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Elsa DREYFUS-SCHMIDT AHU Paris-Descartes Exercice Libéral Paris Charlotte RITTER Exercice Libéral Paris Une même passion, la dentisterie adhésive et esthétique : 1200 participants de 14 pays différents se sont réunis au Mont des Arts à Bruxelles les 15 et 16 décembre 2017 pour la 5 e édition de la Conférence internationale de dentisterie adhésive et esthétique (CIDAE). Alternance de didactisme et de pédagogie, les présentations de la CIDAE, avec leur dimension spectaculaire, incarnent ce juste équilibre entre la formation et la passion du métier avec, toujours, le souci de l’excellence. Au programme de cette édition, les participants ont pu découvrir de nombreuses innovations, et écouter des ténors de la dentisterie des quatre coins du monde, dans une ambiance confraternelle et chaleureuse. Reportage En direct du CIDAE Clinic 2018 ; 39 : 113-123 113 et articulaire. Les contacts occlusaux sont nombreux, symétriques et bien équilibrés en intensité. Les bords libres et les faces palatines des incisives maxillaires sont usés sévèrement. Les faces occlusales des dents cuspides sont intactes. Le patient souffre de re- flux gastro-œsophagien (RGO). Il consulte car il est inquiet de la « dimi- nution de ses dents de devant ». Il sou- haite retrouver des incisives de taille normale et plus blanches (fig. 1). Comment dépiste-t-on un RGO ? Quels sont les signes cliniques qui orientent vers une acidité d’origine gastrique ? Quelle attitude adopter si le gastro- entérologue ne diagnostique pas de RGO ? Le reflux gastro-œsophagien est la re- montée intermittente du contenu gas- trique dans l'œsophage en raison d'une défaillance de la barrière anti-reflux (sphincter œsophagien) [1]. Il est pré- Jean-Pierre Attal est maître de confé- rences des Universités, praticien hospi- talier, responsable du département de Biomatériaux de l’université de Paris Descartes. Il a écrit plus de 300 publi- cations, dont des dizaines internatio- nales. Il nous expose un cas clinique à résoudre pendant le congrès. Un patient de 35 ans, en bonne santé générale, présente des édentements unitaires anciens non compensés de 36 et 46, et une bonne santé parodontale Jean-Pierre Attal Jeu cas clinique. La problématique de l’érosion © Initiatives Santé, 2018 © Éditions CdP 2018/Initiatives Santé

Sant En direct du CIDAE 2018/Initiatives · Jean-Pierre Attal est maître de confé-rences des Universités, praticien hospi-talier, responsable du département de Biomatériaux de

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Elsa DREYFUS-SCHMIDTAHU Paris-DescartesExercice LibéralParis

Charlotte RITTERExercice LibéralParis

Une même passion, la dentisterie adhésive et esthétique :1200 participants de 14 pays différents se sont réunis au Mont desArts à Bruxelles les 15 et 16 décembre 2017 pour la 5e édition de laConférence internationale de dentisterie adhésive et esthétique(CIDAE). Alternance de didactisme et de pédagogie, les présentations de laCIDAE, avec leur dimension spectaculaire, incarnent ce justeéquilibre entre la formation et la passion du métier avec, toujours,le souci de l’excellence. Au programme de cette édition, lesparticipants ont pu découvrir de nombreuses innovations, etécouter des ténors de la dentisterie des quatre coins du monde,dans une ambiance confraternelle et chaleureuse.

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et articulaire. Les contacts occlusauxsont nombreux, symétriques et bienéquilibrés en intensité. Les bords libreset les faces palatines des incisivesmaxillaires sont usés sévèrement. Lesfaces occlusales des dents cuspidessont intactes. Le patient souffre de re-flux gastro-œsophagien (RGO).Il consulte car il est inquiet de la « dimi-nution de ses dents de devant ». Il sou-haite retrouver des incisives de taillenormale et plus blanches (fig. 1).

