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REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2010 - N°420 // 93 Rubrique proposée par Gérard Guez, avocat à la Cour - [email protected] Nous savons tous la définition de l’examen de biologie médicale (exit l’analyse), un des fondamentaux de la médicalisation de la biologie. Le prélè- vement (phase pré-analytique) en fait partie. Cet examen comprend aussi, bien sûr, l’interprétation contextuelle du résultat. La prescription reste la base avec ses élé- ments cliniques pertinents. Le biologiste peut réaliser d’autres examens, ne pas réa- liser ceux de la prescription, proposer des modifications au prescripteur (qui peut les refuser), dans le respect de la NABM. S’il y a urgence, ou indisponibilité du prescripteur, le biologiste n’est pas obligé de lui soumettre les modifications. Le biologiste peut, à la demande d’un patient sans prescription, réaliser un examen, non remboursable : il doit l’en informer. Biologiste responsable Le biologiste est responsable des per- sonnel, lieu et matériel de prélèvement. L’ordonnance définit les personnes qui prélèvent, les conventions à établir, le rôle du biologiste et les sites où doit se réaliser l’examen. Qui sera responsable auprès des CPAM ? Qui aura fait le prélèvement, qui aura exé- cuté les examens, qui aura signé les résul- tats, avec ces conventions, ces délégations, ces biologistes coresponsables qui vont se déplacer d’un laboratoire à l’autre ? Qui aura modifié la prescription ? Le médecin n’était-il vraiment pas là ? À qui la charge de la preuve ? Il faut absolument éviter tout risque de confusion avec une suspicion de fraude : rajout manuscrit sur une prescrip- tion par exemple. Le prélèvement est réalisé dans l’un des territoires de santé infrarégionaux d’im- plantation du LBM, sauf dérogation. La transmission d’échantillons pour l’exa- men de biologie médicale, d’un LBM à un autre, ses conditions, les contrats de coopération et la proportion de transmis- sions… figurent à l’ordonnance. Seuls les contrats de collaboration conclus avant sa publication restent valables jusqu’au 1/11/2013. Sauf les laboratoires à but non lucratif, les LBM privés sont dirigés par un biologiste responsable, représentant légal. Si la struc- ture juridique du LBM le permet, plusieurs représentants légaux sont désignés biolo- gistes coresponsables. Le biologiste responsable, les biologistes coresponsables et les médecins anato- mo-cytopathologistes coresponsables ne peuvent exercer cette fonction que dans un seul laboratoire. Le Comité français d’accréditation (COFRAC) est l’unique organisme d’accré- ditation pour les normes EN ISO NF15189 et 22870 (biologie délocalisée). La HAS a cependant un rôle essentiel : veiller à la cohérence des procédures avec la politi- que de santé. Les décisions du COFRAC seront transmises à la HAS, à l’Agence française de sécurité sanitaire des pro- duits de santé (AFSSAPS), à l’Agence de la biomédecine et à l’Agence régionale de santé (ARS). Le contrôle de qualité du résultat des exa- mens sera assuré par l’AFSSAPS, modalités à préciser par décret. LBM multisites La réforme met en place des systèmes de garantie de la pluralité de l’offre de biologie médicale dans un territoire de santé. À ce titre, l’ARS peut s’opposer à l’ouverture d’un LBM ou d’un site si elle risque de porter, Réforme de la biologie Propos sur l’Ordonnance du 13 janvier 2010 « réformant la biologie » « Des biologistes qui assurent des biologistes » MADP assureur confraternel et partenaire d’Entreprise labo © BSIP/TETRA © BSIP/TETRA

Propos sur l’Ordonnance du 13 janvier 2010 « réformant la biologie »

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Page 1: Propos sur l’Ordonnance du 13 janvier 2010 « réformant la biologie »

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2010 - N°420 // 93

Rubrique proposée par Gérard Guez, avocat à la Cour - [email protected]

Nous savons tous la définition de l’examen de biologie médicale (exit l’analyse), un des fondamentaux de la médicalisation de la biologie. Le prélè-vement (phase pré-analytique) en fait partie. Cet examen comprend aussi, bien sûr, l’interprétation contextuelle du résultat.

La prescription reste la base avec ses élé-ments cliniques pertinents. Le biologiste peut réaliser d’autres examens, ne pas réa-liser ceux de la prescription, proposer des modifications au prescripteur (qui peut les refuser), dans le respect de la NABM. S’il y a urgence, ou indisponibilité du prescripteur, le biologiste n’est pas obligé de lui soumettre les modifications.

