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Résumé La commune de Peille a été récemment le théâtre d'une série de petits événements sismiques qui a inquiété la population locale. Tout d'abord le 1er novembre 1999 avec une secousse de magnitude (Mw = 3.4), et ensuite un essaim d'environ 400 séismes de la fin novembre jusqu'au 20 décembre 2000, et dont la plus forte secousse a atteint une magnitude de 3.5 Ces derniers événements ont été une aubaine pour les spécialistes de Géosciences Azur, car ils ont eu lieu pendant une campagne de détection fine de micro événements et de plus, ils se sont produits en plein cœur du périmètre d'observation. Le déploiement important de capteurs dans cette zone a permis d'identifier la portion de faille qui a joué et également de mesurer les effets d'amplification dans certains quartiers de la ville de Nice située à 10 km seulement de l'épicentre. Afin de compléter ces données, il paraissait indispensable d'examiner d'une manière plus approfondie la sismicité historique de ce village. Le séisme ligure de 1887 a causé d'importants dégâts à Peille tout comme probablement d'autres séismes plus anciens. Ce nouveau cas d'étude tente également d'apporter une réponse sur les causes responsables de dégâts sur cette commune très proche de Nice et de Monaco. 1. Peille, village médiéval (Figure 1) Pour la première fois le toponyme Peille se révèle à nous en 1028, le témoin d'un acte se nomme Gaucelinus de Pilia. L'ancien Pilia, est un nom d'origine Ligure qui signifie "hauteur nue et herbeuse". Peille est un charmant village aux ruelles étroites et tortueuses dont les maisons semblent jouer des coudes. C'est aussi la cité aux arcades, aux ogives, aux voûtes nombreuses sombres et humides. A Peille je m'en vais ce soir tourner la page disait Léo Ferré qui eut le coup de foudre pour ce village médiéval. Les difficultés de la vie en montagne, les dangers de l'isolement, le besoin de l'entraide, celui de la sécurité, obligèrent cette communauté à se grouper étroitement formant une bourgade compacte entourée de murs fortifiés. C'est sans doute ce qui explique l'abandon des hameaux satellites éloignés d'Ongran, d'Ueïra, et de Saint-Martin au profit du village actuel de Peille. 2. Situation géographique Le village de Peille perché à 650 m d'altitude se situe à 16 km au nord-est de Nice et seulement à 7 km de la principauté de Monaco, donc relativement proche de zone fortement habitée (Figure 2). Regard sur la sismicité historique de la commune de Peille dans les Alpes-Maritimes. André Laurenti 1 1 auteur en sismicité historique 14, rue de la Placette, Haut-de-Cagnes, 06800 Cagnes-sur-mer, courriel : andr e.laur enti@liber tysurf.fr Regard sur la sismicité historique de la commune de Peille dans les Alpes-Maritimes.- André Laurenti Actes des VI e Rencontres - Archéosismicité & Vulnérabilité, Environnement, bâti ancien et société Groupe APS 2002 1 Figure 1 : Le village de Peille perché à 650 m d’altitude sur le flanc sud du mont Castellet (photo A. Laurenti) Figure 2 : Situation géographique de Peille

Regard sur la sismicité historique de la commune de …€¦ · Castillon, de Sainte-Agnès, de Gorbio, de la Turbie, de Monaco, ... Castellet (photo A. Laurenti). POPULATION DE

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Page 1: Regard sur la sismicité historique de la commune de …€¦ · Castillon, de Sainte-Agnès, de Gorbio, de la Turbie, de Monaco, ... Castellet (photo A. Laurenti). POPULATION DE

RésuméLa commune de Peille a été récemment le théâtred'une série de petits événements sismiques qui ainquiété la population locale. Tout d'abord le 1ernovembre 1999 avec une secousse de magnitude(Mw = 3.4), et ensuite un essaim d'environ 400séismes de la fin novembre jusqu'au 20 décembre2000, et dont la plus forte secousse a atteint unemagnitude de 3.5Ces derniers événements ont été une aubaine pourles spécialistes de Géosciences Azur, car ils ont eulieu pendant une campagne de détection fine demicro événements et de plus, ils se sont produitsen plein cœur du périmètre d'observation. Ledéploiement important de capteurs dans cette zonea permis d'identifier la portion de faille qui a jouéet également de mesurer les effets d'amplificationdans certains quartiers de la ville de Nice située à10 km seulement de l'épicentre.Afin de compléter ces données, il paraissaitindispensable d'examiner d'une manière plusapprofondie la sismicité historique de ce village.Le séisme ligure de 1887 a causé d'importantsdégâts à Peille tout comme probablement d'autresséismes plus anciens. Ce nouveau cas d'étude tenteégalement d'apporter une réponse sur les causesresponsables de dégâts sur cette commune trèsproche de Nice et de Monaco.