Comment dépiste-t-on un RGO ?Quels sont les signes cliniquesqui orientent vers une aciditéd’origine gastrique ? Quelle attitude adopter si le gastro-entérologue ne diagnostiquepas de RGO ? Le reflux gastro-œsophagien est la re-montée intermittente du contenu gas-trique dans l'œsophage en raison d'unedéfaillance de la barrière anti-reflux(sphincter œsophagien) [1]. Il est pré-

Jean-Pierre Attal est maître de confé-rences des Universités, praticien hospi-talier, responsable du département deBiomatériaux de l’université de ParisDescartes. Il a écrit plus de 300 publi-cations, dont des dizaines internatio-nales. Il nous expose un cas clinique àrésoudre pendant le congrès.Un patient de 35 ans, en bonne santégénérale, présente des édentementsunitaires anciens non compensés de 36et 46, et une bonne santé parodontale

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sent chez 20 à 40 % des adultes dans les pays dé-veloppés. Les symptômes sont des brûlures et desdouleurs épigastriques (œsophagite), une touxchronique inexpliquée, de l'asthme, des laryngiteset des érosions dentaires.Le diagnostic est confirmé par une pH-métrie œso-phagienne qui mesure pendant plusieurs heures le pHde l’œsophage. Le diagnostic est confirmé pour un pHsupérieur à 5. Cet examen est fiable dans 96 % des cas.

Quelles sont les objectifs de traitement ? • La protection des faces palatines de l'usure chi-mique.• La restauration des pertes de substance anté-rieures en redonnant une forme naturelle.• Le comblement des édentements de 46 et 36 parprothèses implanto-portées.• L'éclaircissement des dents.

Quelle proposition de traitement peut-on faire ?• Temps orthodontique pour obtenir l'espace pro-thétique antérieur nécessaire.• Facettes palatines en composite (fig. 2 et 3).• Éclaircissement ambulatoire externe.• Raccord vestibulaire en composite (fig. 4 et 5).• Implants et prothèses implanto-portées sur 46 et 36.

Peut-on éclaircir les dents érodées ?Avec quel protocole ? Et quel est le pro-nostic ?Les dents érodées ne présentent pas de contre- indication à l'éclaircissement ambulatoire externeen utilisant du peroxyde de carbamide à 10 %.L'émail joue un rôle important dans le résultat del'éclaircissement et, dans ce cas clinique, l'émail ves-tibulaire n'est pas atteint sur les portions d'incisivesrésiduelles. Il n'y a donc aucune raison que le résultatobtenu ne soit pas satisfaisant.

Si vous indiquez des facettes, quel maté-riau sélectionnez-vous et pourquoi ?Le composite est le matériau idéal des facettes pa-latines pour :• permettre facilement les raccords vestibulairesaprès un simple fraisage de sablage ;• permettre la préparation en vue de facettes ves-tibulaires en technique bilaminaire ;• éviter l'usure des dents naturelles antagonistes.

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Installés dans le golfe de Saint-Tropez depuis 2005,Hélène et Didier Crescenzo dirigent un laboratoirede prothèse hors norme proposant un travail arti-sanal de haut niveau, le laboratoire Esthetic Oral. Ilspartagent leur grande connaissance du travail deprothésiste, de la dentisterie et des matériaux, pardes conférences dans le monde entier et la publi-cation de nombreux articles. Ils possèdent uneconnaissance des problématiques cliniques qui leurdonne une importante valeur ajoutée pour leursréalisations et qui est appréciée par leurs praticienscorrespondants.La dentisterie moderne leur a ouvert une nouvelleréflexion au travers de la notion de « gradient thé-rapeutique » qui favorise la conservation tissulaire.Ils ont eu l’idée de proposer un « gradient des réa-lisations prothétiques », du chips au bridge complet,selon le même esprit. Leurs approche, analyse etétude reposent sur ce principe. Ils sont depuis 5 ansles concepteurs et formateurs d’un système de pré-visualisation esthétique digitalisée, le VEP (VirtualEsthetic Project). Tous leurs travaux passent parune étude de wax-up suivi du mock-up en clinique.Ils ont développé des techniques pour travailler àdistance, améliorer la précision en méthode tradi-tionnelle avec la technique CPC. Ils ont développéleurs connaissances cliniques, ce qui les a amené àcomprendre les limites des matériaux dans leurcontexte clinique.Leur présentation aborde les temps par temps deleur laboratoire, avec différentes astuces pour fa-ciliter les étapes cliniques qui suivent leurs partiestechniques. Ils exposent ensuite les différentes tech-niques possibles pour la réalisation de pièces en cé-ramique et détaillent le choix du lingotin de céra-mique en fonction de l’épaisseur et de la couleurdu support, un sujet sur lequel ils ont égalementbeaucoup travaillé, ainsi que le travail de texture desurface. Toutes ces étapes sont incontournables,peu importe l’outil utilisé.Trois céramiques sont présentées en fonction dusupport et de la technique de pressé :• Inline (monochrome) : il s’agit d’une céramiquefeldspathique renforcée à la leucite pressée sur mé-tal (POM). Elle existe en 7 couleurs, sous forme delingotin en 2 tailles (XS ou S) ;

