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1 1-Programme de l’année : -chapitre 1 : Présentation et rappels -chapitre 2 : Le sport dans la culture -chapitre 3 : Sport et genres -chapitre 4 : Sport et cité 2-Quelques rappels : 2.1-Le sport « fait social total »* * : concept de M.Mauss, Sociologie et anthropologie, 1932 « Nous avions conscience que la connaissance du sport était la clef de la connaissance de la société ». (N.Ellias, in N.Ellias et E.Dunning, Sport et civilisation, la violence maîtrisée, Fayard, 1994) 2.2-Dépasser le sens commun : « Chaque homme assimile des aliments et oxygène son sang. Mais tout un chacun ne se met pas à écrire un traité sur la digestion et la circulation. Il n’en est pas de même avec les sciences sociales » (L.Trotsky, Œuvres, 1933) 2.3-Les grands paradigmes de la sociologie : 2.3.1-Déterminisme et individualisme : Sociologie – Licence Chapitre 1 Présentation et rappels G.Veziers, Université d’Avignon, partement STAPS

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1-Programme de l’année : -chapitre 1 : Présentation et rappels -chapitre 2 : Le sport dans la culture -chapitre 3 : Sport et genres -chapitre 4 : Sport et cité

2-Quelques rappels : 2.1-Le sport « fait social total »* * : concept de M.Mauss, Sociologie et anthropologie, 1932 « Nous avions conscience que la connaissance du sport était la clef de la connaissance de la société ». (N.Ellias, in N.Ellias et E.Dunning, Sport et civilisation, la violence maîtrisée, Fayard, 1994) 2.2-Dépasser le sens commun : « Chaque homme assimile des aliments et oxygène son sang. Mais tout un chacun ne se met pas à écrire un traité sur la digestion et la circulation. Il n’en est pas de même avec les sciences sociales » (L.Trotsky, Œuvres, 1933) 2.3-Les grands paradigmes de la sociologie :

2.3.1-Déterminisme et individualisme :

Sociologie – LicenceChapitre 1

Présentation et

rappels

G.Veziers, Université d’Avignon, département STAPS

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2.3.2-Le degré de liberté de l’acteur sur un continuum :

° de liberté de l’individu

Du DETERMINISME à… …l’ INDIVIDUALISME L’individu naît de la société.

Ses comportements sont conditionnés par des facteurs tels que l’éducation, la culture, la structure économique et ces déterminismes échappent en grande partie à la conscience. L’individu intègre et exprime les normes de la société.

La société naît des interactions entre les individus. Ils agissent en « acteurs » conscients et rationnels, en fonction de calculs coût/avantage.

D’un côté les actions « irrationnelles » de la sociologie (E.DURKHEIM) et…

… de l’autre les actions « rationnelles » de l’économie (M.WEBER)

-Le structuralisme : -K.MARX, « Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c’est au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience » (K.Marx, Critique de l’économie politique, 1859) -En sport J.M.BROHM. « Le sport ne fait que transposer au niveau de l’activité non directement productive (…) du loisir, du temps libre, la compétition sociale, mais sous une forme ludique et aliénée » (J.M.Brohm, Sociologie politique du sport, in Partisans, 1964) -C.LEVI-STRAUSS, (Anthropologie structurale, 1958). -En sport P.Parlebas (ex : la classification des jeux sportifs)

-L’actionnalisme : A.TOURAINE -L’existentialisme : J.P.SARTRE : « Ce n’est pas la dureté d’une situation ou les souffrances qu’elle impose qui sont motifs pour qu’on conçoive un autre état de chose où il en irait mieux pour tout le monde ; au contraire, c’est à partir du jour où l’on peut concevoir un autre état de choses qu’une lumière neuve tombe sur nos peines et sur nos souffrance et nous décidons qu’elles sont insupportables » (J.P.Sartre, L’Etre et le néant, 1943) -L’individualisme méthodologique : -R.BOUDON (La place du désordre, 1983) « L’individualisme méthodologique part d’une proposition très simple, à savoir que, quel que soit le phénomène social que l’on veut étudier, et quelle que soit son échelle, ce phénomène est obligatoirement l’effet d’actions, d’attitudes ou de croyances de la part des individus » (…) « une proposition telle que « la classe ouvrière a décidé que… » suscite immédiatement un sentiment d’absurdité » (R.Boudon, Y’a-t-il encore une sociologie ? 2003) -En sport P.PARLEBAS. « Les phénomènes sportifs résultent de la compositions d’actions individuelles disposant d’une marge d’improvisation et d’originalité non négligeable. A une liaison causale rigide, il semble plus valide de substituer des processus d’interactions accordant au sujet agissant une réelle capacité d’initiative (…) Le destin sportif des individus n’est pas déposé comme une fatalité dans les classes sociales ». (P.Parlebas, Eléments de sociologie du sport, 1986)

-Le structuralisme génétique : -P.BOURDIEU (La distinction, 1979, Le sens pratique, 1980) « Parce que l’habitus est une capacité infinie d’engendrer en toute liberté (contrôlée) des produits – pensées, perceptions, expressions, actions – qui ont toujours pour limites les conditions historiquement et socialement situées de sa production, la liberté conditionnée et conditionnelle qu’il assure est aussi éloignée d’une création d’imprévisible nouveauté que d’une simple reproduction mécanique des conditionnements initiaux » (P.Bourdieu, Le sens pratique, 1980) -En sport C.POCIELLO.

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3-Conclusion ; Sociologie, philosophie et politique : -« le marxisme prend comme point de départ la société » (R.Deleplace, in Les cahiers du Centre d’Etude et de Recherche Marxistes n°43, 1965) -« Nous préconisons un véritable transfert de compétences de l’Etat en faveur du mouvement sportif car, philosophiquement, nous pensons qu’il faut partir des individus et non de l’Etat » (R.P.R, Un sport libre dans une société responsable, programme sportif du RPR pour les élections législatives de 1986)

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1-Avant propos sur la culture :

1.1-Naturel ou culturel ? 1.2-Les « deux » cultures : 1.3-Cultures de classes et « habitus » : « Il est la classe incorporée » (P.Bourdieu, La distinction, Paris, Ed de minuit, 1979) « Ensemble de dispositions historiques disposées au seins des corps individuels sous la forme de schèmes mentaux et corporels de perception, d’appréciation et d’action » (P.Bourdieu, La distinction, ibid.) ou « Système de dispositions durables et transposables, structures structurées prédisposées à fonctionner comme structures structurantes, c’est à dire en tant que principes générateurs et organisateurs de pratiques et de représentations » (P.Bourdieu, Le sens pratique, Paris, Ed de minuit, 1980)

POSITION (déterminant majeur de l’habitus)

DISPOSITIONS (habitus)

PRATIQUES (prises de positions, révèlent et sont déterminées largement par l’habitus )

Sociologie – Licence 2002Chapitre 2

Le Sport dans la

culture

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-les travaux de P.Bourdieu montrent que « les dispositions à l’égard du corps, de la pratique sportive, sont cohérentes avec les dispositions à l’égard d’autres pratiques culturelles ». (J.Defrance, Sociologie du sport, Paris, La découverte, 1995)

2-Retour sur « l’espace des sports » : -fig 1. -1ère publication : C.Pociello, La force, l’énergie, la grâce et les réflexes, in C.Pociello (dir), Sport et société, Vigot, 1981. -Réactualisation : C.Pociello, les cultures sportive, PUF, 1995. -fig 2.

