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Université Lumière Lyon 2 École doctorale : Sciences humaines et sociales (SHS) Institut d'études politiques de Lyon Laboratoire d'accueil : Centre de Politologie de Lyon CERIEP Diplôme d'études approfondies Science politique Mobilisations, Médiations, Représentations, Régulations Année académique 2003-2004 Mémoire de recherche présenté par Amélie BASILLE REHABILITATION OU REQUALIFICATION Un projet urbain pour une réponse à l’insécurité d’un quartier Directeur de recherche : Monsieur le professeur Claude JOURNES

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Université Lumière Lyon 2 École doctorale : Sciences humaines et sociales (SHS)Institut d'études politiques de Lyon Laboratoired'accueil : Centre de Politologie de Lyon CERIEP

Diplôme d'études approfondies Science politique Mobilisations, Médiations, Représentations, Régulations

Année académique 2003-2004Mémoire de recherche présenté par

Amélie BASILLE

REHABILITATION OU REQUALIFICATIONUn projet urbain pour une réponse à l’insécurité d’unquartier

Directeur de recherche : Monsieur le professeur Claude JOURNES

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Table des matièresRemerciements . . 4Introduction . . 5Partie 1 : Péri-Moncey un quartier, une histoire . . 16

Chapitre 1 : Une spécificité inscrite dans le temps . . 16Section 1 : Promenade dans le quartier . . 16

Section 2 : Histoire du quartier26 . . 18Chapitre 2 : Une problématique spécifique . . 21

Section 1 : Les premiers réaménagements . . 21Section 2 : Les problèmes rencontrés . . 25Section 3 : La mise à l’agenda de la réhabilitation de 1998 . . 28

Partie 2 : La réhabilitation du quartier Péri-Moncey . . 31

Chapitre 1 : Un traitement partenarial et contractuel de l’insécurité74 . . 31Section 1 : La montée de l’idéologie sécuritaire . . 32Section 2 : La politique de la ville . . 34Section 3 : Le Contrat Local de Sécurité . . 37Section 4 : La prévention situationnelle . . 39

Chapitre 2 : Vers une réhabilitation du quartier Péri-Moncey . . 42Section 1 : La réhabilitation des espaces : appropriation et sécurisation . . 43Section 2 : La réhabilitation et la sécurisation du quartier par l’habitat . . 52Section 3 : Les supermarchés . . 61

Partie 3 : Les effets de la réhabilitation . . 62Chapitre 1 : Un quartier réhabilité . . 62Chapitre 2 : La sécurisation du quartier . . 65Chapitre 3 : La vérification de l’hypothèse . . 67

Conclusion . . 74bibliographie . . 77

Articles . . 77Ouvrages . . 80Sources . . 81

Annexes . . 84Abreviations . . 84Annexes 1 Les entretiens . . 84Annexes 2 Les comptes rendus CCPS . . 85Annexes 3 Règlement et fiche incident OPAC du Rhône . . 85Annexes 4 Questionnaire et Analyse, Séminaire Monsieur Paul Bacot . . 85Annexes 5 Extraits du CLS . . 86Résumé . . 86Mots clés . . 86Abstract . . 86Key-words . . 87

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RemerciementsJe remercie Monsieur Claude Journès qui a dirigé mon mémoire et qui a su m’orienter quand j’enai eu besoin, ainsi que l’ensemble de l’équipe enseignante pour leurs précieux conseils et leursapports en terme de méthodologie.

Je tiens à remercier également l’ensemble des personnes qui m’ont reçue en entretien et quim’ont accordé de leur temps pour répondre à mes questions.

Enfin, je souhaite aussi remercier les documentalistes de l’Agence d’Urbanisme de Lyon pourleur accueil et pour le travail qu’ils ont effectué.

« Que ces quartiers soient neufs ou anciens, qu’ils soient bourgeois oupopulaires, qu’ils soient même parfois sordides, ce sont là des lieux remplisd’émotion pour ceux qui y ont vécu un moment essentiel de leur existence. Queleur établissement relève du provisoire ou qu’ils s’installent plus durablement,il y a toujours une forme d’occupation du sol, d’identification à l’espace. Lapopulation qualifie le territoire, et celui-ci, par un effet de retour, qualifie ses

occupants… » Pierre Milza et Emile Temime 1

1 Dans le préambule de BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, Paris, ed. Autrement, 1997, p. 7.

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Introduction

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Introduction

Le quartier Péri-Moncey est composé d’environ 2000 habitants, il a une situationgéographique privilégiée entre la Presqu’île et la Part-Dieu. Les rues qui le délimitent sontle cours Gambetta, le cours de la Liberté, l’avenue de Saxe et la rue Chaponnay. Il estcaractérisé par un parc de logements anciens, assez dégradés et de ce fait occupés pardes ménages aux conditions sociales modestes et en majorité d’origine étrangère.2 Depuis1998, un projet de réhabilitation du quartier a été décidé par la ville.

Lors de la rédaction de mon mémoire de maîtrise3 j’ai effectué une recherchesur la coproduction de sécurité au travers d’une technique d’origine anglo-saxonne,nouvellement importé en France, la prévention situationnelle.4 Au cours de mes recherches,j’ai alors rencontré un élu du septième arrondissement, Monsieur Michel Bos5 adjointd’arrondissement délégué aux déplacements urbains, qui m’a parlé de la place Gabriel Péricar il s’agit d’un cas pratique de la Commission Communale de Prévention Situationnelle6

(CCPS). En effet sur cette place un certain nombre d’actions ont été mises en place dans lebut de lutter contre l’insécurité. Monsieur Michel Bos m’a alors expliqué que cette place sesituant sur deux arrondissements, elle avait connu des difficultés quant à sa sécurisation et ila précisé les intentions de la ville quant à cette zone : faire circuler les gens. C’est une placequi historiquement a toujours connu des rassemblements, des centaines de personness’y retrouvent chaque jour, principalement des personnes d’origines maghrébine,. Le faitque j’habite ce quartier me rendait proche de cet espace, j’en connais les pratiques, leshabitudes, je connais sa population. Mais j’en étais également éloignée car j’habite lesecteur pour mes études et ne connaît pas l’histoire de sa population, de ses bâtis, de sescommerces… J’ai alors décidé de m’y intéresser et me suis rendue compte que plus quela place c’était tout le quartier qui était en réaménagement, ses places – situées à chacunedes extrémités de la rue Moncey – place Bahadourian et place Gabriel Péri mais aussi sesrues, ses immeubles… J’ai appris que ce quartier avait connu depuis un siècle projets dedémolition et de rénovation alternativement mais en général sans suite. Est-ce que la villeavait un projet global et durable pour cet espace ? Que voulait elle faire de ce quartier ?

Ces questions sont restées en suspend quelques temps et à l’automne 2003, alors quele réaménagement du quartier était sur sa fin, mes interrogations se sont précisées et j’aidécidé d’y consacrer mon mémoire de DEA

2 Contrat Local de Sécurité de la ville de Lyon, 27 novembre 1998 (Annexes)3 « Coproduire la sécurité. Vers un espace défendable à la française », Université Lyon II, sous la direction de Monsieur Claude

Journès, 20034 La prévention situationnelle consiste en une modification des situations afin de réduire l’éventuelle opportunité qu’elles offrent

aux délinquants de commettre des délits.5 BOS Michel, Adjoint du 7ème arrondissement délégué aux déplacements urbains, entretien du 7 août 2003, Annexes.6 Traduction institutionnelle de la mise en œuvre de la prévention situationnelle.

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Un questionnaire7 proposé aux passants place Gabriel Péri, rue de Marseille et rueMoncey m’a permis de saisir un élément très important et non négligeable dans le quartier,la présence de l’histoire. Tous les Lyonnais ont quelque chose à dire sur ce quartier, sursa place. Ils ne se sont pas contentés de répondre à mon questionnaire, chaque fois c’estune part de leurs souvenirs, de leur histoire que ces gens m’ont fait partagé. Ce quartier qui« sert depuis près de deux siècles de lieu d’entrée pour les populations migrantesdans la ville » 8 évoque un aspect de son passé presque chez tous le monde : pourcertain c’est le Prisunic aujourd’hui qui occupait la place du CLIP (Centre Liberté Péri) sur laplace Gabriel Péri, pour d’autres se sont les magasins de vêtements, on allait a la Guillotièrepour acheter des vêtements pas chers, pour d’autres encore, ce sont les divertissements,à la Guille on y va pour faire les 400 coups, on va y faire la fête. La place Gabriel Péri quis’appelait autrefois la place du pont parce que ce dernier allait jusque là est encore appeléeainsi cinquante ans après avoir changé de nom.

L’histoire est très présente dans ce quartier et elle permet de comprendre les enjeux quila concerne aujourd’hui. L’ancien Faubourg de la Guillotière n’est intégré à la ville que depuis150 ans et à l’époque ce fût pour répondre à des préoccupations politiques et sécuritaires.Les différentes politiques qui se sont enchaînées dans le quartier ont généré un état dedélabrement et d’insalubrité et de délabrement au niveau de ses bâtiments, les propriétairesrefusant d’investir car on parlait souvent de démolition.

Sa position géographique ajoutée à son côté populaire en a fait un lieu d’arrivéepour la population immigrée qui avec le temps a formé à la Guillotière une communautéde communautés. Aujourd’hui la zone Péri-Moncey également surnommée la Médinase caractérise par son insalubrité, son caractère méditerranéen (population, commerce,pratiques…) et sa popularité.

Dans les années 1970 la crise économique va fortement affecter le quartier et commedans beaucoup d’autres villes, un sentiment d’insécurité va apparaître.

En 1990 alors que le quartier se délabre et que l’insécurité augmente – qu’il s’agissede l’insécurité liée à la délinquance ou de celle liée aux effondrements, à la vétusté duquartier – la ville et la Communauté Urbaine de Lyon (COURLY) décident qu’il est temps dereconquérir cet espace. La ville choisit alors de rénover la place Gabriel Péri qui ne doit plusêtre un lieu de rassemblement. Elle enferme le quartier derrière le CLIP, immense bâtimentrecouvert de miroir, « cache misère » dissimulant la Médina et reflétant les beaux immeublesdu cours de la Liberté, de la rue de Marseille et du cours Gambette. Mais les personnes quiavaient pris l’habitude de se retrouver devant le Prisunic pour parler du pays continuent àse rassembler devant le CLIP.

En 1998 la construction du CLIP (immense bâtiment sur la place abritant des bureauxet des logements sociaux) ne règle en rien le problème que connaît le quartier, la misère,l’exclusion, l’insalubrité, la délinquance – la place Gabriel Péri est réputée dans toute larégion pour son trafic de drogue et son recel – sont toujours là. Il règne à la Guillotière unclimat d’insécurité. Mais de quelle insécurité s’agit-il ?

Les immeubles s’écroulent, les canalisations ont du plomb, les logements sontinsalubres et souvent pas aux normes, les vitres des fenêtres sont quelquefois brisées voire

7 A l’occasion du séminaire de Monsieur Paul Bacot, j’ai réalisé un questionnaire que j’ai par la suite proposé dans le quartier.Le questionnaire et l’exposé auquel il a donné naissance se trouvent en Annexes.

8 BERTHET Jean-Marc, « Le quartier Moncey à l’épreuve de l’agglomération », Les Cahiers Millénaire 3, L’agglomérationlyonnaise en perspectives : l’exemple du quartier Moncey, n°14, 1999, p. 3.

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murées. On trouve de nombreux trafiquants de drogue et d’objets volés aux abords de laplace qui vendent leur produits ouvertement, sans se cacher. Enfin, les rassemblementsqui ont lieu chaque jour sur la place, les logements vacants qui sont squattés, la visibilitédes immigrés, de leurs pratiques qui peuvent surprendre, tout cela contribue à générer unsentiment d’insécurité chez les personnes qui passent par la Guillotière.

L’équipe municipale de Raymond Barre, Maire de Lyon de 1995 à 2001, va alors devoirchoisir entre requalification et réhabilitation, entre raser le quartier ou le rénover. C’estla deuxième voie qui va être choisie.

Le quartier Péri-Moncey est un quartier atypique, exotique, pluriethnique, une Médina,un quartier populaire à deux pas de la préfecture et de Bellecour. De ce fait, peut-on penseraccueil de nouveaux arrivants et maintien de la population actuelle avec ses pratiques,sa culture, sa visibilité en plein centre ville, au cœur du triangle Bellecour, Part-Dieu,Préfecture ?

Que veut-on faire du quartier ? Comment veut-on définir le quartier en le rénovant ?Quel est l’objet de cette rénovation ?

Ceci m’amène à poser la problématique suivante :Problématique :Dans quelle mesure la redéfinition du projet urbain Péri-Moncey contribue à réduire

l’insécurité et le sentiment d’insécurité dans le quartier ?Après une première recherche exploratoire, plusieurs questions se sont alors posées,

nous tenterons d’y répondre dans ce mémoire :Le secteur Péri-Moncey est-il caractérisé par la présence d’un « urbanisme

criminogène », est ce qu’en le réaménageant on peut mettre fin à l’insécurité et au sentimentd’insécurité qui s’y développe ?

La population du quartier, ses pratiques vont-elles être considérées comme unespécificité à maintenir ?

Vise-t-on la réhabilitation, la requalification ou la sécurisation de l’espace ?Hypothèse :L’hypothèse dont nous allons tenter de vérifier la réalité est la suivante :En réhabilitant le quartier, ses logements, ses espaces, en mettant en commun le travail

de différents partenaires est-il possible de créer un espace réapproprié et sécurisé et demettre fin à une situation historique de mise en marge, tout en préservant l’identité duquartier ?

Le déroulement de l’enquête :Les entretiens réalisés à l’occasion de la rédaction de mon mémoire de maîtrise ont

constitués mon premier contact avec mon terrain.Après avoir constitué une première bibliographie, j’ai élaboré un questionnaire pour le

séminaire de Monsieur Paul Bacot qui m’a permis de prendre contact avec les difficultésdu quartier et qui a généré de nombreuses rencontres informelles me permettant de saisirl’ambiance et les éléments forts de la vie dans le secteur Péri-Moncey.

J’ai par la suite commencé à recenser les acteurs intervenants dans l’objet de monétude : agents de développement au contrat de ville, bailleurs, élus, agents de proximité,

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membres du Contrat Local de Sécurité, police nationale, police municipale, commerçants,Notre Dame des sans abris…

Voici le tableau des entretiens effectués :

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Introduction

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Nom Poste Date du rendez-vous Durée et supportMonsieur BadonnelStéphane

Agent dedéveloppement Contratde ville 7ème

Lundi 17 mai 2004 1h Annexes

Lieutenant Bar Commissariatdivisionnaire centre Jeudi 1er juillet 2004 40mn Annexes

Monsieur BosMichel

Adjointd’arrondissementdélégué auxdéplacementsurbains 7ème

Le 7 Août 2003 1h Annexes

Monsieur CatinoLionel

Chef de poste Policemunicipale

Vendredi 2 juillet2004

30mn non enregistré

Monsieur DechatteJean-Christophe

SCIC Conducteurd’opérations

Mardi 6 juillet 2004 1h30 Annexes

Madame De CosterMireille

Premier adjoint aumaire du 7ème

Mardi 15 juin 2004 30mn Annexes

Madame GarciaVillard Claire

Responsable agenceSCIC

Lundi 19 juillet 30mn Annexes

Monsieur GuthSébastien

Responsablecommunication NotreDame des sans abris

Jeudi 22 juillet Par téléphone

Monsieur HuguetPatrick

Maire du troisième Vendrdi 9 juillet 2004 30mn Annexes

Monsieur Le Calloc’hMichel

Ingénieur sécurité /technique CLS

Vendredi 6 août2004 Et le 30 juillet2003

Par téléphone Et2h Annexes

Monsieur LerayDavid

Directeur CasinoGabriel Péri

Jeudi 8 juillet 2004 20mn Annexes

Madame LordierBéatrice

Agent de maîtriseCocci Market GabrielPéri

Mercredi 28 juillet2004

Par téléphone

Monsieur MaaouiTarek

ARRADEP ResponsableLundi 28 juin 2004 1h30 dont 30mn devisites Annexes

Monsieur RapicanoDominique

Responsableclientèle SACVL

Mercredi 16 juin2004

45mn Annexes

Monsieur RochetteNicolas

Agent dedéveloppement Contrat

de ville 3ème

Lundi 5 juillet 2004 30mn non enregistré

Monsieur RomieuxCharles

Directeur OPAC duRhône

Vendredi 11 juin2004

1h30 Annexes

Madame SimonBrigitte

Chef deprojet Contrat de ville

3ème

Courant juillet àplusieurs reprises

Par mail

Commissaire Sola Commissariatdivisionnaire centre

Lundi 21 juin 2004 45mn Annexes

Madame AudreyThura

ResponsableClientèle OPAC duGrand Lyon

Jeudi 17 juin 2004 40mn Annexes

Monsieur VialayJean-Pierre

Chef de service CLS Mardi 22 juin2004 Et le 5 Août2003

30mn Annexes

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Les élus de la mairie centrale Monsieur Gilles Buna, vice président à l’aménagementurbain, et Monsieur Jean-Louis Touraine, Premier adjoint au Maire, n’ont pas eu de tempsà me consacrer, il en est de même pour Monsieur Bernard Rey, adjoint du troisièmearrondissement à la tranquillité publique.

Une observation participante devait avoir lieu avec le Lieutenant Bar, elle a finalementété annulée car ce dernier a appris que j’habite dans le quartier et il a jugé cette démarchetrop risquée pour ma sécurité.

Pour les entretiens, j’ai choisi le style semi-directif avec un questionnaire personnaliséen fonction des acteurs rencontrés.

Un certain nombre d’articles de presse et de documents recueillis auprès des servicesde documentation de l’agence d’urbanisme m’ont informée sur les objectifs et enjeux de laréhabilitation.

Nous allons à présent tenter de définir quelques notions qui seront utilisées par la suitedans notre développement :9

RéhabilitationEtymologiquement ‘habiliter’ vient de ‘habile’ du latin ‘habilus’ : « commode à avoir en

main », « maniable » qui vient de ‘haber’ : « avoir, tenir du sens qui se manie bien ». Il sedécline dans ‘habileté’ puis ‘habilitation’ : du latin ‘habilitatio’ et également dans ‘habiliter’du latin ‘habilitare’ qui veut dire « rendre apte » au sens juridique.

La réhabilitation peut donc se traduire par le fait de rendre apte de nouveau.La réhabilitation choisie en 1998 vise les espaces publiques et les immeubles. Il s’agit

donc de rendre les places et les rues aptes à leur vocation légitime et les immeubles aptesà y habiter.

‘Habiter’ vient du latin ‘habitare’ qui est un fréquentatif de ‘haber’ : « avoir » et qui signifie« avoir souvent occupé ».

L’orientation affichée par la municipalité, celle de la réhabilitation suppose donc quel’on reprenne en main et que l’on rende l’espace apte à ses usages.

La remarque que cela soulève est la suivante : quand on réhabilite on reprend à celuiqui a : l’habitant pour rendre apte. Aussi il faut que l’habitant, celui qui a, soit demandeurafin que la réhabilitation fonctionne.

Trois acteurs interviennent dans la réhabilitation de Péri-Moncey : le locataire, quihabite ; le bailleur, qui possède ; et le pouvoir public qui reprend en main.

Voici de quelles manières ils peuvent intervenir, trois possibilités sont envisageables :le pouvoir public décide de réhabiliter le quartier ou le bailleur se débrouille seul – c’est cequi s’est passé pendant longtemps – ou le locataire est associé à la réhabilitation.

Dans le quartier il s’agit d’une reprise en main par les pouvoirs publics sur un « ras lebol » des locataires et de la ville.

Une question reste en suspend, s’agit-il de reprendre en main pour donner à celui quia : l’habitant (réhabilitation) ou est ce que l’on reprend en main pour donner à quelqu’und’autre (requalification) ?

9 Certaines de ces notions ont déjà fait l’objet de définitions dans mon mémoire de maîtrise : « Coproduire la sécurité. Vers unespace défendable à la française », Université Lyon II, sous la direction de Monsieur Claude Journès, 2003 et ont donc été en partiereprise. Notamment sécurité, insécurité, incivilité, sentiment d’insécurité.

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Introduction

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La ville de Lyon s’est intéressée à cette réhabilitation pour des questions d’ordre publicmais également parce que cette ville a la particularité de posséder une grande partie desterrains de la ville.

Requalification‘Qualifier’ du latin ‘qualificare’ est composé de ‘qualis’ : « quel » au sens de « apte »,

« fait pour » et de ‘facere’ : « faire », « rendre tel ».Les objectifs affichés de la politique de la ville vise le maintien des populations actuelles

et l’accueil de nouveaux ménages en rendant le quartier attractif.La ville va reprendre en main pour donner à celui qui a : l’habitant et aux nouveaux ce qui

n’est pas contradictoire puisqu’un grand nombre de logements sont vacants. Les problèmesse situent à un autre niveau ; est-ce que le Politique peut dire que désormais ces habitantsvont vivre avec ces nouveaux habitants. Cela suppose un changement dans la sociologiedu quartier qui ne sera pas forcément accepté. D’autant plus que – nous y reviendrons –la mixité actuelle est née d’une sédimentation de populations au travers l’histoire qui a finipar former une communauté homogène.

Le risque d’un tel programme est de procéder à une requalification : en voulant rendreapte (réhabiliter) à de nouveaux arrivants, on risque de rendre telle (requalifier) cettenouvelle population et de perdre l’identité du quartier.

RénovationRénovation vient du latin ‘renovatio’ : « renouvellement », rétablissement dans l’état

premier ou remise à neuf. La rénovation du quartier vise à remettre à neuf, à restaurerses immeubles et ses espaces publics, à les remettre en état suite aux dégradations etdestructions qu’ils ont pu connaître.

RéaménagementL’aménagement est « l’organisation globale de l’espace, destiné à satisfaire

les besoins des populations intéressées en mettant en place les équipementsnécessaires et en valorisant les ressources naturelles. » 10 En réaménageant la placeGabriel Péri, on ré-aménage un espace de façon à satisfaire les populations intéressées.On satisfait les populations du quartier en réaménageant leurs immeubles. Qui cherche t’onà satisfaire par le réaménagement de la place ?

La sécurité devoir de l’EtatLa déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 stipule en son article 2

que, « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturelset imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et larésistance à l’opposition. » En parlant de droit à la sûreté, l’article 2 notifie le droit à toutgroupe social d’être à l’abri du danger..

Dans l’article 12, est ajouté, « La garantie des droits de l’homme et du citoyennécessite une force publique : cette force publique est instituée pour l’avantage detous et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée. » La sûreté,de chaque individu est de la responsabilité de l’Etat qui s’engage, par le biais d’une forcepublique, à les protéger des éventuels dangers.

La loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995 énonce

en son article 1er que « la sécurité est un droit fondamental et l’une des conditions10 Le Petit Robert, édition 1977.

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de l’exercice des libertés individuelles et collectives. L’Etat a le devoir d’assurer lasécurité en veillant sur l’ensemble du territoire de la république, à la défense desinstitutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et del’ordre public, à la protection des personnes et des biens. » On parle actuellement desécurité et non plus de sûreté, la sécurité, c’est la situation qui résulte de l’absence réellede danger. La sécurité offre une dimension plus large que la sûreté, l’Etat a pour missionde jouer sur l’état d’esprit des gens, sur leur sentiment d’insécurité.

La sécurité est un droit, la sécurité est une prestation11 , il existe une demande et uneoffre de sécurité.

L’insécurité

Comme le fait remarquer Philippe Robert12, sociologue et directeur de recherches auCNRS, ces dernières années, les campagnes électorales donnent l’impression qu’il n’existepas d’objectifs plus important que la lutte contre l’insécurité.

Le tout est de savoir de quelle insécurité on parle ?Si l’on met de côté l’insécurité alimentaire, climatique, sanitaire,… ce terme reste large.

Au début du 20ème siècle, l’insécurité, ce sont les manifestations ouvrières, le 10mars 1906, à Courrière dans le Nord de la France, une explosion dans une mine a tué1099 mineurs. Cet accident est à l’origine d’une importante grève qui n’a pris fin qu’après

l’adoption de meilleures mesures de sécurité. Le 1er mai 1906 a été l’occasion d’unemanifestation où les mineurs ont réclamé des journées de huit heures. La manifestation aété réprimée par les gens d’armes, appelés à l’époque « la troupe ». La tâche des forces del’ordre était de ne pas laisser le contrôle de la rue aux grévistes parce qu’ils allaient d’usinesen usines et de chantiers en chantiers pour faire cesser le travail et, parce que leur présencedans la rue est apparue au gouvernement comme un défi à son autorité.

De nouveau, en 1910, une partie de la France est sujette à des manifestations avec lagrève des terrassiers de la compagnie du Nord, deux cents cinquante grévistes qui voulaienten débaucher d’autres furent cernés et matraqués.

En 1940, l’insécurité, ce sont les groupes terroristes qui ne respectent pas l’ordreétabli. Durant l’été 1940, des attentats ont été perpétrés contre les troupes allemandes,ces dernières répriment cette attitude par des traques minutieuses, l’incitation à la délation,un recours généralisé à la torture, l’appel à des forces importantes (Milice, GMR,…) Cetterépression est à l’origine de pertes considérables.

A partir de 1940, des groupes appelés terroristes par les uns, maquisards par les autresentretiennent des zones d’insécurité en France.

En 1945, la guerre a fait beaucoup de morts, il y a beaucoup d’enfants sans parents, àcette époque l’insécurité se traduit donc par les nombreux vols que commettent ces enfantspour survivre.

En 1960, à la fin de la guerre d’Algérie, on observe en France une nouvelle formed’insécurité : le terrorisme de l’Organisation de l’Armée Secrète (OAS), organisationclandestine crée en 1960 par les partisans du maintien de la présence française en Algérie.Elle se manifeste au lendemain du putsch militaire d’Alger, par des attentats terroristes quis’intensifient au moment de la signature des accords d’Evian le 18 mars 1962.

11 CHALUMEAU Eric, « La politique de lutte contre l’insécurité », Regards sur l’actualité, n°275, novembre 2001, p. 28.12 ROBERT Philippe, L’insécurité en France, Paris, La découverte, 2002.

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Les années 1960, sont aussi les années de la jeunesse, conséquence du Baby Boom,un français sur trois a moins de vingt ans et cette jeunesse se fait entendre de différentesfaçons. Fin juillet 1959, suite aux évènements, à Paris et à Bandol, apparaît la figuremédiatique du blouson noir ou plutôt des blousons noirs, car c’est surtout les phénomènesde bandes qui inquiètent. Ils se caractérisent par leurs tailles (énorme) et leurs violences(nouvelles et gratuites)13 : vols de voitures et de mobylettes.

Une autre forme d’insécurité existe depuis l’antiquité : le grand banditisme.La bande à Bonnot (un exemple parmi tant d’autres) représente le glissement de

la cause anarchiste vers le grand banditisme et l’introduction en France du hold-up « àl’Américaine » utilisant l’automobile naissante.

Dans les années 1960, 1970, des mouvements de population se soulèvent contrela société de consommation et contre le capitalisme. Ce sont la bande à Bader, lesbrigades rouges… Ces mouvements d’extrême gauche ont mené de nombreuses actionsspectaculaires et meurtrières dans les années 1970.

Dans les années 1970, la délinquance augmente considérablement et apparaît dansles sondages d’opinion le sentiment d’insécurité.

Les trente glorieuses se traduisent par le développement d’une société deconsommation. Lors du premier choc pétrolier, le chômage augmente et avec lui ladélinquance et l’insécurité.

Jusqu’à cette époque, l’insécurité était liée à la criminalité passée devant un juge, undélinquant était quelqu’un qui commet un délit, délit puni par le code pénal.

Depuis les années 1970, c’est à une nouvelle forme d’insécurité que les Français ontaffaire. Il s’agit de la délinquance « qui peut menacer chacun d’entre nous »14.

Quand on parle d’insécurité, il ne s’agit pas de remettre en cause la paix civile, encoremoins la paix face aux menaces étrangères. Il s’agit de protéger les individus contre unenouvelle forme d’insécurité, insécurité caractérisée par ces actes délinquants envers lespersonnes ou leurs biens..

On peut dater l’émergence de cette nouvelle insécurité autour des années 1970, 1975,la première réelle prise de conscience politique se traduisant par le rapport « réponses à laviolence »15 dirigé par l’ancien Garde des sceaux, Alain Peyrefitte, en 1977.

Dans ce mémoire lorsque nous utiliserons le terme « insécurité » nous entendronscette nouvelle forme d’insécurité qui apparaît depuis la fin des années 1970 et qui à laGuillotière se traduit principalement par des vols, quelques agressions, ; du vandalisme,des dégradations, du trafic de drogue ou encore du recel d’objets volés.

Mais il ne s’agit pas du seul type d’insécurité que nous désignerons par ce terme. LaGuillotière connaît une autre forme d’insécurité, ces bâtiments s’effondrent, ces logements

sont vétustes, insalubres, en ce début de 21ème siècle deux immeubles se sont écrasés,de nombreuses fenêtres sont brisées, les équipements de gaz, d’eau ou d’électricité sontvétuste voire hors d’usage. Aussi, les locataires sont constamment en danger.

13 MUCCHIELLI Laurent, Violences et insécurité, Paris, La découverte, 2001, p. 88.14 ROBERT Philippe, L’insécurité en France, op. cit., p. 3.15 PEYREFITTE Alain, Réponses à la violence, Documentation française, 1977.

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La volonté de réhabiliter le quartier, affichée en 1998, semble viser par ces actions cesdeux formes d’insécurité.

