16
36 000 cOmmUNES LE MENSUEL DES MAIRES RURAUX DE FRANCE N° 346 I jUIN I 2017 ACTUALITES Quelle sera la ruralité de demain ? Les maires veulent se faire entendre Réseau Fenêtre sur Association de pharmacie rurale UN QUINQUENNAT POUR RIEN ? SANTÉ

SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

36 000 cOmmUNES

LE MENSUEL DES MAIRES RURAUX DE FRANCE

N° 346 I jUIN I 2017

ACTUALITESQuelle sera la ruralité de demain ?

Les maires veulent se faire entendreRéseau Fenêtre sur

Association de pharmacie rurale

UN QUINQUENNAT POUR RIEN ?SANTÉ

Page 2: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

ÉDITOSOMMAIRE

VANIK BERBERIAN PRÉSIDENT AMRF

« La chèvre et le chou »

BRÈVES Page 3

RÉSEAUPage 5

DOSSIER

Santé : un quinquennat pourrien ?

Page 6

ACTUALITÉS

Quelle sera la ruralité dedemain ?

Page 13

FENÊTRE SUR

L’association de pharmacierurale

Page 16

Retrouvez l’AMRF enligne

/ 2 / 36 000 communes N° 346 - juin 2017

36000 COMMUNES, LE MENSUEL DES MAIRES RURAUX DE FRANCE - N. 346 / juin 2017FONDATEURS Etienne Furtos - Jean Herbin - François Paour - Gérard Pelletier - Pierre-Yves Collombat - Andrée Rabilloud REDACTION 52, avenue Foch 69 006 LYON • Tél. 04726179 93 • [email protected] de la publication : Vanik Berberian Directeur de la rédaction : Cédric SzaboRédactrice en chef - Mise en page : Julie Bordet-Richard EDITÉ par l'Association des maires ruraux de France (AMRF) • 52, avenue Foch 69 006 LYON • Tél. 04 37 43 39 80 • Fax 04 37 23 59 87 • [email protected]É DE RÉDACTION : Marie Jeanne Béguet - Dominique Bidet - John Billard - Jean-Paul Carteret - Guy Clua - Dominique Dhumeaux - Michel Fournier - Nadine Kersaudy - - Louis Pautrel - Luc WaymelIMPRIMERIE Imprimerie IPS • Dépôt légal : 2e trimestre 2017 • CPPAP 0621 G 84400 • ISSN: 0245 - 3185

RELATION ABONNES - RESEAU Catherine Champeymont • Tél. 04 37 43 39 80 • [email protected] Adhérents 19 € • Non-adhérents 37 € • CCP LYON 1076-40 Y

La question de la santé n’est-elle pas très emblématique desdifficultés que rencontre notre pays ?

On en parle depuis plus de 30 ans, le diagnostic connu est régulièrementmis à jour par des tonnes d’études statistiques qui s’entassent dans lesarmoires des cabinets successifs des ministres de la Santé …. et rien nechange. Ou plutôt si, la situation s’aggrave. Les déserts médicaux encampagne sont maintenant rejoints par les déserts médicaux en ville. Soyons cyniques et considérons qu’il s’agit là d’une belle illustration de« l’égalité des territoires » appellation d’un ministère du quinquennat quivient de s’achever !Certes, nous avons la lucidité de penser que rien n’est simple et que lequinquennat passé ne peut être tenu pour seul responsable d’une situationqui s’est dégradée au fil du temps. Nous subissons tous les conséquencesd’un numerus clausus trop longtemps inadapté, d’une forte inertiecorporatiste, d’abus financiers de toutes sortes, d’une carence grave enmatière de prévention, etc.Espérons, dans l’intérêt du Pays, que la nouvelle ministre de la Santé seraplus efficace que la précédente, elle qui n’a jamais daigné recevoir lesmaires ruraux. Je me souviens des seuls échanges que nous avions eu à latribune du Congrès des maires de France en début du mandat, où le débatportait sur le choix entre une méthode coercitive et une méthodeincitative… palabres qui ont d’ailleurs toujours cours. A force de vouloir en permanence ménager la chèvre et le chou, arrive untemps où la chèvre meurt et le chou … pourrit.

@defibrilators

Twitter : @Maires_Ruraux

Page 3: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

36 000 communes N° 346 - juin 2017 / 3 /

BRÈVESVu sur...les réseaux sociaux

Ils/elles ont dit...

Lu dans la presseLa réforme des zones de revitalisation rurale s’appliquera au1er juillet 2017La réforme des zones de revitalisation rurale (ZRR) a été votée enloi de finances rectificative pour 2015 du 29 décembre 2015 (arti-cle 45). Désormais, toutes les communes d’une même intercom-munalité éligible seront classées en ZRR. La durée du classementsera alignée sur les mandats municipaux, soit six ans. Le classe-ment sera désormais défini selon un double critère de faiblesse dedensité de population et de faiblesse du revenu par habitant. Ob-jectif : cibler les territoires les plus ruraux et les plus en difficulté.S’agissant des exonérations fiscales pour les entreprises, les prin-cipaux bénéfices attachés à ce zonage seront maintenus. Par exem-ple, l’exonération d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétéspour les créations ou reprises d’activité sera prolongée. Pour lesorganismes d’intérêt général (associations, par exemple), l’exoné-ration de charges sociales se poursuivra pour soutenir l’emploi etl’activité d’établissements de services, notamment des établisse-ments d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD)ou des structures d’aide à la personne.

Lettre du maire rural (avril 2017)

Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-tion de l’état civil : deux décrets publiésDeux décrets signés du Garde des sceaux sontparus ce 10 mai. Le premier met en applicationl’article 48 de la loi du 18 novembre 2016 demodernisation de la justice du 21ème siècle, à sa-voir le transfert de la gestion des pactes civils desolidarité (Pacs) aux officiers de l’état civil enmairie, qui entrera en vigueur le 1er novembre2017. « Une circulaire de présentation sera égale-ment diffusée aux juridictions ce jour. Cette cir-culaire fait suite à un comité de pilotage mis enplace par la Chancellerie avec l’ensemble des ac-teurs concernés afin de pouvoir garantir dès àprésent une entrée en vigueur de la réforme dansles meilleures conditions », annonce le ministrede la Justice, Jean-Jacques Urvoas. Celui-ci avaitassuré il ya une an, lors de la discussion parle-mentaire du texte, « que personne ne serait per-dant ; ni l’Etat ni les collectivités locales ».

Le Courrier des Maires (10 mai 2017)

«Regardez ce qui se passe sur l’accès au très haut débitsur tous les territoires français. Si les collectivités etl’Etat n’investissent pas, des pans entiers de la popula-tion française n’auront jamais un accès Internet très ra-pide. Couper les dépenses des collectivités de 10 mil-liards d’euros dit beaucoup du projet de société d’Em-manuel Macron qui ne se préoccupe aucunement de ré-duire la montée des inégalités entre et à l’intérieur desterritoires.»

Stéphane Troussel (PS), président du département de Seine-Saint-Denis

« Les principes d’aménagement du territoire et d’urba-nisme, largement pensés à partir et pour des milieux ur-banisés et appliqués par extension au territoire national,ne sont toujours pas en phase avec les réalités des es-paces de basse densité et sont peu aptes à saisir et à va-loriser des initiatives locales innovantes dans des mi-lieux pour l’essentiel rural, que l’on considère abusive-ment à la traine des mutations de l’ « urbanisme »urbain »

Antoine Brès, Francis Beaucire, Béatrice Mariolle, « La France des cam-pagnes à l’heure des métropoles – territoire frugal », édition Métispresses

2017, 251 p.

Page 4: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

/ 4 / 36 000 communes N° 346 - juin 2017

BRÈVES

Le Gland d’Or

RENSEIGNEMENTS - CONTACTEZ l’AMRFSi vous souhaitez reçevoir des informations sur l’AMRF, merci de nous faxerce bulletin au 04 37 23 59 87 ou de nous le retourner à l’adresse suivante :

AMRF, 52 avenue Foch, 69006 Lyon

Nom, prénom : ...............................................................................

Elu de la commune de : ...................................................................

Adresse : .......................................................................................

E-mail : .........................................................................................

