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62 École d’échographie gynécologique Imagerie de la Femme 2008;18:62-65 © 2008. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés École d’échographie gynécologique Première leçon Sémiologie échographique de la pathologie pelvienne Érick Petit Service d’imagerie médicale, Centre hospitalier Paris Saint-Joseph, 185, rue Raymond Losserand, 75014 Paris. Correspondance : E. Petit, CIMI, 6, place d’Italie, 75013 Paris. Email : [email protected] Voici quatre images échographiques ovariennes (fig. 1 à 4). Qu’en pensez-vous et quelle conduite à tenir proposez-vous ? L’objectif de cette rubrique « école d’échographie gynécologique », centrée sur le thème de la sémiologie échographique de la pathologie pelvienne est de montrer des images pathognomoniques concernant les annexes, l’endomètre, le myomètre puis d’autre origine plus rare, devant conduire à une conclusion diagnostique [1] claire et ferme, sans aucune hésitation, basée sur une description sémiologique très précise. Il s’agit en somme, et par analogie, de repérer et distinguer immédiatement l’éléphant, la girafe ou le zèbre dans la savane. Figure 1. Femme de 25 ans, douleurs pelviennes, J6, ovaire gauche, 31 mm, plan sagittal oblique.

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École d’échographie gynécologique

Imagerie de la Femme 2008;18:62-65© 2008. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

École d’échographie gynécologique

Première leçon

Sémiologie échographique de la pathologie pelvienne

Érick Petit

Service d’imagerie médicale, Centre hospitalier Paris Saint-Joseph, 185, rue Raymond Losserand, 75014 Paris.

Correspondance : E. Petit, CIMI, 6, place d’Italie, 75013 Paris. Email : [email protected]

Voici quatre images échographiques ovariennes

(fig. 1 à

4)

. Qu’en pensez-vous et quelle conduite à tenir proposez-vous ?

L’objectif de cette rubrique « école d’échographie gynécologique », centrée sur le thème de lasémiologie échographique de la pathologie pelvienne est de montrer des images pathognomoniquesconcernant les annexes, l’endomètre, le myomètre puis d’autre origine plus rare, devant conduireà une conclusion diagnostique [1] claire et ferme, sans aucune hésitation, basée sur unedescription sémiologique très précise. Il s’agit en somme, et par analogie, de repérer et distinguerimmédiatement l’éléphant, la girafe ou le zèbre dans la savane.

Figure 1. Femme de 25 ans, douleurs pelviennes, J6, ovaire gauche, 31 mm, plan sagittal oblique.

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E. Petit

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Figure 2. Femme de 40 ans, métrorragies, J13, cycles longs, ovaire droit, plan axial, 1 = 16 mm.

Figure 3. Femme de 43 ans, ménorragies, J14, cycles de 28 jours, ovaire gauche, plan axial, 1 = 23 mm.

Figure 4. • a : Femme de 21 ans, dysménorrhée, J20, ovaire droit, plan axial.

a

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Réponse

Ces quatre dossiers ont encommun, bien entendu, de corres-pondre à des situations physiologi-ques permettant d’illustrer les diffé-rentes étapes de la folliculogénèse,aisément reconnaissables en échogra-phie [2] et qu’il ne faut pas prendrepour pathologiques par méconnais-sance de la physiologie ovarienne, etnotamment des variations ovariennesen fonction du cycle. D’où la néces-sité de connaître le jour du cycleauquel l’échographie est effectuéepour pouvoir l’interpréter correcte-ment. Les aspects physiologiques etpara-physiologiques ou fonctionnelssont, en effet, toujours à évoqueravant de porter un diagnostic patho-logique, on ne le répétera jamais assezen matière d’échographie pelvienne.

Premier dossier

Il s’agit d’un ovaire normalement

pluri-folliculaire

(fig. 1)

, ici à J6,chez une femme de 25 ans souffrantde douleurs pelviennes non spécifi-ques, liées en fait à une colopathiefonctionnelle. En première partie decycle, ou phase folliculaire, il est nor-mal de constater sur chacun des ovai-res cet aspect caractéristique pluri-folliculaire avec, notamment jusqu’àJ8, quatre à huit follicules de moins de10 mm, sans répartition spécifique-ment périphérique au sein de l’ovaire.Il n’est donc en aucun cas adéquat oujustifié d’employer le terme d’ovairepolykystique, comme cela se voitencore trop souvent, devant une tellesituation strictement physiologique etde pratique quotidienne.