Les incivilités« Le terme d’incivilité n’est pas neuf, mais son usage s’est considérablementtransformé. Il ne signifie plus simplement discourtoisie. Depuis le milieu desannées quatre-vingt-dix, il est devenu synonyme de désordre, de nuisance,d’inconduite, d’incivisme, d’impolitesse, d’insolence, de petite délinquance.Toutes les atteintes, plus ou moins claires, plus ou moins violentes, plusou moins délibérées aux biens et aux personnes réunies dans l’expression« incivilités » sont difficilement appréciables et traitables par la police et lajustice »16

Sébastien Roché, politologue, enseignant et chercheur au CNRS, fait remarquer dans unarticle intitulé « Les incivilités, défi à l’ordre social » paru en 1994 que les incivilités sont troppeu prises en considération. Elles représentent « les atteintes à l’ordre public ordinaire,pas nécessairement tel que le définissent les pouvoirs publics, mais, tel qu’on leconstruit dans la vie quotidienne » 17 .

Ce nouveau concept regroupe quatre catégories d’actes .18

« Les actes de salissure et de dégradation, ainsi que le vandalisme dans cequ’il a de moins spectaculaire (boites aux lettres endommagées, vitres ouampoules cassées, extincteurs vidés, tags, etc.) Les abandons d’objets (ticketsde transport, sacs poubelles, électroménagers, etc.) Les modes d’entrée encontact (de l’absence de formule de politesse aux insultes.) Les conflits (plus oumoins déclarés) à propos du bruit (qui constitue le premier motif de conflit dansl’habitat social) ou des chahuts scolaires, des odeurs (de la cuisine à l’urine etaux déjections diverses dans les parties communes), des occupations d’espace(caves, montées d’escalier, places publiques.) »

Même si tous ces actes ne sont pas punis pénalement, ils sont responsables du sentimentd’insécurité. L’individu ne réfléchit pas en terme juridique, certaines situations ou certainsactes le gênent et peuvent lui procurer une certaine peur qui, même si elle n’est pasressentie par son voisin n’en est pas moins un sentiment réel d’insécurité. C’est pourquoiSébastien Roché insiste sur le fait que les incivilités sont des actes en lien avec l’ordre socialet non l’ordre pénal.

Les incivilités procurent une « rupture dans l’ordre social » , introduisent « uneincertitude au cœur de la vie sociale » qui vont être responsables d’un sentimentd’insécurité.19

Petit à petit, le sentiment d’insécurité se nourrit de ces nouvelles violences et augmente.

16 DAMON Julien, « Les incivilités », Problèmes politiques et sociaux, n°836, 24 mars 2000, couverture.17 ROCHÉ Sébastien, « Les incivilités, défi à l’ordre social », Projet Paris, n°238, 1994, p. 37-42. (extraits) dans DAMONJulien, « Les incivilités », Problèmes politiques et sociaux, n°836, 24 mars 2000, p. 7.

18 ROCHÉ Sébastien, « Face aux incivilités, comment reconquérir les espaces collectifs ? », l’Etat de la France 1998-1999,Paris, La découverte, p. 94. Cité dans DAMON Julien, « Les incivilités », Problèmes politiques et sociaux, n°836, 24 mars 2000, p. 9.

19 ROCHÉ Sébastien, Insécurité et liberté, Paris, seuil, 1994, p. 29. dans DAMON Julien, « Les incivilités », Problèmes politiqueset sociaux, n°836, 24 mars 2000, p. 28-29.

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Introduction

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Le sentiment d’insécurité apparaît en France au milieu des années 1970, et engendrela parution du rapport20 du comité présidé par Alain Peyrefitte qui souligne l’augmentationde la criminalité et du sentiment d’insécurité.

Le sentiment d’insécuritéIl s’agit d’une impression de menace envers une personne ou le bien d’une personne.

« Par ailleurs, le sentiment d’insécurité est lié à des signes provenant del’environnement social (comportements interprétés comme menaçants) etmatériel (urbanisme agressif). Il mêle un aspect réactif (à d’éventuelles menaces)et une dimension anticipative (la peur d’être victime). »21

Il ne faut pas nécessairement avoir été victime de délinquants pour éprouver un sentimentd’insécurité. Selon Sébastien Roché, le sentiment d’insécurité va s’expliquer par l’insécuritéobjective (réelle, en terme de faits) mais aussi par la conjonction de facteurs « multi-applicateurs », c’est le modèle « Prexvu ».22

Ce modèle montre que le sentiment d’insécurité se construit avec la pression dela délinquance, avec l’exposition personnelle ou par la réverbération de l’exposition depersonne tierce. De ce fait, quelqu’un qui habite dans un quartier où il y a beaucoupd’insécurité, une forte pression de la délinquance, pourra ne pas ressentir un fort sentimentd’insécurité du fait d’une banalisation de la délinquance. De la même façon, si l’on joue surle facteur exposition, quelqu’un qui reste chez lui ne ressentira pas l’insécurité. Aussi, lefacteur vulnérabilité peut avoir son importance, celui qui pratique les arts martiaux se sentiramoins concerné par l’insécurité, par exemple.

Le débat sur l’insécurité et le sentiment d’insécurité a commencé à prendre del’importance au milieu des années 1970. Ces derniers existent depuis « toujours » mais,la sécurité en tant que préoccupation majeure et motrice des politiques publiques est plusrécente.

Dans une première partie nous nous intéresserons aux spécificités du quartier Péri-Moncey, spécificités qui ont leurs origines dans l’histoire de ce quartier. Dans une deuxièmepartie nous étudierons la réhabilitation du quartier en présentant les cadres institutionnelsqui sont à l’origine des différentes actions mises en œuvre puis leur traduction sur le terrain.

Enfin, dans une dernière partie nous nous attacherons à observer les effets de la« réhabilitation » du quartier et à vérifier la réalité de notre hypothèse.

20 PEYREFITTE Alain, Réponses à la violence, op. cit..21 SOULLEZ Christophe, op. cit., p. 209.22 « Expliquer le sentiment d’insécurité. Pression, exposition, vulnérabilité et acceptabilité », Revue française de science politique,volume n°48, n°2, avril 1998, p. 274-305. Cité dans DIEU François, Politiques publiques de sécurité, Paris, L’harmattan, p. 63.

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Partie 1 : Péri-Moncey un quartier, unehistoire

Chapitre 1 : Une spécificité inscrite dans le temps

Section 1 : Promenade dans le quartierIl est 10 heures du matin, c’est une belle journée de février, il fait froid mais le temps n’estpas pluvieux. Je quitte la rue d’Aguesseau où j’habite un petit appartement et me dirige versla place Gabriel Péri.

Le long de la rue de Marseille, les commerçants ouvrent leurs rideaux, les livreursdéchargent leurs marchandises ; la journée vient de commencer et pourtant la place quej’entraperçois, au loin, est déjà pleine de monde.

Quelques mendiants sont déjà assis sous l’abri de l’arrêt du tramway se partageantune bouteille de vin, un autre est à la sortie du Casino et demande un peu de monnaie auxclients qui sortent de la supérette. Pendant ce temps, en face du tabac, deux jeunes sontinstallés avec leur chien et demandent quelques pièces en échange d’une démonstrationde jonglage.

Devant le CLIP (Centre Liberté Péri) bâtiment aux allures majestueuses qui se dresseau bout de la place, une centaine de personnes, la plupart d’origine maghrébine, discutent,debout ;

Je me souviens avoir croisé quelque fois, aux abord de la place, des gens qui, n’étantpas du quartier, s’étonnaient d’un tel regroupement : « Tiens ! Il y a une manifestation ! »Voilà le genre de questions que se posent les passants quand ils se retrouvent face à cettefoule.

Comme je me dirige vers le centre commercial de la Part-Dieu, je choisis d’emprunterla rue Moncey.

J’arrive donc sur la place et me trouve au milieu de cette centaine de personnes,quasiment que des hommes, qui sont là, debout, tous les jours et qui partagent entre euxles souvenirs de leur vie passée, de l’époque où ils habitaient au Bled, période dont ils ontla nostalgie.

Au milieu de ces hommes, quelques draps sont étendus sur le sol présentant diversesmarchandises, disposées en vrac sue ces étalages de fortune, aux passants qui s’arrêtent.C’est une sorte de petit marché aux puces qui s’installe chaque jour sur la place. On ytrouve tout et n’importe quoi : une paire de chaussure « presque jamais portée » commele dit son propriétaire alors qu’un acheteur potentiel essaie de faire baisser les prix, desvêtements, des cigarettes du pays, des objets décoratifs et même des paires de lunettes devue quelques fois. Un homme vient d’en choisir une, cela lui a pris deux minutes, pas devisite chez un spécialiste pour lui, il les a mises sur son nez, a regardé autour de lui et l’airsatisfait de la correction, sort son porte-monnaie pour les payer.

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Après avoir traversé le CLIP qui est ouvert en son milieu de façon à pouvoir accéderaux rues derrières. J’entre dans la rue Moncey, comme il est encore tôt, la rue est calme,mais il n’est pas rare un peu plus tard dans la journée de se voir proposer d’acheter duhaschich dans la rue.

Alors que j’avance dans la rue Moncey, je remarque que plusieurs immeubles ont desfenêtres cassées voire murées. Le quartier regorge de logements vétustes ; l’année dernièrele couloir du 19 rue Paul Bert s’est effondré, trois ans auparavant, c’est le 51 rue Monceyqui s’écrasait sur lui-même.

J’arrive sur la place Bahadourian anciennement place St Jacques mais qui a pris le nomdu propriétaire d’un magasin se situant sur un bord de la place, à l’angle de la rue Villeroy.

La famille Bahadourian est installée à la Guillotière depuis 1938 et la réputation ducommerce dépasse largement le quartier ; des gens viennent de toute la ville pour yacheter produits exotiques, épices ou spécialités méditerranéennes. Plus qu’une enseigne,plus qu’un nom Bahadourian est désormais une institution. C’est vers cette place que denombreuses personnes viennent d’un peu partout pour faire leurs courses puisqu’on ytrouve de nombreuses boucheries Halal, des vendeurs de disques de musique du Bled etdes magasins proposant des articles directement importés du Maghreb. Il règne un parfumet une ambiance méditerranéenne dans les rues entre la place Gabriel Péri et la placeBahadourian. C’est une ambiance bien particulière que celle de la Guillotière où se mêlentdiverses communautés et où comme disait Armand Bahadourian – lors de l’inaugurationde la place qui porte désormais le nom de son père – le racisme est inconnu et le respectde l’autre prévaut.23 Presque côte à côte, on trouve deux boucheries « l’une certifie uneviande halal, l’autre à la vitrine ornée d’une étoile de David, propose de la viandecacher » 24 .

Historiquement, la Guillotière est un lieu d’accueil des populations immigrées, un pointde chute pour de nombreux étrangers. S’y sont installés des Italiens, Grecs, Arméniens,Algériens, Tunisiens, Marocains. Aujourd’hui encore, tant par ses commerces que par seshabitants, la Guillotière est un véritable melting pot où Arabes, Africains et Asiatiques25,cohabitent et se partagent les commerces.

La Guillotière est souvent surnommée « la Médina » ou la « little Algérie » par seshabitants. Pendant le Ramadan, c’est tout le quartier qui est en effervescence. Le marchédu Ramadan s’installe pendant prés d’un mois rue St Jacques et les vendeurs de menthe,de pâtisseries ou d’épices sont là quelque fois dès cinq heures du matin et attendent dansle froid après avoir mis en place leurs planches et leurs tréteaux. Des Musulmans viennentde toute la ville et de plus loin encore pour s’approvisionner.

Alors que je quitte la place Bahadourian, je m’interroge : ce quartier multiculturel, cetteMédina intra-muros, à deux pas du centre ville, à un pont de Bellecour « la bourgeoise », àcôté de la préfecture, ce quartier laissé pour compte quel fût son passé ?

23 MARTINI-BARTHEL F., « Des sages des deux côtés », Le Progrès, 2 janvier 2004.24 Ibid.25 Pour la plupart, bien entendu cette description n’est pas exhaustive.

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Section 2 : Histoire du quartier26

Les spécificités du quartier de la Guillotière ont leurs origines dans l’histoire de ce faubourget plus précisément dans son urbanisation dont le point de départ est la construction du pontsur le Rhône vers 1183. Lors de sa construction, le pont du Rosne, qui allait alors jusqu’à laplace Gabriel Péri d’où son ancien nom : place du pont, permettait d’assurer des relationscommerciales, religieuses, militaires entre Lyon et le Midi ainsi qu’entre Lyon et les paystransalpins. Sur la rive gauche du pont convergeaient plusieurs chemins : la route de Vienne,le chemin de Grenoble, le chemin de St Laurent et le chemin de Crémieu ; ils formaientune artère unique, l’ancêtre de la grande rue de la Guillotière. Le pont représentait un axede communication important et il devient rapidement un lieu de passage pour les pèlerins,les soldats, les voyageurs et les marchandises. De ce fait, des activités économiques etcommerciales vont se développer à la Guillotière pour profiter du passage.

L’existence du groupement de la Guillotière n’apparaîtra sur un document officiel qu’en

1479, il formera un hameau puis un bourg au 16ème siècle pour enfin donner naissance

à une ville durant le 19ème.Le développement du bourg va se faire petit à petit profitant de l’accroissement de

la ville de Lyon qui, à la fin du 15ème siècle met fin à son statut de ville frontière avecle rattachement du Dauphiné et de la Provence et profitant aussi de l’accroissement deséchanges commerciaux avec l’étranger.

Le fait que le pont du Rhône soit l’axe de communication majeur entre Lyon et l’Est etle Sud, que les pèlerins, les soldats, les commerçants et marchandises transitent par cepont va engendrer le développement de cabarets, d’ateliers de réparation pour voiture etde marchand de chevaux à la Guillotière. Mais ce n’est alors qu’un lieu de passage, lesvoyageurs ne s’y arrêtent qu’en cas de crue ou lorsqu’ils arrivent après la fermeture du pont.

A. La Guillotière : un lieu exutoire

Au 12ème siècle, le hameau s’est agrandi par la construction d’établissement tels uneléproserie, une maladrerie, un hôpital… Sa position de tête de pont, à l’entrée de Lyon, vafaire qu’on y gardera les gens que l’on suspecte de véhiculer des épidémies. De la mêmefaçon, les gens dont on pensait qu’ils n’auraient pas suffisamment d’argent pour se payerun hôtel en ville se voyaient refuser l’accès au pont et restaient à la Guillotière.

Finalement, dans les années 1730, la Guillotière, qui se compose d’un groupement demaison entre le pont et la grande rue, apparaît déjà comme une vraie banlieue.

Dans la première moitié du 19ème siècle, le bourg se transforme en ville. La situationgéographique de la Guillotière va faire qu’elle va pouvoir profiter du commerce international,des capacités industrielles et bancaires de Lyon et sa population va se multiplier par 10 encinquante ans pour atteindre 65 378 habitants en 1856.

Les activités commerciales, artisanales, industrielles et militaires vont attirer une maind’œuvre ouvrière pour laquelle des logements vont devoir être construits. Ce sont deshabitations bon marché, construites rapidement qui vont fleurir de façon désordonnées.

26 Cette partie reprendra en grande partie le développement effectué par BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de

Lyon, op. cit.

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A la moitié du 19ème siècle, la Guillotière est donc faite de constructions hâtives,d’établissements insalubres éparpillés au milieu des champs.

Durant le 19ème siècle vont être construites les actuelles rue Moncey, rue Paul Bertainsi que le cours Gambetta, cours des Brosses à l’époque.

Enfin, le 24 mars 1852, la Guillotière devient un quartier de la ville de Lyon. Ce serale foyer de développement des industries métallurgiques et chimiques qui vont attirer lespopulations ouvrières ce qui donnera au quartier son caractère populaire et cosmopolite.

B. Lieu de débaucheLa Guillotière sera à la fois un carrefour stratégique pour les échanges, un point de chutepour certains, une étape ou encore un lieu de transit pour d’autres. Les mouvements y sontincessants. Il s’y côtoie toutes sortes de population et rapidement… naissent des cabarets

et autres lieux de divertissements populaires. A la fin du 18ème siècle, le quartier a acquisune bien mauvaise réputation : ce serait un lieu de débauche, on y trouve des salles dedanse, des salles de jeux, de l’alcool, des prostituées. Certaines activités sont contrôléesvoire interdites mais les rixes sont fréquentes et la Guillotière est considérée comme une« hors-zone » difficile à contrôler du fait de la multiplicité des chemins permettant auxsuspects de s’échapper.

Déjà la configuration de l’espace pose un problème quant à la sécurisation des lieux.

C. Foyer d’infectionVers 1840, en plus d’être un lieu de débauche, la Guillotière devient le principal foyerd’infection de la syphilis. Les prostituées de Lyon viennent s’y réfugier pour échapper auxcontrôles médicaux. Les vérifications sont difficiles car il y a 17 maisons de tolérance maisle nombre de maisons de prostitution clandestine s’élève à 700.

D. Foyer de délinquance

La Guillotière au 19ème siècle est un lieu insalubre, marécageux et menacé par les crues.Les oyers y sont donc peu élevés et c’est là que s’installent les nouveaux arrivants.L’exclusion générée par cette situation se traduit par une augmentation de la délinquance.On aurait 26 délinquants pour 1000 habitants27 et la majorité se concentrerait autour de laplace du pont.

« En somme, bien avant l’arrivée des vagues d’immigrants qui marqua le quartierde la place du pont, le lieu avait acquis une bien mauvaise réputation, nourrissantles fantasmes et les psychoses insécuritaires des lyonnais »28.

Face à ces problèmes, la Guillotière va faire l’objet de tentatives de réappropriationsinstitutionnelles par des opérations de police et par des opérations urbanistiques dans lebut de mettre fin à cette image de quartier mal famé qui lui colle à la peau.

E. La Guillotière : lieu d’accueil

27 Selon une étude réalisée par André Chassin sur la délinquance à Lyon entre 1845 et 1847, cité dans Ibid., p. 30.28 Ibid., p. 31.

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Depuis longtemps la Guillotière a été le point de chute de nombreux étrangers mais c’estsurtout après la première guerre mondiale que le secteur devient un pôle d’immigration. S’yinstalleront Italiens, Grecs, Arméniens, Algériens, Juifs Ashkénazes de l’Europe de l’Est,Tunisiens, Marocains… Un peu plus tard l’arrivée des Asiatiques et des Turcs modifieraencore la composition du quartier.

La présence de ces populations immigrées a engendré l’émergence d’une activitécommerciale particulière.

Aujourd’hui encore, on va à la Guillotière chercher ses épices, sa menthe fraîche, dela viande halal, on vient y prendre un thé ou prendre ou donner des nouvelles du pays.

Cette présence d’immigrés dans le quartier agrémentée du fait que la place du pont estdevenue un lieu de rencontre, que les gens s’y rassemblent chaque jour par centaines, aexacerbé les réticences et les stigmatisations chez les Lyonnais si bien que cette présencea nourri les discours sécuritaires, hygiéniques et racistes.

F. La Guillotière : le garni, le café et la rueQuand les travailleurs immigrés arrivent, ils s’entassent dans de petits logements, ilsacceptent ces conditions de vie car de la sorte, ils économisent de l’argent pour envoyerau pays ou pour le jour ou ils y rentreront. La vie s’organise entre le travail, les garnis, lescafés et la rue où l’on se retrouve entre immigrés d’un même pays pour parler du Bled. Lesgarnis sont des chambres souvent chez l’habitant louées à bon marché pour des duréesvariables. Dans ces garnis, les conditions de vie sont misérables : bien souvent il n’y a pasd’installation sanitaire, les chambres sont insalubres, délabrées, infestées par les rats. Lecafé et la rue permettent d’échapper à l’exiguïté de la chambre. Pour de nombreux immigrés,touchés par la grave crise économique des années 1930 «en plein cœur de la crise, lecafé des compatriotes est la survie » 29 . Sans oublier que dans ces cafés d’immigrés, lasolidarité est une issue de secours appréciable, on s’y retrouve pour manger, pour discuterou encore pour jouer aux dominos. Quant à la rue, c’est le lieu public le plus fréquenté parles travailleurs immigrés.

A la Guillotière, historiquement, les gens se retrouvaient pour causer. En 1932, dansLa vie lyonnaise, Petrus Sambardier 30 détaillait les raisons pour lesquelles il y a toujourseu des gens en stationnement à cet endroit/

« Les activités économiques ou artisanales qui s’étaient développées dans lesecteur expliquent pourquoi la place est devenue un lieu où l’on reste debout. Enface de la mairie [ qui était à l’angle de la rue de Marseille et de la grande rue de laGuillotière ] devant le café, s’est tenu longtemps le marché aux grains. De l’autrecôté, au débouché de la rue Marignan, il y avait le stationnement pour l’embauchedes compagnons de la bâtisse. En pénétrant rue Moncey, on trouvait le marchéaux groles. Entre le cours Gambetta et le cours de la Liberté, les trottoirs étaientgarnis d’Arabes en burnou sale qui vendaient au verre ou à la poignée des dattesgrasses dans leurs paniers en lambeaux……Le Proche-Orient était représentépar des Arméniens qui vendaient des racines dont le simple contact guérissaitle mal de dent et qui pouvait aussi amollir et dissiper les cors aux pieds. Il yavait des dentistes à la poitrine couverte de médailles. Les grecs vendaient des

29 Ibid., p. 50.30 SAMBARDIER Petrus, La voix du peuple, n°215, 15 janvier 1937, cité dans Ibid. p.51.

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cacahuètes, un commissionnaire avait sa banquette à cirer les souliers devant lapharmacie Boissonnet et, souvent, le tramway était arrêté au milieu de la placepar le rassemblement formé autour d’un marchand de chansons. »31

Dans les années 1930, la présence d’étrangers et de commerces tenus par des immigrésva nourrir les discours racistes.

En 1932, avec l’ouverture du Prisunic sur la place Gabriel Péri, une guerre des prixest ouverte, les commerçants français s’estiment lésés et ils s’attachent à démontrer queles étrangers représentent une nuisance sociale. Des mesures vont être prises pour limiterle nombre d’étrangers dans l’artisanat cependant dans les années 1960-1970 des gensviennent d’un peu partout pour s’approvisionner chez les commerçants Juifs et Maghrébinsde la Guillotière principalement en bijoux, tissus, cassettes ou produits alimentaires.

Depuis une quinzaine d’année, « la crise algérienne, le chômage en France,l’accroissement du sentiment d’insécurité urbaine, les problèmes de délinquance etde drogue, le racisme et la visibilisation sociale des maghrébins, etc. ont nettementdétérioré le dynamisme de la place et sa légitimité dans les plans d’urbanisme de lamunicipalité » 32 .

A deux pas de Bellecour, de la préfecture et de la Part-Dieu ce quartier qui évoquaittrop l’Afrique du nord va être repensé : « C’est le temps de la reconquête » 33 .

Chapitre 2 : Une problématique spécifiqueDepuis plus d’un siècle, le quartier a connu de multiples aménagements : « ceserait l’histoire d’un faubourg de Lyon, d’une commune périphérique de Lyon– la Guillotière – qui serait devenu un lieu de centralité par excroissance del’agglomération lyonnaise. Central, il séduit la puissance publique qui régulièrements’essaie, à travers le fameux axe Moncey, la diagonale dans la ville, à ménager etaménager ce lieu conflictuel et complexe, interculturel et ethnique, mélange d’ici etd’ailleurs » 34 .

Section 1 : Les premiers réaménagementsLe quartier Péri-Moncey a connu d’innombrables projets urbains et il apparaît commeimportant de s’y intéresser, c’est en observant le passé que nous pourrons saisir laproblématique actuelle.

L’aménagement de la place trouve ses origines à la fin du 18ème siècle ; entre le milieu

du 18ème et le début du 19ème, plusieurs propositions vont se succéder.

31 Ibid., p.52-53.32 Ibid., p.60.33 Ibid., p.61.

34 BERTHET Jean-Marc, « Le quartier Moncey à l’épreuve de l’agglomération », Les Cahiers Millénaire 3, L’agglomérationlyonnaise en perspectives : l’exemple du quartier Moncey, op. cit., p. 3.

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Jusqu’au 18ème ,19ème siècle le pont du Rhône arrivait jusqu’à la place Gabriel Périqui portait alors le nom de place du pont. Après avoir franchi le Rhône, le pont s’étendaitencore sur quelques arches traversant brotteaux ( graviers, végétations de vorgines ) etilônes. La rue de Marseille et le cours de la Liberté étaient sous les eaux et de l’extrémitédu pont partaient le chemin de Vaulx en Velin, la grande rue de la Guillotière et le cheminmenant au château de Béchevelin. L’espace au bout du pont n’a alors rien d’une place maisc’est un espace stratégique du fait des axes de communication qui s’y croisent en formantune étoile.

Les plans pour l’aménagement de ce lieu vont se succéder jusqu’à la fin du 19ème

siècle. Finalement ce sera une « place ronde de 35 mètres de rayon ; sur l’extrémitédu pont le cours des Brosses (Gambetta) mène au Rhône, grande allée des Brotteaux(cours de la Liberté), rue tendant à la Tête d’or […] (Marignan), rue tendant à Vaulx(Moncey), rue impasse (rue Paul Bert). » 35 .

Après l’inondation de 1825, le pont au niveau du cours des Brosses est remblayé, après

celle de 1856, une digue est construite. A la fin du 19ème siècle, se sont principalement destravaux d’élargissement et des alignements qui seront réalisés. De nombreux projets ont vule jour mais sans jamais aboutir. Ce serait à cause de la loi de 1841 sur les expropriationsqui ne répondrait plus aux besoins des grandes agglomérations en matière d’hygiène etd’esthétique. La nouvelle loi de 1918 va remédier à cela : « l’administration municipalepeut exproprier, outre les immeubles indispensables à l’ouverture ou l’élargissementdes voies ( loi de 1841), ceux qui sont compris dans une zone déterminée dontl’acquisition est jugée utile pour la réfection et l’assainissement de tout un quartieret l’édification de constructions salubres et esthétiques. » 36

La municipalité va encourager la création en 1919 du syndicat d’études pour lareconstruction du quartier Moncey car elle est consciente « qu’il n’y a pas de quartierplus malsain », « qu’il s’agit de l’assainissement d’un quartier insalubre et qu’il fautlutter contre la tuberculose, cause de tant de victimes » 37 .

Entre les guerres et pendant la seconde guerre mondiale se seront surtout des travauxde voirie qui seront effectués. En 1932 est construit le Prisunic à la place de la brasserieCharroin, là où se situe aujourd’hui le CLIP.

En 1944, la place du pont recevra le nom de place Gabriel Péri, député communiste dela Seine st Denis fusillé le 15 décembre 1941. Enfin, après la guerre le pont de la Guillotièresera reconstruit après avoir été endommagé par les Allemands.

Dans les années 1960, les travaux de voirie et les aménagements des quais restentles priorités.

Quant aux années 1970, « elles doivent être considérées comme des annéesde transition entre un temps qui se consacre eux travaux de voirie et un temps oùse matérialisera une volonté de restructuration d’un secteur qui s’est peu à peupaupérisé, notamment aux alentours de la GrandeRue. » 38

35 CURTET Raymond, « La place du pont, les avatars d’un projet d’urbanisme (XVIIIé-XXè) », Les Cahiers Millénaire 3,L’agglomération lyonnaise en perspectives : l’exemple du quartier Moncey, n°14, 1999, p. 8.

36 DELFANTE Charles, 100 ans d’urbanisme à Lyon, Lyon, ed. LUGD, 1994, p. 177.37 BMO 6-03-1922 dans Ibid.38 Ibid., p. 156.

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Les abords de la place Gabriel Péri vont faire l’objet d’études en vue d’une rénovation.La SONACOTRA (Société Nationale de Construction pour les Travailleurs Algériens)qui s’occupe des problèmes des travailleurs immigrés avait pensé à une destruction /reconstruction du quartier qui, en raison de son coût, n’a pas eu lieu.

Avec le chômage, la crise, la montée du sentiment d’insécurité, à la fin des années1970 on se demande si la construction du métro ligne D, dont un des arrêts doit se trouversur la place, amènera un peu de vie dans ce quartier qui souffre et qui perd son dynamisme.

Les années 1980 sont le temps de la reconquête comme le précise Azouz Begag,chercheur au CNRS et au laboratoire d’économie des transports de l’université Lyon II, dansson ouvrage Place du Pont ou la Médina de Lyon,39 « Tout commence par une sorte detoilettage qui s’avère de plus en plus urgent pour le vieux bourg de la Guillotière et quiva opposer les amoureux du passé, qui entendent protéger les « racines du quartier »et les modernistes impatients de voir la Grande Rue rejoindre le 20ème siècle » 40 .

Dernier des quartiers populaires qui n’ait pas encore connu de transformationsurbanistiques, « la Médina de Lyon va connaître, à son tour, les procédures de ZAC,zone d’aménagement concerté, d’OPAH, opération programmée d’amélioration del’habitat, de réhabilitations diverses… » 41

L’événement déclencheur est sans doute l’effondrement d’un escalier 12 rue de l’épée.Le quartier pourrit, les logements sont habités dans la grande majorité par des étrangerset ils vivent dans des conditions de vie incroyables. De nombreux logements n’ont plusde fenêtres, certains n’ont pas d’eau, pas d’électricité, les planchers s’effondrent, les murstroués regorgent d’humidité…

Après l’effondrement, Simone André, adjointe à la mairie s’insurge : elle ne comprendpas comment des familles peuvent vivre dans de tels logements. La Société d’Equipementdu Rhône et de Lyon, la SERL, mènera des actions de réhabilitation ponctuelles sur lequartier, puis une opération d’envergure est pensée pour la Guillotière où règnent faiblesrevenus, marginalisation, manque d’entretien, rejet…

En 1985 débute une opération de restauration / rénovation dans le quartier avec pourconsigne : « préserver et améliorer le patrimoine existant et revitaliser le quartier »42 .

