Upload
others
View
1
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
U N I V E R S I T É P A R I S 1 P A N T H É O N - S O R B O N N E
MASTER M2 MANAGEMENT
SPECIALITE PROFESSIONNELLE :
RESSOURCES HUMAINES ET RESPONSABILITE SOCIALE DE L’ENTREPRISE
MEMOIRE D’ANALYSE
OPERATIONNALISER LA PERFORMANCE SOCIALE ?
UNE ADAPTATION DES FONCTIONS RH INCONTOURNABLE.
REDIGE ET SOUTENU PAR :
DANIELE TALMONT -FAIVRE
PROMOTION JB 2015
DIRECTEUR DES TRAVAUX :
FLORENT NOËL
DATE DE LA SOUTENANCE :
Mots clés : Performance sociale, Ressources humaines, Management, Opérationnalité, Parties
prenantes, Salariés
I N S T I T U T D ’ A D M I N I S T R A T I O N D E S E N T R E P R I S E S D E
P A R I S
2
L’UNIVERSITE N’ENTEND DONNER AUCUNE APPROBATION NI
IMPROBATION AUX OPINIONS EMISES DANS CE MEMOIRE :
CES OPINIONS DOIVENT ETRE CONSIDEREES COMME PROPRES A LEUR
AUTEUR
3
REFERENCES
MASTER MANAGEMENT – M2 -
SPECIALITE PROFESSIONNELLE :
RESSOURCES HUMAINES ET RESPONSABILITE SOCIALE DE L’ENTREPRISE
PROMOTION JB 2015
TITRE DU MEMOIRE: OPERATIONNALISER LA PERFORMANCE SOCIALE ?
UNE ADAPTATION DES FONCTIONS RH INCONTOURNABLE CONFIDENTIEL : NON
REDIGE ET SOUTENU PAR : Danièle Talmont Faivre
ADRESSE : 26 rue Sellenick – 67000 Strasbourg
TELEPHONE : 0603969424
E-MAIL : [email protected]
DIRECTEUR DE MEMOIRE Florent Noël
DATE DE DEPOT DU MEMOIRE: LE 13 NOVEMBRE 2016
RESUME
Le thème très actuel, de performance sociale surgit de manière récurrente à travers
les discours des dirigeants d’entreprises. Mais, même si cette notion nous renvoie à une idée
d’amélioration de la qualité de vie au travail, par la prise en compte de l’idée de « social », il
s’agit bien in fine, d’agir pour le profit de la performance économique et globale de
l’entreprise. Toutefois, le flou persiste : de quoi parle-t-on ? Au-delà des finalités affichées, des
pratiques et des réalités de l’entreprise qu’en est-il des valeurs véhiculées par ce concept ?
Dans ce travail, nous étudions comment ces notions résonnent et, s’il existe une opérationnalité
possible de la performance sociale.
Aussi à partir d’une interrogation sur les effets d’une re-nomination de la « Direction
des ressources humaines » en « Direction de la performance sociale », au sein de notre
entreprise, Pôle emploi, nous abordons dans une première partie de ce mémoire la question du
sens au travers de considérations étymologiques et de lectures académiques. Ensuite nous
interrogeons la place de la commission européenne dans cette profusion d’outils proposés et
valorisés par la communauté professionnelle (CEO, DRH, consultants, agences de notations,
etc.). Puis par le biais de l’expression de salariés de tous horizons, nous analysons si leur
perception peut nous offrir une définition de la performance sociale au sein de l’entreprise :
une opérationnalité possible de celle ci. Et plus encore, si l’évolution d’une DRH en Direction
de la performance sociale (DPS) est pertinente ou non dans notre contexte économique actuel.
Cette troisième partie porte notre regard sur un changement de paradigme majeur des fonctions
RH.
Et, si cette étude ouvre sur les prémisses de ces changements, plus encore elle nous
interroge, lorsque l’entreprise réorganise, lorsqu’elle parle de mobilité professionnelle,
d’agilité, de nouveaux talents, etc. sur le traitement du salarié, de sa différenciation avec
certaines parties prenantes externes : tout simplement du devenir de son statut de salarié !
4
REMERCIEMENTS
A travers ces quelques lignes, je souhaite plus particulièrement apporter mes
remerciements à Florent Noël, mon directeur de mémoire, qui a su prendre le temps et l’écoute
nécessaire pour me faire cheminer d’idées en idées dans ce labyrinthe de la performance
sociale.
Par ailleurs je souhaite remercier l’ensemble des professeurs, qui nous ont apporté leurs
connaissances, leur savoir et nous ont permis de nous ouvrir à d’autres horizons. Une mention
spéciale à Cynthia, qui a toujours été là pour nous faciliter la tâche.
Si je parle du corps enseignant, je ne peux que le référer à l’ensemble de notre promo et
des personnes qui la constituent : des personnalités riches, différentes, issues d’horizons variés,
des personnes qui ont su prendre le meilleur de chacun, en laissant les petites imperfections des
uns et des autres ne pas empiéter sur le groupe. Je les remercie chacune pour cette
bienveillance, pour leurs apports et pour la bonne humeur qui nous a accompagné durant ces 15
mois malgré la charge de travail de tous.
Je souhaite remercier mes proches, ma famille et mes amis. Mes enfants qui ont dû faire
face à un frigo vide : Mélia, Médéric et Sophie, leur père, Laurent qui a su se substituer à mes
absences. Mes amis pour leur attention particulière et leur relecture : Pascal, Sylvie, Véronique,
Guy, Hubert, Dominique, Pierre Yves, …
Pôle emploi qui m’a permis de réaliser ce cursus. Plus particulièrement mes collègues
proches qui m’ont soutenue dans toute cette aventure, puis tous ceux qui se sont prêtés à la
démarche en répondant au questionnaire : Carmen, Laetitia, Sophie, Valérie, Emmanuelle,
Angélique, Pascal, Éric, Isabelle, Hervé, Catherine, Gaëlle, Vanessa, Jean Yves, Nathalie,
Gauthier, Saliha, …
Je terminerai, avec un remerciement particulier à tous les DRH externes à Pôle emploi,
qui ont pris un moment pour répondre et mieux encore pour échanger téléphoniquement,
curieux et intéressés par ce sujet : Sabine, Julien, Hubert, Isabelle, Éric, Lionel, Frédéric, …
Plus simplement, à tous ceux qui ont cru en moi, m’ont aidée, et accompagnée dans
cette belle aventure.
5
SOMMAIRE
INTRODUCTION
I. Première partie — La performance sociale : étymologie et
fondements conceptuels
1.1. Approche étymologique des termes de « performance » et de « social »
1.11. La performance 12
1.11.1. Etymologie du terme « performance » 12
1.11.2. La performance dans le champ de la linguistique et de la psychologie 13
1.11.3. La performance à travers l’approche théorique de Bourguignon 14
1.11.4. La performance au service de l’entreprise à travers l’approche
théorique de Morin et col. 15
1.12. Le social 17
1.12.1 Etymologie du terme « social » 17
1.12.2 Le « social » dans le champ du travail 18
1.12.3 Le « social » dans le champ de la sociologie 18
1.13. La « performance » et le « social » 21
1.2. La performance sociale au cœur des lectures académiques
1.21. Retour sur la naissance d’un concept : la marque américaine 23
1.21.1. Carroll (1979) 23
1.21.2. Wood (1991) 24
1.21.3. Clarkson (1995) 25
1.21.4. Mitnick (2000) 25
1.22. Les apports de la littérature européenne 25
6
II. Deuxième partie — L’opérationnalisation de la performance
sociale : de l’Europe au monde professionnel
2.1. L’Europe comme levier du mode opératoire de la performance sociale
2.11. Quelques éléments de contexte 28
2.12. La commission européenne 28
2.2. Les regroupements de professionnels (associations, lab, …), cabinets
de consultants, agences de notation, etc.
2.21. Les agences de notation extra-financière ou agences de notation 30
2.22. Les regroupements professionnels 32
2.23. Les think tanks 34
2.24. Les cabinets de consultants 35
2.25. Tableau de synthèse 39
III. Troisième partie — L’opérationnalité de la performance
sociale à travers la perception des salariés
3.1. Présentation de la démarche liée à l’analyse de l’expression de salariés
3.11. Les choix méthodologiques qui se sont imposés 41
3.12. La démarche liée aux questionnaires 42
3.13. Le texte d’accompagnement 42
3.14. Les questions posées 43
3.15. Les retours de mails 43
3.16. Le logiciel IRaMuTeQ 45
3.2. Analyse des retours
3.21. Analyse des retours de la question « une » (E1) 45
3.21.1. La performance sociale comme lien social 47
3.21.2. La performance sociale comme démarche de gestion 47
3.21.3. La performance sociale comme élément de Qualité de vie au travail 48
3.21.4. La performance sociale comme facteur économique 49
7
3.21.5. Essai d’analyse 49
3.21.6. Tableau de synthèse de la question « une » - Q1 50
3.21.7. Eléments de lecture 50
3.22. Analyse des retours de la question « deux » (Q2) 51
3.22.1. Une Direction de la performance sociale qui « gère » les ressources
humaines par le management 53
3.22.2. Une Direction de la performance sociale qui pilote
la performance humaine 54
3.22.3. Une Direction de la performance sociale complexe 55
3.22.4. Une Direction de la performance sociale qui se dote de « moyens » et
d’outils innovants 56
3.22.5. Réajustement des classes de la question « deux » 57
3.22.6. Tableau de synthèse de la question « deux » 58
3.22.7. Eléments de lecture 59
3.23. Eléments d’analyse des questions « une » et « deux » : regard croisé 59
3.23.1. Eléments de lecture du tableau de synthèse 59
3.23.2. Tableau de synthèse 60
3.23.3. Eléments d’analyse 61
CONCLUSION 62
BIBLIOGRAPHIE 66
ANNEXES 71
8
INTRODUCTION
Dans le cadre de la réforme territoriale, depuis le 1er
janvier 2016, Pôle emploi1
réorganise sa structure et son organisation régionale. A cette date, l’entité « Pôle emploi
Alsace » (tout comme celle de Loraine et de Champagne Ardenne) n’existe plus en tant que
telle, mais est intégrée au sein de la nouvelle région « Grand Est ».
La mise en œuvre du regroupement « grande région » relève du Directeur régional, le
portage politique est fort : notes de cadrages spécifiques, communications auprès des salariés
des fonctions supports, des managers, … à travers des focus, des séminaires, un journal papier
et un intranet spécifique. Un point d’avancée est réalisé régulièrement au niveau des instances
représentatives du personnel (CHSCT, CE). Ce regroupement impacte les fonctions d’appuis2
dans leurs organisations, à travers la mutualisation de services, des relocalisations, des
créations de pôles d’activités ou leurs suppressions, etc. Les services Ressources Humaines
(RH) et son COD-RH3 sont totalement impliqués notamment à travers l’accompagnement au
changement. L’objectif est de travailler en amont l’évolution de carrières des agents des
fonctions support et de proposer des mesures d’accompagnement spécifiques, dans le cadre de
mobilités professionnelles et de la réorganisation des services.
Pour engager ces travaux, le nouveau Comité de Direction (CODIR) Alsace
Champagne-Ardenne Lorraine est mis en place au 1er
janvier 2016. Il est constitué de cadres
dirigeants, initialisant ainsi un nouveau niveau hiérarchique. Aujourd’hui, les directeurs des
services des fonctions d’appuis, membre des anciens CODIR, (un comité de direction par
région) ont la charge de maintenir leurs activités sur leurs territoires tout en étant responsables
de domaines (exemple : trois Directeurs des ressources humaines en place géographique, et
respectivement responsable de la « gestion administrative-paie », de la « GPEC et du
recrutement », des « relations sociales, de la santé et des conditions de travail »).
1 Pôle emploi : Acteur du marché de l’emploi, constitué de 54000 collaborateurs, a pour mission de faciliter le retour à l’emploi des
demandeurs et d’offrir aux entreprises des réponses adaptées à leurs besoins de recrutement. Pôle emploi est créé le 19 décembre 2008, par la
fusion de l’ANPE (service public) et de l’ASSEDIC (droit privé) : loi du 13 février 2008. 2 Les fonctions d’appuis, ou supports sont des fonctions qui ne font pas partie du processus de production. Mais elles participent à la bonne
marche de l’entreprise. A titre d’exemple : les ressources humaines, la communication, le juridique, l'informatique, le contrôle de gestion, la
comptabilité ou les services généraux, etc. Ces métiers prodiguent un niveau de service indispensable aux équipes opérationnelles et participent à la performance globale de l'entreprise. 3 COD RH : comité de direction ressource humaine.
9
Le Comité de direction (CODIR), lui est constitué de 4 grandes directions :
1 La Direction de la stratégie et des relations extérieures ;
2 La Direction de la performance sociale ;
3 La Direction financière et de la maitrise des risques ;
4 La Direction des opérations et du réseau ;
La Direction des ressources humaines n’existe plus en tant que telle, elle est renommée
Direction de la performance sociale. Et, paradoxe, sans qu’aucun élément de communication
ne soit apporté aux salariés contrairement à la communication portée pour la réorganisation.
C’est à partir de là que notre questionnement s’est ouvert, et que notre interrogation
s’est tournée vers cette nouvelle nomination qui surgissait de nulle part, telle une « génération
spontanée » pour reprendre, de manière métaphorique une notion Aristotélicienne4.
Notre problématique s’est donc formulée en ces termes :
« D’où surgit cette appellation, que signifie- t-elle ? Qu’entendre par cette association
entre « performance » et « social », dans un contexte de pressions fortes, au sein de
l’établissement ? Que penser de cette modification à un moment où les résultats, les chiffres
sont prêts à prendre le pas sur la « qualité des services rendus » ?
Ces interrogations nous ont portés à l’extérieur de Pôle emploi, vers des lectures
« internet » à travers lesquelles il fallait bien se rendre à l’évidence : « la performance sociale »
devenait un sujet. Cependant, à trop en entendre parler, nous ne savions plus vraiment de quoi
il s’agissait au point où le sens en devenait évanescent, peut être faute d’en connaître l’origine
et les enjeux.
Aujourd’hui, le constat montre que chacun y va de sa conception, de ses attentes, ou
frustrations. Tranquillement ces mots s’installent dans le paysage, deviennent un élément de
langage dont chacun se dote pour « faire avec ».
4 La génération spontanée est une notion aristotélicienne, tombée en désuétude, attribuant l’apparition d’un être vivant sans ascendant, de nulle
part et indépendamment de la matière inanimée (https://fr.wikipedia.org/wiki/Génération_spontanée).
10
Effet de mode, de marketing, traduction éphémère de ce que pourrait être la question
sociale de la responsabilité de l’entreprise, volonté de mettre la performance au service des
salariés ou inversement celle des salariés au service de l’entreprise, intention de tenir compte
de l’humain pour en faire le cœur de l’entreprise ?
Le flou persiste, de quoi parle-t-on, que mettre derrière ces termes, aujourd’hui
lorsqu’une Direction des ressources humaines devient une Direction de la « performance
sociale » ? Si notre questionnement est au départ issu de notre vécu professionnel, nous nous
en sommes très vite dégagé, afin d’ouvrir notre recherche et d’en faire une interrogation plus
généraliste.
Aussi, sans avoir la prétention de trouver un consensus sur ce que pourrait être ou ne
pas être la performance sociale, nous nous proposons d’interroger cette notion5 et d’en extraire
quelques grandes lignes afin d’ouvrir à la réflexion.
Dans une première partie, nous tentons une approche théorique de cette notion de
« performance sociale ». L’idée est de mieux en cerner la représentation, d’en comprendre le
cadre contextuel dans lequel elle est née, d’en fixer les contours.
Il nous importe de nous y retrouver dans le « bric-à-brac » théorique regroupant tout
autant la performance sociale/sociétale, que la responsabilité sociale des entreprises, où même
la qualité de vie au travail et le bien-être. Il s’agit pour nous, de simplement tenter d’en saisir
les enjeux et les évolutions pour en extraire une ligne directrice.
Dans une deuxième partie, nous nous proposons de mettre en évidence comment la
notion de « performance sociale » présente essentiellement dans la littérature américaine, a
réussi à percer en Europe. La place occupée par la commission européenne et celle prise par les
associations de professionnels, les cabinets de consultants, les think tanks 6, etc. Cette
appropriation semble permettre de rendre compte de cette notion sous une forme plus
opérationnelle et ainsi de permettre aux entreprises de s’en saisir.
5 Nous parlons de notion et non de concept, souvent ces deux termes se chevauchent sans pour autant être des synonymes. D’après le Larousse,
le terme de concept fait référence à un objet construit dans le monde scientifique. Une notion est une connaissance intuitive générale qui
synthétise les caractéristiques d’un objet mais sans prétendre à sa scientificité, elle peut également être une construction ». 6 Le think tank est un groupe ou laboratoire d’idées influentes, indépendant et à visé non lucratif. Les personnes le constituant apportent des
réflexions sur des sujets politiques, économiques, sociétales, ...
11
Enfin dans une troisième partie, nous essayons de mettre à jour ce qu’il en est de « la
performance sociale » pour les salariés : leur perception à partir de leur expression. Cet
exercice, nous permet d’envisager la pertinence de ce concept et sa possible opérationnalité au
sein d’une entreprise : plus particulièrement dans le domaine des ressources humaines.
L’objectif premier de ce travail de recherche est de « défricher » cette notion de
« performance sociale » afin d’en envisager les impacts potentiels ou pas. Puis après une
analyse et discussion croisée à partir de ces divers apports, d’ouvrir à de nouveaux débats et
réflexions.
12
I. Première partie — La performance sociale : étymologie et
fondements conceptuels
1.1. Approche étymologique des termes de « performance » et de « social »
De manière très basique, nous tentons dans ce premier temps exploratoire, de cerner la
notion de « performance sociale » à partir d’une recherche étymologique des termes et des
grands champs que ces représentations traversent. Nous utiliserons des ressources classiques
telles que le Larousse7, le Robert
8 ou des informations issues d’internet via des sites comme
Wikipédia. Nous nous attacherons déjà au mot « performance » puis à celui de « social » pour
tenter de dégager une première lecture de cette association.
1.11. La performance
1.11.1. Etymologie du terme « performance »
Son apparition date de 1838, son origine est anglophone. Son sens global précise
« accomplissement, réalisation, résultats réels » dans des champs relativement vastes.
Le terme de performance est introduit en France plus particulièrement dans le milieu des
turfistes, à propos du cheval de course et de sa manière d’être, de son comportement. Puis
rapidement, par extension de sens, il passe dans l’usage courant pour rendre compte de
résultats sportifs hors du commun, d’exploits dans le sens « d’accomplir ».
Cette idée initie au XXème siècle l’usage de ce terme pour parler « des performances » d’un
appareil. Une nuance s’opère dans cette acception plurielle, qui renvoie plutôt aux
« possibilités optimales d’un appareil ». 9
Le terme franchit un cap, et un changement de paradigme s’opère : relevant
essentiellement du monde du vivant et du mouvement, (dans ses premières significations), il
intègre ici le monde des objets.
Mais quoiqu’il en soit, le sens reste plutôt lié à l’idée de comportement, de tenue du
produit ou d’une personne dans une situation donnée, une action à produire.
Cette notion se retrouve tout particulièrement dans le milieu artistique10
, ou la
performance se réfère à l’idée d’« exécution ». Le Larousse précise : « mode d’expression
7 Le petit Larousse (2004). 8 Le Robert sous la direction d’Alain Rey (2000). 9 L’exemple cité par le Robert est celui des chemins de fer (1832). 10 Au sujet de L’art performance ou la performance de l’art, (https://fr.wikipedia.org/wiki/Performance_(art)).
13
artistique contemporain qui consiste à produire des actes, des gestes, un événement dont le
déroulement temporel constitue l’œuvre en soi ».
1.11.2. La performance dans le champ de la linguistique et de la psychologie
La linguistique s’en empare avec Chomsky11
(1963), qui oppose « to perform » :
réaliser, accomplir, à « compétence ». Nous retrouvons ici, cette même idée d’action à réaliser.
En France, Binet12
(1905), travaille à l’élaboration de tests mentaux, c’est la naissance de la
psychométrie. Ces travaux à l’origine du calcul du QI (quotient intellectuel) permettent une
mesure de la performance intellectuelle. Les résultats à un ensemble de tests permettent de
comparer la performance intellectuelle de l’enfant (résultats aux tests) par rapport à un groupe
de référence.