1. Peille, village médiéval (Figure 1)

Pour la première fois le toponyme Peille se révèle à nous en1028, le témoin d'un acte se nomme Gaucelinus de Pilia.L'ancien Pilia, est un nom d'origine Ligure qui signifie "hauteurnue et herbeuse".Peille est un charmant village aux ruelles étroites et tortueusesdont les maisons semblent jouer des coudes. C'est aussi la citéaux arcades, aux ogives, aux voûtes nombreuses sombres ethumides. A Peille je m'en vais ce soir tourner la page disait LéoFerré qui eut le coup de foudre pour ce village médiéval. Les difficultés de la vie en montagne, les dangers de l'isolement,le besoin de l'entraide, celui de la sécurité, obligèrent cettecommunauté à se grouper étroitement formant une bourgadecompacte entourée de murs fortifiés. C'est sans doute ce quiexplique l'abandon des hameaux satellites éloignés d'Ongran,d'Ueïra, et de Saint-Martin au profit du village actuel de Peille.

2. Situation géographique

Le village de Peille perché à 650 m d'altitude se situe à16 km au nord-est de Nice et seulement à 7 km de laprincipauté de Monaco, donc relativement proche dezone fortement habitée (Figure 2).

Regard sur la sismicité historique de la commune de Peille dans lesAlpes-Maritimes.

André Laurenti1

1 auteur en sismicité historique 14, rue de la Placette, Haut-de-Cagnes, 06800 Cagnes-sur-mer, courriel :[email protected]

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Figure 1 : Le village de Peille perché à 650 m d’altitude surle flanc sud du mont Castellet (photo A. Laurenti)

Figure 2 : Situation géographique de Peille

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Il s'inscrit dans un secteur extrêmement tourmenté.Agrippé à la pente sud du mont Castellet (825 m), il estbarré au nord par l'imposante cime de Baudon (1 266 m)et le col routier de la Madone (928 m), à l'est par la cimede Morgelle (1 079 m), celle de Gariglian ( 1 108 m) etdes Cabanelles (1 090 m) et enfin au sud par le montRastel (802 m).A l'est entre la montagne et le village, une entailleprofonde permet au torrent du "Faquin" de couler parmiles rocailles jusqu'au hameau de la Grave de Peille situéen aval où il conflue avec le Paillon de la Grave. Ce siteremarquable s'ouvre vers le sud-ouestperpendiculairement à la vallée du Paillon (Figure 3).

3. Le climat

Malgré une altitude de 650 m, Peille bénéficie du climatméditerranéen. Il subit l'humidité du Golfe de Gènesavec une alternance de deux saisons sèches et de deuxsaisons pluvieuses avec une pointe en automne (octobre- novembre). Le réseau hydrographique est de typetorrentiel à régime intermittent.

4. Evolution de la population

Cette présente étude se limite exclusivement au villagede Peille, aussi les données concernant l'évolution de lapopulation sont quelque peu faussées car la communeréunit plusieurs quartiers contemporains éloignés duvillage et dont la plupart sont actuellement en pleineexpansion. Il est également important de soulignerqu'avant 1948 le hameau de Blausasc situé à l'ouest, étaitrattaché à Peille, il a été par la suite érigé en communedistincte, ce qui explique l'écart entre la population de1878 et celle de 1954. La guerre de 14 - 18 a fait disparaître cinquante six

soldats de la commune et celle de 39 - 45, six. Après cesdeux événements, ici comme ailleurs, le dépeuplements'est amorcé selon les mêmes causes, il s'est concrétisépar l'exode des jeunes gens vers les villes voisines, où lavie est moins rude et plus lucrative Malgré tout et contrairement à certains villages del'arrière pays trop éloignés des villes, qui constatent au fildes ans le nombre d'habitants diminuer, Peille voit sapopulation augmenter régulièrement (Tableau 1). Ce faitpeut s’expliquer par des taxes moins élevées qu'en villeet la qualité de vie, le calme, l'air pur, le cadrepittoresque…

5. Urbanisation

Au début du Moyen âge, le territoire de Peille atteignaitenviron 20 000 hectares et appartenait dans un premiertemps aux Vicomtes de Nice. Les terres descendaient ducol de Braus et du Méras au nord et allaient jusqu'à lamer, dont tout ce qui constitue aujourd'hui la cotemonégasque. Son territoire se composait des communesactuelles de Touët de l'Escarène, de Berre, de Contes, deCastillon, de Sainte-Agnès, de Gorbio, de la Turbie, deMonaco, de Peillon, et de l'Escarène.Le Rocher de Monaco appartenait en indivis à l'abbaye età la commune de Peille qui, toutes deux le cédèrent auxgénois le 19 mai 1179.Actuellement Peille offre encore une vaste étendue : sasuperficie est de 4 239 hectares et 77 ares dont 2 000hectares de forêt (Figure 4).

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Figure 3 : Cartographie de Peille.

Tableau 1 : Evolution de la population et du parc immobilierde Peille.

Figure 4 : Peille est situé à flanc de versant au pied du montCastellet (photo A. Laurenti).

