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NOUVEAUX SENS
Référentiel de
l’entrepriseapprenante
7e édition 2021-2022
Nos grands témoins 2021-2022
Pierre AndradeSuez
Anthony Att iaEuronext
Gilles BabinetEssayiste
Elina BadetzEDF
Christine BellinTF1 le Groupe
Marc BensoussanIBM France
Sébastien BertrandCrédit Mutuel
Gérôme BilloisWavestone
Valérie BompardGroupe VYV
Fabrice BonnifetGroupe Bouygues
Émeline BourgoinING
Luce BrunerieClass’croute
André BrunetièreCegid Group
Laurent Butré Schlumberger
Laurence Caurett eAtol Les Opticiens
Aurélia ChevalEuropcar Mobility Group
Fabienne CholConseil régional d’Île-de-France
Cathy Collart-GeigerPicard Surgelés
Raoul Costa de BeauregardBack Market
Simone de OliveiraBRED Banque Populaire
Olivier DelabroyAir Liquide
Frédéric DelrieuSixense
Charlott e DenneryBNP Paribas Leasing Solutions
Jean-Philippe DesbiollesIBM France
Christophe DufourAstraZeneca France
Dominique DufresneBNP Paribas
Benjamin Durand-ServoingtGroupe Etam
Jean-Daniel ElbimBolloré Transport & Logistics
Christophe FamechonFnac Darty
Maud FunaroPrintemps
Matt hieu GarnierCoface
François GauthierVeolia
Hervé GbegoCompta Durable
Michel GesquièreIBM France
Dario GilIBM Research
Matt hieu GrymonprezAdeo
Franck GuibertGroupe Asten
Cristel GuillainNatixis
Jean-Charles HardouinArkema
Eric JacquotFaurecia
Vincent JauneauSiemens
Béatrice KosowskiIBM France
Franck Le ValloisFFA
Laurence LelouvierGroupe Onet
Geoff roy LibaudièreGroupe Eram
Françoise LyGroupama
Graziella MarcheseRougeGorge Lingerie
Edouard MargainLavinia
Clémence Marty-ChastanAP-HP
Mehdi MohammediHachette Livre
Julien MolezSociété Générale
Marie-Noëlle Muller-PernodetIBM France
Romain MulliezPicWicToys
Odile PanciaticiRenault
Pierre-Charles ParsyRoyal Canin
Laurent PasquierC’est qui le Patron ?!
Franck PerillierGroupe Foncia
Guillaume PlanetGroupe SEB
David QuantinGroupe Matmut
Laurent SarratSis ID
Rosanne SerranoDassault Aviation
Loïc ThomasEDF
Aida Todri-SanialCNRS
Xavier VaccariDocaposte
Xavier VasquesIBM France
Aymeric VincentGroupe Les Échos - Le Parisien
Omer WaysmanDanone
NOUVEAUX SENS
Référentiel de
l’entrepriseapprenante
7e édition 2021-2022
3 Sommaire
6 INTRODUCTION
Marc Bensoussan - IBM France Nouveaux sens
14 REGARDS CROISÉS :
LES ORGANISATIONS SE RÉINVENTENT
15 Cathy Collart-Geiger - Picard Surgelés
19 Jean-Daniel Elbim - Bolloré Transport & Logistics
24 Gilles Babinet - Essayiste
28 Fabrice Bonnifet - Groupe Bouygues
34 Romain Mulliez - PicWicToysLa crise nous a permis de trouver notre modèle multicanal
39 Laurent Pasquier - C’est qui le Patron ?!C’est qui le patron ?! : un nouveau modèle pour les consommacteurs
41 Clémence Marty-Chastan - AP-HPL’avènement de la télémédecine en France : « La crise sanitaire a marqué un pas majeur pour son usage »
45 Maud Funaro - PrintempsLe Printemps tisse une nouvelle relation-client autour de la magie des lieux et du conseil
47 Christophe Famechon - Fnac DartyFnac Darty digitalise ses canaux clients pour rivaliser avec les pure players
49 Aurélia Cheval - Europcar Mobility GroupLa mobilité se transforme, Europcar Mobility Group aussi
SOMMAIRE
PARTIE 1
Expérience client& employé
53 Simone de Oliveira - BRED Banque PopulaireAvec Pro Plus, la BRED construit un modèle de plateforme multiservices pour sa clientèle PME
55 Omer Waysman - DanoneAujourd’hui, le e-commerce se conjugue au pluriel
58 - RougeGorge LingerieL’omnicanal à l’épreuve de la rentabilité durable
60 Charlotte Dennery - BNP Paribas Leasing SolutionsBNP Paribas Leasing Solutions améliore son expérience client grâce à la e-signature
62 Christine Bellin - TF1 le GroupeLe Groupe TF1 : sur la route du direct-to-consumer
65 Benjamin Durand-Servoingt - Groupe EtamLa RFID, bras armé de l’omnicanalité au sein du Groupe Etam
67 Edouard Margain - LaviniaLavinia place le sommelier au centre de son dispositif omnicanal
69 Luce Brunerie - Class’crouteClass’croute crée un nouveau modèle d’affaires pour s’adapter au travail hybride
71 Laurence Caurette - Atol Les OpticiensAtol Les Opticiens crée un parcours client digital pour Lexilens
74 Pierre-Charles Parsy - Royal CaninRoyal Canin propose un abonnement hyper-personnalisé, avec l’appui des vétérinaires
76 Sébastien Bertrand - Crédit MutuelLe Crédit Mutuel soigne l’expérience collaborateur
78 Valérie Bompard - Groupe VYV« Proche des aidants », la nouvelle plateforme à haute valeur relationnelle du groupe VYV
80 Loïc Thomas - EDFEDF analyse et optimise ses interactions clients
4 Sommaire
Data & IA
84 Fabienne Chol - Conseil régional d’Île-de-FranceLa tablette, support d’acculturation digitale pour les agents de terrain franciliens
88 Laurence Lelouvier - Groupe OnetOnet : de l’entreprise de services à l’entreprise à impact
90 Elina Badetz - EDFChez EDF, les comptables deviennent des « robot farmers »
94 Dominique Dufresne - BNP ParibasComment BNP Paribas cultive en interne ses futurs experts cybersécurité
96 Guillaume Planet - Groupe SEBEn matière de transformation, l’humain passe avant la tech
100 Cristel Guillain - NatixisLe programme Jobs in Motion, pour des talents « faits maison »
103 Aymeric Vincent - Groupe Les Échos - Le ParisienLe journal Le Parisien opère sa mue digitale
105 Émeline Bourgoin - ING ING invente son onboarding distanciel pour partager sa culture
108 Françoise Ly - GroupamaGroupama passe en mode collaboratif
112 Christophe Dufour - AstraZeneca FranceLa donnée vie réelle, le prochain enjeu véritable des laboratoires pharmaceutiques
116 Raoul Costa de Beauregard - Back MarketAvec l’aide de la data, Back Market veut offrir aux produits
119 Matthieu Garnier - CofaceAvec iCON, la Coface transforme ses assets data en nouveau gisement de valeur
122 Laurent Butré - Schlumberger
124 André Brunetière - Cegid GroupCegid Flow, l’expert-comptable de poche
126 Julien Molez - Société GénéraleInscrire les données et l’IA au cœur de la transformation digitale de Société Générale : de l’inspiration à l’engagement
129 Olivier Delabroy - Air LiquideQlixbi, la nouvelle bouteille connectée d’Air Liquide
131 Franck Le Vallois - Fédération Française de l’Assurance Data et assurance : comment concilier temps long et rapidité du digital ?
134 Jean-Philippe Desbiolles - IBM France
136 Marie-Noëlle Muller-Pernodet - IBM FranceLes entreprises souhaitent acheter leur informatique aussi simplement que leur abonnement téléphonique
139 Geoffroy Libaudière - Groupe EramEram ouvre à ses clients les données de performance sociale et environnementale de ses chaussures
Talents & Culture
PARTIE 2 PARTIE 3
5 Sommaire
144 Odile Panciatici - Renault et Eric Jacquot - FaureciaAvec XCEED, Renault et Faurecia tracent la conformité des pièces automobiles
148 Vincent Jauneau - Siemens30 000 usines à digitaliser sous 5 à 10 ans en France
152 David Quantin - Groupe MatmutLa Matmut refond son Système d’Information pour mieux s’ouvrir à son écosystème
154 Laurent Sarrat - Sis IDSis ID, le Waze de la fraude au virement
156 Xavier Vaccari - DocaposteLe plan « Cloud First », une révolution copernicienne menée par Docaposte
158 Pierre Andrade - SuezD’opérateur d’infrastructure à éditeur de solutions :
160 Rosanne Serrano - Dassault AviationLa plateforme 3DEXPERIENCE, bureau d’étude virtuel de Dassault Aviation
162 Matthieu Grymonprez - AdeoAdeo, un SI agile et orienté business
164 Michel Gesquière - IBM France
stratégique
168 Jean-Charles Hardouin - ArkemaArkema opérera sa migration sur le cloud en moins de quatre ans
170 Frédéric Delrieu - SixenseBeyond progresse encore pour bâtir l’avenir du BTP
172 Franck Guibert - Groupe AstenLe cloud à puissance variable, innovation du Groupe Asten
176 Hervé Gbego - Compta DurableIntégrer la dimension environnementale dans
179 Gérôme Billois - WavestoneComment les Comex peuvent agir sur les enjeux de cybersécurité
183 Mehdi Mohammedi - Hachette LivreHachette Livre tourne la page de 40 ans de legacy
185 Franck Perillier - Groupe Foncia
d’information
187 François Gauthier - VeoliaVeolia, quatre piliers d’innovation digitale pour la transformation écologique
190 Anthony Attia - EuronextTokenisation, blockchain et cryptomonnaie : « la révolution n’a pas (encore) eu lieu »
193 Aida Todri-Sanial - CNRSLe CNRS et IBM cherchent à percer le secret quantique
195 Dario Gil - IBM ResearchNanotechnologies, IA, Quantique, Cloud : le futur de la hard tech selon IBM Research
199 Xavier Vasques - IBM France
du changement climatique
202 POSTFACE
Béatrice Kosowski - IBM France
Plateformes, Cloud & Industrialisation
PARTIE 4
Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
PARTIE 5
6 Introduction
INTRODUCTION
Ces derniers mois ont décidément constitué une
expérience singulière. Ce que nous pensions être une
parenthèse s’est prolongé dans le temps et étendu au
monde entier, ancrant dans la durée des adaptations
que nous pensions provisoires. Elle a révélé nos fragilités
mais aussi la capacité de changement et la rapidité
d’exécution dont nous étions capables, collectivement et
individuellement. Mais pour mener ce formidable effort
dans l’entreprise et aborder de nouveaux rivages, quatre
éléments sont et resteront indispensables : le sens, qui
doit guider toute action, l’ouverture (mentale comme
physique), l’hybridation comme solution aux enjeux
complexes, et la rapidité dans l’action et l’adaptation.
Donner du sensCitoyens-consommateurs, collaborateurs et dirigeants sont
tous d’accord : l’activité économique doit retrouver du sens,
un équilibre entre dynamique privée et valeurs partagées.
La généralisation du télétravail ou travail en mode hybride
nécessite une attention encore plus forte concernant ce
socle fondamental. Cela implique de la part des entreprises
une approche systémique, non pas en corollaire de l’activité
productive mais au cœur du réacteur.
Nouveaux sens
Marc BensoussanSenior Advisor Stratégie et Transformation, IBM FranceFondateur du Référentiel de l’Entreprise Apprenante
7 Introduction
traçabilité des produits et des services
- À travers le bon équilibre entre personnalisation et respect
de la vie privée
- À travers une IA explicable, auditable et éthique.
À titre d’exemple, Back Market, place de marché pour les
plus vulnérables des smartphones, modèle par modèle,
en captant les données de ses marchands concernant
les pannes et incidents. L’entreprise acquiert ensuite des
composants alternatifs, ce qui lui permet de faire tendre
produits neufs. À la clé : un impact environnemental
important sur le marché des produits technologiques.
S’ouvrirL’ÉCOSYSTÈME, POUR ATTEINDRE RAPIDEMENT
DE GRANDS OBJECTIFS
La logique d’écosystème offre des solutions innovantes
pour s’adapter au monde actuel : AstraZeneca et GSK font
par exemple front commun dans le cadre de la Coalition
Innovation Santé, pour créer un bracelet connecté à
même de maintenir le parcours de soin en distanciel sur les
Pour engager davantage leurs talents, les entreprises
les enjeux sociétaux. Onet, société de services de propreté,
prend par exemple en compte le critère de la performance
environnementale dans l’intéressement. Laurence Lelouvier,
DRH, est formelle : « Toute action est contributive à une
entreprise à impact ; évaluer cet impact doit devenir un
Il est nécessaire de repenser le lien entre les clients,
les employés et l’entreprise dans un environnement
beaucoup plus digital. Leur expérience doit rimer avec
adaptent leur stratégie. Pour Picard Surgelés, il s’agit de
toucher de nouveaux publics, sensibles aux avantages
environnementaux du produit (pas de gaspillage, récolte
de saison, etc.), via une distribution omnicanale.
pour les consommateurs, comme le pensent 72% des
dirigeants d’entreprise(1) :
« Il est nécessaire de repenser le lien entre les clients, les employés et l’entreprise dans un environnement beaucoup plus digital. »
(1) Global AI Adoption Index
8 Introduction
Nouveaux sens
INTRODUCTION
progressivement des applications professionnelles (gestion
des plannings, de la restauration, etc.) et plus de liens
avec le siège. Dans l’entreprise également, la parité et la
diversité sont un enjeu majeur, et la technologie permet
par exemple d’élargir les champs de recherche dans le
recrutement (sourcing automatisé de CV, diversité dans
les évaluations et décisions). La notion de diversité est
géographiques et permet aux entreprises de se réinventer
et d’être attractives pour de nouveaux talents.
DES ESPACES OUVERTS ET SÉCURISÉS
L’ouverture est également visible dans la vie réelle. Avec
la pérennisation du télétravail, les espaces changent de
destination. Ils sont le lieu de l’intelligence collective et du
dialogue avec l’extérieur. Ainsi avec 40% de surface gagnée
le Conseil régional
d’Île-de-France veut créer dans ses locaux des espaces
d’accueil pour ses parties prenantes.
« Le bureau du 21ème siècle est un lieu d’échanges et
L’ouverture et la sécurisation, autrefois antithétiques,
se rejoignent aujourd’hui pour créer de nouveaux
environnements techniquement complexes. Renault le
prouve à travers le projet XCEED, sa plateforme blockchain
dédiée à la conformité des pièces détachées automobiles
pathologies respiratoires liées aux BPCO(2).
Les plateformes ouvertes sur l’écosystème permettent
l’innovation, dans un monde où la mise sur le marché du
vaccin en un temps record a été rendue possible par des
collaborations entre acteurs privés, publics, les secteurs
pharmaceutiques, biologiques, et des
Le consommateur, informé et conscient, est acteur de ces
client sera une priorité sur les deux prochaines années
(vs 35% il y a deux ans) (3), mais seuls 10% des entreprises
indiquent que leurs clients contribuent à l’innovation en
termes de produits et services(4). C’est ainsi que la marque
C’est qui le Patron ?! fait participer les consommateurs au
cahier des charges de ses produits, leur donnant toutes les
clés pour faire eux-mêmes les arbitrages entre prix, qualité
et juste rémunération des producteurs.
L’INCLUSION ET LA DIVERSITÉ
La période Covid a mis en lumière la puissance des
pratiques numériques, mais aussi ceux qui en sont exclus,
environ 15% de la population française(5). La lutte contre
la fracture numérique s’en est trouvée renforcée. Ainsi le
Conseil régional d’Île-de-France a équipé en tablettes
les 8 500 agents de terrain des lycées franciliens, intégrant
(2)(3) COVID-19 and the future of business :
(4) Expanding innovation : It takes an ecosystem, (5)
9 Introduction
utilisateurs, à l’exemple des collaborateurs du Crédit
Mutuel qui peuvent consacrer la majeure partie de leur
améliorant la connaissance client.
L’HYBRIDATION DURABLE
VIE PROFESSIONNELLE / VIE PERSONNELLE
Avec l’allongement sur deux ans de la crise Covid, le
télétravail devient une donnée permanente. 43% du travail
en France a été effectué à distance en 2020(7). 61% des
salarié comme pour l’entreprise, il a rapidement fait l’objet
d’accords collectifs, la plupart des organisations optant
pour deux ou trois jours de télétravail hebdomadaires. Le
futur du travail est à construire et doit prendre en compte
sur l’ensemble de leur cycle de vie, ouverte à l’ensemble
de l’écosystème, et qui réunit aujourd’hui environ
70 acteurs européens de l’industrie automobile.
Pour rendre possible l’ouverture, la cybersécurité devient
un sujet de premier plan dans les Comex. L’année 2020 a
vu le nombre de cyberattaques multiplié par quatre(6), et
des attaques ciblant les hôpitaux ont rappelé les funestes
conséquences de cette criminalité. D’autres secteurs
prennent conscience de ce risque. C’est le cas du groupe
immobilier Foncia qui a sensibilisé ses dirigeants en
simulant une cyberattaque et proposé une formation à ceux
qui en avaient besoin.
HybriderNous retrouvons l’hybridation à tous les niveaux : entre
l’Homme et la machine, entre les énergies pour créer des
modes de transport plus respectueux de l’environnement,
entre les secteurs d’activité pour produire un nouveau
vaccin en moins d’un an.
AUGMENTÉE
Pour un salarié sur trois, l’équilibre
vie professionnelle / vie personnelle
est l’enjeu professionnel numéro 1
des cinq prochaines années.
(6) (7)
10 Introduction
Nouveaux sens
INTRODUCTION
HYBRIDATION DE LA SCIENCE ET DE LA DATA
POUR L’INNOVATION
La science a pris une place essentielle dans nos vies
quotidiennes depuis deux ans : médecins, biologistes,
statisticiens sont au centre du débat public. Augmentée
par les données, la science a été une source d’innovations
primordiale dans la gestion de la crise : séquencement du
génome du virus en quelques jours, ou encore simulation
L’industrie pharmaceutique
ouvre la voie de la réhabilitation
de la R&D dans l’innovation,
mais cette fois-ci augmentée
par la data. Demain ce sera
l’informatique quantique qui
l’humanité, combinée à l’IA et
l’informatique traditionnelle.
Le centre médical universitaire
multidisciplinaire Cleveland
Clinic a créé le Discovery
Accelerator un centre qui utilisera le cloud hybride, l’IA et
le quantique pour accélérer fondamentalement le rythme
des découvertes dans les soins de santé et les sciences de
la vie(11).
l’engagement des talents et le recrutement. « Le distanciel
offre plusieurs avantages en matière de recrutement.
D’une part, il facilite le premier entretien, car la disponibilité
est meilleure, d’autre part on a moins d’abandon en cours
de route, malgré un processus plus long, car on a humanisé
ING.
Le fait brusquement irruption dans la
inadapté, jeunes enfants,
etc.), et des risques sur la
santé et l’engagement des
collaborateurs. Les échanges
et suivre les cas particuliers,
et énoncer des règles pour
maintenir l’équilibre entre
vie professionnelle et vie
personnelle. Au bilan, 60% des
actifs considèrent que la crise a
eu un impact sur leur situation
professionnelle(8). Pour un salarié sur trois, l’équilibre
entre vie professionnelle et vie personnelle est l’enjeu
professionnel(9) numéro 1 des cinq prochaines années.
actifs pensent à une reconversion professionnelle suite à la
crise, et 16% l’ont déjà engagée(10).
(8) (9) (10) (11) The Virtual Enterprise : The Cognitive Enterprise in a Virtual World,
C’est un fait inédit :
les pays, les métiers et
les institutions ont réussi à
collaborer pour mettre au point
un vaccin contre la Covid-19
en huit mois, là où 10 ans étaient
nécessaires auparavant.
11 Introduction
(12) The Virtual Enterprise : The Cognitive Enterprise in a Virtual World, (13)(14) Expanding innovation : It takes an ecosystem,
HYBRIDATION DES SECTEURS D’ACTIVITÉ
Dans le domaine industriel, le jumeau numérique permet
d’évaluer plus rapidement l’impact d’un changement de
mode de production. En France, « On peut envisager d’ici
5 à 10 ans des usines
directeur Industrie de Siemens. L’aéroport de Hong
Kong et le port de Rotterdam sont également des
exemples où la combinaison de l’innovation technologique
opérationnelle, des produits renouvelables et des
interactions Homme-machine permet d’obtenir de meilleurs
résultats pour ces organisations, leurs écosystèmes et le
monde dans son ensemble(12).
La nature même de l’économie numérique fait basculer
l’économie de biens et services en économie de l’expérience.
Dès lors, les frontières entre secteurs tombent et de nouveaux
acteurs peuvent prétendre y prendre part. C’est le cas
du secteur banque-assurance où 51% des PDG estiment
qu’à l’avenir la plus forte concurrence viendra des autres
secteurs (13). Pour son marché PMI-PME, la BRED fédère sur
son portail bancaire des services de partenaires (gestion des
notes de frais, planning, etc.) pour leur faciliter la gestion.
Le secteur public doit aussi se réinventer pour
accompagner la transformation durable, et la coopération
avec le secteur privé est d’autant plus importante. Pour
Gilles Babinet, l’enjeu est avant tout culturel : « Il faut
encourager une nouvelle dynamique, en rendant possible
une certaine porosité entre secteurs public et privé, dans
voir comment les choses se passent ailleurs, et à l’inverse le
secteur public a besoin d’attirer de jeunes talents capables
de faire de la transformation et du au
logique hybride en travaillant avec les startups pour porter
l’innovation à l’échelle. La collaboration entre et
BioNTech pour développer le vaccin contre la Covid-19
illustre le nouvel équilibre des forces en place.
Accélérer
C’est un fait inédit : les pays, les métiers et les institutions
ont réussi à collaborer pour mettre au point un vaccin
contre la Covid-19 en huit mois, là où dix ans étaient
nécessaires auparavant. Cette accélération rendue possible
par la technologie s’applique à toutes ces organisations,
qui se doivent d’accélérer le rythme de la transformation
numérique - c’est le cas pour 59% des organisations
depuis le début de la pandémie(14). Le raccourcissement
12 Introduction
Nouveaux sens
INTRODUCTION
SAVOIR INNOVER ET DÉLIVRER RAPIDEMENT
chain est un enjeu majeur. Un tiers des PDG français
déclare être confronté à la réingénierie de la chaîne
d’approvisionnement (17).
Schlumberger s’appuie sur le principe
(« écrire une fois, déployer n’importe
où
d’améliorer le volume et la rapidité de l’introduction
et du déploiement des services(18).
Les méthodes agiles, qui étaient souvent réservées
aux équipes innovation ou digitales, se sont établies
Groupama.
la main-d’œuvre à distance a été déterminante pour
61% des PDG(15).
SAVOIR PIVOTER RAPIDEMENT FACE À LA CRISE
Produire des masques et du gel en quantité, organiser
des événements hybrides… l’année 2020 avait déjà montré
des adaptations spectaculaires. Avec les de
l’année 2021, les organisations ont dû à nouveau faire
preuve d’agilité. Pour 56% des CEO, améliorer l’agilité et
dans l’ère post-pandémique(16).
Par exemple, l’AP-HP n’a eu besoin que de quelques jours
pour équiper, former et basculer des milliers de médecins à
qui en avaient besoin, mais qui devaient rester éloignés des
hôpitaux parisiens au paroxysme de la crise sanitaire.
Pivoter, c’est également inventer de nouveaux
à l’image d’Air Liquide, qui offre une tête
connectée à ses 20 millions de bouteilles, pour proposer
encore de leur activité par la donnée, de nouveaux services
et de nouveaux produits.
(15) COVID-19 and the future of business : Executive epiphanies reveal post-pandemic opportunities, (16) The 2021 CEO Study : Find Your Essential - How to thrive in a post-pandemic reality, (17)
The 2021 CEO Study : Find Your Essential - How to thrive in a post-pandemic reality - France POV, (18) The Virtual Enterprise : The Cognitive Enterprise in a Virtual World,
13 Introduction
ConclusionNous prenons conscience de nos limites, de nos
vulnérabilités et en même temps de nos formidables
capacités collectives. Pour être pérenne, l’évolution des
entreprises doit être durable, respectueuse de l’humain et
démarche apprenante.
La digitalisation, réservée avant la crise à des secteurs ou
des métiers parfois annexes, s’est déployée dans le
des entreprises. Cela a nécessité du courage et
une posture managériale résolument impliquée dans la
résolution des problèmes et le partage des informations et
des objectifs. Plus que jamais, l’entreprise apprenante est le
mode de pensée qui permet de passer de la marche forcée
à des équipes qui collaborent, créent, pilotent, se forment
en toute autonomie dans le collectif.
L’intelligence collective crée de la valeur économique,
qui se présentent à nous nécessitent cette démarche
systémique. Tout en faisant leur propre en
matière de sobriété environnementale, les technologies
se mettent au service de ces objectifs qui ne peuvent être
accomplis que tous ensemble.
14 Regards croisés
REGARDS CROISÉS
Les organisations se réinventent
Quatre dirigeants partagent leur visison des grandes tendances
qui vont façonner les années à venir.
15 Regards croisés
Vous avez rejoint Picard Surgelés en juin 2020. Quels
enseignements tirez-vous de cette première année pour
le moins atypique ?
La période a été inspirante ! Picard Surgelés est l’enseigne
alimentaire préférée des Français et elle est forte d’une
histoire de 50 ans. Elle vit là un épisode inédit qu’il faut
comprendre et décrypter.
La consommation de surgelés a explosé pendant le premier
gagne un million de nouveaux clients ! Il y a eu à la fois des
produits. 50% des adeptes de la livraison sont de nouveaux
clients.
sont adaptés à la crise, car facilement stockables (ce qui
permet d’espacer les courses), pratiques et économiques
quand on cuisine davantage à la maison.
D’autre part, notre secteur a lui aussi connu une explosion
des achats en ligne. L’e-commerce alimentaire représente
10% du marché aujourd’hui, soit trois points gagnés en
Cathy Collart-Geiger
PICARD SURGELÉS
BIO
Depuis 2020 / Présidente-Directrice Générale, Picard Surgelés
2018-2020 / Directrice Clients, marques, innovation, concepts et
stratégies, Auchan Retail France
2016-2018 / Successivement Directrice des hypermarchés,
puis Directrice commerciale et Directrice générale, Intermarché
2015-2016 / Directrice de la Transformation Culturelle,
Groupe Boulanger
1994-2014 / Successivement Directrice d’hypermarché, Directrice de
l’animation commerciale en France, puis Directrice régionale en Chine,
Groupe Auchan
Cathy Collart-Geiger est diplômée de l’IPAG.
« Nous voulons multiplier les points de contact client »
16 Regards croisés
déploiement pour atteindre 100% des 1 040 magasins du
en 30 minutes avec Deliveroo. Et nous préparons encore
d’autres points de contact.
Pour tenir cette promesse du multicanal, il faut un schéma
directeur de SI et de logistique. Orientée vers le magasin,
Nous construisons un référentiel produits qui va alimenter
tous les canaux de manière simple, et un socle de parcours
multicanal, incluant le paiement.
En parallèle, notre schéma directeur supply chain doit nous
permettre de gérer aussi bien les magasins que la livraison
à domicile, c’est-à-dire de passer de la palette au
à l’unité. En octobre, nous avons ouvert un entrepôt LAD
(Livraison À Domicile) pour alléger le réseau actuel. Nous
réorganisons notre réseau et allons ouvrir en 2021 un
nouvel entrepôt mixte LAD et magasins dans le nord de la
France.
Notre troisième sujet concerne : notre site web
et intègre les
différents parcours d’achat et le (produits
nouvelle version de notre application, conforme aux
standards du marché.
Quatrième sujet, : nous avons
introduit les méthodes agiles pour lancer très vite des MVP,
cas de l’application, pour laquelle nos équipes métiers et IT
ont travaillé ensemble. Nous travaillons également en
avant de déployer, à l’exemple du test Deliveroo
mené sur un mois avec dix-sept magasins en région
parisienne.
quelques mois. Or, jusqu’à présent, ce n’était pas le modèle
côté de ce potentiel ; il fallait en tirer les enseignements et
saisir l’opportunité.
surgelé parfaitement en phase avec la préoccupation d’une
alimentation saine : le produit est plus naturel, les fruits et
légumes sont cueillis en saison, il n’y a quasiment aucun
mis en avant ces points forts dans son
Ma priorité a été d’analyser ces phénomènes, et de les
transformer en opportunités pour Picard. À
nous avons proposé aux actionnaires un plan de croissance
en vingt-sept chantiers, un business plan sur cinq ans, et un
plan d’investissement associé.
Quels sont les grands axes de ce plan
de transformation ?
Nous construisons un modèle de service qui multiplie les
points de contact, répond aux nouveaux besoins clients,
tout en faisant sens économiquement. Concrètement,
nous adressons cinq sujets.
Sur les parcours d’achat, nous avons mis en place en
quelques semaines la livraison à domicile dans toute la
France, ce qui n’existait pas auparavant, car nous nous
limitions à nos propres camions qui ne couvraient que 25%
du territoire. Comment desservir tout le monde, quand le
colis doit arriver sans aucune rupture de la chaîne du froid
jusqu’au congélateur du client ? Nous nous sommes tournés
niveau national.
L’année dernière, nous avons également lancé le
click-and-collect dans 300 magasins et poursuivons son
17 Regards croisés
Toutefois, nous ne sommes pas encore dans une relation
proactive. Nos produits sont exceptionnels mais le lien
humain doit l’être tout autant, c’est ce qu’exprime notre
nouvelle plateforme de marque Bienvenue. Nous entrons
donc dans l’ère de la personnalisation. Nous allons
dans un pour fournir une donnée consolidée à
tous les métiers.
Nous voulons également co-construire des produits avec
une communauté de clients-ambassadeurs, et mieux
investir les nouveaux canaux de type et messageries
instantanées. Mais en première étape, il nous fallait déjà
des outils opérationnels.
Comment améliorez-vous votre impact
environnemental ?
Nous travaillons à trois niveaux :
1. : sa composition (made in France, réduction
de la teneur en sucre et sel, chasse aux nitrites, etc.) et
son emballage : nous avons déjà économisé 350 tonnes
de plastique cette année ! En amont, nous travaillons
sur l’écoconception et la recherche de matériaux de
substitution.
2. : nous optimisons la consommation
d’énergie et mettons en place des bonnes pratiques (en
3. : nous avons signé l’accord FRET21 qui
engage les chargeurs sur leurs objectifs de réduction
de CO2 (optimisation des chargements, des tournées,
utilisation d’énergie propre, etc.).
Et nous multiplions les entrepôts pour réduire les trajets.
l’acculturation digitale de
: nous avons digitalisé les entretiens d’activité,
nous travaillons sur notre nouveau portail interne et sur un
coffre-fort collaborateur pour lui adresser des documents
personnels. Les bureaux vont être aménagés pour s’adapter
à l’ère du télétravail.
Nous ne faisons pas du digital pour du digital.
La technologie doit démontrer sa plus-value soit pour
la pénibilité métier (équipement de tablettes pour
le magasin), soit pour la relation client, soit pour la
productivité. Et dans le même temps, nous continuons
d’ouvrir de nouveaux points de vente (dix-sept en 2020)
avec un objectif de 200 magasins en cinq ans.
Quelle est votre approche de la relation client,
et comment allez-vous vers le commerce
conversationnel ?
comme en ligne. Il existe un service client internalisé depuis
1985 et la plupart des agents sont très expérimentés. Nous
avons aussi une autour des sujets santé.
« Nous ne faisons pas du digital
pour du digital. La technologie doit
démontrer sa plus-value soit pour la
pénibilité métier, soit pour la relation
client, soit pour la productivité. »
18 Regards croisés
Préparation, restauration, vente, livraison…
Dans l’alimentaire, les frontières s’estompent entre les
métiers. Quels rôles envisagez-vous pour Picard ?
Nous ne souhaitons pas ouvrir de restaurants mais plutôt
accompagner de plus en plus d’instants de consommation.
Par exemple, nous avons conçu pour le marché BtoB
un snack-bar connecté, c’est-à-dire un distributeur
automatique de plats préparés, pour assurer un service
de sain, 24h/24, dans les entreprises. Trente
de ces systèmes sont déployés, nous avons beaucoup
de demandes, mais nous avançons progressivement
aujourd’hui car c’est nous qui assumons l’installation,
l’approvisionnement, la télémétrie, etc.
Mais pourquoi ne pas imaginer demain ce snack connecté
des magasins éphémères (plages, stations de ski) ?
Pour ces développements, nous nous appuyons sur nos
points forts : notre marque, nos produits, et nos recettes
exclusives.
19 Regards croisés
Quelles sont les activités de Bolloré Transport
& Logistics ?
Bolloré Transport & Logistics est un acteur majeur de
l’excellence opérationnelle dans le domaine du transport
et de la logistique. L’entreprise est organisée en quatre
business units : Bolloré Ports, opérateur de 21 concessions
portuaires dans le monde (essentiellement en Afrique
mais aussi Amériques et Asie), Bolloré Logistics, acteur
« En logistique, transformation digitale et transformation environnementale vont de pair »
Jean-Daniel Elbim
BOLLORÉ TRANSPORT & LOGISTICS
BIO
Depuis 2020 / Directeur de la Transformation Digitale, Bolloré
Transport & Logistics
2019-2020 / Chief Innovation & Data Officer, Bolloré Transport
& Logistics
2017-2019 / Chief Transformation Officer, Bolloré Logistics
2014-2017 / Directeur Freight Procurement, Groupe Bolloré
2011-2014 / Directeur général, Brossette - Saint-Gobain Distribution
Bâtiment
Jean-Daniel Elbim est titulaire d’un master de Finances à Paris
Dauphine, et diplômé de l’INSEAD.
majeur du transport et de la logistique à l’international
regroupant plusieurs expertises métiers (
logistique contractuelle, douane, etc.), Bolloré Railways,
concessionnaire de trois lignes ferroviaires en Afrique
Bolloré
Energy, spécialisée dans la distribution et le stockage de
produits pétroliers (en France, Allemagne et Suisse). Nous
sommes présents dans 109 pays avec 721 agences locales,
35 000 collaborateurs, dont plus de 20 000 en Afrique.
20 Regards croisés
Nous investissons chaque année plus de 250 millions
d’euros dans des projets d’infrastructure. Aujourd’hui, nous
totalisons par exemple plus de 2 millions de m2 d’entrepôts
nous gérons le transport de 800 000 équivalents container
par an, ce qui nous place dans le Top 10 mondial de cette
activité.
La crise sanitaire et le blocage du canal de Suez
ont révélé l’extrême importance de la logistique et
des transports pour de nombreux compartiments de
grands enjeux auxquels est confronté le monde de la
logistique ?
Dans nos métiers, gérer la logistique consiste à gérer les
aléas : les perturbations météorologiques, les blocages
administratifs, les retards, etc. Nous savons nous adapter
à des conditions qui changent et sécuriser des plans de
transport au moyen d’options alternatives. Plus la crise est
forte, plus il faut prendre les choses avec calme et recul.
Durant la crise sanitaire, nous avons été confrontés à
passagers qui a réduit très fortement les capacités de
transport aérien réservées aux marchandises. D’autre part,
l’augmentation des taux de fret liée à l’immobilisation des
vols passagers. Notre priorité étant de continuer à assurer
la continuité de nos activités, il a fallu être inventif et
affrétant par exemple des avions de ligne et en disposant
les colis sur les sièges pour optimiser l’espace disponible à
bord.
C’est ainsi que durant la pandémie, nous avons continué
à acheminer des marchandises, et notamment plus de
2 milliards de masques. Plus récemment, nous avons
également transporté 3 600 concentrateurs d’oxygène à
destination de l’Inde pour endiguer la pénurie d’oxygène
dans le pays. Aussi, il faut savoir que la livraison d’un vaccin
requiert anticipation et organisation car avant de livrer les
doses, il faut, en amont de la production, avoir transporté
Dans ce contexte, la digitalisation de tous les maillons de
la chaîne logistique s’est considérablement accélérée, en
particulier la dématérialisation des documents de transport
ainsi faciliter la prise de décision.
« Durant la crise, nous sommes
passés de 300 à 6 500 liaisons VPN
par jour simplement en Europe. »
21 Regards croisés
Que vous apportent concrètement les technologies
dans la gestion de la crise ?
Premier point, il y a dix ans, nous n’aurions pas été
capables de gérer l’activité en télétravail. Durant la
crise, nous sommes passés de 300 à 6 500 liaisons VPN
par jour simplement en Europe ! Notre avait
été digitalisée en amont du fait de notre large périmètre
données et la forte hausse de l’utilisation du VPN et de tous
les outils digitaux, comme Teams.
Deuxième point, le digital
est une aide à la décision.
La capacité de traiter un grand
nombre de données, de les
rendre disponibles sur un même
écran pour aider l’opérateur
à prendre ses décisions est
essentielle. Toutefois la décision,
elle, n’est jamais automatisée.
Pour le par
exemple, nous avons mis en place
pour les collaborateurs au niveau
mondial un outil appelé Decision
Management Platform délivrant
en temps réel les informations de prix, de disponibilité et
d’allocations.
collaboration avec une startup asiatique pour modéliser
la situation, faciliter la prise de décision, et construire des
plans alternatifs pour le transport de marchandises avec des
propositions différenciées pour chaque type de transport.
Les résultats sont encourageants avec 90% de taux de
réussite sur l’exactitude des délais d’arrivée, et nous incitent
à poursuivre l’expérience.
Troisième point, après l’urgence intervient l’optimisation.
probabilistes proposent la solution la plus pertinente. Sur
cette base, l’opérateur expérimenté utilise les éléments,
mais aussi son expérience vécue, pour prendre la bonne
décision.
Votre activité s’insère dans des contextes culturels très
divers. En quoi la technologie vous permet-elle d’avoir
une meilleure vision dans cette complexité ?
Premier principe :
nous expérimentons
localement, puis nous
déployons mondialement.
Avec les 1 000 collaborateurs
de la DSI, en plus du
classique, nous pouvons
dire que nous sommes en
expérimentation permanente !
Parmi les axes de recherche
principaux, il y a la sécurité des
personnes. À titre d’exemple,
nous avons mis en place
à Singapour un portail de
sécurité, équipé d’une IA de
reconnaissance visuelle en edge, qui va permettre de
(EPI). Au sein des concessions portuaires, nous utilisons
l’IoT pour faire de la maintenance prédictive et éviter ainsi
les blocages des collaborateurs.
Deuxième principe, nous avons mesuré durant cette
crise le fort potentiel de la data. Actuellement, nous
développons une solution globale One TMS pour nos
109 pays, qui permet entre autres de générer un dossier
« Pendant la crise du canal de
Suez, nous avons travaillé en
collaboration avec une startup
asiatique pour modéliser la
situation, faciliter la prise
de décision, et construire des
plans alternatifs. »
22 Regards croisés
unique par (à la place d’un dossier import et un
dossier export pour le même objet) et d’avoir une approche
homogène au niveau mondial. Cet outil logiciel doit
fonctionner de manière robuste dans tous les territoires,
y compris en cas d’instabilité des réseaux télécom, même
s’il s’appuie sur une infrastructure cloud. Avec cette double
méthode, nous visons une homogénéisation par le haut de
l’excellence opérationnelle.
Comment travaillez-vous votre impact
environnemental ?
Une marchandise n’est plus acheminée de la même manière
qu’il y a quelques années. Auparavant, nous n’aurions
pas imaginé transporter par train des marchandises entre
la Chine et l’Europe. Aujourd’hui, des milliers de trains à
containers réalisent ce trajet, qui présente un avantage
environnemental en même temps qu’il est plus rapide et
Nous intégrons la dimension environnementale dans
notre quotidien. Toute proposition commerciale comporte
le calcul de l’impact carbone de chaque alternative.
Le client a donc automatiquement le choix entre la solution
la plus rapide, la plus verte ou la moins chère. Ceci est
compte de chaque moyen de transport utilisé, même en
multimodal) et d’importantes capacités de calcul.
Avec le label Green Terminal, nous nous engageons
également pour des ports plus verts en prenant en compte
toutes les préoccupations environnementales, que ce
soit en encourageant la dématérialisation des documents
de transport ou en optant pour des équipements plus
respectueux de l’environnement notamment des portiques
et des tracteurs électriques.
La maintenance prédictive, l’optimisation des tournées et
du remplissage des camions, des avions et des containers…
toutes ces améliorations concourent également à un
meilleur impact environnemental en même temps qu’à une
deux objectifs sont loin d’être antinomiques et vont de pair.
D’ailleurs, nous avons récemment été distingués par
Ecovadis pour notre démarche RSE et nous sommes très
performantes dans ce domaine, tous secteurs confondus.
« Le sujet de l’impact
environnemental devient une
demande de premier plan,
et la logistique y tient une place
de choix. La data va permettre
de structurer la transparence
de l’information. »
23 Regards croisés
Quelles sont les prochaines étapes pour optimiser
toujours plus la supply chain ?
L’adoption de la blockchain s’est accélérée. Dans un
contexte d’incertitude, elle apporte des garanties et de la
TradeLens,
la blockchain multi-opérateurs opérée par IBM.
Nous travaillons sur d’autres sujets en mode POC : l’analyse
d’images dans les entrepôts, l’inventaire par drone, ou la
distribution de produits ou de médicaments en situation
À plus long terme, dans votre imagination, comment
voyez-vous évoluer la logistique du futur ?
L’évolution de l’offre sera très différente selon les
l’Afrique quand l’Europe souhaite à l’inverse relocaliser.
Des technologies comme l’impression 3D peuvent ainsi
participer à diminuer le volume de pièces transportées.
La logistique va également de plus en plus être guidée par
le consommateur. Le sujet de l’impact environnemental
devient une demande de premier plan, et la logistique y
tient une place de choix. La data va permettre de structurer
la transparence de l’information. Nous transportons non
des informations et de la data.
demandent des scénarios en cas d’aléas majeurs, et
attendent qu’on leur propose des solutions alternatives,
surtout quand le niveau général de l’incertitude augmente.
L’enjeu sera de continuer à développer les nouvelles
technologies pour pérenniser nos actions dans une
démarche d’amélioration continue.
24 Regards croisés
Quelle analyse faites-vous de la transformation
digitale du secteur public par rapport à celle qu’a pu
connaître le secteur privé ?
La transformation du secteur privé a véritablement démarré
Depuis 4-5 ans, on observe plus de méthode, mais la France
reste en retard sur le plan international : dans un classement
entreprises les plus innovantes dans le monde.
Pourtant sur les 40 entreprises du CAC, 27 sont directement
attaquées par des modèles de plateforme, et même les plus
prospères sont concernées. On observe que dans certains
pays, comme le Royaume-Uni et l’Espagne, les entreprises
ont un management plus international, et que ce sont
justement ces entreprises qui se sont le mieux transformées.
Nos freins sont avant tout culturels : il nous faut passer d’un
mode élitiste, verticalisé, à un mode de décision partagé.
« Pour une transformation technologique et managériale du secteur public »
Gilles Babinet “Refondre les politiques publiques avec le numérique”
CENTRE NATIONAL DU NUMÉRIQUE
BIO
Depuis 2018 / Vice-Président, puis co-Président du Conseil National
du Numérique
Depuis 2012 / Digital Champion pour la France à la Commission
Européenne
1986-2018 / Entrepreneur à l’âge de 22 ans, fondateur de nombreuses
sociétés dans des domaines aussi divers que le conseil (Absolut),
le bâtiment (Escalade Industrie), la musique mobile (Musiwave),
la co-création (eYeka), les outils décisionnels (Captain Dash), etc.
Gilles Babinet est également professeur associé à Sciences Po Paris,
membre du Conseil Stratégique d’EY, membre du Conseil de la Fondation
EDF, administrateur de l’association Voices of Nuclear et auteur.
Dernier ouvrage paru : Refondre les politiques publiques avec
le numérique (Dunod).
25 Regards croisés
sur investissement du digital, mais dans le public c’est le
frein à la transformation. Le deuxième frein, c’est la
son fonctionnement représente le comble du
et du silo, ce qui entre en contradiction avec
la logique transverse du numérique. La collaboration
inter-administration est le maillon qui dysfonctionne le
plus, et c’est ainsi que la coordination de la crise Covid
est faite par les préfets, une
méthode qui n’est acceptée par
l’administration que parce que
c’est exceptionnel.
La transformation digitale
dimensions :
1. l’accès (c’est-à-dire faire
en sorte que tout le monde
ait accès à Internet) a été un
chantier plutôt bien mené par
la France,
2. la capacitation (c’est-à-dire
la faculté de se servir d’Internet) a pris dix ans de retard
après l’arrêt du plan Cyberbase. 15% de Français sont
encore exclus du numérique, par manque de connaissance,
la formation des agents
engagée,
4. le cloud a fait l’objet de directives confuses entre les
différents niveaux de décision, à cet égard les récentes
orientations de la ministre Amélie de Montchalin sont
bienvenues,
5. l’identité électronique
unique pour tous les rapports avec l’administration) reste
à développer à grande échelle.