Avec Binet, la notion de performance introduit une nouvelle conceptualisation: celle de
mesure par comparaison à des résultats obtenus. Ce passage, met très clairement en
évidence la teinte que va recouvrir le mot performance dans l’hexagone en y associant :
« résultats, mesures et comparaisons ».
Aussi, dans le cadre d'une démarche d'évaluation, l'analyse de la performance vérifie
que l'organisation analysée réalise de façon effective et pertinente (les bonnes choses), de façon
efficiente (rapidement, au bon moment, au moindre coût) pour produire les résultats fixés ou
attendus et - in fine - répondre aux besoins et aux attentes des clients13
, au sens large du terme.
Pour l’économie, la performance économique relève tout autant des ressources que du chiffre
d’affaire14
.
A travers ce bref détour étymologique, nous pouvons extraire deux grandes familles de
sens au sujet du terme « performance » :
Le premier plutôt en lien avec la manière de faire, de réaliser une action, un acte, du
« comment ». L’aspect est plutôt comportemental avec des termes comme
11 Cité par le Robert, Chomsky est un universitaire américain spécialisé dans le domaine de la linguistique
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Noam_Chomsky). 12 Alfred Binet Psychologue français ayant mis au point avec Simon des tests de mesures de la performance intellectuelle
(https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Binet). 13 Même plus généralement à l'ensemble des « parties prenantes» dans le cadre de l’entreprise. Les parties prenantes sont plus connues en
anglais sous le nom de « stakeholders », les parties prenantes de l’entreprise regroupent l’ensemble de ceux qui participent à sa vie économique (salariés, clients, fournisseurs, actionnaires), de ceux qui observent l’entreprise (syndicats, ONG), et de ceux qu’elles influencent
plus ou moins directement (société civile, collectivité locale). Les parties prenantes sont toutes les personnes, autres que les actionnaires, ayant
un intérêt dans les activités de l’entreprise. Cf ; J. Allouche, Cours de 2015/2016 master management des ressources humaines et RSE Ŕ IAE Paris Sorbonne. 14 Exemple extrait de Wikipédia cf https://fr.wikipedia.org/wiki/Performance
14
« réalisation, accomplissement, exploit ». Ce qui semble être pris en compte est
« l’acte en soi », dans « sa réalisation », ceci pouvant s’appliquer autant à l’humain
qu’à l’objet.
Le second plutôt en lien avec les résultats obtenus et la finalité par comparaison à une
norme, une référence. Ce qui importe ici, c’est plutôt le fait « d’être le meilleur ».
De manière très schématique nous pourrions dire que la première orientation relève
plutôt du qualitatif et de « la beauté » de l’acte, dans l’ici et le maintenant15
, alors que la
seconde relèverait plutôt du quantitatif et de la « compétitivité ».
Sans que l’on puisse parler réellement de clivage ou de dichotomie entre ces deux
manières de concevoir la notion de « performance », cette distinction paraît intéressante. Les
limites et contours du terme restent flous et montrent l’impact de la sémantique dans
l’interprétation que chacun d’entre nous peut en faire.
Pour Pesqueux16
(2005), « le mot est en quelque sorte « attrape tout » dans la mesure
où il comprend à la fois l’idée d’action (performing) et d’état (performance comme étape
franchie) » et pour Saulquin et Schier17
(2007), « Lorsqu’on cherche à définir la performance,
force est de constater que le vocabulaire des spécialistes n’est pas stabilisé. La performance
est un construit qui débouche sur des divergences selon les auteurs, un mot « valise » qui a
reçu et reçoit toujours de nombreuses acceptions. »
1.11.3. La performance à travers l’approche théorique de Bourguignon18
Bourguignon (1995-1996-1997), est l’une des rares auteures à s’être attelée à cette
notion dans ses signifiés et dans une recherche de sens. En 199719
, elle se demande ce dont il
est question à travers les utilisations successives de ce terme de « performance », faites par les
uns et les autres, allant jusqu'à dire : « La perplexité s’accroit lorsque, au-delà d’un titre
d’ouvrage qui affiche la performance comme objet d’étude central, on cherche en vain une
15 A noter le terme de « performatif » est utilisé en linguistique au sujet d’un verbe qui exprime et constitue simultanément l’action qu’il
exprime du style « je performe » en anglais, il est peu usité en français. Cette distinction est intéressante dans le rapport de temps qu’elle
introduit ou pas. 16 Pesqueux Y., (2005) « La notion de performance globale », p : 7. Pesqueux est professeur au Conservatoire national des arts et métiers,
titulaire de la chaire de développement des systèmes d'organisation. 17 Saulquin J.Y., Schier G., (2007), « Responsabilité sociale des entreprises et performance Complémentarité ou substituabilité ? » in Revue des sciences de gestion, n°223, pp. 57-65 Ŕ Saulquin est professeur et doyen honoraire Ŕ ESCEM Ŕ Tours Ŕ Schier est professeur à l’université
de Rennes 1. 18 Bourguignon. A. : Professeur au Département « Approches interdisciplinaires du management » de l’ESSEC 19 Bourguignon. A., « Sous les pavés la plage... ou les multiples fonctions du vocabulaire comptable : l'exemple de la performance », in
Comptabilité - Contrôle - Audit - (Tome 3), Ed Economica, pp. 89-101.
15
réflexion introductive sur le concept … ». Elle poursuit, nous offrant cet axe de réflexion : « le
hasard n’existant pas il faut bien supposer que cette absence ponctuelle de rigueur remplis des
fonctions spécifiques »
Elle met ici en évidence la polysémie du terme et les représentations multiples qui s’y
nouent, une des formes de l’ubiquité du langage difficilement appréhendable pour le
« pragmatisme », la « gestion », et le monde du quantifiable.
Pour contourner cette question Bourguignon propose « trois sens primaires » :
1. « La performance est action » plus proche du sens anglophone, la performance serait ici
proche du processus, et « non un résultat qui apparaît à un moment dans le temps »,
Blaird20
(1986), avec une référence proche de la définition retenue par Chomsky (1965-
1971) : « elle est la mise en acte d’une compétence qui n’est qu’une potentialité » : la
capacité à réaliser …
2. « La performance est résultat de l’action » en référence à Bouquin21
(1986), la
performance ici, est plutôt liée au niveau de réalisation de l’action.
3. « La performance est succès » en lien avec les représentations de réussite, variable pour
chaque entreprise et les acteurs qui la composent.
Bourguignon propose ainsi une multitude de performances possibles, mettant en
évidence sa singularité, tout en l’inscrivant dans un champ commun et collectif. C’est cet
aspect que nous retiendrons au-delà des trois formes de performance qu’elle décrit.
1.11.4. La performance au service de l’entreprise à travers l’approche théorique
de Morin and col22
Pour aller plus loin Morin et col (1994), relèvent quatre grandes approches théoriques
de la performance ou efficacité :
« Une approche économique » : elle se fonde et repose essentiellement sur l’idée
d’objectifs à atteindre. Elle pourrait être représentée par de grandes figures des
20 Cité par Bourguignon. 21 Cité par Bourguignon. 22 Morin E.M., Savoie A., Beaudin G., (1994) « L’efficacité de l’organisation : une conception intégrée », In L’efficacité de l’organisation.
Chap 5, Edit° Gaëtan Morin, Estelle M. Morin est professeur de management à HEC Montréal.
16
théories de l’organisation comme Fayol, Weber et Taylor. Pour eux l’organisation est
basée essentiellement sur des critères économiques (économie et productivité).
« Une approche systémique » : elle met l’accent sur l’environnement de l’entreprise
et son adaptation au milieu dans ce qui va lui permettre d’être pérenne, sans
présupposer une façon d’organisation particulière. La performance est alors analysée à
travers les processus de la qualité du produit, de la rentabilité financière, de la
compétitivité. Ces approches sont portées par Von Bertalanffy, Thompson, Emery et
Trist, Katz et Kahn.
« Une approche politique » : Elle pose l’idée de légitimité de l’entreprise vis à vis
des parties prenantes. Elle permet à l’entreprise de mettre en œuvre sa stratégie tout
comme de passer des moments de crises. Ces notions sont plus récentes et s’inscrivent
dans les travaux de Pfeffer et Salancik, Hirchman, et Nord.
« Une approche sociale » : Cette dimension relève de la structure des relations entre
les individus et les groupes. L’observation porte sur la structure sociale qui constitue
l’organisation. L’efficience de cette dimension pourrait être « la cohésion sociale ».
Les individus sont considérés comme éléments constitutifs de l’organisation. L’atteinte
de ces objectifs est corrélée à ceux de la performance économique. Cette approche est
représentée essentiellement à travers l’école des sciences humaines avec Mayo,
Maslow, McGregor, Likert et Quinn23
.
Ce détour met une fois encore en évidence les interprétations multiples qu’offrent la
sémantique et les champs du possible comme le souligne Bourguignon. Morin quant à elle
nous introduit doucement vers les acceptions du terme, en lien avec le milieu de l’entreprise et
des organisations.
Cependant ce qui nous paraît important, dans ces différentes approches, reste l’idée de
la performance qui se joue sur deux niveaux : le dedans (action en soi) ; le dehors (les
résultats une fois l’action terminée).
23 Les différents auteurs de référence sont cités par Morin et col.
17
Un peu, dans ce même sens, De La Villarmois24
(1998), distingue deux dimensions de
la performance : «une dimension objective de type économique (l’efficience) et systémique
(pérennité de l’organisation) puis une dimension subjective à la fois sociale (ressources
humaines) et sociétale de l’organisation. »25
Il poursuit « La performance peut alors finalement être considérée comme un mode de
construction des frontières entre le « dedans » au regard du « dehors » de l’organisation, d’où
l’importance performative du recours à la notion. ». Une autre manière d’appréhender la
notion de dehors et de dedans.
1.12. Le « social »
1.12.1. Etymologie du terme « social »
A partir d’une démarche identique à celle utilisée pour le terme de « performance »,
nous allons tenter de cerner ce qu’il en est du « social », à travers l’évolution de sons sens ou
de ses sens.26
Dans une définition large, on peut entendre cette notion de « social », comme
l'expression de l'existence de relations entre les vivants. Certains animaux, dont la plupart
des mammifères par exemple, sont qualifiés « d'espèces sociales ».27
Dans son acception commune, le terme « social », issu du latin « socialis » (fait pour la
société, sociable, …), renvoie à celui de « société », apparu deux siècle auparavant et lui-même
issu du latin « sociétas » qui signifie « association, réunion, communauté ».
C’est au XIVème siècle que le sens dérivé apparaît avec l’idée de communication, c’est
à dire le rapport entre des personnes qui ont quelque chose en commun, pour passer à la
représentation d’union ou d’alliance.
Au XVIIème la notion de « vivre en société » prend tout son sens par opposition à celle
de « vivre à l’état de nature ». L’adjectif s’emploie alors dans ce qui est propre à « la vie
humaine dans sa dimension collective », avec l’apparition de notions telles que « contrat,
pacte, traité social, … »
24 De la Villarmois O. : Professeur des Universités, Directeur du Master Contrôle de Gestion et Audit Organisationnel, Directeur MBAIP
Océan Indien. 25 De La Villarmois. O. (1998) « le concept de performance et sa mesure » actes des XIV journées des IAE, Nantes, T.2, pp 199-216, cité par
Pesqueux (2005) in « la notion de performance globale, p. 9 et 14. 26 Analyse réalisée à partir des données du Petit Larousse illustré, du Robert et de Wikipédia (déjà cité). 27 Référence en ligne : https://fr.wikipedia.org/wiki/Social
18
La notion d’ensemble d’individu entre lesquels existent des rapports durables et
organisés prend son essor en particulier avec Montesquieu puis Rousseau (le contrat social).
1.12.2. Le « social » dans le champ du travail
En 1830, l’adjectif se spécialise, qualifiant ce qui est relatif aux rapports entre les
classes de la société, par opposition à ce qui relève de la politique et de l’économique. Avec la
révolution industrielle, une nouvelle « classe sociale » est née, celle des ouvriers ou pour
reprendre un terme marxiste « le prolétariat ». On parle alors du rapport social entre travailleurs
et employeurs, de « classes sociales ». Le droit du travail nait à cette même époque (fin du
XIXème.).
C’est subséquemment la « grande entrée » du terme « social » dans le monde du travail,
de l’entreprise. Ainsi, il crée liens et passerelles entre le patron (le représentant de l’entreprise)
et les ouvriers, (médiatisés ou pas par les syndicats), mais également entre emploi et société
(« raison sociale », « siège social »).
Le droit social devient alors un terme qui regroupe l'ensemble des règles régissant les
relations individuelles et collectives de travail : droit du travail, droit à la sécurité sociale, à
l’aide sociale, etc.
Le « Social » précise ainsi ce qui est relatif aux relations de la société pour définir
aujourd’hui l’ensemble des questions sociales dans différents secteurs.
1.12.3. Le « social » dans le champ de la sociologie
C’est avec l’avènement des sciences sociales (1908), et de la sociologie que l’étude
« des êtres sociaux » est envisagée du point de vue des groupes structurés d’individus.
Le « social » devient l’objet d’excellence de la sociologie qui pourrait se définir comme la
branche des sciences humaines qui cherche à comprendre et à expliquer l'impact de la
« dimension sociale » sur les représentations (façons de penser) et les comportements (façons
d'agir) humains. Ses champs de recherche sont très variés : travail, famille, médias, rapports de
genre (hommes/femmes), statuts et fonctions, religions, etc.
19
C'est ce qui pousse l'humain à réagir en société de façon à modifier ou préserver son
statut social28
.
Dans les grands contributeurs et initiateurs de la sociologie, nous pourrions citer entre
autre : Janne, (1908-1991), Maus29
(1872-1950), Durkheim, (1858-1917), Strauss, (1908-
2009), etc.
Janne30
(1951), est l’un des premiers à définir en ces termes, ce qu’est pour lui la
société : « C'est d'une manière générale la communauté humaine plus ou moins complexe où
l'on vit, où vivent les individus pris en considération pour l'application du mot. Les hommes
qui font partie d'une société présentent cette caractéristique d'avoir entre eux des rapports
volontaires ou involontaires, explicites ou implicites, réels ou potentiels ; ils sont à quelque
degré interdépendant et forment un groupe qui comporte généralement des sous-groupes plus
ou moins consistants et entremêlés par les membres communs qu'ils comptent. »
Durkheim31
(1974), précise sa vision sous cette forme : «une société n’est pas un
groupe d’individus qui habitent dans le même endroit géographique, elle est « avant tout un
ensemble d’idées, de croyances, de sentiments de toutes sortes, qui se réalisent par les
individus »,
Et, pour mieux déterminer et analyser le contenu de cette réalité psychique, il invente le
concept de « fait social » qui est essentiel, puisqu’il constitue et exprime la conscience
collective d’une société.
«Ils (les faits sociaux) consistent en des manières d'agir, de penser et de sentir,
extérieures à l'individu, et qui sont doués d'un pouvoir de coercition en vertu duquel ils
s'imposent à lui. »32
Pour lui, les « faits sociaux » ont une réalité objective qui peut être étudiée, comme un
physicien étudie le monde physique. Il précise et rappelle que les faits sociaux sont aussi
28 Définition succincte de la sociologie : cf : https://fr.wikipedia.org/wiki/Sociologie 29 Mauss M. et Fauconnet P. (1901), « La sociologie : objet et méthode » in article Sociologie», grande encyclopédie vol 30,
http://www.taymat.org/etudesamazighes/S1/la_sociologie.pdf 30 Janne H. (1951), « Introduction à la sociologie générale » in La Revue de l'Institut de Sociologie, n°3, pp. 345-392,
https://sociologies.revues.org/2964
Janne H. (1908-1991), est un sociologue et un homme politique belge. Il fonde en 1958, avec Georges Gurvitch, l’Association internationale
des sociologues de langue française (AISLF), (Cf Javeau C., « Henri Janne aurait cent ans », Cahiers internationaux de sociologie 2/2008
(n° 125) , p. 377-378 URL : www.cairn.info/revue-cahiers-internationaux-de-sociologie-2008-2-page-377.htm. 31 Durkheim, E., (1974), « Sociologie et philosophie » Paris, PUF, p. 79. 32 Durkheim E. (1894) «Qu'est-ce qu'un fait social ?», in Les règles de la méthode sociologique, Chap.1, publié dans Les cahiers psychologie
politique, numéro 6, Janvier 2005.
20
internes aux individus : il n'y a qu'à travers les individus que les faits sociaux peuvent exister :
« En effet, les choses sociales ne se réalisent que par les hommes ; elles sont un produit de
l'activité humaine. Elles ne paraissent donc pas être autre chose que la mise en œuvre d'idées,
innées ou non, que nous portons en nous, que leur application aux diverses circonstances qui
accompagnent les relations des hommes entre eux ».
Pour conclure sur ce point Durkheim précise : et si «Un phénomène social ne peut être
produit que par un autre phénomène social […] La fonction d'un fait social doit toujours être
recherchée dans le rapport qu'il soutient avec quelque fin sociale » 33
.
Nous n’irons pas plus en avant dans cette incursion au milieu du champ de la
sociologie, celle-ci nous entrainant trop hors de notre « objet » d’étude. De plus, même si
Durkheim, nous laisse à penser que oui, nous ne pouvons réellement dire à ce stade, si la
« performance sociale» est un « fait social », questionnement qui pourrait être une voie
d’exploration parallèle à ce travail.
Cependant, ce détour nous permet de lier très nettement les notions de société et
d’interrelations entre les hommes, que celles-ci soient directes (par exemple groupes) ou
médiatisées par une structure (institutionnelle, étatique), un enjeu (humain, économique,
juridique), au « social ».
Par ailleurs il apparaît également que sous le « social » une multitude d’acteurs s’en
font les parties prenantes, et qu’un phénomène social n’est jamais qu’interdépendant
d’un autre, pour une fin sociale donnée (implicitement ou explicitement).
Notons également qu’aucun élément ne nous laisse entendre si le « social » est
forcément en lien avec la notion de « bien » pour « l’humain » ou « la société », ou si son lien à
la morale est indéniable, même si cette question (de la morale), reste importante et traverse les
questionnements de Durkheim, au sujet de ses rapports avec le fait social34
, tout comme elle
traverse également le questionnement de la « Corporate » américaine.
Aussi s’il paraît indéniable que « le social », de par ses enjeux, a toute sa place dans la
responsabilité sociale de l’entreprise, comment entendre la notion de « performance sociale »
au sein de l’entreprise, comment composer avec l’adjonction de ces deux termes ?
33 Durkheim « le fait social » cf : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fait_social 34 Au sujet de la moral et de l’éthique dans le milieu des entreprises américaines (contrairement à l’Europe), cf. M. Ben Yedder et F. Zaddem
(institut de gestion économique de Tunis) « La responsabilité Sociale de l’Entreprise RSE : voie de conciliation ou terrain d’affrontements ? »
in de Revue multidisciplinaire sur l’emploi, le syndicalisme et le travail (REMEST), 2009, vol. 4, Nº 1,
21
1.13. La « performance » et le « social »
Louart35
(1996), nous prévient que « l’adjonction de ces deux termes peut
surprendre ». Il précise simplement que : « le premier renvoie plutôt à une idée de mesure, de
quantification ou d’évaluation, alors que le second fait plutôt référence à l’homme et à sa
complexité ». Ceci dit, pour Gilbert et Charpentier36
(2004), cette association, n’est plus si
étonnante depuis les travaux de l’école des relations humaines, où « la contribution des
ressources humaines à la performance des entreprises est généralement admise ». C’est donc à
travers la littérature que nous allons poursuivre notre recherche afin d’établir ce qu’est ou
pourrait être la « performance sociale » en terme cette fois de concept.
1.2. La performance sociale au cœur des lectures académiques
Les écrits académiques sont peu abondants sur ce sujet. Contrairement à ceux lié à la
responsabilité sociale des entreprises. Très rapidement et de manière schématique, deux grands
courants se distinguent de l’ensemble37
. Le premier dit « la théorie des parties prenantes »
identifie les bénéficiaires à l’égard de qui l’entreprise se doit d’être responsable. La deuxième
qui intègre la notion d’entreprise citoyenne identifie plutôt la manière d’être responsable. Ce
second modèle pour le dire simplement vient enrichir la théorie des parties prenantes. C’est ce
second modèle qui va initier la performance sociale et c’est de celui-ci dont il sera plus
particulièrement question ici.
