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E ´ ditorial Re ´ habilitation apre `s ce ´ sarienne. Pas seulement une re ´ habilitation postope ´ ratoire Enhanced recovery after Caesarean delivery. Not just a postoperative rehabilitation Dans ce nume ´ro des Annales franc ¸aises d’anesthe ´sie et de re ´animation (Afa), sont publie ´ es deux enque ˆtes e ´ valuant les pratiques franc ¸aises en matie ` re de re ´ habilitation pre ´ coce apre `s ce ´ sarienne programme ´e. L’une s’inte ´ resse aux pratiques a ` l’e ´ chelle de deux re ´ gions (I ˆ le-de-France [IDF] et Provence-Alpes-Co ˆte d’Azur [PACA]) [1] et l’autre au niveau national au travers d’un questionnaire adresse ´ aux anesthe ´ sistes re ´ animateurs membres du club des anesthe ´ sistes re ´ animateurs en obste ´ trique (Caro) [2]. Ces enque ˆtes s’inte ´ ressent a ` un sujet particulie ` rement impor- tant puisque avec pre `s de 21 % de ce ´ sariennes re ´ alise ´es chaque anne ´e en France [3], on peut estimer a ` environ 160 000 par an le nombre de femmes concerne ´ es. Le concept de re ´ habilitation, de ´ veloppe ´ dans les anne ´es 1990 par Kehlet [4] dans le cadre de la chirurgie digestive, a e ´te ´ initialement sous-tendu par des exigences me ´ dico-e ´ conomiques. Par une approche multidisciplinaire, ce concept vise a ` favoriser la re ´ cupe ´ ration rapide des capacite ´s physiques et psychiques ante ´ rieures du patient ope ´re ´. La re ´ habilitation postope ´ ratoire repose sur un certain nombre de mesures visant a ` re ´ duire les facteurs implique ´s dans la limitation de la re ´ cupe ´ ration comme la douleur, les dysfonctions d’organes, l’immobilite ´ . . . Parmi ces principales mesures on retiendra : l’analge ´ sie postope ´ ratoire multimodale efficace et limitant le recours aux opioı ¨des ; les apports oraux pre ´ coces ; le retrait rapide des cathe ´ ters, drains et sondes, y compris la sonde urinaire ; la mobilisation pre ´ coce des patients ; la pre ´ vention des nause ´es et vomissements. . . [5,6]. Si de nombreuses e ´ tudes ont fait depuis la preuve de l’inte ´re ˆt de tels programmes en chirurgie digestive et dans d’autres situations en termes de re ´ duction de la dure ´e d’hospitalisation et de la morbidite ´ postope ´ ratoire [5,7], leurs mises en œuvre et leurs e ´ valuations dans le contexte de la ce ´ sarienne restent peu documente ´ es. Pourtant, les grands principes de la re ´ habilitation sont applicables a ` la ce ´ sarienne me ˆme s’il sera important de prendre en compte dans ce cadre les spe ´ cificite ´s du post-partum que sont les bouleversements psychiques, physiques et endocri- niens survenant chez la me ` re. Les objectifs de la re ´ habilitation, devront de plus inclure la facilitation de la relation me ` re–enfant, de l’allaitement et de la mise en œuvre des soins au nouveau-ne ´. Les re ´ sultats de ces deux enque ˆtes, nous e ´ clairent sur les pratiques en France et identifient des mesures de ´ja ` applique ´es par les e ´ quipes et des insuffisances dans la re ´ habilitation apre `s ce ´ sarienne programme ´e non complique ´e. Ces enque ˆtes pre ´ sentent quelques diffe ´ rences au regard des praticiens et des structures cible ´es ainsi que des approches utilise ´es mais elles sont comple ´ mentaires. L’enque ˆte de Wynieki et al. [3], bien que limite ´e a ` deux re ´ gions (IDF et PACA), est assez repre ´ sentative de la situation nationale, pour ce qui concerne la taille des structures et l’organisation des soins, ainsi que le sugge ` rent les donne ´es de l’enque ˆte nationale pe ´ rinatale re ´ alise ´e en 2010. Un point d’inte ´re ˆt de ce travail est la justification d’un certain nombre de pratiques par l’existence de liens et d’interactions entre diffe ´ rents e ´le ´ ments de la re ´ habilita- tion. De me ˆme, l’e ´ tablissement d’un score base ´ sur six mesures conside ´ re ´es comme essentielles dans un programme de re ´ habi- litation pour juger de la mise en place d’une strate ´ gie globale au sein des structures, est particulie ` rement pertinent me ˆme si ce score devra e ˆtre valide ´. Les e ´le ´ ments de ce score sont : dure ´e de perfusion postope ´ ratoire infe ´ rieure a ` 24 heures, de ´ but de l’analge ´- sie orale avant la 24 e heure, retrait de la sonde urinaire avant la 24 e heure, reprise des boissons avant la sixie `me heure, reprise de l’alimentation avant la sixie `me heure, emploi de carbe ´ tocine en une injection unique perope ´ ratoire ou injection d’ocytocine perope ´ ratoire et relais postope ´ ratoire pendant une dure ´e infe ´r- ieure ou e ´ gale a ` six heures. L’enque ˆte de Jacques et al. [2] bien que nationale s’adresse aux anesthe ´ sistes re ´ animateurs adhe ´ rents au Caro, des praticiens fortement implique ´s en anesthe ´ sie obste ´ tricale. De fait cette enque ˆte interroge pour la plupart, des « spe ´ cialistes » du domaine. En revanche, la majorite ´ des re ´ pondants exercent en CHU dans des Annales Franc ¸aises d’Anesthe ´ sie et de Re ´ animation 32 (2013) 130–133 I N F O A R T I C L E Mots cle ´s : Enque ˆte Analyse des pratiques Ce ´ sarienne Re ´ habilitation Post-partum Keywords: Survey Practices Caesarean delivery Enhanced recovery Postpartum DOIs des articles originaux: http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.01.016, http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.01.002 0750-7658/$ see front matter ß 2013 Socie ´te ´ franc ¸aise d’anesthe ´ sie et de re ´ animation (Sfar). Publie ´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´ serve ´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.01.008

