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Rapport de recherche commandité et financé par la DARES (Mission animation de la recherche)

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Rapport de recherche commandité et financé par la DARES

(Mission animation de la recherche)

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“ Flexibilités et performances :

quelles évolutions du travail et de l'emploi ? ”

Réponse à l’appel à propositions Ministère de l'emploi et de la solidarité, Direction

de l'Animation de la Recherche des Etudes et des Statistiques

« TIC, FLEXIBILITES, TRANSFORMATIONS DU TRAVAIL ET PERFORMANCES :

PLACES ET ROLES DE LA FONCTION RH Le cas de France Telecom »

- RAPPORT FINAL -

Par

Loris GUERY, Estelle MERCIER, Didier MOTTAY et Géraldine SCHMIDT [dir.],

GREFIGE (Université Nancy 2) Groupe de Recherche en Economie Financière

et en Gestion des Entreprises

avec la collaboration du GRC, Groupe de Recherche sur les Communications (Université Nancy 2)

Janvier 2003

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 3

SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE 4 PARTIE 1 : LES POLITIQUES DE FLEXIBILITE(S) CHEZ FRANCE TELECOM. QUESTIONNEMENTS THEORIQUES ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE 8

CHAPITRE 1. LA NATURE DE LA FLEXIBILITE ET LA PLACE DES RESSOURCES HUMAINES 8 1.1. FLEXIBILITE ET STRATEGIE DE L’ORGANISATION 8 1.2. VERS UNE FLEXIBILITE DES RESSOURCES HUMAINES 12

CHAPITRE 2. PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE 23 2.1. PROBLEMATIQUE ET QUESTIONNEMENT : TIC, FLEXIBILITE ET TRANSFORMATIONS DU TRAVAIL23 2.2. PROTOCOLE METHODOLOGIQUE 28

PARTIE 2 : RECONFIGURATION ET CSRH CHEZ FRANCE TELECOM. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES COMME OBJET DE FLEXIBILITE ? 37

CHAPITRE 3. UNE NOUVELLE STRATEGIE QUI IMPLIQUE UNE RECONFIGURATION DE LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES 37 3.1. UNE STRATEGIE ORIENTEE VERS LE CLIENT, PERMISE PAR DES DEPLOIEMENTS DE PERSONNELS 37 3.2. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES COMME OBJET DE FLEXIBILITE 47

CHAPITRE 4. LES CENTRES DE SERVICES RESSOURCES HUMAINES : RESULTATS DE L’ANALYSE EMPIRIQUE 56 4.1. CREATION ET FONCTIONNEMENT DES CENTRES DE SERVICES RESSOURCES HUMAINES 56 4.2. LA FLEXIBILITE DANS LES CSRH : RESULTATS DE DEUX MONOGRAPHIES 62 4.3. ANALYSE TRANSVERSALE DE LA FLEXIBILITE DANS LES CSRH 95

PARTIE 3 : LES CENTRES D’APPELS CHEZ FRANCE TELECOM. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES COMME ACTEUR DE LA FLEXIBILITE ? 99

CHAPITRE 5. LA FLEXIBILITE DANS LES CENTRES D’APPELS : RESULTATS DE 3 MONOGRAPHIES 99 5.1. ANALYSE DES ENTRETIENS REALISES A L’USO (LE 12) 100 5.2. ANALYSE DES ENTRETIENS REALISES A WANADOO 110 5.3. ANALYSE DES ENTRETIENS REALISES CHEZ ORANGE 124

CHAPITRE 6. POUR UNE ANALYSE SYNTHETIQUE TRANSVERSALE DE LA FLEXIBILITE DANS LES CENTRES D’APPELS 139 6.1. UNE ANALYSE QUALITATIVE INTER-SITES 139 6.2. UN ECLAIRAGE COMPLEMENTAIRE A TRAVERS LES REPONSES AU QUESTIONNAIRE DU JOB DIAGNOSTIC SURVEY (JDS) 147 6.3. VERS UNE MISE EN PERSPECTIVE THEORIQUE : CONFRONTATION DES RESULTATS A LA LITTERATURE 159

CONCLUSION GENERALE 166 BIBLIOGRAPHIE 170 ANNEXES 174

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INTRODUCTION GENERALE

• Rappel du contexte et de la genèse de la recherche

- Le GREFIGE et la collaboration avec le GRC : l’équipe de chercheurs Le GREFIGE, équipe d’accueil de l’Université Nancy 2, bi-disciplinaire en sciences de gestion et sciences économiques, est l’équipe support du projet. En son sein, quatre chercheurs ont participé activement à la recherche, à tous ses stades. Par ordre alphabétique :

- Loris Guéry, allocataire-moniteur à l’IAE de Nancy 2 et doctorant au GREFIGE, dont la thèse de doctorat en cours s’inscrit dans ce programme de recherche, avec une orientation plus particulière sur le rôle et la place des managers dans les évolutions actuelles de France Télécom ;

- Estelle Mercier, Maître de Conférences à l’Université Nancy 2 (IUT d’Epinal) et

membre du GREFIGE, dont les préoccupations de recherche s’inscrivent en gestion des ressources humaines, et notamment dans les entreprises publiques de service public ;

- Didier Mottay, Maître de Conférences à l’Université Nancy 2 (IAE de Nancy) et

membre du GREFIGE, dont les centres d’intérêt en recherche se situent à l’interface des problématiques du changement organisationnel, des NTIC et du contenu du travail, et pour qui France Telecom avait déjà constitué un terrain de recherche ;

- Géraldine Schmidt, alors Responsable du GREFIGE et Professeure à l’IAE de

Nancy 2, aujourd’hui Professeure à l’IAE de Paris (Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne) qui, outre sa participation à la recherche dans sa globalité, en a assuré la coordination scientifique.

Par ailleurs, il est vite apparu intéressant, voire opportun, de faire appel à des regards pluridisciplinaires sur l’objet d’étude retenu. Il a ainsi été envisagé une collaboration scientifique avec l’équipe de psychologie du travail de Nancy 2, spécialisée sur les communications, le GRC (Groupe de Recherche sur les Communications), dirigée par le Professeur Alain Trognon. C’est dans ce cadre que deux étudiantes de DESS de Psychologie du Travail (Séverine Hamant et Nathalie Radocchia) ont effectué durant 3 mois leur stage et leur mémoire de fin d’études au GREFIGE sur ce projet de recherche. Elles sont essentiellement participé au travail de terrain dans les centres d’appel (réalisation d’entretiens, retranscriptions et contribution à leur analyse).

- L’appel d’offre de la DARES et la réponse initiale

C’est en septembre 2000 que la réponse initiale à l’appel d’offre lancée par la DARES fut rédigée. La problématique était alors clairement orientée vers une analyse des effets et des enjeux des NTIC en termes de flexibilité(s), à travers deux axes principaux : 1. l’évolution des métiers (contenu et caractéristiques) sous l’effet des NTIC et de la flexibilisation croissante des organisations ; et 2. les modalités de GRH dans le cadre des

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ces emplois dits « flexibles » (conditions de travail, rémunérations, formation, recrutement, gestion de carrières,…). L’application au cas de France Télécom est alors envisagée au sens où elle présente l’avantage d’un terrain en pleine mutation strategico-organisationnelle, offrant une panoplie d’emplois et de métiers variés, où la relation de service au client devient prégnante dans beaucoup de cas. L’expérience de recherche de certains des membres de l’équipe chez France Télécom représente en outre un atout non négligeable, tant au plan de la connaissance longitudinale du terrain que de la facilité d’accès à celui-ci.

- L’accès au terrain France Télécom et les évolutions de la problématique Les premiers contacts au sein de France Télécom se font à travers la mission « reengineering de la fonction RH », dirigée par Bernard Merck, avec la collaboration de Françoise Ridet notamment. La problématique suggérée a d’emblée recueilli un assentiment et un soutien très net de la part de nos premiers interlocuteurs, ce qui a permis d’accéder assez rapidement à une série d’autres entretiens exploratoires, puis aux trois lieux d’observations choisis : des centres d’appel, des CSRH (Centres de Services Ressources Humaines) et le suivi d’un projet de Gestion du Temps de Travail (GTT) sur Intranet. Au fil de ces entretiens exploratoires, et au fur et à mesure de la réflexion théorique menée en parallèle, la problématique a progressivement mis en avant une dimension qui restait au second plan initialement : celle des places et rôles de la fonction Ressources Humaines dans les politiques de flexibilité(s) chez France Télécom. Cette dimension apparaît finalement comme le pivot de la problématique définitive de cette recherche. • Présentation générale de la recherche : éléments de problématique et protocole méthodologique

- Les axes principaux de la problématique La flexibilité est, tout au long de cette recherche, et sur la base des travaux et typologies existants, appréhendée à travers trois axes de différenciation :

- la dimension opérationnelle / stratégique - la dimension interne / externe - la dimension qualitative / quantitative

La problématique s’articule alors autour des propositions générales suivantes :

- Les choix stratégiques en termes de flexibilité (politiques de flexibilité de l’entreprise) peuvent traduire d’une part une réponse aux évolutions du contexte environnemental et des contraintes qui s’exercent sur l’entreprise (réaction) et, d’autre part, une volonté d’améliorer la capacité d’adaptation de l’organisation à ses clients et à ses salariés (proaction).

- Ces politiques stratégiques de flexibilité se déclinent ou se traduisent en

différentes modalités de flexibilité, interne et externe, qui correspondent à une série d’ajustements organisationnels (flexibilité opérationnelle).

- La flexibilité interne s’exerce à la fois sur des éléments de gestion qualitative et

de gestion quantitative des ressources humaines.

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- Pour ces différents niveaux et formes de flexibilité, la fonction ressources humaines tient une place particulière, au sens où elle peut être aussi bien l’objet d’une flexibilité accrue (reconfiguration de la fonction) et l’acteur central de l’incitation/ la gestion/ l’accompagnement de cette flexibilisation : la GRH comme objet ou acteur de la flexibilité.

- La mise en place de ces formes de flexibilité et les actions de GRH qui les

accompagnent ont des effets en termes de performances individuelles et organisationnelles.

- Dans ces processus, les TIC peuvent jouer le rôle de facilitateur des pratiques de

flexibilité (et par conséquent des performances associées), mais aussi de résultante des changements organisationnels : les TIC comme moyen ou produit de la flexibilité1.

- Dans le cas précis d’une entreprise comme France Télécom, le contexte et les

contraintes sont particulièrement surdéterminants dans le choix des politiques de flexibilité, mais aussi dans les modalités concrètes de flexibilité opérationnelle.

Ces propositions sont organisées en un modèle général de recherche repris dans la Figure 3. de ce rapport.

- Les étapes du protocole méthodologique Pour répondre à cette problématique, un protocole méthodologique en deux deux grandes phases a été construit :

- une phase exploratoire, qui vise à comprendre le contexte de FT, ses politiques de flexibilité et ses choix en matière de TIC ; cette phase conduit également à envisager les lieux d’observation à privilégier dans la phase suivante.

- une phase empirique approfondie, organisée autour de trois terrains d’analyse principaux : les centres d’appel, les Centres de Services Ressources Humaines (CSRH), et le suivi d’un projet de mise en place sur l’Intranet d’un outil de gestion du temps de travail (projet GTT). Ce projet faisant l’objet d’une étude longitudinale non encore achevée, il ne sera pas inclus dans le présent rapport.

Plusieurs outils de recueil des données sont utilisés : entretiens semi-directifs (source essentielle de recueil), documentation interne et externe sur l’entreprise, et enquête par questionnaire normalisé, le Job Diagnostic Survey (JDS). Au total, et sur les trois terrains, plus de 80 entretiens ont été réalisés et une soixantaine de questionnaires JDS ont été reçus et traités. C’est à une démarche de triangulation des données que s’apparente le protocole empirique. Le protocole est schématisé dans la figure 4. du rapport.

1 En référence notamment au cadre d’analyse de la théorie de la structuration développée par Giddens (1987) et reprise dans certains travaux sur les technologies de l’information (Cf. partie 1 du rapport).

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• Structuration du rapport Le présent rapport est développé en trois temps. Le premier (Partie 1.) introduit en amont la recherche sur ses aspects théoriques. Principalement, une discussion est proposée sur la notion de flexibilité à partir d’une synthèse de la littérature existante. Ceci permet tout d’abord de souligner la diversité des conceptions de cette notion, la multitude des typologies qui y sont associées, ainsi que la richesse des débats et enjeux théoriques et pratiques qui en dépendent (Chapitre 1.). Ceci permet ensuite de proposer un cadre d’analyse à notre recherche, fondé sur un modèle de recherche combinant les différentes dimensions retenues de la flexibilité aux spécificités du contexte de France Télécom, puis à définir un protocole méthodologique adapté (Chapitre 2.). Dans un second temps (Partie 2.), l’analyse se focalise sur la démarche de reconfiguration (ou reengineering) de la fonction RH, notamment autour de la création de CSRH, qui illustre alors la fonction RH en tant qu’objet de la politique de flexibilité / flexibilisation de France Télécom. Cette stratégie de reconfiguration étant expliquée dans ses grandes lignes et ses principaux enjeux (Chapitre 3.), les résultats d’une analyse empirique qualitative réalisée dans deux CSRH sont ensuite développés (Chapitre 4.). Dans un troisième temps, enfin (Partie 3.), l’accent est mis sur un lieu d’observation particulier et privilégié de la flexibilité au travail, celui des centres d’appel, où la fonction RH est cette fois-ci appréhendée dans son rôle d’incitateur et d’accompagnateur des politiques de flexibilité. Les monographies de trois plate-formes sont présentées (Chapitre 5.), puis une tentative de synthèse transversale est proposée (Chapitre 6.). Au total, la recherche a permis de réunir un matériau empirique à la fois riche et varié, qui fait véritablement sens au regard de la problématique retenue. La conclusion générale s’efforce de mettre en perspective l’ensemble de ces réflexions issues des analyses tant théoriques qu’empiriques.

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PARTIE 1 : LES POLITIQUES DE FLEXIBILITE(S) CHEZ FRANCE TELECOM. QUESTIONNEMENTS THEORIQUES ET

DEMARCHE METHODOLOGIQUE Chapitre 1. La nature de la flexibilité et la place des ressources humaines

1.1. Flexibilité et stratégie de l’organisation

1.1.1. Origines et définitions de la flexibilité

1.1.1.1. L’instabilité de l’environnement comme source de la flexibilité L’apparition des préoccupations en matière de flexibilité des organisations, ainsi que le développement de son étude au sein des sciences de gestion, semblent liés à l’instabilité qui caractérise l’environnement économique depuis les années 1970. De manière très globale, la flexibilité d’un système peut se définir comme « son aptitude à se transformer pour améliorer son insertion dans l’environnement et accroître ainsi sa probabilité de survie » (Tarondeau, 1999a). Ce lien étroit avec l’environnement se retrouve dans les différentes définitions de la flexibilité des organisations : « aptitude ou capacité de l’entreprise, capable d’utiliser ou de contrebalancer l’action de son environnement » (Reix, 1979), « aptitude à s’adapter sans délai à des modifications imprévisibles de l’environnement » (Cohen, 1994), « aptitude de l’entreprise à répondre aux modifications de l’environnement pour assurer le maintien de ses objectifs fondamentaux » (Reix, 1999), « capacité d’adaptation à des changements non anticipés de l’environnement » (Tarondeau, 1999b), « capacité à s’adapter aux événements ou aux circonstances imprévus et à saisir ainsi des opportunités ou à écarter des menaces » (Desreumaux, 1999). L’intérêt porté à la flexibilité n’a donc de sens que dans le cas où une organisation n’est pas totalement maître de son environnement, où elle est face à des situations d’incertitude sur l’évolution de cet environnement. Ces turbulences sont induites par différents facteurs (Agro et al, 2001), au premier rang desquels on trouve la mondialisation des marchés et la nécessité de répondre rapidement aux demandes des clients, la diffusion des modèles d’organisation américains, l’évolution technologique. Rojot (1989) formule l’hypothèse selon laquelle deux facteurs expliquent l’accroissement récent du besoin de flexibilité des entreprises : d’une part, le passage d’une partie croissante de l’entreprise aux services et, d’autre part, l’introduction massive des nouvelles technologies. L’entreprise, face à ces différents facteurs qui s’imposent simultanément, est confrontée à l’obligation de se « flexibiliser » afin d’accroître sa capacité et sa vitesse d’adaptation.

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Cette flexibilisation, au sens d’ajustement de l’organisation aux modifications de son environnement, s’opère par le biais de divers mécanismes :

- Ajustement des flux de production (aspects capitalistiques, modernisation, etc.) - Ajustement des processus organisationnels (réorganisation, décentralisation,

réduction de la division verticale du travail, déspécialisation de la division horizontale, etc.)

- Ajustement de la force de travail (effectifs, coûts du travail, organisation, durée, contenu, etc.)

Trois variables définissent et mesurent globalement la flexibilité (Tarondeau, 1999a). La première correspond au champ des possibles ; les deux autres, qui permettent de mesurer l’aptitude d’évolution de l’organisation, se rapportent au coût du changement ainsi qu’aux délais du changement.

1.1.1.2. Vers une définition de la flexibilité Si les études s’accordent à reconnaître l’instabilité de l’environnement comme cause de la nécessité de flexibilité, on ne trouve cependant pas de définition réellement stabilisée du concept de flexibilité. De plus, certaines études portant sur la flexibilité ne la définissent pas. L’ensemble des définitions pourrait, selon Pasin et Tchokogué (2001), être regroupé en quatre tendances principales :

- la première tend à définir la flexibilité comme la capacité à absorber les changements créés par l’environnement ;

- la deuxième la considère comme la capacité de s’adapter aux changements ; - la troisième l’appréhende comme un ensemble d’habiletés spécifiques ou de

qualités particulières, telles que les capacités à échanger ou substituer des ressources, faire des économies de variétés, ou raccourcir les temps de réponse ;

- enfin, la quatrième tendance tend à présenter la flexibilité comme un concept multiforme, englobant des significations diverses selon les auteurs.

Ceci explique donc la grande disparité que l’on constate au travers des études existantes. De fait, selon Upton (1994), les définitions utilisées sont souvent fonction du problème qui est étudié. Pire encore, la comparaison de certaines études aboutit à la constatation que les définitions et les typologies ne se recoupent pas, voire se contredisent. Cependant, sur la base des définitions avancées dans un échantillon d’études portant sur cette thématique entre 1979 et 2001, et étant majoritairement postérieures à 1995, certains points sont récurrents :

- Dans quasiment toutes les définitions, il est fait mention de l’environnement ; - L’environnement apparaît comme un élément changeant et difficilement

prédictible ; - Peu de définitions considèrent que la flexibilité est un moyen d’agir sur cet

environnement ; à l’inverse, l’utilisation de termes tels que « adaptation », « réaction », « ajustement », « transformation » est courante ;

- Le temps d’adaptation semble être une contrainte importante : « aptitude à s’adapter sans délai à des modifications imprévisibles de l’environnement » (Cohen, 1994) ; « capacité d’adaptation sous la double contrainte de l’incertitude et de l’urgence » (Everaere, 1997) ;

- La flexibilité ne s’opère pas sur une dimension unique, mais combine différents niveaux (structure, individu, etc.) et différents domaines (technologies, ressources humaines, etc.).

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 10

On pourrait alors définir la flexibilité comme une « capacité d’adaptation de l’entreprise en réaction à des changements de l’environnement difficiles à anticiper ». Si cette conception de la flexibilité est la plus courante, il ne faut cependant pas perdre de vue qu’elle peut également adopter une dimension proactive en vue de maintenir l’équilibre dynamique entre l’environnement et l’organisation (Evans, 1991 ; Volberda, 1998). Cette relation mise en évidence entre l’entreprise et son environnement amènerait également à s’intéresser aux proximités et parallèles qu’il est possible d’établir avec d’autres notions auxquelles ont recours les sciences de gestion, telles que celles d’adaptabilité, de réactivité ou de fit.

1.1.2. Des typologies qui conduisent à s’intéresser à la stratégie de l’entreprise

1.1.2.1. Des typologies fonctionnant par oppositions

Quels sont les domaines de l’organisation qui sont flexibles ? Produits (satisfaction d’un grand nombre de besoins par la combinaison de modules de faible diversité), processus (s’adapter à la variété des produits ou services et aux fluctuations des demandes), organisation (être en mesure de changer assez facilement de configuration, ce qui se rapproche de la notion de structures organiques), travail et emploi (Tarondeau 1999b). Ces domaines sont entremêlés, interdépendants, combinatoires (Everaere, 1997). Pour Desreumaux (1999), la politique de gestion de la flexibilité combine à la fois des modalités de gestion des ressources et des actions sur l’organisation. Dans les différentes ressources mobilisées pour accroître la flexibilité, on note l’importance des ressources humaines qui « constituent un levier majeur de la flexibilité » (Everaere, 1997, p.135). Au sein de la flexibilité du travail, on oppose souvent la flexibilité interne à la flexibilité externe, et la flexibilité qualitative à la flexibilité quantitative. Du fait que la flexibilité touche des domaines variés de l’entreprise, et qu’elle peut se réaliser pour chaque domaine selon des modalités différentes (surtout dans le cas de la flexibilité du travail et de l’emploi), de nombreuses typologies de la flexibilité ont été élaborées. Pour Upton (1994), l’une des caractéristiques de la littérature académique relative à la flexibilité est l’utilisation de taxinomies de la flexibilité, notant par ailleurs que le recours à de telles listes prescrites de types de flexibilité est difficile dans le but d’analyser des problèmes managériaux. De même que les définitions, les typologies de la flexibilité sont donc multiples. Elles consistent souvent à opposer deux formes de flexibilité, comme par exemple statique / dynamique, ou qualitative / quantitative. Chacune d’elles a son intérêt selon le domaine d’étude des chercheurs, et est plus ou moins en mesure d’éclairer la problématique de la recherche. Chaque typologie ou chaque point de vue permet par conséquent de lier le thème de la flexibilité à des préoccupations de recherche spécifiques (Pasin, Tchokogué, 2001). Parmi les nombreuses typologies existantes, on distingue la flexibilité :

- Opérationnelle, stratégique (Reix, 1979 ; Desreumaux, 2000) - Financière, technique, fonctionnelle, numérique (Mercure, 1997 ; Livian, 2001) - Quantitative externe, externalisation, quantitative interne, fonctionnelle, salariale

(Rojot, 1989) - Potentielle, effective (Reix, 1979) - Statique, dynamique (Bardelli, 1995 ; Cohendet, Llerena, 1999) - Quantitative, qualitative (Tarondeau, 1999b) - Fonctionnelle, structurelle, temporelle et numérique (Pasin, Tchokogué, 2001) - Interne, externe (Brunhes, 1990 ; de Terssac, 1992 ; Upton, 1994)

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 11

- Produit, processus, organisationnelle (Gerwin, 1993) - Du travail et de l’emploi (Tarondeau, 1999b) - Quantitative, qualitative (OCDE, 1987 ; Everaere, 1997 ; Tarondeau, 1999b) - Technico-organisationnelle, du travail (Dif, 1998) - Des ressources, de coordination (Sanchez, 1995 ; Wright, Snell, 1998) - A court, moyen, long terme (Buzacott, Gupta, 1989), etc.

Il est parfois possible d’opérer des regroupements entre ces différentes typologies. Il en va ainsi de la flexibilité salariale (adaptation du coût du travail) qui s’intègre à la flexibilité financière, la flexibilité fonctionnelle (accroissement de la polyvalence, de la mobilité interne, modification de la conception des tâches) s’assimilant quant à elle à la flexibilité qualitative (niveau et étendue des qualifications, degré d’autonomie), la flexibilité numérique (formes d’emploi et volume de la main d’œuvre) à la flexibilité quantitative (nombre d’employés, horaires de travail, rémunération).

1.1.2.2. Flexibilité et stratégie L’une de ces multiples typologies, établie dès 1979 par Robert Reix et désormais classique, oppose la flexibilité opérationnelle à la flexibilité stratégique. La flexibilité opérationnelle correspond à « la capacité de l’entreprise à faire face à des variations de volume d’activité dans un délai minimum et avec des coûts d’ajustement les plus faibles possibles » (Desreumaux, 1999, p.407). On retrouve bien dans cette optique, à court terme, les deux variables de délai et de coût d’ajustement citées précédemment. L’adaptation s’effectue dans ce cas principalement par le biais de la modification du montant ou du volume des ressources utilisées. La flexibilité stratégique correspond quant à elle à « la capacité à faire face à des changements dans la nature des activités et non plus dans leur niveau » (Desreumaux, 1999, p.407), et correspond donc à une vision à plus long terme de l’entreprise. Nécessitant des investissements en ressources et des transformations de l’organisation dans son ensemble, ce qui implique du temps, elle peut entrer en conflit avec la flexibilité opérationnelle qui a pour objectif une adaptation à court terme. Cette flexibilité stratégique, qui s’exprime par une transformation de l’ensemble de l’entreprise et pas uniquement par le niveau des ressources auquel elle a recours, nous intéresse directement dans le cadre de notre recherche, ce qui incite à examiner les liens entre stratégie et flexibilité. En comparant la littérature destinée aux managers (littérature scientifique exclue) datant des années 1960 avec celle datant des années 1990, Boltanski et Chiapello (1999) mettent en évidence une remise en cause du 2ème esprit du capitalisme (la grande organisation) au profit d’un 3ème esprit du capitalisme qui émerge (l’entreprise-réseau). Ils notent dans la littérature managériale des années 90 une « attention obsessionnelle à l’adaptation, au changement, à la "flexibilité" » (p.113). Cette obsession trouve ses bases dans un certain nombre de phénomènes d’ordre mondial à partir de la fin des années 70 : fin de l’opposition entre l’économie capitaliste américaine et l’économie planifiée soviétique, émergence d’un pôle capitaliste en Asie, etc. Se basant sur les six cités présentées dans De la Justification, les auteurs mettent en évidence à partir de cette littérature destinée aux cadres l’existence d’une septième cité, la cité par projets (notion calquée sur celle d’organisation par projet). Au sein de celle-ci, la flexibilité est une qualité d’importance. Ceci laisse donc à penser à une évolution des relations entre la stratégie et la flexibilité, ou plutôt à une irruption de la flexibilité dans la stratégie. Dans un environnement changeant, la flexibilité d’un système lui permet d’accroître sa probabilité de survie (Tarondeau, 1999a), de même qu’elle est un moyen d’assurer le maintien des objectifs fondamentaux de l’entreprise (Reix, 1999). Cette dernière acception de la flexibilité suppose soit que la stratégie de l’entreprise n’est pas

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fondamentalement remise en cause lors des changements qui interviennent dans l’environnement, soit que hormis des objectifs tels que sa survie, l’entreprise ne dispose plus de stratégie à long terme et réagit au coup par coup aux modifications de son environnement. Ce lien stratégie-flexibilité renvoie à une rupture avec l’idée de planification stratégique, du fait des exigences d’adaptation de l’entreprise, idée que défend Mintzberg (1994) pour qui la stratégie va à l’encontre de l’adaptation et du changement des organisations. Sans aller aussi loin dans la remise en cause de la stratégie, force est de constater que la notion de réactivité des entreprises a marqué la fin du 20ème siècle. La planification stratégique, conception rigide de la stratégie de l’entreprise, a cédé le pas à l’intention stratégique, plus ouverte aux remises en cause et aux évolutions au fil du temps, afin d’atteindre le but fixé. Dans la lignée de l’idée de "surprise stratégique" d’Ansoff (1980) qui montre que les managers ne sont pas en mesure de prévoir totalement leur environnement, le modèle adaptatif (Chaffee, 1985) suppose que l’entreprise dispose d’un socle de moyens qui lui permettent de répondre aux modifications de l’environnement. Elle s’adapte de manière réactive, et la flexibilité y est considérée comme une capacité à générer des stratégies innovantes. De même, les tenants d’une approche dynamique de la contingence (Hrebiniack, Joyce, 1985) mettent en avant l’idée d’une création d’un potentiel de flexibilité qui se base sur un ensemble de ressources et de capacité de transformation de l’organisation. Selon Tarondeau (1999b), l’écologie des populations et l’approche par les ressources sont les deux grands courants théoriques qui attribuent un caractère stratégique à la flexibilité. Pour l’approche fondée sur les ressources, « la flexibilité apparaît comme une ressource complexe, combinant de nombreuses ressources et compétences, qui permet à une entreprise de se doter d’options stratégiques » (Tarondeau, 1999b, p.11). Cette perspective est intéressante en ce sens qu’elle s’éloigne de la vision court-termiste de la flexibilité, et qu’elle met par ailleurs l’accent sur le fait que la flexibilité n’a pas une source unique au sein de l’organisation, mais qu’au contraire elle se base sur de nombreux éléments (techniques, humains, etc.). Une stratégie flexible se caractérise donc par la « consécration de la flexibilité par préparation et création d’un potentiel » (Everaere, 1997, p.49). Par conséquent, la flexibilité est donc bien un moyen de répondre à une modification des données de l’environnement de l’entreprise, mais il n’est pas possible de la considérer uniquement dans sa dimension réactive, puisque l’organisation s’est "préparée" à répondre à l’environnement.

1.2. Vers une flexibilité des ressources humaines Parmi l’ensemble des typologies présentées auparavant, celle utilisée par Dif (1998) présente l’intérêt de séparer un niveau organisationnel d’un niveau plus individuel. Se basant sur Boyer (1987) et du Tertre (1989), Dif considère que les entreprises ont recours à deux types de flexibilités : une flexibilité technico-organisationnelle et une flexibilité du travail. La flexibilité technico-organisationnelle renvoie à une organisation de production souple, caractérisée par l’existence d’unités plus ou moins autonomes. La flexibilité du travail correspond quant à elle à une capacité d’adaptation qualitative et quantitative de l’utilisation du travail. La définition de ces deux types de flexibilités permet de mettre l’accent sur deux dimensions différentes, c’est-à-dire sur l’organisation (flexibilité technico-organisationnelle) et sur les individus (flexibilité du travail), ce qui rejoint les deux niveaux d’étude évoqués dès le début de la recherche sur France Télécom (recours aux technologies de l’information qui favorise un ajustement organisationnel en lien avec un ajustement de la force de travail). La flexibilité du travail, principalement dans sa

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dimension qualitative, est considérée par Dif comme indispensable en vue de la flexibilité technico-organisationnelle. Cependant, comme souvent, la description de la flexibilité qui est faite s’applique plus facilement pour étudier le secteur industriel qu’une entreprise telle que France Télécom. De plus, le même terme peut recouvrir des acceptions différentes, et c’est ainsi que pour Tremblay (1992), la flexibilité technico-organisationnelle prend en compte à la fois la flexibilité de la technologie de production et celle du travail, renvoyant à la polyvalence des salariés et à celle des équipements productifs.

1.2.1. La flexibilité organisationnelle en lien avec les technologies de l’information

1.2.1.1. La flexibilité technico-organisationnelle

L’ajustement des flux de production est l’un des aspects les plus développés en sociologie du travail avec l’apparition de nouveaux systèmes productifs depuis les années 80 (Coriat, 1991, Boyer et Durand, 1993) censés accroître la capacité de l’entreprise à réagir face aux « aléas » de la demande (Veltz et Zarifian, 1992). La flexibilité de la production provient de transformations technologiques et organisationnelles qui visent à ce que l’organisation s’adapte mieux à variations quantitatives et qualitatives de la demande (Gadrey, 1988). Les processus flexibles doivent s’adapter à ces variations qualitatives et quantitatives, et donc à la variété des produits ou services ainsi qu’à la fluctuation du niveau de la demande. Les discussions concernant ce type de flexibilité touchent principalement aux technologies flexibles et donc aux processus productifs. Si l’étude de cette dimension est particulièrement pertinente dans le cas de recherches portant sur des entreprises de type industriel où le processus de production est clairement tangible, elle l’est par contre moins en ce qui concerne des entreprises de services telles que France Télécom. Ces technologies dites flexibles, développées grâce à l’amélioration de l’automatisation et au développement de l’informatique, doivent permettre de raccourcir le délai d’adaptation de l’entreprise ainsi que la production de produits différents à partir des mêmes éléments de base. L’atelier flexible mis en évidence par Coriat (1990) combine dans cette perspective l’automatisation et la polyvalence. L’utilisation de ces technologies flexibles aboutit à la différenciation retardée des produits. Cependant, les résultats liés à l’utilisation de telles technologies se sont révélés fréquemment inférieurs aux espérances (Coriat, 1990). Celles-ci étaient en effet liées à une vision classique de l’effet des technologies sur l’organisation, particulièrement connue en systèmes d’information, qui est le déterminisme technologique, et selon laquelle les technologies sont des facteurs exogènes à l’organisation qui ont sur elles des impacts automatiques. D’autres perspectives théoriques en la matière, principalement la perspective de l’émergence, ont mis en évidence (Markus, Robey, 1988) que cette relation n’était pas de nature causale, mais qu’elle consistait plutôt en des interactions entre les technologies et les individus.

1.2.1.2. Les technologies de l’information dans la flexibilité de l’organisation L’impact des technologies de l'information constitue un terrain de recherche important pour la gestion (Alsène, 1990) parce qu’elles induisent des changements aussi bien au niveau de l'organisation (Whisler, 1970 ; Mumford, 1987 ; Reix, 1990 ; Orlikowski et Robey, 1991) qu’au niveau du travail individuel (Parsons, 1988).

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• Des TI favorisant la flexibilité de l’organisation…

L’expression Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication (TIC) concurrence depuis peu le mot "informatique" inventé en 1962 ou d'autres expressions inspirées de l'américain ou non telles que : Technologies de l'Information (TI), Système d'Information (SI), Télématique ou bien encore Bureautique (Peaucelle, 1997). Pourtant, si les nuances existent, il faut reconnaître qu’elles sont faibles et recouvrent plutôt la diversité des usages de l'ordinateur dans notre société qu’une véritable différence technologique. Historiquement, les premiers efforts de l'informatique s'orientaient vers l'automatisation des tâches simples ayant pour conséquence le remplacement des employés par des automates. Plus récemment, avec l'apparition de l'acronyme TIC, l'accent est mis sur la communication dans une vision qui privilégie l'individu en tant que destinataire de l'information. Les nouvelles technologies viennent compléter les grandes techniques de communication que sont l'imprimerie et les télécommunications en assurant la numérisation de l'information présente dans les textes, les images et le son. Les données numérisées sont libérées de leur support physique et peuvent être mémorisées, classées, transmises et dupliquées (par exemple imprimées). Les nouvelles technologies s'intéressant à l'information et à la communication, elles influencent directement la prise de décision dans les organisations. Dès le milieu des années 80, Huber (Huber & al, 1986) insiste sur le fait qu'une organisation se doit de créer des structures et des procédures qui facilitent la prise de décision dans l'organisation. En effet, l'entreprise a besoin de communications rapides pour prendre des décisions et s'adapter à la concurrence. Cette rapidité permet d'assurer avec efficacité le commandement hiérarchique, la coordination (ajustement mutuel) et le contrôle qui lui sont nécessaires pour assurer la cohésion de ces actions. Traditionnellement, dans les petites organisations la parole dans le face à face permet d'assurer les exigences de souplesse et de vitesse. Son inconvénient est d'exiger beaucoup de temps des personnes qui doivent se trouver dans le même lieu et être libre en même temps. Ceci entraîne une perte importante de temps en déplacement et en attente. Afin de résoudre ces inconvénients et abaisser les coûts de transaction de nombreuses applications informatiques sont apparues : l'échange de données informatisées, les messageries électroniques, les collecticiels (groupware) et plus récemment l'Internet. Ce dernier permettant d'assurer à un moindre coût la collecte de l'information interne (intranet) et externe (extranet), qui permet à l'entreprise de prendre connaissance de son environnement interne et externe. Une fois les fonctions de Commandement, Coordination, Contrôle et Information (C3I) assurées avec efficacité, l’organisation est capable de réagir rapidement aux évolutions de son environnement. Au niveau organisationnel, ces technologies entraînent des modifications dans la structure même des organisations (Barron, 1994). Si l'on retient l'hypothèse qu'il existe un déterminisme technologique (Reix, 1990 ; Reix & Meyer, 1991), alors l'introduction des nouvelles technologies entraîne un "aplatissement" de la structure de l'entreprise (Dawson, 1988 ; Rockart & Short, 1989), soit une diminution des niveaux hiérarchiques de l'encadrement (Reix, 1990). Ainsi, parmi les salariés de l'entreprise, l'encadrement intermédiaire, du fait de son rôle pivot dans la structure organisationnelle, a été très tôt identifié comme étant le plus susceptible d'être influencé par le processus d'automatisation (Dickson et Simmons, 1970 ; Guthrie, 1973 ; Kling, 1978 ; Leavitt et Whisler, 1958). Les TIC favorisent également une circulation de l’information en réseau plus directe et plus fiable que la traditionnelle diffusion hiérarchique. Dans le cadre des métiers d’interface, c’est surtout la mise en réseau d’informations client qui a permis (1)

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d’automatiser certaines tâches autrefois manuelles (inscription, changement d’adresse ou de références clients etc.) (2) de les mettre à disposition de tous donc d’élargir le cercle des personnes susceptibles d’avoir accès à ces informations et capables de répondre aux demandes des clients (« l’information partagée »). Ainsi, les TIC peuvent être considérées comme favorisant la flexibilité en ce sens qu’elles permettent de réduire les délais et les coûts inhérents au changement. Les technologies de l’information sont à la fois un soutien à l’amélioration de la fluidité des ressources (les modifications en termes de coordination se traduisent par un accroissement du traitement de l’information), et à l’élargissement du répertoire des réponses (permettant notamment la différenciation retardée) (Reix, 1999). Elles sont, de manière générale, un outil précieux et efficace permettant de soutenir les changements organisationnels cherchant à accroître la flexibilité des entreprises. Le recours aux technologies de l’information favorise notamment un reenginnering de la fonction Ressources Humaines au sein des entreprises, en vue de la faire évoluer en direction d’une fonction créatrice de valeur, en permettant aux professionnels de la fonction de se concentrer sur leurs missions stratégiques (Matmati, 2001). Cette transformation de la FRH s’opère par ailleurs par le développement du partage de la fonction en direction des managers opérationnels (Peretti, 1996), les Libres Services RH donnant la possibilité de traiter automatiquement des processus de gestion de tâches administratives du personnel à faible valeur ajoutée (Barthe, Castro, 2002).

…mais dont les effets sur la flexibilité du travail sont encore méconnus

Ainsi, les technologies de l’information sont relativement peu flexibles en elles-mêmes. Leur coût d’implantation est souvent lourd, le temps d’implantation et de mise en route long, et leurs possibilités d’évolution sont parfois faibles (Reix, 1999). En outre, le recours aux technologies de l’information conduit sous certains aspects à une rigidification de l’organisation et des comportements, et donc à une réduction de la flexibilité. Ainsi leur implantation dans un objectif d’automatisation nécessite un travail de formalisation des processus. Ce travail réalisé, il est tentant de ne plus faire évoluer ce couple processus – système d’information. De même, les systèmes de type « aide à la décision » génèrent le risque de formalisation de situations dans des cadres d’analyse trop restreints, ainsi qu’une réduction de la richesse de l’information. Cette aide informatisée s’accompagne par ailleurs d’une réduction de la capacité d’apprentissage des individus face aux situations réelles. En effet, l'impact au niveau individuel des nouvelles technologies en général, et de l'informatique en particulier, n'est ni simple à appréhender, ni uniforme. Une hypothèse bien connue suggère que les nouvelles technologies entraînent une simplification du travail et un appauvrissement des compétences requises pour le mener à bien (Braverman, 1974). Alors que d'autres travaux font apparaître que l'utilisation des nouvelles technologies ne conduit pas nécessairement à une simplification du travail, (Pinsonneault et al., 1993). Cet enrichissement du travail peut entraîner une intensification du travail ayant des conséquences négatives sur l'employé (stress, burn out). Ce débat sur l'impact de l'automatisation des tâches a commencé dès le début du processus. (Attwell & Rule, 1984). Pour certains auteurs (Leavitt et Whisler, 1958; Mowshowitz, 1976) le travail automatisé devait se trouver diminuer dans son contenu. La prise de décision et le pouvoir devaient être centralisés, et le contrôle exercé par la hiérarchie plus important. Cela devait

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s'accompagner d'une perte d'autonomie et de responsabilités de chacun vis à vis de son travail. Plus récemment, De Terssac constate que les changements s'opèrent sur le contenu du travail (autonomie) et le niveau de l'emploi (De Terssac, 1992). Pour d'autres, au contraire, l'automatisation doit entraîner un enrichissement du contenu du travail (Anshen, 1962; Giuliano, 1982). D'une part, puisque les tâches routinières sont les plus susceptibles d'être automatisées, les individus devraient pouvoir se concentrer sur les tâches les plus valorisantes. D'autre part, les ordinateurs personnels devraient entraîner une décentralisation des informations et de la prise de décision dans l'organisation. La responsabilité et l'autonomie de chacun s'en trouveraient renforcées et cela irait dans le sens d'une plus grande satisfaction du travailleur, ce qui renforcerait sa motivation à mieux produire. Dans le secteur des services par exemple, J. Gadrey (1994) met en avant la réduction des interactions simples largement austomatisées au profit de relations sociales plus complexes entre le prestataire et le client (écoute, conseil, dialogue, réponse immédiate etc.). Toutefois, les effets observés sont susceptibles d'être influencés, positivement ou négativement, par un grand nombre de variables individuelles et organisationnelles (âge des salariés, niveau de formation, structure de l'entreprise).

Le modèle structurationniste de la technologie pour différencier la flexibilité potentielle de la flexibilité effective

La théorie de la structuration, développée par Giddens (1987), tente de dépasser l’opposition entre les théories qui mettent l’accent sur les propriétés institutionnelles des systèmes sociaux, et celles qui mettent en exergue la liberté des acteurs. Son idée centrale est celle de dualité de la structure, cette dernière se définissant comme un ensemble de règles et de ressources (Rojot, 1998). Il y a dualité car la structure est d’une part un élément facilitateur ou contraignant des agissements des individus, et d’autre part le résultat de leurs actions. Ce résultat se concrétise soit dans le sens d’un renforcement des structures existantes, soit dans celui d’une modification ou d’une évolution. Structure et action entretiennent donc une relation récursive, aucune ne pouvant être envisagée comme la cause de l’autre. Quelle représentation des technologies de l’information et de leurs relations avec les individus la théorie de la structuration véhicule-t-elle ? Rappelons tout d’abord qu’en elle-même, elle ne traite pas des technologies mais de la production et de la reproduction du système social. Il n’y a par conséquent pas une vision unique des technologies de l’information exprimée clairement dans ce cadre théorique, mais plusieurs interprétations ou adaptations faites de la théorie par divers auteurs. Ainsi, si l’on reprend le modèle structurationniste de la technologie utilisé par Orlikowski et Robey (1991) et développé plus en détail par Orlikowski (1992), la technologie est présentée comme « une sorte de propriété structurelle des organisations développant et/ou utilisant la technologie », c’est-à-dire qu’elle « englobe et est par conséquent une illustration de certaines règles et des ressources constituant la structure de l’organisation » (Orlikowski, 1992, p.405). Une technologie de l’information apparaît alors dans sa dualité comme le produit de l’action humaine mais également comme son médium, présentant un ensemble de règles ou de ressources facilitant ou contraignant cette action. Le système de relations entre l’organisation, les technologies de l’information et les acteurs ainsi mis en évidence, montre que l’organisation peut tenter de maîtriser, ou tout du moins d’orienter le comportement des individus par le biais des technologies de l’information dont ils ont à se servir. Pour De Sanctis et Poole (1994), cette influence serait liée aux structures sociales portées par la technologie, composée des deux éléments

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que sont les caractéristiques techniques et l’esprit. Ce dernier se définit comme « l’intention générale au regard des valeurs et des objectifs sous-tendus par un ensemble donné de caractéristiques structurelles » (De Sanctis, Poole, 1994, p.126). Correspondant à ce que Giddens nomme la "légitimation", il est évidemment subjectif, mais défini au moins pour partie par les concepteurs et le management, et renseigne les utilisateurs sur la manière dont ils doivent se servir de la technologie de l’information, notamment lorsque les procédures ne sont pas explicitement spécifiées. Cependant, la théorie de la structuration met en exergue la liberté des acteurs, l’une des bases de la théorie étant le caractère non déterministe de leur conduite, puisqu’ils ont toujours la possibilité "d’agir autrement" (Rojot, 1998). Selon l’utilisation qu’ils font des technologies de l’information, les individus peuvent donc entrer dans le moule de ce qui est voulu par l’organisation, ou au contraire s’en écarter. Les technologies de l’information, telles qu’elles sont utilisées au quotidien, sont donc à la fois construites par les concepteurs et par les utilisateurs (Orlikowski, 1992). Entre en compte dans cette possibilité de divergence des comportements des usagers la notion de "flexibilité interprétative de la technologie" développée dans le modèle structurationniste de la technologie, et qui correspond au « degré avec lequel les utilisateurs d’une technologie sont engagés dans sa constitution (physiquement et/ou socialement) durant le développement ou l’utilisation » (Orlikowski, 1992, p.409). Ceci suppose donc que les technologies sont potentiellement modifiables tout au long de leur existence. Orlikowski concède cependant qu’il peut exister des différences importantes entre les technologies dans les possibilités de reconception dont elles font l’objet. La flexibilité interprétative est donc contrainte par les caractéristiques matérielles de la technologie, et plus généralement par les contextes institutionnels et les niveaux de connaissance et de pouvoir des acteurs durant les phases de conception et d’utilisation. Il ressort donc de ceci que la flexibilité générée par les technologies de l’information peut s’appréhender selon la typologie flexibilité potentielle/flexibilité effective (Reix, 1979). En effet, les caractéristiques purement techniques de ces technologies ainsi que l’esprit offrent un potentiel de flexibilité. Cependant, la flexibilité effective ne se constate que dans les interactions des individus avec ces TI, qui, si elle sont guidées par les caractéristiques et l’esprit, n’en sont pas pour autant déterminées.

1.2.2. Flexibilité du travail et ressources humaines

1.2.2.1. Flexibilité interne vs flexibilité externe Les différentes formes de flexibilité du travail qui sont observées dans les pratiques des entreprises peuvent tout d’abord être regroupées en deux catégories : la flexibilité interne et la flexibilité externe (Boyer, 1987 : Cohendet et Llerena, 1989 ; Brunhes, 1990). La flexibilité interne du travail est « la possibilité, pour une entreprise, d’ajuster l’utilisation et les rémunérations de ses salariés en fonction des besoins de la production et des résultats financiers » (Dif, 1998, p.233). Elle se manifeste donc, comme son nom l’indique, à l’intérieur des frontières de l’organisation considérée, et implique de disposer de surcapacités en ressources et en compétences. La flexibilité externe consiste quant à elle à « ajuster le niveau de l’emploi au sein de l’entreprise en fonction des besoins de la production et du marché » (Dif, 1998, p.234). Elle revient donc soit à jouer sur le nombre de salariés de l’entreprise (embauches et licenciements, Contrats à Durée Déterminée), soit à faire appel aux services d’autres entreprises (intérim, sous-traitance, filialisation). Outre le fait qu’elle participe à la précarisation de l’emploi, l’un des risques liés à la pratique de la flexibilité externe est de

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voir disparaître les savoirs opérationnels, et tout particulièrement les savoirs tacites liés à la pratique quotidienne des salariés de l’entreprise (Tarondeau, 1999b). Cette typologie flexibilité interne / flexibilité externe est souvent utilisée pour marquer les différences de pratiques selon les pays. Ainsi, deux modèles principaux s’opposeraient (Brunhes, 1990). D’un côté un modèle britannique, qui se base sur une flexibilité externe et quantitative des ressources humaines. D’un autre côté, le modèle suédois, qui correspond à une perspective à long terme des ressources humaines, où la flexibilité est majoritairement interne, orientée vers la flexibilité qualitative. L’existence d’une flexibilité technico-organisationnelle en est l’une des conditions de base.

1.2.2.2. Flexibilité quantitative vs. flexibilité qualitative

La flexibilité quantitative du travail Comme cela vient d’être mentionné, il est également possible d’opposer la flexibilité quantitative à la flexibilité qualitative. La flexibilité quantitative s’illustre par les travaux d’Adkinson et des théoriciens de la segmentation du travail (Doeringer, Piore, 1975), dans laquelle on trouve au centre un marché interne, relativement stable, composé du "noyau dur des salariés" qui bénéficie de la forme classique du contrat de travail (Contrat à Durée Indéterminée), et un marché externe, instable, archétype de l’emploi flexible, avec des formes d’emplois particulières ou atypiques (CDD, temps partiels, intérim, etc.). L’éloignement par rapport au centre au centre du schéma traduit donc un relâchement du lien entre l’entreprise et l’individu au travail. Dans cet aspect quantitatif de la flexibilité, cette dernière est sous-tendue dans la nature même du contrat de travail, qui permet alors d’aboutir à une flexibilité du temps de travail en tant qu’élément majeur de la GRH, en opposition à la fidélisation ou aux mécanismes de loyauté (Baret, 1997).

Figure 1 : Les formes de flexibilité quantitative (d’après Doeringer et Piore, 1975)

CDI temps plein

Travailleurs indépendants

Stagiaires

CDD

Intérimaires Sous-traitance sur le site

Travail à temps partiel

Contrats aidés

Permanents Temporaires Contrats commerciaux

Relâchement des liens avec l’entreprise

Théorie de la segmentation

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Dans le secteur privé, les deux marchés ne sont pas étanches, les salariés du marché interne pouvant d’un moment à l’autre être en situation de précarité, ceux du marché externe ayant quant à eux l’espoir de se trouver à l’inverse en phase de stabilisation de leur emploi. Rojot (1989) souligne cependant que le modèle de flexibilité du travail noyau-périphérie n’a aucune validité explicative dans la réalité, du fait notamment que certains effets résultent plus de stratégies produits/marchés que de stratégies de main d’œuvre (flexibilité stratégique, technologique, etc.). La flexibilité quantitative du travail repose principalement sur les heures supplémentaires et les emplois qualifiés d’atypiques (en opposition à un CDI). Ces contrats atypiques peuvent poser problème lorsque le niveau de qualification est élevé, que les technologies utilisées sont complexes, ou que les savoir-faire nécessaires sont tacites et difficiles à contrôler. Cependant, les entreprises peuvent y avoir plus facilement recours lorsque les travailleurs ont des compétences dont l’entreprise n’a pas besoin régulièrement. Une stratégie de flexibilisation quantitative du travail présente des avantages évidents pour les dirigeants d’entreprises. Le principal est peut-être que les résultats en sont tangibles dans des délais courts, ce qui est important si l’on fait l’hypothèse que les dirigeants sont soumis à une pression sur des résultats chiffrés à court terme (Everaere, 1999). Mais d’autres avantages sont également prégnants, comme la possibilité, via l’intérim, de disposer de travailleurs de qualité, sans que l’entreprise ait pour autant des devoirs importants envers ces individus. La présence côte à côte de salariés titulaires et de personnes sous contrats atypiques peut également se traduire par une sorte de concurrence entre ces deux groupes, positive en termes de productivité pour l’entreprise : les premiers entrent dans ce jeu afin d’assurer leur place dans le "noyau dur", les seconds le font dans l’espoir d’une embauche durable. A l’inverse, la flexibilité quantitative génère un certain nombre d’effets pervers, mis en évidence par Everaere (1999) et classés en six catégories. Tout d’abord, l’arrivée de nouveaux travailleurs au sein de l’entreprise se traduit par des problèmes de productivité, puisque le nouveau travailleur, par exemple intérimaire, ne peut pas être tout de suite totalement opérationnel face aux particularismes de l’entreprise dans laquelle il vient d’arriver (repères spatiaux, techniques, organisationnels, socio-culturels, etc.). Cette méconnaissance peut également se traduire par un deuxième effet négatif, c’est-à-dire l’augmentation de la probabilité de survenue d’accidents du travail. Si la flexibilité quantitative est susceptible de générer une concurrence entre les individus, elle risque également de se traduire par une insatisfaction, liée par exemple à la précarisation ou au caractère aléatoire des horaires de travail, ce qui se manifeste par une dégradation de l’implication et de la sensibilité à la qualité du travail effectué. Cette concurrence qui vient d’être évoquée se traduit également par des problèmes de cohésion sociale, préjudiciable à l’efficacité collective. La gestion des compétences, qui nécessite une optique à long terme de l’entreprise et de ses ressources humaines, est également remise en cause par le recours à une flexibilité externe du travail. Enfin, cette flexibilité conduit aussi à paralyser l’autonomie des salariés alors qu’on la considère généralement comme allant de paire avec les processus de production flexibles. Ceci s’explique une fois encore par la tension entre les salariés du noyau dur et les autres, puisque les uns comme les autres, dans la crainte d’une dégradation de leur situation, ne sont pas enclins à s’écarter des règles dictées par la hiérarchie.

La flexibilité qualitative du travail La flexibilité qualitative (ou fonctionnelle) porte sur le contenu même du travail (Tarondeau, 1999b), sur « le niveau et l’étendue des qualifications des employés et sur leur degré d’autonomie dans l’organisation » (Tarondeau, 1999a, p.66). Elle vise, grâce à

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l’élargissement des compétences et aux efforts de formation, à accroître la polyvalence des salariés ainsi que leur mobilité interne (Gadrey, 1988). Le travailleur flexible est donc polyvalent, il a une étendue de compétences qui lui permet de maîtriser un grand nombre de tâches. La polyvalence est accrue par des formations ponctuelles et, au quotidien, par les capacités d’apprentissage des individus. La flexibilité qualitative du travail est amplifiée pour des organisations où le travail de groupe occupe une place importante, où il y a une importante mobilité interne, où la direction développe une politique visant à mobiliser la capacité d’apprentissage. Elle repose donc sur l’étendue des compétences, ou la polyvalence, et les capacités d’apprentissage des individus. Son étude se heurte rapidement à une difficulté, qui est qu’elle se trouve face à « des phénomènes à la fois multiformes et peu formalisés » (Gadrey, 1988, p.14). L’accroissement de l’autonomie et des compétences des salariés est donc une condition nécessaire au développement de la flexibilité qualitative (Everaere, 1997). Ceux-ci doivent donc être en mesure de maîtriser les différentes situations de travail et de répondre aux aléas (ce qui induit de rompre avec la logique taylorienne de séparation entre la conception et l’exécution), afin d’être effectivement mobiles au sein de l’entreprise. La polyvalence et la mobilité sont également en rupture avec la vision classique de la parcellisation des tâches issue du management scientifique. Dans la typologie à laquelle il a recours, Dif (1998) intègre la flexibilité fonctionnelle (ou qualitative) comme sous-dimension de la flexibilité interne. Elle consiste selon lui, et pour un volume donné de travail, à affecter « les salariés de l’entreprise à des fonctions variables en fonction des besoins de la chaîne de production ou des fluctuations de la production » (Dif, 1998, p.233). Comme souvent dans les études portant sur la flexibilité, cette définition est beaucoup plus facilement applicable à des entreprises du secteur industriel qu’à des sociétés de services. Mais le point le point important noté par l’auteur est que la flexibilité qualitative du travail est un élément indispensable à la flexibilité technico-organisationnelle dont nous avons parlé précédemment. En effet, « la polyvalence des salariés constitue l’élément de base pour la mise en œuvre effective de la flexibilité technico-organisationnelle » (Dif, 1998, p.233). Il est par conséquent très difficile de séparer dans les faits la flexibilité au niveau organisationnel de la flexibilité au niveau des individus. De plus, la mise en œuvre de la flexibilité qualitative n’est pas chose aisée. En effet, si de manière théorique la mobilité des salariés en divers points du processus productif est réalisable par le biais de leur plus grande polyvalence, cela se révèle plus difficile dans les faits et trouve ses limites lorsque ce processus devient complexe, et donc que la polyvalence devient plus difficile à acquérir (Everare, 1997).

1.2.2.3. Choix d’une typologie de la flexibilité (figure 2) Afin d’appréhender la flexibilité dans le cadre de cette recherche, il nous a semblé intéressant de combiner les deux typologies présentées précédemment, soit flexibilité interne / externe, et flexibilité qualitative / quantitative. La première étape consiste à différencier la flexibilité externe (ajustement du niveau de l’emploi) de la flexibilité interne (ajustement de l’utilisation et de la rémunération des salariés), la seconde, pour chacune des deux dimensions qui viennent d’être définies, consiste à différencier la flexibilité quantitative de la flexibilité qualitative La flexibilité externe concerne tout d’abord les relations qu’entretient l’organisation avec d’autres entreprises de son environnement. Elle se manifeste alors par des phénomènes de sous-traitance, de filialisation ou d’acquisition. La seconde dimension de la flexibilité

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externe a trait à la gestion de la force de travail. Il s’agit dans ce cas d’observer les variations d’effectifs en fonction de la production, ainsi que la nature des contrats qui lient les individus à l’organisation. La flexibilité interne se subdivise selon sa nature qualitative ou quantitative. Dans sa dimension qualitative, elle a principalement trait, comme cela a été présenté auparavant, au contenu du travail. Les autres éléments pris en compte sont l’autonomie du salarié ainsi que sa mobilité au sein de l’organisation, mais également les actions de formation qui ont été mises en œuvre. L’influence des technologies de l’information sur ces divers éléments fait également partie des composantes à appréhender. La flexibilité interne quantitative se réalise au travers de la flexibilité du temps de travail et de la flexibilité des rémunérations. La première revient à modifier le nombre d’heures travaillées dans l’entreprise sans influer sur les effectifs. On y trouve l’ensemble des formes d’aménagement du temps de travail qui permettent une meilleure adéquation entre le volume d’activité et le nombre de personnes présentes, l’adaptation des horaires pouvant se faire aussi bien sur l’année (temps de travail hebdomadaire plus important certaines saisons) que sur la journée (horaires d’ouverture des services élargis). La flexibilité des rémunérations consiste quant à elle à mettre en relation les performances de l’organisation avec le niveau de rémunérations des individus. Cela se fait par l’introduction d’une part variable dans la rémunération, qui dépend de la performance d’un individu, d’un collectif de travail ou d’une entité plus large. Par conséquent, la part variable peut être strictement individuelle ou alors être identique pour un groupe d’individus.

Figure 2 - Une typologie de la flexibilité

Flexibilité / grandes orientations stratégiques

Flexibilité externe

Flexibilité interne

- Effectifs

- Nature du contrat

(atypique par rapport aux

fonctionnaires) :

contractuels / congé de fin

de carrière

-Filialisation

-Sous-traitance

-Acquisitions

Flexibilité qualitative :

-Contenu du travail

-Autonomie

-Mobilité

-Formation / compétences

-TIC / interface homme-machine

-Relations de travail

Flexibilité quantitative :

-Rémunérations

-Temps de travail : temps effectif,

pauses, formations …

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1.2.2.4. Les modalités de GRH dans la flexibilité Jusqu’à présent, le rôle de la GRH dans les entreprises a été de proposer les outils permettant l’ajustement de la force de travail aux nouvelles contraintes environnementales, techniques et productives de l’organisation. Ainsi, la modernisation du système productif dans les années 80 a été l’occasion pour les entreprises françaises d’engager une rénovation des relations sociales dans l’entreprise (Riboud, 1987) par le biais des outils de participation et de motivation tels que projets et chartes d’entreprise, cercles de qualité, groupes d’expression. De nombreuses recherches en sociologie, économie et gestion ont montré que la tendance forte en la matière était à l’individualisation de la relation entre le salarié et l’entreprise en rupture avec les rapports impersonnels et collectifs des années 70 dans l’objectif de susciter une adhésion aux valeurs et aux objectifs de l’entreprise (Morville, 1985). Les recherches consacrées dans les années 90 à l’étude des modalités de gestion des ressources humaines dans le secteur des services et de la grande distribution, ayant le plus recours à une main-d’œuvre flexible, semblent indiquer une très forte flexibilité des modes de gestion de la main-d’œuvre et la création d’emplois plutôt précaires sur lesquels se reporte une partie les aléas de la demande (Baret, 1997), en complète contradiction avec le niveau requis d’implication du personnel pour satisfaire la clientèle (Alis et Thévenet, 1994). A cet égard, les évolutions dans ce domaine seraient similaires à celles observées dans les autres secteurs : vers une segmentation et une flexibilisation accrue des politiques et des pratiques de GRH (Allouche & Sire éd. 1998 ; Louart, 1994 ; Bournois, 1994). Plus généralement, et quel que soit le type de flexibilité du travail et de l’emploi privilégié par l’entreprise, la fonction Ressources Humaines se trouve au cœur du processus de flexibilisation, ce qui justifie l’intérêt à porter à son étude. Les activités de la RH sont largement différentes selon que la flexibilité a une dimension qualitative ou quantitative. Dans le cas d’une flexibilité fonctionnelle, les activités de la fonction RH suivent ainsi une optique à long terme (actions de formation, de reconversion, afin d’accroître la polyvalence des salariés et préserver l’emploi), alors qu’une flexibilité quantitative externe nécessite une gestion à court terme. En matière de flexibilité interne qualitative, les pratiques de ressources humaines concernent principalement la formation, dont l’objectif va être de développer les compétences des salariés. D’autres pratiques relèvent plus de la hiérarchie et du quotidien des managers de proximité, comme la promotion de la prise de responsabilité, le travail en équipe, etc. La flexibilité interne quantitative va quant à elle impliquer une gestion lourde du temps de travail de chacun des salariés de l’entreprise, ainsi que la gestion de l’individualisation des rémunérations et éventuellement du lien entre la valorisation des compétences et la rémunération. La flexibilisation externe du travail va avoir pour conséquence de mettre l’accent sur l’une des pratiques les plus traditionnelles, c’est-à-dire le recrutement (choix du type de contrat, sélection des candidats, choix entre l’embauche et le recours à l’intérim). Les réflexions précédentes sur la flexibilité, les TIC et les modalités de GRH définissent le champ de la problématique de travail, explicitée dans le chapitre suivant.

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Chapitre 2. Problématique et méthodologie

2.1. Problématique et questionnement : TIC, flexibilité et transformations du travail

2.1.1. Problématique générale Plusieurs questions émergent de la revue de la littérature sur la flexibilité en lien avec la gestion des ressources humaines et les TIC. En effet, quels sont les effets réels des TIC sur la flexibilité des organisations ? Quels sont ces effets sur la GRH ? De quelle manière la GRH utilise les TIC dans la création de nouveaux métiers dans l'organisation ? Quelles sont les formes de flexibilité utilisées par les organisations ? etc. Deux questions nous intéressent particulièrement dans le cadre de cette recherche : le lien entre la flexibilité, les TIC et l'émergence de nouveaux métiers ; et la manière dont la gestion des ressources humaines est impliquée dans le processus de flexibilisation des organisations.

2.1.1.1. Flexibilité, TIC et évolution des emplois La première question à se poser est de savoir quel type de flexibilité est mis en œuvre dans l'organisation. Le processus de flexibilisation, sous l'effet des TIC, touche t-il :

- Au niveau des emplois dans et hors de l’entreprise (flexibilité externe) ? par exemple, en quoi les TIC ont-elles favorisé la création, la suppression ou la refonte de certains emplois du fait de la mise en place de réseaux informationnels, de bases de données clients, de l’automatisation de certaines tâches ?

- Au contenu des emplois (flexibilité interne qualitative) ? Quelles sont les

caractéristiques du travail effectué ? le contexte dans lequel il s'opère (relations de travail, relations hiérarchiques) ? les compétences requises pour exercer cet emploi ? Y-a-t-il une évolution significative du fait de l'utilisation des TIC ?

Ce premier axe nous permet ainsi de cerner l’évolution des emplois dans l’entreprise et d’identifier quels sont ceux qui sont le plus soumis à la contrainte de flexibilité.

2.1.1.2. Flexibilité et politiques de gestion des ressources humaines La flexibilisation de la structure organisationnelle suppose la transformation, l’émergence ou la disparition de certains emplois dans l’entreprise (axe 1 de la problématique), mais elle suppose également une évolution conséquente des conditions de travail, de rémunération, de carrière et de formation. La question qui est alors posée est de savoir dans quelle mesure ces évolutions sont accompagnées, provoquées ou subies par l’entreprise et par la DRH ?

- Quelles sont les modalités particulières de la relation d'emploi : temps de travail, rémunérations… liés à la contrainte de flexibilité ? Y-a-t-il des différences avec d'autres emplois de l'entreprise ? (flexibilité interne quantitative)

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- Au niveau de la formation : ces métiers font-il l’objet d’une politique

particulière en termes de formation ? cela traduit-il un changement ou une évolution sur la nature et le niveau des compétences requises ? (flexibilité interne qualitative)

- Au niveau du recrutement : les critères et les procédures ont-ils évolué ? Si

c’est le cas, les TIC ont-elles eu un effet sur cette transformation ?

- Au niveau des carrières : quelles sont les trajectoires professionnelles des individus ? quelles évolutions leur sont proposées au sein de l’organisation ? quelles sont les politiques de mobilité ? (flexibilité interne qualitative)

Il s’agit ainsi surtout de voir si les caractéristiques de la relation d’emploi sont amenées à évoluer sous l’effet des TIC et la contrainte de flexibilité, et quel est le rôle de la fonction RH dans cette évolution.

2.1.1.3. Flexibilité et performance Un dernier aspect traité dans cette problématique est le lien entre flexibilité et performance. Quels sont les effets de la flexibilité sur la performance individuelle (objectifs individuels, satisfaction, motivation, stress…) et collective (productivité, qualité de service) ? Et en quoi les TIC agissent sur ces performances ? De manière synthétique, après avoir pris connaissance des changements organisationnels voulus par les dirigeants et des Technologies de l’Information et de la Communication mises en place, les objectifs de la recherche sont donc :

- De déterminer les conséquences de cet ajustement organisationnel et de l’utilisation des TIC sur le travail des salariés, afin de cerner les dimensions de la flexibilité de la force de travail ;

- D’évaluer les conséquences de cette flexibilité ; ⇒ Sur les individus (relation à leur emploi, dimensions psychologiques, etc.) ⇒ Sur la performance des individus, des collectifs de travail et des entités considérées

- D’étudier le rôle de la fonction Ressources Humaines dans la gestion du changement.

2.1.2. La problématique dans le contexte d’une grande organisation en mutation : France Télécom

Le secteur des télécommunications est depuis quelques années le cadre d’une concurrence intense entre opérateurs. Dans ce contexte, les structures de France Télécom issues de l’organisation pyramidale de l’ancienne Direction Générale des Télécommunications ont évolué vers une structure décentralisée, désormais organisée en sept branches : Mobiles, Services Fixes et Internet, Distribution, Entreprises, Développement, réseaux, Ressources (doc web FT). A ces sept branches vient s’ajouter la Direction des Ressources Humaines. Les dirigeants ont la volonté de faire évoluer l’entreprise, de la rendre plus flexible afin de mieux répondre aux variations d’un environnement ouvert et turbulent. France Télécom se doit d’être plus réactive, et ceci à tous les niveaux, de l’opérationnel au stratégique. Ainsi, si la stratégie est pour l’entreprise de rester focalisée sur le métier des télécoms,

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l’importance prise par les différents segments d’activité a subi de fortes modifications au cours des dernières années. La téléphonie fixe en France, activité historique de France Télécom, qui représentait plus de 90% du chiffre d’affaires du groupe en 1995, occupe une place de plus en plus réduite (désormais moins du tiers du chiffre d’affaires) au profit d’activités à plus forts potentiels de développement telles que la téléphonie mobile (Orange), l’accès et le contenu liés à Internet (Wanadoo), le service aux grandes entreprises multinationales (Global One / Equant). Les axes stratégiques qui sont poursuivis sont :

- La valorisation de la position de leader de France Télécom en France - L’exploitation des trois pôles de croissance que sont les mobiles, Internet et

l’international - Le développement des services de mise en réseau

Dans la situation concurrentielle au sein de laquelle évolue France Télécom, l’opérateur qui se trouvait historiquement en position monopolistique se trouve désormais confronté à la nécessité de répondre au mieux aux attentes des clients. Les concurrents ne manquent pas, quel que soit le segment d’activité (ouverture du marché des communications téléphoniques aux niveaux local, national et international, concurrence vive sur tous les marchés liés à la nouvelle économie, etc.). L’engagement de plein pied dans cet environnement concurrentiel implique donc une capacité de réaction beaucoup plus rapide qu’auparavant. De plus, France Télécom se trouve également face à la nécessité de rationaliser ses coûts afin d’atteindre l’objectif clairement établi qui est de continuer à mieux réussir économiquement que ses concurrents européens. Pour résister à l’intensité de la concurrence, des efforts commerciaux d’envergure ont en effet dû être réalisés, ce qui a engendré des frais importants. L’ensemble de ce contexte stratégique et de ses implications a pour corollaire l’adaptation de l’entreprise à ces nouvelles conditions d’exercice de son activité. Ces adaptations se manifestent au niveau structurel depuis 1995, avec une structure dirigée vers le client, axée sur les processus, favorisant notamment la constitution de groupes de projets transverses à l’ensemble des fonctions de l’entreprise. Elles s’exercent également à un niveau organisationnel, avec la volonté par exemple de prendre les décisions au plus près du terrain, de développer les logiques d’expérimentation. Les Technologies de l’Information et de la Communication sont considérées dans cette optique comme un ensemble d’outils qui soutiennent le changement. De par leur possibilités techniques, elles favorisent un ajustement organisationnel allant dans le sens d’une plus grande réactivité. Elles facilitent ainsi les évolutions de l’organisation du travail voulues par les dirigeants, comme par exemple une décentralisation de la décision, une plus grande autonomie, un développement du travail en équipe, des compétences, de l’apprentissage, etc. Ces évolutions se constatent par exemple au travers du développement du télétravail sous ses diverses formes (travail nomade, alterné, coopératif) qui transforme l’organisation du travail traditionnelle ainsi que les liens interindividuels. Ces changements organisationnels et techniques modifient le travail des salariés et favorisent un accroissement de la flexibilité qualitative de la force de travail. Celle-ci peut se manifester par un enrichissement du travail (élargissement des tâches, plus grande latitude dans la manière de réaliser le travail, auto-contrôle, etc.). Il ne faut cependant pas perdre de vue que l’entreprise est composée de différents groupes de salariés (cadres supérieurs, encadrement intermédiaire, personnel en contact avec les clients, personnel des centres d’appel, etc.). De plus, l’entreprise est scindée en plusieurs branches, aux métiers différents. Les TIC utilisées sont donc probablement très variables selon les métiers, les fonctions, les branches. Par conséquent, les dimensions de la flexibilité et les transformations du travail sont vraisemblablement très hétérogènes. Les métiers existants peuvent se transformer grâce aux modifications dans l’organisation du travail permises par

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le recours aux TIC. C’est le cas par exemple de l’encadrement intermédiaire et de proximité qui se recentre sur sa fonction de manager, une part importante des tâches administratives liées à la gestion des ressources humaines qui l’occupait auparavant étant désormais traitée par des Centres Supports en Ressources Humaines, un système de workflow reliant la phase de demande par le salarié, d’acceptation par le manager, et de traitement administratif par le CSRH. De nouveaux métiers peuvent également être créés et se développer comme c’est le cas dans les centres d’appel Ola ou Wanadoo, de même que dans les CSRH. Par leur nature même, les salariés disposent d’une liberté d’action, éventuellement au moment de la conception des technologies, mais principalement lors de leur implémentation puis de leur utilisation. Ils ne sont donc pas passifs face à l’introduction des TIC, puisqu’ils peuvent les rejeter ou détourner l’utilisation pour laquelle elles sont conçues. De cette liberté des individus, associée aux modifications dans les rapports au travail entraînées par l’utilisation des TIC, découle l’intérêt à porter à l’intervention de la fonction Ressources Humaines (au niveau du Groupe comme à celui des Directions Régionales), que sa perspective soit de favoriser l’utilisation des TIC ou d’en gérer les conséquences sur les salariés. Ces flexibilités (organisationnelle et individuelle), permises ou accrues par les Technologies de l’Information et de la Communication, permettent une meilleure réactivité aux aléas, ce qui joue favorablement sur la performance à court terme de l’entreprise. A plus long terme, le partage des expériences, la possibilité de développement des compétences et de l’apprentissage, sont également des facteurs potentiellement positifs. Par ailleurs, les évolutions de la nature du travail jouent sur la relation que les salariés entretiennent avec leur emploi (satisfaction, motivation, stress, etc.), ce qui se répercute sur la performance. Ainsi, l'intérêt d'un terrain comme France Telecom est de cerner quels types de flexibilité(s) l'entreprise va mettre en œuvre, compte tenu des contraintes fortes en matière de personnel qui pèsent sur elle, et quels vont en être les effets sur la performance. La figure 2 qui suit illustre cette situation où la flexibilité se dessine en premier lieu à travers les grandes orientations stratégiques, qui induisent des formes de flexibilité opérationnelle différentes (interne/ externe, qualitative/quantitative). Quelles que soient les modalités choisies, la flexibilité au sein de l'organisation a un effet direct sur la performance individuelle et collective. Dans ce processus Stratégie - Flexibilité - Performance, la fonction RH a un rôle à jouer : que ce soit en tant qu'acteur du changement, accompagnateur de la flexibilité et des évolutions qui en découlent ou en tant qu’objet de la flexibilité. En tant que fonction, la RH est elle-même amenée à introduire de la flexibilité dans ces procédures (reengeniering), aidée par les TIC (création des Centres de Services de Ressources Humaines) et à faire évoluer ces emplois (qui sont dorénavant mutualisés dans un centre d'appel "interne"). La fonction RH est donc au cœur de la problématique comme terrain d'expérimentation d'abord (objet de flexibilité), puis comme acteur ou accompagnateur des évolutions organisationnelles ensuite, induites par l'exigence de flexibilité.

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Figure 3 - Synthèse de la problématique au sein de France Telecom

Flexibilité / grandes orientations stratégiques

Contexte / Contraintes

Evaluation de la performance

Acteur :

-Valorisation, incitation

à la flexibilité interne

-Gestion du parcours

professionnel

-Introduction des TIC

Performance au niveau de l’individu :

- Satisfaction, motivation, implication

- Différence entre les objectifs et ces facteurs de performance

- Stress, burn out

Facteurs de différenciation : statut, âge, expérience

professionnelle antérieure …

Performance dans l’organisation du travail :

- Productivité

- Qualité de service

- Apport des TIC aux différents niveaux

Objet :

-Reengineering

- CSRH

Flexibilité externe Flexibilité

interne

- Effectifs

- Nature du

contrat

(atypique par

rapport aux

fonctionnaires)

: contractuels /

congé de fin de

carrière

- Filialisation

- Sous-

traitance

- Acquisitions

Flexibilité

qualitative :

-Contenu du travail

-Autonomie

-Mobilité

-Formation / compétences

-TIC / interface homme -

machine

- Relations de travail

Flexibilité

quantitative :

- Rémunérations

- Temps de travail : temps

effectif, pauses,

formations …

Fonction RH- acteur - objet

Adaptation aux clients/salariés : Centres d'appel, CSRH

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2.2. Protocole méthodologique

2.2.1. Démarche générale L’étude monographique de France Télécom est fondée sur la collecte de données aussi bien qualitatives que quantitatives. Elle consiste en des éclairages de différentes situations caractéristiques de l’évolution actuelle de France Télécom, via le recours aux technologies de l’information (télétravail, nouveaux métiers dans les centres d’appels, transformation de la fonction managériale, nouvelles formes de travail …). Notre point d’entrée pour mener à bien cette étude se situe au niveau de la Direction des Ressources Humaines Groupe. Bernard Merck, chargé de mission au sein de la Direction des Ressources Humaines Groupe, plus spécifiquement en charge du reengineering de la fonction Ressources Humaines, est la première personne qui a été jointe. Intéressé par le projet qui lui a été exposé à cette occasion, il nous a mis en contact avec sa collaboratrice Françoise Ridet. La rencontre avec Françoise Ridet s’est déroulée le 26 janvier 2001, à Paris. Après l’exposé de la thématique de ce contrat de recherche, une liste de responsables susceptibles d’être intéressés par la problématique et à même de fournir un terrain d’étude intéressant a été dressée, composée des contacts suivants :

- François Viquesnel, France Télécom Recherche & Développement : Responsable de la gestion du recrutement et de la mobilité sur Intranet

- Jean-Bernard George-Roux, DASSI (Délégation aux Activités de Services et Systèmes d’Informations) : Responsable de la refonte des process et des outils informatiques pour la gestion RH (@noo....), désormais Directeur de la stratégie de DRH Services à FTSRH

- Michel Jeannin, Direction Régionale Picardie : DRH de la DR Picardie, implantation des Call Centers en région

- Alain Béréziat, Direction de l’Innovation : Directeur du projet Télétravail, Responsable du Domaine Innovation Terrain

- Patrick Lorenzo, France Télécom Formation : évolutions du process formation avec les TIC

La poursuite de la recherche s’est déroulée en deux phases : une première phase exploratoire, articulée autour d’entretiens notamment avec certains des contacts qui viennent d’être cités, une seconde phase empirique plus large sur différents terrains, combinant le recueil de données qualitatives et quantitatives.

2.2.2. Première étape, la phase exploratoire Cette phase exploratoire doit permettre de comprendre le contexte dans lequel évolue France Télécom et les principales évolutions qui traversent l’entreprise, et notamment d’appréhender de manière large les effets des technologies de l’information sur l’organisation étudiée. Elle amène à préciser la notion de flexibilité telle qu’elle est mise en œuvre au sein de France Télécom, ainsi qu’à affiner les éléments de problématique et à définir les terrains à explorer. Le travail exploratoire a été réalisé auprès de différents cadres de l’entreprise. Parmi les contacts précédemment cités, ont été rencontrés : Alain Béréziat ; Jean-Bernard George-Roux et une consultante RH à France Télécom Services RH (FTSRH) ; Michel Jeannin accompagné du Directeur de l’Unité de Services par Téléphone (UST) Picardie. Les objectifs de ces entrevues étaient multiples :

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- Recueillir le discours des responsables sur les politiques mises en œuvre, tant en matière d’introduction et de gestion des TIC, qu’en matière d’organisation du travail et de gestion des ressources humaines ;

- Définir les terrains appropriés à notre recherche empirique, et obtenir l’accord des responsables pour intervenir au sein même de leurs services ;

- Obtenir de la part des responsables d’autres contacts afin d’élargir nos champs d’actions.

A partir des pistes proposées par les personnes rencontrées, d’autres entretiens de nature exploratoire ont été réalisés avec :

- Thierry Lautard, Responsable du projet CSRH (Centres de Services en Ressources Humaines) à FTSRH ;

- Gérard Laporte, Responsable du projet GTT (Gestion du Temps de Travail) à FTSRH ;

- Martine Pavageau, Responsable du département "Soutien / Contrôle" à la Direction Régionale de Besançon.

Le projet CSRH a trait à la transformation de la fonction Ressources Humaines avec la concentration des traitements administratifs sur des sites spécialisés. L’entretien réalisé avec la responsable du département "Soutien / contrôle" est lui aussi axé sur l’évolution de la fonction Ressources Humaines en cours depuis quelques années. Le projet GTT est quant à lui un exemple d’apport des technologies de l’information à l’évolution des missions des managers. Dans tous les cas, les entretiens réalisés étaient de type semi-directif. Ils se sont déroulés sur le lieu de travail des responsables, et étaient menés pour les trois premiers conjointement par trois membres de l’équipe, et pour les derniers par un seul chercheur. L’exploitation des données issues de l’ensemble des entretiens exploratoires est présentée par la suite. Ils mettent l’accent sur le contexte auquel est soumise l’entreprise et la stratégie adoptée, au cœur de laquelle se trouvent les redéploiements de personnels. Ces entretiens présentent également comment la fonction Ressources Humaines est un objet de flexibilité.