Twitter : @Maires_Ruraux / Facebook : mairesrurauxamrf

Le député de Saône-et-Loire, Philippe Baumel a tenu despropos scandaleux à propos des communes rurales au len-demain du second tour de la Présidentielle. Il a affirméque «les communes dynamiques ont mieux résisté auxvotes FN que les communes où il ne passe rien». Cette attaque triste et sans fondement ne vient pourtantpas d’un haut fonctionnaire parisien, mais bien d’un mairerural. Comme quoi, on peut oublier les problèmes de ter-rain beaucoup plus facilement qu’il n’y parait!

Tristes propos

18267 Le chiffre

Pratiquecertificats de décès

C’est le nombre de médecins retraités inscrits autableau de l’Ordre mais qui ont souhaité conti-nuer à exercer.Source : A tlas de la démographie médicale 2016

Le Décret n° 2017-602 du 21 avril 2017 com-plète les mentions devant figurer sur le certificatde décès. Il créé un « volet médical complémen-taire » au certificat, destiné à renseigner lescauses du décès lorsqu'elles sont connues plu-sieurs jours après le décès et après que les voletsadministratif et médical du certificat de décès ontété adressés aux institutions et organismes com-pétents (article R2213-1-1 du CGCT). Il étend laprocédure de dématérialisation du certificat dedécès qui porte sur l'ensemble du volet adminis-tratif (article R2213-1-2 du CGCT). Le décretsupprime également l'agrément du ministère del'Intérieur concernant le modèle de bracelet plas-tifié utilisé pour l'identification des personnes dé-cédées (article R2213-2 du CGCT). NB : ce texteest entré en vigueur le lendemain de sa publica-tion au Journal officiel, soit le 24 avril 2017.

Conscient de la nécessité républicaine et démocratique d’intégrerles citoyens dans le processus décisionnel, le Conseil départemen-tal de Haute Garonne a voté la Charte du dialogue citoyen enHaute-Garonne. Il a aussi lancé différents « chantiers ouverts aupublic » tels des plans de concertation dans la mise en place despolitiques publiques et d’autres rencontres d’échanges avec les ci-toyens qui ont permis de dégager une base d’expériences. Cette charte prend plusieurs engagements dont la création d’unfonds de soutien à la démocratie participative en Haute-Garonne.Ce fonds est destiné à soutenir les projets des communes de moinsde 5000 habitants engagés ou souhaitant s’engager dans le déve-loppement du dialogue citoyen en Haute-Garonne.Les candidatures répondant à l’appel à projets doivent s’inscriredans la démocratie participative. C’est-à-dire la possibilité donnéeaux citoyens d’interagir, par le biais d’un projet territorialementancré, dans la construction des politiques publiques en renouvelantet modernisant l’action publique locale.

Démocratie participativeUn fonds de soutien dans le 47

Page 5: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

36 000 communes N° 346 - juin 2017/ 5 /

RÉSEAU

Région Grand-EstSe faire entendre

L’association des maires ruraux deHaute-Marne s’est saisi de la syn-thèse des Etats GénérEux pour fairesavoir aux candidats aux législativesqu’elle souhaitait tous les rencontrer.La ruralité a été absente dans la cam-pagne présidentielle, il s’agit qu’ellene le demeure pas pour la nouvellecampagne électorale. Les maires ru-raux de Haute-Marne ont donc décidéde remettre à chaque candidat le do-cument de synthèse des Etats Géné-rEux. Ils souhaitent ainsi peser de fa-çon constructive et interpeler les can-didats sur leurs engagement en faveurde la ruralité.Beaucoup d’autres départements ont

décidé de faire de même. C’est le casnotamment de l’Indre, du Lot-et-Ga-ronne, de l’Essonne, etc.

LégislativesRencontrer les candidats

Les maires ruraux de la région GrandEst ont réagi à la publication du dé-cret précisant la composition du co-mité régional pour la biodiversité etont souhaité se concerter pour définirune stratégie commune. Ils se sontréunis à Champenoux (54) le 26 avrildernier. Le nouveau comité régional pour labiodiversité, qui peut compter jusqu’à160 membres, vient remplacer les an-ciens comités régionaux « trameverte et bleue ». Il sera sollicité sur leschéma régional pour la biodiversité,le schéma de cohérence écologique etsur le schéma régional d’Aménage-ment, de Développement Durable etd’Égalité des Territoires (SRAD-DET). Ensemble, les représentantsdes dix AMR du Grand Est ont jugéimportant de faire savoir qu’ils vou-laient y être présents et actifs. « Cesont des enjeux majeurs pour nos ter-ritoires, ont-ils souligné. C’est uneopportunité de faire reconnaître lesMaires ruraux du Grand Est, d’avoirdes contacts directs avec les servicesde la DREAL et du Conseil régionalsur ces questions, de faire circulerl’information dans les deux sens et de

faire entendre la voix des territoiresruraux vivants… ». A l’issue de leurrencontre, Michel Fournier, présidentde l’association des maires rurauxdes Vosges et coordonnateur desmaires ruraux du Grand Est, a envoyéun courrier au préfet de région et auprésident du conseil régional pourfaire officiellement acte de candida-ture. Chaque association départemen-tale a désigné un binômehomme/femme susceptible de repré-senter les maires ruraux au sein de ce

comité.Les échanges ont ensuite porté surl’évolution de la compétence tou-risme, la mobilité, la carte nationaled’identité, le numérique et la télépho-nie, la communication des associa-tions de maires ruraux. Et avant de seretrouver autour d’un repas, lesmaires ruraux du Grand Est ont dé-cidé d’organiser un congrès régionalà l’occasion du salon Urbest, qui setiendra à Metz en janvier 2018.

Dans un courrier daté du 12 avril2017, le ministre de l’Intérieur a in-formé l’Association des Maires Ru-raux de France des ajustements misen place s’agissant des modalitésd’instruction des demandes de cartesnationales d’identité.250 dispositifs complémentaires derecueil d’empreinte vont ainsi êtreinstallés. Le courrier indique que « ladétermination de leur exacte localisa-tion pourra se faire au plus près duterrain, dans la concertation entre lespréfets et les présidents d’associa-tions départementales des maires ».

cNIconcertation départementale

L’AMRF a participé au Congrès desPouvoirs locaux et régionaux d’Eu-rope à Strasbourg. Dans ce cadre,elle a apporté sa contribution activeau rapport « Un avenir meilleur pourles régions rurales européennes ». Cerapport a été discuté le 4 mai 2017 àEupen (capitale germanophone de laBelgique) en présence du PrésidentVanik Berberian. Plus d’informa-tions sur le Congrès sur le site :http://www.coe.int/t/Congress/de-fault_fr.asp

EuropeL’AmRF au congrès

Page 6: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

DOSSIER

/ 6 / 36 000 communes N° 346 - juin 2017

D’après un article du Monde du 31 mars 2017, 148 cantons en France se trouvent sans médecin généraliste libé-ral (contre 91 en 2010) et 581 cantons n’ont pas de dentiste. Au total, 3.9 millions de Français vivent dans desterritoires à la situation alarmante.D’après l’Atlas de la démographie médical publié chaque année par le Conseil national de l’Ordre des méde-cins, en 2016, on comptait 284,4 médecins (toutes spécialités confondues) en moyenne pour 100 000 habitants.« Selon toutes les spécialités confondues et tous les modes d’exercice, 86 départements enregistrent une baissede la densité médicale sur la période 2007/2016. Le département du Gers comptabilise la plus forte baisse natio-nale (-20.2%). »Cependant, il n’y a jamais eu autant de médecins en France. En 1979, le pays comptait 112 066 médecins. En2011, il en comptait 216 145 et en 2016, ils sont 285 840.Le problème ne tient donc pas seulement au nombre de médecins, mais à la concentration de ceux-ci dans leszones urbaines

Santé : un quinquennat pour rien ?