La plupart des travaux plus orientés sur « la performance sociale » sont plus
essentiellement issus de la recherche américaine et se concentrent autour de quelques grands
noms. Les observations sur cette thématique, et les modèles les plus connus, datent des années
soixante-dix38
avec Carroll39
(1979). Puis viennent ensuite ceux de Wartick et Cochran40
(1985), précédent ceux de Wood41
(1991).
35 Cité par Gilbert Patrick, Charpentier Marina, (2004) in « Comment évaluer la performance RH ? Question universelle, réponses
contingentes », Patrick Gilbert : Professeur à l’IAE Paris Sorbonne (Directeur du master Management). 36 Gilbert Patrick, Charpentier Marina, (2004) « Comment évaluer la performance RH ? Question universelle, réponses contingentes » Ŕ
Publication GREGOR. 37 Cf. cours de J.Allouche (2016), IAE, Paris Sorbonne : master 2 de management des ressources humaines et RSE. 38 A travers leur article, T. Daudigeos, A. Acquier, B. Valiorgue nous offrent la genèse, des mouvements de recherche sur le sujet en portant
leur regard sur ceux des années 70. Cf. : « Que peut nous apprendre le courant de la Corporate Social Responsiveness sur les démarches de
développement durable des entreprises contemporaines ? » in Working paper serie RMT (WPS 10-10) 34 p. 2010. 39 A.B. Carroll: Professor Emeritus, University of Georgia Business Ethics, Stakeholder Management. 40 S.L. Wartick, P.L. Cochran: Professor of Manangement, Indiana University. 41 D.E. Wood: Professeur Uniserity of Victoria.
22
Il s’agit de travaux de recherches conséquents, dont seront issus deux concepts :
le « Corporate social responsiveness », (Responsabilité sociale/sociétale de
l’entreprise : RSE) ;
le « Corporate social performance », (La performance sociale/sociétale de
l’entreprise : PSE) ;
Pour tenter d’en comprendre d’avantage, et nous permettre d’aller plus en avant, nous
avons dû réaliser des détours à travers d’une part : la notion de responsabilité sociale des
entreprises, (dont nous retiendrons l’acronyme en vigueur : RSE), avec Germain42
(2004),
Trébucq43
(2004), Allouche (2005), Pesqueux (2006), Saulquin44
, Schier45
(2007), Igalens46
, El
Akremi47
, Gond48
et Swaen49
(2011).
Et d’autre part, à celle de « performance globale » à travers les articles de Pesqueux
(2004), Berland50
et Dohou,51
(2007), Salgado52
(2013), et Baret53
(2006) qui l’a définie
comme : «l’agrégation des performances économiques, sociales et environnementales»
Tenter d’en saisir quelques éléments s’est avéré essentiel pour notre compréhension du
phénomène, et ce, même si ces détours peuvent paraître longs au lecteur. Nous verrons
comment la notion est tout aussi confuse dans ces divers travaux, et comment cette conception
de « performance sociale » se mélange avec d’autres. Au gré des lectures nous croiserons
indifféremment « performance sociale » / « performance sociétale » / « responsabilité sociale
ou sociétale », etc.
Seuls les acronymes R.S.E. et P.S.E. semblent créer l’unité. Quelques auteurs prendront
parfois le temps de préciser soit la notion ou les notions, soit de poser une définition tel un
postulat, ou encore d’autres en parleront comme d’un « fait établi ».
42 C. Germain Professeur, Finance Audencia Business School 43 S. Trébucq : Enseignant-chercheur en stratégie, contrôle et systèmes d’information 44 Jean Yves Saulquin : Doyen honoraire recherche chez FBS Tours-Poitiers, ex-ESCEM 45 G. Schier : Professeur de Finance, Groupe ESCEM 46 Jacques Igalens : Professeur IAE de Toulouse et chercheur au CRM, CNRS 47 A. EL. Akremi : Professeur des universités : Toulouse 1 – Chercheur CRM & CNRS 48 Jean-Pascal Gond, professeur en RSE à la Cass Business School, City University, Londres. 49 V. Swain : Université catholique de Louvain - Louvain School of Management 50 N. Berland : Responsable d'un programme de formation : M2 Gestion/Finance/ Comptabilité, Contrôle interne, Audit 51 A. Dohou Renaud : Maitre de conférence économie et gestion IAE Dijon 52 S. Salgado : PRAG à Arts et Métiers ParisTech Campus d’Aix-en-Provence. Rattaché au CERGAM, Aix-Marseille Université. 53 P. Baret : Professeur-Associé Groupe Sup de Co La Rochelle – Economie et finances
23
1.21. Retour sur la naissance d’un concept : la marque américaine
Pour cette partie dite « Américaine », notre travail s’est plutôt basé et référé sur des
textes d’auteurs francophones, ayant traité la thématique sous divers angles, même s’il peut
être enseignant de se poser la question, des effets de traductions liés à ces termes.
Les auteurs s’accordent pour faire de la RSE (responsabilité sociale de l’entreprise), le
lieu de l’émergence du concept de « la performance sociale » des entreprises (Carroll -1999,
Wartick et Cochran -1985, Bnouni -2011). Et de la notion de P.S.E (performance sociale de
l’entreprise), un concept central de la recherche en éthique des affaires (Business Ethics) et des
travaux sur les relations entreprises-société (Business et Society), Igalens et Gond, (2003).
Les différents auteurs, Bnouni (2011), Dutton et Larouche54
(2016), sont assez unanimes pour
faire coïncider l’émergence du concept de RSE avec les réflexions de Bowen (1953)55
qui dès
cet époque soutenait « l’importance de mettre en œuvre des politiques, de prendre des
décisions ou de suivre des orientations en accord avec les valeurs de notre société »56
.
Pareillement la paternité du premier modèle de la performance sociale revient très clairement à
Carroll (1979). Celui-ci introduit en matière de RSE un nouveau concept : la « corporate
social performance » : la performance sociale de l’entreprise (PSE).
1.21.1. Carroll (1979)
Très schématiquement, Carroll (1979), développe la PSE, comme le croisement de trois
dimensions (Germain & Trébucq57
-2004, Berlan & Dohou58
-2007) :
1. « Les principes de responsabilité sociétale » (économiques, légales, éthiques et
discrétionnaires), cette dimension correspond aux fins que poursuit l’entreprise par le
biais de la RSE.
2. « Les philosophies de réponse » apportées aux problèmes sociétaux qui se présentent
calculée à partir des quatre postures qui sont : refus, contestation, adaptation et pro-
action ou anticipation.
3. « Les domaines sociétaux » au sein desquels l’entreprise est impliquée.
54 Robert Dutton est président du comité consultatif de l’école des dirigeants de HEC Montréal, est président de « Larouche consultant » 55 Howard Bowen, Economiste et moraliste américain. 56 Cité par Robert Dutton et Daniel Larouche in « La responsabilité sociale des entreprises de la bonne intention à la discipline de gestion ». 57 Germain Christophe, Trébucq S. (2004) « Au-delà de la RSE : la responsabilité globale » ; p 37. 58 Berland Nicolas, Dohou A. (2007) « Mesure de la performance Globale des entreprises » p 8.
24
Même si cette catégorisation n’est pas parfaite, aux dires même de Carroll, ces travaux
mettent en évidence que « le concept de PS peut être appliqué en utilisant un système fondé
sur les relations de l’entreprise avec les individus et les groupes concernés par ces activités et
ces objectifs » (Bnouni -2011). Il réintègre en quelque sorte la théorie des « parties prenantes »
au sein de sa nouvelle conceptualisation.
Par ailleurs Aquier, Daudigeos, Valiogue, (2010), à travers l’histoire de la RSE,
reviennent sur le mouvement de recherche de Bauer & Ackerman. Ils mettent en évidence
comment ceux-ci, en laissant de coté la question du lien entre pratiques de RSE et performance
de l’entreprise, s’exposent directement à la critique libérale qui voit la RSE comme une
doctrine foncièrement subversive.
Les auteurs font l’hypothèse (entre autres) que le développement autour de la notion de
performance sociétale de l’entreprise (Carroll, 1979) peut ainsi s’expliquer comme une
tentative de faire face à la critique libérale, et comme une stratégie de légitimation du
courant.
1.21.2. Wood (1991)
Dans la lignée des travaux précédents, Donna Wood (1991), décompose également la
performance sociale en trois niveaux, et elle la définie comme : « Une configuration
organisationnelle de principes de responsabilité sociale, de processus de sensibilité sociale et
de programmes, de politiques et de résultats observables qui sont liés aux relations sociétales
de l’entreprise »59
.
Wood, en 1991 estime qu’il n’existe toujours pas de théorie, à proprement parler,
permettant d’appréhender la notion de performance sociale (Germain & Trébucq -2004).
C’est ainsi qu’elle propose la prise en compte des concurrents, des fournisseurs, de la société
en générale et de toutes personnes ou groupes concernés par les activités de l’entreprise : « les
parties prenantes ».
Par rapport au modèle de Carroll, celui de Wood semble intégrer plus d’approches et
clarifier leurs niveaux (Igalens, Gond -2003).
59 Cité par Gond J.P. « Performance sociétale de l'entreprise et apprentissage organisationnel: vers un modèle d'apprentissage sociétale de
l'entreprise? », Journée AIMS : Développement durable et entreprise.
25
1.21.3. Clarkson (1995)
En 1995, les études de Clarkson60
montrent que les entreprises gèrent au mieux leurs
relations avec leurs parties prenantes et n’intègrent pas dans leur démarche les questions
sociales plus globales. Ces travaux se centrent plutôt sur la question des résultats
contrairement à ceux de Wood plus axés sur les processus (Closon61
-2010)
1.21.4. Mitnick (2000)
Mitnick (2000), cité par Germain & Trébucq (2004), ne trouvant toujours pas pertinent
la définition de la performance sociale de Wood (1991) ira dans le sens différent, montrant que
la « performance sociétale est l’émanation d’une configuration organisationnelle ». Il propose
dans la foulée une typologie de la mesure de la performance sociétale.
1.22. Les apports de la littérature européenne
Les reprises ou la poursuite des travaux d’auteurs européens sur le sujet n’apportent que
peu d’éléments nouveaux. Seul, Gond62
(2003), s’inscrivant dans la lignée de ceux présentés
par Clarkson (1995), et Wood (1991), propose une nouvelle modélisation de la PSE « comme
processus d’apprentissage ».
Cependant, même si comme nous l’avons relevé, les textes post-américains ne
présentent pas d’avancées majeures sur la thématique, les auteurs traitant du sujet permettent
quoiqu’il en soit de soutenir de nouvelles analyses par le biais de regards croisés.
De manière très globale, nous avons relevé que lorsqu’il s’agit de performance sociale, les
écrits sur le sujet, traitent plutôt d’un aspect de l’opérationnalité du « produit » comme nous le
verrons dans la partie suivante63
A partir de nos lectures, nous pouvons dire que la littérature francophone sur le sujet est
essentiellement faite d’articles assez éparts. Cependant, il semble évident, - au-delà de la
60 Cité par Germain C., Trébucq S. (2004) « Au-delà de la RSE : la responsabilité globale » ; p : 37 61 Closon C. « L’impact de la satisfaction des travailleurs à l’égard de la performance sociale de leur entreprises sur le soutien organisationnel
perçu, l’implication organisationnelle et la satisfaction au travail des travailleurs » p : 68 (Laboratoire de psychologie du travail Ŕ université
libre de Bruxelles . 62 Gond J.P. (2003), « Performance sociétale de l’entreprise et apprentissage organisationnel : vers un modèle d’apprentissage sociétal de
l’entreprise ».63 Cf. paragraphe 2.11 « Les cabinets de consultants ».
26
naissance du concept de RSE et de PS - que leurs articulations avec l’entreprise est très liées
aux particularités du pays, à sa culture, et ses modes d’évolutions. Le modèle américain et
l’étude de son évolution mettent très clairement ces liens en avant. Maignan et Ralston64
(2002), parlent d’« un construit social dépendant largement de contextes culturels ».
Par ailleurs, la plupart des écrits se situent dans un intervalle temps d’une vingtaine
d’année et pose la question de la pertinence du sujet en termes de « sujet d’étude », ou
« d’opérationnalité » aujourd’hui. Aussi, nous ne pouvons qu’adhérer à ce que dit Gond
(2009), en parlant cette fois de Performance Sociétale de l’entreprise (PSE) : « Les revues de la
littérature mettent en évidence le manque de fondements théoriques et d’ancrage empirique de
cette notion et des concepts qui lui sont liés, tels que celui de Performance Sociétale de
l’Entreprise (PSE) ou de sensibilité sociétale de l’entreprise »65
Mais à priori, cette confusion n’est pas nouvelle puisque déjà Votaw66
dès 1973
exprimait ainsi ses doutes au sujet de la RSE : « un terme brillant qui signifie sans doute
quelque chose, mais certainement pas la même chose pour tout le monde», idée reprise par
Ullmann qui, en 1985, assimilait les recherches sur la RSE à des « données en quête de
théorie»
En 2009, Gond encore, note : « Les synthèses récentes de la littérature expriment un
scepticisme similaire : le concept de PSE y est présenté comme un concept « insaisissable »
(Clarkson - 1995), « désorienté » (Gond - 2006), un « paradigme perdu » (Gond et Crane -
2010) ou encore une notion « fatalement défectueuse » (Rowley et Berman -2000)
[…] probablement condamné à rester en perpétuel état d’émergence (Lockett et al. -2006) »
Mais alors, en ce sens, pourquoi, si absente de la littérature depuis presque quinze ans,
elle resurgit aujourd’hui aussi fortement dans le monde professionnel à travers de multiples
offres, écrits, outils, de cabinets de consultants, d’associations professionnelles des ressources
humaines ou de dirigeants ?
64 Maignan et Ralston (2002) cités par Robert C. in « Responsabilité sociale de l’entreprise et pratiques de gestion des ressources Humaines »
Cahier du Fargo, n°1060902, IAE de Dijon.65 Gond J.P. (2009) « La responsabilité sociale de l’entreprise au-delà du fonctionnalisme : un cadre d’analyse pluraliste de l’interface
entreprise - société » Conférence à HEC Montréal http://leg.u-bourgogne.fr/rev/142066.pdf 66 Votaw (1973), chercheur américain sur la Corporate Social Responsability et la PSE « The corporate dilemma » Cité par Gond dans l’article
précité.
27
Que s’est-il passé entre les avancées théoriques américaines, (sous-entendu le milieu
des entreprises américaines) et les préconisations européennes en terme de performance
sociale?
C’est ce à quoi nous allons essayer de répondre en installant, dans notre réflexion
l’Europe et plus particulièrement la commission européenne comme pièce centrale dans le
processus d’opérationnalisation de la performance sociale dans nos entreprises.
28
II. Deuxième partie — L’opérationnalisation de la performance
sociale : de l’Europe au monde professionnel
2.1. L’Europe comme levier du mode opératoire de la performance sociale
2.11. Quelques éléments de contexte
Nous venons d’appréhender à travers ces quelques lignes la notion de « performance
sociale » depuis sa naissance et son histoire américaine. Le milieu d’affaires et d’entreprises
américain contrairement à celui européen résumait ses activités de responsabilité sociale plutôt
par des actions philanthropiques. En Europe, l’intérêt pour la RSE remonte plus ou moins aux
années 1990 et fait suite aux actions des organismes de la société civile à l’encontre des
entreprises ayant occasionnées des conséquences sociale (Danone,...) ou environnementales
graves (Shell, Total ...)67
. Par ailleurs la question reprend vigueur aux états unis avec les
affaires Enron, Arthur Andersen, Xerox, etc. Aussi pour tenter de s’approcher au mieux de la
notion de performance sociale européenne, il nous faut revenir un instant sur la définition de la
commission européenne en matière de Responsabilité Sociétale de l’Entreprise.
2.12. La commission européenne68
Celle-ci, dans son livre vert, (2001), définit la responsabilité sociale de l’entreprise
comme suit : « Le concept de responsabilité sociale des entreprises signifie essentiellement que
celles-ci décident de leur propre initiative de contribuer à améliorer la société et rendre plus
propre l'environnement. Cette responsabilité s'exprime vis-à-vis des salariés et, plus
généralement, de toutes les parties prenantes qui sont concernées par l'entreprise mais qui
peuvent, à leur tour, influer sur sa réussite ».
Elle précise :
« Au sein de l'entreprise, les pratiques socialement responsables touchent
premièrement les salaries et concernent par exemple l investissement dans le capital humain,
la santé et la sécurité, ainsi que la gestion du changement, tandis que les pratiques
écologiques responsables ont surtout trait à la gestion des ressources naturelles utilisées dans
67 Cf Allouche : cours de master 2 « management des ressources humaines et RSE » 68 10 ans après Wood et 22 après Carroll
29
la production. Elles ouvrent une voie permettant de gérer le changement et de concilier le
développement social et une compétitivité accrue. »69
Notons juste que cette orientation prise par la commission européenne, ouvre et trace la
voie aux différents rapports, et accords relevant du Bien-être et de la Qualité de vie au travail
en France. (Rapport Lachmann Ŕ2010, l’accord national intersyndical portant sur la qualité de
vie au travail- ANI -2013).
Pour Berland et Dohou, (2007), la définition européenne de la RSE permet bien de
rendre plus opérationnelle la notion de développement durable, et de caractériser la
responsabilité sociétale « dans son sens pratique » à travers le concept de « Triple Bottom
Line » définit comme suit:
1. Prospérité économique ;
2. Respect de l’environnement, respect ;
3. Amélioration de la cohésion sociale ;
C’est d’ailleurs dans ce contexte qu’émerge la notion de performance globale définie
« comme l’agrégation des performances économiques, sociales et environnementales »
(Baret, 2006 ; Raynaud, 2003)70
. Berland et Dohou posent l’hypothèse de la performance
globale comme : « Une convention sociale co-construite et négociée entre l’entreprise et ses
différents parties prenantes ».
La commission européenne, dans sa conceptualisation large, regroupe l’ensemble des
performances inhérentes aux entreprises comme indissociables. Elle ouvre de plus à la
réflexion au sujet des impacts de celle-ci tout autant sur le champ interne, qu’externe à
l’entreprise.
L’aspect lié aux parties prenantes externes étant le plus souvent pris en compte à travers
les services dédiés au RSE (même si les répartitions ne sont pas toujours aussi claires). Celles
aux internes plutôt par les services RH à travers la qualité de vie au travail, l’accompagnement
managérial, … et justement la performance sociale. L’orientation est clairement posée par la
69 Commission de la communauté européenne, (2001), « le livre vert : Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des
entreprises » http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52001DC0366&from=FR 70 Cité par Berland et Dohou.
30
commission européenne : investir dans son capital humain, la santé, la sécurité et
l’accompagnement aux changements.
Le point de jonction entre l’interne et l’externe est « l’intérêt commun ». D’un côté la
contribution de l’entreprise à l’amélioration de la société et de la planète, de l’autre une forme
de veille pour que l’ensemble de ces actions apportent à leur tour des bénéfices à l’entreprise :
du donnant-donnant en quelque sorte.
Les infléchissements européens, nous autorisent à penser que l’opérationnalité de la
« performance sociale » est de l’ordre du possible. Toujours est-il que le monde professionnel
fourmille et plus que de satisfaire simplement aux obligations légales et juridiques applicables,
il doit investir dans le capital humain, les relations aux parties prenantes et l’environnement.
La performance sociale, pour la plupart des contributeurs de l’entreprise ou spécialisés
autour de celle-ci (journalistes, consultants, agences de notation, …) devient un enjeu plus
pragmatique et opérationnel. C’est ce que nous allons observer dans ce que propose les
différents acteurs du monde professionnel.
2.2. Les regroupements de professionnels (associations, lab, …), cabinet de
consultants, agences de notation, etc.
2.21. Les agences de notation extra-financière ou agences de notation
Suite, entre autres, à cette orientation européenne, les entreprises subissent des
pressions de plus en plus fortes concernant leur responsabilité sociale. Celles-ci se déploient au
travers de divers dispositifs de régulation, d’ONG, plutôt spécialisées dans les droits de
l’homme, de l’environnement, etc.