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Figure 4. Méthodologie de la recherche

(3°étape)

Evolution de la Fonction RH

Evolution du management intermédiaire

Phase exploratoire : 6 entretiens Directeur du projet Télétravail F.T.S.R.H (ex-DASSI ) : 2 personnes DRH Direction Régionale Picardie et

Directeur UST Picardie Responsable du projet CSRH Responsable du projet GTT Responsable "Soutien/Contrôle" en

DRH de région

Variables analysées : Les caractéristiques du travail

G.T.T Responsable projet

G.T.T à F.T.S.R.H Etude dans 2 C.S.R.H.

Responsable projet C.S.R.H à F.T.S.R.H

Etude dans 3 Centres d’appels : Orange,

Wanadoo, le 12

(1° étape)

Thèmes traités : Refonte de la fonction RH et TIC Contenu, organisation et conditions

de travail Modalités de GRH associées à ces

emplois

(2°étape)

Thèmes traités : Contenu, organisation et conditions de travail Modalités de GRH associées à ces emplois

3 pistes de travail

57 Entretiens semi-directifs 3 responsables de plate-forme 6 responsables d’équipe 1 analyste qualité 1 superviseur des flux 1 soutien métier applicatif 45 téléopérateurs ou téléconseillers

J.D.S 67 questionnaires

25 Entretiens semi-directifs 2 Directeurs de CSRH 1 responsable soutien 3 responsables d’équipe 2 soutiens 1 accompagnateur SI 16 assistantes de gestion

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2.2.3. Deuxième étape, la phase empirique : trois lieux d’observation De ces différents entretiens exploratoires, il apparaît que trois terrains d’analyse (ou lieux d’observation) sont susceptibles de correspondre à la problématique de notre recherche, comme cela est illustré par le schéma présentant la méthodologie de la recherche (Figure 4) :

• Les centres d’appels Les centres d’appels participent à la performance de service de France Télécom par l’assistance permanente aux clients, aussi bien au niveau technique qu’administratif. Leur création a permis également de répondre aux besoins de reclassement d’un certain nombre de personnels dont les postes avaient évolué ou disparu au cours des reconfigurations de France Télécom (techniciens et administratifs). Il est donc intéressant de voir comment ces salariés ressentent leur nouveau métier (image dévalorisante du travail en centres d’appels ?) et quelles perspectives ils y voient. De plus, la présence de trois centres d’appels regroupés dans la même unité (UST Picardie) est un élément intéressant afin de procéder à des comparaisons. En effet, les salariés n’ont pas les mêmes profils : techniciens experts chez Wanadoo, administratifs chez Ola, personnel plus ancien au service du 12. La comparaison peut également s’effectuer en termes de stade de développement de chacun des centres : la plate-forme Ola existe depuis moins d’un an, la plate-forme Wanadoo depuis trois ans, celle du 12 depuis beaucoup plus longtemps. Les centres d’appels, dont l’existence est inhérente à la fois à la flexibilité stratégique de l’entreprise et à la flexibilité des ressources humaines, permet l’étude des nouveaux emplois créés chez France Télécom (contenu, organisation et conditions de travail, ainsi que les modalités de GRH associées). Le recueil de données a été réalisé durant la même semaine dans les trois centres d’appels. Au total ce sont 57 entretiens semi-directifs qui ont été réalisés avec différentes catégories de personnels (des responsables de plate-forme aux télé-conseillers, mais également des fonctions hors ligne hiérarchique comme un analyste qualité). Les résultats issus de ces entretiens sont présentés par la suite. De plus, 67 questionnaires JDS ont été traités dans le but d’analyser les caractéristiques du travail.

• Les Centres de Services en Ressources Humaines Les Centres de Services en Ressources Humaines ont deux fonctions : traitement administratif de certaines tâches RH réalisées auparavant en Unités Opérationnelles (UO) ; conseil en tant qu’expert RH aux managers et autres catégories de salariés. De manière plus large, leur création s’intègre à la reconfiguration de la fonction RH au niveau de l’ensemble de l’entreprise, la RH devenant un prestataire de services interne. Dans les processus RH soutenus par des workflows, le fait que ces CSRH s’occupent des traitements administratifs permet aux managers de se concentrer sur l’aspect management de leur fonction qui était auparavant restreint par la nécessité de réaliser ces tâches administratives. Les CSRH créent donc les conditions d’une évolution du travail de l’encadrement intermédiaire et de proximité. L’étude des CSRH permet de faire le lien entre la flexibilité de la fonction Ressources Humaines et le recours aux technologies de l’information. De plus, au niveau de leur fonctionnement interne, ils sont également un terrain d’étude du contenu, de

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l’organisation et des conditions de travail, ainsi que des modalités de GRH associées aux emplois.

• Le projet GTT relatif à la gestion du temps de travail sur Intranet Le projet GTT se trouve également à l’intersection de la reconfiguration de la fonction Ressources Humaines et de l’évolution du métier des managers. Dans le projet "RH demain" de reconfiguration de la fonction Ressources Humaines, les managers sont de plus en plus partie prenante aux modalités de GRH concernant leurs équipes, ce qui se manifeste par une charge supplémentaire de travail. Les technologies de l’information permettent d’alléger cette charge en automatisant certains processus RH et en offrant du soutien sur d’autres aspects. L’outil GTT, installé sur l’Intranet de France Télécom, doit permettre aux managers de simplifier la gestion du temps de travail de leurs équipes, activité complexe et chronophage depuis l’accord d’OARTT. Un entretien a été réalisé avec le Responsable du projet, de même que la participation à deux journées de formation des managers. Le suivi de la mise en place et de l’utilisation de l’outil GTT était initialement prévu par le biais d’entretiens semi-directifs avec des managers encadrant des équipes aussi bien techniques que commerciales. Ces entretiens n’ont cependant pas été réalisés, du fait notamment du retard pris par le déploiement de l’outil GTT, mais surtout de la réticence des managers à abandonner les outils informatiques qui avaient été développés en local (généralement sous la forme de tableaux Excel) et à se donner le temps de s’approprier l’outil GTT, dont le maniement s’avère complexe. Par ailleurs, le Responsable du projet considère GTT comme un outil venant faciliter le travail des managers sur une activité qui n’est pas au cœur de leur mission (le planning de leurs équipes), mais n’ayant pas d’influence significative sur l’évolution de leur travail. Malgré les apports de l’outil GTT (planning pouvant se répéter à l’infini, compteurs sur les différents types de congés, alertes en cas de contradiction du planning avec l’accord d’OARTT, etc.), ceci peut expliquer pour partie la faible adhésion des managers au regard des efforts à réaliser pour maîtriser l’outil GTT. Compte tenu des éléments qui viennent d’être exposés, le projet GTT ne fera pas ici l’objet d’une présentation spécifique. L’entretien réalisé avec le Responsable de projet a par contre été intégré aux résultats concernant la transformation de la Fonction Ressources Humaines.

2.2.4. Les entretiens semi-directifs : conception et analyse

• La construction des guides d’entretiens Un guide d’entretien a été conçu pour chaque catégorie d’acteurs rencontrés et ce, pour chaque type de terrain d’étude (Centre d’appel, CSRH, projet GTT). Une série de thèmes sont communs à l’ensemble des entretiens menés, permettant ainsi une confrontation des discours selon les types d’interlocuteurs. Par ailleurs, une série de questions spécifiques (ou de formulations spécifiques d’une même question) sont ajoutées dans chaque guide d’entretien. L’ensemble des guides d’entriens sont fournis en annexes (Annexes 1 à 4 et 5 à 8).

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• L’analyse du contenu des entretiens réalisés

L’ensemble des entretiens réalisés a fait l’objet d’une retranscription exhaustive, constituant ainsi un matériau de plus de mille pages au total. Une grille d’analyse commune à tous les entretiens a ensuite été construite autour des éléments clés de la problématique de la recherche. Cette grille est fournie en intégralité en Annexe 10. Elle est structurée autour des thèmes suivants :

0. Caractéristiques individuelles de l’interviewé et facteurs de différenciation : a. Identité b. Ancienneté c. contexte d’arrivée sur le plateau

1. Flexibilité qualitative interne a. Nature du travail b. Caractéristiques du travail c. Contexte du travail d. Autonomie / Contrôle e. Formation / Compétences

2. Flexibilité quantitative a. Redéploiements / gestion des effectifs b. Nature du contrat de travail c. Rémunérations d. Gestion du temps de travail

3. Evaluation de la performance a. Performances perçues b. Motivation c. Satisfaction d. Implication e. Stress / burn out f. Améliorations suggérées

4. Modalités et rôles de la fonction ressources humaines a. Valorisation du métier b. Gestion de carrière c. Accompagnement / outils de la mobilité d. Accompagnement de l’introduction des TIC e. Apports des TIC pour la GRH

5. Autres – Divers

2.2.5. Le recours au JDS, Job Diagnostic Survey

2.2.5.1. Rappel : Un outil d’enquête avalisé : le « Job Diagnostic Survey » pour mesurer l’impact des TIC sur le contenu et les caractéristiques du travail

Si les chercheurs s'accordent à considérer que les nouvelles technologies sont susceptibles d'avoir un effet sur les personnes travaillant dans les organisations, il est plus difficile de préciser la nature de ces effets. Deux articles déjà anciens ont tenté d'apporter une réponse à ce problème. Ives et Olson (1984) ont adopté deux indicateurs : la qualité du système et l'acceptabilité du système. L'acceptabilité du système inclut l'utilisation du système, son impact sur les attitudes des utilisateurs, et la satisfaction vis-à-vis de l'information. Dans un article plus tardif, Zmud et Kwon reprennent trois indicateurs de la réussite d'un système d'information : l'utilisation, la satisfaction des utilisateurs et la performance des utilisateurs (Kwon et Zmud, 1987). Le premier de ces trois indicateurs, la mesure de l'utilisation du système d'information, outre qu'il pourra poser des problèmes de mesure pratiques et éthiques, ne donne pas d'indication sur la qualité du travail exécuté.

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Quant à la performance, les études montrent que ce résultat organisationnel est très difficile à mesurer (Srivasta et al., 1977). De plus, dans les activités de service, le concept même de performance est difficile à cerner. Le troisième indicateur, la satisfaction des utilisateurs, est souvent considéré par les chercheurs en Système d'Information comme un bon indicateur de la réussite de l'implantation des technologies de l'information (Bostrom et Heinen, 1977 ; Boddy et Buchanan, 1984 ; Gatian, 1994). Nous sommes donc en présence d'un concept, la satisfaction, qui est commun à la GRH et à l'étude des SI (Système d'Information). Notre travail qui se situe à l'intersection de ces deux disciplines de gestion, va lui aussi s'intéresser à cette variable.

La satisfaction au travail Le concept de satisfaction au travail a fait l'objet en gestion de nombreux travaux tant en France qu’à l'étranger (Roussel, 1994). Parmi les chercheurs en GRH, la définition de Locke fait autorité en la matière : « C'est un état émotionnel positif ou plaisant résultant de l'évaluation faite par une personne de son travail ou de ses expériences de travail » (Locke, 1976, p. 1300). Dans la mesure où l'utilisation des TIC entraîne des changements au niveau de la satisfaction du travail, il y lieu de s'interroger sur les mécanismes de cette modification (Ghani, Al-Meer, 1989). D'une façon générale, le lien de causalité entre les modifications technologiques mises en œuvre dans le travail et les modifications des variables psychologiques comme la satisfaction n'est pas clairement expliqué. Parsons (1988) a fait observer le manque relatif d'études empiriques ayant examiné les changements dans le travail résultant des technologies de l'information. De ce fait, nous avons peu d'informations sur la manière dont elles affectent les personnes dans leur travail. Kahn et Robertson retiennent l'hypothèse selon laquelle les modifications technologiques entraînent des changements dans la situation de travail et plus particulièrement dans les caractéristiques du travail (Kahn et Robertson, 1992). Ces caractéristiques du travail (autonomie, feed-back) vont à leur tour entraîner des modifications dans les attitudes. L'étude et la mesure des caractéristiques du travail est un domaine qui a déjà fait l'objet de nombreux travaux aux Etats-Unis où il constitue un domaine particulier de la GRH : la structuration du travail2. Parmi les théories traitant de la structuration du travail l'une des plus répandue est certainement le modèle des caractéristiques du travail3 de Hackman et Oldham (Hackman et Oldham, 1975, 1976, 1980).

2ou Job Design. 3 ou Job Characteristic Model

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Le modèle des caractéristiques du travail

Caractéristiquesdu travail

Etatspsychologiquescritiques

Résultats dans letravail

Variété descompétences.

Identité de latâche.

Importance de latâche

Autonomie.

Feed-back

Grandemotivation interne

Connaissance desrésultats

Responsabilité visà vis des résultats

Intérêt du travail

Modérateurs:1.Connaisance etcompétence.2.Besoind'accomplissementde l'employé.3. satisfaction vis àvis du "contexte".

Faibleabsentéisme etroulement depersonnel

Grandesatisfaction avecle travail

Grande qualité dela performance autravail

Figure 5 - Le modèle de Hackman et Oldham Succinctement, le MCT considère qu'un ensemble de caractéristiques du travail (identité de la tâche, variété des compétences, autonomie...) influence un ensemble d'états psychologiques intermédiaires qui, à leur tour, influencent la satisfaction au travail et la motivation interne (Lévy-Leboyer, 1984 p.126). Hackman et Oldham ont mis à la disposition des chercheurs un questionnaire, le JDS4, qui mesure les caractéristiques du travail. De nombreuses études se sont attachées à mettre à l'épreuve le MCT (Mottay, 1995). Il s'agit d'un instrument fiable et précis susceptible de mesurer les caractéristiques du travail (Mottay, 1999). En ce qui concerne l'étude de l'impact des TIC sur la nature du travail des salariés, plusieurs études se référant au MCT tendent à montrer que les changements techniques dans le travail d'une personne peuvent influencer les caractéristiques du travail qui à leur tour ont un impact sur la satisfaction (Attewell et Rule, 1984 ; Franz et al., 1986 ; Yaverbaum, 1988 ; Medcof, 1989 ; Yaverbaum et Culpan, 1990 ; Kahn et Robertson, 1992). Par exemple, Yaverbaum (Yaverbaum, 1988) a conclu à l'aide du JDS que les utilisateurs finals de SI considèrent leur travail comme étant plus satisfaisant que la plupart des travailleurs. Le questionnaire dans sa version française à déjà été utilisé pour une analyse socio-technique sur un site pilote de France Télécom. Cette étude, menée en collaboration avec l'Organisme National de Soutien en Ressources Humaines de France Télécom et l’un des enseignants-chercheurs associé à ce projet de recherche, analysait l'impact d'un nouveau logiciel sur le contenu du travail des opérateurs (Allaire & Mottay, 1995). En se

4 Le JDS (Job Diagnostic Survey) est l'instrument de mesure des caractéristiques du travail élaboré par Hackman et Oldham, 1980. Il existe une version française de ce questionnaire (Mottay, 1999).

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basant sur le modèle MCT, la modification du système d'information serait donc à même de modifier la satisfaction au travail, en modifiant au préalable les caractéristiques du travail. Si l’on admet l’hypothèse que l’introduction des TIC au sein de l’organisation est de nature à provoquer des changements à la fois sur l’organisation et sur le contenu du travail, alors ces deux modifications entraînent un changement dans les rapports unissant l’employé à l’organisation, mais aussi dans le rapport qu’il entretient avec son emploi. En ce qui concerne ce dernier point, il convient d’appréhender la nature exacte de ces changements. Le JDS est précisément un outil permettant de mesurer dans quelle mesure des facteurs importants de l’emploi tels que la variété des compétences requises par la tâche, l’autonomie, l’importance sociale de la tâche et le rétrocontrôle, sont susceptibles d’être modifiés par l’introduction des nouvelles technologies. Dès lors que des modifications dans la nature de la tâche sont mises en évidence, on assiste à des modifications psychologiques consécutives chez les personnes concernées. Des facteurs psychologiques clefs, comme l’intérêt du travail, la responsabilité vis-à-vis des résultats et la capacité d’autocontrôle sont modifiés. L’ensemble de ces modifications entraîne dans changements dans la satisfaction au travail et dans la motivation intrinsèque relative à celui-ci. Ces résultats entraînent à leur tour une baisse de performance au travail d’un point de vue qualitatif (baisse de l’implication et de l’engagement par exemple. Cette baisse de performance peut se mesurer, de façon classique en GRH, à l’aide d’indicateurs quantitatifs comme l’absentéisme et le roulement de personnel. Les résultats issus du JDS nous permettront de préciser la nature des modifications et les effets sur la performance dans l’emploi.

2.2.5.2. L’apport du JDS dans le protocole méthodologique L’utilisation du JDS dans le cadre de cette recherche a été réalisée lors de l’étude des différents centres d’appels situés à Amiens, afin d’analyser les liens entre les caractéristiques du travail (en relation avec les TIC utilisées) aux différents postes, et les résultats du travail, notamment en termes de motivation et de satisfaction. Les données recueillies par le biais du JDS, après traitements statistiques, permettent d’analyser ces liens et d’établir un certain nombre de comparaisons. Sont par exemple comparées l’image qu’ont les conseillers (salariés répondant aux appels des clients) de leur travail, à celle que leurs responsables hiérarchiques s’en font. Comme cela a été mentionné auparavant, le site d’Amiens présente la particularité d’accueillir trois centres d’appels aux caractéristiques différentes. Là encore, le JDS constitue un instrument précieux afin de procéder à des comparaisons entre les situations de travail de salariés qui exercent leur activité dans des centres d’appels répondant à des demandes différentes (question administratives, techniques …), et se situant à des stades différents de leur histoire. Le mode d’administration du questionnaire a été défini en accord avec les Directeurs des trois centres d’appels, en fonction des contraintes spécifiques à chacun d’entre eux. Pour les plates-formes Wanadoo et Orange, les questionnaires ont été diffusés auprès de l’ensemble des salariés en les déposant dans leurs boîtes personnelles destinées au courrier interne. Les questionnaires étaient accompagnés d’une enveloppe pré-affranchie permettant aux répondants de nous retourner directement le questionnaire sans avoir à le faire transiter par leur hiérarchie. La méthodologie mise en œuvre au 12 a été différente, puisqu’il a uniquement été possible d’administrer le questionnaire en face-à-face aux personnes avec lesquelles se sont déroulés les entretiens. Le questionnaire utilisé est fourni en Annexe 5.

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PARTIE 2 : RECONFIGURATION ET CSRH CHEZ FRANCE TELECOM.

LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES COMME OBJET DE FLEXIBILITE ?

Cette deuxième partie vise à étudier la Fonction Ressources Humaines en tant qu’objet de flexibilité à l’intérieur de France Télécom. Cette évolution de la FRH ne peut se comprendre qu’au regard de la stratégie de développement initiée au milieu des années 1990 par l’entreprise en vue de devenir un acteur paneuropéen des télécommunications. Les résultats présentés ci-dessous se basent sur un suivi de l’actualité de France Télécom (communication de l’entreprise, presse, etc.) et, plus fondamentalement, sur la mise en œuvre de la méthodologie de recherche présentée auparavant. Plusieurs entretiens exploratoires ont été menés auprès de cadres supérieurs chez France Télécom, dont le but était de poser et de mieux comprendre le contexte stratégique et organisationnel de l’entreprise et d’y inscrire les opérations de déploiements du personnel d’une part, et de reengineering de la FRH d’autre part (Chapitre 3.). Par ailleurs, deux Centres de Services Ressources Humaines ont été analysés par le biais d’entretiens semi-directifs réalisés avec les différentes catégories de personnels les constituant (Chapitre 4.). Chapitre 3. Une nouvelle stratégie qui implique une reconfiguration de la Fonction ressources Humaines

3.1. Une stratégie orientée vers le client, permise par des déploiements de personnels

3.1.1. Rappels historiques et orientations stratégiques Sans vouloir présenter un historique exhaustif de France Télécom, ni réaliser une étude stratégique approfondie, rappelons tout de même les principaux jalons qu’a connus l’entreprise, de même que ses actuelles orientations stratégiques, qui permettent tous deux de mieux comprendre le mouvement de flexibilisation que connaît l’entreprise.

3.1.1.1. L’ouverture à la concurrence du marché des télécommunications comme source des transformations actuelles de l’entreprise

L’événement majeur qui a marqué l’entreprise au cours des dix dernières années est sans nul doute son passage de la sphère publique, dans une situation monopolistique, à la sphère privée et ouverte à la concurrence. Cette évolution trouve ses sources dans la déréglementation des principaux marchés mondiaux des télécommunications depuis le milieu des années 1980, le départ étant donné en 1984 avec l’ouverture à la libre concurrence du marché des produits et services de télécommunications aux Etats-Unis. Après la publication d’un Livre Vert en 1987 sur le rôle des télécommunications dans la construction européenne, la concurrence sur les différents segments de la téléphonie est

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progressivement introduite au sein des pays de l’Union Européenne à partir de 1988. En juillet 1996, la loi sur la réglementation des télécommunications en France est adoptée, ce qui marque l’ouverture à la concurrence sur le marché français. L’ouverture à la concurrence de la boucle locale, c’est-à-dire du marché des télécommunications locales, depuis le début de l’année 2002, marque définitivement la fin du dernier monopole que conservait encore l’opérateur historique français. Cette nouvelle donne du marché mondial des télécommunications a été intégrée par France Télécom à la fois par le biais d’une évolution de son statut juridique, de son organisation interne, et de sa stratégie. Le changement de forme juridique de France Télécom débute à partir de 1988, où la Direction Générale des Télécommunications devient France Télécom. Transformée en entreprise au statut de droit public en 1991, France Télécom prend sa forme actuelle le 31 décembre 1996, date à laquelle elle adopte le statut de société anonyme. L’étape suivante de son évolution a consisté en l’ouverture de son capital, concrétisée par l’introduction en Bourse de l’entreprise en 1997, puis une nouvelle fois en 1998. Une autre date importante est l’arrivée de Michel Bon à la tête de l’entreprise le 13 septembre 1995. Trois mois plus tard il dévoile la nouvelle structure de France Télécom, articulée autour de plusieurs branches spécifiques à chaque type de clientèle, et qui répond à un souci de réactivité commerciale et de satisfaction des besoins exprimés par les clients. La structure définie à cette époque a depuis évolué, notamment avec la filialisation des activités téléphonie mobile (Orange) et Internet (Wanadoo). La structure actuelle (données Internet France Télécom) du Groupe France Télécom, développée dans le but de favoriser la décentralisation de l’entreprise, est organisée en sept branches qui rassemblent l’ensemble des entités et filiales :

- La Branche Mobiles, structurée autour d’Orange et de ses filiales, ce qui permet à Orange de gérer l’ensemble de la chaîne de la téléphonie mobile (la conception et la commercialisation des services, l’installation et la maintenance des réseaux). Orange, désormais présent dans plus de vingt pays à travers le monde, dispose de la plus grosse part de marché de la téléphonie mobile en France et de la deuxième en Europe.

- La Branche Services Fixes et Internet, qui assure le marketing de tous les produits et services liés à l’accès Internet depuis le domicile des clients ou le lieu de travail. La branche gère donc à la fois les services d’accès à Internet pour le grand public (Wanadoo étant le premier fournisseur d’accès en France et le deuxième en Europe), les portails B to B et les services d’hébergement pour les PME, ainsi que des services en ligne (Pages Jaunes, Voila, Alapage, Marcoply, Mappy, etc.).

- La Branche Distribution gère l’ensemble des canaux de vente des produits et services destinés au grand public (clients résidentiels et professionnels), aussi bien au travers du réseau des agences France Télécom (environ 700 points de vente) que par le biais de la grande distribution.

- La Branche Entreprises est dédiée à la gestion de la clientèle allant des moyennes entreprises aux grandes multinationales. Elle assure le marketing et la vente des solutions Voix et Données de l’entreprise (filiales Transpac, Expertel Consulting, France Télécom e-business, etc.). Equant fait de France Télécom le leader mondial des services aux entreprises (plus des deux tiers des cent plus grandes entreprises multinationales), de par sa présence dans 220 pays à travers le monde.

- La Branche Développement s’occupe de la recherche (France Télécom Recherche & Développement), l’innovation constituant une source d’avantage concurrentiel pour l’entreprise, et garantit le bon fonctionnement du système informatique de l’entreprise (Division des Systèmes d’Information).

- La Branche Réseaux exploite et supervise les réseaux nationaux et internationaux pour l’ensemble des lignes de produits du Groupe.

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- Enfin, la Branche Ressources assure des missions d’expertise pour le Groupe dans les domaines de la finance, de la gestion, de la comptabilité et de l’audit.

En France, 34 Directions Régionales maillent le territoire, et sont elles-mêmes regroupées en six grands pôles géographiques (Ile-de-France, Nord-Ouest, Sud-Ouest, Sud-Est, Nord-Est, Outre-Mer). Ces Directions Régionales ont notamment en charge les 93 agences France Télécom grand public ainsi que les 26 agences entreprises.

3.1.1.2. Une stratégie orientée vers le client, sur des segments à forte croissance

Une réorientation stratégique liée à l’ouverture à la concurrence

du marché des télécommunications La fin programmée de sa position monopolistique sur le marché français a obligé France Télécom à redéfinir totalement sa stratégie. En effet, comme le rappelait récemment Michel Bon dans un entretien5 « lorsque, en 1996, la loi ouvrant les télécommunications à la concurrence a été adoptée, France Télécom faisait 90% de son activité dans la téléphonie traditionnelle en France. L’arrivée de la concurrence allait à la fois faire baisser les prix, beaucoup, et faire perdre des parts de marché. Sous peine de déclin rapide, nous devions impérativement trouver des relais de croissance, dans les mobiles, les données, Internet, et à l’étranger ». En ces quelques mots, le Président de France Télécom a résumé la situation face à laquelle se trouve l’entreprise et la stratégie qu’elle suit depuis lors. Les axes majeurs de la stratégie de France Télécom, symbolisés par l’idée du passage de la "Phone" à la "Net Compagnie", sont donc la valorisation de sa position de leader en France, l’exploitation des trois pôles de croissance que sont la téléphonie mobile, Internet et l’international, et enfin le développement des services de mise en réseau. La stratégie déployée met l’accent sur la volonté de l’entreprise de poursuivre son développement à l’international, ce qui se traduit par une part croissante de chiffre d’affaires réalisée hors de France (36% du chiffre d’affaire du groupe en 2001, contre 13% en 1999 et 26% en 2000). Ce chiffre d’affaires réalisé hors de France a progressé de 77,3% durant l’exercice 2001. A partir de l’exercice 2002, il est possible que plus de la moitié du chiffre d’affaires de France Télécom soit réalisée hors de France. Ces activités nouvelles et en croissance (mobiles, Internet, opérations à l’international) représentent au premier semestre 2002 près du 69% du chiffre d’affaires du Groupe, contre 66% en 20016. Elles bénéficient du développement de certains services tels que l’accès Internet à haut débit et les services de données sur mobiles (SMS, WAP, GPRS, etc.). Par ailleurs, en ce qui concerne la téléphonie fixe, les parts de marché se stabilisent malgré la vivacité de la concurrence. Plus précisément, sur le marché français, France Télécom demeure en 2001 le leader avec 64% du trafic longue distance, 48% du parc des mobiles et 44% des accès Internet. L’entreprise attribue cette réussite sur son marché intérieur à sa politique tarifaire, à l’extension de sa gamme de services et à l’intensification de sa présence commerciale7. Au niveau européen, le potentiel de croissance est important, principalement en ce qui concerne les nouvelles activités déjà citées, ce qui justifie que l’Europe soit au centre de la stratégie internationale du Groupe. L’internationalisation a été renforcée en 2001 notamment par le biais de l’unification des actifs mobiles derrière la marque Orange, l’intégration de Freeserve à Wanadoo, la consolidation d’Equant, et en 2002 par la

5 Entretien accordé au quotidien Le Monde, daté du 11 mars 2002 6 Communiqué de presse du 12 septembre 2002 7 Rapport annuel 2001

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consolidation par France Télécom de l’opérateur polonais TP Group (TP SA ainsi que ses filiales dont PTKCentertel, opérateur mobile).

Les résultats des différents segments France Télécom estime avoir désormais atteint la taille critique dans chacun de ses métiers stratégiques8 : Orange est leader en France et au Royaume-Uni et s’impose comme une marque paneuropéenne, Wanadoo se renforce en Europe grâce à l’acquisition d’Eresmas en Espagne, la fusion entre Equant et Global One a permis de créer le leader mondial des services aux entreprises. Le chiffre d’affaires consolidé du Groupe France Télécom s’établit au premier semestre 2002 à 22,5 milliards d’euros, soit une croissance de 10% par rapport au premier semestre 2001.

Le segment Orange Ce segment comprend les activités de téléphonie mobile en France, au Royaume-Uni et dans le reste du monde, exceptées quelques activités mobiles situées en Moldavie, Liban, Egypte. Les prévisions concernant le marché de la téléphonie mobile en Europe estiment que d’ici 2005 les mobiles devraient représenter près de 35% de la valeur des services de télécommunication en Europe. France Télécom tente donc de renforcer sa position (leader en France et au Royaume-Uni, deuxième en Europe) en déployant des réseaux GPRS et UMTS, et en associant des activités liées à Orange et à Equant concernant les applications voix-données au profit des grandes entreprises. La base de clientèle du groupe Orange s’établit au 30 juin 2002 à 41,4 millions de clients, soit une progression de 16,6% en un an. Le nombre de clients progresse sur les marchés où la téléphonie mobile est déjà fortement implantée (+17% en France, +7,9% en Grande-Bretagne), mais plus encore sur les marchés émergents tels que la Slovaquie. Le chiffre d’affaires du segment a progressé de 13,8% au premier semestre 2002 pour atteindre 8 059 millions d’Euros. Tout comme le nombre d’abonné, il progresse sur l’ensemble des marchés.

Le segment Wanadoo Ce segment comprend les services d’accès Internet, les portails, les sites marchands, les annuaires, les services aux professionnels (principalement l’activité de création de sites). Avec l’acquisition de Freeserve en janvier 2001, Wanadoo est devenu l’un des premiers acteurs européens des services d’accès et de l’audience Internet, et, pour préparer l’avenir, France Télécom investit dans un programme de déploiement des réseaux d’accès en ADSL, de même qu’elle prépare l’arrivée des services multimédias liés au haut débit. Le chiffre d’affaires du segment Wanadoo progresse au premier semestre 2002 de 33,2% par rapport au premier semestre 2001, pour se porter à 918 millions d’Euros. Cette progression est principalement due au développement des services « d’accès, portails et e-commerce » (+69,2%), alors que les produits des « Annuaires et services aux professionnels » sont en plus faible croissance (+4,6%). Enfin, la rentabilité opérationnelle du segment est en forte amélioration puisque l’EBITDA est positif de 29 millions d’Euros, contre -54 millions d’Euros l’année précédente.

Les segments « Services fixes, voix et données » en France et hors de France Le segment « Services fixes, voix et données en France » regroupe plusieurs activités historiques du Groupe réalisées en France et en particulier la téléphonie fixe, les réseaux d’entreprises, la télédiffusion, la télévision par câbles ainsi que la vente et la location d’équipement. Le segment hors de France regroupe les activités réalisées hors de France

8 Communiqué de presse du 12 septembre 2002

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en tant qu’opérateur de téléphonie fixe et de transmission de données, de télédiffusion et de télévision par câble. Il intègre notamment Equant. Les services globaux aux entreprises sont une activité stratégique pour France Télécom, qui a opéré au cours de l’année 2001 la fusion entre Global One et Equant. Désormais Equant compte plus de 3 700 grandes entreprises parmi ses clients, et occupe une position de leader mondial sur ce marché à forte croissance. Les résultats du premier semestre 2002 du segment des services hors de France sont difficiles à analyser du fait des variations de périmètres importantes qui sont intervenues (intégration d’Equant et de TP Group). La constitution du nouvel Equant après fusion avec Global One a été réalisée le 1er juillet 2001. Dans un environnement économique assez peu porteur, le chiffre d’affaires d’Equant s’est réduit de 5,2% par rapport au premier semestre 2001 du fait du recul des ventes sur le marché des services d’intégration (les services de réseaux progressant quant à eux de 2,9%). Le segment des services en France connaît quant à lui une diminution de son chiffre d’affaires au premier semestre 2002 de 2,6%, qui s’explique notamment par l’ouverture à la concurrence du marché des communications téléphoniques locales depuis le 1er janvier 2002, et par la baisse du chiffre d’affaires réalisé avec les autres opérateurs nationaux (déploiement rapide des réseaux des concurrents, baisse des prix des services d’interconnexion). Ces évolutions défavorables sont cependant pour partie compensées par la forte croissance des revenus de l’accès à Internet (multiplication par quatre en un an du nombre d’abonnés à l’accès Internet haut débit via l’ADSL, soit 730 000 abonnés au 30 juin 2002), ainsi que par la progression du chiffre d’affaires des services aux entreprises. Les contributions des différents segments au chiffre d’affaires total du Groupe France Télécom a donc évolué entre le premier semestre 2001 et le premier semestre 2002. Le segment Orange est ainsi passé de 29,7% du CA à 32,6%, de même que le segment Wanadoo, même s’il reste faible dans sa contribution, a progressé pour passer de 3% à 3,7%. Les segments Services fixes, voix et données en France et hors de France ne représentent plus que 63,6% du CA global au lieu de 67,3% en juin 2001.

Une nécessaire stratégie de croissance externe qui a généré une dette importante

Les perspectives d’évolution du marché des télécommunications

La croissance du marché mondial des télécommunications est estimée à 8% par an en valeur pour la période 2000 – 2004, ce qui correspondrait pour l’ensemble des services (services mobiles, téléphonie fixe, données, autres) à une valeur de 1 254 milliards d’Euros en 20049. Les trois principaux phénomènes qui seraient en mesure d’expliquer cette croissance sont tout d’abord le dynamisme du secteur des mobiles, qui grâce à une progression annuelle de 14% devrait atteindre 516 milliards d’Euros en 2004 contre 304 en l’an 2000, le secteur des mobiles représentant alors par la même occasion plus de 40% du marché global en valeur contre 33% en l’an 2000. Le deuxième phénomène est la forte augmentation des services de données qui devraient progresser de 9% par an sur la même période, passant ainsi de 76 milliards d’Euros en 2000 à 106 en 2004 , soit un peu plus de 8% du marché global. Enfin, le troisième phénomène expliquant la croissance du marché mondial des télécommunications est le développement modéré des revenus de la téléphonie fixe, soutenu par la demande des pays en développement et par les accès Internet. Le marché de l’Union Européenne progresse quant à lui plus rapidement que le marché de l’Amérique du Nord (+8% par an contre +4%), et devrait le dépasser à l’horizon 2004 pour

9 Source Idate

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se situer au deuxième rang mondial derrière la zone Asie-Pacifique10. La croissance de ce marché reste tirée par la téléphonie mobile, qui a progressé de 13% en valeur entre 1999 et 2000. Internet constitue également un levier important de développement des services de télécommunications en Europe puisque le nombre d’accès devrait passer de 41 millions en 2000 à près de 130 millions en 200411. Internet favorise l’essor du commerce électronique, même si les perspectives de ce marché restent très peu précises. Le marché français des télécommunications est en valeur le quatrième au sein de l’Europe en 2001, avec 30 milliards d’Euros12. Son développement au cours des dernières années est un peu plus lent que celui du reste du marché européen (12,7% et 14% lors des deux dernières années, contre plus de 15% pour la moyenne européenne). Le marché français partage la plupart des caractéristiques du marché européen, telles que le poids croissant pris par la téléphonie mobile, la croissance rapide de l’Internet, la stagnation de la téléphonie fixe.

Une stratégie d’acquisitions de sociétés sur les segments de croissance : flexibilité externe et politiques de GRH différenciées

La stratégie que l’entreprise a déployée depuis 1995 a visé à trouver des relais de croissance (téléphonie mobile, Internet, international) afin de compenser la baisse annoncée de la téléphonie fixe et faire de France Télécom un opérateur paneuropéen. Le développement de l’activité sur tous ces segments qui ne constituent pas le métier historique de l’opérateur ainsi que son développement à l’international (l’entreprise est désormais présente dans 220 pays ou territoires), se sont effectués en grande partie par croissance externe, et donc par le biais d’acquisitions. Notons notamment durant l’année 2001 l’acquisition de Freeserve, premier fournisseur britannique d’accès à Internet, la création d’Equant issue de la fusion d’Equant et de Global One, l’acquisition d’Internet Télécom, fournisseur de services Internet aux entreprises, le rachat d’Uni2, opérateur alternatif de téléphonie fixe espagnole, l’augmentation de la participation de France Télécom dans le capital de TP SA, opérateur historique polonais et acteur important du marché des télécommunications d’Europe Centrale qui est intégré dans le périmètre de France Télécom depuis le 1er avril 2002. Le recentrage sur ces segments de croissance passe par ailleurs par un désengagement de certaines activités : rachat de la participation de France Télécom dans le bouquet satellitaire TPS par TF1, désengagement de sa participation dans STMicroelectronics notamment. Il est à ce titre intéressant de remarquer, au regard de notre problématique, que ces opérations d’acquisitions ainsi que leurs prolongements en termes de modernisation organisationnelle des différentes entités s’intègrent dans la recherche de flexibilité de France Télécom. Ces opérations traduisent en effet des manifestations de la flexibilité externe du Groupe France Télécom, telle que mentionnée dans la figure 2 synthétisant la problématique de recherche. On assiste en effet à des phénomènes d’acquisitions et de filialisations, puis d’introduction en Bourse des entités qui portent les principaux segments de croissance pour France Télécom : Orange sur la téléphonie mobile, Wanadoo sur l’accès à Internet et le développement de contenus comme le commerce électronique, Equant en ce qui concerne le transport de données pour les plus grandes entreprises mondiales. On observe par ailleurs que les politiques RH y sont différenciées par rapport à celles ayant cours dans la maison mère, puisque par exemple 3 000 suppressions de postes ont été réalisées chez Equant. De même, un plan de réduction des coûts opérationnels a été mis en place chez TP Group, qui s’est notamment traduit par une diminution sensible du nombre d’employés.

10 Source Idate 11 Source IDC 12 Idate news n°230, 2002

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Le financement de la croissance externe

Cette croissance externe a nécessité l’engagement de fonds importants par France Télécom pour assurer son développement. Cette stratégie s’est révélée coûteuse, puisque les acquisitions ont été réalisées dans une période où les valeurs du secteur des télécommunications étaient survalorisées par les marchés boursiers, l’endettement de France Télécom généré par ces opérations de croissance externe s’établissant à la clôture des comptes 2001 à plus de 60 milliards d’euros, et à près de 70 milliards d’euros au 30 juin 2002. Cette situation n’est cependant pas spécifique à France Télécom parmi les opérateurs européens, puisque Deutsche Telekom fait également face à une dette de plus de 60 milliards d’euros13. Les acquisitions qui ont été réalisées l’ont été majoritairement par le biais de paiements en cash en non par l’échange d’actions. La principale cause de la dette actuelle de France Télécom est en effet le rachat d’Orange à Vodafone durant l’année 2000 pour 43 milliards d’euros. La moitié de l’opération a été financée en cash, de manière à ce que la participation de l’Etat dans le capital de France Télécom ne passe pas en dessous des 51%, comme l’impose le statut de l’opérateur. Par ailleurs, l’entreprise s’est engagée à racheter à Vodafone 100 millions de titres France Télécom à 105 euros, sans s’être couverte contre le risque que la cotation de l’action France Télécom passe en dessous de cette valeur. Afin de réduire sa dette considérable, l’entreprise se désengage d’activités non stratégiques (TDF, Stellat, Casema, etc.), et réduit ses actifs immobilisés (cession d’une partie de son patrimoine immobilier). Le développement de l’activité de France Télécom sur les segments porteurs génère une croissance soutenue ainsi que des résultats économiques en progression : l’Ebitda du Groupe a progressé de 13,2% au premier semestre 2002 , le résultat opérationnel de 17,3%. La rentabilité des activités mûres (téléphonie fixe) se stabilise, alors que dans le même temps celle des activités nouvelles s’accélère fortement (principalement la téléphonie mobile). Cependant ces bons résultats opérationnels ne suffisent pas à réduire significativement la dette de l’entreprise. Ce que l’on peut appeler "l’affaire Mobilcom" a également fortement marqué les comptes de France Télécom. Le marché allemand des télécommunications, plus gros marché européen, est stratégique pour les différents acteurs du marché (Deutsche Telekom, British Telecom, KPN, Telefonica). Après la rupture de son alliance avec Deutsche Telekom, France Télécom se trouvait dans l’obligation de trouver un autre moyen de s’implanter sur le marché allemand, ce qui a été fait avec l’entrée de l’opérateur français dans le capital Mobilcom à hauteur de 28,5% en l’an 2000. Un désaccord est apparu en 2001 entre France Télécom et le dirigeant de Mobilcom concernant les modalités de mise en œuvre de l’accord de coopération entre les deux opérateurs, notamment en ce qui concerne le déploiement de l’UMTS. Le dirigeant de Mobilcom a par la suite, et après découverte de malversations, été démis de ses fonctions de Président du Directoire de l’entreprise allemande. L’analyse financière, opérationnelle, stratégique et légale de Mobilcom a amené France Télécom à conclure en septembre 2002 à l’absence de viabilité de l’activité UMTS de Mobilcom ainsi qu’à la décision de ne pas chercher à prendre le contrôle de Mobilcom et de ne plus répondre à ses demandes de concours financiers. Cette "affaire Mobilcom" se solde pour France Télécom par une dépréciation d’actifs de plus de 7 milliards d’euros.

13 Idate News n°228, 2002

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Jean-Louis Vinciguerra, directeur exécutif de la Branche Ressources (Direction financière, opérations de fusions-acquisitions, contrôle de gestion, etc.), justifie14 quelques semaines après la démission de Michel Bon de son poste de PDG de France Télécom, la stratégie suivie par l’opérateur historique français. Il rappelle que l’ensemble des opérateurs européens s’est trouvé confronté à la même situation à partir de l’ouverture à la concurrence du marché européen des télécommunications. L’alternative face à laquelle se trouvait France Télécom au milieu des années 1990 consistait soit à demeurer un opérateur national dont l’activité était concentrée sur la téléphonie fixe, dont les perspectives d’avenir étaient faibles voire nulles, soit à se transformer comme ses concurrents européens en un opérateur paneuropéen orienté vers des activités d’avenir telles que la téléphonie mobile ou l’accès et le contenu Internet. Concernant la téléphonie mobile, ceci implique d’investir dans des licences UMTS dans plusieurs pays, ce qui se révèle coûteux. Cette stratégie de croissance rapide à l’international sur des activités nouvelles impliquait de prendre des risques dans les acquisitions à réaliser. Les cessions d’actifs ainsi que l’introduction en Bourse d’Orange ont rapporté moins que prévu et de ce fait la dette n’a pas pu être réduite rapidement. Si Jean-Louis Vinciguerra reconnaît que France Télécom a connu deux échecs avec NTL et Mobilcom (qui représentent 15% de la dette du groupe), il estime que France Télécom dispose désormais de l’un des meilleurs portefeuilles parmi les opérateurs télécoms européens.

3.1.1.3. Les entretiens exploratoires : une évolution de France Télécom totalement intégrée par les cadres rencontrés

Si les entretiens exploratoires que nous avons réalisés ont apporté relativement peu d’éléments quant à la stratégie globale de France Télécom, ils sont par contre éclairants sur l’évolution des mentalités de ces cadres qui ont été rencontrés. Ainsi, même en ce qui concerne la téléphonie fixe en France qui n’est pas le segment le plus dynamique, le discours tenu est bien celui de représentants d’une grande entreprise privée du secteur des télécommunications, qu’est devenue en un temps très limité France Télécom, et non pas celui de membres d’une administration. Il est caractéristique de constater que le changement dans la stratégie, dans l’organisation, dans les méthodes de travail, s’est accompagné d’un changement dans le vocabulaire utilisé puisque les personnes rencontrées ne parlent pas "d’abonné" ou "d’usager", mais de "client", de même que "l’agent" est généralement devenu un "salarié". Ceci relaie la vision qu’a Michel Bon de la transformation de l’entreprise, qui met « le client au centre, le salarié au cœur ». L’effort consiste désormais à faire en sorte que l’ensemble des salariés ait conscience de ces évolutions que vit l’entreprise, ce qui n’est pas encore le cas actuellement : « On leur dit bien on n’est pas atypique France Télécom, on n’est pas tout seul dans une planète je ne sais pas dans quelle galaxie … c’est la société, dans toute entreprise c’est çà, c’est le changement, plus rien n’est figé dans le marbre » (Responsable du département "Soutien/Contrôle" en DRH de région). France Télécom est donc désormais orientée vers le client aussi bien en national qu’à l’international, et en tant qu’entreprise privée, ses objectifs ne sont plus de l’ordre du service public, mais économiques. Au regard de l’endettement évoqué précédemment, des réductions de coûts sont nécessaires, ce qui entraîne des changements difficilement imaginables il y a quelques années. Il en va ainsi d’un certain nombre d’outils informatiques, qui auparavant auraient été créés en interne et qui désormais sont pour certains achetés auprès de sociétés informatiques. Comme l’indique le responsable du projet CSRH, « auparavant … France Télécom avait une logique … çà c’était l’image de France Télécom très … technicienne donc on fait nos propres produits pour répondre à

14 Entretien accordé au quotidien Le Monde, daté du 1er octobre 2002

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tous les besoins … et qui soient parfaits […] la volonté actuelle maintenant c’est … elle est plus économique c'est-à-dire … par exemple sur des progiciels avant tout ». L’autre élément récurrent dans les entretiens exploratoires et relatif à la stratégie de l’entreprise concerne l’idée de "Net Compagnie", que l’on trouve aussi depuis un certain temps dans quasiment tous les communiqués de presse qui émanent de l’entreprise, et qui symbolise les orientations stratégiques de France Télécom sous l’idée du passage de la "Phone Compagnie" à la "Net Compagnie". Comme en atteste le Directeur de DRH Services « le seul objectif du Président c’est de devenir la Net Compagnie ». Cette notion de Net Compagnie permet de couvrir des réalités très différentes. Elle est le vecteur d’une valeur nouvelle de l’entreprise, mais elle se matérialise également par des éléments beaucoup plus concrets avec la diffusion des technologies de l’information dans l’ensemble de l’organisation pour le plus grand nombre de salariés : « France Télécom est … s’appelle la Net Compagnie, nous avons comme but que tous nos salariés se servent de l’outil intranet » (Responsable du projet GTT). Dans cette optique, France Télécom doit constituer par la même occasion un terrain d’expérimentation pour les technologies qu’elle développe et souhaite mettre sur le marché, et créer par là même un "effet de vitrine" En tant que Net Compagnie, France Télécom a également pour ambition de devenir un prestataire de services en matière de systèmes d’information pour les entreprises (ce qui se fait déjà par le biais de sa filiale Equant), et, en conjuguant ses activités téléphonie et internet, être en mesure de proposer des solutions globales (système informatique, connexions, communications, etc.). C’est par exemple ce qui est envisagé pour l’un des outils informatiques mis en place récemment sur l’intranet de France Télécom, et qu’une grande entreprise française de plusieurs dizaines de milliers de salariés est venue observer. De fait, les missions de certains services de France Télécom évoluent pour devenir des prestataires de services vis-à-vis de l’ensemble de France Télécom (maison-mère et filiales), et éventuellement dans l’avenir vis-à-vis de l’extérieur. C’est par exemple le cas de la DASSI (Délégation aux Activités de Services et Systèmes d’Information), devenue France Télécom Services RH : « On va avoir un plan de développement vers les filiales, dans les deux ans à venir. Pour être à la fois sur l’aspect métier et sur l’aspect systèmes d’information, être un prestataire de services reconnu. D’ailleurs c’est ce que le DRH du groupe nous demande de faire. Il nous demande dans les deux ans à venir de devenir une entreprise de services RH de référence en systèmes d’information » (Directeur de la Stratégie de DRH Services).

3.1.2. Les déploiements de personnels au cœur des transformations actuelles

3.1.2.1. Un statut fonctionnaire préservé, des déploiements de personnel en direction des activités en développement

Les orientations stratégiques de l’entreprise se concrétisent donc par un accent mis sur toutes les activités en lien direct avec le client, ce qui nécessite bien évidemment d’avoir du personnel à mettre à ces postes. Se pose alors à France Télécom le problème du statut de ses salariés. En effet, la grande majorité (environ 85%) demeure sous statut fonctionnaire, ce qui a pour conséquence que la direction ne dispose pas de toute la palette de solutions qui s’offrent habituellement aux dirigeants d’entreprises privées pour gérer l’emploi et pouvoir mettre ainsi à un poste la personne qui dispose des compétences adéquates. Impossible par exemple de procéder à des licenciements comme l’a fait son concurrent British Télécom et d’embaucher des personnes rompues à la relation client. La seule solution qui s’offrait à France Télécom a donc été de développer la mobilité interne, ce qui a été fait de manière importante, puisqu’en l’an 2000 ce sont 12 000 salariés qui

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ont été déployés15, soit un total de 52 000 depuis le début de cette politique de l’emploi dans l’entreprise en 1996. Cette politique de déploiements, également cités dans les entretiens exploratoires sous le terme de redéploiements, tente de conjuguer la volonté de conserver le statut de fonctionnaire des salariés présents dans l’entreprise avant la privatisation, avec la nécessité de disposer de personnel sur les segments de croissance. Ainsi dès le début, « les messages du Président Michel Bon ça a été "on garde le statut des fonctionnaires" mais par contre il s’est engagé, çà vous avez dû l’entendre aussi, il s’est engagé à fournir un emploi pour tout le monde, "personne ne sera exclu, personne en dehors du chemin", çà c’est vraiment ses paroles, mais avec la condition c’est que il va falloir bouger » (Responsable du département "Soutien / Contrôle" en DRH de région). Les redéploiements sont par conséquent un élément central des transformations actuelles que vit l’entreprise. La nécessaire réduction des coûts se traduit par un certain nombre de réorganisations internes des différents services, aussi bien commerciaux, techniques qu’administratifs, qui aboutissent pour partie à la fermeture de certaines entités et donc à des disparitions de postes. Ce sont donc les personnes qui occupaient ces postes qui font l’objet de redéploiements et vont majoritairement sur des activités en contact avec le client, soit en contact physique soit en contact téléphonique : « France Télécom fait avec son personnel mais il faut que le personnel migre là où nos missions doivent se développer. C’est pour çà que vous avez entendu parler de ces mobilités vers des métiers genre plates-formes Wanadoo … enfin tout ce qui est réponse au client » (Responsable du département "Soutien / Contrôle" en DRH de région). Désormais les redéploiements se font principalement en direction de centres d’appels, dont l’activité est en pleine expansion. Ces centres d’appels sont pour la plupart des plates-formes téléphoniques qui ont pour objectif de répondre à des questions précises de clients ou à résoudre leurs problèmes (renseignements téléphoniques, assistance Orange, Wanadoo, 1014, 1016, etc.). D’autres centres, dont l’activité tend à se développer depuis peu de temps, n’interviennent pas comme les autres de manière réactive, donc en réponse au client, mais de manière proactive. Ce sont eux qui prennent directement contact avec les clients ou les clients potentiels, par exemple dans le but de ramener chez France Télécom les clients qui sont partis chez des opérateurs concurrents.

3.1.2.2. La prise en compte des bassins d’emplois dans l’implantation des centres d’appels

Ces déploiements de personnels se heurtent au problème de la gestion de l’emploi sur les bassins d’emploi de France Télécom. En effet, la mobilité géographique (entre villes, entre régions) du personnel de France Télécom est relativement réduite, ce qui s’explique notamment par la moyenne d’âge relativement élevée des salariés (près de 44 ans en 200016), ainsi que par le fait que, pour une part importante d’entre eux, ils occupent depuis longtemps le même poste. Le changement de métier qui leur est demandé est donc en soi déjà un bouleversement considérable. Il est d’autant plus difficile d’obliger les salariés à être mobiles géographiquement que l’on pas une vision claire de la pérennité des postes qui sont proposés à l’occasion de ces redéploiements, ne serait-ce qu’à un horizon court, comme l’atteste la Responsable du département "Soutien / Contrôle" en DRH de région : « dans deux ans … effectivement personne ne peut leur dire que dans deux ans ils seront à Wanadoo ».

15 Données issues du Bilan Social 2000 16 Donnée issue du Bilan Social 2000

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Lors de réductions d’effectifs ou de fermetures de service, les déploiements en direction d’agences (donc en contact physique avec le client) étaient inférieurs au nombre total de salariés à redéployer. Nous avons vu que la plupart d’entre eux est désormais redéployée dans des centres d’appels. Selon un membre de la DRH Groupe en charge du reenginnering de la fonction RH, ces centres d’appels sont une solution pour gérer les bassins d’emploi. En effet, ce type d’activité étant très réduite jusqu’au milieu des années 1990 (mis à part les renseignements téléphoniques), il y avait très peu de centres d’appels jusqu’aux alentours de 1998. Avec la croissance importante de l’activité de hot-line liée au développement de la téléphonie mobile et d’Internet, est apparue la nécessité d’implanter de nouveaux centres d’appels. C’est au sein de ces centres qu’ont été redéployées les personnes en provenance de services dont l’activité étant en décroissance ou avaient fermé : « il faut savoir que les centres d’appels c’est fait pour … les personnes qui sont à redéployer dans le service … les autres services … plutôt que de prendre des sous-traitants, c’est bien le but de France Télécom » (Responsable de centre d’appel Orange). Ainsi, le choix des sites d’implantation des centres d’appels a été conditionné par la prise en compte de l’état des bassins d’emplois, ce qui permet une « réadaptation de l’effectif dans les zones … entre guillemets où il n’y a pas trop de travail, ou d’évolution du travail, donc ils ont été implantés dans ce genre de zones » (Responsable du projet CSRH).

3.2. La fonction Ressources Humaines comme objet de flexibilité

3.2.1. Evolution de la Gestion des Ressources Humaines durant les années 1990

Les transformations stratégiques et organisationnelles de France Télécom au cours des années 1990 ont eu des répercussions en termes d’organisation de la Fonction Ressources Humaines et de gestion des ressources humaines afin de rapprocher l’opérateur de ce qui se passe chez ses concurrents du secteur privé (Sire, 2001).

3.2.1.1. Evolution de l’Organisation 1 (EO1) La première réforme organisationnelle, au début des années 1990, appelée "Evolution de l’Organisation 1" (EO1) visait à créer et mettre en place une description et une classification des postes au sein de l’entreprise, ainsi qu’un outil d’évaluation des personnels. Elle représente le point de départ de la gestion des compétences chez l’opérateur historique français. Deux évolutions majeures caractérisent la première phase de l’évolution de l’organisation. La première est la mise en place des "Entretiens de Progrès" (EP), c’est-à-dire d’entretiens annuels d’évaluation réalisés par le supérieur hiérarchique direct. Ceci représente une rupture avec la situation précédente, basée sur une évaluation uniquement administrative des salariés, héritée de l’époque où, n’ayant pas encore le nom de France Télécom, l’opérateur faisait partie intégrante d’un ministère (Direction Générale des Télécommunications). France Télécom passe ainsi d’une notation administrative principalement basée sur l’ancienneté à un outil multicritères favorisant le management par objectif. La philosophie des entretiens de progrès, en confrontant les objectifs fixés aux résultats atteints, est d’évaluer les besoins de formation des salariés ainsi que les possibilités de carrières qui s’offrent à eux, la rémunération restant très largement dépendante de l’évolution de carrière. Cette évolution s’accompagne au niveau de la Fonction Ressources Humaines d’une décentralisation de la gestion de la mise en œuvre des entretiens de progrès, puisque chaque Branche, chaque Direction Régionale, a la possibilité de construire ses propres outils d’évaluation et de décider de leur application.

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La seconde évolution majeure est la mise en place au sein de l’entreprise d’une réflexion ayant trait à la gestion des compétences. L’évolution des activités considérées comme stratégiques par France Télécom, la multiplication et l’accélération des changements organisationnels, la nécessité de mettre l’accent sur les activités en rapport direct avec le client, tous ces éléments font que la mobilité interne et les changements de métier devenaient un impératif, ce qui impliquait une réflexion sur les compétences présentes et celles à développer. Un accord social relatif à la politique de l’emploi et des compétences a été signé en 1997, portant sur l’insertion professionnelle des jeunes, l’ARTT et la promotion. Le volet portant sur la promotion tente de concilier l’intérêt de l’entreprise avec les exigences du statut fonctionnaire des salariés de France Télécom. La procédure de promotion, aussi bien dans le cadre de la "reconnaissance des compétences" (PRC) que dans celui de l’"aptitude et potentiel" (PAP), s’opère par le biais d’un entretien avec un jury. Les managers sont néanmoins associés dans les phases préparatoires, notamment via l’entretien de progrès qui doit être l’occasion d’échanges quant aux opportunités de carrières.

3.2.1.2. Evolution de l’Organisation 2 (EO2) La description des postes a été achevée en 1993. La seconde "Evolution de l’Organisation" (EO2), lancée en 1995, était principalement axée sur la refonte du système de rémunération par le biais de la reclassification des emplois, dans le but de s’aligner sur les pratiques de rémunération existant dans le secteur privé, et de mettre en cohérence le système de rémunération avec celui de la gestion des compétences. EO2 a généré plus de tensions sociales que ne l’avait fait EO1, les transformations portant désormais sur la rémunération des salariés. Jusque là le salaire de chaque individu était fonction de son statut et donc du concours par lequel il était entré chez France Télécom, qui déterminait sa place dans les grilles des salaires. La nouvelle grille mise en place est composée de quatre niveaux, subdivisés chacun en trois sous catégories (sauf le niveau IV pour lequel il existe des "4.4. et plus"). Les classes I et II regroupent les "employés et techniciens" ainsi que les "agents de maîtrise", la classe III les cadres, et la classe IV les cadres supérieurs et dirigeants. Beaucoup de difficultés se sont cristallisées autour du problème du "coutumier France Télécom", c’est-à-dire du défraiement forfaitaire pour les techniciens et opérateurs réseaux, ce qui représentait près de 40 000 personnes. Les opérations de re-classification intégraient en effet le passage du coutumier à un système de remboursement de frais professionnels au réel. Ceci était interprété par les salariés à la fois comme une remise en cause de ce qu’ils considéraient être un avantage acquis et comme la mise en évidence du fait que les techniciens n’étaient plus l’élite des salariés. La situation s’est débloquée en 1999 avec la mise en place par la Direction des Ressources Humaines d’une solution consistant à proposer aux salariés le rachat du coutumier ou l’octroi d’un avantage monétaire. Le système de rémunération est désormais de plus en plus proche de ce qui peut se trouver dans des entreprises privées traditionnelles, la rémunération globale correspondant à la somme du salaire de base, des avantages monétaires et non monétaires, et d’un bonus variable. Ce dernier a tout d’abord été instauré pour les cadres dirigeants et supérieurs, puis pour les cadres. Durant l’année 2001 l’individualisation de la rémunération fixe s’est appliquée aux collaborateurs non cadres sous convention collective, la part variable a été étendue à l’ensemble des cadres et des vendeurs. Des accords de participation et d’intéressement avaient par ailleurs été signés après que France Télécom fût passé sous statut privé.

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EO2 s’est par ailleurs concrétisée par une décentralisation de la prise de décision en matière de gestion des ressources humaines. A partir de 1996, les compétences RH ont été décentralisées en direction des Unités Opérationnelles. Un réseau de 600 Responsables des Ressources Humaines (RRH) a été déployé, chaque RRH étant directement rattaché à un Directeur d’Unité Opérationnelle. Ceci a nécessité des recrutements et des formations en interne afin d’assurer ce déploiement en quelques mois. Cette nouvelle organisation de la Fonction Ressources Humaines représente un changement important par rapport aux organisations antérieures, car les RRH sont rattachés directement aux Directeurs d’Unités Opérationnelles et non pas à la Fonction Ressources Humaines elle-même. Les RRH sont des généralistes des ressources humaines, chargés de mettre en œuvre au sein de l’Unité Opérationnelle la politique RH décidée dans le cadre de stratégies locales, elle-même déclinées de la politique RH de la Direction Régionale. Cette évolution est un premier pas en direction d’une Fonction Ressources Humaines qui aurait au sein de l’entreprise un rôle de partenaire stratégique.

3.2.2. Le projet "RH demain" pour aboutir à une fonction RH créatrice de valeur ajoutée

3.2.2.1. Le constat concernant la FRH à la fin des années 1990 et les évolutions souhaitées

Après l’entrée de France Télécom dans le domaine concurrentiel et la décision de suivre de nouvelles orientations stratégiques, l’entreprise a fait en 1998 le « constat d’inadaptation de la structure RH aux enjeux du Groupe »17. La mise en concurrence avec d’autres opérateurs européens et mondiaux, les attentes des marchés financiers, ont eu comme conséquence pour France Télécom de devoir comparer ses résultats économiques et financiers à ceux des autres opérateurs privés et non plus à ceux d’entreprises publiques hexagonales. Ce constat a mis en évidence trois problèmes essentiels relatifs à la Fonction Ressources Humaines18. Le premier est que les effectifs de la fonction sont comparativement aux opérateurs concurrents largement supérieurs, puisque près de 4% des effectifs de France Télécom travaillent dans la FRH, contre environ 2% chez la concurrence. Par ailleurs, la répartition des effectifs au sein de la fonction elle-même est déséquilibrée en faveur de la gestion administrative, peu créatrice de valeur ajoutée. Le deuxième problème est que la RH telle qu’elle est organisée apparaît trop éloignée des préoccupations des managers, notamment en ce qui concerne la gestion de l’emploi, le développement des compétences des salariés, les relations sociales. L’entreprise estime que les managers sont insuffisamment responsabilisés sur la dimension RH de leurs équipes, et que leurs pratiques manquent d’homogénéité. Les managers expriment par ailleurs un besoin d’être soutenu dans les activités RH concernant leurs équipes, ainsi qu’un désir de disposer d’une plus grande marge de manœuvre pour adapter leurs pratiques au contexte dans lequel ils se situent. Enfin, et de manière plus globale, le troisième problème est que l’organisation RH paraît lourde et peu lisible, avec des redondances entre les missions des différentes structures. A partir de ce constat, l’entreprise souhaite mettre en place un modèle de GRH qui promeuve l’implication de la ligne hiérarchique, notamment dans le développement des compétences de leurs collaborateurs. Dans ce nouveau modèle de GRH, favorisant une individualisation de la gestion des salariés, la fonction ressources humaines intervient dans la détermination des politiques de GRH, mais également en tant que support aux

17 France Télécom, Dossier de presse "RH Demain", juillet 2002 18 France Télécom, Dossier de presse "RH Demain", juillet 2002

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opérationnels. Les orientations stratégiques de France Télécom en matière de ressources humaines sont au nombre de sept19 :

- Développer les souplesses nécessaires à l’évolution de France Télécom ; - Développer l’appartenance et l’efficacité Groupe ; - Accélérer et diversifier l’internationalisation des ressources humaines du Groupe ; - Renforcer les compétences et la pratique managériale pour la ligne hiérarchique ; - Changer les représentations des salariés et développer leurs compréhensions ; - Créer les conditions d’un pilotage stratégique des ressources humaines pour

l’ensemble du Groupe ; - Assurer une régulation sociale en accord avec les enjeux de France Télécom.

Cinq grands domaines sont constitutifs de la Fonction Ressources Humaines, considérée en tant que "business partner" : la gestion de l’emploi et le développement des compétences (dimension collective), le développement individuel des collaborateurs (dimension individuelle), la conduite du changement, les relations sociales, et enfin la gestion administrative.

3.2.2.2. Un discours repris par les acteurs de la fonction dans les entretiens exploratoires

Toutes les personnes rencontrées lors des entretiens exploratoires et qui font partie de la fonction Ressources Humaines (en DRH Groupe, à France Télécom Services RH, ou en DRH de Direction Régionale) font mention du même constat concernant la fonction RH, c’est-à-dire du poids trop important qui était le sien jusqu’il y a peu. En effet, après avoir analysé la situation de la fonction RH de France Télécom au regard de celle de ses concurrents à la fin des années 1990, il s’est avéré que son poids par rapport à la masse salariale totale était largement supérieur à ce qui se trouvait chez les autres opérateurs téléphoniques (environ 4% contre 2%) : « par rapport à un ratio global d’une entreprise, on est à … on a un taux de fonction RH qui est quasiment le double par rapport aux autres sociétés » (Directeur de la Stratégie de DRH Services). De plus, la répartition des effectifs au sein même de la fonction RH était largement favorable à la gestion administrative, peu porteuse de valeur ajoutée : « la gestion administrative employait encore trop de monde à France Télécom, était sur la tête de trop de personnes, donc un processus lourd, qui coûte cher » (Responsable du département "Soutien / Contrôle" en DRH de région). Et à l’inverse de la gestion administrative, les activités plus stratégiques et plus porteuses de valeur ajoutée de la fonction RH manquaient quant à elles de personnel : « on n’avait pas assez de personnes qui s’occupaient de tout ce qui est formation, emploi, relations sociales, donc qui est bien de la GRH » (Responsable du projet CSRH). A partir de ce constat, il s’est donc avéré nécessaire d’alléger le poids de la fonction RH, « nous avions une fonction RH qui représentait pratiquement 4% de nos salariés, ce qui est énorme, donc nous avions la prétention et la volonté de la diviser par deux, de faire un gain de 50% et donc de passer à 2% de nos salariés qui gèrent la fonction RH » (Responsable du projet GTT), mais également de la faire évoluer afin qu’elle fasse moins de travail administratif et devienne une force de proposition, de soutien (membre de la DRH Groupe en charge du reengineering de la fonction RH). Ces nouvelles exigences, liées à la situation concurrentielle dans laquelle se trouve désormais l’entreprise, amènent donc un souci de productivité, même si « on n’emploie pas le terme "réduction des coûts de la RH", disons "recentrage des activités métiers" » (Responsable du projet GTT). Cette préoccupation n’est d’ailleurs pas spécifique à la fonction RH, mais est partagée par toutes les fonctions supports, pour lesquelles il est

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traditionnellement difficile de mettre en évidence la valeur ajoutée qu’elles dégagent : « c’est une nécessité économique, toutes les fonctions supports de l’entreprise, qu’elles soient financières, comptables, SI ou RH sont en train de passer cet engagement-là » (Directeur de la Stratégie de DRH Services).

3.2.3. Les trois volets de "RH Demain" Le projet de reengineering de la Fonction Ressources Humaines, baptisé "RH Demain", a été lancé en 1999 dans le but de transformer les modes de gestion des ressources humaines de l’entreprise, ce qui touche des aspects ayant trait à la culture, aux processus de gestion, à l’organisation, à la professionnalisation des salariés ainsi qu’aux outils utilisés. La nouvelle organisation de la fonction, qui doit venir en soutien aux managers, est repensée à partir de l’Unité Opérationnelle, ce qui implique de redéfinir les processus et doit permettre de clarifier les missions et d’alléger les structures RH situées au-dessus de l’Unité Opérationnelle. A partir de janvier 1999, un Directeur de projet a été nommé, ainsi qu’une équipe projet nationale de taille réduite, intégrant les structures RH existantes ainsi que les managers et RH de terrain. Un comité de pilotage a été mis en place en avril de la même année afin de valider et/ou réorienter les pistes de travail et réflexions de l’équipe projet. Un groupe projet RH a également été instauré dans le but de faire des propositions à l’équipe projet nationale concernant les RH et leur organisation, les compétences requises et les outils nécessaires, en conciliant les attentes du management, de la Direction et du personnel. Plusieurs groupes opérationnels ont par ailleurs été créés (groupes tests, comité process, comité Systèmes d’Information RH). Le projet de reenginnering de la fonction RH s’inscrit dans cette double logique de réduction des coûts et de recentrage sur les activités à valeur ajoutée. Lancé en 2000 au niveau national, il est progressivement décliné au niveau des régions, et devrait s’étaler pour les principales évolutions jusqu’en 2002. Il s’articule autour de trois volets que sont : 1) l’évolution des missions de la fonction, de son organisation et de la gestion administrative ; 2) la mise sur l’intranet de certains process RH ; 3) l’évolution du management autour de l’idée de "manager 1er RH".

3.2.3.1. L’évolution organisationnelle de la fonction RH et la création des CSRH

Dès avant la mise en œuvre du projet "RH demain", la fonction RH connaissait des transformations organisationnelles, ainsi que des transferts de compétences importants entre les différents niveaux. En effet depuis 1996 et le projet EO2, la gestion administrative concernant les ressources humaines était progressivement décentralisée des Directions des Ressources Humaines des Directions Régionales au profit des services RH des Unités Opérationnelles (agence, Unité Régionale de Réseaux, etc.) : « au fil des ans tout ce qui est vraiment strictement opérationnel a été décentralisé vers les unités et nous on se recentre sur notre métier de DRH de région, c’est-à-dire qu’on se concentre plus sur le fonctionnel » (Responsable du département "Soutien / Contrôle" en DRH de région). Cette évolution s’est renforcée dans le cadre du projet "RH demain", où les missions des DRH de région se recentrent sur des niveaux stratégiques et politiques, autour des activités productrices de valeur ajoutée : le développement des compétences, le pilotage de l’emploi, les relations syndicales. Ces politiques sont des déclinaisons des politiques nationales, et s’adaptent aux contextes spécifiques au territoire couvert par la Direction Régionale : « donc nous centré sur le stratégique, la politique … la politique on donne un cadrage aux unités, en sachant que cette politique on l’a nous-mêmes reçue de la DRH de

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FT SA qui elle-même s’inscrit dans la politique de la DRH Groupe, donc on décline » (Responsable du département "Soutien / Contrôle" en DRH de région). Au sein de chaque Unité Opérationnelle se trouve un Responsable Ressources Humaines (RRH). Son rôle est relativement similaire à celui de la DRH en Direction Régionale, soit la définition des politiques RH au niveau de son unité dans le cadre donné par la DRH de région, et leur mise en œuvre. Le dialogue social, les relations sociales avec les syndicats, prennent une importance croissante à son niveau, puisque tout comme le développement des compétences ou le pilotage de l’emploi, les relations sociales sont déclinées et décentralisées au niveau des unités opérationnelles. Les négociations avec les syndicats se font depuis environ quatre ans de moins au moins au niveau de la Direction Régionale, pour se faire à l’inverse au niveau des unités opérationnelles et aboutir à des accords locaux. Il en est ainsi allé des négociations portant sur le passage aux frais réels, ou sur l’accord d’OARTT. Mais l’évolution majeure qu’a connue la fonction RH au cours de ces dernières années est la disparition progressive des activités administratives liées aux ressources humaines au niveau des unités opérationnelles, pour être regroupées au sein de Centres de Services en Ressources Humaines (CSRH) : « nous supprimons toute la fonction RH de proximité, la saisie … la saisie quotidienne d’informations, d’absences, de frais de déplacements, enfin tout ce qu’on appelait bureau d’ordre, bureau de ressources humaines à une époque, et c’est centralisé sur des Centres de Services Ressources Humaines qui sont dix en France » (Responsable du projet GTT). Il s’agit d’une rupture avec la logique sous-tendue par EO2 qui misait sur la décentralisation au niveau des Unités Opérationnelles des pratiques de GRH et des tâches administratives en découlant (qui étaient traitées dans les Bureaux d’Ordre, ou Bureaux de Ressources Humaines). Les services Ressources Humaines au sein des Unités Opérationnelles sont donc de taille plus réduite qu’auparavant, mais constitués de personnes ayant des compétences plus pointues en RH, généralement de niveau cadre, qui viennent en soutien à l’action du RRH. L’enjeu de cette évolution a bien trait aux gains de productivité de la fonction RH, obtenus par la concentration des tâches administratives qui ne sont pas productrices de valeur ajoutée en un nombre réduit de lieux dédiés à leur traitement : « concentrer la gestion administrative sur un pôle, ce qui veut dire efficacité et puis gain de productivité, il faut le dire, et ça a été dit » (Responsable du département "Soutien / Contrôle en DRH de région). Ces CSRH renvoient à un concept d’externalisation interne sur le modèle des "Sure Services Centers" américains : « on a déchargé les services opérationnels de tout ce qui était traitement technique de l’administration du personnel pour le confier à des centres spécialisés qui gèrent en moyenne entre 8 000 et 20 000 salariés » (Directeur de la Stratégie de DRH Services). Les CSRH sont mis en place progressivement depuis le premier trimestre 2000, l’objectif étant que les dix centres, qui s’occupent de 70 Directions Régionales et services nationaux, soient tous opérationnels en juin 2002. En juin 2002, ces dix CSRH comptaient un effectif global d’environ 800 personnes20. En parallèle à cette gestion administrative inhérente à tous les actes quotidiens qui ont un impact sur la situation du salarié en termes de GRH (heures supplémentaires, congés maladie, allocation de rentrée scolaire, primes exceptionnelles, changements de situation administrative, etc.), les CSRH ont également une activité d’assistance téléphonique RH. Celle-ci vise à répondre aux questions des salariés ou des managers des unités opérationnelles dont ils ont la charge en ce qui concerne les situations individuelles de ces salariés ou les règles de gestion RH.

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Le fonctionnement des CSRH ainsi que le travail qui y est réalisé par les assistants de gestion fera l’objet de plus amples développements dans la suite des résultats de la recherche.

3.2.3.2. Le recours aux technologies de l’information pour alléger le coût des activités sans valeur ajoutée

L’évolution de la fonction RH tend à la recentrer sur son cœur de métier, sur ses activités créatrices de valeur ajoutée. En plus de la centralisation de la gestion administrative dans les CSRH, la productivité de la fonction RH a été améliorée en recourant aux technologies de l’information qui permettent progressivement d’automatiser des processus RH à faible valeur ajoutée : « on a engagé un vaste chantier qui est organisationnel, des processus, des compétences, mais aussi l’outil, donc l’outil quelque part a apporté sa pierre à ce chantier-là, en dégageant la fonction RH de tâches à faible valeur ajoutée ou à valeur ajoutée nulle » (Directeur de la Stratégie de DRH Services). L’exemple de la gestion des demandes de congés est particulièrement éclairant sur les gains financiers qui peuvent être générés. En effet, il y avait environ 1 200 000 demandes de congés qui circulaient sous forme papier chaque année chez France Télécom. Avec l’accord OARTT signé en 2000 et donc les Jours de Temps Libre (dénomination des jours d’ARTT chez France Télécom) supplémentaires à prendre en cours d’année, les prévisions tablaient sur plus de 7 000 000 de demandes de congés par an. En plus des gains inhérents à toute automatisation d’un processus (temps, personnel, etc), ces processus ont également été simplifiés lors de la phase de réflexion préalable à leur mise sur l’intranet de France Télécom, sous forme de workflow ou autre. Cette simplification a notamment été relative à la circulation des actes de gestion dans l’entreprise et au nombre d’étapes nécessaires à leur validation. Cependant, les enjeux de cette informatisation de certains processus RH ne se limitent pas simplement à l’aspect économique, mais s’expriment également en termes d’image. Au travers du recours aux technologies de l’information dans la modernisation du fonctionnement de France Télécom, c’est une nouvelle fois l’idée de "Net Compagnie" qui transparaît, grande entreprise du secteur des télécommunications et de l’internet, elle-même utilisatrice de ces technologies et à la pointe sur certains domaines comme l’utilisation des outils intranet en matière de processus RH. En effet, si certaines entreprises aux Etats-Unis ou au Canada, telles qu’IBM ou Boeing, avaient développé des Systèmes d’Information RH avec des workflow, « durant toute une période en Europe on n’avait rien vu d’équivalent » (Directeur de la Stratégie de DRH Services). Tout comme les informations commerciales sont disponibles sur le site Americ de l’intranet de France Télécom, les informations relatives aux ressources humaines et les processus qui ont été informatisés se trouvent sur @noo, organisé en trois espaces : un espace accessible à tous, qui rappelle notamment un certain nombre de règles RH et propose divers outils de simulation (temps partiel, congé de fin de carrière) ; un espace spécifique à chaque salarié ; un espace uniquement accessible aux managers. Les processus RH qui ont été mis en ligne sont accessibles à tous les salariés depuis leur espace personnel. @noo, qui est ce que l’on appelle un Libre Service Salariés, est « une couche en amont du système d’information RH, qui vise à permettre aux salariés et aux managers d’être partie prenante pas des actes, mais des processus RH, qui sont donnés sous forme électronique » (Directeur de la Stratégie de DRH Services). Le premier processus de gestion traité via @noo a été la saisie de la participation et de l’intéressement, c’est-à-dire un choix de placement effectué par chaque salarié. Auparavant, ce processus se concrétisait chaque année par deux fois 150 000 bulletins papiers remplis par les salariés, puis saisis un à un par la fonction RH. Désormais, les

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informations saisies par les salariés dans @noo viennent directement alimenter le Système d’Information RH appelé Alliance. Le deuxième processus, qui fonctionne depuis novembre 2000, concerne la gestion des demandes de jours de congés et des Jours de Temps Libre. Contrairement au premier processus, celui-ci fonctionne selon une logique de workflow. En effet, alors que la gestion de l’intéressement et de la participation relève purement d’un choix personnel du salarié, la prise de congés nécessite la validation par le manager. Par conséquent, une fois que le salarié a déposé sa demande de congés sur @noo, elle est automatiquement transmise au manager de ce salarié, qui valide ou non la demande. Une fois la demande validée électroniquement, l’information en est transmise directement au Système d’Information RH. Les processus suivants à devoir être mis en Libre Service Salariés sont la prise de repos compensateurs (mars 2002), ainsi que la gestion des frais de déplacements prévue pour 2002 – 2003. Le choix de ces deux premiers processus, outre qu’ils ne sont pas porteurs de valeur ajoutée pour l’entreprise, n’est pas neutre en termes d’adhésion des salariés à cette évolution relative à la manière dont ils interviennent dans les processus RH qui les concernent directement : « l’argent et les congés, c’est quand même deux accroches sympathiques » (consultante RH à France Télécom Services RH). Il est donc à noter qu’à travers cette évolution de la fonction RH, toute une partie des processus qui sont peu porteurs de valeur ajoutée, auparavant traitée par du personnel administratif, est reportée sur les salariés. Cette idée se retrouve dans le slogan d’@noo qui est « parce que c’est @noo, c’est à vous d’agir ». Ce mouvement va aller en s’accentuant puisqu’à l’avenir, chaque salarié sera également responsable de l’actualisation des données personnelles le concernant, comme par exemple sa situation familiale.

