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La protection des marchandises en droit des transports maritimes
1
INTRODUCTION GENERALE
La généralisation des risques dans la société actuelle, les grandes catastrophes
maritimes, imposent d’accorder une attention particulière aux marchandises qui font l’objet
d’un transport maritime dans le but de les protéger des dommages mais aussi de préserver
l’environnement. Les échanges, notamment commerciaux ont permis d’accélérer le processus
de la mondialisation1 qui a favorisé à son tour la croissance mondiale. A la fin du XXe siècle,
l’impulsion donnée par ces échanges est due en grande partie au développement des
transports. Les transports2, entendus comme les déplacements des hommes et des choses sont
la base même du commerce international. En effet, le commerce international et le transport
plus précisément le transport par voie maritime sont intrinsèquement liés. 90%3 du commerce
international s’effectuent par voie maritime. Le transport par voie de mer bénéficiant du fait
que la planète soit recouverte au trois quart par des océans et des mers a été le premier
système de transport. Au regard de ce constat, la rupture de tout trafic maritime signifie non
seulement la faillite immédiate de nombreuses industries mais également à moyen terme,
l’asphyxie de l’économie internationale4. La place prépondérante du transport maritime dans
l’économie et dans le commerce ne constitue pas un phénomène récent, son origine se situe
loin dans l’histoire.
Pour certains, l’histoire de la marine marchande remonte au milieu du dix-neuvième
siècle et à la révolution industrielle génératrice du capitalisme. Cette époque marque sans
doute une mutation, mais non un commencement. La navigation maritime remonte aux
activités des phéniciens, ils assuraient le transport de marchandise sur leurs propres navires. Il
n’y avait pas d’armateurs de métier, c’est-à-dire de commerçant en état d’offre permanente de
fret ; les armateurs étaient des marchands ou plutôt c’étaient les marchands qui se faisaient
armateurs pour transporter outre-mer leurs produits5. Vers la fin du XVIIe siècle survient une
1 « La mondialisation est un processus historique qui est le fruit de l’innovation humaine et du progrès technique. Elle évoque l’intégration croissante des économies dans le monde entier, au moyen surtout des courants d’échanges commerciaux et des flux financiers », La mondialisation : faut-il s’en réjouir ou la redouter ? préparé par les services du FMI, www.imf.org. 2 Il existe plusieurs types de transport : le transport aérien, le transport maritime, le transport routier 3 Pour les pays africains ce chiffre se situe à au moins 95% du commerce extérieur des Etats 4 Martine Remond-Gouilloud, Droit Maritime, 2e édition, Pedone, paris, 1993,avant-propos 5 René RODIERE, Emmanuel du PONTAVICE, Droit Maritime, 12e éd., précis Dalloz, n°7, p 9.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
2
modification majeure des données économiques internationales : certains pays6 suffisamment
développés commencent à disposer d’une production agricole ou industrielle excédentaire,
qu’ils entreprennent d’exporter. Dès lors l’expédition maritime, fondée sur le transport de
fret7 à l’aller comme au retour devient une opération fructueuse en soi. Désormais le transport
maritime cesse d’être l’accessoire d’une opération commerciale pour devenir une opération à
part entière. En effet, les navires voyageaient au gré des demandes de fret, des itinéraires que
chaque nouveau contrat façonnait ; ils faisaient des transports « à la commande »,
du « tramping »8
En même temps la capacité et la rapidité des navires s’accroissent. De la marine à
vapeur hier aux nouveaux systèmes de navigation des temps modernes, cette évolution
technologique a des incidences sur le plan juridique, financier et politique. Sur le plan
juridique, alors que les navires à voile tributaire des conditions climatiques, ne pouvaient
prévoir la date exacte de leurs escales, l’évolution a permis de prédire le jour d’arriver avec
plus ou moins de précision. De plus les commerçants de part et d’autres des mers peuvent
organiser leurs affaires en fonction de ces dates d’escales et peuvent prendre des commandes.
En ce qui concerne l’incidence sur le plan financier, la marine marchande devient une
industrie autonome et florissante. Le commerce maritime cesse d’être l’apanage des gros
industriels capables d’affréter un navire entier. Sur le plan politique, la puissance d’un Etat se
mesure à l’importance de sa flotte maritime9. L’importance de la flotte maritime est justement
ce qui à l’origine de ce qu’on peut appeler « la bipolarisation du monde en droit maritime ».
D’un côté il y a les grands pays d’armateurs généralement du Nord et d’un autre côté les pays
du Sud qualifiés de pays de chargeurs. L’opposition entre ces deux blocs de pays tourne
essentiellement autour de la question des obligations et responsabilités des différentes parties
au contrat de transport.
6 Notamment la France, l’Espagne, l’Angleterre 7 Le terme fret, équivoque peut revêtir trois sens : soit il désigne le prix du transport de marchandises par mer, soit comme ici, la cargaison transportée, laquelle donne lieu au versement d’un fret, soit enfin, il désigne le prix d’affrètement d’un navire. Dans ce dernier sens on parle de l’évolution des taux de fret, du courtage de fret 8 Tramping du mot anglais « tramp » qui signifie vagabond ; le navire tramp n’a pas de destination fixé à l’avance, il va d’un port à l’autre là où le hasard des contrats l’appelle 9 Au 19e siècle par exemple la suprématie de l’Angleterre était essentiellement basée sur l’importance de flotte marchande ; pour illustrer le rôle important de la mer rappelons cette phrase de Disraeli « ceci est salé donc ceci est à nous »
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
3
La convention internationale10 pour l’unification de certaines règles en matière de
connaissement, adoptée le 25 août 1924 à Bruxelles qui avait pour but d’établir un régime
juridique international uniforme à suscité avec le temps un vent d’insatisfaction dû en parti au
sentiment que la répartition globale des responsabilités et des risques favorisent largement le
transporteur au détriment du chargeur. La question de la révision du droit relatif au transport
de marchandise par mer a ainsi été soulevée et on a abouti à l’adoption d’une nouvelle
convention le 31 mars 1978 en Allemagne, dite Règles de Hambourg11. Notons que le Code
de la marine marchande de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale
reprend en son chapitre deux sur le contrat de transport de marchandises par mer les
dispositions des Règles de Hambourg12. Pour autant les polémiques et les controverses n’ont
pas cessé autour du système de responsabilité du transporteur. La division des pays a plus que
jamais été effective.
Dans le souci d’aboutir à une « ré-unification »13 des règles, l’assemblée générale des
Nations Unies a adoptée en 2008 une nouvelle convention appelée « Règles de Rotterdam »14.
Cette convention à été soumise à la signature des Etats le 23 septembre 2009 à Rotterdam au
Pays-Bas. Cette nouvelle convention a pour ambition de rallier tous les Etats et d’être la seule
qui régisse le domaine du droit de transport maritime. Les Nations Unies sont entrain de tout
mettre en œuvre pour attirer et convaincre le plus grand d’Etats et surtout écarter les
réticences des pays africains. Sa vulgarisation se fait par l’intermédiaire des séminaires
internationaux comme celui de Yaoundé qui s’est déroulé les 18 et 19 mars 201015.
10 Le terme convention au sens générique vise tous les accords internationaux tout comme le mot traité qui est défini par la convention de vienne de 1969 sur le droit des traités entre Etats en son art. 2 comme étant un « accord international conclu par écrit entre Etat et régi par le droit international, qu’il soit consigné dans un instrument unique ou dans deux ou plusieurs instruments connexes, et quelle soit sa dénomination particulière » 11 Pour une étude approfondie de cette convention lire G. Auchter, « La convention sur le transport de marchandises par mer » (Règles de Hambourg 1978), Droit Européen des transports, 1979, vol. XIV, n°1,2 et 3, p.3 et s et 215 et s ; Bonassies, Les Règles de Hambourg une avancée certaine, mais modeste, JMM 1988. 1341 et s ; Makouta, La protection du chargeur à travers la convention du 25 aout 1924 et les Règles de Hambourg, JMM 1988.821 et s, cités par R . Rodière et E. du Pontavice, Droit Maritime, 12e édition, précis Dalloz, p385 n° 394 12 Art. 395 al 4 « Les dispositions du présent chapitre découlent de celles de la convention de Hambourg, 1978, sur le transport de marchandises par mer, à laquelle il est fait référence et qui est appliquée à titre supplétif. » 13 L’expression est empruntée au Pr Delebecque 14 On doit cette dénomination au Pr Gertjan van der ZIEL, I. K. DIALLO, communication sur « Les obligations et responsabilités du chargeur envers le transporteur », Règles de Rotterdam 11 décembre 2008- colloque du 21 septembre 2009 à Rotterdam, www.rotterdamrules2009.com. 15 Le séminaire international sur la convention des Nations Unies sur le contrat de transport International des marchandises, effectué entièrement ou partiellement par mer avait pour thème ‘’Les Règles de Rotterdam : Quel apport pour l’Afrique ?’’, organisé par le Conseil National des Chargeurs du Cameroun ( CNCC) en collaboration avec la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International ( CNUDCI), le Comité Maritime International ( CMI) et l’Union des Conseils des Chargeurs Africains (UCCA) avait pour intervenants plusieurs chefs de délégation au groupe de travail n°3 de la CNUDCI, experts maritimes et
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
4
La place prépondérante qu’occupe le problème de la recherche d’un équilibre entre
transporteurs et chargeurs relègue au second plan certaines autres préoccupations non moins
importantes comme celle de la protection des marchandises.
Les marchandises objet du contrat de transport par mer, celui-ci étant défini comme
tout contrat par lequel un transporteur s’engage contre paiement d‘un fret à déplacer les
marchandises d’un port à un autre ; lors de leur acheminement peuvent subir des dommages,
qui seront dans la plus part des cas à l’origine du contentieux sur la responsabilité de l’une ou
l’autre partie. De plus, richesse ou créatrice de richesse, les marchandises ont un rôle
important à jouer sur le plan économique et même sur le plan social, elles constituent
également un indicateur de choix en ce qui concerne la santé de l’économie d’un pays et
même de l’économie mondiale. Il n’est donc pas superflu de s’intéresser à leur sécurisation
d’autant plus que le nombre de naufrages et pertes de navires de marchandises est très élevé.
En effet, ces dernières années, plusieurs navires ont chaviré causant des pertes énormes, parmi
ces catastrophes on peut citer le naufrage du m/S Joola, navire transportant des marchandises
et des passagers le 26 septembre 2002 ; la perte du Zonobia en 1980, la perte de l’Espresso
Sardegna en 1973 et plus récemment la collision dans la nuit du 26 au 27 janvier 2010 à
l’entrée du chenal du port de Douala du navire cargo « Jupiter Ace » et du navire « Alexandra
Express » entraînant le naufrage de ce dernier ainsi que la perte et les dommages
considérables des cargaisons qu’il transportait. Contrairement à d’autres secteurs d’activités
qui ont connu après des catastrophes majeures, pour le transport des marchandises
dangereuses parmi les plus importantes, l’échouement de l’Amoco Cadiz le 16 mars 1978 qui
déversa près de 277000 tonnes de pétrole brut, l’échouement de l’Exxon Valdez le 23 mars
1989, la catastrophe de l’Erika le 11 décembre 1999, une réglementation tendant à prévenir
ces dernières et l’institution de dommages spécifique comme le dommage écologique, le
transport maritime de marchandises ordinaires a mollement réagi.
Le transport maritime s’inscrit dans une perspective plus large qui est celle du droit du
commerce international entendu comme étant l’ensemble de règles qui régule le flux des
marchandises et des services entre les espaces économiques nationaux. En plus, le droit des
enseignants d’université. Pour une synthèse des travaux, L. le rapport de synthèse du séminaire présenté par le Pr Martin NDENDE, ainsi que toute la documentation mise à la disposition des participants par le CNCC et disponible au centre de documentation de cette structure, rappelons que ce séminaire était le premier du genre en Afrique subsaharienne. Le Cameroun a signé cette convention le 29 septembre 2009 au siège des Nations Unies à New-York (USA), pour une liste des pays signataires des Règles de Rotterdam consulter le site de la CNUDCI www.uncitral.org
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
5
transports maritimes est une discipline qui se situe à la charnière du droit public16 et du droit
privé, intéresse également le droit international public17. Toutefois, malgré ces ramifications,
le droit maritime est une discipline autonome. D’essence purement internationale, le droit
maritime oblige toute étude à être mené sur le même plan. Cette nature internationale découle
de ce que la mer à l’inverse des frontières terrestres qui divisent les systèmes juridiques et les
peuples, a toujours été un trait d’union entre les cultures juridiques, un lieu de rencontre entre
les hommes.
Le thème de la protection des marchandises en droit des transports maritimes fait
ressortir deux éléments principaux à savoir, marchandises et protection.
En droit des transports maritimes, est considéré comme marchandises tout bien de nature
quelconque qu’un transporteur s’engage à déplacer en vertu d’un contrat de transport18.
Certaines conventions internationales19 considèrent également comme étant des marchandises
les animaux vivants, l’emballage et tout équipement et conteneur qui ne sont pas fournis par
le transporteur ou pour son compte. Dans le transport maritime et dans les transports en
général ont distingue les marchandises dangereuses des marchandises ordinaires. Les
premières faisant l’objet d’une réglementation minutieuse20 quant à ce qui concerne les
modalités de transport et les méthodes de protection tant de l’environnement que des
personnes et même de la cargaison seront exclues de cette étude. Littéralement, le terme
protection est entendu comme l’action ou le fait de protéger quelque chose, c’est une action
de sauvegarde. En droit, le terme protection recouvre plusieurs réalités : elle peut être
diplomatique21, fonctionnelle22 ou juridictionnelle provisoire. En droit des transports, le mot
protection vise généralement la sécurisation, la sauvegarde de la cargaison d’une part et
d’autre part, dans des cas particuliers, elle peut être préventive ou répressive. La protection
des marchandises ordinaires désigne le fait de mettre en œuvre des mécanismes de
sécurisation de la cargaison contre les risques, les dommages pendant le transport.
16 L’Etat ne peut se désintéresser du développement de sa marine marchande ni des relations établies par la mer. Les nécessités du commerce d’importation et d’exportation, le désir d’une influence internationale par des relations régulières le poussent à encourager la marine marchande par différents moyens. 17 Ceci pourrait s’expliquer par le caractère international de ce droit 18 Il ressort de cette définition qu’à l’exception des immeubles, tout bien peut faire l’objet d’un contrat de transport. 19 Les Règles de Hambourg notamment, art 1 et les Règles de Rotterdam. 20 Il s’agit notamment du Code IMDG (International Maritime Dangerous Goods), code maritime international des marchandises dangereuses. 21 La protection diplomatique est celle que l’Etat peut assurer à ses nationaux lorsqu’ils ont été lésés par des actes contraires au Droit international commis par un Etat étranger et qu’ils n’ont pu obtenir réparation par les droit interne de cet Etat. Lexique des termes juridiques 13e éd, Dalloz. 22 Cette protection est assurée par une organisation internationale à ses agents ou à ses ayants droits victimes d’un dommage causé par un Etat en violation du Droit international. Lexique des termes juridiques, 13e éd, D.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
6
Faire une étude sur la protection des marchandises conduit à inventorier puis à évaluer
les mécanismes de protection existants. La question étant alors de savoir dans quelle mesure
le droit positif assure-t-il ou sécurise-t-il la cargaison, face aux risques d’avaries et de perte
des marchandises ?
Se pencher sur la protection des marchandises permet d’abord de recentrer le débat sur
un thème qui est généralement exclu des grandes discussions au profit de l’équilibre entre les
parties. Autant il a été signalé que la résolution de ce dernier problème est primordiale pour
une question de bonne entente entre différents Etats, autant la thématique de la protection des
marchandises a un impact sur le plan économique. Car les marchandises transportées par voie
de mer constituent les premiers échanges commerciaux mondiaux et sont coûteuses malgré
leur faible valeur unitaire et elles sont considérées comme élémentaires dans la vie
quotidienne.
D’un autre point de vue l’absence d’une réglementation précise et adaptée sur ce
thème est la première cause d’un abondant contentieux maritime. Une étude sur la question
serait un point de départ non seulement pour des règles claires mais aussi pour les
professionnels qui trouveraient en ces règles un outil efficace pour la gestion de leurs affaires.
Le législateur s’est depuis longtemps attelé à préciser très clairement les obligations et la part
des responsabilités des différents acteurs du contrat de transport, il est temps de se pencher sur
les marchandises.
Le droit de transport s’est construit autour de la notion de risque de mer23 en raison
des aléas que l’on peut rencontrer durant une phase de transport et pouvant avoir d’important
enjeux financier sur une expédition de marchandise, notamment en cas de perte ou de retard.
L’étude de la protection des marchandises en droit des transports maritimes permet de
mettre au premier plan une préoccupation généralement occultée. Le droit des transports
maritimes offre une variété de moyens de protection des marchandises qui s’appuie sur les
mécanismes issus des conventions internationales (première partie). Mais les règles résultant
de ces conventions ne garantissant pas toujours un résultat efficace, le recours à une assurance
des marchandises est nécessaire (seconde partie).
23 D. Schadée, la mer comme mère du droit, p. 513, in Etudes offertes à René Rodière, 1981
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
7
1ère Partie :
LES MECANISMES DE PROTECTON ISSUS DES
CONVENTIONS INTERNATIONALES
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
8
Les transports maritimes s’inscrivent dans un cadre juridique et un contexte politique
et économique spécifiques dont les influences réciproques expliquent l’évolution de la
codification de la matière. L’activité de transport maritime a toujours, même aux époques les
plus anciennes, présenté un caractère éminemment international et est ainsi voué à un
développement dans une dimension dépassant les Etats. Mais ce sont généralement des
particuliers qui ont recours à ce mode de transport pour des besoins de leur commerce à
travers le contrat de transport maritime. Acheminer des marchandises d’un port à un autre
sans dommage, tel est l’objet du contrat de transport maritime. Pour atteindre ce but, le
contrat et les usages du milieu mettent à la charge des différentes parties des obligations. La
spécificité des risques, l’importance de la cargaison transportée impose certaines mesures qui
doivent être prises afin de garantir aux marchandises une sécurité. Les différentes conventions
internationales en vigueur qui régissent la matière, organisent de façon plus ou moins précise
les rôles du chargeur et du transporteur, parties principales du contrat de transport. Les
conventions permettent à ces deux parties dans des proportions différentes d’avoir des
moyens de protection, les marchandises doivent également faire l’objet d’une protection
précise. En raison de la valeur de la cargaison transportée et de son importance pour
l’économie internationale, l’objectif de la protection est double : d’abord éviter que les
marchandises soient endommagées et ensuite, en cas d’échec de cette prévention, engager la
responsabilité des parties. Parce que ces deux objectifs s’appuient sur le contrat de transport
qui lui- même découle des conventions internationales, il est nécessaire de se pencher sur les
mécanismes issus de ces conventions internationales (chapitre I). Malgré cela les
marchandises ne sont pas toujours à l’abri de certains risques. Ceci en raison des insuffisances
de la protection accordée. Ces insuffisances qui ont plusieurs sources doivent faire l’objet
d’une étude approfondie dans le but de pouvoir trouver des solutions et ainsi améliorer la
sécurité de la cargaison (chapitre II).
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
9
CHAPITRE 1 :
L’APPLICATION PAR LES PARTIES DES REGLES
CONVENTIONNELLES
La convention est un accord de volonté destiné à produire un effet de droit
quelconque24, elle s’entend plus largement que le contrat. Le contrat de transport maritime de
marchandises a pour finalité l’acheminement des marchandises. Comme toutes les parties à un
contrat, le transporteur et le chargeur bénéficient de certaines mesures qui ont pour but de les
mettre à l’abri de certains désagréments, il doit en être de même en ce qui concerne les
marchandises, objet du contrat. Les mécanismes de protection issus des conventions
internationales s’organisent en deux étapes : d’abord en amont de l’opération de transport,
celle-ci consiste à éviter les dommages ensuite en aval par la mise en œuvre de la
responsabilité. Le contrat de transport découle des conventions internationales et de ce fait
chargeur et transporteur sont soumis aux règles de ces dernières. Ainsi, afin de garantir un
minimum de sécurité aux marchandises ou cargaisons quelque soit la situation, le droit des
transports maritimes des marchandises a d’abord privilégié la réparation des dommages
(section 2). Les différentes parties peuvent ainsi engager leur responsabilité en cas de
dommages de la marchandise. Mais face à certaines difficultés liées notamment à la mise en
œuvre de l’action en responsabilité et à la longue procédure, les conventions internationales
insistent de plus en plus sur l’importance de la prévention des dommages (section1).
SECTION 1 : LA PREVENTION DES DOMMAGES
Prévenir c’est éviter. La prévention de manière générale a pour but d’éviter la
survenance ou la réalisation de dommages. Les mesures préventives de protection en transport
maritime visent donc une protection en amont des marchandises. Elles peuvent se décliner en
mesures unilatérales de protection physique (paragraphe 1) ou alors prendre la forme
d’obligations contractuelles (paragraphe 2).
24 Guillien (R), Vincent (J), Lexique des termes juridiques, 13éme édition, Dalloz, 2001
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
10
Paragraphe 1 : les mesures unilatérales de protection physique des marchandises
La protection physique a pour but de sécuriser la marchandise pendant son transport,
lors des manutentions et au cours des étapes préliminaires, intermédiaires et terminales. En
effet, au cours du transport, les marchandises supportent une très dangereuse accumulation de
risques. Les mesures unilatérales consistent donc pour l’une des parties à l’opération de
transport à préserver la marchandise et à l’isoler de l’extérieur. Elles sont constituées par des
opérations d’emballage et de marquage de la marchandise (A) et de conditionnement (B).
A- L’EMBALLAGE ET LE MARQUAGE DE LA MARCHANDISE
L’emballage est de manière générale tout objet, quelle que soit la nature des matériaux
dont il est constitué, destiné à contenir et à protéger des marchandises, à permettre leur
manutention et leur acheminement25.
En transport maritime, il n’existe pas de réglementation spéciale précisant les
caractéristiques des emballages maritimes. Il convient donc d’apprécier dans chaque cas la
qualité de l’emballage, et cette appréciation au cas par cas s’appuiera sur les usages du
commerce qui constituent en l’absence de toute normalisation un critère essentiel. C’est donc
en s’appuyant sur ce critère que l’on peut déterminer les caractéristiques et les précautions à
prendre pour les emballages et le conditionnement. L’emballage et le marquage sont ainsi le
point de départ de la protection des marchandises
1) Les procédés d’emballage des marchandises
L’incidence de l’emballage sur la protection des marchandises est considérable. Ainsi,
un emballage mal conçu est cause d’avarie et provoque l’échec de l’opération de transport.
L’emballage maritime26 présente des caractéristiques particulières et doit être effectué selon
certaines techniques.
25 Directive européenne 94 /62/CE (décret français n° 98-638) 26 L’emballage a une importance primordiale dans la protection et cette importance a des répercussions qui vont jusque sur le plan commercial, D. CHEVALIER et DUPHIL, Le transport, les éditions Foucher, collection défi export, 2004, P. 61
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
11
La détermination du type d’emballage à utiliser est généralement fonction de plusieurs
critères notamment la nature des marchandises, la longueur du trajet entre autre. L’estimation
des risques encourus entre également dans la détermination du type d’emballage. Ici il faut
prendre en compte la nature des risques : casses dues à des chocs, rouille, pourrissement, aléas
climatiques, vols ainsi que, le nombre et les lieux des ruptures de charges, les manutentions27.
L’emballage doit tenir compte de la marchandise. Contrairement à ce que l’on pourrait croire,
l’emballage le plus lourd, le plus robuste d’apparence ou le plus cher n’est pas forcément le
meilleur. Le bon emballage est celui qui est effectivement adapté à la nature de la
marchandise, qui la protège et surtout qui est capable de supporter les contraintes normales du
voyage28. Il est souvent conseillé de faire tester les emballages29 .
Les emballages les plus utilisés sont faits à partir de matériaux tels le métal, le bois, le
carton, la matière plastique, le papier, le verre. Il existe aussi des composites appelés ainsi car
ils sont issus de l’association de 02 ou plusieurs matériaux distincts, par exemple caisse-
carton munie d’une autre souple en plastique. L’emballage offre une protection physico-
chimique contre la corrosion, le stockage … une protection mécanique contre les contraintes
dues à la superposition des colis. Cette dernière protection sera obtenue non seulement par
l’emballage lui-même mais aussi par un calage à l’intérieur rendant la marchandise solidaire
du contenant et l’immobilisant contre le vol, l’emballage soustrayant ainsi la marchandise aux
convoitises. La loi ne réglemente minutieusement que l’emballage des marchandises dites
dangereuses30. L’obligation d’emballer résulte de l’économie de certaines dispositions de
présenter convenablement au transporteur, les marchandises emballées31.
Si toute marchandise doit être correctement emballée, elle doit également faire l’objet
d’un marquage.32
2) Le marquage des marchandises
L’opération de marquage est essentielle car elle assure l’identification de chaque
partie de la cargaison. Elle est étroitement liée à celle d’emballage et tout comme cette
dernière, ne fait l’objet d’aucune réglementation internationale spéciale.
27 C’est en effet au cours des manutentions que le risque d’avarie est le plus élevé et le risque de vol est le plus grand 28 CA Paris, 23 Mai 1997, DMF 1978 Som. P.120 CA Paris, 5è ch. B, 19 Mars 1985, Colber son inter c/ Jean COUTURIER parfum et autres 29 Dans certains pays, il existe des laboratoires en France par exemple il s’agit du Laboratoire National d’essai 30 Le code IMDG, régit le transport des marchandises dangereuses 31 Art. 3 Convention de Bruxelles, Règles de Rotterdam 32 Organisation Internationale de Normalisation
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
12
L’obligation d’inscrire des marques sur les marchandises est elle aussi implicitement
consacrée par certaines conventions33. Certaines règles simples font l’objet des
recommandations ISO. D’après celles-ci, tous les colis et caisses doivent porter un numéro
constitué par une fraction dont le numérateur indique le numéro d’ordre et le dénominateur le
nombre total de caisses ou de colis. Les dimensions sont indiquées exclusivement en
centimètre, et les poids en kilogrammes. L’ISO propose également des pictogrammes. Toute
expédition doit faire l’objet d’un marquage sous peine de ne pas arriver à destination. En
général et d’après les usages, les marques doivent être apposées sur les flancs ou sur la partie
supérieure de l’emballage. Le marquage se fait par des symboles graphiques internationaux
relatifs à la manutention des marchandises. Il doit être lisible, indélébile, suffisant, bien placé
et surtout discret sur le contenu34. La liste de colisage, aboutissement de l’emballage et du
marquage énumère pour chaque colis ses caractéristiques. L’emballage et le marquage35
adaptés à la nature de la cargaison sont d’une importance capitale dans le mécanisme
préventif de protection des marchandises. Il faudrait également mettre en exergue le rôle du
conditionnement dans cet objectif de protection.
B- LE CONDITIONNEMENT DE LA MARCHANDISE
Le conditionnement des marchandises consiste dans leur préparation et mise en état
d’effectuer le voyage maritime dans des conditions telles qu’elles puissent résister aux périls
de l’expédition maritime36.
Conditionnement et emballage font généralement l’objet d’une confusion malheureuse
même de la part des professionnels du transport maritime de marchandises pourtant, ce sont
deux notions fondamentalement différentes. Alors que l’emballage a essentiellement pour but,
comme nous l’avons évoqué plus haut, de protéger la marchandise pendant son déplacement,
le conditionnement quant à lui, a pour fonction principale de faire vendre le produit37 ; sa
fonction de protection de la marchandise lors du transport n’étant que secondaire. Le
conditionnement s’entend comme étant l’habillage du produit pour la vente, il est toujours
33 Convention de Bruxelles, art 3 34 Lamy Transport1997, Tome 2, N°425, Duphil et Chevalier, Le transport, les éditions Foucher, 2004, p73 35 Il existe également certaines structures dont l’objectif est de systématiser et publier un certain nombre de règles concernant le marquage en France, il s’agit de l’AFNOR 36 Ibrahima Khalil Diallo, Communication sur « Obligations et responsabilités du chargeur envers le transporteur », colloque du 21 septembre 2009 à Rotterdam, www.rotterdamrules2009.com. 37 D. Chevalier ; F. Duphil, op. cit., P. 62
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
13
solidaire du produit38. L’évolution technologique a imposé de nouvelles méthodes de
conditionnement de la marchandise.
De même que l’emballage, le conditionnement n’est pas régi spécifiquement par
certaines règles. C’est en fonction des usages et pratiques des ports que la marchandise sera
conditionnée ou alors ce sont les législations nationales qui s’appliqueront. Il existe par
exemple dans certains ports, des règles qui imposent la palettisation.
Le conditionnement doit également prendre en compte la spécificité des
marchandises : à chaque type de marchandise, un conditionnement approprié.
Il existe plusieurs types de conditionnement, par conteneurisation (1) ou par palettisation (2).
1- La conteneurisation de la marchandise
La conteneurisation est l’un des aspects visibles de la croissance et de la globalisation
des échanges internationaux. Pour répondre à la demande et réaliser des économies
d’exploitation, les armements pratiquent une massification navale de plus en plus importante.
De nos jours, l’utilisation du conteneur est presque devenue indispensable dans le transport
maritime de marchandises. La protection préventive des marchandises qui sont logées en
conteneur obéit à des règles particulières. Mais avant d’étudier l’empotage particulier des
marchandises, il est nécessaire de se pencher de manière générale sur la notion de conteneur.
Le transport maritime conteneurisé est né sous l’impulsion d’un entrepreneur
américain Malcom Mac Lean39. En cinquante années, la conteneurisation est devenue l’épine
dorsale de la mondialisation. Un conteneur, c’est une « boîte » rectangulaire de dimension
universelle, la clé de son succès réside dans sa standardisation40 ; plus spécifiquement, les
conteneurs sont des cadres fixes munis d’ouvertures que l’on charge de marchandises
diverses, individualisées ou en vrac et que l’on remet préalablement fermés et même scellés
aux transporteurs41. Quelque soit le pays, les conteneurs sont identiques dans leur
conception42. C’est un outil intermodal qui présente des avantages indéniables. Parmi les
principaux avantages, on cite l’efficacité fournie par le conteneur. En effet, le conteneur offre
38 D. Chevalier, F. Duphil, p 62, op. cit 39 En 1956, il adapta des navires pour transporter des remorques des camions par voie maritime. Paul TOURRET, note de synthèse n° 49-Nov. 2002, La révolution du conteneur www.isemar.asso.fr. 40P. TOURRET, La révolution du conteneur, note de synthèse, n°48, novembre 2002 www.isemar.asso.fr. 41 RODIERE, affrètements et transports n°513 ; aussi, le conteneur est un récipient destiné à recevoir des marchandises, M. REMOND-GOUILLOUD, Droit Maritime, 2e édition, Paris 1993, n°574, p 371 42 Le texte de référence en matière de transport maritime en conteneurs est la Convention Internationale sur la sécurité des conteneurs (CSC) de 1972.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
14
une manutention plus efficace et surtout une réduction des coûts de transport43. Ensuite
comme on l’a dit c’est un outil intermodal qui permet des prestations de porte-à-porte. Le
transport multimodal prend ainsi tout son sens et toute son importance. L’intermodalité
permet le développement par les armateurs de lignes régulières de réseaux hub and spoke44.
Le transport ne se perd plus sur le seul segment port à port mais s’élargit à la prestation porte
à porte.
Il existe deux possibilités d’expédier des marchandises par conteneurs : soit par
conteneurs complets (FCL) pour Full Container Load, c’est la solution la plus répandue où
toute la marchandise appartient à un même client qui loue la boîte ; soit par groupe maritime
(LCL) pour Less Than container, Cette méthode est utilisée pour les petits envois (1 à 10 m3).
Dans ce cas, on groupe les lots afin d’obtenir un conteneur complet.
A L’origine, n’étaient que des conteneurs « dry » (sec) de 20 à 40 pieds de long45 qui
servaient au transport de marchandises dites sèches et conditionnées en caisse, carton, balles,
ballettes mais d’autres conteneurs plus spécifiques ont été crées : les conteneurs –citernes
(tank conteneurs) les pleins ciels (open top), les réfrigérés (refeer). Le conteneur standard de
20 pieds sert de conteneur de référence pour estimer les capacités d’un navire et évaluer les
flux. On parle alors en EVP (équivalent 20 pieds) ce qui correspond à un volume utile de 33
m3. Chaque conteneur est identifié par une série d’inscription permanente sur ses parois46.
L’évolution technologique liée à la conteneurisation de plus en plus croissante des transports
est la modification des navires et de la configuration des ports. Les navires ont dû s’adapter,
d’abord en termes de capacité ils sont de plus en plus gros et ensuite, par le nombre de marins
qui a diminué et enfin par le niveau de la résistance. Les ports ont dû se moderniser et se
spécialiser. Les conditions de travail moins nombreuses, plus spécialisées ont fait émergé les
«mains ports » ou ports principaux47 les « hubs »48 où les conteneurs ne font que transiter. La
conteneurisation a aussi obligé à mettre en œuvre des méthodes particulières de chargement
des marchandises. Il s’agit de l’empotage du conteneur. Deux termes définissent le
chargement et le déchargement de la marchandise d’un conteneur : l’empotage et le dépotage.
43 P. ex. un transport entre Taïwan et le Havre coûte 3000 euros environ. Le prix de ce transport aurait coûté au moins 3 fois plus cher dans les années 60 44 Forum international des transports, doc de référence n°299-1, janv 2009 P 8 45 6,05 et 12,19 mètres 46 Propriétaire, n°d’immatriculation, masse brute maximale, charge 47 Los Angeles, Rotterdam, Hong Kong … 48 Algésiras (Espagne) ; Givia Tauro (Italie), Kingston (Jamaïque)
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
15
Presque toutes les marchandises peuvent faire l’objet d’un transport par conteneur. Il s’agit
essentiellement de biens d’équipement et de consommations plus ou moins élaborés qui
empruntent cette voie. Mais le conteneur s’ouvre également aux produits en vrac.
Avant d’être empoté dans un conteneur, les marchandises doivent être emballées et
conditionnées selon les usages ou les règles issues des conventions applicables49. En effet,
bien que les conteneurs offrent une protection contre les dangers extérieurs, il est important
d’isoler les marchandises entre-elles.