POPULATION DE LA COMMUNE

1838 1878 1954 1975 1982 1999 1588 1580 888 1245 1745 2045 PARC IMMOBILIER

Epoque d'achèvement Avant 1949 1949 à 1974 1975 à 1981 1982 après 447 261 119 259

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Le village s'est développé à partir du rocher de l'ancienchâteau Comtal des Lascaris vers le VIème et VIIèmesiècle, puis à conquis le versant de part et d'autrepar implantation en gradins convexes à partir du Xèmesiècle. Pour intercepter le passage Monaco - La Turbiequi passait par le col Saint-Bernard, un castrum futconstruit à cheval sur le chemin et le vallon du Faquin.Ce fut Peille, dont les premières murailles s'élevèrent trèsprobablement aux XI et XII siècles. Le village de Peilledevenu place forte par la suite, fut entouré d'un solidemur d'enceinte très élevé, avec tours carrées, rondes,demi-lunes, meurtrières, créneaux et mâchicoulis. Lesremparts existent toujours partiellement à l'est et à l'ouestdu quartier de la Barma dit aussi "Lo Concas". Il en resteassez peu, car une partie fut démolie pour la constructionde la route Peille - la Turbie, une autre, par lestremblements de terre (Figure 5), enfin les habitants duquartier de la tour y causèrent aussi des dégradationssérieuses. Ce lieu se dénomme toujours la Tour et lequartier du Bari.

Peille est situé à flanc de versant, il possède laparticularité de présenter deux alignements de façades depart et d'autre de l'éperon rocheux du "Baous du Caster"surplombant le ravin. Les faîtages sont parallèles auxcourbes naturelles du sol.A plusieurs kilomètres de là, le territoire de Peilleregroupe au sud les hameaux résidentiels de Saint-Martinde Peille et des Lacs, on distingue également le Val deVille au nord-est, et enfin la Grave de Peille au sud-ouestqui constitue le site industriel dû à l'implantation del'usine des ciments Vicat. Tous ces quartiers satellites onttendance à se développer.Les bâtiments isolés sont rares, à l'exception de quelquesbergeries et cabanons d'agriculteurs. L'absence desgranges, si nombreuses dans les vallées alpines du

département, est sans doute la principale caractéristiquedu paysage. Cette situation dépend du mode deproduction. Contrairement à l'élevage, la culture del'olivier, principale ressource de la région, ne nécessitepas de locaux annexes privés, tout juste une resserre pourentreposer les jarres d'huile et d'olives salées nécessairesà la consommation familiale.

6. Les matériaux utilisés

L'éventail des matériaux employés pour la constructionest assez réduit par comparaison avec les autres valléesdu département. Les bâtisseurs utilisaientessentiellement la pierre maçonnée, souvent enduite aumortier de chaux, et la terre cuite pour la toiture. Le bois,(cyprès, sapin, mélèze, châtaignier, pour l'essentiel) étaitemployé au niveau des structures internes et deséléments de fermeture. Les façades sur rue sont engénéral enduites d'un mortier fin, lissé à la taloche.

6.1. La pierreOn utilisait le calcaire sous forme de moellons, les blocséquarris étant réservés aux chaînages d'angle et auxembrasures. La vieille cité nous révèle que lesconstructions furent particulièrement soignées et que lapierre de taille fut l'élément essentiel du maçon. Elleprovenait des carrières ouvertes du "Carcaïs", un quartiersitué au sud de celui du "Val de Ville". Cette particularitédans la construction donnait aux bâtisses, à la fois cecaractère de gravité et de noblesse. Maintes portes etfenêtres, la plupart murées aujourd'hui, montrent intactl'ogive ou l'arceau romain. La perfection de l'ouvrage estune preuve évidente que la plupart des habitations durentappartenir à des familles aisées grands propriétairesterrien de la cité. Il est même probable que laconstruction des bâtisses dut, à une certaine époque, nonseulement subir l'influence d'une directive frisantl'urbanisme de bon aloi, mais aussi l'émulation rivale descitadins peillois.

6.2. La terre cuiteLa totalité des couvertures est réalisée à l'aide de tuilescanal posées ou maçonnées sur un voligeage plus oumoins jointif. Leur fabrication artisanale leur confère unevariété de tailles et de couleurs. En outre, les réparationsau cours des ans furent un facteur supplémentaire dedifférenciation. Toutefois vue de loin, la toiture retrouveune certaine unité d'aspect.

6.3. Mortiers et enduits Il s'agit des mortiers à la chaux obtenus par le mélanged'une part de chaux grasse et de deux ou trois parts desable d'origine naturelle et locale. La fabrication de lachaux se faisait localement et sous la responsabilité decertains habitants reconnus pour leur savoir faire.

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Figure 5 : Une partie de ces remparts fut démolie pour laconstruction de la route Peille-la Turbie, une autre, par lessecousses sismiques. (photo Gilletta).