Le droit du patient rural

Dans un récent rapport sénato-rial, sur l’évaluation du nonrecours aux minima sociaux

des personnes en situation de préca-rité sociale (2016), le constat est cin-glant « La population non-recouranteest ainsi probablement plus impor-tante en milieu rural qu’en milieu ur-bain ». Une autre étude estime à15 % la part des assurés sociaux quirenoncent à consulter un généraliste.Parmi les raisons, l’absence de méde-cins à proximité. Effet immédiatperçu par un récent rapport de laDrees (Direction de la recherche, desétudes, de l’évaluation et des statis-tiques) : « les inégalités sociales demortalité par exemple se creusent lé-gèrement sur la période 2009-2013,pour l’écart d’espérance de vie à 35ans entre cadres et ouvriers par rap-port à la période 2000-2008. Leconstat est complété par une démo-graphie médicale en chute déjà affir-mée et bientôt libre dans les pro-chaines années en opposition aux dy-namiques démographiques de nom-bre de communes rurales. Consé-quences, les parcours sont plus longs,les temps d’attente également. »L’organisation mondiale de la Santé(OMS) le rappelle : « Le droit à lasanté comprend l’accès, en tempsutile, à des soins de santé accepta-bles, d’une qualité satisfaisante etd’un coût abordable ». Les actionssont nombreuses et anciennes. Par-fois judicieuses mais jamais à la hau-teur de l’intensité du besoin des po-pulations. C’est par exemple la ré-cente convention tripartite entre l’as-surance maladie, les médecins etl’Etat qui met à peine 10 M€ pour à

la fois aider à l’installation des jeunesmédecins et au soutien aux médecinstuteurs. C’est le cas du cursus de for-mation qui peine à se réformer pourfaire entrer la médecine de ville dansles études, à fortiori l’exercice desstages en milieu rural. Ce sont lesmaisons de santé, inventées il y a 10ans et dont beaucoup sont déjà endeçà du nombre de professionnelsprésents au départ,…un premier bilanobjectif et froid doit être fait sur cesoutils. Dans le Loir-et-Cher, 15 ontété créées, 5 sont fonctionnelles au-jourd’hui… ! Un exemple de plus dela matérialité, non pas d’un sentimentd’abandon, mais d’un abandon bienréel.A l’orée d’une nouvelle législature,avec l’arrivée d’Agnès Buzyn, femmemédecin, comme ministre des Solida-rités et de la Santé et enrichis de tousles éléments qui concourent à faireconsensus sur l’obligation morale etmatériel de changer de braquet, lesMaires ruraux rappellent l’urgenced’agir sur d’autres bases que cellesqui ont prévalu jusqu’à maintenant.Ils interpelleront à la fois le mondede la santé, celui des patients, desopérateurs de technologies pour quechacun prennent ses responsabilités. Le chemin est étroit entre libertéd’installation aux droits des patients.Les élus sont souvent contraints decomposer avec un environnement quiles éloigne fortement du champ de ladécision avec une présence crou-pionne dans les nouveaux conseilsterritoriaux de santé. Pis, les rurauxen sont souvent exclus du fait dunombre de places réduites et « trus-tées » par les présidents de CHU.Avec pour conséquence immédiate deconstruire une représentation de l’en-

jeu sanitaire qui minimise la prise encompte du monde rural.Dans ce monde-là pourtant les éner-gies ne manquent pas. Des médecinsinvestis et mobilisés, des élus cataly-seurs et des projets inédits mais sou-vent nés de l’opiniatreté des acteurslocaux que de l’aide bienveillante destutelles diverses. Des innovationsémergent, comme les cabinets secon-daires, la télémédecine, et souvent ladynamique locale associant élus etprofessionnels. « La médecine deproximité se doit de s’intégrer au seind’un territoire avec une visibilitéclaire et transparente pour les élus lo-caux et leurs administrés » nous rap-pelle Isaac Gbadamassi , médecinayant concouru à l’émergence duprojet emblématique de santé en mi-lieu rural, Païs. Pour cela la mobilisa-tion doit venir du pays, de sa fragilitédésormais connue pour, comme dansbeaucoup de situations, en faire uneopportunité. Elle doit être l’occasionpour chacun de se remettre en ques-tion. Nombre de médecins ruraux de-puis des décennies s’étonnent desaides à l’installation de leur succes-seur et imaginent eux-mêmes les so-lutions dont les élus ont tracé l’ur-gente nécessité, à savoir de condi-tionner la liberté d’installation à unquantum d’années d’exercice dans lemonde rural. Les élus doivent aussimieux s’organiser, être aidés pourcela, et agir aussi sur l’attractivité deleur territoire. Le ministère de laSanté doit, lui, changer de vision surle monde rural et cesser d’arguer dela statistique et des ratios pour entrercomme certaines Agences régionalesde santé dans une approche oùl’humain prend le dessus.

CEDRIC SZABO

Page 7: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

DOSSIER

36 000 communes N° 346 - juin 2017 / 7 /

Santé : un quinquennat pour rien ?

Que propose le nouveau Président de la République ?

Dans le programme présidentield’Emmanuel Macron, leconstat est fait d’une excel-

lence technologique, une bonne cou-verture des gros risques et une forteespérance de vie d’une part mais dela persistance voire d’une augmenta-tion des inégalités d’accès aux soinsd’autre part. A travers ce constat,Emmanuel Macron cible trois défisprincipaux : la prévention, l’accèsaux soins et la soutenabilité finan-cière. D’un point de vue général, Emma-nuel Macron souhaite davantage mi-ser sur la prévention en créant un ser-vice sanitaire de trois mois pour lesétudiants de santé. Effectué dans lesécoles ou les entreprises, ce serviceaurait pour objectif la mise en placed’actions de préventions. L’accentest également mis sur l’accélérationdu déploiement des groupementshospitaliers de territoire. Le président exprime sa volonté decréer les « conditions d’un meilleurdialogue avec le secteur privé » pourpermettre une offre plus adaptée etdes circuits simplifiés et fluidifiés.

Concernant les moyens financiers, lamise en place d’un plan d’investisse-ment de 5 milliards d’euros en soinsprimaires dans l’innovation en santé,le déploiement de la télémédecine etdans l’hôpital de demain est prévue. D’un point de vue plus spécifique eten particulier pour diminuer les iné-galités d’accès aux soins, plusieurspropositions figurent dans le pro-gramme du Président de la Répu-blique. Le Président de la République sou-haite mettre fin au numerus claususqu’il considère comme injuste etinefficace en formant davantage depraticiens et en adaptant la capacitédes formations aux besoins des terri-toires. Lutter contre les inégalités d’accèsaux soins passe également par lacréation de davantage de maisons desanté pluridisciplinaires, avec pourobjectif de doubler leurs effectifsd’ici la fin du quinquennat. Bien quela création de structures telles que lesmaisons de santé permettent un accèsaux soins dans les territoires ruraux,leur utilité dépend de la présence depraticiens de la santé pour y assurerles permanences. Comment les inci-

ter à s’installer dans les territoires ru-raux ? Cette question n’est pas abor-dée explicitement dans le programmedu nouveau président. Toutefois, desprécisions sont données concernantles médecins… des villes : ces der-niers verraient leur rémunération évo-luer afin de favoriser les activités deprévention. Pour lutter contre les déserts médi-caux, la priorité est davantage donnéeau numérique pour développer latélé-médecine et la prise en charge àdistance. Constituant une partie de lasolution, il est toutefois primordialque le recours à la prise en charge àdistance ne soit pas perçu comme unsubstitut à un accès direct aux soins.De plus, la prise en charge à distancese base sur le développement du nu-mérique, enjeu de taille pour les terri-toires ruraux : il constitue une forcede développement mais est égalementsource d’inégalités. De nombreusescommunes sont encore en zoneblanche !Mais le tout nouveau gouvernementne compte qu’un secrétaire d’Etat,chargé du numérique. Le numérique,priorité du programme de Macron ?

CLÉA ROUIRE

Que demandent les maires ruraux ?

Lors des Etats GénérEux de laRuralité, les élus ont évidem-ment souvent évoqué le pro-

blème de la santé.A l’issue de tous les échanges, plu-sieurs préconisations sont apparues.Il faudrait, selon eux, réformer lesétudes de médecine et mieux infor-mer les futurs médecins de la de-mande et des besoins du monde rural.Les maires réclament également queles jeunes généralistes soient obligésde venir s’installer dans les zones ru-rales pendant leurs premières annéesd’activité. Ils souhaitent également miser sur lesstages et recommandent 4 stagesobligatoires en médecine généraledès la 3e année, dont la moitié enzone rurale. Pendant ces stages, ceslogements devraient être financés enpartie par l’Etat ou les collectivités,ou alors être mis à disposition par lacommune.Il faut aussi inciter les médecins à de-venir maîtres de stage.