3-Les pratiques révélatrices de la cohérence position-dispositions : 3.1-Des conditions d’existence à la valorisation de la forme ou de la fonction :

3.1.1-Constatations générales concernant le rapport position-dispositions : -le repas « bourgeois » « est tout un rapport à la nature animale, aux besoins primaires et au vulgaire (…), c’est une manière de nier la consommation dans sa signification et sa fonction primaires, essentiellement communes, en faisant du repas une cérémonie sociale, une affirmation de tenue éthique et de raffinement esthétique » (P.Bourdieu, La distinction…) « Culture devenue nature, c’est à dire incorporée, classe faite corps, le goût contribue à faire le corps de classe » (P.Bourdieu, ibid.) -fig 3. « Tout se passe comme si l’ « esthétique populaire » était fondée sur l’affirmation de la continuité de l’art et de la vie, qui implique la subordination de la forme à la fonction » (P.Bourdieu, ibid.) -L’opposition force/forme dans les pratiques liées au corps : L.Boltanski, Les usages sociaux du corps, rev. Les annales, 1971.

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3.1.2-Le sport en cohérence avec les autres pratiques culturelles : -L’opposition forme/fonction dans les sports de combat : J.P.Clément, La force, la souplesse et l’harmonie, étude comparée de trois sports de combat : lutte – judo – aïkido, in C.Pociello (dir), Sport et société, ibd. « Le jour où le cavalier prendra son cheval sur le dos, alors ce sera du sport » (altérophile cité par C.Pociello, sport et société, ibid.) 3.1.3-Mais pourquoi cette relation position-dispositions ? « La distance au monde (dont la « distance au rôle » mise au jour par Goffman est une dimension particulière) (…) est le principe de l’expérience bourgeoise du monde » (P.Bourdieu, La distinction, ibid.) 3.2-Culture du public et culture du privée :

3.2.1-Constatations générales concernant le rapport position-dispositions :

3.2.2-Le sport en cohérence avec les autres pratiques culturelles : -fig 4. 3.2.3-Mais pourquoi cette relation position-dispositions ? 3.2.3.a-Une culture du public plus féminine ? 3.3-Importance de la trajectoire sociale dans la classe moyenne :

3.3.1-L’effet du désir de mouvement : -fig 5.

3.3.2-L’effet du mouvement :

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4-La place de la culture dans les rapports de domination : 4.1-La domination par la « naturalisation » de la culture : « La négation de la jouissance inférieure, grossière, vulgaire, vénale, servile, en un mot naturelle, qui constitue comme tel le sacré culturel, enferme l’affirmation de la supériorité de ceux qui savent se satisfaire des plaisirs sublimés, raffinés, désintéressés, gratuits, distingués, à jamais interdits aux simples profanes. C’est ce qui fait que l’art et la consommation artistique sont prédisposés à remplir, qu’on le veuille ou non, qu’on le sache ou non, une fonction sociale de légitimation des différences sociales ». (P.Bourdieu, La distinction, ibid.) 4.2-Domination par la culture, la place de la violence symbolique : « le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme pas sa force en droit et l’obéissance en devoir » (J.J.Rousseau, Du contrat social) -Violence symbolique : « violence douce, invisible, méconnue comme telle, choisie autant que subie » (P.Bourdieu, Le sens pratique, ibid.) « Les dominés appliquent les catégories construites du point de vue des dominants aux relations de domination, les faisant ainsi apparaître comme naturelles » (P.Bourdieu, ibid)

4.2.1-La critique radicale du sport, divergences et complémentarité :

4.2.1.a-Tous sport est d’essence compétitive : -M.Caillat, Sport et civilisation ; histoire et critique d’un phénomène social de masse, l’Harmattan, 1995) 4.2.1.b-Cette essence, est le produit de la société capitaliste : « Le sport ne fait que transposer au niveau de l’activité non directement productive (…) du loisir, du temps libre, la compétition sociale, mais sous une forme ludique et aliénée » (J.M.Brohm, Sociologie politique du sport, in Partisans, 1964) 4.2.1.c-Le sport est d’essence bourgeoise : 4.2.1.d-…et aide à sa domination : « L’acceptation idéologique, politique, du sport, est une profonde capitulation devant l’ordre bourgeois ». (P.Laguillaumie, Pour une critique fondamentale du sport, Partisans, 1968)

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« La constitution d’un champ des pratiques sportives est solidaire de l’élaboration d’une philosophie du sport qui est une philosophie politique du sport. Dimension d’une philosophie aristocratique. » (P.Bourdieu, Comment peut-on être sportif ? Actes du 7ème colloque de l’HISPA, 1978) 4.3-La démocratisation ; corollaire de la domination : « Tout les groupes courent dans le même sens, vers les mêmes objectifs, ceux qui leurs sont désignés par le groupe occupant la première place dans la course » (P.Bourdieu, La distinction, ibid.)

4.3.1-Des jeux aux sports, une dépossession du peuple ? « Le fair-play est la manière de jouer de ceux qui ne se laissent pas prendre au jeu au point d’oublier que c’est un jeu, de ceux qui savent maintenir la « distance au rôle », comme dit Goffman, impliquée dans tous les rôles promis aux futurs dirigeants » (P.Bourdieu, Comment peut-on être sportif ? ibid.)

4.3.2-Le sport, un spectacle populaire… « Bref, le sport, qui est né des jeux réellement populaires, c’est à dire produits par le peuple, revient au peuple, à la façon de la folk music, sous forme de spectacles produits pour le peuple » (P.Bourdieu, Comment peut-on…, ibid.)

5-Conclusion : -Pour en savoir plus : -P.Bourdieu, La distinction, critique sociale du jugement, Paris, Ed de Minuit, 1979.(surtout les chapitres 3, 5, 6, 7) -P.Bourdieu, Le sens pratique, Paris, Ed de Minuit, 1980. (surtout le chapitre 3) -P.Bourdieu, Comment peut-on être sportif ? in Questions de sociologie, Paris, Ed de Minuit, 1984. -C.Pociello, La force, l’énergie, la grâce et les réflexes, in Sport et société, Paris, Vigot, 1981. -C.Pociello, Les cultures sportives, Paris, PUF, 1995. -C.Pociello, L’espace des sports, in Sport et démocratie, Paris, Assemblée nationale, 1998. -J.P.Clément, La force, la souplesse et l’harmonie, étude comparée de trois sports de combat : lutte – judo – aïkido, in sport et société, ibid. -P.Mounier, Pierre Bourdieu, une introduction, Paris, Pocket, 2001.

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1-Introduction : 1.1-Les rapports hommes/femmes, des rapports de classes ? « Vieux débat que celui de l’opposition entre nature et culture » (R.Thomas, avant-propos à Le sport et la femme : du mythe à la réalité, Carole A.Oglesby et call, Vigot, 1982 (ed initiale aux USA en 1978)) « il n’est pas exagéré de comparer la masculinité à une noblesse » (P.Bourdieu, La domination masculine, Paris, Liber, 1998) 1.2-Sport et genres : actualité, intérêt et nécessité : « S’interroger sur féminin/masculin et activités physiques et sportives relève, aujourd’hui comme hier, de l’actualité, de l’intérêt et de la nécessité » (Geneviève Fraisse (déléguée interministérielle au droit des femmes), préface de Sport, école, société : la différence des sexes, féminin, masculin et activités sportives, Annick Davisse et Catherine Louveau, L’Harmattan, Paris, 1998). « Fréquemment communes aux hommes et aux femmes aujourd’hui, la pratique physique n’en demeure pas moins le lieu d’expression de leurs différences (…) Des disciplines choisies aux façons de s’y adonner, il y a des pratiques physiques « de femmes » (…) comme il y a des pratiques physiques et sportives « d’hommes ». De là à dire que les pratiques sont sexués…il n’y a qu’un pas…que nous n’hésitons pas à franchir » (C.Louveau, in Sport, école, société, ibid) « Tous les sociologues estiment que le changement dans les relations entre les sexes est l’une des questions les plus importantes de notre époque » (E.Dunning, Le sport, fief de la virilité, in Sport et civilisation, E.Dunning et N.Ellias, Fayard, Paris, 1998)