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7. Histoire

Peille vivait dans une sorte d'autarcie et pratiquaient letroc. Les villageois possédaient des maisons, de la terre,du bétail, mais peu d'argent liquide. Les revenuscommunaux étaient éminemment faibles et la majeurepartie était facilement absorbée pour les besoins de ladéfense du château.Ainsi, lorsque survenait un cataclysme, un séisme parexemple, qui détruit tout ou partie des immeubles, unesécheresse, des pluies trop abondantes qui dévastent lesrécoltes, cela entraînait la disette comme ce fut le cas en1323.Autres événements :- En 1358 guerre civile entre les branches de Duras etCharles d'Anjou- En 1357, des armées de Provence passaient pour allerse battre en Piémont, sans compter des bandes arméesqui, après la retraite de Poitiers, parcoururent etravagèrent de nombreux villages des Alpes-Maritimes.- 1560 - 1593 - 1623 : terribles famines- 1550 - 1631 : épidémies de peste

8. Tectonique

De prime abord lorsqu'on observe le paysage dans lequels'inscrit Peille, constitué d'épaisses couches calcaire duJurassique, ce village semble reposer sur une rochemassive qui le met à l'abri des effets désastreux d'unséisme comme par exemple la commune voisine de laTurbie qui n'a enregistré aucun dégât lors du séismeLigure de 1887 et pourtant cela n'a pas été le cas pourPeille.La commune de Peille s'inscrit dans la branche orientalede l'Arc préalpin de Nice, c'est probablement la zonetectonique la plus complexe des Préalpes du sud. Cet Arcsurplombe le littoral méditerranéen en gradins successifsentre Roquebrune et Nice, il est le dernier reliefimportant des Alpes Méridionales (Bretizel, 2000). Les principaux marqueurs observables dans le paysagesont les suivants : . 8.1. Front chevauchant jurassique du Mont BaudonIl est orienté N 120 Est avec un pendage général vers lenord-est (Figure 6)

8.2. Particularité : faille aquifère de Peille-SainteThèclePar son amplitude et sa longueur, c'est une desdéformations les plus importantes de la région. Ellelimite au nord-ouest le massif du Mont Agel.D’extension longitudinale : 10 kilomètres environ dansle secteur étudié. Vers le sud-ouest, elle se raccordeprobablement à l'accident du Mont Vinaigrier (est deNice). Vers le nord-est, elle se prolonge jusqu'à la zonetectonique de Sospel où elle paraît se raccorder au grand

linéament de la Roya.Direction :-N20E entre la cime du Baudon et Peille,-N35E entre Peille et Sainte Thècle,-N40E au sud-ouest du plateau Tercier.Type de déformation : normale à composantedécrochante senestre, à regard nord-ouest. Cette faille qui traverse depuis le col Saint-Bernard levillage a causé des bouleversements visibles dans lepaysage ainsi qu'au niveau du sous-sol. Le MontCastellet sur lequel vient s’adosser le village représenteune zone détachée du Mont Baudon. Celle-ci estconstituée de brèches calcaires complètement broyéespar le jeu de cette faille (Figure 7).

La majeure partie du village de Peille est donc bâtie surdes roches extrêmement instables.

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Figure 6 : Quartier du Val de Ville avec au dessus, lechevauchement de la cime de Baudon, et dans le creux le colde la Madone de Gorbio (photo A. Laurenti).

Figure 7 : L'impressionnant miroir de faille observable au lieudit "Envirounous" et matérialise l'accident Peille Sainte Thècle(photo A. Laurenti).

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8.3. Faille de LaghetExtension longitudinale : 7 kilomètres entre la cime duRastel et le plateau du Camp de l'Allée au sud-ouest deLaghet.Directions : -N10E entre la cime du Rastel et la pointe des lacs.-N25E entre la cime des Lacs et Laghet.A la cime du Rastel, elle se termine par un crochetbrusque vers le nord-ouest et se perd dans la zone broyéede la faille précédente. Ce rebroussement indique unpendage vers l'Ouest Sud-Est de 50° environ.Type de déformation : décrochante senestre.Cette structure est probablement un satellite de la grandefaille Peille-Sainte Thècle. En effet, dans le ravin de laLauna, près du point où ces deux structures se rejoignent,on observe un faisceau secondaire de faillesdécrochantes dans les falaises de calcaire jurassique.Leurs directions, variables, sont toutes sécantes sur lesfailles Peille-Sainte Thècle et celle de Laghet qui leslimitent : il s'agirait donc ici d'un champ de cisaillementoccupant l'espace entre deux failles majeures.

8.4. Chevauchement de la cime du RastelExtension : 3 kilomètres entre Peillon et le col de SaintPancrace.Orientation : N45EPendage moyen : 60° nord ouestLimite nord est : faille du col de Saint-Pancrace.Limite sud-ouest : amortissement progressif sous levieux village de Peillon.Ce chevauchement se dédouble localement en un replisecondaire parallèlement et au sud du front principal(Baous Roux) (Figure 8 et 9).

8.5. Faille cachée :Suite aux événements sismiques de 1999 et 2000 et grâceau dispositif installé depuis quelques mois dans le

secteur, une équipe de Géosciences azur a mis enévidence l'existence d'une faille parallèle à celle de Peille- Sainte Thècle sans expression de surface. Cette faillecachée d'une longueur inférieure à 600 m, serait située unpeu plus au nord de l'accident majeur Peille-SainteThécle (Couboulex et al., 2001).

