35
PROGRAMME DEVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI LE SYSTEME BANCAIRE ET LE CREDIT A LECONOMIE NOTE TECHNIQUE AOUT 2015 Cette note technique a été préparée dans le cadre d’une mission du Programme d’évaluation du secteur financier au Mali menée en mars 2015 sous la direction de Mehnaz Safavian (Banque mondiale) et sous la supervision du Pôle Finance et marchés des Pratiques mondiales de la Banque mondiale. Elle présente une analyse technique et des informations détaillées sur lesquelles reposent les conclusions et les recommandations de l’évaluation du PESF. De plus amples informations sur le PESF sont disponibles à www.worldbank.org/fsap. BANQUE MONDIALE POLE FINANCE ET MARCHES DES PRATIQUES MONDIALES Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized Public Disclosure Authorized

PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

  • Upload
    others

  • View
    5

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

PROGRAMME D’EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER

MALI

LE SYSTEME BANCAIRE ET LE CREDIT A L’ECONOMIE

NOTE TECHNIQUE AOUT 2015

Cette note technique a été préparée dans le cadre d’une mission du Programme d’évaluation

du secteur financier au Mali menée en mars 2015 sous la direction de Mehnaz Safavian

(Banque mondiale) et sous la supervision du Pôle Finance et marchés des Pratiques mondiales

de la Banque mondiale. Elle présente une analyse technique et des informations détaillées sur

lesquelles reposent les conclusions et les recommandations de l’évaluation du PESF. De plus

amples informations sur le PESF sont disponibles à www.worldbank.org/fsap.

BANQUE MONDIALE

POLE FINANCE ET MARCHES

DES PRATIQUES MONDIALES

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Pub

lic D

iscl

osur

e A

utho

rized

Page 2: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- i -

Table des matières

Sigles et abréviations ................................................................................................................... iii I. Résumé analytique ........................................................................................................ 4 II. Rappel des faits et contexte .......................................................................................... 6 III. Structure et description générale du secteur bancaire .............................................. 8

IV. Solidité et performance du secteur bancaire ............................................................ 12

V. Cadre juridique, réglementaire et prudentiel .......................................................... 18 VI. Crédits à l’économie et inclusion financière ............................................................. 22

VII. Recommandations ................................................................................................. 32

Graphiques Graphique 1: Croissance sur 5 ans des actifs, des prêts et des dépôts : Source : BCEAO ......10

Graphique 2 : Structure du capital du système bancaire en décembre 2013 (en pourcentage du

total des actifs du système bancaire) ................................................................................11 Graphique 3: Crédit aux cinq principaux emprunteurs en pourcentage des fonds propres .....14

Graphique 4: Décomposition des écarts au Mali et dans l’UEMOA .......................................17 Graphique 5: Répartition sectorielle des crédits (31décembre 2013) ......................................23

Tableaux

Tableau 1: Suites données aux principales recommandations relatives au secteur bancaire

dans le cadre du PESF 2008...............................................................................................7

Tableau 2: Évolution du secteur bancaire ..................................................................................9 Tableau 3: Structure du capital des banques ............................................................................12 Tableau 4 Adéquation des fonds propres aux besoins ............................................................13

Tableau 5 : Liquidité bancaire .................................................................................................16 Tableau 6 : Rentabilité et performance du système bancaire ..................................................17

Tableau 7 : Ratios prudentiels applicables aux banques de l’UEMOA ...................................20 Tableau 8 : Indicateurs d’inclusion financière, pourcentage de Maliens de plus de 15 ans. ...30

Tableau 9 : Indicateurs d’inclusion financière, en pourcentage des adultes de plus de 15

ans ....................................................................................................................................30 Tableau 10 : Principales recommandations .............................................................................32

Appendice 1 : Indicateurs de solidité financière …………………………………………..35

Page 3: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- iii -

SIGLES ET ABREVIATIONS

APBEF Association professionnelle des banques et établissements financiers

BCEAO Banque centrale des états de l’Afrique de l’Ouest

CB Commission bancaire

BIC Bureau d’information sur le crédit

BDM Banque de Développement du Mali

BHM Banque de l’Habitat du Mali

BIM Banque internationale du Mali

BMS Banque malienne de Solidarité

BNDA Banque nationale de développement agricole

BRVM Banque régionale des valeurs mobilières

CCJA Cour commune de justice et d’arbitrage

CMDT Compagnie malienne pour le développement du textile

DGDP Direction générale de la dette publique

FGHM Fonds de garantie hypothécaire du Mali

FI Institutions financières

PESF Programme d’évaluation du secteur financier

PIB Produit intérieur brut

PNB Produit national brut

IFRS Normes internationales d’information financière

FMI fond monétaire international

IMF Institution de microfinance

SIG systèmes d’information de gestion

MPME Micros, petites et moyennes entreprises

OHADA Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires

DSRP Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté

RCCM Registre du commerce et du crédit mobilier

RDA Rendement de l’actif

PME petites et moyennes entreprises

SYSCOA Système comptable ouest-africain

UEMOA union économique et monétaire ouest africaine

UMOA union monétaire ouest africaine

Page 4: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 4 -

I. Résumé analytique

1. Le secteur bancaire malien s’est systématiquement développé au cours des

dernières années, mais il manque encore de profondeur et l’accès aux services bancaires

est limité. Le secteur bancaire constitue l’essentiel du secteur financier malien, puisqu’il

détient environ 97 % des actifs de ce dernier. Le ratio du crédit privé au PIB était de 21,8 %

en 2013, soit une proportion supérieure à la médiane pour l’Afrique (17,4 %) et à la médiane

pour l’ensemble des pays à faible revenu (16,4 %). Le ratio des dépôts intérieurs au PIB, qui

était de 23,1 %, est du même ordre de grandeur que la médiane pour les pays à faible revenu

(23,5 %). Les données de l’enquête indiquent toutefois que l’inclusion financière est moins

développée au Mali que dans les pays comparables.

2. Le secteur bancaire semble, en général, avoir un niveau de capitalisation suffisant

et être rentable, bien que les résultats varient largement selon les banques et que la

qualité des actifs soit médiocre. Les banques semblent, en général, avoir un niveau de

capitalisation suffisant et la norme d’adéquation des fonds propres globale du système (Bâle

I) était de 12,9 % à la fin de 20131, soit un niveau supérieur à la moyenne de l’UEMOA

(10,6 %) ; en juin 2014, toutefois, une petite banque et une banque de taille intermédiaire ne

respectaient pas le ratio d’adéquation des fonds propres minimal de 8 % (Bâle I). Les carences

du système de classification des prêts et de dotation aux provisions, les lacunes de la

réglementation prudentielle et le manque de rigueur dans l’application des réglementations

peuvent toutefois laisser douter de la validité des informations sur la santé et la capitalisation

du système. La concentration des risques, la qualité du crédit et les contraintes de liquidité

grandissantes sont les plus importants facteurs pouvant compromettre la sécurité et la solidité

du secteur. Les banques sont rentables, puisqu’elles affichent un rendement de l’actif de 1,2 %

et une rentabilité des fonds propres de 14,1 %. Les marges brutes d’intermédiation se sont

établies, en moyenne, aux alentours de 8 % au cours des trois dernières années, et évoluent à

la baisse (7,7 % 2013). Elles sont donc inférieures aux médianes pour l’Afrique et pour les

pays à faible revenu, qui sont de 8.8 % et de 9.6 %, respectivement2. Les marges sont dues à

une base de coûts relativement élevée (dépenses hors intérêts représentant 55,8 % du revenu

bancaire net) et à l’ampleur du risque de crédit. La qualité des actifs est médiocre, mais elle

s’améliore.

3. Les insuffisances des normes prudentielles et le manque d’application de ces

normes pourraient compromettre la solidité des banques ; des réformes sont toutefois

en cours. Ni les réglementations régissant la classification des prêts et la constitution de

provisions, ni les ratios d’adéquation des fonds propres aux besoins ou de concentration des

risques ne sont conformes aux normes internationales. La BCEAO a entrepris, avec une

assistance technique du FMI, d’appliquer progressivement les normes de Bâle II/III, et a

également pris des mesures pour, notamment, améliorer l’information sur le crédit, adopter

des normes comptables internationales et mettre en place un système de supervision consolidé

1 BCEAO

2 Finstats 2015, IFS

Page 5: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 5 -

de plus en plus nécessaire étant donné l’importance grandissante de groupes bancaires

régionaux au Mali. La Commission bancaire devrait renforcer ses efforts d’application en

attentant la mise en œuvre de ces mesures.

4. Les banques au Mali accordent généralement des crédits à une gamme

relativement limitée de sociétés, et sont en mesure de dégager des marges confortables grâce

à cette clientèle traditionnelle. Toutefois, par suite de l’arrivée de nouvelles institutions et de

banques plus solides, elles sont en butte à une concurrence plus intense pour cette clientèle,

ce qui exerce des pressions à la baisse sur les taux prêteurs. Les récentes pressions dues à la

concurrence a eu pour résultat positif d’obliger les banques à rechercher activement de

nouvelles opportunités de financement plus rentables au niveau de la clientèle de détail

(essentiellement les salariés urbains) et les PME. La part des financements aux 50 plus gros

emprunteurs a donc diminué, pour tomber de 60 % du portefeuille total en 2012 à 39,4 % en

décembre 2014.

