Santé individuelle, alimentation industrielle (et angoisses de populations riches)

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Synthèse d'articles tirés de mon blog @Geographedumond

Citation preview

Sant individuelle, alimentation industrielle (et angoisses de pays riches)

17 novembre 2006. Obsit. Le saviez-vous ? Une guerre se droule sous nos yeux, que nous ne souponnions pas jusquici : LOMS mobilise lEurope contre lobsit . Cest en tout cas le titre choisi par Martine Perez dans le Figaro daujourdhui (ici). La confrence se tient Istanbul, et la solennit nchappe pas lenvoye spciale : un nouveau processus est en marche, dont la premire pierre vient d'tre pose par la signature hier d'une charte europenne contre l'obsit par quarante-huit pays europens. Les runis du jour constatent que les Europens salourdissent, anne aprs anne. Selon les pays, entre 32 et 79 % des hommes adultes et entre 28 et 78 % des femmes souffrent de surpoids ou d'obsit en Europe. La France se situe un niveau plutt moyen, avec 49 % des hommes et 35 % des femmes concerns. Le nombre denfants en surpoids corrobore les statistiques prcdentes : plus dun petit Franais (g de 7 9 ans) sur six est concern.La suite de larticle se disperse quelque peu, en mlangeant les causes et les consquences, les lieux communs les kilos superflus fatiguent inutilement lorganisme, lexcs de sucre accrot le risque de diabte et les pistes srieuses. Lair du temps flotte aussi Istanbul, o lon a bien entendu identifi un premier ennemi, lindustriel. Forcerait-on les Europens manger ce que produit la filire agro-alimentaire ? En tout cas nous transmet dIstanbul Martine Perez Tenir les individus seuls comptables de leur obsit n'est aujourd'hui plus acceptable .Je reviendrai en conclusion sur les recommandations mises dans la charte signe Istanbul. En attendant, il y a de quoi rester dubitatif. Les comparaisons historiques manquent. Ainsi, on note la chute rcente de la dpense physique . Mais la population franaise comptait encore huit actifs sur vingt-et-un dans lagriculture il y a un sicle (2 / 22 en 1975 et moins d1 / 24 en 2006), pour une activit professionnelle compltement rvolutionne dans le mme laps de temps. Dans lagriculture comme dans les autres secteurs conomiques, la productivit a augment, avec la plupart du temps une diminution de la pnibilit du travail. Faudra-t-il le regretter, parce que le confort signifie une dpense moindre dnergie, et par voie de consquence lengraissement du travailleur ? Pas plus srieuse nest l'accusation profre contre lordinateur ou contre la tlvision : ne grossissait-on pas l'poque o l'on frquentait davantage les bistrots et o l'on lisait livres et journaux en grand nombre ?Il ne me reste quune piste approfondir, laisse en plan par la journaliste, seulement cite pour son lien aux transports : lnergie. Je pars en effet dun postulat certes peu en vogue et forcment contestable que lalimentation moyenne des Europens a assez peu vari. Si lengraissement menace, il convient par consquent de prendre le problme dans un autre sens. A alimentation gale, lEuropen brle de moins en moins de calories (do ce surplus), car il reporte sa consommation d'nergie. On peut par exemple noter que lactivit la plus lmentaire, la thermorgulation humaine, devient pisodique et cesse dtre automatique : logements surchauffs en hiver, voitures et logements climatiss lt. LEuropen en surpoids dispose par consquent des moyens techniques pour parer lexcs climatique. Cest ce que lon appelle le confort, lascenseur qui remplace lescalier.Il convient de lier ces lments la question du dplacement et sur l'talement urbain. En Europe, et plus prcisment en France, la distance entre domicile et lieu de travail augmente rgulirement. En 2003, les 3,7 millions de migrants alternants que compte lIle-de-France ont effectu un trajet moyen de 11,6 kilomtres (voir ici). Cette distance implique limpossibilit totale de marcher pied ou dutiliser un vlo. Prtendre