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< DOSSIER > MÉDECINS DU SPORT 13 N°63-JANVIER/FÉVRIER 2004 Rupture du LCA et ligamentoplasties : Genou d’hier et d’aujourd’hui Rupture du LCA et ligamentoplasties : Genou d’hier et d’aujourd’hui * CABINET CHIRURGICAL GOETHE, PARIS ** CRRF LA CHÂTAIGNERAIE, PARIS DRS PATRICK DJIAN* ET GUY BELLIER* DRS VÉRONIQUE SALVATOR-WITVOET**, SONIA LAVANANT**, RANIA BELMAHFOUD** ET MICHEL BOVARD** Coude Epaule Articulation Renforcement musculaire Ligament Mots clés Petit tour historique des réparations chirurgicales des ruptures du LCA et des techniques de rééducation qui y sont associées. Introduction Page 14 Histoire chirurgicale Un peu d’histoire Page 14 A - Diagnostic B - Chirurgie Autogreffes d’aujourd’hui Page 15 A - Le transplant libre de tendon rotulien B - Les tendons ischio-jambiers C - Traitement des lésions associées D - Apport de l’arthroscopie Rééducation post-opératoire Page 17 Indications opératoires Page 17 A - Qui opérer ? B - Quand opérer ? Histoire de la rééducation Evolution des techniques Page 18 A - Appui total et immobilisation articulaire B - Port d’une orthèse de rééducation C - Récupération des amplitudes articulaires D - Renforcement musculaire E - Re-programmation neuromotrice F - Rééducation accélérée G - Reprise du sport Synthèse de l’évolution après ligamentoplastie Page 23 A - Les années 1970 B - Les années 1980 C - Les années 1990 D - Quel avenir ? Conclusion Page 24 Bibliographie Page 25 Sommaire

Rupture du LCA et d’aujourd’hui - genou.netgenou.net/new/MEDIAS/Dossiers/40/rupturelca.pdf · Rupture du LCA et ligamentoplasties: Genou d’hier et d’aujourd’hui * CABINET

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M É D E C I N S D U S P O R T 13 N ° 6 3 - J A N V I E R / F É V R I E R 2 0 0 4

Rupture du LCA etligamentoplasties:Genou d’hier etd’aujourd’hui

Rupture du LCA etligamentoplasties:Genou d’hier etd’aujourd’hui

* CABINET CHIRURGICAL GOETHE, PARIS** CRRF LA CHÂTAIGNERAIE, PARIS

DRS PATRICK DJIAN* ET GUY BELLIER*DRS VÉRONIQUE SALVATOR-WITVOET**, SONIA LAVANANT**, RANIA BELMAHFOUD** ET MICHEL BOVARD**

CoudeEpauleArticulationRenforcement musculaireLigament

Mots clés

Petit tour historique des réparationschirurgicales des ruptures du LCA et des techniques de rééducationqui y sont associées.

Introduction Page 14

Histoire chirurgicale

�� Un peu d’histoire Page 14● A - Diagnostic

● B - Chirurgie

�� Autogreffes d’aujourd’hui Page 15● A - Le transplant libre de tendon rotulien

● B - Les tendons ischio-jambiers

● C - Traitement des lésions associées

● D - Apport de l’arthroscopie

�� Rééducation post-opératoirePage 17

�� Indications opératoires Page 17● A - Qui opérer ?

● B - Quand opérer ?

Histoire de la rééducation

� � Evolution des techniques Page 18● A - Appui total et immobilisation articulaire

● B - Port d’une orthèse de rééducation

● C - Récupération des amplitudes

articulaires

● D - Renforcement musculaire

● E - Re-programmation neuromotrice

● F - Rééducation accélérée

● G - Reprise du sport

�� Synthèse de l’évolution après ligamentoplastie Page 23

● A - Les années 1970

● B - Les années 1980

● C - Les années 1990

● D - Quel avenir ?

Conclusion Page 24

Bibliographie Page 25

Sommaire

Histoire chirurgicale

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Rupture du LCA

Les lésions ligamentaires du genou représententune pathologie fréquente. Parmi les différentesruptures ligamentaires, celle du ligament croiséantérieur (LCA) reste de loin la lésion la pluscommune. Il est le ligament intra-articulaire le plus important du genou, et sa ruptureentraîne des symptômes actuellement bienconnus (instabilité, douleurs…). Les procédés de réparation, de plus en plus précis, peuventpermettre un retour aux activités sportives avecle même niveau sportif qu’avant l’accident. En plus des activités sportives traditionnellespourvoyeuses de lésions ligamentaires,

la pratique du ski alpin de masse a abouti à uneaugmentation considérable de cette pathologie. L’histoire des réparations du LCA relate unesuccession de découvertes, d’idées novatricesoubliées puis reprises, d’erreurs souventrépétées ou de modes chirurgicales parfois sans fondement scientifique objectif.Le but de ce travail sera, dans une 1re partie, de relater l’historique des ruptures du LCA du point de vue diagnostique, thérapeutique et d’établir les bases chirurgicales actuelleslorsqu’une indication est portée.

La 2e partie abordera l’histoire de la rééducationaprès plastie intra-articulaire, reflet d’une revuede la littérature. La rééducation prend une partimportante dans le résultat fonctionnel finalaprès ligamentoplastie. Les constatationshistologiques et biochimiques, les travauxrécents sur la biomécanique des transplantstendineux et les avancées chirurgicales depuis un quart de siècle ont fait évoluer les bases de la rééducation concernant : la reprise d’appui,l’immobilisation du genou opéré et le port d’une orthèse, la récupération des amplitudesarticulaires, les techniques de renforcementmusculaire, la rééducation proprioceptive, la rééducation dite “accélérée” et enfin la reprise sportive, certains exercices ayant étéinterdits à une époque puis autorisés plusrécemment, le contraire étant également vrai.

■A - DiagnosticLe père de la chirurgie du LCA est pro-bablement un Français, Amédée Bonnet(1) qui, en 1845, décrit les signes cli-niques faisant suspecter une rupture duLCA. Les signes évocateurs étaient un cra-quement audible lors du traumatisme,une hémarthrose du genou et des signesde mobilité anormale. Ses écrits ont étéremis au goût du jour en 1993, avec le

valent du signe de Lachman. Le signe duressaut ou pivot shift des Anglo-saxonsapparaît en 1967 avec un chirurgien fran-çais, Marcel Lemaire (6), suivi de Macintosh(7), un chirurgien canadien en 1972. Smith(8) est le 1er à rapporter une augmentationde la rotation externe chez les patients pré-sentant une rupture du LCA. L’instabilitérotatoire, elle, est démembrée beaucoupplus tardivement.