2-Du sexe au genre : « On ne naît pas femme, on le devient » (Simone de Beauvoir, le deuxième sexe, 1949). « Le processus de socialisation reste un moyen par lequel la société communique à un individu ce qu’elle attend de lui » (Susan L.Greendorfer, Sport et socialisation, in Sport et femme, C.Oglesby, ibid)

Sociologie – Licence 2002Chapitre 3

Sport et genres

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2.1-Les origines culturelles de la « nature » féminine : « Il y a un principe bon qui a créé l’ordre, la lumière et l’homme et un principe mauvais qui a créé le chaos, les ténèbres et la femme » (Pythagore, cité in Le deuxième sexe, S. de Beauvoir, 1949) « Les différences visibles entre les organes sexuels masculins et féminins sont une construction sociale qui trouve son principe dans les principes de la raison androcentrique, elle même fondée dans la division des statuts sociaux assignés à l’homme et à la femme » (P.Bourdieu, La domination masculine, Liber, Paris, 1998) « L’homme est à la tête de la femme, comme le christ est à la tête de l’Eglise » (Pape Léon XIII, cité in G.Duby et M.Perrot, Histoire des femmes, 1991) « La femme est destinée à plaire à l’homme. Si on la prépare à séduire et à se soumettre, elle se rendra agréable à l’homme au lieu de provoquer sa colère ; sa force réside dans ses charmes » (J.J.Rousseau, cité par Betty Spears, Le mythe, in Le sport et la femme, C.Oglesby, ibid) « Si la femme est faible par sa constitution même, la nature a donc voulu la rendre soumise et dépendante dans l’union sexuelle ; elle est donc née pour la douceur, la tendresse, et même pour la patiente, la docilité ; elle doit donc supporter sans murmurer le joug de la contrainte, pour maintenir la concorde dans la famille par sa soumission et par son exemple » (Dr Virey, Dictionnaire des sciences médicales, 1801, cité par Yvonne Knibiehler, Les médecins et la « nature féminine » au temps du code civil, annales ESC n°4, juillet-août 1976) « La femme est à l’homme ce que l’Africain est à l’Européen et le singe à l’humain » (Paul Topinard, anthropologue, 1873), « Etre féminine, c’est se montrer impotente, futile, passive, docile » (S. de Beauvoir, Le deuxième sexe, 1949)

« L’identité masculine est associée au fait de posséder, prendre, pénétrer, dominer et s’affirmer, si nécessaire par la force. L’identité féminine, au fait d’être possédée, docile, passive, soumise » (E.Badinter, XY, de l’identité masculine, odile jacob, 1992) « Le premier devoir pour un homme est : ne pas être une femme » (R.Stoller, Masculin ou féminin, PUF, 1989) « la force particulière de la sociodicée masculine lui vient de ce qu’elle cumule et condense deux opérations : elle légitime une relation de domination en l’inscrivant dans une nature biologique qui est elle-même une construction sociale naturalisée » (P.Bourdieu, La domination masculine, Liber, Paris, 1998)

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3-Les deux âges du féminisme…et du sport féminin : 3.1-De la fin du 19ème aux années folles, premier âge du sport et du féminisme : « De par son anatomie spéciale, la femme est incapable des efforts que comporte tout sport (…) Il semble oiseux d’insister sur ce point qu’un sport n’est point un jeu de femme » (Dr Héricourt, La femme dans le sport moderne, in La revue des deux mondes, 1900) -1903, mouvement des suffragettes en Angleterre -1906, création à Lyon de la société féminine de natation « l’ondine », avec comme devise « l’émancipation féminine » -1912, création du club « fémina sport » -1920, droit de se syndiquer sans l’autorisation de son mari. -1924, alignement de la scolarité et des diplômes par E.Herriot. -1921, 70 associations sportives féminines, env 5000 licenciées. -1922, premier jeux mondiaux féminins -1928, première participation officielle aux JO « Une femme n’a pas moins besoin d’activité qu’un homme (…) elle doit être en bonne santé et vigoureuse. C’est une exigence de la maternité. (…) La femme n’est point construite pour lutter mais pour procréer » (Dr Maurice Boigey, Manuel scientifique d’EP, 1922)

3.2-Des années 30 au début des années 60, mer calme ou creux de la vague ? « La querelle du féminisme a fait couler beaucoup d’encre, à présent elle est à peut près close : n’en parlons plus » (S. de Beauvoir, Le deuxième sexe, 1949) -1938, la femme n’est plus tenue au devoir d’obéissance à son mari. -1944, droit de vote et éligibilité. « Le but de l’exercice physique chez la femme est de la mettre à même de franchir plus aisément l’épreuve de la maternité. Nous voulons former des femmes saines qui nous garantissent une postérité robuste » (Dr Friedrich, Le corps et le sport : les bases biologiques de l’EP, Paris, 1954)

3.3-Des années 60 aux années 80 : deuxième âge du sport féminin et du féminisme : -1959, Loi Berthoin qui autorise la mixité (elle sera rendue obligatoire en 69) -1966, droit d’accéder à une activité professionnelle sans l’autorisation de son mari. -1967, loi Neurwirth autorisant la contraception. -1974, création du Secrétariat d’état à la condition féminine avec Françoise Giroud -1975, Loi Weil IVG -1980, première femme académicienne

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-1981, première femme préfet. -1981, création du Ministère des droits de femmes (Yvette Roudy) -1982, obtention du remboursement de l’IVG par la sécurité sociale -1983, égalité professionnelle

4-Féminisme, domination masculine et sport ; essai d’état des lieux : 4.1-Quelques aspects actuels de la domination masculine :

4.1.1-Dans la sphère privée : -Temps moyen passé par jour aux travaux ménagers en 2000 (Enquête INSEE) :

Célibataires H : 2h13 F : 2h48

En couple H : 2h09 F : 4h12

En couple avec enfant(s) H : 1h30 F :6h40

Temps consacré aux enfants H : 1h50 F : 3h40

-fig 1.

4.1.2-Dans le monde du travail : -%age d’infériorité du salaire féminin par rapport au salaire masculin dans l’Union Européenne : Danemark -11,9% France -23,4% Belgique -16,1% Italie -23,5% Finlande -18,4% Espagne -26,3% Allemagne -23,1% Portugal -28,3% (issus de S.Bosio-valici & M.Zancarini-Fournel, Femmes et fières de l’être, Larousse, 2001)

4.1.3-Dans le monde politique : -fig 2. -Pourcentage de femmes dans les parlements en janvier 2000 : Suède 47% Espagne 21,6% Danemark 37,4% Portugal 18,7% Finlande 37% Royaume Unie 18,4% Allemagne 30,9% Etats Unis 12% Belgique 23,3% Italie 11,1% Suisse 23% France 10,9%

4.1.4-Autres réflexions…

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4.2-De la domination à la violence symbolique : « Plus j’étais traité comme une femme, plus je devenais femme. Je m’adaptais bon gré mal gré. Si j’étais censée être incapable de faire des marches arrières ou d’ouvrir des bouteilles, je sentais, étrangement, que je devenais incompétente. Si l’on pensait qu’une valise était trop lourde pour moi, inexplicablement, je la jugeais telle, moi aussi » (J.Morris, Conundrum, New York, 1974) « Les filles incorporent, sous forme de schèmes de perception et d’appréciation difficilement accessibles à la conscience, les principes de la vision dominante qui les portent à trouver normal, ou même naturel, l’ordre social tel qu’il est et à devancer en quelque sorte leur destin, refusant les filières ou les carrières d’où elles sont en tous cas exclues, s’empressant vers celles auxquelles elles sont en tout cas destinées. La constance de l’habitus qui en résulte est ainsi un des facteurs les plus importants de la constance relative de la structure de la division sociale du travail » (P.Bourdieu, La domination… , ibid.) « Elles sont condamnées à donner à chaque instant les apparences d’un fondement naturel à l’identité minorée qui leur est socialement assignée » (P.Bourdieu, ibid.) « Le bonheur d’être femme jusque dans la subordination a été chanté surtout par des femmes, éprises jusqu’à la mystique de leur propre quiétude » (Michelle Perrot, Préface de Un siècle…, ibid) « Le fait est que les hommes rencontrent chez leur compagne plus de complicité que l’oppresseur n’en trouve habituellement chez l’opprimé ; et ils s’en autorisent avec mauvaise foi pour déclarer qu’elle a voulu la destinée qu’ils lui ont imposée » (S. de Beauvoir, Le deuxième sexe, 1949) -« Où se sent-on plus en sécurité qu’au bout d’un laisse ? » (Françoise Giroud, cité par C.Bard, Le triomphe du familialisme, in Un siècle, ibid) -Michel Bozon, Les femmes et l’écart d’âge entre conjoints : une domination consentie, 1990

