Rapport d'information sur la sûreté aérienne et aéroportuaire

Embed Size (px)

Citation preview

N 4068______

ASSEMBLE NATIONALECONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958TREIZIME LGISLATURE

Enregistr la Prsidence de l'Assemble nationale le 13 dcembre 2011.

RAPPORT DINFORMATIONDPOS en application de larticle 145 du RglementPAR LA MISSION DINFORMATION

sur la sret arienne et aroportuaireAU NOM DE LA COMMISSION DU DVELOPPEMENT DURABLE ET DE LAMNAGEMENT DU TERRITOIRE

ET PRSENTPAR M.

DANIEL GOLDBERG ET M. DIDIER GONZALES

Dputs.

3

SOMMAIRE___Pages

INTRODUCTION..............................................................................................................I. LA SRET ARIENNE SINSCRIT DANS UN PAYSAGE PARTICULIREMENT COMPLEXE, MAIS ELLE CONSTITUE UN ENSEMBLE QUI TEND UNE CERTAINE COHRENCE .................................................................................................. A. LA SRET ARIENNE SINSCRIT DANS UN PAYSAGE PARTICULIREMENT COMPLEXE ..........................................................................

5

9 9 9 11 17 20 21 21 23 25 26 29 35 35 35

1. Cest un univers marqu par la dmesure ....................................................... 2. Cest un univers marqu par la diversit .......................................................... 3. Cest un univers confront des dfis considrables ....................................B. LA SRET ARIENNE CONSTITUE UN ENSEMBLE TENDANT UNE CERTAINE COHRENCE ........................................................................................

1. Une rglementation particulirement dveloppe........................................... a) La rglementation internationale ...................................................................... b) La rglementation europenne.......................................................................... c) La rglementation nationale ............................................................................. 2. Le choix par la France dactivits de surveillance opres par des socits prives ................................................................................................. 3. Limportance des contrles et de la coordination effectus par ltat ...........II. LA SRET ARIENNE IMPOSE UNE LUTTE INCESSANTE ET POURTANT, ELLE REPOSE SUR DES OUTILS ET DES PROCDURES PERFECTIBLES ................. A. UNE LUTTE INCESSANTE ....................................................................................

1. Un combat efficace qui obtient des rsultats ................................................... 2. Des rsultats qui ne doivent pas faire oublier que la lutte contre le terrorisme arien est particulirement difficile par nature et quelle prsente un cot lev ...................................................................................... 3. Des menaces qui persistent .............................................................................. a) Les menaces traditionnelles se diversifient ....................................................... b) De nouvelles menaces se profilent, encore mal connues et mal analyses ......... c) Certains contrles demeurent fragiles...............................................................

38 41 41 44 46

4 B. DES OUTILS ET DES PROCDURES QUI RESTENT PERFECTIBLES...............

49 49 50 51 57 59 65 65 65 66 67 68 69 71 79

1. Linspection filtrage et laction des agents de sret arienne : une technique critique............................................................................................. a) Linspection filtrage suscite depuis longtemps des critiques et des insatisfactions .................................................................................................. b) Laction des agents de sret............................................................................ 2. Le renseignement et linformation : des modes de contrle valoriser et dvelopper....................................................................................................... 3. Le recours aux scanners corporels et au profiling : des formules modernes trop peu utilises .............................................................................. LES PRCONISATIONS DE LA MISSION D'INFORMATION .................................. Sur la gouvernance de la sret arienne .......................................................... Sur la prise en compte des risques ..................................................................... Sur les outils de la politique de sret................................................................ Sur les entreprises et les agents de la sret arienne ........................................ Autres mesures .................................................................................................. CONCLUSION ................................................................................................................. EXAMEN EN COMMISSION .......................................................................................... LISTE DES PERSONNES AUDITIONNES ................................................................ ANNEXE 1 : ANNEXE 17 LA CONVENTION RELATIVE LAVIATION CIVILE INTERNATIONALE ............................................................................................ ANNEXE 2 : RGLEMENT (CE) N300/208 DU PARLEMENT EUROPEN ET DU CONSEIL DU 11 MARS 2008 RELATIF L'INSTAURATION DE RGLES COMMUNES DANS LE DOMAINE DE LA SRET DE L'AVIATION CIVILE ET ABROGEANT LE RGLEMENT (CE) N2320/2002 .............................................

83

87

5

MESDAMES, MESSIEURS,

Le 12 janvier 2011, le Bureau de la commission du dveloppement durable et de lamnagement du territoire elle-mme en charge du secteur des transports ariens dcidait de crer une mission dinformation sur la sret arienne et aroportuaire, la commission dsignant ensuite, le 9 fvrier 2011, vos Rapporteurs pour conduire cette mission. La question de la lutte contre le terrorisme arien est de fait une proccupation constante de lAssemble nationale, en raison des destructions, des drames de toutes sortes que celui-ci entrane et de la ngation profonde quil reprsente de nos valeurs dmocratiques, comme de ce principe majeur de laviation civile qui est de rapprocher les hommes. Cette proccupation constante, lAssemble nationale lexprime, lors de lexamen annuel du budget des transports ariens, dans llaboration de la loi, travers lactivit de ses commissions, comme dans le cadre de ses missions de contrle. Nombreux sont ainsi les dbats et travaux intervenus sur ce thme de la lutte pour la sret arienne dans la priode rcente, en tout cas, depuis cette date charnire , quont constitu les vnements du 11 septembre 2001. Vos Rapporteurs pensent, parmi dautres exemples, au rapport dinformation sur la sret du transport arien en Europe prsent le 12 avril 2005 par M. Thierry Mariani, au nom de la dlgation de lAssemble nationale pour lUnion europenne, au rapport dinformation prsent le 16 novembre 2011 par M. Guy Geoffroy, au nom de la commission des affaires europennes, sur le projet de mise en place dun systme europen de collecte et de traitement des donnes des dossiers passagers ( passenger name record ou PNR) ou encore aux dbats tenus, dans le cadre de llaboration de la loi du 14 mars 2011, dorientation et de programmation pour la performance de la scurit intrieure ( LOPPSI 2 ), sur la question de linstallation de scanners corporels dans nos aroports. Proccupe de terrorisme arien, lAssemble nationale sattache une tude sans concession des dysfonctionnements de la politique de sret. Rgulirement, des rapports officiels, des articles de presse, des missions tlvises font dailleurs apparatre de tels dysfonctionnements existants ou

6

potentiels ; ainsi en a-t-il t, le 6 janvier 2011, dune mission de France Tlvisions, Envoy spcial , intitule Police prive La scurit au rabais . Dans le prsent rapport, vos Rapporteurs, aprs plusieurs mois de travaux et de nombreuses auditions des diverses parties prenantes la question de la lutte contre le terrorisme arien, sefforceront de prsenter une forme de bilan de la sret arienne ; ils tenteront surtout dexposer quelques propositions concrtes, quils souhaitent rapidement oprationnelles. Deux formules fortes pourraient rendre compte de lesprit dans lequel ils ont men leurs rflexions : un propos, tout dabord, que tenait le Secrtaire gnral de lOrganisation de laviation civile internationale (OACI), M. Raymond Benjamin, le 17 fvrier 2011, devant la Chambre de commerce franaise au Canada : Dans le domaine de la lutte anti-terroriste, il ne fait aucun doute que le mot dordre est : tolrance zro ; un considrant ensuite du rglement communautaire du Parlement europen et du Conseil du 16 dcembre 2002 relatif linstauration de rgles communes dans le domaine de la sret de laviation civile : Les actes criminels commis New York et Washington le 11 septembre 2001 montrent que le terrorisme constitue lune des plus graves menaces qui soient pour les idaux de dmocratie et de libert et pour les valeurs de paix qui sont lessence mme de lUnion europenne. . Comment dfinir prcisment la sret arienne ? Cest la security en anglais, qui se proccupe de la protection des avions et des zones aroportuaires contre les attaques volontaires, actes de terrorisme ou de dmence, quil faut ainsi distinguer de la scurit arienne , la safety , qui est relative, elle, la construction et au fonctionnement des avions, la lutte contre les accidents et les incidents. Lannexe XVII de la Convention de Chicago du 7 dcembre 1944 relative laviation civile internationale qui figure en annexe du prsent rapport a donn, de cette notion de sret, une dfinition stricte : la sret arienne est la combinaison des mesures ainsi que des moyens humains et matriels visant protger laviation civile contre les actes dintervention illicite . Elle sapparente ainsi la scurisation des aronefs, des passagers et de leurs bagages, des quipages, des personnels au sol, du fret, des zones aroportuaires accessibles uniquement aux personnes munies dun titre daccs, dites zones rserves . Vos Rapporteurs ont choisi, par souci de ralisme, de donner cette notion, un contenu trs large et volutif, et de considrer ainsi, que la politique de sret arienne concerne aussi la protection de lensemble des infrastructures aroportuaires et mme, avec la monte des menaces, celle des zones limitrophes des aroports et, plus loin encore, la protection des quipages ltranger.

7

Vos Rapporteurs estiment que le terrorisme demeure aujourdhui un danger mortel, comme lont rappel les attentats de Madrid, le 11 mars 2004, de Londres, le 7 juillet 2005, plus rcemment, celui de Marrakech, le 28 avril 2011, comme lont rappel aussi les tentatives dattentats ariens djoues au cours de la dcennie qui vient de scouler. Ils estiment quil appartient tous de mener un vaste effort dimagination, de courage et de rflexion la hauteur des enjeux et des menaces existants. Et cet effort incombe aux pouvoirs publics, comme aux acteurs conomiques et la socit civile tout entire, ainsi que le rappelait le Livre blanc sur la dfense et la scurit nationale qui, publi en juin 2008, dfinit la stratgie globale de scurit de notre pays dici 2020. Deux temps vont rythmer ce rapport dinformation, avant que vos Rapporteurs prsentent leurs suggestions touchant la politique conduire : la sret arienne sinscrit certes dans un paysage particulirement complexe, mais elle constitue un ensemble qui tend une certaine cohrence ; la sret arienne impose une lutte incessante et pourtant, elle repose sur des outils et des procdures qui demeurent perfectibles.