La revitalisation en question débutera deux ans plus tard mais sous couvert detransformation, il s’agira en fait plutôt de créer dans le secteur des conditions favorables àla venue de nouveaux ménages : on vise le renouvellement de la population.

L’état social du quartier est très bas, la presse décrit ce qu’elle appelle « l’overdosed’insécurité place Gabriel Péri » 43 : haschisch, opium, héroïne, recels, effractionssur les voitures…

La police n’intervient guère face aux petits dealers qui vendent ouvertement dans lerue si bien que les riverains recherchent des solutions auprès du Front National et ce sont

39 BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit.40 DELFANTE Charles, 100 ans d’urbanisme à Lyon, Lyon, ed. LUGD, op. cit., p.157.41 BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit., p. 62-63.42 Ibid., p. 64-65.43 Ibid., p. 65.

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des familles qui s’occupent de faire la chasse aux dealers ; la police cherchant, elle, àdémanteler les réseaux.

Sous Francisque Collomb, maire de 1976 à 1989, en 1986, portée , entre autres, parSimone André, adjointe à la mairie de Lyon, déléguée aux affaires sociales, une grandeopération de transformation du quartier est lancée dans le but de le reconquérir et de lerendre à sa vocation urbaine, à la fluidité. « S’agit-il de rendre à l’histoire légitime ce quiaurait été spolié par le présent marqué par les immigrations récentes ? » 44

A partir de là, une politique va être mise en place afin de lutter contre l’insalubrité, contrel’enclavement et contre ce côté méditerranéen, peut-être un peu trop visible.

Une OPAH (Opération Programmée d’Amélioration de l’Habitat) va être prévue de 1989à 1991 tellement le quartier est dans un état de délabrement avancé.

Finalement, le 15 mars 1987 est présenté dans le Bulletin Municipal Officiel de Lyonun projet de réorganisation du nord de la place du pont. Il est prévu un jet d’eau, des galetset des arbustes de façon à dissuader les Maghrébins de se rassembler et de stationnerdebout sur la place.

Le 27 août 1988, le Prisunic, qui avait ouvert ses portes 56 ans auparavant, les refermedéfinitivement ; le climat d’insécurité, le surdimensionnement du magasin par rapport à saclientèle ainsi que « la forte présence [ dans la population du quartier] d’une majoritéd’origine maghrébine parmi la clientèle … Qui ferait fuir la clientèle » 45 seraient lescauses de cette fermeture.

Le terrain a été acheté par la société Hexagone Développement Immobilier (HDI) deuxmois avant la fermeture, le plan d’amélioration de l’habitat prévoit de multiples actions derénovation et promet au quartier un avenir brillant tourné vers l’Europe.

Finalement, le projet sera interrompu en 1990 par le projet CLIP (Centre Liberté Péri)et l’axe Moncey.

Avec la fermeture du Prisunic, la communauté urbaine de Lyon ( COURLY) et la villede Lyon ont choisi d’en profiter et de saisir cette opportunité pour mettre en œuvre unerestructuration complète des lieux ; si bien que certains se sont même demandé si cet achatpar HDI n’était pas « la conséquence de la volonté municipale de passer à la vitessesupérieure dans la rénovation du quartier » 46 .

Fin 1988, début 1989, un projet de ZAC conventionnée est proposé et adopté.« Chacun pense [ alors ] que les 32 000m² de l’ensemble vont être construits, selonle plan séduisant de René Gagès, avec le passage de la diagonale Moncey, avecses miroirs recouvrant les hauts murs concaves (45 m) reflétant les immeublesenvironnants » 47 .

L’architecte veut offrir un nouveau repère à l’agglomération.Mais rien n’a été fait. Le CLIP devait intégrer des bureaux, des commerces, des

résidences pour personnes âgées, des logements et un hôtel. Tout portait à croire que ceprojet verrait le jour, d’autant plus que le schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme

44 Ibid., p. 66.45 Ibid., p. 68.46 Ibid., p. 68-69.47 DELFANTE Charles, 100 ans d’urbanisme à Lyon, Lyon, op. cit., p.199.

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de l’agglomération lyonnaise baptisé Lyon 2010 présentait un projet pour la ville qui visait àen faire une grande métropole européenne et dans laquelle le CLIP avait sa place.

Mais les choses en ont été autrement : Les objectifs du programme étaient de stopperl’évolution actuelle du quartier, de mettre fin la concentration d’immigrés, de mettre fin àl’invisibilité du quartier. « Le CLIP jettera la lumière sur les ruelles de l’ombre » 48

. Les opinions sur cette construction divergent, les habitants craignent l’enclavement etl’exclusion tandis que les commerçants qui n’habitent pas le quartier pensent au mondeque cela amènera.

« Six mois après l’élection de Michel Noir, [le 19 mars 1989], le CLIP, à l’instarde tous les projets de l’ancienne municipalité, est retardé à cause d’une mise à platgénéralisée. En novembre de la même année, le commissaire enquêteur soucieuxdes problèmes de relogement émet un avis défavorable à l’enquête publique.[Ensuite], c’est le marasme de l’immobilier qui constitue le principal obstacle à lacommercialisation du CLIP. » 49 Débute alors une période durant laquelle plus rienne va bouger et le terrain vague qui remplace désormais le prisunic va contribuer audéveloppement de l’insécurité, les délinquant profitant « du temps mort dans ce no man’sland » 50 .

Face à ces problèmes, le projet va être réétudié, l’immeuble perdra en hauteur pourfaciliter sa commercialisation. Finalement comme le CLIP n’est toujours pas commercialisé,en 1993, la COURLY décide d’investir, elle-même, à hauteur de 63 millions de francs dansle CLIP soit 4400m² de bureaux et 2300m² de logements sociaux. Les élections législativesont leur part de responsabilité dans ce projet mais la construction peut enfin débuter.

« Tout le monde semblait attendre qu’on en finisse…le temps était devenu lajustification la plus urgente de la transformation de ce quartier sensible » 51 aurisque de faire des erreurs.

Section 2 : Les problèmes rencontrés

A la fin du 20ème siècle, la communauté d’origine immigrée du quartier Péri-Monceys’appauvrit et ce principalement pour deux raisons :

Tout d’abord, la crise économique des années 1975 a fortement touché les salariés peuqualifiés qui sont très présents parmi les populations immigrées de la Guillotière. Beaucoupd’entre eux se sont retrouvés au chômage et ont eu de grosses difficultés pour s’adapter àd’autre emploi quand ils n’ont pas subi la ségrégation raciale.

La seconde explication à cet appauvrissement est à rechercher dans la réduction dunombre de « voyage d’achat » organisés pour les habitants du Maghreb. Cette réductiona fait chuter fortement les recettes de leurs compatriotes installés dans des villes commeLyon, Marseille…52

48 BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit., p.71.49 LIGHT Daniel, « Le scénario du CLIP en voie d’ « adaptation » », UBE, 10 octobre 1991.50 BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit., p.75.51 Ibid., p. 77.52 E. G., « Place du pont : Un quartier qui ne sera jamais pris en considération ? », Le Progrès, 9 mars 1992

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Finalement, c’est d’une population pauvre, quelque fois en situation d’exclusion socialeet dont 29% a plus de 60 ans à laquelle on a affaire. Faute de revenus suffisants maissans doute aussi parce que le quartier leur plaît, parce que certains y sont nés, ces gensacceptent de vivre dans des logements insalubres.

Dans la dernière décennie du 20ème siècle, les propriétaires des logements dans lequartier laissent leurs immeubles se dégrader. Le 22 mai 2000, d’ailleurs un immeubles’écrasait au 51 rue Moncey, au mois de mars 2003, cette fois, c’est un escalier quis’effondrait au numéro 19 de le rue Paul Bert. Cet état du bâti, dont une partie appartientà la ville, que nous avons déjà décrit précédemment a fortement contribué à amplifier,dans l’esprit des gens du quartier, un sentiment d’abandon de la part de la municipalité.Parallèlement à ce problème de vétusté des logements, les bailleurs de leur côté constatentun manque de civisme chez certains des habitants du quartier. Comme le faisait remarquerTarek Maaoui, responsable de l’agence ARRADEP (Agence Régionale Rhône-Alpes pour leDéveloppement de l’Emploi de Proximité) – agence inter-organisme qui assure la tranquillitéet la sécurité par le biais de la propreté pour les bailleurs : il y a un laisser-aller de la part deshabitants, « le local poubelle, par exemple, si la porte n’est pas ouverte, ils ne vontpas pousser la porte pour mettre le sac dans le container, et si le container est fermé,ils ne le mettront pas dans le container, ils le mettront par terre » 53 . C’est peut-être laconséquence de ce sentiment d’abandon mais c’est l’un des problèmes rencontrés dans lesecteur Péri-Moncey. Autre exemple, Tarek Maaoui, dans ce même entretien, explique que« ces dernières semaines […] un couple de personnes âgées de plus de 70 ans […]jetait quotidiennement des bouteilles de verre et des poubelles par la fenêtre. » 54

Jean-Christophe Dechatte, conducteur d’opération chez SCIC Habitat Rhône-Alpes,raconte, pour sa part, comme il est fréquent de retrouver dans les parties communes desimmeubles tags, urine, déchets et vandalisme de tout genre55. La faute reviendrait, selonlui, à un laisser-aller partagé entre service de proximité, bailleurs et habitants.

A côté de ce laisser-aller et des dégradations gratuites commises par les riverains, ilfaut aussi mettre en exergue une autre forme de dégradation de l’habitat qui, elle, n’est pasgratuite. Il n’est pas rare dans les immeubles du secteur de voir de faux plafonds et desboîtes aux lettres arrachés ; les dealers s’en servant pour dissimuler de la drogue.

Les logements font aussi l’objet d’effractions puisque les personnes sans domicile fixeprofitent de nombreux appartements vacants pour y établir des squats, n’hésitant pas mêmeà faire tomber des cloisons pour avoir plus d’espace.

Une autre spécificité du quartier qui pose quelques problèmes car elle amplifie lesentiment d’insécurité des passants est l’existence de rassemblement et de marchéssauvages ; activités présentes historiquement autour de la place Gabriel Péri.

Si ces marchés sauvages ont quelque fois un caractère anecdotique et sympathiquelorsqu’il s’agit du vendeur de menthe au coin de la rue Moncey et de la rue de l’épée ou dela vendeuse de biscuits asiatiques rue Passet ; ils prennent un tout autre caractère et sontbeaucoup moins tolérés, par la population et par les forces de sécurité, lorsqu’il s’agit derecels d’objets volés ou de vente de drogues « douce » ou « dure ».

53 MAAOUI Tarek, responsable agence ARRADEP, Entretien du 28 juin 2004, Annexes.54 Ibid.55 Dechatte Jean-Christophe, Conducteur d’opération, SCIC Habitat Rhône-Alpes, Entretien du 6 juillet 2004, Annexes.

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En effet, on peut tout trouver place du pont : de la menthe, des chaussures mais aussides téléphones volés, des cigarettes de contrebande, du haschisch, de la cocaïne et même,paraît-il, des armes56.

Les délinquants profitent des rassemblements et de la pagaille créée par le marchésauvage pour proposer ouvertement, sans se cacher le moins du monde, leurs produitsvolés et leurs substances illicites. « Il suffit de passer sur cette place pour le constater[…] ces délinquants ne se cachent même plus. Ils accostent les passants pour leurproposer du H, des auto radios, des portables… sans parler des agressions » disaitJean-Louis Touraine premier adjoint au Maire57. De plus, la structure du quartier derrière leCLIP, Place Gabriel Péri, est faite de nombreuses traboules qui permettent aux délinquantséventuels de s’enfuir et d’échapper aux policiers.

Jean-Louis Touraine poursuit : « En plus, c’est un secteur de plus en plus sale carles cantonniers n’acceptent plus de nettoyer sans être accompagnés par la policecar ils sont agressés dès qu’ils tombent sur une cache de haschisch. » 58 En juillet2001, les agents d’entretien des rues du quartier Péri-Moncey s’étaient mis en grève aprèsl’agression de l’un de leurs collègues ; « le syndicat CGT évoque des problèmes connusdepuis longtemps » 59 . et fait référence aux divers rackets et agressions : la troisièmeen deux ans.

Une autre forme de délinquance observable dans le secteur Péri-Moncey est le vol :il se fait à l’arraché dans les rues et sur les places, par effractions dans les voitures ou àl’étalage dans les commerce du quartier.

Le directeur du supermarché Casino qui se situe sur la place Gabriel Péri, côté septièmearrondissement explique qu’il est arrivé dans ce magasin il y a un an et que la spécificitéde la délinquance Place Gabriel Péri est qu’elle vient de partout : il ne s’agit pas forcémentde résidents du quartier. Le magasin a aussi été touché par quelques actes de vandalisme,principalement des vitres cassées et par quelques bagarres. Les vols restent cependant leproblème majeur des supérettes qu’il s’agisse du Casino côté septième arrondissement oule Cocci Market côté troisième arrondissement.

A la sortie du Casino, comme nous le disions un peu plus haut, il n’est pas rare quequelques mendiants fassent la manche. Ceci est aussi inhérent à l’une des caractéristiquedu quartier : le Foyer Notre-Dame des sans abris se situe quelques rues plus loin, rueSébastien Gryphe. Or il s’agit d’un foyer d’hébergement de nuit, la journée les passagersont donc tendance à rester dans le quartier. Cette présence de SDF qui parfois restent toutela journée assis à l’arrêt du tramway, en buvant de l’alcool contribue au développement d’unsentiment d’insécurité chez les passants.

Tous ces éléments ont contribué à créer la réputation de la place Gabriel Péri quidépasse largement les frontière du quartier et qui atteint même les pays outre méditerranée.Dans une interview pour Lyon quartier 60 Christian Philip alors député maire du troisièmearrondissement expliquait que « aujourd’hui, les Lyonnais contournent le quartier pourne pas croiser des dealers, ou se retrouver au milieu d’un marché sauvage ! »

56 Article non signé, « Opération anti-dealers à la Guillotière », Lyon Capital, n° 377, du mardi 22 au mardi 28 mai 2002.57 Dans Freund Valérie, « Place du Pont « Les délinquants vont partir » », Lyon Quartier, Mai 2002, p. 16–19.58 Ibid.59 AR. G., « Les agents d’entretien boycottent le secteur Péri-Moncey », Le Progrès, 25 juillet 2001.60 Vassé Olivié, « Pery-Moncey bientôt sous haute surveillance », Lyon Quartier, Octobre 2002, p. 18–27.

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L’histoire de la Guillotière, la sédimentation de ses populations ont fait que tout lyonnaisa quelque chose à dire sur ce quartier qu’il nomme tantôt Moncey, Guillotière, place du pont,place Gabriel Péri. Nous l’évoquions plus haut, quand ils arrivent aux abords de la place,les passants s’étonnent souvent face à cette foule de gens, face à ces hommes debout, quiparlent fort, dont la culture est différente, étrange voire incomprise et cela aussi fait parfoisnaître en eux un sentiment d’insécurité.

« L’étranger est celui qui n’est pas… »61

L’étranger est étrange : « est « étrange » ce qui est « hors de l’ordinaire,étonnant, singulier » disent les dictionnaires. On retrouve ainsi la portée large duterme d’ « étranger » : celui qui, n’étant pas connu de nous, nous étant extérieur,surprend ou étonne, et souvent inquiète par son « étrangeté »62.

Cette inquiétude va nourrir à la Guillotière les fantasmes insécuritaires qui vont égalements’alimenter des faits réels, d’actes de délinquance et d’incivilité. Dans un article de LyonFigaro intitulé « Un pont entre Lyon et sa Médina » 63 Sandrine Boucher nous rapporteles propos d’une habitante : « En 1998, on nous avait dit que le marché sauvage seraitinterdit. Dès 7 heure du matin, ‘ils’ viennent installer leur cochonneries. Il y a la saleté,le bruit, l’odeur. La police ne vient pas, personne ne leur dit rien. Je ne leur ai jamaisparlé, pour cela il faudrait un médiateur. On n’ose plus inviter les gens chez nous, ona peur de recevoir des coups de couteaux dans le dos. »

Finalement, la situation de ce quartier qui connaît des spécificités propres aux banlieuesalors qu’il se situe en plein centre de Lyon a, de nouveau, attiré l’attention des pouvoirspublics.

L’équation a été posée de la façon suivante : soit le quartier doit être rasé, soit il doitêtre réhabilité. Cette réhabilitation qui débute en 1998 et qui n’est pas encore totalementterminée, trouve sa justification dans la situation difficile d’insécurité, d’abandon voire

d’exclusion que connaît le quartier à la fin du 20ème siècle et au début du 21ème.

Section 3 : La mise à l’agenda de la réhabilitation de 1998A partir de 1996, pour sortir de l’abandon et de l’incertitude dans laquelle il était plongédepuis plusieurs années, le quartier Moncey va connaître trois grandes étapes :

La première étape débute à la fin de l’année 1996 et au début de 1997, la nécessitéde prendre une décision apparaît comme primordiale, cela fait maintenant dix ans que lePrisunic est fermé, le CLIP a été construit au fond de la place Gabriel Péri et joue un peu unrôle de « cache-misère » dissimulant le quartier Moncey derrière qui « pourrit » et reflétantpar ses miroirs les beaux bâtiments qui bordent la place. Le quartier va mal, il est temps defaire quelque chose. Les habitants n’en peuvent plus et « en étaient arrivés à souhaiter lepire pour que le cauchemar de l’incertitude prenne fin » 64 . A propos de la dégradationdu climat social, le comité d’habitants et de commerçants du quartier Péri constituéd’ « associations de fait, indépendantes qui regroupent des personnes désireuses

61 LEQUIN Yves (dir,), « L’étranger de l’image au statut », La mosaïque France, Paris, Flammarion, 1989.62 Ibid., p. 16.63 Boucher Sandrine, « Un pont entre Lyon et sa « Médina » », Lyon Figaro, 19 novembre 2001, p. 2.

64 MOISSONNIER Maurice, BEN ABDESSALAM Fadila, NETCHAOUI OM-HANI, « Prendre en compte l’histoire pourconstruire l’avenir : le cas de la Guillotière, op. cit., p. 57.

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de faire avancer les choses dans le quartier avec une démarche constructive etcitoyenne » et travaillant « en collaboration avec d’autres associations du quartier :l’association des familles immigrées, l’association solidarité Français / immigrés,l’Objectif Quartier Péri, le moulin à parole » 65 parlait en janvier 199866 d’un territoireabandonné, marginalisé et convoité.

Abandonné, il l’est par les bailleurs qui sont lassés de réparer, il l’est également parles pouvoirs publics qui n’assurent plus le nettoyage, l’entretien ou l’éclairage ; enfin, il l’estabandonné aussi par ses habitants qui s’exaspèrent puis désespèrent.

Marginalisée, la rue Moncey est fermée, l’éclairage manque, les commerces sontsinistrés aussi les rues sont désertées.

Convoité, le quartier est réputé pour son économie parallèle et laissé à l’abandon. Ilattire d’autant plus les délinquants d’autres secteurs.

Le comité dénonçait également ce qu’il décrivait comme un accumulation de faitsviolents qui, cumulés et agrémentés d’une « absence » d’intervention de la part des autoritésont fait naître un sentiment de peur, d’insécurité et de rejet du quartier

La deuxième étape débute en 1997, avec la création de la commission Moncey surl’initiative de Raymond Barre, maire de Lyon de 1995 à 2001, elle est présidée par HenriChabert, son vice-président à l’urbanisme. Cette commission « s’est donné commemission de réfléchir sereinement au destin de ce quartier ancien du centre ville,totalement laissé pour compte. » 67 La commission Moncey travaille en 1997 à la miseen place d’un projet respectant quatre principes :

∙ valoriser le quartier et son identité∙ investir fortement et rapidement (pour préparer son avenir et renouveler la dynamique

privée au niveau commercial et résidentiel)∙ donner une place au quartier dans la ville par le développement social, des espaces

publics, l’habitat et les commerces∙ permettre le maintien de la population actuelle : le quartier doit attirer les autres

populations mais les résidents actuels doivent pouvoir s’y maintenir68.

Deux scénarios vont être proposés : destruction ou réhabilitation.Soit on achève l’axe Moncey « ce qui entraîne la destruction de 2 îlots d’immeubles

et réhabilitation du reste du quartier ». 69

Soit on « maintien [….] la forme urbaine actuelle, avec [la] réhabilitation duquartier ». 70

Cette commission va écouter experts, techniciens, acteurs locaux, association,habitants et élus.

65 Lyon Quartier Moncey, http://i.ville.gouv.fr/divbib/doc/gielyon.pdf , p.37.66 DOSSIER La mobilisation du comité d’habitants et de commerçants du quartier Péri pour la réalisation d’un projet urbain

concerté, Les Cahiers Millénaire 3, L’agglomération lyonnaise en perspectives : l’exemple du quartier Moncey, n°14, 1999, p.43.67 MOISSONNIER Maurice, BEN ABDESSALAM Fadila, NETCHAOUI OM-HANI, « Prendre en compte l’histoire pour

construire l’avenir : le cas de la Guillotière,69 Lyon Quartier Moncey, http://i.ville.gouv.fr/divbib/doc/gielyon.pdf , p.35.70 Ibid.

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Les habitants vont être écoutés et cette concertation répondra à deux enjeux : le premierconsiste à s’assurer du maintien de l’identité du quartier tandis que le second vise à instaurerle débat et l’échange d’information avec les habitants.

Finalement, le comité du quartier a clairement choisi le scénario numéro deux ; lepremier entraînant la destruction de 160 logements et amenant à la probable disparition de « l’aspect villageois et communautaire » de la Guillotière.

En février 1998 , Raymond Barre optait pour la voie de la sagesse : préservation duquartier et réhabilitation.

Nous sommes aujourd’hui dans la troisième phase, depuis 1999 le projet est entré danssa phase pré-opérationnelle et les premières grandes actions ont débutées en 2001.

« En 1999, la Communauté Urbaine de Lyon et le ville de Lyon ont décidéd’assumer la réalisation de travaux connexes à l’aménagement des deux lignesde tramway ».71

Grâce à l’arrivée du tramway, la place Gabriel Péri, elle aussi, va pouvoir faire l’objet d’unréaménagement. L’objectif est d’ouvrir le quartier, de faciliter la circulation et d’offrir plus defluidité dans un espace peut-être un peu trop asphyxiant.

Si la décision de réhabilitation a été prise en 1998, le projet depuis cette date n’estpas resté fermé à l’évolution de la situation, aux problèmes rencontrés, au changement demunicipalité .

« Le projet de remodelage du quartier Moncey et Gabriel Péri, entrepris en1998 par Raymond Barre et son vice-président à l’urbanisme Henri Chabert quiavait alors fait le pari de la réhabilitation et non de la destruction, a été repriset revu à la hausse par la nouvelle équipe municipale ».72 « Le quartier, avecsa forte tradition populaire, les habitats bourgeois de l’avenue de Saxe et leshabitats sociaux cachés de part et d’autres, a une âme qui en fait un véritableenjeu d’urbanisme et de tranquillité publique, puisque c’est un site où l’on parlebeaucoup d’insécurité… »73

Voilà les raisons qui ont poussé l’inscription à l’agenda public du projet de réhabilitation duquartier Péri-Moncey. L’interprétation cognitive de la problématique du quartier a amené lespouvoirs publics à opter pour une réhabilitation du quartier doublée de la valorisation deson identité.

71 Projet de délibération au conseil municipal « Convention relative à l’aménagement de la place Gabriel Péri et de ses

abords Lyon 3e Lyon 7e » ,Ville de Lyon, 2004/3962, 28 juin 200472 Benoit Agnès, « De l’air autour du CLIP », Lyon Figaro, 16 mai 2002, p. 4.73 Ibid.

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Partie 2 : La réhabilitation du quartierPéri-Moncey

Chapitre 1 : Un traitement partenarial et contractuel del’insécurité74

Dans les années 1975 - 1980, la France est confrontée à une nouvelle forme d’insécurité :c’est celle que met en évidence le comité présidé par Alain Peyrefitte, garde des sceaux,dans son rapport « Réponses à la violence » 75 .

Les émeutes urbaines se multiplient, les phénomènes de bandes aussi, les incivilitéssont de plus en plus fréquentes et apparaît, dans les sondages d’opinion, le sentimentd’insécurité. La sécurité est alors inscrite comme objectif sur l’agenda politique et elle va fairel’objet d’une politique publique. Préoccupation traditionnellement rattachée aux politiquesde droite, elle va s ‘étendre aux politiques de gauche. Alors que Pierre Joxe est ministrede l’intérieur entre 1984 et 1991, sous François Mitterrand, on assiste à un ralliement de lagauche aux objectifs de sécurité.

C’est à cette époque que, face à un manque d’efficacité des solutions adoptées jusquelà, on commence à réfléchir au traitement de la délinquance par l’urbanisme. Petit à petit estfait le lien entre urbanisme et sécurité. Alain Peyrefitte parlait « d’urbanisme criminogène »et ces termes ont par la suite été repris par Michel Rocard.

A la Guillotière, dans les années 1980, on assiste à une montée su sentimentd’insécurité, il y a le marché sauvage, les rassemblements, la drogue, les actes dedélinquance, les incivilités… Les gens qui n’habitent pas le quartier préfèrent souvent lecontourner. C’est « l’overdose d’insécurité » de la place Gabriel Péri76 dont on parlaitun peu plus haut. On a un quartier qui va mal, qui « pourrit », qui est laissé pourcompte et des solutions vont être cherchées du côté de l’urbanisme avec entre autre laconstruction du CLIP. « Le projet que présente René Gagès comprend un hôtel dehaut standing, des logements de bon standing, une résidence pour personne âgées,des commerces de centre et des bureaux et s’inscrit dans un projet plus vaste, partiedu programme électoral de Michel Noir : créer la « diagonale Moncey », lien entreLyon et Villeurbanne, qui fut le rêve de tous les urbanistes de Lyon depuis le débutdu 19ème siècle. Hélas, le projet ne passe pas le cap de l’enquête publique (11/1989)parce que […] le commissaire enquêteur dit « non » au motif que « le projet manqued’un programme d’ensemble de rénovation du quartier intégrant tous les problèmes :

74 Certains passages de cette deuxième partie sont inspirés de mon mémoire de maîtrise : « Coproduire la sécurité. Vers

un espace défendable à la française », Université Lyon II, sous la direction de Monsieur Claude Journès, 2003.75 PEYREFITTE Alain, Réponses à la violence, op. cit.

76 BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit., p. 65.

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commerces, logements sociaux, équipements sociaux et planning de réalisation. » »77 .

Il n’y a pas de projet global pour le quartier, en 1996 d’ailleurs, - alors que la deuxièmeversion du CLIP a été construite, dans l’urgence certainement, pour mettre fin au terrainvague qui marginalisait d’autant plus le quartier, - les habitants sont désabusés, ils ne saventplus quoi penser, le CLIP a enfermé leur quartier et aucun problème n’est réglé.

L’année 1997, année du colloque de Villepinte est marquée par ce que l’on surnommeun tournant dans le discours sur l’insécurité. La gauche parle de l’insécurité sur un autre ton :« pas de liberté sans sécurité » ; ce sont les mots choisis par Lionel Jospin pour exprimersa volonté de mettre fin à la montée de la délinquance et au sentiment d’insécurité. C’est àcette occasion que Jean-Pierre Chevènement alors Ministre de l’intérieur, donne naissanceau Contrat Local de Sécurité (CLS).

Partant du constat qu’entre 1995 et 1998 la délinquance aurait progressé d’environ14% . En 1998, le maire de Lyon, Raymond Barre et différents partenaires signent un ContratLocal de Sécurité dans lequel le quartier de la Guillotière et de Moncey est classé commeun quartier sensible.

Dans ce chapitre, nous allons nous attacher à présenter le cadre qui donne naissanceau projet de réhabilitation du secteur Péri-Moncey en observant tout d’abord l’évolution despolitiques publiques de sécurité, puis la naissance et l’impact de la politique de la ville, leContrat Local de Sécurité et les réponses qu’il apporte à la problématique spécifique duquartier Moncey et nous terminerons avec la présentation de la prévention situationnelle etde sa Commission Communale de Prévention Situationnelle (CCPS) qui a joué un rôle nonnégligeable dans la réhabilitation du quartier Péri-Moncey.

Section 1 : La montée de l’idéologie sécuritaireA la fin des années 1970, une nouvelle idéologie sécuritaire fait son apparition. Ellecorrespond à l’émergence d’un sentiment d’insécurité, les Français ont peur, ils sontconfrontés à de nouvelles violences, nouvelles par leur caractère et par leur fréquence.L’insécurité devient l’une des préoccupations majeures des français, elle se ressent autravers des enquêtes d’opinion publique et cette préoccupation donnera lieu à de nouvellesorientations de la part des gouvernements. Cette prise de conscience politique apparaîtaprès la publication du rapport Peyrefitte qui fait état de la criminalité grandissante danscertaines villes françaises et qui donnera naissance à la loi « Sécurité et Liberté ». Eneffet, les villes et leurs banlieues sont sujettes à de nouvelles formes de violence telles desémeutes urbaines, des phénomènes de bande – comme on n'en avait jamais connu – etl’arrivée d’une délinquance d’un nouveau type : les incivilités, qui gênent l’ordre social etprovoquent un sentiment d’insécurité qui touche les victimes mais également le reste de lapopulation. Les politiques de lutte contre l’insécurité se multiplient alors et s’imposent dansl’agenda politique français.

Si le quartier Péri-Moncey n’est pas aussi touché que la banlieue par les émeutes, ilest en tous cas le lieu de toutes sortes de recels, de deals et le sentiment d’insécurité yest grandissant.