Le biologiste peut, à la demande d’un patient sans prescription, réaliser un examen, non remboursable : il doit l’en informer.

Biologiste responsable

Le biologiste est responsable des per-sonnel, lieu et matériel de prélèvement. L’ordonnance définit les personnes qui prélèvent, les conventions à établir, le rôle du biologiste et les sites où doit se réaliser l’examen.

Qui sera responsable auprès des CPAM ? Qui aura fait le prélèvement, qui aura exé-cuté les examens, qui aura signé les résul-tats, avec ces conventions, ces délégations, ces biologistes coresponsables qui vont se déplacer d’un laboratoire à l’autre ? Qui aura modifié la prescription ? Le médecin n’était-il vraiment pas là ? À qui la charge de la preuve ? Il faut absolument éviter tout risque de confusion avec une suspicion de fraude : rajout manuscrit sur une prescrip-tion par exemple.

Le prélèvement est réalisé dans l’un des territoires de santé infrarégionaux d’im-plantation du LBM, sauf dérogation. La transmission d’échantillons pour l’exa-men de biologie médicale, d’un LBM à un autre, ses conditions, les contrats de coopération et la proportion de transmis-sions… figurent à l’ordonnance. Seuls les contrats de collaboration conclus avant sa publication restent valables jusqu’au 1/11/2013.

Sauf les laboratoires à but non lucratif, les LBM privés sont dirigés par un biologiste responsable, représentant légal. Si la struc-ture juridique du LBM le permet, plusieurs représentants légaux sont désignés biolo-gistes coresponsables.

Le biologiste responsable, les biologistes coresponsables et les médecins anato-mo-cytopathologistes coresponsables ne peuvent exercer cette fonction que dans un seul laboratoire.

Le Comité français d’accréditation (COFRAC) est l’unique organisme d’accré-ditation pour les normes EN ISO NF15189 et 22870 (biologie délocalisée). La HAS a cependant un rôle essentiel : veiller à la

cohérence des procédures avec la politi-que de santé. Les décisions du COFRAC seront transmises à la HAS, à l’Agence française de sécurité sanitaire des pro-duits de santé (AFSSAPS), à l’Agence de la biomédecine et à l’Agence régionale de santé (ARS).

Le contrôle de qualité du résultat des exa-mens sera assuré par l’AFSSAPS, modalités à préciser par décret.

LBM multisites

La réforme met en place des systèmes de garantie de la pluralité de l’offre de biologie médicale dans un territoire de santé. À ce titre, l’ARS peut s’opposer à l’ouverture d’un LBM ou d’un site si elle risque de porter,

Réforme de la biologie

Propos sur l’Ordonnance du 13 janvier 2010 « réformant la biologie »

« Des biologistes qui assurent des biologistes »

MADP assureur confraternel et partenaire d’Entreprise labo

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sur le territoire de santé, l’offre d’examens de biologie à un niveau dépassant 25 % des besoins de la population tels définis par le SROS.

L’ARS est aussi habilitée à s’opposer à une acquisition d’un LBM ou à une fusion de laboratoires si elle conduit à ce que, sur tel territoire de santé, la part réalisée par le LBM issu de cette acquisition ou de cette fusion dépasse 25 % du total des examens de biologie médicale réalisés.

Les sites du LBM se trouvent soit sur le même territoire de santé, soit sur 2 et au maximum sur 3 territoires de santé limitro-phes, sauf dérogation du SROS, motivée par une insuffisance de l’offre.

Un biologiste médical au moins exerce sur chaque site du laboratoire de bio-logie médicale aux heures d’ouverture. Cela ne s’applique pas aux heures de permanence auxquelles, toutefois, un biologiste peut intervenir en fonction des besoins du patient.

Le nombre de biologistes médicaux en exercice au sein d’un laboratoire de biologie médicale détenant une fraction du capital social et travaillant au moins un mi-temps dans le laboratoire est égal ou supérieur au nombre de sites de ce laboratoire.

Ouverture d’un LBM

Elle est subordonnée au dépôt préalable, par son représentant légal, d’une décla-

ration auprès de l’ARS, dans un délai fixé par voie réglementaire.

Avant l’ouverture d’un nouveau LBM, l’instance nationale d’accréditation lui délivre, à sa demande, une attestation provisoire établissant qu’il satisfait aux critères d’accréditation susceptibles d’être vérifiés avant ouverture. Elle prend, après l’ouverture du laboratoire et dans un délai fixé par voie réglementaire, la décision d’accréditation relative aux examens ou activités que le laboratoire réalise.

