lesautres mois.» Stupeur parmi les journa-listes. Pour la première fois depuis desmois, le président de la Républiquechoisit de ne pas répéter son engage-ment. Il y a au minimum du flou. Doncun doute. Tout le monde comprend lamême chose. La dépêche de l’AFP titre:«François Hollande a reconnu jeudi impli-citement qu’il ne parviendrait pas à inver-ser la courbe du chômage d’ici la fin de

l’année.» La machine médiatique et lesréseaux sociaux s’emballent.La droite tire ses premières balles. AAubervilliers, les conseillers du chef del’Etat réalisent l’imbroglio. A peine lapetite cérémonie de signature de con-trats terminée, Hollande revient vers lesjournalistes remettre les points surles «i»:«Je maintiens l’objectif d’inver-sion de la courbe du chômage.» Etd’ajouter : «Vous aurez des réponses cesoir sur les chiffres.» En fin de journée,une fois ceux-ci rendus publics, l’Elyséepublie un communiqué: «L’inversion dela courbe du chômage est désormaisamorcée.» Et pour ne pas donner le sen-timent de rétropédalage: «Comme je l’aiindiqué ce matin même, la mobilisationpour l’emploi, qui porte ses fruits, doit sepoursuivre et même s’amplifier.»

REBOND. Que s’est-il passé? Commentle chef de l’Etat a-t-il pu louper un telmoment, que beaucoup dans son en-tourage attendaient comme un tour-nant, ou en tout cas comme la possibi-lité d’un rebond ? Bien sûr, le chef del’Etat savait depuis la veille au soir qu’iltenait son pari. «Mais il voulait respecterscrupuleusement l’embargo. Il n’avait pas

à commenter des chiffres quidevaient être rendus publicsdans l’après-midi», confie unde ses conseillers. Mais Hol-lande «ne souhaitait surtoutpas laisser entendre qu’ilpouvait se satisfaire de cette

première étape. Même quand le chômagebaisse de 20 000, il reste encore plus de3 millions de Français au chômage. Etdonc il faut continuer la bataille de l’em-ploi», poursuit ce conseiller agacé parl’emballement de la presse.On savait que Hollande n’était pas trèsà l’aise avec le storytelling sarkozyste,mais de là à imaginer qu’il puisse, lejour d’une bonne nouvelle, faire croireà une mauvaise… «Parfois, c’est étonnantde constater à quel point il n’est pas trèsopportuniste», constate un proche. C’estle moins que l’on puisse dire. •

Par GRÉGOIRE BISEAUL’ESSENTIEL

LE CONTEXTEPour la première fois depuis deuxans et demi, les chiffres duchômage (catégorie A) ont baissé.

L’ENJEUCette inflexion de la courbe,promesse centrale de Hollande,sera­t­elle pérenne ?

Par ÉRIC DECOUTY

FruitsLes économistes demauvais augure, lesboutefeux de l’UMP et tousles contempteurs de lapolitique gouvernementaleen sont aujourd’hui pourleur glose. Les chiffrespubliés hier, et notammentla baisse de plus de20000 demandeursd’emploi de longue durée,dessinent uneincontestable améliorationdu marché du travail. Desstatistiques inédites depuisavril 2011, rehaussées parle recul constant duchômage des jeunes. Si laprogression des chômeursayant une activité limitéenoircit le tableaud’octobre, nul ne peutaujourd’hui contesterl’embellie. Certes, lafragilité des chiffres, alliéeaux prévisions pessimistesquant à une véritablereprise économiqueen 2014, incitent à laprudence. Et il faudraattendre les statistiquesdes prochains mois pourvérifier que la promessede François Hollanded’inverser la courbe duchômage –que beaucoupraillaient encore hiermatin– est réellementgagnée. Mais le chef del’Etat, qui a justementsouligné que la bataillecontre le chômage segagnait sur la durée et passeulement au terme d’uneéchéance, fut-ellehautement symbolique,peut goûter les premiersfruits de sa politique. Lafameuse «boîte à outils»présidentielle –avec lesemplois aidés quibénéficient plusparticulièrement auxmoins de 25 ans–constitue aujourd’hui lefondement de cetteamélioration. Il ne s’agitque d’une esquisse etFrançois Hollande a raisonde faire preuve d’humilité.Mais en cet automnemaussade et contestataire,le gouvernement adésormais des chiffresobjectifs pour défendresa politique.

ÉDITORIAL

that we are getting nowhere. Slowly , we are getting nowhere

Que s’est-il passé? Comment lePrésident a-t-il pu louper un telmoment, que son entourageattendait comme un tournant.

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 EVENEMENT • 5

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and that is a pleasure It is not irritating to be where one is .

La diminution des demandeurs d’emploi sans aucune activité en octobres’accompagne d’une augmentation de ceux ayant travaillé à temps partiel.

La catégorie A,l’arbre qui cache laforêt des chômeurs

n baisse d’un côté, en haussede l’autre : rarement les chif-

fres du chômage aurontété aussi contrastés

qu’au mois d’octobre. Ainsi, si le nom-bre de demandeurs d’emploi sansaucune activité a bien diminué de prèsde 20 000 le mois dernier (catégo-rie A), le nombre de personnes à la re-cherche d’un temps plein mais ayantexercé une activité réduite (catégoriesB et C) a explosé, avec 60000 inscritssupplémentaires. Autrement dit, unepartie des chômeurs «à plein-temps»serait passée à temps partiel…Pour expliquer ce qui constitue néan-moins une vraie baisse du chômage en

catégorie A, la première depuis le prin-temps 2011, Pôle Emploi souligne queseptembre et octobre sont tradition-nellement des mois de reprise d’acti-vité. Et que celle-ci passe le plus sou-vent par des contrats courts etprécaires. Près des deux tiers des nou-veaux contrats signés sont en effet desCDD de moins d’un mois. Mais l’opé-rateur de placement fait aussi remar-quer que cette période est égalementcelle des… vendanges. Bref, nombre dejeunes, notamment, se seraient vusproposer des contrats de saisonniers.Difficile, dans ces conditions, de déga-ger un mouvement de fond à partird’octobre, tant ces chiffres paraissentcontradictoires.Reste que sur les derniers mois, la ten-dance est plutôt à l’accalmie. «Sur unemoyenne de plusieurs mois, l’inversion dela courbe du chômage se dessine, croitmême déceler le ministère du Travail:-3500 par mois en moyenne sur les troisderniers mois, […] après +18 270 audeuxième trimestre et +33 070 aupremier trimestre.»

POURQUOI CETTE «PAUSE» ?Faute de croissance (0,2% attendu surl’année), ce n’est pas du côté dusecteur privé qu’il faut chercher uneexplication. En réalité, cette accalmiedoit surtout aux contrats aidés, dontle gouvernement a fait un usagemassif. Pour 2013, l’objectif est de

480 000 «contrats uniques d’inser-tion». Et un effort particulier a été faitsur le second semestre, contribuant àla décélération actuelle du chômage.De plus, la durée moyenne de cescontrats a augmenté: elle atteint douzemois pour les derniers signés, soit deuxfois plus qu’en mai 2012. A ces contratsclassiques s’ajoutent les «emploisd’avenir», dispositif réservé aux moinsde 26 ans et qui semble tenir ses pro-messes. Sur les 100000 que le gouver-nement espère engranger d’ici la fin del’année, 85000 ont déjà été signés. Dequoi expliquer que, chez les jeunes aumoins, le fameux retournementde la courbe est déjà une réalité. Du

moins en catégorie A,où leur nombre a diminuéde 4,5% depuis avril, soit25000 personnes.Autre facteur de décrue,le plan «30 000 forma-tions prioritaires pour30000 emplois vacants»,

lancé par le gouvernement. Un dispo-sitif dans lequel seraientdéjà entrés 17000 deman-deurs d’emploi, quittantde ce fait les catégories A, B et C pourla D, bien moins observée.Enfin, le crédit d’impôt pour la com-pétitivité et l’emploi (CICE), dont bé-néficient les entreprises en proportionde leur masse salariale, fait sentir sespremiers effets: selon une estimationde l’Insee, il permettrait la sauvegardede 15000 emplois au second semestrede cette année.

LE RETOURNEMENT S’ANNONCE­T­ILDURABLE ?Pour l’heure, pas grand monde n’ycroit. En tout cas, aucune grande insti-tution économique. OCDE, FMI,assurance chômage, Commissioneuropéenne… Toutes prédisent uneaugmentation du nombre de deman-deurs d’emploi durant la plus grandepartie de l’année prochaine, même sicette hausse s’annonce plus modéréequ’au cours des derniers mois. Selonl’Unédic, le nombre de sans-emploidevrait bien connaître une quasi-stabi-lité d’ici la fin de l’année, avec12000 chômeurs en plus au troisièmetrimestre, et «seulement» 3000 sur lestrois derniers mois de l’année. Mais ilconnaîtrait un retour de flamme en2014, avec 75600 nouveaux inscrits àPôle Emploi sur l’année en catégorie A,

soit plus de 7000 par mois. Même pru-dence du côté de l’Observatoire fran-çais des conjonctures économiques.Selon l’OFCE, la multiplication descontrats aidés, dont le volume resteracomparable l’année prochaine, ainsique le CICE permettront une «stabili-sation» entre fin 2013 et début 2014.Mais «le taux de chômage repartirait en-suite à la hausse jusqu’en fin d’an-née 2014, les créations d’emplois dans lesecteur non-marchand étant insuffisantespour absorber la hausse de la populationactive».

POURQUOI LA REPRISE DEVRAITÊTRE POUSSIVE ?Attendue l’année prochaine à 1% envi-ron, la croissance ne permettrait pasd’enclencher un authentique reflux duchômage. En France, c’est un taux de1,5% qui est généralement jugé néces-saire pour absorber à la fois les gains deproductivité, mais aussi et surtoutl’augmentation de la population active.Ainsi, malgré la baisse de la population

en âge de travailler, lenombre de personnes seprésentant sur le marché

du travail ne cesse d’augmenter.En 2012, alors que la population des15-64 ans diminuait de 80 000, plusde 220000 personnes supplémentairesse sont portées candidates à un emploi.Un phénomène lié aux différentesréformes des retraites qui ont conduità repousser l’âge effectif de départ.En 2013, même si la tendance ralentit,près de 137 000 nouvelles personnessont attendues sur le marché dutravail.Sauf bonne surprise en termes decroissance, 2014 s’annonce donc sim-plement moins pénible que 2013 sur lefront de l’emploi. Et quand bien mêmel’activité repartirait, certains écono-mistes estiment qu’elle ne débouche-rait pas immédiatement sur des créa-tions de postes. Selon Eric Heyer,économiste à l’OFCE, les entreprisesont supprimé relativement peu d’em-plois au regard de l’ampleur de lacrise, et se trouvent aujourd’hui en si-tuation de sureffectif. En cas de re-prise, elles pourraient donc choisir deréaliser des gains de productivité,c’est-à-dire de demander plus de tra-vail à un même nombre de salariés,plutôt que d’en embaucher d’autres.

DOMINIQUE ALBERTINI etLUC PEILLON

Pôle Emploi souligne que septembreet octobre sont traditionnellementdes mois de reprise d’activité. Etque celle-ci passe le plus souventpar des contrats courts et précaires.

DÉCRYPTAGE

François Hollandeet Michel Sapin, ministredu Travail, hier, dans leslocaux du groupe chimiqueSolvay pour la signature decontrats de génération.PHOTO MARC CHAUMEIL

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 20136 • EVENEMENT

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STROMAE LONDON GRAMMAR THE SKINS GANG DO ELETRO THE MIDNIGHT BEAST MIKHAEL PASKALEV LUKE JENNER BENJAMIN CLEMENTINE

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Pour Raymond Soubie, du Conseil économique etsocial, le chômage des jeunes est le plus inquiétant:

«Un seul mois ne faitpas une tendance»

Ancien conseiller social de NicolasSarkozy à l’Elysée jusqu’en 2010,

membre du Conseil économique etsocial, Raymond Soubie est au-

jourd’hui à la tête de l’agence de presse spé-cialisée AEF et président des sociétés deconseil en ressources humaines etcommunication Alixio et Taddeo.Comment jugez-vous ces dernierschiffres de Pôle Emploi?Ils sont plutôt bons. On assistepour la première fois à une dimi-nution incontestée du nombre dechômeurs en catégorie A. Maisun seul mois ne fait pas une tendance, ilfaut un trimestre au minimum pour quecette inflexion se confirme.La politique d’emplois aidés du gouverne-ment vous paraît-elle pertinente?Dans les conditions actuelles et au vu de lafaiblesse de la croissance, c’est le seulmoyen d’agir avec des effets immédiats surle chômage. Ces dispositifs sont plus intelli-gents qu’auparavant dans la mesure où ilscomportent un volet formation et peuventconstituer une première marche vers unemploi pérenne. Il y a une situation d’ur-gence pour les jeunes qui sont, en France,1,9 million de «Neet» [Not in education, em-ployment or training, ndlr], ni dans les étu-des, ni employés, ni en formation.Croyez-vous à une reprise durable de lacroissance et donc de véritables créationsd’emplois dans le secteur marchand?On sait que, compte tenu de l’accroisse-ment de la population active d’environ100 000 nouveaux entrants par an, il fautentre 1,5% et 2% de croissance pour créerdes emplois. Au vu des dernièresprévisions, on n’y parviendra pasavant au mieux 2015, et l’hypo-thèse d’une croissance durablement faibleautour de 1% par an n’est pas exclue. Laquestion se poserait alors de construire unmodèle alternatif pour réussir à faire dimi-nuer un chômage qui n’est, à de rares ex-ceptions près, jamais descendu sous la barredes 8% en France depuis une vingtained’années.Que faut-il faire, alors?Il y a un problème spécifique de l’emploides jeunes dans notre pays qu’il faut main-tenant prendre à bras-le-corps. Nous orga-nisons à partir d’aujourd’hui à la GrandeHalle de la Villette à Paris un événementinédit [le salon Jeunes d’avenir] au cours du-quel sont proposés 10000 emplois du sec-teur marchand à des jeunes non qualifiés.Et pour ceux qui n’en trouveront pas car ilsne sont pas employables en l’état, différen-

tes solutions seront proposées: une forma-tion, du conseil, du coaching, etc. Ça peutparaître un grain de sable, mais l’idée est defournir un accompagnement réellementpersonnalisé aux jeunes exclus des canauxhabituels. Et je crois à l’effet de contagion

de telles initiatives associanttous les acteurs, publics, privéset associatifs.Comment jugez-vous la politiquemise en place par le gouverne-ment pour permettre à la Francede regagner en compétitivité?Elle est loin d’être négligeable,

et courageuse, authentiquement social-dé-mocrate quand on voit ce qui est fait avecle crédit d’impôt pour la compétitivité etl’emploi (CICE) par exemple. Mais elle nedonnera des résultats qu’à condition quel’investissement revienne.Mais ce n’est pas le cas…Non, et les dernières enquêtes ne sont pasbonnes, le moral des ménages recule et lesindicateurs sont moins optimistes qu’à lasortie de l’été.La loi de juin 2013 sur la sécurisation desparcours professionnels produit-elle deseffets?C’est trop tôt pour le dire: les accords com-pétitivité-emploi de Renault et PSA ont étésignés avant son entrée en vigueur. Pourtout dire, je l’espère mais je n’en suis passûr, tout dépendra de la manière dont ilsseront appliqués.Comment jugez-vous le climat social?Compliqué et paradoxal. D’un côté, il restecalme, les syndicats négocient et les joursde grève ne cessent de reculer. De l’autre,

tout peut déraper à tout momentdans le climat actuel de rejet despolitiques et des corps intermé-

diaires. A mesure que l’état de l’opinion sedégrade et que les mauvais indicateurss’accumulent, les risques d’explosion so-ciale grandissent.Le gouvernement est-il responsable?En tout cas, il n’a pas la baraka. En dépit deses efforts réels pour stimuler la reprise, lamachine continue à patiner.D’où peut venir l’étincelle alors?La France n’est pas seule dans cette situa-tion, loin de là, et je pense que le retourne-ment, s’il a lieu, viendra d’une améliorationnotable d’une conjoncture internationaleencore très incertaine. A partir de là, lemouvement s’enclenchera et l’on verra queles réformes mises en place, même si ellesdoivent encore être complétées, n’aurontpas été vaines.

Recueilli par CHRISTOPHE ALIX

AFP

INTERVIEW

REPÈRES

«La baisse du chômageest une bonne nouvellepour mon pays.»Frédéric Lefebvre député UMPdes Français de l’étranger, hier

«Le discours volontaristedu président de laRépublique, allié auxmesures prises depuis unan et demi, commencentà porter leurs fruits.C’est toute la Francequi doit s’en réjouir.»Claude Bartolone présidentde l’Assemblée nationale, hier

«La journée a étémarquée parl’improvisationincompréhensiblede François Hollande surles chiffres du chômage.Elle est anxiogène pourtous les Français.»Jean­François Copéprésident de l’UMP, hier

Source : Dares

Nombre de demandeurs d’emploien France métropolitaine, catégorie A

Janvier 2013

Novembre 2013

- 0,6 %sur

1 mois

+6 %sur1 an

«Ce qui comptepour nous, c’est quel’inversion de la courbedu chômage devienneune tendance longue.»Bruno Le Rouxprésident du groupe PSà l’Assemblée nationale, hier

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 EVENEMENT • 7

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BOB WILSONINVITÉ SPÉCIAL

It is only irritating to think one would like to be somewhere else. Here we are now

Gant rose trouvé dansles rues de New York;

verre du verrier tchèqueVisser; pot de Thaïlande

du Nord (Néolithique).PHOTOS LOVIS

DENGLER OSTENRIK. COLLECTIONPARTICULIÈRE

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 20138 •

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a little bit after the beginning More and more we have the feeling

BangkokserévoltesurlaplacedeThaksin

Par ARNAUD DUBUSCorrespondant à Bangkok

e chaos règne de nouveau dans lesrues de Bangkok, plus de trois

ans après les sérieux

troubles politiques qui avaient causéla mort de 93 personnes, au prin-temps 2010. Des ministères, dans lacapitale thaïlandaise, sont occupés ouencerclés par des milliers de manifes-tants appelant au renversement dugouvernement de Yingluck Shinawa-tra. Un ancien député d’opposition àla réputation sulfureuse, SuthepThaugsuban, demande avec des ac-cents dantonesques l’établissementd’un «gouvernement populaire» etd’un «tribunal populaire».Dans un autre quartier de la ville, plusà l’est, d’autres manifestants favora-bles, eux, au gouvernement et à l’ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra,renversé par un coup d’Etat en 2006et dont Yingluck est la sœur cadette,se mobilisent pour protéger le gou-vernement qu’ils ont largement con-tribué à élire en juillet 2011. Cettecrise, qui ne peut se comparer à

aucune des révolutions récentes quiont agité d’autres pays dans le monde,déroute par sa complexité. Le person-nage central semble en être Thaksin,qui a été condamné pour corruptionen 2008 et qui vit en exil depuis. Ceserait, à en croire de nombreux ana-lystes thaïlandais, un choix entre être«pour ou contre Thaksin».«La pire des choses qu’ont faites Thak-sin et ses acolytes pour le pays a été desemer les graines de la corruption etd’enraciner une culture d’impunité. Cesont les mêmes grainesqu’avait semées FerdinandMarcos, lesquelles ont fait desPhilippines –autrefois le phare lumineuxde l’Asie du Sud-Est – le pays démuniqu’il est aujourd’hui», écrit l’éditoria-liste Pornpimol Kanchanalak, dans lequotidien The Nation. Des propos quifont écho aux cris des manifestantsqui demandent le «déracinement durégime Thaksin», signifiant par là l’in-fluence de la famille Shinawatra surla conduite du pays.

HIÉRARCHIE. Thaksin est incontesta-blement un facteur important : sesmandats successifs de 2001 à 2006ont été une période de transformationprofonde de ce vieux royaume, en-

glué dans ses traditions, et où la no-tion d’égalité a été inhibée par unsens presque obsessionnel de la hié-rarchie. C’est durant sa période aupouvoir qu’une partie de la popula-tion, longtemps maintenue au bas del’échelle, a pris conscience de sonpoids politique. Et quand l’armée adécidé, en septembre 2006, de ren-verser Thaksin sous prétexte de pro-téger la monarchie et de lutter contrela corruption, la pilule a été amère.«Après le coup d’Etat, la dimension so-

ciale de cette crise a commencéà prendre corps, analyse unjuriste souhaitant garder

l’anonymat. Les gens des campagnesont réclamé le retour de Thaksin etd’une politique qui leur était bénéfiquematériellement. Quand la population deBangkok a rejeté ces demandes, cesgens ont pris conscience du mépris dontils faisaient l’objet de la part des habi-tants de la capitale.»Certains analystes estiment queThaksin a surtout joué le rôle d’un ca-talyseur. Il a révélé un malaise latent,celui d’un pays à cheval entre un mo-dèle de société en bout de course et unnouveau format politique et social quireste à définir. Selon une interpréta-tion du politologue irlandais Benedict

Anderson, la Thaïlande a été jusqu’àprésent «contrôlée par une oligarchie,un réseau de familles interconnectées,dont les enfants vont dans les mêmesécoles, se marient entre eux et parta-gent des valeurs communes».

TABOU. Les «Chemises rouges», op-posants vocaux à cette élite à la foisaristocratique et bourgeoise, ont re-mis en cause ce douillet arrangement.Et, pour certains, cette émergencepolitique des humbles dépasse de loinla personne de l’ex-Premier ministre.«Si Thaksin était retiré de l’équation,cela ferait plaisir à beaucoup de gens del’establishment. Mais c’est une illusion,car la question du rejet par les Chemisesrouges du contrôle exercé par l’élite tra-ditionnelle subsistera», estime Puan-thong Pawakapan, de l’UniversitéChulalongkorn.La famille royale thaïlandaise est lecœur de cette élite établie, mais dis-cuter son rôle est tabou, car toute cri-tique à son égard est punie par une loicontre le crime de lèse-majesté parmiles plus sévères de la planète. Le ju-riste souligne: «Malgré cette sévérité,de plus en plus de gens bravent cette in-terdiction de critiquer, depuis le coupde 2006.» •

ANALYSE

Dans la capitale, la rue réclame la démission de Yingluck Shinawatra, la sœur de Thaksin.

«Les Chemises rouges n’ont pas de cerveau»Ils estiment être les représen-tants de la modernitéthaïlandaise et s’époumonentdans des sifflets pour signifier

leur rejet du gouvernement dirigépar Yingluck Shinawatra. Ces ma-nifestants qui ont envahi le quartierhistorique de Bangkok, occupéplusieurs ministères et intimé auxfonctionnaires l’ordre de «cesser decollaborer avec un gouvernement illé-gitime» affichent ouvertement cequ’ils considèrent comme leur su-périorité sur les «Chemises rou-ges», ces partisans de l’ancien Pre-mier ministre Thaksin Shinawatra,qui avaient paralysé le principalquartier commercial de Bangkokpendant plus d’un mois en 2010.«Regardez les gens ici, regardez leursvisages, ce sont des gens biens, pas

des brutes comme les Chemises rou-ges. Les Chemises rouges n’ont pasde cerveau, pas de connaissances»,s’exclame un homme corpulent quiexplique avec fierté être fonction-naire. Malgré cette respectabilitéaffichée, les pires insultes à l’en-contre de la chef du gouvernementfusent. «Yingluck est doublementstupide. Elle est autiste. Elle rend lesThaïlandais laids aux yeux dumonde. Elle ne fait qu’écouter sonfrère», assène Chavalit, un autremanifestant.«Déraciner». Parmi ces opposantsqui affichent leur soutien à la mo-narchie en arborant des brassardsjaunes sur lesquels on peut lire«Nous aimons le roi», il existe tou-tefois une certaine disparité so-ciale : les rangs des représentants

des classes moyennes de Bangkokont été renforcés par des petitscommerçants et des agriculteurs dusud du pays, d’où est originaireSuthep Thaugsuban, un ancien dé-puté d’opposition devenu le princi-

pal leader de la campagne antigou-vernementale.Des étudiants des écoles techni-ques, issus de milieux peu favori-sés, se sont joints à d’autres venusdes meilleures universités deBangkok. Le mot d’ordre est le

même pour tous: il faut «déracinerle régime Thaksin». Ce qui semblesignifier que l’ensemble de la fa-mille Shinawatra, originaire dunord de la Thaïlande et qui a do-miné le pays depuis 2001, quitte

pour de bon le terri-toire national.Dans cette foule encolère, certains secontenteraient d’undépart du gouverne-ment en place, commeNarinlak Siritoonthai,

une vive sexagénaire venue de labanlieue de la capitale. Pour elle,Yingluck doit «s’excuser devant lepeuple» pour les problèmes causés.«Si c’était dans un autre pays, la chefdu gouvernement aurait quitté sonposte depuis longtemps. Regardez le

Japon, si les dirigeants perdent leurlégitimité, ils démissionnent. Et dansvotre pays, un dirigeant politique quia une maîtresse est obligé de démis-sionner», affirme-t-elle.Dissolution. La plupart des mani-festants disent toutefois ne pouvoirse satisfaire d’une dissolution duParlement, qui déboucherait sur unscrutin. «Les élections, vous savez…Beaucoup de gens disent maintenantque nous devons trouver une nouvellevoie. Peut-être que la démocratien’est pas une bonne chose pournous», dit Kornwika Paediramon,une jeune designer de Bangkok.Suthep Thaugsuban, le leader de lacampagne antigouvernementale, adéclaré vouloir «restituer le pouvoirà la monarchie».