Parallèlement se développe fortement l’investissement socialement responsable (ISR)
qui désigne « tous les placements financiers réalisés en fonction d’un arbitrage fondé non
seulement sur la performance financière des valeurs suivies, mais aussi sur la prise en compte
de critères sociétaux» (l’ORSE, 2005)71
, comme la protection de l’environnement, le respect
71 ORSE, l’observatoire de la responsabilité sociétale des entreprise, cité par D.Bessire, S.Onnee, (2006) « Les agences de notation sociétale :
la quête de légitimité dans un champ organisationnel en construction », en ligne : halshs-00548091
31
des droits de l’homme, la qualité du management des ressources humaines et des
relations avec les clients et fournisseurs.
C’est dans ce contexte qu’apparaissent en France les agences de notation72
. Elles
évaluent et notent les entreprises et les États au regard de leurs pratiques Environnementales,
Sociales et de Gouvernance (ESG), domaines non pris en compte par la notation financière.
La notation sociétale s’impose donc. En France, les principales agences sont : Vigeo73
,
Ethifinance74
, Innovest75
.
Les agences reposent initialement sur un mécanisme décalqué de la notation financière,
« ce qu’indique bien l’emploi du terme même de «notation». Une bonne note sociétale envoie
aux multiples partenaires de l’entreprise un signal sur la qualité de son engagement sociétal.
« Elle lui permet éventuellement de se concilier leurs bonnes grâces et donc d’espérer ainsi
obtenir les ressources qui lui sont nécessaires dans les meilleures conditions » (Bessire et
Onnee -2006).
Enfin, la notation sociétale fournit aux gérants de fonds ISR (investissement
socialement responsable) un dispositif d’évaluation de la RSE qui leur permet de mieux
légitimer leurs décisions et ceci d’autant plus précise Quairel76
(2004), que « le concept de
responsabilité sociale (ou sociétale) de l’entreprise est sémantiquement flou et (que) ce sont
les dispositifs d’évaluation des performances qui l’opérationnalisent ».
Ces agences s'appuient généralement sur des sources multiples : les entreprises elles-
mêmes (documents publics, questionnaires spécifiques, chartes réalisées, …), les parties
prenantes (ONG, syndicats, organisations gouvernementales, etc.) et les médias.
Si les critères d'évaluation diffèrent d'une agence à une autre, (il n'existe pas de
référentiel standard du développement durable), celles-ci s'appuient généralement sur les
grandes conventions internationales et couvrent les trois critères de l’ESG :
72 A titre d’exemple : http://www.vigeo.com/csr-rating-agency/ & http://ethifinance.com/newwebsite/ 73 Vigéo évalue tout type d'entreprises, publiques et privées. 74 Ethifinance prend en compte les petites et moyennes entreprises. 75 Innovest a créé EcoValue 21, un modèle mathématique pour calculer la plus-value économique d'une entreprise qui prend en compte les
critères ESG. 76 Quairel F. (2004) « Responsable mais pas comptable : analyse de la normalisation des rapports environnementaux et sociaux»,
Comptabilité Contrôle Audit, tome 10, vol. 1, juin, pp. 7-36.
32
1. Environnement,
2. Social,
3. Gouvernance,
Puis elles divisent la notation dans plusieurs domaines, par exemple Vigeo se structure
autour : des ressources humaines, de l’environnement, des clients et des fournisseurs, des droits
de l’homme, de l’implication dans la communauté et la gouvernance d’entreprise.
Les agences de notation extra-financière regardent à la fois les performances
économiques de l'entreprise et son comportement vis-à-vis de l'environnement, son respect des
valeurs sociales et sa politique de gouvernance.
À la différence des agences de notation financière, les agences de notation extra-
financière sont rémunérées par les investisseurs et non par les émetteurs. Les entreprises elles-
mêmes peuvent néanmoins commander une notation approfondie de leurs pratiques ESG
auprès de certaines agences. On parle alors de "notation sollicitée". Ainsi, elles peuvent
connaître leur positionnement en matière de responsabilité sociale.
Les notations extra-financière peuvent servir pour les fonds ISR qui intègrent des
critères extra-financiers dans leurs choix d'investissement avant d'intégrer des entreprises à leur
portefeuille77
.
L’agence de notation devient en ce sens un acteur pivot du système de légitimation pour
l’entreprise dans le champ particulier de la RSE et de la performance sociale. Elles viennent en
quelque sorte objectiver le social pour le mettre au service de la performance.
2.22. Les regroupements professionnels
Malgré cette forme d’opérationnalisation européenne, la mise en œuvre de la
performance sociale se cherche et reste difficilement appréhendable parce qu’ouvrant à de
nouveaux paradigmes (scientifiques, technologiques, sociétales, économiques...).
L’entreprise, pour rester en phase avec ses orientations, prise dans un environnement
économique et sociale complexe, par le poids de ses différentes parties prenantes, de leurs
attentes, se voit pourtant obligée d’en passer par là.
77 Cf article de Novethic : http://www.novethic.fr/lexique/detail/agence-de-notation-extra-financiere.html
33
Des auteurs comme Capron, et Quairel-Lanoizelée78
notent dès 2007, que les
entreprises ont clairement la volonté d’officialiser leur engagement et de le faire connaître.
Pénétrant l’entreprise tout autant de l’extérieur que de l’intérieur, une forme de
révolution conceptuelle, s’impose pour les hommes et les femmes qui la constituent. Il en va de
sa survie ou de celle du travail, de l’économie, … tout dépend bien sûr, du point de vue et de la
place dont on parle.
Néanmoins, les schémas et modèles cognitifs79
résistent et les changements liés à la
mondialisation, semblent plutôt endurés. Même si les managers affichent très clairement
l’importance de cette question par rapport aux enjeux économiques à travers un discours très
« communiquant » ou « politique ». Les flous théoriques des concepts et les effets mis en
évidence par Bourguignon peuvent prendre tout leur sens ici. Toutefois certains regroupements
professionnels à l’initiative de leurs dirigeants tentent de définir ce qu’il en est.
« Le Mouvement pour un nouveau pacte social » fondé sur « la confiance et la
performance"80
, publie à travers son livre blanc, des propositions concrètes pour booster la
performance sociale. Chefs d’entreprises, directeurs des ressources humaines, influenceurs
mettent l’accent sur la plus-value économique obtenue par la prise en compte de la
performance sociale versus salariés. L’idée est qu’un salarié bien dans son travail sera plus
productif. La complémentarité de la performance et du social est ici mise en avant.
D’après une étude menée par le Mouvement en avril 2015, la performance sociale est
aujourd’hui reconnue de façon positive par 70% des français et apparaît comme bénéfique à la
fois pour l’entreprise et ses salariés.
C’est à travers des propositions très concrètes que le mouvement oriente ses réflexions
autour de la performance sociale de l’entreprise.
78 Capron. M., Quairel-Lanoizelée. F. (2007) « la responsabilité sociale d’entreprise », édit° la découverte ; Paris. 79 Delavallee E., cours de « Design organisationnel et transformation des entreprises » Master 2 « Management des ressources humaines et
RSE » IAE Paris Sorbonne, 2015/16 au sujet des modèles cognitifs. 80 Réunis au sein du " Mouvement pour un nouveau pacte social fondé sur la confiance et la performance ", initié en 2010, par l'agence de
communication Capitalcom, des groupes tels que l'Oréal, GDF, Suez environnement, France Telecom Orange ou encore Renault ont constitué
un livre blanc : « Et si la performance sociale insufflait une autre dynamique de croissance», en ligne : http://www.pacte-social.fr/wp-
content/uploads/2015/05/2013_Pacte-Social-Livre-Blanc-Vision-partagée.pdf . Il a été présenté lors d’assises du 12 juin 2014 et rédigé par des
présidents, directeurs généraux et DRH de ces entreprises cotées et partageant la même ambition. cf : http://www.pacte-social.fr
34
2.23. Les think tanks
Un peu à la « traine » les think tanks 81
s’emparent également de la réflexion et la relaie
à un niveau plutôt politique. En 2011, le Centre d’Analyse Stratégique à travers une
observation démontre que l’amélioration de la conciliation entre vie professionnelle et vie
familiale renforçait l’égalité hommes-femmes et influait positivement sur la performance des
entreprises.
Le think tank Terra Nova publie une note (2012), sur l’amélioration des conditions de
travail dans le secteur privé, intitulée : « Une vision progressiste de l’entreprise ». Il rappelle
que l’entreprise est d’une part un lieu de vie et d’épanouissement des salariés, où se tissent des
liens sociaux, et « un acteur à part entière des sociétés et territoires » où elle est située.
La note formule 18 propositions, parmi lesquelles figures, notamment, le fait de donner aux
salariés la possibilité de participer à la transformation de leurs situations professionnelles
quotidiennes et à la définition de la qualité de leur travail. L’accompagnement individuel et
collectif par des dispositifs de formation et de reconnaissance est également suggéré. Ou
encore en proposant de fonder, en partie, la fiscalité des entreprises sur des objectifs
environnementaux définis par la loi.
L’Institut Montaigne (2012), propose de créer des incitations financières à se
syndiquer, de réformer le financement des syndicats et de redéfinir le fonctionnement des
instances de représentation auprès de la direction des entreprises, une autre manière d’entrer
dans le registre du social et de la performance.
Si les think tanks sont plus politisés et moins concrets, au sein du monde professionnel,
les cabinets de consultants rivalisent pour offrir outils et dispositifs afin d’apprécier cette
performance sociale à travers d’indicateurs quantifiables, tentant ainsi de permettre aux
entreprises de rendre compte de leur activité « performance sociale ».
81 Informations issues de l’observatoire des think tanks « Comment accroître la performance des entreprises en temps de crise ? Le point de
vue de quatre think tanks français », en ligne: http://www.oftt.eu/think-tanks/generalites/article/comment-accroitre-la-performance-des-
entreprises-en-temps-de-crise-le-point-de-vue-de-quatre-think-tanks-francais
35
2.24. Les cabinets de consultants
Etant donné l’importance des enjeux82
, audits et conseils se multiplient au profit des
entreprises et de leur communication sur cette thématique.
« Ces instruments se distinguent par leur entrée de lecture, par leur caractère public ou
privé, interne ou externe à l’entreprise, par le nombre de dimensions qu’ils investiguent, par la
nature de la démarche, …. Ils ont en commun le principe de la mesure par l’analyse d’indices
dits objectifs » (Closon83
- 2010).
Ceci dit la mesure de la performance sociale devient un défi pour l’entreprise. Elle
relève soit du monde objectif (quantitatif), soit du monde subjectif (qualitatif), mais il faut la
mesurer, la mettre en évidence, la montrer.
Les références dites objectives s’expriment surtout en termes d’indicateurs.
Ils témoignent de la volonté d’engagement de l’entreprise. Ils sont traduits sous forme
de codes, de chartes84
, etc. L’acte reste souvent sous sa forme écrite et souvent la réalité
comportementale diffère.
Ou ils vérifient, valident que l’entreprise est en adéquation avec les attentes sociales sur
le sujet. Il s’agit des labels, des normes85
.
Les références subjectives sont plus complexes à appréhender. Elles relèvent plutôt
d’analyses liées à la passation de questionnaires qualité de vie, satisfaction, ou à des modalités
d’accompagnement managérial, etc. Chacune s’inscrit dans les offres et prestations des
cabinets et consultants en entreprise.
D’ailleurs ne s’agirait-il pas de tenter de trouver les moyens d’objectiver, ce
subjectif si difficile à « neutraliser » ? En 1975, Sudreau86
écrivait « si l’on veut que la
82 In : « La QVT un enjeu pour l’entreprise en 2015 », en ligne : http://www.rhinfo.com/thematiques/management-et-conditions-de-travail/la-
qualite-de-vie-au-travail-enjeu-2015. 83 Closon C. in « L'impact de la satisfaction des travailleurs à l'égard de la performance sociale de leur entreprise sur le soutien organisationnel
perçu, l'implication organisationnelle et la satisfaction au travail des travailleurs » p :70. - C. Closon est psychologue du travail. 84 À titre d’exemple : Charte_Sociale_Sanofi.pdf. 85 À titre d’exemple la norme iso : « Chaque organisation doit mettre en œuvre des actions pour améliorer le monde. Une évaluation de la
performance ISO 26000 de SGS mesure les performances de votre organisation et les améliorations en termes de comportement socialement
responsable ». http://www.sgsgroup.fr 86 Sudreau P. cité par Igalens et Gond in « La mesure de la performance sociale de l’entreprise : une analyse critique et empirique des données
ARESE » p. 1476.
36
gestion sociale participe aux préoccupations stratégiques de l’entreprise, il faut qu’elle sorte
du relatif et du subjectif, même si, dans ce domaine, la quantification est difficile »
Les cabinets des consultants s’y essaient et s’en saisissent pour légitimer sa mise en
œuvre. Ils proposent ainsi des outils venant améliorer la performance, et au-delà « rendre plus
performant » les indicateurs. C’est ce que propose, par exemple, le cabinet Mozart Consulting87
en créant un nouvel indicateur : « l’indice IBET » ou Mars-Lab88
qui lance dès 2008
« l’observatoire de la vie au travail » (l’OVAT89
) et pour qui la performance sociale est : «la
synchronisation de la performance individuelle, de la performance collective et de la
performance organisationnelle. Et pour qu’il y ait performance sociale, la performance de
chaque salarié doit être synchrone avec la performance de son collectif de travail et par-delà
celle du corps social tout entier. Enfin, la performance du facteur humain doit être synchrone
avec la performance de l’organisation ».
Nous pouvons nous demander aujourd’hui, au regard de l’explosion du nombre de
consultants, si ceux-ci ne viendraient pas implicitement légitimer l’entreprise dans sa
démarche, en lui offrant une sorte de « couverture », d’« assurance » permettant à certains
dirigeants et managers de se déresponsabiliser vis à vis d’un sujet souvent complexe ?
En même temps les consultants se doivent d’apporter du crédit à la démarche
d’opérationnalisation de la performance sociale, afin d’en faire un « vrai » sujet d’entreprise.
Pour aller plus en avant dans cette idée, nous avons relevé qu’un certains nombres de cabinets,
s’associent au monde de la recherche. Les chercheurs et scientifiques qui s’y inscrivent,
produisent ainsi des études dont l’objectif sera plutôt de démontrer, de mettre en évidence une
des plus-values de la performance sociale ou a postériori une valeur de celle-ci. A titre
d’exemple, nous pouvons citer quelques références90
ancrant la performance sociale dans le
monde de l’opérationnalité de l’entreprise et plus particulièrement au travers :
87 Le cabinet Mozart consulting, crée l’indice IBET (http://www.mozartconsulting.eu/fr/accueil.html). 88 Mars-lab est une société de conseil en management de la performance sociale et en prévention des risques sociaux. Depuis 2007, mars-lab
propose d’accompagner les organisations et leurs salariés pour « valoriser leur capital humain tout en prévenant les risques qui menacent leur
performance sociale : performance des individus, performance des collectifs de travail et performance de l’organisation ». La P.S. vu par Mars
Lab : http://www.mars-lab.com/la-performance-autrement/, son livre blanc : « La performance sociale au travail »: http://www.mars-
lab.com/wp-content/uploads/2015/06/livre-blanc-sur-la-performance-sociale-mars-lab-2013.pdf 89 Mars-lab, l’OVAT : http://blog.ovat.fr 90 Nos références ne recouvrent pas l’ensemble des travaux existants sur ces questions, nous avons opté de manière partiale à quelques
références illustratives.
37
de ses liens avec la performance économique de l’entreprise : Allouche, Charpentier
et Guillot91
(2003), réalise une étude de cette abondante littérature, en s’appuyant sur
180 études de recherches depuis 1970.
Bnouni92
(2011), présente également un état de l’art, permettant de mettre à jour le lien
de causalité entre la performance sociale et la performance financière. Et au-delà de la
mise en évidence d’une corrélation plutôt positive entre PS et PF, l’auteur note une
forme d’ambiguïté sûrement liée à « la prolifération des différentes conceptualisations
de la responsabilité sociale des entreprises ainsi que la multitude de mesures utilisées
pour approcher la PS et la PF ».
Gond et Igalens93
(2016), ne dénombre pas moins de 251 études sur ce sujet, dans le
champ plus large de la RSE en date de 2009, et plus de 300 études empiriques depuis
1972 qui testent la nature des relations entre la PSE et la PF.
Michael Porter94
(2003), précise les enjeux de ces choix ainsi : « Peu importe ce qu’ils
racontent en public, lorsque vous êtes derrière la scène avec les chefs d’entreprise et
les dirigeants, ils vont vous demander : “Pourquoi devrions-nous investir dans des
initiatives sociales ?” Nous aurons beau tous nous préoccuper sincèrement de sauver le
monde, si nous ne pouvons répondre à cette question correctement, nous avons un
problème. »
de ses modalités de mesure95
, avec Igalens, et Gond, (2003)96
qui analysent les
données ARESE 2000. Dans le préambule de l’étude, les auteurs relèvent la complexité
et la diversité des mesures, liées à « l’ambiguïté sémantique dans la définition du
concept ». A partir des travaux de Decock-Good (2001) ils définissent ainsi cinq
catégories de mesures.
91 Allouche J., Charpentier. M., Guillot-Soulez. C. (2004) « Un panorama des études académiques sur l’interaction performances
sociales/performances économiques et financières. », Congrès de l’AGRH. Par ailleurs notons que les auteurs centrent leur étude sur la
pratique GRH en restreignant leurs choix autour de quatre des thèmes les plus récurent dans la littérature : la rémunération, la formation, les
relations sociales et les suppressions d’emplois. 92 Bnouni I., (2011) « Performance sociale et performance financière : Etat de l’art » Ŕ XXème conférence de l’AIMS Ŕ Nantes. 93 Gond J.P., Igalens J., « Chapitre V. L’impact financier de la responsabilité sociale de l’entreprise », La responsabilité sociale de
l'entreprise, Paris, Presses Universitaires de France, «Que sais-je ?», 2016, 128 pages.
Les auteurs présentent huit hypothèses sur les interactions entre PSE et PF et un tableau récapitulatif des différentes modalités de construction
des liens positifs entre PSE et PF. 94 Porter M., cité par Gond J.P., Igalens J., ibid, p78 : Extrait d’une interview de Michael Porter (« CSR Ŕ A Religion With Too Many
Priests ? »), réalisée en septembre 2003 à la Copenhagen Business School 95 A ce sujet, cf l’article de Aquier. A., Daudigeos. T., Valiogue. B. (2010) chercheurs associés à Mines Paritech & EM Lyon ; « Que peut nous
apprendre le courant de la Corporate Social Responsiveness sur les démarches de développement durable des entreprises contemporaines ?». 96 Igalens J., Gond J.P. (2003) «La mesure Sociale de l’entreprise : une analyse critique et empirique des données ARESE», in Revue de
Gestion des Ressources Humaines, Eska. Université Toulouse I. pp.111-130.
38
de ses moyens à se faire évaluer, Gilbert et Charpentier (2004), proposent une
démarche originale sur ce sujet, mi empirique, mi sociologique, ils la veulent en tout
état des choses orientées « terrain » et « opérationnalité ». Après avoir posé les contours
de la performance sociale, et du champ (méthodologie de l’étude, présentation des
acteurs) sur lequel ils allaient évoluer, c’est avec la typologie d’Ulrich qu’ils proposent
leurs analyses sur les modalités en vigueurs au sein des entreprises partenaires. Pour
conclure que les mesures d’évaluations des performances RH sont diverses, (certaines
contestables, d’autres pas du tout), mais surtout que « la réponse à la question
« comment évaluer ? » est secondaire par rapport à celle de l’identification du
positionnement de la fonction RH dans l’entreprise »
de mettre en lumière ce qui la détermine, à titre d’exemple Reynaud (2014),
présente un texte inattendu, en comparant les déterminant de la performance sociale à
partir de deux structures : Emmaüs et les Restos du cœur. Son objectif est de
comprendre les fondements de l’indépendance financière des organisations au service
des plus démunis. Et de conclure « la littérature traditionnelle sur la PS s’attache au
lien existant entre celle-ci et la performance économico-financière. Un lien positif est
souvent trouvé … ce qui reviendrait à dire que ce sont les entreprises qui ont les
moyens qui feraient du social, … les résultats de notre article proposent une
perspective différente. En effet, dans le cas d’Emmaüs on s’aperçoit qu’une
organisation a appliqué les règles du jeu économiques afin de servir la performance
sociale, c’est donc pour servir la performance économique que la performance sociale
a été nécessaire »
de ses liens avec la performance globale, à travers les différents écrits relevant de la
responsabilité sociale de l’entreprise et plus récemment à travers ceux traitant de la
performance globale. Plus particulièrement avec des auteurs comme Raynaud, (2003)
qui introduisent cette idée de « performance globale » et y intègre la performance
sociale comme l’un de ses trois piliers. Plus récemment encore nous en retrouvons la
trace à travers l’étude des performances « extra financières » (Morin-Estève, Gendron,
39
Ceccarelli Ŕ2016)97
, peut-être dans le souci d’une recherche de vocabulaire commun
avec les agences de notations !