Les difficultés apparaissent au moment de leur empotage. Tout ou presque peut se
côtoyer dans un conteneur : les bouteilles de champagne avec des planches à voile, des tétines
de biberon avec es caméras vidéo par exemple. Toutefois, le bon sens interdira l’empotage de
produits dangereux avec les denrées alimentaires. Mais il existe des cas moins évidents,
comme un chargement de carottes contaminées par l’odeur des oignons présents dans le
même conteneur. Dans ces hypothèses, il faut s’assurer que les premiers emballages soient
appropriés et résistants.
En plus, l’empotage du conteneur nécessite des soins à apporter lors du collage et de la
disposition des marchandises, la charge doit être équilibrée. L’emballage et la
conteneurisation des marchandises constituent la première étape des mesures préventives de
protection. En plus de la conteneurisation, la palettisation est également un mode de
conditionnement de la marchandise.
2- La palettisation
Comme autre mode de conditionnement, on peut citer la palettisation. Il est à noter que
la palettisation ne fait l’objet d’aucune réglementation internationale, tout ou presque est issu
des usages ou recommandations de certaines organisations. La palettisation est un
regroupement des articles individuels qui se fait sur une plateforme de dimensions
compatibles avec une manutention par chariot élévateur. Dans certains cas, il est effectué
directement en sortie de production et la charge unitaire n’est dissociée que chez le
consommateur final. La palette doit présenter des qualités de résistances permettant une
manutention appropriée et un stockage correct. En fonction de leur destination et surtout de
leur durée de vie escomptée, les palettes sont réalisées dans des matériaux divers, tel l’acier
qui est résistant et de longue durée, les alliages d’aluminium qui sont inoxydables et légers,
les plastiques, le bois (bois lamellé-collé, contreplaqué), les composites. Concrètement, la
49 Voir paragraphe 1
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
16
palette commune comprend un plateau supérieur sur lequel repose la marchandise, des plots
intermédiaires permettant la prise sur deux ou quatre côtés. Dans certains cas, la palette est
remplacée par une simple feuille de carton ou de plastique résistant assurant « la palettisation
sans palette ». Ce dispositif exige toutefois des matériels de manutention spécialement
équipés tout au long de la chaîne. L’emballage et le conditionnement des marchandises
constituent la première étape des mesures préventives de protection. Celles-ci prennent encore
tout leur sens lorsque les parties au contrat sont soumises à des obligations.
Paragraphe 2 : Les obligations contractuelles relatives à la protection des marchandises
La conclusion du contrat de transport n’appelle pas de remarques particulières en ce
qui concerne la protection des marchandises. D’une manière générale, la seule difficulté
sérieuse tient à l’identification des parties. Ceci étant, c’est au niveau de l’exécution du
contrat que les intérêts de la marchandise sont en jeu. Comme tout contrat, le contrat de
transport des marchandises par voie maritime met à la charge de toutes les parties des
obligations dont le but est d’assurer une exécution efficace du transport. Outre l’exécution
efficace du transport ces obligations ont également pour objectif d’assurer la sécurité de la
cargaison. Ainsi, les textes et les usages ont soumis le chargeur (A) et le transporteur maritime
à des obligations contractuelles particulières (B).
A- LES OBLIGATIONS DU CHARGEUR ET DES INTERMEDIAIRES DE
TRANSPORT
Le chargeur est une partie essentielle du contrat de transport. Le terme "chargeur"
désigne « toute personne par laquelle ou au nom de laquelle ou pour le compte de laquelle un
contrat de transport de marchandises par mer est conclu avec un transporteur et doit s'entendre
également de toute personne par laquelle ou au nom de laquelle ou pour le compte de laquelle
les marchandises sont effectivement remises au transporteur en relation avec le contrat de
transport par mer »50. Il lui incombe certaines obligations relatives à la marchandise. Mais il
peut décider de confier l’exécution de ces dernières à un intermédiaire. Le chargeur (1) et les
intermédiaires de transport (2) sont les deux premiers intervenants dans le contrat de transport
et les premiers à déclencher la mise en œuvre de la protection des marchandises.
50 Art. 1 Règles de Hambourg, la convention de Bruxelles du 25 août 1924 ne contient aucune définition du terme chargeur, les Règles de Rotterdam définissent le chargeur comme « la personne qui conclut un contrat de transport avec le transporteur » art. 1 al. 8
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
17
1) Les obligations du chargeur
Il s’agira d’étudier les obligations qui sont en rapport avec la protection des
marchandises. Mais il faudrait noter que le chargeur doit en principe payer le prix du
transport et doit retirer la marchandise. On pourrait parler ici des obligations des ayants droits.
Dans cette hypothèse par ayant droit à la marchandise, il faut entendre principalement le
chargeur 51mais le destinataire52 encourt lui aussi des obligations dès lors qu’il s’intègre au
contrat de transport. Plus précisément, les ayant droits à la marchandise supportent deux
obligations dans le cadre de la protection des marchandises. Il s’agit de l’obligation de
présenter la marchandise et l’obligation de sincérité dans les déclarations à fournir au
transporteur. La présentation concerne l’extérieur, elle suppose que la marchandise réponde
aux exigences légales ou propres aux offres des transporteurs. Il s’agit des règles concernant
l’emballage, le conditionnement et le marquage des marchandises.
La présentation de la marchandise doit se faire aux temps et lieu fixés par la
convention des parties ou selon l’usage du port de chargement. Le chargeur doit présenter les
marchandises pour embarquement convenablement emballées et marquées53 et le
conditionnement doit respecter les usages du commerce. Les obligations d’emballer
correctement et de marquer qui incombent au chargeur ne sont pas directement prescrites par
les textes. Mais elles résultent indiscutablement de l’économie du système de la Convention
de Bruxelles du 25 août 1924. En effet, les articles 3 et 4 de la dite Convention consacrent
implicitement les obligations d’emballage, marquage et conditionnement à la charge du
chargeur. Les Règles de Hambourg ne contiennent aucune disposition explicite allant dans ce
sens.
L’article 3 alinéa 3 pose l’obligation de marquer les marchandises et l’article 4
exonère le transporteur de toute responsabilité pour le dommage résultant des insuffisances et
des fautes d’emballage ainsi que de l’insuffisance ou de l’imperfection des marques apposées
par le chargeur. De même, le transporteur ne peut invoquer une insuffisance de l’emballage
lorsqu’il est conforme aux usages du commerce54. L’absence totale d’emballage peut alléger
la responsabilité du transporteur qui n’a pas apporté tous les soins à la cargaison55.
51 Bonassies et Scapel, Droit Maritime, 1e édition, 2006, LGDJ, p. 665, n° 1039. 52 Il est une partie adhérente au contrat de transport. 53 Bonassies, Scapel, op. cit. 54 Cass., 15 mars 1983 n°79-14.318, n°271, lexis. 55 Lamy transport, 2007, t. 2, n°609
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
18
A cause du fait qu’il n’existe pas de réglementation sur les emballages, c’est à la
jurisprudence et à la pratique que reviennent la tâche de trancher si tel ou tel emballage est
suffisant pour les marchandises. Ainsi il a par exemple été reconnu suffisant, pour des flocons
de pommes de terres, des sacs en papier kraft trois plis, plus un fil de polyvinyle interne, les
fonds et les bouches de chaque sac étant soudé en continu56, pour des feuilles de tôle : des
caisses en bois normalement agencées dans lesquelles se trouvent placées les différentes
feuilles, enveloppées par paquet dans du papier du genre kraft et séparé entre elle par une
feuille de papier fin.
Dans le sens contraire, ont été jugés insuffisants pour des fruits, des emballages sans
ouvertures ne permettant pas de bons échanges thermique et gazeux et susceptibles
d’entraîner une condensation de pourritures et moisissures, pour des meubles un emballage
sous papier goudronné est inadapté, pour des marchandises diverses, un simple emballage en
carton.
En ce qui concerne l’obligation de sincérité, le chargeur a l’obligation de déclarer avec
sincérité la nature et la valeur des marchandises dans le but de permettre au transporteur
d’exécuter correctement ses obligations. Il s’agit selon les professeurs BONASSIES et
SCAPEL d’une obligation de sincérité et non de véracité de la déclaration57. La fausse
déclaration résultant d’une erreur ne doit pas donner lieu à sanction58. L’obligation de
sincérité est d’une double importance d’abord, une méconnaissance de la nature de la
marchandise peut être source de danger pour le navire et l’expédition. Le péril peut résulter ici
de l’embarquement de marchandises dangereuses à bord du navire, sans que les mesures de
sécurité nécessaires aient pu être prises. L’obligation de sincérité concernant de telles
marchandises, « de nature inflammable, explosive ou dangereuse » sont d’ailleurs renforcées
par l’article 4 alinéa 6 de la convention de Bruxelles. Cet article module les sanctions selon
que la nature de ces marchandises a été déclarée au capitaine qui les a acceptées en
connaissance de cause, ou qu’au contraire, elle lui a été dissimulée.
Ensuite la fausse déclaration de la nature de la marchandise peut causer un préjudice
commercial en rapport avec la protection dans la mesure où, lorsque le chargeur, pour réaliser
une économie recherche dans la nomenclature tarifaire, une rubrique faiblement tarifée plutôt
que celle qui correspond exactement à la nature de la marchandise embarquée, le chargeur
s’expose à se voir priver de tout recours en indemnisation à l’encontre du transporteur si les
56 CA Rouen, 2 déc. 1982, BT 1983, p 210 57 Bonasies et Scapel, Droit maritime, LGDJ, p 666, n°1041 58 Bonassies et Scapel, op. cit.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
19
marchandises font l’objet d’avarie ou de manquant. Il arrive très souvent que le chargeur face
appel à des professionnels pour l’exécution des obligations qui lui incombe et se met ainsi à
l’abri. Son choix de ses attentes c’est-à-dire en fonction de ce qu’il souhaiterait ou non garder
une main mise sur les opérations de transport.
2- Les obligations des intermédiaires
Les intermédiaires de transport sont des personnes qui interviennent à la demande de
l’une des parties au contrat de transport. Ce sont des professionnels du transport qui sont
utiles et parfois même indispensables. Les intermédiaires sont présents sur toute la chaîne du
transport. Dans le cadre de notre étude il sera question de mettre en exergue principalement
les obligations de deux types d’intermédiaires qui interviennent à la demande du chargeur, il
s’agit du commissionnaire et du transitaire.
Le chargeur peut tout d’abord faire appel à un commissionnaire de transport. Le code
de la marine marchande de la communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale
résume très bien le rôle du commissionnaire en son article 45359. La jurisprudence française a
défini la commission de transport comme étant « la convention par laquelle le
commissionnaire s’engage envers le commettant à accomplir pour le compte de celui-ci les
actes juridiques nécessaires au déplacement d’une marchandise d’un lieu à un a autre ; elle se
caractérise non seulement par la latitude laissée au commissionnaire (…) mais aussi par le fait
que cette convention porte sur le transport de bout en bout »60. Le commissionnaire de
transport est un organisateur de transport traitant sous sa responsabilité l’exécution complète
du transport d’une marchandise. Il procède en son nom, au transport des marchandises qui lui
sont confiées par un chargeur en choisissant lui-même les différents transporteurs et
intermédiaires dont il a besoin. Il a une obligation de résultat envers son client61. Selon le
doyen Rodière, même si le commissionnaire doit rendre compte en cas de difficultés il est
aussi mandataire, il est « plus que cela ».
59 « Le commissionnaire de transport est investi d’une mission relative à l’organisation du transport dans son ensemble. Il s’engage à faire exécuter le transport d’une marchandise d’un lieu à un autre. Il a une obligation de résultat. », V. aussi l’acte n°4/96-UDEAC-611.CE du 11juillet 1996 portant convention Inter Etats 60 Cass. Com. 16 févr. 1988, D. 1988.IR.60 61 Lexique des termes maritimes du port de Rouen, art. 453 code de la marine marchande CEMAC
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
20
Le commissionnaire de transport a une très grande marge de manœuvre, homme-
orchestre, opérateur en chef, il est considéré comme un ensemblier62. Il a la maîtrise du
transport de bout en bout. Dans sa tâche d’organisation de transport, le commissionnaire doit
surtout s’atteler à rechercher un consignataire de marchandises et s’assurer que les magasins
de celui-ci sont adaptés à la conservation de la marchandise. En plus, dans ce cas il appartient
au commissionnaire de transport de s’occuper de la protection des marchandises en respectant
les instructions de son commettant. Il doit choisir un transporteur compétent, un matériel
adapté aux spécificités de la marchandise. Il sera toujours bénéfique au chargeur de faire
appel à un commissionnaire. Pour pouvoir se consacrer à d’autres activités. Il est un
intermédiaire précieux qui économise à l’expéditeur du temps, des tracas et même de
l’argent63.
Dans le cas où le chargeur aimerait garder une main mise sur toutes les opérations, il
devra faire appel à un transitaire64. De manière stricte, le transitaire est un intermédiaire
spécialisé dont la mission essentielle consiste à assurer la continuité entre deux modes de
transports distincts. Ce dernier ne doit agir que dans le strict respect des instructions de son
commettant, parce qu’il n’a pas la liberté des voies et moyens. Son rôle se limite à conclure
les actes juridiques nécessaires au transport. C’est un agent de liaison, un professionnel du
passage65. Mais depuis quelques années, le transitaire ne s’occupe plus que des fonctions
juridiques il effectue également des tâches physiques telles que la consignation de la
marchandise. On les appelle les NVOCC (Non Vessel Operating Carrier).
Cependant la distinction entre les deux professionnels est loin d’être aussi clair. En
effet, bien souvent la même entreprise porte la double casquette de transitaire et de
commissionnaire et elle peut avoir la double qualité au cours d’une même opération de
transport. Ce qui permettra à cette entreprise de changer de qualité en fonction de ses intérêts.
Il reviendra alors au chargeur de bien définir contractuellement la notion d’intermédiaire avec
l’autre partie, car ce seront les clauses du contrat qui commanderont la solution du litige. Les
différentes obligations du chargeur et des intermédiaires, quand on a fait appel à eux, sont des
62 Ngamkan, G., « Quelques conseils juridiques et pratiques aux chargeurs et réceptionnaires africains afin de leur permettre de tire le meilleur parti de leurs activités commerciales », Etudes et dossiers, Juridis périodique, n°28 oct-nov-déc 1996 63 Josserand, « Les transports », Librairie Arthur Rousseau, cité par B. MERCADAL, Droit des transports terrestres et aériens, précis Dalloz, 1996. 64 Le mot transitaire est souvent employé à tort par un abus de langage des professionnels, généralement ils parlent de transitaire quand il faut parler de commissionnaire de transport en affirmant qu’ils ont confié l’organisation de leurs opérations de transports 65 Etymologiquement, le mot transit signifie passage. V. Julien, M., « Un métier de la chaîne des transports : du transitaire à l’OTM » Annales IMTM, 1986, p133
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
21
obligations préalables à l’opération de transport proprement dite. Pour la réaliser dans de
bonnes conditions, le transporteur maritime est lui aussi soumis à des obligations.
B- LES OBLIGATIONS DU TRANSPORTEUR
Le transporteur désigne toute personne par laquelle ou au nom de laquelle un contrat
de transport de marchandises par mer est conclu avec un chargeur. Dans le cadre de
l’exécution du contrat de transport des marchandises, le transporteur est soumis à une
obligation générale : celle d’acheminer au port convenu les marchandises qui lui on été
confiées par le chargeur. Il s’agit d’une obligation qui résulte des textes. En effet, les Règles
de Hambourg disposent que le contrat de transport par mer « désigne tout contrat par lequel le
transporteur s’engage contre paiement d’un fret, à transporter des marchandises par mer d’un
port à un autre »66. Au-delà de cette « obligation d’évidence »67, les textes font peser sur le
transporteur des obligations de deux ordres allant dans le sens de la protection des
marchandises. Il s’agit notamment des obligations relatives au navire (1) et celles qui
concernent directement les marchandises (2).
1) Les obligations du transporteur relatives au navire
Les obligations relatives au navire résultent de l’idée que le transporteur devant
acheminer les marchandises, doit s’assurer du bon état de son navire. Elles sont issues des
différentes conventions internationales68. Ainsi dans le but d’assurer aux marchandises une
certaine sécurité, Le transporteur a d’abord au début du voyage l’obligation de faire diligence
pour « mettre le navire en état de navigabilité dans tous ses éléments ». C’est une obligation
de moyen69 qui permettra l’exécution de l’obligation de résultat relativement à
l’acheminement de la cargaison. Le domaine de l’obligation de diligence est très large. Elle
concerne tout ce qui touche à la navigabilité du navire. Non seulement le navire doit-il être
apte à affronter les périls de la mer mais encore être armé par un capitaine et un équipage
compétents.
66 Art.1al. 6, 67 Bonassies et Scapel, Droit maritime, LDGJ, 2006, p 637, n°1001 68 Art. 3§1 Convention de Bruxelles de 1924, art. 14 Règles de Rotterdam, les Règles de Hambourg ne prévoyant aucune disposition explicite dans ce sens 69 Michel ALTER, Droit des transports terrestres, aériens et maritimes internes et internationaux, 3è édition, Dalloz, 1996.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
22
Le contenu précis de l’obligation de diligence peut donner lieu à débat70. La
convention de Bruxelles de 1924 et plus récemment, les Règles de Rotterdam parlent d’une
« obligation de diligence raisonnable ». Par diligence raisonnable, il faudrait entendre
l’examen vigilent que doit tout professionnel compétent à ses cocontractants71. L’obligation
de diligence a non seulement un caractère exigeant mais aussi un caractère personnel. Les
tribunaux sanctionnent le transporteur maritime qui se décharge de son obligation sur les sous
traitants72.
La notion de navigabilité comporte un triple aspect nautique, commercial et
administratif. La navigabilité nautique s’apprécie en fonction de l’état de la coque du navire
(étanchéité et solidité des moyens de propulsion et de l’approvisionnement des soutes, ainsi
que la capacité de l’équipage). La navigabilité commerciale concerne les aménagements
intérieurs du navire destinés à recevoir les marchandises et à assurer sa conservation : cales,
citernes, appareils frigorifiques, thermomètres, systèmes de refroidissement. La navigabilité
administrative fait référence aux documents administratifs que doit posséder le transporteur
Après avoir fait diligence pour assurer la navigabilité de son navire, il doit prendre soin des
marchandises.
2) Les obligations relatives à la marchandise
Ayant pris en charge la marchandise pour un acheminement, le transporteur leur doit
des soins. Les soins dus sont relatifs à deux phases précises de l’exécution du contrat. Ils
concernent d’abord le chargement de la marchandise ensuite l’accomplissement du voyage.
Le chargement de la marchandise commence avec sa prise en charge73. Le
transporteur a l’obligation de prendre en charge la marchandise. La notion de prise en charge
n’étant pas définie par les textes, ne doit pas se confondre avec le chargement de la
marchandise. Elle est selon le doyen RODIERE « l’acte juridique par lequel le transporteur
accepte la marchandise au transport74 ». Le chargement c’est l’opération matérielle qui
70 Lire Bonassies et Scapel, Droit Maritime, LDGJ, 2006. 71 Le doyen Rodière évoquait « le personnage moyennement bon », ce qui d’après le Pr Bonassies n’était pas suffisant 72 V. affaire du Muncaster castle, Lloyd’s law reports 1961.457, DMF 1963.246. n. Bonassies 73 Le moment de la prise en charge varie en fonction des conventions internationales 74 Rodière, Traité Général de droit maritime, affrètement et transport, tome II, Dalloz, 1968, p 554,
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
23
t l’arrimage76.
consiste à mettre les marchandises à bord du navire75. Il comporte deux opérations qui se
succèdent sans interruption : le saisissage e
Le saisissage de la marchandise est entendu comme le fait de rapprocher la
marchandise du navire, lui faire franchir la muraille du bâtiment et la déposer sur le port ou
dans les cales77. L’arrimage est l’opération qui consiste à disposer méthodiquement les
marchandises et à assurer solidement le chargement en assujettissant chaque marchandise par
le jeu de câbles, cordages ou étais divers78. L’arrimage et le saisissage sont des opérations
essentielles dans la sécurisation de la cargaison. On comprend pourquoi les conventions
internationales obligent le transporteur à procéder de façon « appropriée et soigneuse ».
En ce qui concerne le cas particulier des marchandises logées en conteneur, le
transporteur doit s’assurer du positionnement adéquat des conteneurs en fonction de leurs
spécificités. L’arrimage des conteneurs doit être équilibré et stable, la compétence du
shipplaner79 doit être avérée pour cela. La possibilité pour le transporteur d’arrimer certaines
marchandises en pontée ne le dispense pas de le faire de façon appropriée et soigneuse.
Lorsque la pontée n’est pas interdite les informations du chargeur seront cruciales pour la
sécurité du navire, de la cargaison et de l’environnement marin.
La marchandise prise en charge doit être transportée jusqu’au port de destination80.
C’est l’obligation essentielle du contrat. Pendant le déplacement, la marchandise doit être
conservée par le transporteur. L’accomplissement du voyage a également son importance
dans le régime de protection des marchandises.
Le voyage doit se faire en « droiture »81. Cependant, c’est l’un des points sur lesquels
le transporteur conserve une large marge d’initiative afin de prendre en compte les aléas de la
navigation maritime82.
La diligence du transporteur s’étend également aux soins qu’il doit à la cargaison en
cours de route. Cette règle est le corollaire de l’obligation d’assurer de façon appropriée et
75 Bonassies, Scapel, Droit Maritime, LDGJ, 2006, n°1010, p 643 76 Lire, le saisissage et l’arrimage des marchandises, Cissé Baye, mémoire DESS, 2002-2003 ; CDMT 77 Dictionnaire, Gruss de marine 78 Bonassies ,Scapel, préc, 1011 ; p 643 ; Rodière, 517, P 152 79 Personne chargée d’organiser le plan de chargement des conteneurs et attribuer à chacun un emplacement précis à bord du navire, note de synthèse, N°49, Novembre 2007, La révolution du conteneur, Paul Tourret, www.isemar.asso.fr. 80 Toujours de façon appropriée et soigneuse, Bonassies et Scapel, Droit Maritime, Dalloz, p 654, n° 1024 ; art 3 al 2 Convention de Bruxelles 1924 ; art 445 al 2 code CEMAC de la marine marchande 81 C’est-à-dire en route directe et sans escale, M. Remond-Gouilloud, Droit maritime, 2e édition, Paris 1993, p364 n°561, art 3al 2 Convention de Bruxelles 1924 ; et art 445 Code CEMAC. 82 Le connaissement comporte systématiquement des clauses accordant toute liberté au transporteur quant à la détermination de la route à suivre
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
24
soigneuse le transport. Pour comprendre la portée de cette obligation, il faut avoir présente à
l’esprit la règle de responsabilité qui pèse sur le transporteur.
L’obligation de soin s’étend à partir du moment où il prend il charge les marchandises
jusqu’à leur livraison. Il s’agit de soins ordinaires par opposition aux soins exceptionnels83.
Les soins ordinaires s’entendent des soins généraux que la cargaison requiert non des soins
particuliers que peut appeler tel ou tel élément de la cargaison84. Les soins sont fonction de la
nature de la marchandise. Les soins extraordinaires sont des diligences spéciales qui résultent
d’accords exprès85.
A côté de ces différentes obligations, il existe une obligation particulière qui est celle
de transborder les marchandises en cas d’empêchement au transport86.
Prévu généralement par les clauses du connaissement, le transbordement doit être effectué
dans un souci de protection de marchandise sinon il perd son caractère licite. Enfin, la
cargaison doit être livrée au port de destination convenu entre les parties87.
SECTION II : LA REPARATION DES DOMMAGES
Le contrat ayant force obligatoire, son inexécution, fait contraire au droit, appelle
normalement une sanction88. L’inexécution qui est une violation du lien contractuel fait
référence, en matière de transport maritime à la survenance d’un dommage ou alors du retard
à la livraison. La protection dans ce cas prend la forme d’une réparation en dommages-
intérêts. Il s’agit d’une satisfaction par équivalent parce qu’ici, l’inexécution est
définitivement consommée89. Pour cela il faut que le transporteur engage sa responsabilité
(paragraphe 1), le chargeur et l’intermédiaire aussi (paragraphe 2).
83 La distinction de soins ordinaires et extraordinaires a été empruntée à la jurisprudence ferme de la cour de cassation, civ. cass . , 15 juillet 1891, s, 1892. 1. 591 84 Rodière,Traité Général de droit maritime, Affrètement et transport, tome 2, Dalloz, 1968 ,n°532, p169 85 Michel Alter, Droit des transports et terrestres aériens et maritimes internes et internationaux, 3ème éd, p. 143 86 En cas d’innavigabilité du navire, Michel Alter, op. cit. p143 87 Cette règle est rappelée par un arrêt de la cour de Cassation française du 13 nov 2002, DMF 2002. 242, obs. R, Achard. , sur la notion de livraison, L., Bonassies , Scapel.,Droit Maritime, LGDJ, 2006., et Rodière, Traité Général de droit maritime, affrètement et transport, Dalloz, 1968. 88 F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil, Les Obligations, précis Dalloz, 8éd, 2002, p538, n°558 89 ibid. p. 558
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
25
Paragraphe 1 : La responsabilité du transporteur
La responsabilité est la censure de la défaillance injustifiée d’un débiteur lorsque les
faits de l’inexécution sont établis. Il s’agit de prouver qu’elle est fautive, or le débiteur est à
priori en faute. Tel est le fondement général de la responsabilité contractuelle pour faute qui
tire sa source du code civil90. On parle de responsabilité à base subjective ce qui suppose,
selon le Professeur Alain SERIAUX, la réunion de deux causes : l’inexécution et la faute du
débiteur91.
A côté de ce système de responsabilité dite à base subjective s’est développé le
système de présomption de responsabilité, d’ailleurs nettement objectif qui ignore toute
référence à la faute. Le débiteur y est responsable de plein droit cela signifie qu’il est tenu de
réparer le dommage sur la seule constatation matérielle de l’inexécution de ses obligations. Le
droit des transports s’est spontanément porté vers un tel système de responsabilité de plein
droit. Le transporteur est responsable parce qu’il a promis un résultat : la saine arrivée des
marchandises à destination. Tout problème de responsabilité se décompose en deux questions
de fond : d’abord à quelles conditions la responsabilité est-elle engagée (A) ensuite,
lorsqu’elle est engagée, quelle est la réparation due (B) ?
A- LES CONDITIONS DE LA RESPONSABILITE
En règle générale, Pour engager la responsabilité d’une partie qui n’a pas exécuté la
prestation promise, il faut réunir trois conditions : un préjudice éprouvé, une faute du
défendeur et la relation de cause à effet qui fait de ce préjudice une conséquence de cette
faute. En matière de transport maritime, s’il est nécessaire que les marchandises aient subi un
dommage, la faute du transporteur n’a pas à être nécessairement établi. La relation causale,
quant à elle se déduit de la concomitance du dommage et du transport. Parce que le
transporteur s’est engagé à acheminer les marchandises dans l’état où il les a prises et dans un
délai déterminé, il engage logiquement sa responsabilité en cas de dommage (1) et doit une
réparation (2).
90 Art. 1147 code civil 91 A. Sériaux, la faute du transporteur, n°2.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
26
1) La variété des dommages
Les marchandises peuvent subir trois catégories de dommages en transport maritime :
il s’agit de la perte des marchandises, des avaries et des dommages dus au retard à la
livraison. Toutes les conventions ne reconnaissent pas ces trois types de dommages. La
Convention de Bruxelles 1924 ne sanctionne que les dommages dus aux pertes et aux avaries
alors que les Règles de Hambourg en plus de cela traitent du retard à la livraison. Le Code
CEMAC de la marine marchande quant à lui va dans le même sens que les Règles de
Hambourg92.
Le transporteur ayant reçu une quantité déterminée de marchandises a l’obligation de
livrer la même quantité au destinataire. Dans le cas contraire, on considérera qu’il y a perte de
marchandise. Il est important de distinguer la perte totale de la perte partielle de
marchandises. D’après la doctrine, il y a perte totale « quand à destination, le transporteur
n’est à même de délivrer à l’ayant droit aucun élément de la marchandise qu’il a prise en
charge »93. Autrement dit, la marchandise est égarée, dans tout les cas elle n’est pas retrouvée
et présentée au réceptionnaire dans un certain délai.
Les pertes partielles de marchandises s’assimilent à des manquants. Ici, le transporteur
livre les marchandises en bon état. Mais il ne les livre pas en totalité et le destinataire constate
qu’il y a des manquants en poids ou en nombre94. La présentation par le transporteur de
l’emballage vide qui contenait la marchandise fait qu’il n’y a pas perte totale. Il y a juste un
manquant.95 De même, la perte d’un ou plusieurs colis composant un lot unique n’est pas une
perte totale. Ces problèmes trouvent généralement leur origine dans les conditions de
transport. Le transporteur ne s’étant pas acquitté de façon appropriée et soigneuse à ses
obligations de garde et de soin de la cargaison.
Quand le connaissement ne contient pas de réserve sur l’état de la marchandise, le
transporteur est réputé l’avoir reçue en bon état. La constatation à l’arrivée de son mauvais
état établira l’avarie dont le transporteur doit répondre96. Il y a donc avarie lorsque le
92 Art 452 Code Cemac de la marine marchande 93 R.Rodière, Traité Général de droit maritime, affrètement et transport, Dalloz, n°598, p240 94 CA. Litt. Arrêt n°029/C du 20 févr 2009 GRIMALDI LINES c/ STE STAR NATIONALE SA, STE ALLIANZ MARINE & AVIATION. 95 R. Rodière, ibid., La solution est raisonnable, puisque le réceptionnaire recevant quelque chose est à même de vérifier la perte qu’il subit, V. aussi en matière d’assurance maritime, Ripert,3 ;n°2623-1 96 L’absence de réserve du transporteur ne l’empêche cependant pas d’établir qu’il avait pris en charge une marchandise en mauvais état, V. Affaire Apsara
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
27
transporteur livre la marchandise mais celle-ci ne correspond plus à ses caractéristiques97. Les
différentes Conventions opèrent une distinction entre les dommages apparents et les
dommages non apparents sans toutefois les définir. En l’absence des critères objectifs, il est
donc revenu à la jurisprudence le soin de proposer des définitions. On peut retenir qu’un
dommage est apparent lorsque, au moment de la délivrance, le réceptionnaire peut s’en rendre
compte par un examen rapide mais suffisant à l’aide des sens dont chacun dispose98.
La troisième catégorie de dommage que peut subir les marchandises est constituée du
retard à la livraison. Au sens de la doctrine, le retard ne suffit pas en lui-même en tant que
dommage, il faut qu’il ait causé un préjudice99. Autrement dit, ce sont les conséquences
dommageables du retard qui sont incriminées. Celles-ci peuvent se manifester en perte ou en
avarie. Il y a retard lorsque le délai convenu ou à défaut le délai raisonnable100 a été dépassé
par le transporteur. Le retard ne s’assimile pas à la perte des marchandises, rappelons-le, il y a
perte totale de la marchandise si celle-ci n’est pas retrouvée et présentée au réceptionnaire
dans un certain délai. S’il est évident que les marchandises ont subi des dommages il faut
aussi que le réceptionnaire ait une attitude exemplaire. Il doit automatiquement faire des
réserves 101dès qu’il reçoit la marchandise. C’est à ce prix qu’il pourra facilement se mettre à
l’abri de certaines déconvenues si la responsabilité de plein droit du transporteur n’est pas
engagée.
2) Le système de responsabilité du transporteur
L’importance d’une responsabilité de plein droit du transporteur pour la protection des
marchandises découle de ce que ce dernier étant soumis à une obligation générale
d’acheminement et de soins doit répondre des dommages subis par les marchandises. En
instaurant un système de responsabilité objective la protection des marchandises est plus
accrue et efficace. Il est à noter que le domaine de la responsabilité varie d’une convention à
une autre. La convention de Bruxelles ne traite que de la partie strictement maritime du
97 CA. Litt. Arrêt n°028/C du 20 févr 2009 Sté MAERSK CAMEROUN SA c/ Ets KOUANTCHIPE J-M 98 CA Paris, 9 Juillet 1959, DMF 1959, p680 99 Rodière préc., n° 608 p248, CA Litt. Arrêt n° 161/C du 18 déc. 2009 CAMSHIP LINES SA c/ ELEVAGE PROMOTION AFRIQUE. 100 Contrairement aux transports ferroviaire et routier où les délais sont établis avec rigueur, on considère que le transport maritime est une expédition à risque qui ne pourrait faire l’objet d’un délai donné rigoureusement. 101 Art. 21 Règles de Hambourg, L.,Akam Akam, les réserves à la livraison. Etude des diligences des réceptionnaires dans le transport maritime, thèse, Aix-Marseille, 1988.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
28
transport et exclue le retard. Par contre, les Règles de Hambourg et les Règles de Rotterdam
ont un domaine d’application plus étendu allant de la prise en charge à la livraison102.
Certains auteurs103 estiment cependant que la responsabilité du transporteur tel que
prévue par les Règles de Hambourg n’est pas de nature à fournir une protection efficace parce
qu’en réalité, il s’agirait plutôt d’un système de présomption de faute. Système moins sévère
que celui de la responsabilité de plein droit. Affirmer la responsabilité de plein droit du
transporteur implique que la faute est indifférente à l’attribution de cette responsabilité. La
portée juridique d’un tel système est que lorsque les marchandises ont subi un dommage, il
dispense l’ayant droit de faire la preuve que le dommage est dû à la faute du transporteur ou
des agents dont il répond. Il revient donc à ce dernier d’établir la cause du dommage et de
démontrer qu’elle ne lui est pas imputable. En pareil cas, quand la lumière n’est pas
entièrement faite, l’ombre profite au bénéficiaire de la présomption c’est-à-dire à l’ayant droit
aux marchandises104. Le transporteur ne saurait s’exonérer par avance de cette responsabilité
de plein droit par une clause dans le contrat de transport. Les différentes conventions régissant
les transports maritimes réputent nulle pareille clause. Cependant, la présomption de
responsabilité qui pèse sur le transporteur n’est pas irréfragable, elle n’est qu’une présomption
simple que celui-ci peut faire tomber par une double preuve. D’abord la preuve positive et
formelle de l‘existence d’une cause d’exonération, ensuite la preuve d’un lien de causalité
entre la cause d’exonération invoquée et le dommage. Quoiqu’il en soit lorsque la
responsabilité du transporteur est établie ou du moins lorsqu’il n’a pas pu prouver que le
dommage n’était pas dû à son fait, il doit réparer les dommages subis par les marchandises.