Drs Patrick Djian*, Guy Bellier*

Introduction

travail d’Hans Passler (2). Stark (3) en1850, cite Segond (4), un chirurgien fran-çais connu en raison de la descriptiond’une fracture témoignant d’un arra-chement de la capsule antéro-externe etpathognomonique d’une rupture asso-ciée du LCA. L’importance du LCA dansle contrôle de la translation antérieuredu tibia a été remarquée par Weber en1836. Noulis (5) décrit en 1875 l’équi-

� Un peu d’histoire

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Rupture du LCA

■B - Chirurgie

• Premières autogreffesLa 1re publication d’une réparation du LCAdate de 1917 avec le fascia-lata comme tissude remplacement (9). En 1918, Smith décritla 1re reconstruction intra et extra-articu-laire (8). En 1937, Landa, chirurgien russe,décrit et propose l’utilisation du tendon rotu-lien, le surtout fibreux pré-rotulien et unelanguette de tendon quadricipital (10). Cettetechnique modifiée est toujours utiliséeactuellement. Kenneth Jones (11) a repriscette technique en 1963 en utilisant uni-quement le tendon rotulien sur 11 patients. En France, la technique du transplant librede tendon rotulien fut décrite par AlbertTrillat et Henri Dejour (12), 2 chirurgienslyonnais. Les tendons ischio-jambiers internes (droitinterne - demi-tendineux) sont utiliséspour la 1re fois en 1939 par Macey (13).L’utilisation d’autres tissus, comme leménisque, rapportée par Hölzel, donnede mauvais résultats et la technique estabandonnée. Le concept de reconstruc-tion dynamique utilisant le demi-tendi-neux fixé distalement, introduit parLindeman (14) et Augustine (15) en 1950et 1956, est aussi éphémère pour desproblèmes de laxité.

• Prothèses ligamentaires Elles sont largement essayées avec desrésultats catastrophiques en termes delaxité résiduelle et de synovite à corpsétrangers (16,17). En 1903, Lange est le1er à utiliser les fils de soie avec un ten-

don demi-tendineux, sans grand succès.Puis, très rapidement, de nombreux chi-rurgiens utilisent cette technique. La 1re communication date de 1973 et, en1989 aux Etats-unis, la FDA (Food andDrug Administration) prône successive-ment l’utilisation du LAD, du Goretex et du Dacron. En France, plus de 50 000 ligamentoplasties synthétiquessont réalisées. 10 ans plus tard, en 1995, les recom-mandations dans le cadre des RéférencesMédicales Opposables sont : « Il n’y a paslieu d’utiliser les ligaments synthétiquesni en tant que prothèse de substitution,ni en tant que renfort, dans la chirurgiedu ligament croisé antérieur ». La raisonde cet abandon : un taux d’échec inac-ceptable. La rupture d’un ligament arti-ficiel est inéluctable ; il en résulte unerécidive de la laxité avec disséminationde particules prothétiques responsablede synovite. A plus long terme, cettesynovite est responsable d’arthrose et laplupart des séries affiche un taux d’échecvariant de 66 % à 100 %.

• Allogreffes Elles sont largement utilisées aux Etats-unis où les banques de tissus ont desimpératifs sévères dans le recueil des tis-sus et le dépistage des maladies virales.Le conditionnement de telles greffes estimportant à considérer. La congélation n’entraîne pas de diminution sensible des qualités mécaniques. Associée à l’irradiation (< 2,5 Mrad), on note une diminution

acceptable de la résistance mécanique.En revanche, si l’irradiation dépasse les2,5 Mrad, l’utilisation de la lyophilisa-tion diminue les qualités mécaniquesdes greffes. En France, l’utilisation d’allogreffes ten-dineuses n’est pas possible car aucunebanque de tissus n’en dispose actuelle-ment. Côté avantages, l’utilisation des allogreffesdiminue la morbidité du site donneur etle temps opératoire. Pour les inconvé-nients, on retiendra le risque infectieux,le coût élevé et la durée de la “ligamen-tisation”, plus longue qu’avec les auto-greffes (18).

La “ligamentisation” (19) est un phéno-mène biologique et biomécanique del’adaptation d’un tendon placé dans unearticulation et soumis à des contraintesnouvelles. Ces phénomènes ont étédécrits dès le début des années 80 surdes expérimentations animales, puishumaines. Ces phénomènes biologiquesévoluent durant le 1er mois vers unephase de nécrose du transplant. Elle estsuivie d’une phase d’hyper-vascularisa-tion entre la 8e et la 10e semaine, qui per-met la prolifération cellulaire defibroblastes. Vers 1 an, le transplant pré-sente des caractéristiques proches du LCAnatif. Cette évolution explique la pru-dence recommandée par les chirurgienspour la date de reprise des activités spor-tives ; il faut donc compter environ 1 anpour une reprise au même niveauqu’avant l’accident.

L a reconstruction du LCA fait actuel-lement appel à 2 méthodes princi-pales :

• soit l’utilisation de l’appareil extenseuravec prise du tendon quadricipital, dutendon rotulien ou d’une association des2 comme l’a décrit MacIntosh ;• soit celle des tendons ischio-jambiersinternes.Nous prendrons comme description typepour l’appareil extenseur, l’utilisation dutendon rotulien.

■A - Le transplant librede tendon rotulien (20) Le principe de l’intervention consiste àremplacer le LCA rompu par un trans-plant libre de tendon rotulien (Fig. 1 et 2).Pour cela, l’intervention commence par leprélèvement du tiers central du tendonrotulien associé à 2 chevilles osseuses àchaque extrémité provenant de la rotuleet du tibia. L’intervention est ensuitemenée sous arthroscopie et consiste en lapréparation de l’échancrure inter-condy-

lienne. Cette préparation permet de repé-rer l’issue intra-articulaire de 2 tunnelsosseux tibial et dans le condyle externe.Leurs orifices intra-articulaires aboutissentsur le site d’insertion du LCA. Le respectde ces sites est essentiel pour le bon résul-tat de cette chirurgie. Beaucoup de tra-vaux fondamentaux et cliniques ontmarqué la littérature scientifique ; depuisplusieurs années le respect de certainesrègles, actuellement consensuelles, a per-mis d’alléger les suites opératoires.

� Autogreffes d’aujourd’hui

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Rupture du LCA

L’orifice tibial s’effectue à la partie postéro-interne de l’insertion anatomique du LCApour éviter tout conflit de la plastie avecle toit de l’échancrure. L’orifice fémoral aété aussi placé de plus en plus postérieurpour se rapprocher d’une isométrieidéale. La fixation de cette greffe est assu-rée par des vis, dites d’interférence, quise placent dans les tunnels osseux, entreles chevilles osseuses du transplant et lesparois des tunnels. Elles peuvent être soitmétalliques (donc visibles sur les radio-graphies post-opératoires) ou en poly-mère résorbable (invisibles sur lesradiographies). L’utilisation d’un transplant libre de ten-don rotulien présente de nombreux avan-tages pour la reconstruction du LCA: trèsgrande résistance initiale du tendon rotu-lien, très bonne tenue des vis d’interfé-rence permettant une mobilisationpost-opératoire précoce, résistance de laliaison os-tendon naturelle et fixation àmoyen terme rigide par incorporationdes greffons osseux. Les inconvénients de cette techniquesont liés au prélèvement du tendonrotulien : douleur de pointe de rotule,diminution de la force musculaire duquadriceps qui s’atténue avec la récu-pération.

■B - Les tendons ischio-jambiers Les tendons ischio-jambiers internes pré-levés sont le droit interne et le demi-ten-dineux (Fig. 3 et 4). On a assistérécemment à un engouement de la partdes chirurgiens pour cette technique. Ily a quelques années, un seul tendonischio-jambier prélevé et retourné sur lui-même donnait une plastie à 2 brins. Maisla tenue mécanique de cette plastie était

Sur le plan opératoire, l’utilisation des ten-dons ischio-jambiers obéit aux mêmesrègles que le tendon rotulien mais, étantdonné l’encombrement plus importantdes ischio-jambiers par rapport au ten-don rotulien, le positionnement des tun-nels doit être parfait.