9

I. LA SRET ARIENNE SINSCRIT DANS UN PAYSAGE PARTICULIREMENT COMPLEXE, MAIS ELLE CONSTITUE UN ENSEMBLE QUI TEND UNE CERTAINE COHRENCEA. LA SRET ARIENNE SINSCRIT PARTICULIREMENT COMPLEXE DANS UN PAYSAGE

La mission dinformation a t frappe, tout au long de ses travaux, par la complexit de la sret arienne : cet univers est plac sous le signe de la dmesure ; il est marqu par la diversit ; il est confront des dfis considrables.1. Cest un univers marqu par la dmesure

Le premier lment de complexit du paysage de la sret arienne rside sans doute dans le fait que la lutte contre le terrorisme arien doit sexercer dans un univers vaste, dmesur. Le terrorisme arien est ainsi un phnomne mondial, susceptible de concerner potentiellement tous les tats (mme si les grands pays, tats-Unis, France, Royaume-Uni ou ceux qui sont le thtre de conflits sont plus particulirement concerns), tous les aronefs (les lignes intrieures, comme ce fut le cas, lors des attentats du 11 septembre 2001, aussi bien quinternationales), toutes les zones aroportuaires, les plus grandes comme les plates-formes secondaires ou daffaires. Vos Rapporteurs ont mesur ds lors rapidement, la ncessit dviter toute vision troite, franco-franaise des problmes et de retenir leur dimension internationale, intercontinentale, les activits terroristes transcendant par nature les frontires. Ils ont ainsi pris en compte la rglementation et les ngociations internationales touchant la sret arienne, les aspects europens de cette question, en se penchant sur les travaux des instances communautaires, mais aussi la lgislation compare, en examinant les rgles quont retenues nos partenaires allemands, britanniques, espagnols, nerlandais ou nord-amricains, car les problmes actuels de la sret arienne doivent tre poss essentiellement aux plans europen et international. Lampleur des chiffres, des volumes qui caractrisent les transports ariens est un signe de la dmesure, de la dmultiplication, dans laquelle sinscrivent les efforts mens pour assurer la sret arienne. Celle-ci doit sappliquer, rappelait ainsi M. Charles de Courson, rapporteur spcial du budget des transports ariens, lors de son audition par la mission dinformation, alors que des centaines de milliers davions sont en permanence en rotation . La visite que vos Rapporteurs ont faite, le 16 juin 2011, laroport de Roissy a rappel, que le trafic de Paris-Charles de Gaulle concernait, en 2010,

10

58 millions de passagers et 2,4 millions de tonnes de fret, que 5 000 passagers passent quotidiennement par un seul poste dinspection filtrage, que jusqu 50 000 bagages de soute peuvent tre traits par heure, que Paris-Charles de Gaulle accueille toutes les grandes compagnies et toutes les grandes alliances, y compris les compagnies du Golfe, que son hub (1) offre 21 000 possibilits de correspondance hebdomadaires, que la zone rserve de laroport, celle laquelle ne peuvent accder que les personnes munies dune autorisation ( badge ou titre de transport) et qui doit faire lobjet dune surveillance spciale couvre pas moins de 2 500 hectares... On pourrait, pour poursuivre cette analyse, rappeler galement, quen 2010, le trafic arien mondial a concern, 2,5 milliards de passagers et que ceux-ci taient alors 120,6 millions en France, dont 44,6 millions de passagers dans les neuf aroports rgionaux dintrt national, quil a concern aussi 43 millions de tonnes de marchandises et souligner que, selon les perspectives de lOrganisation de laviation civile internationale, le trafic arien moyen rgulier de passagers pourrait progresser un taux annuel voisin de 4 % dici 2025 Cest dans cet univers marqu par une certaine dmesure, un certain gigantisme, quil faut affronter en permanence un ennemi inconnu, trs difficile dtecter, susceptible de crer les plus grands dommages, en utilisant la menace de simples couteaux lame rtractable, comme ce fut le cas, lors des attentats du 11 septembre ou en recourant une faible quantit dexplosifs. Lennemi peut tre un tat, un groupe de terroristes (la quadruple attaque arienne du 11 septembre 2001 a t commise par dix-neuf pirates de lair) ou un individu isol. On peut galement tre en prsence de terroristes, mais aussi de personnes dsquilibres , qui peuvent videmment, elles aussi, commettre des actes de violence illicite contraires la sret arienne. Tout se passe, en dfinitive, comme si les tats se trouvaient devant des frontires immenses surveiller, mouvantes quant leurs risques potentiels et quils devaient toujours poursuivre des candidats laction terroriste, qui oprent partir de donnes et dobjets infimes. Le terrorisme arien a connu en ralit plusieurs ges. Les annes 70 ont t marques par les dtournements daronefs et les prises dotages, principalement en lien avec le conflit du Proche-Orient. Avec les annes 80, sont apparues ensuite les destructions davions en vol (lattentat de Lockerbie en 1988, celui du DC10 dUTA en 1989). Les vnements du 11 septembre 2001 ont marqu un nouveau temps de la piraterie arienne : celui des avions-suicides, o les aronefs cessent dtre des

(1) Le terme de hub dsigne une plate-forme de correspondance, qui permet aux compagnies ariennes deffectuer des changements rapides.

11

cibles, pour devenir eux-mmes des armes susceptibles de crer des dommages considrables (plus de 3 000 morts, dans le cas du 11 septembre). Aujourdhui, comme lestiment les responsables du Secrtariat gnral de la dfense et de la scurit nationale, le SGDSN, dont la mission dinformation a auditionn le Secrtaire gnral, M. Francis Delon, la menace est toujours dactualit, mme si la probabilit de voir se rpter un scnario du type de celui du 11 septembre 2001 semble plus faible, du fait des mesures importantes de sret mises en place dans les aroports commerciaux et bord des aronefs. Les nouveaux axes deffort doivent porter aussi sur la sret des arodromes daviation lgre ou daffaires et sur celle des petits aronefs volant, par exemple, aux abords des grandes agglomrations ou de sites dimportance vitale (dpts ptroliers, centrales nuclaires). L ennemi insaisissable est aujourdhui, de plus en plus, un individu oprant seul, comme le montrent deux exemples rcents dattentats djous, dont il sera, plusieurs reprises, question dans ce rapport : celui de Richard Reid, un musulman britannique qui, le 22 dcembre 2001, tentait de faire exploser, dans le vol 63 dAmerican Airlines reliant Paris Miami, avec 183 personnes bord, une petite quantit dexplosif dissimule lintrieur de ses chaussures ; celui dOmar Mutallab, un jeune Nigrian qui, le 25 dcembre 2009, aprs avoir embarqu Lagos, tentait, sur le vol Northwest 253 AmsterdamDetroit transportant 278 passagers, de mettre le feu un explosif puissant, quil avait cach sous ses vtements. Le danger peut venir aussi dobjets isols ou de taille rduite, comme le montre une autre tentative rcente (le 29 octobre 2010) dattentat djoue, cette fois sur les activits de fret ; deux colis pigs destination des tats-Unis en provenance du Ymen ont t intercepts alors Londres et Duba, un des colis contenant des mlanges dexplosifs dissimuls dans une imprimante dordinateur.2. Cest un univers marqu par la diversit

Plac sous le signe de la dmesure, du gigantisme, le paysage de la sret arienne frappe ds lors logiquement par sa grande diversit, celle dabord des sites, des personnes, des objets contrler ; celle ensuite des intervenants ; celle enfin des outils de contrle auxquels il est recouru. La diversit, la multiplicit des sites, des personnes, des objets contrler est sans doute propre la sret arienne. Cette diversit rend elle-mme difficile la politique conduire et ne facilite pas lvaluation des procdures ainsi que celle de laction des oprateurs publics et privs.

12

LAnnexe du rglement n 300/2008 du Parlement europen et du Conseil du 11 mars 2008 relatif linstauration de rgles communes dans le domaine de la sret de laviation civile, qui figure en annexe du prsent rapport, donne une ide assez prcise, par exemple, de cette diversit des zones, des personnes, des objets contrler : tous les passagers au dpart et ceux qui sont en correspondance (qui partent par un autre aronef que celui par lequel ils sont arrivs) ou en transit (qui utilisent le mme aronef) ainsi que leurs bagages de cabine (1) : il est indispensable, en effet, dempcher lintroduction darticles prohibs dans des zones dites de sret accs rglement et bord des aronefs ; il en va de mme pour les bagages de soute, une procdure de vrification devant permettre de sassurer quaucun bagage isol na t embarqu bord (principe de la rconciliation bagage- passager ) ; le fret et le courrier doivent galement tre contrls en totalit, avant leur chargement bord dun aronef ; cette mme rgle sapplique aux approvisionnements de bord, y compris la restauration, destins tre transports ou utiliss bord des avions ; les personnes autres que les passagers (quipages, maintenance) et les objets quelles transportent doivent eux aussi tre contrls lentre des zones accs rglement, de mme que les vhicules y accdant ; les aronefs eux-mmes doivent faire lobjet de vrifications ou de fouilles de sret avant leur dpart, afin de sassurer quaucun objet prohib ne se trouve bord ; des mesures de sret en vol doivent enfin tre dfinies, telles que linterdiction pour les personnes non autorises daccder au poste de pilotage au cours du vol ou lapplication de mesures appropries vis--vis de passagers susceptibles de crer des troubles. Vos Rapporteurs observent que, de plus en plus, les aroports eux-mmes pour ce quil est convenu dappeler la zone publique , librement accessible sans titre ni autorisation particulire (parcs de stationnement, banques denregistrement, espaces daccueil, activits commerciales) sont considrs comme pouvant faire lobjet dactes terroristes. Les infrastructures aroportuaires constituent de fait un potentiel trs important pour un pays et son conomie. Ainsi, la notion stricte de sret arienne , qui se proccupe dempcher lintroduction dans les zones daccs rserv et bord des aronefs, darmes, dexplosifs ou dautres objets dangereux pouvant conduire des actes dintervention illicite se complte-t-elle, de plus en plus, de la prise en compte(1) Un contrle unique de sret est pratiqu pour tous les vols lintrieur de l espace Schengen .