Réhabilitation après césarienne. Pas seulement une réhabilitation postopératoire

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Annales Francaises d’Anesthesie et de Reanimation 32 (2013) 130–133

Editorial

Rehabilitation apres cesarienne. Pas seulement une rehabilitation postoperatoire

Enhanced recovery after Caesarean delivery. Not just a postoperative rehabilitation

I N F O A R T I C L E

Mots cles :

Enquete

Analyse des pratiques

Cesarienne

Rehabilitation

Post-partum

Keywords:

Survey

Practices

Caesarean delivery

Enhanced recovery

Postpartum

Dans ce numero des Annales francaises d’anesthesie et de

reanimation (Afa), sont publiees deux enquetes evaluant lespratiques francaises en matiere de rehabilitation precoce aprescesarienne programmee. L’une s’interesse aux pratiques a l’echellede deux regions (Ile-de-France [IDF] et Provence-Alpes-Cote d’Azur[PACA]) [1] et l’autre au niveau national au travers d’unquestionnaire adresse aux anesthesistes reanimateurs membresdu club des anesthesistes reanimateurs en obstetrique (Caro) [2].

Ces enquetes s’interessent a un sujet particulierement impor-tant puisque avec pres de 21 % de cesariennes realisees chaqueannee en France [3], on peut estimer a environ 160 000 par an lenombre de femmes concernees.

Le concept de rehabilitation, developpe dans les annees1990 par Kehlet [4] dans le cadre de la chirurgie digestive, a eteinitialement sous-tendu par des exigences medico-economiques.Par une approche multidisciplinaire, ce concept vise a favoriser larecuperation rapide des capacites physiques et psychiquesanterieures du patient opere.