3.2.3.3. Le manager comme 1er RH de son équipe Comme pour l’ensemble de l’entreprise, dont le fonctionnement doit se rapprocher de celui d’une entreprise privée classique, le rôle de l’encadrement de première ligne évolue. Ce qui lui est désormais demandé est « qu’il ait un rôle de chef d’équipe, qu’il ait un rôle réglementaire, qu’il se rapproche davantage de ce que l’on retrouve dans les chefs d’équipe chez nos concurrents, dans les entreprises classiques, toutes les entreprises de droit privé qu’on peut trouver » (Responsable du projet GTT). Il est d’ailleurs à noter que la notion de manager est particulièrement large chez France Télécom, du niveau d’agent de maîtrise jusqu’à celui de cadre supérieur, puisque « le manager c’est quelqu’un qui encadre … donc il peut encadrer une personne comme il peut en encadrer 3 000 » (Directeur du projet Télétravail). En se rapprochant de ce qui existe à l’extérieur de France Télécom, la fonction de manager s’éloigne de son aspect traditionnel, de connaissance et de soutien technique aux membres de l’équipe de travail, pour se diriger véritablement vers du management d’équipe et une forte implication dans les processus RH. Les chefs d’équipe sont devenus chez France Télécom les "managers 1er RH". En ce qui concerne le volet RH de son activité, le manager n’a pas à connaître toutes les règles, mais il doit savoir où trouver l’information, être au courant de la politique RH, être intégré dans les processus RH (comme par exemple le recrutement). C’est désormais à lui qu’il revient de prendre en charge les décisions concernant les processus RH qui concernent les membres de son équipe. Par exemple, nous avons vu précédemment que le manager intervient pour valider ou non une demande de congé posée sur @noo. C’est dans cette logique-là que le manager est "1er RH" : « on lui demande de s’occuper des congés par rapport au bon fonctionnement de son équipe, si il est d’accord ou pas que la personne parte. Il est RH en ces termes-là, point » (consultante RH à France Télécom Services RH). Au niveau des processus RH, il intervient donc en tant que décideur. Il a à ce titre de plus en plus de latitude en ce qui concerne les pratiques RH au sein de son équipe : accord des congés, participation au recrutement, distribution d’éventuelles

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primes individuelles, etc. La fonction RH elle-même s’est, comme cela a été présenté auparavant, recentrée sur les activités créatrices de valeur ajoutée : « dans les processus qu’on a réécrit c’est … le manager il est en plein dans la décision, et la DRH d’unité elle est comme nous on est : du soutien, de l’alerte, de l’expertise, mais plus dans la décision » (Responsable du département "Soutien / Contrôle" en DRH de région). Cette nouvelle fonction, décisionnelle, nécessite que le manager dispose des informations nécessaires à la prise de décision, et qu’il soit en mesure de fournir un certain nombre de renseignements à ses salariés. Sur ce dernier plan, « son rôle est d’être capable d’informer le salarié de façon très macro sur les actes de gestion, il n’a pas vocation à tout connaître de chaque processus RH » (Responsable du projet CSRH). Si les salariés désirent des informations plus précises les concernant, ils peuvent contacter l’équipe de gestion qui se charge d’eux au CSRH. De même, les technologies de l’information interviennent dans le soutien au manager, puisque celui-ci a accès, sur @noo, à l’ensemble des règles de gestion RH qui sont accompagnées d’une explication concernant les marges de manœuvre dont il dispose pour chacune d’elles. Ce passage au "manager 1er RH" renforce la charge de travail de ces individus, sur des aspects parfois très complexes comme la gestion du temps de travail. Celle-ci s’est en effet considérablement complexifiée avec le passage au statut d’entreprise privée, la coexistence de salariés de droit public et de droit privé, et la signature de l’accord d’OARTT. Une fois encore, les outils informatiques disponibles sur l’intranet interviennent en soutien aux managers. L’outil GTT (Gestion du Temps de Travail), dont les informations sont mises à jour quotidiennement par le SIRH (absences validées, etc.), les aide ainsi à établir le planning de leurs équipes et leur fournit un certain nombre d’indicateurs (nombre d’heures supplémentaires réalisées, répartition heures récupérées / heures payées, solde de jours de congés, de jours d’ARTT, etc.). Inscrit dans la logique du "manager 1er RH", donc du manager décideur, GTT est un outil d’aide à la décision qui n’impose aucune contrainte par rapport aux décisions de gestion du temps de travail que prend le manager : « notre outil de gestion du temps de travail est un outil d’aide au fonctionnement de l’équipe, d’aide à la décision, mais n’impose rien au manager. Il peut toujours gérer son équipe, ils pourront toujours gérer leur équipe comme ils le voudront. Il n’y a rien qui sorte de l’outil, si ce n’est ce qu’il veut qu’il sorte lui de cet outil » (Responsable du projet GTT). Pour résumer, l’évolution de la fonction Ressources Humaines chez France Télécom semble être sujette à un double mouvement : d’une part, une décentralisation de la prise de décision dans le cadre d’une politique nationale relayée par les Directions Régionales, d’autre part, une centralisation de la gestion administrative relative aux ressources humaines, accompagnée d’une informatisation des processus à faible valeur ajoutée. Cette centralisation de la gestion administrative des Ressources Humaines s’opère au niveau des Centres de Services ressources Humaines. Une étude empirique approfondie a été menée dans ces structures nouvellement créées chez France Télécom.

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Chapitre 4. Les Centres de Services Ressources Humaines : résultats de l’analyse empirique Les Centres de Service Ressources Humaines ont constitué un premier terrain d’analyse empirique pour la recherche. Ce terrain permet d’appréhender la fonction RH comme objet de flexibilité, le CSRH étant la pierre angulaire du reengineering de la fonction. Dans un premier temps sont rappelés le contexte de création et les principes de fonctionnement des CSRH (4.1.). Dans un second temps, l’analyse monographique de deux CSRH (A. et B.), fondée essentiellement sur une série d’entretiens semi-directifs menés en leur sein, est développée (4.2.), avant de conclure sur une rapide analyse comparative et transversale (4.3.).

4.1. Création et fonctionnement des Centres de Services Ressources Humaines Comme cela a été précisé auparavant, les CSRH sont un élément phare de la restructuration de la Fonction Ressources Humaines qui est menée chez France Télécom, laquelle vise à développer une FRH centrée sur son cœur de métier, partenaire d’affaire vis-à-vis des autres entités de l’entreprise, et créatrice de valeur ajoutée. Parmi ces évolutions, la création des Centres de Services Ressources Humaines manifeste la volonté de centraliser le traitement des actes administratifs, peu voire pas porteurs de valeur ajoutée. Mais les CSRH ne sont pas axés uniquement sur cette recherche de productivité, puisqu’ils sont également chargés de répondre aux questions que peuvent se poser les salariés relatives à leur situation individuelle, ainsi qu’aux managers de ces salariés et aux membres de la Fonction Ressources Humaines en Unités Opérationnelles. Les avantages anticipés de la création des CSRH portent par conséquent principalement sur une dimension économique, mais également sur la qualité de service21 :

- « Bénéfices des effets de seuil sur : ⇒ Le coût unitaire de traitement ; ⇒ Les besoins d’encadrement ; ⇒ Les moyens logistiques et techniques.

- Gestion de l’organisation et des hommes par : ⇒ L’accroissement de la capacité d’évolution de l’organisation en fonction de la charge de travail.

- Meilleure qualité de service aux clients par : ⇒ Le maintien d’un niveau de compétences du fait du nombre élevé de dossiers de même nature traités (y compris les dossiers complexes) ; ⇒ Le partage structuré et informel des expériences et savoirs professionnels au sein du Centre (professionnalisation des équipes). »

4.1.1. Peu d’assistants de gestion issus du domaine RH, et dont les motivations divergent

Du fait des réductions d’effectifs dans les services RH en Directions Régionales et en Unités Opérationnelles, les CSRH ont récupéré une partie de ces personnels qui ont été redéployés, mais également d’autres personnes redéployées et originaires de services principalement administratifs, mais également techniques (Responsable du projet CSRH).

21 « Centre de Services RH, Cahier des charges », France Télécom, document interne, 2000

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 57

Le cahier des charges des CSRH22 précise que la création et la localisation des CSRH doit se baser sur une étude préalable, portant notamment sur la densité des effectifs de gestion administrative par zone d’emploi ainsi que sur les opportunités de redéploiements. Dans les deux CSRH (que nous nommerons A et B) où les Directeurs ont pu être rencontrés, les salariés assurant la fonction d’assistant de gestion présentaient trois profils d’origine professionnelle : la Fonction Ressources Humaines, les autres fonctions support, les activités commerciales. Au niveau national, la proportion d’assistants de gestion issus de la filière RH est très variable, puisqu’elle va de 20% à 70% (Directrice du CSRH B). Dans les CSRH A et B, cette proportion se situe dans le bas de la fourchette. Les assistants de gestion sont pour l’essentiel originaires de fonctions support ayant connu des fermetures de services ou tout du moins des réductions d’effectifs comme les Achats ou la Comptabilité. Il y a enfin « des personnes qui viennent aussi du commercial un peu fatiguées de la vente, du proactif au téléphone aussi … » (Directrice du CSRH B). Au CSRH A, si la première vague de recrutement a concerné des personnes originaires des domaines RH et comptables, « la deuxième vague, ça a été complètement différent, il y a eu de tout, des gens qui viennent du contentieux professionnel, résidentiel, on a eu également des personnes qui venaient des services commerciaux : accueil physique, accueil téléphonique » (Directrice du CSRH A). Les assistants de gestion se sont portés volontaires pour intégrer les deux CSRH : il ne s’agit par conséquent pas de redéploiements forcés comme cela a pu être observé dans les centres d’appels qui ont constitué le second terrain de notre recherche. Mais s’ils ont demandé à intégrer un CSRH, ils n’avaient pas forcément pour autant souhaité quitter leur poste précédent : « les personnes qui viennent du contentieux professionnel ou résidentiel, effectivement ils ont fait un choix, mais de toute façon leur service disparaissait. Donc s’ils n’avaient pas fait le choix de venir au CSRH, ils auraient dû faire le choix d’aller dans un autre service, mais il fallait qu’ils fassent un choix » (Directrice du CSRH A). La situation est par contre différente pour les assistants de gestion issus de la fonction commerciale puisque leurs services d’origine n’étaient pas menacés de fermeture. Il s’agit dans leur cas d’une démarche totalement volontaire de leur part, dans la perspective de prendre du recul par rapport à l’intensité de la relation client caractéristique des postes commerciaux.

4.1.2. Une montée en compétences nécessitant des formations lourdes L’une des difficultés rencontrées à l’occasion de la création des CSRH et du développement de leur activité est la nécessité de faire monter en compétences ces personnes qui, même si elles travaillaient dans des services RH, y faisaient généralement du traitement administratif concernant des domaines précis de GRH, comme par exemple la rémunération. La maîtrise du poste d’assistant de gestion requiert désormais d’être compétent dans l’ensemble des domaines RH, puisqu’un assistant de gestion a la responsabilité d’un portefeuille de salariés pour lesquels il réalise l’ensemble de la gestion administrative RH. Un effort de formation a par conséquent dû être réalisé par l’entreprise, différencié en fonction de l’origine professionnelle des personnes intégrant les CSRH. Les assistants de gestion issus de la Fonction Ressources Humaines ont bénéficié de formations spécifiques aux différents pans du domaine dont ils n’avaient pas la maîtrise. Pour toutes les personnes originaires d’autres fonctions, la formation s’est révélée nécessairement plus lourde puisqu’elle doit traiter de l’ensemble de la gestion des ressources humaines. Ces assistants de gestion ont donc suivi une formation Capp Avenir sur une durée d’environ un

22 « Centre de Services RH, Cahier des charges », France Télécom, document interne, 2000

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an. Cette formation, réalisée par alternance (une semaine de cours pour deux ou trois semaines de travail en CSRH), s’est déroulée par modules traitant des règles de gestion, du système d’information, etc. Le parcours Capp Avenir « débouche sur un certificat de maîtrise des compétences, dans un premier temps collectif, et qui peut être dans un deuxième temps individuel » (Directrice du CSRH A). Le certificat collectif sanctionne l’acquisition de compétences par un groupe de travail. Trois groupes ont terminé leur parcours au CSRH d’Amiens, un quatrième est en cours de parcours, sa formation ayant commencé mi-2002. Plusieurs personnes des trois premiers groupes se sont inscrites pour passer le certificat individuel. L’objectif de Capp Avenir est en fait d’obtenir un diplôme Bac+2 en gestion du personnel (Responsable du projet CSRH). Le coût de la formation visant à la constitution des compétences des assistants de gestion, réalisée par un prestataire externe à France Télécom, est évalué pour chaque individu à 40 000 francs (soit un peu plus de 6 000 Euros). Selon la Directrice du CSRH B, Capp Avenir a fourni une très bonne formation théorique, laquelle doit « être complétée par une formation plus pratique au relationnel notamment de l’outil … du SIRH interne » (Directrice du CSRH B). Il s’agit en fait de mettre en pratique les connaissances théoriques qui ont été acquises, afin que les assistants de gestion soient en mesure de réaliser efficacement les tâches qui leur incombent. Ces formations plus ponctuelles et à vocation opérationnelle sont réalisées en interne par l’équipe Soutien. Par ailleurs, chaque équipe d’assistants de gestion inclut au moins un salarié plus ancien, issu de la filière RH, qui constitue le référent auprès de ses collègues. Un système de tutorat est ainsi mis en place, où le plus ancien vient en aide à ses collègues qui suivent les formations Capp Avenir.

4.1.3. Une logique client/fournisseur remise en cause La création des Centres de Services Ressources Humaines est un projet piloté par France Télécom Services RH, elle-même rattachée à la Direction des Ressources Humaines de l’entreprise. En tant qu’entité de la Fonction Ressources Humaines, les CSRH sont considérés comme des prestataires de services pour le compte de plusieurs Unités Opérationnelles, Branches ou services nationaux23. Le cahier des charges24 des CSRH précise en effet que « Le Centre de Services RH est un prestataire de services pour le compte de plusieurs entités clients ». Cependant une Directrice de CSRH fait remarquer que, si la notion d’une relation client / fournisseur présente l’intérêt d’introduire chez du personnel fonctionnaire et administratif l’idée qu’il est face à des clients internes, elle ne constitue pas néanmoins une grille de lecture pertinente en ce qui concerne les relations que les CSRH entretiennent avec les entités dont elles ont en charge la gestion administrative RH : « la relation client-fournisseur elle ne fonctionne pas avec les CSRH, elle est biaisée. Parce que quand vous êtes un client vous choisissez votre fournisseur, vous n’êtes pas content vous vous en débarrassez, là ce n’est pas vrai, le marché il a été régulé au départ, telle DR va dans tel CSRH, personne n’avait le choix » ; « Quand on est dans du relationnel avec une institution là ça peut être … ça biaise, parce que l’interlocuteur se sent en droit de tout demander, non. Notamment il n’a pas le droit de nous demander des choses qui sont trop coûteuses en gestion » (Directrice du CSRH B).

23 France Télécom, Dossier de presse "RH Demain", juillet 2002 24 « Centre de Services RH, Cahier des charges », France Télécom, document interne, 2000

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4.1.4. Le cahier des charges et ses adaptations locales Afin que les dix CSRH soient organisés et fonctionnent de manière homogène, un cahier des charges a été établi par FTSRH. Dès les premières phases de la création des CSRH, la performance demandée était connue : « On nous annonçait déjà des ratios de productivité […]. Janvier 2000, le cahier des charges l’indiquait déjà ! » (Directrice du CSRH A). Le cahier des charges25 donne des précisions relatives :

- Au périmètre (activités, processus de gestion administrative traités, entités prises en charge) ;

- A la volumétrie et aux ressources ; - Aux missions associées aux postes de référence ; - A l’organisation type ; - Aux outils du CSRH.

Les activités réalisées au sein d’un CSRH sont de plusieurs natures. La première est l’administration du personnel qui concerne, pour les salariés aussi bien sous statut fonctionnaire que contractuel : le traitement des informations relatives à la situation personnelle ou professionnelle des salariés et des décisions managériales s’y rapportant, les opérations de paie, ainsi que les charges sociales. L’information constitue la deuxième activité. Elle est différenciée en fonction de l’identité des personnes qui prennent contact avec le CSRH (manager, salarié, filière RH). Chaque équipe d’administration du personnel reçoit et traite ainsi les demandes d’information de son périmètre client. Ces deux premières activités sont réalisées par les assistants de gestion, alors que la troisième, le soutien administration du personnel est réalisée par des salariés appelés Soutiens. Elle regroupe principalement l’expertise sur les règles de gestion, le traitement des cas complexes, l’aide aux assistants de gestion en cas de difficultés sur la gestion des dossiers ou l’utilisation des outils informatiques, ainsi que l’administration du système d’information RH. Enfin, l’activité de contrôle interne réalise les contrôles préventifs et de supervision prévus par les processus de gestion RH, ainsi que des contrôles a posteriori de la qualité des traitements réalisés par le CSRH. Vingt processus de gestion administrative sont traités en CSRH, certains étant qualifiés de "standard", d’autres de "spécifiques". Les processus standards sont ceux qui sont réalisés par chacun des CSRH au profit des entités dont il a la charge (recrutement, temps de travail, absences, maladies, accidents, rémunération, etc.). A l’inverse, certains processus sont "spécifiques", en ce sens qu’un seul CSRH sur les dix est chargé de leur traitement, cette concentration étant justifiée par « des raisons de maîtrise du processus, de recours à des compétences spécialisées ou d’optimisation des moyens »26. Ces processus spécifiques ont notamment trait au chômage, aux disponibilités, aux détachements. Des éléments de volumétrie, relatifs aux ressources humaines nécessaires pour faire fonctionner efficacement les CSRH tout en optimisant les bénéfices tirés de la concentration de la gestion administrative, sont fournis dans le cahier des charges de janvier 2000, de même que des ratios charges/ressources, exprimés en termes de nombre d’agents gérés par assistant de gestion, et de nombre d’assistants par Responsable d’Equipe. Le périmètre prévu est de 12 000 salariés pour chaque CSRH, celui-ci accueillant près de 70 personnes, dont 48 assistants de gestion. Il est prévu qu’une fois la montée en compétences de l’ensemble des assistants de gestion réalisée, les indicateurs de productivité soient réexaminés.

25 « Centre de Services RH, Cahier des charges », France Télécom, document interne, 2000 26 « Centre de Services RH, Cahier des charges », France Télécom, document interne, 2000

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Les CSRH étant un type d’entité totalement nouveau au moment de leur création, les missions associées aux différents postes (dix en tout, de l’assistant de gestion au Directeur) sont présentées dans leurs grandes lignes. Ils se composent donc : des assistants de gestion qui traitent la gestion administrative des RH ainsi que de leurs Responsables d’Equipes ; de l’équipe d’experts soutiens et du Responsable soutien, qui viennent en aide aux assistants, mettent en œuvre des formations ponctuelles, interviennent sur le traitement de dossiers complexes ; de postes à vocation plus transverse ou support : expert contrôle interne/qualité, administrateur/support système d’information, gestionnaire de ressources, responsable gestion, assistant post-paie, et enfin du Directeur. Le cahier des charges recense enfin les outils informatiques nécessaires au bon pilotage et traitement de l’activité, tels que le système d’information RH, les outils intranet, les outils permettant de gérer l’activité d’assistance téléphonique, etc. Si le cahier des charges présentait et expliquait l’organisation souhaitée et apportait déjà des éléments précis en matière d’objectifs de productivité, les équipes restreintes constituées autour des Directeurs disposaient néanmoins aux niveaux locaux de marges de manœuvre dans la création de chacun des CSRH. C’est par exemple le cas de l’organisation de la fonction assistance téléphonique réalisée par les assistants de gestion : « c’était pas défini tel qu’on l’a mis en place, mais il était prévu qu’on fasse de la gestion de conseil assistance. Après, la façon de mettre en place, ça a été plus une initiative locale, mais au vu du cahier des charges » (Directrice du CSRH A). Par ailleurs, durant la période de montée en charge, l’organisation du travail n’était pas forcément telle que prévue par le cahier des charges : compte tenu du niveau de compétences des assistants de gestion, qui ne maîtrisaient pas l’ensemble du domaine RH, l’organisation pouvait se faire en portefeuille d’activités (certaines personnes ou équipes s’occupant de la rémunération, d’autres du temps de travail, etc.) et non en portefeuille clients, c’est-à-dire l’organisation "normale" où une équipe gère un nombre défini d’Unités Opérationnelles sur l’ensemble des processus de gestion administrative. La présence de ces marges de manœuvre explique l’existence de différences de fonctionnement, somme toute relatives, entre CSRH : « En gros les missions, tout est à peu près là pour remplir les missions. Après on choisit des formes d’organisation un peu atypiques en fonction de son bassin local, du niveau de ses compétences » (Directrice du CSRH B). Des différences ont par exemple été observées entre les CSRH A et B : alors qu’au CSRH B l’activité d’assistance téléphonique est séparée de l’activité de gestion administrative à la fois dans le temps et dans l’espace (roulement de personnel, plages horaires définies, pièce dédiée à l’assistance téléphonique), la séparation ne se fait que dans le temps au CSRH A, puisque les assistants de gestion prennent et traitent les appels depuis leur poste de travail habituel.

4.1.5. Gestion administrative des RH et assistance téléphonique : deux types d’activités différentes en termes d’autonomie des assistants de

gestion D’après le cahier des charges des CSRH27, un assistant de gestion :

- « Participe au traitement des besoins d’un portefeuille de clients affectés à son équipe ;

- Contribue à l’établissement d’une relation client en relation avec le correspondant Administration du personnel de l’entité concernée ;

- Traite la totalité des événements et des actes de gestion d’un salarié ; - Répond aux questions des salariés relatives à leurs situations individuelles ; - Répond aux questions des managers relatives aux règles de gestion RH ».

27 « Centre de Services RH, Cahier des charges », France Télécom, document interne, 2000

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Il ressort de ceci que les missions des assistants de gestion sont principalement de deux ordres : « traiter les actes de gestion administrative … informer, conseiller les salariés, les managers et les RH d’unités » sur la gestion administrative (Responsable du projet CSRH). La première de leurs missions est donc d’assurer le traitement administratif des actes de gestion correspondant à des décisions prises en Unités Opérationnelles. Il peut s’agir par exemple de traiter une demande de remboursement de frais, une fois celle-ci validée et donc signée par le manager du salarié concerné, et donc de faire la saisie dans le système d’information RH, dénommé Alliance. La seconde mission est d’informer les managers et les salariés en matière de réglementation RH (droits à congés selon le statut du salarié, etc.) et de réalisation des actes de gestion. Il s’agit d’une « fonction conseil – assistance, c’est simplement une hot-line téléphonique » (Responsable du projet CSRH). Les salariés disposent en effet d’un numéro vert pour contacter l’équipe de gestion (composée de quatre à six assistants de gestion) qui les gère personnellement au niveau du CSRH. Il est important de souligner que les activités des CSRH sont bien de nature administrative et de conseil, mais qu’elles ne sont en aucun cas de nature décisionnelle, puisque toutes les décisions RH concernant les salariés sont prises au niveau du terrain par les managers. Le personnel qui travaille dans les CSRH assure les deux missions qui sont dévolues au centre, soit le traitement administratif et la "hot-line RH". La volonté des initiateurs des CSRH était en effet que ce soient les mêmes personnes qui fassent le traitement administratif et le conseil pour un même portefeuille de salariés, afin qu’ils soient effectivement en mesure de répondre aux questions précises et spécifiques de chaque salarié (Responsable du projet CSRH). Cette séparation des deux activités dans le temps répond par ailleurs à une demande qui était exprimée par les personnes qui travaillaient auparavant dans les Bureaux des Ressources Humaines en Unités Opérationnelles, du fait de la difficultés qu’elles avaient à traiter les dossier sans être dérangées par des appels téléphoniques de salariés ou de managers ayant des questions à leur poser : « Les personnes qui travaillent dans le domaine RH se plaignaient du fait que quand elles étaient en train de traiter un dossier, elles étaient constamment dérangées par les gens qui appelaient. Donc on a voulu éviter ça. […] Donc la seule solution, c’était bien de différencier les plages d’accueil des plages de gestion » (Directrice du CSRH A). Une telle organisation a cependant son revers, puisque certaines assistantes de gestion assimilent le fait d’avoir des plages horaires dédiées à l’assistance téléphonique au travail réalisé dans les centres d’appels de France Télécom (Orange, Wanadoo, etc.), lequel ne bénéficie pas d’une bonne image : « Pour elles, ce n’est pas valorisant de faire du téléphone, parce que ça a une connotation centre d’appels, parce que de temps en temps il y a un client agressif » (Directrice du CSRH A) ; « Elles pensent que c’est utile, c’est clair, mais ce n’est pas marrant. Elles n’ont pas encore de plaisir à le faire, ça viendra peut-être un jour … c’est vrai c’est intéressant de renseigner quelqu’un, quelqu’un est dans la panade, on lui donne … il nous dit merci, c’est gratifiant. » (Directrice du CSRH B). Ces difficultés sont pour partie liées à l’importante montée en compétences que nécessite le poste d’assistant de gestion pour des personnes non originaires de la Fonction Ressources Humaines, comme cela a été évoqué auparavant. De ce fait, « elles n’ont pas les compétences sur toutes les question, d’où un stress supplémentaire […]. Ça suppose d’être compétent pour arriver à ce niveau de plaisir, et ce n’est pas le cas » (Directrice du CSRH B). Par ailleurs, l’avantage de disposer d’assistants de gestion capables de faire aussi bien du traitement administratif que du conseil téléphonique est qu’il est ainsi possible de leur attribuer l’une ou l’autre activité en fonction du volume de travail à réaliser (l’une des interrogations à l’ouverture des CSRH étant relative au volume du flux d’appels téléphoniques adressés au CSRH ainsi que sa variabilité). Disposer d’assistants de gestion compétents à la fois dans la gestion administrative et d’assistance téléphonique, séparer les deux activités dans le temps et dans l’espace, tout ceci vise à obtenir une organisation

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du travail permettant d’être plus flexible, puisque en ce qui concerne l’organisation interne des CSRH « l’objectif c’était la fluidité et la flexibilité » (Responsable du projet CSRH). L’intégration de ces deux tâches permet également d’éviter la dimension taylorienne du travail qui serait apparue si une partie des membres du CSRH n’avait fait que du traitement administratif, et l’autre que du soutien téléphonique : « la volonté et l’insistance sur le fait que chaque équipe de gestion ait un portefeuille et une double mission, c’est bien çà la volonté, c’est bien d’éviter justement la taylorisation, parce que là il était très facile de tomber dans ce biais » (Responsable du projet CSRH). Cependant, le principe dans l’organisation du travail est de scinder ces deux missions à la fois dans le temps et dans l’espace : « on fonctionne par roulement pour éviter […] de perturber ou de parceller effectivement leur travail au quotidien » (Responsable du projet CSRH). La diversité provient donc plus de l’alternance entre ces deux activités que d’une réelle variété de chacune d’elles. Mais s’il n’y a pas forcément une réelle variété (une fois les compétences acquises, les processus RH à traiter sont divers mais leur nombre reste limité et ils n’évoluent pas dans le temps), le degré d’autonomie est quant à lui très différent entre les deux activités. L’assistance téléphonique est ainsi qualifiée de "travail extrêmement contraint" par la Directrice du CSRH B. La gestion administrative laisse les assistants de gestion libres dans la manière de traiter le dossier du moment où les règles RH sont respectées et que les délais sont tenus, alors que l’assistance téléphonique s’opère par le biais d’outils informatiques qui acheminent les appels, permettent de monter les fiches recensant le contenu des appels, etc. : « Quand elles sont sur leur position de travail elles étudient un dossier, ce sont elles qui sont maîtresses du temps d’étude du dossier, on n’a pas de compteur derrière. Donc c’est elles qui étudient le dossier, qui prennent les décisions, elles sont dans un travail qui fait confiance à leur autonomie. Quand elles sont au téléphone, elles reçoivent plein de choses, donc elles sont en travail contraint. Plus contraint donc plus fatiguant. » (Directrice du CSRH B).

4.2. La flexibilité dans les CSRH : résultats de deux monographies 4.2.1. Rappels méthodologiques et place des CSRH dans la recherche

Suite à l’entretien exploratoire réalisé avec Thierry Lautard, Responsable du projet CSRH, celui-ci a pris contact avec les Directeurs des différents CSRH afin de déterminer quels étaient ceux susceptibles de nous accueillir pour procéder à des entretiens semi-directifs avec les différentes catégories de personnels présentes dans leur centre. La partie empirique de la recherche consacrée aux CSRH s’est déroulée au sein de deux Centres de Services Ressources Humaines, que nous nommerons A et B dans la suite de la présentation. Dans chacun des deux CSRH, outre la Directrice du CSRH, la majeure partie des entretiens s’est déroulée avec des assistantes de gestion, c’est-à-dire les salariés qui traitent les dossiers et assurent l’assistance téléphonique. Des personnes occupant d’autres fonctions ont également été interviewées : soutiens métier, responsables d’équipe, responsable du soutien, accompagnateur Système d’Information. En tout, vingt-cinq entretiens semi-directifs d’une durée moyenne d’environ une heure ont été réalisés. Spécificité des services administratifs, par opposition aux services techniques, toutes les personnes rencontrées étaient des femmes. Tout comme cela est le cas pour la partie empirique consacrée aux centres d’appels, l’échantillon des personnes rencontrées dans chacun des deux CSRH est relativement représentatif de leur structure, avec une majorité d’assistantes de gestion, quelques responsables d’équipes, ainsi que des fonctions plus transverses comme les soutiens ou l’accompagnateur Système d’Informations.

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Dans la même logique que les centres d’appels, les CSRH sont des entités permettant le redéploiement de personnels issus de services qui fusionnent, réduisent leur personnel, ou ferment. Ils se démarquent cependant des centres d’appels par le fait qu’ils ne se situent pas sur des activités à forte valeur ajoutée, comme la téléphonie mobile ou l’internet, mais dans une Fonction Ressources Humaines à laquelle il est demandé de réduire ses coûts. Ceci se concrétise au niveau du statut des salariés présents dans les CSRH, puisque tous les salariés sont issus de redéploiements, et donc sous statut France Télécom. Aucun contractuel n’a été embauché dans les deux CSRH étudiés. Par conséquent, la moyenne d’âge paraît plus élevée encore que dans le reste de l’entreprise (soit environ 45 ans), la plupart des salariés ayant par ailleurs plus de 20 ans d’ancienneté au sein de France Télécom. Du fait de la prédominance de la gestion administrative, il est difficile d’analyser les CSRH directement en comparaison aux centres d’appels. Ceci aurait été possible si les CSRH avaient été des centres d’appels RH avec une partie de l’activité dédiée à la gestion administrative en back-office, permettant par là même aux salariés d’avoir un travail plus diversifié et de ne pas être en permanence en contact téléphonique direct avec le client. Au vu de l’importance de la gestion administrative, les CSRH apparaissent comme une illustration de la transformation de la Fonction Ressources Humaines, avec des problématiques d’organisation interne qui leur sont propres (séparation temporelle et/ou spatiale des deux pans de l’activité, etc.). Outre une flexibilité interne quantitative liée au temps de travail, la flexibilité devrait y être observée principalement sous sa forme qualitative en termes de différence d’autonomie entre gestion administrative et assistance téléphonique, de polyvalence des assistantes de gestion sur l’ensemble de la Gestion des Ressources Humaines, de formation et de montée en compétences sur les différents domaines de la GRH.

4.2.2. Analyse des entretiens réalisés au CSRH A

4.2.2.1. Caractéristiques et parcours des personnes interviewées Les principales caractéristiques des salariés rencontrés au cours des entretiens sont résumées dans le tableau suivant.

Emploi

Grade

Age

Ancienneté FT

Ancienneté

CSRH

Identifiant

Statut

Ag/rh

2.2.

40 - 45 ans

21 ans

9 mois

[A-Ag/rh-1]

France Télécom

Soutien

2.3.

> 50 ans

33 ans

2 ans 4 mois (création)

[A-Soutien-2] France Télécom

Ag/rh

2.2.

55 ans

33 ans

2 ans 4 mois (création)

[A-Ag/rh-3]

France Télécom

Ag/rh

40 - 45 ans

19 ans

9 mois

[A-Ag/rh-4]

France Télécom

ASI

48 ans

19 ans

1 an

[A-ASI-5]

France Télécom

RE

2.3.

40 - 50 ans

20-25 ans

1 an

[A-RE-6]

France Télécom

Ag/rh

2.1. ou 2.2.

40 - 50 ans

25 ans

2 ans 4 mois (création)

[A-Ag/rh-7]

France Télécom

Ag/rh

2.2.

45 - 50 ans

27 ans

2 ans 2 mois

[A-Ag/rh-8]

France Télécom

Ag/rh

2.2.

35 - 40 ans

18 ans

2 ans

[A-Ag/rh-9]

France Télécom

RS

3.2. ou 3.3.

35 - 40 ans

17 ans

2 ans 4 mois (création)

[A-RS-10]

France Télécom

Légende : Ag/rh : assistant de gestion / RE : responsable d’équipe / RS : responsable soutien / ASI : accompagnateur Système d’Information

Tableau 1 : Caractéristiques des salariés interrogés au CSRH A

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 64

Conformément à la structure de la composition du personnel du CSRH, les salariés interviewés sont principalement des assistantes de gestion (six personnes sur les dix). Les autres fonctions présentes au CSRH sont également présentes, puisque ont également été rencontrés un soutien, un accompagnateur systèmes d’information, une responsable d’équipe et la responsable de l’équipe soutien. Tous les salariés de l’échantillon sont sous statut France Télécom. De fait, aucun contractuel n’a été embauché au CSRH puisque dans le cadre de la réorganisation de la Fonction Ressources Humaines, les personnes qui ont été intégrées dans les CSRH étaient toutes issues de redéploiements. L’ancienneté au sein de France Télécom est par ailleurs importante, dans tous les cas supérieure à 17 ans et souvent de plus de 20 ans. Par conséquent, la moyenne d’âge des personnes rencontrées s’établit autour de 45 ans, la population du CSRH étant probablement un peu plus âgée que la moyenne des salariés de l’entreprise. Plusieurs des personnes rencontrées ont participé à la création du CSRH et à sa mise en route, il y a un peu plus de deux ans au moment où ont été réalisés les entretiens. D’autres sont arrivées peu après ou plus récemment (moins d’un an), lors de la montée en charge du CSRH et de la création de nouvelles équipes de travail (appelées "plateaux" par les assistantes de gestion). Les mobilités au sein de l’entreprise pour venir travailler au CSRH ont été qualifiées de volontaires par tous les agents avec lesquels ont eu lieu les entretiens. Si l’on n’a assisté à aucun redéploiement forcé en direction du CSRH, il est cependant possible de préciser cette idée de volontariat des salariés. Il semblerait en effet que deux situations distinctes puissent être observées, en fonction de l’origine professionnelle des personnes présentes : fonctions supports ou activités commerciales.

• Fonctions supports (principalement Fonction Ressources Humaines)

Toutes les personnes issues de ces fonctions disent être arrivées volontairement à leur nouveau poste au CSRH. Cette affirmation peut cependant être nuancée, en ce sens que dans tous les cas, les services dans lesquels elles étaient présentes ont subi une restructuration, voire ont été fermés. Plus qu’une volonté de changer de poste, elles ont postulé pour intégrer le CSRH plutôt que d’autres services. Pour les assistantes de gestion issues de la filière RH, intégrer le CSRH était généralement considéré comme allant de soi, dans la continuité de leur emploi précédent et toujours en contact avec leur domaine de compétences. La même "volonté contrainte" se retrouve chez une assistante de gestion originaire du service du 12, qui a quant à elle anticipé la fermeture de ce service de renseignements téléphoniques qu’elle estime inévitable, et surtout cherché à éviter d’être par la suite redéployée vers un centre d’appels : « Orange n’a pas tellement une bonne réputation ! Parce qu’il y a des personnes avant moi qui ont été nommées d’office et ça ne passe pas très bien » ; « [Wanadoo] c’est trop technique, moi l’ordinateur je ne sais pas trop ! Je ne me voyais me lancer là-dedans. Je ne me sers pas beaucoup de l’ordinateur … ». A cette volonté de demeurer dans le domaine des ressources humaines ou d’éviter le travail en centres d’appels vient s’ajouter la volonté de ne pas ajouter à la mobilité professionnelle une mobilité géographique, c'est-à-dire de ne pas quitter le bassin d’emploi sur lequel se situait leur poste précédent. De même, le système d’horaires à la carte dont bénéficient les salariés du CSRH a parfois constitué l’une des raisons d’intégrer le CSRH plutôt qu’un centre d’appels, où les horaires sont beaucoup plus élargis et plus contraints.

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• Activités commerciales

La situation est différente pour les personnes originaires de services commerciaux, puisque l’on peut dire qu’elles ont dans leur cas réellement choisi d’intégrer le CSRH : « l’avantage que j’ai eu c’est que je suis allé cherché un métier » (ASI). Pour elles également la volonté de ne pas quitter la région est présente, mais les motivations de postuler au CSRH sont diverses : fatigue de la relation avec les clients, incompatibilité d’humeur avec leur ancien supérieur, contenu du travail jugé peu intéressant sur le dernier poste occupé suite à une restructuration, etc. L’évolution de la fonction commerciale elle-même et de ce qui est désormais demandé aux salariés ont également pu être des raisons importantes de la décision de quitter l’ancien poste : « fallait faire rentrer de l’argent tout de suite et le reste ne les intéressait pas du tout. J’avais l’impression de berner les gens. J’étais plus du tout en accord avec moi-même et donc j’ai demandé à changer et j’ai postulé pour le CSRH » (Ag/rh).

4.2.2.2. Flexibilité qualitative interne : travail / formation / autonomie

Une diversité et une complexité du travail issues du traitement de l’ensemble des processus RH

Comme cela a été déjà été mentionné auparavant, le travail des assistantes de gestion est à la fois composé de la gestion administrative des dossiers RH des salariés de France Télécom, et de l’assistance téléphonique relative aux questions qu’ils peuvent se poser concernant leurs dossiers. Deux assistantes de gestion résument cela ainsi :

- « On a ce système de centre d’appels où on répond au salarié sur les questions qu’il peut nous poser sur son dossier personnel. On essaie de traiter ce qu’il nous demande, de répondre le plus précisément possible et le mieux possible. Quand on ne sait pas, on le rappelle. Sinon on fait des actes de gestion : la maladie, les prestations familiales, toutes les prestations d’actions sociales. On gère le dossier du personnel. »

- « On s’occupe des dossiers du personnel depuis leur arrivée jusqu’à leur retraite et tout ce qu’il y a entre les deux, les congés maladie, les promotions, les mobilités … »

Lorsque l’on demande aux assistantes de gestion de parler de leur travail, elles font plus spontanément mention de ce qui a trait à la gestion administrative des salariés (appelés "clients"). En effet, c’est pour elles la gestion des dossiers des salariés de France Télécom qui constitue le cœur de leur travail, et non pas l’assistance téléphonique qui n’est pas toujours bien comprise : « pour elles la seule activité c’était les dossiers mais pas l’accueil téléphonique » (RE). Cette focalisation sur la partie administrative se retrouve également dans la manière d’évaluer leur performance au travail : « pour elles si on dit que les dirigeants ne sont pas satisfaits de l’efficacité, pour elles c’est que les dossiers. Je dis non, pas que les dossiers mais aussi le téléphone » (RE). Rappelons cependant que cette tendance à considérer la gestion administrative comme étant leur véritable travail s’explique également par la faible part qu’occupe normalement l’assistance téléphonique dans le temps de travail hebdomadaire (une demi-journée). Ainsi, les assistantes de gestion considèrent que leur travail est varié, mais ne parlent dans ce cas-là que de la gestion administrative. Le fait d’alterner cette gestion administrative avec l’assistance téléphonique aux clients n’a jamais été spontanément avancé comme étant un moyen d’effectuer un travail varié. C’est par conséquent principalement de la large gamme de domaines RH abordés dans les dossiers des salariés que provient la diversité ressentie :

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- « C’est diversifié quand même. Vous avez des choses qui vont revenir souvent comme les congés maladie, les absences … mais c’est très varié comme travail » (Ag/rh) ;

- « Ça change tout le temps, même les choses les plus simples on est toujours face à un cas » (Ag/rh) ;

- « C’est très vaste parce que ça touche toute la vie de l’agent » (Ag/rh). Cette diversité interne à la gestion administrative trouve sa source dans l’organisation du travail qui a été choisie, c’est-à-dire une organisation en portefeuille et non par activités. L’organisation par activités aurait consisté à attribuer à chaque groupe d’assistantes de gestion le traitement d’un type de processus RH défini (par exemple la gestion des processus relatifs à la rémunération). À l’inverse, l’organisation par portefeuille client revient à attribuer un nombre défini d’Unités Opérationnelles à des assistantes de gestion, qui traitent alors tous les processus RH concernant les salariés de ces Unités Opérationnelles. Au moment où les entretiens ont été réalisés, la plupart des plateaux constitutifs du CSRH fonctionnaient par portefeuille client. Une seule des personnes rencontrées faisait partie d’un plateau, qui, si à l’avenir fonctionnera également par portefeuille client, fonctionnait par activités du fait de la présence importante d’assistantes de gestion arrivées récemment et ne disposant pas des compétences nécessaires pour traiter l’ensemble des processus RH. L’organisation par portefeuille client a également pour conséquence le sentiment de réaliser un travail complexe, puisque les assistantes de gestion doivent être compétentes sur l’ensemble des domaines RH. C’est donc de la connaissance de la réglementation RH et de la diversité des cas à traiter que provient ce sentiment : « je touche un peu à tout, je me renseigne mais on ne pourra jamais être autonome complètement. Même les anciennes ne savent pas tout. Faut dire que ça change totalement donc … c’est énorme » (Ag/rh). Si cette amplitude des connaissances RH à acquérir est présente chez les salariés issus de la filière RH et qui travaillaient auparavant en bureau d’ordre, elle est encore plus marquée chez l’assistante de gestion qui a choisi de quitter le service du 12 : « plus intéressant c’est vrai, plus difficile parce qu’il y a beaucoup de choses à savoir » ; « c’est tellement vaste. Enfin moi je m’en rendais pas compte que ça soit si vaste que ça » ; « même si on croit bien connaître un domaine, non, il y a toujours un petit truc qui change tout ».

Des formations lourdes pour assurer la montée en compétences, relayées en interne par les soutiens et les anciennes

De cette volonté d’organiser le travail par portefeuille clients découle la nécessité de faire monter en compétences les assistantes de gestion sur l’ensemble des domaines RH. Sur les six assistantes de gestion rencontrées, cinq d’entre elles ont suivi la formation Capp Avenir qui porte sur la réglementation concernant les divers domaines des Ressources Humaines. Cette formation se réalise par alternance, avec une semaine de formation par mois et le reste du temps à travailler au CSRH : « On a tout de suite été sur le plateau. Remarquez c’est pas plus mal de faire les deux en même temps » (Ag/rh). Mais de par l’organisation en portefeuille clients, il n’y a pas toujours eu de correspondance entre les thèmes abordés durant les périodes de formation et le type de dossiers à traiter au CSRH au moment du retour sur le plateau, même si cela semble avoir été cherché : « c’était trois ou quatre jours de formation et ensuite on revenait un peu sur nos positions de travail où là en priorité on traitait ce qu’on avait vu pendant les cours. Quelquefois en cours ce qu’on avait vu on l’avait déjà plus ou moins vu sur le tas, mais on revoyait en approfondissements aux cours » (Ag/rh). Une assistante de gestion note également l’insuffisance de ce type de formation (uniquement réglementaire) pour traiter

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efficacement les dossiers : « Capp Avenir c’est très bien, mais ça n’apprend pas à l’employé de travailler, de savoir quoi faire sur tel cas » (Ag/rh). Par ailleurs, quelques formations ont pu être réalisées par les Soutiens lors de la mise en route du CSRH et avant que des assistantes de gestion ne commencent à suivre Capp Avenir. De manière plus générale, l’équipe des Soutiens organise régulièrement des formations plus ponctuelles sur des points de gestion spécifiques, comme par exemple la mise en place de la rémunération globale des cadres. Une assistante de gestion a également fait mention de l’existence d’une formation relative à l’assistance téléphonique, mais qui n’a pas été très développée : « on a eu un cours en arrivant pour nous apprendre la bonne parole mais sans plus. C’est pas la même exigence [que dans les centres d’appels] puisqu’on a des clients internes » (Ag/rh). À leur arrivée au CSRH, les nouvelles assistantes de gestion bénéficient par ailleurs d’un système de tutorat de la part des plus anciennes, généralement originaires de la Fonction Ressources Humaines : « avec les nouvelles elles font du tutorat. Même si elles ont une formation sur Capp Avenir ; même nous plus anciennes on a toujours quelque chose à leur demander » (Ag/rh). En effet, les personnes nouvellement arrivées ne savaient pas dans tous les cas comment traiter les dossiers qui leur était attribués si elles n’avaient pas suivi les modules de Capp Avenir précédemment : « on l’a appris avec les anciennes qui faisaient parti du RH avant. Donc on a appris sur le tas avec ces personnes-là en plus des formations qu’on avait » (Ag/rh). Mais d’après une assistante de gestion travaillant dans la filière RH depuis plus de vingt ans et ayant participé à l’ouverture du CSRH, le tutorat n’est pas un système réellement efficace parce que les tuteurs doivent garder leurs propres dossiers à gérer : « On avait mis en route les tuteurs puis ça n’allait pas vraiment parce que les filles qui ont des questions à poser, bon ben c’est tout, qu’elles les posent, hein ! Sinon il aurait fallu que je n’ai pas de position et que je fasse l’école derrière les personnes. Être tuteur et travailler c’est pas possible, on peut pas faire les deux » (Ag/rh).

Deux activités différentes en termes d’autonomie des assistantes de gestion

Les objectifs, tout comme les modalités de contrôle, sont très différents entre la gestion administrative et l’assistance téléphonique, comme le résume ainsi une assistante de gestion : « L’assistance téléphonique, dans le bureau du responsable il y a un micro qui centralise tous les appels et en gestion de toute façon on gère le portefeuille et on fait ce qu’on a à faire » (Ag/rh). En ce qui concerne la gestion administrative, aucun objectif n’est précisément défini, mais il s’agit de boucler le maximum de dossiers pour la date à laquelle doivent être clôturées toutes les opérations relative à la paie des salariés :

- « Passer le maximum d’actes de gestion relatifs à la paie à peu près quatre jours avant la date fatidique » (Ag/rh) ;

- « en gros l’objectif c’est la paie, c’est le principal » (Ag/rh) ; - « A la fin de chaque période de paie le RE regarde tout ce qui reste dans les

chemises donc tous les dossiers en retard. On n’a pas encore des objectifs quantitatifs définis, pour l’instant on n’a que des objectifs de qualité mais c’est à peu près pareil ».

Selon une Responsable d’Equipe, le contrôle de l’efficacité du traitement des dossiers s’opère de manière quantitative (nombre de dossiers traités, en attente), et qualitative : « l’efficacité je l’évalue dans le traitement des dossiers en faisant un point toutes les semaines de tout ce qui a été traité et ce qui reste à faire en fonction de la date d’arrivée et je regarde si ça a été fait correctement » (RE).

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De la même manière, les assistantes de gestion gèrent leurs dossiers comme elles le souhaitent, l’objectif restant toujours d’en avoir traité le maximum pour la date de la paie. Cependant tout ceci doit évidemment se dérouler dans le respect de la réglementation et des règles RH spécifiques à l’entreprise. Une seule assistante de gestion a fait mention de procédures à suivre dans le traitement des dossiers : « on s’organise en conséquence et on est libre de gérer nos dossiers comme on veut. Sinon pour les gérer, il y a une procédure à suivre et on regarde dans le DGRH en fonction du dossier » ; « on ne fait pas ça comme ça quand même, on a des procédures à suivre, on a des documents pour nous aider quand c’est le premier par exemple. On a donc un mode opératoire et on a toujours la possibilité de demander aux anciennes. C’est vrai qu’on a des procédures à suivre, on ne peut pas faire n’importe quoi » (Ag/rh). Mais d’après plusieurs assistantes de gestion, le travail n’est effectivement pas défini de manière rigide, mais il est contraint par les délais à respecter et la pression liée à la date de la paie : « on va d’urgence en urgence, c’est tout à fait ça ! » (Ag/rh) ; « je décide de faire ça ou ça mais je ne fais jamais ce que je décide parce qu’il y a toujours des changements qui arrivent et on ne traite en gros que les urgences » (Ag/rh). Cette auto-organisation de leur travail est par ailleurs liée à la nature du traitement des dossiers dont elles sont responsables, celui-ci pouvant dans certains cas s’étaler sur plusieurs mois : « il faut attendre les retours, puis il faut reprendre, puis ça repart pour trois mois, c’est long. Y a des procédures très très longues » (Ag/rh). Malgré cette liberté dans la manière de traiter les dossiers, l’une des assistantes de gestion rencontrées, issue de la filière RH, regrette le manque d’autonomie qui lui est accordé comparé à son poste précédent « là au CSRH on est comme à la maternelle. J’ai vraiment l’impression de rétrograder pire qu’au départ de ma carrière. C’est "fais ci, fais ça, vas pas là" … » (Ag/rh), ce qui est source d’insatisfaction : « Je ne peux pas faire ce que je veux. C’est toujours fait pour faire au mieux et là on m’empêche de le faire et ça m’énerve » (Ag/rh). Pour l’activité d’assistance téléphonique, aucun objectif précis n’a été assigné aux assistantes de gestion, mais « en temps de réponse on ne doit pas laisser trop attendre les salariés » (Ag/rh). Une autre assistante de gestion rappelle qu’il faut essayer de clore le plus d’appels immédiatement, c’est-à-dire de les traiter un direct avec le client et non pas de les mettre dans la corbeille du plateau qui gère le salarié en question. Selon une assistante de gestion, il serait inéluctable et même normal que des objectifs soient fixés dans l’avenir, au moins en ce qui concerne l’assistance téléphonique : « sur les demandes clôturées ça serait normal parce que quand le clients appelle il faut qu’on arrive à le renseigner hein ! » (Ag/rh). D’après elle, seul le fait que toutes les assistantes de gestion n’aient pas terminé leur formation explique que ces objectifs ne soient pas encore mis en place : « on ne nous impose rien pour l’instant mais … on ne peut pas imposer parce qu’il y a des gens qui n’ont pas terminé leur formation » (Ag/rh). Une assistante de gestion résume en quelques mots en quoi consiste l’assistance téléphonique : « quand le client appelle, on enregistre son identifiant pour que s’affichent les informations relatives à l’agent. Ensuite on note l’appel, normalement on est censé le prendre en direct mais les trois quarts du temps on est surpassé ; ensuite on va dans Alliance voir si on peut résoudre l’affaire, si oui on donne la réponse à l’agent. Si le dossier est clôturé le jour même c’est tout, c’est terminé, sinon on ne peut pas résoudre, on envoie ça sur la plateau en question » (Ag/rh). Les assistantes de gestion doivent au maximum essayer de répondre aux demandes ou questions des salariés qui appellent, c’est-à-dire "clôturer le dossier", dans le cas contraire elles entrent la demande dans le système informatique (@ssist’RH) pour la transmettre au plateau qui gère le dossier du salarié.

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L’activité d’assistance téléphonique semble être plus formalisée que celle de gestion administrative : « en premier on doit s’annoncer, ensuite on demande l’identifiant du salarié et on a des infos à rentrer dans la machine, on a des répertoires dans le système informatique où classer les types d’appels comme les congés maladie, les attestations, etc. » (Ag/rh). Il n’y a cependant pas de procédures, de séquences-types, de scripts à suivre comme c’est le cas dans des centres d’appels traditionnels : « non c’est naturel. On s’annonce, on leur demande leur code d’identifiant France Télécom de façon à pouvoir accéder sur leur dossier » (Ag/rh). Le travail est par contre ressenti comme étant beaucoup plus parcellisé que ne l’est la gestion administrative : « pour le téléphone c’est évident qu’on fait des petits bouts de travail. Pour la gestion je dirais c’est quand même plus de A à Z » (Ag/rh). Grâce aux outils informatiques dont disposent les Responsables d’Equipes, ils peuvent comme dans tout centre d’appels suivre le flux des appels, les temps de réponse, de retrait, etc. : « si par exemple quelqu’un s’est mis en retrait trop longtemps, ils peuvent très bien lui demander pourquoi » (Ag/rh). En plus du temps de retrait, ils s’intéressent surtout au pourcentage d’appels clôturés au regard des appels reçus. Ce soutien apporté par l’informatique facilite les procédures de contrôle par les RE : « On a l’outil, on a des chiffres, c’est quand même plus facile. Tandis que dans les dossiers et les courriers il faut être très rigoureux et bien surveiller les dates d’arrivée et cerner aussi les personnes qui ont du retard » (RE). Il semblerait que les Responsables d’Equipes ne pratiquent pas d’écoutes des conversations téléphoniques, mais ceci n’est pas clair pour les assistantes de gestion elles-mêmes : « officiellement non, officieusement certaines disent que oui » (Ag/rh). L’une des Responsables d’Equipes, ayant travaillé au 1014 avant d’intégrer le CSRH, va parfois s’asseoir à côté des assistantes de gestion quand elles sont au téléphone, dans le but d’améliorer leur discours ainsi que leur manière de travailler, ce qui n’a pas été facile à faire accepter : « j’ai eu beaucoup de difficultés à le faire accepter parce que pour elles c’était du flicage, et j’ai eu du mal à leur faire comprendre que c’était pour les aider et que de toute façon il n’y avait pas que des points négatifs » (RE). Le travail est contraint par le flux des appels, puisque les assistantes de gestion prennent les communications téléphoniques au fur et à mesure de leur arrivée via le numéro vert et leur distribution entre les différents postes de travail. Des périodes de creux peuvent exister, durant lesquelles il n’y a aucun appel téléphonique. Les attitudes des assistantes de gestion divergent alors : certaines respectent l’organisation du travail telle que définie, c’est-à-dire qu’elles ne font pas de traitement administratif « Quand on a un moment de libre on rappelle le client pour lui donner la réponse. Mais quand je suis d’appel en aucun cas je fais des actes de gestion qui demandent de la rigueur. Puis quand on est d’appel c’est aussi le moment privilégié pour aller regarder sur l’application pour voir toutes les nouveautés qui arrivent dans le domaine RH » (Ag/rh) ; d’autres en profitent pour faire le traitement administratif de dossiers puisqu’elles estiment ne pas avoir suffisamment de temps dans la semaine pour faire l’ensemble de ce qui leur est demandé : « souvent après la paie il y a des jours où c’est relativement creux et on essaie de faire un peu de gestion. On n’a pas le droit mais on le fait quand même » (Ag/rh).

Un poste de travail unique pour les deux activités Contrairement à ce qui est réalisé dans d’autres Centres de Services Ressources Humaines, les activités de gestion et d’assistances téléphoniques sont séparées dans le temps mais non dans l’espace, puisque les assistantes de gestion restent sur leur poste de travail durant leurs vacations téléphoniques. Ceci explique l’autonomie qu’elles prennent de traiter des dossiers durant les périodes d’assistance téléphonique où le nombre d’appels

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est faible. Elles voient en effet à côté d’elles durant cette période de temps où elles devraient se consacrer uniquement à l’assistance téléphonique les dossiers des salariés qui sont en attente, puisque chaque assistante de gestion dispose de son propre poste de travail. Comme s’exclame l’une des personnes rencontrées : « heureusement parce que vu le nombre de dossiers qu’on a ! ». Dans l’ensemble les assistantes de gestion considèrent que leurs postes de travail sont bien agencés, même si quelques éléments plus ponctuels sont mentionnés, comme par exemple des problèmes d’organisation de l’archivage qui les gêneraient dans leur travail.

4.2.2.3. Flexibilité quantitative interne : rémunération / temps de travail

Rémunération Comme dans le reste de l’entreprise et en fonction du grade, les assistantes de gestion et les soutiens ne bénéficient pas d’un système de rémunération globale :

- « C’est en fonction du grade, c’est tout. On est payé comme des fonctionnaires avec l’ancienneté, le grade. Pour les employés pour l’instant y a une prime exceptionnelle qui est versée une fois par an » (Ag/rh) ;

- « Jusque 2.3. inclus on n’a pas la rémunération globale donc on continue à avoir des avancements d’échelon normaux » (Soutien).

Ce système de rémunération sépare les assistantes de gestion de la hiérarchie du CSRH qui est sujette au système de rémunération globale mis en place dans l’entreprise : « les cadres, la rémunération globale, y a leurs échelons mais tous les ans y a une augmentation managériale qui vient en plus de leur changement d’échelon ou alors qui leur grignote leur changement d’échelon s’ils ne donnent pas vraiment satisfaction » (Soutien). Comme cela vient d’être mentionné, les Responsables d’Equipe ont à leur disposition un certain nombre de primes exceptionnelles qu’ils attribuent (latitude managériale) à des membres de leurs équipes. Ce système de primes exceptionnelles accordées par les RE est parfois mal ressenti par les salariés habitués au fonctionnement de France Télécom en tant qu’entreprise publique, et qui les considèrent comme une source d’inéquité : « y a des gens qui ont des primes et ça je l’ai mal encaissé alors que je suis ancienne et y en a qui les ont eues. J’aimerais bien savoir pourquoi j’en ai pas eu alors que j’ai essayé de faire le maximum » (Ag/rh).

Temps de travail : horaires à la carte vs. vacations prédéfinies La gestion du temps de travail est différente pour l’activité de gestion des dossiers des salariés de France Télécom et celle d’assistance téléphonique. En fait les assistantes de gestion bénéficient des horaires à la carte, sauf pour les plages d’assistance téléphonique qui sont prédéfinies pour chaque plateau selon un planning prévu sur l’année. Selon la Responsable d’Equipe, « il suffit qu’à la fin du mois elles aient fait leur nombre d’heures. Y a des plages obligatoires, mais après 16h elles peuvent partir » (RE). Mais une des assistantes de gestion nous explique que ce système n’est plus de mise et que le temps de travail se gère désormais à la semaine : « on pointe et on a le droit que de faire une heure en plus par semaine ou une heure en moins. Donc si vous faites une semaine une heure et demie, la demi-heure est perdue » (Ag/rh), ce qui est source d’insatisfaction pour elle : « j’ai rien contre l’heure à la semaine mais ça prend la tête. Gérer au mois c’est quand même plus facile. C’est une perte de temps encore » (Ag/rh).

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Un planning annuel définit donc les tours de service que doivent prendre les différents plateaux pour l’assistance téléphonique, chaque plateau assurant l’une des deux plages horaires quotidiennes, à savoir 8h-13h ou 13h-18h30. Les six plateaux assurent les vacations téléphoniques l’un après l’autre, et de ce fait chaque assistante de gestion est de permanence téléphonique une demi-journée (d’une durée de 5h ou 5h30) tous les trois jours. Mais dans les faits les assistantes de gestion sont plus souvent au téléphone que cela n’a été prévu au départ. En effet, elles estiment que le volume d’appels ne peut être traité par le seul plateau qui assure normalement l’assistance téléphonique : « depuis qu’on a pris la Branche Entreprises, on est pratiquement au téléphone toute la journée » (Ag/rh). En plus de ce plateau (appelé groupement 1, ou GT1), un autre plateau (appelé groupement 2 ou GT2) prend en charge les appels en cas de débordement, c'est-à-dire si le groupement 1 ne peut gérer à lui seul les appels entrants. Une assistante de gestion résume ce fonctionnement : « au téléphone on y est de 13h à 18h30 donc ça englobe déjà une bonne demi-journée. Si bien que le lendemain on travaille moins. Si on est de téléphone l’après-midi, le matin on est en GT2 sachant qu’il y a toujours eu débordement donc ça fait une journée de travail entière au téléphones » (Ag/rh). Dans les faits les assistantes de gestion seraient donc au téléphone au moins une demi-journée de plus que prévu par semaine, ce qui réduit d’autant le temps qu’elle peuvent accorder à la gestion de leurs dossiers, pour lesquels elles estiment déjà être sous pression. Malgré ces plages horaires définies pour un plateau, il semblerait que sur certains plateaux les assistantes de gestion s’organisent entre elles en fin de journée pour ne garder que le nombre de personnes nécessaire pour répondre aux appels et libérer les autres : « Quand on est beaucoup sur le plateau on ne reste pas tous. De toute manière à 18h30 on n’a plus beaucoup d’appels. Donc en fait on s’arrange entre nous » (Ag/rh). La Responsable d’Equipe rencontrée indique quant à elle qu’elle gère son équipe en fonction des flux d’appels mais refuse que les membres de son équipe s’auto-organisent comme le mentionnait l’assistante de gestion ci-dessus : « Je leur dis exceptionnellement que si elles veulent partir, elles peuvent ou si elles n’ont pas leur nombre d’heures elles se mettent en retrait et elles traitent des dossiers. Mais je veux que ce soit uniquement quand je leur dis et qu’elles ne se mettent pas en retrait pendant une demi-heure pour faire un dossier » (RE).

4.2.2.4. Flexibilité quantitative interne : redéploiements / mobilité Comme cela a été expliqué en présentation du CSRH, les assistantes de gestion sont pour la plupart issues de redéploiements, souvent à la suite de réorganisations ou de fermetures de services, au départ RH puis principalement comptables. Selon l’Accompagnateur Systèmes d’Information, aucune ne regrette son arrivée au CSRH. Cependant la Responsable Soutien reconnaît que de tels redéploiements peuvent déstabiliser les salariés qui les vivent : « c’est vrai qu’en changeant de métier, en créant un service comme ça … non seulement on déstabilise les gens parce qu’ils doivent se réinvestir complètement, changement d’organisation, changement de compétences, changement de responsable … donc je veux dire tout ce qui était leurs repères changent complètement. Donc c’est vrai que depuis deux ans elles ont dû se reconstruire » (RS). Les assistantes de gestion rencontrées, si elles semblent avoir bien vécu leur propre redéploiement, sont critiques envers les déploiements en général et leurs conséquences :

- « On crée des services, on les ferme, trois ans après on se rend compte qu’ils étaient indispensables, on les rouvre, on rappelle les gens qui étaient partis … c’est une aberration ! Je crois qu’il y a des gens complètement démotivés » (Ag/rh) ;

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- « Y a beaucoup de gens qui demandent des changements dans d’autres administrations, de plus en plus. Ils en ont marre. Toujours faire changer les gens comme ça … » (Ag/rh).

Compte tenu du coût engagé par l’entreprise dans la formation Capp Avenir, les assistantes de gestion doivent normalement rester deux ans sur le CSRH. Quelques départs ont néanmoins déjà eu lieu, quasi totalement dans le cadre de Congés de Fin de Carrière. D’un point de vue plus qualitatif, une mobilité existe au sein du CSRH lors de la création de nouveaux plateaux. Étant donné que les personnes qui arrivent pour composer ces nouvelles équipes ne sont en général plus originaires de la Fonction Ressources Humaines et ne maîtrisent pas la manière de traiter les dossiers au sein du CSRH, quelques "anciennes" des équipes existantes quittent leurs équipes pour intégrer les nouvelles : « Au moment de la reprise de la Branche Entreprises, il a fallu restructurer pour passer de quatre plateaux à six. On a donc pris deux ou trois personnes de chaque plateau pour former ces deux autres plateaux pour éviter de mettre que des nouveaux arrivants » (Ag/rh).

4.2.2.5. Relations de travail et relations hiérarchiques

Les relations de travail entre collègues Les assistantes de gestion rencontrées estiment travailler dans une bonne ambiance, avec des relations conviviales avec leurs collègues de plateau : « je m’entends très bien avec mes collègues. C’est assez convivial, y a toujours un travail de groupe mais au RH ça a toujours été un travail de groupe » (Ag/rh) ; « sur mon plateau tout le monde se connaît bien » (Ag/rh). Probablement du fait de l’étendue des connaissances RH nécessaires au regard de celles que possède effectivement chaque assistante de gestion, toutes mettent en exergue l’entraide qui est développée au sein de chaque équipe :

- « On s’entend toutes très bien, il y a de l’entraide. Il y a quelques nouvelles qui sont arrivées et y a pas de problème de ce côté-là » (Ag/rh) ;

- « C’est un boulot où il faut que tout le monde s’entraide » (Ag/rh) ; - « Si quelqu’un ne peut pas passer un acte parce que c’est juste limite limite, la

collègue peut le faire » (Ag/rh). Cette entraide est également présente dans l’équipe des Soutiens « on a une collègue qui fait du RH depuis trente ans, donc quand on est coincé on lui demande » (Soutien), qui note par ailleurs les bonnes relations qu’entretiennent les assistantes de gestion avec les Soutiens. Cette cohésion entre les personnes d’un même plateau est également notée par l’Accompagnateur Systèmes d’Information. Certaines assistantes de gestion regrettent un certain manque de relations entre les différents plateaux qui composent le CSRH, mais considèrent que c’est à chacune d’entre elles de faire des efforts pour nouer des relations avec les personnes qui n’appartiennent par à leur propre plateau : « C’est à nous aussi de sortir. Si je m’installe sur mon plateau et que j’y reste, si tout le monde fait comme moi, personne ne viendra. Non parfois je traverse les couloirs et j’ai des contacts avec les autres » (Ag/rh). L’organisation en plateau est parfois remise en cause, au regard du fonctionnement antérieur de la fonction RH, car elle aurait pour conséquence de limiter les relations entre les plateaux et entre les personnes d’un même plateau : « C’est certainement le fait qu’on est un groupe important qu’il n’y a plus de communication entre nous. Avant c’était plus soudé, plus chaleureux » ; « sur les autres plateaux on ne se dit même pas bonjour parce qu’on ne prend pas le temps de se dire bonjour » (Ag/rh).

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À l’inverse, d’autres mettent l’accent sur l’entraide qui existe entre les différents plateaux en cas de difficultés de l’un d’eux (surcharge de travail, nombre de personnes en formation trop important pour pouvoir traiter les dossiers dans les temps, etc.) : « quelquefois il nous arrive de faire des actes pour des collègues d’autres unités. On s’entraide. C’est un travail d’équipe de toute manière ! » (Ag/rh). L’entraide entre plateaux que les assistantes de gestion acceptent de bonne grâce est également soulignée par la Responsable d’Equipe : « Il y a eu un problème sur un plateau pendant un mois et demi où il y a eu énormément de malades donc il a fallu faire de l’entraide. Elles l’ont fait, elles ont même accepté de traiter certains dossiers en allant sur le plateau concerné pour ne pas balader des dossiers, des courriers » (RE). Les relations entre les Responsables d’Equipes paraissent quant à elles nettement moins resserrées, la RE rencontrée regrettant le manque de relations et de réflexions communes entre eux : « quand le collègue a une idée, il la met en application, ça fonctionne très bien donc il faut s’échanger ses idées ou parfois y réfléchir ensemble. Quand il y a un domaine sur lequel on n’arrive pas à trouver une solution pour que ça fonctionne bien, se dire on se met autour d’une table, on propose et on voit ce qui sera le plus efficace » (RE). De ce manque de relations et de coordination entre responsables résultent des styles de management différents entre plateaux, des annonces n’intervenant pas aux mêmes moments, etc., ce qui est mal compris par les assistantes de gestion et se révèle préjudiciable à l’ensemble du CSRH : « Il faut que les responsables aient la même vision du management, faut qu’on marche exactement dans le même sens parce qu’entre elles elles parlent et se disent "tiens pourquoi elle fait ça et pas moi ?", donc ça je trouve c’est important, si on veut que ça tourne bien il faut aller dans le même sens » ; « elles m’ont dit "on ne comprend pas pourquoi tu fais ça, tu es la seule à le faire". C’est là que je me suis dit qu’effectivement c’est dangereux » (RE).

Les relations hiérarchiques Les relations entre les assistantes de gestion et leurs Responsables d’Equipes sont bonnes, parfois cordiales, mais il semblerait que les assistantes de gestion n’aient pas toutes compris le rôle de leur encadrement, et que dans certains cas les Responsables d’Equipes n’assument pas le rôle qui devrait être le leur mais se rapprochent au contraire de ce que souhaiteraient les membres de leurs équipes. Quelques remarques d’une assistante de gestion illustrent les bonnes relations qu’elle entretient avec son Responsable d’Equipe : « nous on a un RE vraiment super et sur les autres plateaux c’est pareil, ils sont très disponibles » ; « y a jamais eu de problème. Super bien super super et c’est important. On est vraiment secondé » (RE). Selon la Responsable d’Equipe, les assistantes de gestion attendent d’elle du soutien et qu’elle les aide à traiter les dossiers sur lesquels elles ont des difficultés, sans pour autant intervenir directement sur le dossier : « elles veulent qu’on les accompagne et qu’on les soutiennent. Quand elles se sentent en difficulté, elles paniquent et c’est normal donc elles attendent que je vienne et que je les aide et que je leur apporte une solution » (RE). Mais contrairement à ce que souhaiterait l’entreprise (faire des managers le 1er RH de leur équipe), une partie des assistantes de gestion continue de voir le Responsable d’Equipe comme un référent, un expert en matière de RH, et attendent de sa part une assistance dans le traitement des dossiers complexes : « Son rôle c’est pas simplement de … il peut nous aider aussi » (Ag/rh) ; « Qu’il sache également traiter les actes, qu’on puisse aller lui demander un conseil si on a un problème avec un dossier » (Ag/rh). Cet écart entre les attentes des assistantes de gestion et ce qui est demandé aux managers de France Télécom est souligné par la Responsable Soutien : « on nous demande de dire "je ne sais

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pas mais je n’ai pas à savoir", et c’est vrai que là il y a un décalage entre les attentes des assistantes de gestion … » (RS). De ce fait, le manque de connaissance des RE en termes de réglementation RH et de mode de traitement des dossiers est parfois mal ressenti par les assistantes de gestion « qu’elle s’intègre, qu’elle apprenne comme nous quoi ! » ; « [la connaissance RH] normalement ils sont censé l’avoir, hein ! » (Ag/rh), voire porte atteinte à leur légitimité, principalement auprès des personnes originaires de la filière RH : « Bien souvent c’est des gens qui n’ont pas fait des RH et qui sont devenus chefs. Donc ils en savent moins que moi » (Ag/rh) Les attitudes des Responsables d’Equipe divergent, certains s’en tenant effectivement à leur rôle de premier RH, de pilotage de l’activité de l’équipe, etc., alors que d’autres se rapprochent des attentes des assistantes de gestion à leur égard, allant parfois jusqu’à prendre en charge une partie du travail que doivent réaliser les personnes de l’équipe : « on a de la chance d’en avoir un qui nous défend et qui fait même du travail pour nous en fin de paie, que les autres ce n’est pas le cas » (Ag/rh). Cette attitude de certains RE est déplorée par la Responsable de l’Equipe Soutien, qui y voit l’une des raisons des difficultés actuelles du CSRH : « je pense qu’il y a un décalage avec les Responsables d’Equipes, c’est que eux ils ont leur petite équipe et ils ont la tête enfouie dans le quotidien, dans le B à Ba, et en fait ils font le neuvième, et ils font ce que moi je faisais à une époque à la compte, c’est-à-dire le volant de remplacement parfois. Et je pense que les agents, les assistantes de gestion à un moment donné ne les regardent plus de la même manière » (RS). Enfin, le style de management de certains Responsables d’Equipes, jugé trop directif, est parfois remis en cause, notamment par une assistante de gestion issue de la filière RH et qui avait visiblement l’habitude de travailler en toute autonomie :

- « Ma chef était gestionnaire comme moi donc elle connaît le travail, ce n’est pas ça que je lui reproche mais c’est sa manière de manager » ;

- « Du management autrement que ça parce que être commandée […] ne me va pas du tout » ;

- « Quand on fait quelque chose de bien on ne vient pas nous le dire, par contre quand on fait quelque chose de pas très bien ça ils ne manquent pas de le dire » ;

- « J’ai des collègues plus jeunes sur le plateau et qui en ont marre d’être commandées. Ils me disent "toi tu t’en vas, tu tiens le bon bout ».

4.2.2.6. Évaluation de la performance

Productivité / qualité / apport des TIC (performance organisationnelle)

Comme cela a été évoqué auparavant, aucun objectif précis n’est fixé aux assistantes de gestion, que ce soit pour la gestion administrative ou pour l’assistance téléphonique. Il leur est de ce fait difficile d’évaluer leur performance, sauf à regarder la taille des piles de dossiers ayant été traités et de ceux en attente de traitement. Par ailleurs, l’ambiguïté traditionnelle aux centres d’appels entre productivité (nombre d’appels à prendre, temps de communication, de retrait) et qualité de service est également présente dans l’assistance téléphonique. En matière d’efficacité globale du CSRH, l’Accompagnateur Systèmes d’Information fait toutefois remarquer, probablement au regard du nombre de salariés géré par assistante de gestion, que « les ratios sont excellents au CSRH […] et on est quand même un des

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meilleurs CSRH de France, il faut le dire » (ASI). Mais un problème d’efficacité du fonctionnement du CSRH est ressenti par les responsables du CSRH, et est source de nombreuses interrogations de leur part : « Je ne sais pas si c’est le fait d’avoir récupéré la Branche Entreprise, si c’est le fait de s’être agrandi … si c’est le fait d’avoir d’autres personnes qui sont arrivées au sein du CSRH, j’ai l’impression que là on patine » (RS) ; « Est-ce qu’en ratio [la Directrice du CSRH] considère qu’on est bon ? Parce que si c’est nos ratios c’est pas la peine d’essayer de trouver de nouvelles organisations. Si on butte toujours sur ce ratio de toute façon on n’aura pas de solution pour améliorer les choses. Maintenant on estime que le ratio est bon, regardons nos organisations, regardons ce que l’on fait pour optimiser, parce qu’il y a peut-être des choses qui sont faites qui ne sont pas utiles, peut-être que justement dans les circuits tout le monde s’occupe de tout, ça on l’a déjà vu, on l’a déjà remarqué, donc une perte de temps » (RS). En ce qui concerne l’assistance téléphonique, il semblerait qu’il soit plutôt demandé aux assistantes de gestion de mettre l’accent sur la qualité du traitement des demandes des clients et non sur le nombre d’appels à traiter, comme l’atteste la Responsable d’Equipe : « On n’est pas là pour leur dire vous avez tant d’appels mais faites-les correctement ! » (RE). Cependant les assistantes de gestion font remarquer une pression récente mise par la direction du CSRH pour comprendre pourquoi deux plateaux sont en permanence au téléphone et améliorer la performance : « là en ce moment ils sont en train de tout regarder parce qu’ils trouvent des gens qui se mettent en retrait pour répondre » (Ag/rh). Rappelons encore une fois que le suivi de la performance de l’assistance téléphonique est plus aisé que celui de la gestion des dossiers, du fait du recours aux technologies de l’information pour répartir les appels, suivre les temps de communication, le nombre de salariés en appel ou en retrait, etc. Selon l’un des Soutiens, si les assistantes de gestion doivent passer dans la semaine plus de temps que prévu en assistance téléphonique, c’est justement parce qu’elles ne respectent pas l’organisation du travail qui a été définie : « ceux qui sont au téléphone se mettent en retrait pour demander des renseignements ou autre pour traiter le dossier tout de suite, ce qui fait que ça déborde. Donc au lieu d’être une demi-journée au téléphone, elles sont toute la journée ! » ; « si c’était bien respecté, quand elles n’ont pas de téléphone, elles pourraient traiter leurs dossiers tranquillement sans être dérangées par le téléphone. Mais là c’est pas forcément le cas parce qu’y a d’autres collègues qui leur demandent de traiter telle ou telle chose pour traiter en direct » (Soutien). Du fait de ces dysfonctionnements au niveau de l’assistance téléphonique, aussi bien les assistantes de gestion que leur hiérarchie regrettent une qualité de service qu’ils jugent moins bonne que ce qu’il serait possible de faire : « Des fois les temps de communication je me dis c’est pas possible qu’elles aient interrogé le client parce que c’est vraiment très rapide » (RE). Au niveau des assistantes de gestion, ce sentiment est renforcé par l’obligation qui est la leur d’assurer les permanences téléphoniques alors même qu’elles ne possèdent pas encore les connaissances nécessaires sur l’ensemble des domaines RH, et ne sont par conséquent pas en mesure de répondre à toutes les questions qui leur sont posées. Elles doivent dans ce cas déposer les questions dans la corbeille du plateau qui gère le dossier de l’agent, ce qui a pour conséquence que les assistantes de gestion du plateau doivent prendre du temps pour répondre à ces questions, ce qui réduit par conséquent le temps disponible pour la gestion des dossiers. Encore une fois, l’assistante de gestion issue de la filière RH depuis plus de vingt ans regrette le mode de fonctionnement du CSRH et estime que la qualité de service est moindre par rapport à ce qui était obtenu avant la réorganisation de la FRH : « Avant j’avais l’impression de bien travailler, de bien faire mon travail, j’étais contente tous les mois. Je faisais tous mes dossiers. Tout était clean, mais là pas du tout. Je ne sais même

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pas ce qu’il y a dans les cases, y a peut-être des gens qui vont rester là et qui vont être pénalisés » (Ag/rh).

Motivation / satisfaction / implication (performance individuelle)

Une motivation issue de la diversité des domaines RH, mais limitée par un manque d’autonomie et de reconnaissance

La diversité du travail semble être une source de motivation récurrente chez les assistantes de gestion. Mais encore une fois, la diversité ressentie est issue de l’organisation du travail par portefeuille, qui nécessite de traiter l’ensemble des processus RH, et non de l’alternance entre la gestion et l’assistance téléphonique. Pour les assistantes de gestion, qu’elles soient issues de la filière RH ou non, c’est la gestion administrative des dossiers des salariés qui constitue leur véritable travail, l’assistance téléphonique ne représentant qu’une activité supplémentaire, obligatoire, et qui vient réduire d’autant le temps qu’il leur est possible d’accorder à leurs dossiers : « je préfèrerais faire que de la gestion et avoir au téléphone mes agents. Parce que faire du téléphone ça n’apporte pas grand-chose. C’est prendre un appel, le notifier dans l’application et l’envoyer sur le plateau qui le gère si on ne peut pas répondre » (Ag/rh). Cependant certaines assistantes de gestion reconnaissent l’intérêt de l’assistance téléphonique qui permet d’être confronté à d’autres problèmes que ceux gérés dans les dossiers : « Quand on est au téléphone c’est vrai que ça nous mange notre temps de gestion mais l’intérêt du téléphone c’est qu’on apprend énormément de choses parce que quand on a un cas, on est obligé d’aller chercher dans la doc » (Ag/rh). La qualité du service rendu aux salariés de France Télécom est également une source de motivation importante et répandue : « Les intérêts c’est quand j’ai quelqu’un qui m’appelle et qui est satisfait. La satisfaction du client qui est content de notre travail, qui reconnaît notre capacité » (Ag/rh) ; « Apporter de l’aide aux agents. C’est quand même motivant parce qu’on a l’impression d’être utile à quelque chose » (Ag/rh) ; « on essaie toujours de faire le maximum pour le salarié » (Ag/rh). Une seule fois l’existence de primes exceptionnelles, assimilées à un mode de reconnaissance du travail réalisé, a été citée comme un facteur de motivation. À l’inverse, le manque de reconnaissance au quotidien par la hiérarchie peut être source de démotivation : « je n’ai jamais eu aucune récompense, aucune félicitation, rien, c’est pour ça je vous dis que je suis très déçue » (Ag/rh) ; « une évaluation oui, de la reconnaisse il n’y en a pas beaucoup hein ! » (Ag/rh) ; « on essaie de faire de notre mieux et on a l’impression que ce n’est jamais reconnu. On se fait engueuler parce qu’on ne fait pas telle ou telle chose mais on ne nous dit jamais merci quand on fait bien » (Ag/rh). Les effets négatifs des redéploiements se ressentent également en termes de démotivation d’une partie du personnel : « faut quand même se dire que les gens de mon âge 40/50 ans n’aspirent qu’à une chose c’est que le CFC soit prolongé. Vous trouvez ça normal ? » (Ag/rh) ; « y a une telle incertitude qui fait que les gens n’ont plus envie de s’investir dans leur boulot » (Ag/rh). Encore une fois, l’organisation du travail plus rigide que ce qu’ont connu certaines personnes en Direction Régionale auparavant ne renforce pas leur motivation parfois déjà vacillante : « J’arrive en fin de carrière, dans trois mois je serai en CFC, c’est vraiment la fin mais une triste fin. Je suis vraiment déçue. […] C’est le même métier mais sans responsabilité et j’étais beaucoup plus autonome » (Ag/rh).

