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LInformation psychiatrique 2010 ; 86 : 405-11 VARIA Une clinique de la psychose ordinaire Juan Pablo Lucchelli 1 , Fabian Fajnwaks 2 RÉSUMÉ Certains patients présentent un fonctionnement psychotique sans pour autant présenter des symptômes typiques (hallucinations, délire). Il ne sagit pas de tableaux cliniques symptomatiques, mais bien plutôt dune clinique très discrète, avec la présence de phénomènes à minima. À partir de la psychanalyse, et à laide de la psychiatrie phénoménologique, nous analysons dans ce travail cinq faisceaux symptomatiques qui souvent passent inaperçus car ils sont négligés par le clinicien qui ne sy prend pas à lavance et qui réduit lexamen aux seuls symptômes psychotiques majeurs et/ou au comportement. Trois vignettes cliniques y seront traitées. Mots clés : psychose, état limite, cas clinique, symptomatologie psychotique, phénoménologie ABSTRACT A common psychosis clinic. Some patients show signs of psychotic behaviour without presenting any typical symptoms (i.e. hallucinations, delusions). This does not concern symptomatic clinical panels, but rather only very slight clinical signs, with the presence of a minimum amount of the phenomena. Based on psychoanalysis, and with the aid of phenomenological psychiatry, in this paper we assess five different symptomatic facets which often go unnoticed. This is because they are neglected by the clinician who does not take them into consideration in order to advance and reduce the examination to the major psychotic symptoms alone and/or behaviour. Three clinical cases are presented. Key words: psychosis, borderline, clinical case, psychotic symptoms, phenomenology RESUMEN Una clínica de la psicosis ordinaria. Algunos pacientes presentan un funcionamiento psicótico sin por ello presentar síntomas típicos (alucinaciones, delirio). No se trata de cuadros clínicos sintomáticos sino más bien de una clínica muy discreta, con presencia de fenómenos al mínimo. Partiendo del psicoanálisis, y mediante la psiquiatría fenomenológica, analizamos en este trabajo cinco haces sintomáticas que a menudo han pasado inadvertidas pues las descuida el clínico que no se prepara con antelación y reduce el examen sólo a los síntomas psicóticos principales y/o al comportamiento. Se estudiarán tres viñetas clínicas. Palabras claves : psicosis, situación límite, caso clínico, sintomatología psicótica, fenomenología L INFORMATION PSYCHIATRIQUEVOL. 86, N° 5- MAI 2010 405 doi: 10.1684/ipe.2010.0636 1 Membre du Laboratoire de psychopathologie et clinique psychanalytique, Université de Rennes-II, E.A. 4050, et de lAssociation mondiale de psychanalyse, 98, rue de Vaugirard, 75006 Paris, France <[email protected]> 2 Maître de conférences au Département de psychanalyse de lUniversité de Paris-VIII, membre de lAssociation mondiale de psychanalyse, Laboratoire de psychopathologie et clinique Psychanalytique, Université de Rennes-II, E.A. 4050, 33, rue du Faubourg-du-Temple, 75010 Paris, France <[email protected]> Tirés à part : J.P. Lucchelli, F. Fajnwaks L INFORMATION PSYCHIATRIQUEVOL. 86, N° 5- MAI 2010 405

Psychose Ordinaire

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La psychose ordinaire

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  • LInformation psychiatrique 2010 ; 86 : 405-11

    VARIA

    Une clinique de la psychose ordinaire

    Juan Pablo Lucchelli1, Fabian Fajnwaks2

    RSUM

    Certains patients prsentent un fonctionnement psychotique sans pour autant prsenter des symptmes typiques(hallucinations, dlire). Il ne sagit pas de tableaux cliniques symptomatiques, mais bien plutt dune clinique trsdiscrte, avec la prsence de phnomnes minima. partir de la psychanalyse, et laide de la psychiatriephnomnologique, nous analysons dans ce travail cinq faisceaux symptomatiques qui souvent passent inaperus car ilssont ngligs par le clinicien qui ne sy prend pas lavance et qui rduit lexamen aux seuls symptmes psychotiquesmajeurs et/ou au comportement. Trois vignettes cliniques y seront traites.

    Mots cls : psychose, tat limite, cas clinique, symptomatologie psychotique, phnomnologie

    ABSTRACT

    A common psychosis clinic. Some patients show signs of psychotic behaviour without presenting any typicalsymptoms (i.e. hallucinations, delusions). This does not concern symptomatic clinical panels, but rather only veryslight clinical signs, with the presence of a minimum amount of the phenomena. Based on psychoanalysis, and withthe aid of phenomenological psychiatry, in this paper we assess five different symptomatic facets which often gounnoticed. This is because they are neglected by the clinician who does not take them into consideration in order toadvance and reduce the examination to the major psychotic symptoms alone and/or behaviour. Three clinical casesare presented.