A.Du. (à Bangkok)

REPÈRES

Bangkok

LAOS

CAMB

VIE

TNA

M

MYA

NM

AR

MYA

NM

AR

MYA

NM

AR

MALAISIE

300 km

THAÏLANDE

THAÏLANDESuperficiePopulationPIB par habitantEvolution du PIBInflation103e sur 186 sur l’indicateurde développement humain(IDH) Sources : FMI, Pnud 2012

510 890 km2

67,89 millions4 194,9 €

+6,5 %3,0 %

«Nous devons trouverune nouvelle voie. Peut-êtreque la démocratie n’est pasune bonne chose pour nous.»Kornwika Paediramon une jeune designer

YINGLUCKSHINAWATRAFemme d’affaires etPremière ministre aprèsla victoire en 2011 deson parti, le Puea Thai,aux législatives. Elleest la sœur de ThaksinShinawatra, renverséen 2006 par l’arméeet soutenu par les«Chemises rouges».PHOTO REUTERS

L’héritage de l’ancien Premier ministre divise à nouveau la Thaïlande.

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 MONDE • 9

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10 • MONDE

that I am getting nowhere . Slowly , slowly ,

DavidCameronsort lesbarbelésLe Royaume-Uni affole l’UE en voulant restreindre la circulation des Européens les plus pauvres.

Ce n’était bien entendupas une coïncidence.Au lendemain de l’an-nonce par le Premierministre britannique,

David Cameron, de mesures dedurcissement des conditionsd’accès des nouveaux immi-grés en provenance del’Union européenne, les dernièresstatistiques, publiées hier, l’ontsans aucun doute réconforté. Sil’immigration en général a légère-ment baissé au cours de la dernièreannée, s’élevant à un peu plus d’undemi-million de personnes, lenombre d’arrivants en provenancede l’UE a augmenté avec la venue,entre juin 2012 et juin 2013, de183000 citoyens européens, selonl’Office for National Statistics(ONS).

STARTING­BLOCKS. Les arrivées lesplus nombreuses venaient de paysd’Europe du Sud (Espagne, Portu-gal et Grèce) pour des raisons éco-nomiques évidentes. En revanche,alors que les mesures annoncéeshier concernaient les «nouveaux»

Européens, à savoir les Bulgares etRoumains, à compter du 1er janvier,l’immigration en provenance de cespays n’a pas connu d’augmentationsignificative. Pourtant Cameronjoue sur la crainte d’un déferlementvenant de Roumanie et de Bulgarie,Etats qui vont bénéficier de la librecirculation au sein de l’UE. Cette

crainte est, depuis des mois,complaisamment relayée parune presse à majorité euro-

phobe, mais n’est absolument pasconfortée par la moindre étude sta-tistique.Deux chercheurs, Christian Dust-mann (University College London)et Tommaso Frattini (Université deMilan), ont ainsi publié début no-vembre une étude qui prouve

qu’entre 2001 et 2011 les immi-grants en provenance de l’Espaceéconomique européen (UE, plusLiechtenstein, Islande et Norvège)

ont apporté des recettes fiscales auRoyaume-Uni de 34% supérieuresà ce qu’ils ont touché en prestationssociales, soit une contribution netted’environ 22,1 milliards de livres(26,5 milliards d’euros).Mais Cameron, qui s’est catégori-quement refusé à estimer le nom-

bre de Bulgares et Roumains dansles starting-blocks pour arriver auRoyaume-Uni dans cinq semaines,compte fermement renégocier

l’accès aux prestationssociales. Il souhaiteainsi imposer un délaide trois mois aux nou-veaux arrivants euro-péens avant de leurpermettre de bénéfi-cier des allocations

chômage, lesquelles ne pourraientde toute façon être allouées quepour une durée maximale de sixmois. Par ailleurs, l’accès à l’aideau logement serait supprimé et unplafond annuel sur le nombre demigrants venant de pays membresde l’UE serait instauré. Cameron

préconise également le blocage desdéplacements depuis des pays dontle PIB n’atteint pas un niveau mi-nimal. Mendiants et sans-abri enprovenance d’Etats de l’UE se-raient immédiatement expulsés etinterdits de retour pendant douzemois.

«MÉCHANT MEMBRE». La Com-mission européenne a évidemmentbondi après ces annonces. Le com-missaire européen à l’Emploi et auxAffaires sociales, Laszlo Andor, acritiqué une réaction «hystérique»et a prévenu Cameron que leRoyaume-Uni pourrait finir par«être perçu comme le méchant mem-bre de l’UE». Le président de laCommission européenne, José Ma-nuel Barroso, a même décroché sontéléphone pour rappeler au Premierministre britannique que «le prin-cipe de libre circulation est un desprincipes les plus chers aux citoyenseuropéens». Viviane Reding, com-missaire à la Justice, a pour sa partsouligné que «la libre circulation estun pilier fondamental du marché uni-que, lequel est très prisé parle Royaume-Uni». Et, a-t-elle rap-pelé, la Grande-Bretagne a été l’undes plus ardents défenseursde l’élargissement de l’Unioneuropéenne.Il ne fait aucun doute que les pro-positions de Cameron sont essen-tiellement dictées par la volonté desatisfaire l’aile droite de son particonservateur et de les dissuader derejoindre l’Ukip (United KingdomIndependence Party, anti-euro-péen) qui a, depuis quelques mois,le vent en poupe. Mais la stratégieaura en partie fait chou blanc,puisque 46 députés conservateursont déposé une motion réclamantdes mesures bien plus drastiques,dont le gel pendant cinq ansde l’ouverture des frontières auxBulgares et aux Roumains. Et ce,quitte à aller à l’encontre des loiseuropéennes.Cameron a pourtant tenté de s’ex-tirper de la politique intérieure enaffirmant que sa vision rencontraitde larges échos ailleurs en Europe.Il comptait, en effet, essayer de ral-lier des soutiens à ses propositionslors du sommet européen qui s’estouvert hier à Vilnius. Il a notam-ment cité Angela Merkel et sa pro-messe, dans son accord de coalitionavec le SPD, de revoir la politiqued’immigration allemande. Et amentionné la France, en autreexemple, après les déclarations duministre de l’Intérieur, ManuelValls, sur un «système d’asile sur lepoint d’imploser». •

ParSONIADELESALLE­STOLPERCorrespondante à Londres

Mendiants et sans-abrien provenance d’Etats de l’UEseraient immédiatement expulséset interdits de retour pendantdouze mois.RÉCIT

Des ouvriers agricoles venant d’Europe de l’Est travaillent dans un champ de jonquilles, en Cornouailles, en 2008. PHOTO TOM PILSTON. PANOS­REA

503000personnes ont immigré vers leRoyaume­Uni entre juin 2012 etjuin 2013 (contre 517000 l’annéeprécédente), dont 183000 res­sortissants de pays de l’UE (con­tre 158000 l’année précédente).

Entre 2001 et 2011, les immi­grés ont rapporté, vial’impôt, 26,5 milliards d’eurosde plus que ce qu’ils ont reçuen aides sociales. La contri­bution fiscale des Britanni­ques, elle, ne représenteque 89% des aides socialesperçues.

REPÈRES

«Mes électeurs pensentque notre pays est“plein” et que nousne devrions pas nousouvrir à la Bulgarieet à la Roumanie.»Philip Hollobone député tory

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013

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Des manifestationsbrutalement répri-mées, des leaders li-béraux arrêtés, des

islamistes condamnés à despeines de prison délirantes etun processus constitutionnelqui s’enlise : en Egypte, latransition démocratiquepeine à avancer. Plutôt enretrait après la destitution deMohamed Morsi, le 3 juillet,les militants prodémocratie,pionniers de la révolution dejanvier 2011, semblent denouveau prêts à battre lepavé et à défier le nouveaurégime. Depuis mardi, ilsprotestent tous les jours con-tre une loi qui restreint ledroit de manifester.«Oppressive». Promulguédimanche par le présidentintérimaire, Adly Mansour,ce texte contraint les organi-sateurs de rassemblementspublics à fournir leurs coor-données, le trajet du cortège,leurs revendications et lesslogans scandés. Il stipuleégalement que le ministèrede l’Intérieur a le droit d’in-terdire les manifestationsprésentant une menace pour

l’ordre public. Plusieurs as-sociations de défense desdroits de l’homme ainsi quel’ONU dénoncent une «ap-proche oppressive» et une«remise en cause des acquisde 2011».Pour le Premier ministre,Hazem Beblawi, la loi ne faitque poser un cadre juridiquepour «protéger le droit desmanifestants». Dans l’espritdu gouvernement de transi-tion, il s’agit surtout d’em-pêcher les rassemblementsdes anti-coup d’Etat, quoti-diens depuis le renversementde Mohamed Morsi. Durantl’été, un millier de Frèresmusulmans ont été tués etdeux mille autres arrêtés. Lesnouvelles autorités viennentainsi de réveiller la colère deslibéraux. Il faut dire que lespoliciers égyptiens ont unefois de plus montré leur in-compétence en matière demaintien de l’ordre et leurvilaine aptitude à avoir lamain leste, que ce soit pourmettre des taloches gratuitesaux manifestants et auxjournalistes ou pour tripoterles jeunes filles. Au total, une

soixantaine de personnes ontété arrêtées, notammentplusieurs figures de la révo-lution de 2011 –une quaran-taine ont été libérées. Leprocureur général a parailleurs lancé un mandatcontre deux des principauxleaders révolutionnaires :Ahmed Maher, du Mouve-ment du 6 avril, et l’activisteAlaa Abdel Fattah, déjà em-prisonné en 2011, lors de latransition menée par lesmilitaires.Discorde. Cette politiquerépressive a semé la discordeau sein même de la coalitionau pouvoir. Des membres del’organisation Tamarod, àl’origine du rassemblementdu 30 juin ayant conduit à lachute de Morsi, ont publi-quement pris leurs distancesavec le gouvernement et ontappelé à manifester jusqu’àce que tous les militantssoient libérés, tandis que dixdes cinquante membres del’Assemblée constituante ontsuspendu leur participationen signe de protestation.

De notre correspondantau Caire MARWAN CHAHINE

LaruecairoteredevientunchampdebatailleÉGYPTE Les militants prodémocratie protestentcontre une loi limitant les rassemblements.

Un manifestant près du Parlement égyptien, mercredi au Caire. AMR ABDALLAH DALSH. REUTERS

Par LUC MATHIEU (à Kaboul)

Le nord de l’Afghanistangagné par la violence

C’est un nouvel épi-sode dramatiquepour l’ONG française

Acted en Afghanistan. Aprèsl’enlèvement d’un Françaisà Kaboul en janvier, six deses travailleurs humanitairesafghans ont été assassinés, etun autre grièvement blessé,mercredi, dans le nord.

Quelles sont les circons­tances de l’attaque ?Les sept employés de l’ONGqui travaillaient pour un pro-gramme de scolarisation desfilles venaient de quitter envoiture Maïmana, la capitalede la province de Faryab,pour rejoindre le district voi-sin d’Almar. Selon le chef dela police provinciale, ils ontété interceptés puis sortis deforce de leur véhicule avantd’être abattus. «Les as-saillants ne leur ont poséaucune question et ne les ontpas fouillés. Ils ont ouvert le feuimmédiatement, ils savaientqui ils attaquaient», confirmeune source humanitaire àKaboul. L’embuscade a étérevendiquée par les talibans.

La sécurité se dégrade­t­elle dans le nord ?Longtemps préservée, la ré-gion est désormais un terrainde conquête pour les insur-gés. Outre les talibans, leMouvement islamiqued’Ouzbékistan s’y est im-planté, ainsi que des com-battants tchétchènes et pa-kistanais. Fait rare, lestalibans ne recrutent pasuniquement parmi les Pach-tounes, l’ethnie majoritaire,mais également chez lesTurkmènes et les Ouzbeks.

Ils visent en priorité les for-ces de sécurité afghanes quiont largement remplacé cel-les de l’Otan. «L’ennemi tented’affirmer sa présence dans lenord depuis le début de l’an-née», avait reconnu en sep-tembre le porte-parole duministère afghan de l’Inté-rieur, Sediq Sediqi. D’aprèsl’ONG ANSO, les attaquesdans la province de Faryabont quasiment doublé sur lestrois premiers mois de cetteannée par rapport à 2012.

Y a­t­il un risque de multi­plication des attaques ?Si Kaboul est épargné par lesattentats spectaculaires, lesinsurgés poursuivent leur of-fensive dans la quasi-totalitédes autres provinces. Lestroupes étrangères ayant lar-gement entamé un retrait quidoit s’achever fin 2014, cesont les policiers et soldatsafghans qui figurent au pre-mier rang des victimes, avecprès de 400 tués chaquemois, selon le départementd’Etat américain. Le nombrede civils assassinés ou blessésa, lui aussi, augmenté de23% sur les six premiersmois de 2013, d’après l’ONU.L’année prochaine s’annoncecritique, le président afghan,Hamid Karzaï, refusant designer un traité de coopéra-tion militaire avec les Etats-Unis. Si ce blocage persiste,Washington pourrait déciderde retirer la totalité de sessoldats à la fin 2014. Et lesautres pays donateurs ris-queraient de réduire leursaides. L’armée et la policeafghanes seraient alors seu-les face aux talibans. •

DÉCRYPTAGE«Si sous la pressiondes manifestationsen Ukraine,[le président] ViktorIanoukovitch décidede signer l’accord[d’associationavec l’UE], je vousdemande de signersans hésitationet sans condition, ycompris concernantma libération.»Ioulia Timochenkol’opposante emprisonnéedont la libération étaitjusqu’à présent exigée parl’UE, dans un messageaux dirigeants européens

Le zoo de Vienne a enfinannoncé hier le prénomde son bébé panda né enaoût. Après les cent joursd’attente réglementairescomme le veut la traditionchinoise, le petit pandaa été baptisé Fu Bao.Un prénom pas banal pourun ursidé puisqu’il signifie«léopard heureux». Il estle troisième bébé pandaà être né par conceptionnaturelle au zoo de Vienne.Il avait été précédé parFu Long («dragon heu­reux») en 2007 et Fu Hu(«tigre heureux») en 2010.La Chine étant propriétairede tous les pandas nésen captivité dans les zoosdu monde, Fu Bao devraquitter Vienne pour rejoin­dre la République popu­laire quand il aura atteintl’âge de 2 ans, comme l’ontdéjà fait ses deux frères.En attendant, le bébé de3 mois, qui mesure déjàplus de 60cm pour 6kg, nequitte pas encore la nicheoù sa mère, Yang Yang,prend soin de lui. PHOTO AFP

À VIENNE, UNPANDA NOMMÉ«LÉOPARDHEUREUX»

L’ANIMAL

240000bouteilles de bières ont été détruites par l’Hisbah,la police islamique dotée de 9000 hommes, dans laville de Kano, dans le nord du Nigeria. Cette opérationétait censée dénoncer les comportements «immoraux».Des fûts contenant au total plus de 8000 litres de bière,ainsi que 320000 cigarettes ont également été détruits.

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Sida: lasantépréoccupantedesassociations

Par ÉRIC FAVEREAU

C’était mardi soir dans les locaux de la Ciné-mathèque à Paris, pour les vingt-cinq ans del’Agence nationale de recherche sur le sidaet les hépatites (ANRS). En présence de Fran-çois Hollande, il y avait là toute la planètesida: beaucoup de médecins, de res-

ponsables, mais aussides associations de ma-

lades. Celles-ci étaient àla fête : on les

choyait, on les félicitait.N’était-ce pas grâce à elles, grâceà leur militantisme et à leur farouche volontéde ne pas reculer, que la France est devenuele deuxième pays au monde sur la recherchecontre le sida, en terme de publicationsscientifiques ?Vingt-cinq ans, donc. Et aujourd’hui, à laveille du 1er décembre, journée mondiale delutte contre le sida, qu’en est-il de la situationen France? Le climat est maussade car, para-doxalement, alors que l’épidémie continueà être inquiétante chez les gays (lire ci-des-sous), jamais le tissu associatif n’a paru aussifragile, déstabilisé, en manque cruel de fi-nancements. La situation est si tendue quecertains se demandent si ce tissu va survivre.Déjà, plusieurs dizaines d’associations ontfermé leurs portes. Et les plus importantesévoquent des changements radicaux.«Les raisons ? Elles sont multiples bien sûr»,analyse Christian Saout, qui a longtempsprésidé Aides avant de prendre les rênes duCollectif interassociatif sur la santé (CISS),regroupant toutes les associations de maladesen France. «Mais sur le financement, la causeest claire : les pouvoirs publics ne veulent pasfaire le switch.» C’est-à-dire? «La lutte contrele sida a toujours été financée par des créditsd’intervention, relevant en quelque sorte de l’ur-gence. Aujourd’hui, tout le monde accapare cescrédits de crise. Et pour le reste, nous n’avonsjamais opéré le changement qui aurait dû con-duire vers des crédits de routine, du ressort del’assurance maladie.» Et Christian Saoutpoursuit: «On voit clairement notre incapacitéde concevoir un modèle de prise en chargeadapté aux maladies chroniques.» Tour d’hori-zon des cas les plus emblématiques du mondeassociatif.

AIDES PRIVILÉGIE LE SUDAides, bien sûr, tangue. Le bateau amiral, laplus grosse, la plus importante associationde lutte contre le sida en Europe, va connaî-tre des temps difficiles. Bruno Spire, son pré-sident, ne s’en cache pas: entre 2008 et 2013,ce sont près de 25% de financements publicsqui se sont envolés. Les agences régionalesde santé comme la Direction générale de la

santé les ont ainsi baissé drastiquement.Aides, aujourd’hui, c’est près de 450 salariéset un budget de près de 40 millions d’euros.Mais depuis deux ans, les fonds privés, enparticulier les collectes dans les rues, four-nissent plus de la moitié du budget.L’avenir? «On ne va pas mourir. Dans cinq oudix ans, nous serons toujours là. Mais dans quelétat, et pour faire quoi ?» se demande BrunoSpire, qui donne un exemple de l’absurditédes pouvoirs publics: «Depuis deux ans, nousnous sommes lancés dans les tests de dépistage

rapide pour les populations lesplus fragiles. C’était le souhait despouvoirs publics. Or, on nous les

paye 25 euros, c’est-à-dire que l’on perd del’argent à chaque test.» Que va-t-il se pas-ser ? «Nous avons fait des choix, expliqueBruno Spire. Nous garderons nos actions àl’international, vers les pays du Sud. Nous n’al-lions pas faire ce que l’on critiquait chez bonnombre d’Etats du Nord, disant qu’en raison dela crise ils réduisaient leur aide au Sud. Non, onmaintient. Mais cela veut dire qu’en France,nous allons devoir faire des coupes sèches.»

ACT UP­PARIS TENTE DE SURVIVREHier fer de lance du discours public, impo-sant ses slogans et ses manifestations, Act Upest devenu une petite association: moins dedix salariés, avec un budget de 800000 euros.«Il y a deux ans, Sidaction nous a donné117 000 euros, maintenant un peu plus de

80000 euros. Oui, Act Up est en danger», lâ-che un des vice-présidents qui ne mâche passes mots sur la ministre de la Santé, MarisolTouraine: «Qu’a-t-elle compris? Elle n’est ja-mais venue présider le nouveau comité de pilo-tage du nouveau plan sida. Et elle a pris positionpour pénaliser les clients des prostituées, alorsque tout le combat a été de décriminaliser si l’onveut être efficace en terme de santé publique.»

LE SIDACTION À LA PEINEDepuis vingt ans, à côté des financementspublics, il y a le Sidaction, puissant collecteurde fonds, en particulier grâce à une émissiontélévisée. Cet événement est devenu indis-pensable, irriguant tout le milieu associatif.La moitié de sa collecte va en effet vers la re-cherche, et l’autre moitié vers les malades etles associations. «Les difficultés existent de-puis deux ans, analyse Marc Dixneuf, du Si-daction, très bon observateur du foisonne-ment associatif. Il y a eu des changementsadministratifs aussi, avec la création des agen-ces régionales de santé (ARS). Toutes les sub-ventions sont passées par elles. Or, il y a eu desbaisses dans toutes les régions. Avec des absur-dités: par exemple, l’ARS de Guadeloupe a toutstoppé, alors que l’épidémie y est très forte. Al’inverse, en Guyane, l’ARS a mis du temps,mais elle a compris, et fait du bon travail.»Par ailleurs, l’enveloppe globale distribuéepar le Sidaction est en baisse. «En 2013, versle milieu associatif, nous avons donné un peu

plus de 2,8 millions d’euros. En 2012 et les an-nées précédentes, c’était au moins 4 millions.»Comment dès lors faire des choix? «Ce qu’ilmanque, précise Marc Dixneuf, c’est une ré-flexion publique sur les enjeux de l’épidémie, etsur ce que les pouvoirs publics veulent faire.»

VIVE «LES PETITS BONHEURS»«La solitude ? Peut-être n’a-t-elle jamais étéaussi forte qu’aujourd’hui chez les malades, plusforte en tout cas qu’il y a dix ans quand il y avaitencore une forte mobilisation», constate Gre-gory Becq, qui a fondé en avril 2008 les Petitsbonheurs. C’est la plus belle histoire dumonde associatif, mais c’est aussi comme leretour au tout début de l’épidémie. Le projetpourrait sembler naïf, il ne l’est pas. Voilà desbénévoles qui aident les malades, les poussentà réaliser un rêve ou un désir. «On s’est renducompte que vivre vingt-cinq ans avec le virusprovoquait un isolement majeur, et surtout uneprécarisation. Beaucoup sont seuls, sansmoyens», insiste le fondateur de l’associationqui suit 850 malades, dont des plus de 60 ans.Les bénévoles se déplacent, vont à leur ren-contre. Parfois tous les jours, ou une ou deuxfois par an. «On peut les emmener en week-endà la campagne, aller avec eux acheter des vête-ments, ou bien simplement ranger leur apparte-ment.» C’est tout bête et cela marche. Aidesleur donne 100000 euros, pour un budget de250000 euros. «Aujourd’hui, ajoute GregoryBecq, on a surtout besoin de bénévoles…» •

DÉCRYPTAGE

A l’initiative de l’Organisation mon­diale de la santé (OMS), la journéemondiale de la lutte contre le sida alieu dimanche. Depuis 2011 et jusqu’en2015, son thème est «Objectif zéro:zéro nouvelle infection, zéro discrimina­tion, zéro décès lié au sida».

REPÈRES

6400nouvelles contaminations par le VIH,en 2012 en France, selon l’Institut natio­nal de veille sanitaire.

Les associations de lutte contre le sidasubissent une baisse de plus d’un tiersdes subventions publiques depuis deuxans. Goutte d’eau (quelques millionsd’euros) par rapport aux 127 milliards debudget de l’assurance maladie, mais auxconséquences catastrophiques.

Le sida est devenu, en France, une épidémietrès particulière. Marginale chez leshétéros, maîtrisée voire en baisse chez lesmigrants, faible chez les usagers de droguepar voie intraveineuse, mais active chezles gays. C’est ce qu’indiquent les étudesde l’Institut de veille sanitaire (INVS),publiées dans le Bulletin épidémiologiquehebdomadaire (BEH). On estime qu’il y aentre 150000 et 200000 personnes vivantavec le virus, 30000 ignorant leur statut.Globalement, l’épidémie n’est pas à l’arrêt:«Environ 6400 personnes ont ainsidécouvert leur séropositivité en 2012.»Et surtout, «le nombre de découvertes deséropositivité VIH augmente uniquementchez les hommes ayant des rapportssexuels avec les hommes».«Les pratiques à risque continuent, voireaugmentent chez les gays. Elles ont lieuaussi bien à Paris qu’en province, chez lesjeunes que chez les vieux», analyse AnnieVelter, de l’INVS, qui a coordonné une vaste

étude sur le sujet à partirde questionnaires remplis par plus de10000 hommes ayant des rapports avecdes hommes. On découvre ainsi que«l’usage du préservatif systématique estproche de 60% chez les séronégatifs,mais seuls 20% des séropositifs l’utilisentsystématiquement lors de rapportsanaux avec un partenaire occasionnel».Et cette chercheuse d’ajouter:«Depuis 1997, l’usage systématique dupréservatif ne cesse ainsi de diminuer,et ce, quel que soit le statut sérologiquedes répondants. Il est passé de 68%en 1997 à 47% en 2011.» Pour l’INVS,cette situation justifie la mise en placede politiques où l’on multiplie le typede réponses, par exemple en essayantde diminuer les pratiques les plusà risques, mais aussi en promouvantéventuellement des médicamentsantirétroviraux avant un rapportà risque. É.F.