Quoiqu’il en soit Germain et Trébucq (2004), après avoir fait le point sur les limites des
outils de pilotage actuel en matière de pilotage de la performance sociale, et du flou entourant
cette logique, terminent leur article en déclarant : « Sur le plan théorique, l’intégration
sociétale de la performance à la mesure de la performance globale doit être mieux définie et
mieux précisée […] des notions encore trop abstraites telles que la responsabilité ou la
performance sociétale »
Tout en notant l’importance de constater à travers la littérature, qu’au-delà du concept
de « performance sociale de l’entreprise » naissait celui de « performance sociétale » définit
comme « un concept fédérateur, une synthèse conceptuelle et une réconciliation des approches
jusqu’alors disjointes au sein du champ de la recherche », (Aggeri et al. -2005).
Au-delà de la tentative d’éclairer l’évolution des fondements théoriques de la RSE et de la
performance, Germain et Trébucq (2004), restent eux même assez flou et confus dans
l’utilisation des termes : Responsabilité sociale/ performance sociale/ sociétale, passant avec
une simplicité étonnante de la Responsabilité sociale à la performance sociale et plus
particulièrement à la performance sociétale (Germain & Trébucq -2004).
De nombreuses définitions foisonnent dans la littérature ce qui démontre que la notion
de performance sociale reste encore une notion fragile et non stabilisée. A travers l’ensemble
de ces observations, il apparait très nettement qu’elle n’est aucunement stabilisée aujourd’hui
et qu’elle fait l’objet d’une construction progressive dans laquelle les différents acteurs
s’attachent à faire valoir une définition singulière ou des définitions particulières. Ce qui
participe à l’éclosion multiple des cabinets professionnels.
2.25. Tableau de synthèse
Nous proposons ici, un tableau récapitulatif des points d’impacts sur la performance
sociale des regroupements professionnels, des think tanks, des agences de notation et des
cabinets de consultants :
97 Morin-Esteves C., Gendron C., Ceccarelli A. (2016), « Les rapports de développement durable : dialogues autour de la définition et de la
mesure de la performance extra financière des entreprises. » RIODD 2016, Saint-Étienne, France. Elles sont toutes trois Professeures à l’ICN
Business School Ŕ Nancy Metz.
40
Acteurs de l’opérationnalité Actions sur Moyens
Agences de notation L’ISR, Evaluation, Notation
Mouvements Professionnels La stratégie de l’entreprise,
l’image publique,
Impulsions, préconisations,
Marketing
Think tank Le politique Débats, agitateurs d’idées
Cabinets et consultants L’entreprise Outils, mesures, indicateurs
De manière très succincte, ce tableau permet de dresser les grandes lignes des liens qui
s’établissent entre les différents « opérateurs » de la performance sociale, en lien avec les
entreprises, leurs actions et les moyens mis en œuvres pour parvenir à une forme
d’opérationnalité de la performance sociale.
Mais qu’en est-il pour les salariés ? C’est ce nous proposons d’étudier dans la troisième
partie. Il s’agit de percevoir à travers l’expression des salariés comment cette notion de
performance sociale à fait son chemin ou pas, et comment pour le monde des parties prenantes
de l’entreprise versus « salariés » elle devient ou pourrait devenir opérante à travers par
exemple une Direction.
41
III. Troisième partie — L’opérationnalité de la performance
sociale à travers la perception des salariés
Nous avons donc souhaité dans le cadre de ce travail, entendre comment à travers le
discours de salariés, la notion de « performance sociale » prenait sens.
Que symbolise l’idée de « performance sociale », quelle représentation en ont-ils ?
Les salariés, parties prenantes de l’entreprise, sont-ils à même de mettre celle-ci en
œuvre, ou du moins de la penser à travers une direction spécifique ?
3.1. Présentation de la démarche liée à l’analyse de l’expression de salariés
Pour réaliser cette étude, nous avons opté pour un questionnaire simple et minimaliste
afin d’obtenir un recueil de l’expression de salariés sur la performance sociale.
Notre souhait est de réaliser une analyse de leur perception, en lien avec notre
questionnement initial, sur ce qu’est la performance sociale. Nous n’avons pas défini de
méthodologie particulière d’analyse, celle-ci est venu assez naturellement au fil de la
réalisation et des avancées de notre travail. D’ailleurs comme le mentionne Igalens, El Akremi,
Gond et Swaen98
(2011), peu de recherches (et donc de méthodologies) portent sur la
perception en soi, elles sont en générale, plutôt centrées sur la mesure de cette même
perception.
Notre seul désir, à travers cette observation est celui de confronter la théorie, les actions
des entreprises et la perception des salariés, d’en considérer les écarts, ou au contraire d’en
relever les liens. Cette modalité d’approche nous permet tout simplement de connaitre les
représentations et les sentiments de salariés vis-à-vis de ce que lui renvoient ces notions.
3.11. Les choix méthodologiques qui se sont imposés
Nous avons fait parvenir deux questions simples à des personnes salariées relevant de
domaines différents : certaines exerçant au sein de ressources humaines, d’autres non, certaines
de notre entreprise, d’autres externes. Nous avons juste tenté d’avoir un échantillonnage large.
Sans avoir spécifiquement ciblé les populations sollicitées. Nous avons quoiqu’il en soit
souhaité sortir de notre entreprise, pour confronter notre regard à l’externe et ouvrir à
l’objectivité.
98 Igalens, El Akremi, Gond et Swaen (2011), « la responsabilité sociale des entreprises vue par les salariés : phare ou rétroviseurs » in
ESKA, revue de gestions des ressources humaines, 2011/4 n°82, p : 33-45.
42
Entendre un nombre de DRH de grands groupes relevant de différents secteurs
(banques, industrie, santé, recherche, services, …) était également un des préalables que nous
nous étions fixés, afin d’obtenir des « paroles de RH ».
Mais si dans un premier temps, nous avions essentiellement visé ce monde, rapidement,
dans un second, il nous a semblé plutôt intéressant d’ouvrir le questionnement à des non RH.
La différence entre interne/externe et RH/non RH était peut-être significative, ou du moins
nous permettait d’élargir notre vision.
Au final, il s’avère que ces distinctions : Interne/externe Ŕ RH/non RH, ne sont guère
pertinentes, dans le cadre de cette recherche, pas plus dans le vocabulaire utilisé que dans la
manière d’envisager la performance sociale.
3.12. La démarche liée aux questionnaires
Nous avons proposé, par mail, deux questions en essayant d’apporter un minimum
d’informations complémentaires sur le sujet. Nous voulions obtenir un « matériel brut », si
possible peu influencé par nos explications99
.
A travers ces questions, nous avons souhaité recueillir le sens que les salariés donnent à
cette notion de performance sociale : soit en tant que telle, soit en tant que dénomination d’une
direction RH.
3.13. Le texte d’accompagnement
Le corps du texte d’accompagnement dans le mail était celui-ci :
« Je me permets de venir vers vous, afin de vous solliciter suivant vos possibilités, dans
le cadre de la réalisation de mon mémoire.
Je suis en train de réaliser un master « management des ressources Humaines et RSE
(responsabilité sociale de l’entreprise) » à l’IAE de Paris-Sorbonne et je travaille sur
la notion de « performance sociale »
J’aurais souhaité vous soumettre dans ce cadre deux questions : […]
Par avance, je vous remercie pour votre participation
Bien à vous »
99 Nous avons dû parfois, répondre à quelques demandes de précisions de manière orale.
43
Suivaient en fin de ce message, nos coordonnées : métier, téléphone, mail, adresse
professionnelle.
3.14. Les questions posées
Les deux questions étaient les suivantes :
La première question :
« Pour vous, qu'est-ce que la performance sociale ? »
La deuxième question :
« Une DRH qui devient Direction de la performance sociale, quel sens cela prend,
quelle signification et quel impact dans la perception du salarié ? »
3.15. Les retours de mails
Sur une cinquantaine de questionnaires envoyés, nous avons reçu 38 réponses
exploitables100
. Ce qui correspond à un taux de retours de plus de 75% fort acceptable.
Sur ces 38 retours, 23 proviennent de l’interne de notre entreprise soit 60% et 15 de
l’extérieur soit 40%. Sur l’ensemble 20 sont issus des métiers RH ce qui représente 52% des
interviewés et 18 de métiers sans liens avec les ressources humaines, soit 48%.
Ce que nous retrouvons ci-dessous :
Dans les métiers RH, les réponses externes sont essentiellement issues de directeurs des
Ressources humaines (cadres dirigeants, ou supérieurs). Ceux-ci se sont d’ailleurs montrés très
intéressés, et curieux de la thématique.
100 Cinq réponses n’ont pu être prises en compte faute du moment tardif de leurs arrivées, ou du contenu relevant d’un copier/coller.
Représentation RH En % de (1)
Non RH En % de(2)
Total En % de(3)
Interne 12 60% 11 61% 23 60%
Externe 8 40% 7 39% 15 40%
En % de (3)
En % de(3)
Total 20(1)
52% 18(2)
48% 38(3)
44
Au sein de notre entreprise, à un niveau national, un seul Directeur de la performance
sociale (cadre dirigeant) a répondu sur quatre sollicités. Notre Directeur général adjoint en
charge des ressources humaines, lui nous a fait un retour. Celui-ci n’a pu être intégré dans les
réponses au regard de l’avancée de nos travaux, mais ses réponses vont dans le même sens que
l’ensemble des résultats. Par ailleurs l’ensemble des salariés sollicités (RH et non RH) en
interne à répondu avec empressement et sympathie.
Si le questionnement semblait aller de soi pour la plupart des interviewés, il n’en a pas
été de même pour les personnes dont les métiers étaient issus de la recherche, ou de la santé,
contrairement aux autres secteurs. Les notions de « performance » et de « social » associées ne
semblent pas faire partie de leur monde professionnel, ni même de leur environnement,
contrairement à celui des consultants ou RH.
La population interrogée se trouve être tout autant constituée de cadres que de non
cadres. Nous n’avons pas remarqué, ni analysé de différences fondamentales.
Les réponses pour certains étaient brèves et courtes, (A titre d’exemple, 19 mots pour la
question n°1, 25 pour la question n°2). Pour d’autres, les questions ont semblé sources
d’éloquences, et ont été relativement denses (290 mots/Q1, 299/Q2). Nous pouvons cependant
établir une moyenne d’une centaine de mots pour la question 1, contre une moyenne comprise
dans un intervalle de [110-120] mots pour la question 2.
Globalement, d’après l’outil statistique de Word, notre matériel de recherche est ainsi
constitué :
Question 1 Question 2
Pages 9 12
Mots 3791 4895
Caractères (sans espace) 20308 26388
Paragraphes 169 200
Lignes 486 502
Les données statistiques, nous laissent entrevoir que les réponses ont été de manière
générale assez étayées, plus particulièrement pour la deuxième question. Il ne nous est
45
cependant pas possible de dire qu’une des catégories (Rh/non RH Ŕ Int/Ext) soit plus prolixe
qu’une autre.
3.16. Le logiciel IRaMuTeQ
Pour nous permettre un premier regard plutôt global, et une analyse statistique des
données, nous les avons codées pour les passer au crible avec le logiciel IRaMuTeQ101
IRaMuTeQ est une interface s’appuyant sur « R », « R » étant un langage de
programmation et un environnement open-source (version libre du logiciel Alceste102
)
permettant le traitement des données et les analyses statistiques.
Nous avons opté essentiellement pour l’utilisation de la classification par la mesure de
Reinert qui permet une analyse textuelle (méthode rapprochant les textes les plus proches), au
plus près des représentations des personnes interrogées.
Cette approche offre, au-delà d’une approche textuelle, des dendrogrammes qui
donnent une représentation de la partition et de la taille des classes définies en pourcentages,
permettant de faire émerger des thématiques particulière. Cette approche est ensuite étayée par
une analyse de contenu des discours orientée par les catégories issues des résultats de
IRaMuTeQ.
3.2. Analyse des retours
3.21. Analyse des retours de la question « une »
Pour rappel, la question est la suivante : « Pour vous, qu'est-ce que la performance
sociale ? ».
L’outil IRaMuTeQ, nous permet une première approche par regroupement de termes
sur l’ensemble des réponses à la question « une ».
Le dendrogramme (ci-dessous) distingue 4 classes de formes. La première (classe1) qui
représente 19,5% des segments de textes. Les 3 autres classes, dans la deuxième branche, sont
sous divisées en une et deux classes : 26% des formes pour la classe 4 et 54,6% pour les
classes 2 et 3. Nous y avons associé sous chaque classe, les termes s’y référents. Ceux-ci y sont
répertoriés de manière décroissantes (référence au nombre d’occurrences relevées).
101 IRaMuTeQ, Version 0.6 alpha 3, conçu par Ratinaud P. et Dejean S. IRaMuTeQ est un logiciel open source. Pour plus d’informations :
http://edutechwiki.unige.ch/fr/IRaMuTeQ#Introduction - ou - http://www.iramuteq.org/documentation/html 102 Marpsat M. (2010) « La méthode Alceste », Sociologie [En ligne], N°1, vol. 1 , mis en ligne le 09 mai 2010, consulté le 31 octobre 2016.
URL : http://sociologie.revues.org/312
46
De manière schématique, nous pouvons dire que quatre classes thématiques émanent du
dendrogramme. Chacune laissant poindre un ensemble de termes permettant de les relier à une
même famille. Nous en avons donc dégagé quatre groupes que nous nous proposons de
nommer comme suit :
1. La performance sociale comme lien social (classe 1) ;
2. La performance sociale comme démarche de gestion (classe 2) ;
3. La performance sociale comme élément de Qualité de vie au travail (classe 3) ;
4. La performance sociale comme facteur économique (classe 4) ;
Parler
Travail
Sens
Evolution
Vie
Effet
Dialogue
Changer
Bien être
Social
Aspect
Etablissement
Volonté
Moyen
Ressource
Humain
Œuvre (mettre)
Organisation
Atteindre
Service
Référence
Service
Production
Permettre
Définir
Compte
Production
Atteindre
Objectif
Economique
Moyen
Œuvre (mettre)
Résultat
Mesure
Gestion
Adéquation
Parvenir
Obtenir
Capacité
Temps
Agir
Collectif
Partenaire
Relation
Agent
Développement
Social
Individuel
Compétence
Acteur
Partenaire
Climat
Salarié
Management
Société
Homme
47
Dans la partie suivante, nous allons reprendre chacune de ces classes afin d’en étayer
les données et d’en percevoir les contours.
3.21.1. La performance sociale comme lien social (classe 1)
La classe 1 : avec des termes comme « Relation », « Partenaire », « Agent »,
« Collectif », … évoque quelque chose de l’ordre du lien social. Dans ce cadre, la
performance sociale pourrait être « le fait de favoriser le déploiement et l’expression du
potentiel humain au service du collectif »(E.21)103
. Indispensable à la performance sociale, il
s’agit à travers elle de rassembler un ensemble d’individus pour faire groupe. Le social fait
donc référence à une notion collective, aux salariés mais pas seulement : « Il fait aussi
référence à la société, au corps social»(E.34)
.
C’est cette même idée d’ensemble que l’on retrouve à travers les termes de
« Partenaire », d’ «Agent » et de « Relation ». Pour les personnes auditées, « l’entreprise doit
mettre la relation employeur / employés au centre de ses préoccupations »(E.3)
. Cependant c’est
bien «l’ensemble des acteurs (qui) sont concernés par la performance sociale : les salariés par
leur implication, les managers par leur qualité managériale, les IRP par l’entretien des
relations sociales, etc. »(E.8)
. Ce qu’il s’agit de mettre en œuvre c’est « un système de
management des relations humaines »(E.28)
et plus précisément, pour l’entreprise en
s’appuyant « sur la fonction RH qui est un acteur important du dialogue social … dans sa
capacité à promouvoir un dialogue de qualité avec les partenaires sociaux et les salariés »(E.5)
.
L’objectif est bien de « co-construction avec les partenaires sociaux »(E.26)
. D’ailleurs la
performance sociale pourrait être « un indicateur du climat social entre Agents, Direction,
Partenaires sociaux » (E.14)
.
3.21.2. La performance sociale comme démarche de gestion (classe 2)
La classe 2 : où se côtoient les termes : « Moyen », « Ressources », « Œuvre » (mettre),
« Humain », … renvoie plus particulièrement à la notion de mise en œuvre de la performance
sociale dans une dimension évolutive de la gestion des ressources humaines (GRH) actuelle.
La performance sociale serait une modalité de gestion des ressources humaines c’est-à-
dire pour les services RH «la capacité à mettre en adéquation les charges avec les moyens,
mais en y ajoutant un troisième paramètre »(E.6)
qui serait « qualitatif » pour les uns et
103 « E » signifie Entretien et le chiffre associé, le numéro de l’entretien. Les références sont annotées pour la soutenance, les entretiens ne sont
pas en annexe par respect de l’anonymat : l’ensemble de ce travail n’étant pas considéré comme confidentiel.
48
« quantitatif » pour les autres. La performance sociale permet alors, de mesurer « le résultat
obtenu et les moyens mis en œuvre pour y parvenir » à travers la mise en place de « tableaux de
bord sociaux. »(E.2)
Il s’agit ainsi « de lier les résultats obtenus par une entreprise aux moyens humains
développés pour y parvenir »(E.3)
en « optimisant au mieux les ressources pour les mettre en
adéquation avec les besoins. »(E.10)
La performance sociale peut également s'apprécier selon la capacité de l'entreprise à
faire évoluer et à conserver ses talents, salariés clés, potentiels, etc., et donc à « les mettre en
perspective dans le cadre d'une politique de gestion de carrière transparente et
adaptable. »(E.5)
Cela implique par conséquent « un changement de politique RH d’où devrait découler
«de nouvelles orientations managériales, »(E.33)
Ainsi la performance sociale pourrait être : « le fait de favoriser le déploiement et l'expression
du potentiel humain au service du collectif. » (E.21)
Reste à définir si ces changements engendrent obligatoirement « une « transformation »
de l’homme qui en fait un outil de performance pour l’entreprise. » (E.3)
!
3.21.3. La performance sociale comme élément de qualité de vie au travail
(classe 3)
La classe 3 : dans laquelle, nous relevons plutôt les notions de : « Sens », « Travail »,
« Evolution », « Vie », « Parler », … tend vers les valeurs du Bien-être au travail des individus
(Classe plébiscitée par 31% des formes).
Et si la performance sociale intègre l’économique, il n’empêche qu’elle « touche aussi
bien au sens à donner, qu’aux moyens à envisager pour aider à grandir dans l’entreprise en
passant par la prise en compte des conditions de travail » (E.22)
. Il s’agit de « donner du sens
au travail »(E.5)
afin de permettre l’évolution de chacun.
Ce serait cela la performance sociale versus salariés : « motiver les salariés à trouver du
sens dans leur travail, et les aider à aller vers une évolution de carrière » (E.23)
: satisfaction,
sens au travail, accompagnement des salariés » (E.26)
.
Pour beaucoup de manière implicite ou explicite, « le lien est assez direct avec la qualité de vie
au travail » (E.1)
.
49
3.21.4. La performance sociale comme facteur économique (classe 4)
La classe 4 : à partir de mots comme « Production », « Atteindre », « Objectif »,
« Economique », etc., contribue plutôt à envisager la performance sociale dans sa dimension
économique.