9. Regard sur la sismicité historique

Parmi la littérature connue à ce jour sur la sismicitéhistorique de la région à l'exception du séisme ligure de1887, aucun document ne mentionne le village de Peille.Il n'a pas été possible de trouver des écrits de l'époqueévoquant des séismes anciens. Toutefois en consultantles trois volumes consacrés à l'histoire de Peille etréalisés par Pierre Gauberti (1973), l'auteur fait souventréférence aux tremblements de terre du XV et XVIsiècles par hypothèse ou par déduction. Les observationsde cet habitant passionné de géologie, de préhistoire etd'archéologie, descendant d'une vieille famille desouche, sont intéressantes et nécessitent une attentionparticulière.

9.1. A la recherche d'indicesOn apprend et on peut d'ailleurs le constater sur leterrain, que le village révèle un nombre important deportiques barrant les rues. Selon Gauberti cesconstructions originales sont dues à deux raisons d'ordredifférent. D'une part, la population augmentant sanscesse, il fallait la loger dans l'enceinte des remparts pourcause de sécurité : or, les immeubles existant dans cesmurs étaient tous habités. La seule solution possiblerestait donc la construction de pièces supplémentairesentre deux maisons et à une hauteur déterminée afin dene point gêner la circulation. Comme la coutumel'autorisait à Peille, chacun bâtissait selon ses besoins età son gré, sans autorisation préalable de la cour. Ces

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Figure 8 : Chevauchement de la cime du Rastel (photo A.Laurenti).

Figure 9 : Dédoublement au sud du chevauchement du montRastel avec au premier plan le village de Peillon (photo A.Laurenti)

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surfaces habitables étaient appelées "loges" etdans la langue peilloise "laùpias" (Figure 10).La deuxième cause nécessitant la constructiondes portiques, est imputable aux tremblementsde terre qui mirent à mal un très grand nombred'immeubles. Pour éviter le pire, les habitantsfurent mis en demeure de soutenir en hâte leursmaisons branlantes. A cet effet, ils eurentrecours à la construction des portiques, seulmoyen d'enrayer d'autres catastrophes, cesderniers faisaient office de coins placés entredeux immeubles ou groupe d'immeubles,comme cela se voit encore à la rue des voûtesau quartier de l'Arma.On trouve des traces lointaines de l'existencede ces loges, en effet une affaire de 1308 -1316, évoquée par un document, nousrenseigne sur certaines constructions encorehabitées en partie dans le bourg. Il 'agit d'uneenquête, suivie de sentence, contre lesdestructeurs du château et contre ceux qui

bâtissent des loges (laùpias) ponts ouportiques (pouertégous) chevauchantles rues.Par ailleurs l'examen attentif du villagenous révèle aussi un nombre imposantd'habitations et terrasses rapportées surles murs des ruelles, à une hauteur de 3à 4 mètres (Figure 11 et 12).

9.2. Des ruelles disparuesDepuis la place de la Colle, de nos joursplace du Mont Agel, on peut remarquerle départ de deux anciennes ruellesaujourd'hui supprimées. L'une sedirigeant vers le nord-est, elle étaitentre la rue Félix-Faure et la rue desVoûtes et aboutissait à la ruelle du montBaudon prolongée vers l'Arma.La deuxième rue supprimée se dirigeantvers l'ouest avait également son origineà la place de la Colle. Un passage voûtémarque son départ. Cette ruelle,parallèle à la face sud de l'ancientribunal, allait aboutir vers le milieu dela rue des Moulins. Son emplacementexact est donc compris entre le rue desMoulins et la rue Saint-Sébastien. Une troisième ruelle partait de la rue dela Sauterie en direction de la placeSaint-Joseph. La chapelle Saint-Josepha été élevée en partie sur l'ancienemplacement de cette rue ainsi que surl'emplacement d'une autre petite ruellepassant également de la rue de la Sauterie et se continuantpar la rue du Four (Figure 13).

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Figure 10 : Plan de Peille.

Figure 11 : Succession de"laùpias" rue Saint- Sébastien.(photo A. Laurenti)

Figure 12 : Rue de l'Horloge(photo A. Laurenti).

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Figure 15 : Parfaite réalisation des ouvertures avenueFrançois Levamis (photo A. Laurenti).

Figure 14 : Détail de l'appui de la voûte sur d'anciennesouvertures (photo A. Laurenti)

La place Saint-Joseph était autrefois occupée par desimmeubles, mais écroulés lors de la catastrophe duConcas; ces derniers n'ont pas été reconstruits afind'agrandir le parvis de la chapelle Saint-Joseph.Dans la rue Félix Faure, on constate le départ d'une petite

rue. Elle venait aboutirperpendiculairement à la rue de l'Ormepar la ruelle reliant le Placée à cettedernière artère.