Toutefois, la réparation due par lui est limitée par les conventions internationales.
B- LA REPARATION DUE PAR LE TRANSPORTEUR
Tenu d’une obligation de résultat en ce qui concerne l’acheminement des
marchandises, le transporteur maritime voit sa responsabilité engagée par le simple fait que
des avaries, des manquants ont affecté les biens transportés ou lorsqu’il y a eu retard à la
livraison. En contrepartie de cette responsabilité de plein doit, il existe en faveur du
transporteur des mécanismes sophistiqués de cas exceptés qui pourront l’exonérer de sa
102 Art. 4 Règles de Hambourg 103 Lire I. Khalil Diallo, Les Règles de Hambourg : un leurre pour les chargeurs ?, Etude et document de l’association sénégalaise de droit maritime, fév.1993 ; M. Alter, droit des transports terrestres aériens et maritimes, internes et internationaux, P146 104 Rodière, Traité Général de droit maritime, affrètement et transport, n°253
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
29
responsabilité. Mais lorsque celle-ci est admise, il doit une réparation. La réparation c’est la
somme due à titre d’indemnisation. Elle est plafonnée (1) mais dans certaines situations ce
plafonnement saute (2).
1- Le plafonnement des réparations
Pour les marchandises ayant été endommagées pendant qu’elles étaient sous la charge
du transporteur, ce dernier doit verser une indemnité afin de réparer le préjudice. La loi
moderne ne tolère que la réparation du dommage par équivalent105. L’indemnité qui sera
versée par le transporteur pour la réparation des dommages représente l’obligation que le
débiteur, ici le transporteur, n’a pas exécuté ou qu’il a mal exécuté. Elle sera calculée par
référence à la valeur de la marchandise au jour et au lieu du déchargement. Il est interdit au
transporteur d’insérer des clauses limitatives de responsabilité à l’instar des clauses
d’exonération. En contrepartie, il bénéficie des limitations légales de réparations106 énumérées
par les conventions. Ces différentes conventions prévoient des plafonnements en fonction de
celle qui sera applicable. La convention de Bruxelles de 1924 modifiée par les protocoles
1968 et 1979 prévoit une indemnisation de 666,67 DTS par colis ou unité ou 2 DTS par
kilogramme de poids brut de marchandises perdues ou avariées. Les Règles de Hambourg de
1978 apportent de légères modifications. En effet, cette convention prévoit des taux un peu
plus élevés notamment 835 DTS par colis ou unité ou 2,5 DTS par kilogramme de poids
brut107. En matière de retard, la convention de Bruxelles n’en fait pas mention alors que les
Règles de Hambourg instaurent une limitation à deux fois et demi le prix du fret payable pour
la marchandise ayant subi le retard108. La nouvelle convention des Nations Unies, les Règles
de Rotterdam prévoient une indemnité de 875 unités de compte par colis ou autre unité de
chargement ou à trois unités de compte par kilo de poids brut de marchandises. En matière de
retard, ladite convention distingue selon qu’il y a eu perte ou dommage subi par les
marchandises à raison du retard et le préjudice économique résultant d’un retard. Dans le
premier cas, la réparation due est fonction de la valeur de la marchandise. Dans le second cas,
l’indemnité due est limitée à un montant équivalent à deux fois et demie le fret payable pour
105 Ibid. n°683 106 Certains auteurs parlent de limitations de responsabilité, il s’agit bien évidemment d’une limitation de réparation car c’est le montant de l’indemnité qui est limitée. 107 Art.6 al 1(a) 108 Art.6 al 1(b)
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
30
les marchandises ayant subies un préjudicie. Il faut retenir que quelque soit la convention
applicable, la limite la plus élevée sera applicable.
L’unité de compte qui est le DTS ou Droit de Tirage Spécial est une monnaie
internationale fictive dont les pays membres du Fond Monétaire International peuvent
disposer pour solder les déficits de leur balance de payement. Il est constitué à partir d’un
panier de cinq (5) monnaies nationales : le dollar américain (40%), la livre sterling (11%), le
yen japonais (17%), l’euro (32% ; Allemagne 21%, France 11%)109. La base de calcul est
constituée par les « colis » ou « unités ». Le colis désigne selon la cour d’appel de Paris dans
le langage des professionnels du transport maritime « non pas seulement une petite charge,
mais toute charge individualisée, telle qu’elle est remise au transporteur et ainsi acceptée par
celui-ci, quel que soit son poids ou son volume »110. Parce que ces différents plafonnements
sont prévus par des conventions internationales, ils ont un caractère impératif et s’appliquent à
la totalité du préjudice sans exclusion. Toute clause qui tendrait à limiter la réparation à une
somme inférieure est nulle. Cependant, cette limitation de réparation n’opère pas dans tous les
cas. Ainsi en cas de dommage subi par les marchandises lorsque le transporteur aura commis
une faute intentionnelle ou inexcusable, soit la loi soit la convention des parties va retenir un
système de réparation plus avantageux pour les marchandises.
2- Le déplafonnement dans des cas particuliers
Dans certaines situations exceptionnelles, la réparation du transporteur n’est plus
limitée. Il est dans l’obligation de fournir une réparation intégrale. La plupart des textes
régissant le transport maritime de marchandises prévoient des dispositions au cas où le
transporteur aurait commis certaines fautes. Il s’agit de la faute intentionnelle ou de la faute
inexcusable du transporteur111.
En effet, dans des termes à peu près identiques la convention de Bruxelles de 1924
modifiée par le protocole de 1968, les Règles de Hambourg, les Règles de Rotterdam
disposent que le transporteur perd le droit de se prévaloir de la limitation de réparation s’il est
prouvé que la perte, les avaries ou le retard à la livraison résultent d’un acte ou d’une
109 Lamy transport2007, tome 2, n°593. 110 CA Paris, 24 oct. 1966, BT 1967, P47, l’arrêt décide en conséquence qu’une pièce pesant 9,5 tonnes et une voiture doivent être considérés comme des colis 111 La convention de Bruxelles de 1924 originelle ne l’avait pas prévu, c’est le protocole de 1968, s’alignant sur une position de la jurisprudence française qui a remédié à un pareil manque
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
31
omission de sa part commis soit intentionnellement soit de façon téméraire112. De manière
plus explicite, la faute inexcusable est considérée par la doctrine, comme une faute commise
avec témérité et avec conscience qu’un dommage en résulterait probablement. C’est une faute
d’une gravité exceptionnelle qui suppose une volonté consciente que son auteur devrait
avoir113.C’est par exemple le cas d’un transporteur qui décide de lever l’ancre dans une
grande tempête avec des vents de 300km/h et qui fait couler le navire après quelque nœuds,
d’où la perte de la marchandise114. En l’espèce il va de soi que le transporteur avait
conscience d’un dommage probable compte tenu de la puissance de la tempête même s’il ne
l’a pas volontairement causé. En pareil cas, il ne bénéficiera plus de la limitation de réparation
et devra alors verser une indemnisation intégrale car « nul ne peut se prévaloir de sa propre
turpitude ».
Quant à la faute intentionnelle, elle implique d’après la doctrine, la volonté du
transporteur de causer le dommage c’est-à-dire l’intention de nuire aux marchandises et à son
propriétaire. Elle suppose au moins la connaissance du tort que l’on causera, ce qui constitue
une mauvaise foi115.C’est le cas d’un transporteur qui jette délibérément à l’eau une
marchandise lors de la navigation alors qu’aucune circonstance ne justifiait ce geste. Il a en
l’espèce comme on le constate, la volonté de causer la perte de la marchandise.
La faute inexcusable et la faute intentionnelle sont considérées comme des cas où la
limitation de réparation est écartée par la loi. Il existe un autre cas où c’est la convention des
parties qui écarte cette limitation, il s’agit de la déclaration de valeur. Ainsi toutes les fois que
le chargeur aura déclaré avant l’embarquement, la nature et la valeur des marchandises et que
cette mention est insérée au connaissement, la limitation de réparation ne s’applique pas. Pour
être valable, la déclaration de valeur doit être explicite et insérée dans le connaissement116. A
propos de ces conditions de validité l’on a pu justement critiquer la jurisprudence d’avoir
admis une fois que l’indication par le chargeur dans le connaissement, qu’il avait l’intention
d’assurer la marchandise pût équivaloir à une déclaration de valeur dans les rapports du
chargeur et du transporteur117.
Parce que la déclaration de valeur est acceptée, elle lie les parties et en cas de
dommage, la marchandise est réputée valoir ce qui a été déclaré. En cas de dommage partiel,
112 Art. 8 Règles de Hambourg, art. 2 (c) protocole de 1968 113 F. TERRE, Y. LEQUETTE, P. SIMLER, Droit civil, Les obligations, précis Dalloz, 8e édition, 2002, P551-553, n°575 114 V. en ce sens, CA paris, 26 mai 1973, D. 1974. 48, note j. Cabannes (erreur grave de navigation) 115 Terré, Simler et Lequette, op. cit., n°595 116 Lamy transport, n° 595 ; Rodière, op ; cit.,p 313 n°680 117 Com.cass., 25 juin 1958, D.1958,748
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
32
la réparation sera proportionnelle au pourcentage de dépréciation de la chose. Il n’y a pas
plafond mais valeur conventionnelle. Le transporteur maritime n’ayant pas exécuté ses
prestations ou les ayant mal exécuté est donc tenu de réparer les dommages. Il en est de même
pour les autres parties au contrat de transport.
Paragraphe 2 : La responsabilité du chargeur et des intermédiaires de transport
Outre le transporteur maritime, le chargeur peut également engager sa responsabilité en
cas de dommage causé aux marchandises. Dans l’hypothèse où le chargeur a fait appel à des
intermédiaires de transport, ceux-ci peuvent voir leur responsabilité engagée. Généralement,
la responsabilité du chargeur et des intermédiaires de transport n’est pas toujours présentée de
manière claire, explicite et automatique parce qu’en ce qui concerne les seconds ils ne sont
pas forcément présents dans le contrat de transport. Toutefois, lorsqu’ils interviennent ils sont
susceptibles de causer des dommages aux marchandises et seront alors tenus de réparer. Une
étude de leur responsabilité (B) n’est donc pas superflue après avoir envisagé celle du
chargeur (A)
A- LA RESPONSABILITE DU CHARGEUR
La responsabilité du chargeur en général n’a jamais été abordée par la doctrine de
manière directe, mais seulement en tant que cas excepté bénéficiant au transporteur118. La
responsabilité du chargeur119 découle de ce qu’il aurait pu commettre des fautes lors de
l’exécution de ses obligations. Ces fautes auraient ainsi été à l’origine des dommages. En
conséquence, il est responsable et doit réparation. A la différence du transporteur, le chargeur
ne bénéficie pas de limitation de réparation. Le chargeur est susceptible de commettre
plusieurs types de fautes (1) qui doivent être sanctionnées (2)
1) La faute du chargeur
Le chargeur peut commettre dans l’accomplissement de ses obligations des fautes qui
causent des dommages aux marchandises. La faute du chargeur a plusieurs origines. Le
chargeur peut d’abord commettre des fautes lors de l’emballage et du conditionnement de la
118 Marlyse FOLLIN, DMF 2008, n°689 p 106. 119 L. la communication du Pr Ibrahima Khalil Diallo, communication sur « les obligations du chargeur envers le transporteur », Règles de Rotterdam, colloque du 21 septembre 2009 à Rotterdam, www.rotterdamrules2009.com.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
33
marchandise. Il peut s’agir d’une absence d’emballage. Selon la jurisprudence, le défaut
d’emballage s’entend de l’insuffisance d’emballage, mais non de son absence totale120. C’est
par exemple le cas d’un emballage sous papier goudronné pour un transport de fauteuils de
France sur le Cameroun121. Le chargeur peut aussi omettre d’effectuer un étiquetage et un
marquage adéquat. En ce qui concerne le cas des marchandises logées en conteneur, le
chargeur peut faire un mauvais empotage puisque rappelons-le, l’empotage est réalisé par le
chargeur. Bien qu’offrant une protection remarquable à la cargaison qu’il contient, le
conteneur, lorsqu’il a été mal empoté ne peut lui épargner les violents efforts qui s’exercent
longitudinalement et transversalement lors de la traversée maritime ou des manutentions. Les
dommages peuvent également être liés à une mauvaise température, à l’absence de calage ou
d’un placement défectueux de la marchandise à l’intérieur du conteneur.
Le chargeur peut ensuite commettre une faute lors des déclarations ou informations
qu’il donne au transporteur pour établir le connaissement. Pour la doctrine, l’obligation de
sincérité du chargeur ne doit pas se confondre avec l’obligation de véracité122.Mais il demeure
que si le chargeur a sciemment fait des déclarations mensongères ou fausses, il devra répondre
des conséquences. Il peut par exemple s’agir pour le chargeur de ne pas préciser au
transporteur que la marchandise est de nature dangereuse afin que celui-ci puisse prendre des
mesures de sécurité nécessaire ou alors de déclarer la marchandise comme étant de la ferraille
alors qu’il s’agit des pièces de rechanges automobile. La faute ainsi constitué, le chargeur doit
une réparation intégrale.
2) La sanction de la faute du chargeur
Lorsque la responsabilité du chargeur est avérée, la sanction qui intervient est sévère.
Ne bénéficiant pas des faveurs accordées au transporteur, le chargeur doit verser une
réparation intégrale en fonction des dommages occasionnés. A l’égard de l’ayant droit aux
marchandises123, le chargeur doit réparer intégralement le dommage subi par les
marchandises. Les autres propriétaires de marchandises pourront également réclamer une
réparation au chargeur des marchandises causes de l’évènement qui a endommagé leur
cargaison. Ceux-ci pourront fonder leur action contre le chargeur fautif sur les dispositions de
L’article 1382 du code civil voire sur celles de l’article 1384 alinéa 1 du code civil sauf à
120 CA. Aix-en-provence, 24 févr. 1960, BT 1960, p. 295 121 CA Paris, 13 déc. 1976, BT 1977, p143 122 Bonassies et Scapel., Droit Maritime, p 666, n°1041 123 Quand le chargeur n’est pas en même temps propriétaire des marchandises
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
34
prouver la faute du chargeur en cas d’incendie né dans les marchandises en cause124. Lorsque,
et c’est le cas le plus fréquent, le chargeur s’expédie à lui-même les marchandises125 et qu’il
commet des fautes préjudiciables envers les marchandises, il les supportera seul. Afin d’éviter
pareilles déconvenues, le chargeur fait généralement appel à des intermédiaires dont la
responsabilité varie en fonction de son statut.
B- LA RESPONSABILITE DES INTERMEDIAIRES DE TRANSPORT
En confiant à un professionnel averti la charge des opérations de transport, le chargeur
se met un peu à l’abri de certaines tribulations. L’intermédiaire doit donc s’assurer de la
bonne exécution des ses obligations sinon il verra sa responsabilité engagée. Toutefois, cette
responsabilité sera fonction de la marge de manœuvre que lui aura laissé son donneur d’ordre.
Ainsi sa responsabilité varie en fonction du fait qu’il agit en son nom propre (1) ou selon les
ordres du chargeur (2)
1- La responsabilité de l’intermédiaire agissant selon les ordres du chargeur
Si le chargeur souhaite garder une main mise sur les opérations de transport,
l’intermédiaire de transport qui ne sera alors dans ce cas qu’un transitaire agira dans le cadre
des ordres du chargeur. A cet effet, les dommages qu’auront subis les marchandises ne
relèveront pas de sa responsabilité. Donc il n’est pas responsable des pertes, avaries et retard à
la livraison quand il a suivi scrupuleusement les instructions du chargeur. Aucune
présomption ne pèse sur lui, le transitaire n’est responsable que de sa faute personnelle
prouvée126. Cette faute peut résider dans une violation des obligations générales ou
particulières qui sont mises à sa charge127. Dans cette hypothèse, l’action contre le transitaire
se prescrit dans un délai de deux ans. Il doit verser une réparation intégrale correspondant à
l’intégralité du dommage. Toutefois, le transitaire peut limiter sa responsabilité à une somme
déterminée à condition qu’une pareille clause ait été connue et acceptée par le mandant128.
Mais cette limitation cesse en cas de faute lourde du transitaire. Constitue une telle faute, le
fait d’avoir loué un engin qui ne comportait pas les équipements nécessaires, de stocker à l’air
124 Bonasies et Scapel, op. cit.. 125 C’est le cas par exemple d’une société mère qui expédie des marchandises à une de ses représentations 126 Rodière, traité général de droit maritime, t. III, n°919. 127 V., lamy transport , t. 2, n°265 et s. 128 Cass. Com., 29 févr.2000, n°95-17.400, lamyline.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
35
libre, en période de pluie, une marchandise particulière sensible à l’humidité simplement
bâchée et en contact direct avec le sol, de perdre des documents essentiels à l’exécution de sa
mission reçus de son mandant.
Il arrive également qu’un transitaire fasse appel à des tiers pour l’exécution de tout ou
partie de sa mission. En tant que mandataire, le transitaire répond des fautes de ces tiers
chaque fois qu’il apparaît que la substitution a été opérée sans l’autorisation, tacite ou
implicite, de son mandant129. Lorsqu’il ressort au contraire des documents de la cause ou des
circonstances de fait qu’il avait reçu pouvoir de ne pas accomplir lui-même les opérations
objet de son mandat, le transitaire ne répond pas des fautes de ses substitués, à moins que
celui dont il avait fait le choix soit notoirement incapable ou insolvable130. La portée de la
responsabilité de l’intermédiaire est différente lorsqu’il agit en son nom propre.
2- La responsabilité de l’intermédiaire agissant en son nom propre
Lorsqu’il agit en son nom propre, l’intermédiaire est un commissionnaire de transport.
Tenu d’une obligation de résultat, sa responsabilité est donc à la base identique à celle du
transporteur131. Dans la cadre de cette obligation de résultat, le commissionnaire assure une
double responsabilité : de son fait personnel et du fait des ses substitués.
Le commissionnaire répond de tout dommage subi par la marchandise ayant pour
origine directe soit une faute matérielle personnelle, un manquement à l’un de ses devoirs
généraux, soit une absence totale de faute ce qui est par exemple le cas, lorsque l’origine du
dommage est inconnue132. Il engage également sa responsabilité pour n’avoir pas sauvé le
commettant de la forclusion ou tout simplement, pour n’avoir pas fait suffisamment diligence
dans l’exécution de sa mission. Il ne peut s’exonérer par avance, mais la validité d’une telle
clause n’est pas contestée sauf s’il s’est rendu coupable d’un dol ou d’une faute lourde.
Le commissionnaire répond de toute la chaîne de transport, ainsi est-il responsable du
fait de ses substitués. Il est garant de tous les intermédiaires et prestataires de services
auxquels il fait appel pour réaliser le déplacement de la marchandise133. Cependant, il ne peut
être plus responsable que ses substitués ne le sont légalement. C’est un principe fondamental.
En plus, lorsque ses suivants lui ont été imposés par le donneur d’ordre, il ne peut plus
129 CA Paris, 6 févr.1986, lamyline. 130 Lamy transport, t. 2, 2007, n° 275. 131 Lamy, tome 2, 2007, n°98 et 1132 et s. 132 Le doute joue donc contre lui, Alter, M., préc., p163. 133 MERCADAL, B., Droit des transports terrestres et aériens, p 34, n°45
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
36
endosser leur responsabilité134. En ce qui concerne l’indemnité due par l’intermédiaire, le
principe est celui de la réparation intégrale de l’ensemble des éléments du dommage. Ces
éléments englobent aussi bien le dommage matériel que le trouble commercial, le bénéfice
manqué, le préjudice moral. Mais ce principe de réparation intégrale se trouve tempéré par un
certain nombre de limitations légales d’indemnités applicables à ses substitués, il lui est, en
outre loisible de circonscrire conventionnellement sa responsabilité. Cette limite
conventionnelle, pour être valable doit toutefois être connue par le cocontractant du
commissionnaire135. Malgré toutes les précautions prises de manière préventives et curatives,
des lacunes encore nombreuses subsistent et ne permettent pas aux marchandises de
bénéficier d’une protection efficace.
134 CA Riom, 11 mars 1998, La Routière c/Michelin, BTL 1998 p. 362 135 Cependant, en 1996 un arrêt de la cour de cassation française arrêt Banchereau c /Chronopost , a décidé qu’en matière de retard lorsqu’il y a manquement à l’obligation essentielle de l’intermédiaire la limitation conventionnelle était réputée non écrite
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
37
CHAPITRE 2 :
LES INSUFFISANCES DES REGLES CONVENTIONNELLES
En droit des transports maritimes, les marchandises transportées objet du contrat de
transport, bénéficient d’une double protection. D’abord un mode de protection qui a pour but
d’éviter tout dommage, il s’agit de la protection en amont de l’opération de transport. Ensuite,
un autre mode qui entre en jeu en cas de dommage et qui se manifeste par la mise en œuvre de
la responsabilité de différentes parties au contrat et la possibilité de verser une indemnité, elle
est qualifiée de protection en aval, car elle intervient en cas d’échec de la prévention. On
pourrait valablement croire que cette double protection issue des conventions internationales
offre une sécurité maximale aux marchandises. Si en effet, elle concourt à assurer à la
cargaison une certaine sécurité, il ne faut pas perdre de vue que le mécanisme de protection
conventionnelle connaît des limites, des insuffisances qui remettent en cause sa portée et son
efficacité. En effet la mise en œuvre des règles régissant la protection des marchandises
connaît des obstacles relatifs notamment à la portée limitée de la responsabilité du
transporteur (section 1) et au cadre juridique confus et défavorable (section 2).
SECTION 1 : LA PORTEE LIMITEE DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR
Le choix, par le droit des transports, d’un système de responsabilité de plein droit du
transporteur maritime avait pour objectif d’obliger ce dernier à tout mettre en œuvre pour
exécuter la prestation promise136. Dans un tel système, il est cependant fréquent que cette
responsabilité soit limitée137. De même, en cas de dommage, sur les marchandises, certains
facteurs ne contribuent pas à assurer aux marchandises une réparation permettant leur
remplacement. Ces facteurs ont pour source les difficultés rencontrées pour rendre 136 Rappelons que pour ce qui est du transporteur maritime, il s’agit d’un acheminement en temps voulu des marchandises dans l’état où il les a prises. 137 A. Sériaux, La faute du transporteur, 2è édition, économica, 1998, n°3 ; la limitation de responsabilité n’est pas inhérente à la notion de responsabilité de plein droit (Voir sur ce point M-E Roujou de Boubée, Essai sur la notion de réparation, Biblio privée, t.cxxxv, 1974, PP311 et suivants) toutefois, il faut reconnaître que cette limitation est monnaie courante dès l’instant où la responsabilité de plein droit est liée à une activité, dans le souci d’assurer un équilibre budgétaire face à l’énormité des risques encourus ( M-E Roujou de Boubée P341, 405 et s)
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
38
responsable le transporteur maritime (paragraphe 1) et également la défaillance d’un système
de réparation (paragraphe 2) qui ne profite pas aux marchandises.
Paragraphe 1 : Les difficultés de mise en œuvre de la responsabilité du transporteur, facteur d’affaiblissement de la protection
L’affirmation d’une responsabilité de plein droit du transporteur maritime ne suffit pas
à elle seule pour établir les bases d’une protection efficace des marchandises. Encore faudrait-
il pouvoir mettre en œuvre cette dernière. L’étude de la responsabilité du transporteur
démontre que le transporteur peut parfaitement ne pas être tenu pour responsable des
dommages subis par la marchandise138. En effet, la protection des marchandises subit le
contrecoup des faveurs accordées au transporteur. Ainsi, l’obligation de résultat du
transporteur s’en trouve fortement atténuée (A) et surtout les conditions pour une action en
responsabilité contre le transporteur sont lourdes pour l’ayant-droit aux marchandises (B).
A- L’ATTENUATION DE L’OBLIGATION DE RESULTAT DU TRANSPORTEUR
La prestation du transporteur consiste à déplacer les marchandises d’un point à un
autre dans l’état où il les a prises et dans un délai donné. Il s’agit en l’occurrence d’une
obligation de résultat. Mais à la lecture des différentes conventions internationales régissant la
question, une partie de la doctrine a requalifié cette obligation en obligation de résultat
diminuée ou obligation de moyen renforcée139. En effet, que ce soit dans la convention de
Bruxelles de 1924, les Règles de Hambourg et même la toute nouvelle convention des Nations
Unies sans oublier le code CEMAC de la Marine marchande, il existe des cas exceptés
permettant au transporteur maritime de ne pas réparer les dommages.
138 Beurier, Tassel, Hesse Ndendé, Chaumette, Proutière-Maulion, Mesnard, Rezenthel, Droits Maritimes, 1ére éd., Dalloz, 2006, p. 328, 345.62. 139 ibid., 345.61, P328
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
39
1) La pluralité de cas exceptés
Mises à part quelques exceptions rares140, le trait essentiel des conventions en matière
de transport est d’instaurer un système de responsabilité automatique avec exonération pour
les cas exceptés141. Selon les auteurs, les cas exceptés sont des causes objectives de dommage
auxquelles le législateur confère une vertu exonératoire142. Leur liste peut être plus ou moins
longue, mais leur nature ne change pas. La responsabilité des transporteurs se rapproche ainsi
davantage d’une responsabilité à l’état pur. Plus brève est la liste des cas exceptés, plus la
responsabilité est intégralement objective143. Le transporteur ne peut « s’évader » que par
quelques portes plus ou moins nombreuses au gré du législateur. La particularité en transport
maritime est justement qu’il existe de nombreuses portes permettant au transporteur de
pouvoir « s’évader ». Il existe en effet une pluralité des cas exceptés qui font échec à la mise
en œuvre de la responsabilité et par là, affaiblit la protection des marchandises. D’après la
doctrine, il existe deux systèmes instituant les cas exceptés144. Le premier procède par
énumération, c’est le système des cas exceptés nommés145. Le second abandonne presque
généralement l’idée d’une énumération. Il institue un système général à toute cause de
dommage, exonère le transporteur, à condition qu’il établisse que le dommage a eu lieu sans
sa faute146. La particularité des cas exceptés est qu’ils ne déchargent pas systématiquement le
transporteur de sa responsabilité. L’ayant droit aux marchandises peut toujours prouver que le
dommage ne résulte pas des cas exceptés invoqués par le transporteur.
Les cas exceptés sont nombreux. On peut les classer en trois catégories : Les fautes
dans la gestion nautique, les faits ayant une cause extérieure au navire et à la cargaison et les
faits ayant une cause dans la cargaison et dans le navire. Ils sont prévus dans la convention de
Bruxelles et l’article 17 des Règles de Rotterdam.
En ce qui concerne les fautes dans la gestion nautique147, ce sont des fautes des préposées et
non du transporteur lui-même. Elles sont prévues par la convention de Bruxelles de 1924. La
faute nautique est une faute particulière qui rend le transporteur irresponsable totalement
140 Notamment la convention de Varsovie du 12 Octobre 1929 en matière de transport aérien. 141 Sériaux, La faute du transporteur, économica, 1998 n°9. 142 Sériaux, A. , ibid. 143 Ce système a connu un succès considérable. Il a été inauguré avec la convention de Berne du 14 Octobre 1890 concernant les transports ferroviaires internationaux (aujourd’hui remplacé par la COTIF CIM du 09 Mai 1980) et gagna ensuite les transports maritimes, routiers et partiellement par la convention de Varsovie. 144 A. Seriaux, op. cit.., 99 pp 75 et ss ; M. Alter, prec.,pp 146-148. 145 C’est le système qui a été consacré par la convention de Bruxelles du 25 Aout 1924. 146 C’est le cas des Règles de Hambourg. 147 Cette distinction est classique. Voir en matière de transport par route Ibrahim Khalil Diallo, Etude de l’AU relatif aux contrats de transport de marchandises par route, Ohadata D-05-08. www.Ohada.com.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
40
même en présence d’une faute prouvée du capitaine du navire, son préposé148. Elle est d’après
la doctrine un acte ou une négligence du capitaine, marin, pilote ou préposé149. Elle abrite
deux notions : La faute de navigation et la faute dans l’administration du navire. La première
désigne toute faute commise dans le choix de la route, dans la conception et l’exécution des
diverses manœuvres commandés au navire.150.
La faute dans l’administration du navire est d’après la jurisprudence une faute au cours
d’une opération qui intéresse le navire en tant que tel, c’est-à-dire qu’il soit chargé ou pas. Le
transporteur bénéficie d’une irresponsabilité totale, contrairement à la règle de droit commun.
Pour ce qui est des faits ayant une cause extérieure au navire et à la cargaison, il existe
plusieurs causes exonératoires. D’abord, l’incendie151. Il s’agit d’un événement ayant causé la
perte de la cargaison peu importe qu’il ait eu lieu à quai ou en mer.
Ensuite, on trouve des faits constituant un événement non imputable au
transporteur152. Il s’agit en réalité de la force majeure. La convention de Bruxelles et les
règles de Rotterdam contiennent une énumération de cas: périls, dangers ou accidents de la
mer, actes de Dieu, faits de guerre, faits d’ennemis publics, arrêt ou faits de prince, saisie
judiciaire, restriction de quarantaine, grèves ou lock-out ou autre entraves au travail, émeutes
ou troubles civils.
S’agissant de la catégorie regroupant les faits ayant une cause dans le navire, on cite
l’innavigabilité153 du navire, aussi bien du point de vue nautique que commercial, dès lors que
le transporteur a établi sa diligence initiale154. Ensuite, les vices cachés du navire155. C’est une
règle singulière qui libère le transporteur parce qu’il a fait voyager la marchandise dans un
navire en mauvais état156. La convention de Bruxelles de 1924 et les Règles de Rotterdam
exonèrent le transporteur de toute responsabilité quand il prouve que le dommage provient des
« vices cachés échappant a une diligence raisonnable ».
148 Beurier,Tassel, Hesse, Ndendé, Chaumette, Proutière-Maulion, Mesnard, Rezenthel, Droits Maritimes, Dalloz p328 n-345.62 149 M. Alter, Droit des transports terrestres, aériens et maritimes internes et internationaux, p147 150 R. Rodière, Traité Général de droit maritime, affrètement et transport., n°621 p263-264 151 Art 4 al 2bconvention de Bruxelles ; Art 17 al 3f Règles de Rotterdam 152 Art 4 Al 2c convention de Bruxelles ; Art 17 Al 3a ; Règles de Rotterdam 153 Art 4 Al 2p convention de Bruxelles, ce cas excepté n’a pas été retenu dans les Règles de Rotterdam 154 L’appréciation de cette diligence relève de la souveraineté des juges. Au fond, il existe juste des bornes de droit voir Rodière op. cit., n°619 pp261 et s 155 Convention de Bruxelles Art 4 al 2p ; Règles de Rotterdam art 17 al 3g 156 Rodière op. cit.., n° 648 p285
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
41
e.
Par ailleurs, on retrouve dans cette catégorie le sauvetage157. C’est une obligation
légale d’intervenir qui pèse sur le transporteur. Elle a pour origine, la longue tradition de
solidarité devant les périls de la mer158.
La dernière catégorie concerne les cas exceptés tenant aux faits du chargeur ou ayant
une cause dans la cargaison. Le premier cas excepté est le vice propre de la marchandise159.
D’après la jurisprudence, il s’agit de toute particularité inhérente à la nature de la marchandise
entrainant la propension de celle-ci à se détériorer sous l’effet des phénomènes extérieurs
normaux. C’est la nature même de la marchandise qui est cause de dommage. Ensuite, la
freinte de route qui est la diminution naturelle de la qualité de la cargaison.
Enfin, les fautes du chargeur, notamment160 lors de l’emballage, le conditionnement,
le marquage ou chargement arrimage, déchargement effectué par lui ou son préposé. Dans
toutes ces situations, le transporteur, s’il en fait la preuve, est exonéré de toute responsabilité.
On constate simplement que l’incidence sur la protection des marchandises est négativ
2) Les conséquences néfastes d’une pluralité de cas exceptés
Les cas exceptés prévus regroupent pratiquement toutes les situations dans lesquelles
les marchandises peuvent subir des dommages. Il devient alors difficile voire impossible pour
l’ayant-droit aux marchandises de mettre en œuvre la responsabilité du transporteur.
Bien que n’exonérant pas automatiquement le transporteur de sa responsabilité, les cas
exceptés permettent à ce dernier de ne pas assumer le dommage. En invoquant un cas excepté
comme cause de dommage et en établissant la relation de cause à effet avec celui-ci, il se
trouve exonéré ou à tout le moins il opère un renversement du fardeau de la preuve161. Il
reviendra donc à l’ayant droit de prouver que le transporteur a commis une faute. Et comme
on le sait en droit, celui qui doit prouver un fait est dans une situation inconfortable.
Une partie de la doctrine a considéré que les Règles de Hambourg de 1978 étaient une
évolution en ce qui concerne la sévérité de la responsabilité du transporteur ; c’était toutefois
sans étude approfondie. En effet, si les Règles de Hambourg abandonnent le système de
157 Elle se trouve énoncée en plusieurs parties dans la convention de Bruxelles. L’une concernant l’acte ou la tentative de sauvetage Art 4 al 2r. L’autre, le déroutement aux fins de sauvetage art 4 al 4. Les Règles de Rotterdam vont plus loin en prévoyant un cas excepté relatif à la sauvegarde de l’environnement art 17 al 3n 158 Voir les développements faits par R. Rodière, Traité Général de droit maritime, affrètement et transport, n° 651 p288. 159 Art 4 Al 2m convention de Bruxelles ; Art 17 Al 3j Règles de Rotterdam. 160 Art 4 Al 2n; convention de Bruxelles ; Art 17 Al 3k Règles de Rotterdam 161 I. Khalil Diallo, Etude de l’acte uniforme relatif au contrat de transport de marchandises par route, www.ohada.com, ohadata D-05-08.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
42
l’énumération des cas exceptés, le « chargeur est sacrifié à l’autel de la preuve »162. L’article
5 alinéa 1 des Règles de Hambourg dispose que le transporteur ne serait point responsable des
dommages « s’il prouve que lui-même, ses préposés ou mandataires ont pris toutes les
mesures qui pouvaient raisonnablement être exigées pour éviter l’événement et ses
conséquences ». En d’autres termes, dès lors que le transporteur ou toute autre personne ayant
agi sous ses ordres démontre la prise des mesures raisonnables, la responsabilité ne pourrait
plus lui être imputée.