■C - Traitement des lésions associées

• Laxités périphériquesLe remplacement isolé du LCA ne règlepas tous les problèmes de la laxité anté-rieure. L’analyse sémiologique pré-opé-ratoire, aidée par l’imagerie, doitpermettre de dépister l’existence de laxi-tés périphériques interne et/ou externeassociées. Les lésions postéro-externesassociées par atteinte des structurespostéro-externes (tendon du poplité, liga-ment latéral externe et capsule postéro-externe) sont certainement l’apanage desruptures du LCA vieillies sur plusieurs années.Les techniques de correction des laxités péri-phériques peuvent agir sur l’os en cas d’at-teinte postéro-externe (ostéotomie denormocorrection), ou sur les formations liga-mentaires (plastie). La non-correction de ceslaxités périphériques entraîne une détentedu transplant intra-articulaire et la réappari-tion d’un ressaut rotatoire.

Figure 3 - Vue anatomique des Ischio-jambiers.Figure 4 - Préparation des ischio-jambiers avantimplantation.

Figure 1 - Préparation d’une greffe de tendonrotulien.Figure 2 - Passage de la greffe de tendon rotuliendans l’articulation.

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manifestement trop faible et les résultatsse dégradaient avec le temps en termesde laxité résiduelle post-opératoire. Actuel-lement, 2 tendons sont prélevés, retour-nés et aboutissent à la formation d’untransplant à 4 brins qui améliorent net-tement la tenue mécanique de ce typede greffe. Le problème actuel reste la fixation intra-osseuse qui apparaît, pour beaucoup,moins satisfaisante que celle du tendonrotulien. Plusieurs systèmes de fixationdes tendons ischio-jambiers se sontrécemment développés avec des résis-tances identiques, voire supérieures, àcelle du tendon rotulien avec vis d’inter-férence. Les différentes séries de la litté-rature montrent que la laxité objectiverésiduelle post-opératoire est un peu plusimportante qu’avec l’utilisation du ten-don rotulien. L’utilisation des tendonsischio-jambiers présente certains avan-tages : baisse de la fréquence des dou-leurs antérieures du genou, moindrediminution de la force du quadriceps etutilisation toujours possible chez l’enfant.Les études IRM montrent que les tendonsischio-jambiers se reconstituent sous laforme d’un tissu fibro-cicatriciel uniqueétablissant une continuité entre les corpsmusculaires et le tibia dans un délai de6 à 12 mois. Le site d’insertion de ce tissufibro-cicatriciel est un peu plus proximalque les tendons ischio-jambiers natifs.

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Rupture du LCA

• Lésions méniscalesIl existe actuellement un consensus surla conservation du tissu méniscal. Ildécoule de l’analyse de l’évolution natu-relle des laxités de genou. En effet, l’étudeà moyen terme des laxités antérieures degenou avec ménisque absent (soit parlésion, soit par chirurgie) montre unedégradation cartilagineuse importantetouchant d’abord le compartimentfémoro-tibial interne. Les désinsertionspériphériques peuvent, en fonction deleur instabilité per-opératoire, être réin-sérées. En cas de lésion méniscale nonréinsérable, une méniscectomie partiellea minima devra être faite.

• Lésions cartilagineusesSeules les lésions symptomatiques et éten-dues doivent être traitées, surtout en ce quiconcerne l’articulation fémoro-patellaire.Concernant l’articulation fémoro-tibiale, ilest possible, selon le type de lésion, derecourir à des abrasions perforations de

Pridie (21) ou à des greffes ostéochondralesde type Mosaic Plasty (22, 23). Les per-forations de Pridie (21), décrites en 1950,sont à l’origine de la formation d’un fibro-cartilage permettant de recouvrir l’ossous-chondral. Ce fibrocartilage possèdeune structure histologique proche de lafibrose et loin du cartilage hyalin. Depuisquelques années, une technique origi-nale mise au point par un chirurgien hon-grois permet de greffer du cartilage hyalinpris aux dépens de zones non porteusesdans le genou et de récupérer une struc-ture histologique identique au cartilagehyalin sur 80 % de la surface, les 20 %restant étant du fibrocartilage. Cette tech-nique a été décrite sous le terme deMosaic Plasty en raison des dessins décritspar les greffes ostéocartilagineuses sur lasurface greffée.

■D - Apport de l’arthroscopieTakagi (24) à Tokyo, en 1918, fut le 1er à

pratiquer une arthroscopie du genousur cadavre en utilisant un cystoscopepédiatrique. La technique s’est ensuitedéveloppée dans les années 30 auJapon, en Allemagne et aux Etats-Unis.Après la seconde Guerre Mondiale,Watanabe (25) reprend son dévelop-pement et publie l’atlas que nousconnaissons avec photos et dessins expli-catifs. L’arthroscopie a aidé à la des-cription de l’histoire naturelle desruptures du LCA. Elle a aussi montrél’existence de rupture partielle du LCA.La reconstruction du LCA est actuelle-ment l’intervention qui a le plus bénéfi-cié de l’apport de l’arthroscopie. C’estune technique qui demande un appren-tissage long (learning curve des Anglo-saxons). Le positionnement des tunnelsosseux est actuellement beaucoup plusprécis par arthroscopie que par arthro-tomie. Tous les travaux biomécaniqueset de positionnement ont été suggéréspar l’arthroscopie.

L a prise en charge du patient com-mence dès la 1re consultation aprèsl’accident. En effet, la rééducation

pré-opératoire est fortement conseilléepour que le patient se présente dans lesmeilleures conditions possibles au momentde l’intervention. Après chirurgie, la réédu-cation doit tenir compte du type de trans-

plant prélevé, de la ligamentisation de lagreffe tendineuse et des contraintes méca-niques s’exerçant lors de la rééducation.Elle est divisée en 4 phases :1 - la phase post-opératoire immédiate, 2 - la phase de rééducation proprement dite, 3 - la rééducation complémentaire, 4 - et la phase de reprise sportive.

En termes de délai, la durée moyenned’arrêt de travail est d’environ 2 mois, laphase de reprise sportive pour les sportsdans l’axe, se fait aux alentours du 4e mois post-opératoire, les sports de pivotsans contact sont repris en moyenne au 8e mois et la compétition en fin de 1re année post-opératoire.

■A - Qui opérer ?

• Indication de première intentionPriorité est donnée aux sportifs pour les-quels le sport constitue un enjeu réel.Cependant, les indications ne se limitentpas à cette population et tous les sportifsde loisir, s’ils décident de continuer leursactivités, peuvent bénéficier de ces tech-niques de reconstruction du LCA. Ils doivent être jeunes et réellement motivés. L’arrêt de travail à prévoir est enmoyenne de 4 à 6 semaines. Dans la

mesure où l’on opère pour prévenir la sur-venue d’une instabilité, la chirurgies’adresse à des patients pratiquant des acti-vités sportives nécessitant un pivot centraldu genou intact. Pour les activités spor-tives individuelles, l’indication est à peserau cas par cas, en fonction du niveausportif, de l’âge et de la motivation.

• Indication de repriseLes ruptures de ligamentoplasties du LCAexistent et peuvent, bien entendu, don-ner lieu à une reprise chirurgicale.