• Zirpress (monochrome) : il s’agit d’une vitrocéra-mique à base de fluoroapatite pour la pressée surarmatures en zircone ; • E.max Press (monochrome et polychrome) : ils’agit d’une céramique de disilicate de lithium avecpressée sous 2 formes, verticale monochrome ethorizontale polychrome.Notre attention se porte tout particulièrement surl’e.max, matériau polyvalent disponible égalementen utilisation cosmétique. Ce matériau peut être utilisé ou plusieurs techniquespour satisfaire les impératifs mécaniques, fonction-nels et esthétiques des restaurations : • monolithique : présente la meilleure résistance ;• cut back : le choix de cette technique se justifiequand l’occlusion est serrée et qu’il est préférablemécaniquement d’avoir un volume plus importantde matériau pressé. Dans un premier temps, la mor-phologie entière de la dent est réalisée par presséede la céramique. Secondairement, le prothésiste ef-fectue une réduction partielle, puis stratifie avecdes effets une couche cosmétique pour amélioreret personnaliser le rendu esthétique ;• tout stratifié : plusieurs apports de matières avecdes masses cervicales, au noyau, de l’opalescencepar endroits… Le tout est sculpté avec des micro-craquelures en mélangeant les masse opaques,semi-opaques et translucides. Ces trois techniques couvrent toutes les indicationsde traitements unitaires antérieures et postérieures. La diversité des lingotins d’e.max permet d’utilisercette céramique dans toutes les situations cliniques.

Il faut envoyer au prothésiste des photos de la dentpréparée ou du support, sans provisoire. Ces para-mètres orientent le choix du lingotin (fig. 1) :• groupe de luminosité : sombre, moyen ou clair ;• nature et couleur du support : moignon naturel,implantaire, inlay-core, masquer ou adoucir ; • couleur désirée ;• degré d’opacité du lingotin.Le disilicate de lithium, dans sa version pressee IPSe.max Press en lingotin, nous est propose selon5 degres de translucidité : • HO : haute opacite, disponible en 3 nuances (HO0,HO1, HO21). Leur forte opacité permet de masquer

Rencontre entre techniqueet clinique Hélène Crescenzo,

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les préparations fortement dyschromiées aussi bienque les faux moignons métalliques. Les restaura-tions sont ensuite stratifiées avec les matériaux IPSe.max Ceram. Utilisable sur tout support ;• MO : moyenne opacite, 5 nuances (de MO0 aMO4). Leur opacité permet de les utiliser pour laréalisation d'armatures sur dents vitales peu dys-chromiées. Utilisable sur support dyschromies sansmetal ; • LT : basse translucidite, 16 teintes (A-D & 4 BleachBL). Leur faible translucidité rend ces lingotins par-ticulièrement adaptés à la fabrication de dents mo-nolithiques (ex. : couronnes postérieures). Le ma-tériau présente une luminosité et une saturationnaturelles qui évitent un rendu trop gris des restau-rations. La technique du cut-back permet de par-faire l’esthétique des restaurations. Utilisable sursupport avec faible dyschromie ; • MT : moyenne translucidité, 4 teintes (A1, A2, A3,B1) et 3 bleach (BL2, BL3, BL4). Leur transluciditémoyenne permet de les utiliser dans les cas néces-sitant un matériau plus lumineux qu’un lingotin HT