LES GAYS TOUJOURS PRINCIPALES VICTIMES DU VIH

Les organisations d’aide aux malades sont obligées de réduire leurs programmes et leurs effectifsà cause de la baisse des financements publics et du montant des collectes.

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 FRANCE • 13

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Nothing is not a pleasure if one is irritated , but suddenly

UnVallsdegauchesurlesterresdeClemenceauAprès sessorties quiont heurtéla majorité,le ministrede l’Intérieurtentait, enVendée,de rectifierson image.

Par GRÉGOIRE BISEAUEnvoyé spécial en VendéePhotos THÉOPHILE TROSSAT

Ce n’est évidemment pas un nouveauM a n u e l Valls. Ni même recen-

tré. Disons plutôt unValls qui a pris conscience

qu’à force de cliver, il était en train dese couper d’une partie de la majorité.Pente dangereuse: il pensait être unrecours, il était en train de devenir unrepoussoir. Il fallait se rétablir. Endouceur, sans donner l’impression dese dédire. Mercredi, il était à la tri-bune de la Mutualité, au meeting duParti socialiste, pour «défendre la Ré-publique face aux extrémismes». L’op-

portunité était trop belle: s’afficheravec la ministre de la Justice. Il n’apas fait dans la demi-mesure: «Moi,parmi vous, je suis celui qui connaît lemieux Christiane Taubira. Progressive-ment, malgré les analyses, les avis,nous formons, je le dis, un beau cou-ple», dédié à «l’Etat de droit». Depuisplusieurs semaines, le ministre del’Intérieur laboure la France. Après leLot, il a passé vingt-quatre heures enVendée en début de semaine. Retoursur une inflexion.

Dimanche, 15h50Dans le TGV Paris­NantesCol roulé gris anthracite, le coudeposé sur une pochette bleue qu’il

n’ouvrira pas une seule fois du trajet,Valls parle. On pourrait être au coindu feu, on est dans un carré premièreclasse de TGV. Face à lui, deux jour-nalistes. L’un du Figaro, l’autre de Li-bération. C’est du off. Evidemment.Le off de Valls a le même goût que ce-lui de Sarkozy: c’est direct, sans dé-tour et souvent enveloppé d’humour.Des confidences qui créent de factoune complicité que le journaliste po-litique a toujours rêvé d’approcher,tout en cherchant à s’en prémunir.Cela faisait quelques semaines quecette question nous tracassait : si leministre de l’Intérieur veut vraimentgrimper jusqu’à Matignon, pourquoialors chercher à diviser son proprecamp sur des sujets aussi identitairespour la gauche que l’intégration oul’immigration? Et si Valls n’était fi-nalement qu’un piètre politique,d’abord prisonnier de ses coups dementon ? Il sourit et répond : «Jecrispe peut-être, mais je ne suis pas dutout marginalisé au sein de la majoritécomme aimeraient le faire croire ceuxqui combattent certaines de mes posi-tions.» Et pour faire preuve d’ouver-ture à sa gauche, il ajoute : «Je n’aiaucun problème avec Benoît Hamon etArnaud Montebourg, ni même avecChristiane Taubira.»Pourquoi alors avoir sciemmentcherché le point de rupture avec lamajorité, sur des sujets comme levoile à l’université, l’intégration desRoms ou le regroupement familial?Valls refuse cette idée selon laquelle

55%C’est la cote d’avenir deManuel Valls (­3 points)selon un sondage BVApublié lundi, ce qui le placeen tête du classement despersonnalités politiques,devant Alain Juppé etJean­Louis Borloo. Son­dage réalisé en ligne les21 et 22 novembre auprèsd’un échantillon représen­tatif de 1113 personnes.

Fontenay-le-Comte

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VENDÉE

LOIRE-ATLANTIQUENantes

La Roche-sur-Yon

MANUEL VALLSw 13 août 1962 Né àBarcelone (Espagne).w 2001 Maire d’Evry(Essonne).w 2002 Député del’Essonne.w 2011 Candidat à laprimaire PS (5,63%).w 2012 François Hollande lechoisit pour diriger la com­munication de sa campa­gne présidentielle.w 16 mai 2012 Ministre del’Intérieur.

REPÈRES

«[Manuel Vallsest allé] au-delà dece qui met endanger le pacterépublicain.»Cécile Duflot ministre duLogement, le 26 septembre,après les propos de Vallssur l’intégration des Roms

Manuel Valls àMouilleron­en­Pareds(ci­contre) et, page dedroite, à Mouchamps

(en haut et en bas à g.),à La Roche­sur­Yon

(en haut à dr.) età Fontenay­le­Comte

(en bas à dr.).

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201314 • FRANCE

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(and then more and more and slowly ). Originally

il aurait de sa propre initiative misces sujets sur la table. Il n’est pasdans la nature du ministre de l’Inté-rieur de verser dans l’autocritique.Son credo: «Plus le temps passe, plusje deviens fort.» Et comme par ha-sard, Manuel Valls a décelé dans lepays «une demande d’autorité, declarté, de visibilité et de force». Sans ledire, il décrit le profil d’un Premierministre idéal qui serait «capable detenir le choc», pour permettre à Fran-çois Hollande de s’élever à la bonnehauteur présidentielle.Dans le petit jeu du «qui demain à laplace de Jean-Marc Ayrault?», Ma-nuel Valls reconnaît que MartineAubry est une carte qui pourraitavoir un sens politique. Et puis il y alui, bien sûr. Et personne d’autre. Ilest suffisamment habile pour ne pasle dire mais le faire comprendre.Mais il ajoute qu’il ne pense pas àMatignon tous les matins : «Je neveux pas perdre de la force et de l’éner-gie à courir plusieurs lièvres à la fois.Mon seul objectif est de réussir dans letemps dans un ministère qui donne unevraie visibilité.»Comme certains conseillers à l’Ely-sée et plusieurs ministres, ManuelValls a été partisan d’un vaste chan-gement dans la composition du gou-vernement pour se donner un peud’air pour les municipales, puis leseuropéennes. Il sait que la prochainefenêtre météo est maintenant au len-demain du scrutin européen. Le TGVarrive en gare de Nantes. Un voya-

geur se lève et lui tend une carte devisite. «Si vous avez besoin de compé-tences pour Matignon.»

19heuresSalle des fêtesde Fontenay­le­ComteCalé derrière un pupitre transparent,Valls parle depuis cinq minutes. Faceà lui, un public de militants socialis-tes et quelques curieux, venus pren-dre le pouls de l’animal politiquepréféré des Français. Ici, la terre estde droite, mais la ville (comme cellede La Roche-sur-Yon) de gauche.Manuel Valls égrène les réformes dugouvernement, sur le mode du «ça,on l’a fait». Et tout d’un coup, sortide nulle part, un cri : «Socialisme,dictature !» Une fois, deux fois. Oncroit à un gag. Mais non. Le petitplaisantin est expulsé manu militari,par le service d’ordre. Bon prince,Le ministre de l’Intérieur demandeà la salle d’applaudir l’audace de cemilitant d’extrême droite. Et en pro-fite pour rendre hommage au ma-riage pour tous, cette «réforme degauche».Le Manuel Valls de la primaire, fa-rouchement social libéral, n’est plusqu’un vieux souvenir. Ici, le ministrede l’Intérieur a des étranges accentsmarxistes : «C’est quoi être de gau-che? lance-t-il. Ça passe d’abord parl’école, afin de lutter contre les inégali-tés, contre ce déterminisme.» Puisc’est l’apologie de l’Etat: «La France

s’est construite avec une colonne verté-brale, l’Etat». Il faut, selon lui, «en-tendre la voix de plus d’Etat», pourlutter contre «le sentiment d’abandonque peuvent ressentir nos conci-toyens». Et enfin, l’apologie de lalaïcité. Applaudissements. C’est lemoment du pot de l’amitié. On com-prend mieux pourquoi Valls est aussipopulaire. Jacques : «Le problèmec’est qu’on a mis deux gentils à la têtede l’Etat. Il faudrait mettre quelqu’unde fort, pour protéger le général enchef.» Daniel :«Il fallait expliquerbeaucoup mieux et plus tôt la situationdont on a hérité. Maintenant c’est troptard.» Béatrice : «La gauche et ladroite, c’est dépassé maintenant.»

Lundi, 11h30A la sous­préfecturede Fontenay­le­ComteLe bâtiment est bourgeois, élégant.Une sous-préfecture comme il y ena près de 250 en France. Un maillageadministratif et qui n’a pas bougédepuis plus d’un siècle. Le 23 octo-bre 2012, à l’Assemblée nationale,Manuel Valls avait été explicite: «Jen’ai jamais caché qu’il nous faudraitfermer des sous-préfectures.» Maisdepuis plus rien. Il a rétropédalé ensourdine. Seules six ou sept sous-préfectures vont être fermées ouréaménagées. Alors il profite d’uneséance de décoration, pour désamor-cer. «Je mesure l’attachement des élusau réseau des préfectures et sous-pré-

fectures […] et ce lien avec l’Etat quiprotège, qui organise, qui est là quandsurgissent les difficultés collectives ouindividuelles.» Valls n’est peut-êtrepas le moderne qu’il aimerait incar-ner. Celui qui était, par exemple, fa-vorable à la suppression des départe-ments:«J’ai changé d’avis. Je ne croispas que cela ferait des économies. Dansles départements ruraux, la questionde la proximité géographique est trèsimportante.»

15h30Tombeau de ClemenceauC’est un lieu-dit, perdu au milieu dela campagne vendéenne. Il y a ni ins-cription ni plaque. Seulement quatrepierres posées par terre, délimitéespar une grille. C’est ici que reposeGeorges Clemenceau. Juste à côté deson père. Manuel Valls ne pouvait pasrater l’occasion de l’anniversaire dela mort du «Père de la victoire». Ce-lui dont le buste trône dans son bu-reau. Alors quand Valls rend hom-mage à Clemenceau, il n’est pasinterdit de penser qu’il parle aussi unpeu de lui. «Je retiens, avant tout,l’attachement viscéral à la République,à la fois expression de la souverainetéde la nation et de la souveraineté del’individu. Car la République, c’estl’ordre […]. L’ordre sans lequel aucunprojet de société n’est viable.» Puisl’ancien maire d’Evry rappelle l’in-compréhension que Clemenceau a pususciter au sien de sa propre famillepolitique. «Rappeler l’héritage d’unhomme, c’est aussi faire l’effort intel-lectuel de fuir les raccourcis, les carica-tures, pour accéder à la complexité, àla totalité d’une pensée. […] Clemen-ceau a su penser contre son époque,contre l’esprit du sérail.»

17 heuresNantes­Paris,dans le TGV du retourCette fois, le ministre est assis dans lesens de la marche. La nuit est tombée.Sarkozy aurait sûrement défait sonnœud de cravate. Valls, lui, le garde.Il évoque le glorieux passé. Les pre-mières années du gouvernement Jos-pin. Il se souvient d’une mécaniquegouvernementale huilée. Une fois parquinzaine, Lionel Jospin réunissait àMatignon tous les ministres pourdébattre des gros sujets politiques encours. Souvent cela se prolongeaitpar un déjeuner. Aujourd’hui, Valls,comme beaucoup de hollandais, rêved’un parti mieux arrimé au gouver-nement. D’un Président qui s’impli-querait davantage dans la gestion dela majorité. D’une plus forte collégia-lité au sein du gouvernement. SonBlackberry vibre. Un sondage BVAvient de tomber. Valls perd 3 points.Il lit le classement à haute voix :«Aubry +6 points, mais elle était trèsbasse; Taubira +2, mais elle est très loinà 19 d’opinion positive; Duflot +3, maiselle était très basse.» Il repose sonportable. «Ce qui compte c’est d’êtrehaut sur plusieurs mois.» •

La reproductionde nos petites annonces

est interdite

Le CarnetEmilie Rigaudias

0140105245

[email protected]

CARNET

DécèS

Paris

Emilie, Roch,sa famille et ses amis,ont le chagrin de vousannoncer le décès deJef qu'ils aimaient tant.

M. Jean-FrançoisDELSALLE,

ARCHITECTE

survenu le 27 novembre 2013,à l'âge de 63 ans.RochDELSALLE

36, RueDes Jeûneurs75002Paris

Te nommer c'est faire brillerla présence d'un être

antérieur à ta disparition.JacquesRoubaud

GuillemetteCHANCENOTTE

a disparu brutalementàMouffy (Yonne) le19 novembre à 37 ans.

Elle a retrouvé Bruno, sonpère, parti le 14 février 1997.

Son amour, samère,ses deux sœurs, son frèresa famille, ses proches,

ses amis.

SouvenirS

ALEXANDREJ'emmène au creuxdemonombre

Des poussières de toiLe vent les portera

Ta famille, tes amis

J­1

LIB_13_11_29_CAR:LIB_AA_MM_JJ_PA 28/11/2013 15:42 Page 1LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 FRANCE • 15

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we were nowhere ; and now, again we are having

1115882Suivant acte SSP en date du 17 novembre 2013, il a été constitué la SCI suivante :Dénomination :

SCI ANI-GAMCapital : 1 000 €Siège social : 14 avenue de Laumière, 75019 Paris.Objet : l’acquisition par voie d’achat ou d’apport, la propriété, la mise en valeur, la transformation, l’aménagement, l’admi-nistration, l’exploitation par bail et la lo-cation de tous biens et droits immobiliers.Gérant : Anne FLEITER demeurant 5 rue Coysevox, 75018 Paris.Durée : 99 ans.Cessions de parts : Les cessions de parts sociales sont libres entre associés. Toutes les autres cessions sont soumises à agré-ment.Immatriculation sera faite au RCS de PARIS.

1115950

GOODS TO KNOW SASSAS au capital de 5000 Euros

Siège social :14 rue Valentin Haüy - 75015 Paris

791 472 665 R.C.S. Paris Par décision en date du 15 novembre 2013, Adeline Carrié, demeurant 14 rue Valentin Haüy, 75015 Paris a été nommée en qualité de Directeur Général de la société à compter du 15 novembre 2013. Les articles 13 et 22 ont été modifiés en conséquence. Modification au RCS de PARIS.

Libération est habilité aux annonces légales et judiciaires pour le département 75 en vertu de l’arrêté préfectoral du 27 décembre 2012Jean­Luc Bennahmias dit «en être resté sur le cul» quand

il a pris connaissance des propos à son endroit dusénateur et maire UMP de Marseille, Jean­Claude Gau­din. «Il n’a jamais été aspergé d’eau bénite celui­là. Moij’ai grandi dans les sacristies. C’est mieux», a déclarémardi l’élu, qui vient de se porter candidat à sa réélec­tion, dans l’émission Preuves par 3 (Public Sénat). «Cequi me choque, c’est cette dernière partie de la phrase,quand il dit que fréquenter les sacristies, c’est mieux.Mieux que quoi? Fréquenter un temple protestant ou unesynagogue?» s’interroge le député européen et vice­pré­sident du Modem. S’il n’envisage pas de porterplainte contre Gaudin, Jean­Luc Bennahmias, chef du filedu parti centriste à Marseille, «lui demande des explica­tions républicaines. Pas des excuses». Hier, le Mrapa réagi en dénonçant «ce renvoi aux origines juives deMonsieur Bennahmias», par lequel «Jean­Claude Gaudinparticipe à cette insupportable racialisation desesprits.» C.F. PHOTO AFP

JEAN­LUC BENNAHMIASDEMANDE DES«EXPLICATIONS»À GAUDIN

Ce week-end, lesécologistes chan-gent de tête. Et

c’est bien la seule certitudedu 2e congrès d’Europe Eco-logie-les Verts (EE-LV) quis’ouvre aujourd’hui à Caen(Calvados). Car entre décep-tions des adhérents sur laparticipation au gouverne-ment, éparpillement des voixentre sept sensibilités et luttedes places côté dirigeants, lesécologistes renouent avecleurs mauvaises habitudes.«Ça me rappelle une périodehéroïque mais un peu pénible,

confie Cécile Duflot. Je nepense pas que ceux qui l’ontvécue aient envie de la revi-vre», ajoute la ministre duLogement, restée six ans –unrecord– à la tête du parti.Fronde. Si tout se passebien, au bout de longues né-gociations qui prendront finau petit jour samedi, Emma-nuelle Cosse sera élue secré-taire nationale. Vice-prési-dente du conseil régionald’Ile-de-France chargée duLogement, l’ancienne prési-dente d’Act Up arrivée chezles écolos avec la vague

d’ouverture aux régionalesde 2010 prendra la suite dePascal Durand. Devant unefronde des cadres qui récla-maient sa tête, ce dernieravait préféré mi-septembrene pas se représenter et pré-féré mener la liste Ile-de-France aux européennes demai. En moins de vingt-quatre heures, le nom deCosse était annoncé pour dé-fendre une «motion de ras-semblement», baptisée «Pourun cap écologiste».Mais avec 38% des5400 suffrages –moins de la

moitié des adhé-rents revendi-qués– récoltés ily a deux semai-nes, on est loindu rassemble-ment visé. Il fautencore convain-

cre deux autres grandes lis-tes : «La motion participa-tive» (LMP- 20,6%)–composée de l’aile gauchedu mouvement et d’environ-nementalistes comme YvesCochet ou Alain Lipietz – et«Via Ecologica» (17%) dontles signataires critiquent ladirection sans remettre encause la participation augouvernement. Reste ensuiteà ramasser quatre petitesmotions dont celle des amisd’Eva Joly, dite «Love»– pour «Là où vit l’écolo-gie»– et ses 8,8%. Certains

rêvent même de renverser ladirection sortante et de ma-jorité alternative. «On re-tombe dans la maladie desécologistes : l’affect et lesquestions de personnes», sedésole David Cormand,membre actuel de la direc-tion. Même Lucile Schmid, àla tête de LMP, juge ce scéna-rio «compliqué». Ce qu’ellesouhaite surtout : «Discuterde la ligne politique et de lagouvernance interne.»Etape. Depuis plusieursjours, deux groupes de tra-vail planchent sur ces sujetspour aboutir à un accord. Lesplus à gauche du parti veu-lent questionner la participa-tion au gouvernement. Tousréclament une «nouvellefeuille de route». «Pourquoivouloir recontractualiser avecles socialistes alors qu’on n’apas encore appliqué l’accord degouvernement?» interroge uncadre. Sans sauter l’étapeclarification, on préfère chezCosse s’appliquer à régler le«rapport au pouvoir» desécolos. «On ne l’a jamaisthéorisé, constate un respon-sable, et, depuis dix-huitmois, chacun le fait dans soncoin» et s’enferme dans la«question piège» du maintiende leurs ministres au gouver-nement. Pour Duflot, «laposture et les effets de com onttrouvé leurs limites». A voir.

LILIAN ALEMAGNA

Lecongrèsd’EE-LVendésordredebatailleSENSIBILITÉS Les Verts doivent élire ce week-end à Caenleur secrétaire national. Emmanuelle Cosse est favorite.

LES GENS

Emmanuelle Cosse à Paris, en novembre 2011. PHOTO JEAN­MICHEL SICOT

«Ça me rappelle une périodehéroïque mais un peupénible.»Cécile Duflot faisant référence auxmauvaises habitudes des écologistes

Par VÉRONIQUE SOULÉ

Heures de «décharge»:les profs de prépasonnent la charge

branle-bas de combatchez les professeursde prépas. Dans le

cadre des discussions sur lemétier d’enseignant, le mi-nistère de l’Education pro-pose notamment de réduireleurs heures de décharge.Associations et syndicats dé-noncent une mesure «bles-sante» qui conduirait à bais-ser leurs salaires ou à les fairetravailler plus sans gagnerplus.

Que veut le ministère ?L’objectif des discussions estde rénover un métier qui abeaucoup évolué mais resterégi par des textes de 1950.Le ministère veut notam-ment supprimer des déchar-ges qui, selon lui, sont dé-passées, comme les «heuresde cabinet» en histoire-géo(pour gérer le matériel, lescartes, etc.) et celles en pré-pas. A la place, il proposeune pondération –une heurede cours en prépa valant 1,5,une heure en zone d’éduca-tion prioritaire 1,1, etc.Un prof de prépa doit donnerdix heures de cours par se-maine. Mais il a une heure dedécharge lorsqu’il enseigneen deuxième année –car lesélèves préparant les con-cours, il a plus de travail– et

une autre heure de déchargelorsque les étudiants sontplus de 35 – soit la majoritédes classes. La plupart desprofs de prépas ont donc des«services» de huit heuresauxquels il faut ajouter lapréparation des cours et lescorrections des devoirs, trèslourdes à ce niveau. Ils fontaussi souvent des heures supet des «colles». Selon laCour des comptes, ce sont lesenseignants les mieux payés.

Pourquoi les profsprotestent­ils ?Dans une pétition qui avaitrecueilli hier 18700 signatu-res, les protestataires récla-ment l’abandon du systèmede pondération. Ils estimentque s’il était appliqué, lagrande majorité des profs deprépa perdrait de 10 à 20% desalaire. Ils dénoncent un pro-jet «déstabilisant un systèmede formation qui contribue defaçon significative à la créationdes forces vives de la nation»et «un incompréhensible etblessant manque de respect»vis-à-vis de personnels dé-voués au service public. Lessyndicats vont protesterlundi au ministère où ils se-ront reçus dans le cadre desdiscussions en cours, et ap-pellent à la mobilisation. •

DÉCRYPTAGE

Réfugiés Pour la res­ponsable du programme«asile» de l’Associationdes chrétiens pourl’abolition de la torture,«la réforme du droitd’asile a une vision trèscomptable». Interview.

• SUR LIBÉ.FR

Le juge Marc Trévidic aobtenu en Algérie le feuvert pour autopsieren 2014 les têtes des moi­nes de Tibéhirine, dans sonenquête sur leur assassinaten 1996, a indiqué à l’AFPl’avocat de proches desreligieux. Le magistrat, quis’est rendu en début desemaine en Algérie, n’a enrevanche pas obtenul’autorisation de réaliserlors de sa prochaine visiteune série d’auditions detémoins qu’il réclamait, aprécisé Me Patrick Bau­douin. Les auditions d’unevingtaine de témoins etl’autopsie des crânes desmoines constituaient lesdeux aspects essentiels dela commission rogatoireinternationale (CRI) adres­sée en 2011 à l’Algérie.Enlevés dans la nuit du 26au 27 mars 1996 dans leurmonastère près de Medea,les religieux avaient étéassassinés. Un acte reven­diqué par le Groupe islami­que armé (GIA) de DjamelZitouni. Après avoir suivi lathèse islamiste, l’enquêtes’est réorientée vers unepossible bavure de l’arméealgérienne.

TIBÉHIRINE :UNE AUTOPSIEAUTORISÉE

L’HISTOIRE

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201316 • FRANCEXPRESSO

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the pleasure of being slowly nowhere.

«En avril, ne te découvre pas d’un fil»… PHOTO JOSHUA DALSIMER. PLAINPICTURE

Ennovembre,fautqueçachambre…Un ouvrage conséquent recenseet explique des milliers de dictons.Une somme indispensable pourpasser un hiver aux tisons.

Non mais dicton, ce se-rait pas le jour pour enparler ? Mais si. En ce29 novembre («neige lejour de Saint-Saturnin,c’est de l’eau pour le

moulin») il est grand temps derendre hommage à une fort bellesomme: 1050 pages sur papier bi-ble de… dictons. Appelonsun «chat un chat», il s’agitlà d’une recension inégalée,réalisée par le Dr ès lettres AgnèsPierron, qui s’est plue à les classer,contextualiser, décortiquer (1).Au finale, une plongée dans un pa-trimoine linguistique construit de-puis l’an mil, transmis de bouche àoreille avant d’être couché dans desalmanachs. Leur signature ? Uneéconomie de mots («c’est la préci-sion qui fait le dicton»). Leur fonc-tion ? Servir de «maison de motsoù habiter ensemble», comme l’ajoliment résumé l’écrivain MichelTournier. Et ce, en rythmant letemps et les saisons («décembre tropbeau, été dans l’eau»), en régissantles maux du corps («trop grattercuit, trop parler nuit»), en accom-pagnant des premiers jours àla mort («tant que tu riras, tu nemourras pas»).Mais, au fond, comme le revendi-que Agnès Pierron, un dicton se ré-sume surtout «à une formulette pouréviter de parler de soi ou de poserdes questions [exemple: “Cheveu fin,cheveu malin”].» Et il s’agiraitsurtout de «prêts-à-porter dela langue» des plus utiles quand onn’a rien à dire, mais qu’on cherchela rime. Alors, «c’est partimon kiki».