De plus, on peut s’interroger sur le sens des « mesures raisonnables ». Est-ce la
fameuse « due diligence » du droit anglo-saxon ou du traditionnel « bonus pater familias »
romano-germanique ?163
De toute évidence, la mise en œuvre de la responsabilité du transporteur maritime est
loin d’être chose aisée à cause également de l’exercice de l’action.
B- DES DIFFICULTES AU NIVEAU DE LA CONSERVATION ET DE L’EXERCICE DU RECOURS
L’action étant de nature contractuelle, seule peut agir une partie au contrat de
transport, mais en aucun cas le propriétaire de la marchandise en cette seule qualité.164
L’action est dirigée contre le transporteur. La compétence du tribunal n’avait pas été
déterminée dans la convention de Bruxelles de 1924. En conséquence, cela relevait du choix
fait par les parties ou par les règles de conflits de juridictions. Ce qui n’est pas le cas en ce qui
concerne les Règles de Hambourg165.Elles consacre ce qu’on appelle un « forum shopping ».
Il en est de même pour ce qui est des Règles de Rotterdam. Mais les difficultés apparaissent
quand dans le souci d’assurer la protection des marchandises, la prise de certaines mesures est
obligatoire (1) et le délai d’exercice de l’action relativement court (2)
1) Diligence imposée au réceptionnaire des marchandises
Contrairement au droit commun, le réceptionnaire des marchandises en droit de
transports maritimes doit accomplir certains actes pour pouvoir exercer un recours contre le
162 I. Khalil Diallo, Les Règles de Hambourg, un leurre pour les chargeurs ? Etude et documents de l’association sénégalaise de droit maritime, févr. 1993. 163 I. Khalil Diallo, op, cit ; Lire sur ces notions de R. Rodière, Traité général de droit maritime, affrètement et transport; Bonassies, Scapel, Droit maritime, LGDJ. 164 M. Alter, op. cit., p 152. 165 Art 21, Règles de Hambourg ; Art 66 Règles de Rotterdam.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
43
transporteur. Il s’agit d’émettre des réserves à la livraison. Cette diligence imposée au
réceptionnaire si celui-ci souhaiterait bénéficier de l’opportunité d’agir contre le transporteur,
amoindrit la protection. Les réserves à la livraison désignent des avis qui doivent être adressés
par la victime au transporteur en cas de pertes, dommages subis par la marchandise ou liés
aux marchandises166.
Ce qui amoindrit encore considérablement la protection des marchandises, c’est le
délai dans lequel ces réserves doivent être effectuées.
Si le transporteur, lors de la prise en charge des marchandises, peut émettre des
réserves lors de la vérification de celles-ci, il n’est pas pour autant soumis à un respect du
délai. Il n’en est pas de même en ce qui concerne le réceptionnaire des marchandises. Sauf le
cas d’inspection commune167 par les parties, le réceptionnaire doit prendre des réserves. Mais
pour être valables, ces réserves doivent être faites pendant un certain temps. La doctrine et les
conventions internationales distinguent selon qu’il s’agit de dommages apparents ou de
dommages non apparents. Pour ce qui est des dommages apparents, les réserves doivent être
faites le jour de la livraison168 et dans les trois jours si les dommages ne sont pas apparents.
Même si cette règle n’est pas sanctionnée par une déchéance, les effets néfastes se font
néanmoins ressentir au niveau de la preuve. Avec la massification des transports maritimes de
nos jours et les activités toujours sans cesse croissantes dans les ports modernes, l’on voit mal
comment pareils délais pourraient être respectés. En ce qui concerne particulièrement le
préjudice dû au retard, le non respect de ces délais est sanctionné par une déchéance. Le
caractère rigide des avis en ce qui concerne la livraison des marchandises, si dans le fond
l’obligation est normale, les conditions ne sont toutefois pas réunies pour en émettre. Ainsi les
dommages subis par les marchandises, alors qu’elles étaient encore sous la charge du
transporteur, pourraient ne pas faire l’objet d’une réparation. Le délai pour agir ne permet pas
également une protection efficace.
2) Le délai pour agir
Les marchandises ayant subi un dommage, il faut logiquement intenter une action pour
obtenir réparation. Comme en droit commun, il existe aussi en droit des transports maritimes
166 Philippe Delebecque, le projet d’instrument sur le transport sur le transport international de marchandises par mer, projet CNUDCI, présentation générale, www.uncitral.org, p 15 167 « Les réserves écrites sont inutiles si l’état de la marchandise a été contradictoirement constaté au moment de la réception » Art 3 Al 6 Convention de Bruxelles 168 Art 3, §6 Convention de Bruxelles
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
44
un délai pour agir. Passé ce délai, toute action est prescrite. Quelle que soit la personne qui
intentera l’action contre le transporteur, elle devra respecter ces délais. Contrairement à la
convention de Bruxelles qui retient un délai d’un an pour la prescription de l’action, les
Règles de Hambourg retiennent un délai de deux ans169.
Il y a certainement un progrès mais il ne faut pas perdre de vue que les Règles de
Hambourg n’ont pas rallier un grand nombre de pays, surtout ceux dits de tradition maritime.
En conséquence, l’application du délai de deux ans est relativement minime, car c’est la
convention de Bruxelles qui s’applique dans la majorité des cas. Il est intéressant de constater
que, contrairement au transport maritime, les autres modes de transport avaient déjà retenu la
prescription biennale. En matière de transport ferroviaire, la Convention du 9 Mai 1980
portant Règles Uniformes dites RU-CIM retient dans son article 58, même si c’est à titre
exceptionnel, une référence au délai biennal de prescription de l’action en responsabilité. En
matière de transport aérien, déjà en 1929, l’article 29 de la Convention de Varsovie retenait un
délai de deux ans170.
En plus, si la limitation de réparation n’opère plus quand il y a faute intentionnelle ou
inexcusable du transporteur, il n’en est pas de même en ce qui concerne le délai pour agir. La
mise en œuvre de la responsabilité du transporteur n’est donc pas simple. Il existe beaucoup
d’insuffisance qui ne permettent pas à ces dernières de protéger efficacement les
marchandises.
Paragraphe 2 : Les limites du système de réparation.
Le versement d’une réparation doit correspondre à l’équivalent du dommage subi. Tel
est le principe171.
En matière de transport maritime, il existe une dérogation, parce que ce mode de
transport est considéré comme une expédition risquée et une « activité d’intérêt général »172
l’on a estimé que le transporteur devait bénéficier d’un plafond d’indemnisation. Si à cause de
certains risques inhérents au transport cette raison se trouve justifiée, cela ne voudrait pas dire
que les plafonds d’indemnisation doivent être dérisoires. L’échec du système de réparation
169 Art 2a Règles de Hambourg, Art 3§6 Convention de Bruxelles modifiée par le protocole de la Haye de 1968 170 I. Khalil Diallo : Les Règles de Hambourg : Un leurre pour les chargeurs ?, précité et Etude de l’acte uniforme relatif au contrat de transport de marchandise par route 171 Terré, Simler et Lequette, Droit Civil, Les Obligations, Précis, Dalloz, 2002 p 581 n° 596 et s 172 Bonassies et Scapel, Droit Maritime, p7, n°5
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
45
apparaît donc tant au niveau des plafonds très modérés (A) que lors de la liquidation de
l’indemnité (B).
A- LES PLAFONDS TRES MODERES DES INDEMNISATIONS.
Une indemnité est une somme d’argent destinée à réparer un préjudice ou à
rembourser un débours173. Elle est généralement fixée en fonction de la valeur des biens
concernés, ce qui n’est pas le cas en matière de transport maritime. Considéré comme une
activité d’intérêt général, les taux d’indemnité sont très bas (1) et la pratique d’avaries
communes pose de nombreuses difficultés (2).
1) Les différents taux d’indemnité et le cas de la déclaration de valeur.
La sécurité juridique actuelle en droit des transports maritimes est mise à mal par une
« superposition désuniformisante 174». Cette « mosaïque conventionnelle »175constitue une
insécurité juridique surtout au niveau de la réparation. En effet, chaque Convention prévoit
ses taux d’indemnisation. Ainsi la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée par les
Protocoles de 1968 et 1979 accorde-t-elle une indemnité de 666.67 DTS par colis ou 2 DTS
par kilogramme de poids brut des marchandises en cas de perte ou avarie176. L’entrée en
vigueur le 1er Novembre 1992 des Règles de Hambourg a apporté certaines modifications.
D’abord, en cas de perte ou avarie des marchandises, le plafond des indemnités est de 835
DTS par colis ou par unité de chargement et de 2.5 DTS par kilogramme de poids brut177 ;
ensuite, l’innovation d’une responsabilité du transport pour cause de retard. Dans ce cas, le
montant dû est limité à une somme correspondant à deux fois et demi le fret payable pour les
marchandises ayant subi le retard178. Les Règles de Rotterdam prévoient une limitation fixée à
875 DTS par colis ou par unité et fixe pour le retard une disposition pareille à celle des Règles
de Hambourg179. Si on remarque une légère augmentation des taux d’indemnisation entre les
173Lexique des termes juridiques, 13e éd., Dalloz 174 Vialard, Antoine, « Sisyphe et l’uniformisation internationale de droit maritime » DMF, 1999 p213, cité par J. Nguenè Nteppè in Les pays africains face à l’évolution du droit international des transports des marchandises par mer, www.drt.univ-nantes.fr/labos/cdmo/, revue congolaise des transports et des affaires maritimes, n°4, janv-juin 2006, pp 67 à 83. 175 Vialard, A., ibid, p 216. 176 Art 4-5 Convention de Bruxelles, modifiée par les protocoles de 1968 et de 1979. 177 Art 6 al 1a 178 Art 6 al 1b 179 Art 59 Règles de Rotterdam
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
46
différentes conventions, il est à noter que cette augmentation doit s’apprécier en fonction des
fluctuations et d’érosion monétaire180.
Pour palier à cette insuffisance liée au montant de la réparation, un système a été mis
en œuvre. Il s’agit de la déclaration de valeur. Il y a déclaration de valeur lorsque le chargeur
indique dans le connaissement la valeur de la marchandise. Dans ce cas, le transporteur devra
verser la somme indiquée dans le connaissement. Tant qu’elle n’est pas contestée, la
déclaration de valeur fixe conventionnellement la valeur de marchandise. S’il y a perte totale,
le transporteur responsable, devra payée une somme égale à la valeur déclarée. En cas de
perte partielle ou avarie la réparation sera proportionnelle au pourcentage de dépréciation de
la chose. Il n’y a pas plafond mais valeur conventionnelle. C’est une différence avec le
plafond légal181. Toutefois, la déclaration de valeur a un inconvénient majeur pour le
chargeur. Elle est très onéreuse, ce qui fait que tous les chargeurs n’ont pas la capacité d’en
faire. Outre les taux d’indemnités relativement modestes et le caractère onéreux de la
déclaration de valeur, le règlement par les avaries communes pose également certaines
difficultés.
2) Les difficultés techniques posées par les avaries communes
En droit commun, les dommages fortuits pèsent sur ceux qui les subissent, ce que la
théorie du risque exprime par deux expressions lapidaires : res perit domino182 et res perit
debitori183. A certains égards, la théorie de l’avarie commune fait exception dans la mesure où
un dommage, certes imposé mais qui n’atteint qu’un seul est reparti sur la communauté dont il
est membre. Il s’agit d’un mécanisme de répartition, entre le navire et les biens chargés à bord
au moment de l’évènement, des conséquences financières résultant d’une dépense où d’un
sacrifice fait pour sauver l’ensemble de l’expédition184. Les avaries communes constituent
également une forme très originale de solidarité et de mutualisation des dommages185.
Cependant, les avaries communes connaissent des difficultés dans leur application. En
plus elles font l’objet de critique de la part de doctrine186. En effet, lorsque le capitaine décide
180 . Alter, op. cit.., p 149 ; I Khalil Diallo, Les Règles de Hambourg, un leurre pour les chargeurs ? 181 Rodière, affrètement et transport, tome 2, p 314, n°680 ; Dans le même sens, Ripert, n°1818 182 La perte est subie par le propriétaire de la chose disparue. 183 La perte est pour le débiteur de la prestation dont l’exécution est devenue impossible. 184 Du Pontavice, E, Les avaries communes, BT, 1983, p134 et s. 185 V. Ndendé, M., Pratique des avaries communes et protection des intérêts liés dans l’expédition maritime, mémoire, DESS de droit des activités maritimes, université de Brest, 1984-1985. 186 Pour une synthèse V. V-E BOKALLI, L’avarie commune : réflexion critique sur une institution traditionnelle du droit maritime, DMF 2001, p83.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
47
un sacrifice volontaire, la situation nouvelle créée par cette décision va mettre les intéressés
en dehors du champ contractuel et l’on peut dire que la déclaration d’avarie commune met fin,
tout au moins provisoirement, au contrat de transport187. Dès que le danger qui justifiait l’acte
d’avarie commune est passé, le contrat de transport devrait théoriquement reprendre son
empire. Toutefois il n’en est pas toujours exactement ainsi et c’est la critique majeure de
l’institution188. Le danger passé, il reste des séquelles de l’avarie commune dans les rapports
entre les parties189. Les insuffisances liées à l’échec du système de réparation induisent
d’autres difficultés qui concernent la liquidation de l’indemnité.
B- LES DIFFICULTES POSEES LORS DE LA LIQUIDATION DE L’INDEMNITE
Pour le calcul de l’indemnité due en cas de dommage, les conventions applicables
instituent une double référence : le poids ou le colis ou unité. Quel est le sens des notions de
colis et d’unités ? Même si dans le calcul de l’indemnité due, sera pris en compte le système
qui avantage les marchandises et le demandeur, la compréhension de ces notions est
primordiale pour l’efficacité d’une protection des marchandises. Par ailleurs, l’évolution
technologique à imposé l’utilisation des conteneurs. Ce nouveau mode de conditionnement
des marchandises a également des spécificités qui posent des problèmes lors de la liquidation
de l’indemnité.
1) L’incertitude quant aux bases de calcul de l’indemnité
Si la définition du kilogramme de poids brut est universelle et ne fait pas de mystère,
les notions de colis et d’unités ont soulevé des controverses avivées par l’apparition des
techniques de groupages modernes de marchandises par palettes190 ou conteneurs. L’unité de
poids à partir de laquelle le plafond doit être calculé est celle qui est porté sur le
connaissement191. Rappelons que le colis et l’unité s’entendent de toute charge individualisée
187 On sait que le transporteur n’est pas responsable dans certains cas limitativement énumérés. Or si dans l’un de ces cas, par exemple une tempête exceptionnelle, le capitaine décide de forcer les machines pour aller s’abriter, ou de jeter à la mer une partie de la cargaison pour s’alléger alors que s’il ne l’avait pas fait, il n’aurait pas été responsable, cet acte juridique engendre une nouvelle situation juridique qui met fin au contrat de transport. 188 Lamy transport, tome 2,2007, n° 1022. 189 Rodière, Traité général de droit maritime, Evènement de mer, n° 295 et s. 190 Palettes : plateau de chargement essentiellement conçu pour permettre des manutentions par charriots élévateurs à fourche (Larousse). 191 Cass. Req. 28 avril 1947, D. 1947, 381, note Ripert.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
48
prise spécifiquement en charge par le transporteur et ce quelque soit le poids ou le volume.
Cependant, le problème qui se pose renvoie à ce qu’on entend par charge individualisée.
S’agit-il de l’engin de groupage ou alors de chaque unité que celui-ci contient ? Pour résoudre
ce problème on se réfère au connaissement. Ainsi l’individualisation résulte-t-elle en principe
des mentions du connaissement, qui trouve ici une fonction subsidiaire importante. La
convention de Bruxelles de 1924 précise que « lorsqu’un conteneur, une palette ou tout autre
engin similaire, est utilisé pour grouper des marchandises, tout colis ou unité énuméré au
connaissement connu inclus dans ce conteneur, cette palette ou cet engin sera considéré
comme un colis ou une unité. Dans les autres cas, cette palette ou cet engin sera considéré
comme un colis ou une unité »192.
Cette solution est à l’origine d’autres difficultés que rencontrent le plus souvent les
chargeurs. Il s’agit de la rédaction du connaissement. En effet le montant de la réparation est
fonction des mentions du connaissement or cette double fonction unité pose des problèmes.
Les chargeurs ne sont pas toujours au courant des astuces qu’il faut faire pour pouvoir
bénéficier d’un montant raisonnable de réparation. Ce sont des difficultés supplémentaires
que le chargeur pourrait éviter. L’utilisation des notions de colis et d’unité qui créent des
difficultés pour la liquidation de l’indemnité est juste une partie du problème qui est apparu
avec la conteneurisation des marchandises.
2) Les problèmes posés par la conteneurisation des marchandises
L’utilisation généralisée des conteneurs a engendré du même coup certaines difficultés
liées notamment au calcul de l’indemnité due en cas de dommage. En plus du fait que le
conteneur constitue un emballage, c’est également une marchandise193. Le problème s’est
donc posé de savoir si un envoi conteneurisé représente un colis unique ou au contraire, s’il se
compose d’autant de colis que d’objets. Cette question a certes été réglée. D’une part, par le
protocole de 1968194 d’autre part par les règles de Hambourg195. Toutefois, les imprimés de
connaissement ne permettent pas toujours aux opérateurs de retranscrire fidèlement la quantité
de marchandises logées en conteneur. En effet, dans la pratique, l’individualisation du
192 Art. 6 paragraphe2 al. a 193 M. Remond Gouilloud, Droit Maritime, Etudes internationales, 2e édition, Pédone, Paris, 1993, n°574, p.371. 194 Art 4. Convention de Bruxelles de 1924, modifiée par le protocole de 1968. 195 Art 6, règles de Hambourg.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
49
contenu sur le connaissement du conteneur ne se fait pas toujours. Dans ce cas, celui-ci est
considéré comme constituant un seul colis196.
La conteneurisation des marchandises, doit entraîner un changement d’habitude de la
part des chargeurs. Car, si effectivement grâce à ces ‘’boîtes’’, les marchandises ont vu leur
sécurité renforcée sur le plan de la protection physique, en cas de dommage malheureux,
l’indemnité, le conteneur constitue une limite. Surtout que, les chargeurs, pour la plupart ceux
des pays moins développés, ne sont pas toujours formées pour rédiger un connaissement. Le
système de réparation tout comme la mise en œuvre de la responsabilité du transporteur
constitue des obstacles à la protection mise en œuvre par le contrat de transport maritime. On
observe également que le cadre juridique dans lequel ce contrat s’exécute est défavorable à
une protection efficace des marchandises.
SECTION 2 : LE CADRE JURIDIQUE DEFAVORABLE A UNE PROTECTION EFFICACE DES MARCHANDISES
Tout mécanisme de protection qui a l’ambition d’être efficace doit s’organiser dans un
cadre juridique adapté. En droit des transports maritimes. Cet objectif avait été atteint du
moins, dans les domaines les plus importants197. De nos jours, il faut dire que les données
politiques économiques et sociales198 ont considérablement changé. La conséquence en est un
éclatement du droit positif199 mais également des lacunes sur de nombreuses questions. La
coexistence de plusieurs conventions régissant le transport maritime de marchandises rend
difficile la protection des marchandises et de cette coexistence, il en résulte des conflits200 qui
affaiblissent ladite protection (paragraphe 1). La signature des Règles de Rotterdam constitue
en la matière une avancée certaine, mais modeste (Paragraphe 2). 196 CA Rouen, 16 Mars 1973, BT 1973, p. 258. 197 Faut-il rappeler les grandes conventions du début du XXème siècle, conventions de 1910 sur l’abordage et l’assistance,… 198 On peut citer parmi ces données le phénomène de la conteneurisation, l’émergence de nouveaux pays maritimes qualifiés de « dragons », les revendications des pays chargeurs. 199 DELEBECQUE, Philippe, le projet d’instrument sur le transport international de marchandises par mer, projet CNUDCI, présentation générale, Vienne, octobre 2003, www.uncitral.org. 200 Sur cette question, V. notamment : NGUENE NTEPPE, les conflits des conventions internationales de Droit privé : le cas de la convention de Bruxelles de 1924 et des règles de Hambourg de 1978 en droit des transports maritimes internationaux de marchandises, thèse de doctorat, Université de Nantes, 2007 ; V. aussi P.Y. Nicolas, les règles de Hambourg devant les tribunaux français, DMF, 1995, P.87, du même auteur, les conflits de conventions internationales dans le transport maritime de marchandises, in Mélanges Bonassies, P265 et S ; V. aussi TARIN, Guillaume, les conflits de conventions internationales en droit du transport de marchandises par mer, mémoire DESS, CDMT, Aix- Marseille 3, 2000, Ibrahima Khalil Diallo, les conflits de lois en matière de transport de marchandises par mer, thèse de doctorat, Paris 2, 1987.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
50
ègle
pplicable (2).
1) La coexistence de plusie ssant la responsabilité du
Paragraphe 1 : Les ambigüités et les lacunes du droit positif
Le droit maritime international est menacé par deux maux remarquables : sa diversité
et sa relative vétusté. La multiplication des conventions dans cette matière a pour
conséquence inévitable un effritement de la protection des marchandises. En effet, l’absence
d’unification du droit des transports maritimes des marchandises ne permet pas de mettre en
œuvre un régime de protection unique. La diversité de conventions implique nécessairement
une diversité de règles régissant la responsabilité du transporteur maritime, qui s’analyse
comme un frein à l’organisation d’une protection efficace (A). Tandis que la vétusté du droit
maritime laisse apparaître des lacunes (B). En effet, la convention de Bruxelles et les Règles
de Hambourg ayant subi l’effet d’usure du temps, ne sont plus à même de procurer aux
marchandises transportées une certaine sécurité.
A- LA DIVERSITE DE REGLES REGISSANT LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR MARITIME, UN FREIN A L’ORGANISATION DE LA PROTECTION DES MARCHANDISES
La communauté juridique internationale cherche depuis nombre d’années à
uniformiser les règles du droit maritime international201. Cet objectif louable part d’un constat
général selon lequel la pléthore de règles concernant le transport maritime a des conséquences
néfastes sur le régime de protection des marchandises. En effet, l’éclatement du droit
positif202 a donné naissance à une multitude de régime de responsabilité du transporteur
maritime. Il en résulte qu’à chaque convention, ses particularités, ses modalités de mise en
œuvre (1). En outre, la réparation des dommages subis varie en fonction de chaque r
a
urs règles régi
transporteur
En raison de la pléthore de conventions, la mise en œuvre de la responsabilité du
transporteur maritime s’avère être difficile. Rappelons que c’est à l’occasion de l’exécution du
201 Transport Canada, politique maritime international, février 2009, p2. 202 P. Delebecque, Le projet d’instrument sur le transport international de marchandises par mer, projet CNUDCI., P.1.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
51
ossibilité à l’ayant droit aux marchandises de prétendre à une quelconque
ence à
de faute206. Cette différence de système est à l’origine d’une confusion de la part du juge et
contrat de transport maritime, ou plutôt de son inexécution, que naît la responsabilité du
transporteur maritime. Pour être engagé il faut observer certaines conditions. D’abord, il faut
que les marchandises aient subi un dommage. On remarque que toutes les conventions n’ont
pas la même appréciation du dommage. La convention de Bruxelles de 1924, qui est
considérée comme celle ayant ralliée le plus d’Etats, ne prend pas en considération ‘’le
retard’’ comme dommage. Par contre, pour les Règles de Hambourg, le retard est un
dommage ou une cause de dommage. Ce qui a pour conséquence, le fait qu’un transport de
marchandises régi par la convention de Bruxelles n’offre pas, en cas de dommage dû au
retard, la p
réparation.
En outre, le problème essentiel posé par la pluralité de conventions est celui de la
détermination de la convention devant régir les rapports entre deux parties dont les pays
respectifs n’ont pas ratifiés les mêmes conventions. Généralement, dans ce type de situation,
la résolution des différends nés dans le cadre du contrat de transport maritime pose de réels
conflits203. Cette mission du juge n’est pas chose aisée, et ce dernier se retrouve devant des
situations complexes. Pour illustration, une affaire204 posait un problème de la convention
applicable. En l’espèce, un transport maritime constaté par un connaissement émis en
Allemagne avait été effectué au départ du port de Hambourg en Allemagne à destination du
port de Douala au Cameroun. Des avaries et manquants avaient été constatés à l’arrivée et le
juge camerounais fût saisi du litige. La tâche du juge revenait à donner préfér
l’application soit de la convention de Bruxelles de 1924 soit des Règles de Hambourg.
Par ailleurs, la différence de principe de responsabilité est également source de
contentieux entre les parties. Précisons que la convention de Bruxelles de 1924 consacre le
principe de la présomption205 de responsabilité et les Règles de Hambourg une présomption
203 V. NGUENE NTEPPE Joseph, les conflits de conventions internationales de droit privé : le cas de la convention de Bruxelles de 1924 et des règles de Hambourg de 1978 en droit des transports maritimes internationaux de marchandises, thèse, université de Nantes, octobre 2007 ; P.Y. Nicolas, les conflits de conventions internationales dans le transport maritime de marchandises in Mélanges Bonassies, édition Moreux, Paris, 2001, P265 et S ; V. aussi TARIN, Guillaume, les conflits de conventions internationales en droit du transport de marchandises par mer, Mémoire DESS, CDMT, Aix-Marseille 3, 2000 ; Ibrahima khalil Diallo, les conflits de lois en matière de transport de marchandises par mer, thèse de doctorat, Paris 2, 1987. 204 64. CA. Littoral, Douala-Cameroun, chambre civil et commerciale arrêt n°175/C du 20 avril 2001 Navire « M/O cam bilinga, affaire Cameroon shipping lines (camship) C/wanga Joseph. 205 Art 4. 206 Art 5 §, V.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
52
des décisions énoncés207. De plus, le problème des cas exceptés ne peut être occulté.
L’application inexacte des Règles de Hambourg ou alors l’application anticipée sont plutôt
des freins à la protection des marchandises. La réparation pose également les mêmes
problèmes.
2) La diversité de taux de réparation
Il a déjà été démontré que les montants ou plafonds de réparation sont dérisoires
malgré les augmentations des Règles de Hambourg. Ces plafonds ne correspondent pas à la
valeur des marchandises transportées. La coexistence de plusieurs conventions dans le
domaine des transports maritimes pose d’autres difficultés en rapport avec la réparation.
En effet, l’utilisation d’une monnaie instable comme le DTS n’est pas en mesure
d’assurer une protection efficace des marchandises. Le choix du DTS comme unité de compte
est paradoxal si l’on veut une réparation à la hauteur de la valeur des marchandises. Une unité
de compte qui a pour ambition d’assurer la réparation lorsqu’un dommage est survenu, et qui
se veut une valeur universelle se doit en effet d’être une valeur sûre et stable, propre à assurer
une indemnisation adéquate. Or, le DTS est loin de réunir toutes ces vertus208. Le DTS est
tout ce qu’il y a de plus instable à cause du panel de monnaies qui le compose. En effet, ces
différentes monnaies, rappelons-les le dollar américain, le yen japonais, la livre sterling et
l’euro, sont elles-mêmes instables et varient selon certaines données économiques. L’effet se
fait ressentir sur le DTS et on ne peut être sûr de la valeur ou du montant de l’indemnisation
que le jour où le dommage est survenu. En plus, pour des marchandises de nature, quantité et
valeur identiques transportées en deux temps, le montant de la réparation, en cas de perte,
avarie ou retard à la livraison a de fortes chances de ne pas être le même. La solution
préconisée par les Règles de Hambourg en leur article 33 offre une possibilité de lutte contre
l’érosion monétaire et corrélativement contre les montants trop bas de réparation. Cet article
prévoit qu’une conférence internationale ayant pour objet de réviser les montants de limitation
ou de remplacer l’unité de compte ou l’unité monétaire, pourra être convoquée par le
dépositaire209 à la demande d’un quart au moins des Etats contractants. Mais cette procédure
parait assez lourde et pourrait conduire les Etats parties à rechercher des solutions nationales
207 CA. Littoral, chambre civile et commerciale, arrêt n°28/C du 21 novembre 2003, navire M/S CAM Bilingue, affaire Camship c/société nouvelle d’assurance, commenté par Joseph NGUENE NTEPPE, Revue Africaine des Affaires Maritimes et des transports, n°001. 208 KENGUEP (E), Analyse critique des règles de responsabilité du transporteur maritime : contribution à la recherche de la solution au problème de l’équilibre contratuel, thèse 3ème cycle, université de Yaoundé II. 209 C’est le Secrétaire General de l’ONU qui est le dépositaire des Règles de Hambourg.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
53
mettant en péril l’esprit d’unification qui résulte de la convention210. Les difficultés liées à la
réparation ne sont pas les plus importantes si l’on met en avant les différentes avancées et
découvertes technologiques. En effet, à cause de celles-ci, on remarque qu’il existe des
lacunes en ce qui concerne la réglementation applicable.
B- LES LACUNES DE LA REGLEMENTATION EN MATIERE DE PROTECTION DES MARCHANDISES
Une protection efficace trouve son fondement dans des textes qui astreignent le
débiteur de l’obligation de protéger à un respect scrupuleux des directives. S’il existe en effet
en matière de marchandises dites dangereuses un code dont le but entre autres est de définir
de quelle manière ces marchandises devront être emballées ce n’est pas le cas des autres
marchandises. Par ailleurs, les techniques ont évolué mais les textes n’ont pas été adaptés à
cette évolution. Ainsi, à côté d’une insuffisance de la réglementation relative à la protection
physique (1) s’ajoute l’évolution des transports qui n’est pas prise en compte (2).
1) L’insuffisance de la réglementation relative à la protection physique.
La protection physique, nous l’avons dit dans le chapitre précédent, est comme la
protection extérieure de la marchandise à travers notamment l’emballage, le marquage et le
conditionnement. Cette protection physique, importante pour la cargaison et le bon
déroulement du voyage, ne fait cependant pas l’objet d’une réglementation minutieuse. Les
différents textes en vigueur, prévoient simplement l’obligation pour l’expéditeur d’emballer et
de conditionner convenablement les marchandises. Les marchandises ne peuvent être
efficacement protégées que s’il existe des normes qui réglementent les modalités et les types
d’emballages. Ce n’est cependant pas le cas sauf en ce concerne les marchandises dites
dangereuses. Ici, des normes sévères régissent l’emballage, le marquage la manutention de
cette catégorie de produits. Les chargeurs doivent les respecter sous peine de grave
pénalisation211. Il existe même pour chaque type de transport, des normes spécifiques pour la
protection physique de ces produits212. Pour les marchandises diverses c’est la pratique et les
210 KENGUEP, (E), Analyse critique des règles de responsabilité du transporteur maritime : contribution à la recherche au problème de l’équilibre contractuel, thèse 3ème cycle, université de Yaoundé II p 178. 211 Alberto. R. Handabaka ; distribution physique internationale, éd celse, p.35. 212 Pour le transport ferroviaire, le règlement concernant le transport international ferroviaire des marchandises dangereuses RID annexés à l’accord CIM et publiés par pour le transport routier. Pour le transport maritime : le
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
54
usages qui ont du intervenir pour proposer la nature des emballages ; marquage et des modes
de conditionnement. Certaines organisations internationales telle l’ISO et nationales ont pour
objectif de pallier a ces insuffisances en proposant des solutions.
L’insuffisance de la réglementation en matière de protection physique est un paradoxe
quand on constate comment le législateur international s’attarde sur les obligations juridiques
des parties. Celles-ci sont évidemment importantes mais ne sauraient occulter l’apport positif
d’une protection physique préalable. L’élaboration d’une convention des normes qui régirait
essentiellement la protection physique des marchandises non dangereuses réduirait de façon
significative les dommages. Cette absence de réglementation en matière de protection
physique combinée à une évolution des techniques des transports maritimes, qui n’est pas ou
peu prise, en compte altèrent considérablement le régime de protection des marchés.
2) L’inadaptation à l’évolution des techniques de transport
Plusieurs facteurs ont modifié les techniques de transport maritime. D’abord,
l’entreprise maritime devient autonome213. Désormais, il existe des armateurs de métiers qui
attendent des demandes des chargeurs, avec lesquels ils ne sont pas unis par des liens
d’association. Ensuite, les progrès techniques ont révolutionné le transport maritime
l’apparition du conteneur qui a accru la capacité de marchandises à transporter ainsi que
l’adaptation des navires à ce nouveau type d’emballage et de conditionnement. Enfin
l’apparition de lignes régulières par opposition au « tramping ». On doit ajouter à ces facteurs,
l’apparition du commerce électronique qui n’est pas prise en compte dans les différentes
conventions en vigueur. L’informatisation sans cesse croissante du commerce international
impose de mettre en œuvre des systèmes de protection adapté à ce nouveau type de vente. En
outre, le droit maritime international est confronté de nos jours à un nouveau problème lié à
l’évolution des techniques : l’anarchie de la société internationale et la création de foyers de
guerres endémiques ou de zones peu sûres214. Plus le transport maritime se modernise, plus
les bandits et pirates modernisent leurs techniques de violence contre les navires. En effet,
dans une société qui n’est plus policée, le trafic de richesses énormes, suscite des convoitises
code maritime international sur les marchés dangereuses recommandés, pour le transport aérien, les instructions techniques sur le transport approprié de produits dangereux par voie aérienne de l’OACI et IATA. 213 Au XVIe siècle il n’ y avait pas d’armateur de métier ici de on était en état d’offre permanente de fret ; les armateurs étaient des marchands ou plutôt c’étaient les marchands qui se faisaient armateurs pour transporter outre-mer leurs produits, il n’y avait que des transports privés V.R. Rodière, E. du Pontavice, Droit Maritime, précis Dalloz, 12e éd, p9, n°7. 214 R. Rodière. E du Pontavice, Droit maritime, précis Dalloz, 12e éd, P11.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
55
de la part des pirates maritimes. Les ports et rades, en particulier tendent à devenir des nasses
ou des « prisons maritimes ». Certains trajets sont réputés dangereux pour les navires à cause
du phénomène de piraterie qui y prévaut. Ceci a pour conséquence, lorsqu’un capitaine décide
de changer de route, d’allonger la durée du voyage et ainsi expose la marchandise transportée
à certains dommages.