A. Idéologie sécuritaire et crise économique

77 DELFANTE Charles, 100 ans d’urbanisme à Lyon, op. cit., p. 194.

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Pendant la première guerre mondiale, la France, qui possèdait le second empire colonial,appelle sur son sol métropolitain de nombreux ressortissants de ses colonies pour prendrepart au conflit. Avec l’éclatement de la deuxième guerre mondiale, les Français ferontde nouveau appel aux contingents coloniaux. Les besoins militaires et de main d’œuvreengendre un accueil favorable envers les populations d’Afrique du Nord, d’Afrique Noire etd’Extrême-Orient. Accueil qui sera vu d’un autre œil après la guerre lorsqu’une partie decette population reste en France et que les courants d’immigration s’intensifient. Lyon, quia subi moins de destruction que d’autres villes, développe son industrie métallurgique etchimique, cela va attirer d’autant plus les populations étrangères.

An sortir de la guerre commence en France ce que l’on appellera les 30 glorieuses, c’estl’époque de la reconstruction, il y a du travail pour tous. La France fait appel à l’immigration.Beaucoup de ces immigrés s’installeront à la Guillotière et ils participeront par l’implantationde leurs commerces à dynamiser le quartier. « Dans les années 1960-70, la place estdevenue un haut-lieu de l’approvisionnement de la communauté maghrébine, cellede France comme celle des pays du Maghreb. » 78

A la fin des 30 Glorieuses, au début des années 1970, avec les chocspétroliers, la situation économique et sociale française s’alourdit. Le chômage augmenteconsidérablement et les immigrés et personnes d’origines immigrées seront souvent lesplus touchés.

Parallèlement à cette crise économique, les enfants du baby-boom nés au début desannées 1950 ont 25 ans et entrent sur le marché du travail ce qui gonfle encore plusles chiffres du chômage. Ces 30 Glorieuses ont engendré la naissance d’une société deconsommation. Dans les années 70, des mouvements de population se soulèvent contrecette société de consommation et contre la montée du capitalisme. Le chômage, l’exclusionqu’il provoque parfois ainsi que ce sentiment de révolte vont se traduire dans la sociétéfrançaise par une hausse de la délinquance et de l’insécurité.

A Lyon, comme ailleurs, le climat social s’alourdit, le chômage augmente, le pouvoird’achat diminue. Le gouvernement a de plus en plus de mal à faire face à cette situationpréoccupante. L’insécurité devient un véritable cheval de bataille électorale. C’est l’époquedes émeutes urbaines, des phénomènes de bandes, ce sont les fameux étés chauds desannées 80. Des solutions vont être cherchées dans la politique de la ville avec la créationd’instances nationales et locales de prévention de la délinquance, avec un certain nombred’initiatives, visant l’insertion économique et sociale des jeunes par le biais de la formationet de l’enseignement, avec la commission nationale de développement social des quartiers(CNDSQ) qui a pour objectif de résoudre les problèmes liés à l’habitat social ou encore avecle dispositif « banlieue 89 » qui repense complètement les banlieues.

Les solutions à ce phénomène national ont d’abord été pensées aux niveauxéconomique, social, culturel, urbanistique mais face à une augmentation de l’insécurité quine semblait pas cesser, le gouvernement annonce qu’il va falloir faire preuve de fermeté.

A la Guillotière, les émeutes urbaines ne sont pas aussi fréquentes qu’en banlieue maisil y règne un fort sentiment d’insécurité. La délinquance, la drogue, la visibilité des immigréset la montée du racisme vont donner une mauvaise image au quartier. La Guillotière estégalement un des derniers quartiers de Lyon à ne pas avoir connu de réhabilitation. Lesanciens quartiers populaires de la Croix Rousse et de Saint Jean ont vu leurs loyersaugmenter et avec cela leur population s’embourgeoiser, les classes les moins aisées sesont retrouvées à la Guillotière où les loyers sont restés bas. C’est donc à un quartier

78 BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit., p. 58.

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populaire, insalubre, à une zone et à une population exclue, laissée pour compte que l’on aaffaire.Des solutions seront proposées en terme de rénovation urbanistique.

B. Le tournant de VillepinteAvec le rapport de Peyrefitte, la question de la sécurité est passée de question de techniquepolicière à enjeu politique. Depuis les années 80 et la création des Conseils Communaux dePrévention de la Délinquance (CCPD), l’idée d’associer des partenaires élus, administratifset associatifs sur une base territoriale a souvent été reconduite. En 1995, la loi d’orientationet de programmation pour la sécurité (LOPS)79 tend à renforcer la présence policière surle terrain.

« A la fin des années 90, la prévention n’apparaît plus comme le seul axe de luttecontre l’insécurité à privilégier. La sécurité semble ne pouvoir résulter que d’unedémarche globale appuyée sur l’idée de partenariat, notamment entre les Maireset l’Etat et sur l’idée de proximité. C’est alors que l’on commence à parler de « co-production de sécurité » »80 .

C’est à l’occasion du colloque de Villepinte, les 24 et 25 octobre 1997, intitulé « Des villessûres pour des citoyens libres » que le « grand tournant » marquant entre autre le ralliementde la gauche à l’idéologie sécuritaire a eu lieu. Le sujet avait déjà été évoqué par LionelJospin, Premier ministre, lors de son discours d’investiture où il souligne à quel point lasécurité est un « devoir primordial de l’Etat » 81 Le gouvernement choisit de traiterl’insécurité au niveau local bien que l’origine des problèmes soit plutôt mondiale.

« On va focaliser l’attention sur le local, sur l’urbain, d’où le nom de « violencesurbaines » pour qualifier ces problèmes et le nom de « politique de la ville »donné à la panoplie des solutions […] on dit qu’en changeant la ville ou quelquechose dans la ville, on va changer l’état d’esprit des gens qui s’y révoltent. »82

Section 2 : La politique de la villeLes politiques de sécurité comme la politique de la ville évoluent au gré de l’évolution del’insécurité et des violences urbaines. Par exemple, la mise en place du comité Peyrefittecorrespond à une demande de solutions pour palier à « l’été chaud » de 1976. Le rapportd’Hubert Dudebout, Gilbert Bonnemaison et Bertrand Schwartz répond aux émeutes desMinguettes au début des années 1980. « Les violences urbaines de Vaulx en Velin audébut des années 1990 ou les échauffourées de la fin 1997 génèrent successivementla création puis la résurrection du ministère de la ville. » 83

79 Loi n°95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité, NOR : INTX9400063L.80 Historique du CLS www.cls.interieur.gouv.fr/_presentation/historique.htm81 JOSPIN Lionel, Discours d’investiture du 19 juin 1997, http://psbb.online.fr/nat/investiture.html82 GARNIER Jean-Pierre dans une interview de Cdric, La politique de la ville ou la gestion de la misère, Le nouvel ordre

local, www.ecn.org/nopasaran/mars01/garnier.html83 DELHOME Danielle, LANDAUER Paul, « La sécurisation des grands ensembles : Incertitudes et contradictions des

opérations de requalification » dansIHESI, Les cahiers de la sécurité intérieure, n°43, 1er trimestre 2001, p. 51.

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La politique de la ville est une politique contractuelle, elle engage sur la base d’uncontrat, le contrat de ville, l’Etat et les collectivités locales, région, département, ville,communauté urbaine, CAFAL, ou le fonds d’action sociale pour les plus importantes.84

Sur la base de ce contrat, les gens se mettent d’accord et s’engagent à mettre desmoyens humains, matériels et financiers à disposition des quartiers dits prioritaires surla base de critère socio-économiques, sur l’état du logement, sur les revenus de seshabitants…

Les quartiers concernés par la politique de la ville à Lyon sont au nombre de 13. Lesecteur Péri-Moncey qui se situe sur deux arrondissements à la fois, le troisième et leseptième est représenté par deux équipes et correspond à deux projets. Chaque quartierfait l’objet d’un diagnostique qui donne naissance à un projet de quartier avec ses axesspécifiques et ses objectifs propres car la politique de la ville est une politique qui se veutau plus près des besoins de ces quartiers.

Les contrats de ville sont signés pour 6 ans, leur objectif est de « mobiliser auniveau des communes ou groupement de villes, des moyens pour réaliser desopérations d’animation des quartiers, de rénovation de l’habitat et d’amélioration del’environnement urbain. » 85

Par la circulaire du 2 novembre 1993, le contrat de ville devient l’acte contractuel de lapolitique de la ville. Son objectif est de lutter contre la ségrégation urbaine et l’exclusion. Uncertain nombre d’actions sont alors préconisées auprès des acteurs sociaux pour prévenirla délinquance, préoccupation majeure des gouvernements successifs.

La ville de Lyon fait l’objet de l’un de ces contrats, le dernier en date a été signé en2000 et prendra fin en 2006. Le projet pour la Guillotière est, côté septième : d’ « affirmerl’existence d’un quartier mixte en centre ville » et côté troisième de « mettre en valeurla reconnaissance de l’existence d’un quartier populaire et multiculturel en centreville ». 86

Selon Nicolas Rochette, agent de développement au Développement Social Urbain(DSU) du troisième, instance de la politique de la ville du troisième87, l’objectif est detravailler sur la réhabilitation, la gestion urbaine de proximité, l’entretien des allées, leréaménagement de l’espace public, la sécurisation des allées d’immeuble, la fermeture deslocaux poubelles, la réhabilitation des bâtiments, l’insertion professionnelle, les activitésenfance-jeunesse, la prévention, la santé… L’un des principes du contrat de ville est detravailler le projet social en lien avec le projet urbain.

« La politique de la ville est une politique publique et partenariale de« discrimination positive » initiée dans les années 1980. »88

L’objectif est de réduire les inégalités et les exclusions entre les secteurs et les habitantsd’une même ville. Les indicateurs sociaux et les caractéristiques urbanistiques du secteur

84 BADONNEL Stéphane, Agent de développement Contrat de Ville du 7ème arrondissement, entretien du 17 mai 2004,Annexes.

85 DIEU François, Politiques publiques de sécurité, op. cit., p.98.86 Service Développement Territorial, La politique de la ville à Lyon », 2000-2006, p. 8.87 ROCHETTE Nicolas, Agent de développement Contrat de Ville du 3ème arrondissement, entretien du 5 juillet 2004, non

enregistré.88 Service Développement Territorial, La politique de la ville à Lyon », op. cit., p. 2.

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Péri-Moncey expriment la souffrance de ce quartier qui connaît une exclusion aux niveauxsocial et urbain. La politique de la ville doit renforcer les actions habituellement mises enœuvre dans la ville par des actions de solidarité adaptées à ces zones sensibles.

Pour réinsérer les quartiers et en faire des espaces de vie agréables, ces actions visenttoutes les facettes de l’action publique : économique, sociale, urbaine…

L’un des points forts de la politique de la ville est qu’elle associe les habitants auxprojets. A la Guillotière, les diverses associations présentent dans le quartier ont étéécoutées et en sens inverse les habitants et les associations sont informés régulièrementde l’avancée des projets.

Un autre point fort réside dans un partenariat, « l’équipe s’appuie sur le réseau despartenaires locaux en capacité de porter des actions (ou d’y participer) contribuantau projet global du quartier. » 89 La cohérence du projet global de quartier est assuréepar l’équipe de maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (EMOUS). Le « co-mandatement »permet une plus grande mobilisation et donc une meilleure adaptation de l’action publiqueaux besoins des quartiers. Enfin, les équipes opérationnelles sont présentes sur le terrain etassurent une présence et une veille sociale qui les confortent dans leur rôle de relais social.

Parmi les actions mises en œuvre, nous pouvons en citer quelques-unes rapidementcar nous y reviendrons plus tard, qui s’appliquent au quartier Péri-Moncey. Par le biais del’Association Service Social Familial Migrants (ASSFAM) des ateliers permettent d’ « initier »les habitants à la vie en France pour leur faciliter l’insertion professionnelle.

Le FISAC (Fonds d’Intervention pour la Sauvegarde de l’Artisanat et du Commerce)subventionne la remise en état des locaux commerciaux dans le quartier.

L’association NOAO développe une action sur la mémoire de la Guillotière.Des OPAH (opérations publiques d’amélioration de l’habitat) sont également réalisées

dans le secteur offrant des subventions pour la rénovation des immeubles.La place Moncey-Saint Jacques a été aménagée, un centre social est pensé avec ses

futurs usagers : voilà le type d’actions qui découlent de la politique de la ville.La politique de la ville travaille également avec le contrat local de sécurité, par exemple

dans sa mission de contribution à la tranquillité des habitants. Face à l’insécurité et ausentiment d’insécurité, l’articulation entre les actions de droit commun et celles relevant dela politique de la ville est essentielle. Cette dernière s’appuie sur le conseil local de sécuritéet de prévention de la délinquance (CLSPD) pour prévenir la délinquance. « C’est un outilpour conduire une politique globale de sécurité publique, de la prévention jusqu’à lasanction. » 90

« A un autre niveau, le comité de suivi du contrat local de sécurité (CLS)constitue l’instance restreinte de CLSPD et permet de pendre en compte, defaçon régulière, les réalités communales et de mobiliser les services de l’Etatconcernés. »91

La direction de prévention-sécurité de la ville de Lyon coordonne la mise en œuvre du CLSet du volet prévention-sécurité du contrat de ville.

89 Ibid., p. 4.90 Ibid., p. 18.

91 Ibid.

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Section 3 : Le Contrat Local de SécuritéLes contrats locaux de sécurité naissent de la circulaire signée le 28 octobre 199792 relativeà la mise en oeuvre des CLS. Dans cette circulaire, il est mis en exergue que face à uneinsécurité grandissante, il est du devoir de l’Etat d’agir et que la sécurité n’est pas sous laseule responsabilité des forces de l’ordre, mais, qu’elle est le résultat de nombreux facteursdont le traitement relève de la compétence des acteurs présents au niveau des collectivitésterritoriales. De ce fait, un véritable partenariat est nécessaire et la commune semble êtrele cadre le plus adapté à la lutte contre l’insécurité.

Ainsi, « les CLS constituent l’outil principal d’une politique de sécuritéprivilégiant l’éducation et la citoyenneté comme axe de prévention, la proximitécomme objectif de redéploiement de la police et de la gendarmerie et l’efficacitépar un renforcement de l’action conjointe de l’ensemble des services de l’Etat. »93

Les contrats locaux de sécurité sont signés par le préfet, le procureur de la république,le recteur d’Académie et le Maire. Leurs territoires d’action peuvent être le quartier, lacommune, l’arrondissement ou l’agglomération. Le contrat concerne les lieux sensibles oùla délinquance est forte, il convient d’établir un diagnostic local de sécurité, préalablementà la signature du contrat local de sécurité, qui servira de référence aux futures actionsmises en œuvre. La sécurité, devoir de l’Etat, nécessite la participation des collectivitésterritoriales et des établissements publics de coopération inter-communale dans le cadredes contrats locaux de sécurité. Cette sollicitation « des acteurs locaux de la part de l’Etatest énoncée dans la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne. » 94

Méthodologiquement parlant, chaque action développée au niveau local par le contratlocal de sécurité fait l’objet d’une fiche action. Le contrat local de sécurité est divisé dela façon suivante : on trouve d’abord 25 fiches actions thématiques initiales, 4 fichesactions territoriales puis le calendrier de réalisation. On retrouve ensuite 12 fiches intituléesavenants contrat local de sécurité qui ont été ajoutées en septembre 2000, suivies de 12fiches regroupées sous le titre avenants « habitat » ajoutées en janvier 2003, une ficheavenant « vie nocturne » ajoutée en janvier 2003 et 5 fiches avenant « sécurité routière »ajoutées en juillet 2003.

Sur chaque fiche action thématique, on retrouve une présentation et un découpagesimilaire permettant de mettre en relief les informations concernant le référent de l’action,les cibles visées par l’action, la méthode, les moyens et le calendrier de l’action.

Depuis le 27 novembre 1998, la commune de Lyon a signé son contrat local de sécurité.Dès sa signature, ont été mis en évidence les principaux objectifs, les principaux partenaireset la méthodologie choisie. Les objectifs du contrat local de sécurité de la ville de Lyon95

forment deux ensembles. Il s’agit, en premier lieu de « réduire la délinquance dans leszones de forte activité dans différents quartiers » et il s’agit en second lieu de « renforcerla cohésion sociale, diminuer le sentiment d’insécurité et réhabiliter le rôle des institutionsdans les quartiers sensibles de la ville. »

92 Circulaire du 28 octobre 1997 relative à la mise en œuvre des Contrats Locaux de Sécurité, JO n°253 du 30 octobre 1997, NOR :INTK9700174C.93 Ibid.94 Loi n°2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, NOR : INTX0100032L.

95 Contrat Local de Sécurité de la ville de Lyon, 27 novembre 1998 (Annexes)

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Selon Jean-Pierre Vialay96- responsable de la mission de coordination des actions deprévention et de sécurité, mission qui englobe le contrat local de sécurité signé en 1998,dont il est chef de projet et le Conseil Local de Sécurité et de Prévention de la Délinquance-la signature du contrat local de sécurité à Lyon correspond à une augmentation de ladélinquance et surtout à l’arrivée d’une délinquance d’importation97 dans ce qu’il appellel’hyper centre de Lyon dans lequel le quartier Moncey est inclus.

Cette hausse, 14% depuis 1995,98 doublée d’un fort sentiment d’insécurité de lapopulation a généré la mise en œuvre d’un partenariat – au travers du contrat local desécurité- entre le préfet, le Maire de Lyon, la justice, l’éducation nationale, la police et lesmembres du groupe de pilotage central.

Un certain nombre d’actions thématiques répertoriées en fiche vont alors être mises enœuvre autour de 4 axes de travail :

Axe n°1 : « Renforcer les réponses policière et judiciaire, prévoir l’évolution de lasituation en temps réel, et proposer des procédures rapides. »

Axe n°2 : « actions de renforcement de l'efficacité, la mise en réseau et la sécuritédes professionnels opérant dans les quartiers sensibles, par groupe de dix personnes, lesrecruter, les motiver, et les former à l'accueil de différents publics. »

Axe n°3 : « augmenter le nombre des agents de médiation sociale, complémentaritépolice nationale /police de proximité, dans les cités, les milieux scolaires, les commerceset lieux publics. »

Axe n°4 : « sécurisation des espaces et équipements publics, par la mise en place d'ungroupe de travail " prévention situationnelle ", d'un système de vidéo surveillance, caméras,amélioration de la qualité de l'éclairage. »

Lors de la signature en 1998, le contrat local de sécurité de la ville de Lyon contenait25 fiches, il en compte actuellement 55.

Le quartier de la Guillotière et de Moncey fait partie des quartiers classés sensiblesdans le contrat local de sécurité suite au diagnostic local de sécurité du fait de son habitatdégradé, de sa population aux conditions sociales modestes et dont l’origine est pour lamajorité étrangère.

Cette zone est principalement concernée par l’objectif n°2 : renforcer la cohésionsociale, diminuer le sentiment d’insécurité et réhabiliter le rôle des institutions. Sur le secteurMoncey, le contrat local de sécurité est intervenu principalement – mise à part dans lesréunions qui ont lieu tous les mois – au niveau des cellules de veille qui sont réunies de façonrégulière pour évoquer les problèmes du quartier, au niveau du réaménagement du quartier,de la mise en place de la vidéosurveillance, de la création d’un point d’accès au droit…

Les réunions du contrat local de sécurité rassemblement, en général, le dispositifpropreté de Moncey, le chef de projet contrat de ville, un bailleur ou deux, des représentantsdu commissariat, la police municipale, l’adjoint à la sécurité de la mairie du troisièmearrondissement et donne la possibilité d’inviter toute personne ayant la capacité d’apporterdes éléments permettant de répondre aux objectifs de sécurisation et de réhabilitation duquartier.

96 VIALAY Jean-Pierre, Chef de Service CLS, entretien du 5 août 2003, Annexes.97 En utilisant les termes « délinquance d’importation, Monsieur Vialay fait référence aux délinquants qui adoptent des

comportements délictueux dans une zone géographique autre que la leur.98 D. M-A., « Lyon, première grande ville à signer un contrat local de sécurité », Les Echos, 30 novembre 1998.

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Le contrat local de sécurité et la loi d’orientation et de programmation sur lasécurité de 1995 donneront naissance à la mise en place d’un groupe de travail« prévention situationnelle » à Lyon et sera créée une commission communale de préventionsituationnelle en 2002, la ville choisissant d’anticiper la parution du décret d’application.

Dans cette dernière section, nous étudierons ce qu’est la prévention situationnelle carelle a joué un rôle important dans la réhabilitation du quartier.

Section 4 : La prévention situationnelleLa prévention situationnelle trouve ses origines dans les pays anglo-saxons, elle s’y

développe au cours de la seconde moitié du 20ème siècle et est liée à la mise en évidencedu caractère, si ce n’est « criminogène », en tout cas propice à la délinquance, de certainessituations et de certains environnements.

La prévention situationnelle est une méthode de prévention contre les actes dedélinquance qui se base sur deux théories.

La première est la théorie de l’activité routinière, elle est développée dans les années1950 par Larry Cohen et Marcus Felson.99 La « routine activity approach » a pour objetde montrer qu’en réunissant, dans un contexte spatio-temporel particulier, un délinquant« probable », une cible « appropriée » et l’absence de « dissuasion suffisante », l’opportunitéde commettre un délit augmente.

La seconde théorie est celle du choix rationnel, elle-même étant le résultat de l’évolutiondes courants de criminologie. Depuis l’époque où le criminel était considéré comme possédépar le diable, plusieurs analyses se sont succédées ou ont co-existées,100 les causes de lacriminalité étant successivement recherchées au niveau psychologique, dans les difficultésd’intégration, dans un conflit de culture, dans une réaction à l’arbitraire des sanctions ouencore – et c’est la théorie qui nous intéresse – dans l’acte et le choix rationnel.

La théorie du choix rationnel, développée dans les années 1980 montre comment ledélinquant agirait en fonction de son environnement.

« Le délinquant est un être humain avant d’être un délinquant. Pour atteindre sesfins, il recherche le moyen le plus commode ; il s’adapte aux circonstances ; il selivre à un rudimentaire calcul coût/bénéfice. Il n’est pas inéluctablement destiné àperpétrer son crime ; il s’y décide plutôt en fonction de sa lecture de la situationet des solutions qui s’offrent à lui. Si, à cause d’une mesure situationnelle,le crime projeté présente trop d’inconvénients ou pas assez d’avantages, ilenvisagera d’autres possibilités. »101

Ainsi, si l’on part du principe que le délinquant n’est atteint « d’aucun déterminismegénétique, social, culturel, racial ou psychologique mais qu’il agit en fonction d’uneanalyse purement stratégique de la situation » 102 , on comprendra aisément qu’enagissant sur les situations, on puisse empêcher le passage à l’acte. Cette vision des choses

99 COHEN Larry, FELSON Marcus, Social change and crime, rate trends: A routine activity approach, American SociologicalReview, n°44, 1979, p. 588-608. Cité par SOULLEZ Christophe, Lexique de la sécurité, op. cit., p. 192.

100 SOULLEZ Christophe, Lexique de la sécurité, op. cit., p. 52-56.101 CUSSON Maurice, Prévenir la délinquance Les méthodes efficaces, Paris, PUF, 2002, p. 48102 SOULLEZ Christophe, Lexique de la sécurité, op. cit., p. 191.

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est à la base des théories de prévention de la délinquance par action sur les situations. Surcette axiomatique de base, des chercheurs – d’abord Anglo-saxons – se sont intéressés àun nouveau type de prévention : la prévention sur les situations ou prévention situationnelle.

A. Le cadre institutionnelS’il a été choisi d’utiliser cette technique à Lyon, alors qu’elle n’est encore qu’au staded’expérimentation dans l’hexagone, qu’aucun texte ne dicte véritablement les actionsinhérentes à son application, c’est dans le souci de ne pas « se priver d’outils qui existentquelque part. » 103 Aussi la prévention situationnelle fait l’objet d’une fiche action dansle contrat local de sécurité.

Au travers de cette fiche intitulée « mise en place d’un groupe de travail préventionsituationnelle », un certain nombre d’acteurs et de services sont mobilisés : servicesmunicipaux, police, pompiers, urbanistes, COURLY, bailleurs… Les objectifs de cette ficheaction sont de « réduire les sites (équipements ou espaces publics) propices audéveloppement d’actes de délinquance et d’incivilités ou du sentiment d’insécurité »104

Ainsi que de « conseiller les services municipaux lors de la réalisation de projetsurbains et paysagers. » 105

Le contrat local de sécurité n’est pas le cadre unique de la mise en œuvre de cettetechnique d’origine anglo-saxonne. La loi d’orientation et de programmation relative à lasécurité du 21 janvier 1995 y fait référence dans son article 11.106 Cet article ne parlepas explicitement de la prévention situationnelle mais il demande aux maîtres d’ouvraged’étudier leurs projets dans leurs contextes futurs de façon à savoir, préalablement à laconstruction, dès le permis de construire, s’ils ne sont pas générateurs de risques et s’ilsn’offrent pas d’opportunité de passage à l’acte pour les délinquants éventuels. Au niveaueuropéen, également, des recommandations ont été formulées dès 1987 par le comité desministres.107

Mais faute, entre autre, de cadre réglementaire, la prévention situationnelle, en France,reste au stade de l’expérimentation.

B. Lyon, ville pionnièreLa ville de Lyon est considérée comme pionnière en ce qui concerne l’application de laprévention situationnelle pour lutter contre l’insécurité en particulier depuis la création dela Commission Communale de Prévention Situationnelle (CCPS). Lyon est la premièrecommune de France à avoir donné une traduction politique à cette nouvelle forme deprévention. La mise en application de la prévention situationnelle à Lyon se fait par le biaisde 4 techniques de prévention dont découlent 8 principes :

Les techniques de la prévention situationnelle :

103 LE CALLOC ‘H Michel, Ingénieur CLS entretien du 30 juillet 2003, Annexes.104 Contrat Local de Sécurité de la ville de Lyon, 27 novembre 1998 (Annexes)105 -73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité, NOR : INTX9400063L.106 Loi n°95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité, NOR : INTX9400063L.107 Recommandation n°R(87)19 du comité des ministres aux Etats membres sur l’organisation de la prévention de la criminalité,

adoptée le 17 septembre 1987.

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∙ Augmenter l’effort par la protection des cibles, le contrôle des accès, le contrôle des« facilitateurs » et, en décourageant le délinquant.

∙ Augmenter les risques en contrôlant les entrées et sorties et en utilisant lasurveillance, qu’elle soit formelle, naturelle ou par les futurs employés.

∙ Réduire les gains en éliminant les cibles, en identifiant les biens pour éviter larevente, en réduisant la tentation ou en supprimant les bénéfices.

∙ Empêcher la justification, cet ensemble de techniques, « trouve sa source dans lejugement moral porté par le délinquant sur ces propres actes. »108 Il s’agit d’inciter aurespect de la loi en réduisant la place des « bonnes excuses » pour passer à l’acte,en donnant mauvaise conscience, en accentuant la sanction morale, en contrôlantles « désinhibateurs » (alcool, drogue…) qui rendent le passage à l’acte moinsproblématique vis à vis de la conscience et de la morale. L’affichage du règlement,par exemple, empêche le délinquant profitant d’une situation ambiguë de commettreun acte délictueux.

Ces quatre types de mesures sont mis en application par le biais de huit principes.Les principes de base :

∙ La visibilité qui permet d’éviter les coins cachés et les lieux pièges.∙ La surveillance naturelle ou co-surveillance, quand la fréquentation de l’espace

permet une surveillance par les usagers eux-même.∙ La socialisation, les activités, la socialisation encourage l’émergence d’un espace

favorisant les activités qui est vecteur de sécurité.∙ La territorialité, le sentiment d’appartenance incite au respect des lieux et à l’auto

surveillance.∙ La lisibilité, des lieux bien délimités et dont l’usage est bien défini sont moins soumis

aux conflits.∙ Le contrôle naturel des accès dissuade l’accès aux cibles.∙ L’aménagement du paysage, l’éclairage, le mobilier urbain, la végétalisation, la

signalétique sont vecteurs de sécurité.∙ Le garant de l’espace doit réagir rapidement, un espace dégradé incite à encore plus

de dégradation.

C. La Commission Communale de Prévention Situationnelle

Le texte à l’origine de sa création 109 précise dans son article premier qu’elle sera « chargéede donner un avis sur les mesures prévues par les constructeurs et aménageurs dansleurs projets pour concourir à la protection des personnes et des biens et faciliterl’intervention des services de police et de secours. » 110

La CCPS donne son avis après avoir examiné l’étude de sécurité publique que lemaître d’ouvrage aura préalablement effectué, qui permet d’apprécier les conséquenceset les risques entraînés par le projet en terme de délinquance. Les points forts de cettecommission sont le partenariat, le débat avec les maîtres d’ouvrages et la participation desfuturs gestionnaires.

109 Direction de la sécurité et de la prévention – Cellule de coordination du Contrat Local de Sécurité, Commission ConsultativeCommunale de Prévention Situationnelle de la ville de Lyon, Bulletin Municipal Officiel de la ville de Lyon, 31 mars 2002.110 Ibid.

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Du fait de la diversité des origines professionnelles des membres de la commissioncommunale de prévention situationnelle, elle peut, grâce à leurs expériences, apporter desconseils nécessaires à la réalisation d’un aménagement sécuritaire.

Chaque mois des maîtres d’ouvrages présentent leurs projets et leurs étudespréalables de sécurité publique, alors la commission contrôle l’adéquation du projet àson environnement en terme de sécurité. Elle peut conseiller le maître d’ouvrage pourd’éventuelles modifications ou valider le projet. La commission n’a qu’un rôle consultatif, iln’y a ni sanction, ni récompense pour les bons et les mauvais élèves. Le réaménagementde la place Gabriel Péri, entre autre, a fait l’objet de l’un de ces passages en CCPS.