Comment peut-on accélérer cette transformation
du secteur public ?
Lorsque l’on échange avec des Directeurs d’Administration
liées aux silos et leur conclusion est bien souvent : « Le
Pour que cela change, il faut
une volonté politique. Avec un
Président culturellement proche
des startups, on a pu nourrir de
grands espoirs.
Dans un premier temps,
le gouvernement a peut-être
péché par excès d’optimisme
et manqué de méthode.
Il aurait fallu organiser au
préalable un Grenelle interne
de la transformation publique.
Finalement, la phase d’analyse est arrivée dans un
deuxième temps parce que rien ne bougeait, et l’ambition
a dû être revue à la baisse.
les directions ont le service public chevillé au corps,
à l’importance du numérique, et cela pèse dans leurs
décisions au quotidien.
« L’Etat dans son fonctionnement
représente le comble du
command and control et du silo,
ce qui entre en contradiction
avec la logique transverse du
numérique. »
26 Regards croisés
Il faut d’autre part engager une démarche de formation
professionnelle à grande échelle. La réforme de l’ENA
n’en n’est qu’un épiphénomène.
transformation numérique. L’Espagne en a fait un outil
d’intégration fédérale, le Royaume-Uni met l’accent sur la
santé publique depuis plusieurs années, ce qui n’est pas
étranger au succès de sa campagne de vaccination Covid.
Quel est celui de la France ?
Comment posez-vous l’enjeu de la souveraineté
numérique pour le secteur public ?
et dans le monde numérique cela prend tout son sens : la
sécurité bien sûr, car les menaces se déplacent et changent
de nature, et la préservation de la capacité de souveraineté
- pouvoir fabriquer des microprocesseurs est à long terme
plus important que de pouvoir produire des masques.
Le débat sur la gouvernance des données est bien sûr
important, mais cela ne veut pas dire qu’il est nécessaire
que les données soient hébergées en France. On peut
avoir du multi-cloud avec un bon niveau de sécurité sans
nécessite une nouvelle doctrine à l’égard de ces sujets,
que gouvernant, et encourage la diffusion de la donnée
entre les acteurs, en particulier dans des domaines où les
enjeux de partage de la valeur sont forts, comme dans la
chaîne agroalimentaire par exemple.
Le rôle de la CNIL doit également être revu, pour un juste
équilibre entre innovation et régulation.
Quels exemples pourraient inspirer la France
dans cette transformation publique ?
Outre l’Estonie qui a développé son administration
numérique pour 1,3 million d’habitants,
le très bon exemple est l’Espagne qui occupe le deuxième
rang en matière de transformation de son administration, (1). Le pouvoir central a
concurrence pour être les meilleures dans la mise en œuvre,
et cela a formidablement marché.
Quelles pourraient être les pistes d’action
pour la France ?
Une ambitieuse réforme de la fonction publique est
absolument nécessaire, selon trois grands axes : d’une part,
il faut encourager une nouvelle dynamique, en rendant
possible une certaine porosité entre secteurs public et
besoin d’aller voir comment les choses se passent ailleurs,
et à l’inverse le secteur public a besoin d’attirer de jeunes
talents capables de faire de la transformation et du
de façon massive avec les formes de contractualisation
actuelles.
(1)
27 Regards croisés
défauts. On n’a pas cherché à gouverner les forces de
la multitude dans une vraie logique d’innovation de
rupture, à base d’open source et de nouvelles formes de
gouvernance.
(2)
« Une ambitieuse réforme
de la fonction publique est
absolument nécessaire, d’une
part, il faut encourager une
nouvelle dynamique, d’autre
part engager une démarche de
formation professionnelle
à grande échelle. »
La France est bien placée dans les classements en
matière d’open data, mais l’enjeu réside plus dans le
décloisonnement et le partage de ces données à travers
des API.
La crise Covid a-t-elle créé une urgence
de réforme ?
des bonnes mesures en matière de cloud, d’identité
électronique, et de formation. Des sujets désagréables
fonctionnement de l’administration à un niveau élevé et
qu’en 35 ans, la fonction publique a crû de 45% soit deux
fois plus vite que dans le privé. Dans ce cadre, il me semble
compétences vers les régions, qui sont encore très limités.
À cet égard, il est important de souligner que les
collectivités territoriales peuvent mener une transformation
de proximité, mais elles ont besoin de l’identité
électronique unique et d’un cadre clair en matière de cloud
souverain. Cela nécessite du courage politique, cela peut
se faire en quatre ou cinq ans comme en Espagne, et cela
Comment mettre en place une stratégie de l’État
en matière d’innovation ?
(2) au
niveau national ou européen. La DARPA a plus de 60 ans et
ses administrateurs eux-mêmes lui trouvent de nombreux
28 Regards croisés
Quel état des lieux dressez-vous des actions en faveur
du climat dans les entreprises françaises ?
Les actions d’une fraction d’entreprises vont dans le bon
dérèglements climatiques. Paradoxe, alors que le sujet
de CO2 dans l’atmosphère continue d’augmenter alors que
de 6 à 7% par an.
prise de conscience du degré d’urgence dans lequel nous
Fabrice Bonnifet
GROUPE BOUYGUES
BIO
Depuis 2017 / Directeur Développement Durable & Qualité, Sécurité,
Environnement, Groupe Bouygues
Président du Collège des Directeurs du Développement Durable (C3D)
1989-2007 / Directeur Qualité, Sécurité, Environnement, Groupe Saur
Fabrice Bonnifet est ingénieur, ergonome, diplômé du Conservatoire
National des Arts et Métiers. Il est également co-auteur avec
Céline Puff -Ardichvili. Dernier ouvrage paru : L’entreprise contributive,
concilier monde des aff aires et limites planétaires (Dunod).
« Si 10% des entreprises mondiales parviennent à transformer leur modèle d’affaires vers une approche perma-circulaire, alors le monde basculera »
29 Regards croisés
nous trouvons. Incendies en Australie, sécheresses en
climatiques en Italie... tout nous indique que le temps
des conséquences de notre inconscience est là. Il ne nous
reste plus que sept ans pour inverser la tendance, faute de
quoi le réchauffement climatique au-delà des 1,5°C sera
irréversible. Ce n’est pas tant le réchauffement moyen qui
est dangereux mais les perturbations extrêmes qui vont
en résulter partout sur la planète. Les technologies bas-
carbone qui contribuent à réduire les externalités négatives
ont toute leur place dans l’effort
pas. Ce sont nos modes de vie
qu’il convient de faire évoluer.
D’autre part, dans les entreprises,
la recherche permanente de la
évidence : à quoi va-t-il servir
d’être compétitif sur une planète
invivable à court terme ? Un
recul de quelques points de
compétitivité n’est plus une raison
pour ne pas agir. Si 10% des
entreprises mondiales parviennent
à transformer leur modèle d’affaires vers une approche
perma-circulaire, alors le monde basculera. Et si l’Europe
peut être aux avant-postes, ce sera une bonne chose car
nous serons en situation d’inspirer les autres nations.
comment faire, mais ce n’est pas le cas. Vouloir maîtriser
tous les risques avant d’agir est un refuge pour l’inaction,
il faut apprendre en agissant. Certains dirigeants
actuellement aux commandes ressentent une profonde
dissonance cognitive entre les valeurs sur lesquelles
ils ont fondé leur statut personnel et cette inquiétante
réalité. Ceux-là ont conscience qu’ils vont dans le mur
mais, curieusement, ne changent rien à leur stratégie.
Heureusement il y en a d’autres, encore très minoritaires,
qui souhaitent exercer leur responsabilité en prenant en
compte le bien commun. C’est avec eux qu’il faut travailler.
Absolument toutes les entreprises sont concernées car
elles utilisent toutes directement ou indirectement des
matières premières, des machines et du capital humain.
les mieux placées pour changer
leur modèle rapidement car elles
sont plus agiles : le dirigeant
peut porter personnellement
cette vision, il a moins de parties
prenantes à convaincre et il est
soumis à moins de pressions
d’actionnaires uniquement
motivés par la rentabilité à court
terme.
Alors comment agir dans cette
urgence ?
Pour réussir une transition, il y a trois options : faire peur,
mais on constate que cela ne marche pas pour mobiliser
le plus grand nombre car la peur inhibe l’action ; interdire :
les législations restrictives vont venir, elles ont prouvé leur
attractif pour inviter à se transformer. Une espèce de rêve
partagé et désirable, c’est beaucoup plus puissant.
Les entreprises sont les mieux placées pour cette ambition,
parce qu’elles sont beaucoup plus conscientes de leur
propre vulnérabilité. Pour cela, elles doivent transformer
leur modèle d’affaires et devenir des entreprises
« Si l’Europe peut être
aux avant-postes, ce sera une
bonne chose car nous serons en
situation d’inspirer les autres
nations. »
30 Regards croisés
contributives. Bien entendu, chaque citoyen-consommateur
agit à son échelle - c’est l’effet colibri -, mais les entreprises
possèdent un bras de levier bien plus important.
L’entreprise contributive est celle qui intègre comme
donnée d’entrée fondatrice les limites planétaires.
Les limites, ce sont celles des écosystèmes, des ressources
elles s’imposent à nous. Il est incompréhensible que les
entreprises dépensent des milliards pour se prémunir de
risques techniques et quasiment rien pour prévenir les
risques physiques et de transition associés au changement
climatique. Ces derniers sont pourtant bien plus critiques,
y compris à court terme. L’entreprise doit se re-synchroniser
au vivant pour espérer assurer sa pérennité économique.
de prendre le temps de se former, faire un audit sincère
des impacts réels de leur activité, mobiliser chaque niveau
(actionnaires, salariés, autres parties prenantes) pour mettre
les enjeux de long terme au centre de la stratégie et
surtout introduire la notion de sobriété dans l’ensemble des
processus. Nous pensons également que le déploiement
d’une comptabilité multi-capital n’est pas une option,
car la comptabilité classique considère les ressources
comme gratuites et donc rien ne permet de les préserver.
Dans votre ouvrage, L’entreprise contributive, vous
ouvrez un certain nombre de pistes...
La bonne nouvelle, c’est effectivement que de nombreuses
solutions existent dans presque tous les secteurs : la mode,
l’alimentation, les transports, le numérique, le logement,
etc.
espaces partageables. Plusieurs projets sont en phase
propose des méthodes industrielles
de rénovation de masse avec des coûts et des retours
sur investissement attractifs, sans même attendre une
désormais de vouloir s’y mettre !
Les scientifiques ont-ils un rôle à jouer dans cette
transformation des entreprises ?
du vivant et du climat dans les Comités d’Administration
des entreprises, car l’environnement ne peut plus être une
variable d’ajustement du business.
« Dans le bâtiment
le groupe Bouygues a imaginé
un bâtiment qui est à la fois
net zéro carbone et
centre de profit, notamment
par l’intensification
de ses espaces partageables. »
31 Regards croisés
PARTIE 1 Expérience Client & Employé32
PARTIE 1
Expérience Client& Employé
33PARTIE 1 Expérience Client & Employé
PARTIE 1 Expérience Client & Employé34
Romain Mulliez
PicWicToys
Depuis 2014 / Président et Directeur Général, PicWicToys
Depuis 2005 / Fondateur de La Vignery
Membre du board :
Passé / d’Auchan Retail France, de Décathlon, d’AFM
Actuel / Président du club d’entrepreneurs AFM,
de Sears KMART
Romain Mulliez est titulaire d’un MBA de l’IUA.
BIO
35PARTIE 1 Expérience Client & Employé
PicWicToys a traversé une période riche en
rebondissements. Fruit du rapprochement en 2018
entre PicWic, cinquième réseau français spécialisé jouet,
et Toys’R Us France, l’enseigne a dû attendre un accord
de l’Autorité de la concurrence, puis traverser la crise
des gilets jaunes, les grèves et les mesures liées à la
crise Covid, dans un contexte où le secteur du jouet est
fortement challengé par les pure players du e-commerce.
Quels enseignements tirez-vous de votre adaptation
à la période Covid ?
Ces deux dernières années ont été extraordinaires
à tous points de vue. Quand une crise est là, il faut la gérer.
Il nous a fallu adresser les enjeux sanitaires, les enjeux
opportunités.
demande expresse des clients, mais ils ont apprécié ce
service. Le conserver nous a permis d’être opérationnels
vous de novembre-décembre qui représente 50% du chiffre
d’affaires et 100% du résultat.
extrêmement agiles : nos 64 magasins physiques ont été
transformés en entrepôts d’e-commerce, et les vendeurs
sont devenus préparateurs de commande, métier pour
lequel ils n’étaient pas formés, avec un outil de travail
novembre 71% de notre chiffre d’affaires 2020, alors que les
magasins étaient fermés !
La première opportunité que cette crise nous a apportée,
c’est celle d’apprendre, et d’obtenir des gains de
transformation durables. Avec 10% du chiffre d’affaires en
digital et une activité nous pensions être digitalisés,
2020 nous a véritablement permis de trouver notre modèle
En effet, fonctionner uniquement en e-commerce et en
Notre e-commerce n’était pas rentable mais nous n’étions
pas en capacité de le voir clairement. Pendant la période
de fermeture, il a fallu préparer 600 commandes
temps passé. Par exemple, nous avons découvert que le
« La crise nous a permis de trouver notre modèle multicanal »
« Fonctionner uniquement
en e-commerce et en drive a permis
d’identifier des coûts habituellement
cachés. Notre e-commerce n’était pas
rentable mais nous n’étions pas
en capacité de le voir clairement. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé36
n’était pas plus rentable que la livraison à domicile à
Maintenant, nous sommes vraiment en appui sur nos deux
jambes, physique et digital, et notre marge e-commerce a
crû de 13 points en un an.
Le mix produit a également totalement changé : en
e-commerce il y a moins d’achat d’impulsion, et moins
d’intérêt pour les marques distributeurs, par exemple.
promotionnel car son impact est différent en e-commerce.
Pour notre opération pré-Noël par exemple, nous
proposons habituellement un bon d’achat de 25€ pour 50€
d’achat en boutique. Cela fonctionne bien car le panier
et 75% seulement des bons d’achat nous reviennent.
En e-commerce, le panier moyen reste à 50,50€ et 100%
des bons sont utilisés, avec de surcroît une moins bonne
Quel rôle prend la technologie dans votre
transformation ?
Dans le passé, le petit commerçant faisait de la
personnalisation, il connaissait les membres de la famille
et leurs goûts, réservait, livrait et faisait crédit. Il y a 50 ans,
le commerce moderne s’est réinventé sur la base de
quelques innovations arrivées en quatre ou cinq ans (code
barre, carte de crédit, caisse enregistreuse, caddie, centre
commercial, etc.), et un modèle “baisse des prix vs volume”.
L’arrivée de la data et du logiciel permet une nouvelle
de concilier la dimension massive et la personnalisation.
La digitalisation consiste d’une part à transposer en
numérique tous les gestes métier, et d’autre part à
produits). Les systèmes sont de plus en plus complexes :
cinq briques logicielles, aujourd’hui j’en ai 55 ! Autant que
possible, je m’efforce de choisir les outils qui existent sur le
dans l’entreprise.
Quelques exemples concrets, parmi les chantiers engagés :
• Entre mars et novembre 2020, nous avons mis en place
un outil de pilotage des stocks pour le
on peut par exemple optimiser le avec une capacité
collaborateur, et en ajustant magasin par magasin les
plannings d’activité partielle. Cela nous a permis d’assurer
des délais de préparation rapides pour le client sans
• L’e-commerce permet l’ajustement des prix des produits
en temps réel sans les contraintes physiques du ré-
étiquetage en boutique, nous poursuivons dans cette voie.
• L’adéquation entre promotion et disponibilité produit
est essentielle. Les achats de mots-clés sont l’équivalent
des mètres carrés pour une boutique : des générateurs de
dans l’entreprise. Pour éviter de promouvoir des produits
que l’on n’a pas en stock il est nécessaire de connecter les
informations temps réel entre elles.
entrants par jour, il faut pouvoir en automatiser une partie,
et rendre le client autonome au maximum.
37PARTIE 1 Expérience Client & Employé
de celles des marques.
Le potentiel de la donnée produit est également sous-estimé.
mais aussi de la dimension du colis, du temps de montage,
de la sécurité, de la durabilité, des composants, etc.
Data client et data produit sont les deux briques de base
du commerce du futur.
Êtes-vous finalement en
train d’inventer votre propre
modèle de commerce unifié ?
Pour les e-commerçants, le
passage vers le commerce
physique ne coule pas
de source (on le voit avec
inversement, et les modèles
ou chinois ne sont pas
transposables en Europe.
La géographie intervient
aussi : on ne peut pas assurer
les livraisons dans une ville
européenne dense comme
dans les larges rues américaines. Et le point d’équilibre
entre physique et digital est différent d’un secteur du retail
à l’autre.
La question que l’on peut se poser en tant que dirigeant
est : sommes-nous capables de nous disrupter nous-
mêmes, sachant qu’il n’y a pas eu d’exemples réussis par le
passé ? Il faut maîtriser les enjeux métiers (y compris ceux
de l’informatique qui manquent encore de représentation
auprès du PDG), et savoir s’inspirer de ce que font des
champions venus d’autres secteurs. Cette vision transverse,
c’est le rôle du dirigeant.
Quelles conséquences pour les équipes ?
Les retailers ont cru un moment pouvoir parler aux clients
en s’affranchissant des collaborateurs, c’était une erreur.
Nous avons maintenu les effectifs mais nous allons vers
une plus grande polyvalence des collaborateurs. Pour
atteindre cette polyvalence, il faut les équiper en outils
partagés, pour qu’ils aillent au-devant du client avec toute
la connaissance disponible
dans l’entreprise.
Comment envisagez-vous le
futur du retail face
aux marques et aux
compétiteurs du
e-commerce ?
Nous, retailers, faisons deux
métiers : celui de commerçant
et celui de distributeur. La
de qui consiste à
trouver un produit au meilleur
prix selon des critères bien
précis, c’est la distribution et
à savoir
la connaissance produit et les conseils personnalisés, c’est
celle du commerçant. Notre proximité nous permet de bien
la prendre en charge.
Dans le futur, l’enseigne doit pouvoir valoriser cette
fonction de (on se renseigne en boutique et
on va acheter en ligne au moins cher ou éventuellement
sur le site de la marque), et la monétiser auprès de ses
partenaires. Pour cela, il faudra démontrer que l’enseigne
a assuré la vente, qu’elle a fait matcher un client et un
produit, et donc il sera nécessaire de rapprocher nos datas
« Le potentiel de la donnée
produit est sous-estimé.
J’ai besoin non seulement
des caractéristiques du produit
mais aussi de la dimension
du colis, du temps de montage,
de la sécurité, de la durabilité,
des composants, etc. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé38
En chiffres...Expérience Client & Employé
Sources : voir page 210
CONSOMMATEURS ET EMPLOYÉS FACE À L’ENJEU DE LA DURABILITÉ
62%
des consommateurs se disent
leur comportement d’achat
pour contribuer à réduire l’impact
négatif sur l’environnement,
contre 57% en 2019.
55%
des consommateurs au niveau
mondial pensent que la durabilité
est un critère très important
lorsqu’il s’agit de choisir entre
deux marques,
soit une hausse de 22%
depuis 2019.
48%
de la main-d’œuvre potentielle
accepterait un salaire inférieur
pour travailler pour des
organisations respectueuses
de l’environnement.
39PARTIE 1 Expérience Client & Employé
un nouveau modèle pour les consommacteurs
Laurent Pasquier
C’est qui le Patron ?!
Depuis 2016 / Cofondateur, C’est qui le Patron�?!
2011-2016 / Fondateur, So Far, société éditrice de
l’application mesGoûts.fr
2008-2010 / Principal Engineer, puis Object Leader,
ST-Ericsson
2006-2008 / Principal Engineer, NXP semiconductors
2004-2006 / Senior Engineer, Philips Applied Technologies
2002-2004 / Design Engineer, Philips PDSL
1998-2002 / Research Scientist, Philips Research
Laurent Pasquier est titulaire d’un Master en Électronique
de l’EFREI et d’un DEA en systèmes microélectroniques
de l’UPMC.
BIO
Quel chemin a mené Laurent Pasquier - qui se présente
conducteurs -, à cofonder avec Nicolas Chabanne la marque
alimentaire C’est qui le Patron ?! ? Avant tout une expérience
un produit plutôt qu’un autre au supermarché, raconte-t-il.
sur les emballages. Pour estimer la valeur nutritionnelle des
produits, j’ai eu l’idée de créer un algorithme rapprochant
ces données avec celles de la base Ciqual(1) qui venait
mesGoûts.fr, première application européenne d’information
sur les produits alimentaires, l’ancêtre de Yuka.
mobile correcte, mais l’application totalise néanmoins
40 000 inscrits. Son modèle d’affaires repose sur
la commercialisation d’un label « la sélection des
de l’application et notamment la révélation des industriels
fabriquant les produits MDD (marques de distributeurs) a
Ensemble, ils posent les fondamentaux de C’est qui le
Patron ?! La Marque du Consommateur, une gamme de
produits alimentaires du quotidien co-construits avec les
consommateurs. Et c’est en 2016, quelques mois avant la
crise des producteurs de lait, que Carrefour accompagne
avec enthousiasme le lancement du lait C’est qui le Patron ?!,
qui intègre dans son prix la juste rémunération
du producteur. Depuis, une gamme de vingt produits et
trente références a séduit plus de 24 millions de clients,
et ce sans aucun budget marketing !
(1)
PARTIE 1 Expérience Client & Employé40
QCM intègre le prix conseillé en fonction des choix du
consommateur ; puis au niveau des médias digitaux qui
nous permettent de garder le contact avec nos clients.
Sans les réseaux sociaux, nous n’aurions jamais pu nous
faire connaître, et réaliser l’un des meilleurs lancements du
Laurent Pasquier est convaincu que la révolution de
consommation initiée il y a quelques années est un
mouvement de fond : « La génération des
préoccupée par l’avenir, devient majoritaire en nombre,
note-t-il. Pour changer les choses, les consommateurs sont
devenus une partie prenante indispensable. Pour avoir
LE MODÈLE D’AFFAIRES EST ÉGALEMENT ATYPIQUE
Deux structures qui coexistent.
D’une part, la SAS propriétaire de la marque,
qui a l’expertise produit, crée les partenariats et les
contractualise. C’est elle qui conçoit le QCM de vote
(moins de dix questions), en ayant déterminé toutes les
alternatives réalisables pour le produit. « La construction
du QCM dure neuf mois, durant lesquels les partenaires
décortiquent les modalités de production et les
déterminants du prix, explique Laurent Pasquier. C’est à
soumis au vote en ligne durant un à trois mois, puis le
La SAS ne perçoit pas le produit direct des ventes, mais
une redevance de 5% sur le chiffre d’affaires réalisé par le
partenaire industriel.
coopérative de plus de 10 000 adhérents qui s’impliquent
dans la vie du produit. Si tout le monde peut voter en
ligne, les sociétaires, eux, sont consultés et décisionnaires
sur les questions complexes. Une partie d’entre eux
participe en plus au contrôle annuel des exploitations
et des usines, parallèlement aux cabinets d’audit type
Veritas. Tous les trois ans, le produit est réévalué avec le
partenaire et les consommateurs. « Ces 10 000 sociétaires
sont les ambassadeurs de nos acheteurs et ce sont eux qui
Ce modèle innovant n’aurait pas pu se concrétiser sans
la technologie. « Elle est intervenue à deux niveaux : au
niveau des questionnaires en ligne, qui ont permis de
et l’acte d’achat en rayon, tout simplement parce que le
« Si tout le monde peut voter
en ligne, les sociétaires, eux,
sont consultés et décisionnaires
sur les questions complexes.
Une partie d’entre eux participe
en plus au contrôle annuel des
exploitations et des usines. »
41PARTIE 1 Expérience Client & Employé
L’avènement de la
« La crise sanitaire a marqué un pas majeur pour son usage »
Clémence Marty-Chastan
AP-HP
Depuis 2019 / Directrice de la stratégie et de la
transformation, AP-HP
2018-2019 / Chef de projet sur la réforme de financement
du système de santé, Ministère des Solidarités et de la Santé
2017-2018 / Administratrice nationale, Croix-Rouge française
2016-2017 / Inspectrice générale des Affaires Sociales, IGAS
2011-2013 / Adjointe au chef de bureau, Agence des
participations de l’État
2008-2011 / Successivement Chargée de mission
puis Adjointe au Chef de Bureau de l’audiovisuel public,
Direction du développement des médias
2007-2008 / Associée, The Boston Consulting Group
Clémence Marty-Chastan est diplômée de l’ENA et d’HEC.
BIO
Clémence Marty-Chastan, nouvelle directrice de la
stratégie et de la transformation de l’AP-HP, revient sur
18 mois de tension extrême au sein des hôpitaux et sur la
manière dont l’essor de la télémédecine a pu contribuer au
Clémence Marty-Chastan, vous avez été nommée
il y a un peu plus d’un an à la tête de la direction
de la transformation et de la stratégie au sein de
l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris. Quel
périmètre exact recouvre ce poste ?
Dans un souci de cohérence, la création du poste
fait suite au couplage nouveau des directions de stratégie
médicale et transformationnelle. De ce fait, je co-dirige
la direction avec un médecin, et cette nouvelle
le plan stratégique de l’institution, en lui octroyant les outils
nécessaires à sa réussite. Stratégie médicale, conduite de
projet organisationnel, transformation numérique, enjeux
de transition écologique, etc. La portée de nos champs
d’intervention est extrêmement large pour accompagner
nos six groupes hospitalo-universitaires, leurs 20 000 lits et
les 8 millions de patients de l’AP-HP.
À quels enjeux de transformation l’hôpital public
doit-il faire face ?
L’hôpital a dû transformer en permanence ses organisations
et ses modes de prise en charge pendant cette crise, avec
une agilité constante. Mais les enjeux de transformation
sont également très présents hors crise : ils concernent par
exemple les prises en charge et leur adaptation aux besoins
des patients et à l’innovation thérapeutique. Ils sont aussi
d’ordre numérique, cette numérisation des processus
devant au mieux faciliter la vie des soignants et celle des
PARTIE 1 Expérience Client & Employé42
ils concernent également la transition écologique qui
mobilise de plus en plus le personnel hospitalier ; ils
accéléré les choses. Dans cette situation sans précédent,
avec une meilleure coordination entre acteurs et partenaires
hors hôpital.
Existe-t-il des enjeux
spécifiques de
transformation sur le plan
numérique ?
Les outils numériques ont
un rôle majeur à jouer
pour construire l’hôpital de
demain, que ce soit pour
structurer notre relation
patient et partenaire, ou
retrouver du temps utile pour
les soignants en digitalisant
leur activité. C’est également
un enjeu fort pour faciliter l’accès des patients à leurs
données médicales, et leur offrir des services capables
d’améliorer la qualité de leur suivi, y compris à distance.
Vous avez été, plus que toute autre organisation,
fortement impactés et mis sous pression par la crise
Covid. Cette crise a-t-elle, comme pour d’autres
secteurs, accéléré votre transformation ?
Cela a été un accélérateur à très grande échelle qui a mis
sous tension extrême nos structures, avec une mobilisation
extraordinaire de tous les professionnels hospitaliers.
Cette crise nous a poussés à aller plus loin avec la mise en
place de structures accordéons et tampons pour adapter
nos capacités de prise en charge. En temps normal, nous
organisationnels. Mais le plus marquant reste probablement
le bond exponentiel de la télémédecine, d’autant que
nous partions de peu, puisqu’il existait historiquement une
forme de réticence. Dans ce contexte précis pourtant,
il a fallu innover et son
déploiement a été massif, sous
les deux angles stratégiques
de la téléconsultation et de la
télésurveillance.
Comment s’est organisée
la téléconsultation ?
L’arrêt brutal des
programmations a fait de
la téléconsultation l’outil
indispensable pour garder
le lien patient/médecin.
majeur sur le déploiement
d’outils, avec la nécessité en dix jours à peine, d’ouvrir
12 000 comptes pour chaque médecin sans exception.
Cela a été évidemment accompagné d’un plan massif
d’accompagnement et de formation, allant même
jusqu’à tester de nouveaux modèles avec succès, comme
la formation en binôme secrétaire et médecin. Autre
incontournable de réussite que nous ne pouvions négliger,
soignants a été décisive pour la rapidité du déploiement.
Par ailleurs, à côté des téléconsultations, les équipes de
l’AP-HP ont innové en proposant aux patients des activités
de télésoins.
« Les outils numériques
ont un rôle majeur à jouer pour
construire l’hôpital de demain,
que ce soit pour structurer notre
relation patient et partenaire,
ou retrouver du temps utile
pour les soignants en
digitalisant leur activité. »
43PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Peut-on aujourd’hui évaluer la progression
de ce nouvel usage ?
Elle a été très forte. Partis d’une activité de téléconsultation
quasi nulle de quelques sites pilotes, nous sommes montés
à une moyenne de 12 000 téléconsultations par semaine
sur la première période épidémique avec des pics à 16 000.
Ceci a représenté au plus fort 30% de notre activité de
consultations. L’activité perdure depuis autour de 5 000
téléconsultations hebdomadaires, niveaux qui sont restés
plus élevés qu’avant crise et oscillant entre 5 et 10% de nos
en effet découvert sur le long terme un intérêt pour le
parcours patient et la prise en charge.
Partant de peu, pourquoi ne pas avoir préféré opter
pour une stratégie de pas à pas, et ce afin de mieux
lutter contre ces réticences historiques ?
Dans le contexte d’une crise sanitaire aiguë, cette approche
large a permis d’assurer la continuité et la sécurité du suivi
de nos malades chroniques et fragiles, et a pu dans un
même temps favoriser le désengorgement des hôpitaux.
Nous nous concentrons maintenant sur l’accompagnement
des usages dans certaines disciplines où cet outil a tout son
sens, comme l’anesthésie (consultations pré-opératoires),
la psychiatrie, l’addictologie ou les maladies chroniques.
Tous les patients concernés par ces spécialités doivent
rester proches de l’hôpital, les médecins pouvant convertir
à tout moment le suivi en prise en charge présentielle en
cas de doute clinique. Sur certaines de ces disciplines, nous
sommes aujourd’hui à plus de 20% de nos consultations
qui se font sous la forme de téléconsultations. L’enjeu reste
donc aujourd’hui de stabiliser ces usages, et d’accompagner
les autres disciplines et les personnels dans l’appropriation
de ces nouveaux modes de prise en charge lorsque c’est
pertinent, en s’appuyant sur ces preuves de succès.
D’autres défis devront-ils être relevés ?
Nous devrons être vigilants sur les sujets de cybersécurité,
beaucoup de médecins, dans l’urgence de la crise, ayant
préféré utiliser leurs équipements personnels plutôt que
la solution sécurisée. Nous devrons également continuer
à travailler sur la simplicité des solutions, notamment pour
maintenu le taux d’usage à 5% en post-crise, reste de
passer à 10% dans trois ans en levant tous ces freins.
Pouvez-vous également nous parler d’une autre
grande innovation digitale liée à la crise, celle du
dispositif COVIDOM ?
En mars 2020, nous avons vite compris qu’il y avait un
enjeu à ce que les patients atteints de formes légères de
la maladie évitent un passage aux urgences, tout en étant
sécurisés sur le plan médical. Nous avons donc créé en
quelques jours la plateforme humaine de télésurveillance
à domicile COVIDOM. Le patient était invité à remplir
« Nous nous concentrons maintenant
sur l’accompagnement des usages
dans certaines disciplines où cet outil
a tout son sens, comme l’anesthésie,
consultations pré-opératoires,
la psychiatrie, l’addictologie
ou les maladies chroniques. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé44
quotidiennement un questionnaire sur ses symptômes,
incluant la prise de certaines constantes. Les réponses
étaient ensuite analysées par un algorithme conçu avec les
hospitaliers, qui déclenchait des alertes en cas de variation
anormale. Une équipe médicale de suivi à distance appelait
ces patients pour évaluer plus précisément leur état de
nos relais en ville.
Quels ont été les résultats ?
Près de 100 000 patients ont été inscrits par un médecin
sur toute la période. En première vague, 12 000 patients
étaient suivis par jour en moyenne, ce qui générait
2 300 alertes par jour environ à traiter. Le taux de mortalité
sur les patients enrôlés a été très faible. Il s’agit de la plus
grande expérience de télésurveillance réalisée en Europe.
L’originalité repose aussi sur le partenariat très inclusif
initié avec la médecine de ville et l’URPS, représentation
syndicale des médecins libéraux. Un sondage de
de 92%, les patients associant bien la télésurveillance à
une démarche de soin. Et quand la médecine de ville s’est
familiarisée avec le virus, nous avons basculé la plateforme
nombre de personnes incluses à 1,5 million.
Quel enseignement majeur tirez-vous de ce succès ?
Les dispositifs innovants les plus performants sont ceux qui
sont co-construits entre le professionnel et le spécialiste
technologique et organisationnel. Ce qui a fait le succès de
COVIDOM, c’est bien la part active qu’ont eu les praticiens
sur la création de cette solution numérique.
« Les dispositifs innovants
les plus performants
sont ceux qui sont co-construits
entre le professionnel et le
spécialiste technologique et
organisationnel. »
45PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Le Printemps tisse une nouvelle relation-client autour de la magie des lieux et du conseil
Maud Funaro
Printemps
Depuis 2021 / Chief Transformation Officer, Printemps
2016-2021 / Directrice Stratégie, Digital et Innovation,
E. Leclerc
2014-2016 / Directrice Générale, Madame Aime
2010-2014 / Project Leader Grande consommation,
Luxe et Retail, BCG
2007-2009 / Rapporteur permanente, Autorité de la
Concurrence
2005-2007 / Économiste, Ministère de l’Économie
et des Finances, Direction du Trésor
Maud Funaro est diplômée d’HEC et de Sciences Po Paris,
et s’est spécialisée en économétrie (Masters London School
of Economics, ENSAE et PhD École Normale Supérieure).
BIO
Le Printemps reçoit chaque année 70 millions de visiteurs
dans ses grands magasins(1), et 50 millions sur ses sites
e-commerce(2). Après des mois de fermeture, c’est avec
émotion que l’emblématique Printemps Haussmann a
rouvert en mai dernier, avec une haie d’honneur pour
accueillir les premiers clients.
C’est une nouvelle page qui s’ouvre : avec l’essor du
e-commerce, la baisse de la clientèle internationale et
les nouvelles habitudes liées notamment au télétravail, le
modèle du grand magasin se réinvente. Maud Funaro, qui a
crise sanitaire, en dessine les contours.
Premier parti pris, le magasin physique reste au centre
de l’expérience : « C’est un lieu de vie auquel les gens
sont attachés, estime-t-elle. C’est encore plus vrai quand
ce lieu est classé monument historique, avec une vue
unique sur Paris. Plus qu’un lieu de shopping, il devient
une destination un lieu de découverte et de
Ce lieu se fait aussi écrin pour le digital, avec le
en scène un un invité et des mannequins
(tous issus des équipes du Printemps) présentant une
sélection de pièces mode et beauté de manière ludique.
Le programme permet de réagir en direct, d’acheter et
peut être vu en replay.
Deuxième parti pris, le conseil est central, personnalisé
: les
(1) (2)
PARTIE 1 Expérience Client & Employé46
pas seulement offrir une accessibilité, c’est aussi connaître
le client. « Concrètement, on pourrait par exemple vous
parfumer avec votre fragrance favorite en magasin, vous
proposer un café dans votre lieu préféré et personnaliser
le conseil en fonction de votre historique, pourquoi pas de
l’univers de votre compte Instagram. Et si on est prévenus
à l’avance, on pourrait même préparer une sélection. C’est
d’outils de clienteling, accéder aux préférences clients,
passer d’un canal à l’autre dans la conversation, et créer des
opérations dans l’espace client. Le pourra
être briefé par le client sur son besoin, envoyer rapidement
une sélection de produits, recevoir le paiement en ligne,
et délivrer en
passer des appels proactifs qui déclenchent des achats.
Funaro.
de la relation « L’e-commerce a terriblement
déshumanisé le parcours d’achat ; on a tous besoin de
parler à des personnes et d’échanger, analyse Maud
Funaro. Pendant la fermeture, on s’est appuyés sur les
service a pu représenter jusqu’à 20% du chiffre d’affaires
d’avant-crise de certains des magasins.
La personnalisation va aussi s’exprimer à travers des
services : outre les basiques liés à l’achat (achat mains
libres, ) et les services commercialisés
(soins beauté, coiffure, restauration), des services
omnicanaux seront lancés pour certaines cibles comme les
locaux, les familles, etc. De nouveaux concepts sont créés
de 10 à 200 euros, à offrir ou à s’offrir en toute occasion.
Troisième parti pris, le grand magasin doit reconquérir
la clientèle locale et touristique proche (française,
européenne) avec laquelle on peut tisser des liens suivis.
La durée est en effet clé pour permettre à cette relation
humanisée d’être économiquement rentable. Pour la
clientèle internationale, l’accent est mis sur les touristes
individuels.
Dans ce nouveau modèle, l’omnicanal est une nécessité.
Là aussi, le Printemps se démarque. « Il n’y a pas un seul
modèle omnicanal, estime Maud Funaro. Pour une marque
qui a un réseau de boutiques de proximité, l’enjeu est
d’apporter en magasin la richesse du site Internet. Nous
c’est l’inverse : nous voulons transposer ce magasin unique
« Le personal shopper pourra être
briefé par le client sur son besoin,
envoyer rapidement une sélection
de produits, recevoir le paiement en
ligne, et délivrer en click-and-collect
ou livraison. »
47PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Fnac Darty digitalise ses canaux clients pour rivaliser avec les pure players
Christophe Famechon
Fnac Darty
Depuis 2017 / Customer Service Director, Fnac Darty
2012-2017 / Customer Service Director, Darty
2008-2012 / Customer Service Director, Dartybox
1998-2006 / VP Member Services Europe, AOL
1996-1997 / Quality assurance manager, Telecom Personal
Argentina
Christophe Famechon est diplômé de l’ESCP.
BIO
a mis à rude épreuve le service client et la logistique de
Fnac Darty. Le chiffre d’affaires web a bondi de 50% en
2020, sur des ventes totales qui ont progressé de 2%
malgré deux mois de fermeture des magasins. « Malgré
ce choc de volume, on a pu assurer un service quasiment
normal de livraison, d’assistance technique et de centre
d’appel. On a été l’un des seuls à pouvoir résister à cette
Relation Client du groupe.
Cette résistance est liée à une avance du groupe en matière
d’omnicanalité, pour le 2ème e-commerçant en France
. « Nous avons été premiers sur le dernier
trimestre 2020, pas mal pour des enseignes françaises
par exemple, l’un des rares distributeurs à permettre le
retrait en magasin d’un article trente minutes après la
millions le nombre de contacts clients, dont 25% via les
canaux digitaux, un volume en hausse de 50%.
« Si la crise nous a permis d’éprouver nos forces, elle
nous incite également à accélérer et à nous adapter aux
changements structurels de comportement de nos clients,
ajoute-t-il. Pour garder notre avance, nous devons investir à
la fois sur la proximité logistique, sur l’assistance technique
nécessaire pour construire une autonomie complète du
client sur le digital. Le groupe a engagé une refonte de son
système CRM, qui devrait être terminée d’ici 2025.
PARTIE 1 Expérience Client & Employé48
En attendant, plusieurs projets sont lancés en phase
pilote. D’abord, une plateforme d’assistance technique
pour mener les clients à l’autodiagnostic, voire
l’autoréparation, sachant que 50% des pannes se réparent
et à nos relations avec les constructeurs, nous enrichissons
Christophe Famechon. Un pilote est testé depuis cet été
en interne, par les conseillers, et auprès des clients.
Un deuxième projet consiste à analyser via des outils
de big data les millions de contacts clients annuels
du groupe. « Comprendre ces sollicitations de manière
détaillée et détecter les signaux faibles nous permettra
d’être encore plus performants dans nos relations avec
nos clients, indique-t-il. Côté nous allons partir
plus loin dans le conseil avec un qui pourra répondre
selon les besoins du client , explique le directeur de la
relation client. Nous nous appuyons sur nos vendeurs pour
construire des arbres de décision. Ce sera un avec
L’humain reste au cœur des préoccupations du directeur
des relations clients. « Le 16 mars 2020, le service client
est passé de l’ombre à la lumière. Nous étions les seuls
se rappelle-t-il. « Cela a encore renforcé ma conviction
que nos conseillers sont d’abord les ambassadeurs
de la marque. La digitalisation vient les aider dans cette
« Si la crise nous a permis
d’éprouver nos forces,
elle nous incite également
à accélérer et à nous adapter
aux changements structurels
de comportement de nos clients. »
49PARTIE 1 Expérience Client & Employé
La mobilité se transforme, Europcar Mobility Group aussi
Aurélia Cheval
Europcar Mobility Group
Depuis 2018 / Chief Strategy Officer, Europcar Mobility
Group et membre du Comité Exécutif du Groupe
2015-2017 / Directrice des Relations Investisseurs en
charge de l’introduction en bourse d’Europcar
Précédemment / Divers postes en finance,
Vivendi (2001- 2014) et chef de mission d’audit, Salustro
Reydel (1996-2001)
Aurélia Cheval est diplômée de NEOMA Business School.
BIO
Avec environ 9 millions de clients, 10 000 collaborateurs,
350 000 véhicules et 27% du marché, Europcar Mobility
Group est le leader européen de la location de véhicules
et l’un des principaux acteurs du secteur de la mobilité.
Europcar Mobility Group a pour raison d’être d’offrir des
alternatives attractives à la possession de véhicules, de
manière responsable et durable. Dans cette perspective,
Europcar Mobility Group offre une large palette de services
de location de voitures et utilitaires - que ce soit pour
quelques heures, quelques jours, une semaine, un mois ou
motorisations les plus récentes et qui sera dans les années
Quel impact la crise sanitaire a-t-elle eu sur votre
marché, et quelle vision avez-vous de l’avenir ?
Lorsque j’ai rejoint le groupe en 2015, j’ai réalisé à quel
point le sujet de la mobilité était central dans les évolutions
de la société. En 2017, le secteur représentait 16% du
PIB mondial, il atteindra 19% en 2030. Il est porté par des
comme l’économie de l’usage et du partage,
la montée des classes moyennes et la digitalisation.
La crise Covid est venue accélérer ces tendances :
l’utilisation - un peu à marche forcée parfois - des outils
l’e-commerce a stimulé l’activité Vans & Trucks.
Le télétravail va probablement réduire les mobilités
quotidiennes, mais aussi démontrer l’inutilité de posséder
un véhicule personnel en ville. Dans les deux à cinq ans,
notre rôle sera de proposer une offre de mobilité à l’usage,
PARTIE 1 Expérience Client & Employé50
digitalisation de nos services (parcours clients) et de nos
opérations (véhicules connectés, accès direct aux véhicules
sans passer par la station, etc.). Nos services de mobilité
s’inscrivent en complémentarité de ceux proposés par
d’autres acteurs notamment les mobilités douces ou, bien
sûr, les les transports en commun, les services de chauffeurs
Comment envisagez-vous l’évolution de votre
expérience client ?
La maturité digitale de notre expérience client est encore
d’IT différentes coexistent dans le groupe. Notre industrie
a été l’une des premières distribuées sur le net, sur des
canaux propriétaires multiples et via des brokers, nos
à l’été 2020, nous avons décidé de mettre en œuvre
une feuille de route plus audacieuse. Nous prenons les
meilleures briques de chacun des SI pour construire un
nouvel écosystème Tech intégré et agile qui nous permette
progressivement d’offrir à nos clients une expérience et des
Comment souhaitez-vous faire évoluer votre réseau
physique ?
C’est la combinaison du physique et du digital qui fait notre
force ! Nous recherchons le meilleur des deux mondes :
- Pour les factories situées dans les gares et aéroports,
l’enjeu est de bien dimensionner les véhicules et les
des machines “key & go” évitant le passage au comptoir.
- Pour les hubs et satellites, qui assurent aussi la partie
Côté business, la crise Covid a entraîné une chute de
45% du chiffre d’affaires en 2020. Cela nous a amené
à revoir le plan de transformation engagé. Nous avons
aussi fait évoluer l’organisation, d’une structure par BU à
une structure par besoin client en trois lignes de services
: Professionals (BtoB), Proximity (urbain) et Leisure
(marques Europcar et Goldcar).
Ques sont aujourd’hui les contours et les acteurs
de votre écosystème ?