    Key words: psychosis, borderline, clinical case, psychotic symptoms, phenomenology

    RESUMEN

    Una clnica de la psicosis ordinaria. Algunos pacientes presentan un funcionamiento psictico sin por ello presentarsntomas tpicos (alucinaciones, delirio). No se trata de cuadros clnicos sintomticos sino ms bien de una clnicamuy discreta, con presencia de fenmenos al mnimo. Partiendo del psicoanlisis, y mediante la psiquiatrafenomenolgica, analizamos en este trabajo cinco haces sintomticas que a menudo han pasado inadvertidas pues lasdescuida el clnico que no se prepara con antelacin y reduce el examen slo a los sntomas psicticos principales y/oal comportamiento. Se estudiarn tres vietas clnicas.

    Palabras claves : psicosis, situacin lmite, caso clnico, sintomatologa psictica, fenomenologa

    LINFORMATION PSYCHIATRIQUEVOL. 86, N 5 - MAI 2010 405

    doi:10

    .168

    4/ipe.20

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    1 Membre du Laboratoire de psychopathologie et clinique psychanalytique, Universit de Rennes-II, E.A. 4050, et de lAssociation mondialede psychanalyse, 98, rue de Vaugirard, 75006 Paris, France

    2 Matre de confrences au Dpartement de psychanalyse de lUniversit de Paris-VIII, membre de lAssociation mondiale de psychanalyse,Laboratoire de psychopathologie et clinique Psychanalytique, Universit de Rennes-II, E.A. 4050, 33, rue du Faubourg-du-Temple, 75010 Paris, France

    Tirs part : J.P. Lucchelli, F. Fajnwaks

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  • Introduction

    Depuis le dbut du XXe sicle, on distingue dans lapsychopathologie le groupe des nvroses de celui despsychoses. partir des annes 1950, sous linfluencede la psychanalyse anglo-saxonne, des catgories intermdiaires ont vu le jour, tout particulirementsous la forme de la personnalit borderline. Mme sicette perspective ne manque pas de pertinence eu garddu polymorphisme clinique auquel les praticiens taientconfronts, nous ne pouvons pas nous empcher deconstater quil existe un flou conceptuel et clinique qui agrandi au four et mesure que des rponses adaptes ces patients se dveloppaient. Dans ce sens, lAgenda derecherche de la prochaine dition du DSM-V [1], qui runitles travaux existants pour la prparation de cette nouvelledition du DSM, accentue de manire rcurrente la nces-sit davancer vers une clinique dimensionnelle etdabandonner rsolument le modle catgorial prsentdans les quatre premires ditions du manuel.

    Nous nous intressons particulirement ces catgories intermdiaires , entre nvrose et psychose, en faisantlhypothse que, chez beaucoup de patients, il sagit desformes attnues de psychose appartenant ainsi aux troubles du spectre psychotique ou encore ce quelon appelle depuis quelques annes des psychosesordinaires [2]. Bien que ces structures ne prsentent pasde signes classiques de la psychose (des dlires dans sesdiffrentes formes, des hallucinations de tout type) ellesnous permettent, grce la prsence de certains phno-mnes discrets qui rendent compte dun dfaut symbolique,dorienter le traitement dune manire particulire. Ce sontsouvent des sujets qui consultent pour des raisons compl-tement diffrentes aux phnomnes dcrits ci-dessous,mais pour qui la prsence de ces phnomnes permetdavancer le diagnostic de psychose.

    Il faut situer ces psychoses en perspective avec dautrestermes proches dj existants dans la psychopathologiecomme ceux de psychose blanche [10], de psychosefroide [11], des personnalits comme si [9], et de prpsychose , pour aborder dans la discussion la diff-rence davec ces termes du point de vue nosographique etthrapeutique. En plus de lexprience clinique de lapsychanalyse, nous allons nous rfrer aux laborationscliniques rcentes de la psychiatrie phnomnologique,notamment partir de lentretien semi structur EASE [3].

    Des distinctions lintrieur mmedes psychoses

    Notre proposition consiste isoler et regrouper en cinqfaisceaux symptomatiques, ou spectres , des formescliniques qui se prsentent sous la forme suivante : desphnomnes corporels, des troubles du langage ou de

    lnonciation, des phnomnes imaginaires avec une forteprgnance du transitivisme , les questionnements surlexistence de ltre du sujet (plus prcisment, de lexistenceet la sexualit) et des troubles de la conscience de soi