Petit à petit, au gré des expériences rencontrées, s’est dégagé un véritable moded’emploi qui a donné naissance à un guide méthodologique à l’usage des chefs de projetqui sera bientôt diffusé.111

Nous savons maintenant qu’un traitement contractuel, partenarial et local de l’insécuritéet du sentiment d’insécurité est mis en œuvre dans le quartier Péri-Moncey. Nous allons,à présent, tenter de décrire les actions mises en œuvre par ces différents partenairespour réhabiliter et sécuriser ce secteur longtemps laissé de côté. Il ne s’agit pas là d’unedescription exhaustive mais simplement d’une présentation de certaines actions menéesdans le secteur de façon à pouvoir saisir au mieux les objectifs pour ce quartier, où l’histoireoccupe une place primordiale, et de manière à en mesurer la portée.

Chapitre 2 : Vers une réhabilitation du quartier Péri-Moncey

La réhabilitation du quartier répond principalement à deux objectifs : le sécuriser et y réduirele sentiment d’insécurité.

Le chef de projet du contrat local de sécurité – Jean-Pierre Vialay – précise quedifférentes actions sont mises en œuvre dans ce sens. Il s’agit selon lui d’agir dans desdomaines aussi nombreux que variés tel que la lutte contre le stationnement sauvage,l’enlèvement des ordures, l’éclairage, l’organisation d’opération de voie publique avec lapolice nationale, la mise en place de la vidéosurveillance ou encore le réaménagement desespaces afin d’en faire des espaces de vie agréables. Nous étudierons la réhabilitation dusite en présentant trois grands ensembles d’actions. Tout d’abord, le réaménagement desespaces publics qui vise un objectif double : la réappropriation et la sécurisation du quartier.Nous observerons ensuite la réhabilitation et la sécurisation du site au travers des actionsmenées sur l’habitat. Nous verrons enfin brièvement comment partenaires privés et publicsse rencontrent pour sécuriser et par la même maintenir les supermarchés du quartier.

Encore une fois, il ne s’agit pas ici de décrire exhaustivement toutes les actions misesen œuvre par la politique de la ville ou par le contrat local de sécurité mais de présenter unepanoplie de réponses apportées par le travail en commun de plusieurs partenaires élus,administratifs, associatifs ou privés dans le but de chercher à vérifier la réalité de notrehypothèse.

111 Direction de la Sécurité et de la Prévention, Cellule de coordination du Contrat Local de Sécurité, Prise en compte de laprévention situationnelle, Guide à l’usage des chefs de projets de la ville de Lyon.

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Section 1 : La réhabilitation des espaces : appropriation etsécurisation

Rappelons qu’en 1997 la question avait été posée de la façon suivante : deux solutionss’offraient au quartier Moncey

∙ achèvement de l’axe Moncey avec destruction de deux îlots d’immeubles etréhabilitation du reste du quartier, ou

∙ maintien de la forme urbaine actuelle avec réhabilitation du quartier.

C’est ce dernier scénario qui a été retenu en 1998, la réhabilitation du quartier peut débuter.

A. Le réaménagement des espacesLe projet ainsi choisi répond à quatre principes jugés nécessaires à son adéquation à laproblématique du site :

Le quartier dispose d’un patrimoine architectural, humain, social, culturel et commercialet il s’agit de le mettre en valeur.

Il convient d’agir rapidement en engageant un plan global d’actions pour re dynamiserle quartier.

Le quartier doit s’ouvrir sur les autres et doit acquérir une place dans la ville.Enfin le secteur doit être rendu attractif pour les populations extérieures tout en

permettant aux populations actuelles d’y rester

1. L’aménagement de la place BahadourianLa réhabilitation et la requalification du quartier est passé par la « réalisation d’un vasteespace public équivalent en surface à celui de la place des Terreaux »112 environ 9000m².L’aménagement de cet espace devrait permettre une diversification des usages (repos,rencontre, discussion, jeux, sport…) et devrait offrir sécurité et confort à la sortie de l’écoleprimaire Paul Painlevé qui se situe sur la place.

Dans ce quartier ancien du troisième arrondissement, c’est la destruction de deux îlotsqui a dégagé cet espace. En novembre 2000, les travaux ont commencé selon les plans del’architecte Eva Samuel et du paysagiste Karin Helms.

Afin de répondre à l’usage qu’en fait la population d’immigrés qui l’investissent chaquejour, et qui l’utilisent comme un lieu de rassemblement et de causerie, la place a étéaménagée comme un salon à ciel ouvert. L’objectif était de faire de cette espace unlieu d’usage. Aujourd’hui, la place est construite à l’image d’un salon et sa lisibilité dansl’espace sera bientôt d’autant plus simple qu’elle sera encadrée sur trois côtés par un doublealignement de grands arbres : des tilleuls. La nouvelle place, ainsi construite, propose unterritoire différencié pour chaque type d’usager.

Des pièces à palabres ont été conçues « soit des petits espaces formés de bancsen béton en arc de cercle »113. Ces blocs de béton semblent avoir été jetés ça et là maisils sont, en réalité, implantés de manière à faciliter la discussion et de façon à permettreindifféremment de s’asseoir ou de s’appuyer sur leurs dossiers. Ce coin à palabres, comme

112 Texte de l’exposition présentant les grandes orientations du projet de requalification du quartier décidé en 1998, « Moncey, pourun aménagement adapté », op. cit., p. 16

113 Benoit Agnès, « De l’air autour du CLIP », op. cit.

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il décrit sur les plans de la place, est ombragé par des petits arbres, des Cercis, mis enscène la nuit par un éclairage au sol.

Un espace de jeux a également été prévu pour les enfants et a permis de donnerune place aux femmes dans ce même lieu. L’aire de jeux est comme encastrée dans desparterres plantés de végétation rampante qui en préserve la tranquillité.

Un terrain de sport, encadré par des grillages pour éviter que les ballons n’en sortent, aété construit sur l’un des bords de la place. A ses côtés l’on trouve un boulodrome et un peuplus loin, près du square pour les petits, des tables de ping pong en béton (cette matièrerésistant aux dégradations éventuelles). Des toilettes publiques et gratuites ont égalementété installées près du square.

« Les maîtres d’œuvre ont ici proposé un lieu adapté aux modes de vie méditerranéens,entérinant la présence de populations d’Afrique du nord dans le quartier. »114. Cependant,le réaménagement de la place propose un espace mixte respectant les traditionsméditerranéennes et lyonnaises (boulodrome).

Conçue comme un salon minéral, la place propose des territoires bien différenciés pourchaque type d’usager et chaque type d’activité.

« Les façades délimitant la place étant très différentes, de type Haussmanien d’un côté,plus simple de l’autre, l’unité de la place naît de son sol en pierre calcaire claire. »115

L’objectif a été pour de cette place de requalifier un espace qui était devenu le lieu deparking sauvage et de l’attribuer aux personnes pour lesquelles il a été pensé. La lisibilité del’espace ainsi obtenue puisque les différentes zones sont bien délimitées, devrait garantirle maintien de l’utilisation de cet espace par ses usagers légitimes.

Contrairement à la place Guichard dont la taille est à peu près équivalente, parfaiteréussite quant à sa non-utilisation, la place Bahadourian devrait être un lieu où l’on s’attarde,ses fonctions semblent coller aux usages repérés.116

« La place Bahadourian, ça a amené un peu de vie dans le quartier ; c’est bien parrapport aux parents qui amènent leurs enfants au parc […], ça a mis un peu delumière et de vie dans le quartier parce qu’avant le quartier il était bien refermésur lui-même. »117

L’aménagement de la place se poursuit également sur ses voiries avoisinantes : rues PierreCorneille, Moncey , Saint-Jacques, Villeroy, Marignan, Epée, Turenne, Paul Bert…

De la même façon, le projet de réaménagement de la place Bahadourian n’est pasdissociable de l’opération de requalification de l’habitat qui a eu lieu entre la place GabrielPéri et la place Bahadourian car les différentes propositions d’aménagement, souvent sanssuite, qu’a connu le secteur ces dernières années, ont eu pour conséquences un laisseraller de la part des bailleurs provoquant une dégradation considérable de l’habitat. Nousétudierons cette requalification un peu plus tard mais il faut garder à l’esprit que cette fois-ci il s’agit d’un projet global.

2. Le réaménagement de la place Gabriel Péri114 ARNOLD François, « La place Moncey à Lyon, lieu d’usage », Le Moniteur, 24 janvier 2003.115 Ibid.116 COUTURIER Bruno, chef de projet du DSU du quartier, cité dans « Moncey prend place », Lyon Figaro, 9 mars 1999.

117 MAAOUI Tarek, responsable agence ARRADEP, Entretien du 28 juin 2004, Annexes.

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La place Gabriel Péri avec ses rassemblements, ses marchés sauvages, ses trafics et recelsen tous genres connaît un problème de représentation, son image et sa forte notoriétédérangent dans ce quartier où le voisinage proche est plutôt bourgeois.

Le réaménagement de la place s’est fait en plusieurs morceaux. Dans un premiertemps, on a pensé le réaménagement, puis dans un second temps, la vidéosurveillance.

Au départ, seule la partie de la place située sur le troisième arrondissement étaitconcernée. L’objectif étant de mettre fin à la vente à la sauvette organisée devant le CLIP.L’équipe de Raymond Barre avait élaboré un projet. Avec le changement de municipalité,le projet a été revu à la hausse, sa version initiale ne semblant pas appropriée pour réglerles problèmes que connaissait la place. « On ne tenait pas compte du problème du trafic dedrogue. » explique par exemple Mireille De Coster118, Premier adjoint au Maire du septièmearrondissement.

Avec l’arrivée du tramway sur la place, les choses vont changer. Grâce à son passage,la place Gabriel Péri va pouvoir faire l’objet d’un réaménagement complet. « L’idée est delibérer l’espace afin de « rendre la circulation piétonne plus fluide » expliquent les servicesde la mission Tramway du Grand Lyon, maître d’ouvrage de l’opération. »119

Si la place Gabriel Péri connaît les problèmes qu’elle connaît actuellement, il y acertes des raisons historiques mais il y a aussi des raisons matérielles souligne Mireille DeCoster. « En particulier les multiples sorties de métro [….] tout ça, c’était des causessupplémentaires. » 120

Aussi, pour tenter de mettre fin aux activités gênantes pratiquées sur cette place,le projet de réaménagement est passé en commission communale de préventionsituationnelle.

Comme la place Gabriel Péri se situe sur deux arrondissements, le sort réservé àce projet n’a pas été le même des deux côtés. Côté troisième, le projet est passé par lacommission communale de prévention situationnelle nouvellement créée qui a conseilléde revoir l’aménagement tandis que côté septième les marchés avaient déjà été lancésaussi il était trop tard pour faire d’importantes modifications. « Cependant, il y avait, avantle réaménagement des escaliers où les gens avaient pris l’habitude de s’arrêter, des’asseoir, de discuter et d’interpeller les passants » 121 aussi la municipalité a demandéà ce que ces escaliers soient supprimés ; cette demande est passée en commission et aété validée.

« Quand on stationne debout, on stationne un moment mais moins longtempsque quand on est assis » explique Michel Bos Adjoint d’arrondissement délégué auxdéplacements urbains122 et il poursuit : « donc on a pu faire enlever au moment destravaux […] ces escaliers qui étaient une façon de stationner là ».

Le nord de la place Gabriel Péri, côté troisième, devait surtout connaître des travauxd’embellissement. Mais la présence de plusieurs sorties de métro, la morphologie de la

118 DE COSTER Mireille, Premier adjoint au maire du 7ème arrondissement, entretien du 15 juin 2004, Annexes.119 DURET Aline, « Place Gabriel Péri : plus de clarté et de lisibilité », Le Progrès, 24 novembre 2000.120 DE COSTER Mireille, Premier adjoint au maire du 7ème arrondissement, entretien du 15 juin 2004, Annexes.121 BOS Michel, Adjoint du 7ème arrondissement délégué aux déplacements urbains, entretien du 7 août 2003,

Annexes.122 Ibid.

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place, les activités qui y sont pratiquées ont engendré – suite au passage en commissioncommunale de prévention situationnelle- des modifications importantes.

« Globalement sur le projet, la commission de prévention situationnelle a pufaire ses premiers travaux pratiques et ses principes ont été appliqués avantl’heure. »123

Le réaménagement a débuté en 2002, par la modification des accès au métro. La multiplicitédes accès rendait la sécurisation des lieux difficile ; des entrées ont donc été condamnées,rendant la visibilité plus simple et réduisant la possibilité pour les éventuels délinquantsde jouer à cache-cache avec la police. La sortie de métro se situant sur la place GabrielPéri a également été réorientée de façon à ce que les usagers sortant sur la place ne setrouvent pas directement au milieu des rassemblements et du marché sauvage car ceux-ciprovoquaient chez eux un sentiment d’insécurité. Le secteur proche de la place a égalementconnu et connaît encore des modifications urbanistiques au niveau de ses traboules. « Onrentrait dans le quartier et par un système de passages d’immeubles en immeubles,on pouvait aller à l’autre bout […] sans jamais traverser une route » 124 échappantainsi à la police. Aujourd’hui, ces traboules commencent à être fermées.

Autre point important, l’aménagement de la place a été revu de façon à rendre l’espacepropice à une meilleure circulation. Pour ce faire, l’espace que s’appropriaient les « hommesdebout de la place du pont » tel qu’on les appelle souvent, a été réduit par la présenced’arbres qui apportent, par la même occasion, un peu de verdure. Un ensemble de fontainesa également été installé, il donne une impression de mouvement. Ces jets d’eau sortentdu sol en plusieurs endroits sur la place et limitent donc l’utilisation de cet espace commed’un marché aux puces.

Enfin, le traitement de la place évite les recoins, le sol y est recouvert de granit etparsemé de fibres optiques ; des lampadaires sont installés, offrant au site un éclairagesécurisant.

« Dans la conception même on a pensé à faciliter la lutte contre la délinquance,l’accès des pompiers, à prévoir un nettoyage facile, une bonne organisation de lamixité sociale qui intègre une grande transparence dans la séparation de l’espace,avec des lieux clairement définis pour les piétons par exemple, [ on a pensé à] réduireles passages obscurs propices aux trafics comme par exemple place Ballanche »125 . La place Ballanche qui se situe derrière le CLIP est totalement cachée et s’y estdéveloppé un fort sentiment d’insécurité . « L’objectif est de la transformer en square,avec une interdiction d’accès nocturne et la fermeture des passages traversant sousles proches du CLIP. » 126

Le partenariat mis en œuvre au sein de la CCPS a eu une importance primordialedans le réaménagement de la place puisque, rassemblant policiers, urbanistes, pompiers,sociologues, éducateurs, municipalité… autour d’une table, il a permis de bien saisir lesenjeux et les impacts du réaménagement.

3. La vidéosurveillance

123 Benoit Agnès, « De l’air autour du CLIP », op. cit.124 LIEUTENANT BAR, du Commissariat divisionnaire centre, entretien du 1er juillet 2004, Annexes.

125 Jean-Louis Touraine, Premier adjoint au Maire, cité dans Benoit Agnès, « De l’air autour du CLIP », op. cit.126 Benoit Agnès, « De l’air autour du CLIP », op. cit.

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Le 27 juin 2002, le conseil municipal de Lyon a décidé d’étendre le réseau devidéosurveillance qui était déjà présent en centre ville. Le vote a été unanime, gauche etdroite, confondues ; il n’y a eu que cinq abstentions. Quatre quartiers ont été visés et parmieux le secteur Péri-Moncey.

Selon Christian Philip127, Maire du troisième arrondissement à l’époque où le vote aeu lieu, la vidéosurveillance est nécessaire aux abords et sur la place Gabriel Péri car ils’agit de « l’un des quartiers les plus sensibles de Lyon […] aujourd’hui, les lyonnais[ le ] contournent [ …] pour ne pas croiser des dealers ou se retrouver au milieu d’unmarché sauvage. »

Depuis fin 2003, neuf caméras sont installées entre la rue de Marseille et la ruede Turenne. L’objectif visé par la mise en place de ces caméras est de rassurer lescommerçants et les habitants mais aussi de dissuader les délinquants ou aider à élucidercertaines affaires. « Surtout pour le trafic de stupéfiant » conclut Christian Philip.128 Aussi,ces caméras permettent de voir quand il y a des gens en difficulté ou de repérer par exempledes dépôt d’immondices.

L’implantation des caméras de vidéosurveillance à Lyon avait débuté avec lamunicipalité précédente, lorsque l’équipe de Raymond Barre avait équipé les sites deLa Duchère et de la Presqu’île. L’objectif poursuivi avait alors été traduit par unefiche action du contrat local de sécurité. Il s’agit de la fiche 23 intitulée « Schémadirecteur vidéosurveillance et alarme » qui vise à « sécuriser les bâtiments publicset les espaces publics particulièrement exposés aux dégradations et actes devandalisme. » 129

Le choix d’équiper le secteur Péri-Moncey correspond à une volonté de la nouvellemunicipalité d’étendre le réseau. Les quartiers du Vieux Lyon, Mermoz et de la place desPavillons sont également concernés.

Pour le secteur Péri, la mise en place de ces caméras a été validée par la CCPS ; uneextension jusqu’à la place Voltaire a même été évoquée. Cependant en matière de sécuritépublique, la vidéosurveillance est considérée comme un complément utile, elle permet delutter contre l’insécurité et le sentiment d’insécurité. Comme le soulignait Louis Lévêque,adjoint au maire, pendant le conseil municipal où la vidéosurveillance a été adoptée : « Plusgénéralement, la vidéosurveillance ne saurait faire l’économie de la lutte contre lescauses de cette insécurité que sont le chômage, la vie précaire, les exclusions. »130 Aussi la vidéosurveillance n’est pas pensée dans le quartier comme une solutionmais comme un complément à des actions d’insertion, d’intégration, de prévention et dereconquête.

4. Un réaménagement pour plus de clarté et de fluiditéLa vidéosurveillance, récemment opérationnelle, devrait dissuader les trafiquants de drogueet limiter l’implantation du marché sauvage.

127 Cité dans Vassé Olivié, « Pery-Moncey bientôt sous haute surveillance », op. cit.128 Ibid.129 Contrat Local de Sécurité de la ville de Lyon, 27 novembre 1998 (Annexes)130 Autorisation de programme extension de la vidéosurveillance des espaces publics, Bulletin Municipal Officiel du

15 juin 2002, p. 1093.

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Les fontaines à jets bouillonnants inaugurées en juin 2004 visent, elles aussi à réduire lemarché sauvage et à limiter les rassemblements. Cet espace public doit devenir un espacede circulation et les caméras permettent – entre autre – de prévenir les forces de police encas de problème.

Cette volonté de faire de l’espace public un espace de circulation est inscrite dans

l’histoire française.131Au 17ème siècle, il n’y a pas d’institution de police mais « l’œil duvillage », tout le monde se surveille, se connaît. Les gens circulent vite de chez eux autravail et vice et versa. Le rôle de l’Etat est limité, il y a peu de contrôle. Cependant, il y ale problème des « errants », une police étatique est créée pour s’occuper de contrôler ceuxqui ne sont attachés à aucun lieu. De cette situation naît l’invention du passeport. Il s’agitde distinguer ceux qui font un voyage des « errants ».

A la fin du 18ème siècle, avec la révolution industrielle, on assiste à un exode rural, lesgens se connaissent moins, la mobilité croît. C’est de ce phénomène que naît la nécessitéd’une police urbaine chargée de contrôler et surveiller l’espace. La mission de la policerepose sur un partage entre l’espace privé et l’espace public.

Dans l’espace privé, chacun fait ce qu’il lui plaît, tant que sa liberté n’atteint pas cellede son voisin. L’espace public, en revanche, est un espace de circulation, la police d’ordres’occupe de faire circuler les gens. Actuellement d’ailleurs, à la préfecture de police deParis, sont observés à partir de plusieurs écrans de contrôle, les éventuels regroupementsde personnes dans certains lieux de la ville. Dès lors qu’un rassemblement de plus de cinqpersonnes est constaté, une première alerte est lancée pour en contrôler le motif.

Dans les années 1970, la crise sociale émanant de la crise économique se traduitpar un nombre important de chômeurs. Il existe désormais des gens à qui on ne peutdemander de circuler. Ces personnes s’approprient l’espace public, d’où l’application denouvelles techniques en France. On ne sait pas trop comment faire, comment régler ceproblème. Alors, les hommes politiques vont aller chercher des solutions chez nos voisinsanglo-saxons : c’est la police de proximité, la prévention situationnelle…

Place Gabriel Péri, l’objectif du réaménagement est – contrairement à la placeBahadourian dont la vocation est d’être une place de quartier, où les gens s’arrêtent,discutent, etc… - de faire de ce lieu « une place urbaine d’agglomération »132 où les genscirculent.

La place du pont, lieu de passage historique où se croisent désormais des voies decommunication importantes : métro, tramway, axes routiers, à vocation à devenir un axede circulation.

B La sécurisation des espaces publicsEn plus de ces actions qui visent à faire du quartier un lieu approprié aux usages pourlesquels il est destinés et un lieu attractif, un certain nombre d’actions sont développéesafin de sécuriser le secteur.

131 Le développement qui suit, relatif à l’espace public, espace de circulation est tiré d’un exposé de Monsieur LINHARDTDominique, professeur de Travaux Dirigés, Université Lyon II, Sociologie Politique Spécialisée, 2002 – 2003, déjà cité dans monmémoire de maîtrise, « Coproduire la sécurité. Vers un espace défendable à la française », op. cit.

132 MURADIAN Vahé, vice président du Grand Lyon chargé de l’urbanisme cité dans DURET Aline, « Place Gabriel Péri :plus de clarté et de lisibilité », op. cit.

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1. Les cellules de veilleLa politique de la ville dans son volet d’actions visant à contribuer à la tranquillité deshabitants propose la mise en place de cellules de veille pour prévenir le développementde la délinquance. Le constat est le suivant : dans certains quartiers, « les actes dedélinquance appellent des réponses rapides. Dans le cas contraire, les dégradationspeuvent s’installer et le sentiment d’insécurité se développer. » 133 Ces réponsespeuvent alors être apportées par la création de ces cellules.

Dans le contrat local de sécurité, la fiche n°26 correspond à la « mise en place decellule de veille sur des territoires identifiés de la ville de Lyon » Parmi ces territoires setrouve le quartier Moncey. La cellule de veille est composée d’un collège permanent departenaires de terrain qui sont réunis autour du commissaire du troisième arrondissement,du Maire du troisième arrondissement ou de son représentant, du représentant de lapolice municipale, du secteur, du chef de projet DSU (développement social urbain) dutroisième et d’un représentant de la cellule de coordination du contrat local de sécurité.134

Un collège occasionnel peut également être convoqué pour apporter des informations surdes phénomènes précis.

L’objectif de la cellule de Moncey est de surveiller les tensions du quartier parla mobilisation des acteurs de proximité ; de mettre en place un réseau d’échanged’information entre les partenaires identifiés ainsi qu’entre la cellule et le Procureur dela République ; et enfin, d’apporter des réponses rapides aux problèmes que connaît lequartier.

Pour l’action des cellules de veille, un partenariat s’instaure entre les différentspartenaires invités. La diversité des compétences professionnelle du groupe permettantd’élaborer une culture commune d’anticipation des évènements et permettant d’apporterdes réponses efficaces.

En plus de ces cellules de veille qui permettent une réflexion commune par différentspartenaires sur un lieu spécifique, peuvent également être programmées des réunions parle DSU, l’objectif est de trouver des solutions à un problème rencontré sur un territoirespécifique mais il ne s ’agit pas forcément d’un problème d’insécurité. Ce fut le cas dela Guillotière l’été passé pour la place Raspail. La place Gabriel Péri côté troisième avecle quartier Moncey derrière fait l’objet d’une cellule de veille qui se réunit régulièrement.Côté septième, en revanche les abords de la place Gabriel Péri ne sont pas directementconcernés par la politique de la ville dont les objectifs visent la Guillotière dans uneacceptation beaucoup plus large. En revanche, le square de la place Raspail qui – du fait deson occupation abusive par les SDF qui y buvait de l’alcool – a été déserté par les familles,a fait l’objet de l’une de ces réunions. Il ne s’agissait pas réellement d’un problème desécurité, il n’y avait pas d’agression – précise Stéphane Badonnel, agent de développementpolitique de la ville au DSU du septième – mais plus d’un sentiment d’insécurité résultantd’une mauvaise utilisation des lieux. Il s’est alors agit « de reconquérir l’espace public etd’imposer à nouveau le fonctionnement normal de ce lieu. » 135 Durant l’été, le squareplace Raspail a été massivement occupé par les SDF qui venaient profiter de l’ombre et qui– et c’est ce qui a posé problème – buvaient et jetaient à terre 300 à 400 cannettes d’alcool

133 Service Développement Territorial, La politique de la ville à Lyon », op. cit., p. 19.134 Contrat Local de Sécurité de la ville de Lyon, 27 novembre 1998 (Annexes)135 BADONNEL Stéphane, Agent de développement Contrat de Ville du 7ème arrondissement, entretien du 17 mai

2004, Annexes.

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par jour. Les problèmes, que ces rassemblements ont générés, ont été quelques agressionsverbales envers les cantonniers mais le problème majeur était le « squatte d ‘un lieupublic par une tranche de la population au détriment des gens qui devraient l’utilisernormalement. » 136 Ce squatte a engendré des comportements répréhensibles : ébriétésur la voie publique et des situations gênantes : odeur d’urine, amoncellement de bouteilles.

Une réunion a donc été programmée et ont été invités la police nationale et municipale,les cantonniers, des personnes de la veille sociale qui est un service de la ville de Lyon quis’occupe, entre autre des publics SDF, des gens des foyers Notre Dame des sans abri. Cefoyer, situé non loin de là, est un foyer d’hébergement de nuit uniquement et d’agglomérationce qui engendre la présence d’un nombre important de SDF dans le quartier en journée.

Des solutions ont donc été cherchées dans le but de réinvestir les lieux et ont ététrouvées dans des actions de prévention, de sensibilisation et d’accompagnement auprèsdes SDF. Une sanisette a également été installée dans le parc.

2. Les actions de la policeFin 1998, alors que le grand projet de réhabilitation et de requalification du quartier estdéjà décidé depuis quelques mois, Jean-François Marigay, qui était alors depuis peuCommissaire de l’arrondissement, expliquait que le secteur de la place du pont a unemauvaise réputation mais surtout pour les gens qui n’y habitent pas.137 L’agglomérationconnaissait alors une recrudescence au niveau de la délinquance violente auquel le quartiera échappé. C’est surtout les vols qui caractérisent le secteur et c’est le trafic qui jette uneombre sur le quartier.

Les objectifs de la police nationale sont les suivants138 : assurer la sécurité de tous,constater les infractions, interpeller les auteurs et éradiquer l’activité souterraine trèsprésente dans le quartier.

La priorité de la police se porte donc vers une « présence constante et permanente »139 , l’objectif étant de « déstabiliser le commerce de rue des stupéfiants » 140

ainsi que «les autres petits trafics […] d’objets volés ». 141 Pour ce faire, des« opérations de voie publique » sont régulièrement organisées place du pont. Chaquesemaine, pendant quelques heures, des dizaines de fonctionnaires arrivent sur place,procèdent à des contrôles d’identité, questionnent sur la provenance des marchandisesvendues et réalisent des interpellations.

Depuis quelque temps, la police travaille en partenariat avec les services de la propretéde la COURLY qui passent sur place après l’intervention de la police pour récupérer lesobjets et cartons abandonnés par les vendeurs à la sauvette afin d’éviter que ces derniersne réinstallent leurs étals quelques minutes plus tard.

Une autre forme de « partenariat » a lieu depuis juillet 2001, elle fait suite à l’agressiond’un agent de nettoyage, la troisième en deux ans.

136 Ibid.137 Cité dans Article non signé, « Délinquance mythe ou réalité », Le Progrès, 23 novembre 1998.

138 LIEUTENANT BAR, du Commissariat divisionnaire centre, entretien du 1er juillet 2004, Annexes.139 COMMISSAIRE SOLA, du Commissariat divisionnaire centre, entretien du 21 juin 2004, Annexes.140 Ibid.141 Ibid.

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La solution apportée face à ce type d’insécurité s’est traduite par un accord entrela direction de la propreté du Grand Lyon et les syndicats des agents qui, suite à cesproblèmes, s’étaient mis en grève. Il s’agit de faire intervenir les agents d’entretien par deux,avec des moyens mécanisés en renfort et avec la présence visible de la police nationale oumunicipale en même temps sur le secteur sans pour autant se laisser entraîner dans unedérive sécuritaire qui consisterait à escorter les agents de nettoyage.

Dans le contrat local de sécurité, un certain nombre d’actions sont présentées et ontpour but de « renforcer les dispositifs policiers et judiciaires » 142 dans le quartier. Parexemple, l’îlotage de la police nationale doit être renforcé avec la présence d’un fourgoncomposé de cinq policiers en particulier sur le créneau horaire 17h - 19h ; ou encore lemarché sauvage pratiqué devant le CLIP doit prendre fin, pour ce faire un arrêté municipalest passé et doit être respecté strictement.

Le partenariat mis en œuvre par l’intermédiaire du CLS apporte beaucoup pour la luttecontre l’insécurité, il permet une meilleure connaissance du quartier, des habitants et lefait que diverses institutions parlent du même problème avec des mots et des ressentisdifférents apporte des réponses plus efficaces.143 Le CLS « permet de rapprocher lesdifférents partenaires et de permettre la mise en place de réseaux de contact demanière à ce qu’à la moindre difficulté on soit capable de faire agir les partenairesdirectement liés à la gestion des problématiques de sécurité » 144 . Le contrat localde sécurité a permis l’instauration de relations privilégiées entre les différents partenaires.Mireille De Coster se réjouit d’ailleurs de ce partenariat qui dépasse le cadre du CLS etqui traduit une volonté de coopération de la part du Commissaire de police et du chef dela police nationale.