Avant l’ouverture du laboratoire, son représentant légal communique à l’ARS l’attestation provisoire délivrée par l’ins-tance nationale d’accréditation.

SDB news, 11/2/2010

Par définition, les mesures transitoires permettent un passage de l’ancienne législation à la nouvelle. S’agissant d’une réforme de fond de la loi de 1975, elle-même principalement intégrée dans une réforme portée par la loi HPST, qui met en place de nouvelles structures administra-tives territoriales, les ARS (au plus tôt en juillet prochain), la gestion de la période transitoire est complexe.

Modalités de regroupement et d’ouver-ture de sites permettant l’obtention d’une autorisation administrative dans le cadre de l’ancienne législation

Aujourd’hui tout LBM résultant de la trans-formation de plusieurs laboratoires exis-tants peut se déclarer auprès des autori-tés administratives en tant que laboratoire comportant plus de 5 sites sans attendre la sortie de dispositions réglementaires.

Tout laboratoire ayant une autorisation administrative sous l’ancienne législation ne peut ouvrir un nouveau site qu’à condition qu’il demeure en nombre constant de sites ouverts au public. Cependant un laboratoire ayant eu une autorisation administrative sous l’ancienne législation n’a la possibilité d’augmenter son nombre de sites et donc de créer des sites nouveaux qu’à la condi-tion qu’il soit accrédité pour au moins la moitié de son activité en nombre d’examens de biologie réalisés pendant une année civile, et ce dans des conditions à déter-miner par arrêté ministériel. L’autorisation administrative qui sera délivrée pour la

création de ces sites nouveaux ne pourra être envisagée que jusqu’au 31/10/2011.

Toujours pour les laboratoires ayant une autorisation administrative sous l’ancienne législation, lorsque ces laboratoires étaient réunis avant le 15/1/2010 dans le cadre d’une SEL ou par des contrats de collabora-tion, ces laboratoires qui souhaitent se réunir après le 15/1/2010 sont tenus au regard des règles de territorialité, aux règles anciennes, c’est-à-dire celles régissant les 3 départe-ments limitrophes ou la région Ile-de-France et non les nouvelles règles de territorialité constituée par la limite des trois territoires de santé infrarégionaux limitrophes.

Sur la qualité

Jusqu’au 31/10/2016, date de l’obtention obligatoire de l’accréditation, les LBM non accrédités devront respecter les nouvelles dispositions réglementaires relatives à la bonne exécution des analyses de biologie médicale fixées par arrêté ministériel à venir. Autrement dit, les laboratoires non accré-dités seront soumis, jusqu’au 31/10/2016 à un nouveau Guide de bonne exécution des analyses de biologie médicale, qui reprendra probablement la plupart des règles actuelles du GBEA.

Autorisations

Toute autorisation administrative obte-nue par un LBM avant le 15/1/2010 est valable au plus tard jusqu’au 1/11/2016. S’agissant des laboratoires ayant obtenu avant le 15/1/2010 une autorisation de fonctionnement, ils doivent impérativement avoir commencé à fonctionner avant le

15/3/2010 (2 mois après publication de l’ordonnance). A défaut l’autorisation est caduque.

Contrat de collaboration

Un LBM non accrédité ayant un seul site peut faire réaliser par un autre laboratoire au maximum deux tiers du volume total des examens qu’il effectue in situ, dans le cadre d’un contrat de collaboration jusqu’au 31/10/2013. Idem, tout contrat de collabo-ration conclu avant le 15/1/2010 cesse ses effets au plus tard le 1/11/2013. Autrement dit, il n’est plus possible de conclure depuis le 15/1/2010 de contrats de collaboration, mais ceux conclus avant cette date restent valables jusqu’au 1/11/2013.

Ristournes

Elles n’existeront plus à compter du 1/11/2013 telles qu’elles figurent à l’article L 6211-6 du Code de la Santé publique dans son ancienne rédaction. Ceci s’applique aux contrats conclus soit dans le cadre d’une collaboration, soit dans le cadre de conven-tions avec les établissements de santé avant le 15/1/2010. Ainsi pour les contrats conclus à compter du 15/1/2010, aucune ristourne ne peut être prévue. La ristourne est tout ce qui ne correspond pas à la notion de frais réels et dûment justifiés.