    Les phnomnes corporels

    Depuis les diffrentes formes dautomutilation, allant delmasculation au fait apparemment banal de senleverdes cils , jusqu la fatigue intense ou la sensationde vide [4], nous savons que le corps est trs souvent lelieu o le sujet traduit tout un ensemble de phnomnesdont linscription dans le registre symbolique poseproblme. Ces phnomnes, souvent bas bruit, isols etdiscrets, ne peuvent entrer en commerce symbolique avecun rseau de reprsentations. Ils ne sont pas labors etreviennent souvent dans le discours du patient sous lamme forme comme une plainte ou une ritournelle qui necde pas et ne sassocie pas dautres reprsentations. Celapeut prendre un ton hypocondriaque, en prsentant uneaffection du corps ou dorgane qui ne sinscrit pasforcment dans un dlire, ou dans le spectre des dysmor-phophobies, organe ou partie du corps, qui semble toujoursse dtacher et se manifester par lui-mme. Ainsi, unhomme avoisinant la cinquantaine, prsente un raidisse-ment des muscles de la mchoire et un engourdissementdu bras gauche depuis vingt ans lorsquil vient consulterun psychiatre. Aprs stre soumis maints examensmdicaux et traitements pharmacologiques, il persiste etnonce une ide quasi dlirante selon laquelle aprs uneintervention chirurgicale subie il y a vingt ans, il y auraitdes restes de liquide anesthsique qui seraient rests dans lecorps et encore agissants [4]. Dautres expriencescorporelles rpertories dans lchelle EASE [3], chellequi essaye de cerner travers des diffrents items cliniquestoute une srie de phnomnes parfois imperceptibles, sonttrs frquentes. Ainsi des changements morphologiques(des sensations paroxystiques, ou de perception de raccou-rcissement ou de constriction de parties isoles du corps),des phnomnes du miroir , des phnomnes de dpersonnalisation somatique (le corps ou certainesde ses parties sont perus tout coup comme bizarres,trangers, sans vie, spars ou disloqus), des perceptionsde dsintgration corporelle (limpression de dsintgra-tion ou de dissolution corporelle, comme si le corps sedisloquait, tombait en morceaux ou disparaissait), desexpriences cnesthsiques (des sensations corporellesinhabituelles dengourdissement comme dans lexempleci-dessus, ou de raideur, des sensations douloureuses inha-bituelles dans une zone prcise, des sensations corporellesmobiles, vagabondant travers le corps). Il y a lieu de sedemander ici en quoi ces expriences ou phnomnes decorps se diffrentient de celles rpertories dans les schizo-phrnies, car de manire vidente, elles en sont trsproches. Quand ces phnomnes de corps sont prsents

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  • de manire constante et au premier plan dans le discoursdu patient, ils constituent souvent le seul phnomnebizarre reprable. Ils sont vraiment isols, et aucuneautre manifestation de discordance nest prsente commedans les schizophrnies. Mais de faon rcurrente ces ph-nomnes se prsentent de manire discrte et en sourdine :les patients ne les voquent parfois quau bout de quelquetemps dans le travail thrapeutique, parfois plusieursannes aprs le dbut dun suivi, et trs souvent demanire passagre et alatoire. Loin de constituer lecentre de lattention du malade, comme dans lhypocon-drie, ces phnomnes de corps occupent une placemarginale dans leur discours mais se dtachent dans leurcaractre bizarre et tranger. Des demandes dinterventionchirurgicale adresses la mdecine qui vont de la simplechirurgie esthtique du nez ou des diffrentes parties duvisage, jusquaux demandes dablation dun membre, enpassant par des chirurgies concernant les organes gnitauxpeuvent relever parfois de ces troubles corporels. Ladifficult majeure les valuer et les diagnostiquerconcerne labsence dide dlirante, autour de cet organeou partie du corps : cest souvent la demande elle-mmequi apparat incongrue ou bizarre, do limportance delvaluer et de ne pas prcipiter lacte chirurgical. Loffrepar une certaine mdecine daujourdhui, oriente par leprofit, surtout ltranger et dans des pays qui vouentau corps une importance extrme, pourrait laisser penserque ces demandes ont augment comme une consquencedirecte de ce changement social et banaliser en fait cephnomne. Il nous semble que, souvent, il faut pluttsituer ces demandes dans le cadre dune structure psycho-pathologique, parfois difficile dterminer, et anticiperainsi les consquences qui auront pour le sujet demandantune intervention irrversible.

    Les troubles du langage ou de lnonciation

    Il faudrait dabord dfinir ce que nous entendons par troubles du langage : les troubles du langage ne selimiteraient peut-tre pas aux fautes syntaxiques grossiresni aux nologismes. Ainsi les troubles du langage quinous intressent ici ne se rduisent pas aux bizarreries djrepres par la psychiatrie classique du XIXe sicle :au-del des psittacismes, strotypes verbaux, onomatopes,cest plutt les dformations syntaxiques, les condensa-tions originales des mots, les effets de sens singuliers, oules parataxes, formes linguistiques que la posie conte-mporaine, sous la plume dun Paul Celan, dunE.E. Cummings, les crits de Joyce ou la posie surralisteont su faire entendre. Nous pouvons aussi ajouter limpor-tance souvent passe inaperue du paralogisme , soitlutilisation dun terme existant dans la langue, mais quile patient donne un sens particulier, priv, souvent opaquepour le sujet lui-mme. Nous pouvons ajouter galementlutilisation de certaines mtaphores qui tmoignent de

