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Recherche par les méthodes mixtes en santé publique:
enjeux et illustration
Marie-Renée Guével, Laboratoire ACTé EA4281 – Université Blaise Pascal / EHESP Rennes,
Sorbonne Paris Cité
Jeanine Pommier, EHESP Rennes, Sorbonne Paris Cité / CNRS, UMR CRAPE 6051
Article publié dans la Revue Santé Publique – Référence :
Guével MR. et Pommier J. (2012) La recherche par les méthodes mixtes en santé publique : enjeux et
illustration. Santé Publique. 24(1):23-38.
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Résumé :
Les méthodes quantitatives et qualitatives sont associées depuis de nombreuses années dans
différents champs de recherche, mais ce n’est que récemment que cette association a été
conceptualisée en termes de recherche par les méthodes mixtes. Un certain nombre d’auteurs
s’accordent même pour qualifier ce domaine émergent de troisième courant méthodologique (les
deux autres étant les courants qualitatif et quantitatif). Ces méthodes offrent la possibilité
d’intégrer plusieurs perspectives et d’être ainsi un avantage pour l’étude des interventions ou
programmes complexes, notamment en santé publique où l’interdisciplinarité est une notion
essentielle. A l’heure actuelle, la littérature est essentiellement en langue anglaise et la littérature
francophone reste modeste. Cet article vise ainsi à présenter l’émergence de ce troisième
courant méthodologique pour un public francophone de spécialistes en santé publique. Une
revue de la littérature publiée dans ce champ a été conduite afin d’identifier ses principales
caractéristiques. Elle a permis de dégager une vue d’ensemble de l’approche par méthodes
mixtes au travers de son histoire, des définitions qui la structurent, de ses applications ; et,
d’identifier les outils développés pour clarifier cette approche (typologies, nomenclature) et pour
la mettre en œuvre (intégration des résultats et critères de qualité). Ces outils sont ensuite
illustrés par la présentation d’une recherche menée en France. La recherche par méthodes
mixtes offre des possibilités pour les questions de recherche complexes et des pistes pertinentes
et prometteuses permettant de répondre aux problématiques actuelles de la santé publique en
France.
Mots clés : méthodes mixtes, quantitative, qualitative, santé publique
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Abstract:
In the past, quantitative and qualitative methods have been associated by researchers in various
research fields, but it is only recently that this association was conceptualized as mixed methods
research. Some authors have qualified this emergent field as a third methodological tradition (the
two others being the qualitative and quantitative traditions). This methodological approach makes
it possible to integrate several perspectives and presents an added value for the study of complex
interventions or programs, particularly in public health where interdisciplinarity is a key concept.
The existing literature is primarily in English and the French literature remains modest. This article
thus aims at presenting the emergence of this third methodological tradition for francophone
public health specialists. A literature review was carried out in order to identify its main features.
The results present an overall picture of the mixed methods approach through its history, its
definitions, its applications and identify the tools developed to clarify this approach (typologies)
and to implement it (integration of the results and quality standards). These tools are then
illustrated by the presentation of a research undertaken in France. Mixed methods research
offers possibilities for complex research questions and offers relevant and promising opportunities
to deal with current public health issues in France.
Key words: mixed methods, qualitative, quantitative, public health
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Introduction
Historiquement, les chercheurs dans différentes disciplines ont depuis longtemps intuitivement
associé les méthodes qualitatives et quantitatives dans leurs protocoles de recherche, en
particulier dans le domaine de la sociologie et plus tardivement dans le champ de la psychologie
(1). Mais ce n’est que récemment que cette association a été conceptualisée en termes de
recherche par les méthodes mixtes (RMM). La RMM s’est aujourd’hui développée dans différents
champs et disciplines (2) : sociologie, psychologie, management, sciences du langage, sciences
de l’éducation, évaluation, sciences infirmières et également en santé publique. Néanmoins, les
publications, dans le champ de la santé publique, présentant l’utilisation simultanée des
approches quantitatives et qualitatives, sont peu nombreuses dans les revues européennes de
santé publique et, plus particulièrement, dans les revues françaises. Une recherche
bibliographique, non exhaustive, avec les mots clés « méthodes mixtes » ou [« qualitatif » et
« quantitatif »] dans les journaux European Journal of Public Health (EJPH), Revue
d’Epidémiologie et de Santé Publique (RESP), Santé Publique et Sciences Sociales et Santé
montrent que seulement 13 articles présentant des études ayant une composante quantitative et
une composante qualitative ont été publiés au cours de ces dix dernières années (six dans EJPH
et sept dans RESP).
De manière générale, la première des raisons avancées pour utiliser les méthodes mixtes (MM)
est de combiner les forces des méthodes qualitatives et quantitatives. Les MM ont en effet
l’avantage de permettre l’intégration de plusieurs perspectives et sont, par conséquent, un atout
pour étudier les interventions et programmes complexes, multidisciplinaires notamment dans le
domaine de la santé et plus particulièrement en santé publique (3).