et plus translucide qu’un lingotin LT. Ces restaura-tions peuvent être caractérisées par maquillage oucut-back ;• HT : haute translucidite, 16 nuances A-D & 4Bleach. Grâce à leur translucidité proche de cellede l’émail naturel, ces lingotins conviennent parfai-tement à la réalisation de petites restaurations (ex. :inlays). Grâce à leur « effet caméléon » naturel, elless’adaptent harmonieusement à la structure dentairenaturelle. Elles peuvent être caractérisées par ma-quillage. Utilisable sur support sans dyschromie ;• Impulse O : les lingotins Impulse sont disponiblesen 2 degrés de luminosité (Opal 1, Opal 2). Les res-taurations réalisées présentent des propriétés opa-lescentes exceptionnelles. Ce matériau est idéalpour la réalisation de facettes (pelliculaires) surdents très claires qui requièrent un effet opalescent.Hélène et Didier Crescenzo présentent leur techniquede mise en œuvre pour la céramique pressée sur basecomposite (CPC) mise au point pour améliorer la pré-cision de la méthode traditionnelle [2].Dans la technique de la cire perdue, même bienmaîtrisée, une grande difficulté existe pour réaliserdes pièces très fines souvent instables ou déforma-bles sur le modèle. Il est possible de sculpter unepièce grossière dans l’idée d’affiner ensuite la piècepressée mais les risques d’ébrécher un bord ou depercer la pièce sont importants.Leur réflexion s’est orientée vers la recherche d’unautre matériau plus compatible pour la pressée,plus stable et moins fragile à utiliser. L’expérimen-tation s’est faite avec différentes résines compositescalcinables sans résidu. La plus performante a étéle Ceramill Gel (Amann Girrbach) qui offre une vis-cosité permettant de travailler à la seringue direc-tement sur le modèle pour réaliser les pièces à pres-ser, sans changer la technique de la cire perdue.Rien n’est modifié dans le protocole de mise en revêtement, ni dans celui de la pressée, c’est lemême que celui de la cire perdue. Toutes les res-taurations fines pour la pressée sont réalisées avecce matériau (fig. 2).La dentisterie actuelle nous mène vers de grandesévolutions, tant pour le patient, le chirurgien dentisteque le prothésiste dentaire. La microdentisterie englobe une approche moins mutilante pour le patient, des étapes très délicates pour le prothésisteet des techniques cliniques très strictes pour le pra-ticien. Tout cela n’est rendu possible que grâce àune connaissance approfondie des techniques etdes matériaux utilisés par le prothésiste et une com-munication étroite entre le cabinet et le laboratoire.

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Le Dr Sousa Dias commence à travailler en 2013après sa formation à l'université de Tel Aviv, il pra-tique une dentisterie esthétique en collaborationavec des dentistes du monde entier depuis sa cli-nique au Portugal. Sa présentation, adaptée auxomnipraticiens, a comme objectif de montrer la réa-lité d'une pratique orthodontique quotidienne in-tégrée dans un travail d'équipe. Les deux premiers cas présentés sont des situationsde doléances esthétiques « simples » : la volonté defermer des diastèmes et celle de résoudre un en-combrement mandibulaire. Ces objectifs esthé-tiques sont résolus après quelques mois de traite-ment orthodontique.Les cas suivants ont permis, grâce à l'approche or-thodontique, de modifier le plan de traitement ini-tialement envisagé par l’omnipraticien afin d'éviterdes prises en charges plus invasives et complexes.Dans le cas n° 1 (fig. 1), la patiente est adressée parson dentiste pour l'intrusion de la 46 afin de recréerun espace prothétique suffisant pour remplacer la16 absente et rétablir des courbes occlusales satis-faisantes. Elle présente également un encombrementdentaire et un couloir dentaire trop sombre au niveaudes molaires ayant une incidence esthétique au sou-rire. Le sinus maxillaire est très bas, néces sitant unsinus lift avant la pose d'implant en position de la 16.Les objectifs sont les suivants :• fermer l’espace au niveau de la 16 ;• améliorer les rapports entre arcades en diminuantl’overjet ;• lever la supraclusion ;• réaliser l'intrusion de la 46 ;• obtenir une classe 1 canine ;• améliorer le couloir dentaire en modifiant la po-sition des prémolaires.L'orthodontiste analyse la situation différemment,il propose alors à l'omnipraticien une nouvelle orien-tation du plan de traitement avec une solutionmoins invasive. Après l'extraction de la 48 et de la 25, la pose d'unappareil orthodontique fixe permet de remplir tousles objectifs de traitement orthodontique et d’avan-