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4.3-Un sport à l’image de la société :

4.3.1-Sport et travail, la part des femmes :

Classement des fédérations sportives olympiques ayant le plus grand nombre de licences femmes 1963 1970 1980 1990 Nombre de fédérations olympiques 22 22 25 27 Ski 1- 110.219 1- 232.642 2- 237.123 2- 223.889 Sports équestres 2- 26.819 3- 42.640 4- 75.802 4- 111.925 Gymnastique 3- 21.907 4- 41.763 6- 66.126 6- 78.000 Basket-ball 4- 21.712 2- 46.382 3- 147.131 3- 157.594 Natation 5- 13.909 5- 27.867 8- 40.397 7- 68.150 Athlétisme 6- 7.185 6- 21.829 9- 32.951 10- 40.262 Voile 7- 3.863 8- 15.077 11- Volley-ball 8- 3.350 9- 8.818 10- 25.765 9- 48.038 Judo 9- 3.000 7- 20.100 5- 66.339 5- 91.103 Hand-ball 10 -2.514 10- 8.555 7- 48.121 8- 60.933 Tennis N.O N.O 1- 304.158 1- 456.881 Total des 10 premières fédés 214.478 465.673 1.043.913 1.336.775 Total général licences f S.O 220.630 478.554 1.131.619 1.398.782 Total général licences f tt fédés 665.622 1.192.533 2.927.644 3.177.915 %age 10 premières fédé S.O/tot S.O 97,21 97,30 92,25 95,57 %age 5 premières fédé S.O/tot S.O 88,19 81,77 73,40 74,45 (Chiffres issus de P.Arnaud, Le genre ou le sexe ?…,ibid) 4.3.2-La phallocratie sportive : 4.3.3- Le rôle des médias : « Soumises par le regard des hommes, les sportives sont jaugées à l’aune de leur féminité autant qu’elles sont évaluées en fonction de leurs résultats » (F.Baillette et F.Liotard, Construction de la domination sportive, in Sport et virilisme, Quasimodo et Fils, Montpellier, 1999)

4.3.4-Un milieu particulièrement sexiste :

4.3.5-Le sport, un refuge pour mâles en crise ? -Anne Saouter, La maman et la putain. Les hommes, les femmes et le rugby, Terrain n°25, 1995. « Le sport –pratiqué, regardé, discouru- est et demeure fondamentalement constitutif de l’identité virile » (C.Louveau, ibid)

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4.4-Le sport, élément de la violence symbolique subie par les femmes : « Nous nommons virilisme cette idéologie de la virilité, entendue comme le caractère de ce qui –dans le masculin- établit, accrédite, propage et renforce l’idée d’une supériorité des hommes sur les femmes. Ce caractère se fonde sur la croyance en une différence de nature entre les deux sexes et sélectionne les éléments propres à alimenter la hiérarchie homme/femme » (F.Baillette et F.Liotard, introduction, Sport et virilisme, ibid) « le propre d’une idéologie dominante, c’est qu’elle n’est même plus identifiée. Elle s’impose dans sa lumineuse évidence » (Françoise Thébaud et C.Bard, Les effets antiféministes de la Grande Guerre, in Un siècle…, ibid) « Les valeurs sur lesquelles repose ce sport (compétition) sont celles-là mêmes qui contribuent à perpétuer l’exploitation, l’oppression et l’aliénation de la femme : compétition, rendement, sélection, hiérarchie, sexisme, virilité exacerbée, culte du muscle et de la réussite, etc. Ce n’est pas par le sport de compétition que les femmes pourront s’émanciper, mais par la lutte pour un autre statut dans la société » (Quel corps ? Quelques réflexions sur le sport féminin, in Quel corps ? n°12/13, janvier 1979) 4.5-Le sport, une émancipation conservatrice ? 4.5.1-Le sport féminin, expression de la situation de domination : 4.5.2-Etre sportive et féministe : une contradiction ? « Le sport reste la seule occupation humaine où les femmes acceptent le principe qu’elles sont inférieures à l’homme et incapable de concourir avec lui » (Jean Girodoux, Le sport, Grasset, 1928) « l’EP et le sport dotent les fillettes et les jeunes filles d’une santé et d’une force qui, sans nuire à leur grâce naturelle, les rendent plus aptes à remplir dans l’avenir le devoir social qu’on attend d’elles » (A.Milliat cité par P.Arnaud in Le militaire, l’écolier, le gymnaste, 1986) « n’oublie jamais ta mission de femme. Tu aimes le stade, préfère-lui la maison » (M.T.Eyquem, reprenant les consignes des sportives catholiques, La femme et le sport, 1944) « Soyez cyclotouristes tant que vous voudrez, mais ne devenez jamais cyclistes. On a vu en France, des femmes se pencher sur des vélos de course, casque en tête, et pédaler aveuglément contre la montre ou sur des distances trop longues. Les femmes sont résistantes, certes, mais le démon de la compétition en des épreuves de ce genre, leur fait outrepasser leurs forces. La bave à la bouche, à l’arrivée, elles s’effondraient. Folie ! » (M.T.Eyquem, le femme et le sport, 1944) « Si les revendications féministes couvrent un champ extrêmement vaste et diversifié, elles occultent totalement le sport ». (P.Arnaud, Le genre ou le sexe ?…, ibid) « Il y a peu de féministes militantes parmi les sportives ; de même n’y a-t-il guère d’allégations au sport dans les actions et mouvements féministes » (C.Louveau, in C.Louveau et A.Davisse, ibid)

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« La femme-athlète est une anomalie sociale (…) Pour accentuer sa féminité elle peut se vêtir de façon adéquate, ne pas prendre le sport au sérieux, rechercher ce qu’on appelle des disciplines sportives plus acceptables, ou encore réaffirmer les valeurs féminines de la société. De tous temps, la sportive s’est efforcée de se conformer aux caractéristiques féminines désirables » (Patricia Del Rey, L’apologie de la sportive, in Sport et femme, C.Oglesby, ibid) 4.6-Etre performante et rester femme, l’impossible performance ? « Les femmes ont sans doute prouvé qu’elles étaient à la hauteur de presque tous les exploits dont les hommes sont coutumiers, mais elles n’ont pas réussi à établir qu’en ce faisant, elles soient demeurées fidèles aux conditions nécessaires de leur existence et dociles aux prescriptions de la nature » (P.De Coubertin, l’Education des jeunes filles, in revue Olympique, 1902) 4.6.1-Les obstacles dans l’accès à l’élite :

5-Sports masculins et sports féminins ; quelques constats : 5.1-Des sports « féminins » et des sports « masculins » :

Sports largement féminisées et qui ont de longue date été investies

par les femmes

Sports moyennement féminisés

Sports peu féminisés dans lesquels les

effectifs féminins ont progressés

Sports dit de « tradition masculine »

-Gymnastique sportive et d’entretien -Danse -GRS -Sports équestres -Aérobic …

-Sports de glace -Ski -Natation -Golf -Tennis -Basket ball -Volley ball -Hand ball -Athlétisme …

-Aviron -Voile -Canoë-Kayak -Ski nautique -Tir à l’arc -Judo …

-Pratiques à forte implantation régionale (pelote Basque, joutes…) -Football -Rugby -Cyclisme -Boxe -Lutte -Haltérophilie -Sports mécaniques -Surf …

5.2-La place des représentations : -fig 3.