Engagement dans l’accréditation

Après 1/11/2013, les LBM non accrédités devront pour fonctionner justifier obliga-toirement d’une entrée effective dans la démarche d’accréditation.

Mesures transitoires

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droitDROIT I GESTION I FINANCES I PATRIMOINE I TEXTES JURIDIQUES I ECHOS PARLEMENTAIRES

L’article 7 de l’ordonnance stipule que l’autorisation administrative d’un labora-toire de biologie médicale délivrée avant la date de publication de la présente ordon-nance continue de produire ses effets jusqu’à l’accréditation du laboratoire et au plus tard jusqu’à la date mentionnée au IV. Toutefois, si le laboratoire de biologie médicale n’a pas commencé à fonctionner effectivement deux mois après la date de publication de la présente ordonnance, l’autorisation devient caduque.

Les SCP, les SEL, et non toutes les socié-tés commerciales, peuvent exploiter un LBM - la SCP devrait donc pouvoir être multisites.

Acquisition, détention

L’acquisition, par une personne phy-sique ou morale, de parts de sociétés exploitant un laboratoire de biologie médicale, n’est pas autorisée si cette acquisition a pour effet de permettre à cette personne de contrôler, directement ou indirectement, sur un même territoire de santé, une proportion de l’offre de

biologie supérieure à 33 % du total des examens réalisés.

L’autorité de la concurrence a levé une barrière à l’entrée des opérateurs sur ce marché. L’alinéa doit se lire : toute per-sonne physique ou morale peut acquérir des laboratoires, partout, jusqu’à 33 % du total des examens réalisés dans chaque territoire de santé.

Ne peuvent détenir directement ou indi-rectement une fraction du capital social d’une société exploitant un laboratoire de biologie médicale privé :

« 1° Une personne physique ou morale exerçant une profession de santé autori-sée à prescrire des examens de biologie médicale, une activité de fournisseur, de distributeur ou de fabricant de dis-positif médical ou de dispositif médical de diagnostic in vitro, une entreprise d’assurance et de capitalisation, un organisme de prévoyance, de retraite et de protection sociale obligatoire ou facultatif ».

Ainsi, hormis les médecins traitants et autres prescripteurs d’examens, tous autres professionnels de santé peuvent devenir associés d’une SEL exploitant un LBM, à commencer par les infirmières.

« 2° Une personne physique ou morale qui détient une fraction égale ou supérieure à 10 % du capital social d’une entreprise four-nissant, distribuant ou fabriquant des dispo-sitif médicaux ou des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, d’une entreprise d’assu-rance et de capitalisation ou d’un organisme de prévoyance, de retraite et de protection sociale obligatoire ou facultatif ».

C’est une mesure beaucoup moins res-trictive que les anciennes dispositions sur les SEL.

Les cliniques ne figurent plus à la liste des professions interdites, et pourront participer au capital des SEL de LBM. Enfin a disparu la clause d’inaliénabi-lité taxant à 90 % tout transfert d’ac-tions dans les 3 ans, et à 75 % dans les 5 ans.

Autorité de la concurrence

JO du 26/1/2010

Avis n° 10-A-01 du 5 janvier 2010 relatif à un projet d’ordon-nance portant organisation de la biologie médicale

Texte accessible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000021741347&dateTexte=&categorieLien=id

Ministère de la Santé (JO du 30/1/2010)Arrêté du 22 janvier 2010 fixant la liste des maladies don-nant lieu à un dépistage néonatal

Texte accessible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000021763691&dateTexte=&categorieLien=id

Ministère de la Santé

JO du 4/2/2010

Décret n° 2010-114 du 3 février 2010 relatif au comité d’éva-luation de la mise en œuvre des dispositions relatives à la modernisation des établissements de santé de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires

Texte accessible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000021779671&dateTexte=&categorieLien=id

TEXTES JURIDIQUES

JO du 5/2/2010

Arrêté du 13 janvier 2010 fixant le règlement intérieur type devant être adopté par les comités de protection des person-nes

Texte accessible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000021782073&dateTexte=&categorieLien=id

JO du 12/2/2010

Arrêté du 3 février 2010 relatif à la proposition de réalisation d’un frottis cervico-utérin lors du premier examen prénatal

Texte accessible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000021817748&dateTexte=&categorieLien=id

Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer

JO du 19/2/2010

Décret n° 2010-150 du 17 février 2010 relatif au contrôle des produits chimiques et biocides

Texte accessible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000021844023&dateTexte=&categorieLien=id