Il existe d’autres difficultés qui concernent essentiellement les pays en voie de
développement. La plupart de ces pays ne suivent pas les évolutions technologiques surtout en
ce qui concerne leurs installations portuaires dont le but est d’assurer une protection à la
cargaison. La majorité des ports des pays en voie de développement n’offre pas de garanties
de sécurité suffisantes pour le stockage des marchandises et ne sont pas adaptés aux nouvelles
méthodes de transport. Ces différentes lacunes tant en ce qui concerne la réglementation que
la protection des installations portuaires semblent être résolus par la nouvelle convention des
Nations Unies qui malgré certaines innovations et améliorations ne va pas jusqu’au bout des
attentes.
Paragraphe 2 : Les Règles de Rotterdam, une avancée certaine mais modeste
Loin de prétendre à une analyse profonde de la philosophie de l’ambitieuse215
convention de la CNUDCl, nous nous proposons d’analyser les idées qui sont susceptibles de
procurer aux marchandises un régime de protection efficace. Et cette étude se fait
essentiellement sur une approche prospective, car cette convention n’est pas encore n vigueur.
Mais il faudrait tout de même signaler que la nouvelle convention dite « Règles de
Rotterdam » se donne pour objectif d’uniformiser et d’harmoniser les règles du droit maritime
international et de trouver un juste équilibre entre les intérêts souvent divergents des
chargeurs et des transporteurs. Si en effet, des progrès relatifs ont été réalisés en ce qui
concerne la protection des marchandises notamment des règles strictes pour l’exécution du
contrat de transport (A) les Règles de Rotterdam conservent néanmoins un caractère
conservatoire (B).
215 Sur cette question voir notamment Philippe Delebecque, « le projet CNUDCI d’instrument sur le transport par mer », DMF, 2003, P315 ; du même auteur, « les travaux du comité des transports du CMI sur le projet CNUDCI », DMF, 2004, P820 ; « Les premiers travaux de la CNUDCI sur le projet préliminaire d’instrument relatif au transport de marchandises par mer », revue scapel, 2002, P84 ; Yves TASSEL, « projet CNUDCI, une double critique de fond », DMF, 2004, p3, Francesco BERLINGIER, « uniformité de la loi sur le transport maritime : perspectives de succès », in Mélanges Bonassies, éd Moreux, Paris, 2001, P57.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
56
A- UNE PROTECTION JURIDIQUE RENFORCEE
Les règles de Rotterdam définissent de façon précise les différentes obligations des
parties (2) mais surtout modernisent le cadre d’exécution du contrat de transport (1). Il
faudrait signaler que pour réaliser ce renforcement la convention doit rallier un très grand
nombre de signatures.
1) La modernisation du cadre d’exécution du contrat de transport
En matière de protection des marchandises, les règles de Rotterdam prennent en
compte les différentes innovations. En tenant compte du fait que de nos jours, c’est le
transport multimodal qui est de plus en plus utilisé cette convention fait entrer dans le cadre
de l’exécution du contrat, des parties ou personnes dont l’intervention était nécessaire mais
qui néanmoins n’avait pas la qualité de parties au contrat de transport.
En vertu de la convention de Bruxelles de 1924 et de son protocole modificatif de
1968 et des règles de Hambourg de 1978, le transporteur est défini comme étant la personne
ayant passé le contrat avec le chargeur. Or ces différentes règles ne traitent pas de la question
de l’exécution du contrat de transport lorsque celle-ci est confiée par le transporteur
contractant à un tiers, ni de la question des règles s’appliquant à ce dernier216. La nouvelle
convention, définit le transporteur comme étant la personne ayant passé le contrat avec le
chargeur, mais n’exige pas que le transporteur exécute effectivement le transport. Ainsi les
différentes parties exécutantes maritimes217 ou autres que maritimes sont soumises en général
aux obligations du transport c'est-à-dire s’occuper de la marchandise de façon soigneuse et
appropriée.
En plus, les obligations du transporteur ont été élargies. Celui-ci doit exercer une
diligence raisonnable quant au maintien du caractère de navigabilité du navire non seulement
avant le voyage en mer et à son début, mais aussi pendant toute la durée de celui-ci. Pour ce
qui est du chargeur, l’obligation traditionnelle d’informer le transporteur est réaffirmé.
En outre, il est confié au transporteur un droit de contrôle. Le droit de contrôle étant le
droit de donner au transporteur, dans le cadre du contrat de transport des instructions
concernant les marchandises pendant la durée de la responsabilité de ce dernier. Ainsi celui-ci
216 Les Règles de Hambourg établissent une distinction entre le transporteur contractant et le transporteur réel, et attribuent au premier en principe la responsabilité de l’exécution de l’ensemble du contrat de transport. 217 Aux termes des Règles de Rotterdam.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
57
peut donner des instructions au sujet des marchandises afin de mieux les protéger ou alors de
modifier ces instructions lorsqu’elles ne servent pas efficacement les intérêts de la
marchandise transportée. Cette modernisation du cadre d’exécution du contrat de transport a
pour conséquence un renforcement des obligations de différentes parties et surtout de leur
responsabilité.
2) Les précisions sur la responsabilité du transporteur
La nouvelle convention qui a pour ambition de re-unifier le droit des transports
maritimes, se devait d’être précise sur la question de responsabilité du transporteur. Ainsi, la
durée de la responsabilité du transporteur a été prolongée en vertu du principe du transport de
porte à porte. De plus, le retard est prévu à côté des pertes et avaries comme dommage
pouvant porter préjudice aux marchandises. En outre, par le passé, les réclamations de perte
ou dommage pouvaient difficilement être présentées dans les délais prescrits si le nom du
transporteur était erroné ou ne figurait pas au contrat de transport. En vertu de la nouvelle
convention si le nom du transporteur n’est pas inscrit au contrat de transport mais que le nom
du navire y apparaît, alors le propriétaire enregistré du navire est réputé être le transporteur.
La nouvelle convention hausse également le montant de la limitation de réparation en
cas de perte ou avaries, en l’occurrence, le plafond est fixé à 875 DTS par colis ou 3 DTS/kg.
La limitation de réparation en cas de retard demeure inchangée en regard de celle prévue
dans les règles de Hambourg soit deux fois et demi le montant du fret exigible. Cependant, le
transporteur ou une partie exécutante ne peut évidemment pas invoquer ces limitations
lorsqu’il est démontré qu’il y a faute intentionnelle ou inexcusable.
En ce qui concerne la prescription du droit de poursuite, les règles de Rotterdam
maintiennent le délai de deux ans établi dans les règles de Hambourg. La nouvelle convention
adoptée a été signée le 23 septembre 2009 lors d’une cérémonie à Rotterdam aux Pays-Bas. A
cette date, 16 pays l’ont déjà signé parmi lesquels le Cameroun le 29 septembre 2009, ainsi
que la France et les Etats-Unis.
Mais au delà de son objectif de réunification du droit des transports maritimes, la
nouvelle convention n’est pas satisfaisante sur tous les points notamment, au sujet de son
caractère conservateur.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
58
B- UNE CONVENTION CONSERVATRICE
La convention des Nations Unies sur le transport des marchandises effectue
entièrement ou partiellement par mer n’apporte pas une protection optimale aux
marchandises. Bien qu’elle soit un texte moderne qui prend en compte l’évolution du
commerce international à travers notamment des dispositions sur le commerce électronique ;
d’une part, et le caractère multimodal transmaritime218 d’autre part ; les Règles de Rotterdam
gardent encore, et ce largement, les marques de la convention de Bruxelles de 1924. A cause
de ce conservatisme, certains souhaiteraient qu’elles ne puissent pas entrer en vigueur. Ce
caractère conservateur se remarque à travers le maintien d’une liste de cas exceptés (1) et une
trop grande liberté contractuelle (2).
1) Le maintien d’une liste de cas exceptés
Les cas exceptés sont, rappelons-le, des causes objectives de dommages auxquelles le
législateur confère une vertu exonératrice. Le projet CNUDCI qui se veut réunificateur remet
à l’ordre du jour un point de discorde en réintroduisant dans son corps une longue liste des
causes d’exonération contenues dans la convention de Bruxelles. En effet, à la lecture de
l’article 17 alinéa 3 de ladite convention on relève au moins 15 cas exceptés en faveur du
transporteur. En plus, on note dans la liste certains cas exceptés dont la présence ne se justifie
plus de nos jours. Des cas exceptés comme l’ « acte de Dieu » qui existait en raison de
multiples difficultés d’ordre technique, économique ou sociopolitique qui prévalaient à
l’époque de la rédaction de la convention de Bruxelles de 1924 ont disparu. Rien ne justifie
qu’au 21e siècle le transporteur puisse encore bénéficier d’une si forte protection au détriment
de la cargaison. Une partie de la doctrine pense que la responsabilité du transporteur aurait
mérité d’être conçue avec un peu plus de rigueur219. Ainsi, elle suggère de supprimer
quelques cas exceptés datant d’une autre époque telle la grève220, le vice caché du navire. En
conséquence, il n’est pas sûr que dans les faits, l’équilibre obtenu dans les Règles de
Rotterdam soit véritablement différent de celui atteint par le droit positif.
218 On doit cette expression au Pr DELEBECQUE 219 Delebecque, le projet CNUDCI, suite et fin, DMF, mars 2008, p213. 220 Un préavis de nos jours est nécessaire pour faire une grève.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
59
2) Les effets néfastes d’une trop grande liberté contractuelle
Le choix d’un système objectif de responsabilité du transporteur maritime est
considéré comme déterminant étant donné que le transporteur aura à cœur de s’assurer de la
prise de précautions nécessaires et raisonnables à l’égard des marchandises qui lui sont
confiés. Néanmoins, dans la foulée de l’élaboration de la nouvelle convention, le groupe de
travail a convenu qu’il y avait lieu de transformer ce concept de longue date et d’introduire un
régime de liberté contractuelle élargie. Aussi, dans le cadre de cette liberté contractuelle,
transporteurs et chargeurs pourraient négocier des contrats de transport établis en dehors du
cadre d’application de la convention. Ce régime de liberté contractuelle encourage la
conclusion d’ententes particulières, désignés dans les Règles de Rotterdam par l’appellation
« Contrat de volume ». Le contrat de volume désigne « Le contrat de transport qui prévoit le
déplacement d’une quantité déterminée de marchandises en plusieurs expéditions pendant une
durée convenue. La quantité peut être exprimé sous la forme d’un minimum, d’un maximum
ou d’une fourchette »221. Ces contrats sont individuellement négociés. Le point
d’achoppement de ce type de contrat concerne le fait que les parties peuvent adapter leur
contrat en y stipulant des droits ou obligations222 accrus ou réduits par rapport à la nouvelle
convention. Concrètement, les transporteurs seront plus tentés par la signature d’un contrat de
volume ce qui leur permettra d’échapper à de nombreuses obligations. Ce qui aura pour
conséquence la réduction de la protection des marchandises car le transporteur ne se souciera
que de limiter au maximum sa responsabilité ou de rejeter le fardeau de la preuve. Une autre
conséquence, et concerne l’assurance. Les assureurs refuseront de couvrir un risque dans ces
conditions. Si la liberté contractuelle est importante pour le commerce mondial, elle ne doit
pas réduire la protection de la cargaison ou accroître les risques. Il existe toutefois une
solution qui rehausse la sécurité des marchandises : il s’agit des assurances maritimes de
marchandises.
221 Article 1 al 2. 222 Les parties ne peuvent toutefois pas se soustraire a deux principales dispositions de la nouvelle convention l’obligation continue du transporteur de fournir un navire en état de navigabilité et l’obligation du chargeur de fournir des instructions et une documentation complète pour le transport des marchandises.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
60
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Les conventions internationales mettent en place un ensemble de mesures destinées à
garantir la sécurisation de la cargaison. Par le biais d’un mécanisme qui regroupe d’une part
des mesures unilatérales et d’autre part des obligations contractuelles, les marchandises sont
préservées de certains risques. Néanmoins, des insuffisances sont à relever, particulièrement
en ce qui concerne la portée limitée de la responsabilité du transporteur et surtout à cause de
l’environnement juridique qui est confus. L’existence de plusieurs conventions internationales
combinée à des lacunes sur certains points diminue les effets de la protection. Le mécanisme
mis en place est certes basé sur deux axes fournissant une protection double, elle demeure
néanmoins insuffisante. Par conséquent, un système de protection complémentaire est
nécessaire pour venir renforcer la protection contractuelle. La double protection issue de la
protection conventionnelle s’articule autour d’un mécanisme en amont donc le but est de
prévenir les dommages et d’un mécanisme en aval qui a pour objectif de sanctionner la partie
responsable de la détérioration ou de la perte des marchandises. Le premier a pour objectif
d’éviter tout dommage, tandis que le second intervient lorsqu’il y a déjà eu dommage.
Toutefois, ce double système présente des limites qui mettent à mal la sécurité de la cargaison
et les intérêts financiers de propriétaire de la cargaison. Le recours à un contrat d’assurance
apparaît comme étant l’unique moyen de relever le niveau de protection des marchandises.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
61
2ème Partie :
LES MECANISMES DE PROTECTION RESULTANT
DE LA CONCLUSION D’UN CONTRAT
D’ASSURANCE
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
62
Bien que le transporteur soit tenu d’une obligation de résultat qui entraîne à son égard
une présomption de responsabilité pour tous les dommages survenus à l’occasion du transport,
il arrive que l’ayant droit à la marchandise ne soit pas indemnisé de ses préjudices, ou du
moins pas entièrement, parce que le transporteur lui oppose une cause d’exonération de sa
responsabilité ou une limite à la réparation ou tout simplement que le transporteur,
responsable, est insolvable. Pour éviter ces risques, l’expéditeur a tout intérêt à souscrire, lui
ou par l’intermédiaire de son commissionnaire, une assurance couvrant la marchandise en
cours de transport. Plus explicitement, l’objet des assurances maritimes est un risque, c’est-à-
dire un dommage subi ou une valeur engagée lié à un évènement déterminé. Le risque atteint
une chose garantie, dont il ressort une avarie. C’est à propos de la chose qu’intervient la
distinction traditionnelle entre l’assurance sur corps et l’assurance sur facultés. L’assurance
sur corps concerne le navire et l’assurance sur facultés concerne les marchandises. De
manière générale, l’assurance est une garantie, et il faudrait préciser une garantie nécessaire.
En effet, la mer est considérée comme étant un lieu naturellement hostile à l’homme et les
risques encourus en mer ont des conséquences qui pourraient, lorsqu’ils se réalisent avoir des
impacts qui dépassent le simple cadre du contrat de transport des marchandises. Le chargeur
ou l’ayant droit aux marchandises doit toujours envisager une protection parallèle à celle
prévues par les conventions internationales pour sa cargaison au vu de la spécificité des
risques de transport. Ainsi, l’assurance des marchandises apparaît comme étant un support
indispensable pour toute opération de transport (chapitre I). Depuis l’apparition de l’assurance
maritime, la matière occupe une place centrale dans le droit maritime moderne. Elle a suivi
tant bien que mal l’évolution sans cesse plus rapide des technologies et des risques. Mais cette
évolution a aggravé certains risques et en a créé de nouveaux, de ce fait, elle doit être adaptée
et améliorée afin qu’elle puisse remplir parfaitement son objectif (chapitre II).
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
63
CHAPITRE 1 :
L’ASSURANCE DES MARCHANDISES, UN SUPPORT INDISPENSABLE
Le transport maritime constitue un secteur clé dans l’économie internationale et dans
l’économie nationale. C’est pour cette raison que les activités de ce secteur font l’objet d’une
réglementation précise. Mais s’agissant du transport maritime de marchandises, la
réglementation en vigueur a montré des lacunes qui mettent à mal la protection de ces
dernières. Afin de pouvoir pallier à ces lacunes, le chargeur ou tout autre ayant droit à la
marchandise doit se tourner vers un autre support de protection qui est l’assurance sur
"facultés". Le recours à l’assurance apparaît comme le moyen permettant de fournir aux
marchandises une protection supplémentaire. Il s’agit d’un « contrat par lequel un
souscripteur se fait promettre par un assureur une protection en cas de réalisation d’un risque
moyennant le paiement d’un prix appelé prime ou cotisation223 ». Ainsi, par ce mécanisme,
l’assurance permet, par ses caractéristiques particulières (section 1) de couvrir un large champ
d’application (section 2).
SECTION 1 : LES CARACTERISTIQUES PARTICULIERES DE L’ASSURANCE
SUR FACULTES
Contrairement aux autres types d’assurances224, l’assurance maritime des
marchandises possède certains caractères qui font d’elle une assurance spécifiquement à part.
Par une simple souscription, l’influence de l’assurance va au-delà même de l’objectif initial
qui est rappelons-le de renforcer la protection de la cargaison transportée. Grace à des
caractéristiques et à un mécanisme efficace, l’assurance facultés exprime le choix d’une
protection accrue (paragraphe 1) et constitue un véritable outil de gestion (paragraphe 2)
223 Yvonne Lambert-Faivre Droit des assurances, précis Dalloz, p39. 224 L’assurance sur facultés est régie par des règles distinctes de celles issues du code CIMA.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
64
Paragraphe 1 : L’assurance des marchandises, l’expression d’une protection accrue
"Quel intérêt j’ai à assurer mes marchandises durant leur transport ?". Cette question,
tous les chargeurs se la posent. Il faut avouer que l’amélioration sensible de la sécurité dans
les ports et la conteneurisation de la quasi-totalité des marchandises donnent l’impression que
prendre une assurance facultés n’est pas vraiment nécessaire. Mais une telle analyse à défaut
d’être erronée est insuffisante parce que ne prenant pas en compte les risques inhérents au
transport maritime et les aléas de l’exercice d’une action en responsabilité contre le
transporteur et de ses suites. Contre ces risques, l’assurance seule peut protéger les
marchandises225. L’assurance facultés apparaît donc comme un instrument de sécurité
optimale (A). Parce que ses conséquences vont au-delà même de la protection des
marchandises au sens strict, l’assurance est également une nécessité économique et sociale
(B).
A- LES ASSURANCES SUR FACULTES, INSTRUMENT D’UNE SECURITE OPTIMALE POUR LES MARCHANDISES
Nombre d’opérateurs s’interrogent sur l’utilité de souscrire une assurance facultés et
un grand nombre d’expéditions sont réalisées sans couverture d’assurance. Cette situation
regrettable provient le plus souvent d’une mauvaise appréciation des garanties offertes par les
conventions internationales. L’effet protecteur de l’assurance facultés va plus loin en offrant
une sécurité efficace contre les risques et les limitations de réparation (1). De plus, il s’agit
d’une sécurité qui est imposée (2).
1) Une sécurité contre les risques et les réparations limitées
Toute marchandise acheminée d’un point à un autre court, du fait même du transport et
des opérations accessoires comme les manutentions et les différentes entreprises, des risques
particuliers tels les heurts, les chutes, les vols sans oublier les risques inhérents à la navigation
maritime226. Dès lors, l’assurance de la marchandise doit être envisagée. De plus, en cas de
dommage subi par les marchandises, l’ayant droit peut agir en responsabilité contre le
transporteur, mais souvent, son action sera à terme mise en échec par tel ou tel cas excepté ou
225 Bonassies et Scapel, Droit, Maritime, LGDJ, 2006, p 820 n°1280. 226 Coulage de navire par exemple.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
65
encore le dommage par les marchandises ne sera que très partiellement réparé du fait de la
limitation de responsabilité. Par ailleurs, lorsque le transporteur invoque un cas excepté, il
revient au chargeur, qui se retrouve dans une situation délicate, de prouver une éventuelle
faute du transporteur. Enfin, en cas de déclaration de contribution en avaries communes, le
règlement est long et complexe. Il ne faudrait pas oublier que même lorsque la responsabilité
du transporteur est prouvée, l’ayant droit aux marchandises peut se retrouver en face d’un
transporteur insolvable. Il s’agit des risques du transport.
Contre tous ces risques, contre tous ces dangers, l’assurance est l’unique solution
satisfaisante. L’objectif de l’assurance est de soustraire le chargeur des difficultés qui
pourront naître d’une action en justice, et de faire échec aux montants dérisoires
d’indemnisation prévus par les différentes conventions internationales. Etant, une sécurité
contre les risques et les réparations limitées, l’assurance ‘’facultés’’ ne doit pas être une
option pour le chargeur ou l’ayant droit aux marchandises, elle est imposée.
2) Une sécurité imposée par la loi
L’assurance maritime sur facultés est nécessaire tant pour les chargeurs que pour les
autres ayants droits à la marchandise. Sa nécessité va au-delà de la simple volonté de ces
parties. En effet, certains impératifs d’ordre sécuritaires et surtout économiques ont fait de
l’assurance maritime sur facultés une obligation227. Dans certains pays, cette assurance est
obligatoire en raison des conséquences qu’elle peut avoir sur le plan économique du pays en
question. Cette sécurité est imposée, et est en plus un phénomène de civilisation.
L’assurance est un phénomène économique qui a une importance capitale. Au
Cameroun, l’assurance maritime sur facultés a été rendue obligatoire par la loi du 8 décembre
1975 et son décret d’application n°75/334 du 06 août 1976228 pour toute marchandise à
l’importation dont la valeur FOB est supérieure ou égale à 500 000F CFA. Cette exigence est
renforcée par des dispositions du code CIMA actuellement en vigueur au Cameroun.
L’obligation résulte de l’article 278 dudit code qui dispose que « l’assurance des facultés à
l’importation revêt un caractère obligatoire dans la mesure où les législations nationales le
prévoient. Elle est alors régie par les dispositions spécifiques de ces législations ». Cette
obligation d’assurance locale avait pour but de promouvoir l’épargne locale et d’améliorer
227 Sur la sécurité imposée par l’assurance sur facultés lire, Y. Lambert Faivre et Laurent Leveneur, Droit des assurances, 12e éd précis Dalloz, 2005. 228 Voir annexes.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
66
l’équilibre de la balance commerciale. Ainsi, elle doit être souscrite auprès d’un organisme
d’assurance agrée et installé sur le territoire national. En tout état de cause, il est de plus haut
intérêt pour le chargeur d’être paré contre certains aléas. L’assurance sur facultés est le
meilleur antidote, une assurance sur mesure, une assurance idoine229. Au-delà de cette
exigence de sécurité, l’assurance facultés a une fonction sociale et économique ; plus qu’une
nécessité, elle est devenue une obligation incontournable230.
B- L’ASSURANCE SUR FACULTES, UNE NECESSITE SOCIALE ET
ECONOMIQUE
L’assurance, c’est se prémunir contre la survenance d’un risque et contre la modicité
des réparations prévues par les conventions. La société actuelle qui est une société qui intègre
la présence des risques de plus en plus nombreux et importants dont la réalisation comporte
des conséquences qui vont au-delà du simple cadre du transport de marchandise. Ainsi, la
protection des marchandises par l’assurance est une nécessité qui a un aspect aussi bien
économique (1) que social (2).
1) L’aspect économique de l’assurance maritime facultés
L’assurance des marchandises en transport maritime a un aspect économique qui ne
peut être occulté. L’assurance des facultés qui succinctement a été défini comme tout contrat
qui a pour objet de garantir les risques relatifs à une opération maritime, est considérée
comme déplacement et novation de la charge pécuniaire d’un risque231. Pour l’assuré,
l’assurance remplace une possibilité de perte d’une grande valeur par une perte certaine mais
beaucoup plus légère, le paiement de la prime. On peut admettre en raccourci que la prime
remplace le risque. Pour l’assureur, l’assurance constitue un pari : il est gagnant si l’assuré ne
subit pas le risque contre lequel il s’est garanti : il est perdant dans le cas contraire.
Cependant, les risques s’étant multipliés, un nombre de plus en plus élevé de personnes
perçoit la nécessité de souscrire une assurance, de telle sorte que l’assureur diluant les
garanties en contrepartie desquelles il touche une prime, fait disparaître le caractère aléatoire
229 Ngamkan,G. Quelques conseils juridiques et politiques aux chargeurs et réceptionnaires africains afin de leur permettre de tirer le meilleur parti de leurs activités commerciales, Juridis périodique, n°28, oct-nov-déc 96, PP. 83-93. 230 Kenguep, E, Analyse critique des règles de responsabilité du transporteur maritime de marchandises : contribution à la recherche de la solution au problème de l’équilibre contractuel, thèse 3ème cycle, université de Yaoundé II, p 315. 231 Mercadal, B., Droit des transports terrestre et aériens, précis Dalloz, 1996.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
67
de l’assurance. Ceci a une conséquence sur l’organisation du système d’assurance qui est basé
soit sur le mode capitaliste, soit sur le mode mutualiste. Dans le premier cas, l’assureur est
une personne morale qui exerce une activité commerciale ; contre paiement, elle vend une
garantie, une sécurité et espère qu’il lui en restera un profit. Dans le second cas, les assurés
sont leur propre assureur : sans être animés par l’esprit de profit, ils mettent en commun une
organisation particulière de la gestion des risques qu’ils rencontrent et dont ils veulent se
prémunir. Ce mode mutualiste est particulièrement celui du monde anglo-saxon, le monde des
clubs de protection et d’indemnisation232. L’assurance des marchandises revêt également une
importance sociale.
2) Une nécessité sociale
Les marchandises transportées par voie de mer constituent le plus souvent des biens de
grande valeur dans le patrimoine de leurs propriétaires. En conséquence, la survenance d’un
dommage affecterait non seulement le propriétaire des marchandises mais également
bouleversera la situation de plusieurs autres personnes telle des salariés, les membres de la
famille ou même la satisfaction des besoins d’une clientèle déterminée ou même encore
diminuerait les recettes de l’Etat. Certains opérateurs perçoivent l’exigence d’assurer les
marchandises comme une simple formalité administrative233. Dans certains pays, d’autres ne
réalisent le besoin de se couvrir qu’une fois le sinistre survenu, d’autres encore n’en voient
pas l’importance. Certaines catastrophes démontrent la situation dangereuse dans laquelle ces
derniers se trouvent. Dans une espèce devenue célèbre, le navire porte-conteneurs allemand
« Janne Wehr » appartenant à l’armateur Oscar Wehr de Hambourg, victime du gros temps en
cours de voyage entre l’Angleterre et la Suède dans la nuit du 21 décembre 1970 a menacé de
chavirer et le commandant de bord a pris la décision de jeter à la mer 2 conteneurs de quinze
tonnes chacun et qui déséquilibraient le navire par suite d’un désarrimage de la pontée. Les
deux conteneurs étaient chargés de bouteilles de whisky représentant une valeur d’environ un
million de francs français à l’époque du sinistre234. Le jet des 2 conteneurs avait été admis en
avarie commune, et l’on sait que la procédure du règlement d’avarie commune est longue et
complexe.
232 Protecting and indemnity clubs, PANDI clubs or P&I clubs. 233 Le certificat d’assurance étant un document qu’il faut présenter à la douane pour enlever les marchandises. 234 Kenguep, E, Analyse critique des règles de responsabilité du transporteur maritime de marchandises : contribution à la recherche de la solution au problème de l’équilibre contractuel, thèse 3ème cycle, université de Yaoundé II
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
68
Dans une autre espèce, le navire CAM BILINGA appartenant à l’armateur-affréteur
Cameroon Shipping Lines (CAMSHIP), en provenance de Rouen arrive au port de Douala le
8 décembre 1994 après avoir essuyé une forte tempête. Sur le pont du navire, le spectacle est
désolant : des fûts sont éventrés des voitures et autres marchandises en vrac jonchent les
parties supérieures des cales du navire. Les dégâts sont évalués à des dizaines de millions de
francs CFA. Certains chargeurs avaient souscrit une assurance maritime sur facultés, d’autres
apparemment n’avaient pas vu la nécessité d’en prendre. Mal leur en pris, car la responsabilité
du transporteur ne pouvait être recherchée avec succès, sauf s’il était établi une faute de sa
part. A défaut d’une telle faute, des chargeurs se sont retrouvés sans recours, sans assurance,
mais à leur crédit des dommages de plusieurs millions de francs.
De telles affaires permettent de démontrer que sur une seule catastrophe, plusieurs
personnes peuvent perdre plus qu’une simple cargaison de marchandise. Les conséquences
sont multiples et de natures différentes. D’abord, les dommages peuvent être d’ordre
mécanique. C’est le cas par exemple lorsque les navires sont endommagés. Ensuite les
dommages peuvent d’ordre humanitaire lorsqu’il y a des blessés ou des décès. On peut
également citer les dommages de nature économique. Enfin des dommages liés à
l’environnement qui causent des dégradations de la faune et de la flore ainsi que du rivage
marin. D’où la nécessité pour les différents opérateurs de souscrire une police d’assurance, car
en plus de les protéger contre le ‘’mauvais sort’’, les assurances maritimes sur facultés
constituent un véritable outil de gestion.
Paragraphe 2 : Les assurances sur facultés, un outil de gestion
Outre le fait qu’elles constituent une sécurité essentielle et efficace pour les
marchandises, les assurances maritimes des facultés permettent de gérer des risques (A) ainsi
que des recours (B).
A- LA GESTION DES RISQUES ET DOMMAGES
En tant qu’outil des risques et dommages, les assurances des facultés préviennent la
survenue (1) des risques et garantissent en même temps la certitude d’un dédommagement
(2).
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
69
1) La prévention des risques
Malgré l’évolution des technologies et l’amélioration des techniques de transport
maritime, l’expédition maritime demeure toujours une opération à haut risque. Bien que
l’avènement du conteneur ait considérablement amoindri les risques de transport, il ne les a
pas totalement supprimés. En plus il existe des phénomènes naturels que personne ne peut
prévoir avec précision. D’où la nécessité logique de se prémunir contre tout risque de perte ou
de dégradation des marchandises en cours de transport du fait de la survenance d’une
catastrophe. La prévention des risques par l’assurance concerne tous types de dommage
politique, économique, ou les pertes, retard et autres. Si prévenir c’est éviter, l’assurance
facultés n’a pas la prétention d’éviter la survenance d’un dommage, mais en souscrivant une
telle assurance, on prévient les conséquences désastreuses d’un dommage. L’assuré prévient
les dommages en payant une prime qui remplace le risque, il se protège de cette façon. Le
risque existe toujours mais, l’assuré ne craint pas sa survenance car il possède une garantie
qui lui évite de perdre la valeur des marchandises. Cette prévention vaut aussi bien lorsque le
dommage se réalise que dans le cas contraire. Un autre avantage de l’assurance, et non des
moindres, concerne la certitude d’obtenir un montant de réparation en cas de sinistre calculé
sur la valeur réelle des marchandises.
2) Une indemnisation certaine
L’assurance maritime sur facultés couvre fondamentalement les risques générés par le
transport maritime. La prévention de ces risques est insuffisante encore faudrait-il qu’en cas
de dommage que l’assuré soit sûr de recevoir une indemnisation. En effet, lorsque survient un
dommage, les premières réflexions concernent la question de l’indemnisation. L’ayant droit
aux marchandises s’interroge sur la question de savoir si non seulement il aura droit à une
indemnisation mais surtout à quel moment cette indemnisation interviendra-t-elle. C’est ici
que l’assurance facultés apparaît dans toute sa ‘’splendeur’’. Dès la constatation du dommage,
l’ayant droit bénéficiant d’une assurance, saisis son assureur qui l’indemnise235. Sans
assurance, toute indemnisation est aléatoire voire impossible.
Une autre question non moins importante se pose : celle de savoir si le transporteur
aura les moyens de verser la somme due en raison de sa responsabilité reconnue dans la
235 L’assureur vérifiera que toutes les conditions sont remplies, que l’assuré n’a commis aucune faute avant de verser une indemnisation.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
70
survenance du dommage. Dans le cas de l’hypothèse où le transporteur est responsable des
dommages, il plane au dessus de la tête de l’ayant droit un risque d’insolvabilité de la part du
transporteur. L’assurance facultés met le chargeur à l’abri de tels risques. La faculté lui est
certes offerte de faire une déclaration de valeur, mais cette formule a de sérieux inconvénients
et ne procure pas les mêmes avantages que l’assurance. Rappelons que lorsqu’il y a
déclaration de valeur le transporteur fautif, devra payer plus que le plafond légal. En fait, la
marchandise est réputée valoir ce qui a été déclarée dans le connaissement. Il n’y a
déclaration de valeur que lorsqu’elle a été expressément prévue. Néanmoins, le transporteur
reconnu responsable pourrait même dans pareil cas démontrer que la déclaration de valeur est
surévaluée. En effet, la doctrine s’était demandée si le transporteur pouvait démontrer que la
valeur déclarée surestimait la chose et il semblait que le seul moyen pour lui de pouvoir
contester l’exactitude de la déclaration fût de prendre une réserve236. Cette solution était
pratiquement déraisonnable car, le chargeur faisant une déclaration de valeur payait une taxe
ad valorem ne pouvait accepter en même temps une réserve du transporteur. Toutefois, il
fallait autoriser le transporteur à éviter que le dommage ne fût une source d’enrichissement
pour le chargeur ou l’ayant droit237. D’où la règle selon laquelle, la déclaration de valeur fera
foi à l’égard du transporteur, sauf preuve contraire de sa part238. En conséquence, faire une
déclaration de valeur n’est pas une solution satisfaisante pour le chargeur. Il faudrait aussi
souligner le fait que cette déclaration est onéreuse, tous les chargeurs ne pouvant s’en offrir
une. Pour toutes ces raisons, l’assurance sur facultés est la solution la plus adaptée pour
protéger les marchandises. Cette dernière procure la certitude d’obtenir une indemnisation
dans les meilleurs délais. D’où il apparaît que l’assurance maritime est également un outil de
gestion des recours.