Parralèlement, les maires ruraux sontouverts à la télémédecine et souhai-tent même un outil numérique per-mettant à tout professionnel de santéde connaître les offres d’installationpartout en France.Enfin, l’AMRF espère la créationd’un statut de médecin territorial.Cette demande a été partiellement en-tendue puisqu’un décret du 2 mai2017 a créé le contrat praticien terri-torial médical de remplacement. Cecontrat est prévu pour inciter les mé-decins remplaçants à s’installer en

zone sous-dotée.Parmi leurs autres revendications, lesmaires ruraux demandent un numerusclausus géographique pour assurer unégal accès au soin dans l’ensemble duterritoire ou une aide à la mobilitédes praticiens intinérants.Ils voudraient aussi étendre les préro-gatives des professionnels de santénon-médecins (infirmières, pharma-ciens, sages-femmes, etc.) en re-voyant le cadre de leurs interven-tions.

JULIE BORDET-RICHARD

Page 8: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

DOSSIER

/ 8 / 36 000 communes N° 346 - juin 2017

Année après année le désert médi-cal rural avance et s’accentue. Laplupart des départements rurauxfont figure aujourd’hui de terr i-toire délaissés voire abandonnés.Les médecins généralistes, en têtede liste manquent à l’appel. Quelest votre analyse de la situation ac-tuelle ?S.Bouxom : Elle est préoccupante.Elle inquiète beaucoup les internes,d’autant plus que nos études étantlongues il nous est impossible detrouver une solution immédiate.Même si le nombre de médecins gé-néralistes s’installant chaque annéeaugmente, il y a aujourd’hui plus demédecins à partir à la retraite que dejeunes médecins à rentrer dans la vieactive. La tendance devrait se stabili-ser en 2020 pour s’inverser en 2040.Vous dites que le nombre de méde-cins généralistes formés augmente.Pourquoi ces jeunes médecins neveulent pas v enir s’inst aller auvert ?S. B. : Le mythe du jeune médecinurbain est faux. 85 % des internes enmédecine générale s’installent en mi-lieu péri-urbain et rural dont 15% enzones rurales à proprement parlé. Mais jusqu’ici la formation des in-ternes n’intégrait pas ou peu de stageen milieu rural. C’est pourtant cesstages et la manière dont ils sont vé-cus qui décident souvent d’une instal-

lation à la campagne.Depuis 4 ans, nous travaillons à faireévoluer cela et nous commençonstout juste à récolter les fruits. Lesstages en ambulatoire en zones ru-rales se développent. La récente ré-forme de la formation des médecinsgénéralistes fait passer le nombre destages à 2 obligatoires de 6 mois avecla possibilité d’en faire 2 de plus. Mais nous manquons de lieux destage. Notre campagne de sensibilisa-tion au statut de MSU (agrément quedoivent obtenir les médecins généra-listes pour accueillir des internes enstage) a commencé il y a seulement 4ans. Le nombre des MSU commenceà augmenter. Il est intéressant deconstater d’ailleurs que les jeunesmédecins demandent beaucoup plusrapidement l’agrément MSU queleurs prédécesseurs. Ils reçoiventainsi des stagiaires, participent à laformation, créent un réseau et remet-tent à jour leurs connaissances.La difficulté de logement et l’éloi-gnement des infrastructures numé-riques et de transports restent un pro-blème pour les stagiaires en milieurural. Mais des solutions sont trou-vées. Par exemple, l’Association dela Médecine Générale en Rouannais,en lien avec les collectivités localesmet à disposition pour les internes enstage et moyennant loyer, une maisonafin de les accueillir. Il faut savoir aussi que le départe-ment universitaire de médecine géné-rale est très récent. Il n’a pas eu en-core le loisir de s’investir dans ce tra-vail. La filière est en train de se struc-turer, et cela ne pourra que favorisernos actions.Nous y travaillons en tout cas.S’il n’y a pas de solut ion immé-diate, et pour faire face à la pénu-r ie, p ourquoi ne p as env isageralors une obligation d’exercice enzone rurale pour les jeunes méde-cins ?S. B. : Cela serait contreproductif, laliberté d’installation fait partie del’attrait de ce métier. La spécialité

médecine générale en sera encoreplus fragilisée.On ne peut faire peser sur les seulsinternes la pénurie actuelle de méde-cins généralistes. Si des mesures doi-vent être prises elles doivent fairepreuve de plus de courage politiqueet être trans-générationnelles. Pour-quoi ne pas envisager que les méde-cins déjà en place puissent y partici-per et assurer par exemple une ½journée par semaine de consultationsdans les zones difficiles ? Qui sera le médecin généraliste dedemain en milieu rural ? S. B. : La médecine en milieu ruralest riche et diverse et elle intéresseles internes. Les médecins de demainne seront pas ceux d’hier. Ils ne sou-haitent plus travailler 70 heures parsemaine. Ils privilégient le travail enéquipe et en réseau. Le lien entre pra-ticiens est important ainsi que la pos-sibilité d’investir dans des plateauxtechniques plus importants (un écho-graphe, une salle de plâtre ou de su-ture…) qui ne seraient rentabilisésque si plusieurs médecins les utili-sent.Il faudra de toute façon repenser l’ac-cès aux soins primaires notamment ladistance minimale en temps de dépla-cements. Les maisons de santé pour-raient être multi-sites avec des cabi-nets de consultations délocalisés, entout cas pour les soins « programma-bles ».La consultation elle-même doit êtreréfléchie. Pour les consultations depetites urgences, peuvent-elles êtremenées par du personnel médical enlien avec le médecin traitant ? Il fauty réfléchir.Les internes en médecine générale,ont bien conscience de leur responsa-bilité dans l’élaboration d’une solu-tion pour enrayer la désertificationmédicale. Cette question si elle n’estpas encore centrale dans nos études,l’est dans notre avenir.

CÉCILE PÔTEL

« Nous manquons de lieux de stage »Stéphane Bouxom

https://www.isnar-img.com/

Interne en médecine générale, porte-parole national de l’ISNAR IMG (Intersyndicale Nationale Autonome Re-présentative des Internes de Médecine Générale).

Page 9: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

DOSSIER

36 000 communes N° 346 - juin 2017 / 9 /

« Il faut que la formationsoit adaptée aux enjeuxdémographiques », dé-

clare Patrice Diot, doyen de la Fa-culté de médecine de Tours qui avoueêtre très sensible au sujet de la déser-tification médicale.Selon lui, il faut intégrer à la forma-tion des enseignements plus territo-riaux, notamment sur la politique ré-gionale de santé. Ces cours permet-traient aux étudiants et aux ensei-gnants de se responsabiliser sur la si-tuation dans les campagnes. Une for-mation davantage axée sur le terri-toire pourrait donner envie aux étu-diants de rester. « Essayer de faire ve-nir un jeune dans un village pourremplacer le médecin à la retraite quitravaillait de 7h à 22h est contrepro-ductif. Il faut parler de qualité de vieà cette nouvelle génération, et il fautredorer l’image du territoire ».Patrice Diot considère également quela formation actuelle des futurs mé-decins est beaucoup trop hospitalo-centrée. Les jeunes étudiants neconnaissent pratiquement que le mi-lieu hospitalier durant leurs études. Ilest donc normal qu’ils décident d’yrester une fois diplômés. C’est pour cela que la faculté deTours et l’Agence régionale de Santéont décidé « d’utiliser le levier de laformation pour contribuer à résoudrela problématique de la démographiedes professionnels de santé, particu-lièrement lourde dans notre région :l’idée forte est – tout en veillant prio-

ritairement à la qualité de la forma-tion offerte aux futurs médecins – deprojeter la faculté de médecine danstous ses territoires, en diversifiant lesstages hospitaliers dans les 6 départe-ments ».D’autres lieux de stages agrées sontprogressivement proposés « en luttantcontre la concentration des internes lelong de l’axe ligérien, et donc en di-minuant aussi le nombre d’internesaffectés à Blois et à Orléans, pourpermettre aux internes de découvrirles autres territoires et notamment lesdépartements du Cher, de l’Eure-et-Loir et de l’Indre, et en étant aussi at-tentive aux stages en libéral, poursortir d’une formation excessivementhospitalo-centrée et faire en sorte quela formation prépare efficacement lesfuturs praticiens au « virage » ambu-latoire ».