Actuellement, le champ de la RMM est traversé par de nombreux débats, il existe notamment
plusieurs définitions de la RMM tendant à montrer qu’il s’agit d’un champ en construction et en
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développement. Cependant, un certain nombre d’auteurs s’accordent pour le qualifier de
troisième courant méthodologique (les deux autres étant le courant quantitatif et le courant
qualitatif) (4).
A l’heure actuelle, hormis les publications de Pluye et al. (5) sur l’utilisation des MM en évaluation
des programmes de santé, la littérature francophone présentant le cadre général de cette
conceptualisation reste modeste. Cet article propose ainsi de contribuer à la diffusion et au
partage de la littérature existante sur les MM, dans la mesure où nous sommes convaincues de
la pertinence d’une telle approche méthodologique pour les recherches dans le domaine de la
santé publique, champ interdisciplinaire par excellence. Il présentera les principaux résultats
d’une revue de littérature permettant de montrer ce qu’est la RMM, d’identifier les principales
caractéristiques du champ ainsi que ses enjeux pour la santé publique.
Méthodes
Une revue de la littérature publiée dans le champ des RMM a été conduite afin d’identifier ses
principales caractéristiques. La revue s’est basée, dans un premier temps, sur les résumés des
articles publiés dans le Journal of Mixed Methods Research, journal de référence dans le champ,
depuis sa création en 2007 jusqu’à juin 2011. Les auteurs de cet article ont chacun lu l’ensemble
des résumés pour sélectionner les articles les plus pertinents vis-à-vis de l’objectif de ce travail.
Les auteurs ont ensuite comparé et discuté leur sélection pour ne retenir que les articles les plus
pertinents. Ces articles ont été lus et leurs références bibliographiques étudiées afin d’identifier
des articles ou des ouvrages susceptibles d’enrichir la réflexion. L’ensemble des documents
retenus a ensuite été lu et analysé pour identifier les caractéristiques du champ de la RMM.
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Le programme des 5ème, 6ème et 7ème conférences internationales annuelles des méthodes mixtes
ont également été inclus dans ce travail afin de vérifier la prise en compte des travaux des
auteurs clés du champ et des dernières thématiques émergentes.
Résultats
Cette section s’articule en trois parties. Une première partie présente une vue d’ensemble de
l’approche par MM au travers de son histoire, des définitions qui la structurent et de ses
applications. La seconde partie est dédiée à la présentation des outils développés pour clarifier
cette approche (typologies, nomenclature) et pour la mettre en œuvre (intégration des résultats et
critères de qualité). Enfin, la troisième illustre la démarche de la RMM par la présentation d’une
recherche menée en France (6).
Une vue d’ensemble du champ de la RMM
Avant l’apparition, dans les années 70, de la « guerre des paradigmes », les méthodes
qualitatives et quantitatives étaient déjà utilisées simultanément, sans que ces recherches soient
labellisées « méthodes mixtes », terme qui n’est apparu que récemment. En 2003, dans la
première édition de leur Handbook of mixed methods research, Tashakkori et Teddlie présentent
en quatre étapes le développement de l’association des méthodes qualitatives et quantitatives
(1). Ils s’appuient sur les travaux réalisés par Denzin et Lincoln (7) sur l’histoire de la recherche
qualitative et décrivent ainsi :
• la période « traditionnelle » (1900-1950), au cours de laquelle de nombreuses
recherches ont utilisé les MM avec peu de controverses méthodologiques, notamment
des travaux sociologiques, tels que les études Hawthorne ;
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• la période « moderniste » ou de « l’âge d’or »1 (1950-1970), marquée par la remise en
cause du positivisme et l’émergence de protocoles de recherche nommés « mixtes » ou
« multiméthodes ». Cette période correspond au développement du post-positivisme
avec l’acceptation que la recherche est influencée par les valeurs des chercheurs, par la
théorie qu’ils utilisent et par le fait que leur compréhension de la réalité est socialement
construite. Ces éléments étaient largement soutenus par les chercheurs employant les
MM. Au cours de cette période, les chercheurs dans le domaine de la psychologie ont
beaucoup utilisé les MM dans leurs travaux (par exemple, les travaux de Festinger,
Riecken et Schachter (1956) ou de Sherif, Harvey, White, Hood and Sherif (1961)) ;
• la période de « l’ascension du constructivisme suivi de la guerre des paradigmes »
(1970-1990), où le constructivisme et les méthodes qualitatives ont acquis une grande
popularité. Cette période voit le développement de nouveaux paradigmes (tels que, le
constructivisme, le naturalisme ou l’interprétativisme) qui s’appuient sur les évolutions
proposées par le post-positivisme, tout en les enrichissant de positionnements
spécifiques, comme, par exemple, en ce qui concerne la généralisation des résultats ou
l’établissement des relations de causalité (9). Les débats entre les théoriciens des
différents paradigmes donnent alors lieu à ce qui a été appelé la « guerre des
paradigmes », chacun argumentant la supériorité de son paradigme. Pour certains, la
compatibilité entre les méthodes quantitatives et qualitatives était ainsi impossible du fait
de l’incompatibilité des paradigmes sous-jacents aux méthodes. Pour d’autres (par
exemple : Brewer et Hanter (1989), Greene, Caracelli et Graham (1989) ou Patton
1 Termes proposés par Denzin et Lincoln (7) et repris par Tashakkori et Teddlie (8)
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(1990)), cette incompatibilité n’était pas justifiée et les MM se sont développées au cours
de cette période souvent ancrées aux approches de triangulation2;
• la période du « pragmatisme et des thèses de compatibilité » (1990 à aujourd’hui), où le
pragmatisme, mis en avant par Howe en 1988 (11), a été posé comme un contre-
argument aux thèses d’incompatibilité. Plusieurs travaux sont apparus ayant pour but
d’établir les MM comme un champ méthodologique à part entière (12-17).