S’il s’agit d’un transplant autologue, biensouvent, il s’agit de défaut de position-nement de la 1re greffe et la reprise chi-rurgicale peut nécessiter, en fonction deslésions, une intervention en 2 temps avecablation de la greffe et comblement destunnels osseux par une greffe osseusepuis, à distance, une reconstruction duLCA avec une autre autogreffe.Dans le cas d’une ligamentoplastie syn-thétique, bien souvent l’ablation du liga-ment prothétique associée à unesynovectomie en un temps fait disparaître

� Rééducation post-opératoire

� Indications opératoires

� Evolution des techniques

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Rupture du LCA

les symptômes liés à la synovite. Si legenou reste instable, on peut être amenéà proposer une ligamentoplastie auto-logue dans un 2e temps. Dans les cas degenou douloureux pur et en fonction deslésions cartilagineuses, une ostéotomietibiale peut être proposée.

■B - Quand opérer ?De nombreuses études prospectives etcomparatives ont démontré que lareconstruction du LCA effectuée rapide-ment (pendant les 3 premières semainessuivant l’entorse) s’accompagne, contrai-rement aux réparations différées, d’untaux élevé de complications, raideurs etalgodystrophies, indépendamment de latechnique utilisée. En effet, la rupture du LCA s’accompagnede la libération intra-articulaire, en grandequantité, de cytokines pro-inflam-matoires.En cas d’agression chirurgicale surajoutée,ces médiateurs induisent une réaction fibro-cicatricielle responsable des phénomènesde raideur. Il faut attendre que “l’orageinflammatoire” soit passé avant d’interve-nir. Cela peut prendre quelques jours pourune rupture isolée du LCA, à plusieurs

semaines en cas de lésions périphériquesassociées. Il faut intervenir sur un genoufroid, sec, indolore, avec une bonne tro-phicité quadricipitale et une mobilité quasinormale, surtout sans déficit d’extension,donc après rééducation, cicatrisation deslésions internes et des désinsertions ménis-cales. La plupart des études rapportent undélai nécessaire de 6 à 8 semaines. Se posera toujours le problème des spor-tifs “vedettes” pour lesquels la pression desclubs et des médias amène à opérer pré-cocement. Il n’est cependant pas démon-tré que la chirurgie en urgence permetréellement à ces sportifs à part, dereprendre la compétition plus rapidementque si l’on attendait de voir réunies lesconditions citées précédemment. Les rup-

tures du LCA associées à des lésions péri-phériques postéro-externes (heureusementbeaucoup moins fréquentes que leslésions associées internes) doivent, enrevanche, être opérées rapidement du faitde la mauvaise cicatrisation spontanée deces lésions, particulièrement difficiles à stabiliser au stade chronique. ■

■A - Appui total et immobilisation articulaireL’abandon de l’immobilisation post-opé-ratoire avec mise en décharge systéma-tique du membre inférieur opéré est,depuis 15 ans, le principal changementde conduite à tenir en post-opératoireaprès ligamentoplastie du genou. Les conséquences anatomiques de l’immo-bilisation articulaire sont pourtant bienconnues depuis 40 ans, entraînant des modi-fications histologiques importantes sur:• le muscle à l’origine d’une amyotro-

phie prédominant sur le quadriceps par rapport aux ischio-jambiers (26) ;• la synoviale avec développement d’ad-hérences fibro-adipeuses (27) ;• le cartilage, dont la nutrition dépendessentiellement de la mobilisation arti-culaire (28) ; l’absence de mobilisationpost-opératoire précoce est à l’origined’une déshydratation du cartilage et del’apparition de zones d’ulcération ;• les tendons, les ligaments et la capsulearticulaire, qui vont subir un remodelagedans leur position d’immobilisation (posi-tion de raccourcissement).

Les travaux de Tipton (29) et de Woo (30)ont bien décrit l’effet délétère de l’immo-bilisation articulaire sur la résistance desstructures ligamentaires et tendineuses, liéà des modifications biochimiques à l’ori-gine d’une altération de leurs propriétésmécaniques. Plus la phase d’immobilisa-tion est prolongée, plus la récupérationde leurs performances biomécaniques seralongue.

Jusque dans les années 80, la crainte d’unerupture du ligament suturé d’abord puisd’une distension des premiers transplants,

Histoire de la rééducation Drs Véronique Salvator-Witvoet**, Sonia Lavanant**,

Rania Belmahfoud** et Michel Bovard**

Figure 5 - Reconstruction du LCA avec un transplantlibre de tendon rotulien. Vue arthroscopique.

Figure 6 - Reconstruction du LCA avec un transplantlibre de tendon rotulien. Vue schématique de profil.

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des sports à risque comme le footballaméricain, protègent des microtrauma-tismes mais n’empêchent pas la lésiondu pivot central.2 - Les orthèses fonctionnelles, qui cor-respondent à un traitement palliatif d’uneinstabilité chronique du genou (laxité rési-duelle post-opératoire ou rupture du LCAnon opérée).Ces 2 premières catégories d’orthèsessont des attelles dynamiques qui per-mettent la reprise d’une activité sportive.3 - Les orthèses de rééducation qui nousintéressent ici et autorisent théorique-ment une mobilisation contrôlée dansun secteur protégé ne sollicitant pas lessutures ligamentaires (butée articulaireréglable) et limitent les rotations. Cette3e catégorie d’orthèse est statique et n’au-torise pas la reprise du sport (Fig. 1 et 2).

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Rupture du LCA

la méconnaissance des modifications bio-logiques du greffon et l’ignorance descontraintes réelles transmises au transplantau cours des exercices de rééducation ontconduit les chirurgiens à plâtrer les patientsopérés d’une ligamentoplastie pendant 6 semaines sans appui. Dès l’abandon del’immobilisation plâtrée, la reprise d’appuia été proposée de plus en plus précoce-ment jusqu’à l’attitude préconisée par cer-tains chirurgiens (31-33) de reprise d’appuicomplet en post-opératoire immédiat enfonction de la tolérance du patient. Il n’ya certainement pas d’attitude systématiqueà adopter et, comme nous le verrons, lechoix de la reprise d’appui en postopéra-toire dépend non seulement du type degreffe utilisée et de son moyen de fixation,mais aussi des gestes chirurgicaux asso-ciés et du morphotype du sujet.

Les avantages de l’appui immédiat (luttecontre la position basse de rotule, parti-cipation à la re-programmation neuro-motrice, lutte contre l’ostéoporose…) ontpermis de diminuer en partie la morbi-dité liée à ce type de plastie. Toutefois,l’ensemble des auteurs (31, 34, 35) s’ac-corde pour recommander une restrictiond’appui immédiat en cas de geste chi-rurgical associé de type ostéotomie devalgisation ou greffe cartilagineuse, del’existence d’une laxité postéro-externeen raison des contraintes en varus, dan-gereuses pour le transplant, ou d’unehyperlaxité constitutionnelle.