La région Centre compte 393 maitresde stage, ce qui en fait la région deFrance la plus dotée. Patrice Diotconseille d’ailleurs à tous les mairesqui ont un médecin dans leur villagede les pousser à devenir maitres destage.A propos des maires, le doyen de lafaculté de Tours a plusieurs conseils.« Il faut accepter l’idée qu’il n’y aurapeut-être pas un médecin pour cha-cune des 36000 communes. Il fautfaire des projets intercommunaux ».Il ajoute « Il faut savoir que lesjeunes médecins chassent en meute.Et ils ont la phobie de l’exerciceisolé. Il faut privilégier les projets delieux de soins avec plusieurs profes-sions médicales. »

JULIE BORDET-RICHARD

Patrice Diot

« Il faut redorer l’image du territoire »

Depuis la démarche initiée par la région Centre Val deLoire, le Conseil national de l’Ordre des médecins(CNOM) et la conférence des doyens de facultés demédecine ont initié Initiative Territoire, pilotée par leProfesseur Diot, et le Dr Bouet, président du CNOM.A cette démarche, ont été associés tous les acteurs desterritoires : associations d’élus (dont l’AMRF), Obser-vatoires national et régionaux des professions de Santé,Union régionale des professions de santé, Agences ré-gionales de santé, représentants des hôpitaux, représen-

tants des présidents d’universités, représentants des étu-diants, etc.Cette initiative vise à « amener les universités à s’enga-ger contractuellement dans une stratégie au service del’attractivité des territoires, en développant la profes-sionnalisation précoce de la formation, en projetant lesfacultés hors leurs murs, au cours des territoires, encontribuant à la construction de parcours compétencetout au long de la vie. »Un premier groupe de travail s’est tenu le 25 avril.

Initiative Territoire

Doyen de la Faculté de médecine de Tours

Page 10: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

/ 10 / 36 000 communes N° 346 - juin 2017

DOSSIER

Si la pénurie de médecins généra-liste en zone rurale s’accentue c’estaussi le cas pour les ophtalmolo-gistes dont l’absence en milieu ru-ral est criante. Comment compren-dre cette situation ?T. Bour : Nous subissons aujourd’huile blocage, à un niveau très bas, dunumérus clausus. La pénurie est crééeartificiellement, car ce numérus est àtort fixé sur le nombre de postes hos-pitaliers alors que 60% des ophtal-mos exercent en libéral. Ainsi seuls150 jeunes ophtalmos sortent par ande l’internat. Ce n’est pas suffisantpour couvrir les départs en retraitemais aussi pour faire face à l’aug-mentation de demande de soins en-gendrée par l’accroissement de la po-pulation, le vieillissement de cettedernière et le développement techno-logique.C’est aussi regrettable car à ce jourdeux étudiants en médecine sur troissouhaiteraient faire de l’ophtalmolo-gie. Le nouveau Président de la Ré-publique nous a dit vouloir débloquerle numérus clausus.La pénurie touche tout le territoire.En France, seulement 64 ophtalmolo-gistes exercent dans des communesrurales, 143 dans des communes demoins de 5000 habitants. Mais lesvilles de 200 000 habitants sont aussitouchées, ainsi que les Centres Hos-pitaliers Universitaires.La nouvelle réforme de la formationdes médecins va inclure désormaisdes stages en libéral, que cela soit encentre de santé, en hôpital ou en ca-

binet. Ce n’était pas le cas jusqu’alorscar les stages étaient tous affectés enCentre Hospitalier Universitaire. Il yaura à partir de la rentrée 2017, troisstages en libéral au cours de la for-mation des spécialistes en ophtalmo-logie. Il faudra être vigilant à leur ré-partition sur le territoire. Le SNOF ademandé à ses 1200 adhérents s’ilssouhaiteraient accueillir un internestagiaire, nous avons eu 900 réponsespositives. Il faudra, comme pour lesautres spécialités obtenir un agrémentde Maitre de Stage. La mise en placedu Contrat d’Engagement de ServicePublic (CESP), qui permet aux étu-diants de toucher une allocation de 2ans minimum s’ils choisissent unespécialité moins représentée ou s’ins-tallent dans une zone où la continuitédes soins est menacée, permettraaussi d’ancrer les jeunes dans un ter-ritoire.

Il n’y aura donc pas d’améliorationd’ici 5 ou 6 ans le temps que les in-ternes se forment. Alors dans l’im-médiat que faire ? Faut-il mettreen p lace des mesures coercit ivespour que les ophtalmo s’installentou consultent aussi en zones ru-rales ?T. B. : Si coercition il y a, elle serainefficace jusqu’en 2030 au moins,car la totalité du territoire français esten pénurie . Alors commentdéterminer les zones prioritaires ?L’ophtalmologie est une spécialité oùl’on veut plus que dans les autress’installer en libéral. Donc forcer uneinstallation dans un lieu déterminéaura un effet dissuasif ou favoriserale système hospitalier où les méde-cins peuvent être salariés.Dans l’urgence, l’ARS devrait mettreen place un zonage pour les ophtal-mos ce qui n’est pas le cas actuelle-

ment. Elle devrait aussi faciliter leremplacement des ophtalmos au seinde leur cabinet pour leur permettred’aller exercer, une journée par se-maine, dans des cabinets secondairesou des maisons de santé. Cette aideau remplacement existe de l’hôpitalvers le cabinet et inversement maispas d’un cabinet de consultation prin-cipal a un cabinet secondaire.Nous avions même envisagé de met-tre en place des consultations avec un« Bus ophtalmo » mais les PouvoirsPublics n’ont pas suivi.Vous préconisez une pratique délo-calisée des ophtalmologistes. Maispourrait-elle être assurée alors quela demande de soins est en for tecroissance et que l’augmentationdu nombre de jeunes ophtalmos nesuit pas ?T. B. : Il faut envisager une autremanière de pratiquer. A l’avenir lesophtalmos ne pourront assurer à euxseuls la totalité des actes. Des contratsde coopération ont été mis en place.Il s’agit de stimuler au sein des cabi-nets d’ophtalmologie l’embauched’orthoptistes qui peuvent pratiquerbeaucoup de gestes d’ophtalmos. Unprotocole organisationnel a été décidéen s’appuyant sur la télémédecine.Une consultat ion à distance, encontact avec un ophtalmo, pourra êtremenée par un orthoptiste dans un ca-binet secondaire par exemple. Un contrat a été récemment mis enplace avec les maisons de santé.L’ARS et la CPAM en sont parte-naires. Ce contrat permettra aux mai-sons de santé d’acquérir un plateautechnique, y compris avec une liaisontélémédecine. Internes en ophtalmo-logie, orthoptistes, infirmières pour-ront mener les consultations.Il faut noter aussi que 65% des cabi-nets d’ophtalmologie aujourd’huisont des cabinets de groupes. Il estdonc possible d’ouvrir un cabinet se-condaire, rattaché au cabinet initial,où les praticiens peuvent tourner enalternance.

CÉCILE PÔTEL

Thierry Bour

« Si coercition il y a, elle sera inefficace jusqu’en 2030 aumoins »

Seulement 64 ophtalmologistesexercent dans des communesrurales

http://www.snof.org/

Médecin libéral ophtalmologiste, Président du SNOF (Syndicat National des Ophtalmologistes de France).

Page 11: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

36 000 communes N° 346 - juin 2017 / 11 /

DOSSIER

La pénurie de médecins touche au-jourd’hui de grandes parties de no-tre territoire. La situation devientde p lus en p lus aigüe. Commentl’analysez-vous ?Y. SCHMITT : Nous payons au-jourd’hui la politique du numérusclausus fermé depuis 20 ans. Les pro-motions aujourd’hui sont très ré-duites. Pourtant nous n’avons jamaisformé autant de médecins et il y a desinstallations.Oui, il y a des installat ions maiselles ne se font pas dans les zonesdéfavorisées. Comment l’expliquer?Y. S. : J’ai vécu dans une ville de2000 habitants jusqu’à mes 18 ans.Mon projet initial était de m’installeren zone rurale. Les études de méde-cine sont longues. Comme pourbeaucoup d’autres jeunes médecins,ma vie familiale s’est construite pen-dant ce temps d’études. Aujourd’huima femme travaille à Strasbourg.Nous voulons ménager la vie profes-sionnelle de chacun.Pour les anciennes générations, lafemme du médecin devenait sa secré-taire ou parfois, médecin elle-même,elle s’installait avec son époux. Cen’est plus le cas aujourd’hui. Lesnouvelles générations ont évolué tantpsychologiquement que sociologi-quement. Il est certain que la qualité de vie estmeilleure à la campagne mais pastoujours la qualité de travail. Les gé-nérations de médecins qui nous ontprécédés ont privilégié l’exercice ensolitaire, ce n’est plus le souhait desjeunes médecins. Ils ne reprennentpas des cabinets individuels. Nos pré-décesseurs ont trop souvent préféré laconcurrence à la collaboration avecleurs collègues locaux. L’ambianceest encore parfois délétère. Les jeunes médecins ne veulent pasnon plus remplacer des praticiens quifont 70 actes par jour, isolés dans leurcabinet. Les jeunes s’installent sur des terri-