5. Les insuffisances de l’infrastructure financière, de l’environnement juridique et

judiciaire et, plus généralement du contexte macroéconomique, constituent des obstacles

à la poursuite de la diversification et de l’élargissement des crédits à l’économie. Les

principaux obstacles sont : i) les défaillances au niveau de l’application des contrats ;

ii) l’insuffisance des systèmes d’information sur le crédit ; iii) les carences du cadre des

transactions garanties ; iv) l’ampleur du secteur informel de l’économie ; v) l’absence de

chaînes d’approvisionnement organisées en dehors du secteur du coton ; et v) le manque de

ressources à long terme pour financer des investissements. Les autorités nationales et

régionales sont conscientes de la nécessité de s’attaquer à ces obstacles, et un certain nombre

d’efforts de réforme pertinents ont été entrepris.

6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté

qui règne, de l’étendue du pays et de la faible densité de population. Selon la dernière

enquête de Findex, seulement 13 % des Maliens ont un compte dans une institution financière.

L’argent mobile se développe rapidement, et offre la possibilité de desservir des zones rurales

dans lesquelles il n’est pas possible d’assurer de manière viable des services bancaires

traditionnels en agence. Il importe d’élargir la gamme des services actuels qui se limitent aux

services de paiements de base pour inclure un menu plus complet de services d’envois de

fonds, de produits d’épargne, de crédit et d’assurance. Assurer un large accès à ces services

permettra de réduire l’informalité au sein de l’économie et d’élargir les circuits du secteur

financier. Il serait possible d’accélérer cette évolution en faisant passer les systèmes de

paiement de masse de plateformes en espèces à des plateformes numériques, notamment les

paiements de l’État au titre des salaires et les autres paiements de l’État à des personnes (G2P),

comme les pensions et les transferts sociaux.

Page 6: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 6 -

II. Rappel des faits et contexte

7. Le Mali est un vaste pays enclavé d’Afrique de l’Ouest comptant 16,9 millions

d’habitants et affichant un PIB par habitant de 657 dollars. L’économie malienne est

essentiellement rurale, puisque les deux tiers de la population vivent de l’agriculture,

notamment du coton. L’or est le principal produit d’exportation du pays, mais sa production

diminue et le secteur a un avenir incertain parce que les réserves prouvées sont limitées. Le

secteur des services, qui contribue pour 40 % au PIB, est dominé par les échanges et le

commerce. La dépendance du pays envers les cultures et l’or expose le Mali à des chocs des

termes de l’échange. L’industrie, qui emploie tout juste 3 % de la population active, se

compose essentiellement d’installations de transformation alimentaire et d’usines textiles de

petite taille. La très grande majorité de la population (plus de 90 %) travaille dans le secteur

informel.

8. Le Mali a été ébranlé par une grave crise politique et sécuritaire en 2012, dont il

se remet à présent. Au début de 2012, des insurgés ont pris le contrôle du nord du Mali, et

déplacé plus d’un demi-million de personnes. Quelques mois plus tard, un coup d’État

militaire a encore plus déstabilisé le pays et son économie, et a provoqué le retrait de l’appui

des bailleurs de fonds. Une intervention militaire menée par la France a permis au

gouvernement de reprendre le contrôle du nord du pays vers le milieu de 2013, et de nouvelles

élections présidentielles et parlementaires ont été organisées plus tard dans l’année dans le

but de rétablir la démocratie.

9. La croissance économique a repris depuis la crise, et l’inflation est faible. Le PIB

a affiché une croissance nulle en 2012 par suite de la crise politique, et de seulement 1,7 %

en 2013 en raison des piètres récoltes agricoles. L’économie malienne connaît de nouveau

une solide croissance puisque, selon les estimations, le PIB aurait augmenté, de 7,2 % en 2014

et devrait s’accroître de 5 % en 2015. Les projections de la croissance pour cette année

replacent le Mali sur sa trajectoire normale, qui s’était établie en moyenne à un peu plus de

5 % au cours des 10 années précédant la crise de 2012. L’inflation est faible (1 % en 2014)

et, selon les projections, devrait rester largement en dessous de la cible de 3 % fixée par la

BCEAO.

Programme d’évaluation du secteur financier de 2008 (PESF)

10. Le Mali a fait l’objet d’une évaluation conjointe de la Banque mondiale et du FMI

dans le cadre du PESF en 2008. Les principales conclusions et recommandations associées

au secteur bancaire, et la suite actuellement donnée à ces recommandations sont récapitulées

ci-après.

Page 7: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 7 -

Tableau 1. Suites données aux principales recommandations relatives au secteur

bancaire dans le cadre du PESF 2008

Recommandations Suite donnée

Bien préparer le secteur bancaire aux

rapides transformations survenant dans

le secteur du coton.

Les transformations envisagées en 2008 dans

le secteur du coton (scission et privatisation

de la CMDT, qui gère la filière coton) n’ont

pas eu lieu. Le financement du secteur est

assuré par un mécanisme structuré établi par

des consortiums bancaires internationaux et

intérieurs, qui semblent fonctionner

correctement. La forte concentration des

risques dans le secteur du coton continue

d’être un problème pour le secteur bancaire.

Mettre en place les conditions requises

pour assurer la réussite des opérations

de privatisation de la BIM et de la BHM.

La privatisation de la BIM s’est déroulée de

manière satisfaisante, mais celle de la BHM

est encore à l’étude, et les problèmes

fondamentaux n’ont pas été résolus. (Voir la

note technique sur le financement du

logement).

Le Mali devrait jouer un rôle plus actif

au Conseil des ministres de l’UEMOA

dans le but d’assurer la modernisation

de l’infrastructure financière et

d’adopter un cadre réglementaire et

prudentiel plus propice au

développement du secteur financier.

Un certain nombre d’initiatives ont été

lancées à l’échelon régional dans le but

d’améliorer l’infrastructure financière

(modernisation des paiements, établissement

d’un bureau d’information sur le crédit privé,

etc.), et des plans ont été établis en vue de

moderniser le cadre prudentiel pour

permettre un passage progressif à Bâle II/III

à l’horizon 2017/18. Il reste toutefois

beaucoup à faire. La recommandation selon

laquelle le Mali doit jouer un rôle actif dans

les instances régionales pour renforcer

l’infrastructure et le cadre réglementaire et

prudentiel reste valable à ce jour.

Créer un cadre et une dynamique pour

structurer les chaînes

d’approvisionnement afin de promouvoir

la participation des banques et du

secteur privé

L’absence de chaîne d’approvisionnement

structurée en dehors du secteur du coton

continue d’être un important obstacle à

l’accès à des financements (voir la note

technique sur le financement de

l’agriculture).

Page 8: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 8 -

III. Structure et description générale du secteur bancaire

11. Le secteur bancaire malien s’est nettement développé au cours des dernières

années, mais il manque encore de profondeur et l’accès aux services bancaires est limité. Le secteur bancaire constitue l’essentiel du secteur financier malien, puisqu’il détient environ

97 % des actifs de ce secteur. Le ratio crédit privé/PIB était de 21,8 % en 2013, soit une

proportion supérieure à la médiane pour l’Afrique (17,4 %) et pour l’ensemble des pays à

faible revenu (16,4 %)3.

12. Depuis l’ouverture d’une nouvelle banque en 2014, 14 banques commerciales

opèrent au Mali. Le secteur n’est que moyennement concentré, les trois plus grandes banques

contrôlant 48 % des dépôts et 40 % des prêts. Le Mali ne compte qu’une banque spécialisée,

la Banque de l’Habitat du Mali, qui est en difficulté. La Banque nationale de développement

agricole (BNDA) autrefois spécialisée dans ce domaine, opère à présent en tant que banque

commerciale générale bien qu’elle continue de poursuivre des activités axées sur le secteur

agricole. Le Mali a aussi trois petites institutions de crédit non bancaires, une société de crédit-

bail et deux fonds de garantie, l’un pour les prêts hypothécaires et l’autre pour le secteur privé,

notamment les PME. Le Fonds de garantie pour le secteur privé n’est entré opère en opération

qu’à la fin de 2014. Ces 17 institutions financières sont assujetties aux réglementations

régionales de l’UMOA et sont placées sous le contrôle de la Commission bancaire de

l’UMOA.

13. La situation a évolué de manière positive dans le secteur bancaire malien entre

2009 et 2013, comme le montre le tableau 2 ci-après. Bien que la mission n’ait pas obtenu de

données comparables pour 2014, il semble que cette évolution positive se poursuive, les

crédits à l’économie étant réputés avoir augmenté d’environ 15 %. Le crédit et les dépôts ont

augmenté plus rapidement que le PIB, et le nombre d’agences et de comptes bancaires a

continué de s’accroître pendant toute la période, malgré le ralentissement observé en 2012 et

2013. Durant cette période, les crédits à l’économie ont augmenté de 65 %, les dépôts de

47 %, le nombre d’agences bancaires de 75 % et le nombre de comptes de 86 %.

3 Finstats 2015

Page 9: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 9 -

Tableau 2. Évolution du secteur bancaire

Évolution du secteur bancaire

2009 2010 2011 2012 2013

Total actifs (FCFA M) 1572,7 1844,2 2041,3 2167 2530,8

Dépôts (FCFA M) 1161,4 1337,7 1457,2 1531,1 1702,8

Croissance en % d’une

année sur l’autre 15,2% 8,9% 5,1% 11,2%

Prêts (FCFA %) 818 936,8 1124,7 1174,7 1344,5

% de croissance annuelle 14,5% 20,0% 4,4% 1,4%

Crédit au secteur privé/PIB -

% 17,6 18,1 20,9 21,4 21,8

Nb agences bancaires 249 281 343 400 433

Agences pour 100 000 hab. 1,72 1,87 2,2 2,46 2,52

Nb comptes bancaires 594 784 655 355 901 584 1 101 688 1 104 057

Sources : CB-UEMOA, BCEAO.