■B - Port d’une orthèse de rééducationBien que le concept d’orthèse soit ancienet cité dans la littérature du XIXe siècle,l’utilisation d’orthèse stabilisatrice dugenou s’est développée dans les années1970 (orthèse de Lenox Hill), en partieen raison des résultats médiocres (laxitérésiduelle) de la chirurgie de reconstruc-tion du LCA ne permettant pas au spor-tif de reprendre son activité antérieureau même niveau.En 1984, l’AAOS (American Academy ofOrthopedics Surgeons) a établi une clas-sification des différentes orthèses dugenou en 3 catégories (36, 37).1 - Les orthèses prophylactiques utili-sées essentiellement aux Etats-Unis dans

De nombreuses études ont été effectuées(38-41) pour préciser l’intérêt du portd’une orthèse après chirurgie du LCA. Lesrésultats sont parfois discordants et neretrouvent pas d’arguments scientifiquesobjectifs en faveur de leur utilisation. Defaçon très synthétique, on retiendra que:• sur la stabilité du genou opéré, Wojtys(40), dans son étude expérimentale, a biendémontré que le port d’une attelle articu-lée diminuait la translation antérieure dutibia et la rotation interne du tibia sous lefémur, mais seulement lorsque lescontraintes appliquées sur le transplant res-taient inférieures à 150 Newton (N), c’est-à-dire infraphysiologiques;• sur la récupération de la force mus-culaire, plusieurs études avec évaluationisocinétique post-opératoire ont cherchéà quantifier le retentissement du portd’une attelle de rééducation sur la forcemusculaire des stabilisateurs du genou ;les résultats sont souvent contradictoireset les études non comparatives ne per-mettent pas de conclure à une différencesignificative à un recul post-opératoirede 2 ans ;• sur la proprioception du genou opéré,là encore, les avis restent différents,Mac Nair et Barrett notent une amélio-ration du sens de position articulaire, cequi n’est pas confirmé par les travaux deBeynnon et de Risberg. L’attitude que nous préconisons, confir-mée par une partie des chirurgiens,dépend du type de plastie utilisée :• après plastie utilisant le tendon rotu-lien, aucune attelle n’est nécessaire au-delà de la récupération du verrouillagedu quadriceps obtenue en général entre3 et 5 jours post-opératoires ; dans cer-tains cas particuliers néanmoins, nousavons recours à l’utilisation d’une attellede série quand il existe une hyperlaxitéphysiologique, des lésions complexesassociées ou lorsque les phénomènesinflammatoires et douloureux initiauxnécessitent la mise au repos transitoirede l’articulation opérée ;• après plastie utilisant les ischio-jambiers, nous recommandons le port d’uneattelle de série pendant 3 à 6 semaines, non

Figure 1 - Orthèse de série en extension.

Figure 2 - Orthèse de série articulée.

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Rupture du LCA

seulement pour éviter des contraintestrop fortes sur le transplant, mais égale-ment pour protéger la cicatrisation dusite donneur.

Dans l’avenir, des études scientifiquesobjectives et validées permettront certai-nement de préciser la place exacte desattelles de rééducation après recons-truction ligamentaire du LCA.

■C - Récupération desamplitudes articulairesDans les années 70-80, la récupération desamplitudes articulaires débutée à l’ablationdu plâtre s’avérait longue, souvent difficileet douloureuse (poulie thérapie). Lespatients conservaient fréquemment un défi-cit d’extension définitif malgré les mobilisa-tions sous anesthésie générale relativementfréquentes. Actuellement, la priorité restela recherche de l’extension physiologique,symétrique au côté non opéré. Harner (42) et Jackson (43) ont bien mon-tré que, chez les sportifs de haut niveau,la perte définitive de l’extension complètes’avérait incompatible avec la reprise decertains sports (course à pied, danse…) etrestait en définitive plus handicapanteque l’instabilité pré-opératoire.Ainsi, la mobilisation rapide post-opé-ratoire et la recherche de l’extensioncomplète immédiatement sont 2 élé-ments qui permettent de prévenir unéventuel conflit fibreux antérieur connusous le nom de Cyclop Syndrom desAnglo-saxons (43) ou “syndrome de lafigue”, comme l’a dénommé Dejour (44),correspondant à l’accumulation de fibroseau pied du transplant à l’origine d’un fles-sum douloureux. Les techniques de recherche d’extensioncomplète sont nombreuses et varient en

fonction du délai post-opératoire. De lamise en place d’un coussin ou d’une calesous le talon, laissant le genou dans levide, jusqu’au recours au travail muscu-laire excentrique sous-maximal surmachine isocinétique à vitesse lente,comme le propose Middleton (45) à par-tir du 3e mois post-opératoire en l’absencede récupération de l’extension complète,les résultats sont encourageants, maisl’indication reste malgré tout limitée cartoutes les équipes de rééducation ne sontpas forcément équipées d’appareil d’iso-cinétisme et il n’y a pas de consensusfranc sur le délai où le travail isocinétiquepeut être débuté après ligamentoplastiedu genou.

■D - RenforcementmusculaireLa mise en place d’un programme de ren-forcement musculaire constitue un desvolets importants de la rééducation aprèsreconstruction ligamentaire du LCA. Il doitpermettre de retrouver une balance mus-culaire quadriceps/ischio-jambiers équili-brée. Dans les années 80, les échecs parrupture des transplants après exercicesmusculaires non contrôlés en chaîne ciné-tique ouverte ont amené de nombreuxauteurs (46-50) à étudier les contraintesréelles des exercices musculaires en chaînecinétique ouverte (CCO) et en chaîne ciné-tique fermée (CCF) sur le LCA, mais éga-lement sur les articulations fémoro-tibialeset fémoro-patellaires (Tab. I). Les constatations de ces travaux sont à labase des nouveaux programmes de ren-forcement musculaire actuellement pro-posés. Si la majorité des auteurs s’accordentsur l’intérêt d’utiliser la rééducation en CCF,il n’y a néanmoins pas de consensus sur ledélai post-opératoire auquel ces exercices

peuvent être débutés; la tendance actuelleserait même à associer des exercices selonles 2 modes CCF + CCO.

• Rappels théoriquesEn chaîne cinétique ouverte (CCO), lepoint proximal (hanche) est fixe, le pointdistal (pied) est libre ; ceci permet un tra-vail analytique sans co-contraction ago-niste/antagoniste. En CCO (travail enpoulie thérapie) la contraction du qua-driceps entraîne une translation anté-rieure du tibia sous le fémur, à l’origined’une contrainte maximale sur le LCAentre 0° et 45° ; le travail analytique desIJ va, à l’opposé, entraîner une transla-tion postérieure du tibia sous le fémur etpeu de contrainte sur le LCA (46, 51).En chaîne cinétique fermée (CCF), les2 points proximal et distal sont fixes, per-mettant un travail global par co-contrac-tion quadriceps/IJ (46, 47, 49, 51).L’intérêt d’un travail en CCF est triple :1 - le recrutement simultané automatiquedes agonistes/antagonistes permet d’an-nuler les forces de translation antérieuredu tibia sous le fémur (49, 50) et dimi-nue les contraintes ligamentaires et ostéo-articulaires ;2 - la stimulation de la re-programmationneuromotrice par renforcement de l’équi-libre entre les muscles de la chaîne pos-térieure (IJ, triceps sural) et de la chaîneantérieure (quadriceps) (31, 49) ;3 - amélioration de la stabilité articulairedu genou.

• Bases pratiques du renforcementmusculaireLes exercices musculaires en CCF (Fig. 3)doivent rester la base du renforcementmusculaire après greffe du LCA jusqu’à8 semaines post-opératoires, en obser-vant une progression dans l’intensité desexercices proposés : après une phasepost-opératoire immédiate où nousrecommandons le réveil du quadricepspar des exercices “d’écrase coussin”, letravail débutera de façon statique en posi-tion debout bipodale, pour être pour-suivi dès 3 semaines post-opératoires enpress leg entre 10 et 60° de flexion puissur ergocycle (position haute de la selle)si la flexion du genou dépasse 90°.Les tableaux II et III résument de façon

Tableau I : contraintes maximales ligamentaires et ostéo-articulaires.