    lexistence dun registre prrflexif : le sujet ne semblepas avoir besoin de sexpliquer, surtout pour ne pas sediviser (ainsi, un patient parlait du mot tacite mot dontle sens lui-mme lui semblait aussi tacite il parlait desa partenaire). Ou encore des propos qui restent allusifs,ferms au sujet qui les nonce (proche de ce que les phno-mnologues appellent lineffable ), par exemple, je medbats avec quelque chose, je ne sais pas avec quoi. Aumoment de parler, je ne suis plus sr de rien , je ne saispas ce qui marrive, je me force dire quelque chose , ceque je dis nest pas complet, alors pourquoi le dire [4].Dans un des cas que nous dveloppons ci-dessous (le casde monsieur M.), le mot sexy associ un crit quil doitrendre son chef, et qui laccueille avec ce qualificatif,produit chez notre patient une vritable gne trs particu-lire, qui dpasse par exemple, tout rapport la pudeur.

    Prgnance des phnomnes imaginaires(notamment lexistence du transitivisme)

    Nous faisons lhypothse que beaucoupde borderlines dcrits dans la littrature prsentent une clinique qui selimite un rapport lautre de type transitif . Il peutavoir ainsi une sorte de confusion avec autrui [3] oubien le sujet ressent un manque de limites entre lui etlautre, une influence de lautre quil a du mal dfinir,une permabilit trop prononce, il se vit comme tant transparent ou il se sent envahi. Une patiente dira jenose plus me regarder dans la glace parce que je ressemblede plus en plus ma mre, ses gestes, ses penses, samanire de voir les choses cest trs dstabilisant, jailimpression dtre elle je nexiste plus, je suis mamre il faut que je me retire de cette image (nousavons aussi, dans cette dernire phrase, une tournure parti-culire, inadquate , quivalente peut-tre un troubledu langage). Il existe trs frquemment des phnomnessimilaires au signe du miroir dcrit par Ably, que cesoit dans sa phase autoscopique, ou seulement dans laphase de rejet de lautoscopie, tel que le psychiatre lesitue dans la mlancolie. Dune manire gnrale, lonconstate lexistence dun transitivisme , des degrsdiffrents, qui traduit la primaut du registre imaginaire.Une bonne partie de la clinique des personnalits comme si dcrites magistralement par Helene Deutschet restes sans suites dans la psychopathologie se situeaussi ce niveau. Le comme si dsigne souvent desidentifications de type imaginaire mises en place chez dessujets qui prsentent un Moi fragile, identifications quifonctionnent trs souvent comme une sorte de prothsemoque. Ces identifications se construisent en empruntantdes traits dun personnage de lentourage du sujet qui peutfonctionner parfois comme un double . dfaut dtreenracines dans un Idal du moi qui leur donne consis-tance, ces identifications sont assez fragiles et dpendentalors de la prsence relle de la personne sur laquelle

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  • elles se calquent. Ainsi elles peuvent venir se dfairefacilement lorsque le sujet perd dans la ralit cettepersonne support de lidentification en question.

    Les questionnements radicauxsur le sens de lexistence

    Ces questionnements sont souvent caractriss par unecertaine perplexit concernant le sens de lexistence quipeut apparatre un moment dans la vie dun sujet, etconsistent en une sorte de rorientation existentielle ousexuelle qui simpose comme une vidence. Ils traduisentun manque de signification solide de lexistence et/ou de lasexualit. Nous retrouvons des tats mlancoliformes , limpression dtre un boulet pour lautre , dtre unincapable . Ou un sentiment de honte quant sa propreexistence. Mais aussi des phnomnes temporels, de gel du temps . noter galement des troublessexuels qui apparaissent parfois au premier plan :limpuissance sexuelle, lide dtre homosexuel. Celapeut aussi se prsenter comme une rorientation existen-tielle. Les thmes souvent rencontrs peuvent tre des phnomnes surnaturels, des religions (notammentdinspiration orientale), une exprience mystique, des th-mes transcendantaux, la mditation, la lecture de symboles,lintrt pour les rituels anciens, la rincarnation, la vieaprs la mort, le bien et le mal, la paix et la communicationuniverselles, des questions concernant le sens de lexis-tence, le sort de lhumanit, le salut, les sciences parallles,les ides relatives la sant ou la nutrition [3],mais aussi la croyance des mthodes de self-help, quiseront suivies au pied de la lettre, la demande tenace defaire une thrapie comportementale pour se fixer deslimites, ou une psychanalyse afin de mieux comprendrele subconscient , lintrt par lalter mondialisme,le rchauffement climatique, lcologie, etc. Ces thmesoccupent pleinement la vie dun sujet et il ne les met pasen question. Le sujet y adhre de manire massive.