cer la 17 afin de fermer l’espace au niveau de la 16absente. Ce traitement permet d'éviter la chirurgie(sinus et pose d’implant) et de résoudre tous lesimpératifs esthétiques (fig. 2 et 3).Tous les patients présentant un édentement uni-taire ne sont pas candidats à l'implantologie.

La dentisterieinterdisciplinaire avecl'orthodontie commepartenaire clé de l'équipe

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Dans le cas n° 2 (fig. 4), le jeune patient se plaint dela malposition de ses dents maxillaires et de l'en-combrement mandibulaire sans avoir réellementconscience des récessions gingivales. Il souhaiteaméliorer l'esthétique de son sourire.Le déplacement des dents par le traitement ortho-dontique dans l’enveloppe osseuse suffit à améliorerles récessions gingivales (fig. 5). Tous les patients

avec des récessions gingivales ne nécessitent pasde chirurgie parodontale.

La deuxième partie de la conférence présente des cascomplexes nécessitant une prise en charge pluridis-ciplinaire (chirurgie, parodontie, orthodontie, restau-ratrice). L’apport de l'orthodontie simplifie considéra-blement la prise en charge et le plan de traitement.

Chef du département de prothèse et de biomaté-riaux de l’université de Genève, le Dr Irena Sailer asigné plus de 80 publications internationales. Elles’intéresse aux sujets actuels de prothèses (im-planto-portées et dento-portées) les plus impor-tants, sous forme de recherches in vitro, de revuessystématiques de la littérature scientifique et debêta-analyses.Sa présentation aborde l’évolution des techniquesde CAD-CAM et l’état actuel des recherches trèsprometteuses de mock-up virtuel dynamique. Elleprésente ensuite un arbre décisionnel résumant lechoix de familles de céramiques en fonction de l’in-dication dento-portée ou implanto-portée. Depuis 1973, date de la thèse sur l’empreinte optiquedu chercheur François Duret, cette pratique necesse de se développer et de s’améliorer, en paral-lèle avec toute la chaîne de planification virtuelle etde CFAO. Aujourd’hui, les dentistes sont dans l’obli-gation de prendre en compte les évolutions tech-

nologiques qui impactent le diagnostic, la planifi-cation, et la communication avec le patient.Le cas présenté est celui d’un patient dont les ra-cines de la 11 et de la 21 sont cariées et à extraire.L’empreinte optique et le cone beam réalisés per-mettent la réalisation d’une planification et d’un set-up virtuel. Cette planification est l’outil idéal de com-munication avec le patient, il permet d’intégrer enquelques clics les modifications souhaitées, avantde lancer l’impression par CAD-CAM d’un mock-upqui est essayé et validé cliniquement avec le patient.Virtuellement, la position des implants est aussi pla-nifiée avec impression du guide chirurgical.Le set-up utilisé initialement est repris pour réaliserle bridge provisoire sur implant. Ce même fichier(.stl) est enfin utilisé et adapté pour la réalisationd’éléments d’usage sur Ti-base.L’évolution de la technologie permet de combinerle visage du patient, les modèles et le CBCT sur unmême support. Des ingénieurs de l’école polytech-