La rehabilitation postoperatoire repose sur un certain nombrede mesures visant a reduire les facteurs impliques dans lalimitation de la recuperation comme la douleur, les dysfonctionsd’organes, l’immobilite. . . Parmi ces principales mesures onretiendra : l’analgesie postoperatoire multimodale efficace etlimitant le recours aux opioıdes ; les apports oraux precoces ; le

DOIs des articles originaux: http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.01.016,

http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.01.002

0750-7658/$ – see front matter � 2013 Societe francaise d’anesthesie et de reanimatio

http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.01.008

retrait rapide des catheters, drains et sondes, y compris la sondeurinaire ; la mobilisation precoce des patients ; la prevention desnausees et vomissements. . . [5,6].

Si de nombreuses etudes ont fait depuis la preuve de l’interet detels programmes en chirurgie digestive et dans d’autres situationsen termes de reduction de la duree d’hospitalisation et de lamorbidite postoperatoire [5,7], leurs mises en œuvre et leursevaluations dans le contexte de la cesarienne restent peudocumentees. Pourtant, les grands principes de la rehabilitationsont applicables a la cesarienne meme s’il sera important deprendre en compte dans ce cadre les specificites du post-partumque sont les bouleversements psychiques, physiques et endocri-niens survenant chez la mere. Les objectifs de la rehabilitation,devront de plus inclure la facilitation de la relation mere–enfant, del’allaitement et de la mise en œuvre des soins au nouveau-ne.

Les resultats de ces deux enquetes, nous eclairent sur lespratiques en France et identifient des mesures deja appliquees parles equipes et des insuffisances dans la rehabilitation aprescesarienne programmee non compliquee.

Ces enquetes presentent quelques differences au regard despraticiens et des structures ciblees ainsi que des approchesutilisees mais elles sont complementaires.

L’enquete de Wynieki et al. [3], bien que limitee a deux regions(IDF et PACA), est assez representative de la situation nationale,pour ce qui concerne la taille des structures et l’organisation dessoins, ainsi que le suggerent les donnees de l’enquete nationaleperinatale realisee en 2010. Un point d’interet de ce travail est lajustification d’un certain nombre de pratiques par l’existence deliens et d’interactions entre differents elements de la rehabilita-tion. De meme, l’etablissement d’un score base sur six mesuresconsiderees comme essentielles dans un programme de rehabi-litation pour juger de la mise en place d’une strategie globale ausein des structures, est particulierement pertinent meme si cescore devra etre valide. Les elements de ce score sont : duree deperfusion postoperatoire inferieure a 24 heures, debut de l’analge-sie orale avant la 24e heure, retrait de la sonde urinaire avant la 24e

heure, reprise des boissons avant la sixieme heure, reprise del’alimentation avant la sixieme heure, emploi de carbetocine enune injection unique peroperatoire ou injection d’ocytocineperoperatoire et relais postoperatoire pendant une duree infer-ieure ou egale a six heures.

L’enquete de Jacques et al. [2] bien que nationale s’adresse auxanesthesistes reanimateurs adherents au Caro, des praticiensfortement impliques en anesthesie obstetricale. De fait cetteenquete interroge pour la plupart, des « specialistes » du domaine.En revanche, la majorite des repondants exercent en CHU dans des

n (Sfar). Publie par Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

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maternites de niveau III, or ces structures ne representent que 12 %des maternites en France [3]. Neanmoins, cette enquete a uneapproche plus large du concept de rehabilitation. En effet, lesaspects preoperatoires comme l’information des patientes, l’exis-tence de reunion de preparation a la cesarienne ou encore lemoment de l’hospitalisation (veille ou matin de l’intervention)sont evalues. De meme, les elements concernant le lien mere–enfant sont evalues.