B- LA GESTION DES RECOURS
L’assurance maritime des ‘’facultés’’ permet certes de gérer les risques et les
dommages mais va au-delà de la simple prévention. La constatation des marchandises arrivées
avariées déclenche maintes procédures qui ne sont pas toujours connues des opérateurs. La
mise en œuvre du processus d’indemnisation est très malaisée pour l’ayant droit aux
236 G. Ripert, Droit maritime, tome 2, n°1818. 237 Rodière, Traité général de droit maritime, affrètements et transports, tome 2, Dalloz, p 313, n°680-681 238 Il est précisé « à l’égard du transporteur » pour marquer qu’il n’est question que des relations nées du contrat de transport et que la solution ne déborde pas sur les relations nées du contrat de vente auquel peut correspondre l’expédition, ni sur les relations nées du contrat d’assurance de la marchandise.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
71
marchandises. Elle est source de perte de temps mais aussi de perte sur le plan financier pour
la victime. L’assurance maritime constitue alors une aide précieuse en ce qui concerne
l’exercice et de l’action (1) et le règlement d’avarie commune (2).
1) L’exercice de l’action
La simplification de l’indemnisation est le but recherché par un opérateur qui souscrit
une assurance facultés. En effet, après la constatation des dommages s’ouvre une période au
cours de laquelle le demandeur doit accomplir un certain nombre d’actes et mettre en œuvre
certaines procédures tout en respectant des délais précis prescrits par la convention applicable.
Il n’est pas toujours aisé de conduire toutes ces procédures car à cause de l’existence de
plusieurs conventions dans le domaine, il faudrait déjà déterminer celle qui sera applicable.
Alors, lorsqu’un tel cas se pose, l’assuré ou le bénéficiaire se fera rapidement indemnisé par
son assureur. Mais l’assuré doit préalablement respecter certaines obligations qui sont au
nombre de trois : conserver les marchandises, conserver les recours et faire une expertise.
Pour ce qui est de la conservation de la marchandise, l’assuré ou le bénéficiaire doit apporter
des soins raisonnables et prendre toutes les mesures nécessaires pour sauver les marchandises
assurées, et éviter l’aggravation des dommages. Il s’agit de la plupart du temps, des
précautions élémentaires qui doivent être prises par le réceptionnaire et qui relèvent du simple
bon sens239. La réaction doit être spontanée, sans qu’il soit nécessaire de prendre l’accord de
l’expert. Toutefois, en cas de défaillance, l’assureur peut se substituer à l’assuré sans pour
autant engager sa responsabilité et sans transfert de propriété et sans reconnaître que sa
garantie est acquise240. Le manquement dûment prouvé par l’assureur à cette obligation peut
entraîner la réduction de l’indemnité. Ensuite, l’assuré a l’obligation de conserver les recours.
Cette obligation implique, en premier lieu que l’assuré ne renonce jamais au recours contre les
tiers, transporteurs notamment, sauf s’il le déclare au préalable à l’assureur et obtient son
accord. En deuxième lieu, la conservation des recours consiste à vérifier l’état extérieur
apparent de la cargaison à la réception, vérifier le contenu et prendre des réserves précises. La
perte du recours du fait de l’assuré entraîne une réduction de l’indemnité à concurrence du
préjudice qui en résulte pour l’assureur241. Il est à noter que l’assuré n’a pas à exercer le
recours. Il lui suffit de fournir à son assureur les éléments nécessaires à l’action dans un délai
239 La lettre du chargeur, n°0033 août 2010. 240 CA Paris, 5e ch., 24 janv.1996, Allianz c/ Cordat. 241 Lamy transport, tome 2, n°308.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
72
nsporteur.
permettant à celui-ci d’agir avant la prescription. L’assureur est alors subrogé dans les droits
et actions de l’assuré après lui avoir versé l’indemnité correspondante.
Le terme subrogation242, propre au langage juridique, est synonyme de remplacement
ou de substitution. Elle peut être réelle243 ou personnelle comme c’est le cas pour l’assurance.
Il y a subrogation personnelle lorsqu’il y a substitution d’une personne à une autre au sein
d’un rapport juridique, elle est directement liée à la technique du paiement, puisqu’il ne peut y
avoir subrogation personnelle qu’à l’occasion d’un paiement244. Aux termes de l’article 1249
du code civil, la subrogation ne peut être que conventionnelle ou légale245. En matière
d’assurances maritimes, la subrogation est conventionnelle et elle est consentie par le
créancier qui est ici l’assuré246. La subrogation allège et libère l’assuré de plusieurs
difficultés. Ce mécanisme permet d’éviter à la victime des délais de règlement généralement
trop long et qui sont de ce fait préjudiciable à la bonne marche des affaires247. Par ailleurs,
l’ayant droit aux marchandises ayant transmis ses droits à l’assureur, il est dispensé de
procédures coûteuses dirigées contre le tra
La dernière obligation de l’assuré en cas de sinistre après la conservation de la
marchandise et la conservation des recours est de demander une expertise. L’intervention de
l’expert de l’assureur est une règle traditionnelle en assurance maritime. L’assuré doit requérir
l’intervention de l’expert de l’assureur désigné dans le certificat d’assurance au plus tard les
trois jours qui suivent la cessation de la garantie, jours fériés non compris. Cela voudrait dire
en pratique dans les trois jours de la livraison si la constatation à lieu à destination finale248.
L’expert a pour mission de :
• Constater les avaries subies par les marchandises pendant le transport ;
• Déterminer la nature, la cause et l’importance des dommages et pertes à partir
des éléments constatés ;
242 Opération qui substitue une personne ou une chose à une autre, le sujet ou l’objet obéissant au même régime juridique que l’élément qu’il remplace, lexique des termes juridiques, 13èd, Dalloz, 2001n P525. 243 La subrogation est dite réelle lorsque, au sein d’un rapport juridique, un bien en remplace un autre, avec les mêmes caractères, prérogatives et charges. Cette de la subrogation est étrangère à la matière du paiement. F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, précis Dalloz, 8e éd., p1262, n°1361 244 Cf. J. MESTRE, La subrogation personnelle, thèse Aix-en-Provence, LGDJ 1979 ; E. SAVAUX, Rép. Civ. D., V° Subrogation personnelle ; cités par TERRE, SIMLER et LEQUETTE, Droit Civil, Les obligations, Précis Dalloz. 245 « La subrogation dans les droits du créancier au profit d’une tierce personne qui le paye, est ou conventionnelle ou légale ». 246 Il existe deux types de subrogation conventionnelle : l’une est consentie par le créancier ( ex parte creditoris) et l’autre par le débiteur (ex parte debitoris), Lire, Droit civil, Les obligations, Terre, Simler et Lequette. 247 Lire Kenguep, thèse préc, p318 et S. 248 Lamy transport, tome 2, n° 308
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
73
• Fixer une éventuelle réfaction selon l’importance des avaries et des contraintes
techniques de transformation ou de commercialisation de la marchandise ;
• Recommander des mesures conservatoires ou préventives pouvant permettre de
limiter les dommages ou prévenir le recours du réceptionnaire.
Le fait de ne pas demander l’intervention de l’expert dans les conditions prévues par la
police entraîne l’irrecevabilité de la réclamation249. Il est aussi important que le transporteur
ait été mis en mesure d’assister à l’expertise de façon à ne pouvoir en nier les conclusions.
Enfin le bénéficiaire doit produire son dossier de réclamation.
L’assuré est donc déchargé de la recherche du responsable, ce qui est d’un grand
intérêt pratique, surtout en cas d’expédition ayant engagé de nombreux intermédiaires. Il
revient désormais à l’assureur, subrogé dans les droits de la victime, après avoir indemnisé
directement cette dernière, de se retourner contre le véritable responsable pour le
remboursement de l’indemnité250. L’aide apportée par l’assurance ‘’facultés’’ en cas de
dommages est très importante, mais elle l’est encore plus en ce qui concerne le règlement des
avaries communes.
2) Le règlement des avaries communes
L’institution des avaries communes est très ancienne et reste propre à la navigation
maritime251. Habituellement, toutes les pertes survenues au cours ou à l’occasion d’une
expédition maritime sont à la charge de deux qui les ont initialement subies : c’est
l’application de l’adage latin « res perit domino ». La doctrine de l’avarie commune constitue
une dérogation à ce principe, en vertu de laquelle tout sacrifice en nature ou en argent fait
délibérément et volontairement par le capitaine pour faire face à un risque de mer ou à un
évènement exceptionnel mettant l’expédition en danger, pour assurer la sécurité commune du
navire et de la cargaison, et permettre la poursuite du voyage, doit être supporté à la fois par
les propriétaires du navire et de la cargaison, proportionnellement à la valeur respective de ces
biens252. Les avaries communes sont réglementées par les Règles d’York et d’Anvers, ces
règles ne constituent pas une convention internationale même si elles sont d’application
mondiale. Il s’agit d’une simple codification de la matière, mise à la disposition du commerce
249 La jurisprudence applique strictement la sanction, CA Paris, 5e ch., 24 janv. 1996, Allianz c/ Cordat ; CA, Lyon, 5 févr. 1981, BT 1981, p 186. 250 Bonassies et Scapel, Droit Maritime, Dalloz. 251 R. Rodière, Avaries communes et transports combinés, BT 1974, p. 14. 252 Lamy transport, tome 2, n°658
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
74
international. Depuis 1864, date de l’élaboration des premières Règles d’York, le texte a été
périodiquement revu, corrigé et complété253. Pour qu’il y ait avarie commune, quatre
conditions selon la doctrine traditionnelle doivent exister simultanément. Il faut : un sacrifice
ou une dépense ; un acte volontaire du capitaine ; un péril imminent et la recherche de
l’intérêt commun du navire et de la cargaison254. Lorsque le capitaine a agi dans l’intérêt de
tous face à un péril imminent en sacrifiant des marchandises, les dommages causés sont admis
en avaries communes255. Il faut préciser que les avaries communes sont classées en deux
catégories selon qu’elles consistent en un dommage causé à la cargaison ou au navire, ou
qu’elles s’analysent en une dépense faite par le capitaine dans l’intérêt de tous. Ainsi, il n’y a
des avaries dommages, qui sont des dommages causés volontairement tant à la cargaison
qu’au navire256 et des avaries frais257 qui sont des dépenses engagées par le capitaine pour le
salut commun de l’expédition maritime.
Dans une telle hypothèse, le règlement des avaries communes est très complexe. Ce
règlement qui peut durer plusieurs années, relève de la compétence de l’assureur, car celui-ci
rappelons-le a été subrogé dans les droits de l’assuré. Concrètement, la procédure de
règlement d’une avarie commune comporte trois phases principales : d’abord la déclaration
d’avaries commune et la nomination du dispacheur, ensuite l’établissement du règlement
d’avarie commune, enfin la liquidation du règlement d’avarie commune258.
Le règlement d’avaries communes nécessite une ‘’phase de confection’’259 qui
impose l’intervention des professionnels, des experts répartiteurs. Des calculs sont nécessaires
ainsi que l’application de plusieurs règles. Lorsque le règlement est rédigé, il est soumis aux
253 Les nouvelles Règles d’York et d’Anvers de 1994, Roger PARENTHOU, revue Scapel, une nouvelle révision a abouti en 2004 à de nouvelles Règles d’York et d’Anvers. 254 De nombreux auteurs anciens ajoutent une cinquième condition : il faut que le sacrifice ait produit un résultat utile. La doctrine la plus récente considère cette dernière condition comme inutile ; cette notion de résultat utile ne figure d’ailleurs nulle part. 255 Parce que, le sacrifice qui est fait volontairement par l’un ou plusieurs dans l’intérêt de tous sera supporté par tous au prorata de l’intérêt qu’ils avaient eux même à être sauvés, COURCY a pu écrire qu’il s’agit d’une « justice distributive », cité par R. Parenthou, Une modeste contribution à l’étude de l’avarie commune. 256 Comme exemple d’avaries dommages on peut citer en ce qui concerne les dommages causés à la cargaison : le jet à la mer pour alléger le navire, les dommages causés aux marchandises par l’eau lors de l’extinction d’un incendie. Pour ce qui est du navire : le sacrifice des agrès et des accessoires, l’échouement volontaire du navire pour sauver la cargaison par un acte de sauvetage du capitaine. 257 Sont considérés comme des avaries frais : les frais de renflouement, les frais de relâche, les salaires et frais de nourriture de l’équipage lorsque ces frais ont été exposés à la suite d’un évènement exceptionnel ; les dépenses exposées pour le règlement des avaries communes. 258 Pour plus de détails sur cette procédure, lire Lamy transport, tome 2, 2004, R. PARENTHOU, La procédure d’avarie commune, annales de l’I.M.T.M, 1984, L. également, NDENDE M., Pratique des avaries communes et protection des intérêts liés dans l’expédition maritime, mémoire DESS de droit des activités maritimes, université de Brest, 1984-1985. 259 J-P BEURIER, Droits Maritimes, Dalloz, 2006.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
75
intéressés pour acceptation. Dans le cas où ceux-ci rejettent le règlement une autre phase
s’ouvre. Simplement, le constat de la complexité de toute cette procédure milite en faveur du
recours à une assurance, la doctrine elle-même reconnaît que cette dernière est une solution
contre les inconvénients d’un règlement d’avarie commune260. Tout ceci pour démontrer que
la procédure est longue et les intérêts de la marchandise, ne sont plus protégés efficacement.
D’où il est véritablement nécessaire de prendre une assurance pour ne pas subir les aléas d’un
règlement d’avaries communes, l’assurance sur facultés est la meilleure solution pour
préserver les intérêts de la marchandise et elle va plus loin car elle a un champ d’application
très large.
SECTION 2 : LE LARGE CHAMP D’APPLICATION DE LA COUVERTURE DE
L’ASSURANCE
Les assurances maritimes facultés sont efficaces parce que leur champ d’application
est très étendu, ce qui lui permet de proposer une gamme de garantie varié (§1) et des contrats
adaptés pour chaque type de besoin (§2).
Paragraphe 1 : Les différentes garanties
L’assurance sur facultés détermine les risques garantis par le procédé de la distinction
entre l’assurance tous risques et l’assurance FAP… Ces 2 types de garanties sont les garanties
principales (A) elles ne constituent pas une alternative impérative il existe des garanties
particulières en fonction des besoins de l’assuré (B).
A- LES PRINCIPAUX MODES DE GARANTIES
Il en existe deux : la garantie tous risques et la garantie ‘’FAP sauf…’’. Avant tout il
est nécessaire de s’intéresser aux conditions de l’assurance (1). Les garanties FAP sauf et tous
risques bien qu’étant fondamentalement différentes (2), présentent certaines dispositions
communes (3).
260 R. PARENTHOU, Une vieille dame maltraitée : L’avarie commune ; in l’assureur africain, 1987.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
76
1) Les conditions de l’assurance
L’assurance maritime est toujours le produit d’une convention et la conclusion du
contrat d’assurance est la condition sine qua non de la garantie261. Les parties contractantes,
les conditions de validité spécifiques et le formalisme du contrat d’assurance sont l’essentiel.
Les parties contractantes sont l’assureur et l’assuré, mais l’intervention d’un intermédiaire est
fréquente. Une originalité du contractant assureur tient au fait que la garantie est souvent
donnée par une pluralité de compagnies qui s’unissent pour pouvoir supporter l’énorme risque
financier qu’est l’expédition maritime. Cependant, l’un d’entre eux occupe une place
prépondérante : celui qui ouvre le dossier262 ; encore faut-il que cette qualité soit manifeste.
En ce qui concerne l’assuré, ce mot a un sens particulier en matière maritime. S’il désigne par
son genre, celui qui bénéficie de l’assurance, la matière offre la particularité de ce que
l’assurance maritime peut être souscrite pour le compte d’une personne déterminée ou
indéterminée. Il existe quatre catégories d’assuré : le souscripteur, une personne nommément
désignée, une personne non désignée et celui pour le compte de qui il appartiendra263. La
chose est rendue nécessaire en matière d’assurances sur facultés car les marchandises qui sont
l’objet de l’assurance sont fréquemment vendues en cours de route, en sorte que la police est
transmise avec elles. Dans ce cas la police est négociable.
Une obligation particulière de bonne foi pèse sur les deux parties au contrat d’assurance
strictement sanctionnée en cas d’omission ou de déclaration inexacte de nature à diminuer
sensiblement l’opinion de l’assureur sur le risque. Que cette déclaration ou omission ait ou
non influé sur le dommage ou la perte de l’objet assuré annule l’assurance à la demande de
l’assureur. Toutefois, si l’assuré rapporte la preuve de sa bonne foi, l’assureur est garant du
risque proportionnellement à la prime prévue.
2) La garantie ‘’tous risques’’ et la garantie ‘’FAP sauf…’’
La garantie apportée par le contrat tous risques est extrêmement large qu’il s’agisse
des risques couverts ou de l’extension de la couverture dans le temps.
Sont donc garantis la perte totale ou partielle de la marchandise, comme tous les
dommages subis par celle-ci. Cette garantie joue à hauteur de la « valeur assurée », laquelle
261 BEURIER, TASSEL, Droits Maritimes, n°325.21 262 D’où la dénomination d’apériteur, du latin aperire qui signifie ouvrir. CA Paris, 28 mars 1991, navire Hélène-Delmas, DMF 1991, p. 516 ; T. com Marseille, 27 juin 1989, revue. Sacpel 1990, p. 29 263 BEURIER, TASSEL, NDENDE, Droits Maritimes, p. 367, n°355.23
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
77
inclut normalement, le prix de revient des marchandises assurées au lieu de destination,
majoré du profit espéré264. L’expression ‘’tous risques’’ ne signifie cependant pas que tous les
risques sont garantis dans leurs conséquences dommageables. C’est ainsi qu’il existe une
catégorie de risques exclus de la garantie. Il s’agit des préjudices financiers, commerciaux ou
indirects265, des risques ajoutés par l’assuré et des dommages inhérents à la marchandise où à
son emballage.
En ce qui concerne la garantie FAP sauf…, elle ne doit pas induire en erreur. Elle
signifie dans le principe que l’assureur ne garantie que la perte totale des marchandises et non
des avaries qui peuvent affecter celles-ci, l’exclusion ne s’étendant pas à l’avarie particulière
résultant de l’un des risques énumérés, lesquelles sont couvertes266. Par rapport au contrat
« tous risques », la garantie FAP sauf présente un double désavantage. D’une part, elle ne
couvre que certains risques. Certes, la liste des risques est aujourd’hui assez longue, il reste
que c’est une liste limitée267. D’autre part, et c’est la différence essentielle, il appartient à
l’assuré FAP sauf… d’établir la preuve de la garantie268 alors que dans l’assurance tous
risques, il appartient à l’assureur de prouver la non garantie269. Toutefois, la garantie tous
risques est plus coûteuse que la garantie ‘’FAP sauf’’. Bien qu’étant différentes, ces deux
garanties ont des points communs qui renforcent la protection des marchandises.
3) Dispositions communes aux deux garanties
Les garanties tous risques et FAP sauf… ont en commun plusieurs points mis en
exergue pour montrer l’efficacité d’une telle protection. Ainsi, les deux garanties sont des
garanties très étendues dans le temps. Ce sont des garanties données de bout en bout270. C'est-
à-dire de magasin à magasin, la marchandise est assurée depuis le point extrême de départ
jusqu’au lieu final de destination. Il n’existe ainsi ni interruption ni rupture de la garantie.
Ensuite, la garantie des contributions d’avaries communes. Pour chaque expédition, la
garantie prend effet à partir du moment où les marchandises prêtes pour le voyage sont prises
en charge par l’entreprise qui doit les acheminer et jusqu’au moment de leur remise au
destinataire ou à ses préposés, représentants ou ayant droit. Quelques soit le mode de garantie,
264 Bonassies et scapel, Droit Maritime 265 Lire, Lamy transport, tome 2, 2007, n°297. 266 Bonassies et Scapel, op. cit. P841, n°1320. 267 Par exemple, n’est pas couvert le risque fréquent de mouille de la marchandise, ni celui de vol. 268 CA Aix-en-provence, 22 mai 1991, rev Scapel 1991, p52. 269 Cass. Com., 20 oct 1993, BTL1993, p52. 270 Lamy transport. Tome 2.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
78
l’assureur prend en charge la contribution aux avaries communes et aux frais d’assistance à la
seule condition que l’évènement à l’origine de l’avarie ne soit pas expressément exclu. En
outre, l’assureur, se substitue à l’assuré pour verser la contribution provisoire ou fournir la
garantie de paiement de la contribution, libérant ainsi la marchandise.
Un autre point commun est relatif à la garantie de divers frais et dépenses sous réserve
que ces frais ne résultent pas d’une exclusion. Ce sont des frais exposés par les bénéficiaires
de l’assurance au cours du voyage. Il s’agit des frais exposés en cas d’interruption ou de
rupture de voyage, pour déchargement, magasinage, transbordement.
Ces garanties prévoient des exclusions communes de base lesquelles visent certains
risques qui n’ont pas le caractère aléatoire ou accidentel qui est attaché à toute notion
d’assurance, et certaines marchandises dont la valeur marchande ou conventionnelle est sans
commune mesure avec leur valeur intrinsèque. Elles excluent également des risques et font
une distinction entre les risques qui sont exclus formellement, ce sont les exclusions absolues,
et ceux qui étant exclus de la garantie de base peuvent faire l’objet d’une couverture séparée,
ce sont les exclusions relatives.
Par ailleurs, on peut également citer la reconstitution automatique du capital les
garanties tous risques et ‘’FAP sauf’’ ne constituent pas les seules garanties possibles. Il
existe des risques qui sont exclus de ces garanties qui peuvent, toutefois faire l’objet de
contrats spéciaux.
B- LA GARANTIE DES RISQUES EXCEPTIONNELS
La garantie des risques ordinaires comme le nom l’indique ne couvre qu’une certaine
catégorie de risques. Les risques exclus font l’objet de garanties particulières. Il s’agit de
l’assurance maritime des risques exceptionnels. En, fonction des besoins et du caractère
dangereux de la route à prendre, l’assuré peut protéger les marchandises. Cette garantie
répond à un domaine bien spécifique (1) et a une durée spécifique (2).
1) Le domaine de la garantie
Les garanties des risques ordinaires excluent les risques de guerres et assimilés. Or,
ceux-ci sont susceptibles d’endommager les marchandises. Afin de garantir leur protection,
les risques correspondant aux exclusions des garanties de risques ordinaires peuvent être
couverts d’une part, par une garantie limitée aux risques en mer, c’est la garantie waterborne.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
79
D’autre part, par une garantie qui couvre les marchandises pendant la totalité de voyage y
compris la partie non maritime, c’est la garantie dite de bout en bout.
Ces deux types de garanties sont très étendues et couvrent les destructions ou
détériorations, les vols pillages ou disparitions résultant de guerre civile ou étrangère,
terrorisme ou sabotage à caractère politique, émeutes. Egalement la dépossession ou
l’indisponibilité résultant de captures, prises, arrêts, saisies. Bien que la marchandise ne soit
pas endommagée, le propriétaire en est privé au moins temporairement, et après l’écoulement
d’un certain délai, le bénéficiaire de l’assurance peut être indemnisé selon la procédure du
délaissement. Comme pour les risques ordinaires, l’assureur indemnise aussi certains frais et
la contribution d’avarie commune résultant d’un évènement couvert. Toutefois, la
détérioration des facultés par suite de retard n’est pas couverte par la garantie. La durée de la
garantie est également particulière en fonction du choix.
2) La durée de la garantie
La garantie waterborne et celle dite de bout en bout ont chacune une durée spécifique
au risque qu’elles sont censées couvrir. Ainsi, la garantie waterborne ou waterborne
agreement ne couvre les risques de guerre qu’en mer. Elle débute lorsque la marchandise
quitte la terre au port d’embarquement. Elle cesse au port final dès la mise à terre sans
pouvoir excéder quinze jours à compter du mouillage ou de l’amarrage dans ce port.
En ce qui concerne la formule de bout en bout, comme pour les risques ordinaires, la
garantie commence au moment où les marchandises quittent les magasins de l’expéditeur et
cesse lors de l’entrée dans les magasins du destinataire. En revanche, pour les risques de
guerre, il existe des délais. Avant le chargement et le déchargement du navire, le délai est de
quinze jours, à bord du navire ou sur allège avant déchargement, le délai est de soixante jours
à compter du mouillage. Ces délais peuvent être prolongés moyennant surprime. Ces
différents types de garantie se font à travers différents contrats d’assurance.
Paragraphe 2 : Des polices d’assurances adaptées à chaque type de transport des marchandises
Pour pouvoir bénéficier des différentes garanties offertes afin de protéger les
marchandises, le chargeur doit conclure un contrat qui sera adapté à ses besoins. En matière
d’assurance maritime des facultés, les contrats d’assurance prennent le nom de polices
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
80
d’assurance et peuvent se faire de deux manières différentes : par police flottante (A) ou par
police particulière (B).
A- LA POLICE D’ABONNEMENT
La police dite flottante encore appelée police d’abonnement est une police où l’assuré
fait assurer ses expéditions au fin et à mesure de ses besoins au moyen d’un carnet
d’aliments271. Ce type de police présente un intérêt certain pour une protection accrue des
marchandises (1) et deux variantes pour pouvoir mettre cette protection en marche (2).
1) L’intérêt de la police d’abonnement
Dès qu’un chargeur ou une entreprise est amené à expédier ou recevoir des
marchandises assez fréquemment, ceux-ci doivent s’orienter vers une police d’abonnement.
Cette formule leur permettra non seulement d’avoir une gestion plus facile mais aussi et
surtout une sécurité plus accrue pour la cargaison. La protection s’organise autour d’un
accord-cadre conclu entre l’assuré et l’assureur. Le contenu d’un tel accord précise l’étendue
des garanties272, les types de facultés.
De manière générale, la police d’abonnement est un contrat préétabli qui détermine les
risques à couvrir, les voyages à garantir, la nature des marchandises, la durée273. Cependant, il
faut bien distinguer celles qui sont souscrites pour compte propre de celles qui sont souscrites
pour compte de tiers.
La police pour compte propre, c’est celle du chargeur qui assure ses propres
marchandises ou celles dont il a la charge de l’assurer. Dans ce cas, il y a obligation d’assurer
toutes les expéditions et couverture automatique de celles-ci. La police pour compte de tiers,
c’est la police ‘’tiers chargeur’’ qu’utilisent les transitaires, commissionnaires de transport
pour leurs clients. Dans la police tiers chargeur, l’assuré n’est tenu de souscrire que les
expéditions que ses clients l’ont chargé d’assurer mais il n’y a couverture qu’après la
déclaration d’aliment. Il faut souligner que l’assuré ne peut stipuler une assurance pour le
compte d’un tiers, que s’il participe à un titre quelconque à l’expédition : transit, transport. Ce
système pratique permet de couvrir les marchandises au fur et à mesure des besoins. Ce
271Lamy transport 272 Lamy transport, tome 2 273 Jacques BONNAUD, l’infidélité dans les polices d’abonnements. A propos du jugement du tribunal de commerce de Marseille du 4 octobre 1996, revue, Scapel 1996.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
81
contrat couvre toutes les expéditions d’un assuré, sans même qu’il ait à les déclarer
préalablement. Sa souplesse qui en fait le succès nécessite une parfaite bonne foi de l’assuré
qui est tenu d’y affecter la totalité de ses expéditions, dans le cadre du trafic déterminé dans la
police. Le système est simple : l’assuré s’oblige à déclarer et l’assureur à accepter. C’est un
contrat de confiance et de fidélité fondé sur la bonne foi de l’assuré, à défaut les assureurs se
protègent par des sanctions. La principale sanction est l’irrecevabilité des réclamations274.
Ainsi pour mieux bénéficier de ces avantages, l’assuré choisi entre deux types de polices
d’abonnement.
2- Les types de polices d’abonnement
On distingue principalement deux types de polices d’abonnement. Les polices à application obligatoire et les polices à application facultative.
En ce qui concerne la police à application obligatoire le souscripteur s’engage à faire assurer toutes les expéditions répondant aux critères définis dans l’accord cadre. En contre partie, l’assureur accorde automatiquement sa garantie pour chaque expédition ou marchandise dès la mise en risque275. Il appartient alors à l’assuré de déclarer les expéditions dans un délai de huit jours.
S’agissant de la police à application facultative, le souscripteur accepte l’engagement de l’assureur mais se réserve le droit d’assurer ou non par le contrat une expédition rentrant dans les prévisions de l’accord-cadre. Du fait de cette possibilité, la garantie ne peut être automatique mais suppose une déclaration de l’assuré. Elle ne prend effet pour chaque expédition que si la déclaration en a été faite à l’assureur préalablement à la remise des marchandises au transporteur.
Plus explicitement, la police à application facultative est encore appelée police « Tiers chargeurs ». Elle est communément utilisée par les commissionnaires et autres auxiliaires de transport ; ceux-ci n’étant tenus d’y affecter que les expéditions que leurs clients les ont chargés d’assurer. Les déclarations d’aliments doivent être faites à l’assureur avant chaque envoi, et comporter tous les renseignements nécessaires à l’appréciation du risque, notamment La nature des marchandises des marchandises transportées, leur emballage, leur valeur assurée, les ports de départ et de destination.
La durée des polices d’abonnement est généralement d’une année renouvelable tacitement.
274 Lire jacques BONNAUD, préc. 275 C'est-à-dire avant toute déclaration par le souscripteur mais à condition que l’assuré déclare l’expédition dans le délai imparti.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
82
On observera que les polices à alimenter qui prévoient une succession de voyages pour une quantité de marchandises déterminées, sont régies par les mêmes dispositions que les polices d’abonnement. Elle vise surtout les contrats commerciaux comportant des expéditions échelonnées sur une période indéterminée. L’assuré indique, lors de la conclusion du contrat, la valeur totale des marchandises et le nombre d’expéditions prévues. A chaque expédition, il émet un « avis d’aliment », c’est-à-dire qu’il indique au préalable à l’assureur la nature, la composition et la valeur de l’expédition. Pour protéger les marchandises, le chargeur peut aussi opter pour la police particulière.
B- LA POLICE PARTICULIERE
La police particulière ou police au voyage est une police qui couvre un voyage déterminé et un lot de marchandises identifiées. Elle présente des caractéristiques et intérêts bien spécifiques néanmoins par rapport à la police d’abonnement elle présente de légers inconvénients.
La couverture particulière ou au voyage couvre des marchandises et un trajet bien déterminés. Elle convient particulièrement à des expéditions occasionnelles. Cette police protège efficacement le chargeur qui expédie ou alors reçoit des marchandises à faible fréquence. Elle est néanmoins indiquée pour les cargaisons importantes qui viennent de façon ponctuelle. Le choix d’une police ou voyage donne lieu à l’émission d’un document unique
La police d’abonnement et la police au voyage sont les deux modalités de conclusion du contrat d’assurance Bien que l’objectif de ces deux types de polices est de protéger efficacement les marchandises Ces polices n’interviennent pas dans le même cadre. Il existe certains paramètres qui dictent le choix de telle ou telle police. Et c’est en fonction de ces données que l’on peut affirmer que la police flottante ou d’abonnement présente des avantages indéniables. Ainsi, la plupart des chargeurs étant des professionnels, la police d’abonnement leur convient beaucoup plus. Il s’agit en fait d’un contrat de confiance basé sur un échange de promesse pour l’assuré de tout déclarer et pour l’assureur de tout garantir. La promesse de l’assureur va même plus loin et peut même intervenir après le sinistre. La police d’abonnement est un contrat de rigoureuse bonne foi qui permet au chargeur professionnel de protéger, quelque soit le moment du sinistre, ses marchandises.
En ce qui concerne la police particulière, comme nous l’avons déjà indiqué plus haut, c’est une police pour expéditions occasionnelles. Le montant de la prime est fixé et payé lors de la conclusion du contrat d’assurance. Le but de l’assurance est de relever le niveau de protection des marchandises, afin d’atteindre pleinement son objectif, elle doit sans cesse être améliorée.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
83
CHAPITRE II :
L’AMELIORATION DE LA PROTECTION ISSUE DU
CONTRAT D’ASSURANCE
L’assurance facultés concourt de manière indéniable à relever en terme de réparation
le niveau de protection des marchandises, objet du contrat de transport maritime. Les
insuffisances et les lacunes des différentes dispositions du contrat de transport font du recours
à l’assurance une obligation. Ce support qu’est l’assurance propose évidemment des méthodes
beaucoup plus à même de répondre efficacement aux différents risques que peuvent courir les
marchandises. Mais comme toute protection l’assurance des marchandises peut être améliorée
afin d’atteindre un niveau de protection optimale. Il s’agit alors dans ce cas de rechercher des
extensions de couvertures de l’assurance qui feront de cette dernière une méthode de
protection qui anticipera les risques de transport. En effet dans un contexte de mutation et
d’évolution permanente, l’anticipation apparaît comme le meilleur moyen d’améliorer les
rendements quelconques. Ainsi pour ce faire, l’assurance devrait aller plus loin notamment en
étendant son champ d’application (section 1) et surtout en relevant l’encadrement de
l’assurance (section 2).
SECTION 1 : L’EXTENSION DU CHAMP D’APPLICATION DE L’ASSURANCE
FACULTES
L’assurance sur facultés a pour but, d’une manière générale, de protéger ou d’assurer
les marchandises contre des risques divers. Pour réaliser cet objectif, elle offre les garanties
suivantes : la garantie des risques ordinaires et la garantie des risques de guerre et assimilés.
Ces deux principales garanties permettent d’éviter des désagréments notamment en ce qui
concerne la mise en œuvre de la responsabilité du transporteur maritime. Avec l’assurance
facultés, le chargeur est en cas de sinistre indemnisé sur la base de la valeur réelle des
marchandises endommagées ou perdues. Telle qu’elle est organisée, l’assurance facultés offre
une protection assez large aux marchandises, mais elle peut malgré tout aller encore plus loin
en élargissant son champ d’application à travers une couverture des risques exclus
(paragraphe 1) et une couverture des marchandises exclues (paragraphe 2).
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
84
Paragraphe 1 : La couverture des risques exclus
L’objectif de l’assurance étant de protéger la marchandise, cette protection ne peut être
totale si une certaine catégorie de risques est exclue de la couverture. Le contrat d’assurance
doit prévoir la couverture de toute sortes de risque : collatéraux (A) et indirects (B) pour
prétendre être totale.