13

dune sret aroportuaire, qui concerne lensemble de laroport et ses zones connexes. La diversit que lon observe est celle ensuite des acteurs de la sret arienne, cette multiplicit des intervenants pouvant nuire la cohrence de la politique mene. En France, par exemple, les acteurs publics sont nombreux : la direction gnrale de laviation civile (DGAC) a une mission gnrale de rglementation et de contrle en matire de transport arien civil et ses agents sont prsents sur toutes les plates-formes aroportuaires ; la police aux frontires (PAF) relve du ministre de lintrieur et est charge, pour lessentiel, de contrler les agents de surveillance salaris de socits prives, mais a aussi des responsabilits en matire de protection des frontires et de lutte contre limmigration irrgulire ; la PAF est prsente plutt dans les zones publiques des aroports ; la gendarmerie du transport arien (GTA) relve de la DGAC et du ministre de la dfense ; elle est prsente dans 40 aroports et assume des responsabilits en matire dordre public et de conduite denqutes judiciaires conscutives aux accidents et incidents daronefs. Dans le domaine de la sret arienne, la GTA, qui exerce ses activits plutt en zone rserve , soumise des conditions daccs et ct pistes , est notamment charge du contrle des bagages de soute et de la surveillance des avions ; le service des douanes relve du ministre des finances ; il est principalement en charge aujourdhui de la scurisation du fret au dpart. Les acteurs sont aussi privs : les gestionnaires daroports et les transporteurs ariens doivent, aux termes de la rglementation, laborer eux-mmes des programmes de sret arienne et peuvent complter les mesures prvues par la rglementation applicable ; les transporteurs ariens ont galement la responsabilit dassurer le respect du principe de la rconciliation bagagepassager ; les socits de sret lies par contrats de sous-traitance aux gestionnaires daroports et leurs salaris inspectent au quotidien les passagers, leurs bagages (de soute et de cabine), les vhicules, les personnels les personnels au sol et navigants sont habitus, par exemple, surveiller les bagages abandonns, dtecter les passagers au comportement suspect. Les passagers peuvent eux-mmes devenir ponctuellement acteurs en matire de sret arienne, comme le donne penser lexemple des deux tentatives dattentats ariens, de dcembre 2001, puis de dcembre 2009, que lon

14

a prcdemment voques, o les candidats laction terroriste ont t neutraliss en partie par des passagers. La diversit des intervenants peut tre source de difficults, quant la synergie des actions entreprises, chacun des acteurs pouvant avoir parfois le sentiment dagir de manire un peu isole ; mais, elle peut inspirer aussi une relle complmentarit, comme le montre laction Russir trois mene en commun par un gestionnaire daroport, Aroports de Paris (ADP), un transporteur arien (Air France) et une administration, la police aux frontires (PAF). La diversit de lunivers de la sret arienne rsulte enfin de la multiplicit des outils et des pratiques de contrle. Loutil emblmatique de cette surveillance, bien connu de chacun dentre nous est le poste dinspection filtrage (PIF) des passagers et de leurs bagages de cabine. Lobjet du contrle pratiqu est dempcher lintroduction, bord des aronefs, dobjets dangereux susceptibles dtre utiliss pour des actes de violence illicite commis dans la cabine ou le cockpit de lavion. Aussi, sont prvus, aux postes dinspection filtrage, des portiques de scurit (fixes) et des magntomtres (portables), visant la dtection de masses mtalliques, des quipements rayons X et, dans 10 % environ des PIF, dautres quipements permettant de dceler des traces dexplosifs (ionscan). Un poste dinspection filtrage de passagers et de leurs bagages de cabine comporte, en principe, suivant les prconisations de lOrganisation de laviation civile internationale (OACI), au moins cinq contrleurs, un amont , un autre lcran , deux la palpation , un dernier la fouille manuelle des bagages, laquelle doit recueillir laccord des passagers. Un roulement de ces agents doit tre programm toutes les vingt minutes. Les agents de sret prsents dans un poste dinspection filtrage peuvent galement, depuis lintervention de la loi du 15 novembre 2001, procder des palpations de scurit sur les passagers, avec leur consentement ; il sagit, pour eux, de passer leurs mains sur les vtements de ces passagers, pour sassurer quils ne portent pas darme ou tout autre objet prohib. Il peut tre galement recouru des fouilles corporelles, qui comportent un examen des vtements et du corps des personnes et qui ne sont susceptibles dtre opres que par des officiers de police judiciaire du mme sexe que les personnes contrles. Elles doivent tre distingues des fouilles des cavits corporelles, qui ne peuvent tre ralises, elles, que par des mdecins. Comme lindiquait M. Patrick Gandil, directeur gnral de laviation civile (DGAC), lors de son audition par la mission dinformation, certains contrles oprs aux postes dinspection filtrage des passagers et de leurs bagages de cabine, tels que la fouille manuelle des bagages et la palpation de scurit ne

15

peuvent tre conduits dans les faits 100 %, car la circulation doit tre facilite et portent, en gnral, sur environ 70 % des passagers et de leurs bagages main. Le contrle des bagages de soute est effectu, quant lui, par des agents de sret installs en sous-sol des arogares, partir dappareils rayons X et ventuellement de tomographes, un systme plus perfectionn, pour les bagages suspects (environ 30 % dentre eux). Ce contrle est considr en France comme scuris 100 % , depuis juin 2002. Les personnels navigants et les objets quils transportent sont soumis, depuis les vnements du 11 septembre 2001, aux mmes contrles (inspection filtrage) que les passagers. Les personnels accdant aux zones rserves font lobjet de contrles biomtriques et par rapprochement documentaire, entre documents didentit et titres daccs. Les vhicules pntrant en zone rserve par des Parif (postes daccs routiers dinspection filtrage) donnent lieu, selon les cas, des fouilles manuelles et des examens laide de miroirs de contrle et ventuellement dquipes cynotechniques. Le fret et les envois postaux sont soumis des vrifications physiques, pouvant tre ralises par des fouilles manuelles, des contrles radioscopiques et des quipes cynotechniques. Des rondes pitonnes et vhicules sont organises autour des avions, qui font eux-mmes lobjet de fouilles de sret avant leur dpart. Ces rondes sont organises galement autour des btiments dits sensibles . Au-del de ces trs nombreux outils classiques de contrle, intensifis au fur et mesure que lon sapproche des avions, existent des techniques plus modernes, auxquelles recourent plus souvent certains pays partenaires. Tel est videmment le cas des scanners corporels ou body scanners utiliss pour linspection des passagers. Les scanners corporels permettent de dtecter les objets interdits dissimuls sous les vtements des passagers, vitant ainsi ces derniers des palpations de scurit, quils jugent parfois trop intrusives. Il existe aujourdhui plusieurs types de scanners, rayons X, les plus anciens, utiliss aux tats-Unis et ondes millimtriques, plus rcents et dpourvus dincidences sur la sant humaine. Sil est largement pratiqu aux tats-Unis et aux Pays-Bas, le systme des scanners corporels na t utilis en France, qu titre exprimental, deux reprises, pour des vols destination prcisment des tats-Unis : Nice, en 2008, puis Roissy-Charles-de-Gaulle, entre fvrier et mai 2010, o il a concern 8 000 personnes.

16

Mentionnons galement la technique du profiling ou profilage , qui consiste tablir un profil psychologique des individus, sappuyant sur leur reconnaissance visuelle et lanalyse de leur comportement. Dans le mcanisme du profiling , par exemple, deux ou trois agents spcialiss se trouvant en amont dun poste dinspection filtrage vont identifier une cible, confronter ensuite leurs apprciations, puis faire part discrtement, aux agents du poste dinspection filtrage, de la ncessit dune palpation de scurit. Des camras de reconnaissance des comportements peuvent tre galement utilises cet effet. Cette technique laquelle recourent largement les tats-Unis et Isral et qui a obtenu des rsultats significatifs dans la lutte contre les stupfiants, na, elle aussi, t que trs peu utilise en France pour linstant, du fait notamment de son cot ; elle est considre dans notre pays comme plutt relie aux fonctions rgaliennes de ltat. Mentionnons aussi lodorologie canine, un peu plus dveloppe en France que les deux techniques prcdentes. Utilise principalement dans le secteur du fret, elle sappuie sur les capacits exceptionnelles de dtection des chiens, particulirement utiles dans la lutte contre les explosifs. Son dveloppement est entrav pourtant, par le fait quun chien ne peut travailler en principe plus de trois heures, un explosif nagissant pas sur son systme nerveux, comme un produit stupfiant, par exemple. Lodorologie canine pourrait pourtant tre valorise, dans les annes qui viennent, dans le contrle des passagers. Les contrles de sret arienne sexercent enfin en France uniquement au sol, la diffrence de ce qui se produit notamment aux tats-Unis et en Isral, mais aussi en Suisse et en Autriche, o des contrles sont prvus galement en vol, avec la prsence de gardes arms embarqus lintrieur des aronefs. Cette dernire technique surtout dveloppe aux tats-Unis, ds les annes soixante-dix, avec les sky marshalls a t recommande, aprs les vnements du 11 septembre, par lOrganisation de laviation civile internationale (OACI) ; mais, sur les vols dAir France, seuls des agents du GIGN ou du RAID ont pu tre sollicits de manire exceptionnelle, depuis 2003, la demande dun pays tiers ou des services franais, faisant tat dun risque sur un vol donn. Au-del dailleurs des outils, il faut voquer aussi les pratiques mmes de contrle des diffrentes plates-formes aroportuaires, qui peuvent tre assez diverses. Ainsi, en va-t-il de lobligation denlever ses chaussures aux postes dinspection filtrage de certains aroports, non impose dans dautres ; de la mme faon, il a parfois t observ que les agents de sret peuvent retirer certains objets (couteaux suisses, par exemple) des passagers dans tel aroport et adopter une attitude diffrente dans un autre Lapproche des risques elle-mme peut dailleurs sembler manquer parfois de cohrence : si des couteaux peuvent tre confisqus ainsi linspection filtrage, lon observe que des bouteilles en verre sont vendues dans les boutiques duty free ou que des couteaux sont utiliss par les passagers pour les repas servis bord

17

Cette diversit des pratiques de contrle trouble souvent les passagers, qui aspirent une uniformisation des rgles et des conduites de contrle dans tous les postes dinspection filtrage.3. Cest un univers confront des dfis considrables

Autre lment de sa complexit, la sret arienne est un univers confront des dfis considrables, ceux que pose ncessairement la conciliation de lexigence dune scurit maximale avec les demandes et les souhaits des parties prenantes au transport arien, avec les protections quoffre le droit, avec les contraintes de lconomie. Vos Rapporteurs retiendront plusieurs exemples de cette difficile conciliation. La conciliation entre les exigences de la sret arienne et les souhaits et demandes de nombreuses parties prenantes au transport arien est le premier grand dfi. La recherche de la plus grande sret arienne impose des contrles stricts, approfondis, lapplication dune rglementation dtaille, lusage de techniques labores. Mais, le souhait des passagers, comme des personnels navigants soumis aux mmes contrles que ces derniers, depuis les vnements du 11 septembre 2001, est, par exemple, que le transit aux aroports se fasse rapidement , celui des compagnies ariennes est, en particulier, que leurs avions partent bien lheure . M. Claude Kupfer, directeur de la sret Aroports de Paris, a pu indiquer ainsi vos Rapporteurs, lors de son audition, quil tait souhaitable, pour un passager, que le temps ddi la sret ne dpasse pas cinq minutes dattente (1). Comme lestimait M. Raymond Benjamin, secrtaire gnral de lOrganisation de laviation civile internationale (OACI), dans une allocution prononce devant la Chambre de commerce franaise au Canada le 17 fvrier 2011, lquilibre entre les exigences de sret et les demandes des acteurs du transport arien est difficile alors maintenir. Des procdures trop lourdes ou contraignantes peuvent paralyser le transport arien, alors que des mesures trop librales pourraient mettre les passagers et les quipages en pril .