Page 10: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 10 -

Graphique 1. Croissance sur 5 ans des actifs, des prêts et des dépôts : Source : BCEAO

Source:

BCEAO

% croissance actifs

totaux, en glissement

annuel

% croissance prêts, en

glissement annuel

% croissance dépôts, en

glissement annuel

Actifs totaux (FCFA M)

Dépôts (FCFA M)

Prêts (FCFA M)

14. La structure du capital dans le secteur bancaire a fait l’objet d’un certain nombre

de modifications, et le secteur est maintenant dominé par des actionnaires étrangers, essentiellement africains. Les banques marocaines sont celles qui sont le plus présentes sur le

marché, puisqu’elles détiennent la majorité ou une part importante du capital de quatre

banques, et ont une part totale du marché (actifs) de 50 %. Les banques de l’UEMOA arrivent

en deuxième place avec une part totale du marché de l’ordre de 16 %. La transformation la

plus notable de la structure du secteur tient à la réduction des parts de capital détenu par l’État

et le secteur public. Lors de l’examen réalisé dans le cadre du PESF de 2007, les banques

Page 11: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 11 -

contrôlées par le secteur public détenaient 60 % des actifs et 70 % des dépôts ; à présent les

banques dont le capital appartient en majorité à des actionnaires privés étrangers contrôlent

91 % des dépôts et 90 % des prêts4. La Banque de l’Habitat du Mali (BHM) est la seule banque

dont l’État est le principal actionnaire, mais elle est en difficulté, elle n’a que 3 % du marché

et elle doit faire l’objet d’une fusion avec la Banque malienne de solidarité cette année. Le

taux de concentration des trois plus grandes banques est d’un niveau moyen, et évolue à la

baisse (il est passé de 57 % en 2006 à 45 % en 2013), de nouveaux arrivants ayant soustrait

des parts du marché au principal intervenant. Les groupes bancaires français, qui prédominent

dans de nombreux pays de l’UEMOA, ne contrôlent qu’une petite banque au Mali, la BICIM,

dont la part de marché n’est que de 4 %.

15. La constitution de groupes bancaires de l’UEMOA est un phénomène récent, en

partie favorisé par l’approbation du système de l’agrément unique des banques et

établissements financiers dans la sous-région. Les deux derniers arrivés sur le marché sont

des institutions appartenant à des groupes dont le siège se trouve dans l’UEMOA (Burkina

Faso et Togo). La Banque de développement du Mali (BDM), qui est la plus grande banque

malienne, a également entrepris de développer ses opérations dans la région en ouvrant des

filiales en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso, et elle a des bureaux en Guinée-Bissau et en

France. La structure du capital actuel du secteur est présentée dans le graphique ci-après.

Graphique 2: Structure du capital du système bancaire en décembre 2013 (en

pourcentage du total des actifs du système bancaire)

Source : BCEAO.

4 L’État détient aussi une part majoritaire du capital du Fonds de garantie hypothécaire du Mali (FGHM).

STATE

FOREIGN

PRIVATEMALIAN

Page 12: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 12 -

Tableau 3. Structure du capital des banques

Profil du secteur bancaire en

décembre 2013

Structure du capital Total actifs Dépôts Prêts

État

privé

malien

étrange

r

Part du

marché

Part du

marché

Part du

marché

Toutes

banques 15% 22% 63% 2 528 152 1 701 116 1 359 966

BDM 20% 21% 59% 18% 19% 14%

ECOBK 0% 7% 93% 14% 12% 15%

BIM 10% 39% 51% 13% 15% 11%

BOA 0% 20% 80% 12% 13% 14%

BNDA 36% 0% 64% 12% 11% 12%

BMS 25% 71% 4% 9% 9% 8%

BAM 0% 45% 55% 7% 7% 8%

BICI-M 0% 15% 85% 4% 4% 4%

BSIC-Mali 0% 0% 100% 3% 2% 5%

BHM 98% 2% 0% 3% 3% 2%

BCS 3% 0% 97% 3% 2% 3%

BCI 0% 0% 100% 2% 2% 2%

Orabank 100% 1% 1% 1%

Note : Coris Bank a ouvert ses portes en 2014

IV. Solidité et performance du secteur bancaire

16. Les indicateurs de solidité financière disponibles indiquent que le secteur

bancaire est dans l’ensemble solide, bien que les résultats varient fortement d’une

banque à une autre et que les actifs soient de médiocre qualité. Les indicateurs de

solidité financière sont récapitulés à l’annexe I.

Adéquation des fonds propres aux besoins

17. Les banques semblent, en général, avoir un niveau de capitalisation suffisant, bien

que deux banques ne se conforment pas aux normes minimales. La norme de fonds propres

globale (actifs pondérés par les risques/fonds propres réglementaires) était de 12,9 % à la fin

de 2013, c’est-à-dire bien supérieure à la norme minimale de 8 % (Bâle I), et plus élevée que

la moyenne de l’UMOA (9 %). Toutefois, à la fin de 2014, une banque ne respectait plus ni le

ratio d’adéquation des fonds propres minimal ni la norme réglementaire de fonds propres, bien

que sa part du marché dépasse juste 1 %. À l’échelon de l’UMOA, en juin 2014, un quart des

banques ne respectaient pas le ratio d’adéquation des fonds propres, et 10 % des banques

avaient un montant de capital négatif. Ces chiffres révèlent un degré de tolérance réglementaire

qui compromet la solidité financière dans la zone monétaire. Le niveau des fonds propres est,

Page 13: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 13 -

par ailleurs, très vraisemblablement surestimé en raison de la faiblesse des normes

prudentielles applicables à la classification des prêts et aux provisions.

Tableau 4: Adéquation des fonds propres aux besoins

2009 2010 2011 2012 2013

Ratio

d’adéquation

des fonds

propres -%

7.7 13.7 11.7 11.4 12.9

Fonds

propres

/Total des

actifs -%

4.6 7.5 8.3 7.7 7.9

Source : BCEAO

Qualité des actifs

18. La qualité des actifs semble être relativement faible, et les provisions peuvent être

insuffisantes. Les prêts improductifs bruts représentaient 19,3 % du total en 2013, et les prêts

improductifs nets 8,3 %, soit des proportions supérieures aux moyennes de l’UEMOA qui

sont de 15,3 % et 6,6 % respectivement. La plus grande partie des prêts improductifs (40 %)

est imputable au secteur des échanges et du commerce, et est relativement plus élevée que la

proportion des prêts revenant à ce secteur (33 %). Les provisions couvrent 62 % du montant

des prêts improductifs. Les conflits et l’instabilité politique observés en 2012 ont entraîné un

fort accroissement des prêts improductifs cette année-là, mais les chiffres préliminaires (non

audités) pour 2014 font état d’une nette amélioration de la qualité des actifs au cours des 12

derniers mois (15,9 % de prêts improductifs bruts et 5,59 % de prêts improductifs nets avec

un niveau de provision de 68,6 %). Les banques conservent généralement les prêts

improductifs dans leur bilan pendant de nombreuses années avant de les passer en charge,

même s’ils sont entièrement provisionnés, dans l’attente du dénouement de longues

procédures juridiques. Le volume des prêts improductifs bruts est par conséquent gonflé,

parfois par des créances irrécouvrables héritées de banques restructurées et privatisées des

années auparavant. Ces créances irrécouvrables héritées d’autres entités, qui sont concentrées

dans trois banques, représentent environ 30 % des créances irrécouvrables du système. Les

banques ne sont actuellement pas tenues de classer un prêt tant qu’il n’est pas en arriéré depuis

plus de 180 jours.

19. Le degré de concentration des risques constitue l’un des principaux points faibles

du système. En application des réglementations de l’UMOA, les banques peuvent prêter

jusqu’à 75 % de leur capital à un unique emprunteur, et les engagements représentant plus de

25 % de la valeur nette ne peuvent pas dépasser l’équivalent de 800 % des fonds propres.

Toutefois, malgré la souplesse extrême du plafond des engagements sur une même signature,

certaines banques ne se conforment pas à la réglementation, en particulier durant les périodes

Page 14: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 14 -

de pointe saisonnières. Au 30 juin 2014, par exemple, quatre banques ne respectaient pas la

limite d’engagement envers un seul emprunteur, et les crédits aux cinq plus importants

emprunteurs du système représentaient près de 100 % des fonds propres des banques. Les

autorités régionales ont fait savoir qu’elles traiteraient de la question du plafond des importants

engagements dans le cadre des activités réglementaires en cours et du passage à Bâle II/III.

Cela ne réglera toutefois pas la question de l’application laxiste des réglementations. La

Commission bancaire devrait, au minimum, faire strictement respecter le plafond en vigueur.

Les banques devraient être en mesure d’accorder des volumes plus importants de prêts

syndiqués avec des entités extérieures au Mali5. Le relèvement du niveau minimum de fonds

propres proposé pourrait également atténuer les problèmes auxquels sont confrontées les

banques de plus petite taille.

Graphique 2. Crédit aux cinq principaux emprunteurs en

pourcentage des fonds propres

Crédit aux

5 principaux

emprunteurs Source : BCEAO.

5 Les crédits à la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT), qui est le plus gros emprunteur

auprès du système, sont déjà financés par des consortiums de banques intérieures et de banques internationales.