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(In)satisfaction : la crainte de ne pas pouvoir répondre aux clients, et une organisation du travail insatisfaisante

L’organisation du temps de travail sous la forme des horaires à la carte est unanimement reconnu comme un facteur de satisfaction par l’ensemble des personnes qui ont été rencontrées. Les conditions de travail, prises dans leur globalité, sont sources de satisfaction, comme le résume cette assistante de gestion : « l’ambiance je ne m’en plains pas. Les conditions de travail il y a pire. Je pense qu’on peut dialoguer quand ça ne va pas. Je ne regrette pas d’avoir changé de travail ». Les assistantes de gestion, principalement lorsqu’elles ne sont pas issues de la filière RH, manifestent une crainte de ne pas pouvoir répondre aux questions qui leur sont posées lors de leurs vacations téléphoniques. Rappelons que les assistantes de gestion qui n’ont pas fini leur parcours de formation Capp Avenir assurent l’assistance téléphonique au même titre que les autres. Le fait de ne pas être en mesure de répondre aux clients qui appellent est donc pour elles un motif d’insatisfaction : « je ne sais pas toujours répondre, c’est un peu frustrant quand même » (Ag/rh) ; « j’appréhende les appels pour savoir déjà si je vais comprendre ce qu’ils veulent » (Ag/rh) ; « j’avais pas l’angoisse du téléphone, ce qui me perturbait le plus c’était de ne pas pouvoir donner la réponse » (Ag/rh). Le manque de temps pour gérer les dossiers, lié aux débordements dans l’assistance téléphonique est un facteur d’insatisfaction chronique :

- « Pendant qu’on répond au téléphone on ne fait pas le dossier et les gens tant qu’ils n’ont pas ce qu’ils veulent, ils appellent tous les jours exprès. C’est une chose que je n’apprécie pas du tout » (Ag/rh) ;

- « Pour la gestion des dossiers on n’a plus beaucoup de temps. C’est énervant parce qu’on voit que la paie approche et c’est stressant » (Ag/rh) ;

- « Etre pris toute la journée pour le téléphone, deux fois par semaine, il ne reste plus beaucoup de temps pour la gestion » (Ag/rh) ;

- … Par ailleurs, le manque d’autonomie dont les assistantes de gestion estiment faire l’objet, ainsi que le mode de management de certains Responsables d’Equipes, sont source d’une insatisfaction importante. On assiste en fait à un décalage entre d’une part les assistantes de gestion, habituées dans leurs postes précédents à travailler de manière autonome et cherchant à répondre le mieux possible aux demandes des salariés de France Télécom, et d’autre part une organisation et une hiérarchie qu’elles estiment trop rigides :

- « On fait des appels téléphoniques et puis par moment on se dit "ah bon ben on n’appelle pas", mais en attendant quoi faire entre deux si ce n’est lire des notes … j’ai l’impression de perdre mon temps » (Ag/rh) ;

- « Je me demande si on ne va pas être obligé de demander la permission pour aller faire pipi ! » (Ag/rh) ;

- « J’ai l’impression d’être au niveau maternelle, d’être commandée, surveillée … » (Ag/rh).

L’explication suivante, donnée par une assistante de gestion à propos de la pression récente de la hiérarchie sur le respect de l’organisation du travail à l’assistance téléphonique, est exemplaire de l’incompréhension des assistantes de gestion face à ce qui leur est demandé de faire : « S’ils continuent comme ça ils vont casser tous les plateaux. Nous aux plateaux 1 et 2 ça marche relativement bien mais s’il y a des problèmes de ce côté-là, on va tomber malade, c’est pas possible autrement ! Quand vous êtes stressé déjà dès le matin, hier j’ai une collègue qui était en assistance téléphonique et qui est allée passer un fax pour un agent qui lui demandait un imprimé, elle s’est faite engueuler

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parce que normalement elle n’est pas censée le faire pour l’agent, chacun doit se débrouiller pour chercher l’imprimé » (Ag/rh).

Implication : une rupture avec les valeurs traditionnelles parfois mal acceptée Comme dans le reste de l’entreprise, l’évolution de France Télécom au cours de la dernière décennie n’a pas toujours été bien comprise, ni acceptée. Les assistantes de gestion restent pour la plupart axées sur la satisfaction de la demande de leurs "clients" internes que sont les salariés, et non sur les attentes de productivité issues de leur hiérarchie : « Elles n’ont pas encore la notion de clients, le salarié qui nous appelle c’est un client, même si c’est un collègue, il faut rester dans cette optique de gérer un client. Ça viendra peut-être hein ! » (ASI). Certaines regrettent le sentiment d’égalité entre les salariés qui prévalait auparavant : « Je préférais quand c’était des concours nationaux, que maintenant par entretien on sait qui sera pris avant les résultats. Je ne devrais pas dire ça mais c’est pourtant comme ça que ça se pratique » (Soutien). Plus fondamentalement, la notion d’entreprise est parfois en rupture avec les valeurs défendues par certains : « je suis entrée comme fonctionnaire justement pour être au service du public mais comme je vous ai dit tout à l’heure la politique [actuelle de France Télécom] ne me convenait plus. Je ne concevais pas ça comme ça. Je voyais un métier comme l’aide au public » (Ag/rh). Une assistante de gestion conclut sur cette question laconique : « Faut dire que quand on a 45 ans et qu’on a changé trois fois de ville et de boulot, comment on peut y croire encore à l’entreprise ? » …

Stress, burn out … L’obligation de boucler le maximum de dossiers pour la date de la paie est une source de stress pour certaines assistantes de gestion, d’autant plus que les débordements de l’assistance téléphonique réduisent le temps disponible pour la gestion : « on est toutes pareilles, tout le monde travaille avec conscience donc systématiquement on stresse » (Ag/rh) ; « la gestion c’est toujours dans l’urgence, c’est le manque de temps » (Ag/rh) ; « c’est énervant parce qu’on voit que la paie approche et c’est stressant » (Ag/rh). Selon certaines la surcharge de travail finira par atteindre un stade critique : « les gens finiront pas craquer. Ce qui va arriver c’est que les gens vont se mettre en maladie, ce qui va générer des retards supplémentaires » (Ag/rh), mais d’autres estiment ne pas avoir de pression. Cette pression que ressentent les assistantes de gestion est cependant minorée par l’un des Soutiens : « Elles disent qu’il y a de la pression mais on voit qu’elles n’ont jamais travaillé dans un centre d’appels où là il y a de la pression. Moi j’étais superviseur au 1014 […] y avait une autre pression qu’au CSRH. Au CSRH ils l’ont par la quantité de travail, la diversité, la compétence, les connaissances mais autrement non. Elles peuvent se permettre d’aller boire un café toutes ensemble alors qu’au centre d’appels c’est pas possible » (Soutien). L’assistance téléphonique est plus fatigante que la gestion, aussi bien du fait de la relation directe avec le client que de la crainte de ne pas pouvoir répondre aux demandes exprimées par les clients :

- « Le téléphone c’est bien mais c’est très fatigant. Quand on sort à 18h30 on est abruti parce que les questions passent du coq à l’âne. La journée passe très vite mais elle est très fatigante » (Ag/rh) ;

- « Des fois c’est la tension tout le temps en fonction de la cadence des appels et en fonction des questions aussi » (Ag/rh) ;

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- « C’est franchement difficile. Je m’en rends compte parce que le soir quand je quitte j’ai mal à la tête » (Ag/rh).

Cette pression ressentie aussi bien sur la gestion que sur le téléphone a pour conséquence qu’il devient parfois difficile de ne plus penser au travail une fois la journée terminée :

- « On se réveille la nuit, on pense aux dossiers … Y a des personnes qui arrivent à se déconnecter complètement et d’autres non » (Ag/rh) ;

- « vous ne partez jamais l’esprit tranquille. Vous vous réveillez la nuit en pensant à ce que vous n’avez pas fait etc. » (Ag/rh) ;

- « je ne viens pas au travail la peur au ventre donc c’est déjà un gros point, même si la nuit ça cogite » (Ag/rh) ;

- « C’est pas comme dans un métier où les gens qui rentrent chez eux n’ont rien dans la tête, mais nous c’est pas le cas. On passe des nuits blanches ! » (Ag/rh).

Ceci est confirmé par l’assistante de gestion qui était auparavant au service du 12 : « Quand on sortait du 12 on ne pensait à rien, mais là ça continue de travailler, "faut que je pense à ça, …" » (Ag/rh). Plus encore, la difficile transition avec les postes qui étaient occupés précédemment et dans lesquels certains personnes s’épanouissaient génère chez elles un fort sentiment de dévalorisation personnelle : « je me sens complètement dévaluée. Je ne suis pas bien dans ma peau » ; « Je ne suis plus rien » (Ag/rh).

4.2.2.7. Accompagnement RH : valorisation des métiers / perspective d’évolution

Seule l’assistante de gestion issue du service du 12 considère, au regard de son parcours professionnel, que le travail en CSRH est valorisé au sein de l’entreprise. Pour la plupart des assistantes de gestion, le travail au CSRH et plus généralement dans la fonction RH n’est pas valorisé : « De toute façon à France Télécom ce qui est valorisé c’est le commercial, et avant c’était le technique » (Ag/rh), symbole de l’évolution de l’entreprise mais où la Fonction Ressources Humaines, comme les autres fonctions support, n’est pas devenue un acteur stratégique central. Les assistantes ressentent cette faible valorisation au travers des relations quotidiennes qu’elles ont avec les salariés qui les appellent : « à la limite un client interne est plus exigeant qu’un client externe. […] Ils nous considèrent pas comme des collègues, on est là à leur service et y en a même qui ne sont pas sympas du tout » (Soutien). De la même manière, une fois arrivées au CSRH, les assistantes de gestion ne voient pas de perspectives d’évolution à leur carrière, mis à part éventuellement celle de devenir Soutien : « Peut-être des postes d’expert mais faut qu’il y ait des appels à candidature. Pour s’y présenter faut déjà avoir un niveau assez poussé dans le domaine » (Ag/rh), le problème étant qu’il n’y aura pas forcément de postes d’expert ouverts dans l’avenir. Les évolutions ne paraissent pas possibles au sein de la Fonction Ressources Humaines : « Passer 2.1. à passer 2.2. c’est tout ça s’arrête là ! En RH les évolutions de carrière n’ont jamais été … si on veut avancer en grade, il faut aller en commercial. Si vraiment on veut tenter une autre carrière, il faut sortir du CSRH et aller en commercial » (Ag/rh). Ceci impliquerait donc pour ces salariés généralement arrivés au CSRH suite à des réorganisations de services de changer totalement de métier pour progresser au sein de leur entreprise.

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4.2.3. Analyse des entretiens réalisés au CSRH B

4.2.3.1. Caractéristiques et parcours des personnes interviewées Les principales caractéristiques des salariés rencontrés au cours des entretiens sont résumées dans le tableau suivant.

Emploi

Grade

Age

Ancienneté FT

Ancienneté

CSRH

Identifiant

Statut

Ag/rh

2.2.

40-45 ans

19 ans

1 an et demi

[B-Ag/rh-1]

France Télécom

Ag/rh

[B-Ag/rh-2]

France Télécom

Ag/rh

[B-Ag/rh-3]

France Télécom

Ag/rh

> 50 ans

31 ans

Plutôt parmi les premières

[B-Ag/rh-4]

France Télécom

Ag/rh

2.1.

45-50 ans

25 ans

2 ans

[B-Ag/rh-5]

France Télécom

Ag/rh

2.2.

< 40 ans

21 ans

2 ans 4 mois

[B-Ag/rh-6]

France Télécom

Ag/rh

2.2.

Presque 2 ans

[B-Ag/rh-7]

France Télécom

RE

3.1. ou 3.2.

Environ 45 ans

24 ans

2 ans

[B-RE-8]

France Télécom

RE

3.3.

< 40 ans

18 ans

[B-RE-9]

France Télécom

Soutien

2.2.

Environ 30 ans

7 ans

2 ans et demi

[B-Soutien-10]

France Télécom

Ag/rh

2.2.

2 ans et demi

[B-Ag/rh-11]

France Télécom

Ag/rh

2.2.

50-55 ans

35 ans

[B-Ag/rh-12]

France Télécom

Ag/rh

2 ans et demi

[B-Ag/rh-13]

France Télécom

Légende : Ag/rh : assistant de gestion / RE : responsable d’équipe

Tableau 2 : Caractéristiques des salariés interrogés au CSRH B L’échantillon de personnes qui a été rencontré est principalement constitué d’assistantes de gestion (dix sur les treize), qui effectuent dans les faits l’activité principale du CSRH. Deux Responsables d’Equipes et un Soutien ont également été interviewés. La structure de cet échantillon est relativement similaire à la structure réelle du CSRH. Tous les salariés rencontrés sont sous statut France Télécom et ont effectué l’intégralité de leur carrière au sein de l’entreprise, certains atteignant par conséquent plus de trente ans d’ancienneté. De manière générale, l’âge moyen s’établit aux alentours de 45 ans, avec quelques personnes s’approchant du départ en Congé de Fin de Carrière, et d’autres de moins de 40 ans (dont le Soutien d’une trentaine d’années). L’ancienneté au sein du CSRH est variée mais dans tous les cas supérieure à un an. Plusieurs personnes ont participé à la mise en route du CSRH il y a deux ans et demi. La quasi-totalité des personnes interviewées sont originaires de la Fonction Ressources Humaines (dix des onze entretiens analysés). Toutes les assistantes de gestion de l’échantillon sont issues de la FRH, principalement en Unités Opérationnelles (en bureaux des ressources humaines, également appelés bureaux d’ordre) mais également en Direction régionale. Ceci constitue un biais dans notre échantillon puisque la Directrice du CSRH avait mentionné la présence pour plus de 50% de salariés non originaires de la fonction RH,

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issus de fonctions supports telles que les Achats ou le Budget, mais également de services commerciaux. Toutes les mobilités pour venir au CSRH ont été définies comme volontaires de la part des personnes qui les ont vécues. Cette mobilité peut néanmoins être qualifiée de contrainte, puisqu’elle est consécutive à des réorganisations de services entraînant des suppressions de postes, ou à des fermetures de services :

- « J’y suis venue un peu par obligation puisque les BRH ont été supprimés et donc j’ai voulu intégrer la plate-forme pour continuer le même métier » (Ag/rh) ;

- « Mon poste a été supprimé puisqu’il sont supprimé tous les RH d’établissement donc c’est comme ça que je me suis retrouvée ici » (AG/rh) ;

- « Toutes celles qui étaient à la DR de Melun sont naturellement arrivées au CSRH où il y a avait quand même besoin de compétences » (Soutien).

- « On me l’a plutôt suggéré, je n’avais pas franchement le choix » (Ag/rh). Il est par ailleurs intéressant de noter que, dans le contexte actuel de réorganisation permanente de France Télécom, certains membres de la Fonction Ressources Humaines ont préféré anticiper la fermeture de leur service et intégrer le CSRH le plus tôt possible, tant qu’il procédait encore à des recrutements : « De toute façon les ressources humaines où j’étais fermaient donc j’ai bien de fait de partir avant parce que j’ai pu choisir ma place » (Ag/rh). L’explication donnée par une Responsable d’Equipe des raisons qui ont motivé son arrivée au CSRH illustre bien le sentiment général : « avant qu’on nous mette dehors je voulais trouver un autre poste ailleurs et c’est pour ça que je suis arrivée au CSRH pour continuer le métier RH et pour me rapprocher de mon domicile ». Comme souvent dans le cas des redéploiements chez France Télécom, la notion de bassin local d’emploi tient une place majeure, les salariés étant peu mobiles géographiquement. On note par ailleurs la volonté franche des assistantes de gestion d’éviter tout redéploiement dans les services commerciaux, et plus encore en direction des centres d’appels.

4.2.3.2. Flexibilité qualitative interne : travail / formation / autonomie

Un travail varié grâce à l’organisation par portefeuille clients, demandant des connaissances RH étendues

Comme dans les autres CSRH, les assistantes de gestion assurent à la fois la gestion administrative des dossiers des salariés de France Télécom, et l’assistance téléphonique aux salariés et managers des Unités Opérationnelles. Lorsqu’on leur demande en quoi consiste leur travail, elles font spontanément référence à la gestion des dossiers. Selon leurs dires, elles suivent l’ensemble de la carrière des salariés : « Mon travail … maintenant c’est de gérer tout ce qui concerne les agents, tout ce qui est leur rémunération, tout ce qui est leur situation individuelle et familiale, le déroulement de fin de carrière … de A à Z, du recrutement jusqu’à leur départ à la retraite ou leur congé de fin carrière à 55 ans » (Ag/rh). L’assistance téléphonique est moins souvent citée en première approche comme contenu de leur travail, mais ceci se comprend du fait que les assistantes de gestion n’y passent qu’une demi-journée de 3 heures par semaine. Quant à son contenu, l’assistance téléphonique « ça correspond à des personnes qui cherchent un renseignement sur leur paie, sur leur situation. On prend des appels, si on peut les traiter en direct si on peut les renseigner on clôture l’appel, autrement on bascule la demande sur le pôle concerné pour qu’ils puissent répondre assez rapidement à cette personne. C’est prévu tout ça, c’est rangé sur le travail en direct » (Ag/rh).

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Malgré le faible intérêt qu’elles portent à l’assistance téléphonique, les assistantes de gestion ne considèrent pas les activités de gestion et de téléphone comme étant réellement différentes ou distinctes l’une de l’autre, mais comme deux faces d’une même activité :

- « C’est complémentaire. Différent non, c’est le type de clientèle qui change parce que là on a à faire à tous les salariés des deux DR confondues mais c’est un travail complémentaire » (Ag/rh) ;

- « En fait c’est la même activité [par rapport à son poste précédent] mais pas gérée pareil » (Ag/rh) ;

- « On fait le même travail sauf qu’on le fait au téléphone. On ne saisit pas du travail mais on essaie de renseigner les gens » (Ag/rh).

Les assistantes de gestion considèrent que leur travail est varié. Mais ce constat n’aurait peut-être pas été le même si la recherche c’était déroulée quelques semaines auparavant. En effet, toutes attribuent cette variété, ou tout du moins l’accroissement notable de la variété de leur travail, à l’organisation en portefeuille clients mise en place depuis un mois au moment de la réalisation des entretiens. En effet, l’organisation par portefeuille client permet de traiter l’ensemble du dossier d’un salarié, ce que ne permettait pas l’organisation par activités, ou les assistantes de gestion ne traitaient qu’un nombre de processus RH définis (par exemple tout ce qui avait trait à la rémunération) :

- « Depuis un mois nous avons un portefeuille client et ça nous permet de traiter vraiment tous les actes de gestion » (Ag/rh) ;

- « Varié encore plus maintenant parce qu’on a quatre pavés d’activités et avant on n’en avait qu’un, après on en a eu deux et maintenant quatre » (Ag/rh) ;

- « On a une vue d’ensemble, on a un seul interlocuteur et puis on est au courant du dossier du début jusqu’à la fin » (Ag/rh) ;

La variété du travail qui est ressentie est donc issue de la variété des domaines RH qui sont désormais gérés. Mais le contenu en lui-même, les modalités de traitement des actes de gestion, sont-ils pour autant variés ? Ceci n’est pas évident : « Il y a des choses répétitives c’est sûr, mais [le travail] demande quand même de la polyvalence parce qu’il y a beaucoup d’activité à connaître » (Ag/rh). Une autre assistante de gestion explique ainsi que son travail est varié, mais que les mêmes traitements reviennent : « C’est varié justement. Bon il y a toujours les mêmes trucs qui reviennent comme partout mais sinon c’est quand même plus varié qu’avant » (Ag/rh). Par ailleurs, elles reconnaissent qu’un certaine répétitivité existe du fait du travail de saisie dans le Système d’Information RH. Tout comme les assistantes de gestion parlent peu d’@ssist’RH en matière de contenu du travail, elles n’en font pas mention en ce qui concerne sa variété. Notons cependant que l’alternance entre la gestion administrative des dossiers et l’assistance téléphonique n’a jamais été mentionnée comme une source de variété du travail. Plus classiquement, les Responsables d’Equipe mettent volontiers en avant la diversité de leur travail, qui constitue l’une des source de l’intérêt qu’ils y accordent : « Ce qui fait le charme de la journée, quand on arrive on ne sait pas ce qui nous attend ; on sait qu’on aura pas fini mais on ne sait pas ce qui va nous tomber dessus » (Ag/rh). De cette diversité des processus RH et des domaines traités depuis le passage à une organisation par portefeuille de salarié découle une plus grande complexité du travail, que les assistantes de gestion appréhendent en termes d’étendue des connaissances à acquérir :

- « J’ai appris pas mal de choses même si c’est lourd à apprendre, c’est vraiment complexe » (Ag/rh) ;

- « Il y a beaucoup de réglementation, des choses à savoir » (Ag/rh) ;

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- « J’avais déjà une connaissance un petit peu du métier RH. Un petit peu, pas tout parce que où j’étais avant on ne faisait pas toutes les activités. Donc aussi j’ai eu une remise en question sur certains travaux à faire, quelques difficultés quand même … » (Ag/rh).

Toutes notent que les postes qu’elles occupent actuellement sont à fois plus diversifiés et plus complexes que ceux qu’elles occupaient auparavant dans la filière RH, mais également que ce qu’elles faisaient à leur arrivée au CSRH. Un sentiment de valorisation personnelle provient chez certaines de cette plus grande diversité du travail au regard des postes précédemment occupés : « depuis un an j’ai appris beaucoup de choses et je trouve que c’est bien, même personnellement » (Ag/rh). L’un des Responsables d’Equipes remet cependant en cause l’organisation en portefeuille client qui vient d’être mise en place, à cause justement de la trop grande diversité et des trop grandes connaissances qu’elle nécessite à ses yeux : « Mon point de vue personnel c’est que s’il y avait eu une séparation de ces rôles c’est certainement que la somme des connaissances à acquérir était certainement trop grande pour qu’une seule personne soit capable de faire l’intégralité des tâches » (Ag/rh).

Un manque d’application rapide de la formation initiale, mais des formations efficaces réalisées par les Soutiens

Cette étendue des connaissances à acquérir se retrouve en matière de formation au sein du CSRH. Des formations Capp Avenir ont été mises en place, pour les assistantes de gestion qui n’étaient pas originaires de la Fonction Ressources Humaines, mais également pour certaines provenant de la filière RH. Les formations théoriques que constituent les différents modules de Capp Avenir sont relayées en interne par les Soutiens, qui mettent en place des formations à vocation plus opérationnelle, plus axées sur l’utilisation des outils :

- « Nous derrière ces formations théoriques on met en place la formation pratique avec les écrans d’Alliance, comment ça se passe, comment on encode, etc. » (Soutien) ;

- « On fait normalement un ou deux jours après la mise en pratique pour que ce soit bien frais dans leur esprit puis sinon on fait aussi en fonction de leurs demandes et de leurs besoins » (Soutien).

L’organisation de la formation Capp Avenir est néanmoins critiquée par plusieurs assistantes de gestion, qui regrettent le manque d’application directe des formations au moment où elles ont été suivies. Ceci est notamment dû à l’organisation par activités qui existait à l’époque, les salariés pouvant par exemple suivre des formations sur le temps de travail, et continuer à traiter des dossiers de maladie :

- « C’était très théorique et après il a fallu appliquer sur la plate-forme mais le temps de traiter les dossiers, le cours n’a pas été mis à profit correctement. Maintenant depuis un mois on se retrouve en portefeuille complet, on a les documents, on va s’en sortir mais bon ça n’a pas été très bien organisé. Dans la théorie c’est vrai que c’était bien pensé, les cours pour rentrer sur la position de travail pour les dossiers, mais comme on était spécialisé au départ, c’était impraticable » (Ag/rh) ;

- « On nous a formé mais on n’a pas travaillé tout de suite sur les formations. Donc là maintenant on est obligé de travailler sur ces activités-là, alors on cherche » (Ag/rh) ;

Pour les salariés possédant déjà des connaissances solides en RH, des remises à niveau ont été organisées en interne : « Nous qui connaissons un peu les RH, on a un soutien, de

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formation sur place dans cette pièce même, de remise à niveau quoi » (Ag/rh). De même, des formations ponctuelles sont réalisées par les Soutiens sur des problèmes ou des thématiques précis. Il semblerait que les assistantes de gestion suivent de nombreuses formations, principalement à l’occasion du passage à l’organisation par portefeuille client : « on a eu pas mal de formations ce mois-ci » (Ag/rh). Une formation externe a par ailleurs été réalisée pour donner aux assistantes de gestion une base quant à la relation client au téléphone, donc pour @ssist’RH : « Un cabinet extérieur est venu deux ou trois jours pour faire une formation sur la technique de réponse au téléphone » (RE). La transmission de connaissances entre assistantes de gestion est par ailleurs fortement présente sur les différents plateaux, les plus anciennes aidant les plus jeunes, celles possédant des compétences pointues dans un domaines répondant aux questions des autres, etc. : « Il y a deux personnes qui sont en Capp Avenir. Donc ils sont sur notre pôle pour nous aider à faire les travaux de saisie. Mais ils commencent quand même à s’intégrer dans l’équipe. On leur apprend, on leur donne des dossiers » (Ag/rh) ; L’efficacité de l’équipe des Soutiens, tant en termes de formation que de soutien au quotidien, est également reconnue par les assistantes de gestion : « Si vraiment on a des problèmes sur un dossier parce qu’il a des particularités, il y a l’équipe de Soutiens qui est là pour nous épauler. Donc on est très bien encadré, ils savent très bien nous gérer nos problèmes » (Ag/rh).

La nature des objectifs laisse une liberté dans la gestion des priorités

Aussi bien en ce qui concerne la gestion administrative que l’assistance téléphonique, il n’y a pas d’objectifs réellement définis. En ce qui concerne la gestion, aucun objectif quantitatif n’est défini précisément, mais ce qui est souhaité a tout de même trait à des volumes de traitement : « Les objectifs c’est en fait de tout passer dans les délais et correctement » (RE) ; « L’objectif clair c’est qu’on arrive à absorber l’intégralité de la gestion qui nous a été confiée et qu’on arrive à tout traiter dans des délais acceptables. C’est pas quantifié » (RE). Cette notion de délai qui vient d’être évoquée par un Responsable d’Equipe a été bien intégrée par les assistantes de gestion, qui font part de la pression du temps juste avant la date à laquelle le maximum de dossier doit être bouclé, juste avant la date de paie :

- « Arriver à faire avant la fin de paie tout ce qu’il y a à faire ! Il y a des priorités de priorités de superpriorités donc on ne sait plus où sont les priorités dans tout ça » (Ag/rh) ;

- « On a des objectifs surtout en ce qui concerne la paie. On est tenu de respecter les périodes de paie. Donc il faut qu’il y ait le moins d’instances possible surtout côté rémunération » (Ag/rh) ;

- « On a des échéanciers paie, on essaie de faire le maximum pour que ce soit passé pour la paie » (Ag/rh).

Le respect de cette date butoir est suivi par les Responsables d’Equipes, qui viennent constater quelques jours avant la date de paie l’état d’avancement des dossiers : « Il vient nous voir dans nos casiers pour voir si tout est traité, s’il n’y a pas des urgences que l’on aurait laissé donc il surveille quand même, voir s’il y a des choses que l’on pouvait attendre pour faire, qu’il vaut mieux attendre pour faire ou autre chose. Mais il vient 48 heures avant la fin de la paie pour voir si tout est fait mais en général il n’y a pas de surprise » (Ag/rh). Sur un aspect plus qualitatif, un système de contrôle croisé a par ailleurs été mis en place entre assistantes de gestion, où elles vérifient le traitement de leurs dossiers entre elles. A ce contrôle s’ajoute la vérification faite par les Responsables d’Equipes sur certains dossiers pointus : « On essaie de se contrôler entre collègues, on

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fait un contrôle croisé comme on dit, mais sinon quand on a des choses un peu plus pointues on voit notre chef, on a des choses qui sont signées par notre responsable, elle vérifie » (Ag/rh). Mais concernant ce contrôle croisé, une assistante de gestion précise qu’il a fallu l’abandonner, faute de temps. A propos de la nouvelle organisation par portefeuille salariés, une assistante de gestion estime qu’il s’agit également d’une manière de mieux contrôler le travail : « Justement c’est pour ça qu’ils nous ont mis les portefeuilles, je pense aussi que c’est pour savoir le travail que l’on fait, ce qu’on arrive à faire avec un portefeuille » (Ag/rh). Concernant l’assistance téléphonique, la Responsable d’Equipe qui a en charge l’organisation du planning de l’ensemble des assistantes de gestion pour @ssist’RH explique quelles sont les demandes que la Direction du CSRH leur adresse : « Elle n’ont pas un temps à passer avec chaque personne ni un nombre d’appels à prendre. Les seuls indicateurs qui sont observés c’est les clôtures au premier appel. Quand un salarié appelle, il faut au maximum le renseigner pour clôturer cet appel » (RE). Ces objectifs semblent avoir été compris par les assistantes de gestion, certaines les expliquant quasiment dans les mêmes termes : « ce qu’ils veulent c’est que l’on clôture le plus souvent les fiches d’appels, c’est-à-dire qu’on puisse répondre tout de suite à l’agent pour éviter qu’il y ait une fiche qui parte » (Ag/rh). L’objectif serait à ce titre de clôturer 80% des appels. D’autres assistantes de gestion parlent de temps de communication à ne pas dépasser : « on a un petit délai quand même, il ne faut pas que l’on passe une heure avec chaque client, le but c’est quand même d’aller assez rapidement au niveau de chaque appel » (Ag/rh). Comme dans tout centre d’appels, les temps de communication, de retrait, etc., peuvent être contrôlés par les responsables par le biais des outils informatiques. Ce contrôle automatisé n’est pas toujours bien considéré par les salariés : « On nous a dit d’aller rapidement mais on a maintenant, on l’a su, qu’il y a un micro chez le responsable donc il voit quand on est en retrait et combien de temps on parle. Il fait les statistiques là-dessus. Il voit aussi quand on est arrêté pour un pause pipi ou cigarette » (Ag/rh). Un certain nombre de contraintes s’exercent par ailleurs sur le travail des assistantes de gestion, aussi bien dans la gestion des dossiers que dans l’assistance téléphonique. Dans le premier cas, on retrouve bien évidemment le respect de la réglementation RH, mais également la rigueur des processus RH (pour leur saisie dans le SIRH). Ces procédures ont néanmoins été allégées : « Il y a des processus à respecter qui ont été bien allégés depuis le début du CSRH donc on respecte dans la mesure du possible » (Ag/rh). Dans le cas de l’assistance téléphonique, il s’agit plus de contraintes issues de l’organisation du travail qui a été décidée : « Si on a eu des appels et qu’on répercute les fiches, on doit rappeler dans les 48 heures et après pour le délai de traitement jusqu’à 10 jours au niveau du dossier » (Ag/rh). Les personnes rencontrées n’ont pas fait mention d’un séquencement issu de l’utilisation de procédures d’accueil téléphonique du client, ou du traitement informatique de la demande en parallèle à la conversation avec ce client. Toutes les assistantes de gestion rencontrées expliquent qu’elles gèrent leur travail et fixent leurs priorités comme elles le souhaitent, dans le cadre des priorités données par leur Responsable d’Equipe :

- « On a l’échéance du mois de paie mais après personnellement je m’organise comme je veux » (Ag/rh) ;

- « C’est nous qui fixons les priorités. Il y a des dossiers tous les jours qui sont distribués à chaque agent. En fait c’est nous qui regardons les plus urgents. On traite comme on le sent. On regarde à peu près le délai qu’il faut pour que quand même ce soit mis en place assez rapidement » (Ag/rh) ;

- « On essaie de se dire "aujourd’hui il faudrait que je traite ça et ça" mais c’est pas la responsable qui me l’impose » (Ag/rh).

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Cette auto-organisation mène dans certains cas des assistantes de gestion à aller à l’encontre des priorités fixées par leur RE : « On passe outre des choses qui sont moins importantes pour les responsables mais importantes pour nous je trouve. Je pense aux clients comme des remboursements de frais qu’on attend le mois d’après » (Ag/rh). Plus que dans le contenu même de leur travail, que dans la manière de traiter les dossiers, il semblerait que l’autonomie des assistantes de gestion s’opère sur l’organisation temporelle de leur travail, c’est-à-dire sur l’ordre dans lequel elles vont traiter les différents dossiers qui leur sont attribués.

Une salle dédiée à l’assistance téléphonique Contrairement au CSRH A, l’assistance téléphonique est réalisée dans une salle spécifique et non pas sur le plateau en lui-même : « Nous sommes dans une pièce à part, nous sommes quatre, il y a quatre postes de travail, on est détaché … en retrait pour ne travailler que sur ces appels téléphoniques, on est là que pour renseigner et travailler » (Ag/rh). Cette salle fait l’objet de critiques des salariés selon lesquels, même à quatre, le niveau sonore est gênant : « c’est une salle qui n’est pas insonorisée et quand les quatre parlent on entend tout » (Ag/rh). Plusieurs assistantes de gestion estiment que les conditions de travail pourraient être améliorées. Leur mécontentement vient du fait qu’une quarantaine de personnes travaille dans la même grande salle, ce qui génère un bruit permanent. Et comme le résumé sommairement l’une d’elles : « Pas assez grand, pièce et bureau trop petit » (Ag/rh).

4.2.3.3. Flexibilité quantitative interne : rémunération / temps de travail

Rémunération : des primes exceptionnelles remises en cause Comme dans les autres CSRH, les assistantes de gestion ne bénéficient pas de la rémunération globale du fait de leur grade, mais ont la possibilité de se voir attribuer des primes exceptionnelles par leur Responsable d’Equipe. Si quelques rares assistantes préféreraient avoir des primes de résultat, basées sur des objectifs quantifiés, d’autres adoptent plutôt une attitude critique envers ces primes exceptionnelles : « Ça n’a pas été évident parce qu’on estimait que cette collègue avait aussi fait l’effort d’apprendre et on aurait aimé que tout le monde ait un petit peu pour que ce soit plus équitable. Donc ce genre de choses au sein d’une équipe c’est pas génial » (Ag/rh). Le Soutien exprime plus clairement ses critiques envers ces primes individuelles : « ça alourdit encore plus le climat » ; « je trouve que tout le monde a fait un gros travail, les gens qui sont arrivés en RH et qui sont partis de rien, je pense que chacun a fait un bon bout de chemin et c’est un peu dommage de séparer encore les gens » (Soutien). L’une des Responsables d’Equipes exprime par ailleurs la difficulté qui est la sienne de procéder à des choix en matière d’attribution des primes exceptionnelles : « Elles ne concernent que 10 à 15% de la population donc on ne peut pas donner à tout le monde, et à partir du moment où on a une équipe qui fait le même travail, c’est difficile d’en sortir une ou deux du lot pour dire "ben celle-là je vais lui donner une prime exceptionnelle et pas aux autres" » (RE).

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Temps de travail : horaires à la carte vs. vacations prédéfinies

La gestion du temps de travail s’opère selon un système d’horaires à la carte, qui entraîne la satisfaction de toutes les personnes travaillant au CSRH : « Je suis à 38 heures mais je suis à 80% donc 30 heures. Je travaille tous les jours mais je fais 9h-16h. […] Je préfère travailler tous les jours de 9h à 16h puisque j’ai un enfant à récupérer à l’école » (Ag/rh). Le système d’horaire variable est suivi par le biais d’une badgeuse, ce qui permet aux salariés de gérer le temps de travail sur le mois : « Pour la journée de travail c’est un horaire variable, on gère notre temps » (Soutien) ; « On gère pour le mois notre temps de travail. Il faut penser quand on arrive en fin de paie comme ça, c’est là où c’est un peu plus long » (Ag/rh). Il semblerait par ailleurs que les personnes aient eu la possibilité de choisir leur régime de temps de travail (temps partiel avec une semaine de cinq jours et une semaine de quatre jours, temps partiel sur cinq jours, etc.) : « Je n’ai jamais eu de problème pour avoir mes horaires » (Ag/rh) ; « J’avais déjà choisi ce temps convenu et en arrivant au CSRH j’ai demandé si je pouvais le conserver » (Ag/rh). Les plages horaires spécifiques à @ssist’RH sont par contre définies par le l’entremise d’un planning organisé par l’une des Responsables d’Equipe pour l’ensemble des assistantes de gestion : « Il y a quatre [assistantes] le matin et quatre l’après-midi sur les positions @ssist’RH, donc elles tournent. Une personne ne fait jamais une journée complète, elles font des vacations de trois heures. Donc ça occupe 8 personnes sur une journée et elles sont 48. Ça fait six jours avec un système de rotation pour éviter de retrouver toujours les mêmes personnes que ces postes-là » (RE). Les assistantes de gestion conservent cependant la possibilité de procéder à des échanges entre elles : « Si on a un congé ou si on est malade c’est à nous de trouver un collègue qui veut bien vous remplacer, on permute comme ça. On met le planning à jour, pour que notre responsable soit au courant de qui est sur l’assistance RH et voilà. […] Donc en général on s’arrange entre nous s’il y a un problème » (Ag/rh).

4.2.3.4. Flexibilité quantitative interne : redéploiements / mobilité Toutes les assistantes de gestion qui composent le CSRH sont issues de redéploiements, que ce sont en provenance de la filière RH ou d’autres services. L’une des Responsable d’Equipe comprend les difficultés qu’elles peuvent ressentir : « Soit elles prennent l’habitude soit au bout d’un moment elles vivent mal la situation. C’est pas évident d’arriver dans un service qui ferme à chaque fois ! Maintenant on dit le CSRH encore pendant combien de temps, personne ne peut le dire » (RE). La seconde Responsable d’Equipe rencontrée note les difficultés que les responsables peuvent éprouver à manager des personnes issues de redéploiements : « On travaille avec du personnel redéployé donc c’est un peu plus difficile. Il y a des gens qui ont accepté des postes au CSRH dans le désespoir d’avoir autre chose » (RE). La logique selon laquelle s’effectuent les redéploiements est parfois mal comprise par les assistantes de gestion, mais également par l’une des RE qui a eu à vivre ce genre de situation auparavant et qui montre que le système des redéploiements ne valorise pas les compétences des salariés qui postulent :

- « Au niveau de [la commune], au départ il y avait beaucoup de gens qui ont changé de métier, qui étaient plus dans le commercial ou autres et qui ont dû apprendre les RH. Alors que nous, venir pour faire du RH on nous disait que

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non, qu’il fallait aller sur les plates-formes Ola, tout ce qui était commercial et qui ne nous intéressait pas du tout » (Ag/rh) ;

- « Ce qui m’a considérablement aigri c’est que j’ai vu par le jeu des redéploiements des tas de gens qui n’avaient aucune prédisposition pour ce genre de métier et qui parce qu’ils étaient là et qu’il fallait bien les occuper on les a mis » (RE).

Les assistantes de gestion relient leurs redéploiements à la recherche de performance financière, et estiment que si l’entreprise pouvait les faire quitter France Télécom elle le ferait :

- « Pour l’instant ça fusionne … sûrement pour supprimer des emplois, c’est le but je pense » (Ag/rh) ;

- « S’ils peuvent nous mettre à la retraite ou dans d’autres administrations, ils le feront ! On le sent bien, on a beaucoup de détachements dans les autres administrations, ça déménage ! » (Ag/rh).

À ces mécontentements face aux redéploiements vient s’ajouter une crainte de nombreuses assistantes de gestion quant à la survie du CSRH :

- « Il y a quand même des choses qu’on avait entendu parler, la paie externalisée, des choses qui seraient externalisées et je me fais un peu de souci pour mon avenir. Je me demande si les ressources humaines ne vont pas disparaître, même la plate-forme je me demande si elle ne va pas disparaître aussi » (Ag/rh) ;

- « Ici notre durée de vie n’était pas longue normalement. On nous avait dit quatre ans » (Ag/rh) ;

- « On ne sait pas ce qu’on va devenir ici. Ils veulent fermer des CSRH, ils veulent encore restructurer » (Ag/rh) ;

- « Entre [le CSRH B] et [le CSRH C], il se peut qu’ils n’en fassent plus qu’un puisqu’ils veulent supprimer du personnel » (Ag/rh).

4.2.3.5. Relations de travail et relations hiérarchiques

Les relations de travail entre collègues Les assistantes de gestion estiment dans leur ensemble que les relations entre travail entre elles sont bonnes, tout comme l’ambiance qui règle sur le plateau, comme le note également le Soutien rencontré : « Globalement sur le CSRH je pense que l’ambiance est bonne » (Soutien) ; « On se connaît tous » (Ag/rh). Ainsi le travail en plate-forme permettrait de s’ouvrir à plus de relations, tout comme les formations et le système de tours à l’assistance téléphonique avec quatre personnes provenant de plateaux différents. Une personne note néanmoins que, par rapport à son poste précédent, les gens se croisent et que les occasions de se rencontrer sont moindres (travail plus dense, pas de pause, pas de restaurant d’entreprise). L’entraide est fortement présente, aussi bien au sein de chaque équipe qu’entre les équipes :

- « C’est une très bonne équipe très solidaire, on s’entraide entre nous, quand on ne sait pas traiter un dossier et que le collègue le sait, on s’entraide » (Ag/rh) ; « Il y a toujours de l’entraide, on est obligé » (Ag/rh) ; « Quand il y a une absence on s’arrange entre nous et si on a un problème, on pratique l’entraide soit avec les autres collègues du portefeuille, soit au niveau du pôle » (Ag/rh) ; « On s’entraide énormément. Il y a toujours dans un groupe des

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gens plus compétents que d’autres et on peut leur poser des questions sans avoir l’impression de les déranger » (Ag/rh).

- « Vu qu’on est moins chargé que les autres pôles on fait de l’entraide avec les autres pôles, on est là pour entraider les autres pôles quand ils ont un peu de retard » (Ag/rh).

Cette entraide entre les assistantes de gestion est également soulignée par les responsables d’Equipes : « Il n’y a pas de souci, elles s’entraident vraiment très bien » (RE). Cette bonne ambiance est cependant discutée par l’une des assistantes, qui note qu’une certaine pression a détérioré l’ambiance de travail et les relations entre collègues (qui se repassent les dossiers même quand ils ne sont pas finis). Par ailleurs, comme cela a été évoqué précédemment, l’attribution de primes exceptionnelles n’est pas favorable au maintien et au développement d’une bonne ambiance au sein des différentes équipes. Le même problème se note au niveau des promotions, dans les équipes d’assistantes de gestion comme dans celle des Soutiens : « Il y a eu ce problème de promotion, sur les cinq il y a eu une promotion qui est passée difficilement parce qu’on fait tous les cinq le même travail, et s’apercevoir qu’il n’y en a qu’un … » (Soutien).

Les relations hiérarchiques Les relations entre les assistantes de gestion et leurs supérieurs paraissent plutôt bonnes, une des assistantes de gestion notant par exemple que les discussions peuvent s’engager librement entre le Responsable d’Equipe et les membres de l’équipe, tout comme entre les membres de l’équipe et lui. L’écoute et l’équité sont importantes aux yeux des assistantes de gestion : « ça vient d’elle tout de suite donc on n’a pas à attendre, elle est toujours ouverte à tout, elle va au devant de nous, elle est très … très humaine. Elle sait bien manager son équipe, elle est très juste. Elle voit là où il y a des problèmes, là où il n’y en a pas, quand il y a quelque chose qui ne va pas, ce qui est très rare, elle nous le dit » ( Ag/rh). Les attentes des salariés envers leur encadrement sont relatives à cette équité, à un soutien vis-à-vis de la direction du CSRH, mais également à une aide, un accompagnement dans la manière de gérer les dossiers et les recherches. Une bonne partie des assistantes de gestion souhaiterait par ailleurs que leurs RE aient des connaissances plus approfondies en RH. Mais si la plupart n’attendent pas de la part des managers un soutien de nature technique, certaines assistantes de gestion n’ont pas encore totalement intégré les attributions des Responsables d’Equipes et attendent d’eux une expertise RH. De ceci peut découler une certaine incompréhension : « On a fait justement des formations pour apprendre de nouvelles choses mais aucune Responsable d’Equipe n’est venue à la formation ! Ça m’aurait paru normal qu’elles y aillent parce qu’on en sait finalement autant qu’elles » (Ag/rh). Cette situation est confirmée par le Soutien, qui ne comprend pas lui-même comment les RE peuvent se passer de connaissances en RH : « Personnellement je n’arrive pas à comprendre comment on peut manager une équipe quand on ne connaît pas le travail. On m’a dit que ce n’était pas comme ça qu’il fallait concevoir le management, que les Responsables d’Equipes étaient là pour manager, pour piloter leur équipe et on ne leur demande pas forcément d’avoir une connaissance approfondie. D’accord sur le fait qu’on ne leur demande pas d’être expert, mais il y a un minimum quand même à connaître mais tout le monde n’a pas l’air d’être de mon avis ! Apparemment je sais que sur certains pôles il y a des gens qui râlent parce que leur manager ne sait pas trop comment faire » (Soutien).

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Les Responsable d’Equipes, originaires ou non de la Fonction Ressources Humaines, comprennent qu’une partie des assistantes de gestion attende de leur part qu’elles détiennent des connaissances en RH, même si elles affirment bien que ce n’est pas leur rôle : « Je connais la réglementation mais la technique je ne la connais pas, ni aller sur tel écran dans Alliance pour savoir ça, non et puis ce n’est pas mon rôle » (RE) ; « J’ai déjà du mal à faire un dossier simple donc je suis dépassée la plupart du temps et dans ce domaine-là elles vont à l’équipe soutien qui les aide à régler les problèmes » (RE).

4.2.3.6. Évaluation de la performance

Productivité / qualité / apport des TIC (performance organisationnelle)

Que ce soit pour la gestion des dossiers ou pour l’assistance téléphonique, nous avons vu auparavant qu’il n’y a pas réellement d’objectifs clairement fixés, ce qui nuit à l’évaluation d’une productivité. Notons seulement que le manque de temps ainsi qu’une certaine surcharge de travail sont mis en avant par plusieurs des assistantes de gestion avec lesquelles se sont déroulés les entretiens : « Avec mes collègues on est débordées » (Ag/rh). Les évaluations que les salariés font de leur travail sont donc des considérations très générales : « On est un pôle qui fonctionne bien. On est une très, très bonne équipe et ça marche plutôt bien » (Ag/rh). L’évaluation de la performance se fait par conséquent sur des dimensions plus qualitatives. Un sondage a à ce titre été réalisé auprès des clients du CSRH, qui tendrait à montrer leur satisfaction : « Je pense aussi qu’on arrive à leur répondre assez rapidement et d’après les statistiques qu’il y a eu, ils ne serait pas mécontents d’@ssist’RH et du CSRH » (Ag/rh). Le manque de temps qui vient d’être souligné aurait également pour conséquence une moindre qualité dans le traitement des dossiers, voire une impression de faire de la quantité et de régresser en qualité (notamment du fait du peu de contrôles croisés, faute de temps) : « Le problème c’est qu’il y en a trop pour faire comme on aimerait que ce soit fait. Des fois il faut aller un peu vite et on aimerait un peu plus de temps pour faire les choses un peu mieux » (Ag/rh). Ce sentiment est encore plus fort lorsque l’organisation du travail au CSRH est comparée à celle qui prévalait dans les anciens postes : « On traitait un dossier, on avait besoin d’une précision on appelait et le dossier était clôturé plus vite. On avait l’impression que c’était mieux. Maintenant on s’est habitué à @ssist’RH mais je pense que nos clients sont plus pénalisés que nous » (Ag/rh). Une Responsable d’Equipe fait part de ses difficultés à évaluer la performance de son équipe, qu’elle appréhende d’ailleurs de manière plutôt qualitative : « L’efficacité je n’ai pas de … je vois tout le courrier, je demande une copie de tous les mails qui sont envoyés mais je n’interviens jamais dans la gestion et si je n’ai pas de remontée derrière c’est que tout se passe bien. J’ai très peu d’alertes et j’ai une bonne remontée mais par contre c’est vrai que je veux savoir ce qu’elles font, savoir pourquoi elles ne peuvent pas passer un dossier, ou si elles rencontrent des difficultés » (RE). L’autre RE regrette un manque de qualité qu’elle trouve important dans la gestion des dossiers, et qu’elle attribue aussi bien au manque de temps qu’au manque de compétences des gestionnaires : « Je pense que les ressources humaines ce n’est pas à faire à la légère, et je me rends compte que quand j’ai bien le temps de regarder ce qui se passe je vois beaucoup d’erreurs. Le travail est très très loin d’être parfait mais très très loin. Bon vu d’au-dessus il semble très lisse, on nous dit que ça passe, on a de moins en moins d’instances mais on a énormément de problèmes » (RE). Selon elle, cette situation risque de poser problème dans l’avenir si elle perdure, du fait du nombre croissant de contractuels dans l’entreprise, qui sont beaucoup plus attentifs aux termes de leur contrat de travail que les fonctionnaires.

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Motivation / satisfaction / implication (performance individuelle)

Une motivation issue de la diversité des domaines RH et de la recherche de la satisfaction du client

L’organisation du travail par portefeuille, et par conséquent la diversité des processus RH à traiter est une source de motivation importante des assistantes de gestion : « La variété des activités. J’aime beaucoup le RH. On touche à tout. Il y a des dossiers plus difficiles à traiter, comme congés de longue maladie, plus pointus, qui plaisent moins bien sûr parce que c’est particulier, autrement non, c’est intéressant » (Ag/rh) ; « On prend un dossier de A à Z, maintenant surtout, on va voir l’évolution, on connaît notre agent, c’est quand même plus facile, plus sympathique à gérer plutôt que de faire un petit truc et puis un autre petit morceau, ça c’est pas bien. Mais là avec le portefeuille c’est très intéressant, c’est varié » (Ag/rh). Le passage en portefeuille client s’est accompagné d’un développement des connaissances en RH également motivant : « J’ai travaillé avec une collègue qui m’a tout expliqué et c’est vrai que c’est intéressant. Je suis donc satisfaite d’avoir appris » (Ag/rh). Cette diversité s’étend au-delà, chez les Responsables d’Equipes : « Je suis ravie, c’est varié, le matin on arrive on ne sait pas sur quoi on va tomber » ; « le RH c’est très varié, on apprend tous les jours, on est loin de tout connaître » (RE). L’autonomie dont disposent les assistantes de gestion pour traiter leurs dossiers est également une source de motivation. Une nouvelle fois, le sentiment de variété du travail est issu de la diversité des domaines RH qui sont abordés et non pas de l’alternance entre gestion administrative et assistance téléphonique. @ssist’RH est d’ailleurs vécu comme une contrainte relativement bien acceptée, mais n’est en aucun cas un facteur de motivation :

- « On y va, mais je ne pense qu’il y en ait beaucoup qui y aillent de bon cœur » ; - « C’est vrai qu’une demi-journée ça suffit ! Une journée à répondre au

téléphone … » ; - « Moi une demi-journée par semaine c’est un maximum parce que je préfère la

gestion que le téléphone » ; - « @ssist’RH on y est très peu, ça va, une fois ou deux dans la semaine c’est pas

la mort ». La qualité du service rendu est également un facteur de motivation important aux yeux des assistantes de gestion, habituées pour certaines à entretenir une relation de proximité avec les agents lorsqu’elles étaient en Bureaux des Ressources Humaines en Unités Opérationnelles :

- « C’est sûr que quand on arrive à gérer le dossier en faisant le maximum on est content et ça me fait plaisir aussi pour les agents » ;

- « Je pense aux clients » ; - « On est content du travail bien fait, et satisfaire notre clientèle ».

Cette notion de qualité de service rendu au client, de rendre service, est également présente dans les facteurs de motivation du Soutien, pour qui les formations permettent d’aider les salariés, ce qui est valorisant : « Au niveau du soutien le plus intéressant je pense que c’est les formations. Voir ce dont les gens ont besoin, essayer de récolter des informations à droite et à gauche pour aider les gens à travailler mieux, travailler dans ce sens, puis la satisfaction que l’on ressent après » (Soutien). On y retrouve également l’autosatisfaction issue du travail bien fait, tout comme chez les assistantes de gestion : « De temps en temps il faut être content de soi parce que si on attend des autres on est

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mal ! » (Ag/rh), ce que vient renforcer l’une de ses collègues : « J’aime ce que je fais, j’essaie de le faire bien mais je n’attends pas de reconnaissance » (Ag/rh). Par ailleurs la rémunération est également un facteur de motivation, même si elles est rarement citée : « la motivation aussi à la fin du mois quand la paie tombe, c’est aussi pour ça qu’on bosse » (RE). La surcharge de travail dont il a été fait mention auparavant est parfois source de démotivation chez les assistantes de gestion, car elle a pour conséquence de mener à un travail de mauvaise qualité : « Là en ce moment je suis moins motivée à cause de la surcharge de travail. On a l’impression qu’on n’y arrivera pas. Sinon c’est vrai que j’étais contente de venir travailler et j’espère que ça va revenir parce que j’aime le travail des ressources humaines, mais à faire rapidement comme ça, on fait des bêtises » (Ag/rh).

Motifs de satisfaction et d’insatisfaction Les premiers motifs de satisfaction sont tout simplement pour certaines des assistantes de gestion d’avoir réussi à intégrer le CSRH : « Sur [la commune du poste d’origine] il n’y avait pas de plate-forme RH, c’était [B] ou [C]. Donc j’ai eu de fait une dérogation écrite qui m’a donné … la chance de venir. Donc voilà, je suis très contente d’être là. Tout se passe bien » (Ag/rh) ; « Mais j’ai vraiment eu de la chance de pouvoir choisir. J’aurais pu être à Wanadoo. […] Je n’aurais pas aimé être en plate-forme téléphonique » (Ag/rh). Au-delà de cette arrivée au CSRH, tous les salariés rencontrés se montrent satisfaits de l’organisation du temps de travail, et de la possibilité pour chacun de gérer son temps. L’organisation en portefeuille clients est également source de satisfaction, d’une part parce qu’elle est plus efficace aussi bien pour les assistantes de gestion que pour les clients, d’autre part parce qu’elle permet à ces assistantes de gestion de retrouver pour partie le côté relationnel qu’elles entretenaient auparavant avec les agents, simplement du fait de suivre tout le temps les dossiers des mêmes salariés :

- « Même si on râle parfois sur cette réorganisation, c’est ce qu’il y a de mieux pour nous et aussi pour l’agent. Avant une collègue traitait une partie d’un dossier, une autre traitait une autre partie, ce n’était pas cohérent. On oubliait de faire des choses en pensant que l’autre l’avait traité, etc. » (Ag/rh) ;

- « On commence à connaître les personnes qu’on gère. C’est plus convivial au niveau des relations » (Ag/rh) ; « Le fait d’avoir toujours les mêmes agents il y aura un côté sympathique » (Ag/rh).

Le manque de temps et la surcharge de travail qui est ressentie sont quant à eux des motifs d’insatisfactions importants, parce qu’ils conduisent selon les assistantes de gestion à ne pas traiter les dossiers au mieux dans l’intérêt des agents de France Télécom :

- « On travaille tout le temps en urgence, il faut toujours en faire plus et on n’a pas le temps d’approfondir et d’essayer de faire du travail bien fait » (Ag/rh) ;

- « Faudrait qu’on aille voir tous les matin mais on ne le fait pas tout le temps parce que chaque fois ça nous casse notre rythme » (Ag/rh) ;

- « Certaines fois on n’a pas le temps d’approfondir le dossier » (Ag/rh) ; - « Le plus gênant c’est quand même quand on arrive en fin de paie c’est un peu

gênant de partir pour aller répondre [sur @ssist’RH] alors qu’il y a des choses plus urgentes à faire sur la position » (Ag/rh).

Les conditions de travail sont également un facteur d’insatisfaction qui est souvent souligné par les assistantes de gestion. Comme cela a été indiqué auparavant, plus d’une

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quarantaine de personnes se situent dans la même grande salle, ce qui génère forcément des nuisances :

- « Ce qui est un peu désagréable, c’est le bruit de quarante personnes dans la même salle » (Ag/rh) ;

- « [Les locaux] sont un peu vétustes et on manque de place » (Ag/rh) ; - « Le plateau là, la pièce a été refaite, ce qui est un peu embêtant c’est la

moquette partout et avec la poussière c’est pas génial » (Ag/rh). Cette insatisfaction relative aux locaux est également présente chez les Responsables d’Equipes : « Quand on a le sentiment d’avoir trop de travail et qu’en plus on est dans un ruche, alors là c’est l’usine. Je pense qu’on serait plus confortablement installé, on serait au milieu de notre équipe dans une cellule un peu plus conviviale, je suis sûre que ce serait nettement mieux » (RE). D’autres facteurs d’insatisfaction sont cités de manière plus ou moins ponctuelle par les personnes rencontrées : la crainte de ne pas pouvoir répondre aux questions des salariés lorsque les assistantes sont sur @ssist’RH, le principe des primes exceptionnelles comme cela a déjà été indiqué, le manque d’information en interne, la relation avec les clients au téléphone parfois un peu difficile.

Implication Les entretiens réalisés fournissent peu d’informations quant à l’implication des salariés. Nous pouvons néanmoins noter que les interrogations des assistantes de gestion quant à l’avenir du CSRH et même l’avenir de la Fonction Ressources Humaines s’accompagnent de comparaisons entre la FRH telle qu’elle existe actuellement et celle qu’elles ont connue auparavant, dont elles sont souvent nostalgiques. Une assistante de gestion qui va bientôt quitter l’entreprise souligne cette évolution : « Contente de partir à la retraite. Je n’aurais pas dit cela il y a quelques années, car c’était pas pareil. Il y avait moins de pression. Ça a beaucoup changé quand même … » (Ag/rh). Les assistantes de gestion se rendent également compte que le CSRH ne génère pas de l’argent mais qu’il en coûte à l’entreprise : « nous on coûte cher et on ne rapporte rien au RH » (Ag/rh). Une Responsable d’Equipe rappelle par ailleurs l’une des difficultés de sa fonction, qui est de tenir des discours auxquels elle n’adhère pas forcément : « Ce qui est difficile c’est qu’aujourd’hui on va vous faire tenir tel discours pour que les personnes adhèrent et puis dans deux, trois mois on vous fera tenir un discours contraire. Alors quand on est convaincu que c’est bien, on arrive à faire passer des choses mais quand on est moins convaincu, c’est déjà plus difficile ! » (RE).

Stress, burn out … La date butoir de la paie génère un stress chez les assistantes de gestion, dont la motivation reste de satisfaire au maximum leurs clients. Il y a donc une pression importante durant les jours qui précèdent la date de clôture de la paie : « En fin de paie c’est vrai que c’est stressant, en plus on nous en ajoute justement parce que c’est urgent » (Ag/rh) ; « C’est stressant parce que si on est en @ssist’RH après la paie, les clients demandent pourquoi ils n’ont pas eu ça ou ça et ça fait encore des fiches » (Ag/rh). Une assistante de gestion, qui note un stress issu de la relation client au téléphone (« il y en a quand même qui sont stressants, très stressants »), indique à l’encontre des autres qu’elle ne ressent pas de pression dans son travail quotidien : « c’est vrai, le travail on n’a pas de pression » (Ag/rh).

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4.2.3.7. Accompagnement RH : valorisation des métiers / perspective d’évolution

La plupart des assistantes de gestion, si elles pensent que leur travail est apprécié par leurs clients (« oui les salariés se rendent compte du travail que l’on fait et qu’on essaie de faire le maximum », Ag/rh), considèrent que le travail en CSRH est peu, voire pas valorisé au sein de l’entreprise.

- « Non pas trop. Justement je me demande si on ne va pas disparaître ! » (Ag/rh) ;

- « je ne pense pas. Comme je vous dis au RH, on est là parce qu’il faut quelqu’un pour gérer tout ça, mais on ne rapporte rien » (Ag/rh).

Cette dernière remarque souligne la dévalorisation des fonctions supports de manière générale, à l’encontre des métiers commerciaux dont l’image est beaucoup plus valorisée au sein de l’entreprise. Ce manque de valorisation du travail en CSRH est également durement ressenti au niveau de Responsables d’Equipes : « L’image d’une Responsable d’Equipe au CSRH c’est surveillante. Tous mes collègues qui n’étaient pas des ressources humaines voyaient ça comme ça et me disaient "mais tu es en train de ruiner ta carrière, quand tu sortiras de là plus personne ne voudra de toi", et alors la vue de mes collègues de ressources humaines c’était "mais c’est une usine, c’est un boulot monstre, tu ne vas pas t’en sortir, c’est la galère, ne prend pas ça, ça va être horrible pour toi". Ils me plaignaient plutôt en termes d’activité » (RE). Les perspectives d’évolution de carrière sont réduites, tant au sein du CSRH qu’à l’extérieur. Les évolutions en termes de grade paraissent déjà relativement difficiles à espérer « Actuellement les Soutiens sont en 2.2. et quand il y aura des 2.3. ce sera pour eux. Donc les agents sur la plate-forme avant qu’ils aient un 2.3. je pense qu’il faudra quelques années » (Ag/rh). Par ailleurs, comme souvent, les postes de Responsables d’Equipes n’attirent pas les assistantes de gestion. Une évolution envisageable est celle de Soutien, mais le Soutien lui-même n’est pas certain de la pérennité de sa fonction : « On est là le temps que tout le monde mette sa gestion au point, pour moi le soutien reste ponctuel. Après qu’est-ce qu’on deviendra je ne sais pas ! » (Soutien). Les perspectives de carrière impliqueraient donc de quitter le CSRH : « pas au sein du CSRH, si je veux avoir une promotion je pense que ce serait ailleurs » (Ag/rh), voire de quitter la Fonction Ressources Humaines pour se diriger vers le secteur commercial, actuellement beaucoup plus porteur : « si on veut évoluer, il faut aller dans le commercial, il faut sortir du domaine RH, c’est comme ça. Il n’y a aucun avenir d’évolution » (Ag/rh) ; « RH il n’y a pas beaucoup de perspectives de carrière ! Donc c’est vrai que dans la maison aujourd’hui il vaut mieux se trouver du côté commercial et informatique que côté CSRH, et sinon au CSRH même il n’y en a pas » (RE). Mais avant de se soucier de leur évolution de carrière, les assistantes de gestion se préoccupent plus de l’avenir du CSRH lui-même, craignant une réorganisation, voire une fermeture, comme cela a été mentionné auparavant : « On ne sait pas ce qu’on va devenir ici. Ils veulent fermer des CSRH, ils veulent encore restructurer » (Ag/rh), « on nous dit qu’on a pas assez de travail, pas assez de clients » (Ag/rh) …

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4.3. Analyse transversale de la flexibilité dans les CSRH Les Centres de Services Ressources Humaines sont une manifestation de la flexibilité au niveau global de France Télécom, au travers de la réorganisation de la Fonction Ressources Humaines. Les évolutions de la fonction visent à faire de la FRH un "partenaire stratégique", recentré sur ses activités créatrices de valeur ajoutée. La création des CSRH participe en ce sens à la recherche d’une plus grande productivité, par la concentration sur des entités spécifiques de la gestion administrative des RH.

4.3.1. De nombreuses convergences entre les deux CSRH Conformément à ce que laissait attendre le cahier des charges défini pour la création des CSRH, les résultats issus de l’analyse des entretiens semi-directifs menés dans les deux CSRH mettent en évidence de nombreuses convergences entre ces deux entités. En matière de flexibilité quantitative, la majorité des assistantes de gestion présentes dans les deux CSRH doit son arrivée à des redéploiements, suite à des réorganisations de services. Les arrivées sont qualifiées de "volontaires" par ces personnes puisqu’elles ont effectivement demandé à intégrer les CSRH (parfois pour éviter des centres d’appels comme Orange ou Wanadoo), mais nous pouvons par ailleurs les qualifier de "contraintes", puisque sans ces réorganisations aucune n’aurait demandé à quitter son poste précédent. Notons que certaines personnes ont anticipé la fermeture de leurs anciens services pour pouvoir choisir plus facilement leur poste, et que des salariés provenant de services commerciaux sont également présents, qui ont choisi de quitter volontairement leurs anciens services. La flexibilité s’exprime dans sa dimension qualitative principalement au travers de la polyvalence qui est demandée aux assistantes de gestion. Polyvalence tout d’abord puisqu’elles doivent assurer aussi bien la gestion administrative des dossiers que l’assistance téléphonique, mais polyvalence surtout par la nécessaire maîtrise des différents domaines RH. L’organisation par portefeuille client, où les assistantes de gestion s’occupent de tous les aspects des dossiers RH d’un portefeuille de clients, génère chez ces assistantes de gestion le sentiment d’exercer un travail varié et complexe, du fait des multiples connaissances demandées. Il est cependant possible de s’interroger sur cette diversité. Il n’apparaît en effet pas évident que traiter différents types de processus RH (rémunération, maladie, mobilité, etc.) se concrétise par une diversité dans le mode de traitement de ces processus, notamment en ce qui concerne leur saisie dans le SIRH Alliance. Par ailleurs, l’alternance entre la gestion administrative et l’assistance téléphonique n’est jamais considérée comme une source de variété du travail, alors même qu’elle était présentée par le Responsable du projet CSRH comme le moyen d’éviter la taylorisation. Cette organisation en portefeuille client implique des montées en compétences importantes chez des personnes qui ne sont pour la plupart pas issues de la Fonction Ressources Humaines. Les formations Capp Avenir, réalisées par alternance, doivent répondre à ce besoin. Les assistantes de gestion y trouvent cependant de nombreuses insuffisances, notamment dans le manque d’application rapide des formations dans le travail au quotidien et dans leur caractère trop théorique. Le relais assuré par les équipes Soutiens par le biais de formations plus opérationnelles est par contre salué.

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La flexibilité qualitative s’analyse également en termes d’organisation du travail et d’autonomie des salariés, pour lesquelles s’observent des différences entre la gestion des dossiers et l’assistance téléphonique. La gestion administrative donne la possibilité aux assistantes de gestion de définir leurs priorités dans le traitement des différents dossiers et les laisse travailler de manière autonome, du moment où elles réussissent à finir leurs dossiers pour la date de mise en paiement. À l’inverse, l’assistance téléphonique est ressentie comme étant beaucoup plus rigide. Le travail y est contraint à la fois par : 1) le flux des appels et sa répartition entre les personnes présente ; 2) la formalisation du mode de traitement (la phase d’accueil, les procédures à suivre pour noter le contenu de l’appel et transmettre la demande quand il n’est pas possible de répondre immédiatement) ; 3) les TIC qui sont associées à cette formalisation. D’un point de vue quantitatif, la flexibilité s’opère de manière très différente sur le temps de travail et sur les rémunérations. Les assistantes de gestion bénéficient en effet d’horaires variables qui leur permettent de gérer leur temps de travail en fonction de leurs contraintes personnelles. Seules les vacations @ssist’RH sont fixes et définies à l’avance selon un planning. Les rémunérations ne sont quant à elles pas flexibles puisque les assistantes de gestion sont rémunérées en fonction de leur grade. Des primes annuelles exceptionnelles ajoutent néanmoins une part variable à cette rémunération fixe, mais génèrent par ailleurs des critiques de la part des assistantes de gestion, qui y voient une atteinte à la cohésion des équipes. La performance organisationnelle est quant à elle difficile à évaluer, sauf par le biais du ratio "nombre de dossiers traités au CSRH / nombre d’assistantes de gestion". Aucun objectif précis n’est fixé aux activités de gestion des dossiers et d’assistance téléphonique, même si les outils informatiques dont disposent les Responsables d’Equipes leur permettent de suivre de plus près @ssist’RH par le contrôle des temps de conversation, de retrait, etc. Les assistantes de gestion tout comme certains Responsables d’Equipe mettent l’accent sur la dégradation de la qualité, tant du fait de la surcharge de travail et du manque de temps, que du manque de compétences des assistantes de gestion. La performance individuelle est contrastée. Les assistantes de gestion sont dans l’ensemble motivées par leur travail, du fait de la diversité des domaines RH traités et de la recherche de la satisfaction de leurs clients. La surcharge de travail et des styles de management parfois trop directifs viennent dans certains cas minorer cette motivation. Les motifs de satisfaction tournent autour de la gestion du temps de travail, alors que les motifs d’insatisfaction sont disparates (crainte de ne pas pouvoir répondre aux questions posées sur @ssist’RH, exiguïté des locaux, manque de temps, etc.). L’adhésion aux objectifs de l’entreprise est faible, puisque les objectifs actuels de France Télécom sont en rupture avec les valeurs traditionnelles des assistantes de gestion. Enfin, l’accompagnement RH est marqué par son insuffisance. Pour les assistantes de gestion, mais également pour des Responsables d’Equipes, leur métier n’est guère valorisé au sein de l’entreprise, tout comme la Fonction Ressources Humaines dans son ensemble, à l’inverse du commercial. Elles voient par ailleurs peu ou pas de perspectives de carrière au sein du CSRH ou dans la FRH, les seules évolutions envisageables impliquant de partir dans les fonctions commerciales. On note également dans le CSRH B une crainte forte quant à la subsistance des CSRH dans les années à venir. De manière générale, les évolutions organisationnelles et les demandes que France Télécom adresse à ses salariés dépassent les capacités d’adaptation des personnes présentes dans les CSRH, qui ont pourtant pour certaines complètement changé de métier : « On fait ce qu’on peut pour faire évoluer nos filles à la vitesse d’un glacier alors

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que France Télécom évolue à la vitesse d’un torrent, donc manifestement je trépigne mais je vois quand même le résultat de ce que je fais » (RE).

4.3.2. @ssist’RH cristallise les insatisfactions dans le CSRH A Le CSRH A se distingue du CSRH B par les difficultés qui entourent l’assistance téléphonique, et qui se répercutent sur l’ensemble de l’activité du CSRH et sur l’ambiance générale au travail. Alors que dans le CSRH B les assistantes de gestion réalisent une vacation @ssist’RH de trois heures par semaine, les vacations devraient au CSRH A durer cinq heures. Mais comme le plateau qui prend les appels est le plus souvent débordé, un autre plateau intervient la plupart du temps en renfort. Ceci a pour conséquence d’après les assistantes de gestion qu’elles passent une dizaine d’heures par semaine à l’assistance téléphonique, ce qui réduit d’autant le temps qu’elles peuvent accorder à la gestion administrative de leurs dossiers. Alors que dans le CSRH B, @ssist’RH n’est considéré que comme une contrainte somme toute acceptable, l’assistance téléphonique cristallise dans le CSRH A toutes les insatisfactions (horaires contraints, travail contraint, difficultés à répondre aux demandes, sentiment d’être constamment débordé, etc.). Le temps perdu pour la gestion des dossiers augmente la pression que ressentent les assistantes de gestion, et de son côté la hiérarchie s’interroge sur l’organisation et accentue le contrôle sur les périodes de vacation téléphonique. Tout ceci concourt à dégrader l’ambiance de travail parmi les assistantes de gestion, à tendre les relations avec la hiérarchie et à réduire leur motivation. Il est possible que cette situation trouve l’une de ses sources tout simplement dans nombre de dossiers de salariés que gère chaque assistante de gestion. Alors que le cahier des charges des CSRH indique un ratio de 250 agents gérés par assistante de gestion, il semblerait que le CSRH A se situe plutôt aux alentours de 300. A l’inverse, le CSRH B serait l’un des deux CSRH (sur les dix) où ce ratio est le plus faible, probablement inférieur à 250. Cette charge de travail supérieure à ce que prévoyait le cahier des charges se traduit par conséquent aussi bien au niveau de la gestion administrative des dossiers que du nombre d’appels reçus au CSRH. Un nombre d’appels trop élevé au regard de la capacité de traitement des personnes présentes sur @ssist’RH pourrait expliquer le nécessaire recours à un second plateau pour traiter les appels et aux difficultés au niveau de la gestion qui s’ensuivent. Mais la localisation elle-même de l’assistance téléphonique peut également accentuer ce problème, ou en créer d’autres. En effet, contrairement à ce que préconisait le Responsable du projet CSRH, il n’y a pas au CSRH A de salle spécifique à l’assistance téléphonique (ce qui est le cas dans le CSRH B), les assistantes de gestion effectuent donc le traitement des appels sur leur position de travail habituelle. Cette situation est plus propice à ce que les assistantes de gestion s’écartent de l’organisation du travail telle qu’elle est définie, en essayant de retourner dans les dossiers des salariés pour répondre aux appels qui sont en cours, ou de faire de la gestion administrative entre deux appels. Durant les périodes d’assistance téléphonique, les assistantes de gestion ne doivent en effet pas profiter des temps creux entre deux appels pour faire de la gestion, alors même qu’elles ont sous les yeux les dossiers qui sont en attente. Au vu de l’importance qu’elles accordent à la satisfaction de leurs clients et de la surcharge de travail qu’elles ressentent, il est probable qu’il soit difficile pour elles de ne pas essayer de rechercher immédiatement les informations pour répondre au client et de ne pas traiter de dossier durant les périodes d’@ssist’RH.

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La situation observées lors des entretiens s’apparentait à un blocage, alliant des problèmes d’efficacité sur @ssist’RH, une surcharge de travail, un renforcement des contrôles. Une incompréhension semblait perdurer entre les assistantes de gestion qui reprochent à leur hiérarchie de ne pas voir leur surcharge de travail, et la hiérarchie qui reproche à ces assistantes de gestion de ne pas respecter l’organisation du travail définie pour @ssist’RH. Le style de management parfois exercé par certains Responsables d’Equipes, jugé beaucoup trop directif par les assistantes, accentue cette incompréhension mutuelle. Les Centres de Services Ressources Humaines ont ainsi constitué le premier terrain d’analyse empirique de la recherche. Les résultats ont mis en exergue la transformation de la Fonction Ressources Humaines, appréhendée en tant qu’objet de flexibilité dans l’entreprise, mais ont également mis en lumière les différentes formes de flexibilité mises en œuvre au sein des CSRH. Si les CSRH comportent une activité de centre d’appel, l’organisation du travail reste relativement souple pour l’assistance téléphonique dans les deux CSRH étudiés. Dans la partie 3 de ce rapport, la suite de la recherche permet d’étudier plus précisément l’organisation du travail telle qu’elle est définie dans de véritables centres d’appels au sein de France Télécom (le 12, Wanadoo et Orange), et d’étudier plus généralement les formes de flexibilité qui y sont développées.

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PARTIE 3 : LES CENTRES D’APPELS CHEZ FRANCE TELECOM.

LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES COMME ACTEUR DE LA FLEXIBILITE ?

Les centres d’appel, créés par France Télécom dans le cadre de sa vaste stratégie de redéploiements, constituent un terrain d’étude passionnant au regard de notre problématique des TIC, des transformation du travail, de la flexibilité et des performances qui y sont associées. Alors que les CSRH illustrent essentiellement la fonction RH en tant qu’objet de flexibilisation, les centres d’appel illustrent quant à eux essentiellement les modalités de la flexibilité mise en œuvre et le rôle de la fonction RH en tant qu’acteur et accompagnateur des changements qui en découlent. Trois monographies ont pu être réalisées, sur la base d’entretiens semi-directifs, d’analyses documentaires et de réponses à l’enquête du JDS : il s’agit de trois plate-formes situées à Amiens, celle du 12 (ou USO), celle de Orange (anciennement Ola) et celle de Wanadoo. Le chapitre 5 développe successivement ces trois monographies, tandis que le chapitre 6 s’efforce de présenter une analyse transversale inter-sites et de dégager quelques résultats synthétiques. Chapitre 5. La flexibilité dans les centres d’appels : résultats de trois monographies Comme cela a été mentionné dans la présentation de la méthodologie suivie, trois centres d’appel ont été analysés en profondeur, par le biais d’entretiens semi-directifs et de questionnaires JDS. Dans les trois centres d’appels (12, Wanadoo, Ola/Orange), ont été réalisés des entretiens semi-directifs sur deux jours, à l’aide des grilles d’entretien préalablement élaborées (l’une pour les téléopérateurs du 12 et les téléconseillers de Wanadoo et de chez Orange, l’autre pour les chefs d’équipe). La plupart des personnes nommées sur la liste se sont présentées. Nous leur avons rappelé les objectifs généraux de l’étude, tout en insistant sur le caractère facultatif de l’entretien. Les résultats présentés ici suivent la structure de la grille d’entretien et de l’analyse thématique de contenu.

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5.1. Analyse des entretiens réalisés à l’USO (le 12) Les renseignements téléphoniques sont une activité ancienne de France Télécom, quel que soit le nom de l’entité dans laquelle cette activité est localisée. En préalable aux entretiens avec les opérateurs, un entretien a été réalisé avec le Responsable de l’Unité Services par Opérateurs (USO), que nous appellerons également au cours de l’analyse « le 12 », comme le font les salariés qui y travaillent. Sur l’ensemble de la Direction Régionale Picardie, l’USO se répartit sur sept sites différents, dont celui d’Amiens où ont été réalisés les entretiens. L’organisation est qualifiée de déconcentrée, avec un système informatique reliant les différents sites entre eux et répartissant ainsi les appels en fonction de la charge de travail de chacun d’eux. Au regard de cette dispersion des implantations géographiques nous pouvons noter, comme cela avait été mentionné lors d’entretiens exploratoires, la volonté de France Télécom de conserver des activités sur certains bassins d’emplois pour y fournir du travail à des salariés a priori peu mobiles géographiquement, notamment du fait de leur âge. Le site d’Amiens est composé d’environ 70 personnes, avec une soixantaine d’Opérateurs des Renseignements Nationaux, des Responsables d’Equipes, des moniteurs-formateurs, et des personnes assurant le secrétariat. Peut-être plus encore que dans le reste de l’entreprise l’âge moyen, compris entre 40 et 45 ans, a tendance à s’accroître. Les mouvements entrants et sortants de personnels éclairent cette évolution. Il y a en effet à la fois des arrivées au 12 et des départs du 12. Les salariés qui partent du 12 sont généralement des personnes jeunes, qui sont redéployées en direction de la plate-forme Ola/Orange (10 personnes en 2000, 9 en 2001). Les arrivées concernent quant à elles des salariés issus de services qui ont été restructurés avec des réductions d’effectifs, voire fermés, ou de services ayant disparu suite à l’externalisation de certaines activités (cas de la restauration). Leurs origines professionnelles sont par conséquent extrêmement diverses : restauration, ateliers-garages, services financiers, etc. Cette diversité, et plus particulièrement la présence au sein de l’USO de personnes que rien ne prédestinait à devoir utiliser des outils informatiques, a pour corollaire la nécessité de mettre en place des formations afin que toutes soient aptes à répondre aux appels des clients. Le travail que réalisent ces opérateurs se caractérise par sa brièveté (la durée moyenne de conversation étant inférieure à 40 secondes), sa simplicité, et sa standardisation. Le traitement de la demande d’un client s’opère en quatre étapes, qui se répètent dans la journée autant de fois que les opérateurs ont un nouveau client au téléphone, soit 200 à 300 :

- L’accueil du client par le biais d’une machine vocale (à son arrivée au 12, l’opérateur enregistre le message d’accueil qui sera diffusé à chaque client dont il prend l’appel). Ceci permet à l’opérateur de ne pas avoir à accueillir les 200 à 300 clients quotidiens, et à l’entreprise de réaliser des gains de productivité ;

- La formulation de la demande par le client ; - L’entrée de cette recherche de numéro de téléphone dans le système

informatique par l’opérateur, et la demande d’éventuelles informations par celui-ci. Le traitement informatique dure moins de 200 millisecondes ;

- La transmission de la réponse au client, qui s’effectue dans plus de 70% des cas grâce à une machine vocale (dans les autres cas les opérateurs répondent eux-mêmes : personnes ayant des difficultés auditives, de compréhension de la langue, etc.).