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5.3-l’Effet de l’âge : -part des filles dans les fédérations sportives scolaires et universitaires :

USEP UNSS FNSU 48% 43% 23%

5.4-l’Effet de la classe : -taux de pratique en fonction de la CSP :

Cadres et professions intellectuelles

ouvrières Agricultrices

90% 57% 49% -taux de pratique en fonction du capital économique :

Gagne plus de 10.000f/mois Gagne moins de 4.000f/mois 78% 52%

-taux de pratique en fonction du niveau d’étude : Bac+2 et plus CAP et moins

90% 53% -taux de pratique en fonction du lieu de vie :

Paris Agglomérations de moins de 2000 hab. 82% 65%

-taux de pratique en fonction du nombre d’enfants : Pas d’enfant 4 enfants ou plus

79% 55% « Dès lors que l’on s’autorise à sortir de chez soi pour exercer un métier, il reste vraisemblablement moins de chemin à parcourir pour s’autoriser à sortir de chez soi pour les loisirs » (C.Louveau, ibid)

6-Les logiques de différenciations hommes/femmes : 6.1-Intérieur/extérieur 6.2-être/paraître « La domination masculine, qui constitue les femmes en objets symboliques, dont l’être est un être-perçu, a pour effet de les placer dans un état permanent d’insécurité corporelle ou, mieux, de dépendance symbolique : elles existent d’abord par et pour le regard des autres » (P.Bourdieu, La domination…, ibid) « Une olympiade femelle est impensable : elle est impraticable, inesthétique et incorrecte » « Si les femmes sont soigneusement dégagés de l’élément spectacle, il n’y a aucune raisons de les proscrire » (P.De Coubertin, Pédagogie sportive, 1922)

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« Mag Vincelot dit dans son lire « Sois belle » que la femme a le devoir d’être belle. Laissez-moi y ajouter le message des auteurs : elle se doit en plus d’être sportive » (Prince Alexandre de Mérode, Vice président du CIO, préface de La femme et le sport en questions, Dr L.Broeckoert (comité olympique Belge) et Dr L.Baeyens, Acco, 1990) « D’une façon plus générale, pour un homme, « être en forme », c’est posséder des qualités organiques invisibles ou cachées qui le prédisposent à l’action, tandis que pour une femme, « être en forme », c’est au sens étymologique, (re)trouver la beauté corporelle telle qu’elle est définie par les canons en vigueur dans la classe dominante » (C.Louveau, La forme, pas les formes ! Simulacres et équivoques dans les pratiques physiques féminines, in Sport et société, C.Pociello, Vigot, 1981) « C’est l’image qu’elle donne d’elle même qui fait la femme, comme c’est l’action qui fait l’homme » (P.Bourdieu, La domination masculine, Liber, Paris, 1998) 6.3-L’axe fondamental : passivité/activité : « Être un homme implique un travail, un effort qui ne semble pas être exigé de la femme. (…) Devoir, preuves, épreuves, ces mots disent qu’il y a une véritable tâche à accomplir pour devenir un homme » (E.Badinter, XY de l’identité masculine, Odile Jacob, Paris, 1992) « Imprégné de féminin durant toute sa vie intra-utérine, puis identifié à sa mère aussitôt né, le petit mâle ne peut se développer qu’en devenant le contraire de ce qu’il est à l’origine » « L’homme viril incarne l’activité. (…) L’intériorisation des normes de la masculinité exige un surplus de répression des désirs passifs, notamment celui d’être materné » (E.Badinter, ibid.) « Etre un homme est la bataille sans fin de toute une vie » (N.Mailer, Prisonnier du sexe, Laffont, 1971) « Ce n’est pas la mère qui engendre ce qu’on appelle son enfant : elle n’est que la nourrice du germe versé dans son sein ; celui qui engendre, c’est le père. La femme comme un dépositaire étranger reçoit le germe et s’il plaît aux dieux elle le conserve » (Apollon, Les Euménides d’Eschyle, cité par S. de Beauvoir, ibid.) « Elle ne fait pas vraiment l’enfant : il se fait en elle ; sa chair engendre seulement de la chair » (S. de Beauvoir, Le deuxième sexe, 1949) 6.4-Des motricités symboliques : 6.5-Nature et culture toujours en débat : « la notion de conformité du jeu à un rôle sexuel est déjà intégré à 1 ans » (Susan Greendorfer, ibid) -fig 4.

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« Dans les collèges ou lycées, tandis que des filles pratiquent le rugby ou la lutte, des garçons du même âge ou plus jeunes sont initiés et souvent perfectionnés à la danse classique. Cette situation peut, à l’évidence, provoquer certains troubles psychologiques chez de jeunes adolescents encore à la recherche de leur véritable identité (Q° écrites aux parlementaires de Mr Eric Raoult, JO du 28 janvier 1991, cité par A.Davisse, ibid)

7-Conclusion : -Pour en savoir plus : -C.Louveau et A.Davisse, Sport, école, société : la différence des sexes, Paris, l’Harmattan, 1998. -F.Baillette et P.Liotard, Sport et virilisme, Montpellier, Quasimodo et fils, 1998. -P.Bourdieu, La domination masculine, Paris, Liber, 1998. -S. de Beauvoir, Le deuxième sexe, 1949 (Ed Folio, 2001) -E.Badinter, XY, de l’identité masculine, Paris, Odile Jacob, 1992. -C.Bard (dir), Un siècle d’antiféminisme, Paris, Fayard, 1999. -P.Arnaud et T.Terret (dir), Histoire du sport féminin, Paris, l’Harmattan, 1996 (Tome 2 en priorité)

-E.Dunning, Le sport, fief de la virilité, in Sport et civilisation, E.Dunning et N.Ellias, Fayard, Paris, 1998 -Quel corps ? Quelques réflexions sur le sport féminin, in Quel corps ? n°12/13, janvier 1979 (in J.P.Escriva et H.Vaugrand, L’opium sportif, la critique radicale du sport de l’extrême gauche à Quel corps ? Paris, l’Harmattan, 1996.)

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1-Introduction : 1.1-Jeunesse en difficulté et classe populaire : « La « banlieue », la cité, c’est le chômage, la chute sociale, la perte de repères sociaux et quand l’identité ne peut plus se construire à partir d’un statut socio-économique, les individus se rabattent sur l’identité spatiale, comme seule stratégie de survie dit-on » « la culture ouvrière reconnaissait une place et une fonction spécifique à la jeunesse dans la participation à la vie de la communauté. Il existait donc une forme spécifique de citoyenneté attachée à un âge de la vie (…) Or ces pratiques n’existent plus » (P.Chantelat, M.Fondimbi, J.Camy, Sports de la cité, anthropologie de la jeunesse sportive, Paris, l’Harmattan, 1996) « La jeunesse, à l’instar de la population ouvrière du 19ème siècle, est stigmatisée comme « classe dangereuse », porteuse de logiques déviantes, anomiques » (M.Clément, Sport et intégration, in J.M.Legras, M.Clément, Sport et société, tome 1 CNFPT, 1993) 1.2-Culte de l’individualisme et violence symbolique : -Les jeunes des quartiers défavorisés ont « pour seule référence la réussite individuelle, dans un contexte dépourvu de valeurs hormis celles de l’argent et de la flambe » (P.Duret et M.Augustini, Sports de rue et insertion sociale, Paris, INSEP, 1993) « La crise a aussi gagnée le monde sportif, il ne subsiste plus que quelque grands clubs, la vie associative est désertée petit à petit par les jeunes au profit de pratiques consuméristes à court terme où seule la recherche du plaisir individuel prédomine » (J.P Gars et M.Diallo, intervenants DDJS et Mission locale à Boulogne, cités par D.Charrier, APS et insertion des jeunes : enjeux éducatifs et pratiques institutionnelles, Paris, La documentation française, 1997) « Etre exclu cela revient avant tout à être rejeté et à en avoir honte. La honte appartient à ces méta-sentiments supposant que l’exclu accepte sa stigmatisation et le jugement de la société. Il le reprend à son compte au point d’avoir du mépris pour lui-même » (P.Duret, in Table ronde, in C.Louveau et A.M.Waser (dir) Sport et cité, pratiques urbaines, spectacles sportifs, Université de Rouen, 1999)

Sociologie – LicenceChapitre n°4

Sport et Cité : Désordre social ou nouvelle

citoyenneté ?