toires où se construisent des coopéra-tions, comme les maisons médicalespar exemple. L’Aveyron où les méde-cins se sont organisés en réseau desoins en est la preuve.Le schéma « un médecin - un clo-cher » n’existe plus.Un jeune médecin s’installe dans unendroit qu’il connait, pas au hasard.Les stages au cours des études pour-raient permettre cette prise de contact.Les étudiants en médecine, avant leurinternat, ont 36 mois de stages àfaire. Mais jusqu’ici, seul un stage de1 mois de médecine générale se fai-sait en libéral hors de l’hôpital (ce

qui ne veut pas dire rural). Après l’in-ternat pour ceux qui choisissent laspécialité « médecine générale »,deux stages hors hôpital sont prévus,bientôt trois. Il faudrait en doubler lenombre !Nous manquons aussi cruellement delieux de stage. Il n’y a pas assez demaitres de stages (MSU) pour ac-cueillir les internes en médecine gé-nérale. Beaucoup des praticiens quivont prendre leur retraite dans les an-nées à venir sont éloignés géographi-quement des internes mais aussi psy-chologiquement de la formation.Les jeunes générations, elles, devien-nent MSU très rapidement. Je le suisaprès seulement 3 ans d’installation. Le temps d’exercice en tant que rem-plaçant est aussi important pour choi-sir un lieu d’installation. Il permet definir sa thèse, de maturer le projetd’installation et de répondre à d’au-tres questions : comment ? Avec qui ? La mise en place du statut de PTMR(Praticien Territorial Médical deRemplacement) est aussi une avan-

cée. Ce dernier permet aux médecinsremplaçants de bénéficier d’une pro-tection prévoyance, maternité et pa-ternité s’ils exercent « dans des terri-toires définis par l'agence régionalede santé, et caractérisés par une offremédicale insuffisante ou des difficul-tés dans l'accès aux soins » . C’estune aide à l’installation en zones sousdotées.Etre médecin n’est pas dissociabledes patients dont il a la charge, quile font vivre et progresser dans sonmétier. Comment vous et vos col-lègues, jeunes médecins, vivez-vousle fait que de plus en plus de pa-tients soient en rupture de soins ?Y. S. : Nous en avons conscience etnous nous en saisissons. C’est pourcela que nous avons organisé le 15mars dernier une convention natio-nale sur « l’accès aux soins dans lesterritoires ». Il faut que cela change.Mais si l’on veut gagner du tempsmédical, il est préférable que ce soitle patient qui se déplace. On peutcréer des cabinets délocalisés maiscela ne sera pas sur cinq sites ! Surun ou deux sans doute.Il faut que le cadre soit fixé nationa-lement et que les territoires se met-tent au travail. L’augmentation dunombre de maisons de santé n’est pasforcément une solution, surtout sielles sont des locaux vides. Mettre enplace une maison de santé, cela ne sedécide pas comme ça. Il faut réfléchiravec les acteurs concernés et réaliserun projet de territoire.Nous sommes à la disposition detoutes les communes, collectivitésqui voudraient travailler sur un telprojet. N’hésitez pas à contacter lesantennes régionales de ReAGJIR.

CÉCILE PÔTEL

https://www.reagjir.fr/

Yannick Schmitt

« Nous payons aujourd’hui la politique du numerus claususfermé depuis 20 ans »

Les générations de médecinsqui nous ont précédés ont pri-vilégié l’exercice en solitaire, cen’est plus le souhait des jeunesmédecins

Médecin généraliste libéral, installé depuis 3 ans à Lingolsheim en périphérie de Strasbourg, vice-président deReAGJIR (Regroupement Autonome des Généralistes Jeunes Installés et Remplaçants).

Page 12: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

/ 12 / 36 000 communes N° 346 - juin 2017

DOSSIERPratique Accueillir des stagiairesLe médecin généraliste de votre commune peut accueillir des étudiants en médecine. Pour cela il doit devenirMaitre de stage des Université (MSU).

Maires, élus, pourquoi ne pas faciliter l'accueil de ces étudiants ?

• Proposez des solutions agréables d'hébergement pour ces étudiants qui viennent passer plusieurs mois dans vo-tre commune.• Faîtes visiter, connaitre votre commune, votre qualité de vie… intégrez ces étudiants…• Transmettez ces informations aux médecins généralistes de votre territoire (un site internet a été créé pour expli-quer la démarche des MSU : http://www.medecinmsu.fr).

Texte présenté par l’AMR du Lot-et-Garonne lors de ses Etats GénérEux de la Ruralité en novembre 2016

Pourquoi devenir Maitre de Stage des Universités ?

• pour aider les étudiants à devenir médecin généra-liste ! • pour trouver facilement un remplaçant, un futur as-socié, voire un successeur!• pour promouvoir la médecine générale et transmettredes compétences qui lui sont spécifiques telles quel’approche centrée patient, la gestion des pathologiesles plus fréquentes, la diversité et la complexité de ladiscipline, la notion de réseau de soins en campagneou en ville.• pour faire découvrir aux étudiants la richesse et laréalité de leur futur exercice en les faisant bénéficierd’un apprentissage optimal sur le terrain.• pour partager l'expérience professionnelle, transmet-tre le savoir en passant le relai à la nouvelle généra-tion.

Devenir MSU est également un moyen :

• de lutter contre l’épuisement professionnel, le burn-out, en sortant de la routine, en prenant du recul sur sapratique. Cela permet de réconcilier les médecins gé-néralistes avec le plaisir au travail. C’est une réelleplus-value au quotidien.• de se remettre en question, de mettre à jour sesconnaissances et de les partager.• d’améliorer ses pratiques, ses compétences en méde-cine générale.Mais aussi être MSU permet :• de trouver facilement un remplaçant, un futur asso-cié, voire un successeur. Vous connaissez votre in-terne. Vous pouvez également contacter les autres in-ternes car vous faites partie d’un réseau que sont lesMSU.• de diversifier sa pratique en tirant bénéfice de la for-mation continue, de l'enseignement, de la recherche.

C'est quoi un MSU ?

• Un Praticien Agréé Maître de Stage des Universités,plus communément appelé MSU - est un médecin decampagne ou de ville qui accueille dans le cadre destages des étudiants en médecine qui sont entre la5ème année (externat) et la fin de la 9ème année (in-ternat) afin de leur permettre de découvrir la médecinegénérale de premier recours.• Le MSU a un rôle important, décisif et complémen-taire dans la formation de l’étudiant en médecine. Illui permet d’accéder à ce terrain d’apprentissagequ’est l’ambulatoire.• Être MSU, c’est transmettre et partager son expé-rience, sa vision du métier de médecin généraliste.On peut devenir MSU pour accueillir des étudiants enmédecine sur 4 types de stages :• Le stage de deuxième cycle destiné aux externes.• Le stage dit « de niveau 1 » pour l'interne de méde-cine.• Le stage dit « de niveau 2 » ou SASPAS (Stage Au-tonome en Soins Primaires Ambulatoires Supervisés)pour l’interne qui a déjà effectué le stage de niveau 1.• Les stages ambulatoires validant la gynécologie et lapédiatrie, pour l'interne ayant déjà effectué le stage deniveau 1.

Comment devenir MSU ?

• Faire une demande d’agrément : pour le stage de 2ème cycle(Externat) ; pour les stages de 3ème cycle (stage de niveau 1,SASPAS, stage ambulatoire validant la gynéco/pédiatrie) (lien)• remplir un dossier de candidature pour la stage de 2ème cycle.• remplir un dossier de candidature mentionnant votre moded’exercice et votre RIAP pour les stages de 3ème cycle.• accepter et signer la charte du Maître de Stage pour les 3èmecycle.