- Cette standardisation et ce séquençage du travail paraissent soutenus par les outils informatiques spécifiques à l’activité des services du 12. Le système d’information répartit

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tout d’abord les appels entre les différents sites de l’USO à travers la région, et par la suite il encadre fortement le travail des opérateurs. La prise d’appels et le traitement des demandes des clients suivent en effet des processus définis et rigides, automatisés par le biais de l’informatique, et desquels les opérateurs ne peuvent quasiment pas s’écarter. L’objectif affiché par l’entreprise est d’obtenir une meilleure productivité en recourant à l’automatisation la plus grande, et au niveau local d’atteindre un équilibre des comptes de l’USO dans les deux ans. Au-delà du traitement des appels, l’informatique intervient également en temps réel sur le suivi de la performance des opérateurs et plus globalement de l’USO. Suivant la logique de réduction de coûts qui est celle de l’entreprise à l’égard des services du 12, le système d’information mesure ce que le Responsable de l’USO nomme la « qualité de service » au travers d’indicateurs quantitatifs tels que le délai moyen d’attente, la durée des appels, etc. L’efficacité est mesurée par le biais du rapport entre le nombre d’appels traités et le nombre d’appels reçus, qui doit être supérieur à 95%. La dimension qualitative de la performance est quant à elle quasiment inexistante, si ce n’est la réalisation mensuelle d’un sondage auprès d’un échantillon de personnes ayant appelé le 12. Les opérateurs semblent d’après le Responsable de l’USO manifester une certaine crainte de l’avenir, qui est pour l’USO directement lié à l’évolution du nombre d’appels des clients. Celui-ci est en diminution, ce que peuvent expliquer divers facteurs tels que le développement de la téléphonie mobile et des services de renseignements correspondant, la tarification des appels au 12, le développement des recherches sur le site internet des pages jaunes et blanches, etc. Par ailleurs, l’automatisation se poursuit, puisqu’il était prévu que durant l’année 2002 les clients aient la possibilité d’avoir recours à un serveur vocal pour traiter l’intégralité de leur demande.

5.1.1. Caractéristiques et parcours des agents interviewés L’une des premières caractéristiques importantes du 12 est la forte homogénéité des âges, des anciennetés, des statuts et des parcours au sein de l’entreprise. Le tableau suivant récapitule les principales caractéristiques des personnes interrogées comptant treize télé-opérateurs, deux responsables d’équipe et un superviseur réseau. Les opérateurs et responsables interrogés ont une moyenne d’âge supérieure à 45 ans et une ancienneté au sein de France Télécom qui dépasse les 20 années. Pour cinq d’entre eux, la fin de carrière et le départ en retraite sont assez proches (moins de 5 ans). A une exception près (un contractuel), les agents sont sous statut France Télécom et ont fait toute leur carrière au sein de l’entreprise. A propos des parcours, on trouve parmi les opérateurs deux catégories : ceux qui sont au 12 depuis longtemps et n’en sont jamais partis (4 sur 15), qui ont eu à un moment donné la possibilité d’évoluer mais ont choisi de rester, et ceux, majoritaires (9 TO sur 15), qui sont arrivés plus récemment du fait de la fermeture de leur service (administratif en général). Pour la plupart des télé-opérateurs, l’arrivée sur la plate-forme est :

- Soit imposée : « A chaque fois, ça a été imposé (…) il n’y avait plus de place dans beaucoup d’endroits, il fallait du monde au 12, donc on était plusieurs à être nommés au 12 » (TO) « Donc je me suis retrouvée ici … au départ contre mon gré à cause des horaires et tout (…) mais finalement après j’ai quand même trouvé un intérêt » (TO).

- Soit un choix « contraint » par la localisation géographique. Peu de possibilités sont offertes sur Amiens et la Région à part dans les trois centres d’appels France Télécom. « J’ai fait une fiche de vœux pour être muté à Amiens, j’ai du demander

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« Amiens tous services » » (TO), « C’est à dire qu’il n’y a pas beaucoup de choix. Il y avait OLA et ici. Je préférais quand même ici, parce que OLA j’étais perdu … s’il fallait expliquer aux gens, j’aime pas tellement. Au 12, c’est bien » (TO)

L’arrivée au 12, imposée ou contrainte, est assez représentative des politiques de redéploiements actuellement menées par France Telecom : fermetures de services et mutations là où les besoins de personnel existent. Le paradoxe est qu’à court terme, le 12 est amené à disparaître, les besoins en personnel sont donc assez réduits. C’est sans doute la raison pour laquelle une partie du personnel redéployé est proche de la retraite ou d’un congé de fin de carrière, les plus jeunes étant amenés à évoluer vers les autres centres d’appels d’Amiens, notamment sur OLA (cf. flexibilité quantitative interne).

Emploi

Grade

Age

Ancienneté

FT

Ancienneté

12

Identifiant

Statut

TO

2.2.

40-50 ans

35 ans

24 ans

12A

F.Telecom

TO

25-30 ans

2 ans

2 ans

12B

Contractuel

TO

2.2

40-50 ans

20 ans

> 10 ans

12C

F. Telecom

TO

2.1

40-50 ans

27 ans

23 ans

12D

F.Telecom

TO

2.1

50-60 ans

30 ans

2 ans

12E

F.Telecom

TO

2.1

40-50 ans

25 ans

2 ans

12F

F.Telecom

TO

2.1

40-50 ans

25 ans

2 ans

12G

F.Telecom

TO

1.3

30-40 ans

12 ans

2 ans

12H

F.Telecom

TO

2.1

50-60 ans

> 30 ans

< 1 an

12I

F.Telecom

TO

2.2

50 -60 ans

32 ans

3 ans

12J

F.Telecom

TO

2.1

< 40 ans

19 ans

18 ans

12K

F.Telecom

TO

2.1

40-50 ans

27 ans

23 ans

12L

F.Telecom

TO

2.1

40-50 ans

> 20 ans

2 ans

12M

F.Telecom

RE

2.3

50-60 ans

35 ans

4 ans

12N

F. Telecom

RE

2.3

50-60 ans

> 30 ans

10 ans

12O

F.Telecom

Superviseur réseau

3.3

50-60 ans

> 30 ans

3 ans

12P

F.Telecom

Légende : TO : télé-opérateur et RE : responsable d’équipe

Niveau/ grade : 2.1 agent administratif, 2.2 contrôleur, 2.3 : responsable-agent maîtrise, 3.3 inspecteur-cadre

Tableau 3 : Caractéristiques des personnes interrogées au 12

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5.1.2. Flexibilité qualitative interne : Travail / Formation / autonomie

5.1.2.1. Un contenu du travail pauvre Les télé-opérateurs définissent leur travail en quelques mots « renseigner les gens sur les numéros de téléphone » en y associant généralement la simplicité « C’est tout simple » (TO), « c’est tout bête » (TO), « c’est pas compliqué » (TO). Parfois, une comparaison avec l’emploi précédent est faite, notamment sur la variété du contenu : « Je préférais ce que je faisais avant, c’était plus varié. C’était un bureau où on faisait de la facturation, on rectifiait les factures. C’était plus intéressant. Mais bon, je sais que je ne trouverai plus de travail comme ça. C’est vrai ça me plaisait je préférais ce que je faisais avant (…) Il faut s’y faire, il faut se faire une raison » (TO). L’aspect répétitif est très fréquemment abordé « c’est toujours la même chose, c’est la routine. On part le soir, on revient le lendemain, on refait la même chose » (TO), « c’est répétitif » (TO), mais il est vu comme un confort psychologique « ça ne me gêne pas » (TO), « ça ne me déplaît pas » (TO). La définition du travail est quelque peu différente chez les anciens du 12 : « C’est varié…il ne faut pas dire que l’on donne que des numéros, il y a des adresses aussi, des recherches d’identité » (TO), « Informer le client, sur des numéros de téléphone, sur des… plein de choses, tout ce que le client a besoin on l’oriente vers d’autres services » (TO). On peut supposer que ces propos relèvent plus d’un besoin de revalorisation et de justification de leur présence au 12 après tant d’années que d’une réelle perception de variété, notamment par rapport aux derniers arrivés sur la plate-forme. Un élément significatif de la pauvreté du contenu du travail est le temps de formation lors de l’arrivée sur le poste et les temps de « recyclage » nécessaires par la suite. Le temps octroyé au départ est de 15 jours tout au plus (une semaine de cours et une semaine de pratique en doublure). Les opérateurs n’évoquent pas de difficultés particulières par rapport à l’appropriation du contenu du travail. Au contraire, l’apprentissage leur paraît assez rapide : « On travaille un petit peu sur le tas quand même. On a eu une petite formation au départ quand même, les petits mots-clés à placer, tout ça, quand on n’a jamais eu de téléphone c’est pas évident, et puis après ça vient tout seul » (TO), « On prend vite le rythme, ça vient vite » (TO). Ensuite, peu de formations sont dispensées, sauf lors de modifications techniques précises (nouvelle procédure de recherche, mise en relation automatique avec le serveur…).

5.1.2.2. Peu d’autonomie dans l’organisation du travail Le travail est séquentiel avec une tendance forte à l’automatisation, du fait de l’utilisation récente d’un serveur vocal pour la mise en relation avec l’abonné recherché. Les phases de travail sont clairement identifiées (Accueil - ville de recherche - Nom demandé - Demande de précisions éventuelles - serveur vocal donnant le numéro et la mise en relation). Des phrases-type sont également recommandées : « Il y a des petites phrases à placer mais on peut faire autrement (…). On doit toujours conclure quand on donne l’appel parce qu’on ne doit pas le donner oralement, on appuie sur une touche, tout est vocalisé, c’est un robot derrière qui donne le numéro. Il nous est demandé de dire aux clients « patientez s’il vous plaît merci », mais on peut le dire autrement : « vous notez le numéro s’il vous plaît », c’est quand même des automatismes qui sont là et c’est difficile de s’en défaire » (TO).

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Le temps des appels est en général très court (20 à 30 secondes en moyenne), permettant à chaque téléopérateur de répondre à une cinquantaine d’appels par heure. Les temps d’appels, de pauses, de mises en retrait ainsi que le nombre d’appels effectués par jour sont contrôlés directement par le responsable d’équipe à travers un tableau de bord automatisé sur lequel apparaît l’ensemble de ces informations pour chaque agent en temps réel. Une pause obligatoire de 10 mn par heure est programmée à un moment bien précis que doit respecter le téléopérateur et calculé en fonction du flux d’appels. Le travail est donc non seulement séquencé dans son contenu mais également dans le temps, à la seconde près. « On a un petit délai … quelques secondes avant de prendre un appel, pour qu’on ait quand même le temps de souffler entre deux appels. » (TO), « Il y a 20 ans, on demandait si on pouvait sortir pour aller aux toilettes, maintenant on ne le dit pas mais si vous appuyez sur le bouton « pas prêt », il y a un voyant qui s’allume sur leurs tableaux et aussitôt ils le voient, 20 secondes ils le voient, 5 secondes ils le voient » (TO). L’autonomie dont disposent les opérateurs dans l’organisation de leur travail est faible, même si quelques uns se plaisent à rappeler qu’ils ne sont pas des robots et qu’ils bénéficient d’une certaine liberté. « D’un côté on vient contrôler, d’un autre côté si on ne fait pas ce que qu’on nous demande, on ne peut pas faire grand chose contre nous » (TO). Ils estiment ainsi avoir une petite marge de manœuvre lors de l’échange avec le client (contenu du travail), surtout dans les cas difficiles, ce qui ne représente en fait que très peu d’appels par jour. Mais lorsqu’un appel est un peu différent, c’est le temps qui manque. « Les problèmes avec la clientèle, ça peut être très stressant. Comme nous on nous demande quand même un rendement… c’est fatiguant (…). C’est vrai qu’il y a des clients, on ne peut pas les laisser comme ça… je veux dire que quand le soir on vous demande SOS Amitié ou… on ne peut pas laisser tomber le client comme ça. C’est difficile à gérer parce qu’on nous demande des résultats derrière (…) Si on disait qu’on gère notre temps comme on en a envie, on serait plus détendus » (TO). Le sentiment d’être contrôlé est par ailleurs assez présent dans les interviews : « On est fliqué de toute façon, ce sont les RE, ils voient tout ce que l’on fait, le temps de pause, tout ce que l’on fait dans la journée, il faut qu’on soit là 7 heures sur notre chaise… enfin, nous on appelle cela du « flicage » « (TO), « On sait très bien que tout est surveillé, c’est sûr. Si on respecte, il n’y a pas de problèmes. On a des pauses toutes les heures et heureusement encore ! (…) c’est vrai que c’est stressant » (TO).

5.1.2.3. Travail et TIC : une automatisation croissante Le type de technologie utilisé est assez simple : un micro-ordinateur, un logiciel de recherche et le disque qui enclenche le serveur vocal. Pour les téléopérateurs présents sur la plate-forme depuis 20 ans, l’évolution technologique est importante. Les TIC ont apporté de la rapidité et de la fiabilité à la recherche de renseignements. Tous expriment une satisfaction par rapport à leur outil de travail en pointant néanmoins le fait que l’automatisation croissante réduit le temps et le contenu de l’interaction avec le client, donc l’intérêt de leur travail. « Moi j’ai envie de rester un petit peu plus avec le client, 2 ou 3 secondes ça n’est pas beaucoup. Moi je pense que le client est plus heureux quand il est resté 2 ou 3 secondes de plus avec l’opérateur. » (TO), « C’est vrai qu’il n’y a pas que du bon. Moi, quand je tombe sur un serveur, ça ne me plaît pas, et les clients n’aiment pas non plus » (TO).

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5.1.3. Flexibilité quantitative interne : temps de travail Les horaires des téléopérateurs sont différents chaque jour et sont calés sur les prévisions d’appels. Trois types de service sont en général effectués : les matins, les après-midis, et les mixtes (matin et après-midi). Les services sont prévus par roulement du lundi au dimanche. L’un des aspects positifs mis en avant par nombre d’agents est la possibilité d’échanger les horaires entre collègues. Il semble y avoir dans ce domaine une grande liberté d’organisation : « Les horaires on peut faire comme on veut » (TO), « C’est pas mal, ça nous permet d’avoir des activités en dehors et d’organiser ses journées de récupération dans la semaine par exemple quand on a travaillé le samedi, le dimanche » (TO), « avoir un travail qui permette d’avoir une vie privée comme je l’entends » (TO), Il arrive ainsi que des opérateurs fassent toujours la même plage-horaire choisie en fonction de leurs convenances personnelles et de celles de leurs collègues. Ainsi, si les horaires de travail sont calqués sur les flux de production et paraissent de prime abord rigides et contraignants, les arrangements qui s’opèrent entre téléopérateurs donnent au système beaucoup de souplesse et s’adaptent aux contraintes personnelles des uns et des autres. C’est d’ailleurs l’un des principaux motifs de satisfaction des agents.

5.1.4. Flexibilité quantitative interne : redéploiement / mobilité La mobilité professionnelle est fréquente dans l’entreprise et fait partie des principes de base des statuts du personnel. Mais elle semble s’être fortement accélérée depuis 1992 du fait des réorganisations successives (EO1 puis E02). Une partie des témoignages évoque des changements d’emplois tous les 3 ans en moyenne. Mais ce qui pourrait être un signe de dynamisme pour l’entreprise et une possibilité d’évolution professionnelle pour les agents n’est en fait qu’une variable d’ajustement pour l’entreprise. A chaque mobilité coïncide une fermeture de services, une réorganisation, une décentralisation puis centralisation de telle ou telle activité…. Cet ajustement est surtout quantitatif et semble faire peu de cas des compétences des personnes. « J’espère que d’ici ma pré-retraite, je vais rester ici ! », « depuis 1996, c’est 3 services que je fais. » (TO), « ensuite, j’ai travaillé 1 an et demi au service facturation, le service a fermé et je me suis retrouvée ici » (TO) », « un service qui a fermé et donc il a fallu nous placer ailleurs » (TO). L’automatisation aidant, il semble fort probable que d’ici quelques années, seuls quelques agents assureront un deuxième niveau de renseignements lorsque la demande n’aura pas été satisfaite par le serveur vocal. Les téléopérateurs sont en général conscients de cette fermeture probable du 12 à Amiens même s’ils déclarent « n’être informés de rien », et perçoivent de manière assez négative toute mutation vers d’autres centres d’appel tels que OLA ou Wanadoo. Déjà plusieurs redéploiements ont été effectués vers OLA dans des conditions qui laissent apparemment peu de choix aux agents et ne font pas appel à des compétences spécifiques : « Et bien au début il y en avait qui étaient volontaires, et puis après quand il n’y a plus eu assez de volontaires, ils les ont un peu désigner d’office… C’est pour ça, moi j’ai eu beaucoup de chances (…) ils ont pris des gens qui étaient nés après 1955, donc moi je suis de 1952, donc moi apparemment je suis trop vieille ! ça m’arrangeait bien pour une fois d’être âgée! » (TO).

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Le dernier départ a laissé un souvenir assez vif aux « survivants » : aucune information, suppression des postes de travail du jour au lendemain… « C’est le seul service où l’information est verrouillée à ce point là (…) au-dessus : « n’en parlez pas, pas de vague » » (RE). La crainte est présente chez les téléconseillers d’être mutés d’office à OLA : « Personne ne veut y aller » (TO). Les échos qu’ils ont de leurs anciens collègues quant au travail et aux conditions les renforce dans cette crainte. « Il y en a qui ne se sont pas adaptés… à cause du travail » (TO) « (à OLA) il y a beaucoup de gens qui stressent et qui dépriment » (TO). Ainsi, la perspective de partir chez OLA « contraints et forcés » les angoisse. « Si on est stressé, c’est plutôt par rapport à leur histoire d’aller à OLA (…) Il fallait qu’ils dégraissent ici parce qu’ils ne pouvaient pas dégraisser à Creil (autre plate-forme du 12), parce qu’ils n’ont que les renseignements. Et on nous a dit « vous avez de la chance d’avoir OLA » mais nous on est aussi bien là (au 12) ».

5.1.5. Relations de travail et relations hiérarchiques L’ambiance de travail est généralement qualifiée de « bonne » notamment pour l’échange des services (horaires). L’entraide existe en cas de problèmes, même si certains indiquent que le travail est surtout individuel et qu’ils ont peu de contact avec leurs collègues pendant le temps de travail. Seules les pauses permettent des échanges, mais elles n’ont pas lieu pour tout le monde en même temps. « On ne travaille pas vraiment tout le monde ensemble, on est quand même indépendant, on travaille soi-même. On n’a pas le temps de communiquer dans la pièce ou très peu » (TO), « L’ambiance est bonne … c’est qu’on ne peut pas trop se parler : les rendements, les rendements … Pas de possibilité de se parler beaucoup… » (TO) Chaque responsable d’équipe gère une quinzaine d’opérateurs. Leur travail selon eux consiste à faire le suivi administratif des agents, les aider à répondre aux appels difficiles, avoir un rôle de motivation de l’équipe et les informer des changements. « On s’occupe de la gestion courante du personnel, notre gros boulot c’est de recevoir, suivre nos agents et essayer de les motiver pour améliorer leurs performances et les tenir au courant de tous les changements » (RE). Cette définition est cohérente dans les principes avec ce qu’attendent les télé-opérateurs (information et soutien technique en cas de difficultés) mais les relations paraissent néanmoins tendues « Ils sont surtout là pour nous flinguer » (TO) « Je n’ai pas l’impression que s’il arrivait quelque chose, ils nous défendraient vraiment » (TO). De leur côté, les responsables d’équipe admettent leurs difficultés à gérer une population parfois défaillante ou qui n’a pas toujours choisi de venir travailler au 12. « On a tous des agents à problèmes (…), qui n’ont pas forcément les connaissances élémentaires » (RE) « J’en ai un c’est le summum : il a des défauts d’élocution, il est sourd, il ne voit pas clair et il travaille au 12 ! » (RE) « On a des gens qui viennent en freinant des quatre pieds…donc ces gens-là, pour les motiver… » (RE). Les RE prennent le parti d’une certaine souplesse vis-à-vis des agents « Il faut être assez souple quand même » (RE) « C’est vrai que les gens bougent facilement (…) ils posent les casques, ils s’en vont » (RE). Le contrôle et le suivi des objectifs semblent être le nœud de toutes les tensions entre les téléopérateurs et les responsables. « Eux, on les stresse et le dernier maillon de la chaîne c’est nous, alors automatiquement il nous tape dessus » (TO parlant d’un RE). Les RE se plaignent de n’avoir que peu d’autonomie vis-à-vis de leurs supérieurs hiérarchiques « On n’a pas de degré d’autonomie. Aucune, aucune autonomie » (RE) « Vous travaillez comme vous voulez du moment où vous restez dans la ligne droite » (RE), notamment en ce qui concerne les objectifs à atteindre « Nos supérieurs attendent que le centre soit le plus performant possible et qu’il n’y ait pas de conflit » (RE) et la gestion

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de l’équipe « ce qu’il attend de nous… qu’on soit un peu garde-chiourmes, point » (RE). « On voudrait nous faire adopter le management que j’ai connu quand je suis arrivée et je ne suis pas tout à fait d’accord. Je veux responsabiliser les gens » (RE) « Un type de management, de flicage » (RE).

5.1.6. L’évaluation de la performance

5.1.6.1. Productivité / qualité / apport des TIC (organisationnelle) L’évaluation de la performance des téléopérateurs se fait essentiellement sur des critères quantitatifs cités précédemment (nombre d’appels par jour, temps d’appels, temps de « pas -prêt », temps de pause…). La mesure de la qualité de service rendue au client existe à travers les enquêtes de satisfaction mais est globalisée pour la plate-forme et ne fait pas partie des objectifs des opérateurs. Cette ambiguïté entre qualité et productivité est assez nette aussi bien chez certains agents : « Soit on fait ce que l’entreprise dit, soit on fait ce que le client demande » (TO), « Il ne faut pas stresser les gens pour qu’ils fassent plus et moins bien » (TO), que chez les responsables d’équipe « il n’y a rien sur la qualité, si bien qu’on peut marcher sur la tête » (RE). Par ailleurs, la mesure de la productivité-temps interpelle les téléopérateurs sur les valeurs de l’entreprise. Beaucoup ont exprimé leur malaise face à des objectifs qu’ils estiment être « d’entreprise privée » : la nécessité de « faire de l’argent », de la « rentabilité » par rapport à l’état d’esprit initial de France Télécom. « On était service public, on n’avait pas à s’intéresser si on était rentable ou pas, donc … c’est vrai que d’un seul coup on ne peut plus raisonner de la même façon. Moi, c’est çà que je regrette » (TO). La technologie a permis d’accroître les performances en automatisant les réponses aux appels, en améliorant la rapidité et la fiabilité des recherches. Elle permet également de suivre seconde par seconde les flux d’appels et les temps de réponses. Dans un futur proche, elle se substituera inévitablement aux téléopérateurs pour les tâches les plus basiques.

5.1.6.2. Motivation/ satisfaction (individuelle) La plupart des téléopérateurs interrogés déclarent ne trouver que peu d’intérêt à leur travail ou ne pas savoir ce qui les motive. « Il n’y a pas grand chose d’intéressant justement », « c’est simple sans souci particulier », « ça ne me déplaît pas ». Quelques personnes seulement mettent en avant l’intérêt du « contact client » mais là encore, l’automatisation réduit de plus en plus cette interaction. Néanmoins, tous les agents du 12 sont satisfaits de leur situation, mais en cohérence avec les résultats précédents, surtout pour des motifs personnels :

- Les horaires qui laissent du temps « à côté » sont très largement évoqués (cf. temps de travail)

- Le bonus financier des dimanches « je travaille tous les dimanches, ce qui me permet de payer ma maison » (TO).

- Enfin, la perspective d’un travail simple demandant peu d’investissement ou d’implication personnelle : « j’ai cherché une voie de garage, je l’ai trouvée, j’ai atterri pour les cinq dernières années » (RE), « Une fois que vous sortez d’ici vous n’avez rien sur le bureau » (TO), « Là déjà, on n’a pas de responsabilités. On s’en va le soir, on ne se dit pas « j’ai oublié ça ou ça »… avant il fallait penser « est-ce

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que j’ai envoyé la facture à tel client ? ». Là pour la fin de ma carrière, c’est vrai que… » (TO)

Quelques téléopérateurs évoquent néanmoins une satisfaction d’ordre professionnel : être sûrs d’avoir bien renseigné le client et accédé à sa demande, « ma satisfaction à moi c’est ça : c’est d’être à peu près sûr de moi à chaque fois que je donne un renseignement » (TO). Il apparaît clairement que la satisfaction des agents est surtout liée aux conditions de travail (horaires) et assez peu au contenu du travail lui-même, qui représente peu d’intérêt si ce n’est celui de la simplicité. D’ailleurs, peu de stress lié au travail n’est abordé dans les entretiens.

5.1.7. Accompagnement RH : valorisation des métiers / perspectives d’évolution

De manière unanime, les agents estiment que le 12 a toujours eu une image négative et dévalorisée au sein de l’entreprise. « Tu vas au 12, c’est vraiment les cancres : ils sont mis au 12 parce qu’on ne peut pas les mettre ailleurs » (TO) « je ne pense pas que le 12 ait jamais été considéré comme un service proprement dit, je pense qu’il a été longtemps l’endroit où personne ne voulait aller » (TO). De fait, avoir travaillé au 12 n’est absolument pas valorisé dans un parcours professionnel, pour certains cela constitue même un « handicap ». Néanmoins, et compte tenu de la fermeture probable de la plate-forme, les responsables tentent de faire passer un nouveau message : le 12 comme expérience valorisée pour évoluer vers d’autres centres d’appel. « Maintenant, ça va servir de tremplin. Au démarrage c’était plutôt un truc coercitif » (RE) « le 12 c’est vraiment une école pour les centres d’appel » (RE). Mais ce message ressemble plus à du redéploiement déguisé qu’à une véritable politique d’incitation à la mobilité. En effet, peu de possibilités sont offertes aux téléopérateurs au sein de la plate-forme « on n’a aucun espoir de progresser » (TO). La seule évolution possible est de partir à OLA ou Wanadoo : « Il y a des personnes qui sont parties à OLA, elles vont pouvoir évoluer, au bout de 3 ans (…) si le travail est bien elles vont progresser. D’ailleurs il y en a plein qui sont partis pour ça. (…) j’ai une copine elle est partie pour être 2.2 parce que je pense qu’en restant au micro là, je ne pense pas qu’on puisse être 2.1 ou 2.2 ». Les perspectives d’évolution sont limitées dans l’entreprise : « Les gens partent sur OLA ou Wanadoo (…) Ils n’ont pas vraiment le choix parce qu’il n’y a plus beaucoup de boulot à FT » (RE). Mais cette solution ne semble guère enthousiasmer les opérateurs qui souhaitent pour la plupart terminer leur carrière au 12, conscients de la difficulté qu’ils auraient à s’adapter à un nouveau travail beaucoup plus complexe sur une autre plate-forme. « Tant qu’il y aura le 12, je reste là. Je n’ai pas envie de partir ailleurs… Si le 12 ferme, on verra, j’attends » (TO), « Tout ce que je demande c’est de rester ici pour terminer » (TO), « je n’ai pas envie de me retrouver en dépression comme les collègues (…) je n’ai pas envie d’être fliquée comme à OLA (…) il y a beaucoup de choses à savoir (…) au 12 on part en vacances, on revient c’est pareil » (TO).

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5.1.8. RH et TIC L’utilisation de l’intranet @noo semble peu fréquente par les téléopérateurs (information, messagerie électronique..) hormis pour saisir leurs congés. Là encore, des difficultés sont évidentes dans l’utilisation de l’outil puisque certains avouent qu’ils ne savent pas « trop bien comment ça marche » (TO) et demandent au chef d’équipe « parce que nous on ne sait pas tout çà » (TO). Ainsi, un écart important existe entre l’utilisation de l’informatique dans leur métier au quotidien avec des applications cadrées, des procédures automatiques, et l’utilisation de l’informatique à titre personnel, de recherche sur internet ou intranet ou même simplement l’ouverture d’une boîte de courrier électronique. Par ailleurs le système de saisie des congés vient se superposer à l’ancien système. La décision reste celle du responsable d’équipe qui continue à tenir son tableau de service manuellement. « Sachant qu’on a gardé l’ancien système, mon truc sur Excel. Je donne une feuille aux agents pour qu’ils me donnent leurs souhaits de congés (…) et puis j’établis des tableaux anciens » (RE) La saisie des congés est donc une obligation supplémentaire pour les agents sans qu’ils en comprennent vraiment l’intérêt « (les opérateurs) ils ne comprennent pas pourquoi maintenant c’est eux qui gèrent leurs congés » (RE) « Si on n’est pas là près d’eux, ils se sentent perdus » (RE).

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5.2. Analyse des entretiens réalisés à Wanadoo Le responsable de la plate-forme Wanadoo a été rencontré préalablement aux entretiens avec les autres salariés, afin de mieux comprendre le contexte dans lequel ils évoluent et d’avoir la vision managériale du fonctionnement du centre d’appels. Le centre d’appel Wanadoo qui a constitué le terrain de notre recherche est l’un des deux premiers centres d’appels créés pas France Télécom pour effectuer l’assistance Wanadoo. Ces centres d’appels internes se sont progressivement substitués à ceux des entreprises sous-traitantes auxquelles l’opérateur avait recours. Nous retrouvons ici ce qui a déjà été mentionné durant les entretiens exploratoires, à savoir que la création des centres d’appels permet de fournir du travail à des salariés de France Télécom touchés par les restructurations de leurs services. La plate-forme Wanadoo se compose de près de 70 téléconseillers répartis en huit équipes, chacune d’elles étant encadrée par un superviseur (nom donné aux responsables d’équipes), intégrant des aides volantes (assurant une fonction de soutien et de formation). Deux fonctions transverses (analyste des flux et analyste qualité) complètent la plate-forme. En elle-même, elle se situe au dernier étage d'un bâtiment moderne de France Télécom. La salle est rectangulaire et elle est organisée en «Open Floor». Les postes sont constitués de petits box ordonnés de façon lâche sur tout l'étage. De larges baies vitrées assurent l'éclairage en lumière naturelle de la pièce. La décoration est sobre et il n’est pas possible de distinguer de publicités spécifiques pour Wanadoo ou France Télécom sur les murs. Au sein de la plate-forme, les superviseurs et les conseillers ne disposent pas, en théorie, de postes fixes, seul le responsable de plate-forme dispose d'un bureau. Quelques petits bureaux vitrés sont disponibles pour un usage occasionnel. Pourtant, de nombreux postes sont personnalisés avec des photographies ou des dessins. Nous avons réalisé les entretiens sur deux jours pendant les heures de travail en utilisant ces bureaux. Une salle de repos est disponible à l'étage inférieur. Au rez-de-chaussée, nous trouvons près du sas d'entrée un large panneau syndical. Des informations concernant plus spécifiquement la plate-forme se trouvent à l'entresol face à la salle de repos. L’ambiance de travail sur la plate-forme semble studieuse. La plupart des conseillers munis de casques sont assis face à leur écran d’ordinateur, mais certain d'entre eux sont debout profitant de l’extension du câble de liaison téléphonique. De cette façon, ils peuvent voir au-dessus de leur box et interférer avec leurs collègues. Un conseiller nous précisera à ce sujet : « Oui, on a de longues laisses, on peut aller loin (rires)! ». L’activité de la plate-forme est centrée sur l’assistance téléphonique aux abonnés à Wanadoo, c’est-à-dire la résolution à distance de tous les problèmes informatiques auxquels les clients peuvent être confrontés lors de la manipulation de leur utilisation d’internet ou de leur messagerie électronique. Depuis la création du centre d’appel, et encore au moment où l’entretien a été réalisé avec son Responsable, les objectifs qui lui étaient fixés étaient de nature quantitative, axés sur la notion de productivité, de coût par appel : « on est dans une situation où le centre d’appels a pour objectif des objectifs de productivité, mais le client … à la limite on peut très bien faire fonctionner de façon parfaite le site, en ayant une qualité de service qui est absolument mauvaise ». Il s’agit en fait de la simple réplication des objectifs qui étaient fixés par France Télécom à ses sous-traitants, comme Téléperformance. Comme l’indique le Responsable de la plate-forme dans l’extrait d’entretien cité ci-dessus, ce type d’objectifs parait assez éloigné de ce que peuvent attendre les clients en appelant l’assistance Wanadoo. L’entreprise semblerait avoir pris conscience de ce fait et faire évoluer les indicateurs afin de mieux prendre en compte la qualité de service : « l’orientation client qui commence à devenir importante, donc là à mon avis ça va changer quand même globalement la façon de

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piloter les plates-formes […], c’est bien parce qu’on va changer aussi le niveau des indicateurs, il faut qu’il y ait une prise de conscience aussi que les apports d’une plate-forme comme ça … disons qu’on n’a pas seulement un certain nombre de coûts […], là on passe complètement à côté de cet aspect client ». Le Responsable du centre d’appel espère par ailleurs que si cette reconnaissance par l’entreprise de la qualité du travail réalisé par les téléconseillers se développe, cela permettra d’améliorer le recrutement sur la plate-forme et de faire « venir des conseillers qui auront une valeur ajoutée dans la façon dont ils traitent l’appel et dans la façon dont ils font en sorte que les clients restent ». Le recrutement a en effet pu être un problème dans les premiers temps de la création du centre d’appels Wanadoo, du fait des modalités selon lesquelles ont été réalisés les redéploiements de personnels en direction de Wanadoo. N’étant pas sur le projet de création du centre d’appels au moment des premiers recrutements, le Responsable n’a pas pu choisir les personnes intégrant la plate-forme Wanadoo : « les premiers ont vraiment été nommés d’office, les autres je me suis bien gardé, en fait, de procéder de la même façon ». Ces salariés ont parfois mal vécu des redéploiements qui ont été mal expliqués ou mal réalisés : « ils sont arrivés là tous en me disant : « et bien on est nommé, bon d’accord on ne peut pas faire machine arrière, OK, mais il faut savoir qu’on nous a menti sur la fermeture de notre service, on ne nous a pas donné le choix comme on nous l’avait promis … » ». Si au départ les personnes redéployées qui intégraient la plate-forme étaient majoritairement issues de services techniques, les origines professionnelles se sont diversifiées par la suite, avec tout d’abord beaucoup de recrutements de personnes qui étaient dans le domaine commercial (dont « une majorité, quand même, de gens qui venaient de services clients par téléphone, par exemple le 1014 »), puis des personnes originaires de l’USO et de services administratifs, notamment financiers. Cette diversité des origines professionnelles et des compétences initiales des téléconseillers, ainsi que l’évolution rapide des techniques liées à Internet, ont engendré et engendrent des besoins de formation, laquelle s’opère sous trois formes. La première correspond à la formation initiale préalable à l’arrivée des téléconseillers dans le centre d’appels ; la seconde à des formations de niveau unique, généralement sur des produits nouveaux comme l’ADSL et destinées à l’ensemble des téléconseillers de la plate-forme ; la troisième à des modules spécifiques destinés à combler les carences de certains conseillers. L’assistance technique à distance nécessite donc des compétences techniques et relationnelles importantes et en perpétuelle évolution. Le traitement des appels doit suivre des phases déterminées (présentation, interrogation du client, reformulations, recherche du problème, élaboration d’un scénario de résolution, test avec le client, etc.), mais le contenu de chacune de ces phases ne parait pas particulièrement prescrit. Les téléconseillers disposent pour réaliser leur travail de l’aide apportée par les outils informatiques de gestion de la connaissance (bases de données nationale et locale). Mais le Responsable de la plate-forme lui-même ne semble pas les pousser à suivre strictement des procédures définies pour traiter les appels : « il y a beaucoup de choses marquées sur la base de connaissances, disons qu’il peut se guider là-dessus, par contre il ne doit pas se calquer vraiment sur ce qu’il a. c’est-à-dire que quand il est sûr d’être dans la bonne branche, tout est marqué. Il a un guide qui est intéressant, d’ailleurs on s’aperçoit que les conseillers expérimentés ont finalement imprimé leur base de connaissance dans la tête. Donc c’est pas mal. Moi je pense qu’il faut qu’il reste toujours à l’écoute ». La volonté affichée par le Responsable du centre d’appels Wanadoo est par ailleurs à la fois de diversifier les activités réalisées par le centre d’appels, et par là même d’offrir des possibilités d’évolution de carrière en interne aux téléconseillers. Cette diversification

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peut s’opérer au niveau des produits pour lesquels une assistance est réalisée (exemple de la prise en charge de l’assistance ADSL), mais également au niveau de la nature de l’activité en elle-même, puisqu’il est envisagé au cours de l’année 2002 la création d’une équipe non plus technique mais commerciale. Cette diversification des activités opérées en interne « donne une diversification des métiers, avec à chaque fois la fonction de soutien ». Contrairement à ce qui semble être la politique généralement suivie dans les centres d’appels, le Responsable souhaite également donner la possibilité aux téléconseillers d’évoluer en interne, pour passer sur des postes d’aide volante, mais également de superviseur : « si on peut entrer ici comme conseiller plutôt bas de gamme et puis ressortir après plusieurs parcours professionnels comme chef d’équipe c’est très bien, et on a la possibilité de le faire. A chaque fois que je mets quelqu’un sur une position d’aide volante j’ai cette arrière-pensée là, puisque là c’est la seule situation où il va montrer qu’il sait donner des conseils, donc il a un côté pédagogue, mais il a un côté animation aussi ». Cette politique de progression de carrière en interne vise à montrer aux téléconseillers qu’il existe des possibilités d’évolution au sein de la plate-forme, et qu’une promotion ne passe pas nécessairement par l’obligation de la quitter pour intégrer un autre service. Les réactions des téléconseillers à la promotion de l’un d’eux à un poste de superviseur sont bonnes selon le Responsable de la plate-forme : « plusieurs conseillers et pas forcément des moindres on dit « super, génial », on voit qu’il y a du concret sur les mots, parce qu’on disait toujours « évolution professionnelle oui mais il faut partir ailleurs, nous on aime bien Wanadoo donc … », et là ça a complètement mis court à ce genre de réflexions ». L’analyse des entretiens qui suit s'appuie sur 13 entretiens exploitables menés auprès des salariés de la plate-forme. L'analyse de contenu des entretiens a été réalisée à travers la grille de lecture thématique commune à l'ensemble des entretiens réalisés dans les différents centres d'appels. Le tableau ci-après reprend les caractéristiques des personnes ayant participé à ce travail. L'échantillon retenu est représentatif de la diversité des métiers exercés sur le site Wanadoo.

5.2.1. Caractéristiques et parcours des agents interviewés La plate-forme est ouverte depuis 1998 avec une vingtaine de personnes. L'âge des conseillers n'est pas homogène. Toutefois il ne semble pas y avoir de personnel de moins de 25 ans. De la même façon le groupe est constitué d'hommes et de femmes. Il y a donc des hommes et des femmes ayant déjà exercé des fonctions diverses chez France Télécom. Durant nos deux journées sur le site, lors de la pause de midi, nous avons discuté de façon informelle avec certains salariés qui nous ont interrogés sur la nature de l'étude. Le premier jour, l'un d'entre eux a regretté de ne pas faire partie de la liste des entretiens. En ce qui concerne le grade, il est fonction de l'ancienneté de la personne. Il est aussi fonction du parcours antérieur à France Telecom. C'est ainsi qu'une conseillère est «3.1» c'est-à-dire cadre, puisqu'elle exerçait précédemment dans le domaine de l'informatique : « Je suis en 3.1 en bas de l’échelle des cadres sans avoir encadré personne. Puisque j’ai été considéré comme expert dans le service où j’étais avant. ». En revanche un superviseur est encore 2.3 et attends sa promotion : « Oui ce sera pour passer en 3.2. Je l’ai fait aussi dans ce sens là.... Et puis je ne vous cache pas que s’il y a un 3.2 au bout, je suis content. »

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Emploi

Grade

Sexe

Age

Ancienneté FT

Ancienneté Wanadoo

Identifiant

Statut

Cons. 2.3 M Env. 30 9 2 ans Wan1 France Télécom

Cons. 2.2 M 41 20 3 ans Wan2 France Télécom

Cons. 2.3 M Env.30 12 2 ans Wan3 France Télécom

Cons. 3.1 F Env.35 12 2 ans Wan4 France Télécom

Cons. 2.2 F Env.50 30 2ans Wan5 France Télécom

Cons. 2.2 M Env.40 20 3 ans Wan6 France Télécom

Cons. 2.3 M Env.40 20 1 an Wan7 France Télécom

Cons. 2.2 F Env.45 20 6mois Wan8 France Télécom

Cons. 2.3 M Env.50 30 3 ans Wan9 France Télécom

Cons. 2.2 F Env. 30 6 2 ans Wan10 France Télécom

Sup. 2.3 M Env.40 20 3 ans Wan11 France Télécom

Sup. 3.2 M Env.55 33 3 ans Wan12 France Télécom

Qual. 3.1 F Env.40 20 3 ans Wan13 France Télécom

Légende : Cons. : conseiller / Sup. : superviseur / Qual. : Analyste qualité

Tableau 4 : Caractéristiques des personnes interrogées chez Wanadoo Il n'est pas facile de discerner les motivations des agents à intégrer la plate-forme. Si certains d'entre eux affirment avoir choisi volontairement ce travail : « ...Je pensais avoir fait le tour du poste (ancien). Et puis un petit peu assez des réclamations clients, ça commençait à devenir un peu lourd, donc j'ai voulu faire complètement autre chose, changer du tout au tout. Surtout que je n'avais pas internet, je n'y connaissais rien, donc c'est un peu un défi. J'ai postulé ». D'autres, plus nombreux, semblent avoir été influencés par des circonstances professionnelles ou familiales : « … Bon, j'ai été commercial pendant quinze ans, et puis ras le bol quoi, donc ça tombait pile poil, ça tombait très bien ». Beaucoup, sont arrivés à la suite de fermeture de services : « …je suis presque ici contre mon gré, quand même. C'est un redéploiement, c'est pas tout à fait ce que j'aurais voulu après la supervision, j'aurais plutôt voulu rester dans le technique….oui imposé ». De nombreux conseillers ont choisi la plate-forme Wanadoo afin de rester ou de revenir dans la région d'Amiens. Dans certains cas (retour) il s'agit d'une démarche volontaire, mais bien souvent, c'était le seul choix possible (restructuration, fermeture). Parfois, la personne a anticipé la fermeture de son service.

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Les superviseurs interviewés ont un parcours analogue aux conseillers. Par exemple si l'on considère le parcours de l'un d'entre eux, on constate qu'il est présent chez France Télécom depuis plus de trente ans. Son parcours est varié. D'abord manuel puis technicien il a exercé par la suite un poste de commercial sur les lignes à haut débit de FT (Numeris). Comme beaucoup d'autres personnes présentes sur la plate-forme, il a d'abord exercé son métier sur Paris avant d'aller à Amiens. Il s'agit donc d'un employé dont le parcours professionnel reflète l'évolution de France Télécom ces trente dernières années. Ce superviseur a participé à la mise en place de la plate-forme en 1998. Il était volontaire : « On m'a demandé et j'ai accepté tout de suite. C'était volontaire parce que j'aime mettre en place des choses ». Ses qualifications dans l'emploi précédent, avaient un rapport avec la technique des réseaux mise en œuvre chez Wanadoo : « … et on m'a appelé pour être sur la plate-forme Wanadoo parce que je connaissais un petit peu l'informatique […] bon moi j'ai été relancé en premier pour Numeris ». Son grade actuel est 3.2.

5.2.2. Flexibilité qualitative interne : la nature du travail et son contexte

5.2.2.1. Le travail : nature et caractéristiques La description du travail varie peu d'un conseiller à l'autre : « Là depuis trois ans c'était exclusivement du dépannage par téléphone des micros clients, installer des connexions, à essayer de faire fonctionner la première connexion ou alors s'ils étaient en panne, de réparer etc… » ; « Mon travail consiste à…je dirais à dépanner en priorité, à conseiller et à orienter un petit peu les clients Wanadoo…de dépanner, d'orienter, de conseiller du point de vue technique, sur l'utilisation de Wanadoo » ; « l'assistance technique. Les gens appellent pour des problèmes techniques de connections, manipulations, c'est basique, c'est du relationnel. C'est fatigant car on doit comprendre le problème du client, l'interpréter et le guider ». Le travail est jugé parfois difficile et frustrant : « le travail, bah de toute façon on s'habitue à tout, même si, de toute façon, ça ne me plaisait pas au départ…Une frustration parfois aussi, parce que bon, il est vrai que de toute manière, on ne peut pas tout dépanner, on ne voit pas toujours clair de toute manière…Bon un peu de frustration et beaucoup de fatigue aussi ». D’une part, le travail est considéré comme répétitif : « c'est souvent les mêmes problèmes qui reviennent… ». Un superviseur insiste sur l'aspect routinier du travail: « À partir de 98, on a recruté en 98, donc les gens ont stressé bon après, au bout de deux ans, après c'était la routine, ça devenait trop de routine, ça devenait trop chiant…" D’autre part, l'évolution des techniques et la complexité de Wanadoo entraînent des changements : « …selon les systèmes d'exploitations qui sont différents, les machines des clients, ce qui a été mis sur les machines, […] on arrive à des situations différentes. Ce qui donne un petit peu d'intérêt au métier. Parce que sinon si le client nous donne simplement une erreur et qu'on répond bêtement ça n'a pas trop d'intérêt, que là, chaque client a une configuration particulière, c'est ce qui est intéressant ». Classiquement nous constatons que la variété des compétences requises dans le travail est source de motivation. Cette évolution technique constante est donc source d'intérêt : « c'est un métier où il faut foncer sinon on est très vite largué ». Cette évolution continuelle peut, si elle est mal accompagnée, se transformer en stress : « C'est un peu gênant parce qu'à la limite le client en sait plus que vous, et ça c'est vraiment détestable. Pour un technicien c'est vraiment horrible parce qu'on a l'impression d'être complètement nul et largué ».

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Un superviseur résume son travail de la façon suivante : « … bon ben prendre le maximum d'appels, ensuite de gérer les pauses, gérer le temps de retrait, gérer les stress, gérer l'inquiétude […] c'est aussi de faire du débriefing, donc d'écouter et de débriefer la personne et d'apporter un plus au niveau technique, au niveau soutien ». Il s'agit donc d'un travail d'encadrement mettant l'accent sur le contrôle quantitatif et qualitatif ainsi que sur le soutien technique. Ce soutien n'est d'ailleurs pas seulement restreint au domaine technique : « on essaye de travailler ensemble pour leur apporter un plus, rendre moins monotone le travail, rendre moins monotone le travail, parce que c'est vrai prendre des appels toute la journée c'est dur ». Dans le cas particulier des superviseurs, il semble que le travail s'exerce avec une certaine autonomie. Illustrons notre propos en ce qui concerne la procédure de contrôle qualitative (les écoutes) : « c'est-à-dire que chaque superviseur fait un peu comme il veut, moi je préviens mes téléconseillers ». Cette autonomie concerne aussi leur temps de travail : « On l'a soumis (le planning) au responsable, il est accepté et donc normalement il y a roulement, donc demain je suis en repos… ».

5.2.2.2. Le travail : Contexte Le travail s'effectue en interaction avec les ressources logicielles du poste. Les procédures d'accueil sont standardisées parfois au détriment du sentiment d'autonomie dans le travail : « Moi, je travaille à ma façon, on ne s'en plaint pas, mais il faudrait avoir un discours type, un discours FT ». Ou bien encore : « Le client nous arrive par un système et on l'accueille […] on a tout un cheminement dans le discours client, on lui pose pas mal de question ». Le système informatique répartit automatiquement les appels des clients entre les différents centres répartis sur le territoire. En conséquence lorsqu'un client raccroche afin de tester la solution proposée par le conseiller, la relation est interrompue. Si la solution se révèle insuffisante, le client rappelle et il est mis en contact avec un autre conseiller : « Au niveau logiciel on a les applications et on se doit de remplir les infos pour permettre l'historique ». Le conseiller ne gère donc pas toujours le client jusqu'à la solution de son problème. Cette situation peut entraîner des problèmes surtout si la fiche historique n'est pas remplie sur la base de données : « Et bien le conso, on a toute la fiche matérielle que l'on doit remplir et qui n'est jamais remplie, ça m'énerve profondément. Le client vient d'appeler et on a son dossier sous les yeux et ce n'est pas rempli non plus alors qu'on sait très bien que c'est essentiel […] le conseiller (précédent) avait l'occasion de le prendre, mais il ne l'a pas fait parce qu'il faut aller plus vite ». La nécessité de prendre un « quota » d'appels entraîne un appauvrissement de la tâche car le dépannage technique ne se double pas d'un relationnel client : « vite fait, bien fait, pourquoi pas, mais moi on m'a toujours dit que c'était incompatible … ». En général, les postes de travail sont individuels. Sans que cela soit officiel, les conseillers se mettent au même poste : « on n'a pas de bureau fixe car on a très peu de documentation papier, tout est dans l'ordinateur. Mais, par habitude on se met aux mêmes places » ; « Le profil se charge sur l'une ou l'autre machine, c'est très important ça ». Comme nous l'avons déjà noté, plusieurs postes sont décorés. Il est courant que deux personnes partagent le même poste en alternance. Les superviseurs ne possèdent pas de bureau, c'est l'apanage du chef de plateau : « on est superviseur, on n'est pas chef hein ».

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5.2.3. Flexibilité qualitative interne : Relations de travail et relations hiérarchiques

En ce qui concerne les relations avec les collègues de travail, elles sont considérées comme bonnes : « Ça se passe très bien, ça se passe très bien et puis les gens qui arrivent ici c'est l'une de leurs premières remarques, ils sont surpris de la bonne ambiance qu'il y a » ; « Ça va (rires), ça va, je n'ai rien à dire, si ce n'est qu'ils sont picards, mais bon » ; « on s'entraide beaucoup ». Les relations avec les superviseurs ne semblent pas poser de problème sur le plan personnel : « avec les supérieurs, ça se passe relativement bien » ; « Oui, oui. Même les superviseurs, à part évidemment, à part peut-être deux et peut-être un jour plus énervé que l'autre on prend pas aussi bien la remarque qu'on nous fait ». Néanmoins certains conseillers sont moins consensuels particulièrement en ce qui concerne l'attractivité de la fonction : « Moi j'aurais honte de faire ce boulot (superviseur). Je préfère être à ma place même si c'est dur et fatiguant nerveusement. […] je ne pourrais pas le faire, garde chiourme ». Le rôle des superviseurs est souvent mal compris. Pour beaucoup de conseillers, souvent issus de filière technique, l'autorité d'un superviseur hiérarchique immédiat doit être assise sur des compétences techniques. C'est particulièrement important dans un service comme Wanadoo car le travail présente des difficultés techniques du fait de l'évolution continuelle de la technique. Or, si les superviseurs suivent les formations, ils ne prennent pas d'appel et leur légitimité est parfois remise en cause. Ceci, d'autant plus que leur grade hiérarchique est soit le même que certains conseillers (2.3) soit immédiatement supérieur (3.2). La légitimité de l'autorité des superviseurs se trouve donc remise en cause : « Moi, je fais mon travail. Je n'ai pas de compte à rendre. C'est pas quelqu'un qui est derrière un bureau à regarder le flux d'appels qui va me dire … ils sont cools, mais on revient au système blouse bleu, blouse blanche. Nous on connaît le travail et on le fait. Dans l'ancien système dans la hiérarchie, ils connaissaient le boulot de base, maintenant c'est du discours » ; « la logique voudrait qu'un supérieur hiérarchique soit meilleur que vous ». Il faut noter que le cas de la plate-forme Wanadoo se distingue de celui des call-centers plus classiques. En effet, dans le cas qui nous intéresse, les conseillers ont déjà une carrière professionnelle importante et disposent d'une qualification reconnue dans leur organisation par l'intermédiaire d'un grade (2.1 à 2.3 parfois 3.2). De plus la plate-forme est récente, et les conseillers peuvent être plus anciens que les superviseurs. Le rôle des superviseurs, en tant que cadres intermédiaires, est mal identifié : « Le problème, c'est qu'ils reçoivent pas mal d'informations et qu'elles restent centralisées au niveau des superviseurs […] c'est pas leur métier de prendre des appels, mais je pense que de se baigner de temps en temps, d'en reprendre de temps en temps, ça leur permettrait de mieux comprendre notre métier de technicien ». En résumé nous dirons que le rôle du responsable hiérarchique immédiat n'est pas clairement identifié : « Quand on leur pose des questions, sans que ce soit de la mauvaise volonté, ils ne savent plus répondre. […] ils gèrent un petit peu la vie du plateau ». Selon les cadres, l'ambiance de travail entre les conseillers est bonne sur le plateau. Ils pensent que cela vient de l'entraide et de l'esprit d'équipe qui règne sur le plateau. Selon l'un d'entre eux, des pratiques de rémunérations individualisées auraient un effet négatif sur ce point : « … tout le monde a son salaire ce qui fait qu'il n'y a pas de concurrence, par contre s'il y avait une prime après, s'ils voulaient mettre une prime à chaque appel là il y aurait une ambiance peut-être un peu plus mauvaise… ». Cette évolution se ferait d'ailleurs, selon ce cadre, au détriment de la qualité du service rendu au client. Lorsqu'on

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évoque avec les superviseurs les grèves ayant eu lieu au sujet du travail du week-end et des jours fériés, cela n'a pas d'influence, selon lui, sur l'ambiance de travail : « Il y a eu des problèmes. Les gens ne voulaient pas travailler le samedi ou le dimanche, nous on ne travaille pas le dimanche. Çà, c'est une lutte syndicale. Autrement tout se passe bien, il y a des grèves, je veux dire c'est normal ». Pour autant le travail quotidien est susceptible d'entraîner des tensions : «Par exemple quand on (un conseiller) prend un client furieux pendant une heure...si le superviseur va le voir juste après, c'est vrai que c'est risque de conflit. Il faut savoir le prendre. C'est normal moi je comprends.».

5.2.4. Flexibilité qualitative interne : autonomie et contrôle

5.2.4.1. Les procédures de contrôle quantitatives Le poste de travail comprend aussi une partie purement téléphonique. Les appels téléphoniques sont acheminés par l'intermédiaire d'un automate d'appel qui répartit les appels entre les différents centres. Cet automate est susceptible de contrôler étroitement le travail des conseillers grâce à ses fonctions de monitorage. Les temps de connexion, les temps de pause, les statistiques afférentes à l'appel sont enregistrés en vue d'une exploitation. Ces indicateurs quantitatifs servent à contrôler le travail des conseillers. Ce contrôle sur des critères quantitatifs est souvent remis en cause : « J'ai pas été élevé comme ça dans l'entreprise. En plus moi j'ai été longtemps dans un service de contrôle où justement tout était misé sur la qualité, le fonctionnement parfait. Alors qu'ici on demande plutôt de faire de la production et de l'appel, traiter de l'appel ». Un conseiller d'une quarantaine d'années, volontaire, chez Wanadoo depuis trois ans nous explique en quoi consiste les contrôles : « c'est le temps de conversation, le nombre d'appels, mais je ne regarde pas les chiffres, ça ne m'intéresse pas ». Le rôle du superviseur est évoqué plus loin : « s'il fait des petits tableaux ça ne m'intéresse pas ». La fonction de contrôle exercée par les superviseurs n'est pas reconnue par les conseillers. Ceci d'autant plus que l'autorité des superviseurs ne peut pas être légitimée par une situation hiérarchique supérieure (le grade) ou l'ancienneté : « Que du flicage, que du flicage. Du petit flicage même. Ils n'ont même pas, ils n'ont même pas suffisamment de poids pour me l'imposer » (un conseiller, plus de 30 ans chez FT).

5.2.4.2. Les procédures de contrôle qualitatives À côté de ce contrôle quantitatif, il y a des procédures de contrôle qualitatives. Plusieurs fois dans l'année le superviseur écoute la conversation entre le conseiller et le client. Les conseillers nous ont déclaré être préalablement au courant de ces écoutes. Les écoutes sont suivies d'un débriefing : « On a en général 2 à 3 écoutes clients par an. Donc le superviseur écoute la conversation, l'enregistre et puis après on fait un débriefing ensemble. On voit ce qui cloche et ce qui va ». Le contrôle qualitatif ne semble pas revêtir une importance capitale pour l'instant : « Parce que ce qui compte en centre d'appels, il faut dire les choses comme elles sont, c'est vrai que la qualité, c'est important, mais le nombre d'appels traités sur une journée c'est mille fois plus important. On porte bien notre nom « centre d'appels ». Certains conseillers déclarent ne pas avoir de retour : « … j'imagine que les autres en ont, mais disons qu'ici peut-être il y a des cas particuliers qui font que […] peut-être que des gens comme moi qui ont un certain âge déjà, qui ont une ancienneté, on a peut-être moins de pression que les autres ». Dans le cadre de la DPO (Direction Par Objectifs), en plus des entretiens concernant le travail, les conseillers ont un entretien de progrès tous les ans : « On a un entretien de progrès tous les ans qui est fait entre le technicien et le superviseur ... chaque

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superviseur a une équipe, donc avec nos superviseurs respectifs, et là il nous fixe nos objectifs pour l'année ». Ces objectifs sont négociés individuellement : « donc c'est mon sup qui dit « on peut fixer cet objectif » mais on négocie ensemble, parce que si on ne se sent pas capable de le tenir…c'est négociable il n'y a pas de problème ». Il semble que ces entretiens soient trop espacés pour faire face à l'évolution des techniques et en conséquence du métier. Par exemple, depuis peu de temps, les clients Wanadoo ont la possibilité de poser des questions par courriel. Les indicateurs ne prennent pas suffisamment en compte cette évolution dans le contenu de l'activité : « Là, cette année des objectifs ont été fixés, mais notre activité a fortement évolué depuis quelques mois donc je pense qu'on va revoir les objectifs parce que ça ne correspond plus du tout… là on fait des mails techniques, on répond au client par mail, […] donc forcément on prend moins d'appels, c'est sûr ».

5.2.5. Flexibilité qualitative interne : La formation et les compétences Peu de choses à noter en ce qui concerne la formation initiale : « Formation de deux semaines, puis une semaine au centre où le technicien fait du tabouret, repart en formation deux semaines et puis en rentrant, on y va doucement : un peu de tabouret et un peu plus d'appels ». Si la formation initiale ne semble pas poser de problèmes, ce n'est pas le cas de la formation continue : « On a un syndicat qui a négocié une heure de formation par semaine et par technicien ». L'autoformation semble la seule réponse à l'évolution des techniques : « Le premier client qui a eu Windows Millenium qui a appelé et bien on a pris les infos au fur et à mesure. C'est un peu gênant parce qu'à la limite le client en sait plus que vous, et ça c'est vraiment une situation détestable ». Le poste de travail des conseillers comprend un écran informatique leur permettant d'accéder à une application permettant le suivi et l'enregistrement de leurs interventions auprès du client (dossier client). Afin de résoudre les problèmes techniques, un Système de Base de Connaissances permet au conseiller de trouver les informations nécessaires. Cet outil est particulièrement utile depuis qu'il n'existe plus d'assistance experte de second niveau. Le contenu du travail est donc enrichi dans la mesure où la plate-forme a vocation à résoudre l'ensemble des problèmes des internautes Wanadoo. Cet aspect, a priori positif si l'on se réfère aux travaux d'Herzberg, entraîne un besoin accru en termes de formation continue. Ce problème peut aussi trouver une solution dans la mise en place d'outils supports au diagnostic de pannes. Cette démarche nécessite une mise à jour régulière des outils, particulièrement lors des évolutions majeures de Windows ou de l'introduction de nouvelles techniques comme l'ADSL. L'ensemble des conseillers exprime une angoisse diffuse, celle ne pas être capable de répondre à la clientèle : « …qu'est ce que j'utilise également, la base de connaissance forcément parce que je n'ai pas assez d'étoffe, entre guillemets, informatique malheureusement, je le déplore même, ça n'est rien, ça viendra, le but du jeu est quand même que l'on soit reconnu comme bon, donc si on n'est pas reconnu comme bon au bout de quelque temps, c'est vrai que c'est embêtant ». L'entraide entre les conseillers joue un rôle important : « entre conseillers, on s'entraide beaucoup ». Les conseillers d'Amiens mettent aussi en œuvre des outils de management des connaissances en réunissant leur connaissance au sein d'une base de connaissance locale : « … donc il vaut mieux se dépêcher, et puis j'utilise aussi de temps en temps la base de Co d'Amiens, c'est-à-dire un outil personnel qui a été monté ici, de toutes pièces par mes collègues, et puis de temps en temps je vais sur le Net pour aller chercher ». Chez wanadoo, l'évolution des techniques et de l'organisation du travail est rapide et le travail se trouve enrichi : « on a un plateau unique donc on a eu une montée de compétence ». Grâce à cette organisation en plateau unique, l'identité de la tâche est renforcée car il est possible de traiter entièrement la demande du client dans les cas

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difficiles : « Là, depuis quelques mois seulement on travaille en appel unique, c'est-à-dire qu'auparavant si vous voulez, quand on n'arrivait pas à traiter un problème, on va dire au bout de par exemple vingt minutes, on devait transférer au niveau deux qui devait être plus compétent que nous ».

5.2.6. Flexibilité quantitative interne : redéploiement / mobilité

Les conseillers perçoivent les effets de la politique de flexibilité quantitative interne à travers les restructurations multiples vécues dans les services. Beaucoup de conseillers pensent que les redéploiements sont la conséquence de la position géographique d'Amiens. Comme la ville est située à mi-chemin entre Paris et Lille, les anciens services ont tendance à se concentrer sur ces deux grands pôles. En somme, les call-centers auraient été créés pour fournir de l'activité aux agents touchés par les restructurations. Cette perception négative est en cours d'évolution : « Ça a changé parce qu'il y a trois ans quand le centre a ouvert c'était le premier centre qui s'ouvrait en France avec Pau. Donc les gens qui allaient sur la plate-forme Wanadoo, c'était des gens du redéploiement. On considérait cela comme une punition ». Depuis cette époque, les centres se sont multipliés et leur nécessité, vis-à-vis de la concurrence, s'est imposée. La comparaison avec les autres centres a valorisé l'image de Wanadoo vraisemblablement par un phénomène de comparaison sociale : « Maintenant ça a changé parce que d'autres plate-formes ont ouvert […] on s'est aperçu que c'était pire là-bas qu'ici et puis aujourd'hui c'est pas plus mal à mon avis. Donc ça a changé. La perception a changé. Maintenant on va dire que quitte à choisir, on va venir à Wanadoo ». Il est difficile de juger de l'attractivité de Wanadoo. En effet, de nombreux salariés semblent ne pas encore avoir fait le deuil de leur ancienne affectation. Néanmoins, nous dirons que dans l'ensemble le travail semble plus attrayant que dans les autres plates-formes FT et beaucoup plus que dans les call-centers privés. En ce qui concerne l'accompagnement des redéploiements, il semble qu'il y ait eu un déficit de communication : « C'est quasiment tombé du jour au lendemain. Mais les gens qui organisaient tout cela savaient depuis longtemps qu'ils nous destinaient à Wanadoo. Mais ils nous l'ont jamais dit ». Le redéploiement s'est accompagné d'une renégociation des grilles et des avantages qui n'a pas toujours été perçue de façon satisfaisante par les salariés.

5.2.7. Flexibilité quantitative interne : temps de travail La gestion du temps de travail semble illustrer de façon concrète la recherche de flexibilité : « l'emploi du temps, c'est quand même hyper important ». Les impératifs familiaux viennent interférer avec les intérêts de l'entreprise : « Je commence à 14 heures, je finis à 21 heures […] Ma fille a 19 ans, mon fils 16 ans. S'ils sont petits, comment fait-on pour aller à l'école si votre femme travaille? C'est dur ». L'arbitrage ne se fait pas toujours en faveur du salarié : « Je voulais travailler quatre jours mais ce n'était pas possible ». Le travail du week-end et des jours fériés pose problème : « là je me dis qu'à la limite on peut, moi je pense, se passer d'internet le week-end … ». La gestion et l'organisation du temps de travail sont un débat important. Le temps de pause est aussi un sujet de controverse. Normalement, il doit y avoir une pause toute les deux heures. Mais les salariés considèrent qu'ils travaillent sur écran et qu'ils doivent pouvoir profiter d'une pause de dix minutes par heure. En fait ils s'accordent les pauses : « On les a imposées, on va dire, et après ça a été une tolérance […] On a trouvé un

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compromis. On les accorde sans le dire » ; « il n'y a rien d'écrit au niveau des pauses donc c'est assez sympa ». Il semble que cette tolérance soit possible du fait de la spécificité du travail de la plate-forme Wanadoo. Les horaires de travail, flexibles, viennent contrarier le travail d'encadrement. En effet, s'il est possible au superviseur de voir son équipe de façon individuelle, il n'est pas possible de réunir toute l'équipe (8 personnes) : « Mais le problème, c'est que les équipes que l'on a elles se croisent, c'est-à-dire qu'on ne les voit jamais ». Nous constatons ici qu'il est difficile d'assurer la cohésion d'un groupe de travail du fait de la flexibilité des horaires de travail.

5.2.8. L'évaluation de la performance. La perception de la performance fait l'objet d'un débat au sein de la plate-forme. D'un côté les conseillers, en accord avec la culture «classique » de France Télécom, cherchent à trouver la meilleure solution et insistent sur la qualité du service rendu au client en termes d'efficacité. De l'autre, l'ensemble des dispositifs de contrôle est plutôt axé sur une notion de performance mettant en avant l'efficience : évaluation du nombre d'appels, temps de communication, files d'attentes. Le discours managérial insiste sur les objectifs, la concurrence, la fin du monopole. En somme, il cherche à mettre en avant une nouvelle culture à France Télécom. Nous retrouvons cette opposition dans les termes employés. Pour l'équipe managériale c'est une plate-forme « Wanadoo », pour les conseillers, c'est une plate-forme « France Télécom ». Il apparaît que de nombreux conseillers comparent toujours avec nostalgie leur situation de travail actuelle avec leur emploi précédent : « on nous demandait de faire de la qualité » ; « il n'y avait pas de pression ». Le discours se réfère souvent au passé : « Avant, ce n'était pas un client, mais un usager, c'est quelqu'un qui paye un service. On gardera les clients ici si on est crédible ». Certains conseillers rejettent un modèle qui ne s'appuierait pas sur les valeurs de l'entreprise qu'ils ont acquises au cours de leurs carrières : « J'ai pas été élevé comme ça dans l'entreprise, en plus moi j'ai été longtemps dans un service de contrôle où justement tout était misé sur la qualité, le fonctionnement parfait. Alors qu'ici on demande plutôt de faire de la production et de l'appel, traiter de l'appel ». Le discours fait aussi référence à la concurrence : « C'est la compétitivité, la production, être toujours plus performant vis-à-vis des autres entreprises ». La satisfaction du client est au centre des préoccupations. Mais cette satisfaction dépasse le seul univers contractuel : « Allez sur AOL, vous allez voir comment vous êtes reçu, avec des petits … de 20 ans, très fort en informatique, plus que nous. En 3 minutes on n’en parle plus, mais ils n'ont pas le respect des gens ». La différence qui existe entre les valeurs traditionnelles du service public, défendues par les conseillers et les pratiques inhérentes aux call-centers influencent la satisfaction, la motivation et l'implication des salariés. Lorsqu'on interroge les conseillers sur leurs sources d'intérêt dans le travail, certains d'entre eux ont du mal à répondre à cette question : « Rien. Non, plus grand chose… ». Ils nous livrent une explication « Mais je crois que c'est la façon dont l'entreprise a évolué […] j'ai 27 ans (dans l'entreprise) où tout était axé quasiment sur la qualité et puis d'un seul coup, on vous dit, il faut tout changer, maintenant c'est la productivité. Moi ça y est, mon éducation, elle est faite ». Classiquement, cette réaction semble être plus répandue chez le personnel âgé, issu des restructurations. D'autres conseillers mettent en avant l'aspect routinier du travail et le manque de relation avec la clientèle : « c'est la routine, mais je pourrais m'intéresser plus, mais je ne suis pas un fan d'Internet ». L'aspect technique du travail est susceptible de motiver certains conseillers : « Moi c'est personnel, c'est complètement personnel, mais je voulais devenir bon en fait entre guillemets, en Internet

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je ne maîtrisais pas trop ». Certains aspects comme le temps libre du fait des horaires décalés sont aussi considérés comme positifs. En revanche, on peut s'interroger sur les sources de motivation. En effet, les conseillers ne pensent pas pouvoir progresser au sein de la structure vers un poste de superviseur. Soit parce qu'ils sont satisfaits de leur situation, soit parce que ce travail leur paraît peu attractif : « Superviseur, ce n'est pas un métier. Je dis ça mais dans un an, vous allez revenir et je le serai peut-être. Si je ne supporte plus de prendre des appels » ; « Et puis moi au niveau indiciaire je suis à fond et je ne peux plus monter. Au niveau de l'évolution il faudrait que je passe 3.2 pour être superviseur. Je préfère prendre des appels » ; « On n'a pas forcément envie de devenir superviseur ». La relation avec le client reste une source de motivation interne : « Ce qui me motive le plus, que mon client soit dépanné. Qu'il soit content quand il raccroche ». France Télécom essaye d'augmenter la motivation externe en modulant la variable rémunération : « Depuis quelques jours on a un challenge sur le placement des comptes d'Accès libre donc il y aura une prime globale pour le plateau et une part individuelle. C'est la première fois, ça ne s'est jamais fait. […] c'est une façon de nous motiver, ça peut être sympa tant qu'il n'y a pas de débordement ». En termes d'implication, force est de reconnaître que les conseillers ne perçoivent pas un grand intérêt envers leur travail, que ce soit de la part de l'entreprise ou de la société en général : « Même pas dans la vie, même pas dans la vie, soyons honnête, il n'y a pas si longtemps mon aîné m'a demandé ce que je faisais, […] je lui dis, je réponds au téléphone, on dépanne les gens sur Internet, il me regarde et il a éclaté de rire, tu ne vas pas me dire que tu travailles avec un casque sur la tête ? J'ai été déçu, j'ai été déçu point final (rires) » ; « (l'image de l'emploi) à mon avis quelque chose de très négatif car moi, parce que quand j'ai demandé à partir à Wanadoo on m'a dit « mais tu es complètement folle » !, […] c'est vrai que notre travail c'est d'être assis à notre bureau, le casque sur la tête, donc ça c'est clair, mais c'est pas plus désagréable qu'un autre métier! ». Le stress existe sur la plate-forme Wanadoo, mais les conseillers mettent en avant leur condition « privilégiée » par rapport à Ola : « on a su imposer des choses, on ne s'est pas laissé faire, alors qu'à OLA, je ne sais pas moi, ils ont plus de pression, c'est sûr ». Le monitorage semble être une source de stress importante : « il y a cette histoire de baromètre qu'on a tout le temps sous les yeux avec le nombre d'appels, le nombre de personnes qui attendent, ça c'est assez agaçant ». En général, les conseillers soulignent que leurs conditions de travail sont meilleures que celles des centraux privés. Les cadres sont conscients de la difficulté du travail des conseillers et du stress qui en est la conséquence : « Je crois que le stress le plus dur à gérer sur le plateau, c'est de prendre les appels, former les gens. Par exemple, là on met en place l'ADSL donc on se rend compte que les gens qui reprennent l'ADSL stressent parce qu'ils ont peur de ne pas y arriver ». Nous retrouvons ici le discours des conseillers qui avaient peur de ne pas pouvoir répondre aux questions des clients du fait de l'évolution des techniques. Un des deux superviseurs distingue deux sortes de stress. Le premier serait un «bon stress» susceptible de motiver les agents. Selon ce cadre, le stress consécutif à l'arrivée continuelle des nouvelles techniques est positif : « Donc il faut apprendre, il faut apprendre, il faut apprendre. Il faut sans cesse se remettre en question. Donc les personnes qui se remettent en question tous les jours stressent, mais c'est un bon stress ». Il distingue d'ailleurs ce «bon stress» consécutif à une situation d'apprentissage permanente, d'un stress qui lui serait négatif puisqu'il ne jouerait aucun rôle dans la mobilisation des salariés : « La majorité, c'est du bon stress, les autres c'est du stress lié à «qu'est ce que je ferais plus tard ? C'est ça aussi ». Apparaît ici le stresseur que nous

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avions mis en évidence chez les conseillers : l'incertitude face à l'avenir. Cette incertitude était amplifiée par les parcours complexes de beaucoup de conseillers : restructurations, fermetures de poste, reconversions. Le monde est perçu comme changeant, imprévisible : « Qui peut dire l'évolution de demain, […] les centres de plate-forme marchent aujourd'hui. Demain on ne sait pas, politiquement on délocalise, on ne sait pas, c'est çà le stress ». Le passé est évoqué de façon nostalgique : « On partait avec l'objectif, on avait un objectif, on savait, alors qu'aujourd'hui on ne sait pas là. Le stress est là, demandez à tout le monde ce qu'ils vont faire demain : ils ne savent pas ». Ce sentiment d'incertitude face à l'avenir est basé sur l'évolution imprévisible des techniques, de la concurrence, de l'évolution politique. Au-delà de ces facteurs externes à France Télécom, il existe des facteurs internes qui renforcent cette inquiétude. En premier lieu le manque d'information et l'isolement : « Parce que nous ici on n'a aucun renseignement, je dirais ici on est loin de tout véritablement, nous on ne sait pas ce qui se passe à l'extérieur au niveau, je dirais France Télécom tout ça ». Enfin, le manque de visibilité concernant la stratégie-produit à court terme : « Là on nous met l'ADSL, du jour au lendemain, re-formation, receci, recela. Mais, ce n'est pas "avant avant", mais c'est 8 jours avant, 15 jours avant. Là, le stress joue ».

5.2.9. Accompagnement RH : valorisation des métiers et perspectives d'évolutions.

Sur le plan des pratiques de GRH, il semble que la flexibilité ne se soit pas accompagnée de pratiques innovantes. Par exemple, les salaires ne sont pas flexibles. Les primes individuelles basées sur les indicateurs quantitatifs n'existent pas. Sur ce point, il convient de noter que la grande majorité des conseillers paraît réservée. Il semble que des dispositifs d'intéressement à la vente se mettront en place dans l'avenir. Il est intéressant de noter que les conseillers ne semblaient pas vraiment au fait des détails concernant les salaires. C'est peut-être le résultat de la grande variété des origines, statuts et grades des agents présents sur le site. Sur la plate-forme, le travail est complexe et nécessite un apprentissage constant. Cet apprentissage est facilité par la bonne ambiance du groupe et les échanges entre les conseillers durant le travail : « il y a une petite auto-formation qui se fait comme ça, des petits trucs du collègue qui a trouvé comment faire, etc. et les pauses elles sont nécessaires pour souffler et puis, à la limite, c'est bénéfique pour tout le monde, même pour l'entreprise ». La pénibilité du travail sur écran justifie les pauses : « on prend des pauses assez régulièrement, mais on en a besoin ». Nous pouvons dire que les pauses constituent un bon exemple d'organisation spontanée du travail qui est justifiée par le caractère particulier de la plate-forme Wanadoo : un travail complexe qui nécessite un apprentissage constant. De plus, le rythme des appels est variable au cours de l'année. Les appels sont liés aux périodes de vente de micro-ordinateur, aux changements d'OS et aux promotions sur Internet. Il existe donc des périodes où le nombre d'appels est plus restreint (lors de notre enquête en juillet par exemple). Bien qu'il existe une certaine latitude sur les pauses par rapport aux autres plates-formes, il s'agit d'une autonomie relative : « quand la personne qui est de vigie (superviseur) vient rameuter ses troupes, c'est assez désagréable ». Pour les personnes n'ayant pas été volontaires pour les centres d'appels, le travail paraît peu motivant. C'est d'autant plus le cas si ces personnes sont en fin de carrière sans perspectives d'évolutions. Dans ce cas, leur seul intérêt c'est bien souvent d'éviter un nouveau redéploiement qui les éloignerait d'Amiens. Chez les personnes volontaires, la situation est plus nuancée. Tout en reconnaissant la pénibilité du travail, le passage dans un centre d'appel leur semble relativement positif : « Je pense que c'est important d'avoir

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passé aussi 2 ou 3 ans sur une hot line, parce que c'est quand même intéressant, à tous les points de vue, je pense que c'est quand même intéressant ». Les personnes dans ce cas, se placent dans une perspective de déroulement de carrière, encore faut-il qu'elles en aient une. Cela dépend de leur âge et de leurs aspirations professionnelles, mais aussi de la politique de GRH de France Télécom. Pour la plupart, l'évolution de carrière proposée aux conseillers ne semble pas les intéresser. D'une part, le poste de superviseur paraît peu attrayant quant à son contenu. D'autre part, il l'est peu sur le plan de la rémunération. Enfin, l'image des call-centers est peu valorisée dans la société en général et chez France Télécom en particulier. Cela tient certainement à la pénibilité de la tâche et au manque de perspective mais aussi à la prégnance de la culture technique de France Télécom. Celle-ci mettait l'accent sur l'efficacité et le savoir technique. Or, au sein de Wanadoo l'accent est plutôt mis sur l'efficience, les indicateurs quantitatifs de productivité plutôt que sur la qualité de la relation client. Ceci a des répercussions au niveau du travail sur la plate-forme. Les conseillers ne respectent pas toujours les procédures, ils mettent en avant la qualité du service. Dans de nombreux cas, l'encadrement laisse faire : « Vous allez voir là-haut, le rappel client là-haut, il n'y a pas des mails … si parce que c'est obligatoire, mais il y aura un coup de téléphone derrière. D'ailleurs, on se fait un peu remonter les bretelles par France Télécom, parce qu'ils n'ont pas le temps, il faut qu'ils travaillent … » On retrouve dans le discours l'importance de la « culture France Télécom » : « … par contre, dès qu'ils ont le téléphone et qu'ils prennent un client, ils sont contents, ils ont l'amour du client, ils ont leur client, c'est France Télécom ».