A- LA COUVERTURE DES DOMMAGES COLLATERAUX
Les dommages collatéraux276 sont des dommages qui ne touchent pas directement un
bien ou un objet déterminé mais qui affectent plutôt ce bien ou objet par l’intermédiaire
d’autres préjudices. Ainsi défini, les dommages collatéraux sont en réalité des dommages
indirects. L’assurance les exclut de notre couverture.
1) La couverture du retard
Il y a retard lorsque le délai convenu ou à défaut le délai raisonnable a été dépassé par
le transporteur277. Le retard en lui-même est exclu de toute couverture par les différentes
garanties de l’assurance. Ce que l’assurance couvre, c’est le retard qui résulte d’un naufrage,
d’un chavirement ou de l’échouement du navire ou de l’embarcation ; d’incendie ou
d’explosion ; d’abordage ou de heurt du navire contre un corps fixe ; mobile ou flottant y
compris les glaces. Mais lorsque le navire est en retard pour toute autre raison, et ce même si
les marchandises sont avariées l’assurance ne les indemnise pas. Cette décision des assureurs
est injuste et ceux-ci pour s’expliquer, soutiennent qu’ils sont hors d’état de maîtriser,
statistiquement et de repartir à l’intérieur de communautés homogènes, de tels chefs de
préjudice dont l’intensité échappe à la mesure278.
Or le retard cause effectivement des dommages. Supposons que des marchandises
aient été commandées pour une période déterminée et uniquement pour cette période, le
navire qui arrive en retard, cause un préjudice. Non seulement les marchandises ne serviront
276 Sides damages en anglais. R Rodière, Traité Général de droit maritime, affrètement et transport, p 367. 277 Rodière R., affrètement et transport, p 248, n°608. 278 E. KENGUEP, Analyse critique des règles de responsabilité du transporteur maritime de marchandises : contribution à la recherche de la solution au problème de l’équilibre contractuel, thèse 3ème cycle, université de Yaoundé II, p 320.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
85
plus mais aussi on peut aller plus loin en affirmant que sur le plan économique, les
conséquences seront importantes. Pour illustrer ce dommage, on parle souvent du vendeur de
guirlandes à noël. Lorsque le navire arrive en retard, c'est-à-dire après le mois de décembre ou
alors le 26 décembre; le vendeur ne pourra plus les écouler sur le marché. Le refus de couvrir
les dommages dus au retard nous conduit à ce qui s’appelle une « inadéquation
structurelle »279, car l’obligation première des assureurs est de quantifier leurs engagements
de manière à organiser leur solvabilité finale en collectant des primes adéquates. La
conséquence de cette exclusion des dommages dus au retard sont des pertes sur le plan
commercial et financier, pertes qui ne sont pas garanties, mais qui devraient l’être.
2) La couverture des dommages commerciaux
Par dommages commerciaux, on entend tout dommage qui ne concerne pas l’aspect
physique des marchandises ni leur quantité mais plutôt un dommage qui est en rapport avec
leur valeur marchande. Les dommages commerciaux résultent généralement des retards, et ces
retards diminuent la valeur de la marchandise. Les dommages commerciaux peuvent être
constitués de la perte invoquée sur la revente280, du coût de la conservation des marchandises
en chambre froide au délai du temps nécessaire281 et même parfois des cas où la marchandise
ne peut plus être écoulée. Les différentes garanties offertes par l’assurance des facultés
excluent des couvertures les dommages commerciaux.
L’exclusion des dommages commerciaux de toute garantie ne saurait s’expliquer par
le fait qu’il s’agit d’un dommage collatéral, il faudrait plutôt se tourner vers les assureurs. Ces
derniers soutiennent, comme en ce qui concerne le retard, que les préjudices causés ont une
intensité qui échappe à la mesure. Cependant, il arrive souvent que ce type de dommage
provient même d’un risque couvert, tels les avaries, on ne comprendrait pas alors pourquoi la
garantie ne s’étendrait pas jusqu’au dommage sur le plan commercial.
L’option de mettre en œuvre une garantie qui couvrirait les dommages commerciaux
serait bénéfique non seulement pour les marchandises mais aussi pour les différents
opérateurs. Ainsi, à l’image des garanties "FAP sauf…" ou tous risques qui s’étendent de
magasins à magasins, il pourrait avoir une option qui permet de choisir la garantie des
dommages commerciaux.
279 E. KENGUEP, thèse préc, p 320. 280 Beurier, Droits maritimes, p 367 n°355.13. 281 CA Aix-en-Provence, 27 mai 2003, revue Scapel 2003, 57 ; DMF HS n°8, juin 2004, p 98, n°111, obs. Delebecque.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
86
S’agissant des avantages tirés par les opérateurs, ils sont de plusieurs ordres. D’abord,
la maîtrise de certains risques qui sont à l’origine de plusieurs types de dommages. Ensuite,
un autre avantage qui est le prolongement du premier, il s’agit de la protection accrue des
marchandises. Cette protection est renforcée car toutes les étapes282 de l’acheminement des
marchandises qui présentent des risques font l’objet d’une garantie. Avec la couverture des
dommages causés par le retard et la couverture des dommages commerciaux, l’assurance offre
aux marchandises une gamme complète de garanties adaptées aux différents risques possibles
lors du voyage. Pour aller plus loin encore dans ce besoin de protection des marchandises,
l’assurance "facultés" devrait introduire dans ses différentes couvertures certains risques qui
en sont actuellement exclus.
B- LA COUVERTURE DES RISQUES INDIRECTS ET INGOUVERNABLES
L’assurance des marchandises donne une définition précise des risques qu’elle couvre,
on pourrait même la qualifier de définition exclusive car elle énumère toute une série
d’exclusion liée au caractère de l’évènement283. Si l’on s’en tient strictement à cette liste
d’énumération, on fait abstraction de certains risques quasiment non prévisibles et
insurmontables. Pour mieux comprendre l’idée d’une couverture des risques indirects et
ingouvernables, il est utile d’étudier le risque qui est couvert en assurance (1) avant
d’envisager comment les risques indirects et ingouvernables pourraient être couverts (2) et
enfin étudier comment des provisions, utilisées en comptabilité, peuvent contribuer à
améliorer la sécurité de la cargaison (3).
1) Le risque couvert en assurance
De manière générale, le risque est défini comme un évènement éventuel, incertain,
dont la réalisation ne dépend pas exclusivement de la volonté des parties et pouvant causer un
dommage284. En matière d’assurance, le risque est entendu comme tout évènement
explicitement ou implicitement prévu au contrat et en vertu duquel la responsabilité de
l’assureur sera mise en jeu285. L’évènement désigne la cause du dommage. Les évènements
sont extrêmement variés si l’on se réfère à leur type. En matière d’assurance, le moment où il
282 Il s’agit du stockage, le voyage proprement dit et la livraison. 283 Beurier, Droits Maritimes, Dalloz, 2006, p 367, 355.14 284 Lexique des termes juridiques, Dalloz, 13e édition, 2001. 285 Alain BESSE, Assurance sur corps, la clause « franc sauf », LGDJ, 1957, p12 cité par Olivier LASMOLES, les assurances maritimes et la couverture des risques terroristes, revue Mare Liberum, n°1, 2004, p 21.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
87
se produit présente une importance capitale. Ce sera en fonction de ce moment que l’on
déterminera les caractéristiques du risque qui pourra être couvert. De ce fait, le risque en
matière d’assurance sur facultés, pour être couvert ne doit pas être illégitime, indirect,
ingouvernable, certain ou exorbitant. Ainsi trouve-t-on énumère une série d’exclusions liée au
caractère de l’évènement qui est à l’origine du dommage ou au caractère du dommage lui-
même.
Est considéré comme illégitime, toute violation de blocs, contre bande, commerce
prohibé ou clandestin, amendes, confiscation286, mise sous séquestre et réquisition, faute
intentionnelle287 ou inexcusable de l’assuré288. Le risque est indirect lorsqu’il s’agit d’une
saisie, caution ou autre garantie financière, immobilisation ou retard du navire, embargo289
quarantaine. Lorsqu’il s’agit de guerres civiles et assimilés, fait du prince, émeutes ou grèves
et assimilés piraterie politique ou guerrière, le risque est dit ingouvernable.
Le risque est certain quand il s’agit d’un vice propre entre autre. Certains risques ainsi
exclus parce que ne répondant pas à certains caractères, l’assurance sur facultés va garantir les
risques admis par le procédé de la distinction entre l’assurance "tous risques" et l’assurance
Francs d’avaries particulière sauf… Rappelons-le, la garantie "tous risques" qui s’applique
dans les limites du voyage assuré ne garantie pas tous les risques, certains en sont écartés.
C’est le cas des risques qualifiés d’indirects et ingouvernables qui pourraient faire l’objet de
garantie.
2) La couverture des risques indirects et ingouvernables
Les risques indirects et ingouvernables comme nous l’avons dit plus haut sont
constitués de saisie, quarantaine, de guerre civile, émeute, grèves. La raison de leur exclusion
s’explique par le fait qu’en ce qui concerne les risques indirects, ils n’atteignent pas
directement les marchandises. C’est par le biais d’un autre évènement que les marchandises
subissent un préjudice. S’agissant des risques ingouvernables, ils sont exclus car ils ne
peuvent être prévus ou alors maîtriser statistiquement de la part des assureurs. Ces raisons
invoquées par les assureurs ne sont pas assez pertinentes. D’une part, ces risques peuvent faire
l’objet de certaines prévisions. D’abord les évènements comme les guerres civiles, les
286 CA Paris, 7 mai 1996, BTL 1996, 520. 287 Cass. Com. 6 juill. 1999, navire Korhogo, DMF 2000, 515, rapp. J-P. Rémery, note P.L. 288 CA Paris, 29 mai 1996, navire IRRINTZINA DMF 1996, 1107, note P-4 Nicolas ; CA Rouen, 3 mai 2001, navire Novgord, DMF 2001, 802, note P. Lotion. 289 CA aix-en-provence, 50 et 2001, navire Renée-Delmas Rev. Scapel 2001, 181.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
88
émeutes ou grèves n’éclatant pas de manière soudaine, il existe presque toujours des signes
précurseurs.
S’agissant particulièrement du cas des guerres civiles, les itinéraires empruntés par les
navires peuvent être considérés comme des "routes conventionnelles", ce qui implique que si
un lieu situé sur cet itinéraire est le théâtre d’affrontements, les assureurs pourront considérer
que ce risque peut être maîtrisé car étant prévisible. De plus, certains endroits sont réputés
pour leur particularité à être constamment ou à un moment donné l’objet d’affrontement290.
En droit commun, l’article 1148 du code civil disposent que : « Il n’y a lieu à aucuns
dommages et intérêts lorsque, par suite d’une force majeure ou d’un cas fortuit, le débiteur a
été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit ».
La force majeure est au sens large, tout évènement imprévisible et insurmontable empêchant
le débiteur d’exécuter son obligation291. C’est un évènement d’origine extérieure, en ce sens
que le fait doit être absolument étranger à la personne du débiteur contrairement au cas fortuit
qui est évènement interne se rattachant à l’activité du débiteur ou de son entreprise292. Mais
de façon générale, la jurisprudence n’admet pas de distinction entre cas fortuit et force
majeure293. Pour qu’il y ait force majeure ou cas fortuit, la réunion de plusieurs conditions est
nécessaire, notamment il faut que l’évènement ait été imprévisible et qu’il ait empêché le
débiteur d’exécuter sa prestation294. L’étude des conditions du cas fortuit ou de force majeure
qui excluent de la garantie des marchandises qui ont subi des dommages du fait des risques
particuliers, on se rend compte que les guerres et assimilés, piraterie et émeutes sont
prévisibles295. Mais ce sont des critères accessoires d’anormalité, de soudaineté et de rareté
qui pourront déterminer si ces évènements sont imprévisibles ou pas. En l’absence de ces
critères, les guerres et assimilés, pirateries peuvent l’objet de garantie. Il n’est pas nécessaire
que les garanties soient identiques à celles qui existent déjà, les assureurs pourront mettre sur
pied d’autres types de garanties et éviter ainsi de faire payer aux assurés des surprimes
onéreuses.
290 C’est par exemple le cas aux larges des côtes de la Corne d’Afrique en ce qui concerne la piraterie. 291 Lexique des termes juridiques, DALLOZ, 13ème éd. 292 Terré, Simler, Lequette, Droit Civil, Les obligations, p 558, n° 581 293V. J. RADOUANT, Du cas fortuit et de la force majeure, thèse Paris, 1919 ; L. JOSSERAND, Force majeure et cas fortuit, DH 1934, chron. 25, cité par Terré, Simler et Lequette. 294 L’impossibilité d’exécution doit correspondre à un empêchement absolu. L’évènement dit-on doit avoir « rendu absolument impossible l’exécution de l’obligation contractée », Cass. Soc., 25 févr. 1954, Bull. civ. IV, n°107, p105. 295 Terré, Simler, Lequette, op. cit., n° 582 et s
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
89
Ensuite, les différentes compagnies d’assurance qui mettent en avant le fait qu’elles ne
peuvent pas maîtriser et répartir à l’intérieur de communautés homogènes des préjudices dont
l’intensité "échappent" à la mesure, peuvent maintenant évaluer ces préjudices, car ils sont
désormais quantifiables. La couverture dont pourrait bénéficier les marchandises contre les
risques indirects et ingouvernables peut s’appliquer au cas par cas. La prime que versera le
souscripteur ne devra pas être majorée d’un coefficient de sécurité. Cette garantie pourra avoir
les mêmes particularités que les garanties "FAP Sauf…" et "tous risques", c'est-à-dire,
garantir les marchandises de magasin à magasin.
Par ailleurs, la prise de livraison avant le moment où l’assurance se termine, ne devrait
pas mettre fin à celle-ci. Cette clause généralement contenue dans les polices d’assurance
maritime sur facultés met fin à une protection qui a été conclu de magasin à magasin. La
durée de protection doit simplement être respectée dans l’intérêt des marchandises. Et l’intérêt
des marchandises impose également que les marchandises exclues de la couverture fassent
l’objet de garantie.
3) Les provisions pour risques
Pour pallier aux difficultés que les assureurs rencontrent pour couvrir certains types de
risques particuliers, une solution généralement utilisée en droit comptable peut être envisagée.
Les raisons évoquées par les assureurs pour exclure ces risques sont principalement relatives
au fait qu’ils ne peuvent pas être quantifiés et maîtrisés afin de pouvoir faire l’objet de
certaines prévisions. La technique utilisée par les comptables lors de l’établissement de leur
bilan en clôture d’exercice pour des risques qui comportent un élément d’incertitude quant à
leur montant ou leur réalisation appelé provision peut aider les assureurs à couvrir les risques
qui échappent encore aux garanties disponibles.
Simplement, les provisions sont constituées en vue de faire face à des pertes ou charges
nettement précisées et que les évènements en cours rendent probables. Il existe deux types de
provisions, les provisions pour dépréciations et les provisions pour risques et charges. Il s’agit
de mettre de côté une somme d’argent en vue de faire face à des dépenses éventuelles. L’Acte
Uniforme de l’OHADA296 portant organisation et harmonisation des comptabilités des
entreprises dispose en son article 48 que : « les risques et charges, nettement précisés quant à
296 L’Organisation pour l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique a vu le jour grâce au traité signé à Port Louis le 17 octobre 1993 et entré en vigueur en 1995. Il a pour objectif d’établir une unification progressive des législations afin de favoriser le développement harmonieux de tous les Etats.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
90
leur objet, que des évènements survenus ou en cours rendent seulement probables, entraînent
la constitution, par dotations, de provisions financières pour risques et charges à inscrire au
passif dans les dettes financières ». Les assureurs peuvent tirer avantage de l’institution des
provisions pour couvrir les risques et même les marchandises exclus. Concrètement, les
compagnies d’assurances peuvent constituer des fonds qui vont contribuer à garantir les
risques collatéraux, indirects et ingouvernables. A partir de la constitution de provision
financière pour risques, les assureurs pourront mettre en œuvre de nouvelles garanties ayant
pour but d’accroître le niveau de protection des marchandises. L’assuré devra verser une
prime pour pourvoir garantir sa cargaison. Les risques s’étant multipliés ainsi que le volume
et la fréquence des envois des marchandises, un nombre de plus en plus élevé de chargeurs
prennent des garanties, de sorte que l’assureur va diluer les risques dans les primes qu’il
reçoit. Lorsque les marchandises auront subis des dommages qui ne sont pas couverts par les
garanties ‘’FAP Sauf’’ et ‘’tous risques’’, en l’occurrence les dommages commerciaux qui
résultent du retard du navire, l’assureur indemnisera l’assuré sur la base des provisions
établies.
Paragraphe 2 : La couverture des marchandises exclues
Les marchandises exclues de la couverture sont celles qui ne bénéficient d’aucune
protection par l’assurance pendant leur acheminement d’un port à un autre. Elles sont
généralement exclues des deux principales garanties à savoir "FAP Sauf…" et "tous risques"
mais font souvent l’objet de couverture sous certaines conditions particulières et parfois de
contrat spécifique. Or toutes les marchandises à l’exception de celles dites dangereuses
doivent bénéficier des mêmes garanties aux mêmes conditions ce qui n’est pas le cas. Afin
d’offrir un régime de protection unique commun à toutes les marchandises, il importe que les
animaux vivants et les marchandises chargées en portée (A) et les marchandises voyageant en
vrac (B) jouissent au même titre que les autres marchandises du régime de protection qu’on
pourrait qualifier de "commun".
A- LES ANIMAUX VIVANTS ET LES MARCHANDISES CHARGEES EN
PONTEE
Les animaux vivants et les marchandises chargées en pontée ne sont pas exclus, au
sens strict de la couverture par l’assurance. Seulement, ces marchandises ne sont garanties
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
91
qu’a l’encontre d’un certain nombre de risques limitativement énumérés et selon certaines
conditions297. L’énumération des risques contre lesquels ces marchandises sont garanties et le
respect d’autres conditions particulières font alors de celles-ci des marchandises exclues des
modalités de garanties générales. Or, le fait que les animaux vivants soient de plus en plus
transportés et le chargement en pontée de plus en plus pratiqué, ces marchandises doivent
s’assurer de la même façon que les autres. Ainsi, la couverture qui s’applique aux autres
marchandises doit également s’étendre sans condition aux animaux vivants (1) et aux
marchandises en pontée (2).
1) La couverture des animaux vivants
Les différentes conventions internationales qui régissent le transport maritime de
marchandises ont des définitions assez contradictoires du mot "marchandises". La convention
de Bruxelles de 1924 exclue les animaux vivants de la définition des marchandises298. Par
contre, les Règles de Hambourg de 1978 admettent les animaux vivants comme étant des
marchandises pouvant faire l’objet d’un transport maritime299.
Toutefois, au vu de l’évolution du commerce, il est normal de considérer les animaux
vivants comme étant des marchandises. De ce fait, il convient, dans l’optique de les protéger
au même titre que les marchandises d’autre nature, d’appliquer aux animaux vivants le même
régime de protection.
La doctrine300 reconnait que la protection des animaux vivants par l’assurance sur
facultés peut faire des difficultés, lorsque ceux-ci sont l’objet d’une opération maritime. Au
même titre que les risques exclus, les animaux vivants qui font l’objet d’un transport maritime
doivent bénéficier d’une garantie adéquate. L’étude des différentes garanties démontre que la
couverture des animaux vivants si elle n’est pas exclue de manière explicite, elle n’est
toutefois pas toujours présentée comme faisant l’objet d’une garantie. La couverture que
l’assurance sur facultés à offrir aux animaux vivants doit être spécifique en vertu de la
particularité même des facultés qui doivent être couvert. Cette couverture doit notamment
prendre en compte le caractère délicat des animaux lorsqu’ils font l’objet d’un transport
maritime. En effet, hormis les risques assez habituels qu’encourent les marchandises diverses
de manière générale, les animaux vivants peuvent être victimes de certains risques spécifiques
297 Bonassies et Scapel, Droit Maritime, LGDJ, p 840, 1319. 298 Art1 al.5 299 Art. 1 (5) Règles de Hambourg. 300 Beurier, Droits Maritimes, p 367, 355.13.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
92
à leur nature. Ils peuvent, en contact avec d’autres produits dans certaines conditions, subir
des préjudices. Le but de l’assurance étant de protéger les marchandises, de les garantir contre
d’éventuels risques, elle doit pour atteindre ce but proposer des solutions qui ne seraient pas
générales mais plutôt qu’intégrerait des particularités. Ainsi, la couverture relative aux
animaux vivants doit prendre en compte les risques normaux ou habituels de tout transport
maritime de marchandises mais aussi les risques qui affecteraient particulièrement les
animaux vivants. Ces deniers courent beaucoup plus de risques que les marchandises d’autre
nature, mais ce fait ne concerne pas uniquement les animaux vivants ; les marchandises qui,
en raison de leur chargement sur le pont sont dites chargées en pontée, courent également des
risques
2) Les marchandises chargées en pontée
Les marchandises qui font l’objet d’un transport par voie de mer ont très longtemps
voyagées dans les cales du navire. Ces dernières étaient l’unique lieu où la cargaison devait se
trouver pour leur acheminement. Le développement de nouvelles techniques d’emballage et
de conditionnement ont favorisé des méthodes modernes de positionnement des
marchandises. Il s’agit du chargement des marchandises sur le pont et ces dernières sont alors
dites chargées en pontée. Plus simplement, les marchandises en pontée sont celles qui sont
mises sur le pont et non dans les cales du navire.
Ce type de chargement n’a pas toujours été admis par toutes les conventions301
régissant le transport maritime de marchandises. Les Règles de Hambourg302 l’admettent
cependant ainsi que les toutes nouvelles Règles de Rotterdam303. L’état de la couverture
actuelle des marchandises chargées en pontée varie selon certaines conditions. Les assureurs
identifient deux hypothèses, selon que le chargement en pontée est admis ou non.
Généralement, les marchandises en pontée bénéficient d’une garantie lorsque le navire
dispose d’installations pour recevoir les marchandises sur le pont. Autrement dit, la cargaison
chargée sur le pont d’un navire ; navire qui ne dispose pas d’installations appropriées pour
cela ; ne sera pas garantie par l’assurance. Cette restriction va à l’encontre même de
l’évolution rapide des méthodes d’emballage et de conditionnement ce qui est contraire au
développement des techniques de construction des navires. Si l’on admet que de nos jours,
301 La convention de Bruxelles de 1924 n’en fait pas mention. 302 Art.9 303 Art.25.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
93
l’utilisation des conteneurs comme emballage, conditionnement est pratiquement devenu la
règle dans le transport, on comprend mal pourquoi lorsqu’ils sont placés sur le pont ils ne
bénéficient pas de la garantie. De par leur poids et leur volume, il semble évident qu’ils ne
pourront pas être mis dans les cales d’un navire, alors le pont devient la seule solution.
Toutes les fois qu’il y aura des marchandises chargées sur le pont, il faudrait qu’elles puissent
bénéficier des différentes protections sans l’ajout d’une surprime et d’une déclaration
préalable à l’assureur. Les marchandises chargées en pontée sont de plus en plus fréquentes,
les différentes garanties de l’assurance sur facultés doivent fournir à ces dernières des
couvertures aux mêmes conditions qu’aux marchandises placées dans les cales du navire.
Tout comme les marchandises chargées en pontée qui font l’objet d’une couverture timide, les
marchandises en vrac connaissent les mêmes difficultés doivent pour cela bénéficier de
couverture adaptées.
B- LES MARCHANDISES EN VRAC
Les marchandises en vrac304 s’entendent de tout chargement emmagasiné dans des
conteneurs citernes ou des silos305 ou directement dans les cales du navire. Elles sont
manutentionnées par pompage, succion ou directement par des moyens mécaniques tels que
des bennes, des pelles ou autres, ces marchandises ne sont pas emballées306. Depuis trente
ans, le transport du vrac a connu un important développement qui a généré une augmentation
continue de la capacité des navires. Actuellement, beaucoup de produits divers sont
transportés par mer en vrac tels que les minerais et surtout les céréales.
Comme toutes les autres marchandises, les marchandises en vrac bénéficient certes
d’une protection par l’assurance, mais en raison de l’insuffisance de son emballage et de son
conditionnement, la qualité de la protection n’est pas semblable à celle des autres types de
marchandises. La raison invoquée étant l’absence de tout emballage, la spécificité et les
propriétés de la marchandise doivent être prises en compte. Ceci d’autant plus que les
marchandises transportées en vrac sont très importantes sur le marché.
L’amélioration de leur couverture par l’assurance se justifie encore par le fait qu’il
existe des navires qui sont uniquement spécialisés dans le transport des marchandises en vrac.
De ce fait les risques sont amoindris car les installations sont prévues pour recevoir des
304 Les marchandises transportées en vrac peuvent être solides (sec) ou liquides. 305 Le transport dans les conteneurs ou tout autre récipient ne peut concerner que des lots réduits. 306 Alberto R. Handabaka, Gestion logistique intégrée de la distribution physique internationale, éd, celse, p 28.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
94
marchandises en vrac. De plus, en cas de dommages lorsque les marchandises sont
transportées en vrac le délai pour les constatations est fixé à vingt quatre heures de la fin de la
garantie. Ces marchandises doivent bénéficier des mêmes conditions de garanties que les
autres types de marchandises car leur faible valeur unitaire est compensée largement par la
facilité des manutentions et leur grande importance sur le plan économique. Leur nécessité
tant sur le plan économique que social devrait les placer au sommet des marchandises
jouissant d’une protection renforcée.
SECTION 2 : UN ENCADREMENT PLUS STRICTE DE L’ASSURANCE
SUR FACULTES
L’efficacité d’une protection ne se mesure pas seulement aux différents mécanismes
qu’elle prévoit. Elle doit en plus de ces mécanismes faire l’objet d’un encadrement particulier
afin de l’adapter aux différentes évolutions du cadre dans lequel elle se meut. S’agissant de la
protection des marchandises dans le cadre du transport maritime, l’encadrement de
l’assurance sur facultés revêt une importance capitale, et passe par une vulgarisation contrôlée
(paragraphe 1) et un renforcement encadré (paragraphe 2) de ladite assurance.
Paragraphe 1 : La vulgarisation contrôlée de l’assurance sur facultés
La société actuelle se caractérise par la propension des individus à se prémunir contre
des risques éventuels. Il s’agit de la recherche d’un besoin de sécurité. Ce besoin qui a évolué
fait de notre société, une « société assurantielle »307, autrement dit, une société dans laquelle
tout ou presque fait l’objet d’une assurance. Cependant, contrairement aux autres types
d’assurances308, l’assurance sur facultés est un domaine assez inconnu et inexploré. Il serait
donc nécessaire en raison du poids du transport maritime dans l’économie de redynamiser ce
secteur (A) et de sensibiliser les différents opérateurs (B).
307 Y. Lambert-Faivre, Droit des assurances, 8e éd, Dalloz. 308 Assurance automobile, assurance de personne, (assurances terrestres, assurances vie).
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
95
B- LA REDYNAMISATION DU SECTEUR DE L’ASSURANCE SUR FACULTES
L’assurance sur facultés rendue obligatoire par une loi au Cameroun ne saurait se
contenter de ce caractère légal pour effectivement atteindre son objectif. Parce que de nos
jours, sa diffusion n’est pas contrôlée, ce secteur connait de multiples problèmes (1) aux
solutions particulières (2).
1) Les problèmes du secteur de l’assurance sur facultés
Secteur réservé à une catégorie précise de personnes, les assurances en général sont
caractérisées par leur relative opacité. En effet, les assurances revêtent des aspects techniques
et financiers aussi complexes qu’importants. Mais ce n’est pas tant ce côté "mathématique"
qui fait obstacle à la propagation de l’assurance sur "facultés". Il s’agit plutôt des difficultés
liées à l’importance même d’une telle assurance et à l’accession à l’information la concernant.
Le développement des assurances et des différentes obligations d’assurer ont favorisé
la prolifération de compagnies d’assurance. Les activités de ces dernières sont beaucoup plus
penchées vers les personnes et tout ce qui est terrestre. Ces compagnies ne mesurent pas le
poids ou alors l’importance de l’assurance sur facultés particulièrement. Face à
l’accroissement d’un besoin de sécurité lié notamment au souci du lendemain, les branches de
l’assurance sus citées connaissent une propagation qui touche une majeure partie de la
population. Des moyens importants sont mis en œuvre pour permettre ou pour inciter les
individus à souscrire une assurance automobile, incendie ou une assurance vie tandis que,
seuls les professionnels du transport maritime connaissent l’existence d’une assurance pour
les marchandises transportées. Or, en tenant compte de l’aspect social de l’assurance facultés,
il est paradoxal de constater que cette assurance ne jouit pas du même statut que les autres
types d’assurance terrestre ou de personnes.
Par ailleurs, accéder à l’information concernant l’assurance sur facultés n’est pas
aisé. Le transport maritime de marchandises touche d’une manière ou d’une autre plusieurs
personnes dans la société et le fait de rendre obligatoire l’assurance des marchandises
transportées par voie de mer ne suffit pas pour rendre compte de son importance et de son
intérêt. A cause de cette absence d’information, certains opérateurs ont simplement considéré
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
96
cette obligation comme une simple formalité administrative309 qui allongerait les modalités
d’acheminement des marchandises. Il faudrait également noter que la fraude n’est pas
étrangère au secteur de l’assurance sur facultés. Celle-ci étant obligatoire, certains opérateurs
fournissent aux services et administrations concernés de faux certificats attestant la
souscription d’une assurance. L’utilisation récurrente de faux certificats par les opérateurs
causent d’énormes pertes financières aux compagnies d’assurance. De plus, ces opérateurs ne
se rendent pas comptent que l’usage de faux certificats est de nature à mettre les marchandises
en danger car le transport maritime est caractérisé par la présence de risque sur toute la
chaîne.
Pourtant, la souscription d’une assurance n’est pas qu’une simple formalité, elle est de
nos jours, probablement la meilleure solution aux risques de transport raison pour laquelle il
serait souhaitable de donner un souffle nouveau à ce secteur.
2) L’apport positif de nouvelles méthodes
Certains ont estimé que souscrire une assurance n’était que d’une certaine façon
retarder la réalisation d’une opération commerciale. Cependant, une telle conviction ne peut
être qu’à l’origine de déconvenues importantes sur le plan économique et qui dépasseraient
largement le coût de souscription d’une assurance. Rechercher la solution la moins coûteuse,
et par conséquent la moins efficace revient en fin de compte à alourdir ses dépenses. C’est
pour cette raison que des solutions adaptées doivent être mises en œuvre.
D’abord, pour une redynamisation réussie, il serait souhaitable de commencer par une
large campagne de diffusion. Les objectifs et les avantages de l’assurance sur facultés doivent
être mis en avant. L’organisation de séminaires en rapport avec la protection des
marchandises et un accent particulier sur les assurances sur facultés est importante310. La
tenue récente de la première édition des « journées de l’assurance » est une bonne initiative
pour la diffusion des informations. L’implication de tous les acteurs lors de ces journées ;
compagnies d’assurance, services et administrations concernés, opérateurs économiques,
gouvernement ; montrent que l’assurance est un secteur important de développement.
Concernant particulièrement les assurances sur facultés, la marginalisation dont elles font
l’objet peut régresser voire même totalement disparaitre grâce à ce genre d’évènement. Il est
309 Gaston Ngamkan ; juridis périodique, n°28 oct-nov-déc 1996 ; p 90. 310 L’organisation par le CNCC de différents séminaires à travers toutes les régions du Cameroun , V. La lettre du chargeur n°0027 fév 2010, le calendrier des séminaires de formation.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
97
toutefois nécessaire que sur le long terme ces journées perdurent et contribuent à explorer de
nouvelles couvertures. Egalement, les différentes compagnies d’assurance devront
régulièrement publier des notes d’informations destinées à valoriser le secteur.
Ensuite, à la faveur du développement du commerce électronique et de
l’informatisation des moyens de paiement, il serait facile pour les opérateurs de disposer
des !:documents justificatifs de souscription d’une assurance sur "facultés". De plus, on
pourrait aller plus loin encore en permettant aux chargeurs de pouvoir souscrire une partie
d’assurance directement à partir d’une connexion internet. Les nouvelles technologies de
l’information et de la communication pourront ainsi contribuer à faciliter la recherche et le
choix d’une protection pour la cargaison. L’option d’une informatisation ou mieux d’une
dématérialisation des documents de l’assurance peut s’avérer très utile en fin de compte. Car
en considérant les possibilités de pertes et de vols que ces documents peuvent faire l’objet en
étant sur support papier, il s’avère que le choix des documents électroniques renforce et
accroît la protection des marchandises.
Enfin, l’obligation d’assurance instituée par l’article 1er de la loi n°75-14 du 8
décembre 1995 ne s’applique qu’aux marchandises importées dont la valeur FOB excède
500 000 Francs CFA. On pourrait tout simplement exiger une assurance pour les
marchandises. Ces différentes alternatives pour la redynamisation d’un secteur aussi
important que celui des assurances sur facultés ne peut s’avérer efficace que si les
destinataires sont à leur tour sensibilisés. La fraude en matière de certificat d’assurance est un
frein pour le développement de l’économie. La dématérialisation des dits certificats permettra
de sécuriser les recettes et facilitera les opérations de commerce extérieur en gagnant du
temps et en ayant moins de tracasseries.
B- LA SENSIBILISATION DES OPERATEURS DU COMMERCE EXTERIEUR
Si la protection des marchandises passe nécessairement par un secteur d’assurance
plus dynamique et plus favorable à l’innovation, il ne faudrait pas perdre de vue que ce sont
les opérateurs de commerce qui mettent en œuvre cette protection. Donc, une vulgarisation de
l’assurance qui n’atteindrait pas les véritables destinataires est vaine. Par conséquent, une
identification des opérateurs est nécessaire (1) pour pouvoir mettre en place un mécanisme
efficace (2).
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
98
1) Identification des opérateurs
Les opérateurs sont les premiers à être concernés par les assurances. Afin de garantir
leurs marchandises et ainsi sécuriser leurs affaires, les opérateurs doivent être tenus informés
de l’obligation de souscrire une assurance "facultés". Cependant, ils doivent faire l’objet
d’une identification.