La performance sociale participerait ainsi à la « production de
l’établissement/entreprise » en ayant « un impact sur la qualité de celle-ci. » (E.16)
Et par la même, elle pourrait être « la capacité d'un groupe d'individus à atteindre un
objectif »(E.25).
En ce sens la performance sociale est « un objectif nouveau à atteindre par
l'entreprise, et qui dépasse largement l'aspect purement technique et organisationnel du
travail. » (E.16)
C’est ce qui marquerait l’évolution des ressources humaines : la performance sociale
devenant « un objectif (ou une finalité) là, où les ressources humaines relevaient plutôt
encore des moyens »(E.34)
. Finalement, elle caractérise une entreprise dont la démarche est « de
concilier l’atteinte de ses objectifs économiques (ou missions) avec une forte prise en compte
de « l’humain » dans son organisation »(E.29)
.
Ceci dit l’opération reste périlleuse puisqu’il va falloir « savoir allier » : « la prise en
compte de la contrainte économique ainsi que celle de l’atteinte d’objectifs (collectifs)
quantifiables ceci dans un domaine qui a trait à l’humain, donc complexe car non
quantifiable. » (E.36).
De fait, « La performance sociale cherche à mesurer les moyens humains
mis en œuvre pour arriver à un résultat opérationnel. Quel cout humain pour quel
résultat. »(E.17)
3.21.5. Essai d’analyse
Les classes 4 et 3 sont toutes deux sous tendues par l’idée de « mouvement », d’« aller
vers », d’« évoluer ». Cependant, on peut noter qu’elles se différencient de par ce qu’elles
touchent ou ce à quoi/qui elles s’adressent dans les termes utilisés ou dans leurs modalités
« d’effets ». A savoir, la classe 4 renvoie plutôt à la « notion de but », (atteindre, objectif,
service, …), et la classe 3 plutôt à la « notion d’être », (bien être, dialogue, …).
Pareillement, si nous nous autorisons un parallèle avec la définition étymologique de la
performance, la classe 4 évoque très clairement cette « notion de résultats obtenus », alors
que la classe 3 rappelle la « notion de performance en soi ».
50
La classe 2 qui se situe dans la même division attire plus l’attention sur « les modalités
de mise en œuvre » de la performance sociale, sous une variante proche de ce qui pourrait
définir l’actuelle GRH (gestion des ressources humaines). La classe une quant à elle, mais en
évidence l’importance du management des ressources humaines, à travers le collectif et le lien
social, facteur inhérent à la performance sociale.
3.21.6. Tableau de synthèse de la question « une » Q1
Ce que nous pouvons aisément résumer dans le tableau suivant104
:
3.21.7. Eléments de lecture :
Ce tableau reprend en ligne 1 les mots issus par classe, de l’analyse IRaMuTeQ. En
ligne 2 les quatre grandes thématiques extraites depuis les analyses des 4 classes et des
entretiens qui y sont associés. La ligne 3 met en évidence les notions propres à chacune des
catégories de classe. La ligne 4 permet de mettre en exergue un « comment » entendre la
performance sociale à travers les classe une et deux alors que les classes 3 et 4 semblent mettre
104 L’accord des couleurs n’est pas des plus heureux, mais celui-ci tente de respecter celui issu des dendrogrammes de IRaMuTeQ et de la
sortie en impression .
Question
« une »
Classe 1
19,5 %
Classe 2
23,4%
Classe 3
31,2%
Classe 4
26%
Mots (1)
Collectif
Partenaire
Relation
Agent
Développement
Social
Moyen
Ressource
Humain
Œuvre (mettre)
Organisation
Atteindre
Parler
Travail
Sens
Evolution
Vie
Effet
Dialogue
Production
Atteindre
Objectif
Economique
Moyen
Résultat
Mesure
Thématique (2)
-
Axes RH
Lien social Ressources
Humaines
Bien être QVT Economique
Notion et
domaines RH(3)
Collectif/
Organisation
Syndicale
Moyen /
GRH
Salariés/ dans
l’être
But/ Production
La performance
sociale (4)
Les classes 1&2 relèvent plutôt
du « comment » entendre la PS
Les classes 3&4 marquent plutôt
l’objectif de ce que pourrait
rechercher la PS
Etymologie (5)
Social Social Performance
/Exécution
Performance /
Résultat
51
en évidence les objectifs recherchés par la PS. La ligne 5 quant à elle, nous permet de mettre en
concordance nos recherches étymologiques des termes « performance » et « social » avec
l’analyse textuelle de la question 1.
Ce rapprochement et cette cohérence de sens présentent l’intérêt de mettre à jour la
pertinence de la perception des signifiants à travers l’inconscient collectif, et la force de leurs
histoires dans les interprétations de chacun. Ce repérage est d’autant plus frappant dans les
distinctions qui s’opèrent entre performance en termes de résultats et de performance en termes
d’exécution. Notons tout pareillement, comment nous pouvons mettre en parallèle l’étymologie
du terme « social » avec les idées de « collectif », de « relation », collectées dans les verbatim.
Et plus particulièrement à l’idée que sous le « social » une multitude d’acteurs s’en font les
parties prenantes, et qu’un phénomène social n’est jamais qu’interdépendant d’un autre, pour
une fin sociale donnée (implicitement ou explicitement) : ce qui pourrait être ici « la
performance » dans ses deux acceptions.
Une des lectures de ce tableau, nous permet de dire que la performance se noue dans
l’économique et la qualité de vie au travail (regroupement de la classe 3 et 4) ce qui serait un
moyen, pour rendre performants les services RH (classe 2) à travers un dialogue social
organisant le lien social (classe 1) au sein de l’entreprise.
Avec de nouveaux modes de management des ressources humaines, il s’agit ni plus ni
moins, d’une définition possible de la performance sociale, d’un type nouveau de service RH
dédiée à ses parties prenantes : les salariés, du moins à travers la perception des salariés qui se
sont prêtés à ce questionnement.
3.22. Analyse des retours de la question « deux » (Q2)
Celle-ci est : « Une Direction des ressources humaines qui devient Direction de la
performance sociale, quel sens/signification cela prend et quel impact dans la perception du
salarié ? ».
Le dendrogramme (ci-dessous) distingue 5 classes de formes. La première (classe 5) qui
représente 17,4% des segments de textes. Les 4 autres classes dans la deuxième branches sont
sous divisées en deux sous classes, 31,6% des formes pour la classe 3 et 50,9% pour les classes
1, 2 et 4, dont 38,7 pour la classe 1 et 2 qui sont sur la même branche.
52
Moyen
Formation
Atteindre
Accompagnement
Organisation
Investissement
Implique
Collaborateur
Dimension
Manager
Sens
Développement
Ressource
Prendre
Direction
Changer
Humain
Correspondre
Mot
Notion
Penser
Négatif
Niveau
Premier
Evolution
Permettre
Indicateur
Générer
Meilleur
Place
Moyen105
Gestion & Management Complexité Pilotage social
De manière très schématique, comme nous l’avons fait précédemment, nous pouvons
dire que se dégagent cinq classes thématiques regroupées en quatre domaines qui peuvent se
qualifier ainsi :
1. Une Direction de la performance sociale qui « gère » ses ressources humaines par
leur management (classe 1 et classe 2) ;
2. Une Direction de la performance sociale qui pilote la performance humaine (classe
3) ;
3. Une Direction de la performance sociale complexe et multiple (classe 4) ;
4. Une Direction de la performance sociale qui se dote de moyens et d’outils
innovants (classe 5) ;
Celles-ci sont dirigées vers ce que peut être une direction de performance sociale
contrairement aux précédentes qui nous orientaient plutôt vers la perception de ce que peut être
la performance sociale en soi.
A partir de l’analyse de ces 5 classes, nous allons découvrir comment pourrait se
construire une Direction de la performance sociale.
105 Cette ligne marque les notions ou domaines que peuvent représenter chaque classe.
53
3.22.1. Une Direction de la performance sociale qui « gère » ses ressources
humaines par le management.
La classe 1, et la classe 2 rassemblent d’une part des termes tels que « relation »,
« prendre », « direction », « humain », « changer », « correspondre » qui tournent autour
d’une idée de « dynamique », de « mouvement » ou la manière pour une Direction de
performance sociale de manager ses ressources humaines. Et d’autre part de mots tel que
« implique », « collaborateur », « dimension », « ressource », « développement » et sous-
tend l’idée de « gestion » des ressources humaines ou il serait question d’une Direction de
performance sociale qui intègre la gestion des ressources humaines106.
A travers ces deux classes, gestion et management des ressources humaines se croisent
et se rejoignent. Les classes 1 et 2 peuvent aisément être regroupées autour d’une thématique
proche qui nous indiquerait une forme possible, de modalité de gestion des ressources
humaines. Elles pourraient définir ce que serait une direction de la performance sociale, dans
son objet, dans ses processus et dans la manière de les mettre en mouvement. « Contrairement
au terme « gestion des ressources » où les ressources humaines semblent être considérées au
même titre que les ressources financières ou les flux de marchandises, c’est à dire quelque
chose dont on dispose, la performance sociale me semble réintroduire les individus pris
collectivement » (E7)
.
Manager, gérer, performer, restent complexes dans les esprits et les perceptions. Aussi,
cette direction pourrait tout autant offrir « une politique axée sur l'employabilité et plus
précisément sur l adaptation des compétences à l’évolution du business et du marché »(E9)
,
qu’une autre permettant aux individus et collectifs de « s'adapter et répondre aux besoins de
l'entreprise, d’être performante pour la réussite de l'entreprise »(E12)
, par exemple à travers
des mobilités professionnelles : une nouvelle manière d’être « agile ». Ou a contrario permettre
au salarié « qui se sent bien dans son travail » de s’impliquer mieux et d’être « forcément plus
performant pour l’entreprise »(E33)
.
Mais cela ne va pas de soi et demande d’une part « un travail didactique auprès du
management pour leurs faire comprendre l’intérêt de la formation, l’intérêt du collectif et du
dialogue social »(E37)
. Et d’autre part une implication de tous
« à la fois les managers » et « la
direction générale » pour une bonne maitrise de « la relation avec les syndicats et le corps
social » (E4)
.
106 La distinction, la nuance entre ces deux idées (gestion et management) est ténue.
54
Plus simplement, il pourrait s’agir d’une évolution, (ou d’une adaptation) des
services des ressources humaines tout comme il y a eu « l’évolution de la GRH, avec la
montée de l’industrialisation, le paternalisme, puis le virage vers la gestion du personnel et
l’arrivé de la composante « humaine » (E33)
dans gestion des ressources humaines (GRH).
Nous pourrions presque parler ici d’une direction de la « dimension sociale du travail »
ce qui pourrait être une autre voie de recherche. Les verbatim liés à ces séquences nous
donnent la sensation d’une « définition qui se cherche », mais quoi qu’il en soit d’une direction
de la performance sociale qui « va plus loin qu’une gestion des ressources humaines » (E2)
.
3.22.2. Une Direction de la performance sociale qui pilote la performance
humaine
La classe 3 : réunit des formes telles que « permettre », « évolution », « meilleur »,
« indicateur », « générer ». Le pilotage de la performance humaine pourrait être, ici l’un des
vecteurs d’une Direction de performance sociale.
Mais cette classe introduit également et très clairement l’idée Ŕ au-delà de l’humain -
que l’évolution d’une DRH, ne peut se faire qu’en allant vers une meilleure rentabilité. Ce qui
se traduit à travers le « pilotage d’indicateurs, qui peuvent être communiqués » et offre « la
capacité de pouvoir mesurer les résultats »(E1)
. Ceci dit, la mise en place d'objectifs et
d'indicateurs « doivent être pertinents et adaptés afin de ne pas générer de pression, de stress
ou de dégradation des conditions de travail »(E15)
.
Ici aussi, la complexité se fait entendre à travers l’expression des salariés et, en filigrane
se pose la question de : comment allier, « indicateurs », « résultats » et « qualité de vie au
travail ». Même si les mots « dialogue », « communication » de cette classe, peuvent déjà
évoquer une solution potentielle, ou du moins des idées.
C’est une ébauche de réponse, qui se traduit dans cette préconisation en proposant de
mettre « au centre de ses préoccupations le dialogue social afin d’obtenir à travers cette
nouvelle approche une évolution des pratiques, et de ce fait, une meilleure performance »(E11)
.
Ou encore ici, en utilisant la communication comme vecteur de compréhension, de sens afin
d’éviter mal entendu et quiproquo tels que celui du salarié qui pourrait se vivre comme « enjeu
de performance (= je ne suis même plus une ressource, je suis un chiffre) »(E26)
.
55
Inversement ce risque peut se révéler être une source positive pour les RH en leur
permettant « d’avoir au sein du CODIR une écoute plus conséquente car en lien avec la notion
de performance donc de chiffres ». (E36)
Quoiqu’il en soit de manière très claire, ces changements et évolutions ne peuvent que
générer des « attentes fortes » en termes de communication, par exemple à travers l’«exigence
d’une meilleure information des salariés, plus directe et moins filtrée par les cadres
intermédiaires ». Mais également en termes d’organisation : « moins hiérarchique, avec plus
de transversalité », permettant « plus de marge de manœuvre », et « une relation sociale
renouvelée ».
Dans l’ensemble, de telles directions devraient permettre aux salariés de percevoir « la
volonté de les associer plus fortement aux orientations et décisions de l’entreprise » (E29)
, et
d’améliorer ainsi leur qualité de vie au travail. Aussi pour l’entreprise ce sont de nouvelles
modalités de management à considérer ou inventer.
Mais « on peut imaginer que ces nouveaux concepts prennent un certain temps à
s’installer vraiment comme lorsque les ressources humaines avaient progressivement remplacé
la gestion du personnel »(E34)
.
3.22.3. Une Direction de performance sociale complexe
La classe 4, avec des termes tels que « mot », « penser », « notion », « négatif »,
« fonction », met en évidence le subjectif de l’affaire qui nous occupe et laisse de fait dubitatif.
Que signifie ce changement, cette nouvelle appellation ? Quel sens y apporter ?
Stupéfaction pour les DRH externes107
qui à aucun moment n’avaient envisagé une telle
évolution de leur DRH, générant ainsi questions et réponses en cascade : s’agit-il d’ « Un effet
de mode ? » Mais est-ce judicieux lorsque l’on sait que « La performance est souvent associée
à une réduction des coûts ? ». Aussi, n’y a t- il pas le risque de créer « Un amalgame entre la
performance sociale et la capacité d'une direction à optimiser la performance des individus ?
Pourquoi changer de nom ? Quel sens prendrait ce nouveau nom face à des situations de crise
(compressions d'effectifs, changements d'organisation...) ? »(E.5)
.
Pour ces salariés de l’industrie, il est clair que l’interrogation passe de suite par le
prisme du risque dans un contexte de réduction d’emploi. Ceci dit ces réactions mettent plutôt
en évidence la dichotomie qu’opère cette association de terme et la difficulté à la penser, ce qui
107 Une des très rares différences entre les internes et les externes : l’effet de surprise ou même de légère stupéfaction face à une nouvelle
dénomination d’une direction de ressources humaines en direction de la performance sociale.
56
peut faire dire que : « sous couvert d'une image a priori positive, (ce) n'est peut-être qu'un
néologisme traduisant le fait qu'on attend en premier lieu toujours plus de performance de la
part des Agents, des institutions, des organisations, et que les moyens/ressources pour y
arriver seront peut-être mis au second plan » (E14)
. Certains en parlent en terme d’ « image »,
de « mode », de « paradoxe » et voir le déclinent en terme linguistique sous le vocable
d’« oxymore ».
Pour d’autres, l’objectif semble précis et sans détours et cette nomination « semble
avoir ce justificatif la, au-delà de l’effet marketing : Si une direction des ressources humaines
s’appelle direction de la performance sociale ça veut forcément dire que l’organisation à
laquelle elle appartient s’est fixée des objectifs de performance et que la direction va être
capable, et va s’organiser pour obtenir les résultats a une période donnée ».(E1)
Pour autant à
un niveau individuel, la perception est pensée comme « plus négative car cela engendre une
impression d’exploitation et de résultat, donc une approche de masse de la fonction et non
plus individuelle »(E36)
. Le collectif semble de retour au moment où la société s’individualise
de plus en plus, mais se cherche collectivement à travers les réseaux sociaux.
Cette classe au sein du dendrogramme se rapproche des classes une et deux de par les
thématiques, et interrogations qu’elle soulève. Elle s’intègre aux notions de gestion et de
management et montrent (même au-delà de ce travail), comment ces concepts sont complexes
en soi. D’ailleurs « si le mot « social » est bien en adéquation avec les fonctions d'une DRH ...
par contre le mot « performance » est plus étonnant ». Et au final, remplacer le nom de DRH
par « direction de la performance sociale », ouvre le risque pour les salariés, « de ne retenir
que le mot "Performance" ... et le résultat pourrait être contre-productif » […], mais « tout
dépend du discours qui accompagnera le changement »(E25)
.
3.22.4. Une Direction de performance sociale qui se dote de moyens et d’outils
innovants
La classe 5, réintroduit des fondamentaux comme « Moyen », « Formation »,
« Atteindre », « Accompagnement », etc. Et ainsi une Direction de la performance sociale doit
se doter de moyens pour arriver à ses objectifs à travers « une véritable action sur la formation
réfléchie, ouverte et discutée avec ses IRP. Une GPEC concrète et simple qui redescend
vraiment vers les salariés et leurs permet de les faire évoluer sans se dédouaner de
suppressions d'emplois en qualifiant un emploi de sensible ».(E37)
57
Tel pourraient être les moyens nécessaires à la bonne mise en œuvre d’une Direction de
la performance sociale, même si celle-ci ne peut se réduire à cette nouvelle forme de gestion,
car « pour atteindre un objectif commun, pour être performant, il faut disposer des
compétences adéquates »(E25)
.
A travers ces 5 classes transparait clairement comment dans la perception des salariés
interviewés, une direction de la performance sociale reste par définition complexe, soit de par
sa nouveauté, soit de par la simple évidence que l’humain en restera une composante majeur.
Quoiqu’il en soit il s’agit d’une véritable évolution des services RH, avec de nouvelles
orientations à prendre, en usant tout autant de moyens classiques (formation, GPEC, etc.),
qu’innovant à travers de nouvelles modalités de gestion de ses ressources, et du management
de celles-ci. Les notions de collectifs, de mouvement, d’employabilité, tout comme celles
d’associer les salariés, les IRP aux échanges, aux dialogues et aux décisions sont très présentes
dans les retours des interviewés, et apparaissent comme des lignes directrices.
3.22.5. Réajustement des classes de la question « deux »
Au regard de cette analyse et du croisement des classes 1, 2 et 4, nous avons extrait
dans IRaMuTeQ une nouvelle analyse, compressant et regroupant les données sur 4 classes.
Cette analyse nous a permis de mettre en évidence plus clairement encore ce qu’il pourrait en
être d’une direction des ressources humaines du futur.
Cette extraction nous permet de créer pour la question « deux » (Q2), un tableau de même
type que celui issu de l’analyse de la question « une » (Q1) avec un nouveau dendrogramme.
Ce regroupement permet de supprimer la question de la complexité en la répartissant au
sein de chacune des classes.
Ce dendrogramme laisse surgir très clairement les quatre grands domaines ou piliers
représentatifs d’une Direction de performance sociale, telle que schématisée ici à travers
l’expression et les représentations des salariés.
Dendrogramme 2 :
58
Pilotage Social Performance Management Moyen
3.22.6. Tableau de synthèse de la question « deux » (Q2)
Question
« deux »
Classe 1
26,1%
Classe 2
32%
Classe 3
20,4%
Classe 4
21,4%
Domaine (1)
Management Performance Pilotage social Moyens
Mots (2)
Ressource
Direction
Devenir
Evolution
Humain Personnel
Collaborateur
Gestion
Entreprise
Financier
Risque
Perception
Penser Rentabilité
Performant
Qualité
Ecouter
Travail
Durable
Permettre
Développement
Résultat
Collectif
Accompagnement
Moyen
Formation
Atteindre Comprendre
Idées sous-
jacentes (3)
Le changement,
une évolution des
services RH, une
autre modalité de
management: un
tournant sociétal
pour l’entreprise
La performance
au cœur du
système perçue en
termes de
rentabilité et de
risque : à penser
Le social pour
une
performance
durable avec la
QVT comme
facteur central
Les nouvelles
modalités de
gestion RH : de
l’individuel au
collectif, en se
donnant les
moyens en interne.