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5.3. Analyse des entretiens réalisés chez Orange Cette synthèse s’appuie sur 14 entretiens menés auprès des salariés de la plate-forme Ola /Orange située à Amiens, dont 10 télé-conseillers clients (TC), 1 Soutien Métiers Applicatifs. (SMA), 2 responsables d’équipe (RE) et la responsable de la plate-forme (RP). L’analyse de contenu des entretiens a été réalisée à travers la grille de lecture thématique commune à l’ensemble des entretiens réalisés dans les différents centres d’appel, afin de faciliter dans un second temps l’analyse inter-sites. La plate-forme Orange est récente et en phase de montée en charge, puisqu’au moment de l’entretien, son ouverture datait de moins d’un an. Dans son ensemble, la plate-forme se compose, outre de la Responsable, de trois Responsables d’Equipes encadrant chacun huit ou neuf téléconseillers, et de trois Soutiens Métiers Applicatifs, dont la fonction est orientée vers le soutien aux téléconseillers et la formation. Une quatrième équipe était en cours de constitution. Les missions de la plate-forme sont de répondre aux interrogations des clients et de traiter leurs demandes, aussi bien en ce qui concerne le domaine technique (manipulations du téléphone portable) qu’administratif (changement de forfait, nouvelles offres, explication de la facture, etc.). Ces sont les redéploiements de personnels d’origines technique, commerciale, du 12, qui ont permis de constituer les équipes de télé conseillers. Les personnes qui ont intégré le centre d’appels Orange se discriminent au regard des redéploiements en deux catégories : celles qui sont venues volontairement à Orange, et celles qui y ont été redéployées sans avoir eu d’autres propositions de poste, « des personnes qui sont venues contraintes et forcées, de fusion de départements, ou bien parce qu’il fallait diminuer le nombre de personnes ». Il est intéressant de noter à ce propos que les téléconseillers ont bénéficié, quelques mois après leur arrivée sur la plate-forme, de trois jours de formation au deuil de leur métier précédent. La plus ou moins grande facilité d’adaptation des personnes recrutées à leur nouveau poste est pour partie fonction de leur trajectoire professionnelle (technique, commerciale, administrative), et notamment de leur expérience en matière de contact client. Les personnes issues du 12 sont généralement celles qui y étaient parmi les plus compétentes, ce qui fait que leur intégration se passe très bien, malgré la différence de compétences requises dans les deux centres d’appels. Les compétences demandées sont principalement de deux ordres : techniques et relationnelles. Les compétences techniques correspondent à la connaissance des produits et des offres proposés par France Télécom, mais également de manière plus prosaïque au maniement des outils informatiques. Les compétences relationnelles ont trait à la relation client, sur laquelle les téléconseillers ont, d’après leur Responsable, des progrès à réaliser. L’importance de ces compétences et leur évolution dans le temps nécessite pour leur acquisition des formations parfois lourdes, comme les quatre semaines de formation initiale qui se poursuivent par deux semaines de tutorat. Concernant la maîtrise des outils informatiques, une formation de quelques jours a également été mise en place pour remettre à niveau des salariés qui n’avaient pas forcément pour habitude de travailler dans des contextes informatisés. L’évolution des offres et des technologies génère par ailleurs d’elle-même des besoins de formation, comme c’est le cas du développement de la technologie Wap sur les téléphones portables. Du fait de cette évolution constante, la formation continue des téléconseillers à toutes les nouveautés relatives à la téléphonie mobile est nécessaire, ce qui absorbe une bonne partie du temps des Soutiens Métiers Applicatifs. Ceci a pour conséquence que leur activité de soutien est partiellement prise en charge par les téléconseillers les plus compétents, sous la forme de tutorat.

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Les réactions des téléconseillers face à leur nouveau poste sont variables, avec une différence qui s’opère entre les personnes venues volontairement et celles qui ont été redéployées de force. Si apparemment la très grande majorité des téléconseillers s’efforce de répondre aux attentes du client et de défendre l’image de France Télécom, les salariés qui ont fait l’objet de redéploiements forcés ont plus de difficultés à adhérer aux nouveaux objectifs de l’entreprise : « c’est plus je dirais dans … ce qu’on appelle la productivité qui fait bondir les gens ». Le centre d’appels Orange est en effet soumis à un suivi de sa performance, qui s’opère à la fois sur la qualité de service (nombre d’appels pris / nombre d’appels abandonnés, sondages sur la qualité, etc.), et sur la productivité : « il y a vraiment un suivi de qualité de service et de productivité, n’ayons pas peur des mots ». Enfin, la Responsable de la plate-forme elle-même dispose d’une vision relativement floue de l’avenir, du fait d’une part du manque de visibilité sur les possibilités de déploiements à venir (décidés par la DRH du Groupe), et d’autre part sur la politique que France Télécom Mobiles veut mettre en œuvre : les redéploiements, « c’est quelque chose qui ne… que je ne maîtrise absolument pas.. .».

5.3.1. Caractéristiques et parcours des personnes interviewées L’échantillon des personnes interrogées chez Ola reflète bien la structure du personnel de la plate-forme : une majorité de télé-conseillers, quelques SMA en soutien et des RE en management et encadrement. On retrouve également une répartition caractéristique par âge, ancienneté et statut : une grande majorité de salariés au statut de fonctionnaire de chez France Télécom, ayant pour la plupart à leur actif une expérience assez longue chez FT (plus de 20 ans), et un petit nombre de contractuels, beaucoup plus jeunes (25-30 ans), entrés depuis peu chez France Télécom. Au-delà des aspects statutaires et d’ancienneté, les facteurs liés au parcours professionnel antérieur et au contexte d’arrivée sur la plate-forme Ola apparaissent primordiaux pour interpréter et expliquer les discours, perceptions et comportements des salariés interrogés. Quatre facteurs ressortent notamment, parfois corrélés entre eux : • L’âge et le statut des salariés : deux facteurs corrélés. Les contractuels sont jeunes, arrivés ches FT depuis quelques années au maximum et chez Ola depuis peu ; les plus âgés sont généralement fonctionnaires et anciens chez FT. La différence de discours entre ces deux catégories de personnes est tout à fait nette. Les perceptions du travail et les perspectives sont sensiblement distinctes. Comme l’exprime un salarié lui-même, fonctionnaire avec 25 ans d’ancienneté, « le problème est différent selon l’âge : les plus de 50 ans s’en foutent, les 35-50 ans éprouvent du ressentiment, les moins de 35 ans sont souvent contractuels et leur but est de gagner de l’argent ». Il poursuit en exprimant ses craintes face à l’arrivée plus importante de contractuels, qui représentent selon lui une menace pour l’avenir de FT : « Ce sont eux qui tuent FT quelque part. Quand je les voyais arriver, je me disais « c’est notre mort », je leur disais » vous verrez, un jour on sera ouvert le dimanche, et puis 24hsur 24, 7j / 7 et si vous les payiez, vous les verriez la nuit… ça c’est clair. Donc, il faut qu’on mette des barrières… ». [TC]

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Emploi

Grade

Sexe

Age

Ancienneté

FT

Ancienneté

Ola

Identifiant

Statut

TC

2.1.

40-50 ans

20 ans

12 ans

[TC-F]

France Télécom

TC

2.2.

> 50 ans

25 ans

10 mois

[TC-H]

France Télécom

TC

1.3.

< 30 ans

4 ans

3 mois

[TC-G]

Contractuel

TC

2.2.

> 50 ans

30 ans

9 mois

[TC-I]

France Télécom

TC

2.1.

> 50 ans

27 ans

1 an

[TC-J]

France Télécom

TC

2.2.

40-50 ans

23 ans

2 mois

[TC-A]

France Télécom

TC

2.1.

[TC-B]

France Télécom

TC

2.1.

40-50 ans

25 ans

1 an

[TC-C]

France Télécom

TC

2.1.

F

40-50 ans

24 ans

1,5 ans

[TC-L]

France Télécom

TC

2.1.

F

1,5 ans

[TC-M]

Contractuel

SMA

2.3.

M

30-40 ans

10 ans

1 an

[SMA-K]

France Télécom

RE

3.1

> 50 ans

27 ans

1 an

[RE-D]

France Télécom

RE

2.3

M

[RE-E]

France Télécom

RP

3.1.

F

> 50 ans

27 ans

[RP-O]

France Télécom

Légende : TC : télé-conseiller / RE : responsable d’équipe / SMA : soutien métier applicatif /

RP : responsable de plate-forme

Tableau 5 : Caractéristiques des salariés interrogés chez Orange • Le contexte d’arrivée sur la plate-forme : le cadre du redéploiement. Les salariés rencontrés ont pour beaucoup rejoint la plate-forme Ola dans le cadre de la politique de redéploiement de FT, notamment en provenance du « 12 » dont les effectifs se sont largement réduits ces dernières années. Deux cas de figure se présentent alors : soit les salariés ont eux-mêmes anticipé les réductions d’effectifs de leur service précédent et se sont volontairement dirigés vers la plate-forme Ola créée à Amiens il y a environ un an, souvent dans un souci de proximité géographique et parfois de diversification des tâches ; soit, ils ont été fortement incités, voire contraints, de rejoindre cette plate-forme. Ce caractère plus ou moins volontaire de l’arrivée sur la plate-forme explique en partie des différences de discours sur le fonctionnement et le travail chez Ola. Un fort ressentiment transparaît à travers les propos de ceux qui sont arrivés « contraints et forcés » comme ils l’expriment souvent eux-mêmes : « On m’a fait un beau cadeau. J’ai été nommé d’office sur la plate-forme Ola. Je suis rentré de vacances : j’avais une feuille comme quoi j’étais nommé dans un centre Ola. J’ai des collègues qui ont eu le choix entre Ola et Wanadoo… » [TC]. Les responsables d’équipe reconnaissent d’ailleurs volontiers les problèmes qu’ils rencontrent pour « remotiver ceux qui sont venus contraints et forcés » [RE]. Certains vivent ce changement forcé comme une complète remise en cause, d’autant plus que leur activité antérieure ne les avait pas habitués à un contact étroit et de nature commerciale avec l’usager ou le client.

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• L’expérience professionnelle antérieure : les remises en cause. En effet, plusieurs des télé-conseillers interrogés expriment leurs difficultés à s’adapter au mode de fonctionnement et au contenu du travail chez Ola lorsqu’ils n’ont pas eu d’expérience en matière de contact avec le client ([TC], a contrario, ceux qui ont eu des postes de nature commerciale, et a fortiori dans le privé, ont une vision radicalement différente, plus positive et sereine. Notons également que la date d’arrivée sur la plate-forme ne semble pas anodine : on distingue en effet les arrivés de la première heure, qui ont contribué au lancement du centre d’appel, et ceux qui l’ont rejoint plus tard. Les premiers arrivés apparaissent plus enthousiastes, et ils jouissent d’ailleurs de quelques avantages qu’ils ont pu négocier à leur arrivée (en termes de primes ou de choix des horaires de travail), même si les informations recueillies à ce sujet manquent de précision. Ainsi, ces quelques facteurs liés au profil personnel et professionnel des salariés se retrouvent comme facteurs explicatifs des différences de discours et d’attitudes sur les thèmes successivement abordés ci-après.

5.3.2. Flexibilité qualitative interne : travail / formation / autonomie

5.3.2.1. Le travail : contexte, caractéristiques et contenu

• Variété, complexité et valorisation de la tâche

* Les télé-conseillers : variété, complexité et… routine Le travail des télé-conseillers chez Ola est unanimement vu comme un travail à la fois varié et complexe, une complexité due à des évolutions constantes et rapides des produits et des services proposés aux clients. La plupart des télé-conseillers venant du 12 notent ce contraste entre la répétitivité des tâches au 12 et leur variété chez Ola. Un tel contraste est tantôt ressenti comme positif (travail plus diversifié, moins monotone), tantôt comme négatif (plus d’inconfort, sentiment de ne pas maîtriser le travail, de devoir sans cesse se mettre à jour, etc.). Témoins les propos de ce télé-conseiller : « J’ai été étonné que ce soit assez complexe. Si j’ai la retraite avant 77 ans, j’aurai pas encore tout pigé ! Ca change tous les jours. Vous êtes absent 3 semaines, vous avez 2 kilos de courrier… » [TC].

La tendance qui ressort des entretiens réalisés est celle d’un sentiment d’être dépassé par le rythme du renouvellement des offres et la multitude des demandes ou questions des clients : « On ne peut pas tout savoir : il y a tellement de situations… » [TC] ; « Il est parfois difficile néanmoins de cerner le problème du client, et l’information nécessaire pour y répondre se renouvelle très rapidement » [TC]. Les responsables d’équipe eux-mêmes soulignent cette caractéristique du travail, qui se traduit par une déstabilisation des conseillers dont ils ont la charge: « Ce qui est vrai aujourd’hui n’est pas vrai dans trois jours… Les agents sont soumis toujours à une information, tous les jours ils sont des informations, des choses qui changent, qui évoluent. […] On ne peut pas avoir d’acquis. […] Ils partent en congé une semaine et ils reviennent, ça a changé : attention, telle procédure, etc. C’est vrai, ça a un côté déstabilisant » [RE]. Néanmoins, le sentiment de « routine » résiste à cette plus grande variété et complexité des tâches : « C’est la routine […] Le travail est toujours le même, mais les offres changent et les produits aussi ; on est noyé sous la documentation ; on a besoin du classeurs et des mises à jour » [TC]. Une routine qui renvoie au caractère contraint du travail : à chaque type de demande correspond un type de réponse, inscrit dans une

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procédure explicite : « Tout est avec des procédures : on n’organise pas notre travail. Pour tel travail c’est telle chose qu’il faut faire » [TC]. Enfin, les télé-conseillers expriment généralement un regret en termes de reconnaissance et valorisation des tâches qu’ils effectuent. Les propos recueillis à ce sujet reflètent un sentiment de manque de reconnaissance eu égard à la complexité de leur travail, parfaitement illustré par cet extrait d’entretien : « On nous en donne toujours plus et, au niveau reconnaissance, y’a pas grand-chose. […] On a toujours l’impression que c’est jamais bien » [TC].

* Les Responsables d’Equipe : la dualité conseil/contrôle Le travail des RE est essentiellement un travail de management des personnes. Il s’agit, selon l’un d’entre eux, de « bien analyser les situations, éviter les problèmes et conflits, y aller doucement pour donner les objectifs, faire les debriefing, etc. ». Ce travail de management est d’autant plus délicat, toujours selon ce RE, que « ce sont tous des gens de l’administration, donc il faut faire attention… ». [RE] La caractéristique majeure de la mission des RE, telle qu’elle est décrite par les RE eux-mêmes, réside en cette sorte de dualité entre une mission de conseil et de soutien auprès des télé-conseillers d’une part, et une mission de contrôle du respect des règles et des objectifs à atteindre sur la plate-forme, d’autre part. Cette dualité est bien illustrée dans les propos qui suivent : « Oui, voilà, on essaie de les soutenir, de les aider. Mais bon, on a aussi nous nos objectifs. On ne peut pas non plus… Le plateau, il faut qu’il vive. On a des comptes à rendre aussi. Le plateau a des comptes à rendre à notre filiale. On ne peut pas tout se permettre non plus, il faut cadrer. […] Bon, quand ils ne respectent pas leur temps de pause et tout ça, on est quand même obligés, parce que c’est notre métier. Ca, c’est l’aspect qui me déplaît, moi, mais bon, on est obligés de faire respecter les temps de pause, parce qu’il y a des dérapages. Vous connaissez les gens, la nature humaine… ». [RE]

• Le poste de travail : avantages et limites du poste « tournant »

Les télé-conseillers n’ont pas de poste de travail fixe et attitré. Cette caractéristique forte est par les uns vécue comme un avantage, par les autres — comme un inconvénient. Les premiers y voient la possibilité de changer régulièrement de collègues : « On est bien obligés de tourner parce qu’il n’y a pas assez de positions. C’est bien, parce que moi je suis du genre à ne pas aimer tout le monde… » [TC]. D’autres regrettent en revanche de ne pas avoir leur « petite place », « leurs habitudes, quoi… » [TC], de ne « même plus pouvoir mettre sur [leur] micro une image de fond… » [TC], ou encore de devoir à chaque changement de position transporter leur documentation personnelle, très volumineuse.

Plus généralement, l’environnement du poste de travail suscite deux types de remarques : sur un plan ergonomique, il est jugé satisfaisant ; sur un plan convivial en revanche, il est parfois jugé très sévèrement, l’organisation en « boxes » semi-fermés ne facilitant pas les échanges entre télé-conseillers, et l’organisation du temps de travail et du temps de pause ne permettant guère le partage de moments conviviaux (« on se croise mais on se parle pas »[TC]). Les propos ci-dessous en sont l’illustration la plus sévère : « [Ne pas avoir de poste fixe], c’est vraiment galère, […], c’est intolérable […], je le déplore complètement. […] Ils pourraient essayer de nous avoir un poste de travail par personne, au moins on pourrait le personnaliser, ça serait déjà plus convivial, tandis que là, on a ces grands panneaux noirs devant nous… je ne peux pas les voir en peinture […] C’est moche, on est par quatre, on a des cloisons qui nous séparent, les cloisons, elles sont vertes… […] C’est l’environnement qui est froid, c’est très froid, ça manque de… Comme FT en ce moment :

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c’est très froid, il n’y a pas une plante verte, il n’y a pas un poster, rien… Si, des posters « Orange », mais bon… on aurait de la montagne ou la mer, peut-être que là ce serait plus doux... que là, Orange… et puis bon, ça n’est pas terrible quand même » [TC]

• Les outils informatiques : apports et dysfonctionnements

Si les outils informatiques dans leur ensemble sont perçus comme un apport indéniable dans la mission de conseil aux clients, ils sont également critiqués sur un certain nombre de lenteurs ou dysfonctionnements. En résumé, et pour reprendre les termes d’un télé-conseiller, « c’est un progrès quand même, mais il y a des choses à améliorer » [TC]… Ou encore, formulé autrement : « Il y a des problèmes d’interface réguliers entre Orchidée et le système ADV. Les applications sont trop longues à répondre. En même temps, on ne peut rien faire sans informatique… » [TC]

Plusieurs applications sont utilisées, et notamment Orchidée (base de données des dossiers clients) et ADV (base de données d’administration des ventes. Les télé-conseillers reprochent leur lenteur, leur imprécision sur certains types de données et surtout leurs pannes fréquentes qui paralysent tout le système de réponse au client et oblige soit à les faire rappeler (ce qui génère un mécontentement chez le client), soit à les rappeler une fois la panne résolue (ce qui ne doit pas se faire en théorie). Bref, les pannes informatiques sont sources de stress et d’insatisfaction chez les opérateurs, qui se sentent impuissants devant ce genre de situation (« quand ça arrive, on ne peut rien faire » [TC]).

Enfin, le manque de simplicité et de convivialité des applications est parfois souligné, ainsi que leur renouvellement ou mise à jour fréquents, qui laisse peu de temps aux conseillers pour prendre possession des nouveautés : « Vous avez une application, vous en prenez à peine l’habitude que ça change… […] J’aimerais avoir un peu de temps pour aller voir Americ […]. Il y a des applications qui sont bien, mais il y en a qui sont tellement lentes… » […] Il y a des moments où on se fait éjecter, on ne peut plus se connecter. […] lls auraient pu faire des applications plus simples, c’est pas toujours convivial » [TC].

• Relations de travail et relations hiérarchiques : des relations courtoises mais peu conviviales

• Des télé-conseillers solidaires dans une ambiance manquant de convivialité

Deux éléments ressortent des entretiens sur ce point : d’une part, les télé-conseillers regrettent pour la plupart le manque de convivialité de l’ambiance au travail (« Les relations de travail sont quasi-inexistantes » [TC], « Il n’y a pas d’ambiance ici… Ca dépend aussi de ceux qui nous gèrent » [TC], etc.), qu’ils attribuent volontiers à la dispersion des horaires et des pauses, à l’organisation en plateau en boxes de travail, et à l’absence de moments particuliers de convivialité qui pourraient être partagés (pots, etc.) ; d’autre part, ils soulignent les comportements d’entraide et de solidarité entre eux. Ici encore, on note quelques différences selon l’ancienneté du salarié, ou même son statut. Les plus anciens ont tendance à être aussi plus sereins dans leurs relations de travail : « Moi, j’ai ma carrière derrière moi, alors je m’entends bien avec tout le monde… » [TC]. Les contractuels de leur côté ne restent pas indifférents aux écarts de rémunération entre fonctionnaires et contractuels, à leur détriment, ce qui nuit aux bonnes relations de travail : « Avec les fonctionnaires, c’est une ambiance compliquée : quand vous êtes payés la moitié de ce qu’ils sont payés, obligatoirement, il y a une différence…» [TC].

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Enfin, le passage récent de Ola à Orange, ainsi que les débats autour de l’ouverture du service les dimanches et jours fériés, ont contribué à détériorer la qualité des relations de travail.

• Les attentes envers les RE : disponibilité et compréhension

Interrogés sur leurs attentes envers les responsables d’équipe (RE), les télé-conseillers s’accordent pour dire qu’ils espèrent de leur part des réponses compétentes et précises à leurs questions, une écoute compréhensive et un management attentif et équitable. On retrouve ainsi la double mission du RE, de conseil et de management : - « On attend de lui qu’il soit à l’écoute, disponible, qu’il sache nous répondre quand on

ne sait pas répondre. Il doit savoir répondre clairement. […] Même les RE viennent demander des trucs… C’est bien, ça va dans les 2 sens » [TC] ;

- [On attend du RE] « qu’il ait le tact de dire ce qui n’est pas bien fait et qu’il sache dire quand c’est bien. J’attends ça puisque ça n’est pas souvent le cas. Il y a des responsables qui ont le tact et d’autres pas » [TC] ;

- [Les attentes envers le RE sont] « qu’il soit objectif, juste, qu’il prenne bien en compte les difficultés qu’on a » [TC] ;

- [On attend du RE] « qu’il soit plus près de nous, plus humain. Qu’il soit compréhensif car on peut avoir quelques faiblesses sans tomber dans l’excès inverse. […] Du moment qu’on fait notre travail, qu’on vienne pas nous dire tiens y ‘a eu de la relâche…On est quand même responsables. On est des adultes » [TC].

Ces derniers propos renvoient à la question centrale du degré et des formes d’autonomie et de contrôle dans les centres d’appel en général, et sur la plate-forme Ola en particulier.

5.3.2.2. L’autonomie et le contrôle

• Un fort sentiment de surveillance, générateur de stress Sur la plate-forme Ola, le contrôle s’exerce à travers plusieurs éléments : le nombre d’appels en attente, le temps passé à chaque communication et le temps passé en position « pas prêt », les écoutes (qui sont signalées ou non aux télé-conseillers selon leur souhait), et les évaluations régulières à partir des « statistiques » périodiques et des écoutes, réalisées par le RE avec chaque TC. En outre, des « appels mystères » et des « enquêtes satisfaction clients » sont réalisés, dont les résultats sont transmis aux RE et responsables de plate-forme. Au total, le sentiment de contrôle est indéniablement fort parmi les conseillers. Et, si quelques uns d’entre eux estiment que les écoutes sont « quelque chose de positif , que le système permet malgré de tout de « se reposer un peu entre deux appels» [TC], la plupart se sentent surveillés, voire « très fliqués » selon leurs termes [TC], et se disent stressés par ce contrôle étroit et subi : « Eh bien, on est stressés, on voit ça, on voit nos chefs, on regarde l’écran… je sais pas… je me sens … Je ne sais pas… je me sens prisonnière quand même » [TC].

Certains vont même jusqu’à évoquer un système d’infantilisation, voire d’emprisonnement : « Enfin, moi, j’ai toujours l’impression d’être comme à l’école, de ne pas avoir quitté l’école, d’être notée sur ceci, d’être contrôlée sur ça… Mais mince, on n’a plus 15 ans, quoi… Donc ça, ça me gêne ce côté là . Dès fois, je me dis que je suis au centre pénitencier, mais c’est vrai… Ca n’est pas à la baguette, mais c’est tellement strict qu’on a l’impression d’être un peu quand même… On se demande si on a fait des bêtises. Moi, c’est l’impression que ça me donne. On n’a pas trop de marge. » [TC] Le stress ainsi

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généré se double parfois d’un sentiment de découragement lorsque les efforts ne sont pas reconnus à leur juste valeur : « De toutes façons, en sortant de là [des entretiens d’évaluation], je suis complètement démolie. […] On fait des efforts, mais on a l’impression qu’on n’en fait jamais assez, c’est jamais assez… Donc c’est un petit peu décourageant quand on sort d’un entretien » [TC] Plusieurs de nos interlocuteurs ont souligné le nombre non négligeable de salariés en maladie, pour cause de dépression, ou demandant leur départ. Certains évoquent même des tentatives de suicide qui seraient expliquées par les conditions de travail… D’autres, tout en l’évoquant, tiennent à relativiser les faits. Par exemple, ce salarié sous contrat qui analyse les différences d’attitudes au travail entre les fonctionnaires et les autres, et entre les volontaires et les autres : « Y a des gens malades, dépressifs, des départs… On dirait que c’est le bagne. Et moi je leur dis que je suis bien ici. Chacun son avis… Après, celui qui n’a pas envie de bosser, il ne bosse pas. […] Moi, je pars du principe qu’à partir du moment où on fait bien son travail, c’est tout. Et puis y a malade et malade… Y a un petit peu de poil dans la main, je crois ! Pas pour tout le monde. Ces dépressions… Y a des gens qui ont dû mal accepter le changement de métier ? Y en a, c’était des volontaires et y en a, ils ne sont pas volontaires… ». [TC]

• Des objectifs de plus en plus quantitatifs

Par ailleurs, à travers les propos des conseillers interrogés sur les objectifs qui leur sont assignés, transparaît une forme de contestation de l’évolution des objectifs, de plus en plus quantitatifs, au détriment d’objectifs en termes de qualité de la prestation rendue au client. Ressort alors une nostalgie plus globale liée aux évolutions récentes de France Télécom dans son ensemble, comme l’exprime ce télé-conseiller : » Depuis que FT a changé, ce n’est plus du tout la même mentalité, je veux dire… c’est vraiment comme une entreprise » [TC] Il poursuit en évoquant le surcroît de surveillance, de contrôle, des objectifs de rendement et de la pression environnante. Beaucoup soulignent cette pression grandissante : « [Avant], on faisait le travail et puis c’est tout. Il n’y avait pas une personne perpétuellement derrière nous » [TC]. Certains s’efforcent de ne pas céder à une telle pression et de rester fidèles à la tradition de qualité de service au client : « [Les objectifs], oui, il y en a, mais moi je n’en sais rien, […] et si vous voulez, moi, je fais de la qualité, pas de la quantité » [TC] Les RE pour leur part tentent de souligner les points positifs de l’évaluation et du contrôle et nuancent le caractère pressant du système, en le relativisant notamment par rapport aux centers d’appel privés [RE]. Ainsi, l’un des RE rencontrés préfère parler de progression que d’évaluation : « On ne parle pas de points faibles. On parle de points forts. On parle de points à améliorer. Il faut toujours que ce soit positif » [RE]. Les écoutes permettent selon eux de faire réécouter et admettre aux agents leurs points d’amélioration [RE]. Les évaluations périodiques doivent être menées avec délicatesse, pour ne pas brusquer les conseillers et briser leur . Notamment, ce RE met en garde contre les dangers d’une notation explicite et chiffrée et lui préfère un système de sourire ou de moue triste pour exprimer l’évaluation, conscient du risque d’infantilisation d’un tel système : « Ce que vous devez retenir c’est l’objectif qu’on s’est fixé et non pas la note, parce que c’est un peu le ramener à l’école. L’écolier, il va sortir et il va dire : « tiens, il m’a mis 15 aujourd’hui… » [RE]. Un autre RE en revanche emploie délibérément l’analogie avec l’éducation des enfants, laissant ainsi à penser que le style de management des RE varie sensiblement d’un RE à l’autre, comme certains conseillers ou SMA l’avaient d’ailleurs exprimé : « J’ai eu des enfants, je m’aperçois qu’on n’est pas très loin. Je ne dis pas que ce sont des enfants, mais c’est pareil : vous leur laissez ça, et on vous prend ça… Il faut savoir mettre des barrières. Et j’ai fait un rapprochement incroyable. J’ai 3 enfants, et je sais que j’ai 3 enfants différents. J’ai des conseillers, c’est 11 conseillers différents qu’il

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faut que je prenne différemment. […] Je ne suis pas cassant. Mais même en leur disant comme ça, c’est très mal pris ». [RE] Enfin, même si les RE insistent sur les objectifs double, quantitatifs et qualitatifs, de la plate-forme, ils reconnaissent aussi que les premiers sont les plus faciles à évaluer et, en ce sens, prédominants dans le système de contrôle et d’appréciation.

5.3.2.3. La formation et les compétences : une formation initiale satisfaisante mais trop peu de temps pour intégrer les mises à jour

A leur arrivée sur la plate-forme, les télé-conseillers bénéficient d’une formation de quatre semaines, suivie de deux semaines de tutorat. Ce système de formation semble donner satisfaction en termes de contenu et d’adaptation sur le terrain : « On nous a laissé le temps de nous adapter. On nous a laissé 6 mois de temps. C’est pas évident, c’est quand même un changement de métier » [TC]. La responsable du plateau estime que cette formation est assez lourde et correspond à des compétences requises relativement élevées : « C’est quand même quelque chose qui demande pas mal de compétences, de réflexion, de rigueur… ». Elle souligne trois types de compétences en particulier : les compétences micro-informatiques, les compétences de « discours client » et les compétences Internet qui, avec l’arrivée du Wap, sont sur le point de devenir déterminantes. Sur les premières, la micro-informatique, une formation de quelques jours a été intégrée au parcours des télé-conseillers après avoir constaté, dans les premiers mois de fonctionnement du plateau, que ces compétences étaient parfois une lacune et une entrave au bon déroulement de leur travail. Sur les secondes, Internet, Ola doit bénéficier de l’aide de quelques personnes de Wanadoo pour les aspects liés au Wap notamment. Pour la troisième enfin, le discours client, le constat est plutôt mitigé : «On a de gros gros progrès à faire. Il y a des formations qui sont prévues. Et puis si ça marche pas, eh bien… 0n verra des formations encore autrement… Je pense que c’est pas inné le discours client. C’est pas inné de savoir mener un entretien non plus, savoir réagir par rapport à un client qui est un peu mécontent, etc. »

Pour leur part, les conseillers Orange déplorent le manque de temps laissé à la formation continue au fur et à mesure des changements d’outils, de services ou de produits. Le rythme et la multitude de ces changements sont à nouveau soulignés. Ils conduisent les salariés à se sentir dépassés, parfois frustrés lorsque ce sont les clients qui les informent sur certaines nouveautés, et à redouter les retours de vacances où il faut se remettre à jour, etc. : « Il faut quand même être au courant de beaucoup de choses… c’est trop, quoi ! Et puis il y a des changements, ça change du jour au lendemain. Quelquefois, les clients sont mieux renseignés que nous. […] Alors j’appréhende les vacances parce qu’après trois semaines de vacances, j’ai bien peur de tout oublier… Pourtant, on a besoin de vacances »[TC]. Certains précisent qu’ils sont même obligés de prendre de la documentation à lire chez eux en rentrant le soir, ne pouvant dégager le temps nécessaire durant la journée de travail. Le passage d’Ola à Orange est un exemple éloquent de changement majeur où les conseillers n’ont eu que quelques jours pour se tenir informés avant le lancement : « On ne nous donne pas le temps de le faire. Si on veut consulter Internet c’est en dehors du travail ou pendant les pauses ! » [TC]. L’entraide et la solidarité entre conseiller viennent pallier en partie cette frustration et permettent un partage des compétences. La responsable de plate-forme elle-même souligne largement dans ses propos l’importance de la formation initiale et continue pour les télé-conseillers. Selon elle, c’est la condition

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nécessaire pour s’assurer d’une réactivité satisfaisante. L’apprentissage est permanent : « On apprend en marchant… bon on essaye déjà, et si ça marche pas, bon, il faut réagir tout de suite… mais c’est vrai que dans les derniers moi, je dirais depuis fin mars – début avril, on est perpétuellement en formation. Il faut savoir que FTM c’est ça : c’est de la formation permanente si on veut évoluer, si on veut être réactif… Y a rien à faire… » [RP]. Notons également que plusieurs conseillers insistent sur le manque de reconnaissance du travail accompli eu égard à cette complexité et ce rythme de renouvellement soutenu, ce qui est source de démotivation comme pour ce télé-conseiller quelque peu désabusé: « De toutes façons, qu’on apprenne ou qu’on n’apprenne pas, on n’est pas mieux considéré. […] On fait quand même des efforts, c’est quand même un travail intellectuel difficile, avec des horaires pas faciles, avec un encadrement pas facile, et on gagne exactement la même chose que la personne qui est à la direction en train de se limer les ongles, parce que y’a quand même des services où c’est comme ça… » [TC]. Le débat sur l’ouverture de la plate-forme les dimanches et jours fériés vient raviver ce type de propos. Les questions de flexibilité quantitative interne, en termes de temps de travail et de rémunération, s’inscrivent dans cette optique.

5.3.3. Flexibilité quantitative interne : temps de travail et rémunération

5.3.3.1. Les horaires de travail souvent subis Globalement les horaires en vigueur sur la plate-forme Ola sont perçus comme moins souples qu’au 12 pour tous les conseillers qui viennent de là. Seuls ceux qui sont arrivés au moment de l’ouverture de la plate-forme ont eu la possibilité de choisir leurs horaires assez librement, ce qui est mal accepté par ceux qui ont suivi. Plus précisément, le problème des dimanche et jours fériés était d’actualité au moment de la recherche. Le responsable du centre avait annoncé quelques semaines auparavant l’ouverture les dimanche et jours fériés, ce qui a suscité des grève : « Il y avait 2 jours fériés de fait au mois de mai, on a fait 2 fois grève. […] J’ai fait remonter que ça ne m’intéresse pas de travailler le dimanche mais ils n’en tiennent pas compte » [TC]. Le problème est que cette annonce intervient alors qu’aucun engagement contractuel n’avait été pris au départ lors de l’embauche des salariés chez Ola : « Jamais ça nous a été proposé, c’est ça moi que je reproche, c’est un peu de la trahison, ça » [TC]. En outre, la nécessité de travailler les jours fériés n’est pas comprise ni admise par les salariés : les renseignements Ola ne sont pas considérés comme un service indispensable et encore moins vital pour les abonnés.

5.3.3.2. Une « tolérance forcée » sur l’organisation des pauses Second élément relatif au temps de travail : l’organisation des pauses. Alors qu’au « 12 » des pauses sont contractuellement prévues toutes les heures pendant dix minutes, rien n’a été officiellement établi chez Ola. En revanche, les salariés ont en quelque sorte imposé une pause de dix minutes toutes les deux heures, tolérée par la direction de la plate-forme qui reste néanmoins vigilante comme en témoignent ces propos : « Si on prend 10 min de pause toutes les heures comme au 12, on va nous dire non. Alors on s’est mis d’accord. Toutes les 2 h on prend 10 minutes. Mais attention aux dérapages ! On sait nous dire « tu as été bavarde aujourd’hui, etc. » [TC] ; « Il n’y a pas de pause attitrée, ils sont forts : il n’y a rien d’établi chez Ola… » « Il n’y a rien d’écrit, donc on tolère les pauses… » [TC].

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L’un des télé-conseillers livre toutefois une définition sensiblement différente de la pause contrainte et réglementée, ce qui illustre la marge de manœuvre et d’autonomie que certains s’octroient dans l’organisation de leur travail :« La pause, c’est quand on commence à saturer. Si on a envie de discuter 5 minutes, on enlève son casque et on va discuter… » [TC]

5.3.3.3. Une prime indexée sur les résultats de la plate-forme

En matière de rémunérations, peu d’interlocuteurs ont été prolixes. L’idée d’une prime variable et individualisée semble prévue mais non encore mise en application : « Lors du discours Orange, ils ont parlé de part variable, donc je pense que ça va venir » [TC]. Au moment où la recherche a été réalisée, la prime d’intéressement est calculée en fonction des résultats du plateau et identique pour tous. Certains redoutent d’ailleurs que ce type de primes individuelles ne « créent un esprit de compétition malsain » [TC].

5.3.4. Flexibilité quantitative interne : le redéploiement ou les effets d’une mobilité « imposée »

Les centres d’appel chez FT sont nés d’une stratégie de redéploiement, au départ sous forme de volontariat, ensuite sous forme imposée. Ces deux situations, de mobilité volontaire ou imposée, sont primordiales à prendre en compte pour comprendre les comportements des individus arrivés chez Ola. Comme l’expliquent ces télé-conseillers, plusieurs de leurs collègues, arrivés sans en avoir eu le choix, vivent difficilement la situation et tombent même parfois malades : - « Ceux qui sont venus volontairement et ceux à qui ça a été imposé ne ressentent pas

du tout le travail de la même manière. […] 5 ou 6 personnes sont, soit en maladie, soit reparties dans d’autres services » [TC] ;

- « C’était des gens qui n’étaient pas volontaires. Tout le monde a été mis d’office ici. Donc forcément ils sont moins intéressés » [TC].

D’autres facteurs sont avancés, notamment par les SMA et les responsables d’équipe, pour expliquer les difficultés d’adaptation des conseillers au contexte de Ola : l’âge, la découverte du contact client et « l’esprit de fonctionnaire » : - « Vous savez, quand vous demandez à une personne de se remettre en question à 50

ans alors qu’elle n’a jamais été en contact client, c’est une prouesse. Moi, je dis que ça doit être dur. […] C’est pour ça qu’il y a des gens qui sont assez vexés [car ils n’avaient pas anticipé (ou refusaient de voir) les fermetures de service, etc. et, en état d’esprit, il y en a qui étaient très fonctionnaires, qui disaient : je suis technicien, je resterai technicien toute ma vie. Mais c’est fini ce temps-là…» [RE] ;

- « Changer de métier, c’est très difficile. En plus, c’est une population assez âgée, donc ils ont plus de difficultés à se remettre en cause par rapport aux plus jeunes » [SMA]

Face à ces difficultés, l’entreprise a d’ailleurs mis en place des séminaires destinés à expliquer l’évolution des métiers aux salariés, et à « rassurer et aider à migrer vers ce nouveau métier » [RE]. L’aide se situe surtout au plan psychologique. Elle est censée venir en compensation de l’image négative et des critiques formulées à l’encontre de ces premières plate-formes : « Il y a eu un temps où Ola, eh bien c’était le bagne, c’était une sanction. […] Ca a été ressenti comme ça. […] Des collègues qui sont restés dans le technique m’ont dit « on m’a menacé d’aller à Ola ». […] Ils prenaient un peu cette mutation pour une punition, pour une sanction » [RE]. La médiocre valorisation des centres d’appel en général, et de la plate-forme Ola en particulier, a indéniablement contribué à alimenter la crainte du redéploiement. Au « 12 », cette crainte est d’autant

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plus forte que le redéploiement s’exerce depuis quelques temps à destination du centre Ola. Un télé-conseiller évoque même une opération « d’épuration ethnique » qui consiste à vider le 12 pour faire venir les salariés chez Ola : « Aux renseignements, il y a quelqu’un qui les gère, c’est un épurateur ethnique : il était mis aux renseignements pour les épurer, faire venir les gens à Ola » [TC].

5.3.5. Evaluation de la performance

5.3.5.1. Productivité / qualité / apport des TIC (performance organisationnelle) Dans l’évaluation de la performance organisationnelle, l’on retrouve cette dualité entre les objectifs quantitatifs (productivité, rendement) et qualitatifs (service rendu au client). L’un des télé-conseillers exprime cette dualité avec beaucoup de clarté et de force : « [Notre objectif est de] renseigner le mieux possible le client. Dommage que le service soit devenu payant… » [TC]. Ou encore : - « Il vaudrait mieux passer plus de temps avec le client et qu’il soit satisfait. Moi je

regarde plus la qualité que la quantité » [TC] ; - « Je préfère faire un appel en moins ou deux, et que mon client soit traité comme il

faut » [TC]. La référence aux valeurs du service public revient régulièrement dans les dires des conseillers interrogés, comme celui-ci: « Nous, avant, on était service public, donc on ne regardait pas du tout au temps qu’on restait avec la personne. On était vraiment proches des abonnés. Du jour au lendemain, pouf ! il faut faire du fric… » [TC]. A cela s’ajoute un problème propre à Orange, pour lequel les conseillers estiment le service très cher et initéressant pour le client et ont quelque scrupule à le proposer. Certains affirment avoir « honte de proposer les tarifs Orange aux clients » [TC].

5.3.5.2. Motivation/ satisfaction (performance individuelle)

Des sources de motivation limitées A la question portant sur les sources de motivation ou d’intérêt au travail, il est frappant de constater le nombre important de télé-conseillers qui affichent explicitement une absence de motivation autre que celle d’avoir un emploi, à l’image de ces réponses : - « Non, je n’en ai pas, je n’arrive pas à trouver de motivation, je n’en ai pas… » [TC] ; - « [La source de motivation], c’est d’avoir un salaire, c’est d’avoir un emploi :

actuellement, j’en suis là, et c’est ce qui m’embête le plus parce que je me lève le matin sans motivation » [TC] ;

- « Ce qui me motive ? C’est qu’on est obligé de venir et de le faire… »[Des sources d’intérêt ?], pas trop, non… » [TC].

Lorsque l’on approfondit quelque peu la question, l’intérêt porté au contact avec le client ressort souvent des propos recueillis (« le plus important pour moi, c’est le client » [TC]), ainsi que le sentiment du travail bien fait, « le sentiment d’avoir fait un dossier de A à Z, surtout sur les cas difficiles » [TC]. Et, lorsque le travail est jugé « intéressant », avec « 10 % d’appels agressifs et 90 % d’appels sans problème », ce sont les conditions de travail qui sont remises en cause, comme par cette conseillère qui dit ne pas supporter les horaires et le stress et demande à partir : « J’arrive à 41 ans et je n’ai plus envie encore de m’embêter avec des horaires, du stress au travail et tout… j’aimerais arriver à faire quelque chose qui me laisse un peu mon esprit tranquille » [TC]

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En termes d’implication, une dissonance ressort entre les objectifs de l’entreprise et les valeurs des salariés, rattachées historiquement à celles du service public : « Il n’y a que l’argent qui compte. On n’est plus un service public du tout. On a vraiment l’impression de ne plus être au service du client, simplement lui soutirer de l’argent » « Quand le client nous dit que c’est de l’arnaque, qq fois on a bien l’impression qu’il a raison » [TC]. Pour les SMA et les RE, les sources de motivation sont plus nombreuses : variété des missions, travail de recherche d’information, travail de conseil et de formation, défi liée à la fonction managérat, etc. [SMA], [RE]. En d’autres termes, comme l’exprime ce RE , « on voit du monde, ce n’est pas cloisonné, ça bouge, il n’y a pas de tension » [RE]. Toutefois, le rôle lié au contrôle des objectifs et au respect des règles de fonctionnement rend plus lourde la responsabilité : « C’est sûr qu’on a un rôle toujours un peu de gardien derrière… mais enfin… vous savez dans un atelier, il faut faire travailler les gens. Vous êtes responsable d’une équipe… Dès que vous êtes responsable, le but c’est quand même de sortir un service » [RE].

Le stress et l’expression d’une souffrance au travail Le manque de motivation au travail s’accompagne, chez la plupart des télé-conseillers, d’une pression importante et constante. Certains s’interrogent d’ailleurs, quelque peu ironiquement, sur l’effet des bandeaux lumineux qui rappellent en continu le nombre d’appels en attente : sont-ils sources de motivation ou de stress ? … [TC]. De nombreux extraits d’entretiens illustrent ce stress ressenti par les conseillers, sous des formes et dont les causes sont variées, perçu par les responsables et s’exprimant parfois sous la forme d’une véritable souffrance au travail : - «On a tout à gérer en fait, on a le client, on a les pannes. C’est dur, c’est un métier

très difficile. D’ailleurs, beaucoup craquent ou sont en maladie » [TC] ; - « Ceux qui sont en maladie, en général, on ne les revoit plus » [TC] ; - « [Une journée de travail type], c’est une souffrance perpétuelle. […] J’appréhende

chaque appel de toutes façons. […] C’est stressant comme travail…, encore maintenant, c’est très fatigant » [TC] ;

- « [Je suis stressé quand] on se fait enguirlander au téléphone : j’ai l’impression d’avoir 20 de tension en l’espace de quelques secondes ; sinon, on prend tout à cœur et on finit par faire de la dépression nerveuse. […] Ici, il y a beaucoup de malades. Il y a déjà des gens qui veulent repartir, qui ne se plaisent pas, des gens qui font des dépressions nerveuses. Il faut rester 3 ans, alors ils resteront 3 ans en maladie et ils repartiront… » [TC] ;

- « Savoir que l’on pénalise le client, qu’on le fait payer, ça me stresse. Ca devrait être gratuit » ; clients râleurs ; « il faut toujours s’adapter, toujours être au top ; on a une vie plus stressante, plus speed » [TC] ;

- « Je vais craquer un jour, parce que c’est pas facile » « c’est stressant, on a beau se dire que c’est pas après nous que les clients ils en veulent… » [TC] ;

Assez logiquement, l’expression de ce stress se traduit par des aspirations à plus de sérénité dans le travail.

Des aspirations à plus de sérénité On retrouve ici, dans les insatisfactions et les suggestions d’amélioration exprimées, les facteurs de stress au travail : horaires étendus, travail fatigant, agressivité des clients, sentiment d’être noyé par la documentation, manque de temps pour les mises à jour ou la prise de connaissance des nouvelles applications, pression et contrôle du temps passé avec le client, prédominance des objectifs en termes de rendements, etc. [TC]. Poussées à l’extrêmes, ces insatisfactions peuvent s’exprimer ainsi :« [Le point principal à améliorer],

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moi, ce serait de ne pas avoir cette épée de Damoclès qu’on a, ça me tue, moi, je vous le jure, travailler ici, ça me tue, vous ne pouvez pas vous imaginer… » [TC]. Plus marginalement, on note également : - des aspects liés au salaire, notamment pour les contractuels moins bien rémunérés à

travail égal que les fonctionnaire (« moi j’étais carrément révoltée « ), et moins bien payés que les nouveaux embauchés [TC] ;

- des aspects liés au management : «[Il faudrait] changer les RE qui ne sont pas aptes à manager et ménager » [TC] ; « On nous en demande beaucoup pour pas beaucoup de récompenses » [SMA]

- des aspects liés aux outils informatiques : « faire que les outils fonctionnent correctement et… une meilleure gestion de tout » [TC] ; « améliorer quelquefois les applications [lourdes et parfois peu conviviales], et à force de les changer, ça ne marche pas toujours très bien » [RE]

5.3.6. L’accompagnement RH : une valorisation médiocre et peu de perspectives d'évolution

L’accompagnement RH en termes de valorisation des métiers et de mobilité ou perspectives de carrières reste très limité, contribuant ainsi à la démotivation et à la pression au travail chez Ola. L’image des centres d’appels chez FT est globalement négative [TC]. Celle de Ola semble l’être encore plus si l’on en juge par ces quelques phrases : - « Il n’y a personne qui venir là. Ola, c’est la bête noire… » [TC] - « Les gens ils se disent : « mais pourquoi tu veux qu’on aille là-bas, on n’est pas fous

nous ![…] C’est pour ça que je vous ai dit dès fois qu’on a l’impression d’être dans un centre pénitencier, on a l’impression d’avoir fait des bêtises pour être là… » [TC]

- « Les centres d’appel, c’est de la merde pour des gens qui travaillent à la DR. […] Même les gens du 12 ils ne voulaient pas venir à Ola » [TC]

- « On ne se rend pas compte de la charge de travail que l’on a. On a aucune reconnaissance financière, rien du tout » [SMA]

En outre, à cette image négative s’ajoute le sentiment de n’avoir aucun autre choix, aucune issue, d’être « coincé » sur la plate-forme pour de longues années, ce qui se traduit par une sorte de fatalisme ou résignation : - « Ici, j’ai l’impression qu’une fois qu’on rentre là, on ne peut plus en sortir… […] Il

n’y a plus d’issue, j’ai pas l’impression qu’on puisse sortir, on nous retient par tous les moyens. […] On ne nous propose rien d’autre de toutes façons » [TC] ;

- « [J’ai le sentiment] d’être coincé ici pour 3 ans » [TC] ; - « Il n’y a pas d’avenir professionnel, pas d’évolution. Il faut aller sur une autre plate-

forme pour évoluer ». « On ne sait pas quel service va fermer, quel service va ouvrir. Après un emploi de télé conseiller, tout ce qu’on peut trouver, c’est un autre emploi de télé conseiller… » [TC] ;

- « Il n’y a pas trop d’avenir dans les plate-formes. Je suis coincé là 3 ans » [TC] ; - « [Je pourrais] évoluer jusqu’à 2.3, mais les grades ne bougent presque plus parce

qu’il y a besoin de moins en moins de monde » [TC] ; - « Venir sur une plate-forme, c’est un retour en arrière… retour à la case départ. Ca

n’est pas progresser. Je pense que les conseillers de la plate-forme vont rester conseillers. De toutes façons, il n’y a plus que des plate-formes téléphoniques que FT crée. Les autres services, ils les ferment les uns à la suite des autres » [TC]

- « On nous a dit : vous êtes là, après dans 3 ans, on ne sait pas. On ne sait pas où on va évoluer. On vit au jour le jour…» [TC]

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Pour les SMA, les perspectives sont tout autant réduites puisqu’il n’est pas souhaité que les RE soient issus du groupe des SMA du même plateau : « Si on veut évoluer, c’est à nous de faire les démarches. Mais on nous a dit clairement que ce n’était pas la peine de postuler : on n’aurait pas assez d’autorité sur les télé-conseillers… ou alors sur autre plate-forme » [SMA]. Quant aux RE, leur vision demeure très prudente, conscients des possibilités restreintes d’évolution et de l’incertitude liée à l’avenir des centres d’appel : « Les possibilités d’évolution dépendront de l’évolution de la plate-forme et de la politique d’emploi. FT demande de plus en plus le profil, c’est-à-dire que si vous postulez à tel poste, il y a des profils… » [RE]. Un autre RE ajoute que la mobilité est volontairement réduite car la formation est lourde et qu’il faut ainsi maintenir les gens en poste au moins trois ans (sauf en cas de maladie, déprime,...). La responsable du plateau exprime à son niveau son sentiment de n’avoir aucune maîtrise de l’avenir du centre d’appel. Sa visibilité est réduite à un, voire deux ans au plus. Son discours laisse apparaître également une sorte de fatalisme ou résignation : on lui a proposé de prendre une plate forme et, n’ayant pas d’autres propositions à l’époque, elle a accepté. Sa mission est claire mais très court-termiste : elle vise d’abord à répondre aux objectifs de redéploiements de FT ; elle est ensuite de faire tourner au mieux la plate-forme en termes de qualité de service et de productivité. Mais sa visions de l’avenir du centre d’appel Ola reste très floue au-delà ce des éléments : « Il faut savoir que les centres d’appels, c’est fait pour les personnes qui sont à redéployer dans le service pour les autres services, plutôt que de prendre des sous-traitants. C’est bien le but de FT. Donc, c’est en fait une analyse faite par le DRH avec les différentes unités au niveau régional, de savoir quelles vont être les fusions, les évolutions de services, etc. Où il va falloir faire des moins, des plus…C’est pas forcément sur la plate-forme Orange (puisque là on va s’appeler Orange), ça peut être Wanadoo, ça peut être le CSRH par exemple, hein … Donc c’est quelque chose qui ne… que je ne maîtrise absolument pas. D’autre part, nous travaillons pour FTM. Nous sommes des sous-traitants de FTM au même titre qu’une entreprise privée. Donc, c’est pareil là, c’est FTM qui tient un peu les clés. Donc, pour parler de l’avenir de la plate forme Orange, je vous dis… » [RP].

5.3.7. RH et TIC L’informatisation de certaines fonctions de GRH, via l’Intranet « @noo » suscite peu d’intérêt chez les salariés rencontrés. Généralement, le système de gestion des congés sur @noo est bien accepté, mais peu d’avantages lui sont reconnus par rapport au système traditionnel de demande sur formulaire papier : « C’est pratique de poser ses congés sur @noo : plus à faire des paperasses », mais ce n’est pas plus rapide qu’avant car la demande doit de toutes façons être validée par le RE [TC] . « Ca doit faire moins de papier pour FT… », estime le SMA. [SMA]. « On est obligés d’y aller puisque maintenant c’est comme ça », « ça ne change pas grand chose » [TC]. Ou encore ces hésitations significatives d’un certain désintérêt, pour ne pas dire scepticisme, face à cette « innovation » : [« Est-ce que c’est bien les applications @noo pour les congés ?]« Oui, c’est bien…. C’est pas mal… ». [« Est-ce que c’est mieux que les anciennes procédures ? »]. « C’est mieux ?… C’est pareil… Je crois pas que c’est mieux, c’est pareil. Les papiers, on en aura toujours. Il faut bien des accusés de réception. » [TC] Certains y voient même une lourdeur inutile (« c’est lourd aussi, le papier c’était très bien ! » [TC]) et un accroissement de l’anonymat dans les relations : « On a l’impression de ne plus avoir de chaleur humaine du tout, mais bon… c’est comme ça, il faut s’y faire… […] C’est encore pour éloigner les gens des uns des autres, moins de contact humain, parce que FT sait bien le faire, je trouve que la communication, elle passe de moins en moins » [TC]. D’autres estiment même manquer de temps pour utiliser ce service : « On n’a jamais le temps d’y aller » [TC].

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Chapitre 6. Pour une analyse synthétique transversale de la flexibilité dans les centres d’appels L’analyse monographique intra-site qui précède a été complétée par une synthèse inter-sites, qui tente de dégager quelques éléments transversaux aux trois centres d’appel étudiés. Dans un premier temps, cette analyse inter-sites est fondée sur les entretiens réalisés (analyse qualitative, 6.1.). Dans un second temps, elle s’appuie — par triangulation — sur les données complémentaires et de nature quantitative recueillies grâce au Job Diagnostic Survey administré dans les mêmes centres d’appel (6.2.). Enfin, une rapide confrontation de nos conclusions à la littérature récente consacrée aux centres d’appel conduit à une mise en perspective (6.3.).

6.1. Une analyse qualitative inter-sites

6.1.1. Une population âgée issue des redéploiements de FT Les personnes rencontrées ont pour la plupart connu une expérience professionnelle antérieure assez longue (plus de 20 ans d'ancienneté dans l'entreprise) soit dans des secteurs administratifs, soit dans le secteur technique. La multiplicité des origines est caractéristique de l'ampleur des réorganisations de FT depuis quelques années. La fermeture des services est la principale raison évoquée de l'arrivée des agents dans les centres OLA et Wanadoo. Même si celle-ci est dite "volontaire", elle n'est la plupart du temps qu'une "anticipation" d'une probable fermeture. Le seul véritable choix est celui de rester sur la région. Dans ce cas, l'ouverture de la plate-forme Wanadoo (4 ans) puis OLA (2 ans) était l'une des seules possibilités de mutation envisageable. Le cas du "12" est un peu différent car ce service existe depuis très longtemps à FT, certains opérateurs ont choisi d'y venir et d'y rester. Les personnels redéployés récemment ont tous un profil similaire : proches de la retraite, ils viennent y terminer leur carrière. Il est intéressant de noter également la présence (encore peu importante) de contractuels jeunes, d'une ancienneté assez faible et dont les propos s'écartent de façon significative de ceux des statutaires (différence d'âge, de statut, d'expérience…) sur les thèmes abordés dans les parties suivantes.

6.1.2. Une flexibilité qui s'exerce en premier lieu sur les temps de travail (flexibilité quantitative interne)…

- Des horaires de travail "subis" ou "choisis"

L'une des premiers leviers utilisés est l'organisation des temps de travail dans les centres qui fonctionnent en "horaires élargis" soit de 8H à 21H du lundi au samedi, et les dimanches et jours fériés au 12. Cette plage est d'ailleurs susceptible d'être encore élargie avec une généralisation d'ouverture les dimanches et jours fériés, qui n'est pas sans créer des conflits avec les télé-conseillers. Jusqu'à présent, ce sont les centres d'appel privés sous-traitants (Télé-performance) qui assurent les surplus d'activité (flexibilité externe), mais la nécessité de s'adapter en permanence à la demande des clients laisse à penser que l'ouverture les dimanches n'est qu'une question de temps et peut-être de négociation …

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On observe une nette différence entre les trois centres quant à l'organisation des horaires de travail. Au 12, bien que des roulements sur les 3 types de services (mixte, matin, soirée) soient institués en théorie, la plupart des agents s'arrangent entre eux pour être toujours présents à la même plage horaire. Ce qui permet de dire qu'ils "choisissent" leurs horaires selon leurs contraintes personnelles. Dans le centre OLA, par contre, les horaires de travail élargis sont considérés comme un inconvénient majeur. A part les premiers arrivés qui ont pu négocier des arrangements avec le responsable du plateau, tous les autres se sont vus imposer leurs horaires. Quant au centre Wanadoo, la contrainte de flexibilité paraît moins "subie" : les télé-conseillers disent avoir négocié leur horaires en 4 ou 5 jours par semaine (4 jours avec plus de soirées et moins d'heures et 5 jours plutôt en mixte).

- Une organisation des temps de travail étroitement liée aux flux d'appels La flexibilité s'exerce également sur l'organisation du travail des télé-conseillers, réparti en "temps", qui n’est pas sans rappeler les "cadences" de Taylor. Ainsi, trois temporalités reviennent assez fréquemment : le temps de réponse aux appels (de loin le plus important), le temps de "pas-prêt" (pas disponible pour répondre aux appels, en général pour remplir la fiche client), le temps de pause et moins fréquemment le temps de formation. On observe alors une forte corrélation entre le déroulement de ces temps de travail et le flux d'appels entrants. L'exemple du 12 est certainement le plus simple à comprendre : tous les temps sont formalisés à la minute près. Les agents prennent connaissance le matin de leurs pauses fixées à une heure précise, environ 10 minutes toutes les heures. Ces pauses sont calculées d'après les prévisions de flux, au moment les plus "creux". Les agents n'ont donc aucune autonomie dans l'organisation de leur travail. Tout est rythmé par les appels des clients. Dans les deux autres centres, à l'inverse, rien n'est formalisé mais le processus reste identique. Les télé-conseillers se sont octroyés dix minutes de pause toutes les deux heures en moyenne et dans le cas de Wanadoo, 1 heure par semaine d'auto-formation a été négociée avec la direction. Mais, si les pauses sont tolérées par les superviseurs "à la discrétion" de l'agent, en réalité elles restent étroitement liées aux flux d'appels. Ainsi, certains télé-conseillers admettent qu'en général ils ne prennent pas de pauses lorsque le flux d'appels est important. Un bandeau lumineux est d'ailleurs là pour leur rappeler en permanence le nombre de clients en attente…et les superviseurs contrôlent en direct les indicateurs de productivité. Ainsi, s'ils semblent bénéficier d'une marge de manœuvre dans l'organisation de leur temps de travail, celui-ci n'en reste pas moins fortement corrélé aux appels entrants et suppose donc une flexibilité plus importante qu'au 12. La négociation d'une heure d'auto-formation à Wanadoo a été âpre du fait du manque à gagner sur le temps de réponse aux appels, donc sur la productivité globale du centre.

6.1.3. … mais également sur le contenu du travail (flexibilité qualitative)

- Une remise à jour permanente des connaissances chez Ola et Wanadoo Le redéploiement de personnels vers de nouveaux métiers "en émergence" dans l'entreprise suppose une grande capacité d'apprentissage et d'adaptation. Si du point de vue

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organisationnel, les transformations successives se passent sans heurts ni résistances ; au niveau individuel, les agents ressentent très négativement ces mutations "forcées" même s'ils s'avèrent capables de s'adapter à un nouvel emploi souvent à l'opposé de leur métier d'origine. Cette capacité d'adaptation et d'apprentissage est surtout visible dans les deux plate-formes OLA et Wanadoo, dont le travail est qualifié de "complexe" et "difficile" par les télé-conseillers, et qui nécessite l'assimilation d'une masse importante d'informations au quotidien (nouvelles offres, nouvel environnement, nouveau matériel, nouvelle technologie etc.). Au 12, à l'inverse, la simplicité du travail demandé remplacé peu à peu par un serveur, est perçu par les opérateurs comme un avantage indéniable sur leurs collègues. La différence entre le 12 et Wanadoo/Ola est importante sur le besoin de formation ou de "recyclage" et sur le partage des compétences. Au 12, peu de besoins sont exprimés, il y a peu de changement sur le contenu du travail ou sur les procédures à utiliser. Les quelques formations dispensées sont relatives à la substitution progressive du serveur vocal aux opérateurs. Sur les deux autres plate-formes, le besoin de remise à jour des connaissances est très clairement évoqué par les télé-conseillers : les offres se multiplient, les produits FT évoluent, les outils changent… le sentiment d'être dépassé par cette masse d'informations et de ne pas avoir les moyens d'y faire face est très présent dans les entretiens, d'autant plus que cela implique souvent un manque de crédibilité auprès des clients, parfois mieux informés. C'est ainsi qu'à Wanadoo, une heure d'auto-formation par semaine a été négociée et qu'un outil de mémorisation et de transmission des compétences a été créé : la base de connaissances locale.

- Une relation client parfois complexe à gérer… Dans les centres Ola et Wanadoo, l'interaction avec le client est plus poussée et suppose une bonne compréhension du problème évoqué et la recherche la plus rapide possible d'une solution satisfaisante. Pour cela, les télé-conseillers utilisent des logiciels dans lesquels sont établies des procédures standards de résolution de problèmes. Ainsi, la consigne est de suivre les procédures, "un dicours-type", un script précis avec le client. Le travail prescrit est donc relativement standardisé à des cas-types. Néanmoins, certains télé-conseillers disent ne pas utiliser ces outils, ne pas vouloir entrer dans un "discours FT " et s'octroyer une liberté dans la manière de traiter leurs appels, notamment chez Wanadoo. Cette autonomie toute relative paraît indispensable dans un tel contexte, pour des personnes ayant bénéficié dans leurs expériences professionnelles antérieures d'une grande latitude dans l'organisation et la réalisation de leur travail (services techniques par exemple).

- Mais un travail qui reste répétitif et routinier Malgré la masse d'informations à gérer et la complexité du relationnel avec le client, le métier de télé-conseiller est jugé répétitif et routinier : les mêmes problèmes qui reviennent, les mêmes réponses données. Seuls les cas "difficiles" où l'opérateur doit "inventer" et sortir des procédures de recherche "standards" offrent encore un intérêt pour eux, mais ces cas restent assez rares (en quantité). Ainsi, le contenu du travail est en partie "dicté" par les appels des clients : à chaque appel, un problème différent, intéressant ou non, le télé-conseiller doit s'adapter à toutes les situations qui se présentent.

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Le contenu du métier de télé-conseiller est encore à définir et surtout à diversifier. La seule réponse aux appels comme mission principale, aussi difficile soit-elle, ne suffit pas à en faire un métier "riche". Ce constat a été fait en partie sur la plate-forme Wanadoo qui a mis en place de nouvelles missions : réponse aux mails techniques, ADSL, mails commerciaux etc. qui permettraient aussi aux agents de "poser le casque" quelques moments dans la journée et d'élargir leur champ de compétences. On remarque ainsi une différence dans l'appropriation et l'évolution du métier de télé-conseiller chez Wanadoo : la volonté est réelle de la part de la direction et des agents de faire évoluer le métier et d'améliorer la qualité du travail (ex : heure de formation). La négociation dans ce centre est par ailleurs largement instituée alors qu'elle paraît inexistante chez OLA. En outre, l'ancienneté (toute relative) de la plate-forme Wanadoo permet d'avoir plus de recul sur les difficultés liées au contenu du travail.

6.1.4. Une évaluation des performances axée sur la productivité Les critères d'évaluation de la performance individuelle et collective sont essentiellement quantitatifs : il s'agit du temps moyen des appels, du nombre d'appels pris par jour, du temps de "pas-prêt", du temps de pause etc. Ces indicateurs sont suivis en direct par les superviseurs et servent à l'évaluation individuelle des opérateurs. La mesure de la qualité de service rendue existe à travers les enquêtes de satisfaction client (performance globale sur la plate-forme) et est abordée individuellement à partir des écoutes des superviseurs, mais ne fait pas partie formellement des objectifs des opérateurs. Deux problèmes sont évoqués de manière récurrente par les agents : le sentiment d'être contrôlé en permanence et l'écart qui se creuse entre qualité des réponses données aux clients et indicateurs de contrôle essentiellement quantitatifs :

- Le sentiment d'être contrôlé en permanence est générateur de stress pour les télé-conseillers d'Ola et Wanadoo qui voient dans le système de monitoring un moyen de "fliquer", notamment sur les temps de pause ou de pas-prêt. Certains évoquent les cadences des "usines à la chaîne", même s'ils estiment être relativement "privilégiés" par rapport aux conditions de travail des centres d'appels privés.

- Le style de management en vigueur sur les plate-formes est fortement contesté : le rôle du superviseur est très mal perçu, le qualificatif le plus employé pour le désigner est "garde-chiourme". Nombreux sont ceux qui évoquent "l'ancien temps" comme référence au travail qu'il effectue : surveillance et contrôle, un peu d'écoute parfois mais les agents n'ont pas l'impression d'être "soutenu" et ne voient pas le métier de superviseur "comme un vrai métier". Par ailleurs, ils contestent leur manque de compétences "techniques", c'est-à-dire leur capacité à résoudre les cas de clients difficiles. Ainsi, globalement, les relations entre superviseurs et agents sont souvent tendues même si elles varient d'un responsable à un autre, selon la pression exercée sur les objectifs (au centre de toutes les tensions). Par ailleurs, le suivi en direct d'indicateurs quantitatifs est porteur de valeurs en décalage avec les valeurs traditionnelles du service public. Faire de la productivité et de la rentabilité n'a guère de sens pour les agents qui mettent en avant la nécessité de rendre aussi un service de qualité. Or, les indicateurs ne permettent pas toujours de répondre de manière satisfaisante au client puisque le temps d'un appel doit être le plus court possible afin de pouvoir en prendre un maximum dans la journée. Cet écart est très mal ressenti par les télé-conseillers qui n'ont même plus comme motifs de satisfaction le plaisir d'avoir bien répondu, d'avoir "dépanné" le client. Cette remarque

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est moins vraie au 12 où les agents s'accommodent plus facilement de critères quantitatifs du fait de la simplicité et de l'assurance d'avoir "bien" fait leur travail.

6.1.5. Flexibilité et performance individuelle : un constat préoccupant… Le constat est clair dans les centres Ola et Wanadoo : une majorité de télé-conseillers se déclare insatisfaite quant à sa situation professionnelle. Cette insatisfaction est générée par plusieurs facteurs déjà évoqués précédemment : un travail difficile avec une remise en cause permanente des connaissances, un travail répétitif pour lequel ils ont du mal à trouver un intérêt et une motivation, un système de contrôle oppressant avec un décalage important entre les objectifs de productivité et les aspirations des télé-conseillers, un style de management contesté, des horaires élargis et des clients souvent mécontents voire agressifs (OLA). A l'inverse, au 12, les agents se disent tous satisfaits de leur situation et ne désirent pas partir ailleurs. Mais leurs motifs de satisfaction n'ont rien de professionnel (eux aussi jugent leur travail inintéressant), ce sont surtout des raisons personnelles qui sont évoquées : horaires choisis qui leur permettent d'avoir du temps pour leur vie personnelle, simplicité du travail, éventuellement petit bonus financier des dimanches etc. Cet écart doit être interprété de plusieurs manières : d'une part, la contrainte de flexibilité s'exerce plus fortement à Ola et Wanadoo en termes de temps de travail (peu de possibilité de choix, horaires élargis, en relation constante avec le flux d'appels) et en termes de contenu du travail (capacité d'adaptation au client plus difficile, informations à assimiler rapidement, variété des situations proposées, contenu plus "complexe"…). D'autre part, le métier de télé-conseiller est un métier encore peu formalisé, trop récent, dont les contours évoluent (exemple de Wanadoo), moins cadré que le métier d'agent de renseignements (déjà ancien) qui se limite à quelques tâches simples. Les dissonances quant à la nature du travail à effectuer (en quantité ou en qualité), aux conditions dans lesquelles il s'effectue (contrôle), à l'impossibilité parfois d'aller jusqu'au bout avec le client etc. sont autant d'éléments qui montrent la difficulté de développer un nouveau métier avec un contenu suffisamment "riche" pour éviter les routines, suffisamment intéressant pour motiver et fidéliser le personnel sur le moyen et long terme. Enfin, la plupart des personnes est issue des redéploiements et n’a donc pas véritablement choisi ce métier pour ce qu'il représentait mais par défaut, parce qu'aucune autre possibilité ne lui était offerte. Par ailleurs, l'adaptation est bien plus longue et difficile qu'au 12. Ainsi, le stress et la fatigue ressentis au travail sont très largement mis en avant par les télé-conseillers alors qu'ils ne sont même pas évoqués par les agents du 12. L’éclairage apporté par les réponses au JDS sera sur ces points particulièrement intéressant. (Cf. 6.2.).

6.1.6. Un rôle limité de la GRH comme acteur et accompagnateur des changements liés à la flexibilisation

Un élément important dans ces résultats est la faiblesse des politiques de GRH dans l'accompagnement de ces nouveaux métiers. Toutes les personnes interrogées s'accordent sur le fait que leur métier est dévalorisé, à l'image de ce qu'a toujours été le 12 à France Télecom : un service où personne ne veut aller, ceux qui y sont ne savent rien faire d'autre … Or, la situation est aujourd'hui bien différente : seuls les centres d'appel recrutent alors qu'ailleurs les services ferment les uns après les autres. Le métier en devenir est bien celui de télé-conseiller.

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Il est alors frappant de constater que ces évolutions n'ont pas été préparées par la DRH : ainsi, le contenu du travail se dessine en fonction des besoins et des centres. C'est à l'agent de s'adapter à l'emploi, et peu d'actions sont menées sur les modalités de cet emploi (rémunération, qualification/compétences, parcours professionnel, évolution, etc.). C'est ainsi que l'on remarque que pour un même emploi existent des grades et des rémunérations associées fort différentes, qu'aucune perspective d'évolution n'est proposée aux télé-conseillers (dans les centres et encore moins dans l'entreprise), alors que certains ont encore près de 20 ans de carrière à faire… il n'est pas surprenant alors que le sentiment exprimé par les agents est d'être arrivé "au bout de quelque chose", d'être "coincé". La plupart ne savent pas ce qu'ils feront dans quelques années et manifestent le désir de partir (Ola/Wanadoo). Cette incertitude qui pèse sur leur avenir est également un facteur important d'insatisfaction et de stress. Le sentiment d'abandon est assez net et la pilule paraît amère pour les télé-conseillers interrogés dont certains ont déjà fait un trait sur leur devenir dans l'entreprise. L'implication est d'ailleurs beaucoup moins importante qu'auparavant du fait de l'écart croissant entre les valeurs traditionnelles de service public privilégiant la qualité et le relationnel client et les impératifs de rentabilité, productivité qui s'affirment et sont relayés par les systèmes de contrôle de l'entreprise. Au total, les résultats obtenus dans ces trois centres sont une première esquisse des effets de la flexibilité interne sur la performance globale et individuelle de France Telecom. Les politiques de redéploiement mises en œuvre au sein de l'entreprise dans un objectif d'adaptation et d'anticipation aux nouvelles contraintes du marché montrent bien ici toutes leurs limites : l'émergence des métiers de télé-conseillers en lieu et place de métiers plus traditionnels (techniques ou administratifs) sans accompagnement particulier de la DRH, créent un triple décalage : décalage sur le contenu du travail effectué jusqu'alors, décalage quant aux conditions de travail, décalage dans les valeurs et la culture France Telecom. Ce triple décalage est à l'origine de l'insatisfaction, de la démotivation et du stress évoqués par les télé-conseillers, en plus de l'incertitude qui pèse sur leur avenir professionnel. La réussite de la transformation de France Telecom en "Net compagnie" se joue actuellement sur sa capacité à mobiliser ses ressources vers ses nouvelles missions. Les résultats précédents - qui n'ont pas vocation à être généralisés pour le moment - sont néanmoins significatifs de l'ampleur du travail qui reste à réaliser dans le domaine des politiques et des pratiques de gestion des ressources humaines.

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Tableau 6 : Analyse inter-sites et synthèse des résultats dans les centres d’appel

OLA-Orange Wanadoo 12 Type de centres Appels entrants Metier-type Télé-conseillers Agents de renseignements La population • Une population FT plus âgée issue des redéploiements (flexibilité quantitative interne)

- Age > 40-45 ans / - Ancienneté > 20 ans • Des contractuels peu nombreux et plus jeunes (flexibilité quantitative externe)

- Age 30-35 ans / - Ancienneté < 5 ans Arrivée sur la plate-forme Choisie (par anticipation) et imposée Choisie (Flexibilité quantitative interne) Choix surtout géographique Flexibilité du contenu du travail (qualitative)

• Un travail difficile lié à la remise à jour permanente des connaissances • Interaction avec le client plus complexe (compréhension du problème - recherche de solutions) • Travail prescrit relativement standardisé (procédures), discours-type FT en interaction avec les ressources logicielles, mais petite marge d'autonomie dans la réalisation (ex : n'utilisent pas toujours les outils FT, ne suivent pas le script…).

•Travail simple, standardisé en alternance avec la technique (serveur vocal).

Travail répétitif et routinier OLA-Orange Wanadoo 12

Formation/apprentissage

• Formation initiale longue (plusieurs semaines) • Temps de formation continue et de "recyclage" (remise à jour des connaissances) insuffisant. • Grande capacité d'adaptation et d'apprentissage

• Formation initiale courte (15 j) • Très peu de "recyclage"

Solidarité et entraide : un partage des compétences Base de connaissance locale : un

outil de mémorisation et de transmission des compétences

collectives

Flexibilité des temps de travail (quantitative interne)

• Horaires de travail calqués sur le flux d'appels prévisionnels (Matin, Soirée, Mixte)

• Changement d'horaires tous les jours, par roulement Horaires "subis" Horaires en partie "négociés" Horaires "choisis" (échanges services) • Relative autonomie dans l'organisation des pauses (selon les besoins et

l'attente, pauses non établies mais tolérées de 10 mn / 2 heures ) • Pauses imposées à heure précise (10

mn / heure) Flexibilité des rémunérations (quantitative interne)

• Aucune pour le moment. / • En projet. Mal perçu par les agents

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OLA-Orange Wanadoo 12 Evaluation de la performance

Critères • Des critères d'évaluation surtout quantitatifs contestés (nombre d'appels, durée, temps de pauses…) • Peu de reconnaissance de la qualité des réponses données (debriefing, écoutes) • Objectifs de productivité en rupture avec les valeurs traditionnelles de service public

Contrôle • Monitoring en direct qui créée une pression sur les télé-conseillers (sentiment d'être contrôlé et surveillé en permanence). Générateur de stress.

• Peu de pression "perçue" par les TO • Caractère très standardisé du travail à effectuer qui s'accommode d'indicateurs quantitatifs de productivité

Motivation Les salariés sont assez peu motivés par leur travail • Conséquences négatives importantes des redéploiements forcés • Contenu du travail peu intéressant et répétitif • Les seules sources de motivation sont la satisfaction du client (Ola / Wanadoo) ainsi que la technicité liée à internet (Wanadoo)

Implication L’implication est beaucoup plus faible que par le passé • Dissonance entre les objectifs de l’organisation et les valeurs des salariés : Valeurs de service public et de satisfaction du client (usager ?) pour les salariés ; performance économique pour l’entreprise, mesurée par des indicateurs quantitatifs • Conséquences négatives importantes des redéploiements forcés

OLA-Orange Wanadoo 12 • Motifs d’insatisfaction : manque de convivialité, horaire étendus, travail fatiguant, agressivité des clients, masse de documentation, manque de tps

Satisfaction

• Pression forte et constante sur les objectifs génératrice de stress • Tension palpable entre les salariés et la hiérarchie

• Mêmes motifs d’insatisfaction qu’à Ola mais à un degré moindre • Hiérarchie plus souple quant à l’autonomie que s’accordent les salariés (pauses, manière de travailler, etc.)

Salariés les plus satisfaits sur les trois centres d’appels

• Simplicité du travail / Rupture nette entre travail et vie privée • Organisation du temps de travail • Bonus financier des dimanches

Dimensions psychologiques • Stress lié au contrôle en temps réel permanent • Absence de stress • Salariés très détachés de leur travail • Craintes de redéploiements vers Ola

Politiques de RH • Manque de reconnaissance du travail réalisé • Sentiment très fort que le travail en centres d’appels n’est ni valorisant ni valorisé • Peu de perspectives de carrières • Mobilité forcée • Différences de rémunérations • Absence d'anticipation et d'accompagnement des politiques de RH

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6.2. Un éclairage complémentaire à travers les réponses au questionnaire du Job Diagnostic Survey (JDS) Notre travail s’est intéressé à la mise en œuvre et à l’accompagnement de la flexibilité qualitative et quantitative du travail chez France Télécom. Le dispositif d’étude repose principalement sur une démarche qualitative, susceptible d’appréhender les processus en cours. Néanmoins, dans le cadre de l’étude des centres d’appels, nous avons procédé à une étude quantitative parallèlement à l’étude qualitative. Nous avons communiqué aux trois responsables de centre, des questionnaires (version courte du JDS) concernant les caractéristiques du travail et la satisfaction au travail. Les questionnaires étaient glissés dans une enveloppe comportant un questionnaire et une enveloppe retour. A l’issue de cette démarche, nous avons réceptionné 67 questionnaires utilisables. Le centre d’appel du « 12 » n’a retourné que six réponses exploitables, il ne sera donc plus évoqué dans la suite de cette étude. Les deux autres centres ont retourné 33 questionnaires pour Orange et 28 pour Wanadoo. Cette démarche quantitative vient compléter et éclairer les résultats de l’étude qualitative. C’est la raison pour laquelle nous allons essayer de montrer si les deux centres (Wanadoo et Ola) peuvent être distingués en ce qui concerne les caractéristiques du travail et la satisfaction. Nous avons décidé d’orienter notre analyse sur les conseillers clients d’Orange et les conseillers techniques Wanadoo. Les superviseurs ne feront donc pas partie de l’étude. Au final, l’analyse portera sur 54 questionnaires. La faiblesse de l’échantillon justifie notre objectif initial : éclairer les résultats de l’importante enquête qualitative. Dans un premier temps, nous allons nous attacher à vérifier les qualités métriques de l’instrument sur la population des centres d’appels. Puis, nous procéderons à des analyses explicatives afin de déterminer si la situation de travail est semblable chez Wanadoo et chez Orange. Enfin, nous progresserons dans notre connaissance des spécificités de chaque centre en comparant les réponses de chaque centre sur les variables de l’étude.

6.2.1. Les caractéristiques de l'outil Pour mener cette étude, nous disposons du questionnaire mis à la disposition des chercheurs par Hackman et Oldham (1980). Ce questionnaire, le Job Diagnostic Survey (JDS)28 est généralement décrit comme une échelle de mesure des caractéristiques du travail. Et, c'est dans cet objectif qu'il est le plus souvent employé. La version complète du questionnaire, d’origine américaine, comprend cinq sections et comporte 54 items (Mottay, 1995). Pour cette enquête, nous ne retenons qu'une partie du questionnaire. Nous conservons quinze items mesurant les cinq caractéristiques du travail du modèle MCT :

• l'autonomie (la liberté et l’indépendance accordées aux employés), • la valeur de la tâche (l'impact du travail pour les autres personnes), • la variété des compétences (l'utilisation de nombreuses compétences dans le travail),

28 Nous pourrions traduire Job Diagnostic Survey par Enquête de Diagnostic des Emplois (Neveu, 1993) mais nous préférons garder l'appellation américaine sous laquelle il est habituellement désigné.

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• l'identité de la tâche (le travail constitue une unité), • le feed-back de l'emploi.