L’écosystème évolue en permanence. Les constructeurs
automobiles, les entreprises de leasing… de plus en
plus d’acteurs tentent de se positionner sur des solutions
métier, servir nos clients dans leurs besoins de mobilité via
rendre disponible le bon véhicule, en bon état et au bon
Nous associons notre savoir-faire historique (sourcing,
et les nouveaux usages de la mobilité en capitalisant sur la
« Le télétravail va
probablement réduire
les mobilités quotidiennes,
mais aussi démontrer l’inutilité
de posséder un véhicule
personnel en ville. »
51PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Notre offre , qui permet de passer dans le même
contrat de l’électrique au thermique, encourage la première
prise en main en électrique. Sur l’ensemble des marques,
(électrique, hybride et hydrogène) en 2023.
- Le réseau régional en ville
- Pour les clients urbains, nous offrons déjà une expérience
purement digitale avec accès direct aux véhicules avec la
marque Ubeeqo, en complément d’une offre plus classique
en station.
Vans & Trucks, l’échange humain reste très
important pour avoir le véhicule exactement adapté au
besoin. Il restera des clients qui auront besoin d’interagir
avec des spécialistes.
Comment travaillez-vous l’expérience collaborateur ?
La digitalisation des opérations est aussi importante pour
le collaborateur que pour le client. Elle est bien sûr clé
contribuent également à améliorer à la fois l’expérience de
nos collaborateurs et celle de nos clients. A titre d’exemple,
La digitalisation du contrôle de l’état du véhicules, ou le
partage des données du véhicule connecté, contribuent
à la transparence de notre relation avec nos clients tout
en améliorant la vie quotidienne de nos collaborateurs.
véhicules.
Comment Europcar Mobility Group peut-il renforcer
sa transformation durable ?
C’est notre ADN et le contexte est maintenant favorable
avec une prise de conscience collective. La réglementation
européenne qui oblige les constructeurs à produire plus
de véhicules verts, les restrictions de circulation dans les
villes, notre propre volonté d’éducation des clients, tout
cela concourt à créer un appétit pour les véhicules green.
« La digitalisation du contrôle
de l’état du véhicules,
ou le partage des données
du véhicule connecté,
contribuent à la transparence
de notre relation avec
nos clients tout en améliorant
la vie quotidienne
de nos collaborateurs. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé52
53PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Avec Pro Plus, la BRED construit un modèle de plateforme multiservices pour sa clientèle PME
Simone de Oliveira
BRED Banque Populaire
Depuis 2016 / DSI, BRED, membre du COMEX et BRED
Banque Populaire
2014-2016 / Directeur développement informatique, BRED
2010-2014 / Responsable du département informatique
Flux et Moyens de paiement, BRED
1998-2010 / Développeur, BRED
Simone De Oliveira est titulaire d’un MIAGE, Université
Paris-Val de Marne.
BIO
« Ouvrir l’offre de la banque, proposer des services de
manière différente, construire une plateforme qui ne soit
pas uniquement une marketplace mais qui appartienne à
DSI de la BRED, les objectifs des plateformes de services
lancées depuis 2020 par la banque coopérative.
Si l’idée est venue de la direction générale il y a quatre ans,
au moment où les API étaient en plein essor, la mise en
œuvre n’a pas été si facile. « Pour la première plateforme,
Pro Plus, destinée aux TPE-PME, nous avons eu deux ans
de gestation métier , explique Simone de Oliveira. Nous
sommes partis des besoins des clients, que nous avons très
soigneusement interviewés lors d’ateliers de
est entrée en jeu. « Nous nous sommes tournés vers les
et leurs API. Les analyser, les comparer, entrer dans
leur univers a été tout un travail. Notre surprise a été de
constater que toutes les promesses n’étaient pas forcément
tenues, que ces jeunes pousses n’étaient pas toutes prêtes
Après avoir mûri le concept marketing, la banque a tranché
en faveur d’une offre élargie à des services non bancaires
du quotidien (agenda, notes de frais, devis, factures)
construite à partir de solutions du marché, mais intégrées
dans l’univers de la BRED. Chaque service payant fait l’objet
d’une souscription séparée mais le fait de tout retrouver sur
partenaires, avec de nombreux allers-retours auprès
des clients pilotes. « Finalement, avec notre informatique
souvent vue comme traditionnelle, nous, les banques,
sommes très utiles pour aider les à s’industrialiser.
Nous apportons notre exigence en termes de performance
PARTIE 1 Expérience Client & Employé54
Maintenant que ce socle technique est prêt, la BRED
déploie plus rapidement de nouvelles plateformes
servicielles. Au menu : une plateforme sur l’immobilier est
en production (avec des services de diagnostic énergie,
déménagement, etc.), une autre sur la retraite est en
développement, mais aussi une offre, dont l’idée est venue
de collaborateurs, pour assister les aidants à garder un œil
sur les comptes de leurs protégés (y compris les enfants
mineurs à l’étranger, par exemple). « Notre travail est un
peu différent ici car ces offres seront disponibles sur mobile,
et certaines, comme l’immobilier, connectées à notre
processus de traitement interne, ont exigé des adaptations
BRED.
« Finalement, avec notre
informatique souvent vue
comme traditionnelle, nous,
les banques, sommes très
utiles pour aider les fintechs à
s’industrialiser. Nous apportons
notre exigence en termes de
performance et de qualité de
service. »
En chiffres...Expérience Client & Employé
10%
seulement des entreprises indiquent
que leurs clients contribuent à l’innovation
en termes de produits et services.
Sources : voir page 210
55PARTIE 1 Expérience Client & Employé
« Aujourd’hui, le e-commerce se conjugue au pluriel »
Omer Waysman
Danone
Depuis 2020 / Director Global E-Commerce & Business
Development, Danone
2019-2020 / Global Head of E-Commerce Europe and Asia,
Danone
2011-2019 / Successivement Trade Marketing &
E-Commerce Manager Windows Phone & Office 365,
Product Marketing Manager Windows Phone, Senior
Strategic Global Account Manager Retail puis D2C Online
Store Category Lead, Microsoft
2010-2011 / Business analyst, Roland Berger
Omer Waysman est titulaire d’une maîtrise en sciences de
gestion de l’Université Paris 1 – Sorbonne et diplômé de HEC
Paris.
BIO
Omer Waysman, Global eCommerce & Business
Development Director, a intégré le groupe Danone
en 2019 avec un objectif clair, celui d’accélérer les logiques
e-commerce du leader agroalimentaire. Cet ancien de
Microsoft nous livre donc les enjeux majeurs d’un marché
bousculé par la pandémie actuelle. Décryptage.
Quelle stratégie de transformation e-commerce pour
le groupe Danone, au sortir d’une période qui qui a
véritablement fait bouger les lignes ?
Nous avions déjà pour ambition avant la crise de doubler
notre chiffre d’affaires sur ce canal, ce qui a été fait en deux
ans, en travaillant davantage la pénétration sur les sites de
nos partenaires distributeurs et pure players, mais aussi en
développant notre activité C’est un
enjeu réel pour nous et nous encourageons dès lors les
différents pays à créer ou optimiser leurs propres canaux
le plus passionnant, nous surveillons de près les tendances
mondiales émergentes pour les intégrer dans nos stratégies
au quotidien et rester pionniers dans nos approches.
Quelles sont-elles ?
Elles sont nombreuses, car aujourd’hui le e-commerce
ne se conjugue pas au singulier mais au pluriel, avec une
vingtaine de sous-catégories en plein développement :
social commerce, BtoB commerce, marketplaces,
modèles d’abonnement, etc. Si je devais choisir un sujet
particulièrement effervescent, j’évoquerais le
en croissance très forte depuis les
débuts de la crise sanitaire. Deux modèles se distinguent
aujourd’hui, le premier basé sur le stock des retailers,
le second entièrement créé par de nouveaux acteurs, dont
la promesse est de livrer en moins de dix minutes sur
PARTIE 1 Expérience Client & Employé56
Il est également beaucoup dit que le groupe Danone
investit fortement sur les enjeux nouveaux du
e-commerce équitable. Vous confirmez ?
Tout à fait, et c’est quelque chose dont nous pouvons
tendance, qui, contrairement à toutes les autres, est née
en Europe pour rayonner dans le monde. Les niveaux de
maturité sont aujourd’hui très variables, mais ce mouvement
se consolidera partout, la responsabilité devenant le second
critère de choix de courses pour le cyber acheteur. À nous
maintenant de trouver les bons
modèles économiques pour
que le modèle soit vertueux et
prenantes.
Sur quelles actions
capitalisez-vous pour agir ?
Notre stratégie repose sur
différents piliers. D’abord le
volet contenu, car une des
grandes questions actuelles est
de savoir communiquer auprès
labels et normes se multiplient. Le consommateur attend
Nous lui devons l’information la plus juste, ce qui a
d’ailleurs un impact sur notre manière de travailler les
medias, car nous cherchons de plus en plus à pousser la
bonne information à la bonne personne pour éviter un
autre type de gaspillage, celui de la publicité.
Il y a ensuite l’expérience client, qui doit être la même
à travers tous les canaux de distribution.
des centres villes denses. Cajoo, Glovo, Dija, Gorillas :
depuis quelques mois, beaucoup d’acteurs lèvent des
fonds pour développer leur activité, à l’image de ce que
l’on observait dans le secteur de l’IT il y a dix ans.
Au-delà du phénomène économique,
les consommateurs sont-ils appétents à la création
de ces nouvelles propositions ?
Non seulement le consommateur est appétent, mais
les entreprises aussi marquent le pas et s’adaptent très
rapidement. Nous avons par
exemple commencé à nous
positionner avec des partenariats
locaux et régionaux sur ce
segment très prometteur dès
plus remarquable que des
organisations centenaires
comme les nôtres parviennent
à réagir avec une agilité
immédiate. L’importance pour
Danone est d’apporter la santé
par l’alimentation au plus grand
nombre et à travers tous ces
nouveaux canaux de distribution.
Comment parvenez-vous à réagir sur des temps aussi
courts ?
En pratiquant le permanent, pour trouver
les meilleures solutions pour chaque marché. Le
devenons une entreprise dotée d’une volonté de
personnaliser nos actions en fonction des périmètres de
chaque marché.
« Le consommateur attend
des clarifications et des preuves,
sans greenwashing.
Nous lui devons l’information
la plus juste. »
57PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Notre troisième sujet est celui du packaging. Le
permet d’aller vers plus de responsabilité en réduisant les
emballages. L’expérience consommateur est plus agréable,
le coût de livraison plus faible car les poids sont plus légers
et on réduit notre empreinte carbone. Nous concentrons
également nos efforts sur un volet opération en testant
au quotidien des solutions technologiques pour améliorer
l’expérience du et réduire l’impact négatif sur
notre planète.
Et quid de la partie promotion ? Est-ce un sujet qui peut
concourir à cette réflexion ?
volonté de changer notre vision sur cet outil, en proposant
une promotion plus responsable dans ses objectifs.
Nous constatons d’ailleurs une vraie appétence de nos
consommateurs sur cette philosophie, puisqu’ils cliquent
60% fois plus sur des contenus à connotation RSE.
Votre sentiment sur l’importance que pourrait prendre
cette tendance dans les prochaines années ?
Nous n’en sommes qu’au début mais c’est très fort.
Le consommateur a besoin de s’éduquer, de comprendre
et nous lui devons cette transparence. Lui et nous avons
besoin de temps pour progresser, comprendre, établir nos
processus, maîtriser nos coûts, tester des solutions, mais
nous sommes au début d’une belle histoire.
En chiffres...Expérience Client & Employé
93%
des entreprises déclarent avoir été
confrontées à la volatilité de la demande
depuis le début de la pandémie,
ce qui a fait naître le besoin pour les chaînes
d’approvisionnement d’être non seulement
mais aussi plus agiles en termes d’exécution.
Sources : voir page 210
PARTIE 1 Expérience Client & Employé58
L’omnicanal à l’épreuve de la rentabilité durable
Graziella Marchese
RougeGorge Lingerie
Depuis 2020 / Directrice Client Omnicanal, RougeGorge
Lingerie
2019-2020 / Responsable Digital & Marketing Client,
RougeGorge Lingerie
2017-2019 / Responsable e-commerce & Nouvelle
distribution, Damart
2014-2017 / Responsable marketing & communication,
Damart Sport
2012-2014 / Responsable marketing international et
projets, Cyrillus
2010-2012 / Responsable de campagne multicanale,
Cyrillus
2009-2010 / Responsable de campagne multicanale,
Verbaudet
Graziella Marchese est diplômée de l’ESC Lille.
BIO
Deuxième enseigne française de lingerie, RougeGorge
totalise 245 boutiques et vise une clientèle de femmes
actives de 35-40 ans. Depuis six ans, la marque a accéléré
dans le e-commerce et lancé de nouveaux services, comme
la livraison, le retour en boutique ou le (1)
Cette évolution s’est révélée précieuse en 2020 : le chiffre
d’affaires e-commerce a été multiplié par deux en un an.
S’il est positif pour l’entreprise, l’essor de l’omnicanal
impacte néanmoins le modèle d’affaires.
« Pour un omnicanal gagnant pour la cliente comme
de RougeGorge. Outre le coût des technologies, plusieurs
éléments de la chaîne de valeur sont en effet impactés :
Ils sont désormais 100%
digitaux avec trois objectifs à concilier, le
l’e-commerce et la notoriété de la marque. « Face aux pure
players, avoir une visibilité acceptable sur Internet nécessite
des investissements continus, rappelle-t-elle. Nous avons
maintenant une bonne courbe d’expérience pour adapter
au recul du commerce physique. « RougeGorge Lingerie
est connue et reconnue pour son accueil et ses conseils
estime-t-elle. Néanmoins le coût des loyers ne peut pas
rester à son niveau d’avant-crise alors que la fréquentation
est moins importante.
(1)
59PARTIE 1 Expérience Client & Employé
RougeGorge a refondu
son site pour améliorer sa performance, l’équilibre entre
image de marque et commerce, et implémenter de
nouveaux services comme le conseil par visio. Le tunnel
de transaction offre une diversité de modes de paiement et
de livraison. Toutefois, la livraison est un point névralgique :
« Si les marketplaces ont fait de la livraison gratuite
leur avantage concurrentiel, de nombreuses marques
100% digital ont décidé de ne plus l’offrir
en argumentant - souvent très bien - sur les raisons
par exemple, l’envoi en plusieurs colis peut
s’avérer aberrant économiquement et d’un point de vue
RSE. Nous mettons en avant la livraison gratuite en magasin
le virage omnicanal impacte l’organisation
de l’entreprise et les métiers. « En boutique, il a fallu
apprendre à s’organiser rapidement avec les nouveaux
outils, tout en jonglant avec les clientes présentes
client gagne en centralité. « Quel que soit le canal où se
réalise la transaction, l’information remonte au même
service. Il est important de garder ce contact, c’est le cœur
du commerce. Ces équipes doivent diffuser la connaissance
les canaux conversationnels vont être développés.
Cette transformation raisonnée mène déjà à des résultats
probants : plus de 35% des clientes fréquentent à la fois
un magasin et un canal digital, et le taux de satisfaction
dépasse les 70%.
« Quel que soit le canal où
se réalise la transaction,
l’information remonte au même
service. Il est important de garder
ce contact, c’est le cœur du
commerce. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé60
BNP Paribas Leasing Solutions améliore son expérience client grâce à la e-signature
Charlotte Dennery
BNP Paribas Personal Finance
2015-2021 / CEO, BNP Paribas Leasing Solutions
2009-2015 / COO, BNP Paribas Investment Partners
2004-2009 / CFO, BNP Paribas Cardif
2001-2004 / Successivement Responsable Développement
& Stratégie BFI, puis Responsable Développement &
Stratégie US, BNP Paribas
1993-2001 / Successivement Chef de Bureau du financement
de la sécurité sociale, Chef de Bureau du Financement des
Collectivités Locales et de l’Intérieur, et Chef de Bureau
Politique Salariale, Ministère de l’Économie et des Finances
1991-1993 / Responsable de la Production et de l’analyse
des comptes trimestriels de la Nation, INSEE
Charlotte Dennery est diplômée de l’École Polytechnique
et de l’Ensae ParisTech.
Le 19 mai 2021, Charlotte Dennery a été nommée Director
and CEO, BNP Paribas Personal Finance, et Membre du
Comex, BNP Paribas Group.
BIO
BNP Paribas Leasing Solutions est spécialisé dans le
tracteur, équipement informatique, etc.). Présent en Europe
d’équipements par an, d’une valeur unitaire moyenne de
50 000 euros. Depuis 2015, Charlotte Dennery, (qui a pris
depuis mai 2021 les fonctions d’Administratrice Directrice
Générale de BNP Paribas Personal Finance), a mené un
chantier global de digitalisation de l’activité, en particulier
de l’expérience client.
Le leasing est commercialisé via trois grands canaux :
1. Le réseau BNPP
de biens mobiliers ou immobiliers. La relation client est
assurée par les conseillers en agence.
2. La vente en BtoC (10%), pour des biens en leasing
opérationnel. Ces équipements nécessitent souvent
ambulances, etc.).
3. Les « vendors » (60%), des partenariats mondiaux,
exclusifs ou non, avec les producteurs d’équipements
au distributeur, qui la répercute au client, explique
Charlotte Dennery. La rapidité de notre réponse va être
déterminante pour emporter le marché. En cas d’accord,
nous débloquons les fonds pour le concessionnaire et
échange tripartite nécessite un grand nombre d’étapes et
61PARTIE 1 Expérience Client & Employé
jours étaient nécessaires entre la demande-client et la mise
précise-t-elle.
Un exemple de cette automatisation : la signature
électronique des contrats. La digitalisation des documents-
types et la mise en place de l’e-signature étaient
niveau du groupe, mais l’adoption restait partielle. « Avec le
en arrière, estime Charlotte Dennery. En janvier 2020, 18%
des contrats étaient signés électroniquement, en décembre
Côté expérience employé, l’entreprise a fortement accéléré
équipes de smartphones et tablettes dernière génération,
organisé des événements d’acculturation digitale variés,
nommé des
fait du reverse
Charlotte Dennery. Des ont débouché sur des
déménagement en s’est accompagné de la mise
en place du télétravail.
étape : « Plonger dans la piscine d’eau froide a accéléré
les pratiques, estime-t-elle. Nous utilisons Teams, Skype,
OneNote, Sharepoint… et pensons à généraliser le mode
d’outil, de culture, et de Elle doit
s’accompagner de beaucoup de communication interne et
« En janvier 2020,
18% des contrats étaient signés
électroniquement, en décembre
c’était plus de 30% ! »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé62
du direct-to-consumer
Christine Bellin
Groupe TF1
2016-2021 / Directrice Stratégie, Développement et
Transformation, puis également Directrice Innovation
et Digital à partir de 2018 et Directrice TF1 Distribution à
partir de 2019, Groupe TF1
2008-2016 / Directrice de la Communication financière et
des Relations investisseurs, puis Directrice du Financement
et la Trésorerie et de la RSE, Groupe TF1
2006-2008 / Responsable financière, Eurosport Londres
2004-2006 / Direction Financement, Bouygues Telecom
Le 1er juillet 2021, Christine Bellin a été nommée Directrice
du projet de fusion des Groupes TF1-M6, Groupe Bouygues.
Christine BELLIN est diplômée de l’Institut d’Etudes
Politiques de Paris et d’HEC Paris.
BIO
La télévision fait sa révolution copernicienne.
La consommation TV a désormais deux entrées, l’une
rassembleuse autour d’événements fédérateurs, l’autre plus
individualisée, à la demande. Au regard de ce paradigme,
le groupe TF1 doit interagir, renforcer sa connaissance
client, faire évoluer son service, bref adopter une stratégie
direct-to-consumer.
de dix ans une première étape sur le replay gratuit, avec la
création de MYTF1, une plateforme qui a fait peau neuve
mi-2019. « MYTF1 est en quelque sorte la 6ème chaîne(1)
qui a participé à la création de Salto et a pris la direction
alliance inédite avec France Télévision et M6, le groupe TF1
a pris également position sur la SVOD(2) avec Salto,
une plateforme qui propose 15 000 heures de programme
et des avant-premières.
La stratégie de refonte de MYTF1 répond à quatre grandes
questions.
QUEL CONTENU ?
MYTF1 propose l’ensemble des programmes issus des plus
grandes franchises des antennes en replay et 9 000 heures
de programmes exclusifs. Pionner sur l’offre AVOD(3) il y a
18 mois, MYTF1 a de nouveau innové en juin dernier, en
étant le premier à proposer un nouveau service
appelé Stream.
(1) (2) (3)
63PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Les utilisateurs ont désormais la possibilité de consommer
les programmes via des playlists thématisées.
QUELLES TECHNOLOGIES ET QUELLES DATA ?
« Nous avons deux enjeux technologiques : proposer le
meilleur service aux utilisateurs et répondre aux besoins
marketing et commerciaux. Il faut traiter les deux avec
Christine Bellin. Face à des
l’expérience client se doit d’être
à la hauteur. Les fonctionnalités
attendues par les consommateurs,
comme la reprise de lecture, la
playlist personnelle, les
(par exemple sur un
match, accès directs aux buts ou
changement d’axe caméra) ont
été implémentées. « Cette refonte
nous met désormais au niveau des
leaders en termes de satisfaction client ; c’est très stimulant
Les données marketing sont nécessaires pour optimiser
précis. « Avec plus de 20 millions d’utilisateurs enregistrés
sur MYTF1, nous pouvons proposer à un annonceur un
ciblage s’appuyant sur les données sociodémographiques
que nous croisons avec celles liées aux programmes
visionnés et avec des données comportementales
propriétaires (comme celles de Marmiton par exemple)
ou des données
nous passons avec des partenaires, comme RelevanC et
AVEC QUELS PARTENAIRES ?
Il y a les partenaires marketing et les partenaires
distributeurs. Les accords de distribution permettent aux
distributeurs de proposer à leurs
utilisateurs l’ensemble
des services du groupe TF1
en linéaire et à la demande sur
tous les écrans. L’accord signé avec
propose une nouvelle gamme de
produits à forte valeur ajoutée.
À l’automne 2021, Orange pourra
proposer à ses abonnés un service
inédit enrichi en
programmes et sans interruption
publicitaire.
COMMENT ACCOMPAGNER CE CHANGEMENT ?
Les équipes techniques, contenu, data et adtech ont été
réorganisées et rapprochées. En 2018, la refonte a été
engagée en mode agile : une organisation en
hebdomadaire en 20 minutes, etc. ont été mis en place),
pour accélérer le rythme d’évolution des produits et gérer
en parallèle le et la refonte. En année 2, l’accent a été
mis sur le suivi des KPI client : temps de latence de l’écran
pub, des chargements de page, etc.
« Face à des concurrents
comme Netflix, Amazon
Prime Video ou Disney+,
l’expérience client se doit
d’être à la hauteur. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé64
« Avec plus de 20 millions
d’utilisateurs enregistrés sur
MYTF1, nous pouvons proposer à un
annonceur un ciblage s’appuyant sur
les données sociodémographiques
que nous croisons avec celles liées
aux programmes visionnés et avec
des données comportementales
propriétaires. »
En parallèle, le groupe a engagé une mise à niveau
régulière des collaborateurs sur les évolutions du secteur
digital avec des modules de formation et de découverte
de trois jours. « On peut sensibiliser sur des sujets comme
la gestion du consentement qui vont impacter l’entreprise.
Cela permet aussi de valoriser l’expertise de l’équipe, ce
sobriété numérique (design de service, sensibilisation des
clients) avec une de 40 personnes.
(4)
par mois, un record historique d’audience en quatre écrans
avec 29,8 millions de en mai 2021.
en jusqu’à 2,4 millions de téléspectateurs
supplémentaires et signe le meilleur replay historique
toutes chaînes et tous programmes confondus.
« En trois ans, nous avons progressé en audience,
en rentabilité, nous avons réalisé plus de 450 évolutions
du produit pour répondre au plus près des attentes des
consommateurs et nous avons lancé une gamme de
produits structurants. Le groupe TF1 propose désormais
(4)
4 CLÉS DE SUCCÈS
Ne pas craindre d’avoir une grande ambition
pour attirer les talents
Délivrer rapidement pour rester dans la course
par rapport à la concurrence
Adopter une organisation transversale et alignée
sur le but à atteindre
Faire savoir ce que l’on fait, associer les équipes
65PARTIE 1 Expérience Client & Employé
La RFID, bras armé de l’omnicanalité au sein du Groupe Etam
Benjamin Durand-Servoingt
Groupe Etam
Depuis mars 2019 / COO, Groupe Etam
2010-2019 / Successivement Associate, Senior Associate,
Engagement Manager, Associate Partner,
McKinsey & Company
2010 / Product Manager, Yves Saint Laurent Parfums
2008-2009 / Line Manager, Lancel
Benjamin Durand-Servoingt est diplômé de l’EM Lyon.
BIO
Après un emballement qui eut l’effet d’un feu de paille
il y a une décennie, beaucoup peinent encore à trouver
des cas d’usage à la technologie RFID. Beaucoup, à
l’exception notable du groupe Etam, qui en a fait, depuis
2019, la pierre angulaire de sa stratégie d’omnicanalité.
« Nous avons toujours été très attentifs au digital,
en étant parmi les premières marques de retail à créer
un site e-commerce dès le début des années 2000, ou
à équiper nos forces de ventes de tablettes dix ans plus
tard. Pour cette nouvelle décennie, ce sont les nouvelles
attentes de nos clientes que nous devons comprendre et
traiter. Elles souhaitent une immédiateté plus grande ainsi
qu’une expérience immersive plus forte. La dimension
durable et responsable devient aussi capitale dans l’acte
de consommation, exigeant une transparence sur nos
conditions de production, du choix des matériaux et de
Durand-Servoingt, COO du groupe.
Et pour cet ancien de l’EM Lyon, le digital représente
toujours une partie des réponses pour la marque aux
1 500 points de vente. « Il ne doit pas être opposé au
magasin, mais plutôt intégré sur toute la chaîne, de la
complète l’expert.
Une ambition qui a trouvé sa concrétisation dans la mise en
œuvre du projet App Mag (i.e. Application Magasin), qui,
de personnalisation et d’omnicanalité. L’intuition de départ
a été d’utiliser la RFID pour développer les premiers
notamment sur l’encaissement mobile, puis d’étoffer
la plateforme de nouvelles idées au fur et à mesure.
Progressivement, l’App Mag s’est véritablement enrichie
pour devenir le prisme relationnel et productivité du
groupe, en faisant le lien entre le magasin, la supply chain
PARTIE 1 Expérience Client & Employé66
d’amélioration… ou les nouvelles idées à tester, à l’image
CRM web sur les produits essayés en cabine. Une approche
culturelle nouvelle puisque ce sont désormais les codes du
digital qui prennent possession du point de vente, alors
que l’on était plutôt habitués à l’inverse.
Cette petite révolution organisationnelle a dû, comme
toujours dans ce type de transformation, embarquer
culturellement l’humain au-delà de l’outil lui-même, avec
des programmes d’acculturation importants. C’était l’une
des conditions de réussite. L’autre réside dans la capacité à
tester et échouer : « On s’autorise beaucoup cette capacité,
car pour enrichir l’innovation, la remise en cause des
et le digital. Première réussite, la création d’une
omnicanalité sans coutures, en créant des ponts entre les
signaux digitaux et la venue en magasin, et en équipant
les forces de vente de l’outil pour les aider à appréhender
toute cette information transverse autour de la cliente.
« Le but devient d’accueillir une cliente en magasin
en ayant conscience de son activité web préalable, mais
aussi d’enrichir la connaissance que nous avons d’elle
en intégrant dans l’application toutes les informations
qui la caractérise sur le point de vente : produits achetés,
Durand-Servoingt.
Test après test, les briques servicielles créées à partir de
la RFID dépassent aujourd’hui largement la dimension
l’ensemble de leur stock en temps réel, les boutiques
deviennent de véritables entrepôts logistiques capables
de réceptionner des colis de retour et de les remettre en
vente, mais aussi de satisfaire directement des commandes
e-commerce à partir de leurs pièces disponibles, rendant
ainsi la gestion des stocks plus agile. « Notre principal
challenge e-commerce restait la largesse de nos gammes
et la disponibilité des tailles. Ne travailler qu’à partir d’un
entrepôt diminue les possibilités de satisfaire la demande ;
garantit en revanche de pouvoir y répondre largement, en
préparant les commandes en magasin. Ce changement
soutient aujourd’hui entre 30 et 50% de la croissance de
notre e-commerce. En outre, sur l’activité de nos points
de vente à l’étranger, la gestion du stock intra-pays offre
Le déploiement vient d’être achevé dans l’ensemble
des magasins et les partages de retours d’expérience
« Le but devient d’accueillir
une cliente en magasin en ayant
conscience de son activité web
préalable, mais aussi
d’enrichir la connaissance
que nous avons d’elle. »
67PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Lavinia place le sommelier au centre de son dispositif omnicanal
Edouard Margain
Lavinia
Depuis 2020 / Directeur des Opérations, Lavinia
2018-2020 / Directeur Digital, Développement & Marketing
Stratégique, Lavinia
2015-2018 / Directeur Digital, Lavinia
2010-2015 / Responsable Marketing & e-Commerce, Sensee
2008-2010 / Responsable Comptes e-Business, FittingBox
2007-2008 / Assistant Marketing, Deloitte
Edouard Margain est diplômé de la Grenoble Graduate
School of Business.
BIO
Depuis 1999, Lavinia propose, en ligne et en boutique, une
gamme de vins et spiritueux venus de plus de trente pays,
relève de l’expérience émotionnelle, et l’enseigne souhaite
continuer à porter cette promesse sur tous les canaux.
Son principe ? Faire du sommelier le point d’ancrage de la
relation, en boutique comme en virtuel. Comme expert,
il est légitime pour gérer la boutique, inviter le client
à une dégustation, faire du conseil, envoyer un devis,
communiquer et assurer le SAV.
Côté boutique, les points de vente(1), plus petits,
deviennent des hubs de service locaux. L’équipe agile
opérations et un responsable VIP et événementiel. Les
services de et de livraison sont renforcés,
avec des partenaires comme Epicery, qui s’appuie sur
le commerce de bouche : une sélection de vins et de
champagne frais est proposée en complément d’un
repas, en livraison ou en Lavinia propose
également à ses clients VIP un service de conciergerie.
Côté digital, le sommelier interagit directement avec les
audiences du site, et peut pousser un panier personnalisé
dans l’espace client. Il signe l’ensemble des messages, et
dispose désormais de son propre compte sur les réseaux
sociaux : « Sur LinkedIn, on constate par exemple que la
page de la marque obtient sept à huit fois moins de
de faire entendre la voix des experts de Lavinia, d’autant
explique Edouard Margain, Directeur des Opérations de
Lavinia.
(1)
PARTIE 1 Expérience Client & Employé68
L’affectation du chiffre d’affaires aux
boutiques, l’intégration par les RH du temps passé sur ces
nouvelles missions, la formation aux outils, et l’acculturation
digitale née de la crise, permettent de faire venir les
collaborateurs à cette nouvelle organisation. L’essentiel est
d’avoir l’expertise produit.
L’objectif est ensuite de transformer ce client digital en
client boutique quand il s’y rend pour retirer sa commande.
En effet, selon Edouard Margain, « si le digital croit de
encourageants (panier moyen en hausse de 35%), l’activité
est moins rentable que la boutique, surtout si l’on
dont la logistique est coûteuse, avec une casse relativement
fréquente. Cette bascule passe par des avantages en
boutique, des animations avec les 700 producteurs, un
accueil personnalisé et la proposition systématique de
dégustation des nouveautés.
L’objectif est de transformer
le client digital en client
boutique quand il s’y rend
pour retirer sa commande.
69PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Class’croute crée un nouveau
s’adapter au travail hybride
Luce Brunerie
Class’croute
Depuis 2020 / Directrice de la Transformation Digitale,
Class’croute
2017-2020 / Chief Digital Officer, Groupe Holder
(Paul, Ladurée, Château Blanc)
2013-2016 / Directrice de Clientèle Senior Mobile et Digital,
Fullsix (Havas Group)
2005-XX / Chef de projet senior digital, Wunderman Paris
Luce Brunerie est diplômée de l’IPAG Business School.
BIO
majoritairement franchisés dans lesquels les clients venaient
acheter ou déguster sur place sandwichs et salades.
Ces points de vente livrent également leurs clients, souvent
en entreprise, pour leur pause déjeuner. Le télétravail
« Nous avons voulu répondre très vite aux besoins des
entreprises qui ont vu leurs restaurants inter-entreprises
fermer pendant la crise avec deux nouvelles offres : une
L’e-cantine ou cantine digitale est une interface web
contrat avec Class’croute peuvent commander leurs repas
et accéder à des tarifs prenant en compte notamment
livraison groupée tous les jours à la même heure dans leur
entreprise avec une offre produits régalant leurs papilles.
Le frigo connecté bouscule davantage le modèle de
Class’croute. Il s’agit de repas mis à disposition dans un
à un QR code via une application mobile. Les produits
compte Class’croute que le client aura alimenté avec des
tickets restaurants ou sa carte bancaire. « Des distributeurs
alimentaires intelligents en libre-service sur son lieu de
travail, approvisionnés tous les jours en produits frais avec
des recettes s’adaptant aux divers régimes alimentaires :
sans gluten, sans lactose, de saison, végétarien, etc., et
Nouveaux Concepts Class’croute, a également imaginé
ce qu’il appelle la Smart Kitchen
nouvelle donne et aux nouveaux usages de consommation
Brunerie.
PARTIE 1 Expérience Client & Employé70
« Après le relifting complet de notre plateforme de marque
en cours de conception – projet dirigé par Géraldine
Painchaud, Directrice Marketing/Communication de
Class’croute en lien avec Lionel, notre Consultant Expert
en externe, l’équipe Transformation Digitale / eCommerce,
l’équipe Marketing, la direction RSE et notre agence
digitale - Class’croute lancera prochainement un vaste
chantier de refonte de la stratégie de la relation client qui
fera la part belle à nos piliers RSE, se dotera d’outils CRM
par une application Class’croute omnicanale répondant aux
besoins de nos clients et à la palette servicielle proposée
société qui ne compte que trente collaborateurs et qui a
été fortement impactée par la crise sanitaire.
Mi-2021, une trentaine de frigos connectés sont déployés.
entreprise, est proposée à nos franchisés avec le soutien
de notre force commerciale dédiée pour déployer le
maximum de frigos connectés Class’croute sur l’ensemble
du territoire. Notre avantage par rapport aux startups de la
Food Tech, c’est que nous maîtrisons de A à Z notre offre
de la fourche à la fourchette, explique Luce Brunerie.
Nous apprenons en marchant, nous testons, nous ajustons.
Ainsi, pour booster cette offre auprès de
ni commission sur les contrats apportés, ni loyers
Avant la crise sanitaire, 70% du chiffre d’affaires de
Class’croute provenait des ventes physiques. En 2021,
60% des ventes proviennent du digital. « Nous devons
accélérer pour accompagner cette révolution des usages
directrice de la transformation digitale.
« Notre avantage par rapport
aux startups de la Food Tech,
c’est que nous maîtrisons de A à Z
notre offre Food, de la fourche
à la fourchette. »
71PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Atol Les Opticiens crée un parcours client digital pour Lexilens
Laurence Caurette
Atol Les Opticiens
Depuis 2017 / Directrice Exécutive, Atol Les Opticiens
2016-2017 / Directrice de l’offre et des achats, Jardiland
2011-2016 / Directrice Stratégie, Marketing et Digital
Groupe FBD, IXINA France
2008-2011 / Directrice Marketing et Achats, puis Directrice
commerciale et exploitation des Boutiques, Lapeyre
2005-2008 / Directrice de marché menuiserie Lapeyre et
«�K par K�», Lapeyre
1998-2005 / Directrice Produits International, Groupe SEB
Laurence Caurette est diplômée de l’Ecole de management
de Marseille (Kedge), titulaire d’un troisième cycle de
l’IFG Lyon, et formée en marketing à IMD Business School
puis en management à l’ESSEC.
BIO
Quatrième enseigne d’optique de France, Atol est une
coopérative qui fédère 620 opticiens indépendants.
L’enseigne se positionne comme le référent de la santé
était encore balbutiant sur le marché de l’optique, explique
Laurence Caurette, Directrice Exécutive d’Atol. Des
tentent de notre marché, mais avec
la prescription médicale, le rôle du magasin reste très
Comment évoluer alors vers l’omnicanal ? « Tout a
commencé par la mise en place d’un feedback client : les
opticiens se sont sentis concernés. Puis, ils ont réalisé la
puissance des avis Google et plus globalement du digital,
explique-t-elle. Dans la récente refonte de notre site, nous
lunettes en réalité augmentée, communication locale sur
les réseaux sociaux - toutes ces briques, mises en place
progressivement par le siège, se sont avérées essentielles
désormais pris en ligne chaque semaine.
« Tout a commencé par la mise
en place d’un feedback client :
les opticiens se sont sentis
concernés. Puis, ils ont réalisé
la puissance des avis Google
et plus globalement du digital. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé72
L’accent est également mis sur l’innovation produit : la
startup Abeye, incubée par le groupe, a lancé Atol Zen,
monture qui détecte les chutes des seniors et se connecte
à un service d’assistance, et Lexilens, destiné aux enfants
dyslexiques pour faciliter l’apprentissage de la lecture et la
mémorisation.
estime Laurence Caurette. Pour les lunettes senior Atol
Zen, nous avons compris en chemin que notre cible
avait la plupart du temps déjà adopté une solution de
téléassistance et qu’il fallait nous appuyer sur le fournisseur
de ce service, explique Laurence Caurette. Dans le cas
de Lexilens, nous avons opté pour un parcours 100% en
Ces lunettes électroniques 100% françaises émettent une
lumière stroboscopique pour transformer le message
envoyé au cerveau. Pour ce produit révolutionnaire, Atol a
lancé la nouvelle marque Lexilens, un site Internet dédié,
et n’apparait que comme distributeur. « Nous sommes
partis de témoignages vidéo très émouvants d’utilisateurs.
Nous invitons les personnes à venir en magasin pour
l’autre. En cas de succès (80% à ce jour), nous proposons la
La marque ambitionne de créer une véritable communauté
d’utilisateurs pour assurer un bouche-à-oreille favorable.
Chaque testeur reçoit un guide informatif à transmettre à
son référent (enseignant, orthophoniste). En s’appuyant
directement sur les patients, Atol ne fait aucune démarche
directe auprès des prescripteurs et répond uniquement aux
demandes. 8 millions de Français et 4 à 5% des écoliers
souffrent de dyslexie aujourd’hui.
« En s’appuyant directement
sur les patients, Atol ne fait
aucune démarche directe auprès
des prescripteurs et répond
uniquement aux demandes. »
73PARTIE 1 Expérience Client & Employé
En chiffres...Expérience Client & Employé
Sources : voir page 210
RÉINVENTER L’EXPÉRIENCE CLIENT DANS UN CONTEXTE (POST) PANDÉMIQUE
+121%
pour les jouets, jeux et loisirs
+76%
pour les vêtements chaussures et accessoires
Les intentions de retour en magasin
concerneront principalement les
catégories de produits qui génèrent
le plus de retours.
14%
des consommateurs déclarent que rien ne les incitera à
revenir faire leurs achats dans des magasins physiques.
La commodité est la principale raison pour laquelle
les consommateurs continueront de faire certains de
leurs achats en ligne. Les promotions en magasin sont
l’argument le plus convaincant pour les consommateurs
de retourner faire leurs achats dans un magasin physique.
84%
client sera de nouveau une priorité élevée au cours des
deux prochaines années, contre 35% il y a deux ans.
PARTIE 1 Expérience Client & Employé74
Royal Canin propose un abonnement hyper-personnalisé, avec l’appui des vétérinaires
Pierre-Charles Parsy
Royal Canin
Depuis juin 2021 / Vice-Président en charge de la marque,
de l’expérience client et de la transformation digitale,
Royal Canin
2018-2021 / Digital Transformation & New Business
Ventures Vice President, Royal Canin
2006-2018 / Successivement Consultant Strategy
& Change, Managing Consultant, Associate Partner,
Strategy & Operations Director, General Manager
& Executive Partner, IBM Interactive
Pierre-Charles Parsy est titulaire d’un Master en Business
Administration de la Warwick Business School, d’un Master
en Business Management de TBS Education, et diplômé
de l’Insead.
BIO
Entité du groupe Mars PetCare (groupe Mars Inc.), Royal
Canin aborde le marché de la nutrition animale par l’angle
du bien-être et de la santé des chats et des chiens.
Le modèle économique de Royal Canin repose ainsi
traditionnellement sur un réseau de partenaires
professionnels qui recommandent et distribuent ses
produits sur un modèle BtoBtoC. On pense notamment aux
vétérinaires, aux élevages, ou encore aux détaillants tels
que les animaleries ou les sites e-commerce spécialisés.
Depuis le début de la pandémie, ce modèle a vécu
quelques bouleversements comme en témoigne
Pierre-Charles Parsy, Vice-Président de Royal Canin
en charge de la marque, de l’expérience client et de la
transformation digitale : « Les propriétaires d’animaux
se sont habitués à commander les aliments de leurs
compagnons en ligne. De plus, les vétérinaires sont de
plus en plus nombreux à proposer de la téléconsultation,
et même les élevages et refuges proposent désormais
Face à la montée en puissance de nouveaux acteurs qui
pourraient disrupter son modèle traditionnel (Vetolib,
l’innovation digitale : « Nous avons conçu une boîte à
outils de microservices, que nous pouvons assembler
autour de plateformes servicielles dédiées à l’activité de
été renforcée avec la création d’une et
d’une qui permettent à la marque d’activer
ces connaissances dès la conception de ses produits et
services.
75PARTIE 1 Expérience Client & Employé
En parallèle, Royal Canin expérimente une approche
DtoC qui représente encore un faible
pourcentage de l’activité. Celle-ci est focalisée sur la
création de nouveaux services consommateur hautement
personnalisés, comme c’est le cas avec l’Atelier Félin.
Ce éphémère, ouvert d’avril à juin 2021, a pris
place dans le quartier du Marais à Paris, et a permis à près
de conseils personnalisés.
ont étudié des données comportementales propres à
témoigne Pierre-Charles Parsy. Les visiteurs sur place ont
pu par la suite souscrire à un abonnement leur permettant
de recevoir mensuellement le régime alimentaire de leurs
félins. Le tout contenu dans une consigne réutilisable, ceci
« C’est un concept que nous avons développé avec une
équipe multidisciplinaire et multiculturelle, avec plus de
dix nationalités représentées autour de la table. Il a eu
pour vertu de nous aider à tester de nouveaux concepts
applicables directement à nos opérations, ou même à
celles de nos partenaires. Cela nous permet de tester de
nouvelles expériences uniques pour le consommateur,
et de découvrir de nouvelles sources de revenus sans
conclut-il.
« C’est un concept que
nous avons développé avec
une équipe multidisciplinaire et
multiculturelle, avec plus de dix
nationalités représentées. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé76
Le Crédit Mutuel soigne l’expérience collaborateur
Sébastien Bertrand
Crédit Mutuel
Depuis 2018 / Directeur d’activité, Euro-Information,
et Coordinateur du Plan Stratégique
Ensemble#nouveaumonde de Crédit Mutuel Alliance
Fédérale
2015-2018 / Chef de Projet Métier, Euro-Information
1991-2015 / Différents métiers réseaux et d’animation
réseaux, banques CIC
Sébastien Bertrand est diplômé de l’IEP / DESS Techniques
bancaires et financières - Strasbourg.
BIO
Leader de son secteur sur la satisfaction client(1)
depuis plusieurs années, le Crédit Mutuel souhaite l’être
aussi sur l’expérience collaborateur. Pour y parvenir,
de nouvelles méthodes participatives.
« Avec l’accélération de l’usage du digital, l’expérience
client a fait l’objet de beaucoup d’attention, l’expérience
collaborateur un peu moins, note Sébastien Bertrand,
Directeur d’activité à la coordination du Plan Stratégique.
Les aspects réglementaires, la sécurité ont pu servir
Or c’est un enjeu important de productivité et
« Pour améliorer l’expérience, il faut d’abord écouter
Euro-Information a lancé un baromètre VOC (Voix du
Collaborateur) calqué sur la voix du client, pour évaluer
ses nouveaux outils. « La démarche VOC est intégrée sur
explique-t-il. Elle se fait en trois temps.
(1)
« Euro-Information a lancé
un baromètre VOC (Voix du
Collaborateur) calqué sur la
voix du client, pour évaluer ses
nouveaux outils. »
77PARTIE 1 Expérience Client & Employé
leurs collègues dans la diffusion des bonnes pratiques
autour des outils. En support, le programme Amplitude
leur fournit des kits ludiques (vidéo, jeux, animations)
moyens digitaux pour générer du contact client proactif.
Le taux de recommandation sur cette animation est de
85%. Le dispositif a été réalisé en interne, avec l’appui
d’IBM pour construire la démarche.