En reprenant etape par etape les principales mesures d’unprogramme de rehabilitation, les resultats de ces etudes nousindiquent que :

� en preoperatoire, pour pres de la moitie des praticiens aucuneinformation specifique sur la rehabilitation postoperatoire descesariennes n’est donnee aux patientes. Or le concept derehabilitation perioperatoire ne se limite pas a la periodepostoperatoire, mais doit debuter en amont par une informationet une education des patients sur le deroulement de la prise encharge tout au long de l’hospitalisation et de leur role dans leprocessus de recuperation [5] ;� des protocoles de rehabilitation sont presents dans 14 % [2] ou

60 % [1] des structures selon les enquetes. Malgre l’heterogeneitede ces resultats, possiblement lie aux differences evoquees entreles etudes et au caractere declaratif de ces enquetes, on peutestimer qu’il existe un nombre non negligeable de structuressans protocole disponible en France. Il s’agit donc la d’uneinsuffisance majeure et des actions devront donc etre initier poury remedier. Il est reconnu que la redaction de protocoles adaptesaux contraintes locales, connus et valides par l’ensemble desintervenants est une etape determinante pour la mise en œuvreet la reussite d’un programme de rehabilitation [5] ;� l’analgesie postoperatoire apres cesarienne est multimodale et ce

concept est bien integre avec une uniformisation des pratiquescomme le revele les deux enquetes. Cette analgesie multimodaleest basee quasi-systematiquement sur l’administration demorphine en perimedullaire qui en est le socle. En effet, cettepratique est declaree par 86 % [1] et 95 % [2] des repondants. Ceresultat est somme toute peu surprenant et logique dans lamesure ou la quasi-totalite de ces cesariennes (plus de 95 %) sontrealisees sous anesthesie locoregionale [1,2]. Les antalgiques nonmorphiniques (paracetamol, anti-inflammatoires non steroı-diens et dans une moindre mesure nefopam) sont tres largementassocies. En revanche, les anesthesiques locaux sont surtoutadministres en infiltration unique. L’infiltration continue de lacicatrice et le recours au bloc de paroi type TAP bloc restentmarginales et le TAP bloc est le plus souvent associe a lamorphine en perimedullaire. Au moins une etude recenteconclue a l’absence d’efficacite supplementaire des blocs deparois par rapport a celle procuree par la morphine intrathecaleseule [8]. En revanche, le benefice du TAP bloc en alternative a lamorphine dans le cadre de la rehabilitation postoperatoire doitetre precise. En effet, si cette technique permet, comparee a lamorphine intrathecale, de reduire l’incidence des effets secon-daires (prurit, nausees), l’efficacite analgesique apparaıt commemoindre [8–10].

Ces enquetes nous indiquent egalement que dans pres de lamoitie des structures, le relais per os des antalgiques est debuteapres la 24e heure postoperatoire (52 % [1] et 45 % [2]). Cespratiques doivent etre revues puisque plusieurs etudes ont montreque l’administration precoce des antalgiques par voie orale estpossible et efficace apres cesarienne [11–13].

L’enquete de Jacques et al. nous revele egalement que seuls16 % des centres ont recours a l’analgesie orale controlee par lepatient (PCOA) [2]. Il s’agit la d’une piste d’amelioration de la

rehabilitation postoperatoire puisque cette technique s’adaptetout a fait a la cesarienne [12].

La reintroduction des apports liquides est autorisee entrel’arrivee en salle d’hospitalisation et quatre a six heures post-operatoires dans une large majorite de structures (89 % [1] et 73 %[2]). De meme l’alimentation, legere le plus souvent, est autoriseeapres la sixieme heure par bon nombre d’equipes (89 % [1] et 40 %[2]). Cependant, 13 % des centres ne reintroduisent l’alimentationqu’apres la reprise du transit !

Cette mesure centrale du concept de rehabilitation qu’est lareprise rapide des apports oraux semble donc bien integree par lesequipes. Plusieurs etudes ont bien montre que la reprise precocedes boissons dans l’heure suivant la cesarienne et de l’alimentation(six a huit heures postoperatoires) n’a pas d’effet negatif sur lareprise du transit mais permet de reduire la sensation de faim et desoif dont souffrent une grande majorite des patientes [14], dereduire significativement le delai d’apparition des bruits hydro-aeriques et de diminuer la duree d’hospitalisation [14–17].