Page 15: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 15 -

Liquidité

20. Les prêts bancaires ont augmenté plus rapidement que les dépôts au cours des

dernières années. Depuis 2009, les dépôts ont augmenté de 47 %, et les prêts de 64 %. La

plupart des banques ont néanmoins été en mesure de respecter le coefficient de liquidité

(12 banques et IF sur 15 au 30 juin 2014 et 14 sur 15 en décembre 2014). L’insuffisance

relative des dépôts pourrait être exacerbée par l’adoption d’un compte unique du Trésor (CUT)

par l’État dont les comptes étaient jusque-là ouverts auprès de banques commerciales et

représentaient 19 % des dépôts en décembre 2014. Bien que la première phase de cette

opération, notamment le transfert des comptes de l’État, ait commencé en 2014, les chiffres

provisoires indiquent que les dépôts de l’État ont, en fait, augmenté en 2014, et que la liquidité

des banques semble s’être améliorée au premier semestre de 2015. La deuxième phase donnera

lieu au retrait du système bancaire des comptes des organismes publics (dont le montant est

actuellement estimé à 149 milliards de francs CFA). Les banques parviennent généralement à

maintenir des liquidités suffisantes (grâce en partie à d’amples injections de liquidités de la

BCEAO), mais la concurrence pour les dépôts – en particulier les dépôts à terme des grands

comptes – s’intensifie. La hausse des taux servis sur les dépôts qui s’ensuit survient alors même

que la BCEAO a abaissé les taux directeurs et le taux d’usure, et que la concurrence exercée

au niveau des prix pour attirer les emprunteurs commerciaux de premier plan s’accroît. Depuis

la fin 2014, les banques indiquent qu’elles accordent des taux prêteurs qui peuvent être aussi

bas que 5,5 % à 6 % à leurs meilleurs clients, tandis que les taux versés sur les comptes très

importants peuvent atteindre jusqu’à 5,5 % ou 6 %. Les bons clients sont désormais en mesure

de négocier la rémunération de leurs dépôts à vue, qui ne portaient jamais intérêt dans le passé.

Cette concurrence accrue et le rétrécissement des marges seront probablement salutaires à long

terme pour le système, et le passage à un compte unique du Trésor est nécessaire. Étant donné

le niveau déjà élevé du ratio prêts-dépôts (90 % à la fin de l’année 2013), il sera toutefois

important de gérer les retraits de manière à éviter de créer des problèmes de liquidité ou de

forcer les banques à réduire les crédits à l’économie. La BCEAO et l’État malien sont

conscients des risques, et procèdent à des simulations pour évaluer l’impact de cette opération.

21. Le niveau des liquidités fournies par la banque centrale est exceptionnellement

élevé dans le cas du Mali et dans toute l’Union monétaire. La BCEAO fournit des liquidités

de plus en plus importantes aux banques. Les crédits de la banque centrale représentent 9 %

des actifs bancaires dans la zone, contre moins de 1 % pour les pays africains comparables. Au

Mali, le financement de la banque centrale a augmenté de 867 % entre 2011 et 2013, pour

atteindre plus de 12 % des passifs et des fonds propres des actionnaires à la fin de 2013.

22. Les banques profitent des possibilités de se refinancer à faible prix auprès de la

BCEAO pour financer l’achat de titres publics. Les banques peuvent actuellement obtenir

des financements de la BCEAO au taux de 2,5 % ; sachant que les bons du Trésor ont un

rendement de l’ordre de 5 %, cette opération est à la fois aisée et profitable pour les banques.

La plupart des refinancements de la banque centrale semblent avoir eu pour objet de financer

l’achat de titres publics. Les avoirs en ces titres ont augmenté de 37 % uniquement en 2013, et

représentaient 18 % des actifs bancaires à la fin de l’année. Cela expose aussi bien l’État que

les banques à des risques de liquidité en cas de resserrement de la politique monétaire. Cet

Page 16: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 16 -

accès bon marché et facile au financement de la banque centrale est un facteur qui pourrait

entraver le développement d’un marché monétaire interbancaire.

Tableau 5. Liquidité bancaire

Ratios de liquidité 2009 2010 2011 2012 2013

Ratios prêts-dépôts 72,2 82,6 88,0 88,5 89,7

Actifs liquides/Total des

actifs 33,8 32,7 36,7 34,8 34,4

Actifs liquides/passifs CT 61,2 92,9 89,4 90,0 98,0 Source: BCEAO

Rentabilité et performance

23. Le secteur bancaire malien a été systématiquement rentable au cours des cinq

dernières années, y compris durant la crise de 2012 (tableau 7). La marge d’intérêt brute,

qui n’a guère varié au cours de la période, était de 7,7 % en 2013. Si ce niveau peut paraître

élevé par comparaison aux écarts entre les taux bancaires observés dans des pays plus

développés, elle est en fait inférieure aux médianes des pays africains et des pays à faible

revenu qui sont, respectivement, de 8,8 % et de 9,6 %6. Elle est aussi légèrement inférieure à

l’écart moyen enregistré dans les pays de l’UEMOA (7,9 %) qui est le groupe comparateur le

plus proche (voir les graphiques 5 et 6 ci-après). Bien que les chiffres de la rentabilité générale

sur l’ensemble de la période ne fassent ressortir aucune tendance prononcée, une

décomposition plus poussée des coûts montre que la composante relative aux marges

bénéficiaires constitue une proportion élevée de l’écart entre les taux d’intérêt au Mali, qui

cadre avec la moyenne de l’UEMOA (graphique 4).

6 Finstats 2015, IFS

Page 17: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 17 -

Tableau 6. Rentabilité et performance du système bancaire

2009 2010 2011 2012 2013

Coût moyen des fonds

empruntés 1,9 1,9 1,8 1,9 1,8

Taux d’intérêt moyen des

prêts 9,8 9,4 10 9,9 9,5

Marge d’intérêt brut 7,9 7,5 8,2 8 7,7

Rendement de l’actif RDA 0,6 1,4 1,7 1,3 1,2

Rentabilité des fonds

propres 6,8 8,6 14,9 12,5 14,1

Dép. hors intérêts/revenu

bancaire net 63,1 59,6 56,5 57,5 59,6

Source : BCEAO

Graphique 3. Décomposition des écarts au Mali et dans l’UEMOA

Traduction des composantes : Marges bénéficiaires avant impôts ; Réserves obligatoires ;

Autres frais généraux ; Dépenses de personnel ; Provisions

Page 18: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 18 -

Source : BCEAO

V. Cadre juridique, réglementaire et prudentiel

Cadre juridique et contrôle bancaire

24. Le cadre juridique, prudentiel et de contrôle du système bancaire malien et

essentiel régi au niveau de la communauté de l’UMOA, bien que les autorités nationales

jouent aussi un rôle en ce domaine. Les principaux organes de supervision sont :

i. le Conseil des ministres de l’UEMOA : il définit le cadre juridique et réglementaire

général et est également l’instance de recours pour les décisions de liquidation

d’institutions de crédit ;

ii. la BCEAO : elle formule la politique monétaire et appuie la supervision de l’activité

bancaire par le biais de ses huit directions nationales, supervise les systèmes de

paiement et détermine les politiques de comptabilité et de crédit applicables aux

banques ; et

iii. la Commission bancaire de l’UMOA (CB) : elle supervise les institutions de crédit,

et a le pouvoir de sanctionner les cas de non-respect des règles et de mettre les

institutions sous administration temporaire. La Commission bancaire doit également

donner son approbation à l’octroi d’agréments bancaires ;

iv. le ministère des Finances national : il a le pouvoir d’émettre et de retirer les agréments

bancaires sur la recommandation de la BCEAO et de la CB.

0.91.7 1.3 1.4 1.1

1.6

1.41.4 1.3

1.3

2.1

2.0

1.8 1.81.7

0.7

0.7

0.7 0.50.5

2.32.1

2.1 2.2 3.2

7.67.9

7.3 7.37.9

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

2009 2010 2011 2012 2013

UEMOA

Profit marginbefore tax

Mandatoryreserves

Other overheadexpense

Personnelexpense

Provisions

Page 19: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 19 -

25. Il importe de renforcer et de moderniser le contrôle bancaire dans les pays de

l’UMOA, notamment dans les domaines suivants :

i. Les normes prudentielles régionales ne sont pas conformes aux bonnes pratiques

internationales à des égards fondamentaux, notamment en ce qui concerne le plafond

des engagements sur une même signature (75 % du capital contre 25 %) et les besoins

de dotation aux provisions qui sont relativement faibles. Les prêts ne sont classés

qu’après avoir été en arriéré pendant 180 jours, et les banques ont jusqu’à quatre ans

pour constituer des provisions d’un montant égal aux prêts garantis. Le montant des

prêts improductifs est donc sous-estimé et celui des capitaux surestimé.

ii. Le cadre prudentiel ne couvre ni les risques du marché, ni le risque-pays ni le risque

de taux d’intérêt ;

iii. Les états financiers des banques ne sont pas présentés conformément aux normes

comptables internationales ;

iv. Les holdings bancaires ne sont pas assujetties aux réglementations ni à une

surveillance consolidée. Aussi l’expansion des groupes bancaires régionaux, qui offre

certes des possibilités, présente-t-elle aussi des risques qu’il importe de prendre en

compte.

v. Il est également important que les organes de supervision du pays dans lequel se trouve

le siège de la banque et des pays d’accueil coopèrent étroitement aux activités de

supervision des groupes bancaires régionaux. Cela n’est pas un problème pour les

groupes bancaires de l’UEMOA, mais ce l’est pour les groupes dont le siège se trouve

en dehors de l’UMOA et, à ce jour, la coopération et la coordination entre les organes

de supervision nationaux et des pays d’accueil demeurent insuffisantes.

vi. Le cadre de résolution bancaire présente des carences, dû en partie au partage des

attributions entre les autorités nationales et régionales.

vii. La région fait preuve de tolérance réglementaire, bien que le respect des normes

prudentielles se soit amélioré au cours des dernières années. À la fin de 2014,

toutefois, la seule norme respectée par toutes les institutions de crédit au Mali était la

norme concernant le plafond des investissements dans des entreprises non financières.