En première étape, on travaille avec un groupe
d’utilisateurs à qui l’on présente les projets des neuf mois à
eux. Cela nous aide à prioriser. Puis on teste les pilotes à
grande échelle (1 000 personnes) en recueillant les avis
par une note globale de l’outil testé, des notes par critère,
et des commentaires qualitatifs. Ils sont analysés chaque
semaine par les acteurs des projets via une console de
pilotage qui donne une vision macro et micro du niveau
d’adoption des utilisateurs. Ces analyses peuvent amener
les groupes projet à mettre en œuvre des améliorations
pilote, après mise en œuvre des améliorations, l’équipe
(Net Promoter Score, moyenne entre les promoteurs et les
réfractaires à l’outil). Si le NPS n’est pas au-delà d’un certain
niveau, nous ne déployons pas l’outil à grande échelle et
Cette démarche est intégrée à tous les projets structurants,
environ trois par trimestre. Elle a été utilisée par
exemple pour tester la refonte d’un outil du quotidien
des conseillers, donnant une vision de synthèse de
l’équipement client. « 70% des utilisateurs ont participé
au vote. Leur avis a compté, puisque trente améliorations
ergonomiques et fonctionnelles ont été apportées.
Cela a favorisé l’adoption de l’outil lors de la phase de
Pour favoriser cette adoption, rien ne vaut la présence sur
le terrain. Un réseau de 3 000 référents locaux a été créé
à cet effet dans les caisses et agences pour accompagner
« Si le NPS n’est pas au-delà
d’un certain niveau, nous ne
déployons pas l’outil à grande
échelle et poursuivons la phase
d’amélioration continue. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé78
« Proche des aidants », la nouvelle plateforme à haute valeur relationnelle du groupe VYV
Valérie Bompard
Groupe VYV
Depuis 2019 / Directrice de la Transformation Stratégique,
membre du Comité de Direction Générale, Groupe VYV
2013-2019 / Successivement Directrice du Marketing
Sogecap puis Directrice Innovation et Transformation
Digitale, Société Générale Assurances
1995-2013 / Successivement Analyste Financier,
Responsable Relations Investisseurs, Marketing et
Développement Commercial Asset Management, puis
Directeur de Cabinet Services Financiers Spécialisés et
Assurances, Société Générale
Valérie Bompard est diplômée de la Société Française
des Analystes Financiers, de l’Université Paris X et de
l’Université Paris Dauphine.
BIO
« Pour se transformer, beaucoup partent du digital pour
y intégrer ensuite la dimension humaine. Nous préférons
d’abord capitaliser sur l’humain, le digital restant un
aujourd’hui Valérie Bompard, directrice de la transformation
stratégique du groupe VYV, lorsque l’on l’interroge sur les
enjeux de transformation numérique des organisations.
Un principe appliqué à la lettre pour porter ceux du
premier acteur mutualiste de santé et de protection sociale
en France, qui représente également le 4ème acteur du
logement social et le premier opérateur non lucratif d’offres
de soins, fort de 45 000 collaborateurs et 10 000 élus de
terrain.
et son écosystème pour évoluer continument du statut
d’assureur payeur vers celui d’accompagnant, en particulier
auprès des 11 millions d’adhérents. « Nous voulons, dans
chaque action que nous menons, des impacts sociétaux
forts. Nos piliers d’activité que sont la mutuelle, les
services, les soins et le logement social nous octroient un
écosystème unique pour donner corps à ce positionnement
Pour amorcer ce virage, la logique du pas-à-pas et du
pilote a prévalu, en choisissant pour commencer un cas
d’usage à forte valeur sur la population des aidants. « C’est
un sujet de société fort qui porte en lui les problématiques
d’autonomie et de vieillissement de la population. Il existe
en France 11 millions d’aidants et nous en recensons
2 millions au sein de nos adhérents. Notre écosystème
permet d’une part de détecter facilement ces publics sur
le terrain, mais aussi d’avoir la capacité de leur proposer
des parcours de prise en charge adaptés pour les
79PARTIE 1 Expérience Client & Employé
faut continuer de faire connaitre ; mais l’enrichissement
de notre catalogue reste essentiel, pour élargir la gamme
des solutions sur certains territoires, la santé restant un
Deux enjeux accompagnent la création et le déploiement
de cet écosystème de partenaires : d’abord le fait de
pouvoir grandir en taille sans perdre en proximité, mais
aussi la gestion de l’interopérabilité technique de la
plateforme avec toutes ces solutions. Avec un déploiement
premier acte de transformation réussi. Et probablement pas
le dernier.
d’accompagnement, le groupe VYV a donc lancé
« Proche des aidants », un dispositif plateforme qui
et représente aussi un outil de diagnostic pour créer des
chaque situation exposée. Accessible à tous en ligne, elle
constitue à la fois une aide à la vente pour les conseillers
mais aussi un outil d’information et de recherche pour les
adhérents, les militants et le grand public, en permettant
également d’être mis en relation avec une équipe
spécialisée. « Nous souhaitons répondre aux besoins
d’accompagnement exprimés massivement par les français
pour le suivi des situations et la coordination des solutions
Valérie Bompard.
LA FORMATION, CLÉ DE L’ADOPTION
Le déploiement du dispositif est d’abord passé par une
phase pilote où la plateforme a été testée sur six points
d’entrée de différentes mutuelles et établissements de
services, pour évaluer le discours et les besoins dans des
environnements différents. Et si l’on demande à Valérie
Bompard deux points clés de l’apprentissage, celle-ci
évoque volontiers l’essentialité des enjeux de formation et
l’intégration de la notion d’écosystème élargi.
« Compte tenu de la place de l’humain dans un dispositif tel
que celui que nous concevons, le rôle donné aux conseillers
et aux militants change ; il nous faut des méthodes
d’embarquement et de formation différenciées, si l’on
souhaite un modèle à haute valeur relationnelle qui met
la personnalisation et l’accompagnement au centre. Il faut
aussi apprendre à chacun à dépasser son environnement
pour travailler avec de nouveaux outils ou de nouvelles
« Pour se transformer,
beaucoup partent du digital
pour y intégrer ensuite
la dimension humaine.
Nous préférons d’abord capitaliser
sur l’humain, le digital restant
un facilitateur opérationnel. »
PARTIE 1 Expérience Client & Employé80
EDF analyse et optimise ses interactions clients
Loïc Thomas
EDF
Depuis 2018 / IT Manager Data, IA & RPA, EDF
2010-2018 / Pilote d’application, Chef de projet IT & Data,
puis Chef de projet IA, EDF
2006 - 2009 / Successivement Développeur, Analyste
fonctionnel, Assistant à maîtrise d’ouvrage, et Consultant
Informatica, Logica
Loïc Thomas est diplômé de l’Université de Bretagne Sud,
Lorient, en Informatique et Statistiques.
BIO
Au sein d’EDF, la direction Commerce assure les fonctions
technico-commerciales de l’entreprise (vente, relation
client), et leurs fonctions support, avec notamment une
DSIN (Direction Système d’Information et Numérique)
dédiée. En matière de relation client, les volumes sont
tout simplement colossaux : 12 millions de visites Internet
par mois, 3 millions d’e-mails et 25 millions d’appels
téléphoniques traités chaque année.
Or, si la discussion de vive voix reste primordiale
pour le traitement des demandes les plus complexes,
EDF reconnaît que l’adoption des nouvelles technologies
d’automatisation intelligente (appuyées par l’IA et les
algorithmes de
processus tout en offrant une meilleure expérience.
Depuis 2018, EDF Commerce a donc mené un certain
nombre de chantiers parmi lesquels le dispositif
Allo-Media. Cette solution permet à l’entreprise
téléphoniques de ses conseillers. « Nous distinguons très
précisément les informations transmises par l’appelant
de celles transmises par le conseiller. Cela nous permet
notamment d’améliorer la connaissance générale des
attentes client, mais aussi de comprendre quelles sont les
étapes de la conversation qui font perdre du temps.
Nous sommes ainsi en mesure d’envisager des solutions
pour améliorer l’expérience des collaborateurs et des
a par ailleurs été
développée par les de la DSIN pour le
traitement automatique des e-mails qui sont ainsi dirigés
81PARTIE 1 Expérience Client & Employé
Cette année, EDF Commerce entend aller encore plus
loin et se lance dans la maîtrise du conversationnel.
L’entreprise forme des équipes IT multidisciplinaires,
collaborant directement avec les directions métiers, pour
embarquer dans sa relation client des chatbots textuels et
vocaux. « Nous étudions notamment la mise en place d’un
serveur vocal interactif (SVI) en langage naturel. L’idée est
de permettre au client une grande liberté de parole, et
de laisser l’algorithme transmettre la requête au meilleur
Les chatbots textuels sont déjà opérationnels et
simples, comme les informations sur EDF, ses produits
via la reconnaissance des appels et e-mails participe
continuellement à l’amélioration des performances de ces
chatbots : « Nous nous sommes aperçus l’an passé que de
nombreux clients nous sollicitent pour obtenir un duplicata
de facture. Nous avons donc amélioré le chatbot pour qu’il
traitent aujourd’hui 50 000 conversations par mois, et ont
conduit à une réduction du temps de traitement moyen par
requête de cinq minutes (et réalisé en toute autonomie).
« L’application à la relation client de l’automatisation, de
l’IA et désormais du conversationnel ouvre de nombreuses
Les chatbots d’EDF traitent
aujourd’hui 50 000 conversations
par mois, et ont conduit à une
réduction du temps de traitement
moyen par requête de cinq minutes.
82 PARTIE 2 Talents & Culture
PARTIE 2
Talents & Culture
83PARTIE 2 Talents & Culture
84 PARTIE 2 Talents & Culture
Fabienne Chol
Conseil régional d’Île-de-France
Depuis 2016 / Directrice Générale Adjointe en charge des
Ressources Humaines, Conseil régional d’Île-de-France
2012-2015 / Directrice Générale de l’INC (Institut National
de la Consommation), 60 Millions de Consommateurs
2007-2012 / Collaboratrice de cabinet ministériel
2003-2007 / Responsable de service au sein d’une structure
associative
1991-2003 / Plusieurs postes dans le secteur privé
(édition puis export)
Fabienne Chol est juriste de formation (King’s College
Londres et Sorbonne).
BIO
85PARTIE 2 Talents & Culture
Pour faire bouger les lignes, Fabienne Chol a une
méthode : transformer les contraintes externes en leviers
de transformation. À la tête des Ressources Humaines du
Conseil régional d’Île-de-France depuis 2016, ses services
mènent une transformation immobilière, managériale
et digitale. « Nous voulons être une administration
stratège, qui constate les transformations de la société,
Chol. Notre déménagement en 2018 et ses conséquences
en termes de collaboration et d’agilité nous ont permis de
Ce transfert était en effet
hautement symbolique : en
regroupant les 1 800 agents de
unique à Saint-Ouen, le projet
n’a au départ pas déchaîné
l’enthousiasme. Pourtant à la
clé, une économie de 9 millions
d’euros par an mais aussi une
nouvelle façon de travailler, moins
silotée, et un ancrage fort dans le territoire.
La réorganisation liée à ce déménagement a produit
des effets en cascade. Elle a permis d’équiper 100% des
équipes en ordinateurs portables ; cet équipement a rendu
possible le télétravail, mis en place au cours de l’année
2017. Résultat, début 2020, 80% des équipes éligibles
pratiquaient le télétravail jusqu’à deux jours par semaine.
« Après une première expérience lors des grèves de 2019,
nous avons basculé à 100% en télétravail en 48 heures
numérisation des dossiers RH des agents s’est avérée
d’autant plus essentielle. 12 000 dossiers avaient été
numérisés en dix-huit mois et la signature électronique avait
été mise en place à la suite.
Sur le terrain, dans les 465 lycées franciliens, les 8 500
agents sont dans un contexte totalement différent. Depuis
le transfert de la compétence
des lycées à la région en
2004, ces agents chargés de la
maintenance, de la propreté,
de l’accueil et de la restauration
avaient du mal à se situer avec
une double hiérarchie Région /
Une concertation a été engagée
en 2016 pour renforcer le lien
avec ces personnels. La mobilité
interne a été encouragée.
Symboliquement, les agents ont reçu des vêtements
professionnels aux couleurs de la région, et sont désormais
présentés aux équipes éducatives à chaque rentrée.
Leur matériel d’entretien a été renouvelé et est désormais
ergonomique (45% des effectifs ont une restriction
médicale du fait de leur travail). « L’équipement des équipes
La tablette, support d’acculturation digitale pour les agents de terrain franciliens
« Nous voulons être
une administration stratège,
qui constate les transformations
de la société, les accompagne
et même les anticipe. »
86 PARTIE 2 Talents & Culture
Pour Fabienne Chol, il est important de capitaliser sur
toutes les transformations managériales récentes. Le
télétravail reste à deux jours par semaine (plus des jours
Pour s’adapter à la nouvelle donne du travail hybride,
les modalités de réunions sont revues. « En télétravail,
on avait une unité de lieu, tout le monde était devant
son écran. En hybride, ce n’est pas la même chose. Une
réunion d’idéation ne peut pas se faire en hybride, alors
qu’une réunion d’arbitrage peut être hybride sous certaines
dégager des îlots d’agilité.
Concrètement, jusqu’à 40% de la surface au sol pourra être
libérée pour accueillir des associations, des startups, des
laboratoires d’université, etc., dans l’objectif de croiser les
énergies du territoire à l’expertise des agents de la Région.
« Le bureau du 21ème siècle est un lieu d’échanges et
curiosité et de la surprise, souligne Fabienne Chol. La
dimension apprenante est importante pour nous. Chaque
agent doit pouvoir prendre conscience de sa propre valeur
et la développer. Avec le concours d’un coach, nous les
encourageons d’ailleurs à prendre la parole pour partager
secteur public ?
Fabienne Chol.
Et depuis septembre 2020, les agents sont en plus équipés
de tablettes. « Nous voulons lutter contre la fracture
numérique parmi cette population, explique Fabienne Chol.
C’est un enjeu de gestion prévisionnelle des compétences,
car les techniques de nettoyage se numérisent, mais aussi
un enjeu de responsabilité sociale : 25% des agents partent
à la retraite sous cinq ans et ils auront besoin d’un socle
et des professeurs porté par la Région, l’opportunité
d’investir pour doter les agents a immédiatement été saisie.
La tablette est équipée d’une application spécialement
dédiée. Développée à la suite d’un hackathon RH, cette
application a été testée et lancée en interne en six mois,
pour le quart du coût du marché. Elle utilise un langage
vous RH et une rubrique d’échange, « les agents parlent aux
vers les outils communs de l’organisation comme l’intranet.
La présence de Teams dans la tablette a fait naître des
usages imprévus comme la messagerie audio entre
collègues, ce qui démontre aussi la capacité des équipes
à s’approprier l’outil et en multiplier les usages.
Prochaine étape : des applications métiers, comme la
gestion des stocks pour l’entretien ou la restauration, sont
en cours de développement. Une application dédiée au
ménage est en test, pour gérer les plannings, partager
l’information sur l’occupation des salles, les incidents, etc. -
des données factuelles habituellement inaccessibles
au siège.
« La tablette est équipée d’une
application spécialement dédiée,
développée à la suite d’un
hackathon RH. »
87PARTIE 2 Talents & Culture
Les locaux du
Conseil régional d’Ile-de-France
à Saint-Ouen
88 PARTIE 2 Talents & Culture
de services à l’entreprise à impact
Laurence Lelouvier
Groupe Onet
Depuis janvier 2020 / Directrice des Ressources Humaines
et RSE, Groupe Onet
2003-2020 / Successivement Directrice des Ressources
Humaines et Communication, Directrice Générale Adjointe
et membre du Directoire, Armatis
2001-2003 / Directrice des Ressources Humaines et
Communication, Convergys
2000-2001 / Création de la fonction DRH, Moria, Inc
1998-2000 / Responsable Emploi et Formation, Convergys
Laurence Lelouvier est titulaire d’une licence en Droit
Public, d’une maîtrise de Philosophie, d’un DESS de
Management et Développement des RH et d’un MBA de
l’ESCP. Certifiée administratrice indépendante (ESSEC).
Né à Marseille en 1860, Onet offre un bel exemple
d’entreprise familiale à succès qui totalise 75 000 salariés
et plus de 80 expertises dans les services aux entreprises :
la propreté, mais aussi la sécurité humaine et électronique,
la logistique, la maintenance et l’ingénierie en milieu
nucléaire.
La responsabilité d’entreprise a toujours été importante
pour le groupe, avec la création en 2010 de la Fondation
Onet pour lutter contre le mal-logement, et l’intégration
précoce de produits d’entretien bio dans les processus de
nettoyage.
a décidé de faire de l’impact positif l’un des piliers
de son plan stratégique Élan 20-23. Présenté aux
équipes en novembre 2020, il va plus loin que la RSE :
« L’environnement, c’est aussi l’environnement social
et collectif que l’on veut proposer aux collaborateurs.
(démarches administratives, par exemple) ; nous
voulons les aider à être les plus autonomes possibles.
qu’est notre métier, de l’aborder différemment de la
concurrence, en portant l’attention sur le cercle formé par
Laurence Lelouvier.
de traduire en actes ce saut qualitatif. « Le champ est très
large, en termes de compétences et d’activité, et cela peut
Pour cela, des groupes de travail ont été organisés avec
BIO
89PARTIE 2 Talents & Culture
est contributive à une entreprise à impact, estime Laurence
En deuxième lieu, Onet a élargi sa politique d’inclusion,
avec la création de référents inclusion dans l’entreprise :
« Il s’agit de faire vivre le collectif dans la diversité de
un enjeu fort avec la refonte de l’Université Onet
présent, elle formait des managers de premier et second
niveau, et va progressivement s’ouvrir à tous, quel que soit
le niveau d’éducation, avec des cours d’alphabétisation
et de sensibilisation au numérique pour développer
l’employabilité des collaborateurs.
mesurable, Onet travaille à une méthodologie d’évaluation
de son impact, en collaboration avec un chercheur de
permette de mesurer une progression à travers quelques
indicateurs clés - progression qui pourra être prise en
compte dans le calcul des primes. Elle permettra également
de prouver les performances environnementales et sociales
du groupe lors d’appels d’offres, un critère qui pèse de plus
en plus dans la décision des clients.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le turnover
est peu élevé dans l’entreprise, de l’ordre de 3-4%. Il faut
dire qu’Onet offre une forte proportion de CDI par rapport
aux standards du secteur. Pour leur permettre de tendre le
plus possible vers un temps plein, le groupe met en place
une plateforme qui rapproche la localisation des sites-client
et l’adresse et les créneaux de disponibilité du personnel
œuvrant. Des parcours de carrière commencent également
à se dessiner. Côté SIRH, de nouveaux outils sont mis en
place pour donner accès à un maximum d’informations
personnelles et pédagogiques, en libre-service.
avec par exemple des critères environnementaux dans le
Durant la période Covid, les personnels se sont trouvés
dans des situations contrastées, en chômage partiel dans le
secteur aéroportuaire, ou en première ligne dans le secteur
hospitalier. Des innovations ont été pensées et mises en
encore plus de poids à cet engagement vers l’entreprise à
« Toute action est contributive
à une entreprise à impact.
Évaluer cet impact doit devenir
un réflexe chez les managers. »
90 PARTIE 2 Talents & Culture
Chez EDF, les comptables deviennent des « robot farmers »
Elina Badetz
EDF
Depuis 2019 / Directrice des Services Tertiaires, EDF
2015-2019 / Directrice du Centre de Services Partagés
Compatibilité, EDF
2006-2015 / Successivement Analyste Senior Régule France,
Auditeur Senior Corporate, Directeur Financier Adjoint
Investissements puis Chef de projet Contrôle de gestion
opérationnelle, EDF
2002-2006 / Contrôleur de gestion, ERDF
1995-1998 / Chef d’agence Clientèle, ERDF
Elina Badetz est titulaire d’un master en droit de
l’Université de Reims et diplômée de NEOMA.
BIO
direction compte 2 000 collaborateurs en charge de la
la formation, des archives, du parc automobile et de la
facturation des Services avec obligation d’achat (pour
produite par les clients). Les volumes sont massifs :
performance opérationnelle de cet ensemble et réaliser des
marche : en deux ans, le coût de gestion des bulletins de
paie a baissé de 11% et celui des factures de 7%.
« Le modèle de performance est simple : on mutualise les
l’autonomie et la responsabilisation des équipes, déclare
Ces équipes, ce sont principalement des agents de
mobilité interne. Âge moyen : 47 ans, plutôt des femmes.
Selon les préjugés classiques, pas le portrait-robot du
parfait geek en entreprise. Et pourtant : poussée par un
management qui intègre au quotidien la conduite du
changement, la digitalisation est véritablement portée par
les équipes. Ce sont bien elles qui détectent des irritants,
proposent des solutions d’automatisation et les mettent en
place, en collaboration avec la DSI.
Et avec le télétravail, cette dimension humaine et
apprenante a été encore plus fondamentale.
« Nous avons connu trois phases dans la période Covid,
91PARTIE 2 Talents & Culture
en contact. La deuxième a été très vite la continuité du
clôture comptable à domicile ! Et nous avons mené des
actions exceptionnelles comme le paiement accéléré des
factures des fournisseurs TPE-PME. Nous avons pu le
faire parce que nos équipes étaient déjà engagées dans
une démarche de responsabilisation et de suivi de la
avions mis en place, nous avons pu arbitrer les priorités.
La troisième phase est celle des opportunités que la
Dans ce domaine, trois grands
sujets déjà engagés ont
fortement accéléré pendant la
crise sanitaire :
1. La dématérialisation
des documents : avec le
ont proposé systématiquement
à tous les fournisseurs de
passer à la facture numérique.
Aujourd’hui 80% des factures
fournisseurs et 87% des factures
sur les obligations d’achat
sont dématérialisées. Les
nouveaux contrats passent progressivement en signature
électronique.
2. L’automatisation : « Nous avons presque industrialisé les
récents d’automatisation : la lecture des documents
Temps, les rapprochements de compte et les contrôles
L’IA est également arrivée à la demande des salariés :
AGATE permet de répondre aux mails fournisseurs
proposition de mail, que le comptable n’a plus qu’à valider.
(doubles règlements, avoirs) qui vont éviter le contrôle
a posteriori.
Certaines équipes se donnent des objectifs de réduction
des gestes manuels, pour se concentrer sur leur cœur
de métier : l’analyse. « Nos comptables deviennent des
analystes de processus, des robots farmers et des analystes
3. Les outils collaboratifs :
Teams était déjà en place
avant la crise sanitaire, et
les revues de performance
matinales intégraient déjà des
collaborateurs en télétravail.
L’usage a été approfondi, et
pour dynamiser les réunions,
Klaxoon est également devenu
un outil du quotidien. Le
nombre de réunions a été
rationalisé.
Alors après la crise, comment aller encore plus loin ? « Avant
tout par un management toujours plus humain, avec des
Les managers ont su être créatifs et authentiques durant
Une nouvelle page s’ouvre avec la mise en place
d’une organisation hybride. « Un accord EDF global est
« Le modèle de performance est
simple : on mutualise les activités,
puis on les standardise et enfin
on les optimise, avec le digital
mais surtout grâce à un travail
managérial sur l’autonomie et la
responsabilisation des équipes. »
92 PARTIE 2 Talents & Culture
en cours mais on continue d’expérimenter sur le terrain
pour allier performance opérationnelle et bien-être de
l’équipe. Il ne faut pas à nouveau imposer des choses,
analyse-t-elle. Les managers doivent avoir leur propre
projet d’équipe concernant le travail hybride. Si chacun
sait individuellement la performance qu’il doit apporter au
La question principale est la suivante : comment, pourquoi
aura-t-on besoin de revenir au bureau ? Quels seront
les moments forts en collectif ? « On aura probablement
besoin d’être sur site pour accompagner les nouveaux
arrivants, pour les clôtures comptables, ou lorsque l’on doit
collaborateurs : « Il y a eu beaucoup de réorganisations, des
transformation, mais si ça marche, c’est parce qu’ils en sont
acteurs.
convaincue que l’on peut entrer dans le futur de manière
volontariste tout en créant quelque chose de beau et
de fort pour les salariés. Pour sortir de la crise, chassons
l’absurde et cultivons l’incroyable ! Il y a tant de choses à
« La question principale
est la suivante : comment,
pourquoi aura-t-on besoin
de revenir au bureau ?
Quels seront les moments
forts en collectif ? »
93PARTIE 2 Talents & Culture
En chiffres...Talents & Culture
Sources : voir page 210
PERFORMANTES SE DÉMARQUENT
83%
des entreprises les plus
performantes déclarent disposer
d’une réserve importante
de futurs dirigeants,
contre moins de 30%
des autres entreprises.
77%
des entreprises les plus
performantes favorisent la
transparence par un dialogue
ouvert avec le personnel,
alors que seulement
23% de leurs pairs le font.
90%
des entreprises les plus
performantes favorisent la
création d’un sentiment d’utilité
en responsabilisant leurs équipes,
alors que seulement
23% de leurs pairs le font.
94 PARTIE 2 Talents & Culture
Comment BNP Paribas cultive en interne ses futurs experts cybersécurité
Dominique Dufresne
BNP Paribas
Depuis 2017 / �Head of Cyberdefense, BNP Paribas
2015-2017 / �Global Head of Global Markets IT Client
& Sales Facing (eCommerce), BNP Paribas
2001-2015 / �Diverses fonctions, jusqu’à celles de Global
Head of GECD IT eSolutions (eTrading & eCommerce),
BNP Paribas Arbitrage
1999-2001 / �Project manager, HP
Dominique Dufresne est diplômé de l’Université de
Technologie de Compiègne.
BIO
interroge Dominique Dufresne, adjoint au RSSI du Groupe
BNP Paribas, sur sa priorité de l’année, il répond sans
Les enjeux de cybersécurité ont pris une place croissante
durant la crise sanitaire. Avec le télétravail notamment,
les risques liés à la sécurité des personnes, des lieux, des
systèmes d’information et de la production ont convergé,
avec pour objectif la protection physique et cyber des
collaborateurs.
Au-delà de la crise, l’accroissement des risques liés à
la cybersécurité est structurel et BNP Paribas a engagé
une vaste transformation dans ce domaine, en associant
parcours utilisateur zero trust
contextualisées selon le sujet et le périphérique). Pour
mener ce déploiement et piloter le risque, les besoins
humains sont immenses.
Plus de 2 000 collaborateurs du Groupe travaillent sur la
des métiers. Il faut en effet s’adapter aux environnements
réglementaires nationaux et à l’historique des fusions et
acquisitions. Le besoin de recrutement est d’environ
200 spécialistes par an. « Il y a un rapport de 1 à 10 entre le
nombre de jeunes diplômés en cybersécurité et les besoins
des talents externes mais aussi internes.
95PARTIE 2 Talents & Culture
une initiative cross-entités pour construire un vrai
parcours de carrière dans la cybersécurité : détection de
compétences, cohérence de la grille salariale, opportunités
de mobilité, parcours de formation, etc. Tout est fait pour
donner envie de rester dans le Groupe. Des formations
en Leadership Cyber, réalisées en partenariat avec IBM,
sont également à l’essai. L’enjeu est aussi pour le secteur
souvent attirés par les GAFAM.
« BNP Paribas considère ces investissements comme
étant essentiels. En effet, les dépenses de formation
sont largement rentabilisées si nous les comparons aux
La cybersécurité devient un métier bancaire core business.
Une banque doit offrir une sécurité totale des opérations,
une opportunité. En effet, parmi les clients qui veulent
recevoir des conseils de leur banque, 55% souhaitent
en premier lieu des conseils en matière de sécurité des
données personnelles(1). Un nouvel axe de service premium
pour BNP Paribas ?
Pour répondre à cet enjeu, elle a travaillé sur trois axes
principaux :
1. L’initiative Cyberculture : elle vise à sensibiliser à
la cybersécurité tous les collaborateurs du Groupe, à
travers la production de contenus de découverte ou de
formation. Disponibles parfois en près de 30 langues,
ces contenus se déclinent sous forme de vidéos, de
séries au caractère décalé, de serious games, etc. Ils sont
régulièrement renouvelés, en particulier en octobre, mois
l’initiative européenne.
2. La formation d’experts via la CyberAcadémie :
celle-ci est ouverte aux collaborateurs Groupe et propose
quatre mois de cours suivis de six mois de stage pratique.
Elle offre aux participants la possibilité de se réorienter
vers des fonctions de Responsables IT/cyber ou de chefs
de projets cybersécurité. Le programme a été conçu par
BNP Paribas en collaboration avec deux grandes écoles
opportunité, soit environ 60 personnes. Ces dernières
ont trouvé directement un poste au sein d’une équipe
de former des personnes qui nous quittent rapidement sur
une sollicitation extérieure, cela n’a pas été le cas. Sur trois
promotions, nous avons eu 100% de réussite à la formation
divers et parfois loin de l’image de l’ingénieur.
La rétention des talents : pour répondre à ce
dernier enjeu, la direction IS a lancé la Filière IT Cyber,
« Il y a un rapport de 1 à 10
entre le nombre de jeunes
diplômés en cybersécurité et les
besoins du marché en France. »
(1)
96 PARTIE 2 Talents & Culture
« En matière de transformation, l’humain passe avant la tech »
Guillaume Planet
Groupe SEB
Depuis 2014 / VP Media & Digital Marketing, Groupe SEB
2010-2014 / Associate Director, Dentsu Aegis Network
2009-2010 / International Network Director, Fullsix
2007-2009 / Group Account Director, Havas Digital
1999-2004 / Account Manager, Dentsu Aegis Network
Guillaume Planet est diplômé de l’Université de Toulouse 1,
de la Toulouse Business School et titulaire d’un MBA
de l’IE Business School.
BIO
Le séisme sociétal et digital de cette dernière année n’a
rien d’une surprise pour le Groupe SEB qui le pressent et
le prépare depuis dix ans. Et pour Guillaume Planet, VP
Media & Digital Marketing, l’avance prise sur ces sujets
reste avant tout un succès humain plus que technologique.
Explications.
En quelques mots, pouvez-vous nous rappeler quels
ont été les enjeux de transformation dans votre secteur
sur la dernière décennie ?
Nous avons d’abord dû répondre aux besoins d’un
consommateur qui s’est profondément digitalisé dans
ses parcours d’achat, la part de e-commerce pesant
aujourd’hui plus d’un tiers dans nos ventes globales. Le
cercle de nos concurrents a aussi beaucoup évolué, de par
la digitalisation de concurrents historiques, mais aussi en
raison de l’émergence de petits acteurs pouvant désormais
leaders, issus de catégories connexes, se sont également
lancés sur nos segments, à l’instar du chinois Xiaomi,
initialement spécialisé dans l’électronique et l’informatique.
partenaires distributeurs comme les GAFA et les BATX,
Alibaba le deuxième. Nous avons dû faire évoluer nos
modèles pour répondre à tous ces nouveaux enjeux.
Qu’est-ce que cette transformation digitale a pu
changer ?
Elle a très probablement apporté une proximité plus forte
avec notre consommateur, et c’est d’autant plus important
que notre modèle industriel créé en 1857 ne nous portait
pas naturellement sur ces logiques. Nous avions déjà
opéré un virage de l’industrie au marketing produit, et le
97PARTIE 2 Talents & Culture
des tool boxes et playbooks les plus concrets possibles.
Ce programme d’acculturation à marche forcée a
concerné toutes les strates de l’entreprise, y compris
le top management et les membres du COMEX. Sans
leur implication totale, pas de transformation possible.
Des objectifs concrets de transformation ont également
été intégrés dans les évaluations de toutes les équipes
marketing et commerce, avec une conséquence directe
sur la variation de leur bonus.
En parallèle, bien sûr, nous
avons rapidement pourvu nos
besoins en nouveaux métiers, en
collaboration avec les RH.
Comment mesurez-vous
les avancées de cette
transformation ?
Pour vous donner un exemple
sur le chantier CRM que
nous traitons actuellement,
nous confrontons deux types
d’indicateurs. Nous portons
indice simple qui est la capacité
du groupe à collecter de la data pour pouvoir engager
ses consommateurs et générer des ventes en propre.
En parallèle, nous évaluons également le niveau concret
d’avancement des feuilles de route et le nombre de
nouveaux use cases déployés par marché.
Quels enseignements peut-on tirer aujourd’hui de ces
sept ans d’acculturation ?
Nous avons eu la chance de pouvoir compter sur
une appétence à la digitalisation qui a été précieuse.
virage du produit au client nous offre encore de nouvelles
opportunités. D’abord la création de valeur par cette
connexion directe qui nourrit toute la chaîne marketing, en
nous permettant de mieux accompagner nos clients dans
propulser au rang d’ambassadeurs. Nous avons en effet la
conviction très forte que leurs recommandations et leurs
contenus ont plus d’impact que les nôtres. En même temps,
cette nouvelle relation enrichit
une base de données alors
même que nous avons toujours
été historiquement pauvres sur
ces sujets, et contribue donc à
nos clients.
Pourquoi avez-vous souhaité
voir figurer votre témoignage
dans le chapitre Talents &
Culture, traditionnellement
réservé aux fonctions RH ?
Parce qu’en matière de
transformation, l’humain passe
avant la tech. Et notre propre
transformation n’aurait pu être réalisée sans un appui
sur toutes les ressources de l’entreprise, celles qui nous
2014, nous avons lancé notre feuille de route, nous avons
souhaité placer l’humain au cœur de ces changements.
Au-delà du vaste chantier technique porté par notre
DSI, nous avons donc implémenté une stratégie
d’accompagnement et de formation pour aider chacun
des 40 marchés à prendre de l’autonomie sur les nouveaux
environnements digitaux et sociaux, avec notamment
« Nous avons eu la chance
de pouvoir compter sur une
appétence à la digitalisation
qui a été précieuse.
Le choc culturel a néanmoins
eu lieu, faisant de la pédagogie,
de la vulgarisation
et de l’évangélisation
des points stratégiques. »
98 PARTIE 2 Talents & Culture
Le choc culturel a néanmoins eu lieu, faisant de la
pédagogie, de la vulgarisation et de l’évangélisation des
points stratégiques de réussite. Il a également fallu rassurer.
La réelle synergie entre les trois parties prenantes que sont
la DSI, les RH et la direction du marketing digital a été clé.
politique du pas-à-pas prévaut pour garantir une parfaite
compréhension et intégration des enjeux, d’abord assimilés
sur des périmètres restreints. Nous avons par exemple
d’abord concentré nos efforts sur tout le champ CRM,
qu’on nourrit par marque et par au fur et à mesure.
Au-delà de l’acculturation, implémentez-vous de
nouvelles méthodes de travail propres au digital ?
Nous avons déjà depuis cinq ans cassé les silos au sein des
avec les équipes techniques. Dans ma direction par
de faire le pont entre nos départements et les services
informatiques. Sur les méthodes dites agiles, nous les
et de dynamiser le développement de certains projets.
Mais nous devons rester vigilants car elles peuvent aussi
rapidement diluer les visions stratégiques. Le véritable
enjeu actuel reste d’être capable de coordonner le temps
long avec le temps court. Rester clair sur les objectifs, tout
en utilisant ces méthodes sur des chantiers opérationnels,
« Nous utilisons les méthodes
dites agiles avec discernement.
Elles ont le mérite de fluidifier et
de dynamiser le développement
de certains projets. Mais nous
devons rester vigilants car elles
peuvent aussi rapidement diluer
les visions stratégiques. »
99PARTIE 2 Talents & Culture
En chiffres...Talents & Culture
Sources : voir page 210
ENCORE DES ÉCARTS DE PERCEPTION
74%
des dirigeants pensent
qu’ils ont aidé leurs employés
à acquérir les compétences
nécessaires pour travailler
d’une manière nouvelle.
Mais seuls 38% des employés
sont de cet avis.
80%
qu’ils soutiennent la santé
physique et émotionnelle
de leur personnel.
Seuls 46% des employés disent
ressentir ce soutien.
86%
des employeurs estiment
que leur organisation fournit
des lignes directrices et des
attentes claires quant à
son mode de fonctionnement.
51% des employés
partagent cet avis.
100 PARTIE 2 Talents & Culture
Le programme Jobs in Motion, pour des talents « faits maison »
Cristel Guillain
Natixis
Depuis 2020 / Head of Transformation & Talent - HR
Division, Natixis
2016-2020 / Head of HR - Technology & Operations
Division, Natixis
2014-2016 / Head of Mobility & Recruitment - HR Division,
Natixis
2012-2014 / Project Leader Operational Efficiency, Natixis
2008-2012 / Head of Carbon Funds Structuring &
Origination, NEI
2003-2008 / Head of Structured Trade & Export Finance
Asia, Natixis
1996-2002 / Product Devlopment Director - International
Division, Banco Santander
Titulaire d’un Magistère d’économie et finance
internationale de l’Université de Bordeaux, Cristel Guillain
est également membre du conseil d’administration de
Fransabank France.
BIO
cultures RH, il sera possible à tout collaborateur motivé de
devenir Data Project Manager ? Pas pour l’établissement
au déploiement de son programme Jobs in Motion.
Lancé en septembre 2020, ce projet stratégique veut
aider les collaborateurs à devenir pleinement acteurs
des transformations de l’entreprise et de leur avenir
professionnel.
Cristel Guillain, Head of Transformation & Talents et
directrice du programme, le résume parfaitement : « Les
souhaitons les opérer en nous appuyant en priorité sur nos
ressources internes, nos collaborateurs, que nous formons
pour cela aux nouveaux métiers. Nous avons besoin de
nouvelles compétences, mais nous avons aussi des talents
et préférons capitaliser sur eux plutôt que d’aller les
offrant également l’avantage de la rapidité des réponses
sur certains besoins ainsi que le gain de temps sur la
compréhension de la culture de l’entreprise.
La volonté, ambitieuse, repose sur trois piliers. En
premier lieu, pour que la posture se traduise en actes de
manière immédiate, la mobilité interne a été priorisée
responsabilités des managers. Le deuxième volet repose
sur le Strategic Workforce Planning, une nouvelle
méthodologie de pilotage des compétences capable, à
partir des informations sur la stratégie de chaque business
unit, d’apporter une vision claire sur les besoins imminents
et à plus long terme, et donc sur la façon d’acquérir
ces compétences (parcours de formation à amorcer,
recrutements ou mobilités à prévoir, etc.). Le troisième pilier
101PARTIE 2 Talents & Culture
BPCE ayant créé sa propre école de formation
la Step Up Academy. Son objectif : proposer des
reconversions individuelles, mais aussi créer des
promotions sur des nouveaux métiers dont l’entreprise
a besoin, en s’appuyant sur les meilleurs experts du
développeurs, dont 50% de femmes, formés en alternance
mars dernier.
Autre exemple, celui des métiers de la data, pour lesquels
Un partenariat avec Quantmetry a donc permis la création
de quatre parcours différents, pour former des data
engineers, mais aussi des data owners, data managers et
data analysts. D’autres outils seront mis progressivement à
disposition des collaborateurs, notamment une application,
véritable assistant virtuel de carrière, capable de faire des
rapprochements entre envie de progression, compétences
et postes disponibles.
Le changement que sous-tend le déploiement de ce vaste
programme est évidemment porté par une action concrète
de conduite au changement, car Cristel Guillain le rappelle :
« Tous les collaborateurs, y compris les RH, voient leur
métier et leurs compétences évoluer et doivent intégrer
rapidement un changement de vision et de posture, même
si les premiers résultats de la Step Up Academy les aident
beaucoup, en montrant que tout collaborateur motivé peut
«�Les défis du monde bancaire
sont nombreux et lourds.
Nous souhaitons les opérer en
nous appuyant en priorité sur
nos ressources internes, nos
collaborateurs, que nous formons
pour cela aux nouveaux métiers. »
102 PARTIE 2 Talents & Culture
41%des PDG
nécessaires pour mener à bien leur stratégie en matière
de ressources humaines.
74%des entreprisesles plus performantes
utilisent des analyses avancées pour savoir exactement
quelles sont les compétences dont elles disposent
au sein de la main-d’œuvre,
contre 13% des autres entreprises.
Pour les entreprises les plus performantes,
70%des compétences essentielles à trois ans
de leur industrie.
41%des entreprises les plus performantes
dont elles auront besoin à l’avenir,
contre 8% des autres entreprises.
En chiffres...Talents & Culture
Sources : voir page 210
103PARTIE 2 Talents & Culture
Le journal Le Parisien opère sa mue digitale
Aymeric Vincent
Groupe Les Échos - Le Parisien
Depuis 2018 / Directeur de la transformation et de
l’innovation RH, Groupe Les Échos - Le Parisien
2006-2018 / Directeur des ressources humaines adjoint
puis Directeur des Talents et du Développement des
Ressources Humaines, Groupe Editis
1999 - 2006 / Responsable Emploi Mobilité et
Communication Interne, Groupe Moniteur
Aymeric Vincent est diplômé des Universités de droit de
Paris II Panthéon Assas et de Paris Nanterre.
BIO
Les mythes eux-mêmes se réinventent parfois pour
pérenniser leur histoire. Tel est le cas du Parisien, quotidien
né quelques jours avant la libération de Paris en 1944
et qui voit, 70 ans plus tard, son modèle transformé à
l’aune du digital. « Les ventes du papier ne portaient plus
Vincent, directeur de la transformation et de l’innovation RH
Un projet de transformation numérique piloté par la
direction du journal, basé sur un nouveau projet éditorial
avec des changements profonds d’organisation, de
processus et d’outils, a donc vu le jour avec une ambition
forte : atteindre 200 000 abonnés numériques en cinq ans.
La personnalisation de l’offre media en est l’un des piliers,
permettant de combattre la culture du gratuit en digital
pour proposer un contenu à forte valeur. Vaste chantier
refondateur s’il en est, que le groupe LVMH, propriétaire
du titre depuis 2015, avait déjà su mener avec succès
changement uniquement par l’aspect technologique,
pratique encore trop souvent répétée dans les processus
de transformation digitale. Nous avons fait l’inverse en
nous préoccupant d’abord du fond et du contenu, l’outil ne
Première priorité, donc, celle du travail sur le changement
du modèle éditorial, pour répondre aux usages web et aux
nouveaux comportements des audiences. La démarche
a été accompagnée par la création de nouveaux services
pour produire des contenus premium et engager des
audiences ciblées.
Après l’adoption du projet éditorial par les journalistes, il a
fallu mettre en œuvre une réorganisation de la
qui a déclenché un vaste avec une centaine
de mobilités internes et des plans de formation pour
104 PARTIE 2 Talents & Culture
accompagner le changement tant sur la compréhension
des cultures numériques et de leurs nouvelles audiences,
que sur les nouvelles formes d’écritures. Le programme
n’a pas hésité à puiser dans d’autres cultures inspirantes,
à l’image par exemple de ce script doctor spécialisé dans
la détection des séries à succès, venu partager sa vision
sur les meilleures techniques de propres à ce
genre.
La direction des ressources humaines a été un partenaire
essentiel pour accompagner la réorganisation, avec plus
de 150 entretiens individuels menés ainsi qu’une attention
toute particulière au respect de la parité dans les différentes
fonctions. « Les membres de la rédaction y ont très bien
répondu, émettant des souhaits pour intégrer des nouvelles
rubriques ou des nouveaux postes. Ce mouvement de fond
Aymeric Vincent. Il a également fallu former 350 journalistes
au nouvel outil de publication Arc Publishing, créé par le
Washington Post, ce qui a nécessité pas moins de 1 600
heures de formation.
Alors que le interne et la formation s’achèvent à
peine, les nouveaux contenus sur le numérique et produits
digitaux portent déjà leurs fruits. Une transformation qui
s’est opérée rapidement, lorsque que l’on sait que ce travail
de fond a été effectué en parallèle de l’activité intense du
titre liée à son statut de quotidien.
«�Première priorité,
celle du travail sur le
changement du modèle
éditorial, pour répondre
aux usages web et aux
nouveaux comportements
des audiences. »
105PARTIE 2 Talents & Culture
ING invente son onboarding distanciel pour partager sa culture
Émeline Bourgoin
ING
Depuis 2018 / Head of HR, ING
2016-2018 / Directrice des Ressources Humaines, de la
communication et de la responsabilité sociale, Axa Group
Solutions
2011-2015 / DRH, Dailymotion
2008-2011 / RH Manager, Canal+
2007-2008 / DRH, Timberland
2006-2007 / DRH, Electronic Arts France & Benelux
2003-2006 / Responsable recrutement puis responsable RH,
Cegelec
1999-2002 / HR coordinator, Alti
Émeline Bourgoin est diplômée de l’ESC Bordeaux (KEDGE).
BIO
Pionnier de la néo-banque il y a 20 ans, ING se distingue
par sa culture et ses pratiques atypiques dans le secteur
bancaire. L’organigramme n’y dépasse pas cinq échelons,
l’Orange Code, un manifeste autour de valeurs comme
l’honnêteté, la prudence et la responsabilité.
Ce n’est pas parce qu’on est en avance qu’on ne doit pas
continuer à se réinventer. Si 100% de l’expérience client
est digitale, ce n’était pas encore totalement le cas côté
collaborateur. En 2017, Workday a été implémenté pour
la gestion du personnel, de la performance et des talents.