Page 13: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

36 000 communes N° 346 - juin 2017 / 13 /

Nouveau quinquennatQuelle sera la ruralité de demain ?La suppression de la taxe d’habita-tion pour 80% des contribuableslocaux Considérée comme étant un im-

pôt injuste, la taxe d’habitationdevrait être supprimée pour

80% des contribuables locaux fran-çais par Emmanuel Macron. Cettemesure est basée sur un constat(trop ?) simple : les communes lesplus pauvres ont une taxe d’habita-tion souvent plus élevée que dans lesgrandes villes. Cette suppression de la taxe d’habita-tion constituerait un dégrèvement in-tégralement compensé. Bien quecette mesure ne présente aucune dif-ficulté technique, elle soulève plu-sieurs questions essentielles.Le montant de la taxe d’habitationest-il systématiquement plus élevédans les communes les plus petites ?La taxe d’habitation constitue unedes ressources principales de la com-mune : une taxe d’habitation élevéene traduirait-elle pas un manque deressources disponibles ? Dans ce cas,supprimer la taxe d’habitation aunom de l’égalité ne renforcerait-il pasà terme les inégalités territoriales ?Et la mission de l’Etat n’est-elle pasjustement de maintenir l’égalité desterritoires ? Bien sûr, cette suppression de la taxed’habitation est prévue comme étantintégralement compensée par l’Etat.Mais cela a de quoi inquiéter. En tou-chant à l’autonomie des collectivités,cette mesure pourrait bien en fragili-ser certaines et surtout les petitescommunes.

Une autonomie des collectivitéslocales mais des économiesnécessairesLe programme d’Emmanuel Macronconcernant les collectivités localesest basé sur deux principes : unemeilleure autonomie des collectivitésà travers notamment une simplifica-tion des normes centrales et la néces-sité de faire des économies dras-tiques. Pour cela, sur les 120 000 postes defonctionnaires que le président veutsupprimer d’ici la fin de son quin-

quennat , 70 000 à 75000 postesconcernent les collectivités locales.Cette mesure touche directement auprincipe de libre administration descollectivités et l’Etat ne peut pas leurimposer une réduction des effectifs.Cette mesure serait rendue possiblepar le non remplacement des fonc-tionnaires à la retraite. Compte tenula pyramide des âges, ces suppres-sions devraient être possibles d’ici lafin du quinquennat. Mais, dans uncontexte où de nombreuses com-munes bataillent pour garantir un ac-cès aux services publics à ses habi-tants et où les territoires rurauxconnaissent une fuite des jeunes ac-tifs, cette mesure les impacterait di-rectement. Par ailleurs, les départs àla retraite massifs peuvent se fairedans des secteurs où la demande defourniture de services publics estforte. Outre les restrictions d’effectifs, lescollectivités devront s’engager à ré-duire leurs dépenses publiques de 10milliards d’euros. Cet engagement seferait à travers un pacte confiance,conclu avec l’Etat. Cette méthodelaisse dubitatif quant à ses résultats etsurtout, la volonté de ronger davan-tage les dépenses des collectivités pa-rait insoutenable voire impossible !A côté de ces restrictions budgétaires,le programme d’Emmanuel Macronprévoit de consacrer 10 milliardsd’euros du plan d’investissement de

50 milliards d’euros aux actions descollectivités. Ces 10 milliards finan-ceront l’amélioration des servicespublics locaux pour améliorer laqualité du service et permettre defaire des économies, ou encore deconclure des contrats de développe-ment durable avec les collectivitéspour la transition écologique. Amé-liorer les services publics locauxpasse donc par une amélioration deson efficacité mais aussi, on l’a vuprécédemment, par une diminutiondu nombre de fonctionnaires, impli-

qués directement dans la fournitured’un service public de qualité.Emmanuel Macron compte octroyerplus de souplesse aux collectivités.Plus de souplesse pour gérer leursressources humaines (et donc arriverà la baisse des effectifs prévue). Plusde souplesse pour gérer leurs fi-nances en simplifiant les normes cen-trales, en permettant de donner unevisibilité aux collectivités sur leursressources sur 5 ans. Un accompa-gnement des collectivités est prévupour rendre plus efficace leurs poli-

ACTUALITÉS

Les collectivités devronts’engager à réduire leursdépenses publiques de 10milliards d’euros

Page 14: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

/ 14 / 36 000 communes N° 346 - juin 2017

ACTUALITÉS

tiques d’achat ou de gestion des dé-chets. Plus de souplesse également pour dé-cider de leur propre organisation. Eneffet, Emmanuel Macron prévoit lasuppression des départements dansles zones métropolitaines mais leurconservation dans les territoires ru-raux où le président souhaite déve-lopper l’intercommunalité. Des inci-tations à la création de communesnouvelles sont également prévues.Face à cela, on ne peut qu’y opposerle principe de liberté de la com-mune ! Inciter et valoriser les grandsensembles ne doit pas se faire au dé-triment de la commune et de sa li-berté de fusionner ou non ! Rappe-lons ici que la commune constitue lepremier échelon de démocratie localeet la mettre à mal c’est égalementmalmener la démocratie. La priorité est davantage donnée aux

grands ensembles et aux assembléesde discussion, telle que la ConférenceNationale des Territoires, rassemblantles associations d’élus. Cette confé-rence se réunira tous les six mois au-tour du Premier ministre pour faire lepoint sur les réductions des dépenses,les normes, les mesures d’’accompa-gnement. Le but : discuter toutes lesdécisions impactant les collectivitéslocales. Si le principe peut être salué,la représentation des associationsd’élus est une vraie question pratique.De plus, la composition de cette

conférence et la proportion de chaqueassociation au sein de cette confé-rence n’est pas précisée et relèverad’une véritable négociation. Faire en-tendre et représenter la voix des terri-toires ruraux n’est pas encore acté niobtenu !

Améliorer la mobilité et l’accès auxservices publics essentielsL’amélioration de la mobilité et l’ac-cès aux services publics essentiels fi-gure également dans le programmedu président. Ce dernier s’engage àne pas fermer d’écoles dans les terri-toires ruraux pendant le mandat. A cetitre, un moratoire sur les écoles estprévu. Un accès de tous aux services publicsessentiels serait facilité par le déve-loppement des maisons de servicesau public. Toutefois Emmanuel Ma-cron mise davantage sur la mobilitépour faciliter l’accès aux services. Eneffet, i l souhaite développer lesmodes de déplacements multimo-daux, le covoiturage, les voies dé-diées aux bus, VTC et covoituragesur les autoroutes urbaines ou encoremettre en place une modulation despéages en fonction de l’occupationdes véhicules. 20 milliards d’eurossur le plan d’investissement de 50milliards d’euros seraient consacrés àl’équipement. Cette mobilité accrueest aussi un moyen de lutter contre lafuite des jeunes actifs. L’accès à la santé est aussi largementdéveloppé dans le programme prési-dentiel (cf page 7).La vie locale territoriale est égale-ment mentionnée puisque qu’Emma-nuel Macron souhaite créer un « ac-célérateur d’associations » pour queles « associations utiles à la société »

se déploient rapidement sur le terri-toire.

Une couverture numérique hautdébit assuréeLe numérique est une des priorités dunouveau président, bien que ce porte-feuille ait été attribué à un secrétaired’Etat plutôt qu’à un ministre dans lenouveau gouvernement d’EdouardPhilippe. Dans ce domaine, les objectifs sontambitieux puisque qu’un déploiementde la fibre, de la 3G et de la 4G surtout le territoire (y compris et surtoutles territoires ruraux) est prévu. Undélai de 18 mois est donné aux opéra-teurs pour que cette couverture soiteffective. Dans le cas échéant, l’Etatinterviendra via un plan d’investisse-ment. D’ici la fin du quinquennat, le but estd’atteindre une couverture haut débitde l’ensemble du territoire et d’élimi-ner les zones blanches. Dans leszones sans réseau, les opérateurs,soutenus par l’Etat, devront y ap-porter la 4G et améliorer la couver-ture en doublant le nombre d’an-tennes mobiles. Ce soutien étatiqueprendra la forme d’octroi de « condi-tions économiques favorables sur lesredevances d’utilisation des fré-quences hertziennes. » Si les objectifsne sont pas tenus par les opérateurs,ces derniers seront sanctionnés finan-cièrement. Un engagement sur l’éli-mination des zones blanches est doncadopté et on ne peut que le saluermais qu’en est-il des zones grises ? De nombreuses propositions impac-tant les territoires ruraux figurentdans le programme d’Emmanuel Ma-cron et dans des domaines qui fontpartie des revendications quoti-diennes des maires. Accès aux ser-vices publics, numérique, mobilitéfont partie des thèmes abordés par lenouveau président de la République.Mais l’organisation territoriale et lanécessité de faire des économies im-pactent de manière plus ou moins di-recte la commune en tant que collec-tivité et premier échelon de la démo-cratie locale. Les communes devrontfaire preuve de négociations habilesnotamment à travers les associationsd’élus pour assurer les moyens deleurs compétences.