Le principe de l’effet relatif des contrats empêche ceux-ci d’avoir des effets à l’égard
des tiers. Ainsi, le contrat de transport de marchandises par mer ne liant que le chargeur et le
transporteur, en cas de sinistre seules ces deux parties seront concernées. Le chargeur est donc
tout particulièrement concerné par l’assurance. Il a intérêt à assurer ses marchandises.
Dans l’hypothèse où le chargeur n’est pas également le destinataire des marchandises,
celui qui l’est doit exiger de l’expéditeur la protection des marchandises par la souscription
d’une assurance sur facultés. Ce dernier n’aura pas besoin de recevoir de manière permanente
des marchandises pour avoir une assurance. La réception d’une seule cargaison de
marchandise justifie le recours à l’assurance comme moyen de protection.
En ce qui concerne le transporteur maritime, normalement, il n’est pas immédiatement
concerné par la souscription d’une assurance. Mais, dans l’accomplissement ou l’exécution de
son obligation, un devoir de conseil pourrait lui être imposé. Celui-ci consisterait pour le
transporteur à avertir le chargeur des limitations de réparation dont il bénéficie et inciter ce
dernier à prendre une assurance pour les marchandises.
Les intermédiaires de transport, étant parties adhérentes au contrat de transport, sont
aussi concernées par la protection des marchandises. Lorsque c’est le chargeur qui a fait appel
à eux, les intermédiaires en fonction de leur statut, transitaire ou commissionnaire de
transport, doivent souscrire une garantie pour les marchandises. Le transitaire doit surtout
préciser au chargeur le cadre de son intervention ; étant sous les ordres du chargeur, le
transitaire a le devoir d’informer le chargeur sur les risques qu’encourt la marchandise et sur
l’efficacité de la protection fournie par une assurance. Ces différents opérateurs doivent être
sensibilisés de manière permanente de leur obligation de protéger les marchandises
2) Les supports de sensibilisation
Les opérateurs ayant un contact plus ou moins direct avec l’assurance des
marchandises, étant identifiés, il importe maintenant qu’ils fassent l’objet d’une
sensibilisation. Le but de cette sensibilisation sera principalement de faire rentrer dans les
mœurs des négociants et opérateurs, le fait que la souscription d’une police d’assurance pour
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
99
les marchandises n’est pas une contrainte « superfétatoire » ou un supplice. Elle doit plutôt
être un reflexe naturel du fait de l’importance économique du transport maritime de
marchandises311. De ce point de vue, il est primordial de mettre en œuvre une compagne
permanente qui verra l’intervention non seulement des organismes d’assurances mais
également de l’Etat voire de la communauté internationale.
Les organismes d’assurance, par la médiation de leur service clientèle, doivent remplir
la fonction pédagogique qui leur incombe. Pour cela l’organisation de différents séminaires
s’avère être efficace. Périodiquement, ces organismes, par les séminaires organisés, les
colloques et autres rencontres doivent développer une relation permettant une coopération
efficace avec les opérateurs.
Le mécanisme de l’assurance doit être expliqué aux différents opérateurs afin d’être
capable de faire une juste appréciation des risques encourus par la marchandise et ainsi choisir
une garantie adéquate312.
L’apport de l’Etat et de la communauté internationale est décisif dans cette
sensibilisation. L’importance du trafic maritime oblige ces deux acteurs à encadrer
étroitement le secteur maritime. Par la sensibilisation, les opérateurs économiques peuvent
alors en toute connaissance de cause choisir une protection adéquate pour les marchandises.
Ce travail de sensibilisation incombe également aux organismes d’assistance aux
chargeurs, pour ce qui est du Cameroun cet organisme est le Conseil National des Chargeurs
du Cameroun. Les missions attribuées au CNCC place cet organisme au centre de la
sensibilisation. Il assiste les chargeurs sur toute la chaîne de transport et défend leurs intérêts
en vue de contribuer à la promotion du commerce international. Sa mission d’assistance aux
chargeurs oblige le CNCC à faire des sessions de formation adressées à ces derniers pour les
sensibiliser et les éclairer sur la nécessité et l’importance de l’assurance sur facultés pour leurs
activités.
Paragraphe 2 : Le renforcement encadré de l’obligation d’assurer les marchandises
Afin de protéger le secteur maritime et notamment le transport des marchandises qui a
une influence considérable dans le développement de l’économie, l’assurance des
marchandises a été rendue obligatoire. Au Cameroun, c’est la loi n°75-14 du 08 décembre
311 G. NGAMKAM, précité, p 90. 312 En étant informés sur l’assurance, les opérateurs relèvent le niveau de protection des marchandises.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
100
1975 et son décret d’application n°76-334 du 06 août 1976 qui rendent obligatoire cette
assurance. Les dispositions de ces deux textes instituent des contrôles et des sanctions en cas
d’infraction à l’obligation d’assurance. Mais la modernisation des techniques de fraude
nécessite un renforcement des contrôles (A) et de sanction (B).
A- LE RENFORCEMENT DES CONTROLES
Outre le but de protection des marchandises, l’obligation d’assurance avait également
pour objectif de protéger un secteur d’assurance naissant dans les pays nouvellement
indépendants et de consolider les résultats positifs de ce secteur dans les autres pays.
S’agissant de la protection des marchandises, les textes législatifs ont prévu un mécanisme de
contrôle de respect de ladite obligation. La modernisation de la société impose pour plusieurs
raisons, un renforcement de ces contrôles par la mise en œuvre de nouvelles méthodes de
contrôles (2) mais une étude des méthodes en vigueur est nécessaire (1).
1) L’organisation des contrôles tels que pratiqués
Dans le but de faire échec aux fraudes qui auraient pu être organisées en cas de non
respect de l’obligation d’assurer les marchandises, divers modes de contrôles ont été mis en
œuvre. Le décret n°76-334 du 6 avril 1976 portant application de la loi n°75-14 du 8
décembre 1975 prévoit des contrôles pour l’obtention de certains documents. Ainsi, s’agissant
par exemple de l’obtention de la licence d’importation, ledit décret subordonne la délivrance
ou le renouvellement de la licence à la production du document justificatif d’assurance313.
Autrement dit, l’autorisation de faire entrer les marchandises dépend largement de la
présentation des documents justifiant la souscription d’une garantie pour les marchandises
Un autre type de contrôle est effectué lors des procédures d’importation et plus
principalement en ce qui concerne les procédures de dédouanement. Les différentes étapes
permettant d’obtenir l’autorisation de déplacer les marchandises sont caractérisées
essentiellement par l’exigence d’une attestation d’assurance314. Quelque soit la valeur de la
marchandise et surtout quelque soit le régime315 l’obtention de l’Attestation de vérification
313 Art 7 du décret « la délivrance ou le renouvellement de toute licence d’importation doit être subordonnée à la production du document justificatif d’assurance visé aux articles 5 et 6 ci-dessus ». 314 Manuel des Procédures, Guichet unique des opérations du commerce extérieur. 315 Régime général de mise à la consommation et le régime suspensif.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
101
des importations (AVI)316, du traitement du dossier en douane de l’enregistrement de la
déclaration en douane, la présentation d’une attestation d’assurance est obligatoire.
Par contre, en matière d’exportation le contrôle de la souscription d’une assurance
pour les marchandises est inexistant. Rien n’est fait pour vérifier la garantie des marchandises
à exporter. Cependant, des difficultés insuffisantes apparaissent dans l’exercice du contrôle de
l’assurance tel que pratiqué. D’abord, la présentation de l’obligation d’assurance n’est requise
qu’en cas de demande d’une licence d’importation ou de renouvellement de celle-ci. Ce qui
laisse supposer que pour l’accomplissement d’autres tâches ou l’obtention d’autres
documents, l’assurance ne serait pas nécessaire. Ensuite, en ce qui concerne la procédure de
dédouanement, la multitude de pièces exigées peut être un facteur de fraude car un désordre
peut résulter de la présentation de toutes les pièces317. En raison de toutes ces lacunes et aussi
pour la modernisation des techniques de contrôle, il est nécessaire de mettre sur pied de
nouvelles techniques.
2) La modernisation des méthodes de contrôle
Un mode de protection, pour plus d’efficacité doit prévoir des contrôles, et améliorer
sans cesse ses méthodes sans oublier de les varier, afin de pouvoir éviter des fraudes. D’une
certaine manière et pour partie, c’est ce qui a été fait avec l’assurance des marchandises car la
législation en vigueur impose certains contrôles. Mais, l’évolution toujours croissante des
technologiques impose une adaptation permanente des moyens de contrôle. Ainsi, il s’est
avéré que l’unique moyen de contrôle prévu dans le décret n°76-334 du 06 août 1976 n’est
plus suffisant. Pour y remédier, on pourrait déjà moderniser la législation existante en matière
d’assurance en incluant les différentes modifications dues à l’informatisation.
En tenant compte du fait que les documents d’assurance doivent être informatisés ou
alors électroniques, les moyens pour contrôler ce nouveau type de document doivent
également être de même nature. Les agents chargés du contrôle doivent bénéficier pour cela
d’une formation appropriée.
En outre, les contrôles peuvent se multiplier sur toute la chaîne de transport,
accroissant ainsi la protection des marchandises.
316 Il s’agit d’un document qui prouve que les marchandises assujetties à une vérification préalable ont été bien contrôlées. 317 Notons que d’après le manuel des procédures au Guichet unique des opérations du commerce extérieur, pour l’obtention d’un document, il faut présenter en moyenne dix (10) pièces.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
102
Le contrôle du respect de l’obligation peut commencer sur le pont d’embarquement.
De même, sur les documents de transports tel le connaissement, une partie réservée à la
mention que l’assurance a été souscrite pour les marchandises peut être prévue.
De manière plus générale, l’exercice de la profession de chargeur pourrait être soumis
à la présentation d’un document qui attesterait de la garantie par l’assurance de toute
marchandise dont l’opérateur aura la charge de s’occuper.
Ainsi, les marchandises pourront bénéficier dès l’embarquement de mesures de
protection efficaces et appropriées. L’existence de contrôles atteste que le respect d’une
obligation n’est jamais immédiat ou alors l’obligation elle-même est rejeté, c’est pour cette
raison que des sanctions sont prévues pour punir les contrevenants.
B- LE RENFORCEMENT DES SANCTIONS
La sanction est la conséquence inéluctable du non respect d’une obligation. C’est une
peine prévue pour assurer l’exécution d’une loi. Pour assurer l’efficacité de la protection des
marchandises par l’assurance, le législateur a effectivement prévu des sanctions. Le contexte
actuel nous permet d’affirmer qu’un renforcement de sanction est tout à fait justifié en raison
de la pléthore de fraude dont peut faire l’assurance, les sanctions en vigueur (1) devraient
pour cela être plus rigoureuses (2).
1) Les sanctions en vigueur
Les dispositions en vigueur prévoient des sanctions318 qui ont pour but d’inciter les
opérateurs à souscrire une assurance. Toutefois, ces sanctions s’avèrent être insuffisantes et
pas assez persuasives pour atteindre leurs objectifs.
Il existe deux types de sanctions prévues : l’amende et la peine d’emprisonnement. En
ce qui concerne l’amende, c’est une peine pécuniaire obligeant le condamné à verser une
certaine somme au Trésor public319. Toute infraction relative aux dispositions de la loi320 est
punie d’une amende égale à 25% de la valeur de la marchandise ou faculté321. En ce qui
concerne l’emprisonnement qui est une peine privative de liberté de nature correctionnelle
consistant dans l’incarcération du condamné pendant un temps fixé par le juge dans les limites
318 Art 3, loi n°75-14 du 8 décembre 1975. 319 Lexique des termes juridiques, 13ème éd, 2001 320 Particulièrement de l’art 1 de la loi n°75-334 321 Art 3 loi n°75-334.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
103
prévues par la loi322, il est de douze mois maximum323. Les deux peines peuvent se cumuler
ou alors être administrées séparément.
Ces peines ne sont pas assez sévères ou du moins, elles ne le sont pas. Le domaine
stratégique qui est celui du transport maritime, notamment en raison de son poids économique
important, impose des sanctions exemplaires. En plus, l’évolution des marchés et
l’importance des investissements en transport maritime de marchandises rendent dérisoire
l’amende de 25% de la valeur de la marchandise. En effet, la valeur totale des cargaisons
expédiées s’exprime en terme de millions voire même de milliards de francs. De ce fait,
prélever sur ces valeurs astronomiques 25%, comme amende pour non respect de l’obligation
d’assurance est presque devenu aujourd’hui une façon d’encourager des fraudes.
Il en est de même en ce qui la peine d’emprisonnement, qui est assez légère. Par
ailleurs, les insuffisances des sanctions ne sont pas les seuls freins à l’efficacité de la peine.
Le prononcé de telles sanctions implique la tenue de procès, procès qui peut s’étendre sur une
longue période. L’apparition de nouvelles données implique la prise de sanction plus
immédiate et de renforcer celles qui existent déjà.
2) Les nouvelles sanctions
L’existence de sanction est de nature à assurer le respect du droit, mais encore
faudrait-il que ces sanctions soient exemplaires. L’amende et l’emprisonnement sont des
sanctions traditionnelles qui permettent d’atteindre des objectifs de dissuasion et de
répression. Mais à côté de ces méthodes traditionnelles, il faudrait ajouter de méthodes plus
modernes et adaptées afin de garantir aux marchandises une bonne protection par l’assurance.
Les difficultés d’application des méthodes traditionnelles plaident pour une adaptation
des sanctions qui pourront être immédiates, rapides et surtout efficaces. Pour convaincre les
opérateurs de fournir aux marchandises un voyage sans risques ou alors pour atténuer ces
risques, les sanctions doivent être exemplaires et rigides.
Pour ce faire, il faudrait commencer par rapprocher les sanctions des opérateurs. Dès
que l’infraction est constatée, à savoir que l’assurance n’a pas été contractée ou qu’elle l’a été
de façon frauduleuse, une sanction doit déjà être appliquée. Au lieu d’attendre que le procès
ait lieu, l’opérateur peut déjà être astreint à verser une somme déterminée et sa licence
322 Lexique des termes juridiques, 13ème édition, 2001 323 Art 3.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
104
d’importation peut lui être suspendue le temps qu’il se mette en situation régulière, à cela on
pourra ajouter le versement immédiat d’une somme d’argent.
Pour les "récidivistes", en matière de non respect de l’obligation de souscrire une
assurance, la tenue d’un procès est utile, alors les sanctions doivent être sévères. L’amende de
25% de la valeur de la marchandise doit être revue à la hausse afin de dissuader tous ceux qui
seraient tentés de se soustraire à l’obligation d’assurance. Le législateur pourrait créer une
sorte de casier judiciaire pour les opérateurs économiques. Celui-ci aurait pour objet de mieux
contrôler et de mieux adapter les sanctions, sera inscrit sur ce casier le nombre d’infraction
déjà commises. Il pourrait aussi mettre sur pied, un système de point qui permettrait de
sanctionner les plus petites infractions. Ces sanctions auront pour ambition de réguler les
affaires et d’assainir le milieu dans lequel ces affaires se déroulent. Pour résumer, les
sanctions doivent être graduées allant du délinquant primaire au délinquant notoire. Les
contrôles et les sanctions sont les éléments fondamentaux de toute protection qui se veut
efficace. Les marchandises transportées doivent bénéficier de toutes les mesures nécessaires
afin de garantir leur sécurité et ainsi jouer un rôle dans le développement économique des
Etats.
L’assurance sur facultés constitue ainsi une meilleure solution pour la garantir la
cargaison contre les risques et dommages, la modicité des réparations. Pour parfaire la
protection qu’elle assure aux marchandises, il est important que l’assurance sur facultés
bénéficie de quelques aménagements de sa forme actuelle. En élargissant sa couverture aux
risques exclus et aux marchandises exclues et surtout en constituant des provisions,
l’assurance sera d’une efficacité optimale.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
105
CONCLUSION DEUXIEME PARTIE
L’assurance contribue de manière significative à améliorer le sort des marchandises.
D’où l’obligation faite par le législateur d’imposer cette solution complémentaire. Le
mécanisme de l’assurance, ne confère pratiquement que des avantages pour l’ayant droit qui
décide d’offrir cette protection à sa cargaison qu’il décide d’expédier. Elle est une sécurité
contre les risques, contre la modicité des réparations. A travers ces deux couvertures, la
garantie FAP et la garantie tous risques, elle va largement au dessus de ces buts. Les résultats
satisfaisants de l’assurance ne doivent pas occulter le fait que la société actuelle a des mœurs
qui évoluent rapidement, il importe dans ce cas de réadapter tout le temps toute méthode de
protection.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
106
CONCLUSION GENERALE
Au terme de l’analyse portant sur la protection des marchandises en droit des
transports maritimes, il ressort clairement que la cargaison transportée n’est véritablement
protégée que si aux actions des parties on combine la conclusion d’un contrat d’assurance.
Mais il convient de reconnaître les mérites du double système protection issu des mécanismes
des règles conventionnelles. Il est nécessaire d’apprécier l’étendue de l’apport de ces
mécanismes depuis les opérations d’embarquement de la cargaison à bord du navire jusqu’à la
livraison au destinataire. Indépendamment de la convention applicable, l’on notera à juste titre
que les marchandises peuvent bénéficier de deux types de protection: une protection en amont
et une autre en aval. Premièrement, la protection en amont est physique à travers les
opérations d’emballages, de marquages et de conditionnement. Il faut rappeler que ces
différentes opérations qui constituent des mesures obligatoires ont connu une évolution
significative avec le phénomène de la conteneurisation. Deuxièmement, l’intervention en
amont est contractuelle. L’aspect contractuel oblige les parties à prendre, chacune étant
soumise à des obligations particulières, des précautions visant la sécurisation de la cargaison.
La survenance d’un dommage, de quelque nature qu’il soit, impose la mise en œuvre de
mesures particulières, il s’agit de la protection en aval parce qu’elle intervient quand il y a eu
échec de la prévention. Toutefois, l’efficacité de cette protection doit être relativisée à cause
de certains obstacles divers. Certains tiennent à la portée limitée de la responsabilité du
transporteur maritime, d’autres sont en rapport avec les ambiguïtés et les lacunes du droit
positif.
Le premier obstacle, notamment la responsabilité du transporteur maritime est un frein
à cause de la rigueur des règles qui régissent le déclenchement d’une action en responsabilité
d’une part et d’autre part à cause du système de réparation en vigueur qui peut être considéré
comme étant un échec324 au regard du volume des marchandises transportées et de leur
valeur.
324 Kenguep, (E), Analyse critique des règles de responsabilité du transporteur maritime de marchandises : contribution à la recherche de la solution au problème de l’équilibre contractuel, thèse, université de Yaoundé II.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
107
rme de régir le domaine du transport de
ndises doivent être au même niveau que
les mét
Sur les ambiguïtés et les lacunes du droit positif, notons que l’existence de plusieurs
conventions qui défendent des intérêts distincts n’est pas de nature à assurer l’existence d’un
régime juridique unique concernant la protection des marchandises. En plus, malgré cette
multitude de conventions, il existe toujours des questions qui ne font l’objet d’aucune
réglementation précise. Pour essayer de remédier à ces nombreux problèmes, une nouvelle
convention a été adoptée, la convention de Rotterdam. Mais à cause de nombreux consensus
qu’il a fallu faire pour arriver à concilier des camps et des intérêts opposés et ainsi avoir une
convention unique ayant pour ambition à te
marchandises par mer, plusieurs problèmes dénoncés dans les conventions précédentes sont
encore présents dans la nouvelle convention325.
Au demeurant, toutes ces limites ne doivent pas conduire à affirmer que les
marchandises transportées par voie maritime n’ont pas de valeur au regard de la relative
protection qu’on leur accorde. Au contraire, ces insuffisances loin de décourager tous les
intervenants de la chaîne de transport, ont favorisés l’émergence et le développement d’une
nouvelle forme de protection complémentaire : les assurances sur facultés. Les assurances de
marchandises ont pour but d’être un support qui renforce les mécanismes mis en place par les
conventions internationales. Obligation est faite aux opérateurs de souscrire une assurance et
son importance a des répercussions sur le plan social et même sur la gestion des organisations
économiques. Les assurances opèrent par le biais des différentes garanties offertes en fonction
des spécificités de chaque voyage, de la nature des marchandises et des risques encourus.
Dans leur forme actuelle, les assurances ne doivent pas être considérées comme étant
parfaites, car l’évolution technologique et le développement de nouveaux dangers imposent
sans cesse une révision. Les assurances des marcha
hodes de transport si ce n’est avoir un peu d’avance. Les assureurs doivent mettre de
côté toutes leurs réticences et accepter l’évolution.
Les marchandises transportées par voie de mer sont sans doute les plus importantes et
contribuent largement au développement de l’économie internationale mais aussi de
l’économie d’un pays. En conséquence, leur importance est telle qu’elles doivent être
rigoureusement protégées. L’assurance est peut être un support efficace mais il est nécessaire
que les conventions régissant ce secteur intègrent toutes les questions avec précisions. Pour ce
faire, les deux groupes de pays, les armateurs d’un côté et les chargeurs de l’autre, devraient
325 Lire, Nguenè Nteppè (J), Les pays africains face à l’évolution du droit international des transports des marchandises par mer, revue congolaise des transports et affaires maritimes, n°4 janv-juin 2006, pp. 67 à 83.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
108
ord et peut-être acquérir des armements pour
ouvoir bénéficier des avantages que procure le statut d’armateur car toute véritable politique
de transport ne peut se faire sans armement326 .
certainement envisager des discussions franches sans rechercher la satisfaction des intérêts
immédiats. D’un autre côté, l’influence que les pays dits d’armateurs possède lors des
négociations ou tout simplement sur la scène internationale doit inciter les pays du Sud en
majorité chargeurs, à se regrouper pour adopter un point de vue identique. Ce qui les conduira
certainement à faire un contrepoids au pays du N
p
326 Sur la question des armements, lire le Pr Ndendé, Les armements d’Etats et leur participation au transport maritime, thèse, Brest, 1990.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
109
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2. Protocole du 21 décembre 1968, portant modification de la convention de Bruxelles du
25 août 1924 pour l’unification de certaines règles en matière de connaissement.
3. Protocole du 23 février 1979 modifiant la convention de Bruxelles de 1924 pour
l’unification de certaines règles en matière de connaissement telle que modifiée par le
protocole de 1968.
4. Convention des Nations Unies sur le transport de marchandises par mer du 31 mars
1978, Règles de Hambourg.
5. Convention des Nations Unies sur le contrat de transport international de
marchandises effectué entièrement ou partiellement par mer, signée le 23 septembre 2009.
6. Code communautaire de la marine Marchandise CEMAC, 2001.
7. Loi n°75-14 du 8 décembre 1975 rendant obligatoire l’assurance des marchandises ou
facultés à l’importation.
8. Décret n°76-334 du 6 août 1976 portant application de la loi n°75-14 du 8 décembre
1975.
9. Acte Uniforme relatif aux contrats de transport de marchandises par route du 22 mars
2003.
10. Recueil des principales conventions internationales et communautaires applicables aux
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CA Littoral, chambre civile et commerciale, arrêt n°029/C du 20 février 2009, GRIMALDI
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Mediterrean Shipping Company REP/MSC SA c/ Dame AMBASSA Victorine.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
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FONDATION AD-LUCEM c/ CAMEROON SHIPPING LINES SA.
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CA Littoral, chambre civile et commerciale, arrêt n°28/c du 21 novembre 2003
DICTIONNAIRE
GUILLIEN (R), VINCENT (J), Lexique des termes juridiques, 13e édition, Dalloz 2001
.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
116
ANNEXES
Annexe 1 : Loi n°75/14 du 8 décembre 1975 portant assurance obligatoire des
marchandises ou facultés à l’importation.
Annexe 2 : Décret n°76-334 du 6 août 1976 portant application de la loi n° 75/14 du 8
décembre 1975 rendant obligatoire l’assurance des marchandises ou facultés à
l’importation.
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
117
TABLE DES MATIERES
DEDICACE......................................................................................................................... I REMERCIEMENTS ........................................................................................................... II LISTE DES ABREVIATIONS........................................................................................... III SOMMAIRE ....................................................................................................................... IV
INTRODUCTION GENERALE ....................................................................................1
PREMIERE PARTIE : LES MECANISMES ISSUS DES CONVENTIONS INTERNATIONALES……………….....................................7
CHAPITRE 1 : L’APPLICATION PAR LES PARTIES CONTRACTANTES DES REGLES CONVENTIONNELLES........................................................................9
SECTION 1 : LA PREVENTION DES DOMMAGES ..............................................9
Paragraphe 1 : les mesures unilatérales de protection physique des marchandises..........10
A- L’EMBALLAGE ET LE MARQUAGE DE LA MARCHANDISE................10
1) Les procédés d’emballage des marchandises .........................................10
2) Le marquage des marchandises...............................................................11
B- LE CONDITIONNEMENT DE LA MARCHANDISE ....................................12 1) La conteneurisation de la marchandise.................................................... 13
2) La palettisation........................................................................................15
Paragraphe 2 : Les obligations contractuelles relatives à la protection des marchandises............................................................................................16
A- LES OBLIGATIONS DU CHARGEUR ET DES INTERMEDIAIRES DE TRANSPORT.................................................................................................16
1) Les obligations du chargeur ...................................................................17
2) Les obligations des intermédiaires .........................................................19
B- LES OBLIGATIONS DU TRANSPORTEUR..................................................21 1) Les obligations du transporteur relatives au navire ................................21
2) Les obligations relatives à la marchandise ..............................................22
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
118
SECTION II : LA REPARATION DES DOMMAGES................................................24
Paragraphe 1 : La responsabilité du transporteur .............................................................25
A- LES CONDITIONS DE LA RESPONSABILITE.............................................25
1) La variété des dommages ........................................................................26
2) Le système de responsabilité du transporteur .........................................27
B- LA REPARATION DUE PAR LE TRANSPORTEUR ...................................28
1) Le plafonnement des réparations............................................................29
2) Le déplafonnement dans des cas particuliers .........................................30 Paragraphe 2 : La responsabilité du chargeur et des intermédiaires de transport ...........32
A- LA RESPONSABILITE DU CHARGEUR.......................................................32
1) La faute du chargeur................................................................................32
2) La sanction de la faute du chargeur.........................................................33
B- LA RESPONSABILITE DES INTERMEDIAIRES DE TRANSPORT...........34
1) La responsabilité de l’intermédiaire agissant selon les ordres du chargeur..................................................................................................34
2) La responsabilité de l’intermédiaire agissant en son nom propre...........35
CHAPITRE 2 : LES INSUFFISANCES DES REGLES CONVENTIONNELLES.............................................................37
SECTION 1 : LA PORTEE LIMITEE DE LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR.................................................................................37 Paragraphe 1 : Les difficultés de mise en œuvre de la responsabilité du transporteur, facteur d’affaiblissement de la protection .......................38
A- L’ATTENUATION DE L’OBLIGATION DE RESULTAT DU TRANSPORTEUR ..............................................................................................38
1) La pluralité de cas exceptés....................................................................39
2) Les conséquences néfastes d’une pluralité de cas exceptés ..................41
B- DES DIFFICULTES AU NIVEAU DE LA CONSERVATION ET DE L’EXERCICE DU RECOURS..........................................................................42
1) Diligence imposée au réceptionnaire des marchandises .........................42
2) Le délai pour agir ...................................................................................43
Paragraphe 2 : Les limites du système de réparation.........................................................44
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
119
A- LES PLAFONDS TRES MODERES DES INDEMNISATIONS. ..................45
1) Les différents taux d’indemnité et le cas de la déclaration de valeur.................................................................................................45
2) Les difficultés techniques posées par les avaries communes ..................46
B- LES DIFFICULTES POSEES LORS DE LA LIQUIDATION DE L’INDEMNITE..................................................................................................47
1) L’incertitude quant aux bases de calcul de l’indemnité ..........................47
2) Les problèmes posés par la conteneurisation des marchandises .............48
SECTION 2 : LE CADRE JURIDIQUE DEFAVORABLE A UNE PROTECTION EFFICACE DES MARCHANDISES ......................49 Paragraphe 1 : Les ambiguïtés et les lacunes du droit positif...........................................50
A- LA DIVERSITE DE REGLES REGISSANT LA RESPONSABILITE DU TRANSPORTEUR MARITIME, UN FREIN A L’ORGANISATION DE LA PROTECTION DES MARCHANDISES ..........................................50
1) La coexistence de plusieurs règles régissant la responsabilité du transporteur ..................................................................................................50
2) La diversité de taux de réparation.......................................................... ...52
B- LES LACUNES DE LA REGLEMENTATION EN MATIERE DE PROTECTION DES MARCHANDISES......................................................... .53
1) L’insuffisance de la réglementation relative à la protection physique......53 2) L’inadaptation à l’évolution des techniques de transport ...................... .54 Paragraphe 2 : Les Règles de Rotterdam, une avancée certaine mais modeste................. .55 A- UNE PROTECTION JURIDIQUE RENFORCEE ........................................... .56
1) La modernisation du cadre d’exécution du contrat de transport..............56
2) Les précisions sur la responsabilité du transporteur ............................... .57
B- UNE CONVENTION CONSERVATRICE ......................................................58
1) Le maintien d’une liste de cas exceptés..................................................58 2) Les effets néfastes d’une trop grande liberté contractuelle....................59
CONCLUSION PREMIERE PARTIE ...........................................................................60
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
120
DEUXIEME PARTIE : LES MECANISMES DE PROTECTION RESULTANT DE LA CONCLUSION D’UN CONTRAT D’ASSURANCE .......................................61 CHAPITRE 1 : L’ASSURANCE DES MARCHANDISES, UN SUPPORT INDISPENSABLE...................................................................63
SECTION 1 : LES CARACTERISTIQUES PARTICULIERES DE L’ASSURANCE SUR FACULTES...................................................................................63 Paragraphe 1 : L’assurance des marchandises, l’expression d’une protection accrue.....64
A- LES ASSURANCES SUR FACULTES, INSTRUMENT D’UNE SECURITE OPTIMALE POUR LES MARCHANDISES ................................................. 64
1) Une sécurité contre les risques et les réparations limitées....................... 64
2) Une sécurité imposée par la loi................................................................ 65
B- L’ASSURANCE SUR FACULTES, UNE NECESSITE SOCIALE ET ECONOMIQUE .......................................................................................... .66
1) L’aspect économique de l’assurance maritime facultés............................66
2) Une nécessité sociale.................................................................................67 Paragraphe 2 : Les assurances sur facultés, un outil de gestion...................................... .68
A- LA GESTION DES RISQUES ET DOMMAGES............................................68
1) La prévention des risques..........................................................................69 2) Une indemnisation certaine.......................................................................69
B- LA GESTION DES RECOURS.........................................................................70
1) L’exercice de l’action................................................................................71
2) Le règlement des avaries communes.........................................................73
SECTION 2 : LE LARGE CHAMP D’APPLICATION DE LA COUVERTURE DE L’ASSURANCE ...............................................................................75 Paragraphe 1 : Les différentes garanties............................................................................75 A- LES PRINCIPAUX MODES DE GARANTIES...............................................75
1) Les conditions de l’assurance...................................................................76
2) La garantie ‘’tous risques’’ et la garantie ‘’FAP sauf…’’.......................76
3) Dispositions communes aux deux garanties............................................77
B- LA GARANTIE DES RISQUES EXCEPTIONNELS......................................78
1) Le domaine de la garantie.......................................................................78
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
121
2) La durée de la garantie............................................................................79 Paragraphe 2 : Des polices d’assurances adaptées à chaque type de transport des Marchandises .............................................................................................79
A- LA POLICE D’ABONNEMENT......................................................................80
1) L’intérêt de la police d’abonnement .......................................................80
2) Les types de polices d’abonnement ........................................................81
B- LA POLICE PARTICULIERE ..........................................................................82
CHAPITRE II : L’AMELIORATION DE LA PROTECTION ISSUE DU CONTRAT D’ASSURANCE ..............................83
SECTION 1 : L’EXTENSION DU CHAMP D’APPLICATION DE L’ASSURANCE FACULTES................................................................................................83 Paragraphe 1 : La couverture des risques exclus...............................................................84 A- LA COUVERTURE DES DOMMAGES COLLATERAUX ..........................84
1) La couverture du retard..........................................................................84 2) La couverture des dommages commerciaux...........................................85
B- LA COUVERTURE DES RISQUES INDIRECTS ET INGOUVERNABLES .......................................................................................86
1) Le risque couvert en assurance................................................................ 86
2) La couverture des risques indirects et ingouvernables ...........................87 3) Les provisions pour risques......................................................................89
Paragraphe 2 : La couverture des marchandises exclues ..................................................90 A- LES ANIMAUX VIVANTS ET LES MARCHANDISES CHARGEES EN PONTEE............................................................................................................90
1) La couverture des animaux vivants........................................................91 2) Les marchandises chargées en pontée.....................................................92
B- LES MARCHANDISES EN VRAC..................................................................93
La protection des marchandises en droit des transports maritimes
122
SECTION 2 : UN ENCADREMENT PLUS STRICTE DE L’ASSURANCE SUR FACULTES.....................................................................................94 Paragraphe 1 : La vulgarisation contrôlée de l’assurance sur facultés.............................94 A- LA REDYNAMISATION DU SECTEUR DE L’ASSURANCE SUR FACULTES........................................................................................................95
1) Les problèmes du secteur de l’assurance sur facultés .............................95
2) L’apport positif de nouvelles méthodes .................................................96 B- LA SENSIBILISATION DES OPERATEURS DU COMMERCE EXTERIEUR .....................................................................................................97
1) Identification des opérateurs ..................................................................97 2) Les supports de sensibilisation ................................................................98
Paragraphe 2 : Le renforcement encadré de l’obligation d’assurer les marchandises .....99
A- LE RENFORCEMENT DES CONTROLES ....................................................99
1) L’organisation des contrôles tels que pratiqués .....................................100 2) La modernisation des méthodes de contrôle ...........................................101
B- LE RENFORCEMENT DES SANCTIONS......................................................101
1) Les sanctions en vigueur ........................................................................102
2) Les nouvelles sanctions ...........................................................................103 CONCLUSION DEUXIEME PARTIE...........................................................................105
CONCLUSION GENERALE ..........................................................................................106
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................109 ANNEXES..........................................................................................................................115