« L’année 2020 a été un déclencheur d’innovation dans nos
modes de travail, explique-t-elle. Depuis deux ans, nous
avons mis en place des méthodes agiles. Les équipes de
la banque de détail sont organisées en squads, les métiers
tech et marketing travaillent côte à côte, etc. Mais par
nature cette organisation demande une présence autour
Comment dès lors adapter l’organisation, alors qu’en sept
jours on est passés de 50% à 97% de travail à distance ?
À court terme, il a fallu équiper les conseillers de clientèle
en matériel portable sécurisé, et la vigilance a été de mise
sur les risques psychosociaux. Parmi les bonnes pratiques :
l’organisation de réunions de libre parole, l’interdiction
des réunions avant 9h, à l’heure du déjeuner et après 18h,
cinq minutes de battement obligatoire entre deux réunions
coachs agiles ont été formés pour pouvoir animer cette
a été accéléré et les managers formés à son utilisation. Pour
utilisé.
106 PARTIE 2 Talents & Culture
Côté recrutement, la digitalisation du processus s’est
accélérée. « Le distanciel offre plusieurs avantages,
entretien, car la disponibilité est meilleure, d’autre part on
a moins d’abandon en cours de route, malgré un processus
recrutement nécessite un test et trois entretiens, mais
cela peut aller jusqu’à 6-7 entretiens pour un poste de
direction. Ce processus est là aussi révélateur de la culture
d’entreprise : le postulant va être reçu par son futur
manager mais aussi deux autres membres du CODIR,
pour avoir plusieurs avis indépendants des hard skills. La
diversité est importante, avec systématiquement un homme
et une femme intervenant dans l’évaluation du candidat.
Pendant cette période de télétravail, plus de
100 recrutements ont été réalisés, 54 onboardings
(intégrations) ont été réalisés en 100% digital en 2020,
et environ 80 collaborateurs prévus en 2021.
« Une expérience collaborateur réussie commence bien
Le turnover à moins d’un an d’ancienneté était un peu
élevé (autour de 8-9% il y a un an, 3,8% aujourd’hui) et l’on
sait que les tout premiers jours sont essentiels pour une
bonne intégration.
Pour créer du lien auprès des nouveaux embauchés,
pratiques de l’onboarding, l’outil Enboarder a été mis en
place, et soigneusement scénarisé.
La validation de l’embauche dans Workday déclenche un
scénario automatisé qui va gérer les interactions avec les
différents interlocuteurs : le manager, l’IT et le tuteur qui
accompagne l’arrivant dans son intégration.
se familiariser avec le langage et la culture maison
(témoignages vidéo de collaborateurs, présentation de
buddy,
qui travaille généralement dans une autre équipe et sera
disponible pour répondre à tout type de question.
Le ton est très représentatif de la culture ING et permet
de partager l’Orange Code. Le contenu est identique pour
30% de seniors).
matériel IT, le choix du buddy, etc. Les RH peuvent
opérationnel, il intègre Workday pour le suivi de son dossier.
«�La semaine de cinq jours au
bureau est clairement révolue,
on aura maximum 50% du temps
de travail au bureau, et pour être
utile, cette présence doit produire
de l’intelligence collective. »
107PARTIE 2 Talents & Culture
Lancé en mode agile, ce projet a fait l’objet d’un premier
test en juillet 2020 et a été mis en place en avril 2021. Cet
outil sera bien sûr conservé au-delà de la période 100%
distancielle.
ING prépare en effet son plan Hybrid Mode. « La semaine
de cinq jours au bureau est clairement révolue, on aura
maximum 50% du temps de travail au bureau, et pour
être utile, cette présence doit produire de l’intelligence
Les RH participent activement à cette réinvention du
travail. « Le processus d’amélioration continue doit
être dans notre ADN, estime-t-elle. Un service RH doit
à l’amélioration continue de l’expérience collaborateur et
SIRH. Si l’on n’est pas capable de mesurer simplement son
action, on ne pourra pas argumenter au même niveau que
En chiffres...Talents & Culture
Sources : voir page 210
62%
des employés souhaitent
conserver leur mode de travail actuel même
après avoir été vaccinés.
44% de ceux qui travaillent à domicile
souhaitent continuer à le faire à temps plein
même après avoir été vaccinés.
108 PARTIE 2 Talents & Culture
Groupama passe en mode collaboratif
Françoise Ly
Groupama
Depuis 2017 / Responsable Transformation Digitale
Groupe, Groupama
2016-2017 / Responsable de Projets Digitaux -
Transformation Digitale Groupe, Groupama
2007-2016 / successivement Analyste Reporting,
Méthodes, Qualité & SI, Project Manager AMO eMarketing
& eCommerce, Team Manager Solutions Mobiles, puis
Revenue Controlling Director, Air France
Françoise Ly est ingénieure, diplômée de l’École Centrale
Paris et titulaire d’un Master de recherche en Innovation
Design & Engineering.
BIO
Comment déployer le travail collaboratif à l’échelle
d’un groupe de 32 000 collaborateurs, deux marques
Groupama et Gan, au contact de près de 11,5 millions
de sociétaires et clients ? Pour Françoise Ly, Responsable
Transformation Digitale Groupe de Groupama, les outils
et le développement des usages associés jouent un rôle
important.
Dans un contexte de profond changement de l’assurance,
un plan stratégique en huit grands chantiers(1) a été lancé
nouvelles pratiques digitales des clients, une concurrence
accrue et les opportunités de gains par l’automatisation.
quotidien mais à l’occasion de moments-clés lors desquels
Depuis 2019, une nouvelle gouvernance communautaire
vise également à faire mieux collaborer entre elles les
entités et mieux répartir les rôles et responsabilités. Dans la
grande variété des activités et des métiers (marché agricole,
marché des particuliers, pros, entreprises, collectivités, etc.),
chaque caisse est désignée comme leader d’un domaine
d’expertise et en devient le référent pour tout le groupe.
Cette volonté s’incarne dans les outils : un site hub par
domaine métier rassemble tous les sujets, que chaque
leader organise dans un espace dédié.
C’est dans ce contexte qu’ont été mis en place les outils
agiles, juste avant la crise sanitaire. Concrètement, 27 des
de cette bascule, un réseau d’une centaine d’ambassadeurs
a été constitué pour diffuser les bonnes pratiques et
s’assurer de leur adoption. Et des comités métiers, ainsi que
(1)
109PARTIE 2 Talents & Culture
des comités métiers et IT, ont permis de prioriser les offres
de services en fonction des besoins terrain.
Dans cette prise en main, des règles globales ont été
(partage de documents) : nomenclature de titres des
documents, métadonnées associées, statut du document
(en cours / validé), règles d’accès, critères de mode public
et privé.
« Cette première étape d’implémentation de M365 est un
exemple réussi de rencontre entre les besoins métier et la
nous sommes beaucoup plus en contact. Des webinars ont
été organisés pour partager les usages et les rôles. Cet
empowerment est favorable au décloisonnement et au
Prochaines étapes : approfondir les usages de 365 pour
gagner en productivité, et tirer parti du temps dégagé
pour aller vers plus d’innovation, notamment automatiser
Le travail d’adoption n’est cependant pas terminé car
personne ne doit être laissé de côté. « Ce sera un processus
itératif, estime Françoise Ly. Mais l’ambassadorat sur
le terrain, le fort soutien de la Direction Générale, et la
consolidation de l’existant nous permettent d’embarquer
«�Prochaines étapes : approfondir
les usages de 365 pour gagner
en productivité, et tirer parti du
temps dégagé pour aller vers
plus d’innovation, notamment
automatiser les tâches à faible
valeur ajoutée comme par exemple
workflows, chatbotisation,
optimisation des recherches, etc. »
Ces outils seront déterminants dans la mise en place
du travail hybride. Groupama rénove aussi ses espaces
physiques pour accueillir essentiellement des projets
pluridisciplinaires. L’hybride sera différent selon les types de
métiers, et reste à inventer. L’outil y prendra sa juste part.
PARTIE 3 Data & IA110
PARTIE 3
Data & IA
111PARTIE 3 Data & IA
PARTIE 3 Data & IA112
Christophe Dufour
AstraZeneca France
Depuis 2019 / Chief Digital Officer, AstraZeneca France
2018-2019 / CTO, Doctoconsult
2002-2018 / Successivement Project Architect Team Leader,
Digital Solution Architect, Head of Business Analyse &
Architecture, Data Intelligence & Software Environment
Director, Orange
Christophe Dufour est diplômé de NEOMA Business School,
de l’Institut Mines-Telecom et du Massachussets Institute of
Technology.
BIO
113PARTIE 3 Data & IA
Les sujets les plus stratégiques ne sont pas toujours les plus
visibles. Une leçon tirée de notre entretien avec le directeur
digital d’AstraZeneca France, qui nous montre que les
chantiers d’innovation du laboratoire sont loin de se limiter
au seul vaccin. Explications.
Quel rôle pour le digital au sein d’un laboratoire
pharmaceutique ?
transverse pour répondre aux besoins data ou digitaux
de la R&D, du marketing et des directions médicales et
commerciales. Cela va de la création de solutions digitales
patients/médecins, en passant par la digitalisation des
formations médecins jusqu’aux enjeux de modernisation de
de la donnée vie réelle, c’est-à-dire l’analyse des données
patients dans nos aires thérapeutiques : Oncologie,
Cardio-vasculaire, Rénal et Métabolique, et Respiratoire et
Immunologie.
Vous avez été particulièrement exposés pendant la crise
sanitaire. Quelques mots sur cette période sous tension ?
Nous avons été très exposés ces derniers temps, mais
mon équipe a surtout été confrontée à une explosion de
la demande sur le plan digital, que ce soit pour soutenir la
continuité de notre activité commerciale mais également
pour lutter contre l’impact de la crise Covid sur la prise en
charge de patients par le système de santé. Nous avons
aussi participé à la création de la Coalition Innovation
Santé qui a réuni 54 acteurs médicaux et technologiques
pour aider les professionnels de santé à continuer à prendre
en charge leurs patients alors que le système hospitalier
était en plein engorgement. Nous nous sommes également
impliqués dans l’Alliance Digitale pour la création du site
maladiecoronavirus.fr qui a permis de réaliser plusieurs
appels au SAMU.
Quelle vocation pour cette Coalition Innovation Santé ?
Au démarrage de la crise Covid, nous avons constaté avec
les patients et les médecins deux fortes tensions sur le
système de soins : la première sur la prise en charge des
La donnée vie réelle, le prochain enjeu véritable des laboratoires pharmaceutiques
« Nous avons aussi participé
à la création de la Coalition Innovation
Santé qui a réuni 54 acteurs médicaux
et technologiques pour aider
les professionnels de santé à continuer
à prendre en charge leurs patients
alors que le système hospitalier était
en plein engorgement. »
PARTIE 3 Data & IA114
Qu’est-ce que la coopétition ?
Elle traduit l’union de concurrents pour défendre des
intérêts communs ou l’intérêt général. Nous avons par
exemple travaillé avec GSK à la création de bracelets
connectés pour les patients atteints de BPCO, maladie
toujours suivis à distance. Ceci montre bien que l’alliance
de deux entreprises pharmaceutiques sur un sujet alors
qu’ils sont en concurrence, c’est possible !
Pouvez-vous revenir sur un autre aspect stratégique de
votre mission, celui de la donnée vie réelle ?
Il s’agit de la donnée clinique et médico-administrative
générée dans le cadre du soin et du suivi thérapeutique.
Ces données nous permettent de comprendre comment les
patients sont pris en charge, comment nos médicaments
fonctionnent dans la vraie vie, et leur appréhension
demeure cruciale. Nous pouvons ainsi mieux comprendre
L’analyse des données en vie réelle documente aussi les
dossiers que nous remettons aux autorités de santé.
patients atteints du virus et l’impact sur les professionnels
de santé, et la seconde sur la prise en charge des patients
atteints de maladie chronique qui n’ont pas pu être suivis
de manière normale. L’objectif a donc été de mobiliser des
partenaires publics et privés pour répondre à l’urgence
sanitaire de patients atteints de maladies chroniques
les maladies cardiaques ou les cancers. Pour cela, je me
suis inspiré d’une démarche co-menée précédemment
avec Microsoft en 2019, Microsoft AI Factory for Health.
Nous avions à l’époque présenté les problématiques du
parcours patient aux startups, pour qu’elles puissent nous
aider. Nous avons repris cette méthodologie pour créer en
deux semaines cette coalition d’acteurs pluridisciplinaires
réunissant associations de patients, acteurs technologiques,
hôpitaux, mais aussi dix-huit laboratoires pharmaceutiques.
Ensemble, nous nous sommes mis en ordre de marche pour
par cette situation sur les parcours de soins.
Comment avez-vous travaillé et avec quels résultats ?
Nous avons demandé aux hôpitaux et aux médecins
de partager leurs besoins à un groupe de 300 startups,
soutenues par les acteurs de la coalition, qui répondaient
en fonction de leurs compétences. En moins de deux mois,
nous avons conçu dix-huit projets d’aide et levé plus de
transformation du secteur. Nous concernant par exemple,
nous représentons maintenant l’industrie pharmaceutique
dans le nouvel incubateur santé de la BPI, aux côtés de
vingt autres acteurs pour créer des projets intégrés sur des
problématiques patients. Cette coalition a donc encouragé
l’innovation en écosystème mais aussi celle de la coopétition
entre concurrents, notion extrêmement intéressante.
« Les données vie réelle nous
permettent de comprendre comment
les patients sont pris en charge,
comment nos médicaments
fonctionnent dans la vraie vie, et leur
appréhension demeure cruciale. »
115PARTIE 3 Data & IA
très rigoureux que je viens de vous mentionner.
Nous venons d’annoncer précisément sur ce sujet la
création d’un consortium, à base de solutions 100%
françaises, pour pouvoir travailler collectivement autour des
données de vie réelle.
Ce consortium, appelé AGORiA SANTÉ, utilise les
avons un cadre juridique et réglementaire pour nous
assurer d’une bonne agilité dans la collaboration, sans
compromis sur la sécurité des données et le respect de la
réglementation. C’est un projet qui a pris plus de dix-huit
mois et que nous avons testé dans le cadre d’une mission
clinique, économique et organisationnelle. Les données
potentiel de transformer notre approche des traitements
de collaborer sur la donnée pour mieux comprendre le
parcours de soin, l’améliorer et produire de la connaissance
Quelles sont les prochaines étapes ?
Ce consortium a été annoncé vendredi 18 juin 2021 lors
de Vivatech, avec Docaposte et Impact Healthcare. Nous
sommes en phase d’accueil de nouveaux partenaires dans
les prochains mois et allons démarrer de nouveaux projets,
comme par exemple sur la collecte de données dans le
cadre de la réforme de l’accès précoce. Notre ambition
est de contribuer ensemble à renforcer la compétitivité et
l’attractivité de la France dans le domaine de l’analyse de
données de santé en vie réelle au service d’une meilleure
prise en charge de la santé des français.
Ces données de santé étant classifiées par la CNIL
« données sensibles », comment travaillez-vous ces
gisements ?
Nous opérons les travaux d’analyse de données de santé
dans un cadre juridique et réglementaire maîtrisé et une
gouvernance vis-à-vis de la donnée – avec des matrices
d’habilitation, des rôles et responsabilités très clairs
pour les différentes parties prenantes. Nous travaillons
également sur le cadre technologique et sécuritaire avec
nos partenaires pour construire des environnements de
collaboration qui sont dans les plus hauts standards du
secteur. Nous développons aussi un cadre de transparence
l’utilité publique de ces derniers sur les données de santé
à la blockchain.
Nous faisons ainsi appel à des bureaux d’étude habilités
pour utiliser les données du SNDS (données de la sécurité
sociale), nos équipes n’ayant accès qu’aux résultats des
analyses sous forme de données agrégées. Ceci nous
permet de répondre aux questions que nous nous posons
dans le respect strict des règles en vigueur. En résumé
les données sont grandement protégées et, en tant que
citoyen, je ne peux que m’en féliciter.
Quels grands défis pour la donnée vie réelle ?
Actuellement les données de santé sont très éclatées. Nous
avons les données de l’assurance maladie, les données
des hôpitaux, les données des pharmacies, des médecins
ou encore des laboratoires d’analyses médicales. Un des
enjeux reste de pouvoir collaborer avec l’ensemble des
données, mais aussi avec les autorités, le tout dans une
PARTIE 3 Data & IA116
Avec l’aide de la data,
produits reconditionnés le
le neuf
Raoul Costa de Beauregard
Back Market
Depuis 2019 / Chief Operating Officer, Back Market
2011-2019 / Successivement Head of Product management
France, General Manager Audio, puis Emerging products,
Amazon
2005-2011 / Consultant, Boston Consulting Group
Raoul Costa de Beauregard est diplômé de Physique
à Paris Saclay (Paris XI), titulaire d’un Master of Sciences
de Centrale Paris et d’un Master of Engineering de Cornell
University.
BIO
Lancée en 2014, Back Market est la place de marché
leader des produits tech reconditionnés(1). Sur sa
plateforme d’achat-vente, Back Market sélectionne des
trente jours après achat. La qualité de service est donc au
cœur de sa promesse de valeur.
500 collaborateurs répartis dans quatre bureaux (Paris,
Bordeaux, Berlin, New York). Elle a réalisé deux levées de
fonds de 110 millions d’euros et de 276 millions d’euros en
2020 et fait partie du le classement des 40 startups
les plus prometteuses de France selon la French Tech.
« Notre objectif est de remplacer autant que possible
la consommation de produits neufs par des produits
reconditionnés, pour des raisons environnementales et
économiques, explique Raoul Costa de Beauregard,
vue environnemental, choisir un iPhone 12 reconditionné
représente un gain de 30 kg équivalent CO2 par exemple.
Et notre rôle d’intermédiaire, la masse critique que nous
constituons, permet à tous d’accéder à de bonnes marques
La proposition est séduisante et rencontre des tendances
de consommation mondiales. Néanmoins le marché du
soit 6%, même si les experts tablent sur un doublement
de sa part de marché d’ici 2025. « Nous pensons que cela
peut aller plus vite, notre activité suit une tendance encore
plus dynamique, souligne-t-il. Pour faire grandir le marché,
(1)
117PARTIE 3 Data & IA
traitement est la première chose qui a été développée
de Beauregard. Avant 2014 en effet, les produits
reconditionnés se vendaient sur des sites de type eBay ou
leboncoin, sans information transparente pour le client.
Sur le site Back Market, l’algorithme propose
systématiquement à l’internaute une et une seule offre,
celle qui présente le meilleur rapport qualité-prix, même si
d’autres sont disponibles. L’algorithme d’attribution évalue
batterie d’indicateurs comme le
taux de conversion du marchand
(facteur prix) et la proportion de
réachat sur Back Market (facteur
qualité).
Côté reconditionneurs,
les marchands ont accès en
permanence à un tableau de
bord intuitif pour consulter
leur historique de ventes, les
indicateurs de qualité (taux de
panne sur les trente derniers
jours, top des produits, etc.). Ils peuvent lire les verbatims
plus fréquemment, et surtout agir pour baisser le taux de
panne : « Nous avons développé une offre de composants
Lors du réachat, les clients ont à leur tour la possibilité de
produit à reprendre, l’application Back Market propose un
en mettant en place des normes homogènes au niveau
Beauregard.
La recherche de qualité commence par le choix des
partenaires marchands. Seuls 50% des reconditionneurs
passeront la période probatoire durant laquelle leur service
est passé au crible (commande à l’aveugle, contrôle
qualité).
Le paysage industriel du reconditionné est composite, avec
schématiquement de petites entreprises locales en Europe,
et de gros acteurs industriels
aux USA et en Chine. « Aux
acteurs locaux, nous apportons
un potentiel d’exportation
hors Europe, un service client
multilingue (40% des SAV),
un service de stockage des
produits. Aux industriels, nous
apportons une relation client
BtoC pour laquelle ils n’étaient
pas toujours outillés, et des
services comme la facturation,
le SAV, ou la livraison unitaire.
À tous, nous proposons un partage de bonnes pratiques
Raoul Costa de Beauregard.
Le partage de data harmonisées par Back Market est
la clé du modèle : « Nous avons accès à une grande
masse de données sur les produits les plus vendus, la
satisfaction client, les causes de retour, jusqu’à la référence
du composant qui a généré la panne. L’algorithme de
« Sur le site Back Market,
l’algorithme propose
systématiquement à l’internaute
une et une seule offre, celle qui
présente le meilleur rapport
qualité-prix, même si d’autres
sont disponibles. »
PARTIE 3 Data & IA118
logistiques sont ainsi centralisés, et il traite uniquement la
réparation, le test et l’envoi au client.
Résultat de l’expérimentation : une baisse des coûts pour le
marchand, une réduction du délai de traitement de cinq à
deux jours, et une satisfaction client en hausse de 10 points
(plus de 85% vs 75%). Le temps de réparation moyen est
passé de 1,2 à 0,8 jour, et le temps d’immobilisation en
usine a été réduit d’environ deux jours.
« Cette proposition a beaucoup de valeur pour les clients
qui se trouvent loin d’un magasin, analyse Raoul Costa de
Beauregard. En parallèle nous testons avec une franchise la
réparation en boutique, en quelques heures seulement.
Il existe des milliers de points de réparation en ville, mais
il faut structurer le réseau, standardiser les délais, la qualité
La démarche sera ensuite étendue à d’autres catégories
de produits. Si le téléphone est très majoritaire, la place
de marché propose en effet plus de trente catégories
de produits : électronique mais aussi électroménager,
micromobilité (vélos électriques, trottinettes), etc. Certains
de ces nouveaux segments, comme les télévisions et les
demande une grande agilité technique et logistique et
l’enrichissement de la collecte de data.
Back Market continue à se développer à l’international,
avec une présence aux USA depuis trois ans et pas moins
proposition de valeur s’exporte très bien, estime Raoul
Costa de Beauregard. Notre enjeu est surtout de structurer
l’offre en trouvant les bons industriels locaux, mais partout
la demande suit. L’avantage c’est que nous n’avons pas
à présenter les produits, les gens les connaissent. Notre
autodiagnostic en temps réel de son téléphone. La boucle
est bouclée : un client peut acheter et vendre, un marchand
peut s’approvisionner et vendre sur Back Market et cette
boucle est la plupart du temps locale.
Cette fonction est intéressante également pour d’autres
catégories de produits, pour lesquelles les constructeurs
n’ont pas mis en place de programmes de reprise : plus de
25% des consoles de jeux vendues en France ont ainsi été
Aujourd’hui l’assurance et l’extension de garantie, qui
renforcent le sentiment de sécurité de l’acheteur, sont
disponibles en France, Espagne, Allemagne, et viennent
d’être lancées aux USA. Back Market travaille avec un
assureur classique, mais ses data lui permettent de calculer
son risque, et de négocier le meilleur tarif, jusqu’à -
pourquoi pas - le prendre en charge lui-même un jour.
côté retour produit cette fois-ci : Back Market a lancé en
janvier dernier le projet Back Repair.
Quand un acheteur doit renvoyer un produit, le parcours
client peut être long : il reçoit un bon de retour prépayé,
qu’il doit imprimer, et doit se rendre à La Poste pour
expédier le colis. Le marchand le reçoit, le teste, et le cas
échéant le répare, puis le produit fonctionnel est renvoyé
jours, un délai standard dans l’e-commerce mais trop long
pour un téléphone. Cette lenteur est liée à la logistique
(le marchand peut se trouver à l’étranger) et à l’organisation
du marchand (les réparations viennent casser son processus
industriel et il peut grouper aléatoirement ses réparations).
Pour améliorer ce temps, Back Market a testé en France
avec une trentaine de marchands un centre-plateforme
119PARTIE 3 Data & IA
L’innovation est parfois l’affaire des vieilles dames
respectables de 75 ans. Le dernier projet de la Coface,
fondée en 1946, en est un bel exemple. Qui aurait pu
croire que cette entreprise, spécialisée dans l’assurance-
crédit, serait parmi les premières à industrialiser un modèle
de commercialisation de ses assets data, devançant bon
nombre de sociétés BtoC dans cette démarche ? Depuis six
mois, sa plateforme iCON propose en effet un accès aux
informations traitées, agrégées et analysées dans le cadre
de son activité historique. Une mine d’or lorsque l’on sait
que la Coface, qui a pour vocation d’aider les entreprises
en assurant l’insolvabilité potentielle de leurs clients, a pour
et politiques des pays de conquête et des clients, pour
établir un projet d’assurance en rapport avec l’évaluation
de ce risque. Au-delà de ce premier niveau d’information,
des experts et analystes se déploient également dans plus
de 50 pays pour étudier ces sources et bilans comptables,
réel les impacts des actualités économiques, politiques et
sociétales.
Fort de cette richesse, iCON a la capacité d’offrir
instantanément des informations sur la majorité des
entreprises dans 195 pays, à la demande ou sur système
d’abonnement mensuel, par site web ou par API. « Nous
remettons de l’immédiateté dans ce qui nous a toujours
caractérisé, l’analyse d’une information internationale
de conseiller, sur une data agrégée, analysée et mise en
perspective, qui devient un outil d’aide à la décision pour
Information du groupe, et porteur du projet en interne
depuis son arrivée il y a dix-huit mois. Pour tenir les délais
d’incubation dans un contexte instable au cœur de la crise
Covid, les méthodes agiles ont prévalu.
Avec iCON, la Coface transforme ses assets data en nouveau gisement de valeur
Matthieu Garnier
COFACE
Depuis 2019 / Head of Business Information Services,
Coface
2010-2019 / SVP Data & Analytics, Equifax
1997-2010 / Différents postes en Risk Management,
en Italie, France, Espagne, Europe du Nord, BNPP Personal
Finance
Matthieu Garnier est diplômé en Mathématiques
de l’université de Bordeaux 1.
BIO
PARTIE 3 Data & IA120
« Nous avons embauché dès mon arrivée deux types
d’équipes, commerciales et développement, pour déployer
le projet de manière globale. Il a fallu ensuite synchroniser
rapidement des algorithmes capables de connecter une
centaine de systèmes d’information internationaux. Au
à travailler différemment, en réinventant les méthodes
collaboratives, mêmes les plus innovantes. Pour exemple,
ce hackathon virtualisé pour l’occasion sur une durée
plus longue et intégrant plusieurs pays, qui a connu un
retard sur le planning initial, une prouesse pour un projet
d’innovation collaborative en cette période.
« Il ne s’agit bien sûr pas d’être broker
mais bien de conseiller, sur une
data agrégée, analysée et mise en
perspective, qui devient un outil d’aide
à la décision pour l’entreprise. »
PARTIE 3 Data & IA122
« l’un des plus grands enjeux
Laurent Butré
Schlumberger
Depuis 2018 / AI Lab Director, Schlumberger
2016-2018 / IT Innovation Service Manager, Schlumberger
2012-2016 / Desktops and Mobility Services Manager,
Schlumberger
2008-2012 / Australia & New Zealand IT Manager,
Schlumberger
1997-2008 / Successivement IT Service Delivery Services
Manager, IT Communication Manager, Hub Business
Project Manager, IT Support Teams Lead, Unix Operator
Support, Schlumberger
Laurent Butré est diplômé de l’ENSIMAG et membre du
conseil d’administration de l’Institut des Hautes Études
Scientifiques.
BIO
Pour comprendre l’ADN et la démarche des cinq centres
être faut-il d’abord s’attacher au parcours du directeur
symbole de la culture d’innovation qui anime les ressources
humaines du groupe. Les 82 000 collaborateurs de
l’entreprise de services et équipements dans l’énergie sont
et verticale permanent, leur permettant de découvrir
tous les métiers mais aussi de faire voyager les idées et
les cultures dans tous les départements. Une logique qui
a dynamisé le parcours de Laurent Butré, cet ancien de
l’ENSIMAG ayant cumulé un grand nombre de postes
différents autour des enjeux IT. Sa formation continue l’a
conduit à Paris, New York, Perth ou Houston en 2017, puis
l’a poussé jusqu’en Californie où il a challengé l’innovation
IT dans le Centre d’Innovation Technologique de
Schlumberger (STIC), avant de revenir sur Paris pour créer
sa vocation, celle de l’entité parisienne reposant sur une
mission d’aide aux départements qui expriment le besoin
d’intégrer de l’IA dans leur activité.
Cette structure de vingt-deux personnes gère environ
100 projets, répondant à des besoins internes sur des
ou les technologies et équipements. Les missions durent
entre trois et six mois et s’attachent à opérer en tandem
en détachant des collaborateurs métiers dans les équipes
du laboratoire. Deux récents cas d’usage démontrent à
eux seuls la grande variété de sujets traités. Le premier,
initié par le laboratoire lui-même, a cherché à compenser
l’amoindrissement d’intelligence collective créé par le
travail à distance. « L’innovation vient de rencontres et
du brassage d’expériences différentes. Le télétravail imposé
par la pandémie pouvait faire mourir ces viviers de
123PARTIE 3 Data & IA
Butré. En s’appuyant sur les technologies du
et sur la solution open source Work Adventure,
le laboratoire a inventé un “café-roulette” destiné à créer
des rencontres, en puisant dans la base de salariés pour
effectuer des rapprochements automatisés par centre
d’intérêts, langue, créneaux de disponibilité, etc. Un autre
exemple, radicalement différent et cette fois-ci destiné
à améliorer les processus de forage industriel par des
solutions de et est l’analyse
des images prises en fond de forage, en temps réel et
pendant l’action. Le but reste de transmettre la décision
en temps réel que l’humain aurait prise avec cette image
et donc éviter d’avoir à remonter jusqu’à la surface cette
sa puissance.
Et si l’on demande à Laurent Butré quels peuvent être ses
meilleurs conseils pour acculturer une entreprise à l’IA,
l’expert priorise quatre grands principes : « Le problème
actuel reste encore l’écart systématique entre le
prototypage et l’industrialisation.
Deuxième exigence, le niveau de maturité digitale du
, l’activité devant déjà être digitalisée sur
Troisième paradigme, pas d’acculturation IA sans tandem
métier et ingénieurs de la donnée (data scientists).
nécessaire : « On en dit un peu trop sur ces sujets, faisant
croire à tort que l’IA peut tout résoudre. L’un des plus
façon de la faire progresser dans les entreprises reste de
développer cas d’usage par cas d’usage, en commençant
par les plus simples, pour informer et convaincre à partir
puisque le laboratoire mène depuis 18 mois une campagne
d’acculturation reposant sur la création de conférences
internes, cours magistraux, mentorats particuliers,
challenges sur les données et autres concours.
« L’innovation vient de rencontres
et du brassage d’expériences
différentes. Le télétravail imposé
par la pandémie pouvait faire
mourir ces viviers de co-création.
Nous avons voulu les recréer. »
PARTIE 3 Data & IA124
Cegid Flow, l’expert-comptable de poche
André Brunetière
Cegid Group
Depuis 2017 / Chief Product and R&D Officer, Cegid Group
2015-2017 / CEO, I-We
2006-2017 / Successivement Director of Professional
Services, Managing Director Sage ATL, Managing Director
Vertical Business, Director for Marketing Product Strategy
and R&D, EVP Sa ge X3 Product, Sage
2004-2006 / Managing Director, Adonix Applications
and Services
2000-2004 / CEO, Imaginative
1998-2000 / Professional Services Director, Abel
1991-1998 / Managing Director, Bruno de Courreges
Consultants
1988-1991 / Research Fellow Associate, Rhône Poulenc
André Brunetière est diplômé de l’École Polytechnique et
Docteur en Sciences Physiques de l’Université Paris Sud.
BIO
Un expert-comptable et un banquier miniaturisés dans
une poche de veston, telle est la promesse de Cegid
Flow, innovation lancée début avril par l’entreprise de
logiciels comptables du même nom. L’idée de cette
application destinée aux TPE est née d’un constat simple
et d’un besoin réel. Sur 4 millions d’entreprises en France,
de gestion informatisée. « Mais pour proposer quelque
chose d’attractif et nouveau à une cible peu rompue aux
processus de comptabilité, nous devions aller plus loin
que les environnements digitaux de gestion que nous
développons actuellement entre experts comptables et
entreprises. Nous avons donc franchi un autre cap avec
la création d’un produit ludique, intuitif et simple, qui
les traite, les agrège et les analyse. Charges, situation de
compte, prévision de trésorerie, ces informations donnent
le pouls de l’entreprise en temps réel, et pousse des
Pour aboutir à ce résultat, l’éditeur a bien sûr investi et
capitalisé dans des outils de reconnaissance automatisée
de texte, capables de traiter les documents fournis sans
aide humaine, mais aussi dans des processus de
pouvant robotiser les traitements comptables,
transformer les écritures et effectuer les rapprochements
nécessaires entre les différentes sources d’information.
« Nous sommes à 5% d’intervention humaine assumée,
destinée à réguler des problèmes d’écriture manuscrite
par exemple, ou des erreurs de pièces. L’équipe dédiée
à cette régulation reste d’ailleurs constante en dépit
d’une croissance de la communauté de clients, puisque le
en forme par un studio de londonien, est
125PARTIE 3 Data & IA
toujours disponible aujourd’hui sous forme d’application
en test gratuit, et sera accessible prochainement via un
abonnement mensuel de 14,99 euros. André Brunetière
conclut : « Ce projet a bel et bien fait de nous une
entreprise apprenante puisque nous avons dû nous
remettre en question pour nous adresser à une nouvelle
cible, très éloignée de celle des experts-comptables par sa
non-connaissance et son manque d’appétence comptables.
Nous avons dû désapprendre car il fallait passer par
d’autres choses que notre cœur de métier de gestion,
« Ce projet a bel et bien
fait de nous une entreprise
apprenante puisque nous avons
dû nous remettre en question
pour nous adresser à une
nouvelle cible. »
72%
des entreprises les plus performantes
attendent des résultats concrets
grâce à l’IA sous 2 à 3 ans.
En chiffres...Data & IA
Sources : voir page 210
PARTIE 3 Data & IA126
Inscrire les données et l’IA au cœur de la transformation
de l’inspiration à l’engagement
Julien Molez
Société Générale
Depuis 2019 / Group Innovation Data & AI Leader, Société
Générale
2014-2019 / Principal puis Associate Director du cabinet de
conseil interne SG Consulting, Société Générale
2010-2014 / Manager, InAdeo
2007-2010 / Manager, Mirevas
2005-2007 / Consultant Freelance
2001-2005 / Consultant, IBM Business Global Services
Julien Molez est diplômé de l’École Centrale Paris.
BIO
Comment faire de l’IA une réalité tangible pour 133 000
collaborateurs, répartis dans 61 pays et exerçant 25 métiers
différents ? Telle est la question que s’est posée la direction
de l’Innovation de Société Générale, entité en charge de
l’accélération de la digitalisation des modèles d’affaires
existants et de la création de nouveaux modèles au sein du
groupe bancaire international.
« Pour garantir une acculturation et une appropriation à
large échelle, il n’était pas question de faire à la place
des entités métiers, mais bien de les conduire à opérer
ces changements culturels eux-mêmes. Mais les sujets
data et IA demeurant complexes, nous avons décidé
de les accompagner pas-à-pas dans la compréhension
des écosystèmes et des perspectives offertes par ces
technologies, mais aussi dans la construction de leurs
Groupe de l’Innovation Data & AI. Un pari permettant à
dans quatre domaines clés pour le groupe bancaire : la
personnalisation de la relation client
et l’automatisation du conseil, la relation client en assurant
un traitement réactif et rapide des demandes client, la
gestion des risques et de la conformité avec la détection
lutte anti-
blanchiment systématisation
du traitement documentaire, gisement de performance
pour la banque.
Cette stratégie de diffusion et d’appropriation a donc
été décomposée en plusieurs étapes. Tout d’abord la
sensibilisation des membres du comité de direction Groupe
de la banque en leur montrant des cas d’usage concrets.
Ils ont ensuite été formés pour comprendre les implications
127PARTIE 3 Data & IA
engagé concrètement, en étant invité à construire sa feuille
de route intégrant des cas d’usage pour chacune des
activités.
En parallèle, un dialogue quotidien a été établi avec les
équipes métier pour les accompagner dans le déploiement
de leur feuille de route, s’assurer qu’elles disposent du bon
cas d’usage : chaque entité métier a ainsi dans ses objectifs
annuels la réalisation de trois cas d’usage avec une cible
cas d’usage, guidés par cette approche forte sur la valeur,
a évidemment été sous tendue par un dialogue et un
rencontrées, que ce soit avec la direction générale, les
responsables des entités métiers et évidemment au
quotidien avec la direction de l’innovation, ainsi que la
Science.
Une fois les premiers processus de transformation
enclenchés, la dernière phase de la stratégie s’est appuyée
sur le faire savoir, maillon essentiel de l’appropriation
générale au sein d’un groupe de la taille de Société
Générale. « Nous croyons à la démonstration par la preuve,
à la diffusion au plus grand nombre en insistant sur les
cas d’usage à succès que nous avons illustrés et explicités
en nous appuyant sur un des vidéos
pédagogiques et plus de trente sessions de partage ou
qui regroupe près de 300 cas d’usage IA en production
au sein du Groupe pour inspirer, permettre le partage et
retient aujourd’hui quelques incontournables : « L’équilibre
demeure la clé du succès, et il faut former autant
qu’engager. Autre écueil à éviter, celui de porter l’IA et la
« Nous avons créé une
plateforme unique qui regroupe
près de 300 cas d’usage IA en
production au sein du Groupe
pour inspirer, permettre le
partage et créer des connexions
entre les personnes. »
des leviers disponibles pour construire des propositions de
PARTIE 3 Data & IA128
En chiffres...Data & IA
Sources : voir page 210
L’INTERNET DES OBJETS
79% L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
52%
LE CLOUD
74%
Les trois technologies
les plus privilégiées
par les PDG pour atteindre
leurs objectifs de croissance.
129PARTIE 3 Data & IA
Qlixbi, la nouvelle bouteille connectée d’Air Liquide
Olivier Delabroy
Air Liquide
Depuis 2019 / VP Packaged Gases - Industrial Merchant
Business Line, Air Liquide
2016-2019 / VP Group Digital Transformation, Air Liquide
2010-2016 / VP Group Research & Development & i-Lab
founder, Air Liquide
2007-2010 / Industrial and Supply Chain Director, Air
Liquide France
2001-2004 / General Manager, American Combustion
Division, Air Liquide America
1998-2001 / R&D Project Manager, Air Liquide
Olivier Delabroy est diplômé de Centrale Supelec.
BIO
Pas de transformation digitale possible sans processus
solides, technologies pertinentes, ni adoption des équipes
et des clients, tel est le point de vue d’Olivier Delabroy,
Une philosophie probablement due à un parcours très
hybride depuis vingt ans au sein du groupe, entre postes
opérationnels sur les métiers historiques et fonctions de
transformation et d’innovation. Si les processus doivent
préserver et pérenniser les fondamentaux : « Les principes
de performance et de sécurité propres à notre activité
doivent rester au cœur, cultivés et augmentés par les
valeurs nouvelles des technologies digitales qui ne restent
alors favoriser une transformation harmonieuse et durable,
notamment sur le sujet crucial de la data.
« L’expérience montre qu’une préparation en amont très
structurée et focalisée sur l’adoption et la création de valeur
perçue par l’utilisateur permet des développements plus
simples, plus rapides et moins coûteux. Toute innovation
technologique doit donc avoir comme obsession sa
adoption est essentielle, aucun projet ne pouvant être
réussi sans embarquer l’humain, qu’il s’agisse du client ou
du collaborateur. Dans une symétrie parfaite, l’un devra
formé pour porter cette transformation dans une entreprise
apprenante. Ce fameux triptyque processus, technologie et
humain sous-tend donc chaque projet d’innovation de cette
activité servant deux millions de clients.
Dernier exemple en date, l’offre Qlixbi, dédiée aux
tout autre dimension. « Nous avions envie de faire parler
PARTIE 3 Data & IA130
ces bouteilles depuis longtemps. Circulant de manière
permanente entre nos services de réapprovisionnement
très ergonomique. La bouteille délivre ainsi aujourd’hui des
informations à même de faciliter le travail de ces métiers,
compréhension des usages et de la compétitivité des
métiers du soudage. « Nous
changeons de paradigme
et de modèle économique,
la captation de données
pouvant permettre de mieux
comprendre chacun de nos
clients et de leur offrir un
certain nombre de nouveaux
services : réapprovisionnement
automatique, optimisation de
aidons aussi le soudeur à se
questionner à partir de la mise
Ce nouveau produit a été
créé en collaboration entre les équipes métier concernées,
le département IT et des chefs de projet de la Factory
Air Liquide dédiée à l’innovation digitale. Une culture
collaborative du design produit a également accompagné
toute la gestion des cycles de développement, ce qui,
pour Olivier Delabroy, caractérise peut-être l’un des
plus grands changements : « Il y a dix ans, nous aurions
Aujourd’hui, nous adoptons les mêmes méthodes que pour
le développement des produits digitaux, privilégions les
ainsi que l’étape de
(MVP), même pour des produits hardware. Cette
démarche itérative nous permet d’améliorer le produit
cinquantaine de clients : nous avons réellement conçu
ce produit pour les soudeurs avec les soudeurs. Le
Lancée en septembre 2019 en Angleterre avec un taux
d’adoption client record, l’offre se déploie progressivement
sur les autres marchés,
soutenue, dans la logique
de symétrie des attentions
chère au groupe, par un
plan d’accompagnement au
changement pour aider les
collaborateurs à comprendre
les nouveaux enjeux de
commercialisation et de mise
en œuvre opérationnelle des
cette bouteille connectée,
nous nous positionnons au
cœur des usages et entrons de
plain-pied dans l’écosystème
du soudeur, perspective qui
ouvre d’autres champs serviciels à imaginer rapidement.
C’est une autre manière d’envisager nos modèles
économiques et d’apporter toujours plus de valeur à nos
« Grâce à cette bouteille connectée,
nous nous positionnons au cœur
des usages et entrons de plain-pied
dans l’écosystème du soudeur,
perspective qui ouvre d’autres
champs serviciels à imaginer
rapidement. »
131PARTIE 3 Data & IA
comment concilier temps long et rapidité du digital ?
Franck Le Vallois
Fédération Française de l’Assurance
Depuis 2020 / Directeur Général, Fédération Française
de l’Assurance
2006-2020 / Successivement Directeur Financier Adjoint,
Directeur de l’Indemnisation Service Client et Membre du
Comex en charge de la Distribution, Allianz France
2005-2007 / Successivement Directeur Général puis
Président Directeur Général, Assurances Fédérales IARD
(groupe AGF)
2000-2004 / Commissaire Contrôleur des Assurances, ACPR
1999-2000 / Inspecteur de Finances, Ministère de
l’Économie
Franck Le Vallois est diplômé de l’École Polytechnique
et de l’ENSAE. Il est également membre certifié de l’Institut
des Actuaires.
BIO
La Fédération Française de l’Assurance rassemble
246 sociétés d’assurance et de réassurance qui
représentent 99% du marché français. Son directeur
général Franck Le Vallois évoque les grands enjeux de
digitalisation du secteur.
Comment le secteur de l’assurance se transforme-t-il ?
Le modèle économique de l’assurance se fonde sur
la mutualisation des risques, c’est-à-dire la capacité
cotisations de tous les assurés. À ce titre l’assurance est
les résultats de l’année découlent des décisions prises dans
le passé en matière de sélection de risques. Par nature,
l’assurance est une activité à cycle long. Or ce modèle
historique doit s’adapter car il est aujourd’hui télescopé
par une révolution digitale qui génère en permanence
des données potentiellement pertinentes pour mieux
appréhender les risques. Nous assistons ainsi à un essor
sans précédent de la data sur toute la chaîne de valeur du
secteur assurantiel. C’est une lame de fond qui impacte les
technologies bien sûr, mais aussi le rythme de l’innovation,
à la fois accélérée par les changements de comportement
réglementaires.
Comment les assureurs intègrent-ils cette nouvelle
donne dans leur modèle ?
Au niveau de la conception du produit, la data ouvre la
voie à de nouvelles approches assurantielles. Davantage
de prévention en amont des sinistres avec par exemple des
capteurs permettant de détecter les fuites et d’éviter les
en alertant les automobilistes sur des enjeux de sécurité -
PARTIE 3 Data & IA132
augmentation de la fréquence des contacts client.
Contrairement à beaucoup d’autres secteurs d’activité,
la relation client en assurance est sporadique –
schématiquement, un dommage tous les cinq ans en
dix ans en multirisque habitation. Or toutes les études
convergent pour dire que plus nombreux sont les contacts,
meilleur est le niveau de satisfaction client.
D’une manière générale, les assureurs vont donc continuer
à adapter leur modèle pour renforcer leur relation client
contrats.
Comment accéder à ces nouveaux gisements
de données ?
Les compagnies doivent à la fois structurer leurs propres
données pour en espérer une totale exploitation et saisir
les opportunités offertes par les données externes. Ainsi,
pour ce qui concerne le véhicule connecté, les assureurs
s’impliquent dès maintenant, car sinon d’autres acteurs les
exploiteront à leur place.