Un autre point fort de l’action de la police est la coopération qui existe entre la policenationale et la police municipale. Cette complémentarité a par ailleurs fait l’objet d’unefiche action dans le contrat local de sécurité. De plus, comme le précise Jean-Pierre Sola,Commissaire de police du troisième arrondissement « il y a une vieille habitude decollaboration entre police nationale et municipale puisque […..] des conventions[ sont signées] entre la mairie et les services de l’Etat ». 145 Il s’agit d’une convention decollaboration qui donne lieu a des rencontres très fréquentes et quelquefois à des opérationscommunes.

Il y a également une habitude de contact hebdomadaire puisque est organisée toutesles semaines une réunion avec des agents de police municipale.

Au niveau des actions mises en œuvre, la complémentarité est réelle et même sila police municipale a des compétences largement inférieures, notamment en matièrejudiciaire, pour ce qui est de l’occupation du terrain, de la présence, elle joue un rôleessentiel. La police nationale occupera les créneaux nocturnes, ses horaires sont plusflexibles, tandis que la police municipale occupera le terrain le jour car son effectif est réduitdurant la nuit. Cette répartition va permettre d’assurer une présence quasi continue dansle quartier.

Il est également intéressant d’évoquer une des forces de la police municipale à Lyon,Lionel Catino, chef de poste du troisième arrondissement faisait remarquer, lors d’un

142 Contrat Local de Sécurité de la ville de Lyon, 27 novembre 1998 (Annexes).143 LIEUTENANT BAR, du Commissariat divisionnaire centre, entretien du 1er juillet 2004, Annexes.144 COMMISSAIRE SOLA, du Commissariat divisionnaire centre, entretien du 21 juin 2004, Annexes.145 Ibid.

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entretien, que la police municipale lyonnaise est représentative de sa population. On ytrouve employé des hommes et des femmes de diverses origines ethniques. Il sembleraitque cette mixité facilite les rapports dans un quartier où tant de communautés cohabitent.

Pour conclure, les polices municipale et nationale adaptent leurs actions à la spécificitédu quartier afin d’en assurer la sécurité et pour y réduire le sentiment d’insécurité. Cesactions visent la tranquillité des gens dans les espaces publics mais la police travailleégalement en partenariat avec les bailleurs sociaux. C’est ce que nous étudierons – entreautre – dans la deuxième section consacrée à la sécurisation du quartier par l’habitat.

Parallèlement aux actions mises en œuvre sur l’espace public, des aménagements etdes rénovations vont être effectuées dans les immeubles.

Section 2 : La réhabilitation et la sécurisation du quartier par l’habitatAvant sa réhabilitation, le quartier Péri-Moncey présente la caractéristique de disposerd’un bâti souvent vétuste voire insalubre. Comme nous l’avons vu plus haut plusieurseffondrements d’escaliers ou d’étage ont eu lieu.

On trouve plusieurs types de logements dans le secteur : des logements sociaux – leparc social est composé d’environ 150 logements dont la grande majorité appartiennentà l’OPAC du Grand Lyon et à LOGIREL-, des logements privés et également un certainnombre de logements étudiants.

Dans cette partie nous nous intéresserons aux cadres et aux actions mises en œuvrepour « sécuriser » l’habitat et pour en faire un espace de vie agréable et nous verronscomment ces actions s’inscrivent dans un objectif plus global qui vise la réhabilitation duquartier.

Nous commencerons par étudier la réhabilitation des immeubles, puis nous nousintéresserons à la mise en place d’une structure : l’ARRADEP (Agence Régionale Rhône-Alpes pour le Développement de l’Emploi de Proximité) qui assure la tranquillité par laprésence et la propreté, nous observerons ensuite les textes et les accords visant la baissede l’insécurité et du sentiment d’insécurité, pour finir nous observerons l’impact des OPAH(Opération programmée d’Amélioration de l’Habitat) et du FISAC (Fonds d’Intervention pourla Sauvegarde de l’Artisanat et du Commerce) sur le quartier.

A. La réhabilitation des immeubles du parc socialLes immeubles du quartier Péri-Moncey, nous l’avons dit, ont régulièrement été menacés dedémolition mais, tout aussi régulièrement, les projets de la ville mettaient fin à ces menaces.Les objectifs ont donc été – et ce durant plus d’un siècle – alternativement démolitionet réhabilitation. Les promesses de démolitions à répétition ont donc provoqué chez lesbailleurs une baisse d’intérêt qui, doublée de la non-attention des pouvoirs publics, a laissécouler les immeubles du quartier dans l’insalubrité.

En 1998, le comité d’habitants et de commerçants du quartier Péri-Moncey s’estclairement positionné pour la réhabilitation du quartier. La municipalité a choisi d’opter pourcette voie et depuis, parallèlement à la réhabilitation de l’espace public, les immeublesalentours en font autant ; les bailleurs sociaux mettent en œuvre des projets de réhabilitationde grande envergure, des initiatives privées sont également prises ; les bailleurs misent surle devenir du quartier.

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C’est le cas par exemple du bailleur social SCIC Habitat Rhône-Alpes qui possèdel’immeuble du 11 rue Moncey et qui a connu une réhabilitation complète qui s’est achevéecourant 2002.

Avant les travaux, cette résidence connaissait des dégradations multiples et lesentiment d’insécurité était fortement ancré dans l’esprit des locataires. On pouvait constaterdes dégradations « gratuites » dans les parties communes répondant certainement à l’étatde délabrement avancé du bâtiment. Les murs étaient tagués, les locataires jetaient leursdéchets par les fenêtres, des gens urinaient dans les escaliers, l’ascenseur avait été cassé.

Des dégradations « avec objectifs » pouvaient également être recensées, l’objectifen question visant, en général, à cacher de la drogue dans les parties communes pouréchapper aux contrôles policiers. Les portes d’entrée étaient fracturées, les boîtes auxlettres arrachées, les doubles plafonds éventrés etc.. Si bien qu’avant les travaux, 14logements étaient vacants sur 27, et les appartements vides ont dû être fermés pardes portes de condamnation métalliques, les portes palières n’étant plus efficaces, leslogements étaient squattés. Dans certains appartements, les cloisons avaient même étéabattues par les squatters.

Motivés par la volonté de relouer ces appartements vides – un logement vacant coûteenviron 15€ par jour à son bailleur146 – et motivé par la réhabilitation du quartier qui, cettefois, semblait lancée, SCIC Habitat a choisi de procéder à la réhabilitation de sa résidence.L’objectif est de réorganiser la résidence en intervenant sur ses équipements, ses contrôlesd’accès et ses locaux commerciaux.

Des travaux ont alors été effectués sur les parties communes ainsi que sur lesparties privatives. Les aménagements ainsi opérés visent beaucoup plus qu’un simpleembellissement – bien que celui-ci soit aussi un des objectifs puisqu’un espace propre inciteà le conserver comme tel – mais il vise également à offrir un cadre de vie agréable auxlocataires en réduisant l’insécurité et le sentiment d’insécurité dans l’immeuble qu’il s’agissede sécurité au sens de malveillance ou au sens du danger lié à la vétusté des lieux.

Dans les parties communes, les portes de la résidence ont été changées, elles sontà présent en acier thermolaqué, une peinture cuite au four qui leur donne un revêtementplus dur, plus résistant aux dégradations. Les systèmes de fermeture sont des ventousesélectromagnétiques, il n’y a plus de fermetures mécaniques mais un système de badgesmagnétiques. Ces derniers sont programmés et, en cas de perte, déprogrammés à distance.Les parties communes ne sont accessibles qu’avec ces badges et aucun ne circule dans lanature. Un sas a également été créé, une première porte qui donne sur la rue est contrôléepar un digicode réglé par une horloge (la journée, les visiteurs n’ont pas besoin de code),la seconde est équipée d’un interphone.

Le local poubelle s’ouvre aussi par la présentation du badge. Il a été aménagé à la placed’un local commercial. Auparavant, les poubelles étaient stockées dans la cour intérieure,ce qui donnait lieu à des jets d’ordures quotidiens par les fenêtres. Le nouveau local a étécarrelé, des plinthes et une évacuation d’eau ont également été posées de façon à faciliterl’entretien.

La cour, quant à elle, a été condamnée, fermant ainsi une traboule, son sol a été carreléet le local d’entretien qui s’y trouvait et dont le toit était constamment couvert d’ordure, aété détruit.

146 Dechatte Jean-Christophe, Conducteur d’opération, SCIC Habitat Rhône-Alpes, Entretien du 6 juillet 2004, Annexes.

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Entre les deux portes d’entrée, dans le sas, ont été installées les boîtes aux lettres,elles sont encastrées et de type anti-vandalisme : la porte et l’ouverture pour les lettres –qui, en général, s’arrachent facilement – sont deux éléments séparés et ce dernier est fixe.

Dans le hall d’entrée, tous les espaces non-utilisés qui peuvent générer des recoins oudes cachettes ont été murés, fermés ou détruits et laissé visible.

« On a une visibilité complète du hall depuis l’extérieur. »147

Dans les parties communes, pour éviter les éventuelles cachettes, le faux plafond installéest d’une seule pièce, lisse, non-démontable et non-visitable. Les gaines techniques quiservaient également de cachette et qui étaient régulièrement ouvertes mais qui – pour desraisons de sécurité – ne peuvent être fermées à clef ont été équipées de systèmes à doublesbatteuses. « Il faut manœuvrer deux serrures au lieu d’une. On rajoute une barrière. »148

Le choix des revêtements pour la résidence s’est orienté vers une faïence murale et ducarrelage au sol, ce sont des matériaux faciles à nettoyer.

L’éclairage installé est un éclairage semi-permanent, cinquante pour cent des lampessont allumées en permanence, les cinquante autres pour cent s’éclairent par un détecteurde présence ce qui permet d’éviter au locataire de se retrouver plongé dans le noir et cequi empêche la dégradation des interrupteurs.

L’ascenseur, lui aussi, a fait l’objet d’une rénovation complète.Enfin, des travaux d’embellissement ont été pratiqués dans les escaliers. Au niveau

des parties privatives, les logements vacants ont entièrement été refait à neuf : plomberie,sanitaire, revêtement, équipement. Dans les logements habités, les équipements anciensont également été changés. Des locataires se plaignaient de ne pas pouvoir séparer cuisineet salon : un système de retombée pour bloquer les odeurs et un bar américain ont alorsété installés. Des travaux d’embellissement ont aussi été opérés.

Pour cette réhabilitation SCIC Habitat a beaucoup communiqué sur le projet auprès deses locataires et s’est mis à l’écoute de leurs demandes.

Sur un point précis, la fermeture de la traboule, le projet de réhabilitation du 11 rueMoncey est passé en commission communale de prévention situationnelle. Nous allonsà présent étudier l’enjeu de ce passage en commission puis nous nous intéresseronsrapidement à un autre projet : la réhabilitation du 16 rue de l’Epée qui présente l’intérêtd’être également passé en CCPS et il est décrit, par ses bailleurs, comme le « symboled’un quartier en plein renouveau. » 149

Les travaux de la CCPSPour le 11 rue Moncey, une traboule permettait de sortir rue Marignan. SCIC Habitat

souhaitait condamner ce deuxième accès ce qui engendrait plusieurs contraintes : cetteentrée était référencée auprès de La Poste mais également auprès des services d’urgence( SAMU, pompiers,…) De plus elle représentait une échappatoire en cas d’incendie. Aussila question a été posée en commission réunissant bailleurs, pompiers, policiers…

147 Ibid.148 Ibid.

149 OPAC du Grand Lyon, « Le Moncey » une résidence, symbole d’un quartier en plein renouveau !, http://www.opac-grandlyon.com/PDF/DP/Rue%20de%20l%27Ep%E9e.pdf

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Ce passage a finalement été condamné pour « rendre les travaux de sécurisationeffectués cohérents et efficaces ». 150

La résidence Le Moncey, quant à elle, située 16 rue de l’épée a fait l’objet d’un passageen commission en septembre 2002

Deux types de travaux ont été effectués, les premiers visant la remise en étatde la résidence avec des travaux de toiture, d’embellissement, des travaux concernantl’ascenseur, l’eau ; l’électricité, le gaz, le chauffage…Les seconds visent la sécurisationdes locaux avec l’installation d’une porte sécurisée, la création d’un local poubelle, la posed’un interphone, la pose de revêtements durables, la mise en place d’un éclairage semi-permanent.151

Le projet a été validé en commission communale de prévention situationnelle, devant« l’importance de la qualité de la réflexion préalable effectuée par le maître d’ouvragedans l’élaboration du projet de réhabilitation » 152 les membres de la commission sesont surtout intéressé aux aspects extérieurs qui risquaient d’empêcher le bon déroulementdes opérations : difficultés de circulation entraînée par les travaux et mise en garde contrel’éventuelle utilisation des matériaux comme des armes.

Finalement, la réhabilitation du Moncey que l’OPAC du Grand Lyon présente comme «symbole d’un quartier en plein renouveau » visera la réhabilitation par des actions de miseen valeur, de rénovation, mais également de sécurisation. Le Moncey semble bien être àl’image du quartier. Quant à la question de savoir s’il s’agit de réhabiliter ou de requalifier,dans le cas présent, 11 familles parmi les 19 qui occupent actuellement la résidence étaientdu quartier.

Le jour de l’inauguration, au côté de Gérard Collomb (Maire de Lyon), PatrickHuguet (maire du troisième arrondissement) et d’Yvon Deschamps (conseiller municipal) setrouvaient Valentin Gomez qui a occupé la résidence de 1935 à 2000 et Sabrina nouvellerésidente. « Deux témoins à l’image de la diversité du quartier Moncey qui constatent, avecsoulagement, la volonté, affichée aujourd’hui, par les politiques de « garder l’âme » duquartier en le rénovant toutefois » commente Le Progrès.153 Reste à savoir si les objectifsaffichés sont les objectifs recherchés. « Quelques instants plus tard, Patrick Huguet,maire du troisième se félicite de la construction annoncée du commissariat de policeplace Bahadourian et de l’installation prochaine de la vidéosurveillance place GabrielPéri. » 154 Tandis que quelques minutes plus tôt un passant reprochait à Gérard Collombd’avoir fait « nettoyer le quartier de ses petits trafiquants, juste avant sa venue. » 155

Lors de la prise de décision de réhabiliter le quartier en 1998, du fait de la dégradationdu climat social et de l’accumulation de faits violents156 « un travail entrepris par l’ARRADEP,avec la ville et les bailleurs sociaux a permis de mettre en place une équipe de médiateurs

150 Extraits des comptes rendus de Commission Communale de Prévention Situationnelle (Annexes)151 Ibid.152 Ibid.153 Article non signé, « L’âme de Moncey rue de l’épée », Le Progrès, 7 mars 2003.154 Ibid.155 Ibid.156 Lyon Quartier Moncey, http://i.ville.gouv.fr/divbib/doc/gielyon.pdf

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« présence tranquillité » présente tous les jours sur le quartier pour dialoguer avec leshabitants. »

B. Le dispositif ARRADEP (Agence Régionale Rhône-Alpes pour leDéveloppement de l’Emploi de Proximité)La structure ARRADEP a été montée – avec la participation de Charles Romieux – en 1994,« elle réunit les bailleurs sociaux de la région et avait pour but de gérer des dispositifsd’insertion destinés à des personnes ayant des difficultés d’accès à l’emploi qui sontlocataires. » 157 C’est au travers de cette action qu’a été lancé le dispositif « présencetranquillité » qui s’est traduit dans le quartier Moncey par la mise en place d’une agenceinter-organisme. Comme les logements sociaux y sont épars, cette agence assure le travailde proximité d’un gardien pour l’ensemble des bailleurs qui n’avaient pas la possibilité definancer chacun un gardien.

La mission première de l’ARRADEP est d’apporter de la tranquillité dans le quartieret plus particulièrement au sein des résidences d’habitat social par la présence et parl’entretien.

L’ARRADEP essaie d’intervenir sur les mêmes missions qu’un gardien cependant seshoraires ne sont pas les mêmes, l’agence est ouverte de 6H30 à 16H30, et ses missionssont quelques peu différentes : elle a mission de propreté, mission technique, mission desécurité, mission pédagogique et enfin d’accompagnement social158

La propreté est l’angle d’attaque principal : « quand vous entrez dans une alléepropre, qui sent bon, vous n’avez pas envie de la dégrader et de la détériorer. » 159

L’ARRADEP fonctionne comme une petite agence, ses membres travaillent pour le comptedes bailleurs et assurent l’entretien classique des parties communes : nettoyage, sortie depoubelle…

Parallèlement à cet entretien classique, l’ARRADEP s’occupe également de l’entretientechnique, elle fait le lien entre locataires, bailleurs et prestataires pour tous les problèmesd’ascenseur, de plomberie, d’électricité, etc.

Par leur présence, les agents de l’ARRADEP assurent une mission de sécurité et detranquillité dans les résidences. Les dégradations et deals qui ont lieu dans les bâtimentssont gênés par les entrées et sorties à répétition de ces agents d’entretien.

Monsieur Tarek Maaoui, responsable de l’agence, précise cependant qu’il y a toujoursun ou deux locataires qui continuent à ne pas respecter les règles de vie de la résidence.Dans ces cas là, l’ARRADEP remplit une mission que le responsable d’agence qualifie depédagogique. Il s’agit de rencontrer ces locataires individuellement ou lors de réunions et deleur expliquer les conséquences de leur comportement, de leur faire comprendre que leurfaçon d’agir n’est pas la bonne. Cette action se fait en lien avec les bailleurs, quelquefoisdes tracts humoristiques peuvent, par ailleurs, être utilisés pour faire comprendre, de façonplus agréable, aux locataires que leur comportement pose problème.

Enfin, la dernière mission qu’occupe le personnel de l’ARRADEP est une missiond’accompagnement social. De nombreux logements sont occupés par des personnesâgées, d’origine étrangère, qui vivent seuls pour certains et qui ont souvent besoin

157 ROMIEUX Charles, Directeur de l’OPAC du Rhône, entretien du 11 juin 2004, Annexes.158 MAAOUI Tarek, responsable agence ARRADEP, Entretien du 28 juin 2004, Annexes159 Ibid.

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d’accompagnement quant à la rédaction de documents administratifs par exemple. Certesil existe des structures qui offrent cet accompagnement mais le caractère informel de larelation qu’ils ont avec l’ARRADEP, le fait qu’il n’y ait pas de ticket, pas de rendez-vous faitque, finalement, c’est ici que les locataires viennent se renseigner. Par ailleurs, le fait queles agents de l’ARRADEP parlent arabe facilite la communication avec les résidents et créeun climat de confiance.

Ainsi, en matière de tranquillité dans les résidences d’habitat social, la structure« présence tranquillité » semble apporter un plus non négligeable. Ajoutée à la réhabilitationdes bâtiments, elle concourt efficacement à offrir un cadre de vie agréable aux locataires.Au sein des résidences, d’autres actions sont mises en œuvre par les bailleurs. Elles visentà garantir la sécurité et la tranquillité des locataires par le biais de partenariats.

C. La prévention de l’insécurité dans l’habitatLes bailleurs sociaux n’ont pas de responsabilité directe en matière de sécurité sinon cellequi découle de la conception et du fonctionnement des logements loués. En revanche, il ya un contrat civil entre le bailleur et le locataire qui est le bail. Le bail précise deux types dechoses : tout d’abord, il décrit le logement, sa surface, ses équipements et les coûts qu’ilgénère ; ensuite, il définit les règles d’utilisation du logement qui s’impose au locataire et aubailleur. En échange d’une jouissance des lieux respectant les règles de vie appliquées dansles bâtiments de la part des locataires, le bailleur s’engage à « permettre la jouissancepaisible des lieux loués. » 160

Même si le bailleur n’est pas responsable et n’a pas l’obligation de s’occuper de lasécurité, même si sa responsabilité vise plus la tranquillité, la prévention et les troubles devoisinage plus que les actes de délinquance ; trois évidences apparaissent :161

Certains troubles de voisinage peuvent engager la responsabilité civile du bailleur etégalement constituer des délits pénaux qui relèvent donc également de la police et de lajustice. La jouissance paisible ne peut exister si la délinquance crée un climat d’insécurité.Enfin, les plaintes des locataires et des agents envers la délinquance grandissante obligentles bailleurs à s’intéresser à la sécurité et à développer des partenariats

Plusieurs actions sont alors envisageables et cumulables

1. Le règlementA l’OPAC du Rhône par exemple, face aux différents problèmes rencontrés, un règlementintérieur a été établi ; il n’y en avait pas auparavant. Il a été travaillé avec les locataireset il a pour objectif de permettre aux locataires de « mieux vivre ensemble ». Il préciseque dans les parties communes, il faut veiller à ce que les portes d’accès soient fermées,à ne pas déposer d’ordures, à ne pas avoir de discussions bruyantes, à ne pas laisserjouer les enfants, boire fumer ou manger dans les parties communes et enfin à ne pasgêner le passage. 162 Le règlement précise également les comportements interdits dans leslogements, dans les parties extérieures et parkings.

160 MARTY Paul-Louis, délégué général de l’Union Nationale HLM, dans BOUSQUET Richard, MEHIRI Soraya, BARETPascale, RUDLOFF Nicole, « Dossier : Des actions communes HLM-POLICE pour la sécurité », Habitat et Société n°21, p. 24.

161 Ibid.162 Reglement intérieur des résidences, Annexes.

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Il s’agit d’un règlement très précis élaboré à partir de situations problématiques et quiva permettre de les rendre très lisibles ainsi que de rendre très lisible l’intervention qu’ellesprovoquent.163 Il permet de bien différencier ce qui fait partie de la vie normale de l’immeublede ce qui est interdit car gênant.

« Priorité de l’action gouvernementale, la sécurité des quartiers d’habitat socialest définie dans le cadre des contrats de ville et des contrats locaux de sécurité »164 qui associent la police nationale et l’Union Nationale des Fédérations d’OrganismeHLM (UNFOHLM).

Afin d’aller plus loin dans le partenariat, l’Etat et l’UNFOHLM ont signé un accord cadre,pour une meilleure sécurité dans les quartiers d’habitat social, le 21 mars 2000. Cet accordcadre donnera naissance à 12 fiches dans le contrat local de sécurité.

2. Les accords cadre du 21 mars 2000Le cadre défini par les politiques partenariales des contrats de ville et des contrats locaux desécurité donne les moyens de renforcer l’intégration des quartiers en difficulté par l’actionde la police, de la gendarmerie et de l’UNFOHLM sur la sécurité et la tranquillité.

« Le partenariat Etat-bailleurs s’est concrétisé par la signature de l’accord cadredu 21 mars 2000 entre l’Etat et l’UNFOHLM, aboutissant dans le respect des exigencesdéontologiques de chacun, à associer étroitement les partenaires. » 165 La traductionde cet accord au niveau régional prend la forme d’une convention de sécurité signée parl’Association des Bailleurs Constructeurs HLM du Rhône (ABC HLM du Rhône) et par lepréfet du Rhône.

Pour apporter une réponse cohérente aux habitants et aux pouvoirs publics, un référentbailleur et un référent police nationale, gendarmerie vont être désignés. Le référent bailleurest en contact permanent avec l’ensemble des partenaires impliqués dans la sécurité, il estchargé de centraliser les incidents recensés sur l’ensemble du parc social par le biais desfiches incidents. Il veille à la cohérence du contrôle social des espaces, enfin il assure lesuivi de la protection et de la sécurité des sites.

Le référent police nationale, gendarmerie nationale est l’interlocuteur privilégié duréférent bailleur avec lequel il est en contact permanent. Il entretien également une relationparticulière avec les gardiens et personnels de proximité du site.

La convention prévoit des conditions particulières pour la prise de plainte, elle prévoitune autorisation d’accès de la police dans les parties communes, une communicationefficace entre les partenaires, des formations pour les bailleurs par les policiers, desmesures situationnelles ou encore le traitement du sentiment d’insécurité par des actionscontre les regroupements ou les véhicules abandonnés.

3. Le Contrat Local de SécuritéDes « avenants habitat » ont été insérés dans le contrat local de sécurité afin de garantir latranquillité des quartiers sensibles d’habitat social dont le secteur Péri-Moncey fait partie.

163 ROMIEUX Charles, Directeur de l’OPAC du Rhône, entretien du 11 juin 2004, Annexes.164 BOUSQUET Richard, MEHIRI Soraya, BARET Pascale, RUDLOFF Nicole, « Dossier : Des actions communes HLM-

POLICE pour la sécurité », op. cit., p. 25.165 Convention de sécurité ABC HLM du Rhône.

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1Douze actions spécifiques ont donc été ajoutées dans l’objectif de renforcer l’efficacité,la mise en réseau et la sécurité des professionnels opérant dans ces quartiers. Plusieursactions vont alors être mises en œuvre et prendront la forme de fiches actions dans lecontrat local de sécurité.

Voyons d’abord les 2 fiches qui concernent directement les bailleurs : il s’agit desfiches n° 47 et n° 39. La fiche n° 47 concerne la participation des bailleurs aux instances etdispositifs liés à la prévention et la sécurité. Une référente bailleur Madame Audrey Thuraqui est également directrice de clientèle à l’OPAC du Grand Lyon a été désignée pourreprésenter tous les bailleurs de l’agglomération lyonnaise. Elle se présente donc, chaquemois, aux réunions du comité local de sécurité – et deux fois par an pour le CLSPD – elle yrencontre les différents partenaires du contrat local de sécurité et leur fait part des problèmesrencontrés sur le terrain ? Pour avoir une idée de ce qui se passe sur le terrain, le référentbailleur dispose de fiches incidents bailleur.

La création de ces fiches est le résultat de la mise en application de la fiche n°39 ducontrat local de sécurité. L’objectif est d’informer la police de façon à adapter les réponsespolicières ainsi que la gestion de proximité.

Deux fiches incidents ont été créées : la première est une fiche réactive qui doit êtretransmise aux services de police dès la constatation d’un incident. Les incidents en questionpeuvent concerner les atteintes aux biens, aux personnes ou les troubles de tranquillitépublique.

La seconde est une fiche de synthèse remplie chaque mois et relatant les phénomènesles plus récurrents. Ces dernières sont transmises à Audrey Thura qui en transmet unesynthèse à l’Observatoire de la Délinquance et de la Sécurité ainsi qu’au contrat local desécurité.

Un retour d’information est régulièrement effectué.A l’OPAC du Rhône, le directeur Monsieur Charles Romieux a mis en place une fiche

incident supplémentaire, elle est plus simple et remplie directement par les locataires.Intéressons-nous à présent aux deux fiches n°40 et n°43 qui concernent les

bailleurs mais plus particulièrement dans leurs rapports avec la police.La fiche n°40 propose la signature d’une autorisation par les bailleurs dont l’objet est

d’accorder à la police nationale et à la police municipale de pénétrer dans les partiescommunes. Cette autorisation doit être renouvelée chaque année et les locataires doiventen être informés. Cette action vise à renforcer les réponses policières et judiciaires.

La fiche n°43, en revanche, a pour objectif d’en améliorer l’efficacité, il s’agit d’identifierun référent bailleur dans les rangs de la police nationale dont les missions sont d’êtrel’interlocuteur privilégié du référent bailleur, d’analyser les fiches incidents, de décider desmesures adéquates, de participer aux audits de sécurité, d’assurer la prise en chargepersonnalisée des dépôts de plaintes des personnels bailleurs et enfin d’entretenir un liende confiance avec les gardiens ou responsables du site. Le référent pour le troisièmearrondissement est le Lieutenant Bar. Une relation privilégiée s’est instaurée entre leLieutenant Bar et Audrey Thura. Il connaît les problèmes des bailleurs, il est présent à leursréunions, il se déplace quelquefois pour prendre les plaintes etc.

Une relation particulière s’instaure également entre la police et le personnel deproximité, elle est décrite dans la fiche n°44 du contrat local de sécurité. Des échangesréguliers ont lieu, le personnel de proximité, les gardiens sont informés de l’évolution duquartier. Un guide outil a, par ailleurs, été réalisé à l’usage des personnels de proximité.

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Il s’agit d’un outil pratique et facile d’utilisation recensant les conduites à tenir face àun certain nombre de situations difficiles. Il présente quelques notions juridiques, lesnuméros téléphoniques d’urgence et les numéros utiles pour le personnel puis sept fichesthématiques recouvrant les principaux types de situations rencontrées et les conduitesqu’elles doivent engendrer : porter plainte, appeler la police, les services d’urgence,l’écologie urbaine (pour les seringues par exemple..) etc.

A présent, nous pouvons observer les quatre fiches visant à réduire le sentimentd’insécurité auprès des populations résidentes.

La fiche n°41 vise les occupations abusives des parties communes, il s’agit d’identifierles types d’occupation, de les évaluer avec les fiches incident et d’y répondre de façonefficace par l’action commune de la police et des bailleurs.

La fiche n°42 a pour objectif de réduire le sentiment d’insécurité des résidents par untraitement rapide des véhicules en stationnement anormal : stationnement gênant, épaves,véhicules incendiés…

La fiche n°46 vise la sécurisation passive des espaces privés à usage collectif avecpourquoi pas le passage de projet en commission communale de prévention situationnelle.C’est le cas,

Par exemple, de l’immeuble se situant 7 rue de l’épée qui connaissait quotidiennementdégradations, dépôts d’encombrants, squat, présence de drogue dans les partiescommunes, agression etc. Un certain nombre d’actions ont alors été programmées afin desécuriser et de rassurer les habitants.

Enfin, et c’est l’objet de la fiche n°48, des rappels à la loi, aux obligations liées au bailsont effectuées par la Maison de la Justice et du Droit.

Pour finir, nous allons désormais nous intéresser à deux autres actions mises enœuvre sur le quartier Péri-Moncey et qui concourent à sa réhabilitation. Il s’agit desOPAH (Opération Programmée d’Amélioration de l’Habitat) et des aides du FISAC (Fondsd’Intervention pour la Sauvegarde de l’Artisanat et du Commerce).