Deuxième dossier

Chez cette femme de 40 ansexplorée à J13, sur fond de cycles plu-tôt longs de 30 à 32 jours, on observeune formation anéchogène de 16 mmau sein de l’ovaire droit correspon-dant à un

follicule

dit

dominant

ouen voie de maturation

(fig. 2)

. Il pré-sente une couronne vasculaire thé-cale périphérique déjà perceptible enDoppler couleur et il est entouré de

Figure 1. Ovaire normal pluri folliculaire à J6.

Figure 2. Follicule dominant de 16 mm, à J13, avec vascularisation thécale périfollicu-laire déjà perceptible en Doppler couleur et follicules périphériques en voie d’atrésie.

Figure 3. Follicule pré-ovulatoire de 23 mm, à J14, avec pont de granulosa sur son bord gauche.

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quelques follicules en voie, eux,d’atrésie car n’ayant pas eu la chanced’être sélectionnés (le milieu ovarienest sévèrement compétitif !). En effet,un seul follicule, parmi la cohorteillustrée par le premier dossier, estsélectionné pour aboutir au folliculepré-ovulatoire (et baptisé de ce faitdominant). Il est d’une taille au moinségale à 12 mm et discernable à partirde J8, croissant de 2 mm par jourjusqu’à maturité. Il n’est, là encore,pas question de parler de kyste, termestrictement réservé à toute situationnon physiologique !

Troisième dossier

Devant cette formation anécho-gène de 23 mm, il ne faut surtout pasévoquer le terme de kyste mais recon-naître un

follicule pré-ovulatoire

(fig. 3)

, suite logique des deux précé-dents dossiers, en accord avec lapériode du cycle (J14) chez cettefemme de 43 ans régulièrementréglée avec des cycles de 28 jours. Ced’autant qu’il existe en périphérie unclassique pont de granulosa ainsiqu’une paroi discrètement épaisse,

crénelée et hyperéchogène. La tailledu follicule pré-ovulatoire varie de 20à 30 mm. Voilà pourquoi il n’est paslicite de parler de kyste en dessous de30 mm.

Naturellement, toutes ces structu-res physiologiques intra-ovariennessus-décrites sont strictement liqui-diennes et donc à contenu anécho-gène avec renforcement postérieur.

Quatrième dossier

Femme de 21 ans, se plaignantd’une dysménorrhée explorée écho-graphiquement à J20 : vous avez sûre-ment reconnu un classique et banal

corps jaune

(fig. 4a)

, le confirmantformellement en appuyant simple-ment sur la touche Doppler couleur

(fig. 4b)

, geste qui doit être fréquem-ment effectué en échographie pel-vienne et notamment devant unestructure centro-ovarienne plus oumoins hétérogène, en tout cas mani-festement distincte du stroma ova-rien environnant. Apparaît en règle,autour d’un tel aspect évocateur enéchelle de gris, une couronne flam-boyante correspondant à la riche vas-

Figure 4. Corps jaune d’aspect échostructural mixte hétérogène (a) avec couronne vas-culaire intense pariétale périphérique en Doppler couleur (b).

a b

cularisation pariétale du corps jaune.Quant au contenu central, fait d’uncoagulum post-ovulatoire, il estd’échogénicité extrêmement variabledans son aspect et dans le temps : deliquidien pur ou quasi-pur à pseudo-solide mais sans jamais de vascularisa-tion centrale en mode Doppler cou-leur.

Conclusion

Il s’agit dans les quatre cas d’unesituation normale strictement physio-logique ne devant donner lieu àaucune action particulière hormis,dans le quatrième dossier, devantl’image en mode B du corps jaune, àl’examen en Doppler couleur. Aucunautre examen complémentaire niaucune surveillance ne sont nécessai-res y compris devant cet aspectpseudo-tumoral usuel de corps jauneen mode B, l’aspect en mode Dopplercouleur étant pathognomonique.

Références

[1] Hricak H. Diagnostic Imaging: gyneco-logy. Salt Lake City: Amirsys, 2007.

[2] Ardaens Y, Guérin du Masgenêt B, Co-quel P. Échographie en pratique gynéco-logique. Paris: Masson, 2007.

Points à retenirDevant une ou des image(s) intra-ovarienne(s) liquidienne(s) ou mixte(s), voire d’aspect solide : • penser en priorité à éliminer une situation physiologique,• pour ce faire toujours tenir compte du jour du cycle,• utiliser le Doppler couleur : couronne vasculaire autour du corps jaune quel que soit son aspect central,• ne pas employer le terme de kyste en dessous de 30 mm.