Les ratios prudentiels obligatoires sont indiqués ci-après (tableau 7).

Page 20: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 20 -

Tableau 7. Ratios prudentiels applicables aux banques de l’UEMOA

Montant minimum des fonds propres 5 milliards FCFA

Ratios d’adéquation des fonds propres >= 8 %

Limite des engagements sur une même

signature

<=75 % des fonds propres réglementaires

Plafond du volume des prêts >= 25 % de la

valeur nette

800 % de la valeur nette

Plafond des prêts internes <=20 % de la valeur nette

Ratios de liquidité (actifs liquides /passifs à

court terme)

>=75 %

Plafond des immobilisations hors bilan <= 15 % de la valeur nette

Participation dans des entreprises non

financières

<= 15 % de la valeur nette

Ratio de transformation7 >= 50 %

26. Les autorités de l’UEMOA sont conscientes des carences du système, et prennent

des mesures pour renforcer la supervision et la réglementation bancaires. Des plans ont

été mis en œuvre notamment pour passer d’une supervision basée sur la conformité dans le

cadre de Bâle I à une supervision basée sur le risque dans le cadre de Bâle II/III. Cette

transition est menée par la BCEAO avec l’assistance technique du FMI, et elle donnera à la

Commission bancaire juridiction sur les holdings bancaires. Elle devrait être terminée en

2017/18. Les normes comptables applicables aux banques en vertu du Plan comptable

bancaire sont actuellement mises à niveau pour mieux correspondre aux normes

internationales d’information financière (IFRS). En ce qui concerne l’adéquation des fonds

propres aux besoins, il a été annoncé il y a quelque temps que le montant minimum des fonds

propres serait porté à 10 milliards de francs CFA ; cette mesure doit entrer en vigueur vers le

milieu de 2016. Les banques qui ne satisfont pas à la norme minimale à la fin de 2015 doivent

soumettre d’ici la fin de l’année un plan indiquant les mesures qu’elles prendront pour

satisfaire à cette obligation. Ce relèvement du montant minimum des fonds propres ne devrait

pas avoir d’impact majeur sur la concentration et la consolidation, car la plupart des banques

du Mali ont déjà des fonds propres d’un montant supérieur à 10 milliards de francs CFA ou

devraient être en mesure d’accroître le montant de leurs fonds propres sans trop de difficulté.

Un collège de supervision a été formé pour l’un des groupes bancaires de l’UEMOA, et il

7 Défini comme étant le ratio des actifs à moyen terme aux actifs à long terme financés par des engagements à

moyen/long terme

Page 21: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 21 -

devrait se réunir pour la première fois cette année. Enfin, la mise en œuvre programmée d’un

système d’assurance des dépôts et d’un fonds de stabilité financière devrait faciliter les

opérations de résolution bancaire.

Protection du consommateur

27. Le cadre juridique et réglementaire fait peu de place à la protection du

consommateur, et ni la BCEAO ni la Commission bancaire n’ont, juridiquement, pour

mission explicite d’assurer cette dernière. La mission et le principal objectif de la banque

centrale et de la Commission bancaire consistent à assurer la stabilité et la solidité du secteur,

bien que certaines mesures puissent être considérées comme des mesures de protection du

consommateur. Il s’agit des taux d’intérêt maximums que les banques peuvent imposer (taux

d’usure), d’une récente instruction disposant que certains services bancaires doivent être

fournis gratuitement, et de la décision prise en 2014 de mettre en place un Fonds de garantie

des dépôts8. Il vaut également la peine de noter que la récente loi uniforme portant

réglementation des bureaux d’information sur le crédit comprend des dispositions pertinentes

pour la protection du consommateur. Chaque État membre de l’UEMOA est doté d’un Conseil

national du crédit, constitué par la BCEAO et présidé par le ministre des Finances, qui a pour

mission d’étudier les conditions de fonctionnement du système bancaire, notamment ses

relations avec la clientèle. Deux associations de consommateurs, la RECOMA et l’ASCOMA,

sont membres du Conseil. Ce dernier ne semble toutefois pas avoir publié ou diffusé l’une

quelconque de ses analyses ou délibérations en ce domaine.

28. Bien que la BCEAO ait récemment renforcé l’obligation d’information, les

conditions et les tarifs ne sont toujours pas transparents en pratique. L’absence

d’informations harmonisées et comparables sur les prix de tous les produits bancaires entrave

la concurrence dans le secteur et contribue certainement au coût élevé des produits et des

services financiers. Une récente instruction dispose que les banques doivent déclarer leur taux

de base, leurs taux minima et maxima sur les prêts et sur les dépôts à la BCEAO, à la

Commission bancaire ainsi qu’aux associations ou aux revues de consommateurs pertinentes.

Aucune méthode standardisée n’est toutefois utilisée aux fins du calcul et de la diffusion des

coûts totaux ou des rendements. Les banques ne sont en outre assujetties à aucune obligation

minimale de divulgation des conditions à leur clientèle. Dans de nombreuses juridictions, les

institutions financières sont tenues de fournir de simples déclarations expliquant les

principaux termes relatifs aux produits offerts aux consommateurs dans un langage simple et

facile à comprendre.

29. Il n’existe pas de mécanisme de règlement des différends efficace et rapide qui

permettrait de traiter les plaintes des clients. Ce type de mécanisme revêt une importance

particulière dans les pays où l’on ne peut compter sur les tribunaux pour fournir des recours

rapides, d’un coût abordable et prévisibles aux consommateurs. Il faudrait combler cette lacune

en nommant un ombudsman ou une personne occupant une fonction équivalente. À l’évidence,

une initiative a été lancée dans le but de mettre en place un mécanisme de médiation à l’échelon

8 Le fonds n'était pas opérationnel à la date de la mission.

Page 22: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 22 -

régional, ainsi qu’un « Observatoire de la qualité des services bancaires ». Lorsque ces derniers

auront été mis en place, il importera de collecter des données détaillées sur les plaintes, de les

analyser et de les publier dans le but de recenser les principaux problèmes et d’exploiter ces

informations aux fins de la formulation d’une politique de protection des consommateurs. Il

n’existe en outre aucune obligation ou norme minimale concernant les plaintes internes dans

les banques ou autres institutions de crédit. Il conviendrait également de remédier à cette lacune

et de s’assurer du respect des normes.

VI. Crédits à l’économie et inclusion financière

30. Les crédits à l’économie et la profondeur du secteur bancaire sont limités, mais se

développent, et ils correspondent dans l’ensemble à ceux de pays ayant des facteurs

fondamentaux macroéconomiques similaires. Les banques occupent une place

prédominante dans le secteur financier malien, puisqu’elles détiennent environ 97 % des actifs

du secteur financier. Le ratio du crédit privé au PIB était de 21,8 % 2013, soit un niveau

supérieur à la médiane pour l’Afrique (17,4 %) et à celle de tous les pays à faible revenu

(16,4 %). Le ratio des dépôts intérieurs au PIB, qui était de 23,1 %, est du même ordre de

grandeur que la médiane des pays à faible revenu (23,5 %).

31. Le secteur bénéficiant des plus importants engagements du secteur bancaire est

celui des échanges et du commerce, qui bénéficie de 33 % du total des crédits, et est suivi

par le secteur manufacturier (17 %). Le secteur minier, à qui est imputable plus des deux tiers

des exportations maliennes, est essentiellement financé de l’étranger.

Page 23: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 23 -

Graphique 4. Répartition sectorielle des crédits (31décembre 2013)

Traduction des secteurs : Agriculture et pêche ; Industries extractives ; Industries manufacturières ; Eau, électricité et gaz

Bâtiment et travaux publics

Source : BCEAO.

32. Le volume de titres publics détenus par les banques augmente plus rapidement

que celui des crédits au secteur privé. Bien que les titres publics ne semblent pas évincer

les crédits au secteur privé pour le moment, ils pourraient certainement menacer de le faire à

l’avenir. Conformément à la législation et à la réglementation en vigueur, les titres émis par

les États de l’UEMOA sont exonérés d’impôt, ont une pondération nulle aux fins de

l’évaluation du capital et peuvent être refinancés à tout moment par la BCEAO, actuellement

à des taux très favorables (2,5-3,5 % en dessous des taux servis sur les comptes d’épargne, les

dépôts à terme et les emprunts interbancaires). Les volumes de titres publics détenus par les

banques ont donc augmenté très rapidement (de 37 % en 2013). La dernière émission

obligataire malienne (à trois ans, en février 2015) a un rendement de 5,5 %, ce qui correspond

à un rendement imposable de l’ordre de 8,2 %. Ce taux est supérieur aux taux prêteurs

actuellement consentis aux plus importantes entreprises clientes, même si l’on fait abstraction

des différentes normes de fonds propres. La pondération nulle des titres émis par les États de

l’UEMOA peut également donner lieu à une surestimation de l’adéquation des fonds propres

du système bancaire aux besoins, dans la mesure où aucun des États souverains de la région

ne court un risque nul de défaillance.