D. Les OPAH et le FISACEn juin 1999, une Opération Programmée d’Amélioration de l’Habitat (OPAH) a commencépour une durée de trois ans, relayée ensuite par une OPAH thématique sur l’habitat indigneet très inconfortable. De nombreux immeubles ont ainsi reçu des subventions pour leurréhabilitation. Il s’agit d’un dispositif permettant aux propriétaires privés de procéder à destravaux de réhabilitation dans leurs immeubles pour en faire des logements conventionnésAide Pour le Logement (APL). Les plus difficiles à convaincre ont été les personnes quilouaient des logements qui n’étaient pas aux normes mais la SERL (Société d’Equipementdu Rhône et de Lyon), qui a animé l’opération, est tout de même assez contente du résultat.En six mois, 93 logements avaient déjà un engagement de subvention. « L’OPAH est […]une bonne incitation à la réhabilitation. Les partenaires financiers (l’Etat, l’ANAH, laville de Lyon et la COURLY) permettent des engagements de subvention allant de 20à 85% du montant total des travaux. Ce pourcentage est proportionnel aux revenusdu propriétaire. » 166

Un autre enjeu est important dans le quartier, c’est le maintien et le développement descommerces. Pour ce faire, le FISAC (Fonds d’Intervention pour la Sauvegarde de l’Artisanatet du Commerce) est intervenu. Il s’agit d’un fond d’aide mis en place par la ville de Lyon pour

166 ARRIEUS Gaelle, « Bon départ pour l’OPAH Moncey / Voltaire », Le Progrès, 14 janvier 2000.

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la relance économique de certains quartiers. Il aide les propriétaires de locaux commerciauxà les remettre en état. Le quartier Moncey-Voltaire a été désigné par la SERL comme l’unedes zones aptes à bénéficier de cette aide. Le FISAC aidera, par exemple, a financé lacréation d’une boulangerie dans l’un des locaux commerciaux du 11 rue Moncey.

Section 3 : Les supermarchésLe quartier de la Guillotière dispose d’un très grand nombre de commerces de proximité,beaucoup sont des commerces que l’on peut qualifier comme « commerce du monde ».Maquis167 africains, supérettes asiatiques et épiceries arabes se côtoient dans le quartier.

Autour de la place Gabriel Péri, on trouve également, à côté de ces magasins deproximité, deux supermarchés : côté septième c’est le Casino, côté troisième le Coccimarcket.

Face aux problèmes que rencontrai le Casino dans le quartier : vols, vandalismes,bagarres, le directeur Monsieur David Leray s’est présenté à l’une des commissions desécurité de la mairie du septième arrondissement, commission à laquelle participent lapolice nationale et le police municipale. Selon le directeur, il fallait un changement du côtéde la police afin que ses actions de sécurisation soient efficaces.

Monsieur David Leray est arrivé en août 2003 dans ce magasin. Dans les six premiersmois, sept agents de sécurité ont été recrutés , « c’est deux fois plus qu’un magasinde taille deux fois plus importante. » 168 La rencontre à la mairie a eu lieu aumois de novembre ; étaient présents Mireille De Coster, le maire du septième, le préfet,le procureur, le commissaire. Le but était de sécuriser le magasin et pour cela, ils avaientbesoin des autorités. Il fallait que ces dernières interviennent lorsqu’un voleur était repéré.C’est aujourd’hui le cas. «Aujourd’hui on appelle la police, dans le quart d’heure quisuit, on a quelqu’un, auparavant une heure, une heure et demie, on pouvait attendre,on avait personne. » 169

Au mois de décembre, un système de sécurité a été mis en place avec un systèmede vidéosurveillance. Parallèlement, la disposition des caisses du magasin a également étémodifiée. Les caisses étaient en plots avec trois plots par rangée de caisse. Les gens quivisaient la troisième caisse de la rangée devaient passer devant la première et la deuxième,ils s’y servaient en sacs et arrivés à la dernière disaient qu’ils avaient payé à la première.Aujourd’hui, des caisses ordinaires ont remplacé les plots et un agent de sécurité est présenten sortie de magasin, en face des caisses, en permanence, pour interpeller les éventuelsvoleurs. Grâce au partenariat entre élus, administration, police qui a lieu à la mairie et grâceà son ouverture aux privés, le supermarché et la police marchent désormais main dans lamain, la police se déplaçant rapidement en cas de problèmes.

Nous venons de voir quels types d’actions ont été mises en œuvre dans le quartierPéri-Moncey. La réhabilitation du quartier est passée par celle des espaces publics etdes bâtiments, de nombreuses actions de sécurisation ont également eu lieu. La questionqui reste en suspend est la suivante. S’agit-il réellement d’une réhabilitation ou d’unesécurisation visant peut-être la requalification du quartier ?

167 Boutiques proposant divers types de services : vente de vêtements, produits exotiques, musiques, objets artisanaux,restauration…

168 LERAY David, Directeur supermarché Casino Gabriel Péri, entretien du 8 juillet 2004, Annexes.169 Ibid.

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Partie 3 : Les effets de la réhabilitation

Nous allons à présent nous intéresser aux effets du réaménagement du quartier. Unedes particularités de ce réaménagement réside dans le fait qu’il est accompagné d’uneimportante sécurisation. La réhabilitation prévoit le maintien des populations actuelleset l’attrait de nouvelles, en revanche la requalification suppose de donner une nouvellequalification à l’espace Péri-Moncey et sous-entend que ses pratiques actuelles soientmodifiées.

Chapitre 1 : Un quartier réhabilitéLe projet pour le quartier, tel qu’il a été énoncé par la ville, était de « mettre en œuvrela reconnaissance de l’existence d’un quartier populaire et multiculturel en centreville ». 170

Pour ce faire, la voie de la réhabilitation a été choisie. Il s’agit de valoriser le quartieret son identité, de lui donner une place dans la ville, de permettre le maintien de lapopulation actuelle tout en devenant attractif pour les personnes extérieures, le tout par uninvestissement fort et rapide. Les personnes extérieures au quartier ne doivent plus avoirpeur de passer par Moncey, elles ne doivent plus contourner le quartier.

Un travail était à faire sur l’image du quartier, sa présentation, sur son habitat, sescommerces, sur le fait qu’il est reconnu dans tout le département comme le plus grand lieud’achat et de vente de drogue ainsi que d’objets volés.171

Le danger inhérent à cette réhabilitation réside dans le fait qu’en changeant l’image duquartier on risque de le changer, de lui faire perdre son âme. Le Lieutenant Bar parle denormalisation du quartier et il explique qu’il faut intervenir sur les petites choses de la vie,il faut éduquer ces gens qui arrivent en quelques heures d’avion, qui se retrouvent dansce quartier et qui continuent à vivre comme ils vivaient antérieurement. Cette éducationpasse selon lui par l’apprentissage d’un certain nombre de règles de vie.172 Cependant,ces cultures, ces attitudes, ces rassemblements, ce marché aux puces, ces « hommesdebout » qui parlent fort et une langue que nous ne comprenons pas, sont autant de traitsqui rassemblés fondent l’identité du quartier.

La ville a choisi de faire de la place Gabriel Péri une place urbaine, un carrefour,un lieu de passage où se croisent : métro, tramway, autobus, voitures, piétons. Elle arepris aux « hommes debout » cet espace qu’ils s’étaient appropriés au début du siècledernier, et lui a donné un autre usage : espace de circulation. La place Bahadourian, enrevanche, qui se situe en retrait du quartier a été pensée de façon à faciliter la discussion,les rassemblements, etc. « La volonté était de faire circuler sur la place [Gabriel Péri],

170 Service Développement Territorial, La politique de la ville à Lyon », op. cit. p. 8.171 HUGUET Patrick, Maire du 3ème arrondissement, entretien du 9 juillet 2004, Annexes.172 LIEUTENANT BAR, du Commissariat divisionnaire centre, entretien du 1er juillet 2004, Annexes.

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sachant que l’on a respecté les réunions de ces gens en aménageant […] des espaces[…]c’est ce qu’on appelle l’agora » 173

Aujourd’hui même si cette place apporte énormément de lumière et de vie dans lequartier, il n’est pas dit que les rassemblements s’y installent. La ville a choisi de changerl’usage de la place Gabriel Péri, de reporter ces pratiques place Bahadourian mais peut-elle faire le poids face à l’histoire ?

C’est un pari bien ambitieux que de penser pouvoir déplacer et déposer un peu plusloin 100 ans d’histoire et de pratiques. A ce pari, Tarek Maaoui n’y croit pas tellement« on ne peut pas enlever ça, ça fait partie de l’histoire du quartier […] c’est un lieude rencontre, un lieu de regroupement, quand on va dire à un jeune […] : samediaprès-midi, tu vas où ? Et bien c’est soit Bellecour, soit Part- Dieu [ ici c’est pareil]les cheybanis 174 de la région, quand je dis région ce n’est pas forcément queLyon, connaissent la place du pont, s’ils doivent venir à Lyon, c’est place du pont[…], s’ils cherchent un truc, ils vont à la place du pont, ça fait partie de la vie duquartier, c’est l’histoire du quartier, c’est une habitude, c’est ancré. […]Ils retrouventcette atmosphère d’Alger, Tunis ou de Rabah » 175

Les effets de la réhabilitation (comme les « non-effets ») se font ressentir dans plusieursdomaines : sur les commerces, le marché sauvage, la délinquance, les rassemblements,la population.

Au niveau des commerces, la réhabilitation a permis de re dynamiser le quartier. Ils’agit surtout des commerces de proximité or les logements du quartier avaient tendanceà rester vacants ce qui réduisait la clientèle potentielle. En 2001, des commerçants de larue Moncey se sont réunis et ont créé une association « la diagonale Moncey ». Cetteassociation à vocation à leur donner plus de poids auprès des pouvoirs publics et elle vise àcréer « également une dynamique commerciale » 176 : semaine à thème, illuminations,etc. de façon à faire connaître et reconnaître les commerçants de la rue Moncey.

Parallèlement à la réhabilitation, des subventions du FISAC, qui dans le quartier vontvers l’implantation de commerces de proximité, devraient contribuer à dynamiser le secteur.De nombreux commerces en rez-de-chaussée sont fermés, certains depuis plus de dix ans ;leur réouverture devrait participer à rendre le quartier attractif. La réhabilitation Péri-Monceya également redonné confiance à certains commerçants qui hésitaient, pensaient fermerboutique et qui ont décidé de se maintenir.

Autre effet intéressant le supermarché casino était, il y a un an encore, déficitaire àhauteur d’un million de francs à l’année, en raison de la multiplicité des vols qui y étaientcommis. La question s’est donc posée de la façon suivante, pour son directeur : « soiton tirait le rideau, soit on avançait ». 177 Grâce à un soutien de la ville ajouté à leurinvestissement dans la sécurisation des lieux, en sept mois, le déficit a été divisé par vingt.Le maintien de ce supermarché en plein cœur du quartier devrait également contribuer àréaliser le projet de la ville : maintenir la population actuelle et attirer de nouveaux résidents.

173 Ibid.174 Il s’agit des personnes âgées issues de l’immigration Nord-Africaine.175 MAAOUI Tarek, responsable agence ARRADEP, Entretien du 28 juin 2004, Annexes.176 FELLAHIAN Stéphane, « La « Diagonale Moncey » a vu le jour sous le signe de l’union », Le Progrès, 19 novembre

2001.177 LERAY David, Directeur supermarché Casino Gabriel Péri, entretien du 8 juillet 2004, Annexes.

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En ce qui concerne les marchés sauvages qui avaient régulièrement lieu sur la place, ilsemble que cette activité ait disparue. Les fontaines et les arbres laissent, en effet, peu deplace à cette pratique qui semblait tant gêner certains habitants, à cause des immondicesqu’elle générait. Cependant, si l’on avance jusqu’à la place Ballanche, juste derrière le CLIP,on peut constater que quelques personnes proposent encore des objets sur des étalagesde fortunes disposés à même le sol.

La réhabilitation du quartier a également eu un effet sur les actes de délinquance. Toutd’abord, au sein des résidences, les dégradations se font rare, le respect des lieux qu’inspireune résidence rénovée et propre, doublée de l’activité du dispositif « présence tranquillité »semble avoir réduit efficacement les actes de vandalisme. Ceci a engendré une baissedu sentiment d’insécurité qui ajoutée à la rénovation des parties privatives a permis auxbailleurs de relouer leurs logements restés longtemps vacants.

Ensuite, en dehors des résidences, le trafic, sur la place du pont, la vente à la sauvetted’objets volés, de cigarettes, de haschich, etc. s’est réduit. La raison du ralentissement decette activité se trouve dans la sécurisation du site par la présence policière et les camérasdont nous parlerons un peu plus loin mais également dans la disparition du marché auxpuces. Les dealers et trafiquants profitaient de l’ambiance brouillonne de la place pourvendre leurs produits ; mélangés à toute cette foule, ils passaient inaperçus. Cependant, leréaménagement des lieux n’a pas pour autant mis fin à ces trafics, ils se sont simplementdéplacés à l’intérieur du quartier.

Les regroupements – quant à eux – qui avaient lieu chaque jour sur la place se sontfait plus rare, les fontaines qui jaillissent du sol décourageant quiconque voudrait s’installer.Cependant quelques personnes viennent encore quelquefois s’installer, d’autre se sontdéplacées place Ballanche : « on fait dix mètres et là comme ça ils sont à l’ombre, c’est mieuxencore » explique Tarek Maaoui178 Les effets des réaménagements sur les regroupementssont difficiles à mesurer. Les fontaines ont été inaugurées en juin, soit juste avant lesvacances. Depuis la chaleur et les départs en vacances de nombreux habitants peuventêtre la cause de la diminution de ces rassemblements. Peut-être qu’en septembre, la placesera de nouveau investie, peut-être que les « hommes debout » iront place Ballanche ;l’avenir le dira.

Le quartier Péri-Moncey est historiquement populaire, la réhabilitation qui est en courspourrait nuire à cet aspect du quartier et par la même occasion à la volonté affichée despouvoirs publics de mixité par ses catégories sociales, par l’origine de sa population, parses commerces ou encore par son habitat.

Si le marché sauvage s’installait, chaque jour, sur la place, c’est parcequ’historiquement, les habitants de ce quartier étaient issus des couches populaires et cemarché était un moyen pour eux de se faire un peu d’argent mais également de se vêtirà un prix abordable. En supprimant ce marché, on attire une nouvelle population – qu’ilaurait indisposée – mais cherche-t-on à maintenir l’ancienne, permet-on à l’ancienne derester ? Selon le Lieutenant Bar, l’objectif visé est de réhabiliter en laissant la possibilitéaux gens qui habitaient le quartier de récupérer leurs logements. Pour SCIC Habitat, l’enjeuest de « conserver une certaine population sur le quartier » et « d’accueillir des famillesautres qui viennent s’installer sur le quartier ». 179 Cette volonté de mixité, on latrouve aussi place Bahadourian où se côtoie la place de palabre pour le méditerranéenet le boulodrome pour le côté lyonnais. Au niveau des commerces, le quartier propose

178 MAAOUI Tarek, responsable agence ARRADEP, Entretien du 28 juin 2004, Annexes.179 GARCIA-VILLARD Claire, responsable agence SCIC, entretien du 19 juillet 2004, Annexes.

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des commerces de proximité très divers. Côté Péri-Moncey, se côtoient toutes sortes demagasins arabes et juifs. Côté septième, on trouve à l’ouest de la rue de Marseille denombreux commerces et restaurants asiatiques tandis qu’à l’est se succèdent maquisafricains, magasin d’accessoires de coiffure et produits cosmétiques africain, etc..

Le FISAC – qui subventionne les propriétaires désireux d’ouvrir ou de remettre en étatleurs commerces – cible pour accorder ses financements « certaines activités en fonctionde la vie du quartier ou en fonction des orientations qu’il veut [lui] donner ». 180 Pourle 11 rue Moncey, il s’agira d’une boulangerie.

Le risque qui découle de la réhabilitation est celui de mettre fin à l’ambianceméditerranéenne qui colle à ce quartier et par là même de mettre fin à son côté populaire.La volonté affichée est de garder les populations actuelles mais on change leurs habitudes,on met fin à leurs pratiques pour ne pas indisposer de nouveaux arrivants. Le jour del’inauguration du 16 rue de l’épée, un passant faisait remarquer à Gérard Collomb qu’il avaitfait nettoyer le quartier de tous ses trafiquants un peu avant son arrivée et donc un peuavant l’arrivée des journalistes.

On peut également se poser la question suivante : est-ce que la réhabilitation ne vapas faire de la Guillotière un « Saint Jean » ? Les loyers ne vont-ils pas augmenter si lesconditions de vie s’améliorent et si le sentiment d’insécurité diminue ?

Patrick Huguet expliquait lors d’un entretien qu’à plus long terme « le fait de retraitercertains immeubles, de financer la rénovation d’immeubles privés fera que l’onchangera un peu la sociologie du quartier. » 181

Encore une fois l’avenir nous le dira.Pour conclure, il semble que les effets de la réhabilitation se fassent sentir par de

meilleures conditions de vie pour les habitants ; cependant l’objectif étant de les maintenir làmais aussi de faire du quartier un lieu attractif pour de nouveaux arrivants, il est à craindreque le prix à payer pour cette salubrité soit une perte d’identité.

Pour l’instant, les différentes actions menées sur l’espace public se traduisent surtoutpar la suppression de la visibilité des activités les plus dérangeantes et par la sécurisationdu quartier.

Chapitre 2 : La sécurisation du quartierSi l’objectif énoncé par la ville pour le quartier est la réhabilitation, de nombreuses actionsde sécurisation sont également mises en œuvre. La présence policière quasi continue, lasécurisation de l’espace public par l’éclairage, par la fermeture d’une bouche de métro, parles contrôles d’accès a l’entrée des immeubles, par la vidéosurveillance, etc. sont autant dechoix qui visent à faire de cette zone un lieu sécurisé, contrôlé, surveillé.

Commençons par la vidéosurveillance, sa mise en service est très récente, il est doncimpossible pour l’instant d’en évaluer les effets sur les actes de délinquance182. A priori on

180 Ibid.181 HUGUET Patrick, Maire du 3ème arrondissement, entretien du 9 juillet 2004, Annexes.182 De plus les effets de cette technique sont très difficiles à mesurer, comment savoir si la baisse de la délinquance doit lui

être attribuée ?

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peut penser que la présence de ces caméras devrait dissuader le délinquant potentiel depasser à l’acte mais elles peuvent aussi le motiver pour commettre un acte délictueux –avec une cagoule par exemple – juste devant la caméra. Filmer les délinquants est unechose, les arrêter en est une autre.

Un autre effet de la vidéosurveillance est le contrôle social qu’elle engendre : noussommes surveillés de partout dans le quartier, dans la rue, dans les stations de métro et detramway, dans les supermarchés et même dans les immeubles où l’on met des portes enverre afin d’avoir une visibilité totale sur le hall depuis l’extérieur. Les caméras surveillentl’espace et l’espace est fait de façon à ce que les gens puissent se surveiller entre eux :visibilité des halls mais également éclairage et restructuration des espaces publics afin qu’iln’y ait aucun recoin caché.

La vidéosurveillance peut éventuellement aussi amener à l’exclusion de certainespopulations : c’est l’effet dénoncé par l’association « non à Big Brother »183

« Ces caméras sont un outil supplémentaire pour chasser les plus pauvres d’entre nousdes quartiers populaires. La protection des biens et des commerces et le contrôle social,induit par la vidéosurveillance, provoquent un recul du « sentiment d’insécurité » qui amèneinvestisseurs et spéculateur immobiliers à acheter et rénover pour ensuite louer vendre desbiens immobiliers à des prix inabordables pour la majorité de la population de la Guillotière. »

La sécurisation du quartier passe également par ce que Charles Romieux appellel’auto surveillance184. Il a mis en place une charte d’engagement : lui s’engage à repeindre,rénover, etc. en échange les locataires s’engagent à lui signaler les incivilités ou délitscommis au sein de la résidence et ce par le biais de fiches incidents spécialement conçuespour les locataires. Si les effets de cette co-surveillance semblent être positifs sur lesentiment d’insécurité des gens qui ainsi sentent l’attention qu’on leur porte, en revanche,elle pose des questions quant à l’éthique d’un tel acte. La co-surveillance suppose ladélation, elle incite des personnes civiles à en dénoncer d’autres. Or ces personnes, à ladifférence des policiers, ne sont pas assermentées, ce qui pose problème quant à la véracitédes faits constatés et ce qui peut porter atteinte à l’intégrité de l’individu ainsi qu’à seslibertés. Ce n’est pas sans rappeler une période sombre de l’histoire de France : le régimede Vichy.

Un autre élément intéressant à étudier dans le cadre de cette réhabilitation est lepartenariat qui est mis en place pour sécuriser le site. Il s’agit de l’un des points forts duprogramme, il a permis de saisir au mieux les problèmes du quartier, ses enjeux et d’yapporter les réponses adéquates. Une remarque peut toutefois être formulée. MonsieurDavid Leray, directeur du supermarché Casino se félicitait de l’impact du partenariat mis enœuvre avec la police au sein d’une commission de sécurité en expliquant que désormais lapolice se déplace quand il les appelle. Mais n’est ce pas là son rôle ?

Ce partenariat s’est exprimé à plusieurs reprise et entre autre par le biais descommissions communales de prévention situationnelle où ont été décidé par exemple lafermeture d’une traboule et la condamnation d’un accès au métro.

Ceci nous permet de mettre en relief un autre effet de la sécurisation des espaces :il s’agit d’une autre insécurité : le fait d’avoir fermé ces accès peut représenter, en casd’incendie, un véritable danger pour les personnes concernées qui auraient, le cas échéant,pu s’enfuir par ces issues.

183 Non à Big Brother, Tract pour une manifestation contre la vidéosurveillance.184 ROMIEUX Charles, Directeur de l’OPAC du Rhône, entretien du 11 juin 2004, Annexes.

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Enfin la limite peut-être la plus importante de cette sécurisation est sans doute le risquede transfert. Les trafics, par exemple, se sont déplacés sur l’arrière du quartier en directionde la place Ballanche. Pour répondre à cela, un projet d’extension de la vidéosurveillanceest étudié. Mais si le problème se déplace à nouveau – ce qui est à prévoir car si les camérasdissuadent, elles ne règlent rien – alors faudra-t-il mettre des caméras dans toute la ville ?

Pour conclure, la réhabilitation du quartier est passée par deux ensembles d’actions :la réhabilitation, tout d’abord ou rénovation de l’espace, du bâti, des équipements, uncoup de peinture sur le quartier pour le rendre plus agréable et plus attractif mais aussiune sécurisation qui fait de chaque habitant un suspect légitimant contrôle et surveillancepermanente dans le secteur.

Dans les années 1990, on avait mis un rideau avec le CLIP devant la difficulté etla misère que connaissait ce quartier. Mais le rideau ne règle pas les problèmes. Dansle cas présent, de surcroît, les habitudes liées à l’histoire ont fait que ses acteurs ontcontinué à vivre ou survivre devant le rideau. Aujourd’hui, s’agit-il de maintenir ces acteursen améliorant leur décor et/ou s’agit-il de faire de cet espace un quartier attractif pourd’autres habitants et d’autres pratiques ?

Chapitre 3 : La vérification de l’hypothèseFinalement la place Gabriel Péri vient de connaître une rénovation de plus.

« Coincée entre les façades d’immeubles bourgeois des grandes avenuesvoisines, proche de la préfecture du Rhône, évoquant trop l’Afrique du Nord, face auxnouveaux repères européens lyonnais, située à une quinzaine de minutes à pied de laplace Bellecour et de la Part Dieu, au cœur du réseau de transport avec le métro et unedizaine de lignes de bus la traversant, elle est destinée à une radicale transformation.Les aménagements nourrissaient l’ambition de faire de cette place de stationnementun lieu de « fluidité » » 185 . La liaison Presqu’île Part Dieuest au cœur des débats depuisla première moitié du siècle. Des aménagements ont été réalisés par touches successivessans stratégie globale. Les équipes municipales alternaient entre volonté de destruction etde rénovation. Si bien que plus personne n’investissait dans le quartier et il est tombé dansl’abandon.

Les modification qu’a connu le quartier Péri-Moncey à la fin du 20ème siècle(destruction du Prisunic, construction du CLIP, réaménagements des espaces…) traduisentla mise en œuvre d’une rénovation parmi d’autres, d’une rénovation de plus pour cequartier populaire au sein d’un arrondissement. Or les objectifs de Péri-Moncey ne sont pasforcément en adéquation avec ceux du troisième arrondissement.

Quelle est l’intention des pouvoirs publics ?Les spécificités du quartier, son identité peuvent-elles s’accorder avec sa position

stratégique entre deux centres importants de Lyon ?La rive gauche est la rive gauche, c’est un fait, ce n’est pas le centre ville. Le quartier

de la Guillotière qui fût autrefois une ville banlieue de Lyon demeure excentrée vis à vis ducentre, de la Presqu’ïle. Cependant si l’on considère les autres zones de la ville de Lyon, onpeut constater que se développent d’autres espaces importants, le centre commercial de la

185 BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit., p. 66.

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Part Dieu et la Préfecture par exemple. Auparavant la gare de Perrache était la principalegare de Lyon, et l’axe Perrache – Hôtel de Ville constituait le centre ville. Aujourd’hui laville de Lyon, la ville active, la ville commerciale s’est quelque peu décentrée. La Part Dieuse développe et plus au Sud également on repense la zone de Gerland. Or, la Guillotièrese situe en plein cœur de ce triangle, elle est un axe de communication majeur et tend àdevenir une place importante et stratégique dans la ville.

Cette situation nous amène à nous interroger quant à la compatibilité entre les vocationsque la municipalité veut donner à ce quartier et ses pratiques actuelles, la visibilité de seshabitants, son ambiance particulière…

Tout un travail est effectué par la politique de la ville sur la mémoire du quartier ce quipeut laisser présager une volonté d’intégration des lieux au développement de la ville touten préservant leur âme. De la même façon, lors de la présentation du projet de réhabilitationde l’immeuble se situant 16 rue de l’Epée , « l’histoire de l’immeuble a été illustrée parGuy Boirayon et exposée au centre social. Le photographe a fixé sous ses clichésquelques réflexions de Pierre-Simon Ballanche, humaniste philosophe très impliquédans la réhabilitation des quartiers, ainsi que des paroles des habitants du quartier.Ce verbatim particulièrement touchant montre l’attachement des habitants à leurquartier. 186 »

Le passé est très présent dans l’esprit des habitants, cinquante ans après avoir changéde nom, la place Gabriel Péri est toujours appelée par certains place du pont ou place dup’.La Guillotière ne compte que 150 ans d’intégration à la ville, elle a longtemps eu des rapportsdistancés avec Lyon, elle n’est qu’une bourgade au débouché du pont le plus ancien deLyon.

Il s’agit aujourd’hui d’une communauté de communautés qui s’est formée avec le tempspar superposition et intégration de couches de populations d’origines ethniques, sociales,culturelles différentes et c’est ce qui a donné sa particularité au quartier Moncey.

Aujourd’hui peut-on l’intégrer au reste de la ville, au développement des zonesavoisinantes ? Peut-on modifier au niveau politique, par une réhabilitation ce que des sièclesd’histoires ont construits ?

Pour mener à bien une intégration, il me semble qu’il faut maintenir les spécificitésou alors il ne s’agirait plus d’intégrer un quartier et de le réhabiliter mais de le requalifier.La réhabilitation suppose de le rénover tout en conservant ses usages et usagers, larequalification quant elle offre une nouvelle qualification au quartier.

La communauté de la Guillotière s’est formée avec le temps, les gens ont appris às’accepter, à se respecter, les commerces juifs et musulmans s’y installent côte à côte etaujourd’hui la municipalité projette de rendre les lieux attractifs à de nouveaux ménages. Lerisque est qu’une population chasse l’autre, les pratiques peuvent ne pas être compatibles.Pour les uns la place Gabriel Péri, par exemple, est un lieu de rassemblement, pour lesautres c’est un espace de circulation. Aidée par la ville, par les réaménagements, si unepopulation doit être chassée, ce sera sûrement celle dont les habitudes sont empêchées.

Quoiqu’il en soit, la mixité décidée au niveau politique a peu de chance de donnernaissance à une identité, ceci n’étant par ailleurs pas forcément l’objectif recherché. Lamunicipalité pouvant voir d’un mauvais oeil la présence d’une identité spécifique au seinde sa communauté. Ceci dépend des objectifs que la ville s’est donné. Elle peut opter pour

186 OPAC du Grand Lyon, « Le Moncey » une résidence, symbole d’un quartier en plein renouveau !, http://www.opac-grandlyon.com/PDF/DP/Rue%20de%20l%27Ep%E9e.pdf

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un conglomérat de quartier, mettant en valeur les spécificités de chacun d’entre eux ; ouelle peut préférer une ville homogène, refuser la diversité, les identités spécifiques et lespratiques particulières. Que souhaite l’équipe municipale de Lyon, une ville uniforme ou uneville où l’on change d’ambiance au fur et à mesure que l’on change de quartier ? Pour lequartier Moncey, l’originalité ne semble pas vouloir être préservée.

Les aménagements qui ont été effectués sur la place Gabriel Péri visent semble- t-il, àen faire un lieu de circulation et à déplacer ses anciens usages et pratiques plus en arrièredu quartier.