Les auteurs qui ont contribué au développement du champ des MM ont initié non seulement la
construction de typologies des MM, mais aussi la définition d’une nomenclature originale. De
nouveaux termes sont apparus, par exemple autour de la notion de transformation des données
avec les termes de données « qualitativées » (« qualitizing » en anglais - c'est-à-dire des
données collectées avec une méthode quantitative, converties en données narratives et
analysées qualitativement – par exemple, l’analyse de données recueillies par questionnaire à
l’aide d’une méthode factorielle pour identifier des facteurs (i.e. de nouvelles variables qui
résument un ensemble plus important de variables (18)) qui sont ensuite assimilés à des thèmes
et comparés aux thèmes issus de l’analyse d’entretiens) et « quantitativées » (« quantitizing » en
anglais – c'est-à-dire des données collectées par des méthodes qualitatives, converties en codes
numériques afin d’être statistiquement analysées – par exemple, dans un questionnaire, l’analyse
qualitative des réponses aux questions ouvertes, les thèmes identifiés étant ensuite convertis en
2 Notion introduite par Denzin (10) en 1978 qui implique la combinaison de sources de données pour étudier un
même phénomène social. Il considérait qu’il pouvait y avoir une triangulation des sources de données mais aussi
des méthodes.
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variables binaires (présence ou absence pour chaque individu) et intégrées à la base de données
quantitatives)3.
Comme dans tout champ en construction, il n’existe pas toujours une grande consistance entre
les différentes définitions proposées. La recherche conduite, en 2007, par Johnson et al. sur les
différentes définitions existant dans le champ des MM illustre bien ce point (4). Dans cette étude,
ils ont demandé aux principaux leaders du champ leur propre définition. Au total, ils ont recueilli
dix-neuf définitions d’auteurs issus de différents champs et disciplines de recherche. Ils ont
ensuite analysé qualitativement les textes fournis. Leur analyse témoigne à la fois de l’existence
de quelques points de consensus, mais surtout d’une grande hétérogénéité du champ ce qui,
pour ces auteurs, est un point positif pour un domaine émergent tel que celui de la RMM. Un
consensus se dégage sur ce qui est combiné, à savoir les méthodes qualitatives et quantitatives.
D’autres aspects sont cependant source de débats : le moment auquel intervient la combinaison
des méthodes (collecte des données, analyse des données, tout au long du processus de
recherche), les raisons pour associer les méthodes, et enfin, les éléments qui guident le choix
des MM (les questions de recherche ou la philosophie du chercheur). Basée sur leur analyse, les
auteurs proposent la définition suivante : « la RMM est un type de recherche dans lequel un
chercheur ou une équipe de chercheurs associe des éléments issus des méthodes qualitatives et
quantitatives (par exemple, l’utilisation de points de vue, de collectes de données, d’analyses de
données, de techniques d’inférences qualitatifs et quantitatifs) dans le but d’une meilleure
compréhension ». Ils ont ensuite schématisé les MM le long d’un continuum allant des méthodes
qualitatives pures aux méthodes quantitatives pures. Au centre se retrouvent les méthodes
associant à part égale le qualitatif et le quantitatif. Les différentes approches méthodologiques
des MM peuvent ainsi être classifiées le long de ce continuum. Toujours d’après Johnson et al.
3 Ces définitions sont issues de Miles et Huberman (19).
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(2007), la RMM peut concerner l’ensemble du processus de recherche et non uniquement les
méthodes, contrairement à ce que suggère le terme « méthode » dans l’expression MM. Dans
cette expression, le terme « méthode » est à prendre au sens large (4).