LE DICTON, C’EST CON…Sous ses petits airs moralisateurs, ledicton sait aussi se faire coquin.Ainsi pouffe-t-on en tombant surcelui-ci: «A la Saint-Mathurin, faisune pipe à tes lapins.» Non, non,

non. Il y a tromperie sur la fellation.Ce dicton fut inventé par des far-ceurs dans les années 60. «Pour êtresûrs de se retrouver entre eux, sans lespetits branleurs de la direction et sansle personnel féminin, des ouvriers im-primeurs de l’ouest de la France ontinventé ce dicton, qui servait en fait demot de passe pour aller boire descoups à la cafétéria», raconte AgnèsPierron.En version plus classique, voire his-

torique, on retiendra les bienréconfortants «pas de boi-teux, ni de bossu, qui n’ait le

diable au cul», ou «vieilles amours etvieux tisons s’allument en toutes sai-sons». Plus médical, on aime bien:«Rage de cul fait passer le mal dedents.» Plus déchaînés, voici: «Filleen cheveux, viens si tu veux», ou lefaussement poétique «chemin jon-chu et cul velu sont forts propres pourchevaucher».Et puis, comme toujours, pas de culsans curé : «Le matin à la messe, lesoir à la fesse» (chaque chose en sontemps, quoi), ou, dans le même re-gistre : «Femme folle à la messe,femme molle à la fesse.» En tout cas,pour les réconciliations surl’oreiller, on repassera car «le mé-nage brouillé, c’est l’hôtel du cultourné». Et quand on ne peutcompter que sur soi-même, autantprendre son temps, puisque «deuxminutes, c’est correct, trois minutesc’est jouer avec».

LE DICTON, C’EST DE SAISON«En avril, ne te découvre pas d’unfil», «en mai, fais ce qu’il te plaît»,mais surtout, surtout : «Quand ona froid, il faut tenir le cul serré.» C’estpeu dire que le dicton sert dans sagrande majorité à rythmer les sai-sons. Gag: moult d’entre eux se ré-fèrent à des calendriers qui ont étéjetés par-dessus bord (le calendrierjulien, celui de Jules César, rem-placé par le grégorien, celui dupape Grégoire XIII), ce qui a en-traîné des décalages d’une dizainede jours dans les prévisions météo-

rologiques. Et pourtant, comme lesouligne Agnès Pierron, «on nes’étonne pas d’un rafraîchissementsensible de la température du 11 au13 mai, ce sont “les saints de glace”,ni d’un étonnant redoux aux environsdu 11 novembre, c’est “l’été de laSaint-Martin”».Mais au fond, qu’importe la véra-cité, du moment qu’on a des saintsauxquels s’accrocher. Alors, pourdécembre, on recommande: «Si lejour de Noël se trouve être un diman-che, les ennuis de l’hiver viendronten avalanche.» Ouf, cette année, çatombe bien, Noël tombe un mer-credi. Allez, un petit dernier pourpasser l’hiver: «Si les pénitents ne sedéchargent, ils retournent àla charge.» Double traduction : siles arbres restent couverts de neige,il risque d’en tomber à nouveau.Sauf que le pénitent n’est autrequ’un pécheur. Quant à ce que si-gnifie la charge, inutile de faireun dessin.

LE DICTON, C’EST LA RÉVOLUTIONPépère le dicton ? Pas tant que ça.Il est même capable de se mettre àbouillonner pour aller s’acoquineravec le slogan. Allez tous ensemblederrière «pas de messe pour lesmasses». Depuis mai 68, des classi-ques perdurent : «Une seule solu-tion, la révolution»; «Elections, piègeà cons»; «Ce n’est qu’un début, con-tinuons le combat.» D’autres ontsuivi, tel le hollandais «investiturepluvieuse, investiture heureuse» (àconfirmer).Dans un registre plus social, on seréjouit encore de ce «Pâques sansscanner, Noël au cimetière», bi-douillé sur mesure par les internesen grève d’un hôpital parisienen 1997. Ou des très quotidiens :«Messes basses, presse basse» et«Quand Gutenberg a des misères,tout va de travers». •(1) «Le Bouquin des dictons», éd. RobertLaffont, collection Bouquins, 1056pp.,30 euros, novembre 2013.

Par MARIE­JOËLLE GROSet CATHERINE MALLAVAL

RÉCIT

Le dicton est un proverbe,tout comme les aphorismes,qui tirent une conclusion defaits observés («chat échaudécraint l’eau froide»), les ada­ges, plutôt de l’ordre du con­seil («qui veut voyager loinménage sa monture»), les pré­ceptes, proches de la leçon(«l’éducation a des racinesamères, mais ses fruits sontdoux»), ou les sentences.

REPÈRES

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 • 17

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BOB WILSONINVITÉ SPÉCIAL

Here we are now at the beginning More and more I have the feeling

Masquetrouvé dans

un supermarchéau Cambodge,

en 2001.PHOTO LOVIS

DENGLER OSTENRIK.COLLECTIONPARTICULIÈRE

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201318 •

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LespesticidesaubanpublicAlors que le Sénat a adopté une proposition de loi qui prévoit de bannir les engrais chimiquesdes espaces verts, les initiatives municipales sans produit phytosanitaire se multiplient.

es herbes folles poussent entre lestombes, des rosiers sauvages fleuris-sent sur les sépultures, des centaurées

et du fenouil sauvage s’infiltrentdans les fissures des trottoirs.

Le cimetière des

Gonards, àVersailles (Yvelines), a des allures anglo-saxonnes. Un peu moins minéral, un peu plusbucolique malgré l’alignement des pierrestombales en granit. La Cité royale est la pre-mière ville en France à avoir expérimenté,dès 2009, le «zéro pesticide» dans ses cime-tières. Mais il a fallu quatre ans pour sevrerles quatre cimetières de la ville de tout traite-ment chimique. A l’origine de l’initiative, ladirectrice des espaces verts de Versailles, Ca-thy Biass-Morin, déterminée à protéger lasanté des agents de ses services, en leur évi-tant les effets toxiques de la manipulation despesticides. L’environnement y a aussi gagné:les cimetières de Versailles sont situés au-dessus des nappes phréatiques ou à proximitéde cours d’eau. Tout traitement –30000 li-tres de produits chimiques par an, par exem-ple, pour le seul cimetière des Gonards –ruisselait immédiatement dans les nappes…

RUISSELLEMENT. Cette révolution vertes’inscrit dans la démarche globale de la ville:depuis 2007, Versailles a banni de ses espacesverts tout engrais chimique et tout produitphytosanitaire. Elle a rejoint ainsi les villesfrançaises (Angers, Belfort, Nantes, Rennes,Strasbourg, etc.) ou collectivités territorialescomme le département de l’Isère, dites «Zérophyto»: elles ont banni les pesticides et pra-tiquent le désherbage mécanique ou thermi-que, ou le paillage contre les «mauvaisesherbes». Un mouvement que la propositionde loi adoptée à l’unanimité par le Sénat le19 novembre –192 voix pour et 4 contre– en-tend augmenter. L’objectif de son auteur, JoëlLabbé, sénateur Europe écologie-les Verts duMorbihan, est de mettre fin à l’usage urbaindes pesticides. Même si les usages non agri-coles ne représentent qu’entre 5 et 10% duvolume total de pesticides utilisés en Franceavec environ 5000 tonnes par an, le principalconsommateur restant l’agriculture, l’impactsur la qualité de l’eau est loin d’être négligea-ble. En effet, jusqu’à 40% des quantitésd’herbicides appliquées en ville, sur des sur-faces le plus souvent imperméables, doncsensibles au ruissellement, peut être lessivévers les cours d’eau, contre 1% environ surterres cultivées ou pelouses. Et générale-ment, ces traitements «urbains» sont répan-dus sur des espaces directement connectésà l’eau: avaloirs, caniveaux, bords de canal,de cours d’eau, de fossés… Le texte adoptéprévoit l’interdiction, en 2020, de «l’utilisa-tion de produits phytosanitaires pour l’entretien

par les collectivités territoriales des espacesverts, forêts ou promenades accessibles ououverts au public». Il stipule également l’in-terdiction, à partir de 2022, de la vente depesticides «pour un usage non professionnel»,c’est-à-dire dans les jardineries ou les gran-des surfaces, à destination des particuliers.Un pas franchi par l’enseigne Botanicdès 2008 et, depuis cet été, par Leclerc dansses magasins bretons.«Dix pour cent des 36 000 com-munes françaises sont déjà dansune démarche Zéro phyto. Ce chif-fre monte même à 60% si on considère les villesde plus de 50 000 habitants, souligne JoëlLabbé. On est mûrs en France pour légiférersur le sujet.» Elles sont nombreuses, en effet,les villes qui ont cessé de stériliser leur sol,de désherber préventivement les bords deroutes et ont réhabilité des herbes dites«mauvaises».Le texte sera soumis au vote de l’Assembléenationale le 23 janvier prochain mais JoëlLabbé, qui est aussi maire de Saint-Nolff,

dans le Morbihan, et a su bannir l’usage despesticides dans sa commune depuis 2007, estoptimiste. «Le texte a le soutien du gouverne-ment», observe-t-il. Philippe Martin, le mi-nistre de l’Ecologie, s’est en effet réjoui, àl’issue du vote au Sénat, de ce texte «équili-bré». «De plus, nous avons déjà fait les conces-sions nécessaires durant les discussions pourque le texte soit voté au Sénat à une très grandemajorité, ajoute Joël Labbé. La proposition deloi initiale avait pour échéance 2018, mais lescentristes ont proposé 2020 pour se caler sur les

mandatures des municipales, et l’UMP souhai-tait attendre 2025.»Pour l’association Générations futures, quimilite depuis de nombreuses années contrel’usage des pesticides, l’adoption de cetteproposition «marque une réelle avancée dansla prise de conscience du danger de ces pro-duits» et de la nécessité de réduire l’exposi-tion du public et des travailleurs. «Durant lesdébats, les risques des pesticides ont été unani-

mement reconnus par les interve-nants, quel que soit leur bord»,note son fondateur François

Veillerette. Mais l’association regrette les dé-lais d’application trop longs: «Attendre 2020-2022, cela ne va pas stimuler suffisamment pré-cocement l’industrie pour la production d’alter-natives et surtout, cela fait peser un risque surce texte, qui pourrait être attaqué avant cettedate», alerte-t-il. De plus, un amendementintroduit une dérogation à l’interdictiond’emploi pour les substances qui sont clas-sées, au niveau européen, à faible risque. Or,la notion de risque faible n’est pas définie de

manière précise, souligneFrançois Veillerette, qui craintque cette faille dans le textepermette aux entreprises agro-chimiques de prolonger lacommercialisation de leursproduits.

Le texte adopté prévoit des exemptions pourles terrains de sport «parce qu’il n’existe pasencore d’alternatives satisfaisantes», expliqueJoël Labbé, et les cimetières «pour des raisonsculturelles». Lui-même a reçu des habitantsde Saint-Nolff en larmes parce que le cime-tière n’était plus entretenu selon eux. Unproblème qu’il a résolu en augmentant les ef-fectifs chargés de l’entretien des espacesverts afin que le désherbage préventif autourdes sépultures soit effectué plus fréquem-ment. A Versailles aussi, Cathy Biass-Morin

s’est heurtée à de nombreuses réticences etplaintes des habitants. Les herbes qui pous-saient entre les tombes, parce qu’ellesn’étaient plus éradiquées par les herbicidestémoignaient pour ces Versaillais d’un man-que de respect envers les défunts. La munici-palité a dû placarder des affiches, communi-quer dans le mensuel de la ville pourexpliquer la démarche…

ALERTE. En creux, la proposition de JoëlLabbé vient souligner la «panne» du plannational Ecophyto lancé en 2008. Directe-ment issu des lois Grenelle pour l’environne-ment, ce plan prévoyait de réduire de 50%l’usage des pesticides, agricoles ou urbains,en dix ans soit d’ici à 2018. Or, souligneFrançois Veillerette, «la tendance en 2012 étaittoujours à l’augmentation». Le dernier bilandu plan Ecophyto, établi par le ministère del’Agriculture en décembre 2012, fait en effetétat d’une hausse de 2,7% sur un an du nom-bre de doses-unités, l’indicateur qui traduitl’intensité de recours aux pesticides en usageagricole. C’est ce qui a décidé un collectif dechercheurs, médecins, militants associatifs,et élus politiques, réunis autour du députésocialiste Gérard Bapt (Haute-Garonne), àlancer un «un cri d’alerte» début novembre,sous la forme d’une pétition en ligne (1).Les signataires, parmi lesquels on note deuxanciennes ministres de l’Ecologie, DelphineBatho et Chantal Jouanno, mais aussi le Pro-fesseur Charles Sultan, spécialiste des trou-bles hormonaux au Centre hospitalier régio-nal universitaire de Montpellier, ainsi que desreprésentants de l’Union nationale de l’api-culture française (Unaf), appellent les «auto-rités politiques» à agir «pour la réduction, voirela suppression quand cela est possible», del’usage des pesticides. «Malgré une diminu-tion nette des quantités vendues depuis 1998,nous constatons que les ventes de pesticides nediminuent pas depuis trois ans», écrivent-ils.Alarmant quand «selon le Commissariat géné-ral au développement durable, 90% des coursd’eau du pays connaissent une présence géné-ralisée de pesticides».Cette situation leur apparaît d’autant pluscondamnable que «depuis 2009, des donnéesrécentes viennent à la fois préciser les risquessanitaires encourus, certains étant désormaisavérés, et montrer les mécanismes des atteintesà la biodiversité, notamment concernant lesabeilles». L’Inserm a ainsi publié en juin uneexpertise collective, qui synthétise les étudesréalisées depuis trente ans. Les chercheursévoquent «une augmentation des risques signi-ficative pour plusieurs pathologies: la maladiede Parkinson, le cancer de la prostate et certainscancers du sang et des troubles de la reproduc-tion et du développement». Gérard Bapt espèreque cet appel collectif «donnera une nouvelleimpulsion au plan Ecophyto 2018». Le pro-chain Comité national d’orientation et desuivi du plan doit se tenir le 9 décembre. •(1) www.change.org

Par ÉLIANE PATRIARCA

«60% des villes françaises de plusde 50000 habitants ont déjà banni lespesticides de leurs espaces verts.»Joël Labbé sénateur EE­LV du Morbihan

ANALYSE

5 à 10%C’est la part des pesticides d’usage«non agricole» mais l’impact est impor­tant: jusqu’à 40% des quantités appli­quées en ville, sur des surfacessensibles au ruissellement, peuventêtre lessivées vers les cours d’eau.

Du latin, Pestis (fléau) et Caedere(tuer), le terme pesticideregroupe herbicides, fongicides, etinsecticides. Des substances trèsvariées aptes à détruire ou à contrôlerdes organismes vivants (insectes, ver­tébrés, vers, plantes, champignons,bactéries, etc.).

UNE CULTURE FRANÇAISEPremier pays agricole de l’Unioneuropéenne, la France est le troi­sième consommateur mondialde pesticides, le premier européen,et se classe au quatrième rangde l’UE en proportion du nombred’hectares cultivés.

REPÈRES

«La présence de pesticidesdans les cours d’eauen France en 2011 estgénéralisée, avec plus de 90%des points de mesuretouchés.»Le Commissariat généralau développement durable

that we are getting nowhere. Slowly , we are getting nowhere

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 TERRE • 19

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BOB WILSONINVITÉ SPÉCIAL

and that is a pleasure It is not irritating to be where one is .

En haut:repose­tête créé

par Bob Wilson pourle personnage de sainte

Thérèse dans sa mise enscène de l’opéra

de Virgil Thomsonet Gertrude Stein

Four Saints in Three Acts.PHOTO LOVIS

DENGLER OSTENRIKEn bas:

vidéoportraitde Lady Gaga inspiré de

la Tête de saint Jean­Baptiste de Solario, 2013.

BOB WILSON

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201320 •

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CesHongroishypothéquésparlesbanques

Le gouvernement du populiste Viktor Orbána réservé un lotissement à des ménagesayant souscrit des prêts en devises étrangèresavant 2008. Surendettés, ils accusent la finance.

Par GRÉGOIRE DE CHABALIERet CORENTIN LÉOTARDCorrespondance à Budapest

Une employée de l’Ordre de Malteprévient : «Ça va être difficile de lesrencontrer, ils ne parlent pas.» L’asso-ciation caritative a été déléguée parle gouvernement pour sélectionneret aider les endettés à refaire leur viedans un lotissement perdu au milieudes champs. Mais, très vite, «ils»

parlent. Comme cette femme qui seraconte: incapable d’assumer les traites de

son crédit hypothécaire en francs suisses, elles’est fait expulser de chez elle. «J’aientendu parler de ce quartier à la télé etc’est mon fils qui a trouvé les infos surInternet pour envoyer une candidature.» Alors ellea quitté sa région, proche de la Croatie, dévastéepar le chômage. Pour finalement atterrir dans deshabitations flambant neuves, à 6 kilomètres dela première bourgade, Ocsa. «Ici, je ne connaispersonne, j’ai dû quitter tous mes amis.»Le quartier ne ressemble à aucun autre dans lepays. Trop neuf, trop propre. Les 80 maisonnet-tes, dont une partie est encore inhabitée, sonttoutes semblables, avec du crépi blanc et des tui-les rouges. Aucune possibilité d’emploi, mais Bu-dapest n’est qu’à 30 kilomètres au nord et le loyer

vaut le coup : l’équivalent de 55 euros pour unemaison de 50m2, 70 euros pour 70 m2. La femmeinsiste: «On nous fait passer pour des irresponsa-bles, mais ce n’est pas comme si les banques avaientprêté à des miséreux sans boulot. Ça aurait vraimentpu arriver à n’importe qui.»

AUBAINE. Elle ne croit pas si bien dire : un tiersdes 3,8 millions de ménages hongrois ont con-tracté un prêt en devises entre 2005 et 2008, descrédits hypothécaires en francs suisses pour laplupart. Jusqu’à sa chute le 15 septembre 2008,Lehman Brothers semblait fringante et la Hongrieen pleine «convergence» avec la zone euro,

qu’elle espérait intégrer dès 2010-2012. Commeon vend des petits pains, les banques faisaient descrédits en devises étrangères avec des taux d’in-térêt trois fois moindres que ceux libellés en fo-rints, la monnaie nationale. La banque centraleaffichait des taux de base supérieurs à 10% pourcontenir l’inflation. Une aubaine pour les ména-ges, mais aussi pour l’Etat, les municipalités etles entreprises.Cette ruée vers un endettement facile, à moindrecoût, était devenue un sport national. «En Hon-grie, on a toujours vécu dans le mythe des produitsétrangers, donc on avait confiance, ça ne pouvaitqu’être mieux que les crédits en forints», raconteainsi Zsuzsa, dans un bar de Budapest. Pour ache-

ter un appartement, cette interprèteavait pris en 2005 un crédit en francssuisses équivalent à 50000 euros. Elle

n’arrive pas à le revendre alors que ses mensuali-tés ont plus que triplé. Tout cela fut possible avecla bénédiction du gouvernement de l’époque,prétendument socialiste, mais ouvert à tous lesvents de la financiarisation néolibérale. Et de sonministre de l’Economie, Gordon Bajnai,aujourd’hui le principal opposant au Premier mi-nistre de la droite nationaliste, Viktor Orbán.Pourquoi ni le gouvernement ni la Banque cen-trale n’ont réagi ? En partie par accointances–«Ils étaient très proches des dirigeants des grandesbanques», rappelle Bálint Ablonczy, journaliste

à l’hebdomadaire de centre droit HetiVálasz. Mais aussi par opportunisme : ilsont surfé sur le gain de plusieurs points decroissance que le crédit facile représentaitpour l’économie hongroise. Lorsque lacrise a rattrapé un pays très exposé auxvents du marché, le forint a sombré, tandis

que le franc suisse, devenu une valeur refuge, n’acessé de s’apprécier, faisant mécaniquement ex-ploser le coût des emprunts. Imparable. La catas-trophe n’a pas tardé à se produire: «Des centainesde milliers de vies ont été saccagées, des dizaines demilliers de petites et moyennes entreprises ont faitfaillite et la Banque centrale a perdu le contrôle de sesliquidités», rappelle Péter Róna, professeur d’éco-nomie à Oxford qui fut l’un des premiers à tirer,en vain, la sonnette d’alarme à l’époque.Un désastre financier et humain dont la Hongriene se remet toujours pas: 560000 crédits en devi-ses sont encore présents dans l’économie, selonl’autorité de supervision financière hongroise

(PSZAF). Et il y a urgence pour 150000 ménagesqui ont plus de quatre-vingt-dix jours d’arriérésavec leur bien immobilier en gage, à la merci deleurs créanciers. Près de 21 000 font déjà face àune procédure d’expulsion.Le lotissement des endettés? «Une goutte d’eau!»s’agace György Sümeghy, de l’ONG Habitat forHumanity, pour qui ce sauvetage des classesmoyennes se fait «aux dépens d’un million de pau-vres très mal logés». Les nouveaux habitants sontincités à cultiver leur petit lopin de terre attenant.Pas question que ce projet vitrine de l’aide auxendettés ne se transforme en un «ghetto miséra-ble», comme le craint Sümeghy.Pour ne pas faire tourner son propre compteurd’eau, Miklós va attendre l’installation du puitscommun pour se lancer dans le jardinage. Sonsalaire d’ouvrier spécialisé chez Michelin –équi-valent à 700 euros – est assez enviable en Hon-grie, où la moitié de la population gagne moinsde 375 euros. Mais voilà : il est amputé directe-ment par la banque, l’autrichienne Raiffeisen, quine lui laisse que 250 euros pour lui, sa femme,Anita, et leur bébé. «C’est vraiment légal de ponc-tionner comme ça mon salaire ?» s’interrogeMiklós. «Plus question de partir en vacances,ajoute Anita. C’est vrai que de l’extérieur, ça faitun peu camp de concentration, ce quartier. On n’estpas si mal, mais je ne veux pas vieillir ici.» En 2008,le couple avait contracté un crédit en francs suis-ses pour acheter une maison de 50 000 euros.De 200 euros au départ, les remboursementsmensuels ont vite doublé… puis triplé. «On sedoutait bien que le prêt allait gonfler un peu, maispas à ce point-là. L’Etat n’aurait jamais dû laisserautant de gens s’endetter comme ça.» Et les ban-ques ? «Faudrait les faire exploser…» Ces prêts ?Des produits véreux, estime l’économiste PéterRóna. «Une sorte d’arrangement dans lequel l’unedes deux parties a le pouvoir de changer les obliga-tions de l’autre, du jour au lendemain, comme bonlui semble. Depuis que le droit romain existe, ça nes’est jamais vu.» Des modifications unilatéralesdes contrats assurant tous les profits aux banqueset tous les risques aux emprunteurs.

FARDEAU. La bataille se joue dans la rue –«A basles banques!» scandent régulièrement les endettésà Budapest– mais surtout sur le terrain juridique.Le gouvernement presse la Cour suprême de sta-tuer sur la légalité de ces prêts car, à ce jour,2500 affaires ont été portées devant les tribunaux.Pour le populiste Viktor Orbán, la justice doitchoisir le camp du peuple, pas celui des banques.Depuis son accession au pouvoir en 2010, il tented’imposer au secteur –détenu à 80% par des éta-blissements étrangers– la prise en charge d’unepartie du fardeau des dettes. Il a interdit les prêtsen devises étrangères, ce qui vaut à la Hongrie,depuis le 28 juin, une procédure d’infraction dela Commission européenne. Il a, le 12 septembre,dégainé un «plan de défense national contre l’en-dettement», qui contraint les banques à appliquerdes taux de change fixes préférentiels pour lesménages capables de rembourser la totalité deleur emprunt. Il a enfin dévoilé le 5 novembre uneextension de ce programme d’aide. «Impensableil y a quelques années, quand le gouvernement dessocialistes libéraux répétait à l’envi que les marchéset les banques, c’était bien, et que l’Etat c’étaitmal», commente Bálint Ablonczy.«Tout ça, c’est purement électoraliste», dénonceTibor Nagy Attila, politologue au Centre for FairPolitical Analysis. Les législatives prévues au prin-temps jouent en faveur des endettés. Orbán a faitdu désendettement une question de souveraineténationale et une bataille politique. Et n’entend paslaisser sombrer cette classe moyenne qui consti-tue le cœur de son électorat. •

REPORTAGE

REPÈRES

HONGRIE

100 km

SLOVAQUIE

CROATIE SERBIE

Budapest Ocsa

Soumis à une avalanchede taxes, le secteur ban­caire –détenu à 80% pardes banques étrangères–a affiché une perte de165 milliards de forintsen 2012 soit 550 millionsd’euros, selon l’agence depresse hongroise MTI. Lesnouvelles mesures poursoulager les ménagesendettés en devises pour­raient leur faire perdrejusqu’à 1,3 milliard d’euros.