Critères de sélection descéramiques de restauration Irena Sailer

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nique de Zurich ont été contacté pour adapter, aupatient et à notre exercice, l’algorithme développédans les films pour virtualiser les acteurs. Le défiétait d’obtenir un « scanner 3D facial » simple d’uti-lisation à partir d’acquisitions faites à l’iPhone. Ledéveloppement est en cours d’amélioration. Aprèsle statique, un scanner a été mis en place pour vir-tualiser les mouvements de la face. Dans un monde idéal, on obtiendrait un fichier .stlqu’on modifierait avec les propositions faites au pa-tient, propositions qui pourraient être vues et es-sayées virtuellement par le patient sur iPhone ouiPad (position dent, éclaircissement, bague…). Ils’agirait d’un mock-up virtuel dynamique. Essayerson sourire comme on essaierait des lunettes. Choi-sir son sourire et valider le fichier .stl.La deuxième partie de la conférence porte sur lescritères de sélection des matériaux de restaurationpour prothèses dento-portées. Toutes les informa-tions présentées sont résumées dans des arbresdécisionnels (fig. 1 et 2). Après quelques années de recul clinique, les résultatsdes études menées ne montrent pas de différencesignificative dans les taux de survie des restaurationsunitaires céramo-métalliques et toutes céramiques(feldspathiques, vitro-céramiques, zirconia) [3].Pour les couronnes unitaires antérieures et posté-rieures, le praticien peut choisir dans la palette decéramiques monolithiques disponibles selon les be-soins esthétiques et les capacités de collage. Lesrésultats obtenus sont comparables à ceux des res-taurations céramo-métalliques. En conclusion, la seule indication restante de cou-ronne céramo-métallique est la présence d’un sup-port très dyschromié qu’il faut camoufler.

Le challenge de l’incisivecentrale maxillaire :composite ou céramique ?

Javier Tapia-Guadix

Le Dr Tapia est un conférencier international ap-partenant à l’équipe de bio-émulation réunissantmentors, chercheurs, prothésistes et dentistes [4].Il présente la problématique de la restauration uni-taire de l’incisive centrale maxillaire. Le défi estgrand car la restauration doit s’intégrer parfaitement

dans le sourire du patient. Il peut sembler parfoisplus simple de restaurer les deux incisives centralespour obtenir une meilleure intégration esthétique,alors que l’une est parfaitement saine, mais cetteoption est beaucoup trop invasive. La dentisterieactuelle a une grande priorité : la préservation tis-

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sulaire. Il faut être conservateur, ne jamais sacrifierles tissus en raison de vos limites techniques. Il fautse former et apprendre… ou adresser le patient versun confrère qui a l’expérience suffisante. La présentation compare l’utilisation du compositeet de la céramique, puis se penche sur l’évolutiondes techniques de prise de teinte. Le tableau 1 compare les propriétés des compositeset des céramiques. Le tableau 2 liste les facteurs àconsidérer pour orienter sa décision thérapeutiquevers l’un des deux matériaux. Quel que soit le matériau choisi, la réussite de la res-tauration dépend de la juste analyse de la teinte dutissu dentaire restant. Il faut observer la nature avecdifférentes lumières pour mieux la reproduire.Le meilleur outil pour communiquer avec le labo-ratoire de prothèse est l’appareil photo.Plusieurs filtres sont utiles pour les photos dentaires,il faut multiplier les méthodes d’analyse.• Polar-eyes (fig. 1) pour polariser la lumière avec unflash photo en retirant toutes les réflexions de lumièreet observer les détails des structures dentaires demanière objective. Cette technique a été développéedès 1987 par Gordon, puis modernisée en digital. Ilsuffit d’appliquer un filtre au niveau de l’appareil. • Fluor-eyes pour prendre des photos des fluores-cences. • White balance (fig. 2) : il s’agit d’une carte de ba-lances du blanc qui sert de référence pour la prise declichés avec la technique d’e-LAB (voir ci dessous).Ces différentes images peuvent être analysées parle praticien et/ou communiquées au laboratoirepréférentiellement sous la forme d’un ficher RAWplutôt qu’un fichier JPEG. Un fichier RAW (de l’an-glais raw signifiant « brut ») est un fichier générépar l’appareil photo numérique, il contient l’ensem-ble des données générées par le capteur, brutesde traitement, plus quelques informations complé-mentaires selon la marque et le modèle de l’appareil.Lorsque vous utilisez le format JPG, c’est le proces-seur du boîtier qui décide d’appliquer les réglagesde prise de vue comme la balance des blancs, l’ex-position et la correction de tons.