Thématique :
Axes RH (4)
Lien social collectif Economique Bien être - QVT Ressources
humaines
Notion (5)
Collectif/Relations
Sociales
But /Production/
Durable
Etre/Salariés Moyen/GRH
Etymologie(6)
Social Performance/
résultat
Performance /
Exécution
Social
3.22.7. Eléments de lecture :
59
Ce tableau reprend en ligne 1 les domaines ou champs que recouvrent ici, une Direction
de la performance sociale. En ligne 2, par classe, les mots issus de l’analyse IRaMuTeQ. En
ligne 3, les idées sous-jacentes extraites à partir des analyses des classes et des verbatim. Et en
ligne 4, essentiellement les thématiques RH (extraites des entretiens) qui se révèlent de chaque
classe. La ligne 5 met en évidence les notions propres à chacune des catégories de classe. La
ligne 6 reprend la cohérence étymologique.
3.23. Eléments de synthèse des questions « une » et « deux » : regard
croisé
Nous pouvons regrouper les résultats de l’analyse des deux questions en un tableau
unique qui se noue autour des axes RH extraits des perceptions des salariés à travers les
questionnaires.
3.23.1. Eléments de lecture du tableau de synthèse
De manière peu traditionnelle, nous nous sommes permis une originalité dans le
croisement des tableaux issus de l’analyse des questions 1 et 2. Au regard des résultats issus
des travaux précédents, il nous a été possible de repérer d’une part que les idées sous-jacentes
(ligne 6) extraites de l’analyse de la question 2, étaient totalement pertinentes pour la question
une. Et d’autre part que les thématiques (ligne 7) et la répartition étymologique (ligne 6) se
retrouvaient de manière identique sur les deux questionnements.
Aussi nous avons utilisé ces éléments comme points de jonction entre les deux
tableaux, ils se situent aux niveaux des lignes 5,6,7. Ils figurent dans le tableau comme le socle
de base des résultats de l’analyse. Les lignes 4, 3, 2, 1 (se lisant de bas en haut) sont de ce fait
totalement en miroir avec les lignes 8, 9, 10, 11 (se lisant de haut en bas sur cette
représentation plane).
60
3.23.2. Tableau de synthèse
Q1(1)
Classe 1 Classe 2 Classe 3 Classe 4
Mots
issus de
IRaMuTeQ
pour la question
« Une » (2)
Collectif
Partenaire
Relation
Agent Développement
Social
Moyen
Ressource
Humain
Œuvre (mettre) Organisation
Atteindre
Parler
Travail
Sens
Evolution Vie
Effet
Dialogue
Production
Atteindre
Objectif
Economique Moyen
Résultat Mesure
Notion
&
Domaine (3)
Collectif -
Org. Syndicale
Management
19,5%
Moyen -
GRH
23,4%
Salarié - Etre
Pilotage
Humain/Social
31,2%
But -
Production
Performance
économique
26%
Q1 ↑ (4)
Etymologie (5)
Social Performance
Exécution Résultat
Idées
sous-jacentes
extraites des
analyses (6)
Le changement, une
évolution des
services RH, une
autre modalité de
management : un
tournant sociétal
pour l’entreprise
Les nouvelles
modalités de gestion
RH : de l’individuel
au collectif, en se
donnant les moyens
en interne.
Le social pour une
performance
durable avec la
QVT comme
facteur central
La performance
au cœur du
système perçue
en termes de
rentabilité et de
risque : à penser
Thématique :
Axes RH extrait
des entretien (7)
Lien social
Ressources
Humaines
Bien être
QVT
Economique
Q2 ↓(8)
Notion
&
Domaine (9)
Management
26,2%
Moyen
21,4%
Pilotage
Humain/Social
20,4%
Performance
économique
32%
Mots
Issus de
IRaMuTeQ
Question
« deux » (10)
Ressource
Prendre
Direction Devenir
Evolution Collaborateur
Collectif
Accompagnement
Moyen
Formation Atteindre
Comprendre
Qualité
Ecouter
Travail
Durable Développement
Résultat
Entreprise
Financier
Risque
Perception Penser
Rentabilité
Q2 (11)
Classe 1 Classe 4 Classe 3 Classe 2
61
3.23.3. Eléments d’analyse
Cette approche permet de mettre en évidence les points de convergences et les points de
divergences entre les deux questions. Ces derniers semblent minimalistes et sont plutôt le reflet
du codage du logiciel IRaMuTeQ. De manière globale, les thématiques, domaines, notions sont
identiques dans les deux analyses.
Cependant il paraît intéressant de noter, dans la question « une », que « la qualité de vie
au travail » est une thématique qui surgit à plus de 31% dans la perception de ce que pourrait
être la PS, alors qu’elle n’est plus qu’à 20% lorsqu’il s’agit de parler très techniquement de ce
que serait une direction de la PS, et pareillement, la « performance économique » représente
32% dans la question « deux » contre 26% dans la question « une » (Ligne 3 et 9). Pourrions-
nous dire qu’entre rêve et réalité il y a « schisme » ?. En tout état de cause, la performance
divise entre « exécution » et « résultat ».
L’analyse interroge également sur la question de l’homme, pris en tant que tel
(perception de ce qu’est la PS/Q1) et de l’homme, pris dans sa fonction, l’entreprise, et
l’économique (Perception de ce que serait une Direction PS/Q2), entre ce que l’on aimerait,
voudrait, et la réalité « infernale » de l’entreprise d’où se dégage une idée de « toujours plus ».
L’aspect social se révèle plus équilibré, même si la dimension « management » est plus
importante dans la perception d’une direction de la performance sociale (Q2), alors qu’il s’agit
de la nécessité de « moyens » pour la représentation de la PS en soi (Q1).
Ceci dit, il semble très intéressant de relever « la cohérence de ces différences » si nous
posons l’hypothèse que les moyens vont de pairs avec l’obtention d’une qualité de vie au
travail favorable et que le management lui, va de pair avec l’économique. Certes, la dimension
de management mériterait d’être plus investiguée, cette notion de nouveau mode de
management revenant de manière récurrente : une référence au « management 3.0 »108 ?:
De façon plus généraliste, « Q1 » renvoie plutôt à une vision orientée « sujet » : la
perception de la PS « c’est quoi/pour qui », par rapport à « Q2» plutôt « organisation » : une
direction de la PS, « pourquoi/comment » ? Notons également comment la place est donnée
majoritairement au management des RH en Q2 et fait ainsi écho à la question « une » dans sa
dimension sociale , ce qui très schématiquement, nous donne sur quoi pourrait jouer le
management avec un passage très marqué de l’individuel au collectif.
108 « Management 3.0 : mode d’emploi » http://www.chefdentreprise.com/Thematique/rh-management-1026/Breves/Management-mode-
emploi-260721.htm - : fédérer autour du pourquoi et laisser libre cours sur la comment.
62
CONCLUSION
Si dans un premier temps, notre étude nous conduit entre étymologie et textes
académiques à la recherche de la performance sociale, il s’avère très rapidement que l’enjeu de
notre questionnement, ou plutôt ses réponses ne sont surement pas à cet endroit. D’ailleurs, au
regard de l’ensemble des éléments recueillis, il semble même tout à fait possible de poser ici
que recherches, définitions et concept de P.S. (tout comme de RSE), sont en quelque sorte une
tentative de modélisation de ce qui empiriquement surgit au sein des entreprises prisent dans
un environnement économique et sociétal totalement mouvant. L’étude de l’origine de cette
réflexion liée à Carroll, Wood, etc., pointe aisément les liens avec le milieu des affaires
américaines, son histoire et sa culture109
.
D’ailleurs, nous avons vu comment la commission européenne doit s’en emparer pour à
son tour la démocratiser dans les pays de l’union et plus particulièrement dans le milieu des
entreprises. A partir des conceptualisations américaines, la commission européenne oriente et
défini la RSE, en y intégrant la dimension de la performance sociale. Ainsi, elle lance et ouvre
la réflexion sur une mise en œuvre opérationnelle de la PS.
Les groupements professionnels, cabinets de consultants, think tanks, etc. s’y attèlent dans la
foulée, proposant définitions, moyens de mesures, d’évaluations, etc., : des outils permettant de
booster les indicateurs et de les développer pour les rendre plus performants.
Au-delà de ces propositions et outils notre analyse offre de nouvelles opportunités de
lecture. A partir du recueil de l’expression de salariés (DRH et non DRH) sur la question de la
performance sociale et de l’évolution d’une Direction RH en Direction de la performance
sociale, l’analyse des discours met en évidence, simplement, ce qu’elle pourrait être. Une
Direction des ressources humaines qui prendrait en compte l’évolution de la société, et de
l’entreprise au sein de celle-ci : autrement dit une forme d’adaptation de l’entreprise à son
environnement. L’entreprise comme microcosme de la société est soumise aux mêmes règles,
en étant absorbée par un environnement qui va vite, qui bouge et qui demande toujours plus de
compétitivité. Après s’être automatisée, numérisée, réorganisée, etc., son objectif est de
109 Nous pouvons noter que si les éléments liées à l’analyse des perceptions des salariés, peuvent se nouer quasi spontanément avec les repères étymologiques de notre première partie de travail, il n’en va pas de même avec les apports liés à l’étude des textes académiques.
63
s’inscrire dans un enjeu mondialiste à travers la RSE et plus finement d’intégrer la performance
sociale en son sein : de s’occuper de ses parties prenantes : ses salariés. C’est ce que met en
évidence, ici l’expression des salariés sur le sujet.
Pour ce faire il apparaît naturellement que la gestion des ressources humaines doit
évoluer, aussi bien dans ses modalités de gestion que dans sa dynamique face à la rapidité des
changements. Une DRH se devra de plus en plus d’être innovante et principalement dans ses
modalités de management des ressources humaines afin d’être en phase avec ce qui attendu
aujourd’hui par l’entreprise, par les salariés et au delà par l’ensemble des acteurs en lien avec
elle. C’est ce qui se révèle distinctement : là, où nous étions dans une gestion des ressources
humaines en termes de moyens, (les moyens humains au service de l’entreprise) nous allons
vers une culture de résultat, essentiellement en termes d’objectifs pour les RH. Ce qui
s'interprète à travers la notion de performance sociale qui ainsi s’insère totalement dans ce
nouveau cadre. Finalement, une DRH va devoir inventer de nouveaux modes de management
vis à vis de son potentiel humain, plutôt de manière collective (par exemple :réflexions et
prises de décisions co-construites) à travers le lien social, véritable tissu de l’entreprise : ce qui
allie bien les termes de « performance » et « social ».
Plus confondant encore, à partir de l’analyse des perceptions, les salariés à travers leurs
réponses sont déjà en phase avec ce que pourrait être demain ces nouvelles organisations RH,
leur fallait juste le temps d’y penser, de puiser dans l’inconscient collectif (en lien avec
l’étymologie des termes), et de le mettre en mot, … Toute aussi flou qu’elle puisse encore être,
la notion de performance sociale est en train de devenir un concept opérant, en voie
d’élaboration.
Et contrairement à ce que nous avons pu mettre en évidence dans les lectures
académiques (le flou de la notion de performance sociale, la déconnexion entre la
conceptualisation américaine et la réalité110
perceptive du terrain, etc.), cette analyse textuelle
de l’expression de salariés permet de mettre en évidence une opérationnalité possible de la
performance sociale, et plus encore la pertinence d’une nouvelle nomination d’une DRH
110 La psychologie de la perception définit la réalité comme l'ensemble des données avec lesquelles nous sommes en interaction constante et
que nous utilisons pour nous adapter et survivre. Ces données ont longtemps été admises comme issues des sens alors qu'aujourd'hui elles sont plutôt considérées comme un produit du cerveau. Delorme. A., Flückiger. M., « Perception et réalité », Bruxelles, De Boeck Supérieur,
« Neurosciences & cognition », 2003, 544 pages
64
(Direction des ressources humaines) en DPS (Direction de la performance sociale), si l’on
considère que cette re-nomination marque un changement de paradigme majeur des fonctions
RH.
Cette étude ouvre donc sur les prémisses de ces changements RH111
, qui mériteraient
d’être fouillés plus finement à travers une étude ciblée sur ce sujet112
. Mais en ce sens, et pour
revenir un instant sur les origines de cette réflexion, il s’avère que si au sein de Pôle emploi,
pour le top management et les directions RH (de manière consciente ou inconsciente), un
tournant est pris au niveau de la conceptualisation de ces nouvelles modalités de manager les
ressources humaines, il en va également de mêmes pour des salariés : cette nomination ouvrant
à de nouvelles attentes de ceux ci (une prise en compte de nouvelles conceptions de travail et
de leurs besoins associés). Et ce, même si l’idée de performance sociale reste équivoque,
ouvrant soit à l’idée de l’humain comme performeur pour son entreprise lorsqu’il est question
d’une direction de performance sociale, soit à l’inverse à celle d’une entreprise qui performe
pour le bien être de ses humains, acteurs de l’entreprise, lorsqu’il s’agit de définir ce que
pourrait être la performance sociale pour les salariés.
Aussi, ce travail, outre le flou de la notion de « performance sociale » qui comme le
note Bourguignon (1997) à bien toute sa fonction, pose la question de ce qu’il en est du salarié
dans cette nouvelle dimension ?
A travers cette analyse, nous avons pu mettre en évidence ce que pourrait être une
Direction de la performance sociale, des moyens dont elle devrait se doter, du management
dans lequel elle devait s’inscrire et impulser, de l’aspect collectif plutôt qu’individuel, de la
notion d’objectifs collectifs, de la dimension qualité de vie au travail fondamentale pour les
salariés, de l’idée d’employabilité et d’agilité de ceux-ci afin d’être au plus près des attentes
économiques, des changements… Mais ceci dit à aucun moment il n’a été question de la place
du salarié dans l’entreprise, au sein de son entreprise. Nous l’avons seulement désigné sous le
vocable de « partie prenante interne », renommé tel que défini dans les théories des parties
111 Cette étude pourrait ouvrir à un travail de mise en perspective de ces changements RH à partir de la matrice de Dave Ulrich. 112 A ce sujet, il pourrait être fort intéressant de réaliser un travail d’analyse entre les offres des cabinets de consultants et les résultats obtenus à travers l’expression et les perceptions des salariés. La plupart des offres sur la thématiques PS, restent essentiellement cantonnées aux
mesures, évaluations, etc. travaillant la notion de PS de manière souvent morcelées. Alors qu’il serait tout à fait envisageable de travailler la performance sociale de manière singulière pour chaque entreprise, mais globale en l’intégrant par exemple dans une démarche d’alignement
stratégique.
65
prenantes. Et si, comme nous l’avons perçu, la notion de « performance » introduit l’idée
d’interne et d’externe, tout comme le terme de « société » d’ailleurs : la théorie des parties
prenantes en fait bien de même. Alors, au final, qu’est ce qui fait aujourd’hui, ou fera demain,
la différence entre une partie prenante interne et externe, entre par exemple un salarié et un
fournisseur ?
En 1984, Freeman définie une partie prenante ainsi « Tout groupe, ou individu qui peut
affecter ou être affecté par la réalisation des objectifs d’une organisation » et si effectivement
les parties prenantes sont différenciées au niveau de leur positionnement en terme d’internes
(actionnaires, employés, …) et d’externes (fournisseurs, clients, …) les préconisations et
modes de relations restent les mêmes afin de : « cibler les parties prenantes prioritaires,
entamer les dialogues sur les engagements, … afin d’améliorer les activités réalisées par
l’organisation et augmenter la performance ».
Aussi aujourd’hui lorsque l’entreprise réorganise, lorsqu’elle parle de mobilité
professionnelle, d’agilité, de flexibilité, … « qui peut être obtenue par l’aménagement des
capacités de production à l’interne ou par le recours à des moyens de production à
l’externe »113
(Roy, Audet, 2002) et aussi parce que « l’entreprise transformée doit développer
l’agilité, la flexibilité et les compétences qui la rapprocheront de ses clients et lui permettront
d’être à leur écoute » 114
(Lejeune, Préfontaine, Ricard -2001), de quoi est-il question ? Quel
traitement pour le salarié ?
Plus précisément n’est ce pas les prémices pour que le salarié soit/devienne
effectivement une partie prenante au même titre que l’est le fournisseur, le client ? 115
Se pose alors la question du devenir du son statut de salarié ?
113 Roy M., Audet M. (2002) « La transformation vers de nouvelles formes d'organisation plus flexibles : un cadre de référence », Gestion 4 (Vol. 27), p. 43-49. 114 Lejeune A., Préfontaine L., Ricard L. (2001) « Les chemins vers la performance : l'approche relationnelle et la transformation des entreprises », Gestion 3 (Vol. 26), p. 45-51. 115 Questionnement issu de nos échanges avec notre directeur de mémoire.
66
BIBLIOGRAPHIE
1. Allouche J., Charpentier M., Guillot-Soulez C. (2004) « Un panorama des études
académiques sur l’interaction performances sociales/performances économiques et
financières. », Congrès de l’AGRH.
(https://www.researchgate.net/publication/228423848_Un_panorama_des_etudes_acade
miques_sur_l'interaction_performances_socialesperformances_economiques_et_financie
res).
2. Allouche J., Huault I., Schmidt G. (2004) « Responsabilité sociale des entreprises : la
mesure détournée? » XVème Congrès de l’AGRH.
3. Allouche J., Laroche P. (2005) « Responsabilité sociale et performance financière des
entreprises : une synthèse de la littérature », in Encyclopédie des ressources humaines,
3ème
éd. 2015, Ed : Vuibert, pp. 1273-1276.
4. Aquier A, Daudigeos.T., Valiorgue B. (2010) « Que peut nous apprendre le courant de la
Corporate Social Responsiveness sur les démarches de développement durable des
entreprises contemporaines ? »
(http://www.academia.edu/616619/Que_peut_nous_apprendre_le_courant_de_la_Corpor
ate_Social_Responsiveness_sur_les_démarches_de_développement_durable_des_entrepr
ises_contemporaines).
5. Auger P., Reynaud E. (2014) « Les déterminants de la performance sociale. Comparaison
des cas d’Emmaüs et des Restau du cœur » in management & avenir, n°70 pp. 189-206.
6. Ben Yedder M., Zaddem F. (2009) « La responsabilité sociale de l’entreprise : voie de
conciliation ou terrain d’affrontements ? » in Revue multidisciplinaire sur l’emploi, le
syndicalisme et le travail (REMEST), vol. 4, Nº 1;
http://www.remest.ca/documents/YeddertREMESTVol4no1.pdf
7. Baret P. (2006) « L’évaluation contingente de la performance globale des entreprises : une
méthode pour fonder un management sociétalement responsable ? » in Jean-Jacques
Rosé, Responsabilité sociale de l'entreprise, Ed : De Boeck Supérieur, « Méthodes &
Recherches »; chapitre 6 Ŕ pp. 135-152
8. Baret P. (2005), « Evaluation de la Performance Globale des Entreprises : Quid d’une
approche économique? » Colloque ADERSE, IAE Lyon, 18-19 Novembre 2005.
9. Berland N., Dohou A. (2007) « Mesure de la performance Globale des entreprises » Ŕ
67
Publication Créfige.
10. Bourguignon A. (1996) « Définir la performance : une simple question de définition ? » in
Performance et Ressources Humaines, Ed. Economica, Fericelli A.AM pp. 18-31.
11. Bourguignon A. (1995) « Peut-on définir la performance ?» in Revue Française de
comptabilité, n° 269 ; pp. 61-66.
12. Bourguigon A. (1997) « Sous les pavés, la plage... ou les multiples fonctions du vocabulaire
comptable : l'exemple de la performance », in Comptabilité - Contrôle - Audit - (Tome
3), Ed. Economica, pp. 89-101.
13. Bessire D., Onnee S. (2006) « Les agences de notation sociétale : la quête de légitimité
dans un champ organisationnel en construction » Comptabilité Contrôle Audit et
Institutions, en ligne : halshs-00548091.
14. Bnouni I. (2011) « Performance sociale et performance financière : Etat de l’art » Ŕ
XXème conférence de l’AIMS Ŕ Nantes juin 2011.
15. Capron M., Quairel-Lanoizelée F. (2007) « La responsabilité sociale d’entreprise », édit°
la découverte ; Paris.