«Nous ne sommespas des braves garsmainstream. J’auraishonte si c’était le cas.Si vous regardez lesvingt années denéolibéralisme, lemarché a toujours eula priorité sur l’Etatet ça ne peut pluscontinuer ainsi.»Viktor Orbán le 16 avril

10C’est, en milliards d’euros,le montant des crédits endevises (la grande majo­rité en francs suisses)contractés par près d’unmillion de Hongroisentre 2005 et 2008, à destaux entre 150 et180 forints pour un francsuisse. La devise magyares’échange désormais autourde 250 francs suisses.

It is only irritating to think one would like to be somewhere else. Here we are now

«On avait confiance [en ces prêts],ça ne pouvait qu’être mieux que lescrédits en forints.»Zsuzsa interprète surendettée

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 ECONOMIE • 21

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22 • ECONOMIE

LeFinistèreamer

A la veille d’unrassemblementdes bonnets rouges àCarhaix, en Bretagne,rencontre avec ceuxqui composentle front du refus.

Par CHRISTIAN LOSSONEnvoyé spécial dans le FinistèrePhotos DOMINIQUE LEROUX

euilleton «bonnets rouges», épi-sode 2. Samedi à Carhaix, l’assem-blage hétéroclite remet le couvert,un mois après le succès de Quim-per, sur le site des Vieilles Charrues.«On veut rajeunir, radicaliser mais

éviter les débordements», raconte l’un des or-ganisateurs. «On veut apporter un nouveaumessage à ceux qui continuent à nous traiter parle mépris», dit Christian Troadec, le médiati-

que porte-parole du collectif Vivre, décider ettravailler en Bretagne. Une nouvelle démonstra-tion de force autour du désir d’autonomisation, dela bataille pour l’emploi et de la mise à mort défi-nitive de l’écotaxe, ces dénominateurs communsqui sédimentent des profils souvent antagonistes?«On verra s’il y a plus ou moins de monde, on avance,pas après pas», rétorque Troadec.Pendant quatre jours, Libération a sillonné le Finis-tère à la rencontre d’acteurs de ce front du refus.On aurait pu s’attarder sur Christian Guyonvarc’h,de l’Union démocratique bretonne: «Le message,c’est : “L’Etat n’a plus d’argent. On le sait. Arrêtezde nous infantiliser et laissez-nous expérimenter.”»Revenir sur Olivier Le Nézet, président du comitérégional des pêches (CFDT), qui dénonce «desmillefeuilles de contraintes, dont cette mauvaise éco-logie non raisonnée et non raisonnable, qui empêchentle développement de l’économie et du social». Ou en-core raconter cet éleveur de porcs, qui peste contrele pacte d’avenir: «Un extincteur vide et un arrosoirde 5 litres rempli d’essence; tout ça va finir par explo-ser…» Mettre en avant ce couple d’éleveurs depoulets depuis vingt-cinq ans, qui soutient lemouvement sans y participer: «On se sent à nou-veau au centre du débat.» Loin des têtes d’affiches,on s’est arrêté sur quatre profils singuliers. •

FRANÇOIS HÉLIAS48 ANS, PATRON D’UNE PME DE TRANSPORTS ROUTIERS DE CONCARNEAU:

«L’écotaxe, j’y suisfavorable, mais pas ainsi»

l débarque dans un petitrestau de Rosporden (Finis-

tère), bonnet rouge dans la po-che. Se fait héler par le patron,qui lui demande de signer unepétition sur le commerce deproximité. Et embraye illico: «Je

suis un petit dans le transport routierde marchandises, principalementagroalimentaires. Une petite boîte de14 personnes, 11 semi-remorques. Ontire le diable par la queue, on arrive àl’équilibre, mais on n’a pas de projetde développement.» La faute, pourcommencer, à la partie «frigo», quichute avec la crise du porc et de lavolaille. François Hélias ne se veutpas la caricature du petit patronantitaxe, antitout. «L’écotaxe, j’ysuis favorable, mais pas ainsi, pascomme ça. Pour l’Alsace, c’est uneévidence, en Bretagne, c’est une taxesur le handicap de notre excentra-

tion.» Il militerait volontiers pourune taxe sur les hypermarchés, parexemple. Mais pas sur un «nouvelimpôt» contre des transports, «dont70% ont lieu dans un rayon de moinsde 70 kilomètres».Il était de la «première manif fonda-trice des bonnets rouges, en 2009».Un millier de patrons, emmenés parPatrick Caré, président du MedefBretagne, avaient alors dénoncél’écotaxe au péage de la Gravelle(Mayenne, lieu à partir duquell’autoroute devient payant). «Puis,on s’est endormi. On a découvert queles boîtiers pour le télépéage étaient ànotre charge. Qu’on allait devoir col-lecter l’impôt au “chargeur”. Devoirrepenser nos trajets sur des départe-mentales.» Il dit aussi que des«grosses boîtes de transport», repré-sentées par la «fédé régionale», l’ontpressé «de ne pas inciter à la déso-

béissance fiscale». Parce qu’ils«peuvent se refaire avec la sous-traitance» et qu’ils «ont des plate-formes, du stockage» et ne font pastourner, eux, leur «camion à videune fois déchargés».Il lâche: «Cette révolte, c’est surtoutcelle de la base, des seconds cou-teaux.» Vraiment? Il sait les intérêtscontradictoires, les divergences, le«bordel du collectif», ce «patchworkimpossible». «Mais c’est la beautédu mouvement : mettre ensembledes gens par nature incompatibles.»Il se dit humaniste, avoue avoir la«fibre de gauche», et évoque sesmaîtres à penser : «Camus et Ro-card.» Et conclut: «Au lieu de s’in-terroger pour savoir quelle terre al-lons-nous laisser à nos gens, ilfaudrait s’interroger sur quels gens al-lons-nous laisser à notre terre.»

C.Lo.

François Hélias, à la gare de Quimper. Il était de la «première manif fondatrice des bonnets rouges, en 2009».

a little bit after the beginning More and more we have the feeling

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013

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ECONOMIE • 23

l’économie en questionsDOMINIQUE ROUSSET CHAQUE SAMEDI 11H-12H

franceculture.fr

RETROUVEZ CHAQUE SEMAINE LES DOSSIER DU CAHIER ECOFUTUR DE LIBÉRATION

en partenariat avec

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Jean­Paul Biger: «On exclut les pêcheurs des débats.»

JEAN­PAUL BIGER53 ANS, MARIN­PÊCHEURÀ LESCONIL:

«Les dés sontpipés, je ne croisplus en rien»

Le petit quintal de langoustines frétillantesvient de filer vers la criée, où elles se négo-cient 10 euros le kilo. Le chalutier bleu mer

est rincé à grandes eaux surle quai de Lesconil. Jean-

Paul Biger a une poigne – et une gouaille – im-pressionnante. «Bien sûr que j’en suis, des bonnetsrouges, comment je pourrais ne pas en être ?» Ilstiendraient, à l’entendre, d’un ultime ralliementcontre un monde qui se disloque. Voilà trente-troisans qu’il vit de la mer, trente-trois ans qu’il voitles bateaux disparaître. «Des chalutiers, y en avait58 quand j’ai commencé. Puis 35 dix ans plus tard.Aujourd’hui, il n’en reste que deux. Marin, c’est géné-tique, et ça crée jusqu’à cinq emplois indirects.» Or,trop souvent, dit-il, on exclut le pêcheur des dé-bats. Il a ainsi monté une association contre le cla-page, le rejet en mer des boues retirées des portsde Loctudy et Lesconil qui s’envasent. «Le conseilgénéral laisse saccager nos plus belles zones de pêcheet nous raconte que c’est plus propre qu’avant! On abeau avoir fait faire une expertise qui prouve l’inverse,tout le monde s’en fout: les dés sont pipés, régionale-ment, nationalement ou continentalement.»Il ne resterait donc plus que la bataille locale? Oui,dit-il. Il flingue l’interdiction de la pêche au-delàdes 20 milles: «Bientôt, on aura des caméras à bordet des bracelets électroniques pour nous suivre.»Evoque les quotas qui reviennent à ce «qu’on doivesauver ici le petit merluchon, prédateur des langousti-nes, quand on peut le pêcher en Espagne». Déplorele déménagement du comité des pêches «à Quim-per», à 26 km d’ici. Et lâche: «Il me reste quatre ansà faire et mon fils reprendra peut-être l’affaire, sinon,y aura bientôt plus que des Parisiens à la retraite ici.»Populistes, les accents de Jean-Paul Biger? Il s’endéfend. «Je ne crois plus en rien et je ne fais pas depolitique, à part celle de mon pays, celui de Cor-nouaille, où l’on est au bout du bout du territoire. Onne peut pas être plus au bout.» Plus à bout.

C.Lo.

Jean­Michel Favennec rêve d’un grand soir.

JEAN­MICHEL FAVENNEC46 ANS, ÉLEVEUR LAITIERÀ LE CLOÎTRE­PLEYBEN:

«Les paysans,usés, ne sontque des pions»

La nuit tombe sur Le Cloître-Pleyben,570 âmes; le bar-tabac affiche complet et il

s’y glisse pour un ravitaillement en clo-pes. Il lui faut trois kilomè-

tres pour regagner dare-daresa ferme à l’heure de la traite de ses 80 brunes desAlpes. «Une bonne race, qui pourrait faire du bon fro-mage. Si les coopératives ne nous en empêchaientpas…» Jean-Michel Favennec, 46 ans, est installédepuis vingt ans dans cette exploitation de 50 hec-tares. Il est le patron de la Coordination rurale dela région, deuxième syndicat agricole, qui se veut«indépendant». Il l’assure: «On a hésité à rejoindrela FDSEA dans les bonnets rouges, qui ne pensentqu’agrobusiness, mais comme personne ne parlaitvraiment des agriculteurs, on y est allés. Pour nous,chaque maillon est quelque chose à part.» La base,surtout, a pressé. Pour rappeler «qu’un tiers despaysans bretons ont disparu en dix ans», martelerque «pour ceux qui restent, leur revenu est négatif»,ou que «50% vont bientôt partir à la retraite».Il sait discourir habilement sur l’impasse del’agroalimentaire. Pour lui, les agriculteurs doivent«gagner dignement leur vie par la vente au juste prixde leurs produits, afin de pouvoir investir, embaucheret installer des jeunes». Il marque un temps: «Lemalaise est si profond. Le climat anxiogène. On voitdes gens, même des types qui se disent du PS, tenirun discours d’extrême droite, c’est alarmant.»Jean-Michel Favennec lit beaucoup, s’informe. Etrêve d’un grand soir où «l’on romprait avec les poli-tiques du passé», où «on ne filerait pas les clés à desélus de 70 ans, qui veulent encore exploiter» un mo-dèle breton où «les ouvriers sont usés jusqu’à lacorde» et où «les paysans ne sont que des pions, fati-gués, endettés, réduits à vendre leurs fermes». Pasvraiment dans la ligne agrobusiness des bonnetsrouges? «Je ne le sais que trop bien. Mais défendrel’emploi sur notre territoire, c’est au moins notre pluspetit dénominateur commun.»

C.Lo.

MARIE­HELÈNE STONE53 ANS, OUVRIÈRE INTÉRIMAIRE,À POULLAOUEN:

«Il va falloirque ça seradicalise»

Pour trouver sa maison, dans un lieu-dit,il faut tourner un peu autour de Poul-laouen (Finistère). Accepter de se perdre

près de l’usine Marine Harvest, qui va fermermalgré les 300 millions d’euros de profits du

numéro 1 mondial du saumon. Et laisser sur lecarreau près de 300 salariés, dont une centained’intérimaires. Dont Marie-Hélène Stone, 53 ans.Elle sort d’emblée : «Nous, les sans-grades, lesmoins que rien, on n’aura rien, aucune indemnité. Onest les dindons de la farce.» A Quimper, le 2 no-vembre, pour la premier grand happening desbonnets rouges, elle a pris la parole au côté de Na-dine Hourmant, la pasionaria FO de Doux. Pourdire sa colère, sa rage et sa volonté de se battre.«Ici, dans ce coin du Finistère, c’est mort, répète-t-elle. Y a plus de travail, que du désespoir, un ras-le-bol terrible.» Qu’on ne lui dise pas que le collectifmarche à droite: pas assez à son goût. Elle a «votéet votera» FN. Comme son mari, chauffeur routieren arrêt maladie, le nez sur ses écrans. «Personnene nous défend, tonne-t-il. Il va falloir que ça pète,que ça se radicalise. On n’a plus rien à perdre.» Ellecoupe : «Et croyez-moi, on n’est pas les seuls.» Ilcoupe à son tour: «Marre de se faire piquer le boulotpar des types de Roumanie et de Bulgarie qui, en plus,piquent le gazole des autres camions.» S’agite :«Avant, quand j’allais en Espagne, j’arrivais à mefaire 3000 euros par mois. Là, ces mecs acceptent debosser pour deux fois moins.» Fantasme xénophobesur les travailleurs détachés, boucs émissaires d’unmal-emploi endémique. Marie-Hélène préfère direqu’elle veut bosser en Bretagne. Et en vivre. «Onachète des produits 50% moins cher, car bientôt péri-més, et on met ça au congélateur. Pour la viande, onélève nos poules. Et on va bientôt mettre un cochon.»Elle dit aussi : «Je ne veux pas être syndiquée. J’ycrois plus. Même la CGT est instrumentalisée. Enfin,si je devais prendre une carte, ce serait à FO: les seulsqui ont eu un temps le courage d’être avec nous.»

C.Lo.

Marine­Hélène Stone a «voté et votera» FN.

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013

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That I am getting

+0,22 % / 4 302,42 PTS1 580 321 947€ -39,44%

GEMALTOTECHNIPVEOLIA ENVIRON.

Les 3 plus fortesPUBLICIS GROUPE .PERNOD RICARDRENAULT

Les 3 plus basses

Marché closMarché clos

+0,08 %6 654,470,00 %15 727,12

«Nous allons connaître une vague defermetures d’entreprises sans précédent.»Roland Héguy président de l’Umih, le syndicat des hôteliers­restaurateurs, qui accuse le relèvement de 7 à 10% de la TVAprévu au 1er janvier

CC’est un acte banaldans la plupart desentreprises. Maischez Servier, où

l’activité syndicale est ré-duite à sa plus simple ex-pression, c’est un événementexceptionnel. Aujourd’hui,les 800 salariés du site deGidy (Loiret), berceau dulabo et ex-lieu de fabrication

du Mediator, vont pouvoirélire des syndicalistescomme délégués du person-nel et membres du comitéd’entreprise.Foulée. Jusqu’ici, à Gidy, lescandidats aux électionsétaient sans étiquette. «Celafait presque cinquante ans queles salariés n’avaient pas eu lapossibilité de voter pour une

organisation syndicale», ex-plique Bruno Carraro, secré-taire général de la CFDT chi-mie dans le CentreVal-de-Loire. Les salariés ontle choix entre deux listes.D’un côté, la CFDT, qui aforcé les portes du labora-toire fin 2012. De l’autre,l’Unsa, arrivée sur le sitedans la foulée. «En 1964, descandidats CFDT avaient bienété élus, mais l’un d’entre eux,considéré comme le meneur,avait été remercié et les autresavaient abandonné leur ap-partenance syndicale au profitd’une amélioration de leur si-tuation professionnelle dansl’entreprise», rappelle BrunoCarraro.La partie qui se joue s’an-nonce aussi peu riante. De-puis son installation commedéléguée CFDT, IsabelleGéant affirme faire l’objet debrimades: «Il y a peu, les col-lègues qui me côtoyaient sur lelieu de travail ou à la cantineétaient convoqués par la hié-rarchie ou intimidés par lesélus du comité d’entreprise.»Une ambiance qui pourraitavoir des conséquences sursa carrière. «Compte tenu deces pressions, si Isabelle n’estpas élue, elle ne pourra sansdoute pas rester», prévientCarraro. Il accuse l’Unsad’être arrivé pour devenir«le syndicat maison». «Lesélus sans étiquette qui l’ont re-joint passaient leur temps àexpliquer que les affaires de-vaient rester en interne et queles syndicats n’avaient aucuneutilité», s’agace Carraro.Brimades. Chez Servier, laculture du secret est de mise.«La CFDT s’y prend très malen attaquant l’entreprise defront, juge Philippe Chau-mette, patron de la branchechimie de l’Unsa. Ils pen-saient arriver comme des libé-rateurs, mais ont un peu ratéleur coup.» Selon lui, «avoirl’esprit maison n’a rien de ré-préhensible» et les accusa-tions de copinage avec la di-rection «n’ont pas de sens».Contacté par Libération, legroupe Servier n’a pas sou-haité commenter les proposdes syndicats.

De notre correspondant à Or-léans MOURAD GUICHARD

UnedosededémocratiesocialechezServierSCRUTIN Pour la première fois, des candidats syndiquésse présentent aux élections sur le site du Mediator.

Il a enfin tranché. Presséde toutes parts de prendreune décision quant au trèscontroversé transfert depropriété à l’américainHess Oil de sept permispétroliers (Libérationdu 17 novembre), le minis­tre de l’Ecologie, PhilippeMartin, est sorti de sacoquille hier. Niet, il nesignera pas. Selon le minis­tère, une partie au moinsde ces permis situés dansle Bassin parisien ciblaientdu pétrole de schiste, dontl’exploitation nécessite lerecours à la fracturationhydraulique. Cette techni­que polluante est bannieen France par une loide 2011, validée par le Con­seil constitutionnel. Soula­gement chez les ONG, éluset collectivités qui esti­maient qu’une signatureaurait constitué un dange­reux précédent. «Etonne­ment» et «indignation» deHess Oil et de l’Union fran­çaise des industries pétro­lières. La bataille duschiste, déjà ranimée mer­credi par un rapport parle­mentaire très favorable, estloin d’être finie. PHOTO AP

PHILIPPE MARTINPRÉFÈRE GARDERSON PÉTROLE

LES GENS

Pour avoir modulé le mon­tant d’une prime en fonc­tion du statut du salarié,selon qu’il est fonctionnaireou simple contractuel, laPoste a été condamnée,jeudi, par les prud’hommesde Paris à verser plus de216000 euros à 43 salariés.Cette somme correspondaux écarts de primes entrestatuts, pour un mêmeéchelon, soit une moyennede 5256 euros par salarié.En février, la Cour de cas­sation, rappelle FO, avaitjugé cette pratique con­traire au principe «à travailégal, salaire égal». La direc­tion envisage de faireappel.

LA POSTESANCTIONNÉEPOUR SES PRIMES

L’HISTOIRE

DEMAIN EN KIOSQUE

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RLIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201324 • ECONOMIEXPRESSO

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TVA et ménages:Mélenchon s’embrouille

«10% des ménagesles plus pauvresconsacrent 8,1% deleur revenu à la TVA,contre seulement3,4% pour les 10%les plus riches. Cetteinjustice se retrouvequand on prend lesujet par l’autrebout: “10% desrevenus les plus basacquittent 11,5%des recettes de laTVA, et les 10%les plus élevés n’ensupportentque 5,2%”.»Jean­Luc Mélenchon surson blog

imanche, le Front degauche marchera «pourune révolution fiscale, lataxation du capital». Et

aussi pour «l’annulation dela hausse de la TVA» program-mée par le gouvernement. Dansson appel à la manifestation, pu-blié sur son blog, Jean-Luc Mé-lenchon dénonce cet impôt«particulièrement injuste». «Les10% des ménages les plus pauvres

consacrent 8,1% deleur revenu à la TVA,contre seulement

3,4% pour les 10% les plus riches.Cette injustice se retrouve quandon prend le sujet par l’autre bout :“10% des revenus les plus bas ac-quittent 11,5% des recettes de laTVA, et les 10% les plus élevésn’en supportent que 5,2%”».

a TVA est considérée comme unimpôt régressif: plus

le revenu du ménageest faible, et plus la part de ce re-venu consacré à la TVA est im-portante. Les chiffres que citeJean-Luc Mélenchon provien-nent d’une étude publiée en2003 par deux économistes, Gé-rard Forgeot et Christophe Star-zec. Ceux-ci établissent bien que

les 10% lesplus richesd é p e n s e n t

seulement 3,4% de leur revenuen TVA quand les 10% les pluspauvres en dépensent 8,1%.L’explication tient à l’absenced’épargne chez les ménages despremiers déciles, qui consom-ment la totalité de leur revenu,et sont donc davantage touchéspar la TVA. D’autres travauxmettent en évidence ce phéno-mène. Les chercheurs AlainTrannoy et Nicolas Ruiz ont eux

estimé en 2008 que les 10% desménages les moins riches trans-mettent 11,5% de leurs revenusdisponible à l’Etat par la TVA, etque ce chiffre est de 5,9% pourles 10% des ménages les plus ri-ches. Bref, si les économistesdiscutent les chiffres, le premierconstat de Mélenchon est incon-testable.En revanche, le leader du Frontde gauche se perd quand il dé-cide de prendre le sujet parl’autre bout –à savoir par les re-cettes – et affirme que les 10%de ménages les plus pauvresfournissent 11,5% des recettesde la TVA, alors que les 10% deménages les plus aisés n’en pro-curent que 5,2%. La paternité deces chiffres, affirme Mélenchon,revient à Mathieu Plane, ancienéconomiste de l’OFCE. De fait,on trouve une citation appro-

chante de l’intéressé dans un ar-ticle de la Tribune daté de jan-vier 2012. Problème, ledit articles’est un peu pris les pieds dans laretranscription d’une déclara-tion de l’économiste… qui disaittout autre chose. La réalité est,de fait, toute autre. Selon l’étudede Nicolas Ruiz et Alain Trannoy,les 10% de ménages les moinsaisés payent annuellement1 308 euros de TVA, contre3588 euros pour les ménages lesplus aisés. Cela signifie que lepremier décile contribue à 5,8%aux recettes globales de la TVA,contre 16% pour le dernier dé-cile. Verdict : les plus aisés sontmoins touchés par la TVA relati-vement à leur revenu, comme ledit Mélenchon, mais ils le sontdavantage en valeur absolue,contrairement à ce qu’il affirme.

CÉDRIC MATHIOT

INTOX

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80%C’est la part des primes de la politi­que agricole commune (PAC) quetouchent les 20% des plus grosagriculteurs de France, selon ledéputé PS Jean Glavany, qui quali­fiait la semaine dernière sur Europe 1le blocus des céréaliers de «scan­dale». Cette proportion 80/20 existebien… mais sur l’ensemble de l’UE. EnFrance, s’il y a des inégalités, ellessont moindres: les 20% des plus grosagriculteurs touchent 55% des aidesselon le ministre de l’Agriculture, Sté­phane Le Foll ; 47% selon l’Insee.

La présidente du FN s’inquièteencore du coût de l’immigration pourl’Etat. Mercredi, sur LCP, Marine LePen a réaffirmé que les étrangers ensituation légale et illégale coûtent«entre 35 et 70 milliards d’euros» paran, selon «certaines études» (Désin­tox du 29 octobre). C’est Yves­MarieLaulan et Jacques Bichot, deux éco­nomistes, qui chiffraient en 2005 cecoût à 36 milliards d’euros, un mon­tant multiplié par deux sans plus dedétails dans une interview, six ansplus tard, de Laulan. Mais cetteétude, outre qu’elle est peu détaillée,est loin de faire consensus.L’essayiste Jean­Paul Gouriévitchparle, lui, d’un coût de 17,5milliards;en juin, l’OCDE tablait plutôt sur10 milliards d’euros. Enfin, selonXavier Chojnicki, un chercheur del’université de Lille, l’immigration…rapporte, en fait, 3,9 milliards par an.