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2-Sport, ville, citoyenneté, la nouvelle donne des années 80 :

2.1-Le sport dans la rue : -Dans les années 80, le sportif de rue devient un « exhibitionniste » (P.Chantelat, Usages sportifs de la ville, spirales n°5, 1992)

2.2-Le rôle du politique :

2.2.1-Réagir dans l’urgence, Les opérations « anti été chaud » :

2.2.2-Agir à long terme, les équipements de proximité « J Sport » : -Pratiques concernées par les équipements « J Sport » :

1991 446 équipements

1992 1016 équipements

Sports collectifs Terrains polyvalents Skate board Football Escalade Sports de combat Basket ball Bicross Tennis de table Tennis et divers

56,5% 11% 13% 7,5% 6%

2% 2% 2%

27% 32% 10% 8% 6% 4% 3% 2% 2% 6%

2.2.3-Un bilan critique :

-F.Chobeaux, L’occasion ratée des « J Sports », aventure d’une intervention politique sur les espaces urbains, in Sport, relations sociales et actions collectives, 1993. « A quand les braquages et les prises d’otages pour obtenir un panneau de basket et une table ping-pong en béton…C’est pas ça l’action sociale. On donne contre rien, à fond perdu. Après ça devient un droit » (Educateur du quartier de l’Alma, Grenoble, cité par J.C.Basson, Sports de rue et politiques sportives territoriales, in C.Louveau et A.M.Waser, Sport et cité, ibid) « Tout semble se passer comme si les acteurs publics regrettaient l’attentisme des jeunes qui, de leur côté déplorent qu’on ne leur permette pas de prendre une part active à la mise en œuvre de la politique sportive » (J.C. Basson, ibid) -La politique menée par F.Bredin de 91 à 94 en direction des quartiers « répondait à la nécessité d’inventer de nouvelles « mission » pour administration désormais en crise d’identité et menacée de démembrement » (L.Arnaud, La politique de la ville au secours du ministère J&S (1983-1993) ?, in C.Vivier & J.F.Loudcher (dir), Le sport dans la ville, l’Harmattan, Paris, 1998)

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3-Les pratiques sportives de rue, « sport dans la ville ou sport de la ville » ? 3.1-Quelques caractéristiques communes : 3.1.1-Le sport de rue, un territoire masculin :

Normalité accordée aux comportements par les « grands frères »

En fonction du statut de la fille

« Est-ce que tu trouve normal… »

En fonction de l’âge du grand frère

« Est-ce que tu trouve normal qu’une fille en général… »

n = 34

D’une fille en général

D’une sœur

Grands frères de 15 à 17 ans (n=20)

Grands frères de 18 à 19 ans (n = 14)

Se promène seule Aille seule en boîte Aille seule faire les courses Aille seule faire du sport Ait envie de faire du body-building Ait envie de faire du full contact Prenne la pilule Rentre à l’heure qu’elle veut Aille au café Sorte avec plusieurs garçons à la fois Parte en camp de vacances seule Couche avec un garçon Porte une minijupe Vive avec un garçon

82.4 38.2 76.5 64.7

23.5

29.4 67.6 8.8

23.5

0

52.9 47.1 79.4 20.6

67.6 23.5 61.8 61.8

14.7

20.6 44.1 8.8 2.9

0

20.6 20.6 61.8 5.9

70 15 65 55

10

25 60 0

10

0

40 35 70 10

100 71.4 92.8 78.5

42.8

42.8 78.5 21.4 42.8

0

71.4 64.2 92.8 35.7

-Tableaux issus de P.Duret & M.Augustini, Sports de rue et insertion sociale, ibid. 3.1.2-Individualisme dans le sport comme dans la vie : « La valorisation de l’exploit technique et du fait individuel sont deux caractéristiques des pratiques auto-organisées » « l’excellence sportive est pour ces jeunes l’exploit individuel » (P.Chantelat, M.Fodimbi, J.Camy, ibid) « le skate demeure très marqué du sceau de l’individualisme. Le skater dit de sa pratique ce que le basketteur de rue dit de la sienne : « on skate d’abord pour soi » » (Michel Fize, Le skate-board : nouvelle forme de sociabilité sportive d’adolescents en milieu urbain, in Sport, relations sociales et actions collectives, 1993) « Le gain symbolique est d’autant plus grand que l’action est spectaculaire » (G.Vieille-Marchiset, Culture et sociabilité sportive des basketteurs de rue : entre liberté et dissidence, in C.Vivier et J.F.Loudcher, le sport dans la ville, Paris, l’harmattan, 1998).

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3.2-Pratique de rue emblématique, le Basket : -Tableau résumé des oppositions entre BB de rue et BB fédéral, G.Vieille-Marchiset, ibid :

Basket de rue Basket fédéral Vigoureux-virulent-parfois brutal Libre Autonome Apprentissage par imitation Création Spontané Sociabilité de proximité Instinctif Hors temps, temps ludique Espace labile, changeant Spectaculaire Provocation, défi

Discipliné Coercitif Dépendant (entraîneur, arbitre) Apprentissage par application Rigueur Construit Sociabilité associative Académique Quadrillage du temps Espace très structuré Efficace et « direct » Coopération-organisation

-Tableau comparatif du BB de rue et du BB de compétition traditionnel, P.Duret et M.Augustini, ibid : Compétition traditionnelle Sport de rue Temps quotidien En rupture En continuité Temps de préparation Entraînement (horaires et

fréquences fixes) Pas d’entraînement

Règlement standardisé Négociable organisation Par championnat, hiérarchisation

des épreuve Par défi, Non hiérarchisation des épreuves

Diffusion des résultats Presse, télé Rumeur Temporalité sur l’année calendrier Au coup par coup 3.3-Foot pied d’immeuble et basket de rue, une logique commune : 3.3.1-Le rapport à l’espace : -Contrairement à ce que pensent Chantelat, Fodimbi et Camy (ibid), A.Blondé écrit que « Le playground appartient à un quartier. (…) Ne viens pas sur le terrain de Basket qui veut ; il faut habiter le quartier, vivre dans le périmètre, appartenir en somme à la communauté de l’endroit » (A.Blondé, le Basket en liberté, rev EPS n°242, juillet-août 1993)

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3.3.2-Le rapport aux autres : « l’appartenance à telle ou telle minorité ethnique n’est pas revendiquée, elle ne constitue pas un principe fondateur ou organisateur de ce type de pratique sportive » « Les groupes de jeunes sportifs apparaissent sans espaces de références fixes, qu’il s’agisse de l’unité spatiale du quartier ou de l’unité ethnique. Ils surfent sur la territorialité mais ne s’y arrêtent pas. Ils sont d’un quartier, d’une ville, d’une ethnie, d’une classe d’âge…mais aucun de ces éléments ne constitue un point d’ancrage fort pour la construction de leur identité » (P.Chantelat, M.Fodimbi, J.Camy, ibid) -Comparaison sport pied d’immeuble, « Haut lieu » et club, P.Chantelat et call, ibid :