changer les habitudes dune telle population relve par consquent de lincantation, si lon met de ct la question de la distance domicile travail. Le surpoids grandissant des enfants est lui-mme li, mme si cela napparat pas vue dil.Car rflchissons un instant ; quest-ce qui a chang entre un enfant de 2006 et son anctre dil y a vingt-cinq ou cinquante ans (encore une fois, si on oublie un instant sa nourriture) ? Lcole garde les mmes caractristiques, avec lobligation jusqu preuve du contraire de demeurer immobile pendant des dizaines dheures par semaine. Les activits sportives longtemps ngliges ont mme gagn rcemment les cours dcole primaire. Il faut donc en revenir aux trajets pour rejoindre lcole. Qui nest pas frapp par le rituel de laccompagnement en voiture des petits Franais (Europens) par leurs parents, par les bouchons devant les coles en dbut de matine et en fin daprs-midi ? Jaimerais bien sr quon jauge scientifiquement les proportions, la part des parents devenus plus inquiets, qui refusent de laisser leurs enfants aller et revenir de lcole par leurs propres moyens, ceux qui habitent trop loin de lcole, et ceux qui trop presss choisissent la solution de facilit, cest--dire la voiture. Au total, combien denfants marchent de faon quotidienne en France ? La question imposerait une enqute approfondie. Il est videmment plus rapide de montrer du doigt les fabricants de barres chocolates. Ceux-ci cherchent bizarrement vendre leur produit : qui sen tonne !?La conclusion du Figaro me rassure cependant, qui touche aux actions dores et dj menes : Les Pays-Bas, eux, ont entre autres lanc un plan national pour relancer la pratique de la danse. L'Italie s'est engage dans des programmes ducatifs pour transmettre son patrimoine culinaire traditionnel... Les questions gnantes restent en suspens : quel Europen dsire moins de confort celui-l mme qui lui permet de brler moins de calories ? Quel Europen souhaite une envole des prix du carburant, qui le forcerait dmnager pour sinstaller prs de son lieu de travail ?La guerre lance Istanbul ressemble fort une gasconnade. Elle resterait risible si elle ne comprenait certaines recommandations bien incompatibles avec les liberts individuelles. Pour n'en citer qu'une, selon quels principes accepterait-on en effet l'aide la pratique d'exercice physique pour les groupes les moins favoriss ?Si tu es pauvre, fais du sport*24 avril 2007. Obsit (suite) La malbouffe, les mfaits du marketing et de la publicit, qui vantent produits gras et sucrs au dtriment des fruits et lgumes, sont l'origine de l'pidmie. Catherine Petitnicolas ne perd pas de temps dans des analyses alambiques. Elle sermonne les coupables dun crime contre la socit, lobsit juvnile ( Cinq millions denfants trop gros en Europe ). Il y a cinq mois, la mi novembre, le Figaro rpercutait dj les conclusions d'une grande campagne de lOMS sur ce thme, marque par la charte contre lobsit signe par quarante huit pays. Si lon en juge par la tonalit de larticle de Catherine Petitnicolas, rien na chang, sauf peut-tre dans le sens dune aggravation : dbauche d'alimentation trop grasse et sucre [], augmentation proccupante de la sdentarit . Si l'on n'adopte pas des mesures radicales pour lutter contre l'obsit et le surpoids qui menacent plus d'un milliard de personnes sur la plante, en particulier les plus dfavorises. Lextrapolation de lEurope lensemble du monde dclenche le sourire, de nombreux pays en voie de dveloppement redoutant surtout les famines. La journaliste signale en tout cas la tenue dun congrs international sur la place insuffisante laisse aux fruits et lgumes. Daprs lAprifel, plus on en mange, mieux on se porte ; impossible de ne pas souscrire cet engagementLobsit entrane en cascade lapparition de pathologies indirectes, mortelles (infarctus, attaques crbrales, diabte de type 2, cancers) ou handicapantes (problmes articulaires ou respiratoires). Celles-ci ou celles-l psent financirement sur les