    Les troubles de la conscience de soi

    Cet axe reprend les troubles de la conscience de soi prsents dans lchelle EASE [3] mais les aborde dunemanire plus large, non seulement parce que le terme conscience de soi risque de limiter les phnomnes la perception des questionnements quun sujet peut seposer sur lui-mme, mais aussi et surtout parce que leterme de soi est lun des plus problmatiques etambigus dans la psychopathologie actuelle [5]. Cesphnomnes concernent des questionnements autour delexistence et lidentit du sujet qui ne se rfrent pas des identifications fortement consolides, mais unquestionnement personnel autour de lidentit sexuelle,du rapport lautre sexe et la sexualit. Tout un spectrede phnomnes concernant lexistence, qui vont dessimples questions autour du sens de lexistence jusquau

    seuil des francs phnomnes de dpersonnalisation, enpassant par des sentiments amoindris de soi, de vide,dangoisse ontologique, de prsence diminue, desphnomnes de dralisation et de dissociation [6], de perte de lvidence naturelle [7], des phnomnesde perte du sens commun, de perplexit, peuvent se situerici, avec la caractristique fondamentale quils seprsentent trs souvent de manire discrte, ponctuelle,isole, ce qui les diffrencie des vritables troublesreprables dans la schizophrnie.

    En ce qui concerne les troubles de lidentit nous retrou-vons des expriences corporelles diverses, des perceptionsde changements morphologiques discrets ainsi que desphnomnes de perplexit face lactivit sexuelle ou face la propre identit sexuelle. Ces phnomnes se prsententen gnral de manire intermittente et ponctuelle, nedonnant pas lieu des interprtations de la part du sujet,ou un vritable dlire, bien que souvent lon puisse retrou-ver des ides qui, de par leur caractre bizarre, ressemblent des ides dlirantes. Les hallucinations sont souventabsentes. Les phnomnes sarrtent trs souvent au seuilde lexprience de dpersonnalisation dissociative, autrediffrence avec les troubles prsents dans la schizophrnie :ce qui prvaut ce sont des sentiments dtranget et deperplexit face des expriences qui risquent de briser lesdfenses psychotiques mises en place pour faire consister unmoi fragile expos ainsi une possible dsintgration.

    Trois vignettes cliniques

    Monsieur R.

    Monsieur R., un homme de 40 ans, est de retour enFrance depuis 1 an, aprs avoir pass 15 ans ltrangerdans des missions humanitaires. Depuis 1 an, il sera pendanttout un temps au RMI et bnficiera, mme maintenant, dela CMU. Il a trouv un emploi de manutentionnaire quiconsiste en ceci : il conduit un camion et un autre employdessine des lignes sur la chausse le fameux marquageau sol . Nous travaillons en binme, nous dira-t-il,comme larme. Aprs une dernire rupture davec unefemme quil avait connue en Afrique, il dcida de rentrer enFrance o il rencontra Cline, quil avait connue 10 ansauparavant. Cest ainsi quil commence frquenter cettefemme, qui se trouve avoir le mme ge que lui (elle estne 3 jours avant lui, le mme mois, la mme anne). Nous nous ressemblons beaucoup, dit-il, on est presqueidentiques : mme got pour la musique, mme gotslittraires, de mme pour la nourriture et, mme physique-ment il mest arriv de regarder une photo delle et depenser que ctait moi on est comme frre et sur ,dit-il avec une exaltation vidente et comme si cette ressemblance tait vidente pour tout le monde. Dsle premier instant que je lai vue, jai compris quon tait faitlun pour lautre. Ils se sont connus dans un stage dans

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  • lhumanitaire , car elle aussi, elle est dans lhumanitaire.Pendant tout un temps, cela aurait t rciproque. Notrerelation coule de source , aurait-elle dit.

    Comme on pouvait sy attendre, lidylle avec Cline sepoursuit surtout au lit : cest dans les rapports sexuels queje mapproche le plus delle Au lit nous devenons un,cest une osmose . Cette sexualit qui voque le mythedes tres circulaires dAristophane dans Le Banquet dePlaton, cest ce qui le fait le plus dsirer et qui lui donnela certitude dune totale complmentarit entre eux.Losmose, nous lavons dit, stend tout : Nous savonsce que lautre pense et vice-versa elle lit en moi ce que jepense et moi aussi entre elle et moi, il y a du tacite. Le patient se trouve dans limpossibilit de mieux expli-quer ce quil entend par tacite , et il lui est notammentimpossible de remettre en question une telle certitude .Il nous rpondra avec ironie que le mot tacite luisemble tout fait tacite . Par ailleurs, il a t inutiledaller chercher plus loin : il ny a rien qui nous confirmechez ce sujet lexistence dun automatisme mental avr.On lit dans lautre travers ses gestes, son comportement cette intuition restant essentiellement thologique , cequi est dj beaucoup dire quant la prgnance delimaginaire. Il faut savoir que ce type de relation nestpas nouveau pour lui : Cest toujours pareil je ne faisque cela avec les femmes je suis un camlon.