(1) Des dispositifs existent lheure actuelle, pour rduire le temps dattente des passagers, tels que le systme PARAFE (passage automatis rapide des frontires extrieures) applicable Roissy et Orly : il consiste en un contrle biomtrique facilitant le passage transfrontire de lespace Schengen et permet un gain de temps pour les passagers frquents inscrits dans ce systme.

18

M. Raymond Benjamin poursuivait : notre but ultime et, je ladmets, cest encore loin dtre le cas aujourdhui, est de faire en sorte que le temps dattente aux postes de contrle filtrage soit le plus court possible et que les mesures en place soient invisibles aux passagers, tout en offrant le plus haut niveau de protection . Les objectifs de la sret arienne doivent galement tre concilis avec les protections quoffre le droit. Les contrles ncessairement dvelopps exercs sur les passagers doivent aussi respecter les liberts publiques et la dignit personnelle. On a vu prcdemment que les agents de sret ne peuvent procder, aux postes dinspection filtrage, la fouille manuelle des bagages des passagers et des palpations de scurit sur ceux-ci, quavec leur consentement. Ces rgles sont contenues dans larticle L. 6342-2 du code des transports, tel quil rsulte des dispositions de la loi dorientation et de programmation pour la performance de la scurit intrieure ( LOPPSI 2 ) du 14 mars 2011. De la mme faon, les fouilles corporelles obissent aux rgles prvues en matire de perquisitions : elles ne peuvent tre ralises que par des officiers de police judiciaire, du mme sexe que les personnes contrles. Rcemment, la mise en place de scanners corporels a t lorigine de nombreux dbats touchant la prservation des droits fondamentaux et de la dignit personnelle, parce quils permettent linspection filtrage doprer un examen des passagers au-del de leurs vtements. La Commission nationale informatique et liberts (CNIL) a pos un certain nombre de limites au recours ce nouvel outil de contrle : la ncessit de recueillir laccord des passagers inspects, limpossibilit, pour la personne qui examine limage, de voir celle qui est contrle, linterdiction de stocker cette image. Ces dispositions ont t largement reprises dans la loi LOPPSI 2 et larticle L. 6342-2 du code des transports, que lon examinera dans la suite de ce rapport. Elles ont t reprises ensuite trs rcemment dans le rglement de la Commission europenne, du 14 novembre 2011, entr en vigueur le 2 dcembre autorisant la formule des scanners de scurit en Europe, alors quils ntaient utiliss jusqu maintenant que sous forme de tests. Les rgles adoptes par la Commission europenne dfinissent un cadre juridique europen, en cas de recours cette technique. Seuls les scanners ondes millimtriques sont ainsi autoriss ; le dispositif communautaire retient galement un ensemble de rgles visant protger les liberts individuelles et la vie prive.

19

Il faut mentionner aussi la question des donnes personnelles qui doit tre concilie avec la sret arienne et voquer les problmes que posent les PNR (passenger name record) ou donnes des dossiers passagers . Les compagnies ariennes et les agences de voyage sont amenes collecter diverses informations auprs des passagers, loccasion des rservations ; stockes dans des bases de donnes, ces informations font ensuite lobjet dchanges jusquau stade de la ralisation des prestations aux passagers. Les donnes figurant dans ces bases prennent la forme denregistrements standardiss au niveau international appels PNR . Les PNR sont susceptibles de contenir toutes sortes dinformations concernant les dtails dun voyage, telles que lindication de lagence de voyage, litinraire concern, les modalits du paiement, les contacts terre du passager Lexploitation de telles donnes doit videmment tre entoure de garanties. Dans une rsolution quelle avait adopte le 13 fvrier 2009, sur le rapport de notre collgue M. Guy Geoffroy, au nom de la commission des affaires europennes, lAssemble nationale reconnaissait ainsi que les donnes PNR constituent bien un outil de la lutte contre le terrorisme, mais que le respect du droit la vie prive et la protection des donnes doit tre assur chaque tape de la collecte et du traitement de ces donnes . Dans une proposition de rsolution adopte le 16 novembre 2011, toujours sur le rapport de M. Guy Geoffroy, la commission des affaires europennes, sexprimant sur le contenu dune proposition de directive visant la mise en place dun PNR europen prsente par la Commission europenne le 2 fvrier 2011, exprimait une nouvelle fois son exigence dune solution conciliant lefficacit des mesures de sret, qui gagnerait effectivement la mise en place dun rgime de transfert et de collecte harmonis au plan europen, avec le droit au respect de la vie prive et la protection des donnes caractre personnel. Les objectifs de la sret arienne doivent enfin tre concilis avec les contraintes de lconomie, celles de la circulation arienne, quil faut faciliter, celles aussi de la comptitivit, quil faut maintenir. La recherche dune sret arienne maximale doit tre compatible ainsi avec la facilitation de la sret arienne. LAnnexe XVII de la Convention de Chicago de 1944 relative laviation civile internationale contient une recommandation aux tats membres ainsi rdige : Il est recommand que chaque tat contractant prenne des dispositions, toutes les fois que cela sera possible, pour que les mesures et procdures de sret entranent le moins possible de perturbations ou de retards dans les activits de laviation civile internationale . Une circulation arienne fluide est essentielle aux yeux des compagnies ariennes comme des gestionnaires daroports, qui souhaiteraient, selon

20

M. Patrick Thouverez, prsident du Syndicat des entreprises de sret arienne (SESA) par exemple, que linspection porte sur 200 passagers en une heure, que celle des bagages prenne de trois quatre secondes . Les rgles de la sret arienne doivent mnager galement la capacit concurrentielle de nos compagnies ariennes, dj frappes par la crise conomique et confrontes lmergence de compagnies non europennes pouvant bnficier de conditions dexploitation plus favorables. M. Charles Yvinec, directeur de la sret Air France, a donn vos Rapporteurs deux exemples de mesures qui, fondes sur des exigences de sret arienne, ont pu peser sur la comptitivit dAir France : De 2007 2010, prcisait M. Charles Yvinec, la France a impos, sans justifier rellement dune menace particulire, un taux de fouille des bagages de cabine de 20 %, alors que le taux de fouille pratiqu par nos partenaires tait de 10 %. Il est clair que trois annes de traitement diffrenci entre la France et les autres pays de lUnion ont cr un dsavantage concurrentiel dfavorable pour les compagnies ariennes et les aroports franais. Dautres exemples perdurent, comme lobligation de contrle documentaire lembarquement qui nest pas exig au niveau europen, mais qui fait lobjet dune exigence franaise . Autre exemple de mise en pril de la comptitivit du domaine arien, les contraintes prvues en matire dinspection filtrage des passagers, souvent ressenties comme tout fait excessives, peuvent conduire des voyageurs, prfrer un dplacement par la voie ferroviaire, arbitrer en faveur du TGV, dans les cas de plus en plus nombreux (courtes et moyennes distances), o le transport arien ne dispose pas dun march captif. Il est vrai, dans le mme temps, que la sret quoffre une plate-forme aroportuaire est, avec lattractivit, laccueil des passagers, les infrastructures, un lment certainement important de sa comptitivit par rapport aux autres aroports.B. LA SRET ARIENNE CONSTITUE UN ENSEMBLE TENDANT UNE CERTAINE COHRENCE

Le paysage de la sret arienne, complexe comme on vient de lanalyser, inspire une politique qui tend une certaine cohrence rsultant : de lexistence dune rglementation particulirement dveloppe ; du choix opr en faveur dactivits de surveillance confies des socits prives concessionnaires ; de limportance de la coordination et des contrles effectus par ltat.

21

1. Une rglementation particulirement dveloppe

Les problmes que pose la sret arienne ont inspir une rglementation importante, principalement aprs la survenue des vnements du 11 septembre 2001. Cette rglementation est essentiellement internationale et communautaire, les dispositions nationales elles-mmes ayant un caractre de plus en plus limit. Ces diverses rgles enserrent le monde de la sret arienne, en en faisant un ensemble particulirement contraint, comme la estim, devant la mission dinformation, M. Patrick Gandil, directeur gnral de laviation civile. a) La rglementation internationale Les instances internationales en charge de la sret arienne ont pos de nombreux principes, labor des normes importantes. La rglementation correspondante est contenue, pour lessentiel, dans lAnnexe XVII de la Convention de Chicago relative laviation civile internationale du 7 dcembre 1944, annexe qui a t adopte elle-mme par le Conseil de lOrganisation de laviation civile internationale (OACI) le 22 mars 1974. Intitule Normes et pratiques recommandes. Sret. Protection de laviation civile internationale contre les actes dintervention illicite lAnnexe XVII a fait ensuite, depuis 1974, lobjet de nombreux amendements. Elle contient des normes, dfinies comme toute spcification dont lapplication uniforme par les tats parties la Convention est reconnue ncessaire la scurit ou la rgularit de laviation civile internationale et des pratiques recommandes dfinies, quant elles, comme toute spcification dont lapplication uniforme par les tats parties la Convention est reconnue souhaitable dans lintrt de la scurit, de la rgularit ou de lefficacit de la navigation arienne internationale Cest lAnnexe XVII de la Convention de Chicago qui a, comme on lindiquait dans lintroduction de ce rapport, dfini le concept de sret arienne, les instances europennes ayant repris ensuite, le texte mme de cette dfinition : la combinaison des mesures ainsi que des moyens humains et matriels visant protger laviation civile internationale contre les actes dintervention illicite . LAnnexe XVII de la Convention de Chicago fixe explicitement plusieurs grands principes appliqus aujourdhui dans le secteur de laviation civile la lutte anti-terroriste. La responsabilit de leur mise en uvre a t confie aux tats contractants. Ainsi, lAnnexe XVII : contient-elle une dfinition des objectifs gnraux des mesures de sret : Chaque tat contractant prendra des mesures pour empcher que des armes, explosifs ou tous autres engins dangereux, pouvant tre employs pour commettre un acte dintervention illicite et dont le port ou le transport nest pas