Cette exploitation de données par les assureurs doit leur
permettre de gérer leur exposition avec plus de précision,
d’innover en termes de couverture de risques et de
développer des services pour leurs clients. Ce travail est
secteur doit faire face : par exemple, face au réchauffement
climatique, les assureurs se sont regroupés pour créer
l’association Mission Risques Naturels visant à mieux
connaitre et prévenir les aléas climatiques.
accident ou événement météorologique sur un trajet -
ou sur leur style de conduite - conduite prudente vs
également citer le développement de nouvelles approches
comme l’assurance paramétrique, qui déclenche
automatiquement le versement d’une prestation en
fonction d’indicateurs mesurables, par exemple pour les
risques climatiques en agriculture.
Au niveau de la distribution, les assureurs mettent
en place une démarche de multi-accès, c’est-à-dire la
possibilité pour l’assuré d’utiliser à sa convenance plusieurs
possibilités d’interaction (Internet, salarié de l’entreprise
d’assurance, intermédiaire d’assurance). Or il y a encore
quelques années, les systèmes d’information - et même
les produits - étaient différents d’un réseau commercial à
l’autre. Progressivement c’est une expérience omnicanale
qui voit le jour, requérant au passage une convergence des
outils informatiques.
En matière de relation client, en particulier pour la gestion
de petits sinistres, l’indemnisation peut désormais être
automatisée à partir de photos. À la suite d’un dommage
pièces endommagées et établir le coût de la réparation,
de contrôle et les sinistres plus conséquents.
En matière d’innovation, les assureurs s’orientent vers
plus de services à valeur ajoutée. Par exemple, assureurs
et associations d’usagers militent auprès de l’Union
Européenne pour un accès à la donnée des véhicules
connectés en vue de construire des services innovants
d’accompagnement et de prévention.
133PARTIE 3 Data & IA
Quels sont les freins à la transformation
de l’assurance ?
videmment le poids de l’informatique en place de
longue date - le - est un immense challenge
gestion (production, comptabilité, indemnisation, etc.). La
gestion sur le long terme de chaque version des contrats
d’assurance est un facteur explicatif de ce phénomène de
d’historiques de données par les actuaires pour prévoir
le futur est un autre facteur de complexité au moment
d’adapter ou de changer le système d’information.
Et n’oublions pas le facteur humain : faire évoluer la culture
et les compétences au sein de l’entreprise prend du temps.
de nouveaux entrants qui ne portent pas le « poids de
le marché s’est concentré, nous assistons à un mouvement
de développement de les startups qui tentent
de capturer tout ou partie de la chaîne de valeur de
l’assurance. Aux assureurs de se montrer à la hauteur de
ce challenge en nouant les bons partenariats et en se
transformant !
« Faire évoluer la culture et
les compétences au sein de
l’entreprise prend du temps. »
⅓
des dirigeants d’entreprise
européens déclarent qu’ils prévoient
d’investir dans des applications
d’IA prêtes à l’emploi au cours
des 12 prochains mois.
En chiffres...Data & IA
Sources : voir page 210
PARTIE 3 Data & IA134
dans nos vies
Jean-Philippe Desbiolles
IBM France
Depuis juillet 2021 / Managing Director pour le Crédit
Mutuel, IBM France
Depuis 2020 / Global Vice-President for Data, Cognitive
& AI Financial Services, IBM France
2016-2020 / Vice-President Cognitive Solutions Team,
IBM Europe
2014-2020 / Global Partner IBM Watson Group Financial
Services, IBM US
2012-2014 / Lead Partner, Business Analytics,
IBM Asia Pacific
2010-2011 / Partner, Banking Integrated Account,
IBM Europe
2006-2010 / CRM Practice Leader Financial Services,
IBM Global Business Services
2005-2006 / Executive Assistant, IBM EMEA
1997-2005 / Managing Consultant Financial Services,
IBM France
Jean-Philippe Desbiolles est diplômé de l’École de
Management de Marseille (Kedge).
BIO
terme d’Intelligence Augmentée -, nous ne créons ni plus ni
moins qu’une nouvelle collaboration entre les humains et les
machines, ces systèmes apprenants que nous avons créés.
comme une capacité d’apprentissage. Par exemple,
l’Homme apprend à un cobot le geste
à reproduire pour fabriquer un vélo sur une chaîne de
fabrication, tandis que la machine assiste l’Homme en lui
fournissant les informations pour prendre des décisions
un progrès technologique conjoncturel, mais un marqueur
structurel dans nos vies, qui expose trois grands enjeux
pour les dirigeants.
L’ENJEU DE LA CONFIANCE
L’adoption de l’IA dans la vie économique et citoyenne va
c’est à la fois la transparence de l’IA, le caractère
explicable des décisions prises et la robustesse du
modèle pour qu’il ne dérive pas de ses objectifs au cours
du temps. Partenaire de l’Homme, l’Intelligence Augmentée
doit être en résonance avec les valeurs de la société dans
laquelle elle s’exerce. Outre ces trois dimensions de la
faut garantir l’équité et l’éthique des contextes de son
utilisation. Au-delà du travail du régulateur européen (et
bientôt je l’espère au niveau global(1)), je suis convaincu que
toutes les grandes organisations seront amenées à édicter
un c’est-à-dire un ensemble explicite de
règles de la bonne utilisation de l’IA, destiné à leurs publics
internes, leur écosystème et leurs clients.
(1)
135PARTIE 3 Data & IA
Ce travail est fondamental. Selon une récente étude menée
par IBM en France(2), 83% des décideurs en entreprise
notamment de la capacité d’expliquer les résultats de leur
IA est critique pour leur business. Plus de 80% considèrent
que les clients donneront la préférence à des entreprises
qui pratiquent la transparence dans ce domaine. L’intégrité
de la marque et l’engagement client en dépendent.
Des outils tels que l’AI OpenScale d’IBM qui permet, sur
modèles sont explicables et d’en maîtriser des biais, sont
déjà opérationnels dans le secteur bancaire. La diversité
équipes chargées de paramétrer ces IA permet également
de limiter les biais.
L’ENJEU DES SOFT SKILLS
Manuel ou intellectuel, aucun métier ne va échapper à une
transformation liée directement ou indirectement à l’IA.
Dans notre enquête, 55% des répondants déclarent que
leur entreprise utilise actuellement des logiciels ou des
outils d’automatisation, et parmi eux, 54% sont motivés par
au quotidien sont transformées, certains métiers vont
disparaître et d’autres émerger : 85% des métiers qui seront
exercés en 2030 n’existent pas encore, selon le
World Economic Forum. Dans ce contexte, la formation
tout au long de la vie est fondamentale. Alors que
culturellement, la France est très axée sur les
une nouvelle pédagogie, basée sur un équilibre entre
et va être nécessaire. En effet, ce sont bien les
capacité de collaboration en équipe, la prise de recul, qui
feront la valeur ajoutée du jugement humain.
UN NOUVEAU SAVOIR-ÊTRE
Quel rôle va prendre l’Intelligence Augmentée dans notre
vie ? En fait, l’IA est déjà là : on fait ses courses avec Yuka,
on noue des relations amoureuses avec Tinder, on se
ce n’est qu’un début !
voisinent en permanence le confort et l’inconfort : confort
de l’hyperpersonnalisation et de l’hyper-contextualisation,
en particulier dans le domaine de l’expérience client,
et inconfort lié à l’évaluation permanente de sa propre
performance, forcément imparfaite. Là encore, ce sont
les soft skills qui vont nous permettre de prendre du recul
par rapport à ces informations, et de bien vivre cette
collaboration Homme-machine.
Face à ces enjeux colossaux, de nouveaux savoir-faire,
un nouveau savoir-être sont à inventer, alors soyons créatifs,
audacieux et engagés ! L’IA est similaire à une vague...
elle ne s’arrête pas, elle se surfe. Alors surfons-la !
« Partenaire de l’Homme,
l’Intelligence Augmentée doit être
en résonance avec les valeurs de la
société dans laquelle elle s’exerce. »
(2)
PARTIE 3 Data & IA136
« Les entreprises souhaitent acheter leur informatique aussi simplement que leur abonnement téléphonique »
Marie-Noëlle Muller-Pernodet
IBM France
Depuis 2021 / Vice-President Technology Group, IBM France
2019-2021 / Vice-President Sales, IBM France
2017-2019 / Directeur Secteur Industrie & Telco/Media/
Energy & Utilities, IBM France
2011-2017 / Successivement Manager of Services Sales
Management Support, Executive Assistant of General
Manager, Director of Government, Telecommunications -
Media - Energy & Utilities sectors, IBM France
2009-2010 / Manager of Business Partner Organization
& Mid-market Operations, IBM Europe du Sud
2007-2009 / Manager of Hardware Sales - SMB Section,
IBM France
2005-2007 / Director of Printing Division, IBM France
1993-2004 / Diverses fonctions chez IBM France
Marie-Noëlle Muller-Pernodet est diplômée de l’ISC Paris
et titulaire d’un MBA de l’ESSEC.
BIO
Quelles tendances voyez-vous émerger dans les choix
technologiques de vos clients ?
L’acquisition de technologies suit un long processus. Le
plus souvent, l’acheteur a fait le plein d’informations et
nous sollicite avec une idée précise.
Aujourd’hui, les clients veulent tester leurs hypothèses
très rapidement. Ils veulent également moins investir en
capex et privilégient le Ils souhaitent acheter
leur informatique aussi simplement que leur abonnement
téléphonique, avec un service de base et des options
modulables.
important à faire, car les clients sont plus volatils.
Quelles tendances observez-vous dans le domaine
de l’IA et de la data ?
Les entreprises recherchent trois types de services :
du service (depuis l’analytics jusqu’à
l’automatisation), des services d’automatisation centrés sur
des l’étape
ultime après celle du
Ces plateformes de données pour toute l’entreprise sont
capables d’intégrer l’ensemble des data hybrides (sources
internes et externes). Nous les mettons en cohérence, nous
les sécurisons, et nous proposons une interface adaptée
aux non-spécialistes, pour qu’ils s’emparent du sujet pour
leurs usages métiers. L’offre s’appelle Watson Orchestrate
et elle est utilisée, par exemple, par L’Oréal.
137PARTIE 3 Data & IA
La crise Covid a impacté tous les secteurs de manière
différente. Comment les aidez-vous à s’adapter ?
la logistique, accélèrent leur digitalisation dans deux
directions : l’extension de leur offre de services et les
investissements pour baisser leurs coûts.
Nous les accompagnons très en amont, en les mettant en
relation avec des clients qui ont franchi le pas avant eux, et
en leur offrant très tôt la capacité
de tester la technologie sur des
cas réels en “mode garage”.
Les secteurs qui ont été
impactés négativement, comme
le tourisme ou le transport
aérien, regardent comment
réduire les effectifs dans leur
organisation pour se remettre
en position de compétitivité.
Nous les aidons à rationaliser
leur portefeuille de fournisseurs,
à voir où l’automatisation peut
s’insérer dans leur chaîne de
valeur, etc.
Dans les deux cas, ce sont des changements majeurs de
business model qu’il faut accompagner, tactiquement et
stratégiquement. IBM dispose de tous les outils - conseil,
analyse et solutions - et peut intégrer de bout en bout pour
le client, ou fournir seulement les briques dont il a besoin.
Comment vous positionnez-vous sur le marché
du cloud ?
Les entreprises cherchent d’une part à s’affranchir de leur
legacy pour que l’infrastructure ne soit plus une contrainte,
partenaires.
SecDevOps(1) pour une meilleure intégration et un meilleur
Finalement,
c’est la nature de l’application
qui va déterminer la bonne
infrastructure, et celle-ci est
bien souvent hybride.
Notre stratégie est « Open
Hybrid Cloud & IA
types d’infrastructures peuvent
être présents, nous y ajoutons
une couche de containerisation
(avec OpenShift de Red Hat) et
un ensemble d’accélérateurs
logiciels qui apportent
modernisation, automatisation,
capacité de prédiction et
sécurisation aux applications.
Avec IBM Cloud, nous nous positionnons comme des
intégrateurs et des offreurs de cloud tactique et spécialisé.
Notre offre avec Sopra Banking Software permet de
répondre aux contraintes de conformité du secteur de la
banque par exemple. Nous coopérons également avec les
hyperscalers(2) quand cela fait sens.
(1)
(2)
« Ce sont des changements
majeurs de business model
qu’il faut accompagner,
tactiquement et
stratégiquement. »
PARTIE 3 Data & IA138
Cela nous mène aussi à pivoter avec eux. Nos acquisitions
récentes sont tournées vers le BtoB, la chaîne DevSecOps
et les services s’adressant aux utilisateurs non-spécialistes.
Par ailleurs, nous nous associons à des spécialistes par
secteur, comme Salesforce, Workday ou SAP, pour proposer
des intégrateurs de taille plus modeste en sécurité multi-
cloud, gestion des opérations, etc. Tous nos logiciels et nos
hardwares sont compatibles avec Red Hat, ce qui permet
cette démultiplication.
Quelles perspectives ouvrent la blockchain
et l’informatique quantique ?
La blockchain est véritablement en train de se développer.
Des acteurs de l’industrie, de la banque, de l’alimentaire,
de la cosmétique nous demandent comment devenir
C’est un fait nouveau que de voir ces
écosystèmes s’organiser pour améliorer ensemble la
traçabilité, la logistique et le respect de la réglementation.
Dans le domaine du nous avons conclu
un accord avec Bouygues Telecom. Nous lançons des tests
utilisant de manière convergente l’edge et l’IoT, notamment
pour l’industrie et les collectivités, avec la ville de Nice.
un premier temps, nous avons ouvert des plateformes en
a un vif intérêt des clients qui y voient une opportunité de
gagner en rapidité et en agilité.
« Nous investissons
dans la R&D 4 à 5%
du chiffre d’affaires par an
depuis 30 ans. »
Comment continuer à être toujours en avance
au niveau de la technologie ?
Notre PDG Arvind Krishna a démarré sa carrière dans les
centres de recherche d’IBM, et la recherche est à la racine
de la culture d’IBM. Nous investissons dans la R&D 4 à 5%
du chiffre d’affaires par an depuis trente ans.
Nous sommes numéro 1 de notre secteur en termes de
dépôts de brevets - plus de 2 500 par an sur la seule
sécurité ! Nos recherches prennent en compte de plus
en plus fortement les enjeux environnementaux, sur les
batteries notamment. C’est un engagement de longue date
d’IBM.
L’innovation, c’est ce qui fait la différence entre un leader
et un suiveur. Et les clients nous la demandent alors nous
n’avons aucune raison de ralentir !
139PARTIE 3 Data & IA
Eram ouvre à ses clients les données de performance sociale et environnementale de ses chaussures
Geoffroy Libaudière
Groupe Eram
Depuis 2020 / Co-directeur de marque Eram, Groupe Eram
2018-2020 / Directeur Supply Chain Pôle Centre Ville,
Groupe Eram
2013-2018 / Successivement Project Manager,
Responsable du service Modernisation & Outils Supply
Chain puis Responsable Prévisions des Ventes Magasins
& E-Commerce, Monoprix
2010-2013 / Consultant Distribution & Retail, Kurt Salmon
Geoffroy Libaudière est titulaire d’un Master
en Droit & Sciences Politiques et diplômé de l’EM Lyon.
BIO
Être une marque de souliers à prix accessible n’empêche
pas de se mobiliser pour l’environnement. Fin 2020,
l’enseigne familiale Eram (200 boutiques, dont un tiers en
franchise) a lancé une nouvelle plateforme de marque, qui
prix mais aussi de pratiques responsables.
industriel ancré localement. 50% de son offre est Made in
Europe (France, Espagne, Portugal), dont une gamme Eram
Flex entièrement conçue et fabriquée dans le Maine-et-
Loire. « Le groupe Eram capitalise sur les éléments forts
de son patrimoine, et le modernise sur deux dimensions :
co-directeur de marque Eram.
En matière d’omnicanal, Eram a lancé l’e-réservation,
le le et refond
actuellement sa plateforme e-commerce. L’ensemble de
ces parcours digitaux représentent à ce jour près de 20%
du chiffre d’affaires de l’enseigne.
Côté RSE il faut aussi faire vite, car l’objectif est de réduire
La loi anti-gaspillage prévoit une obligation de recyclage
ou de réparation des produits non-alimentaires, dont la
chaussure. Les industriels sont évalués selon une méthode
chaussure réunit des matériaux divers, assemblés selon des
désassemblages.
Dans cette perspective, et pour offrir une information
transparente à des consommateurs de plus en plus
sensibles à la traçabilité et à l’éthique, la marque a entrepris
de publier les données environnementales de chacun de
ses modèles.
PARTIE 3 Data & IA140
Concrètement, dès la rentrée prochaine le client en
magasin accèdera, via un QR code apposé sur chaque
modèle, à une page d’information qui détaille de façon
plutôt attrayante la vie de la chaussure.
Six types d’information sont communiquées :
• Les matières
nom de l’usine)
• Les conditions de fabrication (nom et adresse de l’usine,
ancienneté du partenariat avec Eram, effectifs, etc.)
les conditions de
travail dans l’usine (audit externe, effectifs, photo, vidéo,
etc.)
• L’empreinte environnementale, établie en fonction
du sourcing, de la matière, et du transport, et calculée via
• Les test réalisés avant la mise sur le marché pour s’assurer
de la conformité des chaussures
• Les engagements de la marque Eram sur les
problématiques environnementales et sociales.
Si l’idée est simple, le projet a nécessité six mois de
travail. « La data existait, mais elle était disséminée sur
différents sites et au sein d’une multitude de services
L’équipe est partie d’un premier travail réalisé pour l’audit
des fournisseurs, et s’est associée à Belharra Numérique
(spécialisé en supply chain) pour co-construire un outil
robuste, simple, partagé avec les fournisseurs. Ceux-ci
régulièrement pour suivre la progression de la performance
globale.
co-conception des produits, choix des matières premières,
réduction des emballages, transport bateau, etc., le groupe
veut jouer sur tous les leviers et ainsi faire la démonstration
qu’il est possible de faire de la mode à la fois accessible et
responsable. Il participe à la chaire Bali (avec entre autres
Petit Bateau, Decathlon et l’école Estia), pour expérimenter
de nouvelles pistes, comme l’utilisation d’une IA capable
en vue de son recyclage.
Le groupe Eram capitalise sur les
éléments forts de son patrimoine,
et le modernise sur deux dimensions :
l’omnicanal et la RSE.
141PARTIE 3 Data & IA
En chiffres...Data & IA
LES FREINS À L’IA
L’IA est de plus en plus considérée comme une technologie
révolutionnaire capable de transformer le fonctionnement des
entreprises. Malgré tout, de nombreuses entreprises restent
hésitantes pour un certain nombre de raisons :
Sources : voir page 210
38%
ont cité la complexité apparente
de l’intégration de l’IA
dans les systèmes d’entreprise
existants.
33%
ont souligné le manque
d’expertise ou de connaissances
comme frein à l’adoption
de l’IA.
29%
croissante des données
et l’existence de données en silo
comme un obstacle.
142142 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
PARTIE 4
Plateformes, Cloud& Industrialisation
143143PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
144144 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Odile Panciatici
Groupe Renault
Depuis 2018 / Blockchain Vice President, Groupe Renault
Depuis 2015 / Customer Satisfaction Strategy &
Transformation Officer, Groupe Renault
2013-2015 / Vehicle Engineering VP, Groupe Renault
2010-2013 / Chief Vehicle Engineer - B Automotive segment,
Groupe Renault
2007-2010 / Quality Assurance Director, Groupe Renault
2002-2006 / Chief Vehicle Engineer, projet Logan,
Groupe Renault
2000-2002 / Project Manager, Alliance Renault-Nissan,
Groupe Renault
1984-2000 / Successivement Project Manager Renault 19,
Twingo cockpit Project Manager, Clio II cockpit Architect,
Upperbody/Body in white General Manager, Groupe
Renault
Odile Panciatici est diplômée de l’ISAE Supméca Paris
et de l’IESE Business School.
BIO
145145 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Un véhicule se compose de 6 000 à 30 000 composants,
tous soumis à diverses réglementations. Pour répondre au
besoin de transparence et de sécurité de l’automobiliste,
les pays, et 300 nouvelles réglementations et évolutions
sortent chaque année). L’information est multiple : outre
la pièce elle-même, il faut préciser la matière première,
etc. Les constructeurs ont en plus leur propre cahier
des charges, parfois encore plus exigeant - c’est le
cas de Renault en matière de sécurité passive - et les
softwares embarqués, remis à jour évoluent
en permanence... Bref, la centralisation et le partage de
Dès 2018, Odile Panciatici s’est penchée sur la piste
blockchain pour optimiser ce suivi de conformité :
« Pour que l’écosystème atteigne collectivement
l’excellence opérationnelle de bout en bout, nous
devions opérer une rupture et désiloter l’information.
La blockchain est apparue comme particulièrement
De son côté, Faurecia avait déjà entamé des projets
de blockchain ; les deux partenaires ont rapidement
Avec XCEED, Renault et Faurecia tracent la conformité des pièces automobiles
Eric Jacquot
Faurecia
Depuis 2018 / Global end-to-end Quality Director, Faurecia
Depuis 2015 / Group Quality & HSE Director, Faurecia
2007-2015 / Quality Director, Faurecia Exhaust System
2005-2007 / Perceived Quality Director, Faurecia Interior
System and seating
2001-2005 / Supplier Quality & Programmes Director,
Faurecia Interior System
1993-2001 / Quality Manager, puis SQA Manager, Sommer
Allibert
1987-1993 / Quality Manager, Rapid SA
1985-1987 / R&D Manager puis Method Manager, Jaeger
Regulation
BIO
146146 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Après quelques rebondissements(1), XCEED (eXtended
Compliance End-to-End Distributed), nouvelle blockchain
pour l’industrie automobile européenne, développée et
réalisée par Faurecia, Groupe Renault, Knauf Industries,
des composants d’un véhicule, de la conception à la
production.
« Nous avons travaillé sur un POC en 2019, puis sur un MVP
résultats ont été très positifs : des pourcentages de gains
de productivité à deux chiffres,
et un temps divisé par deux pour
gérer un rappel de véhicule.
« En cas de non-conformité, on
peut agir en temps réel et cibler,
puisque l’on sait exactement quel
modèle et quelles usines sont
Global end-to-end Quality
Director de Faurecia. On est plus
Autre avantage de cette mise en commun des informations,
la boucle de retour : « En mutualisant le diagnostic et
la résolution des problèmes, on crée une intelligence
collective, qui permet d’être plus prescriptif, explique-t-il.
L’accès aux données en temps réel permet aussi d’être plus
« Au vu des résultats, nous avons étendu la démarche à
et Turquie, pour la production de la Clio 5 et très
prochainement de nouveaux modèles, annonce Odile
Panciatici. Nous avons commencé par le scope de la
production, mais nous allons progressivement élargir à plus
À terme en effet, XCEED devrait garantir la conformité
sur les phases de vente et d’après-vente. Il devient alors
possible de tracer, de garantir la conformité réglementaire
de la réparation (alors qu’aujourd’hui on ne peut le faire
que ponctuellement sous forme d’audit) ou de tracer le
cycle de vie d’une batterie.
Pour les deux partenaires,
XCEED inaugure un nouvel état
d’esprit pour les industriels de la
mobilité. Pour Odile Panciatici,
« la blockchain n’est pas une
technologie révolutionnaire,
mais la combinaison clés en
main de technologies éprouvées
permet d’aller très vite dans des ruptures de processus
que nous n’avions jamais réussi à faire. Transformation
digitale et excellence opérationnelle sont les deux faces
d’une même pièce, estime-t-elle. La transformation
digitale, ce n’est pas la digitalisation des processus
existants. C’est un changement plus profond, et chaque
élément de l’écosystème tire l’autre vers le haut dans sa
C’est aussi une démarche collaborative inédite dans
cet univers ultra-compétitif : « Il faut dépasser les egos
d’entreprise et comprendre que la coopération est
une question de survie pour l’automobile, répond-elle.
« Transformation digitale
et excellence opérationnelle
sont les deux faces
d’une même pièce. »
(1)
147147 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Aujourd’hui, on ne délivre plus une voiture mais un service
de mobilité de plus en plus personnalisé. Le rythme
d’innovation est tel qu’il faut s’associer pour suivre la
cadence. Quand on a les mêmes enjeux et les mêmes
besoins, autant travailler ensemble. Partageons plutôt le
l’information est automatisée et en temps réel. La
plateforme permet d’emmener de plus petits fournisseurs
qui n’auraient pas les moyens seuls de s’équiper d’une
blockchain, analyse-t-il. Dans ce projet, je retiens aussi
l’aventure humaine, enthousiasmante, qui embarque des
métiers divers (logistique, cybersécurité, production, R&D,
etc.) et les entreprises au niveau global. Il faut se former à
En chiffres...Plateformes, Cloud & Industrialisation
Sources : voir page 210
90%
des entreprises dans le monde
ont migré « sur le cloud » en 2019,
20%seulement environ de leurs charges de travail
ont été transférées dans ces environnements
cloud.
148148 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
« 30 000 usines à digitaliser sous 5 à 10 ans en France »
Vincent Jauneau
Siemens
Depuis 2006 / Vice-Président Siemens France,
Directeur Digital Industries
Depuis 2012 / Président de la division Smart up Industrie,
Gimelec
2000-2006 / Directeur de la division Automation,
Siemens France
1986-2000 / Successivement Responsable du département
Systèmes Éditoriaux de la division Industrie Graphique,
en charge de l’activité Drive au sein de la division
Automation and Drive, Directeur Industrie de la région
Nord, et Directeur Marketing Automation pour la France,
Siemens
Vincent Jauneau est diplômé de l’école Estienne.
Comment renforcer l’industrie française, qui pesait 18%
du PIB il y a dix ans et seulement 12% aujourd’hui ?
de Siemens France. Le taux de digitalisation est de
10% dans les PMI. Dans les grands groupes, des projets
Industrie 4.0 existent, mais ce n’est pas encore le mode
l’automatisation puis le concept de Smart Factory ont
permis de réduire progressivement à moins de 15% la part
de la main-d’œuvre dans les coûts de production, offrant
à la production locale une compétitivité nouvelle.
Pour favoriser cette digitalisation, la BPI, AIF, le Gimelec et
la DGE(1)
les secteurs prioritaires, tels que les industries stratégiques
(santé, composants, etc.) et les industries à gros volume,
capables d’impacter la balance du commerce extérieur.
À l’initiative du Gimelec et dans le cadre de l’AIF, Accenture
participe activement à ce mouvement. Les enjeux sont bien
différents entre le c’est-à-dire la construction
d’une nouvelle usine, et le qui vise à réformer
l’existant.
« Le est plutôt rare en France mais sur ces
projets, Siemens est quasiment toujours présent très en
nordiste LFB spécialisée dans la santé, dont la chaîne de
fabrication a été virtualisée, ou de ACC (Automotive Cells
Company), spécialisée dans les batteries pour l’automobile,
qui a choisi l’outil de simulation, d’analyse et de gestion du
cycle de vie du produit de Siemens. Les machines ont été
virtualisées pour construire, élément par élément, le jumeau
BIO
(1)
149149 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
numérique de l’usine tout en intégrant la technologie du
Troisième exemple, l’usine ASF 4.0 (Chamatex) en Ardèche :
ce spécialiste des textiles intelligents produit désormais
des chaussures de sport pour les marques Babolat, Millet
et Salomon. Généralement fabriquées en Chine, les
chaussures de sport requièrent habituellement beaucoup
de main-d’œuvre à cause du grand nombre de pièces qui la
composent. Cette nouvelle usine a été entièrement
conçue en virtuel, ce qui permet une automatisation mais
un avantage pour les marques qui souhaitent réaliser de
petites séries à un prix compétitif, tout en améliorant leur
des équipes opérationnelles est l’un des grands enjeux de
devrait ouvrir non loin en 2022.
Le concerne, lui, 30 000 sites en France.
Le principal frein au développement de ces industries
crise sanitaire, les taxes de production atteignaient 70
milliards d’euros par an en France, contre 12 milliards
d’euros seulement en Allemagne. Cela pèse sur la
taxes de production de 20 milliards d’euros décidée par
le gouvernement est un élément majeur pour l’industrie
française.
comme l’Afrique du Nord, l’Asie ou les pays de l’Est,
moyen des machines en France est de dix-sept ans
contre neuf ans en Allemagne ! Pour aider les industriels
à renouveler leur parc machine, Siemens procède en
deux étapes : d’abord il implante de l’IoT sur l’existant,
pour donner des éléments de mesure. Le client se forme
et connecte de plus en plus d’éléments de production,
améliore sa productivité, diminue ses taux de panne,
etc. Siemens a réalisé ce type de prestation pour l’usine
Decathlon (connexion des machines sur une plateforme de
), pour MF Bougies, et pour Sidel, producteur
de machines d’embouteillage. Un ticket d’entrée de
D’ici cinq ans, tous les automates devraient intégrer du
edge nativement.
Deuxième étape, avec les économies réalisées, l’industriel
peut acquérir de nouvelles machines.
Chaque machine
comme le montre l’exemple de Sidel, une fois le jumeau
numérique créé, son délai de fabrication est réduit à deux
à quatre semaines (contre huit habituellement), car elle est
assemblée directement sur site, le programme a été testé
et validé avec le jumeau numérique, et les équipes ont
également été formées sur le jumeau virtuel de la machine
avant sa livraison. « Par ce remplacement progressif des
machines, on peut envisager en cinq à dix ans des usines
« La montée en compétence
des équipes opérationnelles
est l’un des grands enjeux
de l’industrie 4.0. »
150150 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Comment les machines de production peuvent-elles être
à leur tour produites en France ? Une première évaluation
révèle que 4 000 entreprises françaises fabriquent des
machines de production pour environ 36 milliards d’euros
Industrie du Futur) française incluant les machines de
production s’est dotée d’une structure représentative sous
offre. Pour ce bel enjeu collectif, l’effet écosystème joue à
plein. « On expérimente de nouvelles façons de travailler,
« Pour éviter de nouvelles
délocalisations (...)
l’appareil productif français
doit se moderniser.»
En chiffres...Plateformes, Cloud & Industrialisation
Sources : voir page 210
Rien qu’au cours des trois
prochaines années,
l’adoption du cloud hybride devrait
augmenter de
47%
Il y a trois ans à peine,
le marché mondial du cloud public
ne représentait que
la moitié de sa taille actuelle.
151151 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
152152 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
La Matmut refond son Système d’Information pour mieux s’ouvrir à son écosystème
David Quantin
Groupe Matmut
Depuis 2018 / CIO / Directeur Général Adjoint Organisation,
Systèmes d’Information et Innovation, Groupe Matmut
2010-2018 / Deputy CIO, IT Director, Groupe Matmut et
parallèlement Directeur Général, Matmut Innovation
2006-2010 / Successivement Lead Architect, puis Head ot IT
Department, iCDC
2005-2006 / Fondateur, Gamien
1996-2006 / Senior IT Architect, IBM
1996-1999 / Project Manager, CGI Informatique
David Quantin est diplômé de l’UTC, titulaire d’un MBA
Paris Dauphine, formé à l’ENS en Cybersécurité.
2021, momentum majeur pour l’assurance ? C’est la
conviction de David Quantin, CIO, DGA Organisation,
SI & Innovation du groupe Matmut. La compagnie vient
d’engager la refonte totale de son système d’information
sur cinq ans.
« Notre patrimoine est très robuste, par exemple dans le
traitement de millions d’opérations quotidiennes, rappelle
David Quantin. Mais le socle technologique doit être
entièrement revu pour s’adapter à la nouvelle donne de
En quoi consiste ce nouveau paradigme ? Dans les années
90, le modèle de l’assurance est orienté produit, et les
branches (vie, santé, dommages) fonctionnent en silo.
le SI s’adapte pour élargir la palette de produits. Dans les
années 2010, elles donnent la priorité à l’expérience client.
C’est surtout à partir de 2015 que les nouveaux entrants -
Sans renverser le marché, ils innovent dans la façon de
dialoguer avec l’assuré. Pour s’approprier ces nouveaux
codes, il a fallu une DSI toujours plus orientée client.
« Nous entrons aujourd’hui dans une nouvelle phase, celle
du SI écosystème, estime le CIO. Les sociétés d’assurances
distingue en effet trois types de coopération : la vente
de produits par des partenaires (par exemple, la Matmut
propose un produit d’assurance santé sur CDiscount), une
avec BNP Paribas Cardif). « Dans cette chaîne de valeur
BIO
153153 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
étendue, chaque acteur va trouver sa place,
sans forcément être un acteur central, analyse-t-il.
Comment basculer, alors que le code a parfois plus de
trente ans ? « Nous avons atteint la limite du
notre parti pris est de tout réécrire, explique David
Quantin. Les solutions s’appellent APIsation, microservices,
containerisation. Sans être novatrices, les API permettent
de créer ce standard de marché pour l’interconnexion.
Nous allons aussi vers les technologies du cloud mais pour
Le schéma directeur est établi, la refonte pèsera 80%
du portefeuille projet en 2022. « La première étape sera
de “réurbaniser”, c’est-à-dire découper précisément nos
quartiers applicatifs, décider s’ils s’appuient sur des briques
internes ou externes (par exemple, la souscription d’un
contrat mobilise des services de signature électronique,
d’archivage), puis nous construirons le nouveau socle
technologique, et nous le testerons dans un an sur un
Une démarche de démarre avec
les équipes DSI (600 personnes) mais aussi les métiers
pour travailler ensemble de manière plus agile. « Un
chantier de refonte SI est un beau moment dans une vie
professionnelle, conclut David Quantin.
Nous voulons honorer notre patrimoine, tout en écrivant
« Un chantier de refonte SI
est un beau moment dans une
vie professionnelle. »
En chiffres...Plateformes, Cloud & Industrialisation
94%
des dirigeants prévoient
de déployer des business models basés sur
des plateformes dans un futur proche.
Sources : voir page 210
154154 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Sis ID, le Waze de la fraude au virement
Laurent Sarrat
Sis ID
Depuis 2016 / Co-Founder & CEO, Sis ID
2014-2016 / Head of Enterprise Information Services,
Sanofi
2008-2016 / Successivement Web & Enterprise Content
Management Platform Manager, Global Application
Platforms Solutions Delivery Director, puis Global
Application Platforms Director, Sanofi Pasteur
2007-2008 / Managing Consultant, Capgemini
2004-2007 / Technical Architect & ECM Consultant,
Atos Origin
1999-2001 / Director of technology, PlanetaDeAgostini
Online
1998-2001 / Project Manager, Fi System
1995-1998 / System Engineer, Case corporation
Laurent Sarrat est diplômé de l’INSA Lyon.
La fraude au virement bancaire pèse un poids croissant
sur l’économie mondiale. Rien qu’en France, elle coûterait
près de 500 millions d’euros par an, et sept entreprises sur
dix en feraient les frais. S’ajoutent à cela des coûts cachés
- ou encore sur l’impact psychologique - « les personnes
trompées peuvent être psychologiquement détruites par la
Face à ce constat est née en 2016 la plateforme
contre la fraude tout seul, nous nous proposons de créer
Sarrat, son fondateur, fait l’analogie avec les communautés
Les entreprises payantes et les fournisseurs qui rejoignent
sa communauté voient leurs coordonnées bancaires
s’engagent à partager leurs historiques de paiement (ainsi
que les tentatives de fraudes réussies ou non). Sis ID croise
BIO
« Puisque vous ne pouvez
lutter contre la fraude tout seul,
nous nous proposons de créer
une communauté de “coyotes”
de la fraude. »
155155 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
« En cas d’erreur, nous assumons
les conséquences et remboursons
le montant de la fraude subie
par notre client. »
dangerosité des coordonnées que ses clients souhaitent
évaluées chaque mois.
Le service se rémunère d’ailleurs au nombre de
Côté technologique, Sis ID se présente donc comme
une plateforme SaaS reposant sur l’infrastructure IBM
Cloud dont l’usage est optimisé par la containerisation.
« Généralement, nos clients déversent d’un seul coup
dans la journée toutes les coordonnées qu’ils souhaitent
containerisation permet donc à Sis ID de gérer son usage
cloud selon le besoin réel de sa plateforme.
Même si Sis ID compte une trentaine de clients en propre
tels que L’Oréal ou Colas, elle exploite le potentiel des API
lui permettant de s’intégrer parfaitement à nombre d’autres
Dynamics, Cegid, etc.). C’est de fait un moyen d’étendre
la surface de commercialisation par l’intermédiaire de
partenaires comme Cegid.
« En cas d’erreur, nous assumons les conséquences et
remboursons le montant de la fraude subie par notre client.
de la plateforme pour faire croire que c’est ce client
impossible car chaque demande et chaque résultat est
immédiatement enregistré dans le registre sécurisé de la
contrôle la manière dont les algorithmes sont développés
que possible.
Sis ID a bouclé une levée de fonds, série A, de 5 millions
d’euros en 2020. Un montant qui devrait lui permettre de
développer son activité au Royaume-Uni et en Espagne,
deux autres pays européens particulièrement touchés par la
fraude au virement.
156156 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Le plan « Cloud First », une révolution copernicienne menée par Docaposte
Xavier Vaccari
Docaposte
Depuis novembre 2020 / Chief Strategy Officer –
Cloud & AI, Docaposte
2012-2020 / Successivement Project Director Delivery,
Directeur Adjoint Business Development & Delivery,
Partner et SVP de l’entité Softeam Cadextan, et VP AI
Delivery & Business Development, Softeam
2010-2012 / Skill group manager, Capgemini
2007-2010 / Architecte Banque Finance, OCTO Technology
2003-2007 / Différents postes jusqu’à celui d’Architecte,
Capgemini
Xavier Vaccari est diplômé de l’Ecole Centrale Paris.
France. Docaposte se positionne en effet comme tiers
un très haut niveau de sécurité et de souveraineté pour le
stockage et traitement de leurs données sensibles.
Quelques exemples concrets : Docaposte propose, parmi
distance pour l’élection des représentants du personnel,
une gamme de signatures électroniques complètes, la
conservation de long terme des documents à vocation
probatoire, et assure l’hébergement du dossier personnel
pharmaceutique de l’Ordre National des Pharmaciens. « La
particularité de Docaposte est que nous proposons une
des offres les plus larges du marché : conseils d’experts,
solutions technologiques et services. Nos clients font
donc appel à nous à la fois pour des besoins de logiciel,
d’automatisation mais aussi d’interventions humaines pour
de Docaposte.
L’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 670 millions
d’euros en 2020 (en tenant compte de l’acquisition d’Index
Education) et a connu une très forte croissance interne
2017 dans des domaines aussi divers que l’éducation ou
le conseil aux entreprises. Elle est membre fondateur de
Gaia-X, la démarche commune pour un cloud européen
souverain et participe ainsi à la construction des interfaces
BIO
157157 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
numérique et atteindre très rapidement le cap du
milliard d’euros de chiffre d’affaires, Docaposte a lancé
un programme de transformation baptisé Cloud First,
une révolution qui fait du cloud la colonne vertébrale
de l’entreprise. Il s’agit d’une double transformation :
celle de l’infrastructure et celle du delivery model (offres,
méthodes de travail, organisation). Elle impactera les 2 000
collaborateurs IT de Docaposte, mais aussi les forces de
vente, le marketing, les services achats et la DRH. Et cette
transformation sera rapide car le projet emmené par Xavier
Vaccari doit être achevé en à peine deux ans !
L’offre d’hébergement de Docaposte s’organise autour
de quatre propriétaires situés en France.
L’entreprise mise désormais sur une organisation en
plusieurs couches : le noyau des infrastructures historiques
(privé mais mutualisé entre plusieurs clients) et à terme le
cloud public.
L’écosystème de partenaires tend à se développer pour
accompagner la croissance de Docaposte et pourra
Au printemps 2021, l’entreprise procèdera aux choix
techniques pour son cloud, avant de déployer sa nouvelle
offre pour l’automne 2021. Plus de trente personnes
se consacrent à ce programme.
Côté métiers, « le cloud doit aider à gagner en vélocité
et avoir un beaucoup plus agressif pour
répondre aux besoins et gagner en capacité de servir de
nombreux clients, en particulier à l’international, résume
Xavier Vaccari. On va changer la manière d’aborder les
Il s’agit par exemple de donner de l’autonomie aux clients
fonctionnalités dont ils ont besoin. Ainsi, monter un puits
de données avec un haut niveau de sécurité et
une IA opérationnelle, pourrait se réaliser de manière quasi-
immédiate et être consommé en mode SaaS.
RH, car les experts cloud native sont encore rares (vingt
recrutements dès cette année), celui du mode de
de ces solutions. Pour fédérer toute l’entreprise autour
de ce projet cloud qui mobilise des investissements très
importants, le programme Cloud First - lancement au
printemps 2021 pour 24 mois - comprend l’acculturation
pratiques DevOps, la formation aux nouveaux outils et des
démarches agiles autour de la transformation des offres.
Les directions Technique, Marketing et Communication ont
Docaposte, supporté par le Comex qui appuie fortement le
projet. À suivre !
« Le cloud doit aider à gagner en
vélocité et avoir un time-to-market
beaucoup plus agressif pour répondre
aux besoins et gagner en capacité de
servir de nombreux clients. »
158158 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
D’opérateur d’infrastructure
Pierre Andrade
Depuis janvier 2020 / Senior Vice President Digital &
Decentralized Solutions, Suez
2018-2020 / Head of Digital and Advanced Solutions, Suez
2010-2020 / Directeur Général Adjoint Eau France, Suez
2009-2010 / Executive Vice President Water Europe, Suez
Environnement
2006-2008 / Water Projects Vice President, Suez
Environnement
2002-2006 / CEO, Nuove Acque (Suez Environnement Italie)
1986-1988 / Internal Auditor, Danone
1984-1985 / Officier de la Marine Nationale française
Pierre Andrade est diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure
des Mines de Nancy.
En France, la gestion des eaux passe traditionnellement
par le modèle de la délégation. Les pouvoirs publics,
propriétaires des infrastructures, accordent à un acteur privé
leur exploitation dans l’objectif de réduire les coûts et de
performances opérationnelles.
rang mondial. Toutefois, ce modèle de la délégation, peu
répandu en dehors de l’Europe, est aujourd’hui remis en
question, car « il est parfois perçu par le public comme un
« Nous sommes donc amenés à valoriser nos performances
opérationnelles en combinant plusieurs modèles
économiques : opérer les infrastructures de nos clients
ou leur fournir les outils techniques pour le faire. C’est là
et commercialise
des solutions SaaS ou qu’elle a, dans un
premier temps, développées pour ses propres besoins. Ces
dernières vont des plateformes de contrôle en temps réel
aux solutions IoT de collecte des données sur le réseau.
« Nous allons vers un avenir mariant SaaS et Data-as-a-
BIO « Nous allons vers un avenir
mariant SaaS et Data-as-a-Service.
On pourrait presque parler
d’Efficiency-as-a-Service
pour qualifier ce modèle ! »
159159 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
« Si l’on veut être au
rendez-vous de l’efficacité
environnementale que l’on
recherche, on doit forcément
en passer par le digital et
développer une approche
temps réel de la maîtrise
des réseaux d’eau. »
On pense notamment à la plateforme AQUADVANCED
Réseaux d’eau qui propose la surveillance en temps réel
de nombreux indicateurs des réseaux d’eau (pression,
débit, etc.) et donc la détection instantanée d’anomalies
telles que les fuites d’eau. AQUADVANCED agrège pour
cela des données issues de sources variées (télégestion,
Supervisor Control and Data Acquisition (SCADA), Système
d’Information Géographique (SIG) et télérelève).
qui développe et commercialise ces outils. Cette dernière
est forte de 400 personnes, principalement basées en
France, et de partenariats visant à renforcer son expertise
sur des sujets tels que la maîtrise des infrastructures
cloud, l’IA, ou encore les enjeux de cybersécurité et de
gouvernance de la donnée (en lien avec les règlements du
RGPD). « Nous sommes donc à la fois éditeur de solutions
et intégrateur, car pleinement capables d’agréger notre
ATTEINDRE LA PERFORMANCE ENVIRONNEMENTALE
PAR L’APPLICATION DU DIGITAL
3S pilote un budget d’investissement de 15 à 20 millions
d’euros par an. Si le spectre d’investissement est
très large, l’impact écologique positif est un élément
développement.
« C’est un enjeu majeur de nos clients au sein des services
environnementale que l’on recherche, on doit forcément en
passer par le digital et développer une approche temps réel
de la maîtrise des réseaux d’eau. Cela permet d’atteindre
traditionnelle plafonne entre 80 et 90% pour les meilleurs
opérateurs. C’est 10% de déperdition en eau économisée,
160160 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
La plateforme
d’étude virtuel de Dassault Aviation
Rosanne Serrano
Dassault Aviation
Depuis juin 2019 / Deputy CDO & Vice President in charge
of Digital Programs, Dassault Aviation
2013-2019 / PLM Team Manager, Dassault Aviation
2008-2013 / PLM Projects Manager, Dassault Aviation
2005-2008 / System Engineering Process and Workshop,
Dassault Aviation
1998-2001 / Electronic Warfare Center Manager,
Thales Airborn Systems
Rosanne Serrano est diplômée de CentraleSupélec
et de l’Université Paris Dauphine.