    On apprend aussi qu 28 ans il se dcide pour lhumani-taire. Lorsquon lui demande pourquoi lhumanitaire ? ,il rpond parce que pour moi ctait une vidence :je passais mon temps donner de largent aux gens dansle mtro, je me suis dit autant de le faire srieusement .

    Ds le dbut de nos entretiens, ce patient nous prvientquavec sa mre cest pareil quavec les femmes elle lemaltraite, elle linsulte, elle sisole, elle boit . Les parentsont divorc lorsquil avait 10 ans. Le pre, quant lui, refaitsa vie avec une femme et, tout de suite, lenfant commence ne plus sentendre avec la belle-mre : Cest mon pre quidit cela, car moi je ne me souviens de rien mon pre maamen chez une psychologue qui est reste sans me parlerpendant une heure, en me regardant je suis parti presqueen courant. Cette seule sance avec la psychologuela beaucoup marqu, nous assure-t-il. Cette question de lamnsie (entre guillemets) concernant le conflit avecla belle-mre, ainsi que le regard de la psychologue noussemblent une des cls de ce cas. Les choses se sont pluttmal termines avec Cline : elle laccuse de harclement, luiil crit des longues lettres quil finit par ne pas envoyer ; ilseffondre, cest la fin, je mangoisse, je me perds, je memeurs , dira-t-il.

    Monsieur M.

    Monsieur M. consulte car il dit prsenter des difficultsavec les femmes. lge de 42 ans monsieur M. a soigneu-sement vit tout contact intime avec elles, part un

    incident avec une amie qui lui a laiss des souvenirsamers. Il est lenfant unique dun pre trs docile,presque un compagnon de jeux, et dune mre trsautoritaire . Il soccupe et sest beaucoup occup decette mre, veuve depuis ses 17 ans, en lui rendant visitetous les quinze jours. Monsieur M. a rapport diffrentsphnomnes concernant son corps, notamment face aumiroir (il a rapport sa difficult se regarder dans laglace) et il dit har son corps et sa tte : ils lencombrentcomme un plus liminer. Un autre phnomne imaginairediscret, comme une gne profonde en prsence du regardsoutenu dautrui en face de lui, est prsent. Confront sonimage il sinjurie lui-mme. Il dit tre un boulet pour lasocit , mme sil occupe un poste important dans uneentreprise, et se dit compltement inutile : son discoursprsente un ton de culpabilit et dautodprciation diffusmais permanents, sans aller jusquaux auto-reproches.Sommes-nous face un discours mlancoliforme ou face des propos clairement mlancoliques ? Si ce tableauvoque la mlancolie, il manque vritablement un discourso le sujet prenne entirement la faute sur lui des actes quilna absolument pas commis, pour assurer cette structure.En revanche, le risque dun passage lacte, quil na pasvoqu, mais qui pourrait survenir au moment du dcs desa mre trs ge, pourrait signer le diagnostic.

    En ce qui concerne la sexualit, il a pu rapporter saperplexit, se retrouvant dans les bras dune trs bonneamie un peu folle , dira-t-il , qui lui faisait desavances et des insinuations depuis longtemps. Elle madshabill, mais je ne comprenais pas ce qui se passait ni cequelle voulait particulirement. Nous nous sommes toutde suite rhabills. Il na pas rapport, par ailleurs, desfantasmes ou dautres types de satisfaction sexuelle. Onpeut prvoir quune ventuelle rencontre avec une femmeserait plutt dstabilisante pour monsieur M., mme si cestparadoxalement cette raison qui lamne consulter. Ainsilorsque son thrapeute a cherch le dissuader despreraller vers de femmes, monsieur M. sest offusqu comme silon avait touch l un point quil fallait prserver.Comme si la raison manifeste qui lamne consulter, lesdifficults avec les femmes, lui permettait par extension dedployer toute une autre problmatique qui autrementnaurait pas pu tre aborde.

    Mlle G.

    Mlle G. prsente ce quelle-mme appelle uneposition sacrificielle . Elle escamote toujours sondsir au profit des autres, plus particulirement lesmembres de sa famille auxquels elle donnait, jusqu ilny a pas longtemps, tout son salaire. Position quelleexplique par le fait quelle ne pense pas avoir ni un corpsni un Moi : elle nexiste quen fonction des autres. Silon regarde de prs, ce propos a peu de chose avoir avecle dvouement hystrique : le bnfice que Mlle G. tire de