CLÉA ROUIRE

Emmanuel Macron prévoit lasuppression des départementsdans les zones métropolitaines

Page 15: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

36 000 communes N° 346 - juin 2017 / 15 /

Etienne FurtosHommages à l’un des fondateurs de l’AmRF

Villes/campagnesBeaucoup à faire ensemble« Nous avons un espace commun à partager, le pays. Nous vivonsdes temps politiques qui nous obligent à cesser de nous ignorermutuellement ». C’est par ces propos que le président de l’AMRFa entamé l’échange avec la maire de Paris, Anne Hidalgo. La villede Paris est elle-même tournée vers le monde rural avec de nom-breuses emprises en bordure de la Seine où elle aide à l’installa-tion d’agriculteurs. Un exemple de la nécessaire complémentaritéentre urbain et rural. Les deux édiles ont prévu de se revoir pourfaire prospérer ce dialogue à partir du symbole de la rencontre en-tre Paris et les Maires ruraux. L’enjeu concerne désormais les rela-tions entre métropoles et campagnes, sur un pied d’égalité. Beau-coup de sujets sont d’intérêts communs. « La ville a sans douteplus besoin de la campagne » a rappelé Vanik Berberian. « Nousavons 4 jours d’autonomie en termes d’alimentation » a répondu lamaire. Preuve que le développement du monde rural est aussi liéaux territoires voisins plus denses.

« Combien avez-vous d’habitants ? interrogeale Préfet. « 300 » répondit Etienne Furtos.« D’accord, on verra plus tard, alors ».

Voilà l’étincelle, teintée du mépris encore vivace à l’en-droit des « petites communes », associée, on l’imagine àune colère sourde, qui est à l’origine de l’engagementd’Etienne Furtos pour créer un regroupement des élus ru-raux qui deviendra quelques année plus tard la fédérationnationale des maires ruraux de France. On connait lasuite. Et une nouvelle étape s’est déroulée lundi 15 maidernier à l’initiative de l’union des maires ruraux de laLoire pour fêter les 50 ans de l’association départemen-tale. Le maire de la commune, Jean-Paul Boyer, accom-pagné de trois de ses prédécesseurs, de Bernard Fournier,

sénateur et président de l’UMCRLet du président national ont dé-posé une gerbe sur la tombed’Etienne Furtos, décédé en mai2011.Un de ses fils, Etienne Furtos, arappelé l’attachement de son pèreà « se retrouver avec ses col-lègues » ; marqueur fort de la viede ce réseau national que de créerdes temps de sol idar i té ,d’échanges et de convivialité. lemaire de la commune a par ail-leurs rappelé l’impact de la ges-tion de ce « développeur » dansune commune qui vit encore beau-coup sur les acquis déployés parE. Furtos durant son mandat, aupremier rang desquels, l’écolecommunale associée à une salledes fêtes utilisée en partie pour la

restauration des enfants. Un exemple s’il le fallait de ladémarche discrète mais concrète de la mutualisation intel-ligente dans l’usage des équipements publics.Le temps convivial organisé par l’association réunissaitdes maires venus de toute le département ainsi que duPuy-de-Dôme sans oublier Ennio Bazzara ancien prési-dent de l’AMR de Meurthe et Moselle. Le pot de l’amitiéa conlu ces échanges avec un propos du président em-prunté à Gérard Pelletier, ancien président, « notre utilitéet notre force se jugent à notre capacité de nuisance, alorsnuisons », une autre manière d’appeler à une résistancebienveillante pour préserver la liberté communale etl’avenir du monde rural.

Bernard Fournier, Jean-Paul Boyer et Vanik Berberian devant la tombe d’Etienne Furtos, fondateur de l’AMRF

ACTUALITÉS

Page 16: SANTÉ UN QUINQUENNAT POUR RIENdata.over-blog-kiwi.com/1/49/08/03/20170711/ob_a623c2... · 2019. 11. 20. · Lettre du maire rural (avril 2017) Transfert du Pacs aux mairies, dématérialisa-

/ 16 / 36 000 communes N° 342 - février 2017

FENÊTRE SUR

L’association de Pharmacie ru-rale es t née en 1953. « Al’époque, il y avait deux fois

plus de créations par dérogation quepar voie normale, et la loi de réparti-tion initiale n’avait comme intérêtque de limiter les créations d’offi-cines dans les villes. Une anarchiequi virait à la catastrophe quand unpharmacien subissait une création àquelques centaines de mètres de chezlui , sans aucun moyen de sedéfendre. » Pour le président de l’as-sociation, Albin Dumas, la déroga-tion est le pire des scénarii. « Caaboutit à ce que les investisseurss’abstiennent ». Le risque d’avoirpeut-être une officine concurrente surson secteur de chalandise freine lesrepreneurs potentiels des pharmaciesexistantes. Entre 1985 et 1995 sur 1642 créations de pharmacies, 1 209l’ont été par voie dérogatoire.* L’as-sociation de pharmacie rurale de-mande des règles claires.« Aujourd’hui, on note une volontéde réduire le nombre de créationsd’officines, la priorité étant donnée

aux transferts depuis 1994. La loi laplus récente (du 21 décembre 2011)stipule que l’ouverture d’une officinedans une commune qui en est dé-pourvue peut être autorisée « par voiede transfert lorsque le nombre d’habi-tants recensés dans la commune estau moins égal à 2 500 », ceci neconcerne qu’une quinzaine de com-munes. Par ailleurs, lorsque la der-

nière officine présente dans une com-mune de moins de 2 500 habitants acessé définitivement son activité etqu’elle desservait jusqu’alors une po-pulation au moins égale à 2 500 habi-tants (cas pour nombre de pharmaciesrurales), une nouvelle licence ne peutêtre délivrée pour l’installation d’uneofficine que par voie de transfert danscette commune. »*Il est difficile aujourd’hui de trouver

des repreneurs pour les officines si-tuées dans les villages. « Les pharma-ciens préfèrent s’installer dans lescentres commerciaux », regrette Al-bin Dumas « pourtant, nous avons lachance d’avoir un réseau fécond.Mais je me bats depuis des annéespour restaurer une considération pourles officines rurales ». A cela, le sortde la pharmacie rurale ressemble àcelui de la médecine rurale : lesjeunes diplômés rechignent à s’instal-ler en dehors des villes. « Mais l’in-vestissement du pharmacien est pluslourd financièrement. L’enjeu n’estpas le même ».Mais la survie de l’officine rurale estaussi liée à la survie de la médecinerurale. Un médecin qui prend sa re-traite et n’est pas remplacé dans unvillage représente fatalement unebaisse d’activité pour la pharmacie etune perte de son chiffre d’affaires.« L’officine rurale est fragile. Si elleexiste, c’est parce que l’on tient à cetaspect citoyen du réseau », confie Al-bin Dumas. La proximité avec les vil-lageois, la relation suivie avec le pa-tient, sont les choses fondamentalesqui permettent au métier d’exister en-core face à la facilité du chiffre of-ferts par les centres commerciaux.Mais le centre commercial, c’est lamort de la relation avec le patient…Mais pour survivre, les officines doi-vent s’adapter aux nouvelles mentali-tés. « Il faut que le cadre juridiques’ouvre un peu à des actes de préven-tion ou à des actes de dépistage ».Récemment, une expérimentation aété autorisée dans la Région au-vergne-Rhône-Alpes qui permet auxpharmaciens de vacciner contre lagrippe. Ce genre de nouvelles dispo-sitions pourraient permettre aux offi-cine de ne pas disparaitre…

JULIE BORDET-RICHARD

* Selon la revue Pour n°214 sur la santé en milieururale

http://pharmacierurale.fr/

« Les pharmaciens préfèrent s’installer dans les centrescommerciaux »

Association de pharmacie rurale

Pour le président de l’associa-tion, Albin Dumas, la déroga-tion est le pire des scénarii.