22

autoris, ne soient introduits, par quelque moyen que ce soit, bord dun aronef effectuant un vol daviation civile internationale (point 4.1.1) ; pose-t-elle plusieurs principes concrets au cur des politiques de sret aujourdhui menes : celui dun contrle des passagers en correspondance ou en transit ainsi que de leurs bagages de cabine (point 4.2.1) ; celui de la sparation des flux entrants et sortants ; il est prcis que : chaque tat contractant veillera ce quil ny ait aucune possibilit de mlange ni de contact entre passagers ayant t soumis un contrle de sret et personnes non soumises un tel contrle, aprs le passage des points dinspection filtrage de sret aux aroports servant laviation civile internationale (point 4.2.2) ; celui de la liaison entre les bagages et les passagers : le point 4.3.1 prvoit ainsi que Chaque tat contractant adoptera des mesures pour que les exploitants, lorsquils assurent des liaisons au dpart de leur territoire, ne transportent pas de bagages de passagers qui ne se trouvent pas bord de laronef, moins que les bagages spars des passagers soient soumis dautres mesures de contrles de sret ; celui enfin dun contrle appropri du fret, des envois par coursiers et envois exprs ainsi que de la poste, destins tre transports sur les vols de passagers (point 4.3.6.). Aprs les vnements du 11 septembre 2001, les instances de lOrganisation de laviation civile internationale se sont proccupes de la mise en place dun contrle systmatique des bagages de soute dans les tats parties la Convention. A t pos surtout, le 15 mars 2002, le principe dun blindage des portes des cockpits pour tous les avions de ligne transportant plus de 60 passagers ou pesant plus de 45 tonnes. Cette mesure importante, qui visait, aprs les vnements du 11 septembre 2001, empcher la prise de contrle des aronefs par des terroristes, des fins de dtournement ou de destruction, est entre en application le 1er novembre 2003 ; elle tait applicable aux tats-Unis depuis le 20 aot 2002. Aujourdhui, lOACI dbat de nouvelles questions, telles que la dfinition de normes pour les passeports et les autres documents de voyages lisibles la machine. Le but ainsi poursuivi est dattester le plus rapidement possible de lauthenticit des documents et de lidentit des passagers. LOACI est, pour vos Rapporteurs, linstance majeure, le cadre naturel auprs desquels doivent tre portes les principales questions qui intressent la sret arienne. LOrganisation de laviation civile internationale, par le nombre des tats quelle rassemble (190), les pouvoirs dont elle dispose, les progrs dcisifs quelle a permis, le symbole mme quelle constitue dune

23

aviation civile mondiale qui rapproche les hommes, est un lieu immanquable dvocation et de solution des questions de sret arienne. b) La rglementation europenne Ainsi que la fait remarquer, lors de son audition par la mission dinformation, M. Filip Cornelis, chef de l unit sret arienne la Commission europenne, lUnion europenne a t particulirement active dans le domaine de la sret arienne, compter des vnements du 11 septembre 2001. Un important rglement du Parlement europen et du Conseil relatif linstauration de rgles communes dans le domaine de la sret de laviation civile a t ainsi adopt le 16 dcembre 2002 (rglement n 2320-2002). Il sagissait ainsi dun texte dapplication directe dans les tats membres, qui rendait obligatoire la mise en uvre des recommandations de la Confrence europenne de laviation civile (CEAC) (1), en lespce le document 30 et qui reprenait largement les dispositions de lAnnexe XVII de la Convention de Chicago, relative laviation civile internationale. Une refonte de cette lgislation europenne, tirant parti de lexprience acquise, est intervenue rcemment avec le rglement n 300-2008 du 11 mars 2008, entr en vigueur le 29 avril 2010. Ce texte trs dtaill, qui figure en annexe du prsent rapport : fixe des normes de base communes de protection de laviation civile contre les actes dintervention illicite mettant en pril la sret de celle-ci (rgles touchant linspection filtrage, aux contrles du fret et du courrier, aux mesures de sret en vol) ; prvoit que chaque tat membre doit lui-mme laborer, appliquer et maintenir un programme national de sret de laviation civile et dsigner une seule autorit responsable de la coordination et du suivi de la mise en uvre des normes de sret arienne ; lobligation de mettre en place un plan de sret incombe galement chaque exploitant daroport comme chaque transporteur arien ; prvoit galement et, ce point est essentiel, que les tats membres peuvent appliquer des mesures plus strictes que les normes communes de base, lorsquils agissent sur la base dune valuation des risques locale ; prvoit enfin que la Commission europenne ralise des inspections dans les aroports et auprs des acteurs du transport arien appliquant les normes de sret de laviation, afin de veiller lapplication du rglement n 300/2008 du Parlement europen et du Conseil du 11 mars 2008 dans les tats membres. Ces(1) La CEAC est un organe consultatif cr en 1955 par le Conseil de lEurope, qui, runissant 42 tats, est comptent pour toutes les questions de circulation arienne en Europe. La CEAC a labor en 1988 un document contenant de nombreuses rsolutions rgulirement mises jour.

24

inspections, qui prennent la forme de tests oprationnels sont inopines ; les rapports dinspection caractre confidentiel sont communiqus aux autorits comptentes des tats membres, qui doivent exposer les mesures prises pour remdier aux dficiences constates, puis partags avec les autorits comptentes de chacun des autres tats membres. Vos Rapporteurs observent avec satisfaction que les dernires inspections menes par les services de la Commission europenne dans les aroports franais conduisent une apprciation positive de nos contrles. Tel a t ainsi le cas en 2011, pour deux aroports, Roissy-Charles de Gaulle et Montpellier, alors que de prcdentes inspections, effectues en 2004, avaient conclu des analyses plus critiques ; le niveau de dtection des objets prohibs serait pass ainsi entre ces deux dates de 40 80 %. M. Filip Cornelis, chef de l unit sret arienne la Commission europenne, a pu faire valoir, lors de son audition par la mission, ce qui constitue, selon lui, les points forts des actions de sret en France : une mthodologie harmonise, la bonne qualit de linspection filtrage des passagers, la prsence de trs bons spcialistes la direction gnrale de laviation civile (DGAC) . linverse, apparaissent comme des points moins positifs, linspection filtrage des personnels, (mais cela serait, selon M. Filip Cornelis, galement le cas dans dautres tats membres), le fait galement que le programme national de sret de laviation civile prvu par le rglement n 300/2008 du Parlement europen et du Conseil du 11 mars 2008 a t transmis tardivement aux autorits communautaires. Il pourrait tre utile de prvoir que les tats membres de lUnion europenne disposent dun dlai de six mois, au plus, pour transmettre leur programme national de sret arienne aux instances communautaires. Lvolution de la rglementation communautaire a connu un temps fort, dans la priode rcente, avec la question de lemport de liquides par les passagers bord daronefs. la suite de tentatives dattentats ariens survenues Londres en aot 2006, partir de produits explosifs liquides, les instances europennes ont dcid, le 6 novembre 2006, de limiter lintroduction en cabine, de liquides, darosols et de gels (LAG) 100 ml. La Commission europenne a ensuite prvu la leve de ces mesures, compter du 29 avril 2011, pour les passagers en correspondance, puis, la date du 29 avril 2013, pour lensemble des passagers. Se fondant sur le fait que les menaces gardent un niveau lev et que les technologies qui permettraient de contrler les LAG emports en cabine noffrent sans doute pas encore les performances souhaites, la France a entendu continuer dappliquer la mesure originelle dinterdiction demport de liquides jusquau 29 avril 2013. Les instances europennes ont finalement dcid de donner un caractre facultatif lchance du 29 avril 2011, prvue pour la leve de linterdiction des

25

LAG des passagers en correspondance et de maintenir la date du 29 avril 2013, pour une libralisation totale de lemport des LAG en cabine. Les travaux europens en matire de lutte contre le terrorisme, notamment arien sinscrivent galement dans le cadre de la politique commune Justice et Affaires Intrieures (JAI), celle du troisime pilier . Le 7 octobre 2010, la Commission europenne prsentait ainsi une Communication relative la lutte contre le terrorisme retenant quatre axes : la prvention (viter la radicalisation de certains individus dans les tats membres), la protection (amliorer la scurit des transports, grce aux nouvelles technologies), la poursuite (tudier la mise en place dun PNR passenger name record europen), la raction (renforcer le rle de lUnion europenne dans la gestion des crises). M. Gilles de Kerchove, coordonnateur de la lutte contre le terrorisme, prsentait ensuite un important document de rflexion mettant laccent notamment sur la ncessit de rponses europennes en matire de cyberscurit , de contrles de dplacements dEuropens se rendant dans des zones de conflits, de scurit enfin des transports terrestres. c) La rglementation nationale Le domaine dintervention de la rglementation spcifiquement nationale en matire de sret arienne apparat de plus en plus limit. Des dispositions lgislatives sont intervenues ainsi, peu aprs les vnements du 11 septembre 2001. La loi n 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative la scurit quotidienne a autoris les agents de sret effectuer des palpations de scurit et fouiller les bagages de cabine des passagers. Puis la loi n 2002-3 du 3 janvier 2002 relative la scurit des infrastructures de transport a prvu des mesures de scurisation du fret arien et des biens et produits utiliss bord des aronefs par les entreprises implantes en dehors des zones rserves des aroports. Plus rcemment, la loi n 2011-267 du 14 mars 2011 dorientation et de programmation pour la performance de la scurit intrieure ( LOPPSI 2 ) a fix, dans son article 25, le cadre gnral des activits de surveillance, jusque-l prcis larticle L. 282-8 du code de laviation civile. Les dispositions ainsi adoptes dans le cadre de la LOPPSI 2 ont t codifies larticle L. 6342-2 du code des transports ; on en analysera de manire dtaille le contenu ci-aprs. Cet article fixe les grands principes de la sret arienne la franaise , en particulier le choix dune surveillance assure par des socits prives concessionnaires des gestionnaires daroports. Il prcise galement les rgles applicables en cas de recours aux scanners corporels.