9.3. Pourquoi ces ruelles n'existentplusGauberti est persuadé que le village dePeille a été affecté par le séisme nissartdu 20 juillet 1564. Et qu'à la suite decette catastrophe, les habitants durentchercher asile en dehors du village,dans les fermes, dans les grottes et faireface en même temps à des cas d'urgenceen prenant des mesures particulièresd'ensemble afin de reconstruire lesbâtisses éboulées et consolider cellesrestées debout. Des portiques furentdressés entre les immeubles se faisantvis à vis afin de les bloquer, les rendreplus solides et habitables. Là seraitl'origine de la plupart des voûtesparticulièrement celles des quartiers dela Colle et de l'Arma. Autre élémentintéressant, la tradition orale affirmeque plus de quatre cents tailleurs depierre au moins vinrent de Marseillepour relever en hâte les ruines de lavieille cité. Il est vrai qu'en examinantattentivement les constructions on peutconstater que presque tous les murs defaçades ont été repris sur les anciennesfondations en pierre de taille.La position douteuse et instable decertains immeubles pourrait expliquerla suppression de ruelles afin de

soutenir les deux rangés de bâtisses se faisant face, parl'adjonction de portiques sur lesquels les habitantsbâtirent de nouveau en hauteur.En empruntant la rue des Voûtes, l'attention est portée surune anomalie constructive remarquable. Il s'agit de

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Figure 13 : Extrait cadastral de Peille

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l'adjonction d'une arche prenant appui sur des ouverturescondamnées (portes, fenêtres). Cette voûte qui supporteune simple terrasse n'a pas été réalisée uniquement dansun but d'améliorer le confort mais probablement pourpallier à une urgence (Figure 14).

9.4. Les ouverturesCe village bâti d'une façon remarquable possède un autreintérêt, ce sont ses ouvertures. Les entrées étaientstrictement traités par l'arceau roman, l'arc ogival et plustard par les linteaux de la Renaissance avec ou sanscorbeau. Malheureusement bien de ces ensemblesarchitecturaux surprenant et qui laissent rêveur sontaujourd'hui cachés sous l'enduit.La majorité des ouvertures est en arc brisé du XII - XIVet XV siècles (Figure 15). Les arcs en ogive sont trèsnombreux dans le village, un accouplement avenueFrançois Levamis est d'une réalisation parfaite, ainsi quecelui de l'ancien hôtel de la gabelle du sel, rue Saint-Sébastien.Place Saint-Antoine, actuellement place Carnot, on peutobserver un portique séparé en deux par un pilier afin desoutenir l'immeuble qu'il supporte. En consultant desphotos anciennes, on peut remarquer que la partie droitede ce portique était totalement obstruée (Figure 16a et16b). Selon Gauberti encore plus à droite de celui-ci, unautre portique d'égale dimension achevait l'ensemble decette magnifique réalisation architecturale (non visibleaujourd'hui). A la suite du séisme de 1887, le bâtiment a étépartiellement détruit. Les travaux de consolidation ontsupprimé la voûte de droite dans son intégralité etobstrué à moitié celle de gauche, le tout remplacé par lemur de soutènement actuel. Ces deux portiques avaient

été construits à l'image de ceux de la place de la Colle(place du Mont Agel) et devaient servir aux mêmesusages.De récentes réfections de la façade ont permis de dégagerla moitié du porche tout en conservant un pilier central,et cela probablement pour faciliter le passage desvéhicules. Il faut être extrêmement prudent avec cestypes de mesures qui peuvent accroître la vulnérabilité del'édifice. Les deux arcs de la place de la Colle actuellement placedu Mont Agel, donnant accès à la rue Lascaris,supportent un immeuble de 3 étages dont le mur defaçade a été démoli lors du séisme de 1887. Il a étéreconstruit avec des matériaux de réemploi, qui sontvisibles et marquants. Les nouvelles fenêtres auxdimensions plus réduites n'ont pas été créées surl'emplacement des anciennes ouvertures initiales, dontles encadrements en pierre de taille sont encorenettement visibles (Figure 17a et 17b).

9.5. La catastrophe du quartier Lo ConcasLe nom du quartier que l'on appelle "Lo Concas"viendrait du verbe concasser, briser, détruire. A la base des vieux remparts se trouvait l'égliseparoissiale Saint-Symphorien ainsi que de nombreusesmaisons d'habitation de personnalités officielles et desComtes de Provence. Toutes ces constructions furentensevelies par un éboulement lors d'un tremblement deterre situé d'après l'historien Durante en 1326 et qui fit détacher du montCastellet, d'énormes blocs de pierre qui anéantirent toutsur leur passage.Gauberti, remet en question cette date, il signale quel'église Saint-Symphorien est encore mentionnée en 1488

dans une bulle du pape Innocent VIII et dansun acte notarié de 1506 ayant trait à un legs demesses pour les défunts. On peut doncsupposer que la catastrophe du Concas seraitencore postérieure à 1506.A titre indicatif, Gauberti indique que presqueau sommet du mont Castellet il y avait unepetite source dont le débit variait suivant lessaisons et que c'est précisément aux alentoursde ce point que le sol s'affaissa. Il préciseégalement, que toutes les maisons bâties enamont et en aval de l'ancienne chapelle Saint-Sébastien sont placées sur d'énormes blocsdétachés jadis du mont Castellet. La mêmeconstatation s'impose à l'extrémité opposée duvillage, au quartier de la Barma. Une autre petite source a également sont pointd'émergence au Concas, c'est la même qui sortplus au sud, à la place de la République, et quiseule alimentait jadis la petite bourgade.Vu la présence des eaux souterraines et le peude liaison et de consistance des roches à cet

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Figure 16 : Place Saint-Antoine (actuellement place Carnot) deuxportiques avaient été construits. Ils ont été en partie obstrués après leséisme de 1887 pour renforcer le bâtiment (photos Gauberti 16a etLaurenti 16b).