•Quelles stratégies pour choisir les composites ?• Nuancier. Il existe maintenant des teintiers qui in-tègrent des teintes émail et dentine, qui peuvent sesuperposer pour être le plus biomimétique possible. • Button technique (fig. 3). Les teintes sont choisiesen déposant des petites noisettes de compositessur les faces vestibulaires au niveau cervical, pourconnaître la teinte dentinaire, et au niveau incisal,pour la teinte amélaire. Il faut être prudent aveccette technique à cause de la déshydratation rapidedes dents. C’est une bonne technique pour les fa-

Propriétés Composite Céramique Mécanique *** *****

Adhésive ***** *****

Complexité du protocole *** **

Stabilité *** *****

Esthétique ***** *****

Réparation ***** *Coût ***** **

Tableau 1.

Situation clinique Céramique Composite

Âge Patients majeurs Jeunes patientsPatients adultes

Modifications à prévoir Non Oui

Teinte Tout substrat dentaire Si faible problème de teinte

Exigence esthétique du patient Forte Modérée

Formation et dextérité du praticien Modérée Importante

Compétences du prothésiste Développées Limitées

Fragilité mécanique de la dent Oui Non

Tableau 2.

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cettes (en tenant compte de l’association entre ladent et l’épaisseur posée par dessus). Cette tech-nique permet d’essayer de façon prévisible.

•Quelles stratégies pour la céramique ?• Classic shade tab (teintier vita). Le résultat estpeu prévisible. Il dépend du substrat, du vieillisse-ment tissulaire, de l’expérience et de l’œil du pro-thésiste. Il risque d’y avoir de nombreux allers-re-tours avec le laboratoire.

• e-LAB (fig. 4). Il s’agit d’un nouveau protocole pré-visible de spectrophotométrie s’appuyant sur despreuves scientifiques (en fonction du spectre decouleur visible par l’œil) [5]. Chaque couleur est dé-finie par 3 caractéristiques : la luminosité (L), laquantité de rouge (A) et la quantité de jaune (B). Ilest utile au laboratoire de prothèse et nécessite uneformation du prothésiste. Les photos sont prisespar l’appareil photo en filtre polarisé avec la carted’équilibre des blancs. La photo en format RAW esttransmise au laboratoire. Les mesures obtenuessont précises et d’une prédictibilité remarquable,elles sont comparées à une base de données. Leprothésiste va créer une teinte personnalisée parrapport au patient à l’aide du système visual eyes,qu’il essaie ensuite virtuellement avant de l’envoyerau praticien (fig. 5). C’est une réelle révolution pourune prise de teinte pour céramique reproductible,le résultat étant presque toujours parfait.

Les fêlures dentairescoronaires Stéphane Browet

David Gerdolle

Après une introduction pleine d’humour des deuxcompères, le sujet des fêlures est lancé dans la bonnehumeur. David Gerdolle présente le cas d’un patientayant consulté il y a quelques années pour des dou-leurs à la mastication sur une dent présentant un

amalgame important, qui a été déposé pour êtreremplacé par une pièce collée. Après une périoderelativement courte, la dent a nécrosé. Un traitementendodontique a été réalisé après observation d’unefêlure radiculaire et une restauration occlusale au

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Reportage

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composite renforcé a été pratiquée. La destructionosseuse autour des racines a beaucoup augmentéet la dent a été extraite. La présentation de cet échecest l’occasion d’analyser les facteurs à observer pourl’éviter autant que possible, en favorisant un diag-nostic précoce grâce à des outils adaptés et la miseen place de stratégies et protocoles thérapeutiques.

Diagnostiquer les fêluresDiagnostic précoceCette première phase de diagnostic est peu inva-sive, pratiquée en prenant son temps et sans déla-brer la dent. Il s’agit d’une phase d’observation avec :• les bons outils visuels :- les outils d’agrandissement : loupes et micro-scopes (agrandissement idéal d’au 13) ou photosintra-buccales et zoom ;- la trans-illumination, comme le Micro-Lux® utilisépar les conférenciers qui présente des embouts lu-mineux changeables de plusieurs formes pours’adapter à toutes les situations cliniques ;- la fluorescence (D-light Pro® de GC) pour faire ap-paraître l'intégrité des fêlures, les reliefs de la den-tine, les matériaux de restauration composite, leursexcès ainsi que les activités bactériennes ;- le sondage à la recherche de perte osseuse ou depoches étroites, conséquences d'une éventuelle fêlure ;• et les bons outils fonctionnels :- Frac FinderTM pour tester la sensation à la pressionet au relâchement ;- test de vitalité ;- Periometer® (test percussion).