Plusieurs raisons sont avancées dans la littérature pour justifier l’utilisation des MM. La raison la
plus souvent citée est que les MM offrent la possibilité de mettre en synergie les forces des
méthodes qualitatives et quantitatives (5;20). Traditionnellement, les approches qualitatives
cherchent à répondre à des questions de recherche de type exploratoire tandis que les
approches quantitatives répondraient à des questions de type confirmatoire. Plusieurs auteurs
sont cependant en désaccord avec cette vision jugeant que cela donne un positionnement de la
recherche qualitative surtout comme étant une étape préliminaire. Par exemple, Punch (21)
pointe que la recherche quantitative, même si elle est classiquement considérée comme celle qui
vérifie ou confirme des théories, peut aussi être utilisée pour la genèse de théories. À l’inverse,
les méthodes qualitatives, souvent considérées comme celles qui génèrent des théories, peuvent
aussi être utilisées pour la confirmation. L’une des plus-values des RMM est alors d’offrir
l’opportunité de répondre de manière simultanée à la fois à la question de l’exploration et à celle
de la confirmation de théories. Ainsi, dans une même recherche, il peut être intéressant, d’une
part, de savoir qu’une variable peut avoir une relation de prédiction avec une autre variable et,
d’autre part, de comprendre comment se passe cette relation prédictive. Cette approche par les
MM peut donc conduire à proposer de nouvelles options pour répondre aux questions de
recherche complexes, pour produire des inférences plus robustes ou encore pour présenter une
plus grande diversité de points de vue.
En 1989, Greene et al. proposent cinq grandes fonctions de base attribuables aux MM : (1) la
triangulation, qui vise la convergence ou la corroboration des résultats issus de différentes
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méthodes dans une optique de validation des interprétations; (2) la complémentarité, qui vise à
conforter, à illustrer ou à clarifier les résultats d’une méthode par ceux d’une autre; (3) le
développement, qui cherche à utiliser les résultats d’une méthode pour aider à développer une
autre méthode (par exemple, la construction d’échantillon ou le développement d’instrument de
mesure); (4) l’initiation, qui cherche à faire émerger les paradoxes ou les contradictions des
résultats d’une méthode grâce aux résultats d’une autre méthode; (5) et, l’expansion, qui vise à
étendre le champ d’application des résultats d’une méthode en utilisant d’autres méthodes. Les
deux premières fonctions sont liées aux multiples inférences qui se confirment et se complètent.
Les trois dernières fonctions sont, quant à elles, liées à l’idée que les inférences réalisées dans
une phase de l’étude conduisent à de nouvelles questions de recherche et/ou à la construction
d’une seconde phase (22).
Les outils développés pour clarifier et mettre en œuvre la RMM
Une typologie des principaux protocoles de recherche
Les méthodologistes des MM ont développé plusieurs classifications dont une recension est
détaillée par Creswell et Plano Clark dans leur ouvrage de 2007 (p.60-62)(20). Nous présentons
ici, à titre d’exemple, la classification proposée par Creswell et Plano Clark dans la seconde
édition de leur livre Designing and conducting mixed methods research (23). Les auteurs de cette
classification décrivent six principaux protocoles : le protocole convergent (« convergent
design »), le protocole explicatif (« explanatory design »), le protocole exploratoire (« exploratory
design »), le protocole niché (« embedded design »), le protocole transformatif (« transformative
design ») et le protocole multiphase (« multiphase design »). Les caractéristiques, les objectifs de
recherche auxquels ils peuvent typiquement répondre, les forces, et, les enjeux et les difficultés
liées à la mise en œuvre de chacun de ces protocoles sont présentés dans le tableau 1.
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Pour Creswell et Plano Clark (2007), le choix du protocole de recherche, et, donc de la qualité
des résultats d’une RMM, dépend à la fois de la pertinence et de l’adéquation du protocole choisi
aux questions de recherche (20). Ces auteurs ont identifié, outre la prise en compte des
compétences du chercheur dans les différentes approches méthodologiques ou des ressources
disponibles pour la mise en œuvre de la recherche, trois facteurs pouvant influencer le choix du
type de protocole :
• le moment et l’enchaînement du recueil et de l’exploitation des données (concomitant ou
séquentiel),
• l’importance relative des données issues de chacune des approches (égale ou
prépondérance de l’une des approches),
• la manière dont les données qualitatives et quantitatives sont combinées.
La nomenclature
Afin de faciliter la construction et la compréhension de la complexité inhérente aux MM, un
système de notation et de présentation graphique a été développé.
Morse a été la première à introduire un système de notation pour décrire les MM (24;25). Ce
système a ensuite été complété par d’autres auteurs, tel que Plano Clark (2005), et est
aujourd’hui largement utilisé (20). Les notations employées permettent d’expliciter les protocoles
de recherche et d’avoir un langage commun entre les chercheurs. Le tableau 2 présente ce
système de notation.
Le tableau 3 présente pour chacun des protocoles décris au paragraphe précédent l’écriture leur
correspondant suivant ce système de notation. Par exemple, la notation suivante :
QUAN+QUAL=vérification d’une convergence, indique que les méthodes quantitative et
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qualitative sont d’égale importance, qu’elles sont utilisées simultanément et que leur association
a pour but de vérifier la convergence des résultats.
En 1992, Steckler et al. ont développé un système de diagrammes (26). Ce système a été repris
par de nombreux auteurs tels que Creswell et Plano Clark (2007). Ces diagrammes utilisent des
formes géométriques pour illustrer les différentes étapes du processus de recherche et des
flèches pour symboliser la progression entre ces étapes. Les procédures, les méthodes utilisées
et les produits sont décrits à chaque étape. En 2006, Ivankova et al. ont étudié l’utilisation de ces
diagrammes et ont formulé dix lignes directrices pour les construire dans le cadre d’une RMM
(27). Ces lignes directrices insistent sur la nécessité d’un diagramme explicite et rappellent les
éléments de base essentiels à la bonne compréhension d’un schéma. L’explicitation des
différentes combinaisons est essentielle tant pour la compréhension des protocoles que pour leur
mise en œuvre. La réalisation de schémas détaillés est alors très utile (20). Un exemple sera
présenté plus loin.