L’innovation est inscrite dans l’ADN de Dassault Aviation.
de son savoir-faire, au travers de la performance
constante de ses processus. C’est donc sans surprise
que le leader aéronautique a su négocier tout aussi
aisément le mouvement de transformation numérique,
avec en particulier la mise en place de la plateforme
3DEXPERIENCE, pour ses programmes avions phares.
big data sont venus enrichir les techniques de conception
produit, ainsi que les processus d’industrialisation, la
au pilotage d’un programme avion et le travail collaboratif
en entreprise étendue. « Cette plateforme est l’outil de
travail du bureau d’études étendu et permet, au travers
d’un jumeau numérique de l’avion, d’intégrer tous
les métiers, y compris ceux de nos partenaires, pour
Rosanne Serrano, Directrice Adjointe de la transformation
numérique.
aucun autre par sa complexité, hissant pourtant de fait cette
plateforme au rang de prouesse technologique. Virtualiser
un bureau d’études implique la capacité de gestion d’une
BIO
« Virtualiser un bureau
d’études implique la capacité
de gestion d’une volumétrie
très conséquente de données
de natures diverses. »
161161 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
« Pour que le projet soit
porté par tous, il doit l’être
avant tout de manière forte
par les directions générales
utilisatrices. »
volumétrie très conséquente de données de natures
de fabrication, procédures de maintenance, etc.) et d’accès
performant à de nombreux utilisateurs, dans un contexte où
les contraintes normatives et sécuritaires sont fortes, et les
Fait différenciant et notable, la méthode d’élaboration
et d’amélioration continue de la plateforme utilise un
mix combinatoire entre méthode classique et méthode
agile, principalement pour laisser cours à la créativité
collaborative sur certaines fonctionnalités nouvelles, au
sein d’une architecture garante des délais de production et
de livraison, dans un secteur qui ne peut souffrir d’aucun
droit à l’erreur.
Et quand on demande à Rosanne Serrano sur quels constats
d’autres sociétés pourraient capitaliser, la centralienne
évoque sans hésiter la conduite du changement : « Le plan
de conduite du changement et de formation aux nouveaux
concepts doit être intégré dès le démarrage du projet, en
que le projet soit porté par tous, il doit l’être avant tout de
162162 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Adeo, un SI agile et orienté business
Matthieu Grymonprez
Adeo
Depuis 2018 / Global Leader Digital Data, Adeo
2016-2018 / CIO-CDO, Leroy Merlin Brésil
2012-2016 / Head of Enterprise Architecture & Innovation,
Leroy Merlin Brésil
2007-2011 / Team manager of Infrastructure Projects,
Adeo Services
2006-2007 / Network & Telecom Leader, Adeo Services
2004-2006 / Infrastructure Project Leader, Adeo Services
2000-2004 / Network Telecom & Security Project Manager,
Leroy Merlin
1999-2000 / IT Specialist, eve.com
1998-1999 / Software Test Lead, Microsoft
Matthieu Grymonprez est diplômé de Telecom Lille,
formé à HEC, à l’ESSEC et au MIT.
Maison-mère de Leroy Merlin, Weldom, Brico Center,
Bricoman ou encore Quotatis, Adeo est leader en Europe
et troisième acteur mondial du marché de l’amélioration de
marketplaces et des partenariats plateforme, Adeo, fort de
150 000 collaborateurs, est présent dans vingt pays.
une logique nouvelle qui a entraîné un plan majeur de
transformation.
au niveau SI Groupe. L’objectif : passer à une organisation
agile, ouverte et internationale. Débutée avant la crise
Covid, fortement accélérée par celle-ci, cette mutation s’est
traduite concrètement par :
- Une nouvelle organisation axée sur le product
management (logique de produits, de build / run, d’API et
de microservices).
- Des équipes en binôme SI / business. « Relation client,
la gestion contractuelle et le recrutement restent des
missions 100% SI.
- : chaque plateforme
spécialisée a son propre chef des opérations. Ainsi la supply
chain est divisée en cinq domaines, comportant chacun
trois à quatre produits, comme le produit
par exemple. Chaque BU développe son produit et dépose
son container dans le cloud, qui est lui globalisé.
BIO
163163 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
- Un travail de fond sur la culture SI, résolument
agile, orientée partenariats.
« Pour fonctionner comme une plateforme, il faut être
À chaque besoin il faut se demander : est-ce intéressant
et différenciant de le faire nous-mêmes ou est-ce que l’on
s’associe ? Le SI doit donc aussi faciliter la connexion avec
- La pérennisation d’un savoir-faire interne : « Notre
commerce est particulier. En général nous customisons
très fortement des softwares du marché, souligne Matthieu
- :
mais aussi meilleure synergie entre les talents. « Il y a
des points forts et une culture SI différente dans chaque
pays : la France excelle en le Brésil en marketing
social, la Russie en micro-services, etc. Nous favorisons
les coopérations. Les équipes russes ont construit une
plateforme de management d’API en qui va être
Une cinquantaine de produits ont été développés selon ce
« Pour fonctionner comme
une plateforme, il faut être
une entreprise ouverte. »
agile, comme lors de la mise en place du et
du pendant la crise sanitaire. En mars 2020
à Nice, un magasin pouvait traiter 35 commandes avec
retrait en magasin par jour, aujourd’hui il en traite
2 000 ! 140 points de vente ont été adaptés. SI,
organisation des magasins en entrepôt, applications pour
aider les collaborateurs à y circuler, supply chain, etc. On
a tout changé ! Sachant que chaque français se trouve en
moyenne à vingt minutes d’un magasin, nous apportons
conclut-t-il.
164164 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Cloud et Intelligence
souveraineté stratégique
Michel Gesquière
IBM France
Depuis 2016 / Strategic Sales Leader, IBM France
1996-2016 / Parcours au sein d’IBM dans le conseil en
stratégie, puis l’outsourcing de services d’infrastructures,
notamment dans la grande distribution, les produits
de grande consommation, le luxe, et enfin le développement
et la négociation de grands contrats de services
et de technologie en France et en Europe.
1988-1996 / Consultant et Directeur, Eurequip
1984-1988 / Executive assistant, groupe SAGEM
Michel Gesquière est diplômé de l’Institut Catholique
des Arts et Métiers (ICAM), titulaire d’un Master of Sciences
de Télécom Paris, et d’un MBA d’HEC Paris (ISA).
L’EXPLOSION DES DONNÉES
Nous connaissons, par la taille d’une photo numérique
de bonne qualité, l’unité de mesure du mégaoctet (Mo)
qui désigne 1 million d’octets. Nous connaissons aussi
le téraoctet (To) qui désigne 1000 milliards d’octets, soit
l’équivalent de tous les ouvrages d’une bibliothèque
universitaire.
Mais nous allons devoir apprendre de nouvelles unités
milliard de téraoctets. Car depuis 2010, le monde a créé
trois dans les cinq ans qui viennent, et par quarante-cinq
d’ici 2035.
de création de données explose, le stock est largement
sous-exploité : 60 à 70% des données actuelles en
entreprise sont inutilisés.
LE CHAPITRE 2 DE L’ÉCONOMIE DE LA DONNÉE
Cette explosion des données a d’abord été visible au
travers du succès spectaculaire des plateformes de réseaux
appelons le chapitre 1 de la révolution de la donnée.
Mais de la consommation, cette révolution va s’étendre
au monde de l’entreprise, à celui de la production des biens
et des services : c’est le chapitre 2 de cette révolution.
Par le couplage du cloud, de l’Internet des Objets
de nouvelles perspectives de croissance plus durable,
BIO
165165 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
plus économe en énergie avec de nouveaux gains de
productivité :
- Dans la santé, c’est la chirurgie de précision à distance,
la télémédecine, les assistants médecins, l’essor des
biotechnologies ;
- Dans l’industrie, ce sont des usines plus connectées,
plus robotisées, plus économes en énergie ;
- Dans l’énergie, c’est l’optimisation des réseaux,
le pilotage des infrastructures à distance, la maintenance
préventive ;
- Dans la banque et l’assurance, c’est l’essor de
fraudes,
la surveillance des activités suspectes ou criminels ;
- Dans la grande consommation, ce sont les produits et
les services augmentés, leur traçabilité, l’association du
consommateur au développement de nouveaux produits ;
- Dans la logistique et la distribution, ce sont les
robots intelligents dans les entrepôts et les magasins,
l’optimisation des routes, la réduction des ruptures de
stocks.
LE BESOIN DE PUISSANCE ET DE MAÎTRISE
DES SOLUTIONS D’EXPLOITATION LES DONNÉES
Nos clients sont conscients de l’importance de cette
révolution. Et de l’urgence d’en faire une nouvelle source
Dans ce nouveau contexte, nos clients veulent :
- Pouvoir déployer et gérer, en toute sécurité et intégrité,
leurs données et leurs applications dans différents
environnement informatiques sur une variété de clouds ;
- Créer en toute liberté de nouvelles applications
but d’innover et de se transformer ;
des algorithmes ;
- Avoir la maîtrise et être souverain dans le choix des
technologies de cloud et d’IA et dans la monétisation de
leurs données.
En résumé, parce que la donnée est devenue une source
d’avantage concurrentiel et de compétition, nos clients
veulent en avoir la maîtrise, et le contrôle de solutions
puissantes d’exploitation des données auprès de
pas en concurrence.
stratégique.
LA SOUVERAINETÉ STRATÉGIQUE DANS LE CLOUD
ET L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
d’assurer la neutralité et la portabilité des applications et
des données sur l’ensemble des clouds (privés et publics)
disponibles sur le marché, dont celui d’IBM.
En fonction de son industrie et de son métier, chaque
entreprise dispose d’un ensemble de données dites
critiques, comme celles relatives à sa fonction de recherche
et de développement, à ses processus industriels ou à
ses clients. Ses données critiques doivent pouvoir être
exploitées sur un cloud privé, et les autres données sur un
cloud public avec une parfaite synchronisation. C’est l’enjeu
du cloud hybride.
166166 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Concrètement, IBM propose une plateforme logicielle
qui s’appelle « OpenShift
Red Hat en 2019, leader dans l’industrie des logiciels libres.
Elle est la fondation du cloud hybride et rend possible la
portabilité et l’interopérabilité.
En amont de cette plateforme, IBM développe des logiciels
pré-intégrés pour aller plus vite dans la sécurisation des
environnements, dans l’intégration, dans l’automatisation,
dans l’exploitation des données (stockées mais inutilisées
et/ou nouvellement créées), dans les fonctionnalités
Par exemple, lors de l’édition 2021 de son événement
annuel Think, IBM a annoncé Watson Orchestrate, une
nouvelle fonctionnalité qui démocratise l’IA et qui est
destinée à accroître la productivité au quotidien des
de traitement de l’information, et cela quelle que soit la
taille de l’entreprise.
mise en œuvre optimisant ainsi l’usage des technologies
administrations publiques.
de solutions puissantes d’exploitation des données, tout
en gardant le contrôle et la maîtrise des données et de leur
de la donnée une somme d’avantages concurrentiels à leur
« Parce que la donnée est
devenue une source d’avantage
concurrentiel et de compétition,
nos clients veulent en avoir
la maîtrise, et le contrôle de
solutions puissantes d’exploitation
des données auprès de partenaires
dignes de confiance avec lesquels
ils ne sont pas en concurrence.
C’est ce que nous appelons chez
IBM la souveraineté stratégique. »
167167 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
En chiffres...Plateformes, Cloud & Industrialisation
Sources : voir page 210
PLÉBISCITÉE MAIS ENCORE COMPLEXE À METTRE EN PLACE
10
clouds différents seront utilisés en moyenne
par les organisations d’ici 2023, provenant
d’un nombre croissant de fournisseurs.
. ¼
des entreprises disposent
aujourd’hui d’une stratégie holistique
de gestion multicloud.
. 84%des dirigeants citent le contrôle
d’une stratégie multi-cloud,
suivi par le manque de compétences pour construire
et gérer une telle plateforme (83%).
90%
des entreprises dans le monde
ont déjà intégré du cloud pour leur IT en 2019,
mais seulement 20% environ de leurs charges
de travail ont été réellement transférées
dans un environnement cloud.
168168 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Arkema opérera sa migration sur le cloud en moins de quatre ans
Jean-Charles Hardouin
Arkema
Depuis 2004 / CIO, Arkema
1999-2003 / IT Infrastructure Director, ATOFINA
1995-1999 / IT Infrastructure Manager, Michelin
Jean-Charles Hardouin est agrégé de Mathématiques.
Depuis 2018, la DSI d’Arkema est à pied d’œuvre pour
œuvrer à la réussite de la transformation digitale du premier
chimiste français. Une mission vaste et minutieuse à la fois,
opérant en profondeur sur différents grands chantiers.
Premier dossier fondamental, celui de la cybersécurité,
prioritaire pour le conseil d’administration, et placé sous
un contexte d’accélération digitale fort, nous portons
un programme qui aborde l’ensemble des dimensions
cyber, avec des axes domaine utilisateur, techniques,
Un ensemble ambitieux qui ne peut aboutir sans la prise en
compte d’une autre dimension majeure, celle de la culture,
s’il en est pour un industriel, mais aussi l’appropriation à
marche forcée des cultures dites agiles, avec le lancement,
il y a deux ans, du programme iTeam Tomorrow, visant
à l’évolution des compétences et au recrutement sur les
nouveaux métiers des équipes IT.
Autres grands sujets d’envergure, un travail structurant
sur l’enjeu data et son architecture, mais aussi le passage
d’un modèle reposant sur les data centers à celui misant
sur l’ comprenant notamment
une migration massive vers le cloud, rendue complexe
par le nombre croissant de data qui doivent pouvoir être
sujets de conduite de l’entreprise, la DSI s’est challengée
seule et en amont, il y a quatre ans déjà, comme le raconte
changer le modèle en allant massivement vers le cloud,
confort. Ne pas prendre à bras le corps ces technologies en
amont, c’était se mettre en incapacité de répondre à moyen
BIO
169169 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
reste l’instauration d’une culture collaborative et agile,
pour dissiper les frictions liées à la défense de pré carrés
Charles Hardouin.
terme à des demandes émanant des métiers, métiers
qui auraient donc tenté de trouver d’autres solutions
pouvant en outre mettre à mal nos ambitions en matière
de cybersécurité. C’était donc à la DSI que revenait la
charge de donner cette grande impulsion et d’embarquer
l’expert est forte dès le début. L’avenir appartient au cloud
hybride et le choix d’Arkema s’est d’abord porté sur le
constitue un
accélérateur de mise en œuvre de nouvelles solutions en
architecturant les services de base déjà disponibles. C’est
ce que nous avons ainsi pu expérimenter par exemple
La roadmap repose sur plusieurs grandes étapes
calendaires. En 2019 a commencé le pour
elle débuté cette même année, et l’ensemble s’achèvera
l’exception de la conservation d’un centre reliquat, pour
des données que le groupe international souhaite maîtriser
en propre. La transition complète prendra moins de quatre
ans, le choix du cloud public renforçant bien sûr de fait les
actions de contrôle et de suivi des accès, avec un cryptage
des données les plus sensibles.
Peut-on attribuer cette réussite et cette rapidité à des
« Des chantiers de cette ambition ne peuvent être lancés
sans s’appuyer sur une formation continue des équipes et
« Le plus grand défi reste
l’instauration d’une culture
collaborative et agile. »
170170 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Beyond progresse encore pour bâtir l’avenir du BTP
Frédéric Delrieu
Sixense
Depuis 2020 / Directeur Général Platform Solutions,
Sixense
2010-2019 / Successivement Directeur Général Adjoint
d’Ineo Com, Directeur Général Adjoint d’Ineo Digital,
Gérant de Ineo Digital, puis Président d’Ineo Solutions
Digitales & Directeur Délégué d’Ineo Tinea, Engie Ineo
2005-2010 / Directeur Infogérance et BPO, Team Partners
Group
2004-2005 / Directeur Infogérance Adjoint, GFI
2000-2004 / Directeur de Département, SopraSteria
Frédéric Delrieu est diplômé en Mathématiques
et Informatique de l’Université de Toulouse III.
solutions digitales dédiées à la construction, gestion et
opérations sur infrastructures, Vinci Construction avait
bien pour ambition de virtualiser le secteur le plus concret
qu’il soit, celui du BTP. En moins de deux ans, Sixense
avait développé et lancé Beyond, plateforme qui reste
aujourd’hui la seule capable de proposer le regroupement
de toutes les solutions métiers et logicielles du secteur :
services de design et de construction, exploitation des
données, géotechnique, activités liées aux structures
des mouvements de surfaces ou encore intégration du
B.I.M, technologie usuelle de modélisation des données
France et à l’international, Beyond permet pour la première
fois d’appréhender l’ouvrage sur la totalité de son cycle de
vie, en conservant et formatant tous les gisements data des
éléments patrimoniaux pour qu’ils représentent désormais
une aide à la décision, et puissent documenter la vie du
projet sur le long terme.
Les potentiels de la plateforme s’organisent autour de
quatre fonctionnalités : Beyond DigitalSite, Beyond
Monitoring, Beyond Asset et Beyond Reality. Beyond
DigitalSite, est la solution complète au service de la
maîtriser la qualité et garantir la sécurité. L’offre
Beyond Monitoring, solution de maîtrise des risques
géotechniques, structurels et environnementaux, est le
cœur du dispositif de gestion en temps réel des données
captées sur un ouvrage et des alarmes nécessaire à la
prévention des risques. Quant à la solution Beyond Asset,
elle permet de procéder à l’inventaire du patrimoine puis
de valoriser les données des ouvrages tout au long de leur
cycle de la vie, notamment sur les phases d’inspection,
BIO
171171 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
de maintenance et de travaux avec pour objectif
d’accompagner la maintenance préventive, d’établir
des scénarios budgétaires et de simuler les opérations à
Beyond Reality propose la visualisation en
3D et l’agrégation de données multi-sources du patrimoine,
via la création de jumeaux numériques.
La plateforme Beyond offre bel et bien au métier des
perspectives encore inédites : celle d’une information
mais aussi le gage d’une sécurité accrue des données ainsi
conservées. Pour autant, le champ des possibles demeure
encore ouvert, Sixense travaillant à pied d’œuvre pour
intégrer deux autres petites révolutions.
Celle du prédictif d’abord, pouvant, à terme faire parler
les data pour prédire l’évolution des ouvrages et des
infrastructures, y compris face au changement climatique.
Celle de la transversalité ensuite : « Les métiers de
la construction ont toujours été des métiers d’experts,
verticaux par essence. Une notion qui s’oppose
profondément aux valeurs de transversalité portées par
le digital. Et c’est ce sujet complexe de la réconciliation
que nous devons résoudre, en permettant à l’ensemble
de nos produits digitaux de communiquer entre eux
pour générer de nouvelles formes d’analyse. Nous
commençons progressivement à développer des premiers
an pour accélérer ces priorités. Dernier exemple en date :
l’intégration des données de relevés de défauts issues des
solutions de télédétection et de photogrammétrie dans
de maintenance et d’exploitation.
Le champ des possibles
demeure encore ouvert, Sixense
travaille à pied d’œuvre pour intégrer
deux autres petites révolutions :
le prédictif et la transversalité.
172172 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Le cloud à puissance variable, innovation du Groupe Asten
Franck Guibert
Groupe Asten
Depuis 2013 / Successivement Directeur d’Affaires
puis Directeur Général, Groupe Asten
2004-2013 / Directeur des Projets, Logica
1998-2004 / Ingénieur Informatique, Unilog
Franck Guibert est diplômé de l’Université de Sciences
et Technologies de Lille.
Pour le Groupe Asten, société de conseil stratégique et
technique en informatique et intégration technologique,
l’année 2021 rime avec innovation. Cette entreprise
française, qui accompagne notamment les organisations
sur la digitalisation et l’externalisation du stockage de leurs
crise pour analyser les nouveaux besoins de ses clients et
se mettre en capacité technologique d’y répondre. « D’un
côté, la donnée, de plus en plus stratégique devient aussi
plus massive, et confrontée aux nouvelles logiques durables
récurrente à des disparités d’activité notables, nécessitant
des niveaux de puissance et des besoins de stockage
Guibert, directeur général.
Dans la manière d’appréhender le cloud jusqu’ici, un choc
de variabilité mal géré pouvait rapidement créer une
situation de blocage, l’entreprise se devant d’anticiper
tout pic tel qu’un inventaire ou un réapprovisionnement
plus de souplesse mais aussi de graduation dans le
dimensionnement du besoin. « Il fallait aller plus loin et
BIO
« La donnée, de plus en plus
stratégique, devient aussi plus
massive, et confrontée aux
nouvelles logiques durables
du zéro papier. »
173173 PARTIE 4 Plateformes, Cloud & Industrialisation
Chose faite à l’été, avec le lancement d’une nouvelle
offre de cloud à puissance variable. Ce cloud nouvelle
génération, en mode container, alloue automatiquement
et en temps réel les besoins de vitesse, de traitement et
de stockage nécessaires aux montées en charge d’activité,
en facturant désormais à la consommation réelle. « Au-
delà d’un nouveau service qui répond à des enjeux
est également novateur par son approche informatique
et technologique. Nous avons misé, avec notre partenaire
IBM, sur les serveurs nouvelles génération POWER
CP4MCM, qui offrent un ratio de puissance de un à huit
par rapport aux serveurs traditionnels. Nous sommes les
premiers à installer ce type d’outils sur ce matériel. Un tel
équipement nous permettant d’offrir plus de puissance,
Franck Guibert.
Une innovation qui va dans le sens de la tendance
émergente de virtualisation : « Le cloud des entreprises
ne sera pas à terme privé ou public, mais hybride, avec
des data centers moins importants et reliés par des
principes de maillage. C’est d’ailleurs comme cela que nous
envisageons d’agir, en toute transparence avec nos clients,
en basculant vers des partenaires quand nous atteindrons
Comme pour tout autre projet portant une innovation
forte et en rupture, le lancement a dû être soutenu par
un processus de conduite au changement en interne
pour rassurer et former sur ces nouvelles manières
d’appréhender le métier du cloud.
Et l’offre, qui vient d’être lancée il y a quelques semaines,
compte déjà des adeptes parmi les clients du Groupe
Asten, qu’il s’agisse de grandes PME/PMI mais aussi acteurs
du CAC 40.
« À terme, le cloud des
entreprises ne sera pas privé
ou public, mais hybride,
avec des data centers moins
importants et reliés par
des principes de maillage. »
174174 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
PARTIE 5
Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
175175PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
176176 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Hervé Gbego
Compta Durable
Depuis 2011 / Président, Compta Durable
Depuis 2020 / Président du Groupe de Travail RSE de la
DFCG, président du Comité normalisation extra-financière,
Ordre national des experts comptables
Depuis 2020 / Président du CERCES - Cercle des Experts
Comptables
2016-2020 / Vice-président en charge du secteur
innovation, Ordre des experts comptables de Paris
Île-de-France
2006-2012 / Expert-comptable, commissaire aux comptes,
Audit CPA
2004-2005 / Consultant Banque, EY
2003-2004 / Auditeur expérimenté, Guibert & associés
Hervé Gbego est titulaire d’un diplôme d’expertise
comptable, d’un Master en Développement durable à Paris
Dauphine, d’un Executive Master des Mines ParisTech et
HEC Paris.
BIO
177177 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
l’entreprise. Pour les fonctions Finance, la prise en compte
de la RSE et de ses données qualitatives constitue un
changement culturel mais aussi un challenge technique.
compatibilité environnementale et sociale, la méthode
CARE (comptabilité adaptée au respect de l’écologie).
Le principe est d’en terminer
avec deux approches qui ne
dialoguent pas. Lorsque l’on
dégrade l’environnement du
fait de son activité économique,
on crée une dette vis-à-vis du
bien commun. Son montant
est évaluable en numéraire et
objectivable sur la base des
d’indicateurs mesurables. En leur
donnant un coût, on peut alors
les intégrer dans la comptabilité
générale, et les piloter au même
titre que le business.
Pour faire avancer cette idée, des experts-comptables
s’engagent. C’est le cas d’Hervé Gbego qui, après avoir
travaillé dans le secteur pétrolier, a fondé Compta Durable
en 2011. Ce cabinet met en pratique l’intégration de la
comptabilité environnementale et sociale, et conseille
les entreprises en matière de reporting RSE et d’audit
la recherche appliquée et compte des références comme
Maif, Carrefour et Auchan. Il travaille également sur les
normes comptables nationales et internationales pour
proposer de nouvelles pistes de normalisation.
« La question que nous posons est celle de l’utilisation du
levier comptable comme élément de transformation, estime
Hervé Gbego. Tant que l’on n’a
pas intégré ces enjeux dans la
on ne changera pas vraiment le
Cette démarche est différente
(qui repose une grille de
critères évalués à partir d’un
questionnaire, sans audit, et
attribue une note à l’instant t à
l’entreprise). Elle s’échelonne sur
trois à cinq ans.
« La comptabilité durable est produite par l’entreprise elle-
même, explique Hervé Gbego. À partir de sa stratégie, on
fait une analyse de matérialité du risque. On va mettre en
place un jeu de mesures sur un an : bilan carbone, analyse
du cycle de vie du produit, données sur la santé physique
et mentale, employabilité des collaborateurs, la notion de
salaire décent, la dégradation des sols, la biodiversité, etc.
Intégrer la dimension environnementale dans l’analyse financière
Lorsque l’on dégrade
l’environnement du fait de son
activité économique, on crée une
dette vis-à-vis du bien commun.
Son montant est évaluable
en numéraire.
178178 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
On va confronter le niveau de dégradation avec les
limites admissibles et valoriser l’écart entre les deux en
La mise en œuvre de cette analyse implique un travail
minutieux de modélisation.
Il faut parvenir à un consensus en matière d’indicateurs
(des débats qui existent aussi en comptabilité classique),
en particulier sur la mesure du capital humain. Le modèle
GIEC. « Toutefois la structuration de jeux de données
C’est le moment d’orienter l’IA sur le traitement des
données environnementales et sociales, pour mieux les
dans cette voie ?
« Quand les groupes nous sollicitent, ils commencent
souvent par prendre une douche froide, reconnaît Hervé
Gbego. Alors qu’ils pensent que leurs actions RSE vont être
mieux valorisées dans les comptes, on leur injecte de la
dette. Mais on ne compense pas une dette vis-à-vis de la
Accepter que toute activité économique crée une dette
écologique permet d’avoir une vision, de la piloter,
d’anticiper un durcissement de la réglementation CO2
par exemple. Réduire sa dette, c’est positif même si ça ne
« La structuration de jeux de
données fiables et homogènes
pose un défi. C’est le moment
d’orienter l’IA sur le traitement
des données environnementales
et sociales, pour mieux les
comprendre. »
179179 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Comment les Comex peuvent agir sur les enjeux de cybersécurité
Gérôme Billois
Wavestone
Depuis 2017 / Partner Cybersecurity & Digital Trust,
Wavestone
2004-2017 / Successivement Consultant, Manager,
Head of Business puis Senior Manager Risk Management
& Security, Wavestone
2002-2004 / Contrôleur Réseau & Sécurité, Total (UK)
2001-2002 / Ingénieur Réseaux, Telindus
Gérôme Billois est diplômé de l’Université de Franche Comté
et titulaire d’un Master Télécom d’INSA Lyon.
La cybermenace a explosé : le nombre d’attaques a été
multiplié par quatre entre 2019 et 2020, selon l’ANSSI(1) !
On compte trois grandes catégories : le rançongiciel
(une somme d’argent est réclamée en échange d’un
déblocage des systèmes), le vol de données (données
la fraude réalisée dans le système (fraude à l’identité,
économique apportent leur lot d’attaques plus silencieuses.
Ces agressions de forte ampleur n’hésitent pas à viser de
grandes entreprises.
Avec 600 spécialistes, Wavestone accompagne de grands
privilégiée sur la réalité en matière de sécurité. Selon
Gérôme Billois, Partner Cybersecurity & Digital Trust, les
grands groupes français sont en retard : « La menace a
été pleinement prise en compte dans le secteur bancaire
depuis 5-6 ans, rappelle-t-il. Les secteurs fortement
réglementés, comme l’énergie et les télécommunications,
ont suivi. Mais dans l’industrie et les services, le numérique
n’a pas toujours été considéré comme faisant partie du
BIO
50 entreprises du Top 100 français
consacrent moins de 5% de leur
budget SI à la cybersécurité,
alors que le bon niveau se situerait
entre 5 et 10%.
(1)
180180 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
cœur de métier, et les investissements sont clairement
Selon Wavestone, 50 entreprises du Top 100 français
consacrent moins de 5% de leur budget SI à la
cybersécurité (alors que le bon niveau se situerait entre
5 et 10%) et 50% seulement atteignent la conformité aux
standards internationaux. C’est également un problème
humain : la part moyenne de collaborateurs dédiés à la
cyberdéfense est de 1 expert pour 864 employés, contre
Quelle pourrait alors être la feuille de route d’un dirigeant
qui souhaite faire monter en puissance son organisation sur
le plan de la cybersécurité ?
Pour Gérôme Billois, il faut compter trois ans pour déployer
1. Faire comprendre aux membres du Comex la nature
et l’ampleur de la menace en rappelant qui peut attaquer
et pour quelles motivations.
2. Faire une évaluation des menaces, liées à Internet ou
au secteur d’activité, qui pèsent sur l’entreprise. « On va
benchmarker les méthodes actuelles des cybercriminels,
les bonnes pratiques de sécurité, mais aussi évaluer des
indicateurs comme le pourcentage de budget consacré à la
sécurité, le nombre d’experts formés par rapport à l’effectif
Ces chiffres concrets permettent de prendre la mesure de
l’effort à accomplir.
3. .
Le Comex établit un suivi régulier et des actions correctives.
Le plan doit agir à trois niveaux : la protection des
systèmes (y compris la sensibilisation des collaborateurs),
pour minimiser l’impact d’un éventuel incident. Une équipe
cybersécurité est nommée. Elle est rattachée la plupart
du temps à la DSI, car 80% de ses actions vont porter sur
la sécurisation de l’infrastructure, des systèmes et des
applications.
Dans un deuxième temps, elle pourra être rattachée à la
direction de l’Audit et des risques, quand son rôle évoluera
vers le contrôle.
Cette gouvernance mise en place, le challenge est celui
de la patience : « Il faut anticiper une frustration du Comex,
car un programme de cyberdéfense s’inscrit dans la durée,
nécessite des budgets importants (50 à 100 millions d’euros
en moyenne) et un suivi attentif par le Comex, explique
Gérôme Billois. Or la diminution du niveau de risque sera
lente à observer, l’organisation ne sera protégée qu’une fois
le dispositif entièrement déployé, et le caractère évolutif
de la menace peut en permanence remettre en cause le
plan(2)
(2)
181181 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
TROIS CONSEILS AUX COMEX POUR ENGAGER UN PLAN D’ACTION
CYBERSÉCURITÉ
1.
clients, données produits, processus, etc.)
2.
permettre d’agir concrètement. Plus largement que
des experts cybersécurité, ce sont des experts en
transformation qui vont vous permettre de conduire
ce changement
3.
plusieurs années
En chiffres...Cognitive Entreprise, Gouvernance
& Écosystèmes
Sources : voir page 210
27%
C’est la part d’entreprises françaises
qui ont déployé des solutions basées
sur l’IA pour améliorer la sécurité
de leur actifs et la détection des menaces,
depuis le début de la pandémie.
182182 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
En chiffres...Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
37%
capacité à faire face aux risques et disruptions, contre
13%des PDG français.
60%
des cadres dirigeants s’attendent à ce que leurs
organisations deviennent extrêmement complexes
d’ici trois ans.
Sources : voir page 210
183183 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Hachette Livre tourne la page de 40 ans de legacy
Mehdi Mohammedi
Hachette Livre
Depuis 2018 / Senior Vice President Information
Technology, Hachette Livre
2011-2018 / Chief Information Officer, Éditions Lefebvre
Sarrut
2008-2014 / Deputy IT Director puis CIO, Editions Francis
Lefebvre
2001-2008 / Project manager puis IT manager, Logica
Mehdi Mohammedi est diplômé de CentraleSupelec.
Troisième éditeur grand public mondial et leader français,
Hachette Livre (2 800 collaborateurs en France) a engagé
en 2018 la modernisation de son système d’information
pour répondre à des enjeux de pérennité et de sécurité.
Le schéma directeur prévoit une refonte par tranche pour
progressivement du mainframe. Le projet est mené
par Mehdi Mohammedi, avec une SI d’une centaine de
personnes.
« La première étape a été de se réorganiser, explique le
Senior Vice President Information Technology. Nous avons
et réduit les projets
incrémentaux pour nous concentrer sur les sujets utiles pour
de programmes, architectes, analystes) pour piloter ces
projets. Nous travaillons en proximité avec les métiers : on
Le Data Hub en est la première concrétisation. Il permet
une mise en commun des données, ce qui a débouché sur
plusieurs cas d’usage :
- Une refonte du Portail HachettePro.fr, utilisé par
plusieurs milliers de libraires. Plus accessible, ergonomique
et il est personnalisable par l’utilisateur
et présente une meilleure exposition commerciale du
catalogue.
BIO
« Nous travaillons en proximité
avec les métiers : on ne transforme
pas que l’outil, on forme aussi les
Hommes. »
184184 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
- La refonte de la Business Intelligence de la fonction
Finance, avec une ergonomie repensée.
données pour pouvoir se dégager du
En parallèle, d’autres chantiers opérationnels ont été
engagés en lien avec les éditeurs et les équipes Supply
Chain.
Avec la crise sanitaire, le schéma directeur a toutefois dû
être adapté, et accéléré en fonction du besoin. C’est le cas
du
Avant 2020, le télétravail était encore marginal (0,5 jour par
semaine). Pour favoriser le travail hybride, il a fallu équiper
les télétravailleurs. « 100% du parc sera passé en portable
nous avions préparé un cursus de formation, constitué de
modules d’e-learning organisés par cas d’usage et par
de Teams a été multiplié par 30, le s’est imposé au
quotidien, tandis que les e-mails sont restés stables.
engagements de dépenses, etc. a été accélérée.
« Travail hybride, variations de l’activité dans les entrepôts
en fonction des dispositions sanitaires… tous ces aléas ont
conclut Mehdi Mohammedi.
« Travail hybride, variations
de l’activité dans les entrepôts
en fonction des dispositions
sanitaires… tous ces aléas
ont pu être gérés et nous ont
confortés dans notre vision. »
185185 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
et sécurité pour ses systèmes d’information
Franck Perillier
Groupe Foncia
Depuis 2017 / Directeur de la Sécurité des Systèmes
d’Information, Groupe Foncia
2015-2017 / RSSI, Club Med
2010-2015 / RSSI, Mondial Assistance France,
Allianz Global Assistance Filiales Francophones
2004-2010 / Responsable du Service Architecture
des Systèmes, Mondial Assistance France
2000-2004 / Architecte Systèmes et Réseaux,
Mondial Assistance France
1996-2000 / Ingénieur études et développements, Synorg
Franck Perillier est ingénieur, diplômé de l’ISIM
(Institut des Sciences de l’Ingénieur de Montpellier).
Foncia est une entreprise de services immobiliers 360°,
incluant la transaction immobilière, la gestion locative et les
syndics de copropriété. Elle totalise 11 000 collaborateurs
répartis dans 400 sociétés.
Sous l’impulsion de Philippe Salle à la présidence, le
groupe a engagé une forte digitalisation pour moderniser
les activités métiers, déployer une solide colonne vertébrale
digitale et renforcer son offre de service client.
En trois ans, des chantiers complémentaires se sont
enchaînés :
- La généralisation d’équipements mobiles donnant une
place prépondérante à Apple sur une formule de location
auprès d’un prestataire
- Une architecture , y compris sur les fonctions
de sécurité, en remplacement progressif de data centers
et certaines applications et vers des
offres SaaS
- Une refonte totale de la téléphonie
SaaS pour une meilleure réponse client (décroche plus
rapide, AG virtuelles, visioconférence, etc.)
- Un ERP réécrit et spécialisé dans les métiers de la
transaction, administration de biens, gestion locative, etc.
- Un nouveau SI Finances & RH
- Des mesures de sécurité renforcées, notamment via
l’intégration de briques de fédération d’identité au niveau
groupe.
Foncia ayant également une forte activité d’acquisition
(50 à 80 sociétés intégrées par an), il est important de faire
des collaborateurs des maillons forts de la cybersécurité.
de la Sécurité des Systèmes d’Information. « Notre secteur
n’est pas aussi sensible que le militaire, l’énergie ou
BIO
186186 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
en se rapprochant des fonctions métiers et juridiques de
permettant aux métiers et aux fonctions SI de se rencontrer,
l’enjeu sécurité est intégré progressivement en amont
des projets, notamment sous la forme d’analyse de risque
et d’échanges qui se doivent d’être courts, concrets et
Sur environ 140 personnes à la DOSI, 5 travaillent
la santé, mais nous traitons des données personnelles
et sommes au cœur des travaux, des relations entre
propriétaires, locataires. C’est essentiel d’être un partenaire
« Pour aider cette prise de conscience sans être anxiogène
et la transformer en action positive, nous montrons
simplement aux dirigeants le nombre d’attaques qui les
cible. Nous le montrons également à l’ensemble des
collaborateurs, par la combinaison de cyberattaques
organisé un webinaire montrant, via l’analyse de cas réels,
opération de sensibilisation auprès de 9 000 collaborateurs
a obtenu un taux de participation supérieur à 80%.
Ces initiatives, et la mise sous contrôle de comportements
à risques, permettent de passer à l’action : mots de passe,
vigilance sur les e-mails, support IT, etc.
« La question à poser aux décideurs est : qu’est-ce que vous
Au-delà des analyses de risque, une nouvelle doctrine
de sécurité très opérationnelle a été déployée selon trois
axes :
1. L’architecture de sécurité (totalement reconstruite en
trois ans)
2. La constitution d’une équipe dédiée et de contacts
Filiales
3. couvrant la protection,
la détection, l’automatisation, puis l’anticipation via
notamment la connaissance du SI, les analyses de la
vulnérabilité, les audits, et la réaction à adopter.
Au-delà de ces dimensions IT et opérationnelles, il
« La question à poser aux
décideurs est : qu’est-ce que
vous ne craignez pas
de perdre définitivement ?
Tout le reste doit être protégé. »
187187 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Veolia, quatre piliers d’innovation digitale pour la transformation écologique
François Gauthier
Veolia
Depuis 2015 / CIO, Digital & Data Analytics, Veolia
2012-2015 / Senior Vice-President IT Transformation &
Sourcing (2012-2014) puis Deputy CIO Group, IS&T Strategy
Transformation & Sourcing, Alstom,
2001-2012 / Consultant et Dirigeant de startups spécialisées
dans le stockage et le traitement des données (Atempo,
Neartek, Visual Friendly…)
1995-2001 / Vice Président Groupe Purchasing (1995-1999)
puis VP Storage Business Unit (1999-2001), Bull
1992-1994 / COO, ActivCard
1990-1992 / Directeur Associé - Crédit Lyonnais Securities
1985-1988 / Business Development manager (1985_1986)
puis Product manager, Flight data Recorder, Schlumberger
Industries
François Gauthier est diplômé de CentraleSupelec
et de l’Imperial College Londres.
« Ressourcer le monde, contribuer au progrès humain,
en s’inscrivant résolument dans les Objectifs de
dans son périmètre actuel, totalise 180 000 collaborateurs.
Son métier : la transformation écologique portée par ses
expertises dans le traitement de l’eau, des déchets et de
et impactantes permettant de lutter contre le dérèglement
climatique, de traiter les pollutions, de préserver les
ressources et d’améliorer la qualité de vie.
Désormais, tous les projets du groupe sont évalués sous le
environnementale, sociale et sociétale. Un ensemble de
gère les grands programmes transverses et assure la
coordination fonctionnelle et l’animation de la communauté
des SI du groupe dans le monde entier (UK, Amérique
du Nord, Asie, etc.), soit 2 500 personnes. « Le plan
”One Veolia” a permis dès 2013 d’enclencher la
Digital & Data Analytics Groupe. Ainsi c’est au niveau
monde qu’ont été déployés la suite Google (2013) et
l’ensemble des outils collaboratifs, que le cloud est devenu
un objectif stratégique majeur (2015) et que la data, source
de valeur pour les opérations et les clients de Veolia, a été
structurée autour d’un et d’un référentiel d’objets
métier (2016). En 2021, la totalité des collaborateurs de
Veolia (à l’exception de quelques ) travaillent
et communiquent avec les outils Google, les deux tiers des
applications du groupe Veolia se trouvent dans le cloud et
toutes les entités dans le monde ont développé des feuilles
de route digitales autour de quatre piliers : les employés,
les clients, les opérations, les offres.
BIO
188188 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
L’innovation réside aussi dans la relation client. Pour
répondre à la demande de transparence des élus sur
la gestion de l’eau, Veolia a développé sa Customer
Portal Factory, un ensemble de briques fonctionnelles
permettant de créer facilement des sites de partage de
données opérationnelles avec les municipalités. Près de
50% du business de Veolia provient du secteur industriel et
commercial, demandeur lui aussi d’outils de pilotage.
nouvelles : « On n’a pas vocation à être éditeur de logiciel,
mais de solutions qui combinent la data, le digital avec
de l’expertise de service. L’humain reste au cœur de nos
métiers et la data et le digital sont au service de ce collectif
dans le but d’apporter à nos clients de meilleures solutions,
transformation environnementale dans laquelle Veolia s’est
Ce socle posé, le plan stratégique de Veolia, Impact 2023,
éventail de développement de solutions digitales.
En 2017-2018 beaucoup de POC ont été réalisés, le scope
digitaux choisis pour leur impact, leur capacité à créer de
François Gauthier.
Quelques exemples : le groupe a présenté début
2020 Hubgrade for Water Operation, sa solution
de supervision d’eau potable (anticipation de fuite,
redispatching de réseau), et une application pour optimiser
la maintenance des équipements, tels que les pompes
hydrauliques, basée sur l’IoT et l’IA prédictive (AmaaS :
Asset Management as a Service).
Autre segment stratégique, la performance des
bâtiments
Veolia optimise la performance énergétique globale et, plus
entrants et sortants. À la clé, des économies pour les clients
appréciable.
En Chine, Veolia a développé les
numérique pour réaliser des simulations sur des usines de
traitement, et prévoit de les associer avec des solutions
BIM.
traitement des
données industrielles
dans les incinérateurs de déchets dangereux pour en
améliorer le rendement, une technologie transposable
à tout type d’incinérateur.
« Beaucoup de POC ont été
réalisés, le scope s’est resserré
aujourd’hui sur une dizaine
de chantiers digitaux choisis
pour leur impact, leur capacité
à créer de la valeur et à être
déployés à l’international. »
189189 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
En chiffres...Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
61%des PDG estiment que l’autonomisation
de la main-d’oeuvre a été déterminante en 2020.
87%
des cadres prévoient de donner la priorité à l’amélioration de
l’agilité de leur entreprise au cours des deux prochaines années
(vs 65% qui déclarent que l’investissement dans l’IoT,
le cloud et la mobilité sera une priorité).
Sources : voir page 210
190190 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Tokenisation, blockchain
révolution n’a pas (encore) eu lieu »
Anthony Attia
Euronext
Depuis 2021 / Global Head Primary Markets and Post
Trade, Euronext
2014-2021 / CEO, Euronext Paris
2009 – 2013 / Successivement Senior Vice President
Universal Trading Platform, puis Chief of Staff to the
President and Deputy CEO, NYSE Euronext
2000 – 2007 / Successivement Head of Integration, Head
of Market Services puis Executive Director Head of
Operations, Euronext
1997 – 2000 / Project Manager Market Structure and
Trading Technology, ParisBourse
Anthony Attia est diplômé de l’ENSIIE et actuellement
membre du conseil d’administration des sociétés MTS
Markets, ELITE SpA, LCH SA et président du conseil de
Liquidshare .
Anthony Attia est aussi Vice-Président de la Federation of
European Securities Exchanges.
les premières et les plus profondes. Et elle continue à
opérer aujourd’hui, portée notamment par la blockchain,
le token et les cryptomonnaies. Mais sur ces sujets, les
écoles de pensée s’affrontent et Anthony Attia, membre
du directoire d’Euronext, les analyse pour le référentiel.
Dans quelle mesure les logiques de tokenisation et de
blockchain peuvent-elles transformer votre métier ?
Le token, ou jeton numérique, porte la promesse de
mais aussi toutes les informations qui leur sont propres.
Si ce processus de tokenisation devenait un jour réalité,
la disruption serait tout aussi grande que lors de la
dématérialisation passée des titres physiques. Beaucoup
dans nos métiers pensaient d’ailleurs cette révolution déjà
proche il y a quatre ans, anticipant une transformation
totale de l’ensemble de la chaîne titre. Mais la révolution
n’a pas encore eu lieu, et lorsque l’on regarde en arrière,
A quoi est dû cet échec ?