    Une clinique de la psychose ordinaire

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  • cette position est plus existentiel que phallique, et si jamaiselle se trouve dbranche de ce circuit, elle est profond-ment perplexe, perdue, sans repres. En dehors dunincident ponctuel avec un ami, Mlle G. na pas eu descontacts intimes avec les hommes. Lors de cet incident,elle avait ressenti une profonde gne au moment de lactesexuel, une vritable angoisse de dsintgration moque.Elle dira aprs avoir le plus grand mal laisser sortirses motions , sa fragilit et ses faiblesses se rendantvidentes au moment o elle pourrait ressentir quelquechose. Je ressens l, dira-t-elle, le risque de medstructurer. Elle tiendra les mmes propos par rapport ses craintes concernant ces entretiens, le fait queceux-ci puissent sattaquer ses dfenses . Il y a unautre propos interrogeant galement son existence : elledira un moment donn, en parlant du fait quelle ne doitdclarer aux impts que largent gagn, quil faut que jereste toujours avec le minimum vital oui, il faut queje reste avec un minimum de vie . Face la voracit delAutre qui il faut quelle donne son argent, Autre quielle sacrifie son existence, il lui reste quand mme un minimum de vie , minimum de vie qui est aussi safaon de nommer le minimum de dsir dont elle dispose.

    Discussion

    Le concept psychanalytique de psychose ordinaire tente de faire valoir lexistence de sujets avec un fonction-nement psychotique sans quils prsentent pour autant desymptmes typiques (hallucinations et dlire). Si nousavons trait demble de la question des spectres oudes faisceaux symptomatiques cest parce quelle noussemble rpondre une ralit clinique de plus en plusprsente dans notre pratique. Elle nous oblige sortirdes catgories nosographiques habituelles ordonnes partir des grands syndromes, des signes et symptmesunivoques. Cette nouvelle clinique dimensionnelle seveut moins attache la prsence de symptmes o prvautune logique du tout ou rien pour faire valoir, en revan-che, une quantification du comportement fonde sur desdegrs. Nous ne pensons pas la psychose ordinaire comme une pathologie intermdiaire entre psychose etnvrose, mais bien plutt comme une diffrentiationclinique lintrieur mme des troubles psychotiques,comme le montrent les vignettes prsentes, dans la mesureo rien ne nous permet dvoquer, notre avis, ni lanvrose ni le refoulement (au sens freudien). Dans lemme temps, certains signes cliniques nous orientent versla psychose sans constituer pour autant des critres pourune schizophrnie (ni au sens du DSM-IV R ni au sensdes critres de Schneider).

    Si nous considrons, par exemple, les personnalitscomme si [8], nous pouvons constater que HeleneDeutsch semble avoir repr avec toute pertinence les

    modes de compensation imaginaire auxquels ont recoursles sujets psychotiques, schizophrnes . Il sagit doncdes identifications trs prcaires. La recherche des typespurs et probablement une extrme rigueur clinique fontdire Helene Deutsch, dans un colloque lAmericanPsychoanalytical Association en 1966, que depuis 1932,cest--dire en trente-trois ans, je nai rencontr dans mavie professionnelle quune seule personne que je puisseconsidrer comme appartenant au type comme si [9].Mais la clinique de la psychose ordinaire laisse apprcierun recours assez frquent des types didentificationinstables, fragiles et fragmentaires sous la forme de cellesrencontres dans les personnalits comme si .

    En ce qui concerne la psychose blanche proposepar Andr Green [10], elle nous parat cliniquement trsproche des psychoses ordinaires en ceci que Greendcrit des phnomnes qui se trouvent en germe dans cetype de psychoses subcliniques , mais loscillation delauteur entre la description dune structure ou des phno-mnes se situant seulement dans un syndrome, nous paratviter la question cruciale prendre en compte dans la cli-nique avec ces patients : la considration de cette psychosecomme une vritable structure psychopathologique partentire. Ainsi la psychose blanche pche, notre avis,par les mmes insuffisances que la prpsychose : ellene prend pas en compte ce que la structure psychotiquehors dclenchement possde de plus spcifique, savoirdes modes de compensation et de supplances.

    Lexistence des noyaux psychotiques existantes dansles structures nvrotiques nous parat brouiller chez Greenquelque part les pistes pour procder un net diagnostiquede structure nvrose-psychose. Quant aux psychosesfroides de Kestemberg [11] bien que le concept prsenteun vritable intrt lheure daborder certains hystriesgraves ou des troubles anorexiques, il nous semble quelauteur a eu un certain mal se dtacher des structurespsychopathiques ou perverses, sans se rsoudre ramenerles phnomnes tudis vers le terrain de la psychose.