L’intégration des résultats en RMM
Un des enjeux majeurs de la RMM est la question de l’intégration des résultats, c'est-à-dire
comment les résultats issus des deux méthodes sont combinés pour répondre aux questions de
recherche posées. Plusieurs typologies sont proposées par différents auteurs. Celle de Teddlie et
Tashakkori en 2003, reprise et appliquée à l’évaluation de programme par Pluye et al. en 2009,
retient trois approches :
• L’approche complémentaire : dans laquelle, les résultats qualitatifs et quantitatifs sont
présentés séparément et ensuite discutés, avec, a minima, un élément du volet qualitatif
qui contribue à un élément du volet quantitatif, ou inversement, soit comme un élément
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qui propose une autre piste d’exploration ou comme un élément explicatif et/ou de
compréhension.
• L’approche par tension dialectique s’utilise quand les résultats QUAN et/ou QUAL ne
permettent pas une convergence et une cohérence dans l’interprétation des résultats.
La présentation des résultats s’appuie alors sur un tableau ou une figure à double
entrée permettant de croiser les résultats quantitatifs et qualitatifs et de mettre en
évidence les cohérences et les divergences. Cette approche souligne que des
divergences sont toujours possibles et qu’il convient de ne pas les ignorer mais plutôt de
les intégrer dans la présentation des résultats de recherche. Ces deux approches
peuvent coexister. Quatre stratégies sont alors proposées dans la littérature pour
trouver une solution aux divergences entre les données ou les résultats qualitatifs et
quantitatifs : (1) la réconciliation, lorsque les données peuvent être ré-analysées et
interprétées de manière plausible; (2) le « fourchettage » (« bracketing » en anglais) qui
propose, lorsque les résultats sont « irréconciliables », de déterminer des cas extrêmes
à l’image d’un intervalle de confiance en statistique; (3) l’initiation, à partir des nouvelles
perspectives issues de l’analyse des données, d’un nouveau projet de recherche ou
d’une nouvelle collecte de données basé sur une nouvelle question de recherche; et (4)
l’exclusion, c'est-à-dire l’omission d’une partie des données, par exemple si les résultats
sont incomplets ou si une partie des données n’est pas suffisamment robuste en terme
de validité (28).
• L’approche par assimilation suggère que les résultats qualitatifs et quantitatifs soient
assimilés sous une seule forme, qualitative ou quantitative, c'est-à-dire que les données
sont « quantitativées » ou « qualitativées » comme définis précédemment dans cet
article.
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Les critères de qualité d’une RMM
Il existe peu de recommandations spécifiques pour évaluer la qualité méthodologique des RMM.
De récents travaux proposent des pistes pour répondre à cette question (29-31).
Dans le courant quantitatif, quatre critères sont largement reconnus pour évaluer la qualité des
outils de collecte de données et, par extension, la qualité des recherches. Il s’agit de : (1) la
validité interne, c'est-à-dire le degré de correspondance entre les données et la réalité ; (2) la
validité externe ou degré de généralisation, c'est-à-dire le degré pour lequel les conclusions
seraient valables pour d'autres personnes dans d'autres lieux et à d'autres moments que ceux de
l’étude ; (3) la fiabilité de l’étude, à savoir la cohérence de l’étude ; et (4) l'objectivité, soit la
tentative de minimiser les biais du chercheur (32).
Dans le courant quantitatif, le consensus n'est pas aussi clair et certains soutiennent qu'il n'est
pas possible d'avoir un ensemble unique de critères. Néanmoins, en 1985, Lincoln et Guba ont
proposé quatre critères analogues à ceux du courant quantitatif visant à déterminer la fiabilité des
résultats (9). Il s’agit de : (1) la crédibilité, c’est-à-dire le fait d’établir que les résultats de la
recherche qualitative sont crédibles du point de vue du participant ; (2) la transférabilité, c'est-à-
dire le degré pour lequel les résultats peuvent être généralisés ou transférés à d'autres contextes
ou situations ; (3) la fiabilité, à savoir la nécessité de tenir compte du contexte dans lequel la
recherche a lieu ; et enfin, (4) la confirmabilité, c'est-à-dire le degré pour lequel les résultats
pourraient être confirmés ou corroborés par d'autres.