LCA Articulation Articulationfémoro-patellaire fémoro-tibiale

Chaîne cinétique fermée > 80° > 60° 0° à 30°(CCF)

Chaîne cinétique ouverte 0° à 60° 0° à 60° > 90 °(CCO) Quadriceps

Chaîne cinétique ouverte / 0 à 30° /(CCO) Ischio-Jambiers

Tableau IContraintes maximales ligamentaires et ostéo-articulaires.

schématique la progression musculaireautorisée pour le quadriceps (Tab. II) etpour les IJ (Tab. III) en fonction du typede greffon utilisé.Le travail en CCF permet un renforce-ment musculaire fonctionnel en dimi-nuant les contraintes sur le LCA et lesstructures ostéo-articulaires. Le travail enCCO constitue, lui, un renforcement mus-culaire à risque qu’il vaut mieux éviterconcernant le quadriceps pendant laphase de maturation du transplant jus-qu’à 8 semaines post-opératoires, ce d’au-

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tant que les activités de vie quotidienne(marche) s’en chargent le plus souvent.Chez le patient sportif, compétiteur, l’as-sociation des 2 modes de travail muscu-laire s’avère plus bénéfique que le simplerenforcement musculaire en CCF.

■E - Re-programmationneuromotrice Chez le sujet sain, la mise en tension du LCAentraîne, par arc réflexe à partir des mécano-récepteurs, une contraction réflexe des IJvisant à le protéger. La rupture du LCA, àl’origine d’une altération des messages pro-prioceptifs, explique la diminution du rôleprotecteur des IJ qui se traduit par l’instabi-lité du genou. Cependant, ces constatationsthéoriques doivent être mises en balanceavec les données cliniques observées,comme Walla, qui notait que 95 % despatients présentant une rupture du LCA nonopérée récupéraient un contrôle actif des IJpermettant, le plus souvent, de contrôler l’in-stabilité du genou.Dans le cadre des programmes de réédu-cation après ligamentoplastie du LCA, letravail proprioceptif neuromusculaire visedonc à restituer ce rôle protecteur des IJ.Toutefois, le médecin rééducateur devragarder à l’esprit que :• contrairement au LCA, le transplant n’aaucun mécano-récepteur nerveux, doncla re-programmation d’une réponseréflexe des IJ se faira à partir d’informa-tions sensitives différentes ;

• les mouvements rapides ne peuvent êtrerégulés par les voies de la proprioception etles exercices proposés doivent chercher àdévelopper des phénomènes d’anticipation.L’acquisition “d’automatismes” de pro-tection n’est jamais définitive, d’où lanécessité, au décours de la phase initialede rééducation, d’entretien (par le gestesportif) ou de réapprentissage à inter-valles réguliers de ces automatismes.

■F - Rééducation accéléréeLe principe de la rééducation “accélérée”,né en 1984-86, est initié aux Etats-Unispar Shelbourne (33) qui avait fait le constatclinique de performances fonctionnelleset sportives meilleures chez un groupe depatients “indisciplinés” opérés d’une plas-tie os-tendon rotulien-os. Ces sportifsn’avaient pas suivi les consignes de réédu-cation classique, mais présentaient néan-moins une diminution des douleursantérieures du genou, une laxité résiduelleinférieure à 3 mm au K.T. 1000, une dimi-nution du nombre de flessum définitif (4 %contre 12 % pour les patients ayant suiviune rééducation classique) et unemeilleure récupération musculaire.De ces constatations, Shelbourne et Nitzétablissent, en 1987, un programme derééducation intensive et accélérée (33)dont les bases étaient :• la reprise d’appui immédiate en post-opératoire supprimant toute attelle ;

Plastie au tendon rotulien Plastie DI DT

Travail statique

Ecrase coussin Ecrase coussinCCF : 2-6 semaines : < 60° CCF : 2-4 semaines : < 60°

6-8 semaines : < 80° 4-6 semaines : < 80°

CCO: (TSI < 50°) > 8 semaines CCO : (TSI > 50°) > à 8 semaines

Travail dynamique

CCF : 2-4 semaines : < 60° CCF : 2-3 semaines : < 60°4-8 semaines : < 110° 3-8 semaines : < 120°

CCO: > 8 semaines au-delà de 45° CCO : > 8 semaines : > 45°

Plastie au tendon rotulien Plastie DI DT

Travail statique

CCF : 1-4 semaines : < 60° CCF : 2-6 semaines : < 60°4-8 semaines : < 120° 6-8 semaines : < 120°

CCO: en post-op immédiat : > 30° CCO: pas de travail des IJ avant3 semaines (étirements) :> 3 semaines : < 60°

Travail dynamique

CCF : 1-4 semaines : < 60° CCF : 3-6 semaines : < 60°4-8 semaines : < 120° 6-8 semaines : < 100°

CCO: en post-op immédiat : > 30° CCO: > 3 semaines : > 30°“pseudo-claquages” entre 3 et 6 semaines.

CCO: Chaîne cinétique ouverte - CCF : Chaîne cinétique fermée.

Figure 3 - Renforcement musculaire sur stepper enCCF (chaîne fermée).

Tableau IIRenforcement du quadriceps selon le type de plastie utilisée.

Tableau IIIRenforcement des ischio-jambiers selon le type de plastie utilisée.

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Rupture du LCA

• la mobilisation passive continue pouratteindre 90° de flexion à 1 semaine,110° de flexion à 2 semaines et la flexioncomplète (140°) à 5 semaines post-opératoires ;• la récupération immédiate de l’exten-sion voire de l’hyperextension active ;• le renforcement musculaire du quadri-ceps en CCF ;• la reprise des activités de vie quoti-dienne à 1 mois post-opératoire ;• le retour des activités sportives à 6 semaines post-opératoires si la récu-pération de la force musculaire évaluéeen isocinétisme est supérieure à 65 % ducôté non opéré ;• la reprise du sport en compétition à 6 mois post-opératoires lorsque la récupérationmusculaire est supérieure à 90 %, et avecmaintien d’une attelle fonctionnelle jusqu’à1 an post-opératoire.

A la suite de Shelbourne, d’autres chirur-giens américains comme Paulos et Coll.(40), puis plus récemment français commeBoileau (31), sont devenus les défenseursd’une rééducation accélérée après liga-mentoplastie os-tendon rotulien-os.Mais aujourd’hui, doit-on toujours parlerde rééducation accélérée ? Ou plutôt derééducation intensive ? Ce protocolepeut-il être appliqué sans réserve à tousles patients opérés d’une plastie au ten-don rotulien ? Cette rééducation peut-elle être préconisée lorsque d’autresgreffons sont utilisés ? La discussion est ouverte et amène cer-taines remarques.

L’appui immédiat est actuellement tou-jours proposé aux restrictions déjà citéesdans cet article (hyperlaxité anormale,geste chirurgical associé, plastie utilisantles IJ…).La recherche de l’extension, voire del’hyperextension complète, est primor-diale chez les athlètes pour préserverleur avenir sportif, mais peut s’avérerdangereuse s’il existe un flessum méca-nique lié, par exemple, à la malpositionde la greffe.L’absence d’attelle de rééducation, maisil faudra rester très vigilant chez lespatients douloureux ou présentant desgenoux inflammatoires post-opératoires,

pour qu’ils n’adoptent pas “un flessumde maintien” souvent antalgique.Le renforcement du quadriceps doit res-ter adapté à la tolérance locale et mus-culaire des patients opérés.