33. Soixante-cinq pour cent des prêts accordés au Mali sont à court terme9, et les

entreprises ont des difficultés à financer leurs besoins d’investissements à plus long

terme. Cette situation peut, elle-même, être imputée au risque plus élevé associé aux

financements à plus long terme ainsi qu’aux contraintes de financement et aux obstacles

9 Le crédit à court terme, tel qu'il est défini dans l’UEMOA a une échéance à moins de deux ans.

Agriculture andFisheries

Extractive industries

Manufacturing

Water, Electricity andGas

Construction andPublic Works

Page 24: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 24 -

réglementaires. Il est difficile aux banques de recouvrer le montant de leurs prêts ou de faire

valoir les garanties par suite des problèmes posés par le respect des contrats et le cadre des

transactions garanties, de sorte qu’elles préfèrent financer des opérations à court terme,

autoamortissables et générant des flux de trésorerie bien définis. L’une des normes

prudentielles de l’UMOA dispose en outre que 50 % des actifs à moyen et long termes doivent

être couverts par des passifs à moyen et long termes (cette proportion était de 75 % jusqu’en

2014). Avant l’assouplissement des limites aux transformations des échéances, cette norme

était un obstacle au financement des investissements, car de nombreuses banques avaient déjà

atteint le plafond, ou même dépassé ce dernier. Faute de données financières complètes sur les

banques pour 2014, il est difficile de savoir si cela est toujours le cas. Le marché obligataire

régional n’est pas exploité par les banques maliennes, et il n’est pas évident que ces dernières

puissent lever des fonds sur ce marché. Fait quelque peu surprenant, selon un représentant de

l’Association professionnelle des banques, une émission obligataire pourrait être interprétée

par le marché intérieur comme une indication que la banque se trouve en difficulté financière.

34. Les banques au Mali accordent généralement des crédits à une gamme

relativement limitée de sociétés, et sont en mesure de dégager des marges confortables grâce

à cette clientèle traditionnelle. Toutefois, par suite de l’arrivée de nouvelles institutions et de

banques plus solides, elles sont en butte à une concurrence plus intense pour cette clientèle, ce

qui exerce des pressions à la baisse sur les taux prêteurs. Les récentes pressions dues à la

concurrence ont eu pour résultat positif d’obliger les banques à rechercher activement de

nouvelles opportunités de financement plus rentables au niveau de la clientèle de détail

(essentiellement les salariés urbains) et les PME. La part des financements aux 50 plus gros

emprunteurs a donc diminué, pour tomber de 60 % du portefeuille total en 2012 à 39,4 % en

décembre 2014.

35. Les efforts d’amélioration de l’intermédiation financière et d’élargissement de la

clientèle se heurtent à un certain nombre d’obstacles. Le degré limité d’inclusion

financière et la faiblesse des crédits au secteur privé sont imputables aux carences des cadres

juridique, judiciaire et réglementaire du développement du secteur financier ainsi qu’à des

facteurs non liés à la politique du secteur financier qui doivent être considérés dans un

contexte économique, social et politique plus générale. Les autorités nationales et régionales

sont conscientes de ces obstacles et prennent des mesures pour remédier à certains d’entre

eux, notamment en établissant un bureau d’information sur le crédit privé (BIC), en

améliorant le cadre des transactions garanties, et en procédant à des réformes réglementaires.

Les principaux obstacles sont notamment :

i. Les défaillances au niveau de l’application des contrats et les insuffisances du cadre

juridique et judiciaire qui font obstacle au recouvrement des prêts. Toutes les banques

ont indiqué que le principal obstacle à l’expansion du crédit et à la diversification de leur

clientèle tenaient au fait qu’elles ne pouvaient pas compter sur les tribunaux du

commerce pour faire respecter les contrats et recouvrer leurs prêts.

ii. Les carences du cadre des transactions garanties. Il est difficile pour les banques

d’inscrire, d’opposer et de réaliser des sûretés constituées sur des biens mobiliers et

immobiliers. Les graves défaillances qui caractérisent le système des titres fonciers et de

Page 25: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 25 -

l’immatriculation des terrains, l’absence de registre électronique des sûretés pour les

garanties mobilières et la possibilité de faire respecter les garanties en dehors du cadre

d’un système judiciaire lent et imprévisible sont autant de facteurs qui découragent

l’expansion du crédit.

iii. L’ampleur du secteur informel de l’économie. Selon une enquête consacrée par l’OIT à

l’informalité en 2002, 94 % des Maliens travailleraient dans le secteur informel, soit le

pourcentage le plus élevé d’Afrique. La plupart des entreprises, en particulier les PME,

opèrent essentiellement dans le cadre de l’économie informelle et sur la base de

paiements en espèces, de sorte qu’il est difficile aux banques de leur consentir des crédits.

iv. L’absence d’informations à jour et complètes sur les risques de crédit des emprunteurs

actuels et potentiels. Les systèmes actuels, qui sont gérés par la banque centrale (Centrale

des risques et Centrale des bilans), ne fournissent pas de données à jour, complètes et

exactes. Le Mali vient d’adopter un texte de loi autorisant la mise en place d’un nouveau

bureau d’information sur le crédit privé (BIC), opérant à l’échelle régionale, qui doit

bientôt devenir opérationnel.

v. L’insuffisance ou l’absence de déclaration des données financières, et le manque de

capacités financières ou administratives au niveau des petits entrepreneurs, qui

limitent leur accès à des financements institutionnels.

vi. Une faible densité de population et de vastes zones rurales, conjuguées à la médiocrité

des moyens d’accès physiques et des infrastructures, qui découragent l’implantation de

nouvelles agences et accroissent la difficulté qu’ont les banques à desservir de vastes

segments de la population.

vii. L’absence de chaînes d’approvisionnement organisées. Pour surmonter les problèmes

posés par le respect des contrats et l’atténuation des risques de crédit, les banques

s’efforcent de structurer leurs financements de manière à avoir une source de

remboursement déterminée et des flux de trésoreries qu’elles peuvent directement saisir.

Cela leur a été possible dans le cas de la filière coton, mais la plupart des chaînes

d’approvisionnements agricoles et autres ne sont pas organisées de manière à permettre

l’octroi de crédits structurés de cette manière (voir la note technique sur le financement

de l’agriculture).

viii. Le manque de ressources à long terme, en raison duquel il est difficile de financer des

investissements. Les ressources des banques sont constituées dans une très large mesure

par des dépôts à vue et à court terme, et les investisseurs institutionnels tels que les

compagnies d’assurance vie ne conservent généralement pas de dépôts à long terme dans

le système bancaire. Les banques ne peuvent transformer les échéances que dans une

mesure limitée, d’une part pour des motifs de risque et d’autre part pour des raisons

réglementaires.

Page 26: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 26 -

Financement des PME

36. En l’absence d’une définition des PME acceptée à l’échelon national et régional10,

et par suite du volume très limité d’informations concernant l’offre ou la demande de

financement des PME, il est difficile de formuler des conclusions ou des

recommandations fondées adaptées au contexte malien. En fait, de nombreux observateurs

— que ce soit dans les institutions financières ou de manière plus générale dans le secteur privé

— ont noté que le concept de PME ne s’applique pas vraiment au Mali puisque, à quelques

rares exceptions près, toutes les entreprises maliennes sont des micros, petites ou moyennes

entreprises. Il a été noté qu’un grand nombre des 50 plus gros emprunteurs qui ont de tout

temps été les principaux bénéficiaires des financements bancaires sont en fait des entreprises

commerciales familiales qui ne comptent qu’un petit nombre d’employés. Si les autorités

souhaitent promouvoir le financement des entreprises mal desservies, il leur faudra tout

d’abord convenir d’une définition (ou de définitions) des micros, petites et/ou moyennes

entreprises, et de collecter régulièrement des données sur l’offre et sur la demande pour pouvoir

formuler leur politique d’inclusion financière et suivre les progrès en ce domaine.

37. L’État malien a récemment pris l’initiative de créer un fonds de garantie pour

promouvoir l’accès des PME à des financements. Le Fonds de garantie pour le secteur privé

(FGSP) est une nouvelle institution financière non bancaire qui offrira aux banques et aux

institutions financières des garanties partielles de risque au titre de prêts à des PME. Le capital

de ce Fonds, qui est initialement de 4,8 milliards de francs CFA, est détenu en majorité par

l’État et des organismes publics, bien que six banques, une entreprise privée et le Conseil

national du patronat (CNPM) détiennent des parts minoritaires. Il a obtenu un agrément en

qualité d’institution financière et il est assujetti à la réglementation prudentielle et à la

supervision de la Commission bancaire. Le FGSP accordera des garanties partielles de risque

aux prêteurs couvrant 50 % des risques relatifs aux prêts aux PME d’un montant compris entre

10 millions et 500 millions de francs CFA. Il aidera aussi les entrepreneurs et les prêteurs à

analyser et à présenter des projets finançables par les banques, et à assurer un suivi et une

assistance technique. Il n’est assujetti à aucune restriction sectorielle et il peut garantir aussi

bien des fonds de roulement à court terme que des prêts au titre d’investissements à long terme.

38. Le Fonds venant juste de commencer ses opérations, il est trop tôt pour

déterminer s’il réussira à atteindre ses objectifs. Une étude de faisabilité détaillée a été

réalisée avant sa constitution, et il est un mécanisme favorable au marché qui promet d’atténuer

au moins certain des obstacles auxquels se heurtent les PME et les prêteurs dans le domaine

10 Au Mali, les autorités fiscales (Direction générale des impôts) classent les entreprises comme suit : les petites

entreprises sont celles dont le chiffre d'affaires est inférieur à 50 millions de francs CFA, et les moyennes

entreprises sont celles dont le chiffre d'affaires est compris entre 50 millions et 1 milliard de francs CFA. Cette

définition n'est toutefois pas utilisée ou déclarée par les institutions financières. À l'échelon de la Communauté,

la Commission de l’UEMOA étudie une charte des PME, qui devrait déboucher sur une définition commune des

PME pour la région.