dpenses gnrales de sant. Les mauvaises habitudes se prennent tt. Il y a aujourd'hui 5 millions d'enfants concerns dans l'Union europenne et 330 000 nouveaux cas apparaissent chaque anne Mais le mdecin interrog par Catherine Petitjean sort bien maladroitement de son champ de comptence pour se livrer une analyse panoramique en forme denfilage de perles. Parlant du dsastreux modle amricain, il dnonce la junk food, et dresse une liste de produits (dangereux ?) : sodas, hamburgers, pizzas, chips, crmes glaces. Or junky signifie drogu. Par extrapolation, lexpression junk food ne dcrit pas un type prcis daliments, mais quelque chose qui se mange sans assiette ni couverts, la va-vite ou enfonc dans un fauteuil moelleux, nimporte quelle heure du jour ou de la nuit. Cette coutume caractrise celui qui souhaite ne pas perdre du temps prparer un plat, mettre le couvert puis desservir la table, celui qui ne supporte pas lide davoir faim ou dattendre sil y en a les autres membres du foyer. Du saucisson, des biscuits dapritif, des olives vertes ou encore des confiseries satisferont tout aussi bien lapptit du junky. Au plan mdical, la prise de poids intervient par le drglement du cycle repas digestion, et non par la faute de tel ou tel produit. Et si les sodas contiennent des forts taux de sucre, nul ne souhaitera - je suppose - promouvoir la consommation de bire ou de vin en contrepartie ; va-t-on pour finir fixer des quotas de litres deau boire obligatoirement ? La junk food renvoie lide que le temps manque, et pas seulement aux mres de famille souvent en premire ligne pour les courses et la prparation des repas Parce que les temps de trajet sallongent [voir papier prcdent ].Concernant le prix des fruits et lgumes, le mdecin interrog par la journaliste croit brandir un argument massue, en avanant comme preuve irrfutable leur renchrissement de 40 % en vingt ans ; 2 % par an, cest linflation normale ! Et si les prix de lindustrie agroalimentaire ont progress plus lentement (de l parler de baisse), cest en lien avec lactivit elle-mme, lamlioration de sa productivit. Et quand bien mme, il est impossible d'tablir une causalit entre la baisse des prix et l'augmentation de la consommation alimentaire (y compris dans les familles modestes). Lorsquaux lendemains des ftes de fin danne, les grands magasins bradent foies gras et surplus ventuels de champagne, personne ne note de rue sur les gondoles ! Bien au contraire, les prix flambent la fin dcembre, parce quune masse de clients se disputent des biens en quantits limites. En bref, les prix sont bas donc les pauvres se gavent constitue lexemple du sophisme.Notre mdecin conomiste amateur persiste nanmoins, attaque les fast-foods sans prononcer de peine (si le mal est dans le fruit et lgume ne convient-il pas dinterdire les enseignes criminelles ?) ni instruire le commencement dun procs. Les amateurs de cuisine du terroir tremblent pour leurs produits caloriques : cacheront-ils comme la femme de Louis de Funs dans la cuisine de lauberge de la Grande Vadrouille, les rillettes, les confits, les cassoulets, ou les choux la crme ; de peur quon les rquisitionne ?Au sommet du vice trne la tlvision, qui porterait tout le poids de lopprobre. La publicit fait acheter tonnant ! de mauvais produits : raison d'une pub alimentaire toutes les trente minutes, un petit Britannique aura absorb 77 000 messages de ce type avant l'ge de 18 ans. Regarder, cest donc dj grossir On finit dans les slogans dignes des ligues de vertus hrites des Puritains anglo-saxons ; culpabilisation et inefficacit. Tous les mdecins valuent positivement lallaitement maternel du nouveau-n. Mais lostracisme vis--vis des mres nallaitant pas tmoigne dun contresens complet. Sil existe des formules adaptes pour une minorit de jeunes mres (cadres de grandes entreprises, ou enseignantes), il nen existe pas pour la majorit : infirmires, caissires de supermarch, vendeuses, ouvrires la chane, etc. Et la vieille