En juin 2002, lors du Congrès de l’Ame-rican Orthopedic Society for Sports Mede-cin (AOSSM) à Orlando, Beynnon aprésenté les résultats comparatifs de2 groupes de 20 patients actifs opérésd’une plastie os-tendon-os ayant suivi,pour le groupe I une rééducation clas-sique, et pour le groupe II une rééduca-tion “accélérée”. Dans les 2 groupes, lespatients effectuaient les mêmes exercices,mais à des délais post-opératoires diffé-rents, l’évaluation était clinique, biolo-gique et fonctionnelle globale. Lesrésultats à 2 ans post-opératoires confir-ment une augmentation de la laxité pourles patients du groupe II (rééducationaccélérée) comparativement à ceux dugroupe I. L’auteur conclut en incitantdonc à la prudence dans la mise en placede protocole de rééducation.

■G - Reprise du sportLe délai de reprise sportive reste encoreaujourd’hui un sujet très controversé et c’esten particulier sur ce point qu’après plastieutilisant le tendon rotulien, dans les années80, 2 conceptions différentes s’opposaient:la majorité des chirurgiens adoptait uneattitude conservatrice visant à protéger aumaximum le transplant et n’autorisait lareprise des activités sportives qu’au 9e ou12e mois post-opératoires. D’autres, commeShelbourne (32, 33), prônaient dès 1987une rééducation accélérée autorisant lareprise de tous les sports à 4 mois.En 1993, les résultats de l’étude de Glasgow(52) confirment les constatations cliniques deShelbourne. Les auteurs ne retrouvent pasd’augmentation de la laxité chez des patientsayant repris le sport précocement (à 5 mois)comparativement à ceux qui l’avaient reprisplus tardivement (à 9 mois), et expliquent enpartie le changement d’attitude des chirur-giens américains. Dans son étude en 2001,Delay (35) rapporte bien cette évolution ennotant qu’en 1992, 40 % des chirurgiensaméricains de l’AAOS interrogés autorisaientla reprise de toute activité sportive à 6 mois,alors qu’en 1998 ils étaient 74 %.

Après plastie au tendon rotulien, 12 % auto-risent le retour à toute activité sportive à 4 mois, 25 % à 5 mois et 72 % à 6 mois. Après plastie utilisant les IJ, 8 % permet-taient le retour au sport à 4 mois, 19 % à5 mois et 67 % à 6 mois post-opératoires.Delay rapporte également qu’après uneallogreffe, ces pourcentages passaient à8 %, 17 % et 55 % pour les mêmes délaispost-opératoires. L’étude statistiqueconfirme que dans le cas des plasties uti-lisant le tendon rotulien, plus les chirur-giens effectuent de ligamentoplasties,plus le délai autorisé pour la reprise dusport diminue.

Plus récemment, en France, certaineséquipes (31, 45) ont suivi le courant etont déterminé les paramètres permet-tant le retour précoce au sport. Lesauteurs s’accordent donc pour autoriserla reprise d’une activité sportive si :• le genou est sec et indolore,• la mobilité est complète,• la récupération de la force musculaireévaluée par isocinétisme est supérieureà 90 % par rapport au côté opposé,• la course sur terrain plat acquise,• la laxité résiduelle mesurée au K.T 1000inférieure à 3 mm comparativement aucôté opposé.

Depuis les études de Chen (53), onconnaît bien les contraintes s’exerçantsur le LCA sain lors d’activités de vie quo-tidienne (marche sur terrain plat : 210 N,descente d’escalier : 133 N…) et d’acti-vités sportives (vélo : 27 N, squatt : 71 N,course : 630 N…). En revanche, l’évo-lution de la résistance des transplants(tendon rotulien ou DIDT) au cours dutemps n’est pas bien connue. Si l’on partdu constat que le greffon présente, à 1 an post-opératoire, une résistancemécanique égale à la moitié d’un LCAnormal (800 N), ceci devrait être suffi-sant pour supporter les contraintes occa-sionnées lors de la reprise de sport parla course à pied, les changements dedirection, les décélérations, les sauts ;toutefois, l’effet potentiellement nocifsur les greffes de LCA incite encore cer-tains chirurgiens à rester prudents avantd’autoriser la reprise précoce des sportspivot contact.

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Rupture du LCA

Si au cours du temps les principesde rééducation après reconstruc-tion du LCA (récupération articu-

laire, renforcement musculaire etproprioception) sont restés identiques,les délais de début des exercices propo-sés ont en revanche changé.

■A - Les années 1970L’approche chirurgicale se résume, pourles ruptures récentes du LCA dans lecadre de lésions complexes, à une suturedu ligament rompu et à une réparationdes plans périphériques ; pour les laxitéschroniques, les années 70 voient letriomphe des premières plasties extra-articulaires (Slokum, Ellison, Loosey,Lemaire…).Les suites post-opératoires et la réédu-cation sont longues et difficiles pour lesruptures récentes du LCA : immobilisa-tion dans un plâtre cruro-pédieux pen-dant 6 semaines, puis reprise d’appuiprogressive en 1 mois avec maintien d’unflessum de sécurité à 30°. La poulie thé-rapie sévit et le renforcement musculaireest effectué préférentiellement en CCO;la sidération du quadriceps est souventlongue à lever. Le travail proprioceptif nedébute qu’après 3 mois. La reprise del’entraînement sportif vers 9 mois et leretour aux sports pivot-contact à 1 anpost-opératoire.Les résultats anatomiques et fonctionnelssont décevants, dominés par un nombreélevé d’algodystrophie retardant les pro-grès en rééducation, une perte de mobi-lité définitive (flessum dans 30 % des cas)et surtout la réapparition d’une laxité rési-duelle que ce soit après suture du LCA enurgence où plastie extra-articulaire. Il adonc fallu se rendre à l’évidence que lasolution résidait dans la réparation du pivôtcentral en utilisant les tendons des IJ à 1puis à 2 brins (Lindeman, Bousquet,Laboureau, Cho…) ; le protocole post-opératoire restait à peu près identique avecune immobilisation plâtrée et une réédu-cation délicate, néanmoins ces 1res plasties

intra-articulaires ont apporté des progrèsdans la qualité des résultats obtenus.

■B - Les années 1980L’avancée technique la plus marquanteest l’arthroscopie, qui évite de largesarthrotomies et facilite les suites post-opératoires.Concernant l’approche chirurgicale, leschirurgiens optent dans un 1er tempspour la reconstruction d’emblée du LCArompu par une greffe de tendon rotu-lien puis, vers la fin des années 80, appa-rait la notion de chirurgie différée qui,pratiquée après “l’orage inflammatoire”post-traumatique initial, permet de dimi-nuer les complications post-opératoires.Enfin, c’est aussi dans cette décénniequ’apparaissent les prothèses ligamen-taires synthétiques, soit en substitutioncomplète, soit à type de renforcementdont les résultats s’avèrent catastro-phiques car leurs performances biomé-caniques sont inadaptées à la fonctionligamentaire.Les programmes de rééducation évo-luent peu durant la 1re partie de cettedécennie avec une attitude relativement“conservatrice” visant à protéger au maxi-mum le transplant utilisé. Les protocolesde rééducation sont conventionnels etmême si l’immobilisation plâtrée est plusrare, l’utilisation d’une attelle de protec-tion est quasi-systématique. Le maintiend’un flessum de sécurité pour protégerle transplant est préconisé. La reprisesportive reste toujours tardive concernant

les sports pivot-contact à 1 an post-opé-ratoire.Les suites post-opératoires restent domi-nées, après plastie au tendon rotulien,par les douleurs antérieures et une pertede mobilité avec flessum persistants.