COÛT DEL’IMMIGRATION :LE PEN PERSISTE

LA RECHUTE

PARTDUREVENUDISPONIBLEBRUTDESMÉNAGESCONSACRÉÀLATVAPar décile de niveau de vie, en %

MONTANTMOYENANNUELDETVADÉPENSÉPARLESMÉNAGESPar décile de niveau de vie, en euros

Source : Insee

D D D D D D D D D D

D D D D D D D D D D

Le manque à gagner fiscal est un classi-que en temps de crise; les efforts pour lemasquer aussi. La droite s’alarme un peupartout d’une perte de 11 milliardsd’euros ; mi-novembre, sur BFM TV, leministre du Budget, Bernard Cazeneuve,a tranquillement rétorqué qu’en 2013l’Etat français n’allait percevoir «que»5,5 milliards d’euros d’impôts de moins

que prévu dans la loi de finance initialeétablie il y a un an. Il est de très mauvaisefoi: cette estimation se base en fait sur ladifférence entre les chiffrages les plus ré-cents du gouvernement et le tout dernierdocument prévisionnel, annexé à la loi definance 2014. Or, si l’on y compare les re-cettes fiscales attendues pour 2013 à cel-les qui étaient dans la loi de finances ini-

tiale, on tombe bien à 11 milliards :-5,6 sur la TVA, -3,1 pour l’impôt sur lerevenu, -3,8 pour l’impôt sur les sociétés,rééquilibrés par un gain de +1,7 milliardsur l’ensemble des autres impôts. Ber-nard Cazeneuve aurait plutôt pu rappelerque ce manque à gagner n’a rien de neuf:les recettes fiscales de 2012 avaient déjàété surestimées de 8,1 milliards.

B VRAI­FAUX FLAGRANT DÉLIT DE MAUVAISE FOI POUR LE MINISTRE DU BUDGET

Cazeneuve minimise le manque à gagner fiscalDésintox traque tous les jourspetits et gros mensongesdu débat public, en partenariatavec Libération et 2P2L. Unepastille d’impartialité à retrouverdu lundi au jeudi, sur Arte, dansl’émission présentée par ElisabethQuin 28 Minutes, à partirde 20h05, et sur Libération.fr.

SUR LIBÉRATION.FR•Retrouvez la page Désintox

le mardi et le vendredidans Libération.

nowhere . Slowly , slowly , we have the feeling we are getting

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 • 25

Page 26: ppliberation_2013112[WwW.VosBooks.NeT].pdf

’élan commémoratif sur le tren-tième anniversaire de la Marche desBeurs est surprenant, pour ne pasdire suspect. Pourquoi un événe-ment oublié par la plupart des Fran-

çais fait-il son retourdans l’agenda politique?

La commémoration n’est pas à rejeter,elle est essentielle si elle ne néglige pasde légitimer des dispositions institu-tionnelles en capacité de lui donnersens. En revanche, si ce rituel en resteà une opération de communication, ilrelève au mieux du marketing politique,au pire de l’instrumentalisation de lamémoire. Or, les acteurs associatifs hé-ritiers du mouvement beur des an-nées 80 ne s’y sont pas trompés: «Raptsur la mémoire !» ont clamé certains.On ne peut que s’étonner du décalageentre l’effet d’annonce gouvernementald’un grand appel à projets pour ce tren-tième anniversaire et la dispersion desinitiatives sur le terrain, la plupartd’une facture aussi médiocre que lafarce belge de Jamel Debbouze (et deNabil Ben Yadir) sur la Marche. «C’estune commémoration pour culs-de-jatte etquelques entrepreneurs de mémoire !»

tranche l’un des principaux acteurs desluttes de l’immigration depuis le débutdes années 80. Ces militants qui ontpoursuivi la Marche de 1983 à 2013n’ont pour la plupart même pas été in-vités à la fête. Ils sont pourtant les vraisrépondants d’un patrimoine politiquedes quartiers populaires. Faut-il enconclure que la commémoration s’estcoupée d’une mémoire vivante pour neplus célébrer qu’une fiction médiatiquesans acteurs à la seule gloire de la Répu-blique compatissante envers tous sesenfants ?Certes, dans un contexte de démobili-sation du peuple de gauche, les calculspoliticiens sont de mise, mais c’est allerun peu vite en besogne que d’accorderfoi à une «complotite» sur le dos dumilitantisme des banlieues. Tous lescombats pour une cause qui sembleperdue ont tendance à se crisper sur lesens de leur expérience, ce qui entraîneparfois des replis groupusculaires qui nefacilitent pas le partage de la mémoire.Le refus des amalgames et de touteforme d’instrumentalisation est uneconstante du radicalisme politique desquartiers populaires. Déjà, dans les an-

nées 80, avant de prendre le maquispour organiser la résistance contre SOSRacisme et la récupération de la Mar-che, les premières mouvances associati-ves des héritiers de l’immigration ontaffirmé leur autonomie contre le Particommuniste, les travailleurs sociaux ettous ceux qu’ils appelaient «gratteursde misère» ou «Jésus de banlieue».C’était le jour de l’arrivée de la Marcheà Paris: «Alors, on a gagné!» me dit unejeune femme, militante des premièresheures du mouvement des banlieues.Dans sa voix, un ton ironique, et elleajouta : «Jamais, je ne laisserai un curéjouer le premier rôle à notre place ! [1]»Elle a ensuite poursuivi son combat quil’a amené à déserter le camp de gauchepour rejoindre les rangs de la droite.D’autres sont allés plus loin dans le res-sentiment. D’autres, encore plus nom-breux, ont dérivé. Grandeur et misèredes destins militants en un combatdouteux contre le mépris social.A la différence d’autres causes, aprèstrente ans de mobilisation en banlieue,aucune trame durable ne semble se des-siner, aucune histoire cumulative, seulun cycle constant de l’éternel retour àla précarité. Sans doute parce que mal-gré leur grande visibilité, l’histoire deshéritiers de l’immigration n’intéressepas grand monde – sinon un antira-cisme médiatique qui se croit autoriséà se faire la voix des sans-voix. Et c’estce paradoxe qui fait que les principauxconcernés n’ont aucune prise sur leurrelation conflictuelle avec la Républi-que. Aussi, plutôt qu’une OPA publiquesur la mémoire des banlieues qui seraitorchestrée par un cynisme politique degauche, le vrai problème est-il le méprissocial : la méconnaissance crasse et lanaïveté criminelle d’une France de ladiversité qui s’invente de nouveauxétrangers de l’intérieur pour ne pas re-mettre en cause ses certitudes identitai-res. Comment raconter l’histoire de lalongue marche des quartiers populairesen quête de dignité, dès lors que lesprincipaux acteurs et vecteurs de récitslégitimes ont été dévalués au pointd’être oubliés? Dès lors aussi que cetteoccultation est couverte par des récitsalternatifs qui ne cessent pas de redé-couvrir cette histoire, comme si elle ve-nait juste de commencer. Pour les mili-tants de l’immigration, la Marche pourl’égalité et contre le racisme avaitd’abord un sens politique. Si cet événe-ment fondateur a pu rendre justice àl’histoire des oubliés de l’histoire, c’estque la visibilité du mouvement a permisd’enrichir l’espace public d’une dimen-sion multiethnique. Une nouvelle iden-tité politique devient alors possible enmême temps qu’une nouvelle manièrede se dire citoyen français. C’est toutl’impensé de l’héritage de la Marche

que d’avoir négligé cette dimension po-litique essentielle qui articule l’exigenced’égalité à la lutte contre les discrimi-nations ethniques. Cette ambition poli-tique dans le droit fil d’une passionfrançaise pour l’égalité s’est vite heur-tée aux limites d’un imaginaire démo-cratique étriqué. L’ascension des Beurssur la scène publique fut aussi rapide etsoudaine que leur disparition. Dès 1985,le moralisme l’emporte sur la politiqueavec l’association SOS Racisme quilance une OPA médiatique sur l’héri-tage de la Marche. Tandis que les Beursaspirent à la reconnaissance comme su-jets de droit, l’antiracisme médiatiqueles réduit à un regard franco-françaisaussi compatissant que misérabiliste.Trente ans plus tard, nous n’avons guèreavancé. Il faut réitérer l’enjeu essentield’une République de la diversité qui estde faire avancer l’égalité en se mobili-sant contre les discriminations socialeset ethno-raciales (2).Tout le malentendu de l’antiracisme,c’est d’entretenir l’idéal d’un huma-nisme de l’universel abstrait contre lesdérives xénophobes de la société civilequi n’est pourtant pas seule en cause,loin de là! Car, même si elle est travail-lée par des courants nauséabonds, lasociété française est en avance sur lacité politique par la diversité qui laconstitue. C’est donc en rester à unepolitique d’opinion aussi symboliqueque dangereuse que de hurler au loupsans engager la responsabilité de l’Etatà travers ses institutions, l’Etat garantde l’égalité des conditions et du modèled’intégration qu’il est urgent de réfor-mer.Cela fait plus de trente ans que la diver-sité se conjugue à la discrimination, quela différence n’est reconnue qu’en ter-mes d’inégalités du point de vue desdroits au travail, au logement, à l’édu-cation, à la protection sociale ou à la sé-curité. S’il est urgent qu’une «belle ethaute voix» s’élève contre le racisme, ilest tout aussi urgent de faire une piqûrede rappel à la République sur l’exigenced’égalité, comme l’avait fait la secondeMarche –Convergence 1984 pour l’éga-lité – dans son texte d’appel avec desmots qui pourraient faire écho à l’ac-tualité: «La gauche ne semble pas mesu-rer l’importance de ce qui est en train dese passer. Prise dans la gestion […] entrel’égalité des droits et le maintien de l’in-justice, elle paraît ne jamais choisir. Ceuxqui la soutiennent ne peuvent donc se mo-biliser autour d’un choix clair ni opposerune voix forte au discours de la peur.»(1) Le prêtre Christian Delorme,porte­parole de la Marche.(2) C’est ce que nous avons proposé avecOlivier Noël au sein du groupe de travail«Faire société: pour une égalité réelle»dans le cadre interministériel d’unerefondation de la politique d’intégration.

Par AHMEDBOUBEKERProfesseurà l’universitéde Saint­Etienne,centreMax­ Weber

L'ŒIL DE WILLEM

La Marche est restée sans voie

nowhere. That is a pleasure wich will continue . If we are irritated

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201326 •

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Quel futur pour larecherche en scienceshumaines et socialesen Europe?

ans un récent article publié dans TheGuardian, Helga Nowotny valorise larecherche en sciences humaines et so-ciales en Europe, en la comparant no-tamment avec sa situation critique auxEtats-Unis (1). Le Conseil européen de

la Recherche, que préside Mme Nowotny, a jouéun rôle clé en faveur de la recherche en scienceshumaines et sociales. Cependant, il reste de sé-rieuses raisons de s’inquiéter quant à son aveniren Europe.L’austérité budgétaire dans les Etats membres

de l’UE a eu des conséquences très négatives.Le financement de la recherche en sciences hu-maines a été sérieusement diminué dans despays tels que l’Espagne, l’Irlande et la France,ainsi que dans les nouveaux Etats membres. Auniveau européen, ce financement est aussi me-nacé. Les propositions pour la recherche ensciences humaines et sociales dans le futur pro-gramme Horizon 2020 annoncent une forte ré-duction de leur financement par rapport au7e programme-cadre 2007-2013. Particulière-ment concernée, la priorité relative aux défissociétaux, «L’Europe dans un monde en mutation:des sociétés inclusives, innovantes et réflexives»,qui constitue le seul programme interdiscipli-naire axé sur les politiques traitant des questionscomme éducation, chômage, criminalité, crois-sance durable, tolérance entre les communau-tés, migrations, patrimoine culturel et arts.Suite aux nombreuses critiques de ses proposi-tions initiales (y compris une lettre ouverte luiétant adressée signée par 25000 chercheurs),la Commission européenne a désigné une prio-rité spécifique intitulée «défis sociétaux», vi-sant à résoudre les problèmes économiques, so-ciaux, culturels et politiques des sociétéseuropéennes. Il s’agissait clairement d’un pro-gramme crucial étant donné les effets drasti-ques de la crise économique. Mais même l’in-fime budget de recherche qui devait lui êtreattribué risque d’être fortement réduit par laproposition d’allouer une partie substantiellede son financement à des projets axés sur latechnologie. La Commission semble davantageconsidérer les sciences humaines et socialescomme un outil au service de priorités comme

l’énergie et les transports que comme unmoyen de traiter les graves problèmes sociauxauxquels l’Europe est confrontée. Paradoxale-ment, tout en annonçant d’importantes initia-tives stratégiques sur la pauvreté, l’emploi, lacompétitivité et l’investissement social, laCommission ne parvient pas à fournir à la re-cherche les moyens nécessaires pour rendre detelles politiques efficaces.Dans ses discours à la British Academy en 2011et à la Royal Irish Academy en 2013, ainsi quedans le cadre de sa récente apparition à la confé-rence de Vilnius en septembre 2013, la commis-saire européenne chargée de la Recherche, del’Innovation et de la Science, Mme Máire Geo-

ghegan-Quinn, a fait part de son so-lide appui aux sciences humaines etsociales. La mise en cohérence des in-tentions et des politiques est désor-mais requise. C’est pourquoi nous de-mandons à la Commissaire deconcrétiser ses convictions et d’ac-corder le financement dont les scien-

ces humaines et sociales ont besoin pour releverles grands enjeux de notre temps. La Commis-saire doit au minimum garantir le maintien duniveau de financement de la période antérieurede la politique de recherche en sciences humai-nes et sociales et, si elle souhaite rester fidèle àla vision qu’elle a précédemment exprimée, elledoit augmenter ce niveau de financement.(1) www.theguardian.com/science/political­science/2013/sep/23/europe­social­sciences­humanitiesParmi les signataires: Jutta AllmendingerProfesseur de sociologie à l’université d’Humboldt,Berlin Francesco Billari Professeur au départementde sociologie, université d’Oxford Craig CalhounDirecteur de la London School of Economics RobertErikson Swedish Institute for Social Research,Stockholm Paolo Federighi Directeur dudépartement de sciences de l’éducation etpsychologie, université de Florence Ramon FlechaProfesseur de sociologie, université de BarceloneDuncan Gallie Professeur de sociologie, universitéd’Oxford Didier Georgakakis Professeur de sciencepolitique, université Paris­I­Panthéon­SorbonneMaurice Godelier Directeur d’études à l’Ecole deshautes études en sciences sociales StefanGradmann Professeur à la faculté des arts, universitécatholique de Louvain Pierre­Cyrille HautcoeurEconomiste, président de l’Ecole des hautes étudesen sciences sociales Svend Erik Larsen Professeur delittérature comparée, université d’Aarhus, DanemarkHelle Mathiasen Professeur et directeur deprogramme de recherche, faculté des arts, et Centerfor Teaching Development and Digital Media,université d’Aarhus, Danemark Brian Nolan Principaldu College of Human Sciences, University CollegeDublin Wiemer Salverda Directeur émérite del’Amsterdam Institute of Advanced Labour Studies,université d’Amsterdam Gisèle Sapiro Sociologue,directrice du Centre européen de sociologie et descience politique, Paris José Vicente SerraoProfesseur d’histoire, Lisbon University Institute…

Par UN GROUPE DE PROFESSEURSET DE SOCIOLOGUES EUROPÉENS

La Commission semble considérerles sciences humaines et sociales pluscomme un outil au service de priorité telsl’énergie et les transports que comme unmoyen de traiter les problèmes sociaux.

Pour l’abolition, et lesmoyens de l’abolition

On avait l’autresemaine déploréici le relatif si-lence de voixgrandes ou peti-tes, mais mâles,confrontées à cer-taine vicieuse pé-tition dont les343 auteurs inti-maient la ministredes Droits desfemmes, Najat

Vallaud-Belkacem, de ne «pas toucherà leurs putes». Il ne fallait pas désespé-rer. En même temps qu’à l’Assembléeparvient la proposition de loi «renfor-çant la lutte contre le système prostitu-tionnel», elles arrivent, ces voix…A leur façon, celles qui s’exprimaientmardi dans ces pages, sous les plumesd’un chercheur en sociologie et d’unpsychanalyste (Libération du 26 no-vembre) sont des voix d’autorité. Ellesne disent pas, elles ne diront ni ne di-raient jamais le corps prostitué avec lesmots des 343 «salauds» autoproclamésen une autodérision quidécidément ne passepas. Un principe démo-cratique les habite ou les hante, et leurrespect de l’autre (la prostituée) est in-déniable – presque gênant, parfois,dans son ostentatoire expression. Ce-pendant, sans atteindre à la vulgarité du«manifeste» de Causeur, elles n’en di-vergent pas vraiment.Il y a, dans la façon dont les hommesparlent de cette proposition de loi, ledésir conscient ou non d’en éradiquerl’essentiel: la contrainte mafieuse, in-dustrielle et mortifère dont, veut-oncroire, il est question, et qu’il s’agiraitd’abolir. Pas de prostitution quantitati-vement marginale, de haut vol, d’es-corts ou de chippendales. Pas non plusde celle, étudiante ou domestique, quimet de 5 à 7 un peu de margarine, sinonde plaisir, dans les épinards de Péné-lope. Pas de celle, à la bonne franquette,de figures que popularisèrent PierrePerret, ou Brassens, ou Doisneau, ouLautner, via Lulu-la-Nantaise en fleurde pavé que «c’est pas tous les joursqu’elle rigole…». Pas d’«un domaine quirelève d’abord du plaisir et du jeu avec soncorps» (le sociologue Pharo), pas mêmed’«un contrat inégal entre une femmepauvre et un homme riche» (le psycha-nalyste Castel). Et pas non plus du «plusvieux métier du monde» (de maman-pu-tain ou d’assistante sociale), expressionque son euphémisation banalise autantque, par fatalisme, elle normalise.Plus que la misère sexuelle du clientm’émeut celle, physique et morale, de

la fille qui reçoit dix, trente ou cin-quante fois par jour. La bonne foi, lameilleure volonté ou la plus grande hu-manité du client ne protège pas la prati-cienne, parce qu’il ne s’agit pas là deconsultations, mais de passes.Sans doute, l’expérience du corps dé-chiré n’est-elle pas aisée à comprendre,sinon à vivre (ou à mourir) – et pourcause! Nos sciences et consciences, quiles fantasment bien plus qu’elles ne lesimaginent, y répugnent, car c’est biende traite qu’il s’agit, de sexe bien plusque d’«amour» tarifé (où c’est le trai-teur, le passeur, le «souteneur» qui faitle tarif et touche le salaire). A ce titre,il n’est pas besoin de prendre des pin-cettes lexicales et de se branlotter laconscience libertaire pour se déclarerrésolument pour l’abolition d’une pros-titution qui ne soit véritablement heu-reuse et choisie. (Laquelle, évidem-ment, il conviendrait alors derebaptiser…) On croyait que cela allaitde soi, et presque sans dire. Eh biennon.En évoquant la prostitution d’une ci-

toyenne francophoneet nantie d’une identitéet des papiers qui l’at-

testent, le psychanalyste Castel avanceque «mépriser les gens qui font des choixsi graves ne convaincrait d’ailleurs vrai-ment que si, au lieu de dénoncer la prosti-tution seule, on dénonçait les inégalités enbloc». Je ne sais si quiconque «méprise»ces prostituées passagères, ni même sileur «choix» est «si grave» – c’est luiqui le dit. Mais si je remplace ces fem-mes par la masse des esclaves de latraite, même s’il y a aussi des esclavesheureux (dans Autant en emporte le vent,par exemple), j’agrée tout à fait à la der-nière partie de sa proposition de «dé-noncer les inégalités en bloc». Et demême lorsque, un peu plus loin, lemême balaie un peu vite et d’un peuhaut «de grands principes» («“abolir laprostitution” comme on abolirait volon-tiers aussi le capitalisme»).Car c’est bien là le point. Pour donnerà la loi les moyens de ne pas rester vœupieu, il convient de lui donner lesmoyens de protéger les «filles». C’estassurément beaucoup demander. Maissi l’objectif est bien d’en finir avec lesréseaux de la traite et d’en protéger lesvictimes, qu’on les cherche, cesmoyens, avec autant de hargne queceux susceptibles de réduire les sacrésdéficits publics.Ce ne doit pas être beaucoup plus com-pliqué, somme toute, qu’une «granderéforme fiscale» établissant, de l’argentroi, la part qui civilise l’enfer des trot-toirs et celle qui va au paradis (fiscal).

NO SMOKING

Par PIERREMARCELLE

it is not a pleasure . Nothing is not a pleasure if one is irritated

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BOB WILSONINVITÉ SPÉCIAL

but suddenly , it is a pleasure , and then more and more it is not irritating

Sylvie Guillemdans le Martyre

de Saint Sébastienmis en scène par

Bob Wilson en 1989.PHOTO GILLES TAPIE .

COLLECTIONPARTICULIÈRE

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MONTRÉAL Porté sur la découverte, le prolifique événement musical a vu défiler undébutant frissonnant, un chanteur possédé, de la disco qui brille et du rap de précision.

M festival, fieffé filonCes dernières semaines, Elliot Magi-not a collé des affiches de con-

cert dans les rues deMontréal. C’est le

job alimentaire de cechanteur de 25 ans. Petite nou-veauté: sur l’un des posters figuraitson nom, parmi ceux de dizainesd’autres artistes du 8e festival Mpour Montréal, qui s’est achevé leweek-end dernier. Des débutantscomme Maginot, qui compose etchante depuis deux ans, ou des va-leurs montantes comme MisteurValaire, venus plusieurs fois enFrance. Ou A Tribe Called Red, in-tense trio electro d’Ottawa qui,avec ses samples des chants amé-rindiens, est une des révélations del’année au Canada.Cinq jours durant, M pour Montréal

a accueilli, dans une vingtaine desalles, plus de cent propositions. Lamanifestation, destinée aux profes-sionnels mais largement ouverte aupublic, se veut une vitrine de lacréation canadienne, dans la villequi a vu éclore Arcade Fire, et aupa-ravant Lhasa, Rufus Wainwright etGodspeed. La crédibilité musicalede Montréal attire désormais les vi-siteurs du monde entier, à l’affût dela prochaine sensation. Le festivala ainsi mis sur orbite l’an dernierHalf Moon Run, pépite folk-rockmontréalaise qui marche bienaujourd’hui en Europe.Quel microclimat a permis cettefloraison? Gourmet Délice, à la têtede Bonsound, à la fois label etagence de management, souligneque «la ville agit comme un aimant,effet qu’Arcade Fire a multiplié. Lesartistes, musiciens ou plasticiensviennent de tout le Canada, des Etats-Unis, voire de France, car les loyerssont raisonnables et qu’il y a une ef-fervescence. Et aussi pour le mode devie. Montréal, c’est l’Europe en Amé-rique. A Toronto, capitale financière,on bosse jusqu’à 23 heures. Ici, on vasouper et ensuite au concert».

La municipalité mise en effet sur laculture comme vecteur de dévelop-pement. Son festival de jazz, engrande partie gratuit, attire enjuillet des foules immenses, et le«Quartier des spectacles», par saconcentration de théâtres, s’af-firme comme un petit Broadway.Près de cent lieux de concerts (encomptant les bars) se succèdententre la rue Sainte-Catherine etl’avenue Saint-Laurent. Un chiffreexcessif? «Disons que l’offre de con-certs excède largement la demande»,concède Gourmet Délice.En début d’après-midi au CaféCampus, Elliot Maginot, notre col-leur d’affiches, avait vingtminuteset cinq chansons pour convaincre.«L’expérience la plus stressante dema vie», confie-t-il en descendantde scène, moyennement satisfait desa prestation. Un frisson a pourtantparcouru la petite salle : en trio,avec ses chansons folk aux harmo-

nies recherchées,le jeune homme arévélé une fragilitébouleversante.Devant une bièredans un café dé-sert orné de mail-lots de hockey surglace, Elliot Magi-

not raconte son enfance à Saint-Hyacinthe, 50000 âmes, tout prèsde la frontière des Etats-Unis.«Mon mal-être d’adolescent ne s’ex-primait pas dans la musique», expli-que-t-il. Il s’est mis à la guitare tar-divement, à la composition et auchant il y a deux ans seulement. Etil a fallu le forcer à sortir de sa co-quille. «En arrivant à Montréal, j’aipartagé un appartement avec monfrère et sa femme, confie-t-il. Ilsm’ont poussé à chanter en public.Sans eux, mes chansons, à l’heurequ’il est, seraient encore dans monordinateur.»