    Pour revenir nos vignettes cliniques, dans le premiercas prsent, nous retrouvons une sorte de transitivisme,dhgmonie du registre imaginaire, o le sujet construitun rapport lautre sexe lAristophane , si nouspouvons nous exprimer ainsi. Difficile de ne pas voir lerapport de continuit entre la relation que le sujet a auxfemmes et le rapport quil a toujours eu avec sa mre. ceci prs que le rapport la mre est purement spcu-laire, sans quil y ait une triangulation dipienne, commelui-mme le dira un jour en affirmant mon pre ne marien transmis . Il y a aussi la prsence dun discours prrflexif , qui se soutient du registre imaginaire enceci : le sujet de lnonciation y est lid (par exemple, il y a du tacite entre nous , je sais ce quelle pense , notre relation coule de source , etc.). Dans ces cas, on nepeut nullement parler, notre avis, dautomatisme mental.Le discours prrflexif [3] veut dire ici que le sujet na pas

    J. Lucchelli, F. Fajnwaks

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  • besoin de sexpliquer : soit de se diviser en sexpliquant.Tout apparat comme une vidence . En effet, de mmeque nous rencontrons une primaut du registre imaginaire,de mme, nous avons pour ce sujet la prsence du regardcomme dterminant du rapport autrui et, en particulier, lautre sexe : il lit dans le visage de son amie, il laconfond avec lui en regardant une photo , il est rest trsmarqu par la psychologue qui le regardait sans parler ,etc. Mme le discours prrflexif est soutenu, probablement,par le regard : ce sont des choses videntes . Ce qui nousamne parler de psychose dans le cas prsent est dunepart, ladite prgnance de limaginaire ainsi que duntransitivisme avr, mais dautre part, la prsence dundiscours prrflexif, ce qui traduit un dfaut dans lnoncia-tion : le sujet peut profrer certains noncs, mais sanspouvoir les soutenir par une sorte de mtalangage .Les cinq faisceaux de troubles proposs plus haut neconstituent nullement de formes cliniques isoles, bien aucontraire, nous rencontrons souvent la combinaison daumoins deux types de troubles . Dans le cas prsent, untransitivisme et les troubles du langage ou de lnonciation.

    En ce qui concerne monsieur M. et Mlle G., nousconstatons que cest surtout les questionnements surltre du sujet qui justifient de parler de psychoseordinaire , mme si dautres phnomnes sont prsents,comme la prgnance de mcanismes imaginaires et desphnomnes du miroir pour monsieur M., ainsi quelangoisse danantisation prsente et le fait de se dire dpossde de son corps chez Mlle G. Des phnom-nes de dsintgration du corps, de perte de la compltudede soi pour Mlle G., ainsi que la perplexit de monsieurM. au moment de la rencontre sexuelle autorisent penser que quelque chose de lordre de lexercice de lasexualit serait profondment dstructurant pour cessujets. Une position mlancolique pour les deux sujetspourrait tre discute, mme si les symptmes classiquesde la mlancolie sont absents (un profond sentiment deculpabilit, des auto-reproches, des dlires). Ce quijustifierait de parler de position mlancolique plus quede vritable mlancolie ou trouble unipolaire. Mais cesaffinits avec la position mlancolique font partie de lapsychose ordinaire : lidentification au dchet et lattraitdu non-tre surgissent comme une consquence de lapanne dautres identifications imaginaires mobilisablespour parer la carence dun Idal du Moi qui lui permettedarticuler des identifications symboliques. Ainsi le sujetse voit attir par lidentification au rien comme objet ( jesuis nul , je suis vide , je nai rien quoi me ratta-cher ) ce qui peut donner une allure trs mlancolique la psychose, mais avec la prsence dautres phnomnesquon ne trouve pas dans la mlancolie classique ou dansles troubles unipolaires. Le ton dpressif est en revancheomniprsent et trs palpable dans le discours des deuxsujets. Pour monsieur M., la possibilit dun passage lacte suicidaire au moment de la perte de sa mre est

    trs prvisible et probable, ce qui viendrait boucler sonimpossibilit radicale passe lacte par ailleurs, lunedes principales plaintes prsentes dans son discours

    Conclusion

    La pertinence du concept de psychoses ordinaires rside dans le fait dinscrire et de proposer une organisationnosographique de phnomnes que nous avons abord icidans une structure psychique. Le diagnostic permet dorien-ter la cure, notamment dans le suivi psychothrapeutique,car nous avons intrt connatre la stratgie adopterdans le transfert ainsi que les diffrentes interventions du th-rapeute. Reconnatre des formes particulires de psychose,permet de respecter certaines compensations imaginairesmises en place par les sujets, pour parer la carence dunesymbolisation. Leur reconnaissance pourrait pargner cessujets des situations qui risquent parfois de prcipiter desdstabilisations de leur structure psychique. Cest le cas,par exemple, lorsque lon aborde ces sujets comme silsagissait des sujets nvross par une erreur de diagnostic.Il sagit ainsi dune clinique qui permet de rencontrer etdidentifier la psychose en dehors des phnomnes et descontextes institutionnels plus classiques. Nous avons ainsivoulu contribuer par ce travail reconnatre ce type depsychose afin de pouvoir, dans un deuxime temps, dfiniret proposer une orientation plus adapte pour leur traitement.

    Rfrences

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    11. Kestemberg E. La Psychose froide. Paris : P.U.F., 2001.

    Une clinique de la psychose ordinaire

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