Dans le domaine des MM, il n’existe pas encore de définition normalisée des critères de qualité
de la recherche. Bryman (2006, 2008) propose néanmoins trois manières de s’assurer de la
qualité des RMM en employant différents critères: (1) les critères de convergence, c'est-à-dire
l’utilisation des mêmes critères pour toutes les composantes de la recherche à la fois qualitative
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et quantitative, par exemple pour une recherche où la composante prédominante est quantitative,
les critères de qualité de la recherche quantitative sont alors retenus ; (2) des critères distincts
pour les éléments quantitatifs et qualitatifs, par exemple lorsque les questions de recherche
abordées par les deux composantes sont différentes ; et (3) les critères « sur mesure »
(« bespoke criteria »), c'est-à-dire de nouveaux critères spécifiques pour la RMM en cours de
développement par les chercheurs en MM (29;31). Plus récemment, dans une synthèse des
travaux publiés sur ce sujet, O’Cathain (2011) propose une trame reprenant l’ensemble des
critères de qualité proposé dans la littérature (33). Cette trame est constituée de huit domaines et
s’appuie sur les différentes étapes d’un projet de recherche, de la planification à l’utilisation des
résultats en passant par le recueil des données et l’interprétation. Ces huit domaines sont les
suivants : la qualité de la planification, la qualité du protocole, la qualité des données, la rigueur
de l’interprétation, la transférabilité des inférences, la qualité de la restitution du travail, la
possibilité d’extraire une synthèse des résultats (dans le sens des données probantes) et l’utilité.
Pour chacun de ces domaines, O’Cathain a recueilli différents critères. Elle souligne la lourdeur
de l’utilisation de ces critères et conclue qu’il existe encore aujourd’hui un trop grand nombre de
critères pour que cette trame soit applicable et que les efforts de recherche pour le
développement de critères de qualité des RMM doivent être poursuivis.
Un exemple de recherche par méthodes mixtes : l’évaluation d’un programme de
promotion de la santé
L’évaluation des programmes de promotion de la santé reste actuellement un enjeu majeur de ce
domaine de part la complexité et la diversité des facteurs susceptibles d’influencer ces
interventions (34;35). De part la possibilité qu’elle offre d’intégrer plusieurs perspectives, la RMM
peut être un atout majeur pour répondre à cet enjeu. C’est dans cette optique que le dispositif
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d’évaluation d’un programme de promotion de la santé en école primaire basé sur la formation
des équipes enseignantes a été développé. Cet exemple a pour but d’illustrer les différentes
caractéristiques de la RMM présentées dans les paragraphes précédents. Le protocole de cette
recherche ainsi que ses cadres théoriques et sa mise en œuvre pratique ont été publiés par
ailleurs (6).
Choix du protocole de recherche
Comme l’indique Creswell et Plano Clark (20), le choix du protocole de recherche s’appuie sur
les questions de recherche. Dans ce projet de recherche, les questions portent, d’une part, sur
les mécanismes et les facteurs contextuels qui permettent à l’équipe éducative de développer
une approche globale de promotion de la santé et, d’autre part, sur l’impact du programme sur
les pratiques individuelles et collectives des enseignants et sur l’impact de ces pratiques sur le
climat scolaire et la perception que les enfants ont de leur école. Ces deux principaux objectifs
relèvent, pour le premier, d’une approche traditionnellement qualitative et, pour le second, d’une
approche traditionnellement quantitative (36). Le but principal de cette recherche étant la mesure
de l’impact du programme, le protocole retenu est de type concomitant niché, c'est-à-dire que les
approches qualitative et quantitative sont utilisées simultanément et qu’elles se nourrissent l’une
l’autre tout au long du processus de recherche. L’approche quantitative est alors dominante et
sert de ligne directrice à l’étude. Ainsi, l’approche qualitative, basée sur des entretiens semi-
directifs et des questions ouvertes dans les questionnaires, est articulée avec l’approche
quantitative, basée sur des questions fermées, à la fois au niveau du recueil, de l’analyse et de
l’interprétation des données.
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Notation et représentation graphique
En référence au système de notation présenté précédemment, le protocole concomitant niché de
cette recherche est noté de la manière suivant : QUAN(qual)=généralisation et interprétation.
La figure 1 présente la schématisation de ce protocole. Cette forme de présentation soutient
l’explicitation des différentes procédures qui sont mises en œuvre, des produits attendus aussi
bien pour la partie qualitative que quantitative du protocole et aux différentes étapes du projet de
recherche : collecte des données, analyse des données et interprétation des résultats.
Intégration des résultats
Les résultats issus des méthodes qualitative et quantitative sont intégrés suivant les approches
par tension dialectique et par assimilation. Ainsi des données issues de l’analyse des entretiens
sont quantitativées et des données issues des questionnaires sont qualitativées. L’ensemble des
résultats est ensuite confronté et discuté. La figure 1 explicite schématiquement cette intégration.
Par exemple, dans cette étude, plusieurs niveaux d’organisation sont impliqués dans la mise en
œuvre du programme, il existe notamment un niveau à l’échelle régionale et un niveau à l’échelle
locale. Dans ce protocole, l’échelle régionale à principalement été étudiée en utilisant des
méthodes qualitatives ce qui a permis d’extraire des éléments de contexte susceptible d’être
déterminant pour l’impact du programme à l’échelle locale. Pour valider cette hypothèse, les
résultats issus de l’analyse qualitative régionale ont été « quantitativées » pour les intégrer à
l’analyse quantitative à l’échelle locale. Cette procédure permet d’avoir une prise en compte plus
globale des facteurs susceptibles d’expliquer les effets observés.