Pied d’immeuble Haut lieu Club Rapport à l’espace Déplacement dans la

ville Espaces interchangeables

Déplacement central qui donne sens à la pratique Espaces non interchangeables

Déplacements sur des lieux standardisés et interchangeables

Rapport au temps Circulaire-Détente semaine

Circulaire-linéaire Détente-progrès Extraordinaire, week-end

Linéaire-Progress Semaine, week-end

Rapport à l’autre Sociabilité communautaire et sociétaire Duel Egalité des chances de participer et de gagner

Sociabilité urbaine Duel Egalité des chances de participer et de gagner

Sociabilité « forcée » Collectif Inégalité des chances de participer et de gagner

Rapport au corps, excellence sportive

Virtuosité Esthétique plaisir

Virtuosité Esthétique plaisir

Efficacité Résultat Travail

Rapport au sport ludique Ludique-sérieux Sérieux 3.3.3-Des pratiques de la ville : « Les pratiques sportives auto-organisées se situent dans le registre des sociabilités urbaines. La non appartenance à une bande, la multifonctionnalité des groupes, la non territorialisation des pratiques sur l’espace du quartier ou de la communauté indiquent le caractère fluide et adaptatif caractéristique de la sociabilité urbaine » (M.Fodimbi, Villes et sociabilités sportives, in C.Louveau & A.M.Waser, ibid)

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3.3.4-Un retour vers les jeux traditionnels ? -Tableau de B.During, Des jeux aux sports, Paris, Vigot, 1984.

Jeux traditionnels Sports anglais Espace Lieu de vie, peu ou pas

définis. Surtout en ville, terrains, précis, mesuré

Temps Calendrier des fêtes ou événements (mariage…) Pas de mesure du temps

Calendrier spécifique, fédéral Chronométrage, record

Joueurs/public Classe d’age, groupes sociaux, ensemble de la pop. Public = participants

Catégories d’age, de niveaux, spécifique au sport. Public = participants

Règles Souples, locales Précises, institution, universelles Techniques Non spécifiques Spécifiques Apprentissage Néant Entraînement, aspect éducatif Violence Risques

Très forte Importants

Variable et réglementée(dosée) Bannis autant que possible

« Si le sportif du 19è siècle est un homme nouveau au sens où il naît contre le rituel et comme homme de projet, s’il est un ascète rationnel (Weber), le sportif urbain contemporain renoue en quelque sorte avec le jeu, le rituel, l’incertitude, le non finalisé ». (Chantelat, Fodimbi, Camy, ibid) 3.4-Skate-board et roller : -Eric Adamkiewicz, Nouvelles pratiques et sports autonomes dans la ville. Création de nouveaux types de relations à l’urbain. L’exemple lyonnais, in C.Vivier & J.F.Loudcher, ibid. -Michel Fize, Le skate-board : nouvelle forme de sociabilité sportive d’adolescents en milieu urbain, in Sport, relations sociales et actions collectives, 1993. 4-Sport et intégration, le sport pour la cité : 4.1-Insertion, intégration, socialisation… des termes interchangeables ? -Insérer : « s’intégrer, s’intercaler, s’introduire » -Socialisation : « Processus par lequel l’enfant intériorise les divers éléments de la culture environnante (valeurs, normes, codes symboliques et règles de conduite) et s’intègre dans la vie sociale » -Intégrer : « Opération qui consiste à assembler différentes parties d’un système et à assurer leur compatibilité ainsi que le bon fonctionnement du système complet » (Définitions du Petit Larousse, 1999)

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4.1.1-Insertion et intégration : « Le choix des mots a donc un sens : intégration vise à créer les conditions d’une adhésion des membres d’une collectivité à ses valeurs, ses règles communes. L’intégration exige donc un minimum de consensus (…) L’insertion en revanche, renvoie à une vision plus violente de l’intégration, fondée sur une sorte d’acculturation généralisée » (P.Arnaud, sport et intégration : un modèle français, spirales 10, 1996) 4.1.1.a-L’intégration républicaine à la française : « L’intégration est un processus spécifique suscitant la participation active à la société nationale d’éléments variés et différents. (…) L’intégration a pour objectif de faire entrer les jeunes dans la société française contemporaine, avec son histoire et ses valeurs, en l’enrichissant par de nouveaux apports. Les politiques d’intégration visent à rattacher à un tout, à une idée unitaire de la société des population étrangères » (Haut commissariat à l’Intégration, rapport sur le développement personnel et l’intégration sociale des jeunes par les loisirs, 1995) 4.1.2-Paradigmes et conceptions de la socialisation : -Pour le paradigme déterministe : « La société est intériorisée progressivement par les individus notamment sous la forme d’habitudes corporelles, de schèmes de pensées et de perception, de représentations, de normes, de règles de conduites et de valeurs. Ce processus s’effectue pour une large part à l’insu des individus. Là, le lien social s’impose pour ainsi dire du dessus aux individus ». --- -Pour le paradigme individualiste : « Le lien social suppose un travail actif des individus, un constant travail d’ajustement mutuel, des opérations incessantes d’interprétation de la situation où ils interagissent. Le lien social n’est pas préexistant à ces situations ; il est construit dans et à travers elles » (P.Garnier, critique des théories de la socialisation, du stade au quartier, le rôle du sport dans l’intégration sociale des jeunes, IDEF, 1992) « la société n’existe plus a priori, mais uniquement dans la réalité sociale constituée après un travail d’ajustement commun entre adultes et jeunes. Cette position remet en cause les écrits de Durkheim ainsi que ceux de Piaget où les enfants sont censés accéder à la compétence morale en passant par une série de stades » (P.Duret et M.Augustini, ibid) 4.2-Sport et Intégration sociale, une réalité ? 4.2.1-Des postulats peu discutés : « Le club est une petite famille, une petite patrie » (M.Baquet, Education sportive, initiation, entraînement,1942) « l’intériorisation de la règle sportive doit conduire à intérioriser la règle sociale » (M.Clément, Sport et société, ibid)

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4.2.2-Des effets évalués ? -D.Charrier, APS et insertion des jeunes : enjeux éducatifs et pratiques institutionnelles, Paris, La documentation française, 1997.

4.2.2.a-La re-mobilisation personnelle : 4.2.2.b-La création de réseaux sociaux : 4.2.2.c-La régulation du climat social : 4.2.2.d-L’acquisition d’une capacité économique :

« Le sport n’est pas intégrateur « par nature ». Le contexte local, les choix stratégiques et les « manières de faire » sont décisifs » (D.Charrier, ibid) « le sport n’est pas éducatif en lui même, il le devient » (M.Baquet, ibid)

4.2.2.e-Le problème de l’encadrement : 4.3-Sport et intégration sociale, un mythe ? 4.3.1-Des capacités intégratrices mises en question : 4.3.1.a-Reconnaître la richesse des sociabilités des sports de rue : « C’est bien la culture sportive légitime qui est ici interpellée pour constituer le ciment de l’intégration. Et cela par la diffusion d’un discours lénifiant sur le sport qui repose sur des poncifs dont l’évidence apparente ne suscitent pas la discussion » (P.Arnaud, Sport et intégration, ibid) -P.Chantelat et call critiquent le fait que dans la conception classique de l’intégration sociale par le sport, « Il convient de les faire passer (les jeunes en difficulté) au « stade supérieur » de la socialisation, c’est à dire les insérer dans des associations ou clubs sportifs dépositaires d’une forme de sociabilité et de citoyenneté supérieure ». « la politique d’équipements de proximité telle qu’elle est pensée est en complet décalage avec les usages juvéniles de ces installation » (P.Chantelat et call, ibid)