BRAS DE FER. Pour Franz Schuller,du label Indica (lire ci-dessous) quivient de le signer, «Elliot écrit trèsbien en anglais, chose assez rare pourun francophone». Lui avoue que lechoix linguistique lui a valu des re-proches. «L’anglais me sert d’ar-mure, ajoute-t-il, je dis des chosesintimes que j’aurais du mal à expri-mer dans ma langue maternelle, parpudeur. En français, je mets la barreplus haut, je n’ai qu’une compositionfrancophone pour l’instant, la seuledont le texte me satisfasse. Mais je

compte persévérer.» Un modèled’écriture en français ? Il hésite,puis cite Richard Desjardins.L’émotion à fleur de peau serait-elleune spécialité montréalaise? On l’aconnue, quelle que soit la languechoisie, chez Lhasa, Adam Cohen(et son père), ou tout le clanWainwright-McGarrigle. Et aussi àl’écoute de Majical Cloudz, impactmajeur du festival. Le duo formé parDevon Welsh à la voix et MatthewOtto aux claviers évoque un Soft Celldépouillé à l’extrême. Voix ample etlyrique, crâne rasé, tee-shirt blanc,le chanteur semble en état d’hyp-nose, frappant l’air ou sautant surplace, comme habité par un démonincontrôlable. Au Club Soda, le duolivre un bras de fer au public d’étu-diants délurés impatients de voir ar-river le déjanté Mac DeMarco. Dou-

leur et noirceur en première partie,fun alcoolisé en deuxième: telle estla paradoxale recette d’une soiréeréussie. Mais le souvenir qui per-dure, c’est le mystère irréductiblede Majical Cloudz, pour lequel Wi-kipédia nous livre une piste étrange:le père du chanteur, Kenneth Welsh,comédien, jouait un des rôles prin-cipaux dans Twin Peaks. Voilà l’ad-jectif qui nous manquait : MajicalCloudz est un groupe lynchien.

BASKETTEURS. Dans le cénacle degens du métier, le rap de DeadObies ou la disco ironique deLe Couleur ont aussi produit leurpetit effet. Ces derniers étaient pré-cédés par une petite hype (leur 45-tours se vendait chez Colette à Pa-ris!) et un emballement sur les ré-seaux sociaux. Chanteuse (ravis-

sante) en combinaison doréeBarbarella et bottes argentées, bat-teur, bassiste, claviers program-més… Les mélodies sont acidulées(clins d’œil à Abba ou à GiorgioMoroder) et les textes naïfs en fran-çais. Un charme qu’on devrait re-trouver l’année prochaine. Quantà Dead Obies, ils s’expriment dansun réjouissant mélange de joual (ar-got montréalais) et de franglais. Ilsse revendiquent du prolétariat desfaubourgs sud de la ville, sans lesclichés victimistes à la française. Letravail des cinq rappeurs, fleuronsdu label Bonsound, respire la spon-tanéité et, pourtant, tout est milli-métré, comme des basketteurs quijoueraient sans jamais manquer unrebond ou un tir à trois points. Quiosera les défier dans un battle fran-co-québécois ? •

Par FRANÇOIS­XAVIER GOMEZ

Envoyé spécial à Montréal

Le chanteur de Grimskunk, Franz Schuller, est le fondateuret directeur de la fougueuse maison de disques canadienne.

Indica, bête de labelOn nous avait prévenus :«Vous ne pouvez pas le ra-

ter, c’est le sosie de Jésus-Christ.» C’est vrai qu’il en a quel-que chose. Franz Schuller étaitomniprésent à M pour Montréal,et pas seulement pour voir les ar-tistes d’Indica, label qu’il a fondéet qu’il dirige. L’aventure acommencé en 1997, quandGrimskunk, le groupe«punk-reggae-metal» où il estchanteur guitariste, décide deproduire ses propres disques,après huit ans de tournées. «Nousavions un mode de vie alternatif,sans boss, qui nous convenait, pau-vres financièrement mais riches denotre expérience et des amitiésnouées à travers le monde», définitSchuller. Le label se monte avec2000 dollars canadiens (environ1 400 euros) et une aide provin-ciale à la création d’entreprise.Prophète. Indica (le nom d’unevariété de cannabis) n’avaitd’autre ambition que de diffuser laproduction de Grimskunk et desgroupes amis, dans un univers, lepunk hardcore, boudé par lesmaisons de disques installées.L’entreprise équilibre les comptes

jusqu’à ce qu’un groupe françaislui fasse passer un cap: «Nos amisM’Panada nous avaient envoyé ledisque de leur nouveau projet, bap-tisé Tryo, se souvient le prophètebarbu. C’était loin du punk mais onadorait, les textes, les voix… On a ditbanco.» Le groupe de reggae

acoustique fait un cartoninattendu au Canadafrancophone, réunissant

jusqu’à 5000 fans à Montréal. Audébut des années 2000, Indica a levent en poupe: deux de ses décou-vertes, les Cowboys Fringants etles Trois Accords, deviennent ma-jeures.Les groupes qui ont créé leur pro-pre label sont légion, plus raresceux ayant perduré. «C’est parcenous avons gardé une approche ar-tist friendly, analyse Schuller. In-dica est au service des artistes. Unefois les frais amortis, presque tout ceque génère un groupe lui revient.»Tout en gardant vive la flammeGrimskunk, qui tourne en Europepresque tous les ans, Franz Schul-ler déborde d’activités. Indica aouvert une antenne en Australie,signant un artiste folk promis à unbel avenir, Kim Churchill. Au

Québec, le label a misé sur HalfMoon Run, qui suscite l’intérêt au-delà de ses frontières: le groupe arempli le Trianon à Paris il y a deuxsemaines. Enfin, l’an prochain,Elliot Maginot, révélation de Mpour Montréal (lire ci-dessus), pu-bliera son premier album.«Tee­shirt». Un rythme de travailsoutenu qui semble se moquer dela crise du disque. «Dès 2004, nousnous sommes diversifiés dans le ma-nagement et les tournées. Notrepriorité reste le développement :prendre des artistes à leurs débuts etles accompagner le plus loin possi-ble. L’objectif est de transformerl’intérêt que peut susciter une chan-son sur le Net en intérêt pour un ar-tiste, analyse Schuller. Si on estpassionné, on ne se contente pasd’un MP3, on veut un tee-shirt, unvinyle… Je suis assez d’accord avecla théorie du Suisse Gerd Leonhard,“Music like water”: l’eau coule durobinet (dans la moitié de la planètedu moins), elle est gratuite ou quasi-ment, mais rien n’empêche d’ache-ter de l’Evian, voire une bouteillehors de prix importée du Japon.»Parole d’Evangile.

F.-X.G. (à Montréal)

«Les artistes viennent de partoutparce que les loyers sont raisonnableset qu’il y a une effervescence. Etaussi pour le mode de vie. Montréal,c’est l’Europe en Amérique.»Gourmet Délice patron du label Bonsound

PROFIL

(and then more and more and slowly ). Originally

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THÉÂTRE Le premier roman d’Ajar-Gary incarné par Jean-Quentin Châtelain, entre python et lamantin.

«Gros-Câlin», tendre étreinteGROS­CÂLIN de ROMAINGARY (Emile Ajar),m.s. Bérangère Bonvoisin,jusqu’au 22 décembre, 19h.Théâtre de l’Œuvre, 75009.

n 1974, Romain Garypublie à 60 ans son pre-

mier roman sousle pseudonyme

d’Emile Ajar: Gros-Câlin (1).C’est le nom que donne unmodeste employé célibataireau python qu’il a rapportéd’Afrique, où il était parti envoyage organisé. L’employéfantasme ses rapports avecune collègue guyanaise, quis’appelle Melle Dreyfus enhommage au capitaine dumême nom, et il va aux«bonnes putes».Le livre débute au Jardind’acclimatation, comme unenouvelle de Cortazar et,comme elle, on ne peutl’imaginer sans le Paris deces années-là, celui desTrente Glorieuses et deshommes de bureau à l’imagi-nation rentrée. Sur le racismeet les prostituées, comme sur

à peu près tout ce dans quoiil serpente, Gros-Câlin a toutce qui manque généralementà l’actualité : la subtilité.Mue. Le python apporte àson propriétaire quelquessoucis avec ses voisins, maissurtout un réconfort physi-que et sentimental. Il ne s’enséparera que lorsqu’il seprendra pour lui : c’est une

forme comme une autre demue et une recherche éper-due d’autonomie. L’employénous dit sur un ton de clochefêlée: «Je suis rentré chez moi,je me suis couché et j’ai re-gardé le plafond. J’avais telle-ment besoin d’une étreinteamicale que j’ai failli me pen-dre.» Il ajoute : «Heureuse-ment, Gros-Câlin avait froid,j’avais astucieusement ferméle chauffage exprès pour ça etil est venu m’envelopper enronronnant de plaisir.» Bienentendu, un python ne ron-ronne pas ; mais un texte etl’acteur qui le dit, si.Quel est le sujet? Le python,certes. Mais surtout les an-neaux que le texte déploieautour de lui et en lui,comme s’il fabriquait et di-

gérait, de digression en di-gression, sa propre matière.L’anneau de solitude. L’an-neau de tendresse. L’anneaud’amour. L’anneau du man-que d’amour. L’anneau dufantasme. Et, après et avanttout, l’anneau de littérature,souris avalée vivante, cœurbattant du sujet.Ce que donnent à vivre et àentendre pendant une heurequinze la voix suisse et lecorps lourd de Jean-QuentinChâtelain, c’est l’agilité et lasensibilité de ces anneaux.Debout, l’acteur est un élé-phant aux pieds fragiles et aucœur de porcelaine, à équi-distance entre ciel, savane etcimetière. Il a une mala-dresse délicate, une bonho-mie blessée. Il porte une djel-

laba, comme Romain Gary.Un banc et une colonne aucarrelage multicolore, quipourraient être de douche,fixent le décor. Six tuyauxverticaux argentés, commeceux d’un orgue, pourraientêtre des voies d’arrosage. Unplot tapissé de miroirs reflèteles pieds de l’acteur, qui évo-quent les mouvements dupython. Est-ce une salle debain? Une cuisine? Les sani-taires d’un hôpital? Béran-gère Bonvoisin et son scéno-graphe ont voulu qu’on nepuisse identifier le lieu, puis-que s’y déroule une méta-morphose, beaucoup plustendre, mais non moins dé-sespérée, que celle de Kafka.Ce qui est certain, c’est quele corps de Châtelain s’y dé-

place et transforme avec unelenteur magique, tout unémoi de la chair, caressée parce texte daté tel un grandcru, et le révélant commeune peau sculpte la main quil’effleure. Lorsqu’il s’allongesur le banc, de dos, l’élé-phant Châtelain devient la-mantin : le python évoqued’autres animaux. Et il n’estplus besoin de la mer nidu ciel pour rappeler aupublic que notre besoin deconsolation est impossible àrassasier.Reflet. Romain Gary écrivitce roman sans penser qu’il lepublierait sous pseudonyme.Il n’est pas interdit de voirdans la mue progressive dupython et de son propriétaireun reflet de celle de l’écri-vain, qui écrivit dans le pos-thume Vie et mort d’EmileAjar : «Je sentais qu’il y avaitincompatibilité entre la noto-riété, les poids et mesures se-lon lesquels on jugeait monœuvre, “la gueule qu’onm’avait faite”, et la naturemême du livre […] J’étais lasde n’être que moi-même.» Ildevint autre en devenantAjar, puis, six ans plus tard,pour une raison ou pour uneautre, il se tua.

PHILIPPE LANÇON(1) Folio vient de republierle livre, avec en supplémentla fin «écologique» initialementprévue par Gary, et qu’ilrenonça opportunémentà publier, sur conseil de l’éditeurignorant qu’il avait à faire à lui.

Jean­Quentin Châtelain dans Gros­Câlin. PHOTO DUNNARA MEAS

CONCERTO POUR VIOLON N° 3de CAMILLE SAINT­SAËNSCe soir, à 20h. Salle Pleyel, 252, rue duFaubourg Saint­Honoré, 75008.

orti du conservatoire en 1993avec un premier prix de violon etun autre de musique de cham-

bre, Renaud Capuçon n’est pas le plusgrand violoniste vivant. Mais cet émulede Nathan Milstein et d’Arthur Gru-miaux n’en reste pas moins l’un des ra-res solistes français à être connus dansle monde entier.Retrouvailles. On l’a vu triompherl’hiver dernier avec le Boston Sym-phony Orchestra dans le Concerto pourviolon et orchestre en ré mineur de Sibe-lius. Et avant de débarquer ce soir àPleyel pour interpréter le Concerto pour

violon et orchestre n°3 de Saint-Saëns, ilétait attendu au Concertgebouwd’Amsterdam pour donner avec sonfrère violoncelliste, Gautier Capuçon,le Double Concerto de Brahms, sous labaguette de Bernard Haitink.Si les médias français parleront sansdoute beaucoup de lui au moment dufestival de Pâques d’Aix-en-Provence,dont il est directeur artistique, RenaudCapuçon n’en fait pas moins événementcette semaine, car il va retrouver, àPleyel, le Philharmonique de RadioFrance et le jeune chef Lionel Bringuier,avec qui il a gravé son nouveau CD.Consacré à Saint-Saëns, ce disque mar-que ses retrouvailles avec son frère quia gravé, lui, le Concerto pour violoncellen°1 ; les deux croisant l’archet sur laMuse et le Poète. Entre raffinement im-

pressionniste et passion romantique,ces trois chefs-d’œuvre de la musiquefrançaise trouvent avec les frères Capu-çon et le Philharmonique de RadioFrance des interprètes subtils et fou-gueux. Après Pleyel, Renaud Capuçonredonnera le Concerto pour violon n°3 deSaint-Saëns avec l’Orchestre Nationalde Lyon les 19 et 21 décembre.Baguette. Quant à Gautier Capuçon,il sera le 3 décembre à Pleyel pour inter-préter le Concerto pour violoncelle n°1 deChostakovitch avec l’orchestre du Ma-riinski. En attendant, place, ce soir, àl’élève d’Isaac Stern et à son Guarneridel Gesù de 1737 dans le N°3 de Saint-Saëns qui, sous la baguette puissante deLionel Bringuier, ne devrait pas man-quer de panache.

ÉRIC DAHAN

CLASSIQUE Retour à Pleyel ce soir du violoniste français.

Renaud Capuçon se frotte à Saint-Saëns

we were nowhere ; and now, again , we are having

le magazine en ligne des centres d'art

marquant 30 ans de décentralisation

UN PROJET D.C.A / ASSOCIATION FRANÇAISE

DE DÉVELOPPEMENT DES CENTRES D’ART

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201330 • CULTURE

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Hier après midi, BertrandDelanoë, maire de Paris,et Dalil Boubakeur, recteurde l’Institut musulman dela Grande Mosquée, ontinauguré l’Institut descultures d’Islam. Sis dansle secteur cosmopolite dela Goutte­d’or, au 56 rueStephenson dans leXVIIIe arrondissement,la structure se veut «lieud’échange et de dialogue,dédié à la création et ladiffusion des culturescontemporaines».L’ICI proposera des expo­sitions, des installations,des concerts, des visitesguidées du quartier, ainsique des enseignements,des ateliers et des débats.Ouvert à tous, cet «établis­sement de proximité vise àfaciliter, dans un quartierpopulaire, l’accès des pra­tiques culturelles à despublics qui en sont éloi­gnés, grâce à l’entrée librede ses expositions ou cer­tains temps forts». Titré Ici,là et au delà, un premieraccrochage réunit les artis­tes Abbas, Patrizia Guer­resi Maïmouna, YazidOulab et Bruno Lemesle.A terme, est annoncé unICI Barbès, au 6 rue desPoissonniers.

L’INSTITUT DESCULTURES D’ISLAMOUVRE SES PORTES

LE LIEU

1 euroc’est la somme à laquellea été condamné le Fondsrégional d’art contempo­rain de Lorraine, accuséd’avoir mal sensibilisé lejeune public à des œuvrespotentiellement choquan­tes. En cause, des textesd’Eric Pougeau, exposéen 2008, comme «lesenfants, nous allons voussodomiser, et vous crucifier,vous êtes notre chair etnotre sang».

«Revienset nettoie!»Tom Tate maire de GoldCoast, en Australie,demandant au chanteurstar canadien Justin Bieberd’effacer les graffitis dontil a couvert, mercredi, le murd’un hôtel de la ville

De père marocain et de mère flamande, le chorégraphebelge Sidi Larbi Cherkaoui aime explorer tous les champsde la danse et franchir les frontières: hip­hop, classique,moines du monastère de Shaolin… Rien ne lui échappede la diversité culturelle. Cela prouve son espritd’ouverture. A La Villette, il présente Milonga, unepièce qui court dans les rues et les milongas, soiréesconsacrées au tango –danse réputée sensuelle, cequ’elle est, ainsi qu’une confrontation. Rien à diresur la mise en scène, honnête, sur la chorégraphieavec des danseurs (y compris contemporains) au top–notamment un trio masculin– et sur les cinq musiciens.Visite guidée de Buenos Aires, le traitement de l’images’avère plus approximatif. Mais Sidi Larbi Cherkaouin’est pas un ambianceur. Les danses se suivent à lamanière longuette d’une émission de télé­réalité oùl’on attend le verdict du jury. Il nous manque Cherkaoui,son regard personnel, juste esquissé dans un tangoau sol hélas faiblard. M.­C.V. PHOTO TRISTRAM KENTONGrande Halle de La Villette, jusqu’au 7 décembre.Rens.: www.villette.com

«MILONGA» DE CHERKAOUI,TANGO DE GUINGOIS

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LES FILMS DU POISSON PRÉSENTE

Odessa, 1979.Derrière le rideau de fer,

deux jeunes Français bravent tous les interdits.

ACTUELLEMENT

‘‘ Un sujet passionnant, rarement traité au cinéma ’’L E M O N D E

‘‘ Une reconstitution sidérante de réalisme ’’L I B É R AT I O N

‘‘ Un duo épatant ’’T É L É R A M A

FESTIVAL DE TORONTO 2013FESTIVAL DE BORDEAUX 2013

PRIX DE LA CRITIQUEFESTIVAL DE BASTIA 2013

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Interdits_Liberation_122x163_3.indd 1 27/11/13 13:18

Saul Leiter aimait àdire : «Etre connu nem’a jamais intéressé.Je préfère boire du café,

écouter de la musique ouencore peindre.» Le photo-graphe, né en 1923 à Pitts-burgh, Pennsylvanie, s’estéteint mardi à New York àl’âge de 89 ans. Le nom de cetalent américain, connupour ses clichés de mode,fut longtemps attaché à Har-per’s Bazaar, Esquire, ainsiqu’à d’autres magazines(Vogue anglais, Nova, Elle)qui forgèrent sa réputationtout au long des années 60et 70.Fils d’un rabbin, Leiternéglige ses études de théolo-gie pour se consacrer àla peinture –contre l’avis desa famille. C’est RichardPousette-Dart, peintre ex-pressionniste abstrait, qu’ilfréquentait alors à NewYork aux côtés d’autresartistes, qui le pousse versla photo.Tiroirs. A 24 ans, Saul Leiterdécouvre la «street photo-graphy», s’achète un Leica,et, en pionnier, se met à sai-sir la ville en couleur, alorsque l’époque ne jure que parle noir et blanc. La photo-graphie deviendra un boulotà plein-temps, grâce auHarper’s Bazaar qui l’enrôleen 1958, mais il ne connaîtraréellement la gloire qu’àl’âge de la retraite. Sestravaux des années 50,étonnamment novateurs,étaient restés dans ses ti-

roirs. Et c’est dans les an-nées 2000 qu’ils connaissentun regain d’intérêt. Ses pre-mières photos en couleurseront exposées à la HowardGreenberg Gallery, àManhattan, en 2006,et l’historien Martin Harri-son lui consacrera cettemême année un ouvrageintitulé Saul Leiter : EarlyColor, qui aidera à le faireconnaître.Vitrines. La première expo-sition personnelle de Leiteraux Etats-Unis aura égale-ment lieu en 2006, auMilwaukee Art Museum.D’autres suivront en Europe,la même année à Anvers,puis à Paris (lire Libérationdu 4 mars 2008), à la Fonda-tion Henri Cartier-Bresson(dont il avait découvert letravail en 1947 et qui avaitrenforcé sa vocation).Saul Leiter était considérécomme un des membresde la New York School ofphotographers, cercle quiincluait Weegee, Diane Ar-bus et Richard Avedon. Atravers son travail picturalaux motifs quasiment abs-traits, élaboré soixante an-nées durant, l’hommeaimait jouer sur la décons-truction de l’espace et laperspective.Les couleurs vives, jaune,bleue ou rouge, sa préférée,entraient en résonanceavec la peinture, laissantparfois une grande placeau noir. Clichés de ruesnew-yorkaises, son sujet

de prédilection, ou jeux dereflets sur des vitrinesembuées, Saul Leiter resteraun tendre spectateur dumonde.

DOMINIQUE POIRET

PHOTO Reconnu sur le tard comme un pionnier,l’artiste américain est mort mardi à 89 ans.

Leiter, tout en couleur

Taxi, 1957. Saul Leiter. PHOTO COURTESY HOWARD GREENBERG GALLERY. GALERIE CAMERA OBSCURA

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 CULTURE • 31

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BOB WILSONINVITÉ SPÉCIAL

nowhere. Here we are now at the beginning . More and more

Femme de courde l’ère Tang.

PHOTO LOVISDENGLER OSTENRIK.

COLLECTIONPARTICULIÈRE

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201332 •

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Avec la sortie de la Play-Station 4 et de la Xbox

One, la huitième généra-tion de consoles est au

complet. Elle avait été inauguréepar la 3DS début 2011, rejointe plustard par la Playstation Vita (fé-vrier 2012) et la Wii U (fin 2012).Rétrospective des générationsprécédentes.

Première générationLa console: Odyssey

Le jeu: PongLa première console, l’Odyssey,sort en août 1972 dans une indiffé-rence générale. Mais le succès phé-noménal du premier jeu d’arcadecréé par Atari, Pong, lancé le moissuivant, propulse les ventes de lamachine, qui dispose aussi d’un jeude tennis. Fin 1975, Atari lance sapropre console, Home Pong.

Deuxième générationLa console: Atari 2600

Le jeu: Breakout

En octobre 1977, Atari apporte deuxévolutions majeures aux consoles:le joystick et les cartouches de jeu.L’Atari 2600 permet de jouer à ungrand nombre de jeux différents(plus de 900 seront produits, dontle légendaire casse-briques Break-out, développé par un certain SteveJobs). Plus de 40 millions d’unitésseront vendues. D’autres machines,comme l’Intellivision et la Coleco-vision, verront aussi le jour.

Troisième générationLa console: NES

Le jeu: Super Mario Bros.En 1983, le jeu vidéo connaît unkrach dû à la faible qualité des jeuxproduits sur Atari 2 600. C’est un

plombier italien venu du Japon quile sauvera de la déroute. Super Ma-rio débarque aux Etats-Unis en 1985à bord de la NES de Nintendo. Lesuccès est massif. Sega emboîte lepas avec sa Master System.

Quatrième générationLa console: MegadriveLe jeu: Street Fighter II

Pour la génération suivante, c’estSega qui tire le premier avec saMegadrive, sortie en 1989 sous lenom de Genesis aux Etats-Unis. Leconstructeur présente également samascotte, un hérisson bleu baptiséSonic. Cette génération est celle del’affrontement entre deux géants(Nintendo sort sa Super NESen 1991 en Occident), mais corres-pond aussi à un âge d’or du jeu vi-déo, marqué par une créativité dé-bridée et pléthore de titres majeurs.

Cinquième générationLa console: PlayStation

Le jeu: Tomb Raider

Sony, nouvel acteur, débarqueen 1994 avec une idée en tête: fairedu jeu vidéo un loisir tendance etgrand public. Le jeu vidéo découvreles polygones de la 3D et la musiquetechno avec le jeu de course emblé-matique du lancement, WipeOut.L’objectif est atteint, la premièrePlayStation s’impose et s’écoule àplus de 100 millions d’exemplaires.

Sixième générationLa console: PlayStation 2

Le jeu: GTA 3Sony continue sur sa lancée et sortsa Playstation 2 en 2000. C’est unrouleau compresseur. Elle écrase laDreamcast de Sega, pourtant sortieplus tôt avec de jolis atouts, et

étouffe la Xbox de Microsoft et laGameCube de Nintendo, débar-quées un peu plus tard. La PSs’écoule à plus de 150 millionsd’exemplaires. Le record absolu desconsoles de salon.

Septième générationLa console: Xbox 360

Le jeu: Assassin’s Creed 2La Xbox 360 en 2005, puis la PS3 etla Wii en 2006 arrivent en terrainconquis. Les consoles de salondominent sans partage l’industriedu jeu vidéo. C’est la génération desblockbusters (GTA 4 et 5, Skyrim,Uncharted, Call of Duty ModernWarfare, etc.). Mais le PC n’a pasencore dit son dernier mot, etd’autres supports, notamment tac-tiles, apparaissent. La partie estloin d’être gagnée.

ERWAN CARIO

I have the feeling that we are getting nowhere. Slowly ,

JEU VIDÉO Les sorties coup sur coupde la Xbox One de Microsoft et dela PS4 de Sony lancent le combat dela nouvelle génération. La dernière?