■C - Les années 1990Les principales avancées techniques res-tent l’IRM qui a permis de faire progres-ser le diagnostic lésionnel exact et lestravaux biomécaniques et expérimentauxqui ont aidé à mieux comprendre le phé-nomène de ligamentisation et à définirune stratégie chirurgicale pour mieuxpositionner les greffons. Dans le mêmetemps, les systèmes d’ancrage ligamen-taire avec l’emploi de plus en plus fré-quent des vis d’interférence permettentd’améliorer la fixation du greffon rotu-lien. Parallèlement, les outils d’évaluationse sont développés (Score IKDC, Tegner,Lyshom…) permettant, à un niveau inter-national, la comparaison des résultatsanatomiques et fonctionnels des diffé-rentes équipes chirurgicales.Les programmes de rééducation suiventl’amélioration des techniques chirurgi-cales et deviennent plus “agressifs” pourle greffon. Ainsi, les défenseurs de larééducation accélérée, telle que prônéepar Shelbourne, apparaissent peu à peuen France (Boileau, Middleton, Roch-congar…). Ces programmes de réédu-cation “intensive” sont réservés auxplasties utilisant le tendon rotulien. Les particularités de la rééducation aprèsplastie DIDT sont liées à la nécessité deprotéger le site donneur du prélèvementjusqu’à sa cicatrisation d’une part et à larelative fragilité des systèmes d’ancragede ce type de greffon jusqu’à 3 moispost-opératoires d’autre part. Dans les suites post-opératoires, les résul-tats fonctionnels à 1 an sont satisfaisantsdans plus de 80 % des cas, quelle que soitla méthode utilisée (DIDT ou tendon rotu-lien) et permettent de valider ces 2 tech-niques chirurgicales. Dans une étude

� Synthèse de l’évolution après ligamentoplastie

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Rupture du LCA

ConclusionDepuis 30 ans, la rééducation s’adapte aux progrès des tech-niques chirurgicales et aux avancées des connaissances expé-rimentales précisant mieux le processus de ligamentisationchez l’homme.En théorie, elle doit permettre un niveau approprié de contraintessur le greffon pour favoriser sa réorganisation collagénique etdonc la maturation du transplant. En pratique, la finalité de larééducation vise à restaurer un genou stable et fonctionnel enpérennisant la qualité du résultat au cours du temps. Toutefois, une rééducation mal conduite, standardisée, peutêtre dangereuse et a sa part de responsabilité dans les mauvaisrésultats cliniques. Les exercices proposés doivent donc resterindividualisés à chaque patient, à chaque lésion, à chaquetype de chirurgie et à chaque réponse tissulaire.

Il n’y a plus de place pour la suture dont on sait main-tenant que les résultats sont similaires à ceux du traite-ment orthopédique. Le LCA rompu doit être reconstruit.Parmi les tendons disponibles, le tiers central du tendonrotulien constitue la greffe de choix. “Etalon or” planétairede cette chirurgie dont la technique arthroscopique estbien codifiée, il aboutit à des résultats fiables et repro-ductibles. La fréquence des douleurs de pointe de rotule,régulièrement observées, est en diminution grâce à l’amé-lioration des techniques chirurgicales et des protocoles derééducation. Pour cette raison, certains préfèrent cepen-dant utiliser les tendons ischio-jambiers, mais dont les résul-tats sur la laxité sont moins fiables qu’avec le tendonrotulien.

• Quels patients rééduquerons-nous ? Jusque dans les années 90, l’âge restaitun paramètre déterminant dans la déci-sion chirurgicale et nombreux sont lespatients qui se sont vus refuser uneplastie de reconstruction du LCA après35 ans. Heter, en 1997, rapporte lesuivi de 45 patients de plus de 40 ans(de 40 à 62 ans) opérés d’une plastieos-tendon rotulien-os : à 3 ans post-opératoire l’évaluation clinique, radio-logique, isocinétique et subjectiveretrouve des résultats identiques à ceuxpubliés dans les séries de patients opé-rés plus jeunes.

• Où seront rééduqués les patients ? Depuis quelques années apparaissentdes travaux comparant les résultats demode différencié de rééducation ; en2001, Rousseau et coll. (55) publiaientles résultats d’une étude prospective ran-domisée chez 103 patients opérés d’unereconstruction du LCA et ayant suivi lemême programme de rééducation, saufdurant le 1er mois post-opératoire où lamoitié a été rééduquée en ambulatoireet l’autre moitié en hospitalisation com-plète en structure de rééducation : lacomparaison des résultats dans les 2 groupes ne trouve pas de différencesignificative. ■

prospective, Katabi et coll. (54), compareà 1 an de recul, les complications retrou-vées en fonction du transplant utilisé. Leursrésultats confirment ceux d’autres auteurs(Aglietti, Corry, Anderson…) en retrouvantque le contrôle de la laxité est mieuxassuré dans le groupe ayant bénéficié d’untransplant libre rotulien, mais que les dou-leurs résiduelles sont moindres dans legroupe DIDT. Ils en concluent que le ten-don rotulien reste le transplant de réfé-rence, notamment pour les sports à hautecontrainte de type pivot-contact.

■D - Quel avenir ?Même s’il est délicat, voire hasardeux,de prédire l’avenir avec précision, cer-taines voies de recherche semblent sedessiner, devant permettre de résoudreles complications résiduelles de cesplasties.

• L’approche chirurgicaleElle s’oriente selon 4 pistes.1 - Le recours progressif à un systèmede navigation informatisée devrait per-mettre d’optimiser le positionnement dutransplant pour diminuer au maximumla variation de longueur lors des mou-vements de flexion-extension.2 - Le développement des plasties à 2 fais-ceaux devrait permettre, outre le contrôlede la translation antérieure du tibia, de

mieux contrôler la rotation tibiale interne.Si les résultats à 6 mois sont encourageants,ils demandent à être confirmés par d’autresétudes prospectives randomisées à un reculpost-opératoire plus important.3 - L’amélioration des systèmes de fixa-tion des greffons par l’intégration de poly-mères résorbables.4 - La meilleure gestion de l’environne-ment ligamentaire (ménisques, cartilage)par le développement des sutures ménis-cales avec utilisation de systèmes résor-bables, peut-être, le développement enFrance des allogreffes méniscales. Demême, la réparation des lésions cartila-gineuses a connu depuis quelquesannées un essor important.On ne peut terminer ce panorama sansévoquer les espoirs qu’apporterait la thé-rapie génique qui, probablement à longterme, sera la solution idéale de cicatri-sation ligamentaire.

• Quelle rééducation demain ?Plus d’interrogations que de certitudesviennent à l’esprit : Jusqu’où “accélerera-t-on” la rééducation ? Suivra-t-onl’exemple de Shelbourne qui, en 1999,autorisait un basketteur professionnel de23 ans à la reprise de la compétition à 6 semaines d’une transplantation os-tendon rotulien-os prélevé sur le genousain controlatéral ?

< DOSSIER >

M É D E C I N S D U S P O R T 25 N ° 6 3 - J A N V I E R / F É V R I E R 2 0 0 4

Rupture du LCA

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BIBLIOGRAPHIE