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endroit, sûrement aidée par d'abondantes pluies,l'hypothèse de l'éboulement occasionné et facilité par letremblement de terre de 1564 peut être possible. D'aprèsGauberti, toutes les bâtisses de ce quartier furent doncentraînées et ensevelies à tout jamais sous une masseénorme de gros blocs. L'enceinte fortifiée primitive setrouvait dans la partie éboulée et par conséquent détruite,elle fut alors rectifiée et reconstruite plus à l'ouest.

9.6. Tremblement de terre de 1887 :Lors du tremblement de terre les habitants ont pu fuir àtemps sans aucun accident. Cependant les dégâts ont étéconsidérables, une quarantaine de maisons sont àreconstruire en totalité ou en partie (Figure 18).Un extrait du registre des délibérations en date du 6 mars1887 (Dossier 1 M 986 Archives Départementales desAlpes-Maritimes), mentionne que "le quartier de laBourgade est l'un des plus maltraités de Peille. Le terrainsur lequel il repose, bouleversé jusqu'à sa base glissera àla pente à la moindre infiltration des eaux et entraîneraavec lui les maisons même les mieux consolidées. Leseul moyen efficace de le protéger pour le présent etl'avenir, c'est de construire en contre bas, un gros mur desoutènement d'une longueur d'environ 100 à 130 m etd'une hauteur moyenne de 6 m".La découverte aux Archives Départementales (Dossier 1M 986 A.D.A.M.) d’une liste des dégâts par propriété, aété d’un grand secours, et a permis d'identifier leshabitations individuelles à partir d’un état désignant lesimmeubles endommagés, auxquels été associés lenuméro de parcelle correspondant mais aussi la naturedes dégâts. Les indicateurs utilisés pour classifier lesdommages étaient les suivants :- Totalement détruit- Partiellement détruit- Endommagé Ainsi l’ensemble des informations recueillies a permisrapidement une visualisation précise sur un extraitcadastral napoléonien de 1874, l'objectif étant de mettreen évidence les secteurs les plus éprouvés (Figure 19).

Le résultat n'est pas très significatif, les dégâts ont affectél'ensemble du village avec une amplification dans lequartier situé entre la place Carnot et la place PrincesseCaroline de Monaco, au quartier du Pous et autour de laplace du Mont-Agel.

9.7. L'église paroissiale Sainte-MariePar ailleurs, ( Gauberti, 1973) le séisme a occasionné desérieux dommages à l'église paroissiale et notamment auclocher. Dans sa séance du 21 juillet 1889, le Conseil deFabrique de la paroisse expose qu'à la suite du séisme leclocher a beaucoup souffert et que les escaliers intérieursont été en partie détruits ainsi que leurs paliers (c'est à

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Figure 17 : Place de la Colle aujourd'hui place du Mont-Agel, fermeture partielle du passage et réduction des ouvertures aprèsle tremblement de terre de 1887 (photos : Detaille 1957 17a, A. Laurenti 17b.).

Figure 18 : Trace de reprise des niveaux supérieurs de l'ancientribunal, place du Mont-Agel endommagé par le séisme de1887 (photo A. Laurenti).

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dire les voûtes). Les mêmes secousses ont déplacé lescloches qui ne tiennent en place qu'imparfaitement.L'architecte, Monsieur Millo, a également relevé desdégâts assez importants à la toiture. La voûte de la nef du

milieu a été fendue dans toute sa longueur d'est en ouest,les murs de la périphérie se sont écartés et la voûte de lanef du côté de l'évangile menace sur deux points (Figure 20).

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Figure 19 : Carte des dommages sur le cadastre de 1874.

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9.8. Chapelle Saint-RochOrientée est-ouest, l'édifice construit à l'entrée du villagedate peut-être de la fin du XVI ou du début du XVII èmesiècle. Le tremblement de terre Ligure la détruisitentièrement. En 1898 des artisans maçons, l’ontreconstruite sur le même emplacement (Figure 21).

10. Conclusion

Comme on a pu le voir, le village de Peille aprobablement été affecté par les séismes du XVème etXVIème siècles (Tableau 2). Pas de trace écrite certes,mais la lecture archéologique des façades révèle deprécieux indices.

Quoi qu'il en soit on peut constater que le séisme ligurede 1887 a lui aussi, marqué l'ensemble de ce bourgmédiéval. Les archives nous en apportent la preuve.La construction des bâtiments conçus dans l'ensembleavec des matériaux de bonne qualité et consolidés par denombreux portiques, ne peut pas être incriminée. Eneffet, ce village montre avec orgueil, une orgie de pierresde taille dont les bâtisseurs s'étaient servis pour leconstruire de la manière la plus noble. Cette communautépossédait certainement des ressources suffisantes pourrépondre rapidement aux dommages occasionnés par lessollicitations sismiques probablement à cause de larécurrence d’événements au cours de la période de 1348 à 1887. Même si la date demeure discutable, la catastrophe du

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Figure 20 : L’église Sainte Marie (photo A. Laurenti). Figure 21 : La Chapelle Saint-Roch (photo A. Laurenti).