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Cette illustration témoigne de l’intérêt de mettre en œuvre une approche méthodologique par MM
pour s’intéresser à des programmes complexes de santé publique impliquant de nombreux
acteurs issus de différents champs professionnels. Elle souligne également les enjeux liés à cette
utilisation et qui seront détaillés à présent.
Discussion : principaux enjeux et défis de la RMM
Comme souligné en introduction, le champ des RMM est en plein développement et tend à se
définir comme un troisième courant méthodologique aux côtés des courants quantitatif et
qualitatif (37). Comme tout champ en développement, il est traversé par des débats et fait face à
de nombreux défis et obstacles, au premier rang desquels se place la multiplicité de définitions,
de nomenclatures et de typologies de protocole de recherche (4;37). En effet, comme le montre
le travail de Johnson et al. (2007), les leaders du champ (toutes disciplines confondues)
proposent des définitions sensiblement différentes, notamment du point de vue des paradigmes
sous-tendant les RMM (4). La question épistémologique est ainsi un enjeu fort pour le
développement du champ et plusieurs pistes sont proposées pour cette réflexion sur les
paradigmes :
• la piste de la dialectique, qui examine les tensions entre les différents paradigmes
utilisés au sein d’une même recherche ;
• la piste du choix d’un seul paradigme (le plus souvent le pragmatisme ou le
transformatif-émancipatoire) ;
• et la piste du multiparadigme, qui suggère de choisir le paradigme le mieux adapté au
contexte (37).
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Ces questions sont au cœur des débats d’où découle la question de l’utilité des MM et de leur
reconnaissance (4;20;37;38). Dans un article récent, Lincoln argumente l’importance du choix
d’un paradigme unique au sein d’une même recherche et l’impossibilité de croiser les
paradigmes, tout en reconnaissant l’intérêt d’utiliser différentes sources de données, quelles
soient qualitatives ou quantitatives, pour répondre à certains objectifs de recherche (39). Cet
exemple montre que les fondements épistémologiques de ce troisième mouvement
méthodologique font l’objet de débats vifs et fondamentaux.
D’un point de vue plus technique, l’explication et l’explicitation des protocole de recherche,
notamment sur la façon dont les méthodes qualitatives et quantitatives sont intégrées tout au
long du projet de recherche, et particulièrement au moment de la généralisation des résultats, est
un des enjeux majeurs du développement des RMM (4;20;37). Liée à cet enjeu, la question de la
qualité des RMM (crédibilité, fiabilité et validation des résultats) est émergente (4) et fait l’objet de
travaux de recherche de plus en plus nombreux (29;30;33;40).
De plus, l’emploi de MM au sein d’un projet de recherche soulève plusieurs questions,
notamment en termes de logistique et de publication (37;41). En effet, d’un point de vue
logistique, les MM requièrent soit qu’un même chercheur ait des compétences à la fois en
méthodologie qualitative, quantitative et mixte, soit une équipe de chercheurs rassemblant ces
compétences et composée de chercheurs en capacité de dialoguer et d’échanger avec les
chercheurs issus des autres courants. Cependant, en santé publique, le travail interdisciplinaire
est une caractéristique essentielle ce qui devrait faciliter le recours au MM. La publication de ces
études est également rendue difficile par la spécialisation des journaux dans l’une ou l’autre des
approches méthodologiques classiques et par la restriction de la taille des articles qui rend
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difficile d’exposer les différentes composantes de l’étude et leur intégration (41). Le peu de
publications en santé publique pourrait en partie s’expliquer par le fait que les résultats des
études mixtes peuvent être publiés séparément ou encore que l’un des volets n’est pas publié.
Des pistes existent néanmoins, dans le développement de la revue Journal of Mixed Methods
Research créé en 2007 (http://mmr.sagepub.com/) ou de la revue International Journal Of
Multiple Research Approaches (http://mra.e-contentmanagement.com/) également lancé en 2007
ainsi que dans la mise en place d’un congrès international annuel consacré à la RMM qui en est
à sa 7ème édition en 2011
(http://www.healthcareconferences.leeds.ac.uk/conferences/details.php?id=6).
Enfin, la reconnaissance, à la fois par ceux qui financent les projets et par ceux qui utilisent les
résultats issus de ces projets de recherche, de l’intérêt et de la pertinence de l’approche par les
MM pour répondre à des questions de recherche complexes est un élément essentiel pour le
développement de projets de qualité (38). Cette reconnaissance passe également par la
formation de professionnels, chercheurs et praticiens, afin qu’ils soient en capacité de
comprendre et de mener des projets utilisant des MM. Cette formation est un des enjeux majeurs
actuels pour la nouvelle génération de professionnels et pour la diffusion de cette approche (38).
La RMM offre des possibilités pour les questions de recherche complexes et des pistes
pertinentes et prometteuses permettant de répondre aux problématiques actuelles de la santé
publique en France.