Diagnostic approfondiUne fois le diagnostic de fêlure établi ou soupçonnéà partir de ces examens complémentaires, les ré-

ponses à 4 questions permettent d'évaluer la dentfêlée et d’orienter la décision thérapeutique.

• La dent est-elle douloureuse ?• Oui, au relâchement : fêlure coronaire.• Oui, en serrant : parodontite apicale/fêlure radi-culaire.• Non : faire des radios, test de vitalité et sondagelocalisé profond.Dans le cas de dent non douloureuse, il faut informerle patient dans son intérêt, lui montrer une photoavant de passer aux tests approfondis et avoir sapermission. La communication est un facteur clé.

•Où est située la fêlure ?• En surface « craze line » : amélaire.• Interne : dentinaire : - oblique : à quoi ressemble le reste de la dent ? Sielle est intacte, on traite partiellement en recouvrantla cuspide affectée. Si non, il faut faire un overlayocclusal (recouvrement périphérique) ;- vertical : mauvais pronostic, recouvrement péri-phérique et overlay.

•Dans quel schéma occlusal s'inscrit le patient ?• Destructeur : - sur une dent : contact prématuré en rc ;- sur plusieurs dents : bruxisme, « cyclic fatigue ».• Normal : mauvais design de la cavité/mismatch.

•Quelle est la tolérance aux risques ?La taille de la cavité n'est pas le seul indicateur. Lerisque n’augmente pas avec la taille de la cavité.Exemple clinique « cavité occlusale ou recouvre-ment périphérique ? ». • Amalgames occlusaux à déposer, pleins de petitssillons. Après avoir vérifié l'occlusion et nettoyé lesdents, il est observé que les lignes de sillon s'arrêtentau niveau de la jonction amélo-dentinaire, il n'y apas de fêlure dentinaire. Une restauration compositeocclusale simple est alors indiquée. • Amalgame occluso-disto-vestibulaire avec plu-sieurs fêlures profondes. Une restauration périphé-rique est alors indiquée.L’atteinte de la jonction amélo-dentinaire et les sur-charges occlusales sont des facteurs de risque.

Traiter les fêlures

•Quand soigner ?Les facteurs visuels suivants sont des facteurs ag-gravants qui orientent vers un pronostic défavorable : • ligne blanche de fêlure ;• ramification latérale autour d'une fêlure verticale ;• élargissement vertical de la fêlure (écartement) ;

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• combinaisons et réunion de fêlures verticales ethorizontales. En présence d'un ou de plusieurs de ces facteurs,et quel que soit le statut symptomatique de la dent,un traitement est indiqué (fig. 1 à 3).

• Pourquoi soigner ?• Aspect biologique. Une fêlure est une porte d'en-trée pour les bactéries. L'objectif est d'empêcherla pénétration bactérienne dans l'organe dentaire.• Aspect mécanique. L'objectif est d'empêcher laprogression des fêlures pour maintenir une unitébiomécanique résistante.

•Où soigner ?• Limites périphériques (marginales ?) : elles doiventêtre parfaitement nettoyées et étanches.• Partie interne juxta-pulpaire : une fois le nettoyagepériphérique de qualité obtenu, il n'est pas néces-saire de poursuivre le nettoyage des fêlures cen-trales.

• Jusqu'où soigner ?La limite ultime est l'accessibilité technique pour lepraticien qui doit pouvoir isoler à l'aide d'une digue.Si la fêlure est au-delà des limites de l'isolation, ilest possible de prévoir un lambeau d'accès et d’ap-pliquer secondairement la digue dessus.

• Comment soigner ?• Fraisage.• Sablage. • Collage.

Pour conclure, la prise en charge des fêlures reposesur un diagnostic précoce et une compréhensionde la biomécanique dentaire. Les limites de la priseen charge sont la possibilité de coller dans debonnes conditions et de restaurer en fonction dela compétence du praticien.

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