Tableau 2 : Les principaux séismes destructeurs des Alpes-Maritimes et de Ligurie

PRINCIPAUX SEISMES DESTRUCTEURS DES ALPES-MARITIMES ET DE LIGURIE

25 Juin 1348 : tremblement de terre dévastateur affecte la Bollène, Roquebillère et Lantosque.

146 ans

23 Juin 1494 : tremblement de terre responsable de dégâts immobiliers à la Bollène, Lantosque, Roquebillière et Utelle.

(Pour mémoire) 13 mai 1549 : en plusieurs lieux des maisons et des cheminées sont tombées ??? Ce séisme a été ressenti à Alba en Italie mais sa localisation reste à ce jour inconnue.

70 ans

20 Juillet 1564 : séisme nissart: il est fait état de 600 à 900 morts et de 180 à 200 blessés. Nombreux dégâts dans la Vésubie et dans le Val de Blore

54 ans

14 et 16 juin 1618 : séisme causant des dégâts à Duranus, Roccasparvière, Coaraze, Utelle et Lantosque.

26 ans

15 Février 1644 : tremblement de terre dévastateur faisant des victimes à la Bollène à Belvédère, à Roquebillière, à Lantosque et Toudon.

243 ans

Pour mémoire les séismes Ligures de 1818 - 1834 et 1854 ont été ressentis dans les Alpes-Maritimes mais n'ont pas occasionné de

dégâts.

23 février 1887 : Le tremblement de terre ligure provoque d'importants dégâts dans tout le département dont à Peille.

117 ans ….

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Concas attire l ’attention sur la géologie du terrain. Laprésence de roches broyées en surface et en sous sol, dûau passage de la faille Peille-SainteThècle apporte laréponse. Le Mont Castellet sur lequel vient s’adosser le village estconstitué de brèches calcaire favorisant la circulation denombreuses sources. La majeure partie du village dePeille est donc bâtie sur un sol extrêmement instable.L'amplification des dégâts sur le village de Peille lors duséisme Ligure de 1887 s'explique par l’instabilité duterrain.Par ailleurs, il est difficile d'avancer l'hypothèse quel’accident Peille-Sainte Thècle ait été mis en résonancepar le séisme ligure. L'avis des spécialistes sur ce sujetreste très partagé.Peille a un héritage magnifiquement consolidé par lesanciens qu’il y a lieu de conserver précieusement Ilconvient pour cela, d'être extrêmement prudent sur touteintervention éventuelle qui pourrait compromettre lasolidité de l'édifice, l'exemple de la place Carnot est àdéconseiller. Il est impératif avant d'entreprendre des

travaux de pratiquer un diagnostic de la vulnérabilitéexistante du bâtiment que l’on veut transformer.En cas de séisme majeur, le réseau routier seraitprobablement impraticable et les secours rendusdifficiles.La préparation des habitants, comme c'estmalheureusement le cas dans toutes les communes dudépartement s'avère inexistante.Cependant, la commune de Peille sensibilisée auproblème a adopté quelques dispositions encourageantesen appliquant un Plan de Prévention de Risque Sismiquesur son territoire et en réalisant une plaquette desensibilisation aux risques qui est disponible et distribuéelors de la notification d'un permis de construire(Mouvements de terrain : PPR approuvé par arrêtépréfectoral du 18 novembre 1999 ; Séismes : PPRapprouvé par arrêté préfectoral du 18 novembre 1999).Un dossier synthétique a été établi par le Préfet desAlpes-Maritimes en date du 29 août 2000. Il estconsultable en Mairie.

Bibliographie

Bretizel, 2000.Bretizel, P., Etude sur les eaux souterraines du Mont Agel et de ses contreforts - Nouvelles observations tectoniqueset hydrogéologiques dans l'Arc de Nice. Riviera Scientifique, p 65 - 88 (ANNAM), 2000.

Courboulex et al., 2001Courboulex, F., Duval, A.M., Deschamps, A., Lomax, A., Larroque, C., Les enseignements du petit séisme de Peille(Alpes-Maritimes). C.R.A.S. Paris, 333, p 105 – 112, 2001.

Gauberti, 1973Gauberti, P., Peille son histoire, t. 1, p. 292, 1973

Remerciements :A l'équipe de Géosciences Azur de Sophia Antipolis Mme Anne Deschamps- Mme Françoise Courboulex - M.Christophe Larroque Pour leur précieuse collaboration.A Monsieur Pierre de Bretizel hydrogéologue pour sa connaissance et ses explications lors d'une visite sur le terrain. A Monsieur Michel Faraut Directeur de Serre Editions pour m'avoir confié les trois volumes sur l'histoire de PeilleA Monsieur Georges Deorestis Maire de la Commune de Peille

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