Page 27: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 27 -

du financement. Les services d’appui à la présentation de propositions de financement et

l’assistance technique fournie ultérieurement aux PME sont des éléments très positifs du

programme de services offerts par le Fonds. Son plan d’activité actuel présente toutefois

certaines caractéristiques qui pourraient devoir être revues dans le but de maximiser l’impact

qu’il pourrait avoir et s’assurer que ses services ont une valeur ajoutée :

i. Pour être admissibles à bénéficier de garanties, les banques et les institutions financières

doivent accepter d’imposer un plafond général aux taux d’intérêt qu’elles demanderont

aux emprunteurs bénéficiant d’une garantie. Ces plafonds sont compris entre 8,5 et 9 %,

soit un niveau bien inférieur au taux d’usure qui est de 15 % pour les banques et de 24 %

pour les institutions financières. Ces taux sont inférieurs au taux moyen acquitté par les

emprunteurs en 2013 (9,5 %) et seront donc probablement insuffisants pour encourager

les banques à prêter à des PME qu’elles estiment présenter des risques plus élevés et qui

n’ont guère d’antécédents, sinon aucun, en matière de crédit. De fait, le taux d’usure lui-

même peut réduire l’appétit des banques pour des opérations de prêt à des opérations

nouvelles ou risquées.

ii. Les frais perçus au titre d’une garantie (prime de risque de 1 % par an sur l’encours des

garanties à la charge du prêteur et montant forfaitaire de 2 % à la charge de

l’emprunteur) sont uniformes et ne sont donc pas fonction des risques.

iii. Le plafond de 50 % imposé au montant de la garantie pourrait devoir être relevé pour les

opérations nouvelles ou plus risquées.

iv. L’État est actuellement le principal actionnaire, et aucun actionnaire du secteur privé ne

détient plus qu’une part très faible. Il serait souhaitable que le secteur privé ait une

participation plus importante au capital du fonds de manière à assurer son adhésion et

promouvoir des politiques répondant aux besoins des bénéficiaires.

39. L’insuffisance des systèmes d’information sur le crédit au sein de l’UEMOA a eu

pour effet de limiter l’accès à ce dernier, car les prêteurs n’ont pas les outils nécessaires pour

évaluer la solvabilité de nouveaux emprunteurs. Elle a aussi sans doute contribué au niveau

relativement élevé des prêts improductifs dans le secteur bancaire. Jusqu’à présent, les États

membres de l’UEMOA n’avaient accès qu’à un registre de crédit public à la BCEAO. Ce

dernier ne fournissait que des informations limitées (informations négatives et encours envers

les banques), et les informations communiquées n’étaient pas toujours à jour ni complètes.

C’est pourquoi de nouvelles lois ont été promulguées à l’échelon régional et à l’échelon

national dans le but de mettre en place un nouveau bureau d’information sur le crédit privé

(BIC) qui a pour mission de combler les carences des systèmes d’information actuels. La loi

nationale a été promulguée en avril 2015, et le BIC n’est pas encore opérationnel, mais sous

réserve qu’il soit dûment établi, il devrait contribuer à élargir l’accès au crédit dans la région.

40. Le crédit-bail, qui est une forme de financement à moyen et long terme

particulièrement bien adapté au financement des besoins d’investissement des PME, est

insuffisamment développé au Mali. Celui-ci ne compte qu’une seule société de crédit-bail,

Alios Leasing, spécialisée dans la vente à bail de camions et de véhicules de transports

Page 28: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 28 -

commerciaux (90 % du portefeuille). Un second bailleur spécialisé, Equibail, a été incorporé

dans une division de la Bank of Africa, car il a été jugé trop petit pour fonctionner en tant

qu’entité indépendante. Le crédit-bail représentait moins de 1 % des crédits consentis par les

banques et les institutions financières non bancaires à la fin de décembre 2013, et diminue en

termes relatifs et absolus.

41. Le crédit-bail n’a pas connu de succès au Mali, malgré d’importants besoins de

financement d’installations et de matériels non satisfaits11, faute de législation habilitante

adaptée. Aucune loi particulière ne s’applique au crédit-bail au Mali, bien que les

réglementations financières applicables dans la région de l’UEMOA soient souples et

autorisent aussi bien les institutions financières spécialisées que les banques à offrir des

produits de crédit-bail. La loi bancaire de 2008 fait référence au crédit-bail en tant que produit

de crédit. Cette ambiguïté a provoqué des incohérences ainsi qu’un traitement inadéquat des

biens récupérés et une imposition inappropriée des biens loués à bail. Deux problèmes

principaux se posent :

i. Les procédures de récupération des biens loués à bail en cas de défaillance du

loueur sont lourdes. Les loueurs à bail ne sont pas considérés être les propriétaires

des biens, et doivent suivre les mêmes longues procédures de recouvrement que les

autres créanciers. Il n’existe pas de procédure simplifiée ou rapide permettant de

recouvrer les biens loués, et les locataires peuvent demander aux tribunaux de

suspendre le recouvrement. Qui plus est, comme le droit de propriété du loueur à bail

n’est pas reconnu, ce dernier doit souvent contracter des hypothèques ou des sûretés

sur le bien, ce qui accroît encore le coût et la complexité de l’opération.

ii. Le crédit-bail fait actuellement l’objet d’un traitement fiscal défavorable. Il est

assujetti à une TVA à un taux défavorable, ainsi qu’à la double imposition du transfert

des biens loués à bail (lors de l’achat de ces derniers par le loueur à bail et de nouveau

lors de leur transfert aux locataires).

42. Il conviendrait de promulguer des textes de loi précis pour établir une base

juridique solide et assurer un régime fiscal et un système de recouvrement adaptés au

crédit-bail. Il existe essentiellement trois options pour promouvoir de tels textes de loi : il est

possible de procéder à l’échelon national, à l’échelon de l’UEMOA par le biais de la législation

financière, ou au niveau de l’OHADA par le biais d’un acte uniforme qui s’appliquerait aux

17 pays membres de l’Organisation. L’OHADA est consciente des besoins en ce domaine,

mais le processus et le calendrier de promulgation d’un nouveau texte par l’Organisation sont

longs. La BCEAO, également consciente du problème, a demandé au Groupe de la Banque

mondiale de lui fournir une assistance technique pour l’aider à formuler des textes de loi dans

le but de préparer un avant-projet pour septembre 2015. Si, toutefois, ni l’OHADA ni

11 L’IFC a réalisé une enquête sur la demande de crédit-bail au Mali en 2011, qui a révélé une importante

demande non satisfaite en ce domaine.

Page 29: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 29 -

l’UEMOA n’agissent, le Mali pourrait promulguer une loi interne (comme l’ont fait d’autres

États membres de l’UEMOA ou de l’OHADA).

Inclusion financière

43. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté

qui règne et de l’étendue du pays. Elle s’est améliorée au cours des dernières années, mais

reste faible, puisque juste 12,4 % de la population âgée de plus de 15 ans est titulaire d’un

compte bancaire (contre 7,4 % en 2009, soit un pourcentage légèrement supérieur à la moyenne

de l’UEMOA qui est de 12,2 %). Lorsque l’on prend en compte d’autres petites institutions

financières et services, la situation devient plus favorable. Comme le montre le tableau 8 ci-

dessous, lorsque les institutions de microfinance, les services financiers numériques, les

services d’épargne postale et autres sont pris en considération, cette proportion atteint près de

50 % pour la fin de 2013. Ces chiffres de la banque centrale ne prennent toutefois pas en

compte le fait que des personnes peuvent détenir des comptes dans plus d’une institution, de

sorte que les chiffres relatifs à l’inclusion financière générale — simplement obtenus en faisant

la somme des titulaires de comptes de différents types — sont sans aucun doute surestimés.

Page 30: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 30 -

Tableau 8. Indicateurs d’inclusion financière, pourcentage de Maliens de plus de 15 ans

2009 2010 2011 2012 2013

Comptes dans une banque

commerciale 7,3 9,3 11 13 12,4

Institutions de microfinance 12,7 15,7 14,5 13,5 20,4

IF au sens large 20 25 25,5 26,5 32,8

Prestataire d’argent électronique au

sens large 20 27,4 31,4 35,9 47,9

Source : BCEAO

44. Selon la dernière enquête sur la demande de Findex (2014), le Mali affiche des

résultats moins bons que les comparateurs du groupe de pays pairs pour la plupart des

indicateurs essentiels de l’inclusion financière. Dans certains domaines (crédit, épargne), la

situation s’est détériorée depuis l’enquête précédente qui remonte à 2011. Cette situation est

en partie imputable aux caractéristiques géographiques du Mali et au conflit survenu entre les

deux enquêtes. Des indicateurs représentatifs pour le Mali, l’Afrique subsaharienne et tous les

pays à faible revenu sont présentés dans le tableau 9 ci-après.