S’agit-il de réhabiliter ou de requalifier ? En 1990, si c’est la réhabilitation qui avait étéchoisie, c’est certainement un commerce qui aurait vu le jour à la place du Prisunic maisc’est le CLIP qui a été construit, l’équipe municipale a pensé que ce dernier cacherait untemps la misère, reflétant par ses miroirs la bourgeoisie architecturale environnante, ensuitele quartier aurait pu être rasé. Mais, les habitants du quartier ont continué à se rassemblerdevant le CLIP pendant et une fois les travaux terminés. Une anecdote amusante nous est

confiée par Azouz Begag dans son ouvrage Place du pont ou la Médina de Lyon 187 a ce

propos. En 1996 sur les grillages du chantier de la place Gabriel Péri, on pouvait lire :LE GRAND LYON PROTEGE VOTRE ENVIRONNEMENT TRAVAUX

D’ASSAINISSEMENT« La boutade involontaire ferait presque sourire [dit-il]. En effet la ville deLyon dans son désir de se hisser au rang de « ville internationale », a depuislongtemps considéré le bourg, le faubourg, la ville de la Guillotière, puis lequartier de la place du pont, comme une gêne dans la géographie de sesambitions. Alors des questions insolentes surgissent : quel environnementle Grand Lyon veut-il protéger ? De quel type d’assainissement s’agit-il ? Laville n’est-elle pas déjà internationale avec son quartier cosmopolite ? Notreregard s’écarte un peu de cette plaquette d’avertissement et se pose au pieddu bâtiment CLIP. Là à l’entrée du couloir qui sépare les deux parties et quimène à la rue Turenne, stationnent une dizaine d’hommes maghrébins, sous unpanneau qui indique PIETONS, SUIVEZ LA FLECHE… , mais ces piétons là nesuivent pas les directions indiquées, ni aucune recommandation de circulation.Ils stationnent. 188»

En 1998, la question est posée de la façon suivante : il faut soit tout raser, soit agir. Doncsoit requalifier, soit réhabiliter. Face à l’insécurité et au sentiment d’insécurité grandissant :immeubles en ruine, équipements vétustes, délinquance, trafics… l’équipe municipale deRaymond Barre opte pour la rénovation. L’objectif affiché est la réhabilitation du quartier,on veut maintenir les populations actuelles et l’ouvrir à de nouvelles, mais sur le terrain, lestravaux visent à changer l’usage des espaces. La place Gabriel Péri, place de discussion,de rencontre, de rassemblement sera une place de circulation, un carrefour important de laville. La place Bahadourian obtient la qualification d’espace mixte proposant des espaces dejeux et des espaces destinés aux palabres. La municipalité voudrait déplacer ces gens, cesimmigrés dont la visibilité nuit, à l’arrière du quartier, place Bahadourian. Mais cette dernièren’a pas d’histoire, elle n’évoque pas les mêmes souvenirs tandis que place Gabriel Péri,chacun se souvient du temps où il y avait le Prisunic, du temps où l’on pouvait acheter sur la

187 BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit., 83 p..188 Ibid., p. 12.

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place des vêtements pas chers, du temps où l’on pouvait venir y chercher des nouvelles dubled. Il s’agirait donc d’une requalification, on a requalifié un espace : la place Bahadourian,pour y déplacer une qualification que l’on a retiré à un autre espace, peut-être parce quetrop visible : la place Gabriel Péri.

La ville a choisi d’offrir un autre espace pour ces usages, elle souhaite, dit-elle, maintenirces populations. Mais sur le trajet qui les séparent de leur nouveau lieu de rencontre, cesimmigrés qui font toute la vie et l’ambiance de ce quartier pourraient bien se perdre. Unefois la place Gabriel Péri « assainie » le quartier pourrait bien avoir changé d’adresse189.

L’insécurité et l’insalubrité ont été les prétextes à refaire et à intégrer le quartier maispeut-être aussi à cacher voir déplacer sa communauté. A la fermeture du Prisunic – quecertains suspectent d’être la conséquence de la volonté de la municipalité d’accélérer lareprise en main du quartier – le bâtiment a tout de suite été rasé laissant place à un chantiersans réels projets pendant plusieurs années. Cependant pour la ville il fallait détruire, letemps du changement était arrivé.

Aujourd’hui encore on tente le changement avec une méthode plus radicale. On changeles pratiques, on rend impossible le marché sauvage qui aidait tant de gens à mieux vivre etqui donnait son âme au quartier. On fait du secteur un lieu attractif, on réhabilite, on sécurise,on attire les classes moyennes et par la même on risque de mettre dehors les classes lesplus populaires.

Pour conclure il semble que la réhabilitation dont parle la municipalité vise en réalité àsécuriser le quartier pour le rendre attractif à de nouvelles populations et donc à de nouvellespratiques, à une nouvelle identité, à une nouvelle qualification.

Le réaménagement des espaces vient de se terminer, la rénovation des immeublesest en cours, cette réhabilitation nous sommes en train de la vivre aussi il est difficile d’enmesurer les effets cependant elle génère des inquiétudes, les habitants sont partagés,certains se réjouissent d’enfin pouvoir vivre dans des conditions décentes, d’autres décèlentderrière toute cette rénovation la volonté de la ville de nettoyer le quartier de ces élémentsgênants. « A côté de la préfecture, ça fait tache. » 190 explique un passant. Tarek Maaouiresponsable du dispositif « présence tranquillité » voit dans ces investissements le signed’une volonté de modifier l’identité du quartier191 et il ajoute : « vous êtes à deux pas dela Préfecture, à deux pas de Bellecour, vous êtes en plein centre ville, le seul pointnoir… Comme disait un ami, quand on parle de la place du pont, c’est la verrue deLyon, une verrue on peut pas la laisser […] , ce qu’ils veulent faire c’est épurer lequartier. » 192

Fantasme ou réalité, l’avenir nous le dira, mais ce qui semble sûr, c’est que l’on ne peutpas garder une banlieue en centre ville or c’est bien à des problèmes traditionnellementréservés aux banlieues que l’on est confronté.

Ces inquiétudes nous amènent à comparer le cas du quartier Péri-Moncey avec ceuxde Saint Jean ou de la Croix Rousse.

Prenons le cas de Saint Jean, dans les années 1960-1970, la réhabilitation du VieuxLyon commence doucement. Après des années d’abandon et de désintérêt et après avoir

189 En 1989 déjà, Bruno Caussé, journaliste présageait ce départ, cité dans Ibid., p. 78.190 Expression recueillie à l’occasion des rencontres effectuées pour mon questionnaire.191 MAAOUI Tarek, responsable agence ARRADEP, Entretien du 28 juin 2004, Annexes.192 Ibid.

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échappé à des démolitions inconsidérées, à des projets de voie express… Le Vieux Lyonva devenir en 1964 le premier quartier sauvegardé de France. Grâce à André Malraux, quiétait alors Ministre des affaires culturelles (1959-1969) sous le Général De Gaulle, il faitétablir une loi relative à la protection du patrimoine historique et esthétique et à la protectionimmobilière193. Le quartier sera réhabilité, les habitations seront restaurées. Aujourd’hui leVieux Lyon fait partie des quartiers inscrits au patrimoine de l’UNESCO, mais plus qu’àune réhabilitation c’est à une requalification que l’on a eu affaire. En effet le Vieux Lyontraditionnellement populaire, a vu ses habitants partir et ils se sont fait remplacer par despopulations plus riches. On a changé la qualification de cet espace pour en faire un lieuattractif pour cette nouvelle population et pour les touristes. S’agit-il de faire de la Guillotièreun autre Saint Jean ? Ce quartier contourné par tant de gens, que souhaite-t-on en faire ?Quel avenir souhaite t’on lui offrir ?

On pourrait par exemple en faire un pôle économique, Le quartier Péri-Moncey ades atouts, il se caractérise par la présence dans ses rues de nombreux commercesatypiques. Entre la place Gabriel Péri et la place Bahadourian, ce sont les produits de laméditerranée, alimentation, vêtements, musiques, épices… Les gens viennent de loin pours’approvisionner, au-delà de la ville, au-delà de la région, le quartier est devenu une véritableréférence pour ses commerces atypiques. Côté septième on trouve également à l’Ouest dela rue de Marseille un nombre impressionnant de boutiques, d’épiceries et de restaurantsasiatiques. A l’Est de cette même rue, et tout au long de la Grande rue de la Guillotièrejusqu’à la rue Jean Jaurès, se sont les maquis, les salons de coiffure, les boutiques deproduits cosmétiques africains. Tout ceci pourrait développer une dynamique commercialedans le quartier, les gens viendrait à la Guillotière pour sa spécificité : ses commercesmultiethniques. Les quartiers parisiens de Barbès, de la Goutte d’Or ou encore de Pigallesont devenus des pôles attractifs de Paris par leurs spécificités : tissus, joaillerie populaire…

La réhabilitation du quartier aurait pu préserver son identité en construisant, parexemple, à la place du Prisunic un espace commercial dans l’esprit des magasins Carrefouren Turquie. L’enseigne du grand hypermarché s’est adapté au style oriental en proposantdes magasins, en Turquie par exemple, agencés sur le modèle du souk.

Ce développement économique autour de la place Gabriel Péri viendrait préserver etrenforcer l’âme du quartier et le rendrait d’autant plus attractif..

Dans le projet de réhabilitation affichée actuellement, si c’est la réhabilitation et doncle maintien des populations qui est réellement recherché, une chose est sûre on ne perçoitpas ce qui est mis en avant pour l’identité du quartier mais plutôt une réhabilitation par lasécurité.

On ne perçoit pas les spécificités du quartier, la perte d’identité d’un lieu entraîne chezses habitants la fin de leur sentiment d’appartenance ce qui risque d’engendrer leurs départsvoire la révolte, la violence, l’insécurité.

Cette réhabilitation donne l’impression que pour la ville de Lyon la seule spécificitédu quartier est son insécurité. Plus que dans une recherche de spécificité on est dans unenfermement du quartier.

Un autre point consiste à s’interroger sur le fait qu’il ait fallu le prétexte de l’insécurité etde l’insalubrité afin qu’un partenariat se mette en place. Monsieur David Leray, le directeurdu supermarché Casino, se réjouit de l’intérêt de la police pour ce quartier.194 Il fait remarquer

193 DELFANTE Charles, 100 ans d’urbanisme à Lyon,op. cit., p. 66.194 LERAY David, Directeur supermarché Casino Gabriel Péri, entretien du 8 juillet 2004, Annexes.

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que, grâce au partenariat police, élus, administration et privé, à présent les policiers sedéplacent en cas de problème. Mais n’est ce pas là leur rôle ? Pourquoi est-ce que cetintérêt commun traduit par ce partenariat, mis en place autour des problèmes d’insécurité,n’est il pas un enjeu politique permanent ? Pourquoi est ce que ces partenariats ne se sontpas institutionnalisés dans tous les quartiers de la ville ? Le CLS s’applique aux quartierssensibles. Enfin, pourquoi ces partenariats ne concernent-ils pas tous les domaines de la vielyonnaise donnant naissance à une politique globale pensée dans le temps, conjointementpar les élus, les techniciens, la population concernée.

Toutes ces questions m’amènent à penser que s’il y avait un réel projet politique, si lapolitique globale prenait le pas sur les différents acteurs des projets, que les projets étaientpensés au delà des alternances politiques, la ville connaîtrait moins de difficultés. Il faut unepolitique globale et pensée durablement, qui résiste aux alternances, de façon à pouvoirréfléchir à ce que l’on veut faire de la ville dans son ensemble. En réhabilitant par touchessuccessives et ponctuelles on ne donne pas de sens à la ville. Où est le centre ? Quellessont les particularités, les spécificités de chaque quartier. Aujourd’hui à Lyon il y a plusieurscentres, il manque une vision globale et durable sur la ville.195 Peut-être qu’avec une visionpolitique qui dépasserait les enjeux des acteurs de la « réhabilitation », le quartier n’auraitpas connu cette succession, sans objectifs réels, d’aménagements et de réaménagementsqu’il a connu depuis si longtemps et certainement que ce quartier ne serait pas devenu cequ’il est aujourd’hui, un lieu mise en marge, laissé pour compte.

De plus un partenariat entre le politique, les promoteurs et les habitants doit être misen œuvre de façon à ce que les projets urbanistiques soient intégrés. La réhabilitation, sielle est pensée en partenariat avec son utilisateur entraîne le respect des lieux. Il n’y a plusbesoin de demander aux usagers de se co-surveiller. Avec les fiches incidents à remplir parle locataire196, le bailleur les contraint à posteriori à surveiller, à pratiquer la délation, alorsqu’il aurait pu les impliquer à priori, développant ainsi leur responsabilité et leur respect deslieux, leur respect des lieux et provoquant par la même la sécurisation de l’espace.

Nicolas Sarkozy, alors qu’il était Ministre de l’intérieur, expliquait qu’en rendant lesgens propriétaires ils prendraient soin et respecteraient leur lieux de vie. Il ne s’agit pasforcément de les rendre propriétaire, je ne pense pas, ce n’est pas une question d’argentou de propriété, la preuve en est que les bailleurs du quartier l’avait laissé tomber enruine. La solution est peut-être plus à rechercher dans l’appropriation des lieux. Si leshabitants s’approprient la place Bahadourian, que les équipements leur conviennent alorsils la respecteront. Bien entendu il existe aussi des actes de malveillance que le sentimentd’appartenance ne suffit pas à supprimer mais le fait de s’approprier un espace engendresouvent son respect. A l’inverse quand un espace est aménagé de façon à mettre fin à sesutilisations traditionnelles, alors ceci peut faire naître la volonté de le dégrader chez sesusagers.

Lorsque l’on parle de l’œil du village qui surveille, on entend en réalité que les gensco-habitent, qu’ils se connaissent, on ne vole pas quelqu’un que l’on connaît. Ces genspartagent quelque chose, une identité et ils se respectent. Ils sont co-citoyens d’un espace,ils y co-habitent en revanche dès lors qu’ils se co-surveillent – par les fiches incidents, pardes halls visibles depuis l’extérieur – tout le monde devient un suspect potentiel, l’individuprime sur la communauté, il y a perte d’identité, il n’y a plus d’appropriation des lieux et cela

195 A l’occasion de mes entretiens et de mes rencontres, on m’a souvent demandé si ce travail était demandé par la ville,est-ce que cela traduit une attente ?

196 C’est le cas pour l’OPAC du Rhône.

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peut laisser place aux dégradations, l’individu se déresponsabilise. Les lieux deviennentdes lieux communs, d’autres s’y installent ce qui accentue les dégradations. L’insécuritéapparaît et avec elle les solutions sécuritaires.

Pour finir, la rénovation du quartier Péri-Moncey traduit une situation paradoxale entreune envie affichée de réhabiliter et des actions fortes sur la sécurisation des lieux. Laquestion se pose donc de la façon suivante : Que souhaite la municipalité pour ce quartier :sa réappropriation, autrement dit le rendre rénové à ses usagers actuels, ou simplement sasécurisation ? L’avenir nous en dira plus mais comme nous l’avons souligné plus haut cequi est tout de même mis en avant pour l’instant : c’est la sécurisation.

Le risque est de donner naissance à un espace requalifié. Le quartier pourrait perdreson identité. La requalification du quartier motivée par sa sécurisation entraînant unemodification des usages, la fuite de ses habitants, la perte de ses spécificités, c’est l’âmedu quartier populaire d’hier et d’aujourd’hui qui risque de s’éteindre.

« Ce quartier est paradoxal. Il enchevêtre les temporalités et les territoires. Lacentralité et la périphérie sont ici en oscillation. Elles dépendent des regardsque nous portons sur le lieu. Lieu de la déshérence foncière ou plateformecommerciale internationale ? Haut-lieu de l'immigration et du commerce ethniqueou lieu de l'aménagement incertain ? Les réponses à ces questions ne sont pasunivoques. Elles mettent chaque fois en jeu les rapports de propriété des uns etdes autres avec ce territoire, en d'autres termes l'appropriation que nous nousfaisons de ce site. Et celle-ci dépend des emblèmes que les groupes sociauxse constituent à partir de ce territoire. Le CLIP, Bahadourian, le Prisunic ou leshommes debout sur la place du Pont sont autant d'emblèmes renvoyant à autantde groupes sociaux, d'espaces et de temporalités. Les hommes debout sur laplace du Pont ne viennent-ils pas figurer là ce que nous recherchons tant parailleurs et qui nous parait parfois ici répulsif : des formes d'agora, d'urbanité etde convivialité dans la ville. »197

197 BERTHET Jean-Marc, « Le quartier Moncey à l’épreuve de l’agglomération », op. cit., p ; 3-4.

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Conclusion

En réhabilitant le quartier, ses logements, ses espaces, en mettant en commun le travail dedifférents partenaires, est-il possible de créer un espace réapproprié et sécurisé et de mettrefin à une situation historique de mise en marge tout en préservant l’identité du quartier ?

En ce qui concerne la vérification de notre hypothèse, en réhabilitant un quartier ilme semble qu’il est possible de créer un espace réapproprié et sécurisé, de l’intégrer audéveloppement de la ville, de garder son identité. Pour ce faire, élus, bailleurs, locataires,doivent marcher main dans la main vers un objectif partagé et explicité. Mais il faut s’endonner les moyens : mettre en liaison ces acteurs, les faire s’investir, ensemble, dans unepolitique économique, par exemple, tout en maintenant l’identité et les particularités desrésidents.

Penser Péri-Moncey comme un pôle commercial spécialisé dans les produits de laméditerranée pourrait être une bonne solution, un compromis intéressant entre l’intégrationdu quartier et le maintien de son identité. Cependant il faut faire attention aux conséquencesdes choix établis, il faut penser la ville dans son ensemble et réfléchir aux spécificités et àl’identité de chaque quartier.

Dans le cas présent, ces voies n’ayant pas été empruntées, les décisions sont prisesau pied du mur, les actions sont mises en œuvres au coup par coup, il n’y a pas d’objectifsclairs et consensuels. Le risque est de construire un nouveau « Saint Jean » mettre fin àl’existence de ce quartier populaire, à cette « Little Algérie » en centre ville.

Pour conclure une rénovation doit être pensée, ce doit être un projet global, leshabitants doivent y être associés, ils doivent être impliqués et ce n’est pas un prétexte –celui de l’insécurité – qui doit les motiver. On peut se servir du prétexte de l’insécurité pourrénover mais ce n’est pas le prétexte à l’objectif visé. Tousprojet. doit être pensé dans unensemble, au niveau de toute la ville.

La volonté pour Péri-Moncey est la réhabilitation, l’avenir confirmera ou infirmera cettevoie.

Le quartier Péri-Moncey pourrait bien devenir un « Saint Jean » ou un « Croix Rousse »,la réhabilitation même si elle affiche tenter de préserver l’identité du quartier, risque enimposant de nouvelles pratiques, en empêchant les anciennes, en aseptisant les lieux, encachant ce qui nuit aux nouvelles orientations, tournées vers l’Europe et vers l’attrait desnouveaux ménages, de lui faire perdre son âme et par la même sa population.

Ce qui semble évident c’est qu’il ne deviendra pas un « La Duchère ». La Duchère étaitavant un ensemble de jardins et est devenue un lieu dortoir où l’on retrouve les classespopulaires. Le quartier Péri-Moncey ne devrait pas prendre cette qualification, deviendra-t-il pour autant un lieu de vie ? Ces habitants retrouveront-ils cet esprit villageois, dont ilsont la nostalgie, et qui s’exprime par la présence de commerces de proximité, d’habitudeset de pratiques propres au quartier, ou par cette atmosphère si particulière qui avait donnéà Péri-Moncey le surnom de Médina ? Nous ne pouvons pas encore y répondre et c’estcertainement pour cela que l’avenir du quartier semble provoquer tant d’inquiétudes etd’interrogations.

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Conclusion

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Le secteur disposant d’un pôle commercial attractif, il pourrait être dynamisé, mais est-ce cette voie qui a été choisie ?

En conclusion même si un prétexte peut lancer une rénovation ce n’est pas ça qui doitle motiver le projet doit être réfléchi globalement et durablement par l’ensemble des acteursconcernés.

A l’occasion de ce mémoire j’ai été confronté à un paradoxe : alors que l’on parle deréhabilitation et que la municipalité laisse entendre qu’elle a l’intention de rénover le quartieret de maintenir ses habitants ; les espaces visibles ont été réaménagés et « débarrassés »de leurs éléments dérangeants, en sécurisant ou en les déplaçant plus loin dans le quartier,laissant transparaître une requalification. En effet un certain nombre d’actions mises enœuvre risque d’exclure les populations actuelles et d’en accueillir de nouvelles, nouvellespar leurs origines sociales, culturelles, ethniques ainsi que par leurs pratiques. Rehabilitationou requalification, ce paradoxe on le retrouve également dans le discours des élus – ily a une envie de réhabilitation, la politique de la ville parle d’assurer la reconnaissanced’un quartier populaire et multiculturel en centre ville198 pourtant on agit fortement sur lasécurisation. Qu’est ce qui est gênant dans le quartier : l’insécurité, l’insalubrité, la visibilitédes immigrés ? Et si l’insécurité n’était qu’un prétexte à la requalification de cet espacedont l’usage actuel ne correspond plus aux ambitions de la ville qui vise l’ouverture surl’Europe ? Alors ce serait l’histoire de la mort programmée d’un quartier peut-être un peu tropméditerranéen, un peu trop brouillon, un peu trop original dans un espace dont la vocationrecherchée est la fluidité et la lisibilité.

S’agit-il d’une réhabilitation ou d’une requalification ? C’est en amont que cela doitêtre décidé, c’est peut-être ce qui a été fait mais la traduction sur le terrain de ce quiest affiché n’est pas clair, les discours sont équivoques, les actions le sont également.Des manifestations sont organisées sur le thème de la mémoire du quartier, un concertde musique marocaine à eu lieu, cet été, sur la place Bahadourian mais il s’agit demanifestations contrôlées et décidées. Les pratiques spontanées, quant à elles n’ont plustellement d’espace. La réhabilitation du quartier pourrait amener à « une prise en comptede l’apport de ses populations dans le domaine économique et culturel, et passeulement par des expositions de babouches et de derboukas, mais, au-delà dela tolérance et de l’assistance, par une reconnaissance au titre de l’histoire et dupatrimoine urbain de ces espaces dont le rayonnement et la réputation s’inscriventbien au-delà des frontières nationales. » 199 . Sa requalification en revanche pourraitprofondément modifier le quartier, lui imposer une nouvelle qualification. Le quartier n’a pasété rasé et reconstruit pour une nouvelle qualification comme ce fut le cas à la Part-Dieumais il tend à devenir un nouveau Saint Jean, à perdre son identité et ses spécificités.

Les populations seront-elles maintenues ou exclues ? L’avenir nous répondra parl’orientation que prendra le quartier. Il ne s’agit pas de dire si ce projet est bon ou mauvaismais de comprendre que s’il n’est pas pensé dans une globalité, la réhabilitation risqued’échouer sur un lieu sécuriser et non réapproprié. Sur une requalification qui ne dit passon nom, une rénovation non comprise, non respectée mais contrôlée. Une rénovation sansréel projet, sans lecture possible aux enjeux floués.

Epilogue

198 Service Développement Territorial, La politique de la ville à Lyon », op. cit., p. 8.199 Cité par BEGAG Azouz, Place du pont ou la médina de Lyon, op. cit., p. 79-80.

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Nous sommes à présent au mois d’Août, le réaménagement de la place Gabriel Périvient de se terminer, au début de l’été les fontaines ont été inaugurées, la place estquasiment vide, seuls quelques hommes supportent le soleil qui « tape » fort les miroirs duClip accentuant la réverbération. D’autres hommes sont un peu plus loin, en arrière, sur laplace Ballanche, debout le long des barrières et discutent à l’ombre. Le quartier est propre,la circulation y est fluide et les espaces sont clairs ; les deux places – place Gabriel Péri etplace Bahadourian – situées à chacune des extrémités du quartier assurent l’ « illumination »du secteur. Les espaces y sont visibles, leurs usages lisibles, rien n’a été laissé au hasard.

A l’intérieur du quartier, le long de la rue Moncey et dans ces rues adjacentes, lestrottoirs et la chaussée sont propres, nouvellement pavées, les immeubles semblent moinsdélabrés, quelques uns ont encore les fenêtres cassées ou murées, on entend au loin lamusique orientale qui émane de chez le vendeur de disques tandis que le marchand detapis sort dans la rue pour saluer un cousin qui rentre du pays.

Une voiture de police est en stationnement depuis ce matin rue Montebello, elle est enretrait du quartier mais est garée de façon à ce que chacun puisse la voir.

Au cœur du quartier, se dégage toujours cette atmosphère qui lui vaut le surnom de« Médina », les parfums de menthe et d’épices sont toujours là, l’ambiance y est peut-êtremoins brouillonne.

La place Gabriel Péri quant à elle a été rendue à sa vocation urbaine et semble avoirperdue son ambiance méditerranéenne. Mais nous sommes au mois d’Août, il fait chaud, lesriverains sont rentrés au bled, il va falloir attendre septembre pour commencer à entrevoirles conséquences de ce réaménagement.

Réhabilitation ou requalification il faudra du temps pour juger.

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200 Les articles qui portent la mention non signés sont des articles recueillis dans une revue de presse effectuée par l’agence

d’urbanisme et sur lesquels les noms d’auteurs n’apparaissent pas toujours.

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Annexes 1 Les entretiens

BADONNEL Stéphane, Agent de développement Contrat de Ville du 7ème arrondissement,entretien du 17 mai 2004

LIEUTENANT BAR, du Commissariat divisionnaire centre, entretien du 1er juillet 2004

BOS Michel, Adjoint du 7ème arrondissement délégué aux déplacements urbains,entretien du 7 août 2003

Dechatte Jean-Christophe, Conducteur d’opération, SCIC Habitat Rhône-Alpes,Entretien du 6 juillet 2004

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DE COSTER Mireille, Premier adjoint au maire du 7ème arrondissement, entretien du15 juin 2004

GARCIA-VILLARD Claire, responsable agence SCIC, entretien du 19 juillet 2004

HUGUET Patrick, Maire du 3ème arrondissement, entretien du 9 juillet 2004LE CALLOC’H Michel, Ingénieur sécurité technique CLS, entretien du 6 août 2003LERAY David, Directeur supermarché Casino Gabriel Péri, entretien du 8 juillet 2004MAAOUI Tarek, Responsable agence ARRADEP, entretien du 28 juin 2004RAPICANO Dominique, Responsable clientèle SACVL, entretien du 16 juin 2004ROMIEUX Charles, Directeur de l’OPAC du Rhône, entretien du 11 juin 2004COMMISSAIRE SOLA, du Commissariat divisionnaire centre, entretien du 21 juin 2004THURA Audrey, Responsable clientèle OPAC du Grand Lyon, entretien du 17 juin

2004-08-20VIALAY Jean-Pierre, Chef de Service CLS, entretien du 5 août 2003VIALAY Jean-Pierre, Chef de Service CLS, entretien du 22 juin 2004

Annexes 2 Les comptes rendus CCPSPlace Gabriel Péri

Rue MarignanImmeuble 16 rue de l’EpéeImmeuble 7 rue de l’EpéeImmeuble 11 rue MonceyVidéosurveillance

Annexes 3 Règlement et fiche incident OPAC duRhône

RèglementFiche incident

Annexes 4 Questionnaire et Analyse, SéminaireMonsieur Paul Bacot

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/!\ A consulter sur place au centre de documentation de l'Institut d'Etudes Politiques deLyon /!\

Annexes 5 Extraits du CLSDiagnostique local de sécurité

Fiches action thématiques n°16 – 20 – 23 – 24Fiches actions territorialesAvenant habitat, fiches 38 à 49DOCUMENTS NON COMMUNIQUES, voir version papier au Centre de Documentation

Contemporaine de l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon

Résumé Le quartier Péri-Moncey est un territoire fortement marqué par le passé. Les pratiqueset spécificités qu’il connaît aujourd’hui sont inscrites dans son histoire, il est un lieu depassage de par sa position géographique mais également un lieu d’arrivée, de rencontreet de rassemblement pour les immigrés. Ce quartier n’est rattaché à Lyon que depuis150 ans et depuis, il a longtemps été mis en marge par la ville. Le bâti et les espacesse sont dégradés. En 1998, après plusieurs tentatives de réaménagement, la municipalitéopte pour une réhabilitation du quartier. L’objectif est d’assurer la reconnaissance d’unquartier multiculturel et populaire en centre ville, de maintenir ses populations et de l’ouvrirà de nouvelles. Cependant, la ville modifie les usages des espaces, elle n’a pas de projetclairement énoncé pour ce quartier, ses actions risquent de lui faire perdre son identité.La situation laisse apparaître un paradoxe : alors que l’on parle de réhabilitation et quela municipalité laisse entendre qu’elle a l’intention de rénover le quartier et de maintenirses habitants ; les espaces visibles ont été réaménagés et « débarrassés » de leurséléments dérangeants, en sécurisant ou en les déplaçant plus loin dans le quartier, laissanttransparaître une requalification.

Mots clés Réhabilitation, Requalification, Sécurité, Identité, Quartier.

Abstract The district Péri-Moncey is a territory strongly marked by the past. The habits and thespecificities which it knows today are registered in its history, it is a passage way due to

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its geographic position but also a place of arrival, of encunters and of gathering for theimmigrants. This district is connected to Lyon only for 150 years and since, it has beenput during a long time in aside by the city. Buildings and spaces have been degraded. In1998, after several attempts of renovation, the municipality opts for a rehabilitation of thedistrict. The objective is to ensure the recognition of a multicultural and populardowntowndistrict, to maintain its populations and to open it to news ones. However, the city modifiesthe practicies of the spaces, it has no project clearly expressed for this district, its actionsrisk to make it lose its identity. The situation lets appear a paradox: whereas we speak aboutrehabilitation and whereas the municipality lets understand that it intends to renovate thedistrict and to maintain the inhabitants; the visible spaces were reorganized and « cleared »of their disturbing elements, by making it feel secure or by moving them farther in the district,letting show through a requalification.

Key-wordsRehabilitation, Requalification, Security, Identity, District.