De plus, onze items supplémentaires mesurent la satisfaction générale au travail (satisfaction vis-à-vis de la sécurité de l’emploi, satisfaction vis-à-vis de la rémunération, satisfaction vis-à-vis du besoin de développement, satisfaction vis-à-vis de l’encadrement, satisfaction vis-à-vis de l’intérêt du travail). Le questionnaire comprend une fiche signalétique du répondant. Nous disposons d'un identifiant anonyme, de sa date de naissance, de son ancienneté à France Télécom, de son ancienneté dans le poste, de son temps de travail hebdomadaire, de son type de contrat, de son statut et de son grade. Très souvent les informations de la fiche signalétique sont incomplètes. Parfois, la personne a rempli la fiche signalétique et a changé d’avis (rayure).

6.2.2. Pré-requis à l’analyse explicative Avant de présenter les résultats de l’analyse explicative, il est nécessaire de s'assurer que les pré-requis concernant l'utilisation de ce type de méthode sont respectés.

6.2.2.1 Description de la population Pour une régression multiple, la qualité des résultats est fortement influencée par la présence d'observations extrêmes (Evrard, Pras, Roux, 1993 , p.442). Pour procéder à une analyse exploratoire des données nous utilisons les "diagrammes en boîte"29 qui permettent de représenter pour chaque variable de l'étude, la forme de la distribution, sa position et de mettre en évidence les observations extrêmes (Laurent, 1985). L’observation 51 est ainsi éliminée car elle se situe à l’extérieur des « moustaches » des diagrammes pour plusieurs variables. Il reste donc 53 questionnaires. L’ensemble de ces questionnaires sera traité à l’aide du logiciel SPSS 10.0. En ce qui concerne les questionnaires de l’étude, 29 sont issus de Wanadoo et 24 d’Orange. La population étudiée semble conforme à nos observations lors des entretiens. Si l’on considère les deux sites, il y a environ 60% d’hommes. La moyenne d’âge est d’une quarantaine d’année avec un écart-type d’environ 8 ans. Les personnes sont à France Télécom depuis une vingtaine d’année et ils sont le plus souvent de grade 2.1 ou 2.2. Les salariés ayant répondu sont donc majoritairement soit en haut de l’échelle « non cadre » soit peu éloignés. L’ensemble de ces résultats doit être apprécié en tenant compte de la présence d’une population de non-fonctionnaires, récemment arrivée chez Orange. En ce qui concerne les fonctionnaires il s’agit en majorité d’une population approchant de la cinquantaine et ayant participé à la naissance et à la mutation de France Télécom ces 25 dernières années. Ces résultats sont détaillés dans le tableau suivant.

29 Ces représentations donnent la médiane, le premier et le troisième quartile (les limites de la boîte). Les scores situés entre une fois et demi et trois fois l'intervalle interquartile du bord de la boîte sont dits "extrêmes", les scores situés entre une fois et demi et trois fois l'intervalle interquartile du bord de la boîte sont dits "outliers". Les moustaches donnent le plus petit et le plus grand score de la variable qui ne sont pas des outliers ou des extrêmes.

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Tableau 7: Statistiques Orange et Wanadoo

Année de

naissance Anciennete

dans le poste

Nombres d'heures

Annee d'entrée

FT

GRADE

N Valide 50 51 48 51 35 Manquante 3 2 5 2 18

Moyenne 1961,40 9,71 33,27 1982,71 Médiane 1960,50 3,00 34,50 1981 22

Mode 1954 1 35,00 1977 21 Ecart-type 7,86 10,20 5,11 10 Minimum 1949 1 7,30 1961 13 Maximum 1977 36 37,50 2001 23

Les deux tableaux suivants distinguent les personnels d’Orange et de Wanadoo.

Tableau 8 : Statistiques Orange

Annee de

naissance Ancienneté

dans le poste

Nombres d'heures de

travail

Annee d'entree à

FT

Grade

N Valide 21 22 22 23 21 Manquante 3 2 2 1 3

Moyenne 1963,86 3,95 32,8273 1984,78 Médiane 1963,00 2,00 35,0000 1982,00 21,0000

Mode 1959 1 35,00 1977 21,00 Ecart-type 8,38 4,03 6,5458 11,63 Minimum 1949 1 7,30 1969 13,00 Maximum 1977 12 37,50 2001 22,00

Tableau 9 : Statistiques Wanadoo

Annee de

naissance Anciennete

dans le poste

Nombre d'heures de

travail

Annee d'entree à

FT

Grade

N Valide 29 29 26 28 14 Manquante 0 0 3 1 15

Moyenne 1959, 62 14,07 33,64 1981 Médiane 1959 12,00 34,00 1980 22,00

Mode 1954 3 34,00 1977 22,00 Ecart-type 7,08 11,31 3,59 8,26 Minimum 1949 1 18,00 1961 21,00 Maximum 1975 36 36,50 1995 23,00

a Il existe de multiples modes L’étude des tableaux 8 et 9 confirme les propos qui précèdent. La population d’Orange est plus jeune que celle de Wanadoo et il s’agit de personne entrée plus récemment chez France Télécom. Chez Wanadoo, il s’agit d’une population plus ancienne ayant des grades plus élevés. Cela confirme nos impressions lors de l’audt sur les postes d’Amiens. Le personnel de Wanadoo est généralement plus agé, il provient de filières techniques et il est titulaire d’un grade plus élevé du fait de son parcours antérieur dans l’organisation.

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6.2.2.2 Validité de l’instrument

Afin de mesurer la fidélité de l'échelle de mesure sur la population, nous avons calculé les Alphas de Cronbach sur les items associés aux variables (Peterson,1994). Les résultats sont conformes aux résultats attendus dans le cadre d'une étude exploratoire (Nunally,1967) . L’instrument utilize lors de l’étude comprend une partie relative à la satisfaction au travail (variables dépendantes) et une partie s’intéressant aux caractéristiques du travail (variables indépendantes). • Les variables dependantes Le questionnaire comprend 11 items relatifs à la satisfaction au travail. Le tableau 1 de l’Annexe 11 mesure la fiabilité de contenu à l’aide de la méthode des alphas de Cronbach. Les résultats obtenus sont très satisfaisants. L’instrument s’avère fiable en ce qui concerne la mesure vis-à-vis de la satisfaction au travail. Dans la suite de cette étude, l’ensemble des scores des items de satisfaction sera agrégé afin de constituer une variable unique de « Satisfaction Totale ». Cette variable sera composée de l’ensemble des scores précédent, moins ceux de la satisfaction vis-à-vis de l’intérêt du travail. En effet, dans la suite de cette l’item « intérêt du travail » sera considéré comme une variable explicative (indépendante). • Les variables dépendantes Il s’agit de vérifier si l’instrument utilisé permet de mesurer précisément les cinq caractéristiques du travail issues des travaux de Hackman et Oldham. Nous allons d’abord vérifier la fidélité par la méthode classique des alphas de Cronbach (Tableau 2, Annexe 11). Bien que les résultats soient légèrement inférieurs au seuil de 0.7, ils sont suffisants dans le cadre d’une étude exploratoire sur un échantillon de taille modeste. Compte tenu des résultats, l’item FBT_2 sera supprimé la suite de l’étude (Tableau 3, Annexe 11). Les résultats sont un peu faibles mais suffisants dans le cadre d’une étude exploratoire. En revanche, compte-tenu des résultats du Tableau 4 (Annexe 11), il n’est pas nécessaire d’éliminer l’item IDT_2 afin d’améliorer les propriétés de la mesure. Enfin, Les résultats sont insuffisants sur la variable « autonomie du travail ». Selon les recommandations de SPSS, il s’agit alors d’éliminer l’item Aut_2 afin d’améliorer la fiabilité de l’échelle. L’item Aut_2 mesurait l’autonomie dans le travail en faisant référence à l’initiative et au jugement personnel. Les employés de France Télécom ont donc distingué cet item des deux autres qui insistent plus sur l’autonomie vis-à-vis de l’ordonnancement des tâches. Afin de vérifier la qualité de la construction de l’instrument dans le cadre particulier des deux centres d’appels, une analyse en composante principale est réalisée. Cela doit permettre de mettre en évidence des facteurs issus de la combinaison linéaire des variables (items). Ces facteurs serviront alors d’indicateurs pour les caractéristiques du travail dans la suite de l’étude. L’échantillon se prête bien à une ACP, puisque l’indice KMO est supérieur à 0.7 (Mottay, 1999). Quatre facteurs sont retenus en appliquant la règle de Kaiser (eigenvalue > 1). Ceci conduit à tenir compte de 67% de la variance initialement présente dans l’enquête. Le tableau suivant présente la matrice des composantes après une rotation equamax.

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 151

Tableau 10 : Matrice des composantes représentatives des « caractéristiques du travail »

Quatre facteurs ou composantes apparaissent à l’issue du traitement. Comme souvent dans les ACP, la première composante a une forte valeur propre et représente ici 30% de la

variation totale. Elle regroupe des items relatifs à l’autonomie dans le travail, à l’identité de la tâche et au feedback du travail. La seconde composante représente la variété des compétences requise par la tâche. Le troisième facteur est l’importance de la tâche pour

l’organisation ou la société. La dernière composante regroupe deux items relatifs à l’identité de la tâche et au feedback :

IDT_1 : « l’organisation du travail est telle qu’il m’est possible d’effectuer un travail complet du début à la fin. » FBT_3 : « Lorsque j’ai fini un travail, je sais si je l’ai bien fait. » .

Il semble que les employés des centres d’appels aient considéré la séquence de base de leur travail identifié lors de l’analyse qualitative : Accueil, traitement du problème, séparation. A l’issue de cette première partie de l’étude, on peut considérer que l’instrument possède des qualités métriques suffisantes pour évaluer les caractéristiques du travail et la satisfaction du personnel des centres d’appel Wanadoo et Orange. L’objectif de la partie suivante sera d’analyser, à l’aide de régressions, s’il existe un lien entre les caractéristiques du travail et la « satisfaction totale » concernant les aspects du travail mesurés.

6.2.3. L’étude du lien unissant les caractéristiques du travail et la satisfaction dans les centres d’appels : Wanadoo est-il différent d’Orange ?

Afin d’appréhender les éventuelles différences dans les caractéristiques du travail entre Wanadoo et Orange, plusieurs régressions linéaires multiples successives seront réalisée. La première analyse la relation en considérant simultanément les deux centres. Puis nous analysons les résultats concernant Orange, avant de terminer par l’étude de régression relative à Wanadoo.

Matrice des composantes après rotationa

,796 ,774 ,763 ,750 ,703

,818 ,789 ,644 ,768 ,748 ,615 ,820 ,729

AUT_1 autonomieIDT_2 identité de la tache 2IDT_3 identite de la tacheAUT_3 autonomie 3FBT_1 feedback de la tache 1VC_1 variete des competences 1VC_3 variete des competencesVC_2 variete des competences 2IMPT_1 importance de la tache 1IMPT_2 importance de la tache 2IMPT_3 importance de la tacheIDT_1 identite de la tacheFBT_3 feedback de la tache 3

1 2 3 4Composante

Méthode d'extraction : Analyse en composantes principales. Méthode de rotation : Equamax avec normalisation de Kaiser.

La rotation a convergé en 8 itérations.a.

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La première analyse concerne les deux centres d’appel : elle doit permettre de mieux comprendre la nature du lien existant entre les caractéristiques du travail et ce que nous avons appelé la « satisfaction totale ». Les résultats sont résumés dans les deux tableaux suivants.

Tableaux 11 : Régression sur les sites Orange et Wanadoo

. On constate l’existence d’un lien entre les caractéristiques du travail et la satisfaction (R² = 0.5). Les deux facteurs contribuant à la relation sont le Facteur 1 et le Facteur 4 (au seuil 3%). La seconde analyse va isoler le centre d’appel Orange. Les tableaux suivants résument les résultats.

Tableau 12 : Régression sur le site Orange.

Coefficientsa

3,603 ,142 25,354 ,000

,701 ,133 ,742 5,288 ,000

-,203 ,142 -,201 -1,430 ,170

5,074E-02 ,155 ,048 ,328 ,747

,337 ,159 ,306 2,123 ,048

(constante)FAC1_1 REGR factor score 1 foranalysis 1FAC2_1 REGR factor score 2 foranalysis 1FAC3_1 REGR factor score 3 foranalysis 1FAC4_1 REGR factor score 4 foranalysis 1

Modèle1

BErreur

standard

Coefficients nonstandardisés

Bêta

Coefficients

standardisés

t Signification

Variable dépendante : SATISFACa.

Récapitulatif du modèle

,738a ,545 ,503 ,7519Modèle1

R R-deux R-deux ajusté

Erreurstandard del'estimation

Valeurs prédites : (constantes), FAC4_1 REGR factor score 4 foranalysis 1 , FAC3_1 REGR factor score 3 for analysis 1 ,FAC2_1 REGR factor score 2 for analysis 1 , FAC1_1 REGRfactor score 1 for analysis 1

a.

Récapitulatif du modèle

,811a ,658 ,582 ,6642Modèle1

R R-deux R-deux ajusté

Erreurstandard del'estimation

Valeurs prédites : (constantes), FAC4_1 REGR factor score 4 foranalysis 1 , FAC1_1 REGR factor score 1 for analysis 1 ,FAC2_1 REGR factor score 2 for analysis 1 , FAC3_1 REGRfactor score 3 for analysis 1

a.

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Le R² ajusté est de 0.582. Il est donc possible d’affirmer qu’il existe un lien entre les caractéristiques du travail et la satisfaction. Le résultat est supérieur à celui obtenu précédemment. Le second tableau détaille les résultats. Les facteurs 1 et 4 contribuent au modèle (le second au seuil 5%). Compte tenu de la taille de l’échantillon, il est difficile d’aller plus en avant dans l’analyse, constatant seulement la présence du lien sans en tirer de conclusion sur sa nature. La même analyse peut être réalisée pour Wandoo .

Tableau 13 : Régression sur le site Wanadoo

Les résultats sont nettement inférieurs à ceux obtenus précédemment. L’analyse de l’ensemble des résultats (cf. Annexe 11) incite à considérer que les liens unissant les caractéristiques du travail et la satisfaction sont soit faibles, soit non significatifs. Le

Coefficientsa

3,698 ,104 35,470 ,000,688 ,109 ,645 6,338 ,000

-,149 ,109 -,140 -1,376 ,1767,E-02 ,109 ,062 ,608 ,546

,347 ,109 ,325 3,197 ,003

(constante)FAC1_1 REGR factor score 1 for analysis 1FAC2_1 REGR factor score 2 for analysis 1FAC3_1 REGR factor score 3 for analysis 1FAC4_1 REGR factor score 4 for analysis 1

Modèle1

BErreur

standard

Coefficients nonstandardisés

Bêta

Coefficientsstandardisés

t Signification

Variable dépendante : SATISFACa.

Récapitulatif du modèle

,658a ,433 ,325 ,8976Modèle1

R R-deux R-deux ajusté

Erreurstandard del'estimation

Valeurs prédites : (constantes), FAC4_1 REGR factor score 4 foranalysis 1 , FAC2_1 REGR factor score 2 for analysis 1 ,FAC1_1 REGR factor score 1 for analysis 1 , FAC3_1 REGRfactor score 3 for analysis 1

a.

Coefficientsa

3,804 ,180 21,079 ,000

,662 ,195 ,567 3,388 ,003

-,131 ,185 -,120 -,710 ,486

,114 ,187 ,106 ,612 ,547

,288 ,185 ,270 1,555 ,135

(constante)FAC1_1 REGR factor score 1 foranalysis 1FAC2_1 REGR factor score 2 foranalysis 1FAC3_1 REGR factor score 3 foranalysis 1FAC4_1 REGR factor score 4 foranalysis 1

Modèle1

BErreur

standard

Coefficients nonstandardisés

Bêta

Coefficients

standardisés

t Signification

Variable dépendante : SATISFACa.

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centre d’appel Wanadoo est donc différent du site Orange. Dans le cas de Wanadoo, les caractéristiques du travail, telles que mesurées, ne déterminent pas la « satisfaction totale ». La taille de l’échantillon ne permet pas de conclure sur la nature exacte de ces différences. En revanche si on analyse ces résultats à la lumière de ceux obtenus par l’analyse qualitative, on peut affirmer que la situation de travail est différente entre les deux sites. Lors de l’analyse qualitative, des différences apparaissent en termes de contexte de travail (grade, rémunération) et d’origine des personnes exerçant chez Wanadoo. Ces différences sont confirmées par l’analyse quantitative des fiches signalétiques. Le personnel de Wanadoo est plus âgé, plus gradé et travail chez France Télécom depuis plus longtemps. Il est principalement composé de fonctionnaires. Nous avons cherché à déterminer l’influence de ces facteurs par des analyses explicatives sans obtenir de résultat significatif. Dans la suite de ce travail, nous chercherons à déterminer la nature des différences entre les deux centres d’appels. Nous utiliserons pour cela des méthodes descriptives. • Analyse descriptive des différences de perception de la situation de travail entre Wanadoo et Orange La première partie de ce travail d’analyse quantitative a permis d’affirmer que les personnes présentes dans les deux centres d’appels avaient une perception différente de la situation de travail. Afin d’approfondir ces premiers résultats, nous allons essayer d’illustrer graphiquement ces différences de perception. Des « boites à moustache » permettront d’appréhender le niveau des variables, la médiane et l’étendue des valeurs que prennent les variables. Le premier graphique reprend l’ensemble des variables qu’elles soient indépendantes ou dépendantes.

Figure 6: Comparaison des centres Wanadoo et Orange

2326 2428 2428 2428 2428N =

Centre d'appels

OrangeWanadoo

8

6

4

2

0

-2

-4

Fac_Aut_Idt_Fb

Fac_Varcmp

Fac_Impt

Fac_Id_fb

Satisf_Totale

21,00

63,008,00

64,00

23,00

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Ce premier graphique descriptif permet de mettre en évidence que la perception des caractéristiques du travail (représentée ici par les facteurs issus de l’ACP) diffère peu dans les deux centres. A l’exception de la boite « Fac_impt » qui indique que l’importance de la tâche est perçue d’une façon plus positive chez Orange (la médiane est plus haute). En revanche, la variable dépendante « Satisfaction totale » atteint un score supérieur chez Wanadoo. Le graphique suivant détaille les résultats concernant la satisfaction totale.

Figure 7 : la « Satisfaction totale » chez Wanadoo et Orange.

Lors de la phase qualitative de la recherche, les situations personnelles chez Wanadoo sont apparues plus variées que chez Orange. L’étendue des résultats concernant la satisfaction est plus grande chez Wanadoo. Par exemple, certaines personnes étaient volontaires pour venir travailler chez Wanadoo. De même, la nature du travail différait d’une personne à l’autre. Certains techniciens intervenaient sur le produit ADSL plus récent et plus complexe que l’offre standard de Wanadoo. De la même façon, les personnes ayant un passé de technicien chez France Télécom semblaient intrinsèquement plus motivées par la complexité du travail présente chez Wanadoo. D’autres facteurs peuvent permettrent d’expliquer ce résultat. Par exemple les rémunérations moyennes semblent plus élevées chez Wanadoo. La « Satisfaction Totale » mesurée dans cette étude est un indice synthétique composé de plusieurs types de satisfaction relatives principalement au contexte de travail (rémunération, encadrement, besoin de développement personnel). Nous allons maintenant détailler la situation de chaque centre vis-à-vis de chacun des aspects de la satisfaction. • Analyse détaillée de la satisfaction

Sont considérés ici les scores sur chaque item pris individuellement. L’étude des scores obtenus dans chaque centre sur les variables relatives à la satisfaction indique que les résultats divergent essentiellement sur la satisfaction vis-à-vis de l’encadrement, de la rémunération et du besoin de développement personnel dans le travail. Dans un premier temps, nous allons détailler les résultats concernant l’encadrement.

2326N =

Centres d'appels

OrangeWanadoo

Sat

isf_

Tota

le

6

5

4

3

2

1

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Figure 8 - La satisfaction vis-à-vis de l’encadrement.

Les scores diffèrent sensiblement entre Wanadoo et Orange. Ce résultat est particulièrement marqué pour le deuxième item (la médiane est à l’extrémité de la boite). Le personnel de Wanadoo a répondu très négativement à l’item suivant :

Sat_enc_2 : « l’aide et les conseils manifestés par mon supérieur. ». Ce résultat est cohérent avec l’étude qualitative. Dans les entretiens, le personnel de Wanadoo remettait en cause la légitimité des superviseurs. Pour ces personnes, souvent issus des services techniques, l’autorité doit s’appuyer sur une compétence technique supérieure. En revanche, sur le premier item (Sat_enc_1 : « l’équité et le respect manifestés par mon supérieur. »), le score de Wanadoo est supérieur et les résultats d’Orange sont très variables. Ici aussi, le résultat est en accord avec la phase qualitative de l’étude. Chez Orange, l’encadrement assure un rôle de contrôle propice aux dérives autoritaires. Enfin les deux centres divergent peu sur leur appréciation concernant la qualité de leur encadrement (Sat_enc_3 : « La qualité de mon encadrement »).

Les résultats de Wanadoo sont supérieurs à ceux d’Orange. A l’évidence, le personnel d’Orange est mécontent de son niveau de salaire (Sat_rem_1 : « le niveau de rémunération (salaire et avantages divers confondus). »). Le second item est moins discriminant, il invoque le sentiment d’équité : « sat_rem_2. l’équité de mon salaire au regard de ma contribution à l’entreprise. ». Ces différences d’appréciation entre les deux centres peuvent s’expliquer par le niveau moyen respectif des grades et donc des rémunérations. Il semble que les résultats d’Orange sont plus dispersés car nous constatons la présence d’outliers. C’est peut-être le résultat d’une plus grande homogénéité des recrutements chez Orange (fonctionnaires et contractuels).

2327 2327 2328N =

OrangeWanadoo

7

6

5

4

3

2

1

0

satisfaction_enc_1

satisfaction_enc_2

satisfaction_enc_3

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Figure 9 - la satisfaction vis-à-vis de la rémunération.

Figure 10 - Satisfaction vis-à-vis du besoin de développement personnel.

2327 2327N =

OrangeWanadoo

7

6

5

4

3

2

1

0

sat_rem_1

sat_rem_2

55,008,0063,00

62,00

2328 2327N =

OrangeWanadoo

8

7

6

5

4

3

2

1

0

sat_bd_1

sat_bd_2

49,00

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Si l’on considère les médianes, le score d’orange est, encore une fois, inférieur à celui de Wanadoo. C’est particulièrement le cas en ce qui concerne l’item « sat_bd_1 ». Afin de mieux comprendre ce résultat, examinons les deux items :

Sat_bd_1 : « Le progrès et le développement personnel que je retire de mon travail » Sat_bd_2 : « Le sentiment d’épanouissement personnel que j’éprouve dans mon

travail » A l’évidence, le personnel de Wanadoo a le sentiment de progresser, ce qui est moins le cas chez Orange. Encore une fois, si l’on se réfère aux entretiens, certaines personnes chez Wanadoo considéraient que leur travail était intéressant. L’objet même du travail, plus technique que celui d’Orange, pouvait leur permettre de progresser dans le domaine des compétences techniques. En revanche, de nombreux conseillers techniques de Wanadoo évoquaient avec regret leur poste antérieur et ne s’épanouissaient pas dans un centre d’appel. Même si dans de nombreux cas ils avaient le sentiment d’approfondir leurs connaissances techniques dans le domaine de l’informatique et des réseaux. Dans la première partie de cette étude, nous avons déterminé que la situation n’était pas semblable dans les deux centres d’appels Orange et Wanadoo. D’une part, les deux communautés n’ont pas les mêmes caractéristiques en ce qui concerne l’âge, le grade et le statut. D’autre part, dans le cas d’Orange les caractéristiques du travail semblent déterminer une partie importante de la satisfaction, ce qui n’est pas le cas chez Wanadoo. Dans la deuxième partie de l’analyse, nous avons comparé les résultats obtenus chez Wanadoo et chez Orange. Plusieurs analyses descriptives nous ont confirmé que les deux centres présentent des différences dans leur appréciation du niveau global de satisfaction. Le personnel de Wanadoo est plus satisfait de son travail que celui d’Orange. Afin de mieux comprendre ce résultat, nous avons détaillé les différentes facettes de la satisfaction. Nous avons alors constaté que ces résultats confirmaient, le plus souvent, ce que nous avions observé lors des entretiens. Que conclure de ces résultats ? Dans le cas de Wanadoo, la satisfaction au travail semble être déterminée par des facteurs de contexte ou bien encore externes au travail. Ce qui expliquerait que le niveau de satisfaction soit supérieur à celui d’Orange. Parmi les facteurs de contexte, la rémunération et l’intérêt du travail semblent jouer un rôle positif. De même le contrôle exercé par les supérieurs ne représente pas un problème pour les conseillers techniques de Wanadoo. D’autres facteurs peuvent intervenir. Par exemple, le travail chez Wanadoo est plus « valorisant » dans la mesure où les aspects techniques jouent un rôle important. Puisque de nombreuses personnes chez Wanadoo viennent de service technique, elles peuvent être particulièrement sensibles à des signaux positifs provenant de l’intérieur ou de l’extérieur de l’organisation. En revanche, les conseillers clients d’Orange ne disposent pas de ces signaux extérieurs positifs. Dans leur situation, seules les caractéristiques du travail peuvent déterminer leur satisfaction au travail. Ces résultats, qu’il faut prendre avec précaution du fait de l’effectif, confirment ceux de l’enquête qualitative. Ils permettent aussi de mieux distinguer les effets de la flexibilité sur les salariés de France Télécom.

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6.3. Vers une mise en perspective théorique : confrontation des résultats à la littérature Les centres d’appels, dont les plus anciens sont les services des renseignements (du « 12 ») de France Télécom, représentent une activité en plein développement, comme l’atteste par exemple la première cartographie des centres d’appels en France réalisée en 2001 par Cesmo Consulting30, de même que l’intérêt que portent les syndicats de salariés à ces nouveaux lieux de travail. Il paraît difficile de dénombrer précisément le nombre de centres d’appels existants, Datamonitor l’évaluant à 2 420 centres de plus de dix positions en l’an 2000, IDC à un peu plus de 2 100, et Cesmo à environ 2 500 (données issues de l’étude Cesmo).

6.3.1. Deux visions opposées des centres d’appels, mais un travail qui reste majoritairement taylorisé

La littérature académique oppose classiquement deux visions des centres d’appels (Frenkel et al., 1998 ; Kinnie et al., 2000). En mettant l’accent sur l’aspect contraignant du travail en centres d’appels, des auteurs ont recours à des images de "bagne électronique" (Garson, 1998) ou de "cage d’acier panoptique" (Menzies, 1996), ce qui constitue la première vision des centres d’appels, les comparant aux industries traditionnelles appliquant les préceptes tayloriens. Cette perspective met en avant la rationalisation industrielle qui y a cours et considère que les centres d’appels entretiennent une version rénovée du taylorisme (Arkin, 1997), le travail y étant une "ligne d’assemblage dans la tête" (Taylor et Bain, 1999), où les technologies de l’information permettent de répartir le travail entre les salariés, de l’automatiser pour une grande part, et de le contrôler en temps réel. Les pratiques de ressources humaines qui y sont associées sont pauvres, tant en ce qui concerne la rémunération que la formation, les salariés sont peu qualifiés et peu de possibilités d’évolution leur sont proposées (Batt, 1999). La seconde vision des centres d’appels met au contraire l’accent sur les éléments qui rendent les centres d’appels attractifs aux yeux des salariés, et notamment l’existence d’une autonomie déléguée aux téléconseillers dans l’organisation de leur travail. C’est le cas dans les situations où les services proposés par les centres d’appels sont personnalisés aux besoins des clients, ce qui peut nécessiter une marge de liberté et d’adaptation au client de la part des téléconseillers. A l’inverse du cas précédent, les pratiques de ressources humaines sont plus favorables aux salariés (existence de formations, rémunération plus élevée, travail à plein temps, etc.) (Frenkel et al., 1998). Ces deux conceptions opposées renvoient par ailleurs à deux styles de management eux-mêmes opposés (Pichault, 1993), à savoir le style de management panoptique (contrôle, transparence, homogénéisation, etc) et le style de management politique (accroissement de la responsabilité, autonomie, compromis permanent, etc.). Lorsque c’est un style de management panoptique qui a cours au sein des centres d’appels, la Fonction Ressources Humaines a un rôle qui se restreint à un aspect curatif (Pichault, 2000), loin d’être partie prenante aux décisions stratégiques et aux décisions d’innovations techniques ou organisationnelles mises en œuvre. La réalité n’est bien évidemment pas aussi simple que ne peuvent la laisser imaginer ces deux images des centres d’appels. Comme cela a été esquissé dans les lignes qui précèdent, l’organisation du travail ne peut être considérée comme homogène dans les

30 Cartographie consultable sur le site internet www.centres-appels.com

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différents centres d’appels, et semble plutôt être liée à la nature de l’activité du centre et par conséquent à la complexité du travail que doivent réaliser les salariés. Par ailleurs, même dans le cas d’une parcellisation des activités selon les principes tayloriens et de leur prescription croissante, les stratégies de résistance des salariés parviennent à dégager des marges d’autonomie dans cette rationalisation industrielle de leur activité (Buscatto, 2002). Afin de prendre du recul par rapport à ces deux visions idéales-typiques des centres d’appels, Frenkel et al. (1998) proposent la prédominance d’un modèle hybride qui vise à réconcilier la standardisation des processus avec la personnalisation du service, et qui combine des éléments issus des deux modèles précédents. Dans la conclusion de son étude, Perrier (2002) note que les centres d’appels s’intègrent dans la « production de masse personnalisée », que Reich (1997) voit comme le modèle de production à venir. Ce modèle combine une plus grande personnalisation des services avec un traitement de masse permis par les technologies de l’information. Malgré l’existence de ce modèle hybride qui diverge de la "cage d’acier panoptique", Frenkel et al. (1998) mettent toutefois en exergue l’uniformité de l’organisation du travail constatée dans les différents centres d’appels étudiés. Cette taylorisation reste apparemment fortement présente même dans les centres d’appels visant à offrir des services personnalisés et complexes aux clients. Buscatto (2002) met par exemple en évidence la rationalisation industrielle qui se développe dans un centre d’appels spécialisé dans la vente et la gestion de produits d’assurance, l’organisation mise en place alliant notamment une parcellisation du travail selon les principes tayloriens et une formalisation croissante des différentes phases de ce travail. Les centres d’appels illustrent aux yeux de Perrier (2002) une « tendance lourde à l’industrialisation des services » (p.43), puisque « les bases technologiques des centres d’appels (couplage de la téléphonie et de l’informatique) et la recherche permanente de productivité poussent à une taylorisation dominante de leur organisation » (Perrier, 2002, p.43). Celle-ci se manifeste par le biais de la standardisation des modes opératoires (recours à des scripts élaborés par la hiérarchie), le routage automatisé des appels, le contrôle en temps réel, etc.

6.3.2. Une typologie de quatre types de centres d’appels, à l’organisation du travail et aux objectifs divergents

Si la tendance générale est à la taylorisation de l’activité, les centres d’appels ne constituent pas pour autant un ensemble homogène aux caractéristiques identiques. Il parait par conséquent nécessaire de recourir à une typologie des différents centres d’appels afin de mieux appréhender les facteurs qui sont en mesure d’expliquer ces différences de caractéristiques. En se fondant sur les travaux de Pichault et Zune (2000), Perrier (2002) propose de distinguer les centres d’appels selon deux principales variables, qui sont la provenance des appels (entrants ou sortants) et la temporalité des actions gérées (actions ponctuelles telles qu’un sondage, ou actions pérennes telles que la banque à distance). Croiser ces deux variables permet dans l’optique de Pichault et Zune d’aboutir à une typologie de l’activité des centres d’appels en quatre idéals-types, chacun d’entre eux étant caractérisé par ses objectifs (qualitatifs / quantitatifs), la sensibilité des actions (risque de perdre des clients ou d’altérer l’image de marque du produit), et la complexité des savoir-faire nécessaires au traitement des appels.

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Tableau 14 - Typologie des centres d’appels selon leur activité

Appels sortants Appels entrants Actions ponctuelles

Type A -Objectif quantitatif -Sensibilité faible -Complexité plutôt faible

Type B -Objectif quantitatif et qualitatif -Sensibilité moyenne -Complexité faible à moyenne

Actions pérennes

Type C -Objectif qualitatif et quantitatif -Sensibilité moyenne -Complexité moyenne

Type D -Objectif qualitatif -Sensibilité forte -Complexité moyenne à forte

Source : Perrier P. (2002), « Centres d’appels ; la GRH confrontée à l’industrialisation des services », Etudes Entreprise&Personnel, n°218. Après avoir étudié les diverses dimensions des caractéristiques organisationnelles des centres d’appels, Perrier (2002) revient sur cette typologie afin de mettre en évidence les divergences qui apparaissent entre les quatre types de centres d’appels. Les éléments organisationnels étudiés nous intéressent directement, puisque l’on y trouve plusieurs dimensions intégrées dans la problématique de notre recherche (type de flexibilité mise en œuvre, polyvalence, autonomie, performance). Les résultats sont synthétisés dans le tableau suivant.

Tableau 15 - Principales caractéristiques organisationnelles par type de centres Type A Type B Type C Type D Caractéristiques des activités

Appels sortants Actions ponctuelles

Appels entrants Actions ponctuelles

Appels sortants Actions pérennes

Appels entrants Actions pérennes

Flexibilité Externe Moyenne à forte

Interne ou externe Forte

Plutôt interne Assez faible

Interne Moyenne à forte

Rationalisation dominante

Industrielle Plutôt industrielle

Plutôt professionnelle

Professionnelle

Polyvalence Très faible Moyenne Moyenne Plutôt forte Autonomie Quasi nulle Faible Moyenne Forte Performance recherchée Ex. d’indicateurs

Productivité Nombre de constacts/heure Temps moyen d’appels Nb informations qualifiées

Productivité Réactivité Qualité de service Nb d’appels traités/heure Taux de réponse Taux de satisfaction

Productivité Qualité de service CA généré/ tranche horaire Nb de nouveaux clients Taux de relances abouties

Réactivité Qualité de service Nb de cas résolus Taux de réponse Taux de fidélisation

Exemples d’activités

Sondage d’opinion Prises de rendez-vous Actions de télémarketing

Renseignements Numéro « vert » limité dans le temps Prises de commande après campagne promotionnelle

Enquêtes de satisfaction Relances clients Campagne de fidélisation Recouvrement

Numéro « vert » permanent Help-desk informatique Téléassistance Banque à distance

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Métiers-types Téléréception-niste Agent de renseignement Téléenquêteur Téléprospecteur

Télévendeur Gestionnaire de commandes

Agent de recouvrement Télévendeur Conseiller télémarketing

Téléconseiller Technicien help-desk Gestionnaire compte client

Source : Perrier P. (2002), « Centres d’appels ; la GRH confrontée à l’industrialisation des services », Etudes Entreprise&Personnel, n°218. Au regard de cette typologie, nous pouvons procéder à un classement a priori des 3 centres d’appels qui constituent notre terrain de recherche, et par conséquent des caractéristiques que l’on peut s’attendre à observer dans chacun d’eux. Ceci sera bien évidemment à comparer aux caractéristiques qui seront empiriquement observées durant le déroulement de la recherche, ce qui passe par exemple par l’étude d’éventuelles dissonances entre les caractéristiques organisationnelles, notamment entre les diverses dimensions de la flexibilité et la performance. L’activité à l’USO (le « 12 ») s’apparente a priori à celle du type A, avec une rationalisation et une automatisation du processus de production permettant d’atteindre des objectifs de productivité. Celles des centres Orange et Wanadoo se rapprochent quant à elles du type D, axé sur la résolution de problèmes auxquels sont confrontés les clients.

6.3.3. Des spécificités des centres intégrés ? La plupart des recherches existantes portent sur des centres prestataires et non des centres intégrés. Les centres intégrés sont des centres d’appels internes, qui appartiennent à une entreprise dont l’activité principale relève d’un autre secteur d’activité. Deux raisons expliquent que certaines entreprises préfèrent développer leurs propres centres d’appels (Perrier, 2002) : soit la relation avec le client est jugée comme quelque chose de trop important dans la stratégie de l’entreprise, et elle ne peut de ce fait envisager d’avoir recours à un sous-traitant ; soit l’expertise que doivent posséder les téléopérateurs est jugée trop pointue. Au-delà de ces deux raisons, Perrier (2002) note que la création de centres d’appels internes peut également être un élément de gestion des sureffectifs, comme cela est le cas à France Télécom. Les centres prestataires ou externalisés se positionnent en tant que prestataires de service, et mettent en avant à la fois leurs moindres coûts au regard de ceux engendrés par des centres intégrés, et leur maîtrise de la relation client. Les caractéristiques de la population présente dans les centres d’appels intégrés ne sont probablement pas les mêmes que les caractéristiques de celle qui travaille dans les centres prestataires, et plus encore lorsque la raison de l’existence de centres internes est la gestion de sureffectifs tel que cela existe à France Télécom. Il s’agit en effet dans les centres intégrés de personnels de l’entreprise, qui dans certains cas de création de centres d’appels occupaient d’autres postes auparavant, alors qu’à l’inverse les salariés des centres prestataires ont été embauchés en tant que téléconseillers. L’optique des recherches et les problématiques qui y sont développées ne sont par conséquent pas les mêmes dans les deux cas. Ainsi celles qui portent sur des centres prestataires aboutissent à des résultats qui ne peuvent pas forcément s’appliquer dans le cas de centres intégrés, comme c’est le cas par exemple de conclusions portant sur les intentions de départ des téléconseillers et les moyens à mettre en œuvre pour les conserver (Gosselin et al., 2002), ou les intentions de départ de salariés en réaction à certains styles de management en vigueur dans des centres d’appels (Pichault, 2000).

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De même, la transposition aux centres intégrés de "bonnes pratiques" avancées pour expliquer la réussite de certains centres d’appels (Merck, 2001) nécessite des précautions, compte tenu de l’écart existant entre des salariés spécialement sélectionnés et embauchés pour travailler en centre d’appels et des salariés travaillant comme téléconseillers à la suite d’une mobilité interne. A ce titre, il faut noter dans le cadre de note recherche l’intérêt des résultats de l’étude d’Honoré (2002). Celle-ci porte en effet sur la mise en place de centres d’appels intégrés, créés à partir des salariés déjà présents dans l’entreprise, dans le cadre de la nouvelle politique commerciale d’une entreprise d’équipement électrique. Les résultats mettent en effet en évidence l’existence d’une brisure dans la trajectoire professionnelle des assistantes (de vendeurs, de directeur d’agence, d’équipe d’ingénieurs) au moment où elles intègrent le centre d’appels pour devenir téléconseillères, puisque ce changement de poste ne correspond pas à une prise de responsabilités administratives croissante, ce qui caractérisait auparavant les transitions successives entre les différents postes qu’elles avaient occupé durant leur carrière. De ce fait, « intégrer un centre d’appels change l’identité professionnelle de l’assistante » (Honoré, 2002, p.58).

6.3.4. Le degré d’industrialisation lié à la complexité du travail Si l’on s’intéresse aux caractéristiques des salariés comme élément discriminant permettant de mieux comprendre les résultats, il est intéressant de se pencher sur les conclusions de la recherche menée par Buscatto (2002). La population du centre d’appels étudié a en effet pour caractéristique de bénéficier d’une stabilité de l’emploi, d’où la possibilité d’établir des parallèles avec les centres d’appels de France Télécom. Cette stabilité de l’emploi a pour conséquences de développer l’implication des salariés dans leur activité de travail, mais également leurs stratégies de résistance, aussi bien personnelle qu’au travers de l’action syndicale. Les formes de réactions mises en place par les salariés pour faire face à la prescription croissante du travail souhaitée par la direction du centre d’appels sont en effet de deux ordres. La première est la prise d’autonomie, l’éloignement du travail prescrit, notamment en n’utilisant pas les scripts développés par leur hiérarchie. La seconde s’opère par le biais des syndicats, avec la montée d’un syndicat à tendance contestataire qui a réussi à négocier des avantages en termes de rémunération ou de temps de travail. Ces résistances sont d’autant plus fortes que les perspectives de promotion sont saturées, ce qui a pour conséquence que les salariés aménagent au mieux une situation de travail dans laquelle ils risquent de se trouver pour une longue période. Favorisée par la stabilité de l’emploi, « ces multiples stratégies de résistance permettent aux chargés de clientèle aussi bien de limiter les contraintes matérielles et personnelles liées à un contexte de travail jugé stressant, répétitif et fatiguant que de s’investir à leur manière dans une situation de travail vivante, riche en interactions » (Buscatto, 2002, p.110). Cette possibilité de résistance des salariés via la prise d’autonomie face à formalisation et à la prescription croissantes de leur travail voulues par la direction n’est cependant pas réalisable dans tous les types de centres d’appels. Elle est en effet liée à la complexité du service offert par le centre d’appels (dans le cas présent, vente et gestion de produits d’assurance). Malgré la parcellisation de l’activité, l’utilisation de scripts, etc., la nature même de cette activité laisse des marges de liberté aux chargés de clientèle, qui ont chacun leur propre vision de ce qu’est un "bon comportement commercial". Au travers de la recherche de Buscatto (2002), mais également de celle de Pichault (2000), il apparaît que la complexité du travail joue sur son degré de prescription, et par conséquent sur l’autonomie laissée aux téléconseillers. Le terrain de recherche de Pichault

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est un centre d’appels constitué de trois départements, et l’étude de chacun de ces trois départements montre que la complexité du travail joue non seulement sur son degré de prescription, sur les indicateurs et modes de contrôle utilisés, mais également sur la politique de rémunération.

6.3.5. Une tension entre productivité et qualité de service Comme le rappelle Perrier (2002), les enjeux économiques des centres d’appels sont d’une part la productivité, et d’autre part la qualité de service. Cependant des contradictions sont souvent notées dans la littérature entre ces deux dimensions de la performance, même si en alliant standardisation des processus et personnalisation du service, le modèle hybride vise à combiner productivité et qualité de service. La rationalisation industrielle évoquée auparavant permet de faire progresser la productivité, par le biais d’une plus grande formalisation de l’activité de travail et du soutien à l’automatisation procurée par les technologies de l’information (le temps est ici un critère de performance essentiel : temps d’attente, de communication, de pause, etc.). Le développement de la qualité de service, si l’on s’intéresse à la qualité des réponses fournies par les téléopérateurs (c’est-à-dire en mettant de côté des éléments tels que le temps de réponse, qui peuvent être améliorés par une plus grande automatisation du traitement des appels), joue quant à lui sur les compétences des salariés et sur l’interaction entre le client et le téléconseiller durant la communication téléphonique (coproduction du service), principalement dans le cas des centres d’appels de type D, axés sur la résolution de problèmes. De ce fait, il paraît difficile de conjuguer une pression sur le temps avec la recherche de la qualité, comme l’attestent par ailleurs les résultats de Gosselin et al. (2002), pour qui il s’agit d’un réel conflit entre qualité et productivité comme dimensions de la performance des salariés. Ces auteurs soulignent que du fait de la quasi-impossibilité de réaliser des compromis entre qualité et productivité, il faut s’interroger sur la capacité des téléconseillers à concilier au quotidien de telles exigences. Cette situation délicate dans laquelle se trouvent les salariés des centres d’appels est d’autant plus prégnante que les priorités et les résultats attendus sont mal définis, ce qui transforme une éventuelle autonomie conférée aux salariés en incertitude sur la conduite à tenir (Honoré, 2002). Au-delà de cette tension entre productivité et qualité, Kinnie et al. (2002) mettent l’accent sur la dichotomie qui existe entre d’une part les objectifs fixés aux salariés de centres d’appels et d’autre part les modes de contrôle qui y sont exercés. Ils observent en effet la coexistence de contrôles hiérarchiques serrés sur des dimensions quantitatives (nombre d’appels, temps de communication, etc.) et de standards de qualité élevés, ce qui peut mener les salariés à des situations de tension et à des contradictions lorsqu’ils réalisent leur travail.

6.3.6. Vers une diversification des activités pour dépasser la taylorisation ?

L’une des conclusions de l’étude de Perrier (2002), s’interrogeant sur "la GRH confrontée à l’industrialisation des services", est que l’amélioration des conditions de travail dans les centres d’appels passe par une diversification des tâches, afin de limiter l’aspect routinier et répétitif du travail, de même que par des tolérances quant aux marges de manœuvre dont disposent les téléconseillers dans l’organisation de leur travail. Dans le centre d’appels servant de terrain de recherche à Buscatto (2002), la hiérarchie fait justement un

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effort pour éloigner régulièrement les salariés de l’activité téléphonique qui est jugée usante. Ceci se traduit par des tâches administratives, des formations, la participation à des groupes de travail, etc. Selon Gosselin et al. (2002), donner aux salariés des centres d’appels d’autres tâches à réaliser permet non seulement de jouer sur le contenu du travail afin d’influer sur la performance individuelle (notamment en termes de motivation, etc.), mais également sur la reconnaissance que ces salariés perçoivent de la part de leur employeur. C’est ainsi un moyen de valorisation que de jouer sur l’organisation du travail en diversifiant les tâches.

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CONCLUSION GENERALE

Au terme de cette recherche menée durant deux années sur le thème de relations entre les TIC, les transformations du travail, les flexibilités et les performances et appliquée au cas de France Télécom, il convient de tenter de synthétiser les principales conclusions qui ressortent de nos investigations empiriques, mais aussi de lancer quelques pistes de réflexions théoriques sur cette base. La problématique de la recherche s’articulait autour de ces quelques propositions :

P1. Les choix stratégiques en termes de flexibilité (politiques de flexibilité de l’entreprise) peuvent traduire d’une part une réponse aux évolutions du contexte environnemental et des contraintes qui s’exercent sur l’entreprise (réaction) et, d’autre part, une volonté d’améliorer la capacité d’adaptation de l’organisation à ses clients et à ses salariés (proaction). P2. Ces politiques stratégiques de flexibilité se déclinent ou se traduisent en différentes modalités de flexibilité, interne et externe, qui correspondent à une série d’ajustements organisationnels (flexibilité opérationnelle). P3. La flexibilité interne s’exerce à la fois sur des éléments de gestion qualitative et de gestion quantitative des ressources humaines. P4. Pour ces différents niveaux et formes de flexibilité, la fonction ressources humaines tient une place particulière, au sens où elle peut être aussi bien l’objet d’une flexibilité accrue (reconfiguration de la fonction) et l’acteur central de l’incitation/ la gestion/ l’accompagnement de cette flexibilisation : la GRH comme objet ou acteur de la flexibilité. P5. La mise en place de ces formes de flexibilité et les actions de GRH qui les accompagnent ont des effets en termes de performances individuelles et organisationnelles. P6. Dans ces processus, les TIC peuvent jouer le rôle de facilitateur des pratiques de flexibilité (et par conséquent des performances associées), mais aussi de résultante des changements organisationnels : les TIC comme moyen ou produit de la flexibilité31. P7. Dans le cas précis d’une entreprise comme France Télécom, le contexte et les contraintes sont particulièrement surdéterminants dans le choix des politiques de flexibilité, mais aussi dans les modalités concrètes de flexibilité opérationnelle.

Pour apporter des éléments de réponse — ou au moins d’éclairage — à ces propositions, une méthodologie en deux temps a été mise en œuvre : dans un premier temps, une série d’entretiens exploratoires (6) a permis de mieux appréhender le contexte, les orientations

31 En référence notamment au cadre d’analyse de la théorie de la structuration développée par Giddens (1987) et reprise dans certains travaux sur les technologies de l’information (Cf. partie 1 du rapport).

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stratégiques et les politiques de flexibilité mises en œuvre au sein de l’entreprise ; dans un second temps, deux terrains d’analyse ont été approfondis par le biais de 82 entretiens semi-directifs au total, complétés par l’analyse de 67 questionnaires « JDS » : 2 CSRH et 3 centres d’appel ont ainsi fait l’objet d’une monographie puis d’une analyse comparée et intégrée. P1. - P2. – P3. Les analyses menées font clairement ressortir que la flexibilité stratégique chez FT est avant tout de nature réactive : c’est en réponse aux évolutions de son environnement (notamment concurrentiel) que l’entreprise « adapte » ses orientations et son organisation. Elle est proactive à un second niveau, au sens où la mise en place des structures du type CSRH ou Centres d’appel visent à anticiper une adaptation la plus fine et la plus rapide possible aux attentes des clients (externes pour les centres d’appel et internes pour les CSRH). Par ailleurs, cette flexibilité stratégique se traduit bien en différentes modalités de flexibilité opérationnelle qui sont autant de réponses par ajustements organisationnels. C’est la flexibilité externe quantitative qui semble surdéterminante dans le cas de FT : la politique de déploiement du personnel, visant à « déplacer » des effectifs importants issus d’activités ou de métiers non créateurs de valeur ajoutée vers des segments de croissance, constitue l’élément majeur de la flexibilité, combiné aujourd’hui à un gel des recrutements et à un accompagnement des départs volontaires. Ce déploiement du personnel répond à une triple exigence de baisse des coûts / augmentation de la valeur ajoutée créée, de maintien du personnel dans l’emploi et du respect des bassins locaux d’emploi. La flexibilité interne quant à elle s’exerce à la fois en termes qualitatifs et en termes quantitatifs, comme une déclinaison à son tour (ou une implication) de la politique de déploiement. P4. – P5. – P7. La FRH tient alors une place particulière dans cet échafaudage de flexibilités : elle est présentée en effet à a fois comme un acteur de la flexibilité (elle est censée initier le changement et de l’accompagner) et comme un objet de flexibilité (elle est au cœur du mouvement de reconfiguration — et d’ « allégement »— des fonctions support dans l’entreprise). Les analyses empiriques menées dans les CSRH comme dans les centres d’appel soulignent d’ailleurs bien plus ce second aspect (la FRH comme objet de flexibilité) que le premier. En effet, les spécificités du contexte de FT, ses contraintes statutaires et économiques, mais aussi sans doute l’héritage culturel de l’organisation, laissent peu de marge de manœuvre dans les modalités d’accompagnement et de gestion des structures étudiées. De fait, l’accompagnement assuré par la FRH de ces changements organisationnels multiples reste limité, ce que déplorent beaucoup des acteurs rencontrés. Cette limite se ressent indéniablement dans les motivations et satisfactions individuelles exprimées par les salariés (manque de valorisation des métiers, manque de perspective de carrières, incertitude sur l’avenir, absence de moyens d’incitation, etc.). P6. En fin, les TIC— qui étaient initialement au cœur de la problématique de cette recherche — apparaissent un peu en retrait dans les analyses empiriques réalisées. Elles s’avèrent plus des moyens au service de la flexibilité que des résultats de cette flexibilité. En outre, il est légitime de se poser la question, à l’issue de cette recherche, du paradoxe entre une flexibilité à court terme mise en œuvre à travers les TIC, et l’installation d’une rigidité à long terme. Sur un plan plus théorique maintenant, cette étude permet de lancer plusieurs pistes de réflexions plus qu’elle ne permet de proposer un modèle conceptuel. Notamment, et pour reprendre ce dernier aspect relatif aux TIC, un recours à la théorie de la structuration conduit à formaliser le paradoxe « empirique » qui vient d’être évoqué. Dans quelle

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mesure les TIC influencent-elles d’une part les pratiques du travail, tout en étant d’autre part détournées par les utilisateurs pour s’éloigner du travail prescrit ? En d’autres termes, comment les TIC participent-elles à la flexibilisation de l’organisation en intervenant dans les méthodes de travail ou les processus, mais aussi comment découlent-elles de la flexibilité par le biais de la recherche d’autonomie de la part des utilisateurs ? Les TIC sont alors à la fois des moyens et des produits de cette flexibilité au regard des analyses structurationnistes. De la même manière, les théories relatives à l’autonomie (en relation ou non avec les TIC) sont intéressantes à interroger à la lumière de nos travaux empiriques. Enfin, plus spécifiquement, les réflexions actuelles sur le paradoxe que constitue le retour à des formes de rationalisation industrielle ou de « production de masse personnalisée » (Perrier, 2002) ouvre des perspectives intéressantes de discussion. Alors que le nouveau Président de France Télécom annonce, dans sa Conférence de Presse du 5 décembre 2002, vouloir « atteindre davantage de flexibilité stratégique et financière à l’horizon 2005 », toutes ces conclusions et questions mériteront d’être confrontées aux décideurs et aux acteurs que nous avons rencontrés, dans le cadre d’une restitution de la recherche auprès de l’entreprise, restitution qui prendra des formes variées, individuelles et collectives, écrites et orales.

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ANNEXES

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Table des Annexes

• Annexe 1 : Le guide d’entretien exploratoire • Annexe 2 : Le guide d’entretien des responsables de centres d’appel • Annexe 3 : Le guide d’entretien des chefs d’équipes des centres

d’appel • Annexe 4 : Le guide d’entretien des télé-conseillers / opérateurs des centres

d’appel • Annexe 5 : Le Job Diagnostic Survey (JDS) • Annexe 6 : Le guide d’entretien des responsables de CSRH • Annexe 7 : Le guide d’entretien des responsables d’équipes des CSRH • Annexe 8 : Le guide d’entretien des assistantes de gestion des CSRH • Annexe 9 : Les grilles d’analyse des entretiens exploratoires • Annexe 10 : La grille d’analyse des entretiens des centres d’appel • Annexe 11 : Les résultats de l’analyse statistique brute appliquée aux

questionnaires du JDS (centres d’appel)

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ANNEXE 1 : GUIDE D’ENTRETIEN EXPLORATOIRE

Rappel du contexte de l'étude / présentation des chercheurs présents Thème de l'entretien

1. Quel a été votre parcours au sein de FT et éventuellement avant d'intégrer FT ?

En quoi consiste votre mission actuelle ? 2. A travers votre parcours chez FT, comment caractériseriez-vous les changements marquants qu'a

connus votre entreprise ?

• en termes d'environnement externe • en termes de modes de fonctionnement internes, • en termes de structures, d'organisation …

3. Quelle est la place et quel est le rôle des TIC dans votre mission ?

• quels types de TIC sont utilisés et par qui, pour quoi ? • comment ont-elles été développées ? y a-t-il une réflexion collective sur le sujet ? qui y a été associé ? A-t-on fait appel à des prestataires externes ou non ? • quels étaient les objectifs poursuivis ? …

4. Quelles sont, selon vous, les conséquences de l'utilisation des TIC sur votre unité, au plan

organisationnel ?

• sur le fonctionnement interne de l'unité ? (réactivité, rapidité du processus de décision, qualité de service / produit, qualité / vitesse de diffusion de l'information, simplification des structures et des circuits de décision, décentralisation, organisation par processus…)

• sur les relations de l'unité avec ses partenaires internes et externes (autres unités FT, clients, fournisseurs, …)

• et sur l'organisation du travail ? (meilleure coordination ? flexibilité de l'organisation du travail ? polyvalence ? responsabilisation ? autonomie ? prise d'initiatives ? élargissement - enrichissement des tâches ? …)

5. Selon vous, comment les individus réagissent à l'utilisation des TIC dans votre unité ?

• en termes de satisfaction ? • en termes de motivation / implication au travail ? • y a-t-il des craintes ? Sur quoi portent-elles ? (plus de contrôle, rapport à la technologie) • stress ?

6. Et l'encadrement de proximité, a-t-il selon vous une place particulière dans ce contexte ?

• modifications des missions ? • modifications dans la manière de réaliser leur travail / mission ? • dans quelle mesure ont-ils recours aux TIC ? • comment ressentent-ils les évolutions de l'organisation du travail ? …

7. Tous ces changements impliquent-ils le développement de nouvelles compétences chez les

salariés ? • si oui, lesquelles ? • comment sont-elles développées ?

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8. Quel est le rôle de la fonction RH dans ce contexte ?

• incitation ? • soutien ? • partage / diffusion d'expériences ? • accompagnement ? • contrôle ?

9. Plus globalement, et pour finir, les TIC sont-elles un facteur de performance ?

• pour celui qui les utilisent ? • pour votre unité ? • pour France Telecom ?

—> définir avec l'interlocuteur les personnes que l'on pourrait rencontrer et qui viendraient illustrer les propos et exemples donnés

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ANNEXE 2 : GUIDE D'ENTRETIENS RESPONSABLES

CENTRES D’APPELS

Rappel du contexte de l'étude / présentation des chercheurs présents Thème de l'entretien Les trois phases de l’entretien

Le métier de responsable de centre d’appel et le lien avec les TIC

1. Quel a été votre parcours au sein de FT et éventuellement avant d'intégrer FT ? En quoi consiste votre mission actuelle ?

2. En quoi les TIC influent-elles votre rôle façon de gérer l’unité ?

• Formation, transmission d’information, gestion du temps de travail, coordination • Quels types de TIC utilisez-vous, pour quoi ? • Quelles sont les conséquences sur le fonctionnement interne de l'unité ?

réactivité, rapidité du processus de décision, qualité / vitesse de diffusion de l'information, simplification des structures et des circuits de décision, décentralisation, organisation par processus…

• Quelles sont les conséquences sur l'organisation du travail ? meilleure coordination ? flexibilité de l'organisation du travail ? polyvalence ?

responsabilisation ? autonomie ? prise d'initiatives ? élargissement - enrichissement des tâches ? …

• Les TIC que vous avez à votre disposition modifient-elles les liens que vous avez avec d’autres unités de France Télécom CSRH ?

CSRH Centres d’appels

3. Pouvez-vous nous décrire le fonctionnement du centre d’appel ? • En termes d’organisation

Nombre d’équipes, de personnes dans chaque équipe Composition de l’équipe (les différents métiers) Comment sont répartis les appels entre les membres de l’équipe ?

Cadences Comment se gère le temps de travail : pauses, horaires, jours travaillés (WE),

congés • En termes de mission

Type de questions posées : assistance technique, administrative Type de clients : débutant, expert Quelles sont les attentes des clients ?

Qualité de la réponse : réponse efficace, rapidité, qualité du contact avec le conseiller, etc.

• En termes de personnel Statut, âge, parcours professionnel Comment se fait le recrutement ? Sur quels critères ? Reclassement interne à FT

4. En quoi consiste le travail de chaque fonction ?

• Conseillers : schématiquement, tout ce qui se passe entre le moment où il décroche et celui où il raccroche

Quel est le degré d’autonomie dans la façon de traiter et de répondre aux appels (procédure très formalisée ou non)

Sur quoi se basent-ils pour répondre ? expérience personnelle, assistance informatique, documentation …

Formation

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• Soutiens

Assistance aux conseillers, formation des nouveaux conseillers, liens avec les chefs d’équipe

• Chefs d’équipe

5. Quelle est le rôle des TIC pour chaque fonction ? (soutiens et chefs d’équipe)

6. L’utilisation des TIC implique-t-elle des compétences particulières ? • Peut-on les développer ?

7. Selon vous, comment les individus réagissent-ils à l’utilisation des TIC ?

• En termes de satisfaction ? • En termes de motivation / implication au travail ? • Y a-t-il des craintes ? Sur quoi portent-elles ? (plus de contrôle, rapport à la technologie),

réticences • Augmentation de la charge de travail, accélération des cadences, épuisement au travail,

stress

8. Y a-t-il une évolution dans le contenu du travail ces dernières années ?

9. Comment les conseillers perçoivent–ils leur travail ? • Développement de carrière

Quelles mesures ou techniques mises en place ? (GPEC)

10. Les chefs d’équipe ont-ils une place particulière dans ce contexte ? • Modifications des missions ? • Modifications dans la manière de réaliser leur travail / mission ? • Dans quelle mesure ont-ils recours aux TIC ? • Comment ressentent-ils les évolutions de l'organisation du travail ? • Quelles compétences sont nécessaires ?

11. Comment France Télécom peut-il évaluer les performances du centre d’appel ?

• Au niveau du call center dans son ensemble Combien y a-t-il de call center assurant le même type de soutien en France ?

• Au niveau de chacune des équipes. Comment est gérée une éventuelle différence de performance entre équipes ?

• Au niveau des individus Critères d’évaluation : qualitatitif, quantitatif Par qui se fait l’évaluation : par le système informatique, chef d’équipe Quelles sont les conséquences de cette évaluation : rémunération

12. Comment la fonction RH vous accompagne-t-elle ?

• RH Groupe et RH de la Direction Régionale • Incitation • Soutien • Accompagnement • Partage/diffusion d’expériences

13. De manière générale, comment voyez-vous l’avenir du centre d’appel ?

• Développement de l’activité • Eventuelle prestation de services pour d’autres entreprise

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Méthodologie pour la suite de la recherche But général : avoir différents éclairages sur les liens entre TIC et travail chez FT. Présentation de la démarche que l’on pense adopter : entretien + questionnaire

Objectif : comprendre le contenu de ces nouveaux métiers, l’organisation générale du travail, l’interaction entre les TIC et les individus, comment les salariés ressentent leur travail • Entretien

Avec un échantillon de conseillers et de soutiens Avec un échantillon ou la totalité des chefs d’équipe

• Questionnaire JDS Soit en face-à-face à la suite de l’entretien, soit à l’ensemble des salariés

Questions : • Quelle période (fin juin – début juillet) • Comment établir un échantillon représentatif de l’ensemble ?

Quelles variables discriminantes ? Statut, âge, ancienneté, fonction exercée avant d’être dans le call center

• Quelle taille de l’échantillon (en fonction des contraintes pour ne pas perturber le fonctionnement du call center) ?

• Passage du JDS : possibilité de le faire passer à l’ensemble des salariés ou non ? Comment le distribuer ?

• Autres contraintes ? JDS : trouver méthode pour assurer le sentiment d’anonymat et de non passage par la voie hiérarchique

• Enveloppes timbrées à l’en-tête de l’IAE, ou • Double enveloppe, la première étant nominale (fichier du personnel) • Enveloppes dans une boîte à l’entrée

Faire passer le JDS au responsable du centre d’appel.

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ANNEXE 3 : GUIDE D'ENTRETIENS CHEFS D’EQUIPES / CENTRES

D’APPELS

Rappel du contexte de l'étude / présentation des chercheurs présents Thème de l'entretien

1. Quels ont été votre formation et votre parcours professionnel, au sein de FT et éventuellement avant d'intégrer FT ?

2. Qu’est-ce qui vous a amené à travailler sur la plate-forme ?

• Restructuration, disparition de services, offre d’emploi interne à FT à laquelle a postulé • Avez-vous été obligé de venir travailler ici ou auriez-vous pu aller ailleurs ?

Si possibilité d’aller ailleurs : Quelle motivation à venir travailler dans le centre d’appels ?

3. Etes-vous sous statut public ou sous statut privé ?

4. A quel grade ? (classification FT : grade 3.2. ?)

Contenu et organisation du travail

5. En quoi consiste votre travail ? (ce qu’il y a à faire) • Taille de l’équipe à gérer ? • Quelle est la personne qui est chargée de prévoir le nombre de conseillers qui doivent

travailler tel jour, les horaires de travail, etc. ? [analyste des flux chez Wanadoo] • en quoi consiste le management de votre équipe ?

Ecoutes : comment se font ? A quelle périodicité ? Comment se prend la décision du choix du conseiller qui va être écouté ? Combien de temps dure une écoute ?

Debriefing : Porte sur quels aspects ? Est-ce que toutes les écoutes sont suivies d’un debriefing ? En quoi consistent les remarques, les conseils ? Débouche sur des formations spécifiques pour les conseillers ?

Quelle est la réaction des conseillers ? • [Wanadoo : en quoi consiste le rôle de vigie ? Vous occupez ce poste tous les combien de

temps ?] • Quels sont les mots que vous pourriez utiliser pour décrire ce que vous attendez de vos

conseillers ? • De quelle manière évaluez-vous l’efficacité de votre équipe ? • Quels sont les principaux problèmes auxquels vous êtes confronté dans le management

de votre équipe ? • Quel est le domaine de votre travail où vous passez le plus de temps : administratif,

management de l’équipe (évaluation des compétences, motivation …), opérationnel en répondant à la place des conseillers ?

• Pensez-vous qu’il y ait une spécificité du management dans un centre d’appel par rapport à d’autres types de services ?

6. Quel est le rôle des TIC dans la réalisation de votre travail ?

• Quels types de TIC utilisez-vous, dans quel but ? • Les TIC vous servent-elles dans le management de votre équipe ? • Avez-vous des applications qui vous sont dédiées en propre (uniquement pour les chefs

d’équipe) ? • [Wanadoo : problème des 2 SI qui coexistent (FT et FTI) : Qu’est-ce que permettent ces 2

SI ? Si les SI n’ont pas de liens entre eux, quels sont les problèmes que cela engendre ?]

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• Concernant les process RH qui ont été mis sur l’intranet en lien avec les CSRH, est-ce

que c’est vous qui donnez l’autorisation pour les congés etc. ? Comment se passe concrètement ? Est-ce que ça fonctionne mieux maintenant sous forme informatisée qu’avec

l’ancien système ? Quels sont les avantages / inconvénients que vous y voyez ? En quoi la mise sur l’intranet des process RH modifie-t-elle votre travail ? (gain de

temps ?) • Finalement, est-ce que vous pourriez vous passer des TIC dans votre travail ?

7. Quelles sont les compétences qui sont nécessaires pour être chef d’équipe ?

• Formations spécifiques aux chefs d’équipe ? • Avez-vous désormais des compétences plus variées que lorsque vous occupiez votre

poste précédent ?

8. Quelles sont les attentes du responsable de plate-forme et des conseillers envers vous ?

9. Avez-vous des critères de performance à respecter ? • Quanti / quali • Sont fixés par qui ? • Comment fait le responsable de plate-forme pour vous évaluer ? • Quelles sont les conséquences de l’évaluation ? • Est-ce que vous évalueriez votre travail de la même manière ?

10. Etes-vous libre dans la manière d’organiser votre travail ?

• Y a-t-il des procédures codifiées que vous devez suivre pour réaliser votre travail ? • Les différents aspects de votre travail sont-ils clairement définis, ou avez-vous la

possibilité de "créer" votre travail ? • Devez-vous souvent interrompre votre travail parce que vous avez des choses urgentes à

régler ? • Est-ce que les communications représentent une part importante de votre temps de

travail ? (avec les conseillers, les autres chefs d’équipe, les responsable de plate-forme) • Que pensez-vous du rythme de travail qui caractérise votre poste ?

11. Votre travail a-t-il évolué depuis votre arrivée sur la plate-forme ?

Conditions de travail

12. Au niveau du temps de travail : • Nombre d’heures de travail par semaine ? • Sur quelle plage horaire s’étalent vos journées ? (début de matinée, heure de midi,

soirées) • Est-ce qu’il vous arrive de travailler les dimanche et jours fériés ? • Vos horaires de travail sont-ils identiques toutes les semaines ?

Si non : Varient tous les combien de temps ? Les horaires sont connus combien de semaine à l’avance ?

• Ces conditions concernant votre temps de travail sont-elles les mêmes que celles de votre poste précédent ?

• De leur côté, comment les conseillers réagissent-ils à leurs horaires de travail ?

13. Concernant votre environnement de travail, votre espace de travail est-il le même que celui des conseillers ? • Votre bureau ou votre espace de travail est-il situé dans le même local que ceux de votre

équipe ? • Est-ce que le type d’implantation des postes de travail qui est ici a des aspects négatifs ?

(volume sonore)

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14. Et en ce qui concerne les relations de travail entre les individus, comment les qualifieriez-

vous ? • Informelles / formelles • Entre conseillers / entre vous et les membres de votre équipe / entre vous et les autres

chefs d’équipe • Est-ce que ce type de relations de travail est spécifique au centre d’appel ou identique à

ce qui se passe ailleurs ? (services en contact avec le client ?) Satisfaction

15. Trouvez-vous votre travail intéressant ?

16. Quels sont les aspects de votre travail qui vous semblent les plus importants ?

17. Pensez-vous qu’il y ait des choses qui pourraient changer et vous permettre de faire votre travail plus facilement ou plus efficacement ?

18. Quels sentiments éprouvez-vous quant à l’utilisation des TIC ? (valorisation, crainte,

dépendance …) Pratiques de GRH

19. Comment s’est fait votre recrutement ? [= question du début]

20. Y a-t-il une formation particulière pour les chefs d’équipe quand ils arrivent sur la plate-forme ? [abordé dans question compétences] • Quels thèmes abordés ? : technique, management … • Formation continue ?

21. La rémunération des chefs d’équipe est-elle indexée sur le grade, ou y a-t-il une prise en

compte de la performance individuelle ? Ou de la performance de l’équipe ? • Si partie variable : même situation pour toutes les personnes au même grade chez FT ?

22. En ce qui concerne la progression de carrière, quelles sont les perspectives qui vous sont

offertes ? • Progression en interne au centre d’appel ? • Progression en externe ? • Est-ce que les compétences que vous avez acquises durant la période passée dans le

centre d’appel sont connues et valorisées dans les autres entités de FT ?

23. Y a-t-il quelque chose qui vous semble important dans votre travail et que l’on n’a pas abordé jusqu’à maintenant ?

24. Avez-vous l’impression globalement que les personnes qui travaillent dans les centres

d’appels sont considérées et traitées différemment des autres par FT ?

25. Pour finir, comment voyez-vous votre travail dans les mois ou les années à venir ?

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ANNEXE 4 : GUIDE D’ENTRETIEN TELE-CONSEILLERS / OPERATEURS / CENTRES D’APPEL

• Rappel du contexte de l'étude / présentation des chercheurs présents • Thème de l'entretien 1. Depuis combien de temps travaillez-vous ici ?

Quels ont été votre formation et votre parcours professionnel, au sein de FT et éventuellement avant d'intégrer FT ?

2. Qu’est-ce qui vous a amené à travailler sur la plate-forme ?

• Restructuration, disparition de services, offre d’emploi interne à FT à laquelle a postulé • C'est vous qui avez choisi de venir travailler ici ? Ou bien vous y avez été incité ?

Comment avez-vous été informé de l'existence de ce poste ? Si possibilité d’aller ailleurs : Quelle motivation à venir travailler dans le centre

d’appels ? 3. Vous êtes sous statut France Telecom (ou contractuel) ? 4. A quel grade ? (classification FT : grade 3.2. ?) Contenu et organisation du travail 5. En quoi consiste votre travail ?

• description des missions • décrivez une séquence-type de travail • degré de répétitivité / variété —> polyvalence ?

6. Votre travail est-il contrôlé ? Comment ?

Ecoutes : comment se font-elles ? A quelle périodicité ? Debriefing : Porte sur quels aspects ? Est-ce que toutes les écoutes sont suivies

d’un debriefing ? Avez-vous le sentiment d'être surveillé dans l'exécution de votre travail ?

7. Quels sont les principaux problèmes auxquels vous êtes confronté votre travail ? 8. Quels outils informatiques utilisez-vous dans le cadre de votre travail et dans quels buts ?

• Utilisez-vous l'Intranet et les outils de GRH disponibles (gestion du temps de travail notamment, intéressement et participation…) ?

Comment cela se passe ? Est-ce que ça fonctionne mieux maintenant sous forme informatisée qu’avec

l’ancien système ? Quels sont les avantages / inconvénients que vous y voyez ?

• Finalement, qu'est-ce que l'outil informatique apporte à votre travail ?

9. Avez-vous des objectifs précis à respecter ? De quels types ?

• Quanti / quali ? nombre d'appels ? satisfaction clients ? • Sont fixés par qui ? • Comment fait le chef d'équipe pour vous évaluer ? • Est-ce que les critères d'évaluation de votre travail vous semblent pertinents ? Et pour vos

collègues ?

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10. Qu'attendez-vous de votre chef d'équipe ? 11. Décidez-vous même de la manière dont vous organisez votre travail ?

• Y a-t-il des procédures codifiées que vous devez suivre pour réaliser votre travail ? • Les différents aspects de votre travail sont-ils clairement définis, ou avez-vous la

possibilité de "créer" votre travail ? • Devez-vous souvent interrompre votre travail parce que vous avez des choses urgentes à

régler ? Conditions de travail 12. Comment s'organise votre emploi du temps ?

• Nombre d’heures de travail par semaine ? Temps de trajet ? • Sur quelle plage horaire s’étalent vos journées ? (début de matinée, heure de midi,

soirées) • Est-ce qu’il vous arrive de travailler les dimanche et jours fériés ? • Vos horaires de travail sont-ils identiques toutes les semaines ?

Si non : Varient tous les combien de temps ? Les horaires sont connus combien de semaine à l’avance ?

• Et c'est vous qui avez fait ce choix ou on vous l'a "suggéré" ? 13. Ces conditions concernant votre temps de travail sont-elles les mêmes que celles de votre poste précédent ? 14. Où travaillez-vous habituellement ? Avez-vous un poste de travail fixe (ou un bureau virtuel fixe)? Comment cela se passe-t-il ?

• Aspects positifs et négatifs (locaux adaptés au travail réalisé ?) • Votre poste de travail est-il bien agencé ? • Matériel adapté ? Logiciels bien conçus ? Quels défauts avez-vous relevés ?

15. Pouvez-vous nous parler de l'ambiance de travail ici ?

• Relations informelles / formelles, sur le lieu de travail / hors travail • Connaissez-vous tout le monde ? Les derniers arrivants ? • Entre collègues ? / avec votre chef d'équipe ? / responsable de plate forme ? • Est-ce que ce type de relations de travail est spécifique au centre d’appel ou identique à

ce qui se passe ailleurs ? (services en contact avec le client ?) Pourquoi ? Pratiques de GRH 17. Comment s'est passée la période d'intégration dans la plate-forme (tuteurs, superviseurs,…) ? 18. Avez-vous suivi des formations depuis que vous êtes ici ?

• sur quels thèmes ? • à quelle occasion ? • est-ce que cela été utile pour votre travail ? • spécifique pour le centre d'appel ?

19. Quelle est la part variable dans votre salaire ? • primes individuelles ou collectives ? • cela vous satisfait-il ? 20. Comment votre travail est valorisé au sein de l'entreprise ? • opinion des autres salariés

• reconnaissance en termes de salaire, promotions, évolution professionnelle,…

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 186

21. En ce qui concerne la progression de carrière, quelles sont les perspectives qui vous sont

offertes ? • Progression en interne au centre d’appel ? • Progression en externe ? • Est-ce que les compétences que vous avez acquises durant la période passée dans le

centre d’appel sont connues et valorisées dans les autres entités de FT ? 22. Y a-t-il une beaucoup de mouvements au sein de l'unité ?

• mobilité incitée / choisie ? • qu'en pensez-vous ?

Satisfaction 23. Quels sont les aspects de votre travail qui vous semblent les plus importants ? 24. Quelles sont les principales sources d'intérêt dans votre travail ? 25. Qu'est-ce qui vous motive au travail ? 26. Avez-vous parfois l'impression de ne pas avoir pu effectuer votre travail dans les meilleures

conditions ? • faute de temps ? • incapacité de répondre à la demande ? • agressions verbales des clients ?

27. Quels points souhaiteriez-vous améliorer dans votre travail ? 28. Votre travail a-t-il évolué depuis votre arrivée sur la plate-forme ? 29. Avez-vous l’impression globalement que les personnes qui travaillent dans les centres d’appels

sont considérées et traitées différemment des autres par FT ? 30. Pour finir, comment voyez-vous votre évolution dans les mois ou les années à venir ? (par

exemple souhaiteriez-vous changer d'emploi ?)

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ANNEXE 5 : LE JOB DIAGNOSTIC SURVEY (JDS) (version française adaptée par Mottay D., 1999)

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 188

ENQUETE SUR LES CARACTERISTIQUES DU TRAVAIL :

Enquête couverte par le secret statistique. Questionnaire confidentiel, facultatif. La loi n°78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'information, aux fichiers et aux libertés, garantit aux individus un droit d'accès et de rectification sur les informations les concernant. Ce questionnaire a été développé dans le but d'étudier les emplois et la façon dont les gens y réagissent. Cette étude est réalisée par l'équipe de recherche du GREFIGE de l'IAE de Nancy . Dans les pages suivantes vous allez trouver différents types de questions concernant votre travail. Des instructions spécifiques sont données au début de chaque section. Veuillez les lire attentivement. Le remplissage du questionnaire ne doit pas vous prendre plus de 10 minutes. Veuillez donc le remplir rapidement. Les questions sont conçues de façon à obtenir vos perceptions sur votre travail et vos réactions à celui-ci. L'analyse précise de ces perceptions, nécessite l'emploi de questions qui peuvent vous paraître redondantes. Nous vous demandons de bien vouloir participer à cette enquête pour laquelle nous garantissons

l'anonymat de vos réponses. Par avance, veuillez bien accepter nos plus sincères remerciements.

Coordinateur de l'enquête : GREFIGE Pôle Lorrain Gestion

13, rue Michel Ney CO 75 54037 Nancy.

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 189

Enquête couverte par le secret statistique. Questionnaire confidentiel, facultatif. La loi n°78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'information, aux fichiers et aux libertés, garantit aux individus un droit d'accès et de rectification sur les informations les concernant. Cochez les cases correspondant à vos réponses ou écrivez dans les espaces réservés. Chaque information est indispensable pour les traitements statistiques. RENSEIGNEMENTS D'ORDRE GENERAL Sexe : Masculin Féminin Année de naissance : 19 |__|__| IDENTIFIANT ANONYME Veuillez inscrire la première lettre du prénom de votre mère suivie des quatre premières

lettres de son nom de naissance : VOTRE EMPLOI Fonction actuelle : ____________________________________________ Ancienneté dans l'organisation: ________________________ Ancienneté dans la fonction: ______________________________________ Ressentez-vous un changement dans le contenu de votre travail depuis votre arrivée dans ce poste ? OUI NON Travaillez-vous face à un écran ? OUI NON Si oui est-il connecté au réseau intranet (interne France Telecom) ? : OUI NON Utilisez-vous souvent l’intranet dans votre travail ? : OUI NON

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 190

-Section 1-

Un certain nombre d'énoncés sont présentés ci-dessous. Ils peuvent être utilisés pour décrire un travail. Vous devez indiquer si chaque énoncé permet une description exacte ou inexacte de votre travail. Essayez d'être aussi objectif que possible dans votre réponse - sans tenir compte de votre appréciation personnelle sur votre travail. Ecrivez un nombre dans l'espace réservé à coté de chaque énoncé, en vous basant sur l'échelle suivante.

Dans quelle mesure l'énoncé suivant décrit-il correctement votre travail?

Très mal Mal Assez mal Indécis Assez Bien Bien Très Bien 1 2 3 4 5 6 7

1. Le travail fait appel à beaucoup de savoir-faire complexes ou de hauts niveaux.

2. L'organisation du travail est telle qu'il m'est possible d'effectuer un travail complet du début à la fin.

3. Le travail me permet de décider du déroulement successif de mes tâches

4. Le travail consiste à réaliser une tâche complète avec un début et une fin évidente.

5. Le travail nécessite la réalisation de tâches variées faisant appel à de nombreux talents.

6. La nature de mon travail me permet de savoir immédiatement si je l'ai bien réalisé.

7. Les conséquences de ce travail peuvent avoir des effets importants sur le bien-être ou l'existence

d'autrui.

8. Le travail me donne beaucoup d'occasions d'évaluer la qualité de ma prestation.

9. Le travail requiert de ma part des compétences nombreuses et complexes.

10. C'est un travail qui peut avoir des répercussions sur un grand nombre de personnes.

11. Le travail fait souvent appel à mon initiative et à mon jugement personnel.

12. Le travail me donne la possibilité de terminer une tâche commencée.

13. Lorsque j'ai fini un travail, je sais si je l'ai bien fait.

14. Le travail me laisse beaucoup de liberté et d'indépendance dans la façon de le traiter.

15. Le résultat du travail est généralement intéressant et important pour les autres.

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-Section 2-

Maintenant veuillez indiquer combien vous êtes satisfait de chacun des aspects de votre emploi présentés ci-dessous.