Consoles,les boss finaux

Horizon permanent de l’indus-trie du jeu vidéo, on l’appelle

dans le milieu la «next-gen» :c’est-à-dire la prochaine géné-ration, sous-entendu de con-soles. Aujourd’hui, la huitième

débarque en force dans les rayons, avecla sortie de la Xbox One, disponiblemondialement depuis le week-enddernier, et de la PlayStation 4, qui ar-rive aujourd’hui en Europe, quinzejours après les Etats-Unis. Cet aligne-ment est unique dans la jeune histoirede l’industrie du jeu, et donne lieu entreles constructeurs Microsoft et Sony à unchoc frontal dont se régalent analysteset gamers, excités par une même ques-tion aussi évidente que triviale: qui serale vainqueur ?Il n’est pas sûr qu’elle trouve une ré-ponse convaincante, du moins dansl’immédiat. Il est même possible que les

nouvelles consoles de Sony et Microsoftrencontrent toutes deux le succès pourune raison presque mécanique: ces ma-chines sont très attendues. Le cycle an-térieur a été exceptionnellement long(la Xbox 360 est sortie en 2005, la PS3un an plus tard) et le champ est d’autantplus libre pour les nouvelles venues queles ventes de leur seule concurrente sé-rieuse, la Wii U de Nintendo, lancéel’année dernière, n’ont pas décollé.

RUPTURES. Cela explique notammentles bons premiers chiffres pour la PS4et la One, que leurs constructeurs res-pectifs se sont empressés de trompeter.Sony a écoulé plus d’un million de sesconsoles en vingt-quatre heures sur lesol américain, et Microsoft annonce lemême chiffre pour ses ventes mondialesdu 22 novembre. Dans les deux cas, cesventes sont supérieures de plus d’untiers à celles obtenues pour le lance-ment des consoles précédentes. Les

précommandes des deux machinesétaient elles aussi particulièrement éle-vées et des ruptures de stock sont à pré-voir d’ici Noël, particulièrement dansle cas de la PS4.Cette dernière semble profiter d’un lé-ger avantage. Elle a remporté la pre-mière manche médiatique en s’adres-sant plus directement au public desjoueurs fidèles, mais c’est surtout auxfaux pas de son compétiteur que Sonydoit cette bienveillance provisoire. De-puis le dévoilement maladroit dela Xbox One en mai, où étaient annon-cées des politiques très restrictives enmatière d’occasion et de connexion,Microsoft n’a cessé de rétropédaler.Abandonnant progressivement ses am-bitions les plus agressives, la compagniea rattrapé une partie de son retard. Aumoment de la sortie des deux consoles,on ne voit plus de désavantage sérieuxpour la Xbox One… Sauf son prix, supé-rieur de 100 euros à la PS4, à cause del’accessoire Kinect, système de recon-naissance vocal et visuel sur lequel Mi-crosoft continue de miser, malgré ledésintérêt manifeste des gamers.Vendues respectivement 400 euros et500 euros, la PS4 et la One seront aussiles premières consoles dans l’histoire deleur constructeur à n’être pas venduesà perte, même si l’une comme l’autrene peuvent se vanter : avec une quin-zaine d’euros de bénéfices par exem-plaire écoulé, les marges restent trèsserrées. C’est bien sûr avec les contenuset les services que Sony et Microsoftréaliseront leurs meilleurs profits, qu’ils’agisse des jeux, qu’ils vendent de plusen plus souvent par téléchargement etsur lesquels ils prélèvent leur dîmequand ils ne les produisent pas eux-mê-mes, ou des nouvelles fonctionnalitésauxquelles les deux entreprises aime-raient tellement nous convertir: VOD,streaming, cloud-gaming, réseaux so-

ciaux, partage, téléphonie, etc. Sur ceterrain, c’est sans conteste la Xbox Onequi présente le menu le plus copieux.L’ambitieuse plateforme de servicesproposée par Microsoft positionne saconsole sur un créneau moins stricte-ment gamer que la PS4. Outre les com-mandes vocales et visuelles très affinéeset la présence de Skype, des accordspassés avec les grands opérateurs per-mettent, par exemple, à la One de pren-dre les commandes sur les box Orange,SFR, Free, etc. Une application qui, àl’usage, pourrait s’avérer redoutable,parce qu’elle favorise l’allumage de laconsole en même temps que la télé. Làencore, il faudra observer dans quellemesure le public est disposé à voir dansune console autre chose qu’une ma-chine à jouer et à embrasser ces nouvel-les pratiques.

STEAM. Difficile de dire à ce public la-quelle des deux prétendantes choisir.L’histoire du secteur nous apprendplutôt que, pour le joueur, la meilleureconsole est toujours celle… qui se vendle mieux, puisque c’est vers elle que lesdéveloppeurs et les grands studios setournent en priorité, lui assurant ainsile meilleur catalogue. La sagesse com-manderait donc d’attendre un peu, letemps, justement, que s’étoffent les ca-talogues de ces rutilantes machines, quin’ont pour l’heure que peu de jeux réel-lement «next-gen» à proposer.Reste que la vraie grande nouveauté decette génération, c’est que les consolesne sont plus les maîtresses du jeu. Leurmodèle est contesté par la concurrencedes tablettes et mobiles. En 2014, l’arri-vée du très disruptif système Steam Ma-chine (un néo-PC pour jouer sur sa télé)promet de secouer encore plus l’empiredes constructeurs traditionnels, laissantpenser que cette «next-gen» pourraitbien être la «last-gen». •

Par OLIVIER SÉGURET

Au commencement était l’Odyssey. S’ensuivirent quarante ans de crampes aux doigts et d’yeux rougis.

1972-2013: les sept piliers de la manette

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 ECRANS­MÉDIAS • 33

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A LA TELE CE SOIR20h50. Masterchef.Divertissementprésenté par Frédéric Anton, Yves Camdeborde,Sébastien Demorand et Amandine Chaignot.23h30. Vendredi, toutest permis avecArthur.Divertissementprésenté par Arthur.1h20. Trafic info.1h24. Confessionsintimes.

20h45. La fête de lachanson française.Les 10 ans de la fête dela chanson française.Divertissementprésenté par Daniela Lumbroso.23h55. Tirage del’Euromillions.0h05. Vestiaires.Série.1h00. Alcaline, le mag.Magazine.1h50. Toute unehistoire.

20h45. Thalassa.Les cadeaux de la mer.Magazine présenté parGeorges Pernoud.22h35. Réflections :Lambert Wilson.22h40. Météo.22h45. Soir 3.23h10. Docs interdits.Sida, la guerre de 30 ans.Documentaire.0h25. En quête depreuves.Série.

20h55. Paulette.Comédie française deJerome Enrico, 87mn,2012.Avec BernadetteLafont, Carmen Maura.22h20. Mes héros.Comédie françaised’Éric Besnard, 87mn,2012.Avec Josiane Balasko.23h50. Rue Mandar.Film.1h20. Un enfant de toi.Film.

20h50. Le souvenir de toi.Téléfilm d’Anna Justice.Avec Alice Dwyer,Dagmar Manzel.22h35. L’étranger en moi.Téléfilm d’Emily Atef.Avec Susanne Wolff,Johann Von Bülow.0h10. Court-circuit.Magazine.0h15. Sept ans d’hiver.0h40. Blanche fraise.1h10. Chez toi ?

20h50. NCIS :Enquêtes spéciales.Série américaine :Berlin,Les supers héros de lavie réelle,Guerre psy,In extremis,Amis et amants.Avec Mark Harmon,Michael Weatherly.0h55. Californication.Pendez-le haut et court,Incroyablement triste.Série.

20h45. MontreuxComedy Festival 2012Best of 2012.Spectacle.22h30. Muriel Robin :au secours !Spectacle de Muriel Robin etPierre Palmade.0h25. Guy Bedos /Muriel Robin àl’Olympia.Spectacle.2h25. LesInrockuptibles.

20h40. On n’est pasque des cobayes !Magazine.22h25. C dans l’air.Magazine présenté parYves Calvi.23h35. Entrée libre.Magazine0h00. Rendez-vous enterre inconnue.Sylvie Testud chez lesGorane.Documentaire.1h45. Le secret dessept sœurs.

20h40. La revue depresse.Spéciale Laurent Gerra.Divertissementprésenté par Jérôme De Verdiere.23h00. Zemmour et Naulleau.Invités : Jean-PierreChevènement, Jean-Louis Debré etJean-Louis Beffa.Magazine.0h25. Paris dernière.Magazine.

20h50. SauveurGiordano.Téléfilm français :Le piège.Avec Pierre Arditi, Julie Bataille.22h40. SauveurGiordano.Crédit pour meurtre,Le petit témoin.Téléfilm.2h10. Poker.3h25. Programmes denuit.

20h45. Les experts :Manhattan.Série américaine :Le repas des fauves,Le samouraï desaffaires.Avec Gary Sinise.22h30. Les experts :Manhattan.Fausse donne,Balles de match,Expert et témoin.Série.0h50. Suspect N° 1.Magazine.

20h50. Enquêted’action.Danger accident : deux-roues et piétonsen première ligne.Magazine présenté parMarie-Ange Casalta.22h45. Enquêted’action.3 reportages.Magazine.3h00. Carrément jeuxvidéo.Magazine.3h10. Météo.

20h45. Les géniescontre-attaquent.Téléfilm américain.Avec Kellie Martin,Brady Smith.22h20. Air bud 5.Téléfilm américain.Avec Katija Pevec, Tyler Boissonnault.23h55. Championnes à tout prix.La Saint-Valentin.Série.0h45. Championnes àtout prix.

20h50. Au coeur del’enquête.Banditisme : la traqueaux cambrioleurs.Documentaire.22h15. Au coeur del’enquête.Braquage, indic et ADN.Documentaire.0h00. Au coeur del’enquête.Cambrioleurs, traqueet ADN.Documentaire.

20h45. Fringe.Série américaine :Le faiseur d’anges,Bienvenue à Westfield.Avec Joshua Jackson.22h30. The walking dead.Série américaine :Chupacabra,Secrets.Avec Andrew Lincoln.0h10. Legend of theSeeker : l’épée devérité.

20h50. Pretty little liars.Série américaine :Question de vie et demort,Cadavre exquis,Ne jamais se défiler.Avec Troian AveryBellisario, Ashley Benson.23h15. Enquête très spéciale.3 épisodes.Documentaire.

TF1

ARTE M6 FRANCE 4 FRANCE 5

GULLIW9TMCPARIS 1ERE

NRJ12 D8 NT1 D17

FRANCE 2 FRANCE 3 CANAL +

Péter dans l’espaceFrance 5, 20h40Peut­on péter dansl’espace? Faire du pédalosous l’eau? On n’est pasque des cobayes répond àune des deux questions.

Fumer les paupiettesCanal+, 20h55Paulette n’est pas la reinedes paupiettes mais de lafumette: l’avant­dernierrôle de Bernadette Lafonten mémé du shit.

Raconter la maladieFrance 3, 23h10Du «cancer gay» de 1983à la maladie de 2013encore tue, Sida, la guerrede 30 ans racontée en unbon documentaire.

LES CHOIX

Il a parfois un œil en moins,le pelage élimé ou le coudésarticulé. Mais on luipardonne tout, à ce dou­dou qu’on a traîné depuisqu’on est né. L’heure estvenue de lui donner unenouvelle célébrité. A lasuite de la sortie du livreMuch loved, où le photo­graphe Mark Nixon aimmortalisé ces trognon­nes bestioles, le Washing­ton Post propose auxinternautes adultes nostal­giques d’envoyer des pho­tos de leur doudou dutemps où ils étaient enculottes courtes. S.Ginhttp://www.washingtonpost.com

DOUDOUVIENS­TU ?

VU SUR LE WWW

La presse s’inquiète de la haussedes tarifs postauxLes Syndicats de la presse quotidienne nationale (SPQN) etrégionale (SPQR) s’en remettent aux parlementaires, inquietsde perdre leurs tarifs postaux préférentiels pour l’achemine-ment et la distribution. Jusqu’ici, ceux-ci sont compenséspar l’Etat auprès de la Poste, selon un accord tripartite signéen 2008. La loi de finances pour 2014 prévoit de retirer cettedotation de 30 millions d’euros à l’entreprise publique, quirépercuterait cette perte sur la presse. «Cet accord a été rompucet été de manière unilatérale, sans concertation préalable»,déplorent dans une lettre les organisations patronales. Lesquotidiens, frappés par la crise de la presse, pourraient ainsi«subir des augmentations» des coûts postaux «comprises en-tre 15% et 22%, à compter du 1er janvier».

RTL se met à la «Renaissance»Selon des informations de Challenges confirmées par RTL,son président, Christopher Baldelli, prépare une remise à platdes sites internet du groupe dans le cadre d’un projet baptisé«Renaissance». Seulement dix-huitième des sites d’info,avec près de 3 millions de visiteurs uniques par mois en sep-tembre, selon Médiamétrie, RTL envisage une ou deux acqui-sitions de sites d’ici fin 2013.

159millionsde dollars (près de 117 millions d’euros) pour le siègedu Washington Post. C’est la somme que va débourserune agence immobilière pour acquérir les locaux dujournal situé à deux pas de la Maison Blanche. «L’accorddoit être conclu à la fin du mois de mars», a précisé lequotidien américain mercredi. Un bijou de famille demoins, donc, pour le célèbre journal, racheté 250 millionsde dollars (184 millions d’euros) cet automne par lefondateur d’Amazon, Jeff Bezos. La rédaction continuerad’occuper des espaces dans l’immeuble de briquesclaires «jusqu’à ce que le journal trouve un nouveausiège». Pour mémoire, c’est là que les journalistes CarlBernstein et Bob Woodward avaient écrit leurs articlessur le scandale du Watergate, qui mena à la chute duprésident Richard Nixon, au début des années 70.

En décembre, le magazineOkapi, à destination des10­15 ans, propose un dos­sier pas idiot sur les usagesd’Internet. Sont mis enavant les pièges du Webdans des questions théma­tiques («les encyclos sont­elles fiables à 100%?»,«l’info est­elle toujoursvraie?») ainsi que, dans unformidable décodage,«comment les marques tetraquent» qui, à partir dudessin d’une cantine, mon­tre comment «on sert de lapub au visiteur selon sesgoûts». L’objectif n’étant pasde jouer les ayatollahs,Okapi évoque les usages,conseille sur les pratiques:comment réussir sa vidéosur YouTube, commentgérer ses commentaires(«tisse des liens», «ne donnepas d’info perso»). Et auniveau éthique, qu’est­ceque ça dit? «Le numériquechange­t­il notre relation àl’autre?» ou «pourquoi letout numérique inquiète­t­il?». Un dossier riche, bonpoint de départ pour deséchanges avec les adultes.S.Es.«Okapi», n°969, 5,20€.

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LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201334 • ECRANS&MEDIAS

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REPERTOIRE

ENTRENOUS

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Le dimanche 1er décembre,se fera l'allumage des cinqbougies deHanouccah

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LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 ANNONCES • 35

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BOB WILSONINVITÉ SPÉCIAL

. We are getting nowhere and that is a pleasure . It is not irritating

Vidéoportraitde Lady Gaga,

inspiré deMademoiselle

Caroline Rivièred’Ingres, 2013.

BOB WILSON

LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 201336 •

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Au Louvre, dont il est le grand in-vité jusqu’au 17 février, Bob Wil-

son a installé dans une salle unepartie de la collection qu’il a

rassemblée à Watermill, lelieu où il vit et travaille

une partie de l’année, surLong Island, près deNew York. Les objets

les plus divers s’y cô-toient et s’y télescopent, dans un chaossoigneusement organisé qui a pour butd’aiguiser les regards. Autre exempled’associations inattendues, les vidéo-portraits réalisés avec Lady Gaga. Troistoiles célèbres «reconstituées» en ta-bleaux vivants où la chanteuse inter-

prète la Mortde Marat deDavid, laTête de saintJe a n - B a p -tiste de So-lari et Made-m o i s e l l e

Caroline Rivière d’Ingres. «J’espère queces portraits serviront à donner une autreimage d’elle», dit Wilson qui insiste surson «étonnante capacité à se transformeret à rester concentrée des heures durant.Dans sa robe empire, elle reste incroya-blement vivante. Kleist disait qu’unebonne actrice est comme un ours, elle at-tend que ce soit vous qui bougiez en pre-mier». Il y a de l’ours aussi dans la

haute silhouette de Bob Wilson. Et unepuissance de concentration hors ducommun. Acceptant l’invitation de Li-bération, il ne s’est pas contenté de re-dessiner les têtières et les lettrines detoutes les pages, mais a voulu bouscu-ler les habitudes de lecture, en cher-chant de nouvelles connexions entrephotos et textes. Quelques jours avantde venir à Libération, il nous avait faitvisiter son expo au Louvre, en imagi-nant déjà comment il pourrait interve-nir dans le journal.

«Dans ce musée, tout ce qui est sem-blable est mis ensemble. Pas dans cettesalle. Vous pouvez trouver un masquede Borneo du XIXe siècle et la tête deMickey Mouse. Tous les deux sont rou-ges avec de grandes oreilles. Ici, le sem-blable et le dissemblable sont mis en-semble. Des restes de têtes africaines,Dietrich en train de fumer une cigaretteet une céramique du XVIIIe siècle. Si jemets un ordinateur sur une commodebaroque, je vois mieux l’un etl’autre.«Le but, c’est de trouver lebon contrepoids. D’instaurer des règlespour mieux les briser. Au Louvre,aucune règle n’est brisée. Quand j’aicommencé mes études d’architecte àNew York, j’ai eu pour prof Sibyl Moho-ly-Nagy, qui enseignait l’histoire del’architecture. C’était un cours surcinq ans. J’arrivais du Texas, je ne con-naissais rien de rien, je n’avais jamaisété dans un musée, dans une galerie, etje suis rentré dans la salle de cours, qui

était plutôt sombre. Elle était vêtued’une robe noire, stricte. Derrière elle,il y avait trois écrans noirs, et des ima-ges projetées sur les trois écrans : unemosaïque byzantine, une peinture de laRenaissance, une chaise de Frank LloydWright… Et son cours n’avait rien à voir

avec ce que nous voyions.Tous les deux mois, il y avaitune seule image sur les trois

écrans: un dessin de Rome par Le Pira-nèse. Et cela a duré comme cela pen-dant cinq ans. Et puis un jour, au milieud’un cours, elle a dit : vous avez troisminutes pour dessiner une ville. Prêts?Partez! Retournez vos feuilles. Il fallaitque l’on pense vite. Et grand. Et pas àune seule chose à la fois, ça c’est tropcompliqué.«Cela m’amène au souvenir de ma pre-mière rencontre avec Marlene Dietrich

en 1971. Je l’avais invitée à dîner et ellem’avait dit : «Avec plaisir.» Et puis untype est arrivé à notre table et lui a dit:“Mais pourquoi êtes-vous si froide quandvous jouez?”Et elle de répondre: “Maisvous n’avez pas entendu ma voix !” Ellem’a expliqué que la difficulté, c’était deplacer sa voix en fonction de son ex-pression. Ses mouvements pouvaientêtre glaçants, mais sa voix était trèschaude et sensuelle.«Le contrepoint, c’est toute la diffi-culté. Prendre un article sur un sujet etune image en décalage pour l’accompa-gner… C’est ce que j’essaye de faire authéâtre. La plupart des gens prennentun texte, puis l’illustrent. Moi je parsdes images et je travaille dessus. Puis jeprends le texte séparément. Et enfinj’assemble les deux. C’est comme mixerun film muet avec un feuilleton radio-phonique. Cela vous permet de trouverdes connexions bizarres, et parfois iln’y a pas de connexions. Comment ceque je peux voir peut m’aider à mieuxentendre ? C’est ça, le défi. Au Metro-politan à New York pour le Ring de Wa-gner, j’avais cent cinquante choristes enmarche contre la musique. La musiquede Wagner, elle fonce, elle n’arrête pasde foncer, et le chœur, lui, bougeaittout doucement. Quand je vois ça, j’en-tends mieux la musique.«Peut-on lire quelque chose dans unjournal et voir quelque chose d’autre?Cela peut faire surgir un autre sens, uneautre compréhension de ce qu’on lit etde ce qu’on voit. C’est cela que je vou-drais essayer.» •

Recueilli par SYLVAIN BOURMEAU,ELISABETH FRANCK­DUMASet RENÉ SOLIS

Bob Wilson revient sur ses années de formation et explique sadémarche, soit trouver de nouveaux sens de lecture enconfrontant texte et image, musique et mise en scène:

«Le contrepoint,c’est toutela difficulté»

«Comment ce que je peux voirpeut m’aider à mieux entendre?C’est ça, le défi. C’est ce quej’essaie de faire au théâtre.»Bob Wilson

to be where one is . It is only irritating to think one would like to be somewhere else.

Bob Wilson, hier à Libération.

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LIBÉRATION VENDREDI 29 NOVEMBRE 2013 GRAND ANGLE • 37

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LIBÉRATIONwww.liberation.fr11, rue Béranger 75154 Pariscedex 03 Tél. : 01 42 76 17 89 Edité par la SARLLibération SARL au capital de 8726182 €.11, rue Béranger, 75003 ParisRCS Paris : 382.028.199Durée : 50 ans à compter du 3 juin 1991. CogérantsNicolas DemorandPhilippe Nicolas Associée unique SA Investissements Presseau capital de 18 098 355 €.

Directoire Nicolas DemorandPhilippe Nicolas Directeur de la publication Nicolas Demorand Directeur de la rédactionFabrice Rousselot

Directeurs adjoints de la rédactionStéphanie AubertSylvain BourmeauEric DecoutyFrançois SergentAlexandra SchwartzbrodDirectrice adjointede la rédaction,chargée des N° spéciauxBéatrice VallaeysRédacteurs en chefChristophe Boulard (tech) Olivier Costemalle(éditions électroniques)Gérard LefortF. Marie Santucci (Next)Directeurs artistiques Alain BlaiseMartin Le ChevallierRédacteurs en chefadjoints Bayon (culture)Michel Becquembois(édition)Jacky Durand (société)Mathieu Ecoiffier(politique)Jean-Christophe Féraud (éco-futur)Elisabeth Franck-Dumas(culture)

Florent Latrive (éditionsélectroniques)Luc Peillon (économie)Mina Rouabah (photo)Marc Semo (monde)Richard Poirot(éditions électroniques)Sibylle Vincendon etFabrice Drouzy (spéciaux)Fabrice Tassel (société)Gérard Thomas (monde)Directeur administratif et financierChloé NicolasDirectrice de lacommunication Elisabeth LabordeDirecteur commercial Philippe [email protected] dudéveloppement Pierre HivernatABONNEMENTSMarie-Pierre Lamotte03 44 62 52 [email protected] abonnement 1 anFrance métropolitaine : 371€.

PuBLICITÉ

Directeur général deLibération MédiasJean-Michel LopesTél. : 01 44 78 30 18 Libération Medias. 11, rueBéranger, 75003 Paris. Tél. : 01 44 78 30 68Amaury médias25, avenue Michelet93405 Saint-Ouen CedexTél.01 40 10 53 [email protected] annonces.Carnet. IMPRESSIONCila (Héric), Cimp(Escalquens), Midi-print(Gallargues), Nancy Print(Nancy), POP (La Courneuve)Imprimé en France Tirage du 28/11/13:119 365 exemplaires. Membre de OJD-Diffusion

Contrôle. CPPP: 1115C80064. ISSN 0335-1793.Nous informons noslecteurs que la

responsabilité du jour nal ne saurait être engagée encas de non-restitution dedocuments « Pour joindre un journaliste,envoyez-lui un email initialedu pré[email protected]

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Arbres d’Amérique tropicale.

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Ajaccio

NuageuxSoleil Couvert FaibleModéréFort

CalmePeu agitée

AgitéeAverses Pluie

Éclaircies

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LLEE MMAATTIINN Une perturbation arrive enManche avec des pluies faibles, mais surle reste du pays, aention, brouillardsnombreux et denses !

LL’’AAPPRRÈÈSS--MMIIDDII Pluies éparses sous lesnuages dans une ambiance encore bru-meuse dans le nord. Mieux sur les régionsméridionales.

-10°/0° 1°/5° 6°/10° 11°/15° 16°/20° 21°/25° 26°/30° 31°/35° 36°/40°

FRANCE MIN/MAX

LilleCaenBrestNantesParisNiceStrasbourg

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SÉLECTION MIN/MAX

AlgerBruxellesJérusalem LondresBerlinMadridNew York

Neige

0,3 m/12º

0,1 m/16º

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VENDREDI

Temps généralement instable avec desaverses plus fréquentes des Pyrénéesau sud-est. Plus sec en Bretagne.

SAMEDI Retour de l'anticyclone. Nuages bas etbrouillards le matin, puis éclairciesassez aléatoires.

DIMANCHE er

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0,6 m/12º

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