26

Des textes rglementaires ont, par ailleurs, dtaill les techniques applicables aux contrles : ainsi en a-t-il t, de deux importants arrts interministriels intervenus, le premier, le 1er septembre 2003 (arrt relatif aux infrastructures, quipements et formations en matire de sret du transport arien ainsi qu certaines modalits dexercice des agrments en qualit dagent habilit, de chargeur connu, dtablissement connu et dorganisme technique), le second, le 12 novembre 2003 (arrt relatif aux mesures de sret du transport arien). Enfin, le dcret n 2010-1073 du 10 septembre 2010 a institu, pour une dure de trois ans, un dlgu interministriel la scurit prive : celui-ci a pour missions de veiller la transparence et au respect des rgles qui simposent au monde de la scurit prive et de sattacher plus particulirement la professionnalisation des mtiers de la scurit, comme le prcisait une rponse apporte par le Gouvernement une question de notre collgue Mme Colette Langlade publie au Journal Officiel du 13 septembre 2011.2. Le choix par la France dactivits de surveillance opres par des socits prives

Une originalit du systme franais de sret arienne rside dans le fait que les activits de surveillance ne sont plus opres par des personnels publics dtat, mais par des personnels de socits prives concessionnaires. Ce choix du secteur priv, qui diffre de celui quont fait, par exemple, les tats-Unis ou lEspagne, a t opr dans la loi n 96-151 du 26 fvrier 1996 (article 28), qui a prvu une externalisation des contrles. Les dispositions lgislatives correspondantes figuraient larticle L. 282-8 du code de laviation civile ; elles sont contenues maintenant dans larticle L. 6342-2 du code des transports, tel quil rsulte de larticle 25 de la loi n 2011-267 du 14 mars 2011 dorientation et de programmation pour la scurit intrieure ( LOPPSI 2 ). Ce texte est ainsi libell : En vue dassurer prventivement la sret des vols, tant en rgime intrieur quinternational, dune part les officiers de police judiciaire ainsi que, sur lordre et sous la responsabilit de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionns aux 1, 1 bis et 1 ter de larticle 21 du code de procdure pnale et, dautre part, les agents des douanes peuvent procder la fouille et la visite, par tous moyens appropris, des personnes, des bagages, du fret, des colis postaux, des aronefs et des vhicules pntrant ou se trouvant dans les zones non librement accessibles au public des arodromes et de leurs dpendances ou sortant de celles-ci. Sont galement habilits procder ces fouilles et visites, sous le contrle des officiers de police judiciaire ou des agents des douanes, les agents de nationalit franaise ou ressortissants dun autre tat membre de lUnion europenne dsigns par les entreprises de transport arien, les exploitants

27

darodromes ou les entreprises qui leur sont lies par contrat. Ces agents sont pralablement agrs par le reprsentant de ltat dans le dpartement et le procureur de la Rpublique. Ils ne procdent la fouille des bagages main quavec le consentement de leur propritaire et des palpations de scurit quavec le consentement de la personne. Dans ce cas, la palpation de scurit est faite par une personne du mme sexe que la personne qui en fait lobjet. Cette option pour des contrles oprs par des socits prives qui sont unies aux gestionnaires daroports par des contrats de sous-traitance (conclus en principe pour trois annes) est bien un lment doriginalit de la surveillance la franaise . Elle a t longuement analyse par la plupart des personnes auditionnes par la mission dinformation. M. Patrick Thouverez, prsident du Syndicat des entreprises de sret arienne (SESA), indiquait ainsi que les activits de surveillance des passagers, de leurs bagages, des vhicules, des personnels exerces par plusieurs entreprises prives unies donc aux gestionnaires daroports par des contrats de sous-traitance conclus aprs appels doffres, regroupent plus de 10 000 salaris, 90 % dentre eux bnficiant dun contrat dure indtermine, pour un chiffre daffaires qui tait de 363 millions deuros en 2009, ralis alors pour 72 % en le-de-France. Quatre grandes entreprises, prsentes dans lensemble de lunivers de la scurit prive, assurent lessentiel de lactivit : ICTS Services, pour 100 millions deuros de chiffre daffaires annuel, Brinks et Securitas, pour chacune 80 millions deuros annuels et Alyzia Sret, filiale dAroports de Paris, ralisant, chaque anne, 40 millions deuros de chiffre daffaires. Sont prsentes aussi sur ce march, plusieurs petites socits, dont Astriam et No Scurit, qui ralisent entre 1 et 20 millions deuros de chiffres daffaires et ne sont pas membres du SESA, lequel regroupe 80 % de lensemble. Il faut remarquer que certaines socits de sret aroportuaire ralisent des marges insuffisantes et napparaissent pas structurellement rentables aujourdhui. Le risque existe ainsi, de voir apparatre, dans lavenir, sur le march, des socits multiservices de scurit, noffrant pas ncessairement le niveau de qualification souhait. Les personnels des socits prives de sret arienne doivent tre ressortissants franais ou dun tat membre de lUnion europenne, pouvoir apporter la preuve dune absence de condamnation pnale dfinitive inscrite dans un document quivalent au bulletin n 2 du casier judiciaire, faire lobjet dun double agrment dlivr conjointement par le prfet et le procureur de la Rpublique, garantissant leur moralit, et enfin tre titulaires dun certificat de qualification professionnelle (CQP) dagent de sret aroportuaire (ASA) complt par le suivi dun module de formation dune dure de 7 28 heures correspondant une spcialit (tenue de lcran, contrle des bagages de

28

soute) (1). Les agents de la sret arienne ne sont pas, en effet, des multicartes de la sret prive, mais sont forms des activits prcises. Le CQP, qui nouvre pas par lui-mme la possibilit de travailler, est accord par la Commission nationale paritaire de lemploi et de la formation professionnelle des entreprises de scurit, au terme dune formation dlivre dans des centres agrs par la direction gnrale de laviation civile (soit aujourdhui, 30 centres), sous rserve de russite une valuation des connaissances ralise devant un jury paritaire indpendant. La formation au CQP a une dure de 78 heures et comporte une initiation aux questions de scurit en plus de celles de sret ; elle est dispense par des formateurs tous certifis par lEcole nationale de laviation civile (ENAC) (2). Les critres prvus par le certificat de qualification professionnelle dagent de sret (CQP ASA) ont permis une lvation du niveau de comptence de ces agents. Laccent y est mis, en effet, sur la qualit de laccueil, la vigilance et la concentration dont les agents doivent faire preuve, ainsi que sur leur capacit grer des situations conflictuelles. Les agents de sret se voient attribuer une carte professionnelle dlivre par le prfet aprs une enqute de moralit, carte qui leur permet de travailler et de changer ventuellement de socit. Ils bnficient, en outre, dune formation continue. M. Claude Kupfer, directeur de la sret Aroports de Paris (ADP), a ainsi donn vos Rapporteurs lexemple des actions de formation continue menes dans les socits prives lies ADP par des contrats de sous-traitance : chaque oprateur doit, tous les trois ans, recycler 50 % de sa formation initiale et, tous les trois mois, passer six heures devant un simulateur dimagerie radioscopique. Selon une enqute effectue, en aot 2010, par lObservatoire des mtiers de la prvention et de la scurit, le taux de fminisation de la profession tait de 47 % en 2009, lanciennet moyenne des agents tait alors de 4,5 annes et leur ge moyen de 35,5 ans. Le turn over est, quant lui, assez important (20 %), bien quen diminution ; un nombre significatif dagents quittent cette profession souvent pour dautres mtiers de la sret. Les apprciations portes devant la mission sur la qualit du travail effectu par les socits prives sous-traitantes ont parfois diffr selon les intervenants : M. Patrick Gandil, directeur gnral de laviation civile (DGAC), estimait ainsi que : Les agents de sret constituent une profession qui a su sadapter et lever son niveau en termes de recrutement, de formation, comme de rmunration .

(1) La formation se droule ainsi en deux phases, comprenant un tronc commun puis six modules possibles suivant les fonctions envisages. (2) Les formateurs, au nombre denviron 200, suivent un module de formation denviron deux mois.

29

En revanche, M. Christophe Naudin, criminologue, auteur dun ouvrage intitul Sret arienne, la grande illusion et dune tude transmise le 1er juin au ministre charg des transports sur le thme Forces et faiblesses de la sret arienne en France jugeait que le choix dune dlgation des prestations de sret arienne des socits prives a peut-tre t opr rapidement sans la considration ncessaire cette mission. La formation des agents de sret est dfaillante, minimaliste, dangereuse et la slection savre inexistante, car on cherche avant tout faire de la rinsertion sociale. Pourtant, vos Rapporteurs observent quaucune des personnalits auditionnes na plaid pour le retour des contrles effectus par les agents publics, tel que le prvoyaient les textes applicables avant lexternalisation des contrles dcide en 1996. Plusieurs dentre elles ont fait tat, en revanche, de dysfonctionnements potentiels dans les procdures de formation des agents de socits prives. Signalons enfin que le secteur des marchandises fait lobjet de mesures particulires : la scurisation du fret est confie aux compagnies ariennes qui dlguent cette comptence des professionnels faisant lobjet dun agrment dagents habilits . Une partie du fret ne pouvant, par ailleurs, pas tre contrle par quipement radioscopique aprs son conditionnement, sa scurisation relve du chargeur qui effectue un contrle visuel du fret et doit, pour cela, avoir obtenu un agrment de chargeur connu .3. Limportance des contrles et de la coordination effectus par ltat

La politique mene par ltat et ses reprsentants donne une cohrence la sret arienne au plan national et sur le terrain . Ltat et ses agents sont ainsi inspirateurs de la politique de sret arienne et contrleurs des actions menes par les acteurs privs de surveillance. Ltat ne sest donc pas dsengag de ses missions dans ce domaine. Au plan national, cest le Premier Ministre qui, dirigeant laction du Gouvernement en matire de scurit nationale, a la responsabilit de dfinir et de coordonner laction des pouvoirs publics dans le domaine de la sret arienne. La commission interministrielle de la sret arienne (CISA), cre par le dcret n 2007-234 du 22 fvrier 2007 et qui runit, sous la prsidence du directeur de cabinet du Premier ministre, des reprsentants des ministres des affaires trangres, de la dfense, des finances, de lintrieur, des transports, est charge de veiller la cohrence de la politique de sret arienne et aroportuaire. Cette instance se runit en principe deux fois par an.