Des technologies encore jeunes et incompatibles ont
peiné à convaincre en termes de cybersécurité et de
performance. En outre, la promesse de désintermédiation
a pu effrayer, chacun voulant défendre son utilité dans
représenté un autre frein. Nos métiers étant systémiques
et hautement règlementés, une bascule radicale vers la
blockchain pouvait être génératrice de risques et nuire à la
investisseurs.
BIO
191191 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
reste l’absence d’un standard commun, garantissant une
blockchains privées et publiques.
Et quelle est la position spécifique d’Euronext ?
Nous prenons notre part dans les travaux autour de
Les principes de cette dernière reposant sur les valeurs de
décentralisation et de partage,
nous avons lancé un consortium
avec plusieurs acteurs tels que
BNP Paribas, Société Générale,
la Caisse des Dépôts ou
différentes sociétés de gestion,
pour innover ensemble. Est
née de cette alliance en 2017
une startup, LiquidShare, dont
la vocation est d’apporter plus
Nous avons également pris des
participations dans la startup
Tokeny, qui travaille sur le cas
de levées de fonds sur les marchés privés. Nous ne sommes
en revanche pas convaincus que cette technologie ira sur
l’activité cœur des plateformes de négociation dans notre
secteur pour toutes les raisons évoquées précédemment.
En 2021, nous avons achevé une expérimentation sur
le règlement des titres en monnaie numérique banque
A titre personnel, je m’interroge sur la durabilité de la
technologie supportant les cryptomonnaies telles que le
Bitcoin. Le nombre croissant des transactions entraine un
besoin exponentiel en puissance informatique, lui-même
générant une consommation d’énergie exponentielle dans
les centres informatiques. Ce modèle n’est pas vertueux :
avec le temps, la complexité du cryptage des transactions
sur la blockchain publique s’accroit et avec elle, le besoin
en électricité et en refroidissement des serveurs. Dans
un monde où nous tentons tous de faire des efforts pour
réduire la production de CO2,
l’adoption massive de cette
technologie ne pourra avoir
lieu que lorsqu’elle sera moins
consommatrice d’énergie.
De nouveaux protocoles
de consensus sont en cours
répondre à ces contraintes
énergétiques et pourraient
apporter une solution durable.
Quel est le niveau de maturité
réel de ces technologies ?
Le principe du token séduit et avec lui, tout ce qui
touche aux valeurs de partage, de désintermédiation
et de réduction des coûts.
La résistance des débuts s’est dissipée, permettant de
franchir un nouveau palier de maturité. Pour autant, ces
technologies cherchent encore de vrais cas d’usages à
impact. Et si on croyait la DLT(1) transformationnelle, elle
n’est en réalité qu’incrémentale. L’autre grand sujet qui
« Le nombre croissant
des transactions entraîne un
besoin exponentiel en puissance
informatique, lui-même générant
une consommation d’énergie
exponentielle dans les centres
informatiques. »
(1)
192192 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Existe-t-il un consensus sur le sujet ?
Non, des différences de vues fortes existent et les analyses
vertus transformatrices de l’actif et son projet de société.
A leurs côtés, coexistent des acteurs ayant un appétit pour
le risque attirés par la volatilité importante et des espoirs
de gains. Ces deux populations aux objectifs différents
génèrent du volume de transactions mais aussi de la
volatilité. En parallèle, de nouvelles analyses intéressantes
prennent corps, à l’instar de celle de Ray Dalio par
exemple, fondateur du fond Bridgewater Associates, qui
avance l’idée d’une valeur refuge, comme l’or, puisque ces
actifs restent décorrélés des fondamentaux économiques –
pour le moment !
Si l’on ne devait garder qu’une chose, quelle serait-
elle ?
a connu plusieurs révolutions initiées par les innovations
technologiques. Certaines de ces innovations ont le pouvoir
mais elles doivent s’inscrire dans l’esprit des cadres
réglementaires créés par la nécessité d’éviter la prochaine
les technologies naissantes autour de la blockchain
contribueront à réduire les risques, cela reste à voir.
centrale. Ceci permet de valider l’utilisation potentielle
d’un euro digital dans nos marchés. Nous avons aussi lancé
des produits d’investissements, dits , sur Bitcoin et
Ethereum pour répondre à la demande des investisseurs.
d’accompagner nos entreprises en Europe dans leur
croissance. Nous continuons donc de suivre de près les
évolutions technologiques et réglementaires, notamment
Et quid du sujet largement débattu des
cryptomonnaies, émanation très médiatique de ces
technologies ?
La promesse de cet actif digital est inédite, puisqu’il ne
dépend pas des banques centrales, n’est pas attaché
à une économie ou indice d’évaluation tangible et n’a
système monétaire, la cryptomonnaie a d’abord connu des
Mais en dix ans, elle est pour autant devenue un véhicule
extrême. Le 9 mars 2021, le Coin Market Cap, indice de
capitalisation de marché, s’élevait à 800 milliards d’euros,
soit 10% de la valeur de l’or. Les banques elles-mêmes,
après avoir fustigé le bitcoin, commencent pour certaines
à proposer leurs services sur ce sujet. Ce retournement s’est
s’adaptent, parfois même malgré leurs convictions.
sujets pour ses clients, après avoir pourtant posé son veto
dans un premier temps.
193193 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Le CNRS et IBM cherchent à percer le secret quantique
Aida Todri-Sanial
CNRS
Depuis 2019 / Directrice de recherche CNRS-LIRMM
2011-2019 / Chercheur, Laboratoire d’Informatique,
de Robotique et de Microélectronique de Montpellier, CNRS
2004-2009 / PhD Research Assistant, UCSB
Aida Todri-Sanial est diplômée de la Bradley University
et de la California State University. Elle détient un PhD
en Electrical and Computer Engineering de l’UC Santa
Barbara. Elle est également Visiting Research Fellow
de l’Université de Cambridge.
Aida Todri-Sanial pourrait disserter des heures sur les
promesses annoncées par la révolution des technologies
quantiques. Les convictions de cette directrice de recherche
au CNRS sont en effet aussi grandes que le champ des
possibles promis par la discipline. « Au-delà d’un aspect
intellectuellement passionnant, ce qu’on peut attendre
du quantique demeure majeur pour le monde de demain.
Il n’est pas question seulement d’accélération mais bien
de rupture, car avec lui, nous pourrons découvrir d’autres
Une raison probable pour laquelle la Région Occitanie
a souhaité présenter les travaux de recherche de son
laboratoire LIRMM de l’Université de Montpellier à IBM,
entreprise elle-même très investie dans cette quête.
La rencontre fut décisive, le laboratoire en informatique et
microélectronique faisant depuis partie de l’écosystème
collaboratif français qui participe au réseau mondial
IBM Quantum Network. Cette grande constellation
internationale de 148 membres, initiée par IBM, a ainsi pour
vocation de créer des ponts entre laboratoires universitaires
et acteurs du privé pour faire progresser la recherche
quantique sur les versants algorithmiques et matériels.
Pourquoi un tel engouement sur une science qui n’a pas
encore véritablement de cas d’usage en production ? Tout
simplement parce que le raisonnement quantique et sa
puissance promettent de résoudre possiblement l’irrésolu
au nom de propriétés uniques. Quand la physique classique
considère ainsi que nous avons tous, Homme ou objet,
du quantique établissent, elles, qu’à l’échelle des atomes,
une particule ou molécule peut bien se trouver à plusieurs
Ces unités peuvent de surcroît s’enchevêtrer, les deux
phénomènes de superposition et d’intrication créant alors
BIO
194194 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
par exemple, à un ordinateur quantique d’avoir accès à
la totalité des résultats possibles d’un calcul en une seule
étape, là où un ordinateur classique doit traiter l’information
de façon séquentielle, un résultat après l’autre. Le gain
de temps pour le traitement des données massives serait
considérable.
Mais pour que ces théories aboutissent, le chemin est
encore long et la recherche importante, d’autres alliances
ou Alibaba se livrant également à une course de vitesse
sans précédent pour percer ce secret. Au programme
qubits, incarnation essentielle du calcul quantique. Ainsi,
quand les ordinateurs classiques utilisent le langage des
bits et les additionnent, les multiplient ou les comparent,
le calculateur quantique utilise lui des qubits qui peuvent
adopter ces fameux états de superposition et d’intrication.
Mais Aida Todri-Sanial le rappelle, cette avancée prend du
temps, rendant pour le moment les machines quantiques
encore trop peu puissantes : « Le but actuel reste d’aller à
minima vers la création d’un processeur de 1 000 qubits.
Avec cette échelle, nous pourrons tester le calcul de
problèmes réels. IBM estime le franchissement de cette
barrière de 1 000 qubits en 2023. Mais il faudra ensuite
temps incommensurable avec une vitesse de calcul sans
commune mesure avec celle d’aujourd’hui, nous allons
investiguer des champs inexplorés et passer au sens propre
100 millions de fois supérieure à un ordinateur classique,
l’informatique quantique pourra en effet développer un
grand nombre d’applications, partout où la puissance de
actuellement sur un système d’absorption du dioxyde
de carbone. On peut imaginer également en chimie,
biologie et médecine, la possibilité de simuler des
molécules sans avoir besoin de passer par la phase du
test réel pour les caractériser. Dans le secteur industriel,
le calcul quantique pourrait aussi contribuer à résoudre
les problèmes d’optimisation. En défense et sécurité, les
algorithmes bouleverseront eux les systèmes actuels de
quantiques pourraient optimiser la gestion des risques.
« Et cela bouleversera probablement des champs qu’on
Sanial. Raison probable pour laquelle le Président Macron
annonçait le 25 janvier dernier le Plan Quantique français,
faisant de cette recherche un sujet d’importance étatique et
d’indépendance stratégique.
Avec une vitesse plus de 100 millions
de fois supérieure à un ordinateur
classique, l’informatique quantique
pourra développer un grand nombre
d’applications, partout où
la puissance de calcul est un enjeu.
195195 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Nanotechnologies, IA,
de la hard tech selon IBM Research
Dario Gil
IBM Research
Depuis 2019 / Senior Vice President, Directeur d’IBM
Research, en charge de la roadmap technologique
et des stratégies d’innovation
2018-2019 / COO, IBM Research
2003-2018 / Divers postes de recherche et de senior
management au sein d’IBM Research, en science et
technologie, systèmes cognitifs, solutions sectorielles,
quantum computing...
Dario Gil est diplômé du Massachussetts Institute of
Technology en Ingénierie électrique et informatique.
Il co-dirige le Laboratoire MIT-IBM Watson AI et le
Consortium Covid-19 High-Performance Computing,
en support de la recherche sur la COVID-19.
Des robots à votre grille-pain en passant par l’Intelligence
que les technologies rendent nos vies meilleures et plus
faciles. Si certaines sont relativement simples, d’autres ont
des applications durables et profondes. Et sans elles, notre
monde s’arrêterait, tout simplement.
Ces technologies complexes sont la raison d’être d’IBM
aux problèmes informatiques les plus ardus dans nos
laboratoires du monde entier. Il est impossible d’expliquer
l’histoire de l’informatique sans IBM. Il est tout aussi
impossible de décrire le présent - et sans doute l’avenir -
de l’informatique sans nos recherches. Les percées de nos
de l’IA, du cloud hybride et de l’informatique quantique
impactent les domaines de la nanotechnologie et des semi-
conducteurs, des systèmes d’exploitation, de l’informatique
sans serveur, de la cryptographie avancée, de la santé, de la
science des matériaux et bien d’autres encore.
et
s’appuient sur les progrès fondamentaux de la science des
matériaux, du niveau de l’atome à la limite de l’informatique.
IBM est une société de informatique.
Alors, quelle est la prochaine technologie remarquable sur
laquelle IBM Research travaille aujourd’hui ?
L’INFORMATIQUE
Il est loin le temps où les ordinateurs remplissaient une
années 40, les chercheurs d’IBM et le physicien Howard
Hathaway Aiken ont créé le Harvard Mark I, ordinateur
Il pesait cinq tonnes et était essentiellement mécanique,
avec quelques 750 000 pièces.
BIO
196196 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Au cours des années, les ordinateurs sont devenus
intégrés qui ne cessent de rétrécir. Les puces couramment
utilisées aujourd’hui dans les smartphones mesurent sept
nanomètres, alors que la plupart des protéines atteignent
environ 10 nm de long et qu’un virus typique en fait
dix fois plus.
Plus les puces sont petites, plus les appareils sont
rapides et économes en énergie, à coût égal. En 2015,
les chercheurs d’IBM ont créé les premiers transistors
fonctionnels avec la technologie 7nm en utilisant un
processus silicium-germanium.
Puis en 2017, ils ont encore
rétréci la puce à 5nm. En
2021, nous avons annoncé le
dernier jalon : 2nm. Ces puces
de 2nm vont donc presque
doubler les performances de
leurs cousines de 7nm, en
utilisant la même quantité
d’énergie (ou économiser
environ 75 % d’énergie à
niveau de performance égal).
Elles pourraient également
quadrupler la durée de vie des batteries des téléphones
mobiles. En collaboration avec des partenaires tels que
Samsung et Intel, IBM Research continue à repousser les
limites de la technologie des semi-conducteurs.
Ces puces seront également utiles pour l’IA. À mesure que
les modèles d’IA deviennent plus élaborés et complexes,
ils deviennent également de plus en plus gourmands en
énergie. Selon une estimation, l’apprentissage d’un grand
modèle de traitement du langage naturel génère presque
autant de CO2 que cinq voitures américaines pendant toute
année, en nous engageant à multiplier les performances
en énergie, les chercheurs pourront explorer de nouveaux
matériels pour l’IA et améliorer ceux qui existent.
Depuis son apparition dans les années 1950, la progression
de l’IA a été longue et sinueuse.
Aujourd’hui, il est essentiel que
surtout lorsqu’il s’agit de
l’adopter à grande échelle pour
résoudre des enjeux complexes,
comme la compréhension des
langues.
Les langages nous aident
à penser et à raisonner, et
nous permettent de partager.
Nous voulons que l’IA le fasse
aussi : pas seulement imiter le langage humain, mais le
comprendre, raisonner et en tirer des enseignements. Nous
méthodes telles que l’apprentissage profond
nous avons fait de grands progrès au cours des
dernières décennies. Alimentés par des réseaux neuronaux
et des algorithmes de
textes, de sons et d’images), les modèles d’IA ont permis
de nombreuses percées dans les domaines de la vision
par ordinateur, du traitement du langage naturel, de la
traduction, de la reconnaissance vocale et bien plus encore.
« En 2019, nous nous sommes
mis au défi de doubler l’efficacité
des performances de l’IA
chaque année, et à multiplier
les performances par plus
de douze d’ici 2022. »
197197 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
C’est là que l’IA peut nous aider : en apprenant à coder
comme les humains. Et nous le faisons déjà, avec AI for
Code.
DU CODAGE À LA CHIMIE ET AU QUANTIQUE
Pendant que certaines de nos IA apprennent à coder,
d’autres déchiffrent le langage de la chimie.
Nos chercheurs ont récemment créé un robot chimiste,
baptisé RoboRXN, appareil de recherche entièrement
automatisé, géré dans le cloud et alimenté par l’IA. L’IA
utilise les connaissances des 200 dernières années pour
découvrir de nouvelles molécules dotées de certaines
propriétés. Cette plateforme de synthèse automatique nous
aide à concevoir et à synthétiser de nouveaux matériaux en
quelques mois au lieu de plusieurs années et de millions de
dollars de budget.
Aujourd’hui, nous nous tournons vers ces nouveaux outils
puissants d’IA pour étudier les langues d’une manière
totalement différente. Notre objectif est d’étendre les
codage et de la chimie, deux domaines qui reposent sur
des symboles.
Nous sommes la seule espèce à abstraire le langage
en symboles : ils sont partout autour de nous, des
caractères typographiques de notre langue parlée aux
symboles numériques représentant les propriétés des
mathématiques, en passant par les cartes schématiques
illustrant la chimie et la disposition des molécules.
C’est dans ce domaine précis que portent nos efforts
actuellement. Nous enseignons à l’IA le langage du codage
et le langage de la chimie.
C’est là que le voyage de l’IA est sur le point de s’accélérer.
Considérons d’abord le codage. Au cours des dernières
décennies, l’automatisation a aidé les entreprises à devenir
Mais les codes ne sont pas d’un abord simple, ils sont
à jour et à sécuriser. Les entreprises dépensent environ
mille milliards de dollars chaque année pour programmer,
déboguer et sécuriser les logiciels. Et de nombreuses
entreprises qui s’appuient sur des logiciels souffrent d’une
Cela représente une énorme opportunité pour l’IA. Et si nous
pouvions enseigner à l’IA non seulement le langage humain
nous pouvions faire en sorte que l’IA fasse un meilleur travail
que nous en matière de programmation ? Elle pourrait nous
aider à améliorer l’informatique en périphérie de réseau
et d’autres applications gourmandes en données dans le
cloud, des voitures autonomes aux appareils intelligents, en
passant par les maisons et les usines.
« Les entreprises dépensent environ
mille milliards de dollars chaque
année pour programmer, déboguer
et sécuriser les logiciels (...). Et si
nous pouvions faire en sorte que l’IA
fasse un meilleur travail que nous en
matière de programmation ? »
198198 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
À l’avenir, RoboRXN pourrait s’associer à une autre
technologie émergeante : l’informatique quantique.
Ensemble, ces technologies devraient donner une nouvelle
dimension à la conception de matériaux innovants. Pour
des simulations rapides et précises, rien ne pourra surpasser
un ordinateur quantique.
Si les ordinateurs classiques ont été d’une aide précieuse
molécule, ils ont atteint leurs limites. Il y a plus de
possibilités pour certaines combinaisons moléculaires qu’il
n’y a d’atomes dans l’univers.
C’est là que l’informatique quantique, un terrain de jeu
pour les pourrait être utile.
plus de 1 000 qubits, baptisé IBM Quantum Condor.
À ce stade, les ordinateurs quantiques nous permettront
d’effectuer des simulations beaucoup plus rapides et
précises. Associés à l’IA et aux ordinateurs à haute
performance, les ordinateurs quantiques du futur, équipés
plus puissantes, devraient révolutionner la façon dont nous
concevons les nouveaux matériaux.
DU MONDE
Aujourd’hui, des puces toujours plus petites et plus
puissantes contribuent également à créer un cloud toujours
plus puissant - la ressource informatique la plus grande et la
à une myriade de datacenters publics et privés.
Le logiciel de pointe sur lequel fonctionne cet énorme
cloud hybride public-privé est aussi le résultat d’une
collaboration de fournisseurs, de plateformes, de services
et d’outils à l’échelle mondiale. Et ce sont les
qui permettent aux entreprises de gérer, d’analyser et de
stocker des données en toute sécurité dans de nombreux
clouds et environnements. Ce sont les qui
supportent l’architecture ouverte sans serveur et permettent
à un réseau d’ordinateurs distribués de fonctionner comme
Calcul haute performance, nanotechnologie, IA, quantique
et cloud hybride : ensemble, ces éléments nous
aideront à construire un monde de demain bien meilleur et
plus durable.
« Aujourd’hui, des puces toujours
plus petites et plus puissantes
contribuent également à créer
un cloud toujours plus puissant. »
199199 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
« Nous aurons besoin du
du changement climatique »
Xavier Vasques
IBM France
Depuis 2021 / Chief Technology Officer, IBM Technology,
IBM France
2018-2021 / Directeur du Centre mondial d’IBM Systems à
Montpellier, Distinguished Data Scientist et Membre
de l’IBM Academy of Technology
2017-2018 / Chef de cabinet du Président, IBM France
2015-2017 / Divers postes jusqu’à Directeur EMEA, IBM
Systems Center, et CTO de la Division Systems Hardware,
IBM France
2013-2014 / Chercheur dans le cadre du Blue Brain Project,
École Polytechnique de Lausanne
2008-2013 / Divers postes, IBM France
Xavier Vasques est diplômé en mathématiques,
informatique et neurosciences de l’Université Pierre
et Marie Curie, ingénieur en informatique au Conservatoire
National des Arts et Métiers à Montpellier, et titulaire
d’un doctorat de neurosciences de la Faculté de médecine
de Montpellier.
Pouvez-vous expliquer en quelques idées l’apport du
quantique à la science de l’information ?
dire que les ordinateurs ont incroyablement bien servi la
société au cours des sept dernières décennies. Cependant,
grandes opportunités d’aujourd’hui restent hors de portée
de nos ordinateurs classiques - et ce n’est pas seulement
une question de machines plus rapides. Si nous voulons
nous devons résoudre de nombreux problèmes tels que
concevoir de meilleures batteries, trouver des moyens
chaînes d’approvisionnement pour minimiser les transports.
approches informatiques radicalement améliorées dans des
domaines tels que la chimie et la science des matériaux,
ainsi que dans l’optimisation et la simulation - des domaines
où l’informatique classique est confrontée à de sérieuses
limitations.
Quelles sont les applications potentielles dans le
monde de l’entreprise ?
Pour ne donner qu’une seule illustration : le problème dit
le problème de l’acheminement des camions de livraison.
adresses, le problème devient exponentiellement plus
a plus de 43 milliards d’itinéraires possibles, ce qui rend
pratiquement impossible de trouver le meilleur.
BIO
200200 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
exponentielle, est une barrière sérieuse à l’informatique
classique, mais qui peut potentiellement être surmontée
par l’informatique quantique.
Quelles industries vont être prioritairement impactées ?
À l’heure actuelle, l’informatique quantique est adaptée
pour certains algorithmes comme l’optimisation, le
ou la simulation. Avec ce type d’algorithmes,
les cas d’usage s’appliquent dans plusieurs secteurs
risques de portefeuille, la détection des fraudes, la santé
(recherche de médicaments, étude des protéines, etc.), les
chaînes d’approvisionnement et la logistique, la chimie, la
recherche de nouveaux matériaux sont autant de domaines
qui vont être prioritairement impactés.
Comment accompagner cette révolution pour
l’entreprise ? Comment notamment disposer des
bonnes compétences et nouer des coopérations ?
Tirer parti des avantages de l’informatique quantique
nécessitera un partenariat entre l’industrie, les universités
et les gouvernements pour conduire la recherche
fondamentale, créer les talents et les compétences
nécessaires, aider l’industrie à explorer d’abord comment
cette nouvelle technologie peut être utilisée pour un
avantage économique, puis permettre l’adoption pratique
de solutions quantiques à mesure que la technologie
évolue. Nous devons créer des communautés de
découverte.
« Tirer parti des avantages
de l’informatique quantique
nécessitera un partenariat
entre l’industrie, les universités
et les gouvernements... »
Quel rôle IBM entend-t-il jouer dans l’essor du
quantique ?
Nous souhaitons aider à favoriser l’adoption mondiale de
l’informatique quantique. IBM a été la première entreprise
à fournir un accès public à un ordinateur quantique sur le
cloud - un système de 5 qubits en 2016. Cette ouverture
a permis à plus de 300 000 utilisateurs de lancer des
centaines de milliards d’exécutions de circuits sur du
matériel réel et des simulateurs. L’accès à ses machines
a conduit à la publication de plus de 400 papiers de
recherche. Aujourd’hui, IBM propose plus de 25 ordinateurs
quantiques, dont un système 65-qubit, aux 140 membres
du réseau IBM Quantum, la communauté active qui
travaille sur ces systèmes.
201201 PARTIE 5 Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Depuis le début de la crise de la Covid-19
59% des organisations ont accéléré leur transformation numérique.
Pendant la crise de la Covid-19
66%
des organisations ont réussi à mener à bien des initiatives
qui se heurtaient auparavant à des résistances.
En chiffres...Cognitive Entreprise, Gouvernance & Écosystèmes
Sources : voir page 210
202 Postface
Nous venons de recueillir le témoignage de nombreux
dirigeants ; en tant que présidente d’IBM, quels
enseignements tirez-vous personnellement de vos
échanges au plus haut niveau avec vos clients ?
Cette période a été une incroyable mise à l’épreuve
du leadership, exceptionnelle dans sa forme comme dans
sa durée. Tout le monde pensait que cette crise serait
rapide, puis après plusieurs phases, nous avons compris
qu’il n’y aurait pas de retour en arrière possible.
La situation de crise a fait tomber des doutes, des tabous,
et amené une hyper accélération de la digitalisation.
sérieuses et robustes. Là où nous réalisions des POC
sur des innovations périphériques par rapport au
nous attaquons désormais le cœur du réacteur.
Nous prenons le risque de remettre en cause le système
patrimonial d’une entreprise pour aller vers des approches
fonctionnement principal de l’entreprise et va lui amener de
nouvelles opportunités.
Le premier sujet qui se pose est celui de l’organisation du
: le télétravail temporaire fait place au travail hybride
permanent. Comment va-t-on concrètement le mettre en
place ?
Le deuxième sujet est : la menace a
été multipliée par quatre en France en 2020(1). La prise
de conscience est là mais la situation n’est pas encore
POSTFACE
Béatrice KosowskiPrésidente, IBM France
« Le digital est entré dans le fonctionnement principal de l’entreprise et va lui amener de nouvelles opportunités. »
(1)
203 Postface
totalement maîtrisée, d’autant plus qu’elle intervient
justement dans une phase de transformation où l’entreprise
est plus vulnérable.
Le troisième sujet est celui de la valorisation de la donnée.
Elle est la richesse de l’entreprise, il faut la protéger, mais il
faut surtout la faire rayonner à sa pleine mesure. Selon nos
études(2), 93% des données collectées en entreprise ne sont
pas exploitées. Il y a trois ans, c’était 80% ! Nous avons créé
des données de façon exponentielle mais leur valorisation
n’a pas progressé dans la même proportion.
Le quatrième sujet, en corollaire, est celui de l’IA :
nous allons vouloir en injecter dans tous les processus
l’automatisation. L’IA passe à une phase industrielle,
à l’échelle, robuste, et spécialisée par secteur.
Durant cette année, on a également beaucoup parlé
de souveraineté et d’éthique…
Une partie des innovations dont les entreprises ont besoin
se trouvent entre les mains d’acteurs non-européens.
Nos clients ont un besoin de souveraineté stratégique
plutôt qu’une préoccupation de souveraineté nationale
stricto sensu.
L’approche hybride, c’est-à-dire une architecture qui
permette d’avoir le bon de bien valoriser
un sous-traitant, dans un point de vente ou dans le cloud -,
voilà ce que recherchent les entreprises. Notre rôle est de
les accompagner en proposant des technologies capables
d’irriguer l’entreprise, ses collaborateurs, son écosystème,
tout en le protégeant.
Un exemple : dans le cloud public, la technologie « keep
C’est lui qui crée et garde la clé du coffre-fort, aucun
collaborateur d’IBM ne peut y avoir accès.
Autre exemple : dans certains secteurs, les régulations
ne cessent de se renforcer, et c’est pourquoi nous leur
apportons des réponses spécialisées. Dans le domaine
bancaire, notre cloud peut gérer en temps réel les
230 contrôles de sécurité et de conformité nécessaires.
Sur le point de l’éthique, le débat est important mais
il faut surtout apporter des preuves tangibles de notre
engagement. Notre conviction c’est que l’éthique
nécessite des expertises et des investissements. À cette
crée des méthodologies pour assurer l’éthique de l’IA.
Et il faut appliquer cette éthique à la méthode de travail,
aux produits, aux actifs, en constituant des équipes
pluridisciplinaires et diverses. Avec notre programme
Women in AI, nous voulons amener cette diversité de
En réalité, l’éthique de l’IA et l’aspiration à plus d’inclusion
sont deux enjeux qui se rejoignent : il y a un grand besoin
de diversité pour construire cette éthique, ce qui nécessite
un engagement en matière d’intégration des compétences.
L’éthique rejoint également la question du sens,
si importante, en particulier pour les jeunes talents.
(2)
204 Postface
Par exemple, nous utilisons l’informatique quantique
des matériaux capables d’absorber du CO2 et d’en faire
une source d’énergie. Ces travaux de long terme sont
prometteurs. Autre exemple, début 2021, nos chercheurs
ont mis au point un prototype de batterie très performant
n’utilisant ni lithium ni cobalt.
Dans le cadre de notre challenge mondial Call for Code
créé en 2018, 15 000 solutions ont été proposées, dont un
grand nombre concerne l’environnement. L’un des lauréats,
la plateforme Agrolly(4)
technologie au service des petits agriculteurs. Elle connecte
les prévisions météo de The Weather Company avec des
données historiques de la NASA, les besoins en cultures
publiés par la FAO et permet ainsi aux agriculteurs de
s’adapter, de faire de meilleures prévisions, et d’obtenir des
du retail utilisent également la technologie pour parvenir à
une mode durable (sourcing, production, logistique, etc.).
Là encore, il s’agit de réussir l’hybridation entre l’ancien
et le nouveau, de relier les acteurs pour faire mieux. Il ne
s’agit pas, à chaque innovation, de jeter l’existant pour
recréer un tout, mais de s’appuyer de façon positive sur son
patrimoine qui a demandé du travail et a une valeur.
Après la vague de l’Intelligence Artificielle, quelles
sont les prochaines frontières technologiques pour
IBM ?
Les technologies d’IA, de blockchain, de data processing
se démocratisent, certes, mais je suis convaincue que
nous n’en sommes qu’au tout début. C’est toujours dans
économique et sens sont liés : la créativité crée de la
diversité et de la valeur.
Dans ces temps d’incertitude, il faut également
concilier redressement économique et transformation
environnementale. Comment adressez-vous ce sujet
chez IBM ?
Effectivement, l’analyse du rapport coût-avantage
clients, même s’il y peut y avoir des différences de maturité.
Tout le monde est d’accord : 80% des consommateurs
disent que la durabilité est importante pour eux, 64% des
(les jeunes talents que nous recrutons) tiennent
compte, pour choisir leur employeur, de ses engagements
sociétaux et environnementaux, et deux dirigeants sur trois
pensent qu’une stratégie durabilité est essentielle pour être
compétitif.(3)
On ne peut pas se passer de la technologie, ne serait-
ce que pour mesurer ce que l’on accomplit en matière
environnementale. Il est important de poser un cadre
juridique, de mettre en place des méthodes de sobriété,
notamment numérique.
Pour notre part, nous sommes actifs pour l’environnement
en tant qu’entreprise - IBM a avancé la réalisation de
sa neutralité carbone à 2030 -, et nous engageons nos
équipes Recherche & Développement et notre écosystème
à trouver des solutions technologiques permettant la
résolution de problèmes concrets.
(3) (4)
205 Postface
nous envisageons le lancement commercial d’un ordinateur
quantique à 1 000 qubits en 2023. Pour nous y préparer,
nous mettons en place un réseau avec des universités,
des centres de recherche, des clients et d’autres acteurs
usages prioritaires, et nous approchons la communauté des
développeurs pour une première acculturation. Le travail
de formation va être fondamental.
la dimension
humaine. La transformation organisationnelle, la conduite
et l’accompagnement du changement sont très importants,
surtout que l’on passe en même temps au travail hybride.
Dans ce domaine, nous sommes encore très loin de la
maturité.
Nous sommes optimistes tout en étant conscients du
chemin à parcourir. Il y a trois ans, 80%(5) des applications
n’avaient pas migré vers le cloud, aujourd’hui, c’est
encore 74%(6). Ces transformations fondamentales ne se
font pas du jour au lendemain. Nous sommes là pour les
accompagner.
la conjugaison de toutes les innovations que l’on trouve
Le premier axe de travail, c’est la modernisation, la
sécurisation des applications, le fait de rendre les
processus intelligents. Nous avons annoncé un projet
d’IA en open source pour comprendre le langage de
programmation des codes machines et des applications.
Baptisée CodeNet, cette base de données qui comprend
500 millions de lignes de code dans 55 langages de
programmation différents a pour ambition de relever trois
différents codes, et personnaliser le code en fonction des
Un véritable pas de géant pour exploiter au mieux le
patrimoine applicatif !
Le deuxième axe concerne la 5G. Nous sommes favorables
récemment lancé avec Bouygues Telecom un Lab 5G
pour développer de nouveaux cas d’usage. La 5G répond
à des besoins métiers, à des sujets d’obsolescence et de
vulnérabilité dans l’industrie. Les logiques de virtualisation
apportent des avantages économiques et des avantages
environnementaux, pourquoi s’en priver ?
En troisième lieu, le quantique va apporter une nouvelle
Il va permettre de résoudre des problèmes de nature
exponentielle, dans différents secteurs comme la banque,
la chimie, la santé, la logistique, le transport, la sécurité,
etc. Ce ne sont pas des technologies futuristes puisque
« La transformation organisationnelle, la conduite et l’accompagnement du changement sont très importants, surtout que l’on passe en même temps au travail hybride. »
(5) (6)
206 À propos
À PROPOS
IBM, entreprise centenaire, se positionne comme le partenaire privilégié de la transformation digitale, cognitive et cloud de ses clients et leur permet ainsi de se différencier et d’innover sur leur marché en mettant à leur disposition technologies,
dernière décennie, la proposition de valeur d’IBM a été elle-même réinventée de bout en bout par une série d’actions de transformation.
1. DES INVESTISSEMENTS POUR STIMULER L'INNOVATION Depuis toujours, l’innovation est le moteur d’IBM, et la transformation de la stratégie, du portefeuille et des compétences pour répondre aux besoins de ses clients est permanente. Le positionnement sur le cloud hybride et le multi-cloud a été accéléré, avec en 2019 le rachat majeur de Red Hat, premier éditeur mondial de solutions logicielles open source, et l’adaptation du portefeuille de solutions. Les investissements de R&D ont été
comme l’IA, la blockchain et l’informatique quantique ainsi que la sécurité. En 2020, plus de 9 100 brevets ont été déposés et IBM conserve ainsi son leadership en termes de brevets déposés pour la vingt-huitième année consécutive (40% de plus que le second dans le classement).
2. UN PORTEFEUILLE CONSTRUIT POUR L'AVENIRUne grande partie du portefeuille proposé a été revu, il s’articule autour de deux axes.
• L’Entreprise Apprenante : la convergence des technologies exponentielles telles que l’IA, la blockchain ou le quantique a le pouvoir de changer les modèles opérationnels, de réinventer les processus et de ré-imaginer la façon de travailler. Ce basculement marque l’émergence de ce qu’IBM
appelle l’entreprise apprenante. Les investissements dans ces technologies ont consolidé sa position de leader sur le marché.En termes d’IA, IDC a désigné IBM comme le leader mondial pour la 4ème année consécutive. Watson est aujourd’hui utilisé dans tous les secteurs et pour tous les processus au cœur du business des entreprises : supply chain, relation client, RH, recrutement, etc.
et de transparence dans les chaînes d’approvisionnement mondiales et dans les processus de conformité. Ce travail est conduit avec plus de vingt grands consortiums qui remodèlent des industries entières. Concernant le quantique, IBM a rendu publique en 2020 sa roadmap pour parvenir à un ordinateur de 1000 qubits, mais un système à 65 qubits est déjà disponible sur le cloud. Et plus de 140 clients mondiaux et 300 000 utilisateurs ont déjà réalisé des milliards d’expériences dans l’IBM Quantum Computation Center.
• Le Cloud Hybride : outre ses offres de cloud public, IBM propose tout un portefeuille applicatif permettant d’accélérer la transformation vers le cloud hybride. Les clients estiment que cette démarche leur apporte 2,5 fois plus de valeur que de s’appuyer uniquement sur du cloud public. IBM a en outre
de ces secteurs hautement régulés. Et bien sûr, IBM continue d’investir dans les grands systèmes comme le mainframe. En termes de sécurité, IBM accompagne 95% des entreprises du Fortune Global 500 et traite plus de 70 milliards d’événements relatifs à la sécurité chaque jour.
IBM Services accompagne ses clients dans leurs démarches de mise en œuvre et de gestion de ces technologies, depuis la stratégie, la transformation des processus, la construction, le déploiement et la gestion des applications. Au cours des dix dernières années, la plus grande agence digitale au monde a été créée, avec 57 studios
207 À propos
et 17 000 consultants IBM iX (Interactive Experience). En France, et à la
transformation digitale, travaille conjointement avec IBM Services pour accompagner les transformations métiers, technologiques et humaines. En 2020, IBM a été classée dans le top 3 des entreprises de conseil et de service en France.Cette année, la partie dédiée aux services d’infrastructure prendra son indépendance sous le nom de Kyndryl, tout en restant très fortement liée à IBM.
Les technologies de pointe et les facteurs externes (tels que ceux
travail. Pour suivre le rythme et la cadence de ces changements, les
plateforme d’apprentissage personnalisée basée sur l’IA. Tout aussi important, IBM s’engage à promouvoir une culture dans laquelle tous les IBMers peuvent donner le meilleur d’eux-mêmes au travail. La diversité et l’inclusion sont essentielles pour l’entreprise et stimulent l’innovation et la satisfaction des employés. En 2020, IBM a atteint une diversité record dans tous les groupes de représentation et les meilleurs scores d’inclusion de sa catégorie.
4. CHANGER LA FAÇON DE TRAVAILLERAujourd’hui, les attentes des entreprises clientes sont dictées par l’expérience personnelle des individus avec les technologies. Avec son Academy, IBM construit les métiers de demain et permet l’évolution des collaborateurs, notamment à travers l’adoption de nouvelles technologies et méthodologies, comme le
et les pratiques de développement agile. Aujourd’hui, plus de 100 000 IBMers travaillent selon les principes de cette méthode. Un grand nombre d’entreprises clientes font l’expérience d’IBM via le Garage ou le modèle de Factory en France : des espaces co-localisés dans lesquels les clients travaillent avec les IBMers pour co-créer des solutions centrées sur les utilisateurs, en mode Les solutions prototypées et validées
logique permet de mettre à disposition des clients toute l’expertise nécessaire pour leur transformation dans un mode industrialisé. De plus, l’écosystème de partenaires, petits et grands, ne cesse de s’élargir, dans le but d’apporter toujours plus de valeur pour les clients.
RESPONSABLE POUR L'ÈRE DIGITALELa stratégie et les décisions commerciales d’IBM ont toujours reposé sur des valeurs fondamentales qui ont survécu à des décennies de changements politiques, technologiques et sociétaux :• Un dévouement sans faille pour la réussite de chaque client• Des innovations qui comptent, pour l’entreprise et pour le monde
Ces valeurs attirent les meilleurs employés et sont le pilier des relations avec les clients. Elles ont guidé les efforts d’IBM pour
Tech doit être, avec par exemple les programmes P-Tech pour l’éducation. L’impact complet de la technologie sur la société est toujours pris en compte, et IBM accepte ce rôle de leader pour faire de l’ère digitale une ère inclusive. IBM s’est également engagée à atteindre la neutralité carbone d’ici 2030.
IBM croit en la promesse fondamentale de la technologie : lorsque la science est appliquée à des problèmes du monde réel, alors un avenir meilleur que celui d’aujourd’hui peut être créé - un avenir plus durable, plus rentable et plus équitable. Pour suivre l’actualité d’IBM en France : ibm.com/fr-fr
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Fondé en 2012, le HUB Institute est le Think Tank Digital leader des transformations business dont sont membres à l’année plus de 120 grandes entreprises (L’Oréal, LVMH, Orange, La Poste, Total...). Notre équipe de plus de 50 experts et analystes accompagne les grandes entreprises pour anticiper et maîtriser les dernières tendances, innovations et bonnes pratiques. Basés à Paris, nous opérons au niveau international.
Piloté par Vincent Ducrey, Emmanuel Vivier et Perle Bagot, le HUB institute permet aux grandes organisations d’accélérer leur transformation business autour de 5 expertises :
en ligne ou en hybride, comme le HUBFORUM en octobre, le Sustainable Paris Forum en décembre, le HUBDAY Future of Retail & Ecommerce en Février ou encore le Sustainable Mobility Forum.
tendances et de décryptage, et nos newsletters de veille stratégique Le Networking : Une plateforme de meeting one to one pour connecter les décideurs avec leurs homologues, nos experts et les solutions et startups innovantes.
année autour de plus de 40 thématiques (AI, Data, CRM, HR, digital transformation, sustainability, social media marketing, etc.)
de Shanghai à la Silicon Valley,
innovantes avec un accompagnement sur mesure de la part de nos experts.
LE HUB INSTITUTE RÉUNIT TOUT AU LONG DE L’ANNÉE UNE COMMUNAUTÉ DE 50 000 DÉCIDEURS B2B AUTOUR DES
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Équipe IBM
Direction : Marc BensoussanCoordination : Viviane Agostinis et Peggy VaugardAvec la participation de Guillaume Ferrand et Sixtine Millot
Équipe HUB Institute
Direction : Sandrine MatichardCoordination : Vanina Prélat L’HerminierRédaction : Guilhem Cadoret, Thibault Deschamps,
Maxime TricoireDirection artistique et maquette : Chantal Ayroles Renfort maquette : Sabrina Benrabia Bordes
SOURCES « EN CHIFFRES »
Expérience Client & Employé / Page 38 IBM Institute for Business Value, Sustainability at a turning point: Consumers are pushing companies to pivot, mai 2021 - page 54 IBM Institute for Business Value, Expanding innovation: It takes an ecosystem, mai 2020 - page 57 IBM Institute for Business Value, Resetting the rules for consumer companies: The race for post-COVID competitive advantage, mai 2021 - page 73 IBM Institute for Business Value, COVID-19 and the future of business: Executive epiphanies reveal post-pandemic opportunities, septembre 2020 - IBM Institute for Business Value, An injection of hope: Life after the COVID-19 vaccine, avril 2021. Talents & Culture / Page 93 IBM Institute for Business Value, Accelerating the journey to HR 3.0: Ten ways to transform in a time of upheaval, octobre 2020 - page 99 IBM Institute for Business Value, Accelerating the journey to HR 3.0: Ten ways to transform in a time of upheaval, octobre 2020 - page 102 IBM Institute for Business Value, Accelerating the journey to HR 3.0: Ten ways to transform in a time of upheaval, octobre 2020 - IBM Institute for Business Value, The 2021 CEO Study : Find Your Essential - How to thrive in a post-pandemic reality, février 2021 - page 107 IBM Institute for Business Value, An injection of hope:
Life after the COVID-19 vaccine, avril 2021. Data & IA / Page 125 IBM Institute for Business Value, The 2021 CEO Study : Find Your Essential - How to thrive in a post-pandemic reality - France POV, avril 2021 - page 128 IBM Institute for Business Value, The 2021 CEO Study : Find Your Essential - How to thrive in a post-pandemic reality - France POV, avril 2021 - page 133 IBM Global AI adoption Index, mai 2021 - page 141 IBM Global AI adoption Index, mai 2021. Plateformes, Cloud & Industrialisation / Page 147 IBM Institute for Business Value, The hybrid cloud platform advantage: A guiding star to enterprise transformation, juin 2020 - page 150 IBM Institute for Business Value, The hybrid cloud platform advantage: A guiding star to enterprise transformation, juin 2020 - page 153 IBM Institute for Business Value, COVID-19 and the future of business: Executive epiphanies reveal post-pandemic opportunities, septembre 2020 - page 167 IBM Institute for Business Value, The hybrid cloud platform advantage: A guiding star to enterprise transformation, juin 2020. Cognitive Enterprise, Gouvernance & Ecosystèmes / Page 181 IBM Global AI Adoption Index 2021, mai 2021, septembre 2020 - page 182 IBM Institute for Business Value, The 2021 CEO Study : Find Your Essential - How to thrive in a post-pandemic reality - France POV, avril 2021 - IBM Institute for Business Value, Expanding innovation: It takes an ecosystem, mai 2020 - page 189 IBM Institute for Business Value, The 2021 CEO Study : Find Your Essential - How to thrive in a post-pandemic reality - France POV, avril 2021, IBM Institute for Business Value, COVID-19 and the future of business: Executive epiphanies reveal post-pandemic opportunities, septembre 2020 - page 201 IBM Institute for Business Value, COVID-19 and the future of business: Executive epiphanies reveal post-pandemic opportunities, septembre 2020.
CRÉDITS ICONOGRAPHIQUES
Couverture : ProMare/IBMIllustrations pages 6, 32, 82, 110, 142, 174 : Erik Tartrais Pictos FreepikPhotos : Page 34 Dragos Gontariu / Unsplash – page 52 Harry Cunningham / Unsplash - page 68 Christiann Koepke / Unsplash - page 78 Chris Montgomery / Unsplash – page 87 Hugues-Marie Duclos - page 112 Daniel Schludi / Unsplash – page 121 Mahdis Mousavi / Unsplash - page 144 Adelin Grigorescu / Unsplash – page 176Photos-portraits : DR
Copyright © 2021 HUB Institute - IBM - Tous droits réservésMalgré le contrôle attentif du HUB Institute et d’IBM, les erreurs ou omissions involontaires qui pourraient subsister dans cet ouvrage ne sauraient engager leur responsabilité.
Merci à toutes les entreprisesqui ont participé à cette édition
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