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-Tableau de P.Chantelat et call, ibid : Les fondements de la

politique La logique des pratiquants

Conception de la ville Mosaïque de quartiers homogènes

Quartiers ouverts et hétérogènes

Usages juvéniles des équipements de proximité

Conquête-défense de l’espace approprié Mobilité géographique faible

Partage d’un espace commun Mobilité géo forte

Socialisation des groupes Forme simple Non intégrés à la ville Réseaux étroits

Forme complexe Intégrés à la ville Réseaux larges

« Parler des logiques d’accomplissement de la jeunesse « favorisée » comme d’une norme comportementale à atteindre, c’est prendre le risque de légitimer un ordre social que le sociologue est censé interroger » (P.Chantelat et call, ibid) 4.3.1.b-Critiquer le modèle d’apprentissage de la citoyenneté par le club sportif : « Pour résumer, en forçant le trait, on pourrait dire, à partir de la définition de la citoyenneté adoptée, que l’association sportive présenterait une sorte de pseudo-citoyenneté quand les pratiques sportives auto-organisées exerceraient, quand à elles, déjà une forme de citoyenneté » « Concevoir la citoyenneté (locale) comme un débat public concret entre citoyens et pouvoirs publics mettant en œuvre un processus dynamique de reconnaissance mutuelle, ne se fonde pas sur l’opposition apprentissage/exercice et ne préjuge pas de l’âge des acteurs sociaux et de leur capacité à être citoyens » (P.Chantelat et call, ibid)

4.3.1.c-Le sport, une école de maîtrise de soi ou de violence ? Agressivité B’ A B A’ Avant Après (A = pratique du dessin, B = pratique de la lutte)

« La pratique sportive n’a pas, en soi, de propriété cathartique, mais au contraire son influence naturelle est la déshinibition des réponses agressives » (R.Pfister, le sport et la catharsis de l’agressivité, in Psychopédagogie des APS, P.Arnaud et R.Broyer, Toulouse, Privat, 1986)

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-Nombre moyen de comportements transgressifs en match (hand-ball) sur 10’ de jeu en fonction de l’âge. -11-13 ans : -16-19 ans : 8,78 20,46 -Proportions des violences affectives et rationnelles.

Aff. Rationnelles Aff. Rationnelles 2,78 6 4.46 16 (Chiffres issues de O.Rascle, G.Coulomb, C.Sabatier, Le sport scolaire est-il en danger ? in rev EPS n°271, Mai-juin 1998) 4.3.1.d-Autres critiques : « le sport, pas plus que le religieux ou le politique, ne peut prétendre véhiculer des valeurs dont notre société est aujourd’hui orpheline. (…) le système sportif, malgré ses héros, est trop englué dans ses aspirations économiques et ses conflits internes pour offrir inconditionnellement une image immaculée où la vertu serait l’unique moteur de la performance » (Betty Mercier-Lefevre, La cité, la morale et le sport, in sport et cité, ibid) « Suivant une stratégie de communication désormais banale en politique, consistant à définir le problème en fonction du type d’intervention que l’on souhaite légitimer, le ministère a multiplié entre 1991 et 1993 les appels d’offres et les colloques sur le thème du sport et de l’insertion » « L’explication des problèmes rencontrés par les jeunes des quartiers déshérités en terme d’anomie et de démotivation permet de créditer du coup une politique en termes de programmes sportifs censés redonner du « punch » à cette jeunesse en perdition » (L.Arnaud, La politique de la ville au secours du ministère J&S (1983-1993) ? ibid) 4.3.2-Critiques radicales, sport et politique en question : « Dans ces conditions, le sport apparaît comme une vitrine médiatique commode pour les pouvoirs publics : sa « neutralité » bienveillante en fait un moyen d’intervention consensuel qui élude avantageusement les vraies questions liées à la pérennité du chômage où l’aggravation de la fracture sociale. Donner du sport à tous, c’est à la fois se disculper de ne pas avoir « tout essayé » et développer une stratégie « philanthropique » tout en légitimant les dysfonctionnement de la société néo-libérale »

« Le sport est ainsi naturellement appelé à jouer le rôle de modèle idéologique : les Luis Fernandez, Y.Noah et autres M.Tyson démontrent que même les plus humbles, les exclus ont la possibilité d’accéder à la réussite. Il suffit de s’en donner la peine et de respecter les règles. La rencontre du néo-libéralisme et de l’Etat-Providence à la française conduit à réinterpréter la politique sociale : celle-ci ne doit pas s’immiscer dans le monde du marché mais se limiter à en amortir les effets négatifs » (L.Arnaud, La politique de la ville…, ibid)

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« La compétition sportive, résout en imagination (…) ce dilemme central de la condition démocratique, la tension entre l’égalité de principe des hommes et leur inégalité de fait ». (A.Ehrenberg, Le culte de la performance, Paris, Calman-Levy, 1992) « Le sport a une fonction de légitimation de l’ordre établie, en tant que système positiviste, il n’est jamais contestataire mais toujours intégrateur » (Quel corps ? n°1, 1975) « Le sport est un puissant moyen de mise en condition politique, et l’on peut tout parfaitement lui appliquer la dénomination d’opium du peuple » (P.Laguillaumie, Pour une critique fondamentale du sport, in Sport, culture et répression, Partisans, 1968) « Que la jeunesse bourgeoise et la jeunesse prolétarienne s’abreuvent à la même source de joie musculaire, voilà bien là l’essentiel, qu’elles s’y rencontrent ce n’est présentement que l’accessoire. De cette source découlera pour l’une comme pour l’autre la bonne humeur sociale, seul état d’âme qui puisse autoriser pour l’avenir l’espoir de collaborations efficaces » (P.De Coubertin, in Le miroir des sports, 24 novembre 1921) « Il faut mettre le prolétariat en état de culture suffisante. Pour qu’il ait la force de résister à lui même, de faire front à la colère, même légère, contre l’injustice, même flagrante, afin qu’il puisse travailler tenacement, mais calmement à sa propre élévation » (P.De Coubertin, Pédagogie sportive, 1922)

5-Conclusion ; le sport de rue, culture jeune ou sous culture de classe ? « les formes de pratiques développées par les jeunes sportifs des DSU relèvent plus d’une « culture jeune » que d’une sous-culture de classe ou d’une culture « banlieue » » (P.Chantelat et call, ibid) « Le monde adulte inspire alors (à l’adolescence) le rejet, et le club sportif apparaît comme une institution sociale remise en cause au même titre que les institutions plus centrales que sont la famille, l’école et, plus tard, le monde du travail » (J.C.Basson, Sports de rue et politiques sportives territoriales, in Sport et cité, ibid) -Pour en savoir plus : -P.Chantelat, M.Fondimbi, J.Camy, Sports de la cité, anthropologie de la jeunesse sportive, Paris, l’Harmattan, 1996. -P.Duret & M.Augustini, Sports de rue et insertion sociale, Paris, INSEP, 1993. -C.Louveau & A.M.Waser (dir), Sport et cité, pratiques urbaines, spectacles sportifs, Rouen, Ed Université de Rouen, 1999. -C.Vivier & J.F.Loudcher (dir), Le sport dans la ville, Paris, l’Harmattan, 1998. -M.Clément, Sport et intégration, in J.M.Legras & M.Clément, Sport et société, tome 2 CNFPT, 1993 -Michel Fize, Le skate-board : nouvelle forme de sociabilité sportive d’adolescents en milieu urbain, in Sport, relations sociales et actions collectives, 1993. -M.Fize & M.Touche, Le skate : la fureur de faire, Caen, Arcane, 1992. -A.Blondé, le Basket en liberté, rev EPS n°242, juillet-août 1993. -P.Arnaud, sport et intégration : un modèle français, spirales n°10, Lyon, 1996. -D.Charrier, APS et insertion des jeunes : enjeux éducatifs et pratiques institutionnelles, Paris, La documentation française, 1997

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