Tableau 9. Indicateurs d’inclusion financière, en pourcentage des adultes de plus de

15 ans

Mali

Afrique

subsaharienne

Pays

à faible revenu

Compte dans une institution financière -2014 13,3 28,9 22,3

Compte dans une institution financière -2011 8,2 23,9 21,1

Compte par téléphonie mobile 11,6 11,5 10,0

Possède une carte de débit 4,0 17,9 6,6

Possède une carte de débit (2011) 1,8 15,0 6,3

A épargné dans une IF durant l’année écoulée 2,9 15,9 9,9

A épargné dans une IF durant l’année écoulée

(2011) 4,5 14,3 11,5

A emprunté auprès d’une IF 2,7 6,3 0,6

A emprunté auprès d’une IF (2011) 4,8 11,7 Source : Findex 2014

45. La rapide expansion de l’argent mobile promet de faire bénéficier de services

financiers les régions rurales isolées du Mali. Les pays du monde entier découvrent les vastes

possibilités offertes par les opérations bancaires sans agence et le recours aux nouvelles

technologies pour atteindre des individus auxquelles il est coûteux et difficile de fournir des

Page 31: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 31 -

services par le biais d’activités bancaires traditionnelles en agence. Le Mali présente des

conditions particulièrement difficiles à cet égard en raison de sa vaste superficie et de l’ampleur

de ses zones rurales isolées. Il est essentiel, pour accroître l’inclusion financière, de trouver

des systèmes de distribution à faible coût permettant de réaliser de nombreuses transactions de

faible valeur. Les services de téléphonie mobile, qui ont une large couverture au Mali, offrent

une telle opportunité, et les services de banque mobile sont l’un des seuls domaines dans lequel

le Mali affiche des résultats relativement meilleurs que ses pairs. Bien que l’on ne dispose

d’aucune donnée de Findex pour 2011, l’expansion des services de banque mobile a été

particulièrement rapide en 201412, ce dont ne témoignent pas les chiffres présentés plus haut.

L’UEMOA a actuellement un modèle de services financiers mobiles basé sur les banques, mais

les autorités régionales devraient autoriser des prestataires de services de paiement non

bancaires à réaliser ce type d’opération dans un avenir proche. Orange Money, qui opère

actuellement dans le cadre d’une banque agréée (BICIM) et qui est de loin le plus important

prestataire de services de paiement mobile au Mali, a fait savoir qu’il avait l’intention de faire

une demande de licence de prestataire de services de transfert d’argent électronique.

46. Les services actuels de banque mobile doivent être élargis pour ne plus se limiter

aux services de paiement de base par téléphone mobile pour inclure un menu plus

complet de services d’envois de fonds, de produits d’épargne, de crédit et d’assurance.

À l’heure actuelle, l’argent mobile sert essentiellement à effectuer des transferts de personne

à personne et des opérations de paiement et d’encaissement, bien qu’il permette aussi de régler

des factures et d’obtenir d’autres services. De plus amples efforts devront être déployés pour

élargir le réseau d’agents, les points où cet argent est accepté et son utilisation. Les prestataires

collaborent déjà avec plusieurs ONG. et bailleurs de fonds pour effectuer des transferts

sociaux aux bénéficiaires. Assurer un accès quasi- universel à ces services permettra de

réduire l’informalité au sein de l’économie et d’approfondir et d’élargir les circuits du secteur

financier.

47. Bien que la conception et la promotion de produits incombent aux prestataires

du secteur privé, l’État a un rôle important à jouer en encourageant le recours aux

services financiers numériques. Il serait possible d’accélérer cette évolution en faisant

passer les systèmes de paiement de masse de plateformes en espèces à des plateformes

numériques, notamment les paiements de l’État au titre des salaires et les autres paiements de

l’État à des personnes (G2P), comme les pensions et les transferts sociaux ; les paiements de

l’État à des entreprises (G2B), et les paiements de personnes à l’État (P2B) comme les

redevances et les impôts. L’État devrait, dans toute la mesure du possible, réduire ou éliminer

l’emploi d’espèces et transférer tous les paiements vers des comptes bancaires ou des comptes

d’argent électronique, pour donner une impulsion majeure à l’élargissement de l’inclusion

financière.

48. Les récentes réglementations au terme desquelles les banques doivent offrir

certains services bancaires gratuitement réduiront le coût des services bancaires et

12 Orange Money a actuellement 2 500 000 comptes, soit environ deux fois plus que le nombre de comptes

d'argent électronique indiqué pour la totalité des prestataires à la fin de 2013.

Page 32: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 32 -

pourront contribuer à promouvoir une plus grande inclusion financière. De nouvelles

réglementations ont été publiées en octobre 2014, au terme desquelles les banques doivent

offrir 19 services gratuitement. La plupart (mais non la totalité) des services figurant sur la liste

sont gratuits dans la plupart des régions du monde (dépôts et retraits d’espèces, transferts

interbancaires et retrait d’argent aux billetteries, relevés mensuels, etc.). La perception de frais

récurrents au titre d’opérations courantes a pour effet de réduire l’épargne et de décourager les

particuliers — en particulier ceux qui ont de faibles revenus et qui ont des rentrées d’argent

irrégulières — d’ouvrir ou d’utiliser un compte bancaire.

VII. Recommandations

49. Le tableau ci-après récapitule les principales recommandations formulées par la

mission pour promouvoir un secteur bancaire stable, inclusif et efficace contribuant à la

croissance économique et au développement.

Tableau 10. Principales recommandations

Principales recommandations Responsabilité Priorité CT/MT

Réglementations et supervision bancaire

En prévision du passage à Bâle II/III et de

l’adoption des IFRS, envisager d’obliger le

classement des prêts lorsqu’ils sont en arriéré

de 90 jours et non pas de 180 jours

BCEAO; CB H CT

Envisager de ramener le plafond applicable aux

prêts sur une seule signature de 75 à 25 % du

capital

BCEAO; CB;

Council of

Ministers

H MT

Mettre en place une supervision transfrontalière

consolidée

BCEAO; CB M MT

Veiller à ce que la poursuite du passage à un

compte unique du Trésor (Phase II) s’effectue

sans causer de problèmes de liquidités ni de

contraction des crédits à l’économie

BCEAO; MoF M CT

Divulgation de l’information, transparence et protection du consommateur

Renforcer les obligations de divulgation de

l’information en exigeant l’application de

méthodes standards pour calculer et publier les

BCEAO; CB M MT

Page 33: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 33 -

coûts totaux et les rendements et divulguer les

conditions de base

Renforcer les mécanismes de règlement des

différends en établissant des normes minimales

pour le traitement interne des plaintes par les

IF ; et mettre en place un mécanisme efficace

de règlement des différends rapide et peu

onéreux

BCEAO; CB M MT

Publier et diffuser plus fréquemment des

informations à jour et détaillées sur le secteur

bancaire, sous une forme facilement accessible

BCEAO; CB M MT

Envisager d’exiger des banques qu’elles passent

en charge les créances douteuses après un délai

raisonnable

BCEAO; CB M MT

Élargissement et approfondissement des marchés

Procéder à des enquêtes périodiques sur la

demande des entreprises et des particuliers en

matière de financement pour obtenir des

informations sur lesquelles baser la formulation

des politiques

État malien M MT

Promulguer une loi spéciale pour le crédit-bail

couvrant, entre autres, les questions fiscales et

de recouvrement des biens qui entravent le

développement de ce produit

Autorités

régionales et/ou

nationales

(Conseil des

ministres de

l’UEMOA ou

OHADA, et

ministère des

Finances)

M CT

Reconsidérer certaines mesures qui encouragent

les banques à investir dans des titres publics

plutôt que dans les crédits au secteur privé

(exemptions fiscales, pondération nulle des

risques)

BCEAO,

Conseil des

ministres

H M

Promouvoir un plus large recours aux services

financiers numériques en déplaçant les services

de paiement de masse de plateformes en

espèces à des plateformes numériques, y

compris les paiements de l’État comme les

salaires, les pensions et les transferts sociaux ;

Prestataires du

secteur privé et

utilisateur ; État

et organismes

publics

. H MT

Page 34: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 34 -

les paiements de l’État aux entreprises (G2B),

et les paiements de personnes à l’État (P2B)

notamment au titre des commissions et des

taxes.

Reconsidérer les plafonds de taux d’intérêt et

les primes de risques uniformes au titre des

garanties émises par le FGSP. Encourager

l’accroissement de la participation du secteur

privé au capital.

État malien,

FGSP

M CT

Infrastructure des marchés financiers

Appliquer la récente loi portant création du

Bureau d’information sur le crédit

Ministère des

Finances, BIC,

APBEF,

services

d’utilité

collective et

autres

utilisateurs

H CT

Page 35: PROGRAMME D EVALUATION DU SECTEUR FINANCIER MALI...6. L’inclusion financière est difficile au Mali en raison de l’ampleur de la pauvreté qui règne, de l’étendue du pays et

- 35 -

Appendice 1 : Indicateurs de solidité financière

2009 2010 2011 2012 2013

Adéquation des fonds

propres aux besoins

Norme de fonds propres 7,7 13,7 11,7 11,4 12,9

Fonds propres/Total des

actifs 4,6 7,5 8,3 7,7 7,9

Qualité des actifs

Prêts improductifs

bruts/total des prêts 25,4 18,9 18,6 21,5 19,3

Prêts improductifs nets

/total des prêts 11,6 8,4 6,5 8,7 8,3

Provisions/prêts

improductifs bruts 61,4 60,6 68,8 63,4 62,1

Prêts improductifs nets

/valeur nette 82,9 44,8 38,7 50,8 52,1

Rentabilité

Coût moyen des fonds

empruntés 1,9 1,9 1,8 1,9 1,8

Taux d’intérêt moyen des

prêts 9,8 9,4 10,0 9,9 9,5

Marge d’intérêt brut 7,9 7,5 8,2 8,0 7,7

Rendement de l’actif RDA 0,6 1,4 1,7 1,3 1,2

Rentabilité des fonds

propres 6,8 8,6 14,9 12,5 14,1

Dép. hors intérêts/revenu

bancaire net 63,1 59,6 56,5 57,5 59,6

Liquidité

Ratio prêts/dépôts 72,2 82,6 88,0 88,5 89,7

Actifs liquides/Total des

actifs 33,8 32,7 36,7 34,8 34,4

Actifs liquides /

engagements CT 61,2 92,9 89,4 90,0 98,0