Ecrivez un nombre dans l'espace réservé à coté de chaque énoncé, en vous basant sur l'échelle suivante.

Comment appréciez vous cet aspect de votre travail?

Très insatisfait

Insatisfait Plutôt insatisfait

Indécis Plutôt satisfait Satisfait Très satisfait

1 2 3 4 5 6 7

1. Le degré de sécurité de l'emploi.

2. Le niveau de rémunération (salaire et avantages divers confondus).

3. Le progrès et le développement personnel que je retire de mon travail.

4. L'équité et le respect manifestés par mon supérieur.

5. Le sentiment d'épanouissement personnel que j'éprouve dans mon travail.

6. L'aide et les conseils prodigués par mon supérieur.

7. L'équité de mon salaire au regard de ma contribution à l'entreprise.

8. L'indépendance de réflexion et d'action que je peux exercer dans mon travail.

9 La perspective d'un avenir sûr dans l'entreprise.

10. L'ampleur du défi que représente mon travail.

11. La qualité de mon encadrement.

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-Section 3-

Maintenant veuillez penser aux autres personnes dans votre organisation qui exercent le même travail que vous. Si personne ne fait exactement le même travail que vous, pensez au travail qui se rapproche le plus du vôtre. Quel est votre avis sur chacun des énoncés suivants qui décrivent les sentiments de ces personnes sur leur travail. Ce n'est pas grave si vos réponses diffèrent de celles que vous avez indiquées concernant vos propres réactions au travail. Souvent des personnes différentes n'ont pas la même perception du même travail. Encore une fois inscrivez le nombre approprié dans l'espace réservé à coté de chaque énoncé.

Quel est votre degré d'accord avec la formulation?

Désaccord total

Désaccord Plutôt en désaccord

Indécis Plutôt d'accord

D'accord Accord total

1 2 3 4 5 6 7 Parmi les collègues qui font un travail similaire au votre:

1. La plupart des personnes affectées à ce travail éprouvent un sentiment de grande satisfaction

personnelle lorsqu'elles s'en acquittent bien.

2. La plupart des personnes affectées à ce travail en sont très satisfaites.

3. La plupart des personnes affectées à ce travail le trouvent inutile ou dérisoire.

4. La plupart des personnes affectées à ce travail sont très sensibles à la responsabilité personnelle

attachée au travail qu'elles accomplissent.

5. La plupart des personnes affectées à ce travail ont une assez bonne idée de la qualité de leur travail.

6. La plupart des personnes attachées à ce travail pensent que ce qu'elles font a un sens.

7. La plupart des personnes affectées à ce travail pensent que sa bonne ou mauvaise exécution relève

clairement de leur responsabilité.

8. Les personnes affectées à ce travail pensent souvent démissionner.

9. La plupart des personnes affectées à ce travail sont contrariées quand elles trouvent qu'elles l'ont

mal exécuté.

10. La plupart des personnes affectées à ce travail se rendent compte si elles le font correctement.

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ANNEXE 6 : GUIDE D'ENTRETIENS RESPONSABLES CENTRES DE

SERVICES RESSOURCES HUMAINES (CSRH)

Rappel du contexte de l'étude / présentation des chercheurs présents Thème de l'entretien

1. Quel a été votre parcours au sein de FT et éventuellement avant d'intégrer FT ?

2. En quoi consiste votre mission actuelle ?

3. Pouvez-vous nous décrire le fonctionnement du CSRH ? • En termes d’organisation

Nombre d’équipes, de personnes dans chaque équipe Composition de l’équipe (les différents métiers) Comment est réparti le travail entre les membres de l’équipe ?

Cadences Comment se gère le temps de travail : pauses, horaires, jours travaillés (WE),

congés • En termes de mission

Par qui étaient assurées ces missions avant la création des CSRH ? Comment la répartition entre ce qui est fait dans le CSRH et ce qui est fait

ailleurs (DRH Région, RRH, managers) est-elle décidée ? Plusieurs étapes ? Qu’est-ce qui restera à terme fait au niveau de la DRH Région ? Au

niveau des managers ? D’où arrivent et sous quelle forme (papier, informatique) arrivent les

informations dont le CSRH fait le traitement administratif ? Mission conseil / centre d’appel RH :

Type de questions posées : règles RH, aide à la décision … ? Y a-t-il des spécificités liées au fait que les personnes qui appellent sont

des salariés FT ? Relation plus simple ? Plus exigeante ?

Quelles sont les attentes des personnes qui appellent ? Qualité de la réponse : réponse efficace, rapidité, qualité du contact

avec le conseiller, etc. • En termes de personnel

Statut, âge, parcours professionnel Comment se fait le recrutement ? Sur quels critères ? Reclassement interne à FT Comment se fait la montée en compétences ?

4. En quoi consiste le travail de chaque fonction ?

• Membres de l’équipe de gestion Comment la répartition du travail entre le traitement administratif et le conseil est-

elle organisée ? Dans le temps (plages horaires / journées spécifiques ?) Dans l’espace (même poste de travail ?)

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Schématiquement, tout ce qui se passe entre le moment où il décroche et celui

où il raccroche Quel est le degré d’autonomie dans la façon de traiter et de répondre

aux appels (procédure très formalisée ou non) Sur quoi se basent-ils pour répondre ? expérience personnelle,

assistance informatique, documentation … Formation

• Soutiens ? Assistance aux conseillers, formation des nouveaux conseillers, liens avec les

chefs d’équipe • Chefs d’équipe

En quoi consiste le management de leur équipe ? Organisation du travail de l’équipe / suivi de la performance Information / communication sur la stratégie FT Rôle technique ? Assistance aux membres de l’équipe de gestion ?

5. Quel est le rôle des NTIC pour chaque fonction ? 6. L’utilisation des NTIC implique-t-elle des compétences particulières ?

• Peut-on les développer ? 7. Selon vous, comment les individus réagissent-ils à l’utilisation des TIC ?

• En termes de satisfaction ? • En termes de motivation / implication au travail ? • Y a-t-il des craintes ? Sur quoi portent-elles ? (plus de contrôle, rapport à la technologie),

réticences • Augmentation de la charge de travail, accélération des cadences, épuisement au travail,

stress 8. Y a-t-il une évolution dans le contenu du travail depuis l’ouverture du CSRH ? 9. Comment les conseillers perçoivent–ils leur travail ?

• Réaction par rapport au fait d’avoir deux activités différentes ? • Développement de carrière

Quelles mesures ou techniques mises en place ? (GPEC) 10. Les chefs d’équipe ont-ils une place particulière dans ce contexte ?

• Modifications des missions ? • Modifications dans la manière de réaliser leur travail / mission ? • Dans quelle mesure ont-ils recours aux TIC ? • Comment ressentent-ils les évolutions de l'organisation du travail ? • Quelles compétences sont nécessaires ?

11. Comment France Télécom fait-elle pour évaluer les performances du CSRH ? • Au niveau du CSRHdans son ensemble

Combien y a-t-il de call center assurant le même type de soutien en France ? • Au niveau de chacune des équipes.

Comment est gérée une éventuelle différence de performance entre équipes ? • Au niveau des individus

Critères d’évaluation : qualitatitif, quantitatif Par qui se fait l’évaluation : par le système informatique, chef d’équipe Quelles sont les conséquences de cette évaluation : rémunération

12. Comment l’entreprise / la fonction RH vous accompagne-t-elle ? • RH Groupe et RH de la Direction Régionale • Incitation • Soutien • Accompagnement • Partage/diffusion d’expériences

13. De manière générale, comment voyez-vous l’avenir du CSRH ?

• Développement de l’activité • Eventuelle prestation de services pour d’autres entreprises

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ANNEXE 7 : GUIDE D'ENTRETIENS RESPONSABLES D’EQUIPES (CSRH)

Rappel du contexte de l'étude / présentation des chercheurs présents Thème de l'entretien

1. Depuis combien de temps travaillez-vous ici ?

2. Quels ont été votre formation et votre parcours professionnel, au sein de FT et éventuellement avant d'intégrer FT ?

3. Qu’est-ce qui vous a amené à travailler au CSRH ?

• Restructuration, disparition de services, offre d’emploi interne à FT à laquelle a postulé • C'est vous qui avez choisi de venir travailler ici ? Ou bien vous y avez été incité ?

Comment avez-vous été informé de l'existence de ce poste ? Si possibilité d’aller ailleurs : Quelle motivation à venir travailler dans le CSRH ?

4. Vous êtes sous statut France Telecom (ou contractuel) ?

5. A quel grade ? (classification FT : grade 3.2. ?)

Conditions de travail

6. Comment s'organise votre emploi du temps ? • Nombre d’heures de travail par semaine ? • Sur quelle plage horaire s’étalent vos journées ? (début de matinée, heure de midi,

soirées) • Est-ce qu’il vous arrive de travailler les dimanche et jours fériés ? • Vos horaires de travail sont-ils identiques toutes les semaines ?

Si non : Varient tous les combien de temps ? Les horaires sont connus combien de semaine à l’avance ?

7. Comment les emplois du temps de chacun sont coordonnés au sein de l'équipe ?

8. Et les temps de travail sont choisis ? imposés ? décidés par concertation ?

9. Ces conditions concernant votre temps de travail sont-elles les mêmes que celles de votre

poste précédent ? • De leur côté, comment les assistants de gestion réagissent-ils à leurs horaires de travail ?

10. Où travaillez-vous habituellement ? Avez-vous un poste de travail fixe ? Où se situe-t-il par

rapport à ceux des assistants de gestion ? • Aspects positifs et négatifs • Notamment, possibilité de contrôler le travail des conseillers ?

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11. Quelle est l'ambiance de travail ici ?

• Relations informelles / formelles • Entre assistants de gestion / entre vous et les membres de votre équipe / entre vous et les

autres responsables d’équipe • Est-ce que ce type de relations de travail est spécifique au CSRH ? • Y a-t-il des syndicats ? Y a-t-il beaucoup de conflits ? Sur quoi portent-ils ? Comment se

passent les relations sociales au sein de la plate forme ? Est-ce spécifique au CSRH (par rapport expériences précédentes) ?

12. Comment les assistants de gestion réagissent-ils au fait d’avoir deux activités différentes, la

gestion administrative et l’assistance téléphonique ?

Contenu et organisation du travail

13. En quoi consiste votre travail ? (ce qu’il y a à faire) • Avez-vous un rôle technique ? (aide aux membres de l’équipe, traitement de dossiers

…) ? Qu’en pensez-vous ? Qu’en pensent les assistants de gestion ?

• Taille de l’équipe à gérer ? • Quelle est la personne qui est chargée de prévoir le nombre de conseillers qui doivent

travailler tel jour, les horaires de travail, etc. ? [analyste des flux chez Wanadoo] • Comment est organisé le travail au sein de l'équipe ? (gestion administrative / assistance

téléphonique) • En quoi consiste le management de votre équipe ?

Ecoutes ? comment se font ? A quelle périodicité ? Comment se prend la décision du choix du conseiller qui va être écouté ? Combien de temps dure une écoute ?

Debriefing : Porte sur quels aspects ? Est-ce que toutes les écoutes sont suivies d’un debriefing ? En quoi consistent les remarques, les conseils ? Débouche sur des formations spécifiques pour les conseillers ?

Quelle est la réaction des conseillers ? • En quoi consistent les réunions d’équipe ? • Quels sont les mots que vous pourriez utiliser pour décrire ce que vous attendez de vos

conseillers ? • De quelle manière évaluez-vous l’efficacité de votre équipe ? • Quel est le domaine de votre travail où vous passez le plus de temps : administratif,

management de l’équipe (évaluation des compétences, motivation …), opérationnel en répondant à la place des conseillers ?

• Quels sont les principaux problèmes auxquels vous êtes confronté dans le management de votre équipe ?

• Pensez-vous qu’il y ait une spécificité du management dans un CSRH par rapport à d’autres types de services ?

14. Quels outils informatiques utilisez-vous dans le cadre de votre travail et dans quels buts ?

• Ces outils vous servent-ils dans le management de votre équipe ? • Avez-vous des applications qui sont spécifiques aux responsables d’équipe ? • Concernant les process RH qui ont été mis sur l’intranet en lien avec les CSRH, est-ce

que c’est vous qui donnez l’autorisation pour les congés etc. ? Comment cela se passe concrètement ? Est-ce que ça fonctionne mieux maintenant sous forme informatisée qu’avec

l’ancien système ? Quels sont les avantages / inconvénients que vous y voyez ? En quoi la mise sur l’intranet des process RH modifie-t-elle votre travail ? (gain de

temps ?) • Finalement, en quoi les NTIC ont-elles modifié votre travail ? Et quels en sont les

principaux apports et limites selon vous ?

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15. Quelles sont, selon vous, les compétences qui sont nécessaires pour être responsable

d’équipe ? • Vous avez suivi des formations spécifiques ? En existe-t-il ? • Est-ce que c'est sensiblement différent de ce que vous faisiez avant ? Pourquoi ?

16. Quelles sont les attentes du directeur du CSRH envers vous ?

17. Avez-vous des objectifs précis à respecter ? De quels types ?

• Quanti / quali • Sont fixés par qui ? • Comment fait le responsable de plate-forme pour vous évaluer ? • Quelles sont les conséquences de l’évaluation ? • Est-ce que vous évalueriez votre travail de la même manière ?

18. Quelles sont selon vous les attentes des assistants de gestion vis-à-vis de leur chef

d'équipe ?

19. Vous décidez-vous même de la manière dont vous organisez votre travail ? • Y a-t-il des procédures codifiées que vous devez suivre pour réaliser votre travail ? • Les différents aspects de votre travail sont-ils clairement définis, ou avez-vous la

possibilité de "créer" votre travail ? • Devez-vous souvent interrompre votre travail parce que vous avez des choses urgentes à

régler ? • Est-ce que les communications représentent une part importante de votre temps de

travail ? (avec les assistants de gestion, les autres chefs d’équipe, les responsables de plate-forme)

• Qu'en pensez-vous ?

Pratiques de GRH

20. Comment se passe le "recrutement"/affectation des personnes qui travaillent ici? (choix ? mutations internes ? affectation "d'office" ?) • Pour les responsables d'équipe ? • Pour les conseillers • Intervenez-vous dans la procédure et le choix des personnes ?

21. Dans quelle mesure ces procédures sont-elles spécifiques au CSRH ?

22. Comment évaluez-vous vos assistants de gestion ?

• Avec quel outil (entretien individuel, etc.) ? • Quels sont les critères d'évaluation ? • Comment sont utilisés les résultats de l'évaluation (gestion de carrière, rémunération, etc.) • A cette occasion, vous recensez les besoins de formation ?

23. Y a-t-il une politique de formation (thèmes, formation continue…)

• Pour les responsables d’équipe • Pour les assistants de gestion • Est-ce spécifique au CSRH ?

24. Comment sont fixées les rémunérations ?

• Partie fixe / partie variable ? selon quelles proportions ? • Sur quels critères ? (indice, ancienneté, qualification, compétences, mérite, performance

de l'équipe, satisfaction clients…) - pour vous ? - pour les conseillers ?

• Comment pouvez-vous agir sur la part variable ?

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25. En ce qui concerne la progression de carrière, quelles sont les perspectives qui vous sont

offertes ? (pour les responsables d'équipe / pour les assistants de gestion) • Progression en interne au CSRH ? • Progression en externe ? • Est-ce que les compétences que vous avez acquises durant la période passée dans le

centre d’appel sont connues et valorisées dans les autres entités de FT ? • Comment la décision se prend ? Intervenez-vous dans la décision ? • Comment une expérience dans un CSRH est-elle valorisée dans un parcours de carrière

chez FT ? Pourquoi ?

26. Y a-t-il une forte mobilité au sein de la plate-forme ? • Mobilité incitée / choisie ? • Quel rythme moyen de mobilité ? • Comment gérez-vous cette mobilité ? • Et les responsables d'équipe en général ?

Satisfaction

27. Quels sont les aspects de votre travail qui vous semblent les plus importants ?

28. Quelles sont les principales sources d'intérêt dans votre travail ?

29. Qu'est-ce qui vous motive au travail ?

30. Quels points souhaiteriez-vous améliorer dans votre travail ?

31. Votre travail a-t-il évolué depuis votre arrivée au CSRH ?

32. Avez-vous l’impression globalement que les personnes qui travaillent dans les CSRH sont considérées et traitées différemment des autres par FT ?

33. Pour finir, comment voyez-vous votre évolution dans les mois ou les années à venir ?

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ANNEXE 8 : GUIDE D'ENTRETIENS ASSISTANTES DE GESTION

(CSRH) Rappel du contexte de l'étude / présentation des chercheurs présents Thème de l'entretien 1. Depuis combien de temps travaillez-vous ici ? 2. Quels ont été votre formation et votre parcours professionnel, au sein de FT et éventuellement

avant d'intégrer FT ? 3. Qu’est-ce qui vous a amené à travailler au CSRH ?

• Restructuration, disparition de services, offre d’emploi interne à FT à laquelle a postulé • C'est vous qui avez choisi de venir travailler ici ? Ou bien vous y avez été incité ?

Comment avez-vous été informé de l'existence de ce poste ? Si possibilité d’aller ailleurs : Quelle motivation à venir travailler dans le CSRH ?

4. Vous êtes sous statut France Telecom (ou contractuel) ? 5. A quel grade ? (classification FT : grade 3.2. ?)

Contenu et organisation du travail 6. En quoi consiste votre travail ? [mêmes relances pour gestion administrative et assistance

téléphonique] • Description des missions • Décrivez une séquence-type de travail • Degré de répétitivité / variété —> polyvalence ?

7. Votre travail est-il contrôlé ? Comment ? [gestion ad. et assist. téléphonique]

• Ecoutes : comment se font-elles ? A quelle périodicité ? • Debriefing : Porte sur quels aspects ? Est-ce que toutes les écoutes sont suivies d’un

debriefing ? • Avez-vous le sentiment d'être surveillé dans l'exécution de votre travail ?

8. Quels sont les principaux problèmes auxquels vous êtes confronté votre travail ? 9. Quels outils informatiques utilisez-vous dans le cadre de votre travail et dans quels buts ?

• Alliance (SIRH) : fonctionne bien ou est handicapant ? • Utilisez-vous l'Intranet et les outils de GRH disponibles (gestion du temps de travail

notamment, intéressement et participation…) ? Comment cela se passe ? Est-ce que ça fonctionne mieux maintenant sous forme informatisée qu’avec

l’ancien système ? Quels sont les avantages / inconvénients que vous y voyez ?

• Finalement, qu'est-ce que l'outil informatique apporte à votre travail ?

10. Avez-vous des objectifs précis à respecter ? De quels types ? [gestion ad. et assist. téléphonique]

• Quanti / quali ? nombre d'appels ? satisfaction clients ? • Sont fixés par qui ? • Comment fait le chef d'équipe pour vous évaluer ?

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 200

• Est-ce que les critères d'évaluation de votre travail vous semblent pertinents ? Et pour vos collègues ?

11. Qu'attendez-vous de votre chef d'équipe ?

• Rôle technique (soutien) ? • Le chef d’équipe a-t-il plus de connaissances techniques que vous ? • En quoi consistent les réunions d’équipe ?

12. Décidez-vous même de la manière dont vous organisez votre travail ?

• Y a-t-il des procédures codifiées que vous devez suivre pour réaliser votre travail ? • Les différents aspects de votre travail sont-ils clairement définis, ou avez-vous la

possibilité de "créer" votre travail ? • Devez-vous souvent interrompre votre travail parce que vous avez des choses urgentes à

régler ? 13. Que pensez-vous du fait d’avoir deux activités distinctes à réaliser dans votre travail ?

Conditions de travail 14. Comment s'organise votre emploi du temps ?

• Nombre d’heures de travail par semaine ? Temps de trajet ? • Sur quelle plage horaire s’étalent vos journées ? (début de matinée, heure de midi,

soirées) • Est-ce qu’il vous arrive de travailler les dimanche et jours fériés ? • Vos horaires de travail sont-ils identiques toutes les semaines ?

Si non : Varient tous les combien de temps ? Les horaires sont connus combien de semaine à l’avance ?

• Et c'est vous qui avez fait ce choix ou on vous l'a "suggéré" ? • Comment est faite la répartition du temps entre la gestion administrative et l’assistance

téléphonique ? 15. Ces conditions concernant votre temps de travail sont-elles les mêmes que celles de votre poste

précédent ? 16. Où travaillez-vous habituellement ? Avez-vous un poste de travail fixe (ou un bureau virtuel fixe)?

Comment cela se passe-t-il ? • Aspects positifs et négatifs (locaux adaptés au travail réalisé ?) • Votre poste de travail est-il bien agencé ? • Matériel adapté ? Logiciels bien conçus ? Quels défauts avez-vous relevés ?

17. Pouvez-vous nous parler de l'ambiance de travail ici ?

• Relations informelles / formelles, sur le lieu de travail / hors travail • Connaissez-vous tout le monde ? Les derniers arrivants ? • Entre collègues ? / avec votre chef d'équipe ? / responsable de plate forme ? • Est-ce que ce type de relations de travail est spécifique au CSRH ou identique à ce qui se

passe ailleurs ?

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 201

Pratiques de GRH 17. Comment s'est passée la période d'intégration dans la plate-forme (tuteurs, superviseurs,…) ? 18. Avez-vous suivi des formations depuis que vous êtes ici ?

• Sur quels thèmes ? • A quelle occasion ? • Est-ce que cela été utile pour votre travail ? • Spécifique pour le CSRH ?

19. Quelle est la part variable dans votre salaire ? • primes individuelles ou collectives ? • cela vous satisfait-il ? 20. Comment votre travail est valorisé au sein de l'entreprise ? • opinion des autres salariés

• reconnaissance en termes de salaire, promotions, évolution professionnelle,… 31. En ce qui concerne la progression de carrière, quelles sont les perspectives qui vous sont

offertes ? • Progression en interne au CSRH ? • Progression en externe ? • Est-ce que les compétences que vous avez acquises durant la période passée dans le

centre d’appel sont connues et valorisées dans les autres entités de FT ? 32. Y a-t-il une beaucoup de mouvements au sein de l'unité ?

• mobilité incitée / choisie ? • qu'en pensez-vous ?

Satisfaction 33. Quels sont les aspects de votre travail qui vous semblent les plus importants ? 34. Quelles sont les principales sources d'intérêt dans votre travail ? 35. Qu'est-ce qui vous motive au travail ? 36. Avez-vous parfois l'impression de ne pas avoir pu effectuer votre travail dans les meilleures

conditions ? • faute de temps ? • incapacité de répondre à la demande ? • agressions verbales des clients ?

37. Quels points souhaiteriez-vous améliorer dans votre travail ? 38. Votre travail a-t-il évolué depuis votre arrivée sur le CSRH ? 39. Avez-vous l’impression globalement que les personnes qui travaillent dans les CSRH sont

considérées et traitées différemment des autres par FT ? 40. Pour finir, comment voyez-vous votre évolution dans les mois ou les années à venir ? (par

exemple souhaiteriez-vous changer d'emploi ?)

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 202

ANNEXE 9 : GRILLES D’ANALYSE DES ENTRETIENS EXPLORATOIRES

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003)

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Direction des Ressources Humaines Groupe

Collaboratrice de Bernard Merck, en charge du reengineering de la fonction RH Contexte - Constat : trop de personnes dans la fonction RH font de la gestion administrative

Transformations actuelles

- Reengineering de la fonction RH via le recours aux TI lancé en 1999 ⇒ Mise en place de 10 CSRH ⇒ Manager 1er RH - Développement des centres d’appels

Enjeux - Optimiser la fonction RH et en réduire le nombre de salariés (de 4% de l’effectif à 2%)

- La fonction RH devient une force de proposition, de soutien, fait moins de travail administratif

Contraintes - Nécessité d’un cursus de formation et de professionnalisation des managers à la carte sur les notions et les outils de RH

- SIRH : nécessité de trouver un système qui soit, d’une part, plus souple pour gérer les fonctionnaires et les personnels de statut privé, et, d’autre part, plus intégré avec les filiales et l’international (75 pays) - Gérer les bassins d’emploi (solution : centres d’appels)

Discours véhiculés Place des TI dans les transformations

- Ces outils doivent faire en sorte que les managers s’investissent dans leur rôle de manager (gestion de l’équipe de travail, développement des compétences …) et moins dans un rôle d’administratif - Les TIC n’ont d’effet que si l’on repense les process et que l’on change de culture.

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 204

Directeur du projet Télétravail Contexte - Pression de la concurrence (7)

- Dégradation de l’implication des salariés (20) ⇒ “ c’est certain que les salariés de France Télécom ils n’ont plus l’attachement à l’entreprise qu’ils avaient il y a 20 ans ”

Transformations actuelles

- Bouleversement permanent : changements d’organisation, ajustement de politique, de stratégie (6) - Gros bouleversements depuis les 5 dernières années (7) - “ On avait déjà des modes de fonctionnement très très décentralisés ” (10) - Développement des modes d’organisation par projet (10) - Les différentes formes de télétravail sont proposées mais jamais imposées au patron d’entité (34) - Le développement du travail à distance crée de nouveaux métiers de soutien pour les salariés qui utilisent ces nouvelles méthodes de travail (103) - Manque d’engagement de la fonction RH dans le développement du travail à distance (104) ⇒ “ c’est la GRH qui devrait être devrait être pilote, moteur et porteur…autant que comme je vous disais les points essentiels c’est pas dans les outils techniques parce qu’on sait faire, mais les points essentiels, c’est les points RH et management ” ⇒ “ au départ c’est finalement vous qui expliquez, formez la RH comment ça se passe c’est ça ? Oui ” - La fonction RH est en train d’évoluer (110, 111) ⇒ “ dans notre organisation il y a la division RH groupe, et puis il y a aussi y a une DRH par branche, donc certaines DRH de France sont plus à la pointe que d’autres, sont plus moteurs que d’autres ”

Enjeux Transformation globale de FT Télétravail

- Plus grande réactivité de l’entreprise (6) ⇒ “ y a 10 ans quand on voulait faire un changement d’organisation, on s’y préparait pendant 2 ans et on mettait 2 ans pour le mettre en œuvre, maintenant on fait ça en 3 semaines ” - Développer le travail à distance sous différentes formes au sein de FT, et vendre des services aux clients comme les entreprises (1) ⇒ “ mon slogan c’est utilisons en interne les services que nous voulons vendre à nos clients ” ⇒ “ l’effet vitrine est quand même important ” - Arriver à faire comprendre que le bénéfice collectif s’obtient au prix d’un surcoût individuel (46) ⇒ “ ça c’est le gros enjeu, arriver à faire comprendre au collectif de travail qu’il y a un bénéfice collectif ” - Le développement du travail à distance est l’une des priorités de l’entreprise (113) - Le travail à distance est une réponse socio-organisationnelle à l’évolution du contexte (134) ⇒ “ le travail à distance c’est une réponse socio-organisationnelle à un certain nombre de problématiques, c’est une problématique de réorganisation, fonctionnement par projet, gestion des compétences ”

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« TIC, flexibilité et transformations du travail : le cas de France Télécom » Rapport final (GREFIGE, Université Nancy 2, janvier 2003) 205

Contraintes - Refus de mobilité géographique de la part des salariés (11)

⇒ “ Dans la mesure où nos salariés ne veulent pas déménager, dans la mesure où ils ont des compétences, on amène le travail à eux plutôt que de … les mettre à la porte ou … les obliger à faire une mobilité géographique ” - La coexistence de fonctionnaires et de contractuels n’a rien changé car “ les règles de gestion dans les principes sont les mêmes ” (19) - Réticence des managers au télétravail des membres de leur équipe (53) ⇒ “ quand c’est dans le bâtiment du manager il a il a la pseudo consolation de contrôler le temps, il est là il bosse ou il est là il est pas là, c’est différent ” ⇒ “ il ne faut pas se faire d’illusions, les réticences elles viennent des managers avant tout, les solutions techniques on les a ” ⇒ “ vous avez des responsables d’entités qui disent oui OK on est convaincu c’est bon on y va etc et puis leurs collaborateurs qui sont en situation d’encadrants qui jouent pas le jeu et qui vont entortiller le truc ; on a eu quelques échecs comme ça…à cause de…de réticences des managers intermédiaires ” - Télétravail : nécessité de conserver des liens informels (81) - Personnes ayant le plus de mal à s’adapter : fonctions administratives, plus de 50 ans et plus de 25 ans d’ancienneté -DSI toujours réticente à ouvrir la porte du SI pour des accès à distance (104)

Discours véhiculés Place des TI dans les transformations

- Télétravail : les TI permettent à des personnes dispersées géographiquement de travailler ensemble ou de réaliser leur travail depuis un lieu autre que leur bureau ⇒ “ le critère essentiel c’est que est-ce que toutes les informations dont j’ai besoin sont accessibles ” ⇒ “ à partir du moment ou vous avez …tout en messagerie électronique vous avez des toutes les informations dont vous avez besoin qui sont sur des sites sur Intranet de l’entreprise vous pouvez travailler depuis n’importe quel lieu ” - Deux outils essentiels pour les managers : le mail et l’intranet ⇒ “ les managers ont la possibilité de se connecter depuis leur domicile à Intranet de France Télécom, à la messagerie ” - Coût du système d’assistance dans le cadre du travail à distance (98) ⇒ “ Le prix du système d’assistance de hotline pour le nomadisme, c’est 50% du coût du système. ”

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• Directeur de la Stratégie de DRH Services (ancien Directeur de la Stratégie du développpement du Business-Plan) • Consultante RH, France Télécom Services RH

Contexte - Poids de la fonction par rapport aux concurrents

⇒ “ par rapport à un ratio global d’une entreprise, on est à ..on a un taux de fonction RH qui est quasiment le double par rapport aux autres sociétés, on va dire ” (160) ⇒ “ la pression au départ elle est économique ” (172)

Transformations actuelles

- Centres de Services RH : concept d’externalisation interne sur le modèle des "Sure Services Centers" américains ; s’occupent à la fois du traitement technique de l’administration du personnel et du soutien en premier niveau (6) ⇒ “ on a déchargé les services opérationnels de tout ce qui était traitement technique de l’administration du personnel, pour le confier à des centres spécialisés qui gèrent en moyenne entre 8000 et 20 000 salariés ” (6) - Manager 1er RH : manager décideur RH (8) (59) - Simplification des processus RH au moment du passage sur @noo (28) ⇒ “ ça nous a amené, alors d’une manière très modeste et à la marge, mais ça nous a amené à essayer de simplifier le processus ” (28) - Reenginnering de la fonction RH : il n’y aura plus de RH de proximité (89) - Vaste chantier de reengineering de la fonction RH soutenu par les TI (160) ⇒ “ on a engagé un vaste chantier qui est organisationnel, des processus des compétences mais aussi l’outil, donc l’outil quelque part a apporté sa pierre à ce chantier là, en dégageant la fonction RH de tâches à faible valeur ajoutée ou à valeur ajoutée nulle ” (160) ⇒ “ "RH demain" qui concerne le repositionnement de…, de la RH en entreprise ” (172)

Enjeux - Enlever à la fonction RH ce qui n’est pas porteur de plus-value (8)

⇒ Réduire le taux de fonction RH (160) ⇒ Dégager “ la fonction RH de tâches à faible valeur ajoutée ou à valeur ajoutée nulle ” (160) ⇒ “ C’est une nécessité économique, toutes les fonctions supports de l’entreprise qu’elles soient financières, comptables, SI ou RH sont en train de passer à cet engagement là. ” (163) ⇒ “ si le manager est le premier RH ça signifie que de temps en temps, quand il a des questions qu’il ne maîtrise pas en RH il doit pouvoir se tourner vers un RH qui est disponible et non pas un RH qui dit "ben attends il faut que je calcule le solde des…ou non j’ai pas fini les reports de solde des congés dans le bilan comptable, et j’ai pas eu le temps parce que j’avais ceci ou cela " ” (163) - Approche économique en termes d’efficacité (141)

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⇒ 1 200 000 demandes de congés papier par an à FT ; avec l’ARTT ce serait monté à 7 000 000 ⇒ "intéressement / participation" : retour sur investissement en un an (147-148) ⇒ “ il y a un certain nombre de personne ici à DASSI, à vouloir intégrer les dimensions économiques dans tous les projets ” (150), (152) - L’enjeu n’est pas uniquement économique, mais peut également être en termes d’image (153) - Responsabilisation du manager via le manager 1er RH (28, 30) - Objectif de @noo : “ le concept du libre service c’est de regrouper pour le salarié et pour le manager, tous ces services là, au fur et à mesure, dans un seul endroit ” (68) - Pour FT SRH : devenir un prestataire de services vis-à-vis de l’ensemble de FT (maison mère et filiales) (85), et éventuellement à l’avenir vis-à-vis de l’extérieur (86) (181-188) ⇒ “ On cherche aujourd’hui, clairement à développer enfin à passer dans une logique de services, vis à vis de France Télécom ” (85) ⇒ “ On va avoir un plan de développement vers les vers les filiales, dans les deux ans à venir. Pour être à la fois sur l’aspect métier et sur l’aspect système d’informations, être un prestataire de services reconnu, d’ailleurs c’est ce que le DRH du groupe nous demande de faire. Il nous demande dans les deux ans à venir de devenir une entreprise de services RH de référence en système d’informations. ” (86) ⇒ “ Oui peut être même euh…depuis on va dire euh on réfléchit à ..une potentialité de business pour France Télécom ” (182) - Développer l’usage des technologies intranet en interne (157) ⇒ “ LSS, c’est clair que d’abord c’est : développer des stratégies d’action. Il y a le fait de développer l’usage du net, dans une entreprise qui travaille avec les télécommunications ” (157) - Objectif de l’entreprise : devenir la Net Compagnie (160) ⇒ “ le seul objectif du Président c’est de devenir la net compagnie ” (160)

Contraintes - Les différences RH (ex : congés) liées au statut fonctionnaire / contractuel sont traitées en back-office par le système de gestion

RH (51) - Formations nécessaires pour la RH en local pour qu’elle s’adapte à ses nouvelles fonctions (165-170)

Discours véhiculés - Slogan d’@noo : “ parce que c’est @noo, c’est à vous d’agir ” (19)

- La Net Compagnie

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Place des TI dans les transformations

- Mise en place depuis 1999 du Libre Service Salariés via l’intranet (8) ⇒ “ vise à permettre aux salariés et aux managers d’être partie prenante pas des actes, mais des processus RH, qui sont donnés sous forme électronique ” (8) - Mise en place des process RH sur @noo les uns après les autres (13) ⇒ “ stratégie de l’usage et non pas une stratégie de type pilotage du système d’information ” (15) - Système de sites pilotes (34-39) - Informations en ligne sur les règles RH et les marges de manœuvre concernant ces règles (49) - Les services qui s’occupent du SI (DSI ?) sont prestataires de services pour la RH (74-75) - A la mise en place de @noo : aucun équivalent en Europe à effectif identique (75-76) ⇒ “ on regarde aujourd’hui quelles sont les entreprises qui font ce genre de choses aujourd’hui en Europe, il n’y en a pas encore beaucoup ” (177) - Le changement d’organisation de la RH est plus important que l’outil informatique (89) ⇒ “ là non plus c’est pas l’outil c’est l’organisation et ça rentre dans la RH de Merck, donc outil ou pas outil de toute façon il n’y aura plus de RH de proximité ” (89) - Les salariés ont bien fait la différence entre le changement organisationnel et les outils informatiques (90) ⇒ “ il peut y avoir à un moment donné une confusion ou le sentiment que c’est l’outil qui détruit l’emploi on va dire, mais apparemment, d’après l’étude qui avait été faite, même si les gens n’adhéraient pas au fait que leurs opportunités étaient déportées, ils n’en ont pas fait porter la conséquence ou subir la conséquence à l’outil ” (90) - Rôle des managers dans l’explication de la mise en place des congés sur @noo (122) ⇒ “ les équipes où s’est plutôt bien passée la mise en place, sont celles dans lesquelles le manager a porté l’introduction de l’outil ” (122) - Le LSS aurait probablement été mis en œuvre même sans "RH demain" (172) ⇒ “ l’outil vient apporter sa pierre, mais en même temps, pour être honnête, ce que dit aussi Martine Romanet qui est la directrice de la division, c’est qu’on aurait fait du libre service, même sans le chantier “ RH demain ”, en termes de performance, d’accessibilité des salariés à des usages et autres, on l’aurait fait quand même ” (172)

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Directeur du Projet CSRH - France Télécom Services Ressources Humaines Contexte - Constat : FT avait un ratio de RH par rapport à la masse salariale très important (4-5%) “ mais avec 90% des RH qui faisaient de

la gestion administrative ” (24) ⇒ “ on n’avait pas assez de personne qui s’occupait de tout ce qui est formation, emploi, relation sociale donc qui est bien de la GRH, management, communication, etc ” (25) - Benchmark : entreprises à l’étranger et en France qui ont développé des SIRH avec des workflows, de l’info en ligne pour les salariés (308)

Transformations actuelles

- Changement permanent chez FT (462-464) ⇒ “ L’enjeu à mon avis il est là : les gens ont changé tellement, ils sont prêts à changer, ils le font, mais au bout d’un moment on change tellement, qu’il faut redonner du sens de manière beaucoup plus concrète, ça veut dire une idée précise, et surtout le faire de mieux en mieux si j’ose dire, concrètement parlant, et d’éviter des changements à la hussarde ” (465) - Explication de ce en quoi consiste la transformation de la fonction RH ⇒ La fonction RH auparavant (1-28) ⇒ Apparition des Centres de Services Ressources Humaines (30 et suite) : objectif : “ traiter les actes de gestion administrative…informer, conseiller les salariés les managers et les RH d’unités ” sur la gestion administrative (32) ⇒ “ La décision reste en unité et en DR ” (131) ⇒ Transfert des compétences entre les différents niveaux de la ligne RH (52-65) - Missions des CSRH (131-138) - Les CSRH récupèrent le personnel qui était en RH en DR ou en UO (87) ⇒ Egalement d’autres personnes issues de fonctions administratives ou techniques (118) - Les autres personnes qui faisaient de la RH en local sont allées dans des centres d’appels (92-93 ; 102-103) - Volonté : que ce soient les mêmes personnes dans le CSRH qui fassent le traitement administratif et le conseil pour un même portefeuille de salariés (142-158) ⇒ “ Le principe c’est de scinder dans le temps ces deux missions ” (151) ⇒ “ la volonté, c’est bien justement d’éviter la taylorisation ” (504) - Manager 1er RH : doit pouvoir informer son salarié de manière relativement large (173-175) ⇒ “ sur les actes de gestion, il a pas vocation de tout connaître de chaque processus RH ” (174) ⇒ Marge de manœuvre du manager concernant les règles RH (181-186) - Les expert maîtrisent désormais aussi bien la droit de la fonction publique que le droit du travail pour les ACO (411) ⇒ “ On avait des experts pour le droit de la Fonction Publique et des experts pour le droit privé. Ça s’est réorganisé il n’y a pas très longtemps et la volonté c’est de mélanger les deux, c’est-à-dire que l’expert on ne lui donne plus le statut mais on redonne acte de gestion ” (411)

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Enjeux - Recentrer la RH sur les activités à valeur ajoutée, soutenir cette transformation par le TI (30)

⇒ “ la volonté maintenant justement afin d’optimiser…la fonction RH chez France Télécom c’est d’y ajouter aussi des nouvelles technologies d’apporter des de la plus value ” (30) - FT : se recentrer sur le client (103-105) - Sur l’organisation interne des CSRH : “ l’objectif s’était la fluidité et la flexibilité ” (163) - CSRH : concentration, gains de productivité de la fonction RH (221) - Se positionner comme un prestataire de services en matière de SI concernant la RH (303-306) ⇒ “ on sera capable de vendre un service plutôt avec le produit ” (303) ; “ l’idée c’est plus le service qui va avec le produit que le produit ” (304)

Contraintes - Prise en compte des bassins d’emplois dans le choix des sites de mise en place des CSRH (44-45, 48-49)

⇒ “ comme la zone géographique, on a fait les choix d’implantation des CSRH en plus liés aux notions de bassin d’emplois ” (44) ⇒ “ réadaptation de l’effectif dans les zones heu… entre guillemets où y a pas trop de travail, ou d’évolution du travail donc ils ont surtout été implantés dans ce genre de zones ” (48) - Nécessité de formations pour les personnes qui arrivent dans les CSRH (118-121) ⇒ Cap Avenir RH : formation pour des personnes qui n’étaient pas de la filière RH et qui sont maintenant assistants de gestion dans les CSRH (270-284) - Complexité des règles RH à FT à cause des différentes statuts des salariés : haut niveau d’expertise des experts de FTSRH qui interviennent en deuxième niveau, après les CSRH ⇒ “ c’est souvent … très spécifique France Télécom avec les histoires de statuts ” (405) - La notion fonctionnaire / on fonctionnaire est un faux problème : il y a seulement 15% d’ACO, concentrés sur la région parisienne (408-411) ⇒ “ On arrête de faire le distingo entre droit de la Fonction Publique et entre les deux statuts en terme d’organisation ” (415) - Nécessité de formations et d’accompagnements lors de la mise en place de nouveaux outils informatiques (480-482) ⇒ “ Si moi-même je n’ai pas d’accompagnement, je vais réagir comme l’utilisateur de base, ou commun, je vais me plaindre et je vais dire oh ben non je ne l’utilise pas, j’ai passé deux heures dessus et ça ne marche pas ” (480) - Difficultés des salariés : doivent à la fois changer de métier, utiliser de nouveaux outils, se comporter différemment, suivre des formations … (494)

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Discours véhiculés - Raisonnement économique dans le choix de la création des CSRH (47)

- Net Compagnie : utiliser les TI en interne (227) - Changement dans la conception du métier de FT ; l’objectif est désormais la performance économique ⇒ “ auparavant…France Télécom avait une logique heu... ça s’était l’image de France Télécom très heu... technicienne donc on fait nos propres produits pour répondre à tous les besoins…et qui soient parfaits ” (291) ⇒ “ la volonté actuelle maintenant c’est … elle est plus économique c'est à dire … par exemple sur des progiciels avant tout ” (293) - Net Compagnie “ c’est…une valeur une nouvelle valeur ” (310), “ c’est également une plue value ” (312), “ c’est aussi un bassin d’expérimentation en interne ” (313) - Se rapprocher du fonctionnement des entreprises privées (418) ⇒ “ Ce qui est clair c’est qu’il y a une volonté quand même […] en termes de règles, d’essayer de fusionner, de se rapprocher le plus possible des règles contractuelles ” (418) ; ex : rémunération individualisée

Place des TI dans les transformations

- Apport important des TI à la transformation de FT (468) ⇒ “ L’apport est important dans le sens où il est très structurant en termes d’organisation, en termes de méthodes de travail, en termes de changements ” (468) - Les TI sont un moyen d’améliorer la productivité mais n’ont pas vocation à remplacer les individus (470- ⇒ “ je suis un fervent partisan du relationnel, donc moi je vois plus en outil d’aide, si j’ose dire, mais pas en outil de remplacement ” (470) ⇒ “ … pour optimiser notre travail, éviter trop de déplacements, favoriser le partage, le travail coopératif, mais je le vois plus en outil d’accompagnement […], il y a toujours l’accompagnement physique, les rencontres physiques qui sont primordiales à mon avis ” (471) ⇒ “ tous les outils que nous on met en place, il est clair que la volonté n’est pas, c’est pas l’outil d’abord, c’est avant tout comme je disais tout à l’heure, éviter les travaux répétitifs, avoir de la valeur ajoutée ” (474) - Développement du maximum d’outils Libre Service Salarié (227) ⇒ Les actes de gestion RH qui ont le moins de VA sont à informatiser (229) - DSI est prestataire de services pour FTSRH : systèmes de centres de profit (349-351) - FTSRH est maîtrise d’ouvrage : a en charge le déploiement, etc. (366) - Vision RH UO : outil de pilotage, création de tableaux de bord RH (370-385) - Le SIRH va changer : People Soft (430) ⇒ “ pourra faire facilement beaucoup de workflow ” (431) ⇒ Objectif : avoir un outil commun à tout le groupe France Télécom (435) - “ Je pense que c’est un facteur de performance, à mon avis, mais ça peut facilement devenir un facteur de mode ou un facteur d’obligation ” (511)

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Directeur du Projet GTT (Gestion du Temps de Travail) - France Télécom Services Ressources Humaines Contexte - Passage au statut d’entreprise de droit privé et ouverture à la concurrence

- Statut privé + Lois Aubry 1 et 2 + accord d’OARTT ont entraîné une complexification de la gestion du temps de travail ⇒ “ les lois de 35 heures, lois Aubry 1, loi Aubry 2 sont arrivées dessus, nous ont obligé à avoir une connaissance d’entreprise, je dirais une entreprise classique, du droit du travail ” (1) - Réduction de la part des fonctionnaires dans l’entreprise, même s’ils restent largement majoritaires (1) ⇒ “ nous avons une population … maintenant nous avons une population de moins en moins de fonctionnaires mais ils représentent encore 80 à 85% des salariés de France Télécom, il y a une population contractuelle de droit public qui est envoie de résorption, mais maintenant nous avons … nous embauchons uniquement des agents contractuels de droit privé, donc que nous appelons ACO, Agents Contractuels ” (1) - Poids trop important de la fonction RH, et sur des activités à faible valeur ajoutée (3)

Transformations actuelles

- Transformation de la fonction RH : suppression du transactionnel en local (3) ⇒ “ nous supprimons toute la fonction RH de proximité, la saisie … la saisie quotidienne d’informations, d’absence, de … de frais de déplacement, enfin tout ce qu’on appelait bureau d’ordre, bureau de ressources humaines à une époque, et c’est centralisé sur des Centres de Services Ressources qui sont 10 en France ” (3) - Mise de process RH sur l’intranet, soutenus par les TI (12) ⇒ “ certains imprimés sont transférés automatiquement comme les Congés Annuels ou les Journées de Temps Libre ” (12) ; “ Donc ces informations nous en avons je crois passées plus d’un million depuis l’ouverture, ça fait un an que c’est ouvert, c’est quelque chose d’énorme, nous avons supprimé toute cette gestion de papier ” (12) ⇒ “ nous allons faire très vite en 2002-2003 la transmission des frais de déplacement ” (12) - Manager 1er RH

Enjeux - Réduction du poids de la fonction RH (3)

⇒ “ Nous avions une fonction RH qui représentait pratiquement 4% de nos salariés, ce qui est énorme, donc nous avions la prétention et la volonté de la diviser par deux, de faire un gain de 50% donc de passer à 2% de nos salariés qui gèrent la fonction RH ” (3) - Recentrage de la fonction RH sur les activités à valeur ajoutée, souci de productivité (4) ⇒ “ on n’emploie pas le terme “ réduction des coûts de la RH ”, disons “ recentrage des activités métier ” ” (4) - Diminution du nombre de salariés et rajeunissement de la pyramide des âges (CFC) ⇒ “ France Télécom pour rajeunir ses cadres, pour permettre à une population relativement âgée de partir plus tôt, toujours dans le but de gains de productivité, permet ce qu’on appelle un Congé de Fin de Carrière pour toute personne qui a travaillé 25 ans dans l’entreprise, permettre de partir à partir de 55 ans avec 70% du salaire et des primes payés jusqu’à l’âge de la retraite ”

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(12) - Diminution de la masse salariale (encouragement au travail à temps partiel) ⇒ “ inciter gens à se mettre à temps partiel … toujours dans un souci de productivité et de gain d’emplois ” (12) - Via le respect du droit du travail (intégré dans GTT) : éviter les accidents du travail et préserver l’image de marque de France Télécom (15) ⇒ “ on ne tient pas à ce qu’il arrive un accident, pour l’image de marque de France Télécom pour le respect du Code du Travail ” (15) - Travail des managers : s’aligner sur la concurrence, s’éloigner du fonctionnement administratif pour aller vers du management des équipes (19) ⇒ “ qu’il ait un rôle de chef d’équipe, qu’il ait un rôle réglementaire, qu’il se rapproche davantage de ce qu’on retrouve dans les chefs d’équipe chez nos concurrents, dans les entreprises classiques, toutes les entreprises de droit privé qu’on peut trouver ” (19)

Contraintes - Dans la mise en place de GTT : contraintes liées à la société ARES qui construit l’outil GTT : retards (8), dysfonctionnements (29-

30), etc. - Pour l’utilisation de GTT : outil complexe, d’où nécessité d’une formation préalable (11)

Discours véhiculés - FT comme grande entreprise privée du secteur des télécoms

⇒ “ Nous avions une philosophie d’entreprise publique ” (1) ⇒ Manager : “ qu’il se rapproche davantage de ce qu’on retrouve dans les chefs d’équipe chez nos concurrents, dans les entreprises classiques, toutes les entreprises de droit privé qu’on peut trouver ” (19) - FT comme la Net Compagnie (12) ⇒ “ France Télécom est … s’appelle la Net Compagnie, nous avons comme but que tous nos salariés se servent de l’outil intranet, nous arrivons puisque notre philosophie est d’avoir un terminal, un micro ou une station de travail banalisée, donc par salarié ” (12) - Manager responsable de la RH de son équipe, est le décisionnaire ⇒ “ notre outil de Gestion du Temps de Travail est un outil d’aide au fonctionnement de l’équipe, d’aide à la décision, mais n’impose rien au manager. Il peut toujours gérer son équipe, ils pourront toujours gérer leur équipe comme ils le voudront. Il n’y a rien qui sorte de l’outil, si ce n’est ce qu’il veut qu’il sorte lui de cet outil ” (13)

Place des TI dans les transformations

- Outils de simulation pour inciter les salariés au temps partiel ou au CFC (12) ⇒ “ il y a aussi des outils de simulation que nous avons, ne serait-ce que la gestion du temps partiel ” (12) ⇒ “ nous avons un outil de simulation qui permet aux gens suivant leur ancienneté, suivant leur indice, l’indice qu’ils vont avoir quand ils seront en Congé de Fin de Carrière ou quand ils seront à la retraite, de voir combien ils vont toucher de prime, combien ils vont toucher par mois en brut en net pendant le temps où ils seront en Congé de Fin de Carrière et quand ils seront à la retraite ”

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(12) - Alliance va être remplacé par People Soft dans les deux ans afin d’assurer une cohérence sur l’ensemble du groupe France Télécom (1 ; 16) ⇒ “ Nous voulons un outil informatique qui gère tout le groupe France Télécom, donc avec toutes les disparités qu’il peut y avoir, que ce soit les filiales de droit français ou de droit international ” (16) - GTT : application centrale pour la DRHG, donc pas de problème de budget (9) - Informations RH à destination du manager sur l’intranet pour qu’il puisse gérer son équipe (12) ⇒ “ Ma Marge de Manœuvre, notre politique le manager premier RH sur le terrain nous voulons lui donner toute l’information, il a çà sur l’outil ” (12)

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Responsable du département "Soutien / Contrôle" en DRH de Direction Régionale Contexte - Constat du poids important de la fonction RH par rapport à la concurrence (12)

⇒ “ il a été relevé dans les études qui ont été faites avant de lancer ce projet, c’est que la gestion administrative employait encore trop de monde à France Télécom, était sur la tête de trop de personnes, donc un processus lourd, qui coûte cher ” (12) ; “ il s’est avéré qu’on était vraiment au-dessus en regardant de benchmark ” (12) - Transformation des relations sociales depuis quelques années dans l’entreprise (32) ⇒ “ on achetait beaucoup la paix sociale ” (32) ⇒ Rachat du coutumier : “ ça a été un passage en force ” (32) ⇒ “ globalement le dialogue social s’est … ressemble plus à un dialogue social d’entreprise privée ” (32)

Transformations actuelles

RH : décentralisation de la prise de décision et centralisation du traitement administratif

- Projet "RH demain" en cours : lancé en 2000 au niveau national (11) - Avant "RH demain", au fil des ans depuis 1996 : décentralisation de la RH de la DRH en direction des UO (4) ⇒ “ au fil des ans tout ce qui est vraiment strictement opérationnel a été décentralisé vers les unités et nous vraiment on se recentre sur notre métier de DRH de région, c’est-à-dire qu’on se concentre plus sur le fonctionnel ” (4) - Dans le cadre de "RH demain", les missions d’une DRH de DR se recentrent au niveau stratégique et politique sur : les relations syndicales ; le budget social ; le développement des compétences ; le pilotage de l’emploi (4) ⇒ “ donc nous centré sur le stratégique, la politique … la politique on donne un cadrage aux unités, en sachant que cette politique on l’a nous même reçue de notre délégation qui l’a elle-même reçue de la DRH de FT SA qui elle-même s’inscrit dans la politique de la DRH Groupe, donc on décline ” (5) - Les redéploiements sont au cœur de la transformation de FT (6) ⇒ “ France Télécom fait avec son personnel mais il faut que le personnel migre là où nos missions doivent se développer. C’est pour çà que vous avez entendu parler de ces mobilités vers des métiers genre plates-formes Wanadoo … enfin tout ce qui est réponse au client ” (6) ⇒ Réduction des effectifs en RH locale et redéploiements : “ il y a eu des déflations sur cette partie administrative, donc il y a des personnes qui ont quitté la sphère RH et qui ont été déployées en … on l’a dit tout à l’heure, essentiellement du commercial ” ⇒ “ il y a des gens qui ont déjà eu des déploiements en nombre non négligeable, peut-être en 4-5 ans il y en a qui sont peut-être à 3-4 déploiements ” (35) - 3 volets de "RH demain" : mise de certains process RH sur l’intranet ; évolution de la gestion administrative avec les CSRH ; partie management avec le "manager 1er RH" (12) - Evolution de la gestion administrative de la RH (12) ⇒ “ centralisation de cette gestion administrative dans des pôles, donc c’est ce qu’on appelle les Centres de Services RH, CSRH ” (12) - Manager 1er RH : le manager n’a pas à connaître toutes les règles, mais il doit savoir où trouver l’information, être au courant de la

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politique RH, être intégré dans les processus RH (comme le recrutement) (12) - Le manager est le décideur et donneur de sens : ⇒ A de plus en plus de latitude en ce qui concerne les pratiques RH de son équipe (17) ⇒ “ on s’aperçoit que dans les processus qu’on a réécrit c’est … le manager il est en plein dans la décision, et la DRH d’unité elle est comme nous on est : du soutien, de l’alerte, de l’expertise, mais plus dans la décision ” (19) ⇒ “ le manager il faudra qu’il fasse la com’ sur les grandes évolutions RH. C’est vrai que ce n’est pas toujours confortable pour eux ” (23) ; “ Les managers il faut qu’ils donnent du sens ” (24) - Rôle des RRH en UO est à peu près le même que celui de la DRH au niveau de la DR (22) - La décentralisation vers les UO et vers les managers concerne également le dialogue social (39) ⇒ “ de plus en plus de choses se font au niveau de l’unité, y compris le dialogue social ” (39)

Enjeux - Pour la mise de process RH sur l’intranet (12) :

⇒ “ des objectifs plus efficaces, mois procéduriers, moins de papiers ” ⇒ montrer l’image de la Net Compagnie - Réduction des coûts liés au traitement administratif des actes RH via la centralisation de la gestion administrative dans les CSRH (12) ⇒ “ concentrer la gestion administrative sur un pôle, ce qui veut dire efficacité et puis gain de productivité, il faut le dire et ça a été dit ” (12)

Contraintes - La présence des statuts fonctionnaires / non fonctionnaires ne pose pas de problème sur la région car il y a encore plus de 90%

de fonctionnaires (6) - Transferts au CSRH ont été mal vécus par les personnes qui s’étaient formées en UO depuis quelques années pour faire ces traitements administratifs (12) ⇒ “ finalement les personnels de nos unités on leur a enlevé cette partie alors qu’ils commençaient vraiment à maîtriser ” (12) - Les personnes à redéployer ne sont pas forcément capables d’aller faire du commercial (12) ⇒ “ essentiellement du commercial, que ce soit en face du client ou en back-office comme on dit si la personne n’avait pas tout à fait le profil. On n’envoie quand même pas en face du client, ça serait un peu grave. ” (12) - Les managers ne sont pas tous capables d’assumer les missions du manager 1er RH (24) ⇒ “ on peut quand même se poser la question “ est-ce que tous nos managers sont capables de çà ? ”. Et on sait bien que non. Même avec tout le soutien du monde ils ne pourront pas, ils n’ont pas … ils n’ont pas le profil, c’est clair. ” (24) - Assez peu de réactions des syndicats sur la transformation de la fonction RH et sur les redéploiements de manière générale, même s’ils sont contre ces redéploiements (31- ⇒ "RH demain" : “ ce n’est pas un projet qu’ils ont … d’ailleurs on n’a peut-être pas suffisamment communiqué là-dessus non plus, mais ce n’est pas un projet sur lequel ils se sont beaucoup battus, on n’a pas vu énormément de littérature là-dessus, de tracts etc ” (31)

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- Déstabilisation des personnes qui ont été redéployées, crainte de l’avenir (35-36) ⇒ “ Ce qui vraiment a déstabilisé les gens c’est tous ces déploiements ” (35) ; “ c’est la traversée d’un océan, c’est très déstabilisateur, on le comprend ” (35) ; “ Dans deux ans effectivement personne ne peut leur dire que dans deux ans il seront à Wanadoo ” (35) ⇒ “ Oui, “ rien ne me garantit … ”, oui voilà. C’est vrai que c’est quand même un problème fondamental. ” (36)

Discours véhiculés - Evolution de l’entreprise pour devenir une grande entreprise privée de télécommunication

- FT est désormais une entreprise comme une autre, pas différente (37) ⇒ “ on leur dit bien on n’est pas atypique France Télécom, on n’est pas tout seul dans une planète je ne sais pas dans quelle galaxie … c’est la société, dans toute entreprise c’est çà, c’est le changement, plus rien n’est figé dans le marbre ” (37) - Tout le monde reste dans l’entreprise mais il faut accepter le fait de changer d’emploi (6) ⇒ Michel Bon : “ les messages du Président Michel Bon ça a été "on garde le statut des fonctionnaires" mais par contre il s’est engagé, çà vous avez dû l’entendre aussi, il s’est engagé à fournir un emploi pour tout le monde, "personne ne sera exclu, personne en dehors du chemin", çà c’est vraiment ses paroles, mais avec la condition c’est que il va falloir bouger ” (6) - La Net Compagnie : “ France Télécom c’est l’entreprise de communication par excellence, le premier opérateur national, donc on a un devoir … que parmi le personnel cette politique de communication soit diffusée et puis qu’il soit … qu’on soit nous-mêmes acteurs ” (12) - Le manager est le décideur RH pour son équipe (12) ⇒ Michel Bon avait dit : “ le manager c’est le 1er RH de son équipe ”. En fait quand on a dit çà on n’a pas beaucoup avancé, on n’a pas dit grand chose (12)

Place des TI dans les transformations

- Mise des process RH sur @noo : Libre Service Salariés (12) ⇒ “ il y a une prochaine évolution début mars avec la prise de repos compensateurs, donc le salarié va saisir sa demande directement, donc ça va encore procéder à l’allégement de toutes ces procédures administratives un peu lourdes ” (12)

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ANNEXE 10 : LA GRILLE D’ANALYSE DES ENTRETIENS DANS LES CENTRES D’APPEL

Caractéristiques individuelles - facteurs de

différenciation

[CODE IDENTIFIANT]

Identité du salarié

- plate forme - statut (FT/C) - Poste - Grade -

Ancienneté

- Tranche d'âge - Ancienneté à FT - Ancienneté / plate-forme -

Arrivée sur la plate-forme

- Parcours antérieur (technique, commercial, administratif)

- Arrivée volontaire ou non - Si volontaire, choix géographique ou travail

I - Flexibilité qualitative interne

Nature du travail - Définition du travail effectué (qualificatifs employés)

Caractéristiques du travail

- degré de variété (types de tâches diff.) - degré de complexité (types de connaissances et

évolution, mise à jour) - parcellisation (séquences-types, TIC) - valorisation de la tâche (réf. au grade, à la

qualification,…)

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Contexte du travail

- Type de technologie utilisée - Apport des TIC (rapidité, fiabilité, contrainte,

panne…) - Adéquation outil et tâche

• Pertinence contenu de l'outil • Pertinence de l'interface (ergonomie)

- poste de travail • Ergonomie poste • Personnalisation

- Relations de travail entre Collègues (entraide, communication, convivialité, solidarité…)

- Relations hiérarchiques • Attentes (technicité /management) • Perception du rôle du Responsable hierarchique

Autonomie / contrôle

- Procédures de contrôle automatisées (monitoring) quanti.

• Indicateurs • Fréquence de suivi

- Procédures contrôle qualitatifs (Ecoutes, sondage, enquête..)

- Utilisation du contrôle( feed-back des supérieurs )

- Perception de l'autonomie (par rapport au contenu du travail)

Formation/compétences

- Formation initiale (intégration, tutorat…) - Recyclage (remise à niveau) - Formation spécialisée - Auto-formation et apprentissage - Partage des compétences /rôle des soutiens

II - Flexibilité quantitative

Redéploiements /effectifs

- Effets perçus de la politique cde redéploiements

Nature du contrat

- Contrats "atypiques" / ou statut FT

Salaires

- primes ?

Gestion du temps de travail

- Possibilité de choix des horaires - Possibilité d'organiser le temps de travail

(échange, jours fériés…) - Gestion des pauses / autonomie

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III - Evaluation de la performance

Perceptions

- De la productivité - De la qualité du service rendu aux clients

Motivation

- Sources de motivation (intérêt du travail) - Degré de motivation

Satisfaction

- Motifs de satisfaction - Motifs d'insatisfaction

Implication

- Adhésion aux objectifs de l'organisation - Adhésion aux objectifs de l'entité

Stress / burn out

- Causes, manifestations

Améliorations suggérées

IV - Modalités et rôles de la RH

Valorisation du métier

- valorisation de l'emploi dans l'organisation - valorisation de l'emploi dans la trajectoire

professionnelle

Parcours professionnel

- Perspectives d'évolution dans l'entité - Perspectives d'évolution à l'extérieur entité

Accompagnement/outils de la mobilité

Accompagnement de l'introduction des TIC

Apports des TIC pour la GRH

- Gestion des congés, intranet…

V - Autres - Divers

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ANNEXE 11 : LES RESULTATS DE L’ANALYSE STATISTIQUE

BRUTE APPLIQUEE AUX QUESTIONNAIRES DU JDS (CENTRES D’APPEL)

Tableau 1: Analyse de Fiabilité des variables dépendantes

Scale Scale Corrected Mean Variance Item- Squared Alpha if Item if Item Total Multiple if Item Deleted Deleted Correlation Correlation Deleted SATSE_1 36,2857 126,7083 0,3420 0,5342 0,8922 SATREM_1 37,6735 123,0162 0,4577 0,7284 0,8846 SATBD_1 36,7551 116,8971 0,7237 0,7975 0,8681 SATENC_1 37,2245 113,1361 0,7327 0,6594 0,8664 SATBD_2 37,2653 107,9906 0,8293 0,7895 0,8588 SATENC_2 37,4898 128,4634 0,3506 0,6970 0,8898 SATREM_2 37,6531 123,3563 0,5351 0,5827 0,8793 SATINT_1 37,3061 113,1752 0,7658 0,6591 0,8644 SATSE_2 37,9592 120,7066 0,6143 0,4928 0,8748 SATINT_2 36,9796 118,7287 0,7199 0,6833 0,8691 SATENC_3 37,4082 118,1216 0,5893 0,6995 0,8762 Reliability Coefficients 11 items Alpha = ,8854 Standardized item alpha = ,8856

Tableau 2 : Analyse de fiabilité de la caractéristique du travail « variété des compétences » Scale Scale Corrected Mean Variance Item- Squared Alpha if Item if Item Total Multiple if Item Deleted Deleted Correlation Correlation Deleted VC_1 11,2308 3,1222 0,4996 0,2919 0,5546 VC_2 11,7308 2,5535 0,4039 0,1654 0,6781 VC_3 11,2692 2,4359 0,5453 0,3308 0,4607 Reliability Coefficients 3 items Alpha = 0,6611 Standardized item alpha = ,6745

Tableau 3 : Analyse de fiabilité de la caractéristique du travail « Identité de la Tâche »

Scale Scale Corrected Mean Variance Item- Squared Alpha if Item if Item Total Multiple if Item Deleted Deleted Correlation Correlation Deleted IDT_1 7,6226 8,7779 ,3951 ,2549 ,7836 IDT_2 7,3962 7,1284 ,5118 ,4324 ,6609 IDT_3 7,5472 6,9064 ,7309 ,5440 ,3894 Reliability Coefficients 3 items Alpha = ,7151 Standardized item alpha = ,7210

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Tableau 4 : Analyse de fiabilité de la caractéristique du travail « Autonomie »

Scale Scale Corrected Mean Variance Item- Squared Alpha if Item if Item Total Multiple if Item Deleted Deleted Correlation Correlation Deleted AUT_1 8,2885 6,7583 ,3850 ,5163 ,4807 AUT_2 6,8462 8,7602 ,1562 ,1956 ,8032 AUT_3 8,3269 5,8322 ,7105 ,5655 -,0181 Reliability Coefficients 3 items Alpha = ,5775 Standardized item alpha = ,5957

Tableau 5 : Analyse de fiabilité de la caractéristique du travail « Feeback du travail » Scale Scale Corrected Mean Variance Item- Squared Alpha if Item if Item Total Multiple if Item Deleted Deleted Correlation Correlation Deleted FBT_1 9,0577 4,7613 ,4264 ,2355 ,4954 FBT_2 8,0000 6,8627 ,2999 ,1117 ,6488 FBT_3 8,5962 4,9514 ,5379 ,2934 ,3156 Reliability Coefficients 3 items Alpha = ,6050 Standardized item alpha = ,6035

Tableau 6 : Analyse de fiabilité de la caractéristique du travail « Importance de la tâche »

Scale Scale Corrected Mean Variance Item- Squared Alpha if Item if Item Total Multiple if Item Deleted Deleted Correlation Correlation Deleted IMPT_1 9,2500 5,7990 ,4145 ,1751 ,5467 IMPT_2 9,8269 5,1263 ,4811 ,2322 ,4466 IMPT_3 9,4615 6,8024 ,4076 ,1723 ,5599 Reliability Coefficients 3 items Alpha = ,6217 Standardized item alpha = ,6233

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE 4 - Le GREFIGE et la collaboration avec le GRC : l’équipe de chercheurs 4 - L’appel d’offre de la DARES et la réponse initiale 4 - L’accès au terrain France Télécom et les évolutions de la problématique 5 - Les axes principaux de la problématique 5 - Les étapes du protocole méthodologique 6

PARTIE 1 : LES POLITIQUES DE FLEXIBILITE(S) CHEZ FRANCE TELECOM. QUESTIONNEMENTS THEORIQUES ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE 8

CHAPITRE 1. LA NATURE DE LA FLEXIBILITE ET LA PLACE DES RESSOURCES HUMAINES 8 1.1. FLEXIBILITE ET STRATEGIE DE L’ORGANISATION 8

1.1.1. Origines et définitions de la flexibilité 8 1.1.1.1. L’instabilité de l’environnement comme source de la flexibilité 8 1.1.1.2. Vers une définition de la flexibilité 9

1.1.2. Des typologies qui conduisent à s’intéresser à la stratégie de l’entreprise 10 1.1.2.1. Des typologies fonctionnant par oppositions 10 1.1.2.2. Flexibilité et stratégie 11

1.2. VERS UNE FLEXIBILITE DES RESSOURCES HUMAINES 12 1.2.1. La flexibilité organisationnelle en lien avec les technologies de l’information 13

1.2.1.1. La flexibilité technico-organisationnelle 13 1.2.1.2. Les technologies de l’information dans la flexibilité de l’organisation 13

1.2.2. Flexibilité du travail et ressources humaines 17 1.2.2.1. Flexibilité interne vs flexibilité externe 17 1.2.2.2. Flexibilité quantitative vs. flexibilité qualitative 18 1.2.2.3. Choix d’une typologie de la flexibilité (figure 1) 20 1.2.2.4. Les modalités de GRH dans la flexibilité 22

CHAPITRE 2. PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE 23 2.1. PROBLEMATIQUE ET QUESTIONNEMENT : TIC, FLEXIBILITE ET TRANSFORMATIONS DU TRAVAIL 23

2.1.1. Problématique générale 23 2.1.1.1. Flexibilité, TIC et évolution des emplois 23 2.1.1.2. Flexibilité et politiques de gestion des ressources humaines 23 2.1.1.3. Flexibilité et performance 24

2.1.2. La problématique dans le contexte d’une grande organisation en mutation : France Télécom 24

2.2. PROTOCOLE METHODOLOGIQUE 28 2.2.1. Démarche générale 28 2.2.2. Première étape, la phase exploratoire 28 2.2.3. Deuxième étape, la phase empirique : trois lieux d’observation 31 2.2.4. Les entretiens semi-directifs : conception et analyse 32

• La construction des guides d’entretiens 32 • L’analyse du contenu des entretiens réalisés 33

2.2.5. Le recours au JDS, Job Diagnostic Survey 33 2.2.5.1. Rappel : Un outil d’enquête avalisé : le « Job Diagnostic Survey » pour mesurer l’impact des TIC sur le contenu et les caractéristiques du travail 33 2.2.5.2. L’apport du JDS dans le protocole méthodologique 36

PARTIE 2 : RECONFIGURATION ET CSRH CHEZ FRANCE TELECOM. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES COMME OBJET DE FLEXIBILITE ? 37

CHAPITRE 3. UNE NOUVELLE STRATEGIE QUI IMPLIQUE UNE RECONFIGURATION DE LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES 37

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3.1. UNE STRATEGIE ORIENTEE VERS LE CLIENT, PERMISE PAR DES DEPLOIEMENTS DE PERSONNELS 37

3.1.1. Rappels historiques et orientations stratégiques 37 3.1.1.1. L’ouverture à la concurrence du marché des télécommunications comme source des transformations actuelles de l’entreprise 37 3.1.1.2. Une stratégie orientée vers le client, sur des segments à forte croissance 39 3.1.1.3. Les entretiens exploratoires : une évolution de France Télécom totalement intégrée par les cadres rencontrés 44

3.1.2. Les déploiements de personnels au cœur des transformations actuelles 45 3.1.2.1. Un statut fonctionnaire préservé, des déploiements de personnel en direction des activités en développement 45 3.1.2.2. La prise en compte des bassins d’emplois dans l’implantation des centres d’appels 46

3.2. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES COMME OBJET DE FLEXIBILITE 47 3.2.1. Evolution de la Gestion des Ressources Humaines durant les années 1990 47

3.2.1.1. Evolution de l’Organisation 1 (EO1) 47 3.2.1.2. Evolution de l’Organisation 2 (EO2) 48

3.2.2. Le projet "RH demain" pour aboutir à une fonction RH créatrice de valeur ajoutée 49

3.2.2.1. Le constat concernant la FRH à la fin des années 1990 et les évolutions souhaitées 49 3.2.2.2. Un discours repris par les acteurs de la fonction dans les entretiens exploratoires50

3.2.3. Les trois volets de "RH Demain" 51 3.2.3.1. L’évolution organisationnelle de la fonction RH et la création des CSRH 51 3.2.3.2. Le recours aux technologies de l’information pour alléger le coût des activités sans valeur ajoutée 53 3.2.3.3. Le manager comme 1er RH de son équipe 54

CHAPITRE 4. LES CENTRES DE SERVICES RESSOURCES HUMAINES : RESULTATS DE L’ANALYSE EMPIRIQUE 56 4.1. CREATION ET FONCTIONNEMENT DES CENTRES DE SERVICES RESSOURCES HUMAINES 56

4.1.1. Peu d’assistants de gestion issus du domaine RH, et dont les motivations divergent 56 4.1.2. Une montée en compétences nécessitant des formations lourdes 57 4.1.3. Une logique client/fournisseur remise en cause 58 4.1.4. Le cahier des charges et ses adaptations locales 59 4.1.5. Gestion administrative des RH et assistance téléphonique : deux types d’activités différentes en termes d’autonomie des assistants de gestion 60

4.2. LA FLEXIBILITE DANS LES CSRH : RESULTATS DE DEUX MONOGRAPHIES 62 4.2.1. Rappels méthodologiques et place des CSRH dans la recherche 62 4.2.2. Analyse des entretiens réalisés au CSRH A 63

4.2.2.1. Caractéristiques et parcours des personnes interviewées 63 4.2.2.2. Flexibilité qualitative interne : travail / formation / autonomie 65 4.2.2.3. Flexibilité quantitative interne : rémunération / temps de travail 70 4.2.2.4. Flexibilité quantitative interne : redéploiements / mobilité 71 4.2.2.5. Relations de travail et relations hiérarchiques 72 4.2.2.6. Évaluation de la performance 74 4.2.2.7. Accompagnement RH : valorisation des métiers / perspective d’évolution 79

4.2.3. Analyse des entretiens réalisés au CSRH B 80 4.2.3.1. Caractéristiques et parcours des personnes interviewées 80 4.2.3.2. Flexibilité qualitative interne : travail / formation / autonomie 81 4.2.3.3. Flexibilité quantitative interne : rémunération / temps de travail 86 4.2.3.4. Flexibilité quantitative interne : redéploiements / mobilité 87 4.2.3.5. Relations de travail et relations hiérarchiques 88 4.2.3.6. Évaluation de la performance 90 4.2.3.7. Accompagnement RH : valorisation des métiers / perspective d’évolution 94

4.3. ANALYSE TRANSVERSALE DE LA FLEXIBILITE DANS LES CSRH 95 4.3.1. De nombreuses convergences entre les deux CSRH 95

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4.3.2. @ssist’RH cristallise les insatisfactions dans le CSRH A 97

PARTIE 3 : LES CENTRES D’APPELS CHEZ FRANCE TELECOM. LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES COMME ACTEUR DE LA FLEXIBILITE ? 99

CHAPITRE 5. LA FLEXIBILITE DANS LES CENTRES D’APPELS : RESULTATS DE TROIS MONOGRAPHIES 99 5.1. ANALYSE DES ENTRETIENS REALISES A L’USO (LE 12) 100

5.1.1. Caractéristiques et parcours des agents interviewés 101 5.1.2. Flexibilité qualitative interne : Travail / Formation / autonomie 103

5.1.2.1. Un contenu du travail pauvre 103 5.1.2.2. Peu d’autonomie dans l’organisation du travail 103 5.1.2.3. Travail et TIC : une automatisation croissante 104

5.1.3. Flexibilité quantitative interne : temps de travail 105 5.1.4. Flexibilité quantitative interne : redéploiement / mobilité 105 5.1.5. Relations de travail et relations hiérarchiques 106 5.1.6. L’évaluation de la performance 107

5.1.6.1. Productivité / qualité / apport des TIC (organisationnelle) 107 5.1.6.2. Motivation/ satisfaction (individuelle) 107

5.1.7. Accompagnement RH : valorisation des métiers / perspectives d’évolution 108 5.1.8. RH et TIC 109

5.2. ANALYSE DES ENTRETIENS REALISES A WANADOO 110 5.2.1. Caractéristiques et parcours des agents interviewés 112 5.2.2. Flexibilité qualitative interne : la nature du travail et son contexte 114

5.2.2.1. Le travail : nature et caractéristiques 114 5.2.2.2. Le travail : Contexte 115

5.2.3. Flexibilité qualitative interne : Relations de travail et relations hiérarchiques 116 5.2.4. Flexibilité qualitative interne : autonomie et contrôle 117

5.2.4.1. Les procédures de contrôle quantitatives 117 5.2.4.2. Les procédures de contrôle qualitatives 117

5.2.5. Flexibilité qualitative interne : La formation et les compétences 118 5.2.6. Flexibilité quantitative interne : redéploiement / mobilité 119 5.2.7. Flexibilité quantitative interne : temps de travail 119 5.2.8. L'évaluation de la performance. 120 5.2.9. Accompagnement RH : valorisation des métiers et perspectives d'évolutions. 122

5.3. ANALYSE DES ENTRETIENS REALISES CHEZ ORANGE 124 5.3.1. Caractéristiques et parcours des personnes interviewées 125 5.3.2. Flexibilité qualitative interne : travail / formation / autonomie 127

5.3.2.1. Le travail : contexte, caractéristiques et contenu 127 5.3.2.2. L’autonomie et le contrôle 130 5.3.2.3. La formation et les compétences : une formation initiale satisfaisante mais trop peu de temps pour intégrer les mises à jour 132

5.3.3. Flexibilité quantitative interne : temps de travail et rémunération 133 5.3.3.1. Les horaires de travail souvent subis 133 5.3.3.2. Une « tolérance forcée » sur l’organisation des pauses 133 5.3.3.3. Une prime indexée sur les résultats de la plate-forme 134

5.3.4. Flexibilité quantitative interne : le redéploiement ou les effets d’une mobilité « imposée » 134 5.3.5. Evaluation de la performance 135

5.3.5.1. Productivité / qualité / apport des TIC (performance organisationnelle) 135 5.3.5.2. Motivation/ satisfaction (performance individuelle) 135

5.3.6. L’accompagnement RH : une valorisation médiocre et peu de perspectives d'évolution 137 5.3.7. RH et TIC 138

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CHAPITRE 6. POUR UNE ANALYSE SYNTHETIQUE TRANSVERSALE DE LA FLEXIBILITE DANS LES CENTRES D’APPELS 139 6.1. UNE ANALYSE QUALITATIVE INTER-SITES 139

6.1.1. Une population âgée issue des redéploiements de FT 139 6.1.2. Une flexibilité qui s'exerce en premier lieu sur les temps de travail (flexibilité quantitative interne)… 139

- Des horaires de travail "subis" ou "choisis" 139 - Une organisation des temps de travail étroitement liée aux flux d'appels 140

6.1.3. … mais également sur le contenu du travail (flexibilité qualitative) 140 - Une remise à jour permanente des connaissances chez Ola et Wanadoo 140 - Une relation client parfois complexe à gérer… 141 - Mais un travail qui reste répétitif et routinier 141

6.1.4. Une évaluation des performances axée sur la productivité 142 6.1.5. Flexibilité et performance individuelle : un constat préoccupant… 143 6.1.6. Un rôle limité de la GRH comme acteur et accompagnateur des changements liés à la flexibilisation 143

6.2. UN ECLAIRAGE COMPLEMENTAIRE A TRAVERS LES REPONSES AU QUESTIONNAIRE DU JOB DIAGNOSTIC SURVEY (JDS) 147

6.2.1. Les caractéristiques de l'outil 147 6.2.2. Pré-requis à l’analyse explicative 148

6.2.2.1 Description de la population 148 6.2.2.2 Validité de l’instrument 150 6.2.3. L’étude du lien unissant les caractéristiques du travail et la satisfaction dans les centres d’appels : Wanadoo est-il différent d’Orange ? 151

6.3. VERS UNE MISE EN PERSPECTIVE THEORIQUE : CONFRONTATION DES RESULTATS A LA LITTERATURE 159

6.3.1. Deux visions opposées des centres d’appels, mais un travail qui reste majoritairement taylorisé 159 6.3.2. Une typologie de quatre types de centres d’appels, à l’organisation du travail et aux objectifs divergents 160 6.3.3. Des spécificités des centres intégrés ? 162 6.3.4. Le degré d’industrialisation lié à la complexité du travail 163 6.3.5. Une tension entre productivité et qualité de service 164 6.3.6. Vers une diversification des activités pour dépasser la taylorisation ? 164

CONCLUSION GENERALE 166 BIBLIOGRAPHIE 170 ANNEXES 174