30

Le Secrtariat gnral de la dfense et de la scurit nationale (SGDSN) est charg, quant lui, de coordonner au quotidien les activits des diffrents dpartements ministriels agissant dans le domaine de la sret arienne. Le degr de la menace terroriste est exprim par le Premier Ministre, le SGDSN proposant le niveau qui sera annonc, sur la base essentiellement des apprciations de lUnit de coordination de la lutte anti-terroriste (UCLAT). Le dcret prcit du 22 fvrier 2007 dsigne galement le ministre charg des transports comme lautorit comptente en matire dapplication de la rglementation communautaire relative la sret de laviation civile. Cette solution mrite examen et, comme lont estim plusieurs personnes auditionnes par vos Rapporteurs, lon pourrait sinterroger sur la pertinence dune coordination interministrielle confie dans lavenir au ministre de lintrieur, principale autorit en charge des questions de sret. Sur le terrain ensuite, lexternalisation des activits de surveillance opre dans la loi du 26 fvrier 1996 est encadre et complte par ltat, qui, agissant dans le cadre de sa mission de scurit nationale, conserve un important rle de contrle. Le contrle du respect de lapplication des normes par les agents de sret est exerc au quotidien, sur les plates-formes aroportuaires, par plusieurs corps dagents de ltat relevant des ministres des transports, de la dfense, de lintrieur et des finances : agents de la direction gnrale de laviation civile (DGAC), gendarmerie du transport arien (GTA), police aux frontires (PAF), service des douanes, tous implants largement sur nos plates-formes aroportuaires. M. Frdric Perrin, directeur central de la police aux frontires (PAF), a indiqu, devant la mission dinformation, que ses agents exeraient, depuis 1996 et lexternalisation des activits de surveillance, un rle de contrleurs et non plus dagents principaux de la sret . Soucieux dviter tout dsengagement de ltat de ses missions dans ce secteur, ils peuvent toujours venir en aide, prcisait M. Frdric Perrin, aux agents de sret un poste dinspection filtrage ; ils ont pu, dailleurs, assumer ce rle, lors de la mise en place, aprs 1996, des contrles de passagers et de leurs bagages de cabine par des socits prives, le temps ncessaire pour que les entreprises prives sadaptent ou immdiatement aprs les vnements du 11 septembre 2001, lorsque les tats-Unis ont demand leurs partenaires un renforcement des contrles. Les personnels de ltat sassurent par des tests oprationnels que les procdures rglementaires sont bien suivies.

31

Ils ne peuvent exercer des pressions sur les gestionnaires daroports ou les socits prives sous-traitantes, en cas de manquements des personnels de ces dernires aux rgles relatives la sret arienne. Il leur appartient simplement dtablir alors des procs-verbaux de manquements, quils notifient lautorit prfectorale. En application de larticle R 217-1 du code de laviation civile, le prfet peut alors, aprs avis dune commission de sret prside par le reprsentant de la DGAC, prononcer, lencontre de lauteur du manquement, une amende administrative dun montant maximum de 750 euros, dans le cas dune personne physique, de 7 500 euros, sil sagit dune personne morale. Des comits de suivi trimestriels runissant les reprsentants de ltat et les socits sous-traitantes permettent danalyser les manquements constats. M. Frdric Perrin a indiqu, par exemple, que les procs-verbaux de manquements tablis par les agents de la PAF avaient un caractre plus ducatif que rpressif. La gendarmerie du transport arien (GTA), plus en charge des activits de la zone rserve, du ct pistes a le mme rle vis--vis des agents de sret qui y exercent leur activit, plus particulirement depuis 2010 et la mise en uvre du nouveau rglement communautaire n 300-2008 du 11 mars 2008. Les contrles ainsi oprs par la PAF et la GTA compltent ceux quexercent, sur les agents de sret arienne, la direction gnrale de laviation civile (1) (M. Patrick Gandil, son responsable, a prcis que la DGAC a un programme de surveillance obligatoire et procde plusieurs milliers de tests par an, avec lobjectif de tester tous les agents de sret chaque anne au moins une fois ) et les gestionnaires daroports (M. Claude Kupfer, directeur de la sret Aroports de Paris a indiqu que, par exemple, ADP procde, dans la limite de 5 % des personnels chaque mois, des contrles internes permettant de vrifier que les personnes qui font de linspection filtrage sont jour de leurs obligations de formation. ). Il faut ajouter cela les contrles par vidosurveillance, dont M. Patrick Thouverez, prsident du Syndicat des entreprises de sret arienne (SESA), a soulign limportance au quotidien pour les agents de sret, les auto-contrles pratiqus par les socits concessionnaires elles-mmes, ainsi que les audits et inspections conduits par les services de la Commission europenne, en application du rglement du Parlement europen et du Conseil n 300-2008 du 11 mars 2008, qui donnent lieu des visites sur place, permettant de comparer la situation locale avec les rapports rcents tablis par les autorits nationales, les dysfonctionnements constats donnant lieu ensuite un suivi. En Allemagne aussi, les tches de surveillance dans les aroports ont t privatises, les contrles des passagers, des bagages tant effectus par des

(1) 200 000 contrles ont t oprs Paris Charles de Gaulle par ltat en 2010, pour 242 manquements ayant conduit des sanctions.

32

socits prives, sous lautorit de la police fdrale. Comme en France, les gestionnaires daroports et les compagnies ariennes remplissent galement des missions de sret. De la mme faon, au Royaume Uni, les personnels de surveillance sont gnralement employs par les aroports, lis des socits prives spcialises dans la formation et la mise disposition dquipes comptentes en matire de sret. Un autre aspect essentiel de la cohrence du systme touche la coordination des diffrents agents de ltat en matire de sret arienne : cette coordination est confie la direction gnrale de laviation civile (DGAC), en charge des questions de rglementation et de supervision du transport arien, mais aussi au prfet du dpartement, un prfet dlgu la scurit pour les plates-formes de Paris Charles-de-Gaulle et du Bourget. La DGAC, reprsentante de ladministration des transports, constitue, pour les autorits communautaires, linstance charge en France de la coordination et du suivi de la politique de sret arienne. Elle a, de surcrot, une responsabilit importante en matire de contrle et ventuellement de sanction lgard des personnels de surveillance, ainsi que de choix des quipements servant aux contrles de sret. Lors de son audition par la mission dinformation, M. Filip Cornelis, chef de l unit sret arienne la Commission europenne, a ainsi estim, quelle compte de trs bons spcialistes . En revanche, M. Christophe Naudin, criminologue, a pu dclarer, devant vos Rapporteurs, que les techniciens de la DGAC matrisent trs bien la scurit, mais pas ncessairement la sret ; or, les menaces et les rponses voluent sans cesse . Mais, alors quils confient ainsi un rle de coordination la DGAC qui dispose dantennes dans les rgions, les DSAC ( directions de la scurit de laviation civile), les textes confrent galement des responsabilits aux prfets dans ce domaine. Pourtant, selon plusieurs personnes auditionnes par vos Rapporteurs, cette solution ne serait pas pleinement satisfaisante, les prfets ayant dj de multiples autres responsabilits et devant assumer de nombreuses autres tches. Une exception existe, pour les aroports de Roissy Charles de Gaulle et du Bourget, o un prfet dlgu spcifiquement la scurit a t dsign en juillet 2010. La mission dinformation a pu rencontrer M. Philippe Klayman, aujourdhui en charge de cette fonction. M. Philippe Klayman a indiqu que ses missions de prfet dlgu concernaient de fait les questions de sret arienne, domaine dans lequel il joue un rle de coordinateur des services de ltat, mais aussi celles de police (respect de lordre public, lutte contre la dlinquance), ainsi que la prise en compte des

33

ralits conomiques prsentes sur la plate-forme (1 000 entreprises dans le cas de Paris Charles de Gaulle). Mais, au-del de cet exemple limit deux aroports parisiens (1), la mission dinformation a eu le sentiment que lunicit de direction des intervenants publics ntait peut tre pas aussi bien assure que souhait et que lidentification de lautorit coordinatrice sur le terrain (reprsentant de la DGAC ? Prfet du dpartement ?) semblait parfois difficile. La mission dinformation propose quun dlgu la sret aroportuaire plac auprs du prfet soit dans lavenir charg de cette coordination du terrain. Vos Rapporteurs souhaitent terminer cette analyse du rle jou par ltat, en se faisant lcho dune proccupation exprime devant eux par certains reprsentants des socits de sret : ltat serait, selon eux, insuffisamment prsent au monde de la sret arienne, semblant opter pour une stratgie essentiellement de sanction et de contrle des acteurs, alors que ceux-ci souhaiteraient que ce rle soit plus souvent daccompagnement leur gard. Vos Rapporteurs proposent ainsi la mise en place dune instance runissant lensemble des acteurs de la sret, qui serait la fois structure dchange, de concertation et dorganisation de cet important secteur dactivit.

(1) La question dune extension des attributions du prfet dlgu la scurit pour Paris Charles de Gaulle et le Bourget la plate-forme dOrly a t pose plusieurs reprises devant la mission dinformation ; cette mesure suppose lintervention dun dcret.

35

II. LA SRET ARIENNE IMPOSE UNE LUTTE INCESSANTE ET POURTANT, ELLE REPOSE SUR DES OUTILS ET DES PROCDURES PERFECTIBLESA. UNE LUTTE INCESSANTE

Trois points doivent tre examins : la lutte mene contre le terrorisme arien obtient certains rsultats ; pourtant, ceux-ci ne doivent pas faire oublier que ce combat est particulirement difficile par nature et dun cot lev et que de graves menaces persistent.1. Un combat efficace qui obtient des rsultats

La lutte rsolue mene en France et dans le monde depuis de longues annes en matire de sret arienne a obtenu, il faut insister sur ce point, des rsultats rels. Lors de son audition par la mission dinformation, M. Bernard Squarcini, directeur central du renseignement intrieur (DCRI), a pu rappeler, que notre pays na pas connu dattentat terroriste depuis 1995. Et cette situation positive est due trs largement, indiquait-il, aux activits de renseignement. Le criminologue M. Christophe Naudin, pour qui 95 % de la sret arienne sont dus la prvention par le renseignement , notre collgue Charles de Courson, rapporteur spcial du budget des transports ariens et M. Frdric Perrin, directeur central de la police aux frontires (PAF) ont mis devant nous des analyses comparables. Vos Rapporteurs ont bien mesur le rle tout fait primordial du renseignement, un certain paradoxe rsidant sans doute dans le fait, que nous navons pu obtenir que peu dinformations sur le contenu mme de ces activits, par nature secrtes et confidentielles. Les diffrents services de renseignement travaillent de plus en plus en symbiose, la distinction entre ennemi intrieur et ennemi extrieur, qui a longtemps lgitim leurs activits respectives ayant perdu de son acuit. De la mme faon, la fusion opre au sein de la DCRI, la date du 1er juillet 2008, de la Direction centrale des renseignements gnraux (DCRG) et de la Direction de la surveillance du territoire (DST) a dot la politique du renseignement dun outil plus performant, plus oprationnel de dtection prcoce des rseaux terroristes, dautant que la DCRI est prsente sur lensemble du territoire national. Ces progrs ont t dailleurs particulirement souligns dans les rapports tablis annuellement par lOffice europen de coopration policire (Europol).