Un abord veineux est maintenu pendant au moins 24 heurespar une majorite d’equipes (70 % [1] et 51 % [2]). Cette pratiquepeut etre un frein a la reprise de l’autonomie et semble surtoutjustifiee par deux facteurs, d’une part, l’administration desantalgiques intraveineux et peut-etre plus encore par la preventionde l’hemorragie du post-partum qui repose encore pour la plupartdes structures sur l’administration prolongee d’ocytocines (69 %[1] et 81 % [2]). Pour autant, certains arguments laissent a penserque le maintien d’une perfusion d’ocytocine au-dela de laquatrieme heure postoperatoire serait inutile [18,19]. D’autrepart, le recours a la carbetocine proposee en prevention del’hemorragie du post-partum pourrait-etre une alternative. Cettemolecule encore peut utilisee (31 % [1] et 15 % [2]) a une efficaciteet des effets secondaires comparables a l’ocytocine et une dureed’action plus longue (quatre a cinq heures versus 30 minutes pourl’ocytocine) 20 [20–23]. Son administration en dose unique sansrelais necessaire pourrait eviter le maintien d’une voie veineuse etdonc favoriser le processus de rehabilitation. Sa sous utilisation al’heure actuelle pourrait tenir a son cout plus eleve que celui del’ocytocine et peut-etre la crainte d’un cumul d’effets cardiovas-culaire en cas de recours conjoint a la sulprostone [22].

Une sonde urinaire est mise en place dans la quasi-totalite descas pour realiser la cesarienne (97 % [1]) meme si cette pratiquen’est pas recommandee [24]. Celle-ci n’est retiree qu’apres la 24e

heure postoperatoire dans 71 % des structures [1]. Il faut noterl’existence d’une discordance importante entre les enquetesconcernant les equipes qui pratiquent un retrait de la sondeurinaire a la sortie de la salle de surveillance postinterventionnelle,puisque le pourcentage de retrait precoce est de 5 % [1] dans uneetude et 51 % [2] dans l’autre. . . Ce resultat est donc a considereravec prudence et apparaıt comme difficilement interpretable. Lesondage vesical a un impact important sur la rehabilitation(inconfort, gene a la mobilite, source d’infection. . .) et le retrait dela sonde urinaire est une mesure indiscutable de ce concept. Pourautant, comme l’indiquent les resultats des enquetes, l’ablation dela sonde urinaire est tardive (> 24 h) et le plus souvent en lien avecune crainte de la retention aigue d’urine. Cette complicationdepend de nombreux facteurs dont la plupart sont controlables(doses d’anesthesiques locaux pour la rachianesthesie, volume desapports liquidiens peroperatoires, dose de morphine en perime-dullaire, immobilisation prolongee en postoperatoire. . .). Le retraitprecoce de la sonde urinaire est une option possible du fait dufaible risque de retention aigue d’urine [25]. Neanmoins, il seraimportant de l’integrer a un protocole de surveillance de la mictionet pour certains a une surveillance de la distension vesicale parechographie [26].

La prevention des nausees vomissements est une mesure ainclure dans les programmes de rehabilitation postoperatoire [5].

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Les resultats d’une des enquetes revelent qu’un protocole seraitdisponible dans 65 % des centres [2]. Ces chiffres sont insuffisantset des protocoles devraient etre plus largement presents dans lamesure ou l’incidence des NVPO apres administration intrathecalede morphine n’est pas negligeable (16–32 %) [27] et que laprevention des NVPO facilite la reprise de l’alimentation.

Enfin, si on s’en tient aux resultats de l’enquete de Jacques et al.la mobilisation precoce des patientes est loin d’etre une mesureappliquee par les equipes puisque 53,3 % d’entre elles n’autorisentle premier lever que le lendemain de l’intervention [2]. Or lamobilisation rapide doit etre considerer comme une mesurecentrale dans le cadre de la rehabilitation apres cesarienne enraison du risque thromboembolique majoree dans ce contexte[28,29].

Mais plus encore que la rehabilitation postoperatoire classiqueet les marges de progres a venir que ces deux etudes soulignent,c’est le concept meme d’accouchement par voie haute etd’environnement propice a la relation mere–enfant que cettedemarche sous tend.