16. Chakroun W., Tounés A. « Performance sociale des entreprises et dispositif de mesures :
un panorama théorique » (https://webbrain.com/attach?brain=F896C85C-9929-FD57-
74F0-E2F976A081D4&attach=96&type=1).
17. Closon C. (2010) « L'impact de la satisfaction des travailleurs à l'égard de la performance
sociale de leur entreprise sur le soutien organisationnel perçu, l'implication
organisationnelle et la satisfaction au travail des travailleurs », La Revue des Sciences
de Gestion 1/2010 (n°241), pp. 67-73.
18. Coulon R. (2006) « Responsabilité sociale de l'entreprise et pratiques de gestion des
ressources humaines », in Revue de l’organisation responsable, (Vol. 1) , pp. 48-64.
19. Delorme. A., Flückiger. M. (2003) « Perception et réalité », Bruxelles, De Boeck
Supérieur, « Neurosciences & cognition ».
20. Durkheim E. (1974) « Sociologie et philosophie » Paris, Presse Universitaire de France.
21. Dutton R., Larouche D. (2016) « La responsabilité sociale des entreprises de la bonne
intention à la discipline de gestion », Gestion 2016/1 (Vol. 41), pp. 30-33.
22. Germain C., Trébucq S. (2004) « Au-delà de la RSE : la responsabilité globale » in
Semaine sociale Lamy, n°1186, pp. 35 Ŕ 41.
23. Gilbert P., Charpentier M. (2004) « Comment évaluer la performance RH ? question
universelle, réponses contingentes » Ŕ Publication GREGOR.
68
24. Gilbert P., Parlier M. (1992) « La compétence du « mot-valise » au concept opératoire » in
Actualité de la formation permanente, n°116, pp.14-18.
25. Gond J. P., France, P. A. (2003) « Performance sociétale de l'entreprise et apprentissage
organisationnel : vers un modèle d'apprentissage sociétale de l'entreprise ? », Journée
AIMS Développement durable et entreprise, 15.
26. Gond J.P. (2009) « La responsabilité sociale de l’entreprise au-delà du fonctionnalisme :
un cadre d’analyse pluraliste de l’interface entreprise - société » Conférence à HEC
Montréal (http://leg.u-bourgogne.fr/rev/142066.pdf).
27. Henri J. (1951) « Introduction à la sociologie » in Revue de l'Institut de Sociologie, n°3,
pp. 345-392 (https://sociologies.revues.org/2964).
28. Igalens J., Gond J. P. (2003) « La mesure de la Performance Sociale de l’entreprise : une
analyse critique et empirique des données ARESE », in Revue de Gestion des Ressources
Humaines, Eska, pp. 111-130.
29. Igalens J., El Akremi A., Gond J. P., Swaen V. (2011) « La responsabilité sociale des
entreprises vue pas les salariés : phare ou rétroviseurs ? » in Revue de gestion des
ressources humaines - n° 82 Ŕ Avril 2011 Ŕ pp. 33-45.
30. Igalens J., Gond J. P. (2016) « La responsabilité sociale de l'entreprise » Paris, Presses
Universitaires de France, collection : Que sais-je ?, 128 pages.
31. Marmuse C. (1989) « Performance » in Encyclopédie de la gestion, Edition Economica, pp.
2194-2207.
32. Martory B., Crozet., Solnik B. (2016) « Gestion des ressources humaine : Pilotage social
et performances » Ed: Dunod, 9ème
édition, pp. 172-183.
33. Mauss M., Fauconnet P. (1901) « La sociologie : objet et méthode » in La grande
encyclopédie, vol 30.
34. Morin E., Savoie A., Beaudin G. (1994) « L’efficacité de l’organisation : une conception
intégrée », In L’efficacité de l’organisation. Chap 5, Edit° Gaëtan Morin.
35. Morin-Esteves C., Gendron C., Ceccarelli A. (2016) « Les rapports de développement
durable : dialogues autour de la définition et de la mesure de la performance extra
financière des entreprises ». RIODD 2016, Saint-Étienne, France.
36. Pesqueux Y. (2005) « Un modèle culturaliste de la RSE » in Jean-Jacques Rosé,
« Responsabilité sociale de l'entreprise », sous la direction de Jean Jacques Rosé, Ed. De
Boeck Supérieur, « Méthodes & Recherches », pp. 365-374.
37. Pesqueux Y. (2004) « La notion de performance globale », Forum international ETHICS,
69
Tunis.
38. Quairel F. (2004) « Responsable mais pas comptable : analyse de la normalisation des
rapports environnementaux et sociaux», Comptabilité Contrôle Audit, tome 10, vol. 1,
juin, pp. 7-36.
39. Reynaud E., Roques O. (2007) « Les pratiques de responsabilité sociale de l’entreprise
confrontées aux valeurs des salariés » Cahiers de recherche CEROG, n°809 (en ligne)
40. Salgado M. (2013) « La performance » : une dimension fondamentale pour l’évaluation des
entreprises et des organisations » in Archives ouvertes HAL.
41. Saulquin J. Y., Schier G. (2007) « Responsabilité sociale des entreprises et performance
Complémentarité ou substituabilité ? » in Revue des sciences de gestion, n°223, pp. 57-
65
42. Veltz P, Zarifian P. (1994) « Travail collectif et modèles d’organisation de la production »
in Le travail humain, vol.57, N°3, édit° Presse universitaire de France,
pp. 239-249.
43. Wood Donna J. (1991) «Corporate Social perfomance revisited » in Academy of
Management review, 1991, volume 16 n°4 pp. 691-718.
Références internet : cabinet, agence, …
1. « Comprendre et évaluer la performance sociale » - RSE pro (http://rse-
pro.com/performance-sociale-655).
2. « Et si la performance sociale insufflait une autre performance » - Regard croisé Un
think tank pour la performance sociale : mouvement pour un nouveau pacte social
fondé sur la confiance et la performance juin 2013 (http://www.pacte-social.fr/wp-
content/uploads/2015/05/2013_Pacte-Social-Livre-Blanc-Vision-
partag%C3%A9e.pdf).
3. « Pourquoi et comment mesurer la performance sociale ? » Marc Alphonse Forge -
Journal du net 22/04/2014
(http://www.journaldunet.com/management/expert/57127/pourquoi-et-comment-
mesurer-la-performance-sociale-des-entreprises.shtml).
70
4. « La performance sociale une composante à part entière du projet d’entreprise » Ŕ Les
échos 30/05/2016 Ŕ APICIL (http://business.lesechos.fr/directions-
generales/partenaire/partenaire-641-la-performance-sociale-une-composante-a-part-
entiere-du-projet-d-entreprise-210921.php).
5. « Le Pilotage de la performance : essai de définition » Ŕ Masanovic S.
(http://www.finyear.com/Le-pilotage-de-la-performance-essai-de-
definition_a14902.html).
6. « Un cadre, une équipe, des performances : la cohésion est-elle le lien ? » Ŕ
Charlier G. Ŕ mémoire école cadre de santé
(http://www.lereservoir.eu/BASE%20TFE%20CADRES/GAEL%20CHARLIER.pdf).
7. « Pourquoi parler de performance de la fonction RH ne doit plus être un sujet tabou ? »
Ŕ Katya Geraud - 2011 (http://www.myrhline.com/actualite-rh/pourquoi-parler-de-
performance-de-la-fonction-rh-ne-doit-plus-etre-un-sujet-tabou.html).
8. « La performance des fonctions « ressources humaines » étude 2008 fonction publique
(http://www.fonction-
publique.gouv.fr/files/files/publications/etudes_perspectives/performance_des_fonction
s_RH_def-2.pdf).
9. « Clarification des concept » Ŕ 2013- (http://www.institut-numerique.org/21-
clarification-des-concepts-520a6f03872db).
10. « Perspective : Une bonne performance sociale est rentable pour les entreprise » -
Réseau entreprise et développement durable (http://nbs.net/fr/connaissances/analyse-de-
rentabilite/rentabilite-du-developpement-durable/une-bonne-performance-sociale-est-
rentable-pour-les-entreprises/).
11. « La performance sociale au travail - Le livre blanc », Mars lab Janvier 2013 -
Stéphane Baggio et Pierre Eric Sutter
(https://www.google.fr/search?q=performance+sociale&ie=utf-8&oe=utf-
8&client=firefox-b&gfe_rd=cr&ei=K1OfV5y3FIWAaMLeiZg).
12. « De la performance sociale à la performance économique » Ŕ 2012 Ŕ Great Place to
Work (http://www.greatplacetowork.fr/publications-a-evenements/blogs-et-
actualite/586-de-la-performance-sociale-a-la-performance-economique).
71
ANNEXES
Annexe n° 1 :
Les hypothèses théoriques relatives aux relations entre la performance sociale et la
performance financière
Annexe n°2 :
Construire le lien positif entre performance sociale et performance financière
Annexe n°3 :
Synthèse des principaux modèles de PSE, Gond et Igalens (2009)
Annexe n°4 :
Quelques mouvements professionnels
Annexe n°5 :
Quelques morceaux choisis indifféremment
72
Annexe n°1
Les hypothèses théoriques relatives aux relations entre la PSE et la PF.
Gond J.-P., Igalens J. (2016) « L’impact financier de la responsabilité sociale de
l’entreprise », in La responsabilité sociale de l'entreprise, Paris, Presses Universitaires de
France , « Que sais-je ? », p. 81.
73
Annexe n°2 : Construire le lien positif entre performance sociale et performance financière.
Gond J.-P., Igalens J. (2016) « L’impact financier de la responsabilité sociale de
l’entreprise », in La responsabilité sociale de l'entreprise, Paris, Presses Universitaires de
France , « Que sais-je ? », p. 81.
74
Annexe n°3 : Synthèse des principaux modèles de PSE, Gond et Igalens (2009).
Auteurs Définition de la PSE Dimensions de la PSE
Carroll
(1979)
L’articulation et l’interaction entre (a)
différentes catégories de
responsabilités sociétales, (b) des
problèmes spécifiques liés à ces
responsabilités et (c) des philosophies
de réponse à ces problèmes
(a) Responsabilités sociétales intégrant les
Niveaux : économique, légal, éthique, discrétionnaire
(b) Philosophies de réponse
Posture : réactive, défensive, d’accommodation,
proactive
(c) Domaines sociétaux
Type de domaines : consumérisme, environnement,
discrimination, sécurité des produits, sécurité du
travail, l’actionnariat
Wood
(1991)
« Une configuration organisationnelle
de principes de responsabilité
sociétale, de processus de sensibilité
sociétale et de programmes, de
politiques et de résultats observables
qui sont liés aux relations sociétales
de l’entreprise »
(a) Principes de responsabilité sociétale
Niveaux : institutionnel, organisationnel et individuel
(b) Processus de sensibilité sociétale
Intègre : l’évaluation et l’analyse de l’environnement,
la gestion des parties prenantes et la gestion des
problèmes sociaux
(c) Résultats du comportement sociétal de l’entreprise
Regroupe: les impacts sociétaux, les programmes
sociétaux et les politiques sociétales
Clarkson
(1995)
Capacité à gérer et à satisfaire les
différentes parties prenantes de
l’entreprise
Le modèle identifie des problèmes spécifiques pour
chacune des principales catégories de stakeholders
qu’il distingue : Employés, Propriétaires/actionnaires,
Consommateurs, Fournisseurs, Stakeholders publics,
Concurrents.
Note : les définitions proposées sont directement construites à partir des idées centrales issues
des articles réalisés par les auteurs.
75
Annexe n°4 : Quelques mouvements professionnels
1. L’AGRH l’association francophone de gestion des ressources humaines. Publication sur
l’ensemble des champs GRH innovation, etc. (http://www.agrh.fr).
2. L’ANDRH : Association nationale des DRH : Acteur de référence dans le débat RH :
http://www.andrh.fr. Créée en 1947, l’ANDRH est une association loi 1901 au service des
professionnels des ressources humaines Avec plus de 5 000 membres, organisés en 80
groupes locaux, elle est la plus grande communauté de professionnels des ressources
humaines en France. l’ANDRH anticipe et accompagne l’évolution des métiers des
ressources humaines et est devenue, au fil des années, la communauté de référence dans le
débat RH.
3. L’ADRH GCT : L’association des DRH des grandes collectivités rassemble les DRH des
grandes villes, des départements, des régions et des établissements publics de coopération
intercommunale. C’est un réseau de ressources et d’échanges pour les DRH L’ADRHGCT
conduit également, via des études et des enquêtes, des réflexions sur les politiques RH et
sur la modernisation du statut (http://www.drh-attitude.fr).
4. Le Lab RH association de loi 1901, regroupant près de 200 startups de l’innovation RH et
de l’emploi, vise à accompagner, fédérer créer un environnement propice à l’innovation
(http://www.lab-rh.com). Le Think Tank est l’une des trois grandes activités du Lab RH.
L’objectif de cette activité est de capitaliser sur l’existant et d’anticiper l’avenir, que ce soit
en matière d’outils, de compétences, de modes de travail et d’organisation, ou de cultures
RH. Les principaux pôles de réflexion du Lab RH concernent la prospective globale, le
bonheur au travail, l’entreprise inclusive, l’entreprise agile, et la technologie dans les RH.
5. La Fabrique de l’industrie est un laboratoire d’idées créé en octobre 2011 par l’UIMM, Le
cercle de l’industrie, et le GFI afin de favoriser la réflexion collective sur les enjeux
industriels en termes de qualité. La Fabrique de l’industrie est présidée par Louis Gallois,
président du conseil de surveillance de PSA Peugeot-Citroën et Denis Ranque, président
du conseil d'administration d'Airbus Groupe. Son conseil d’orientation, composé de
76
dirigeants d’entreprises, de membres d’organisations syndicales et professionnelles,
d’experts issus du monde académique et d’observateurs des médias, veille à la qualité
scientifique, à la pertinence et à l’originalité des travaux. Une équipe resserrée, dirigée par
Thierry Weil et Vincent Charlet, anime un vaste réseau de contributeurs d’origine et de
perspective très diverses (http://www.la-fabrique.fr).
6. Les Rencontres d’Affaires TOP DRH sont une opportunité de rencontrer les acteurs clés
en Ressources Humaines sous la forme de rendez-vous préprogrammés (http://www.top-
drh.com/top-drh/).
7. L’état : France Stratégie est un organisme de réflexion, d’expertise et de concertation
placé auprès du Premier ministre qui travaille entre autre sur la question du RSE
(http://www.strategie.gouv.fr/publications/rse-performance-globale-competitivite et :
http://www.strategie.gouv.fr).
8. Quelques médias spécialisés : Novethic (http://www.novethic.fr).
Mozart consulting qui propose (http://www.socialadvisor.fr).
77
Annexe n°5 : Quelques morceaux choisis indifféremment :
« Quand on commence à mettre en avant une notion, à la poser comme incontournable
dans le fonctionnement d’un établissement, d’une entreprise, c’est souvent à un moment où
cette notion fait le plus défaut. »
« Si une direction des ressources humaines s’appelle direction de la performance
sociale, ça veut forcément dire que l’organisation à laquelle elle appartient s’est fixée des
objectifs de performance et que la direction va être capable, et va s’organiser pour obtenir les
résultats a une période donnée ».
« Une première réaction négative : un effet de mode ? La performance est souvent
associée à une réduction des coûts ? Un amalgame entre la performance sociale et la capacité
d'une direction à optimiser la performance des individus ? Pourquoi changer de nom ? Quel
sens prendrait ce nouveau nom face à des situations de crise (compressions d'effectifs,
changements d'organisation...) ? Cela vient peut-être de 20 ans passés dans l'industrie, secteur
où cela ne va pas toujours bien et où il peut y avoir quelques archaïsmes...
En prenant un peu de recul, dans un projet d'entreprise plus large, en donnant du sens
cette évolution et surtout des éléments concrets et factuels de changement... pourquoi pas ? »
« C'est pour moi une direction des ressources humaines qui a une politique ressources
humaines axée sur l'employabilité et plus précisément sur l'adaptation des compétences à
l’évolution du business et du marché. »
« D’un point de vue stratégique, cette dénomination permet de mettre en avant l’utilité
de la valeur ajoutée d’une direction des ressources humaines. En effet, bien que le retour sur
investissement ne soit pas toujours visible, il a été démontré par de nombreuses études que la
fonction RH a un véritable impact sur l’aspect financier »
« Cela peut signifier que l'entreprise se fixe comme objectif d'afficher et de démontrer
que les Hommes contribuent à la performance de l'entreprise. »
78
« Pour moi cela acte la nécessité de conjuguer les résultats opérationnels et la
motivation de ses salariés. Le risque, en termes de perception par les salariés, est que la
« performance sociale » soit prise au pied de la lettre comme un objectif autonome. »
« C'est une direction qui cherche à optimiser ses politiques, innover en partage et
transversalité avec ses salariés. Cela doit partir de l'écoute du ressenti des salariés pour
ensuite construire et élaborer : dis moi ce qu'il te faut et je le construirai avec toi.
Pas d'ambiguïté dans les termes utilisés parce que ces aspects là sont véritablement des leviers
qui peuvent permettre a une entreprise d'aller plus loin. C'est une question d'image, de
stabilité, de productivité => un gage de rentabilité »
« Une entreprise dispose de diverses ressources pour réussir : des machines, des
financements, des humains.
La dénomination direction des ressources humaines laisse penser que le salarié est une
ressource parmi d'autres et au même titre que d'autres.
Cette ressource est précieuse car elle sert la performance de l'entreprise (tout comme les
autres ressources).
Implicitement la ressource humaine doit s'adapter et répondre aux besoins de l'entreprise, être
performante pour la réussite de l'entreprise.
La performance sociale inverse l'obligation : c'est l'entreprise qui doit être performante vis à
vis des salariés : adopter une série de comportements qui favorisent l'épanouissement de
chaque salarié.
La finalité étant d'obtenir de cette façon le meilleur de chacun pour garantir la réussite de
l'entreprise. »
« Ce passage suppose une certaine maturité de l'organisation, soucieuse de l'image
d'entreprise donnée en interne comme en externe. Pour le salarié cela évoque une notion
d'exigence et l'inscrit dans une ambition collective dont les objectifs dépassent les simples
normes "légales" (dépassement collectif - un collectif à l'unisson derrière les valeurs portées
par l'institution) approche mobilisatrice et éthique . »
« Aussi, dans ce cas, une direction des ressources humaines qui devient direction de la
performance sociale s inscrit, selon moi, dans le cadre d une politique d entreprise : mettre au
79
centre de ses préoccupations le dialogue social afin d obtenir à travers cette nouvelle
approche une évolution des pratiques, et de ce fait, une meilleure performance. »
« Cela peut signifier que l'entreprise se fixe comme objectif d'afficher et de démontrer
que les Hommes contribuent à la performance de l'entreprise. Cela devrait donc générer des
indicateurs de mesure avec les résultats associés. Mais la mise en place d'objectifs et
d'indicateurs doivent être pertinents et adaptés afin de ne pas générer de pression, de stress ou
de dégradation des conditions de travail (effet inverse).
On peut se poser la question : est-ce que la direction financière se dénomme aussi "direction
de la performance économique"? »
« Pour moi, si cette direction prend en charge la performance sociale, elle doit être
axée sur le salarié au regard de la stratégie de l'entreprise avec "une bienveillance". Etre son
ambassadeur en quelque sorte »
« La notion de performance diffère de celle plus traditionnelle de gestion car elle
intègre des dimensions de dynamisme et de mouvement (la gestion étant une notion plus
statique et moins en évolution).
Par ailleurs, cette notion emporte un engagement de qualité que ne porte pas la notion
de gestion. Enfin, le social est un univers plus large que strictement RH, et inclut des
périphéries plus larges qui portent, au-delà de l’administration du personnel, de la formation
et du développement des compétences, et de la gestion juridique et sociale, vers la
responsabilité sociétale, la rénovation du dialogue social et la qualité de vie au travail .
L’association des deux termes suppose une exigence qui complète les différents univers
de performance de l’entreprise. Il ne s’agit plus seulement de garantir la mise en œuvre de
moyens de gestion, la mise à disposition de ressources mais de tenter d’atteindre un niveau de
performance (d’efficacité et d’efficience) qui puisse se mesurer, être objectivé, voire être
dépassé. »