36

La Direction gnrale de la scurit extrieure (DGSE) participe, elle aussi, ces diverses missions de sret en amont par des actions de renseignement efficaces. quel ennemi sommes-nous confronts ? la diffrence de plusieurs pays partenaires (Espagne, Royaume-Uni), la France na pas combattre principalement un terrorisme sparatiste ; elle ne doit pas non plus affronter de manire prioritaire, contrairement certains pays de lEurope du Sud, le terrorisme dextrmistes ( ultra gauche ou ultra droite ). Le risque terroriste que connat notre pays est plutt li aujourdhui laction de groupes radicaux, tels quAl Qada au Maghreb islamique (Aqmi). Du fait de nos engagements politiques et militaires dans certains tats du monde, particulirement en Afghanistan, des positions adoptes par notre pays, par exemple, sur la question du port du voile intgral ou sur notre conception de la lacit, la France fait figure de pays particulirement menac, aprs les tats-Unis. Aqmi est susceptible de sen prendre aujourdhui notre prsence et nos intrts ltranger, nos ressortissants, nos ambassades, nos centres culturels, comme dorganiser des attentats sur nos lignes ariennes ou nos plates-formes aroportuaires. Comment oprent les services secrets ? La collecte, lanalyse et lexploitation systmatique de renseignements, notamment par la surveillance de sites et forums internet jointes lutilisation dune lgislation adapte et dune centralisation des procdures judiciaires (existence dun parquet anti-terroriste par exemple) aideraient, comme nous lindiquait M. Bernard Squarcini, djouer en moyenne deux tentatives dattentats par an. La DCRI est attentive, en particulier, ce que lon appelle, dans le langage de la gestion de crise, les signaux faibles , provenant dindividus susceptibles de basculer dans la radicalisation et de passer laction terroriste. Pour M. Frdric Perrin, directeur central de la police aux frontires (PAF), cest parce que les terroristes sappuient sur des rseaux, des structurations, des complicits , que les activits de renseignement qui ont jou un rle majeur depuis la fin des annes 90 obtiennent des rsultats. Car cela facilite considrablement la surveillance et la dtection prcoce des candidats aux actions terroristes et leur neutralisation prventive. Pourtant, les rsultats positifs obtenus par notre pays en matire de sret arienne ne sont pas dus quaux efforts danticipation et de dtection prcoce que mnent les services de renseignement. Les contrles visibles, inspections filtrages, contrles aux rayons X ont leur part dans ces succs. Par leur caractre massif, en mme temps que non automatique, non norm (les contrles dits alatoires se sont beaucoup dvelopps), ils inscurisent, en effet, srement les candidats aux actions terroristes. Ils contribuent galement rassurer les usagers du transport arien.

37

Nombreuses ont t les observations positives prsentes vos Rapporteurs sur lefficacit de ces contrles. M. Patrick Gandil, directeur gnral de laviation civile, a rappel notamment que les bagages de soute taient, aujourdhui, la suite principalement des vnements du 11 septembre, scuriss 100 %, du fait quils passent sous des systmes de rayonnement trs efficaces , que la rconciliation bagage passager est partout assure et que les techniques de dtection des explosifs se sont sensiblement dveloppes. M. Frdric Perrin, directeur central de la police aux frontires (PAF), a insist, quant lui, sur la forte protection des zones rserves et M. Charles Yvinec, directeur de la sret Air France, a retenu le contrle du fret au nombre des rsultats positifs obtenus. Les socits prives sous traitantes elles-mmes ont t juges en progrs par plusieurs intervenants, sagissant de lefficacit de leurs personnels, qui semble stre amliore, comme du niveau de formation de ceux ci, qui sest sans doute lev avec lapparition des certificats de qualification professionnelle (les CQP) intervenue en 2009. Ces progrs prcisment taient souligns par M. Claude Kupfer, directeur de la sret Aroports de Paris (ADP), qui a estim que : la profession a beaucoup volu depuis dix ans, mais il ne parat pas possible de savoir si lexigence de certification a jou un rle dans cette volution . Ils ont t souligns galement par M. Patrick Thouverez, prsident du Syndicat des entreprises de sret arienne (SESA), par M. Frdric Perrin, directeur central de la police aux frontires (PAF), pour qui des marges de progression existent encore et par M. Philippe Klayman, prfet dlgu la scurit Paris Charles de Gaulle et au Bourget, qui a estim que les progrs raliss taient dus en partie aux exigences amricaines et europennes . M. Charles Yvinec, directeur de la sret Air France a pu estimer, que le niveau de formation des agents est meilleur quavant lexternalisation des contrles, quand ceux-ci relevaient dagents publics . M. Christophe Naudin, criminologue, a fait figurer, quant lui, au nombre des points forts du systme franais, le contrle des bagages de soute et celui du fret, ainsi que les matriels industriels produits en France, qui sont assez innovants et permettent une prsence franaise sur le march . M. Filip Cornelis, chef de l unit sret arienne la Commission europenne, a rappel qu en France, depuis 2004, ont t organiss trois audits du systme national et neuf inspections daroports ; les niveaux de sret peuvent tre jugs bons .

38

Terminons cet expos des analyses positives, en voquant le propos de M. Franck Goldnadel, directeur de laroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, qui notait, lors de la visite de la plate-forme par vos Rapporteurs le 16 juin 2011, que les rcentes inspections des services de la Commission europenne avaient conduit des satisfecit exceptionnels pour un aroport de cette taille . Lapprciation positive porte sur laroport de Paris Charles de Gaulle pourrait dailleurs tre applique nombre de nos aroports rgionaux, grands aroports de province ou petits aroports locaux, selon plusieurs personnes auditionnes par la mission dinformation. Et celles-ci taient daccord pour affirmer que la prsence, dans certains de nos aroports, de compagnies low cost ne se traduit pas par une sret arienne amoindrie, quil ne semble pas exister ainsi, dans notre pays, de sret arienne low cost . Nanmoins, la question du cot exponentiel des exigences de sret supportes par les gestionnaires daroports ncessite un contrle sans faille par les services de lEtat permettant de sassurer du respect scrupuleux des exigences requises. En toute hypothse, le jugement positif port sur les diffrents aroports parat encourageant, tant il est vrai que, dans le contexte actuel, la vigilance doit tre la mme sur toutes les plates-formes aroportuaires.2. Des rsultats qui ne doivent pas faire oublier que la lutte contre le terrorisme arien est particulirement difficile par nature et quelle prsente un cot lev

Le combat contre le terrorisme arien sapparente laffrontement traditionnel de la lance et du bouclier , selon la rfrence faite devant vos Rapporteurs par M. Frdric Perrin, directeur central de la police aux frontires, o lattaquant dispose toujours dun certain avantage. Nos socits dmocratiques ont lobligation prcisment dviter davoir une longueur de retard dans la lutte antiterroriste, comme lestimait M. Patrick Gandil, directeur gnral de laviation civile (DGAC), lors de son audition par la mission dinformation. Et cela est particulirement difficile, indiquait il, parce que la sret arienne est une matire trs volutive . Il est de fait que les mesures prises par les instances internationales, europennes et nationales sont trs souvent intervenues en raction des attentats ou des tentatives dattentats de terroristes ariens. Avant les vnements du 11 septembre 2001, la rglementation de sret arienne tait, aux tats-Unis, peu dveloppe et mme lacunaire. Et les autorits communautaires ne se sont vritablement proccupes de sret arienne, a estim, devant la mission dinformation, M. Filip Cornelis, chef de l unit sret arienne la Commission europenne, quaprs les vnements de New-York et Washington de septembre 2001. Le premier rglement de base fixant

39

des normes communes de sret, qui reprenait les lments du document 30 de la Confrence europenne de laviation civile (CEAC) a bien t publi ainsi, le 16 dcembre 2002. De la mme faon, limportante rglementation europenne limitant lemport de liquides par les passagers bord des aronefs a t prise, en rponse plusieurs menaces successives dattentats intervenues Londres en aot 2006. Cest, depuis lchec de Richard Reid oprant, sur le vol Paris-Miami, en dcembre 2001, partir dune chaussure pige contenant de lexplosif en poudre, que, dans de nombreux aroports, les passagers sont souvent contraints, lors des inspections filtrages, denlever leurs chaussures. Et, cest aprs lchec dOmar Mutallab, qui avait dissimul de la penthrite sous ses vtements, dans le vol Amsterdam-Detroit du 25 dcembre 2009, que les tats ont manifest un intrt renforc pour la technique des scanners corporels, qui permettent une inspection des passagers sarrtant la peau. Leur longueur davance , les candidats laction terroriste peuvent la conserver, si les tats et les multiples intervenants de la sret arienne ne mnent pas un grand effort de recherche, de vigilance et de prvision, mais aussi de synergie dans leurs interventions. Le risque est, ds maintenant, davoir affaire des terroristes nous exposant des prils que nous aurons souvent mal anticips : kamikazes oprant avec des explosifs ingrs, que nous naurons pas su dtecter, cyber attaques , qui seront tudies plus loin, neutralisant nos aronefs menes par un individu ventuellement dsquilibr et agissant seul ou un groupe ayant appris matriser les techniques informatiques, utilisation distance de lance roquettes contre les avions Pour ce combat, qui peut paratre ainsi certains gards ingal, des critiques comparent notre systme une forme de ligne Maginot o la politique suivie serait avant tout prventive. M. Bernard Squarcini, directeur central du renseignement intrieur, a estim que nos actions consistent parfois pour lessentiel, en laccumulation de sacs de sable . Or, M. Charles de Courson, rapporteur spcial du budget des transports ariens, a estim, devant vos Rapporteurs, que les politiques de ligne Maginot sont toujours voues lchec et que les terroristes sauront toujours sadapter et contourner les dispositifs existants . Pour M. Charles de Courson, les exigences amricaines ont srement jou en la matire un rle majeur, ladministration Bush ayant fait savoir aux pays partenaires, postrieurement aux vnements du 11 septembre, que les tats-Unis naccepteraient pas latterrissage, sur le