Pour la cesarienne d’une parturiente sans aucune pathologie,au-dela des imperatifs economiques sous-jacents dont lesconsequences negatives sont mises en exergue au Canada commeen Australie [30,31], au-dela de la presence ou non de catheters,c’est bien le fait de faire de la cesarienne un accouchement a partentiere et du postoperatoire precoce un post-partum qui estsusceptible de mobiliser les patientes et les soignants. C’est danscet esprit qu’une information specifique est delivree au cours de laconsultation pre-anesthesique par 49 % des praticiens ou au coursd’une reunion preparatoire a la cesarienne chez 14 % des declarantsselon Jacques et al. [2]. Ce concept d’accouchement par voie hautelaisse la place au pere de l’enfant en salle de cesarienne, autorise unenvironnement musical choisi par le couple, favorise la participa-tion de la mere a la naissance de l’enfant grace a l’accompagnementde l’extraction du fœtus par des efforts de poussees, incite a lapresentation du nouveau-ne a sa mere et a son pere pendant untemps suffisant pour que s’etablissent un contact visuel et verbalainsi qu’un contact par le toucher (caresse par les mains libres de lamere et « joue a joue »).

Ce concept favorise egalement le « peau a peau » et la mise ausein ou l’allaitement artificiel precoce en salle de surveillancepostinterventionnelle, en presence du pere. L’ablation des lignes deperfusion facilite la mise au sein en rendant la mere plus libre deses mouvements. Enfin, l’intimite est necessaire a ces premiersmoments. Cela implique une reflexion architecturale et organisa-tionnelle alliant intimite et securite en surveillance postinterven-tionnelle.

Les resultats de Jacques al. [2] montre que la demarche derehabilitation precoce pos-cesarienne sur certains aspects de larelation mere–enfants est d’ores et deja mise en pratique. Eneffet, une mise au sein du nouveau-ne des la fin de l’interventionest realisee pour 68 % des repondants et dans 80 % des centres, lenouveau-ne passe la premiere nuit dans la chambre de sa mere[2].

S’il fallait le souligner d’avantage, la rehabilitation aprescesarienne n’est pas seulement une rehabilitationpostoperatoire ! et les specificites du post-partum sont la pournous le rappeler [32] : variations brutales de l’impregnationhormonale qui induisent des modifications sensorielles etpsychiques tournees vers la securite des premiers jours dunouveau-ne, loin des preoccupations de performance etd’autonomie demandees habituellement aux jeunes meres ;place de l’ocytocine, hormone de l’attachement, et peut-etre dela carbetocine dans l’etablissement de la relation mere–enfantmais aussi comme facteur protecteur et analgesique maternel[33–35] ; modification du rythme veille sommeil de la mereparallele au cycle du nouveau-ne ; depense energetique majoree

en lien avec la mise en route de la lactation [36] et une necessaireflexibilite aux besoins propres de chaque mere et chaquenouveau-ne [30].

En conclusion, ces deux enquetes bien que presentant deslimites methodologiques, nous apportent un eclairage particu-lierement interessant sur les pratiques actuelles en France enmatiere de rehabilitation apres cesarienne programmees. Sicertaines mesures semblent aujourd’hui bien integrees par lesequipes (analgesie multimodale, reintroduction precoce desapports oraux. . .), d’autres sont a consolider (retrait precoce desabords veineux, de la sonde urinaire, mobilisation rapide. . .).L’amelioration des pratiques passent par la mise en place deprogramme de rehabilitation multidisciplinaire dans chaquecentre ayant une activite obstetricale. Ces enquetes nousrappellent egalement que la rehabilitation postoperatoire de lacesarienne se distingue des rehabilitations post-chirurgicales parune attention et un environnement qui doivent prendre en compteles specificites du post-partum et faciliter l’etablissement de larelation mere–enfant.

Declaration d’interets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits d’interets enrelation avec cet article.

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H. Keıta*Service d’anesthesie, CHU Louis-Mourier, universite Paris 7, AP–HP,

178, rue des Renouillers, 92700 Colombes, France

A.-S. Ducloy-BouthorsPole d’anesthesie-reanimation, CHU de Lille,

2, avenue Oscar-Lambret, 59037 Lille, France

*Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (H. Keıta)