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Guével & Pommier, 2012 22
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Tableau 1 : Description des principaux protocoles de recherche par méthodes mixtes
Type de protocole
Convergent Explicatif Exploratoire Niché Transformatif Multiphase
Caractéristiques
- Recueil concomitant des données - Analyse séparée - Comparaison et/ou mise en relation des résultats
- Recueil et analyse séquentiels des données : l’étude quantitative précède l’étude qualitative, construite à partir des résultats quantitatifs
- Recueil et analyse séquentiels des données : l’étude qualitative précède l’étude quantitative qui est construite à partir des résultats de l’étude qualitative
- Recueil concomitant ou séquentiel des données - Analyse séparée - L’une des deux bases de données joue un rôle de support par rapport à l’autre base
- Recueil et analyse séquentiel des données dans le cadre d’un paradigme transformatif qui guide le choix des méthodes
- Combine des études qualitatives et quantitatives concomitantes et/ou séquentielles dans le cadre d’un programme de recherche avec plusieurs phases
Objectifs de recherche type
- Obtenir une vue plus complète d’un phénomène à partir de deux bases de données - Corroborer des résultats issus de différentes méthodes
- Expliquer des résultats quantitatifs à l’aide de données qualitatives - Utiliser des données quantitatives pour sélectionner les participants d’une étude qualitative
- Explorer un phénomène dont les caractéristiques ne sont pas connues - Développer un instrument - Evaluer si des résultats qualitatifs peuvent être généralisés
- Aborder des questions de recherche différentes requérant l’utilisation de méthodes différentes - Renforcer une expérimentation en améliorant les procédures de recrutement, en examinant les processus de mise en œuvre ou en expliquant les réactions des participants
- Mettre en œuvre une recherche qui est orientée vers le changement et qui cherche à faire avancer la justice sociale
- Aborder un ensemble de questions de rechercher découlant les unes des autres dans la cadre d’un programme de recherche
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Forces
- Intuitif - Efficace - Facile à mettre en œuvre par des équipes
- Facilité de mise en œuvre et de restitution - Convient à des approches émergentes
- Facilité de mise en œuvre et de restitution - Convient à des approches émergentes
- Peu demander moins de temps et de ressources - Améliore le général avec des données supplémentaires - Facile à mettre en œuvre par des équipes qui sont habitués aux protocoles classiques
- Implication forte des participants - Production de résultats utile pour les membres de la communauté et crédible pour les différents acteurs
- Flexibilité pour aborder des questions interconnectées - Intéressant pour l’évaluation ou le développement de programmes - Propose un cadre support pour la mise en œuvre d’études sur le long terme
Enjeux Difficultés
- Besoins important en expertise et en temps - Problèmes liés aux échantillons et à leur taille - Difficultés à faire converger deux jeux de données différents - Prise en compte de résultats discordants
- Long à mettre en œuvre - Anticipation vis-à-vis de la seconde phase
- Long à mettre en œuvre - Anticipation vis-à-vis de la seconde phase
- Besoins d’expertise concernant le protocole principal et les méthodes mixtes - Nécessité de préciser l’objectif du recueil de données supplémentaires - Difficulté d’intégrer les résultats - Prise en compte des biais
- Peu de lignes directrices pour la conduite de ce type de protocole - Justification du choix de cette approche - Lien particulier avec les participants
- Anticipation des enjeux liés à l’utilisation d’approches concomitantes et séquentielles - Besoins en temps et en ressources - Travail en équipe - Mise en lien des différentes études
Ce tableau présente une synthèse du travail mené par Creswell et Plano Clark, publié dans la seconde édition de leur ouvrage Designing and conducting mixed methods research (23).
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Tableau 2 : Système de notation pour décrire les méthodes mixtes
Notation Signification
QUAN ou quan désigne les méthodes quantitatives
les majuscules désignent les composantes dominantes et les minuscules, les composantes mineures QUAL ou qual
désigne les méthodes qualitatives
le plus: + indique que les méthodes sont utilisées simultanément la flèche: → indique que les méthodes sont utilisées de manière séquentielle
les parenthèses: () indiquent que les méthodes sont nichées, la méthode entre parenthèses étant imbriquée dans la première méthode
les doubles flèches: →← indiquent que les méthodes sont mises en œuvre de manière récursive
les crochets: [ ] indiquent que les méthodes mixtes sont utilisées dans une étude unique ou dans un projet impliquant une série d’études
le signe égal: = indique que le but du protocole sera indiqué à la suite du signe d’égalité
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Tableau 3 : Exemples de notations des différents protocoles de recherche en méthodes mixtes
Protocole Notation Convergent QUAN+QUAL=convergence des résultats Explicatif QUAN->qual=expliquer les résultats Exploratoire QUAL->quan=généraliser des résultats Niché QUAN(qual)=renforcer l’expérimentation Transformatif (pas de notation formelle)
Théorie transformative (QUAN->QUAL) =mettre en évidence des inégalités
Multi-phase QUAN->QUAL->[QUAN+QUAL] =développement d’un programme