rengaine sur la ncessaire diversification de la nourriture dans les cantines scolaires proposer aux bambins ds la crche une nourriture trs varie, riche en lgumes, afin de les habituer des gots et des textures diffrents fait peu de cas des milliers dassiettes pleines vides chaque jour dans les poubelles de la restauration collective Scne de vie quotidienne en Europe.Les cinq millions denfants obses mangent sans doute nimporte comment, ils mangent peut-tre trop. Les psychologues diront quils compensent (leurs angoisses), les mdecins quils sadaptent (aux troubles du sommeil, labsence de petit-djeuner, etc.), et les sociologues quils trahissent la Catgorie Socio Professionnelle de leurs parents ; une chose est sre : ces millions denfants ne brlent pas les calories quils absorbent en contrepartie. Pas assez de marche pied (on a vu leffet du recours la voiture), et pas assez dactivits lextrieur, dans des quartiers pourtant le plus souvent homognes socialement. Il est moins inconfortable intellectuellement de dnoncer la malbouffe, la tlvision ou les jeux lectroniques que d'avouer la responsabilit des parents clotrant leurs enfants la maison ds la sortie de la crche ou de l'cole : cocooning et engraissement !*28 fvrier 2008. Cancer (et vieillissement dmographique) De plus en plus de personnes vivent avec un cancer, mais le temps qui scoule entre lannonce du diagnostic et le jour du dcs sallonge rgulirement. Dans ces conditions, le cancer ressemble de moins en moins l'image de la grande faucheuse qui emportait chaque anne les malades par dizaines de milliers. Il tue moins et plus lentement, comme le grand froid qui endort le vagabond allong par terre un soir dhiver et lemporte sans mme qu'il s'en aperoive. LInstitut National de Veille Sanitaire annonce l assez discrtement cette rvolution dans lhistoire dmographique contemporaine de la France.1980 : 53,73 millions dhabitants ; 2005 : 62,82 millions [Insee]. En 25 ans, la population franaise a gagn un peu plus de 9 millions dhabitants, ce qui correspond une augmentation de 16,9 %. Celle-ci incorpore un solde migratoire lgrement positif. Bien sr, un niveau de natalit proche de deux enfants par femme explique aussi cette situation. Les filles ont imit leurs mres, et ont prennis par leur fertilit les acquis du Baby-Boom : un tremblement de terre est toujours suivi par des rpliques. Le vieillissement favorise plus nettement encore laugmentation de la population. LInstitut de Veille Sanitaire la constat. Les gnrations nes dans lEntre-deux-guerres restent volumineuses en ce dbut du XXIme sicle. Le sommet de la pyramide des ges illustre le maintien en vie deffectifs importants de septuagnaires, doctognaires, de nonagnaires et mme de centenaires [Ined]. LIned prvoit que ces derniers seront moins nombreux dans les deux prochaines dcennies, lointaine rpercussion de la chute des naissances pendant la priode 1914 1920. A cause de la Premire Guerre mondiale, les hommes taient mobiliss et beaucoup nen revinrent jamais. En 2008, on recense un peu plus de 20.000 centenaires, mais lInstitut en prvoit 18.000 en 2015 et 14.000 en 2020.Les Baby-boomers sapprtent prendre la suite de leurs ans dans le troisime ge. Les plus anciens parmi eux prennent actuellement leur retraite et devraient selon toutes vraisemblances prouver par la largeur de leurs rangs quil fait bon vivre en France. Si lon prend en compte le cancer, la proportion des malades saccrot par consquent de faon mcanique, tandis que le nombre de dcs demeure globalement stable, coinc entre un minimum de 520.000 et un maximum de 540.000 rarement dpass : 560.500 en 1985 ou encore 563.000 en 2003. Cette anne-l, les chaleurs estivales tenaces entranent une surmortalit amplement commente dans les mdias. Ceux-ci ont moins prt dattention leffet indirect de la canicule, et plus prcisment au creux de la mortalit qui a suivi lanne suivante : 519.600 dcs en 2004. En lissant sur une dcennie les moyennes de mortalit, la catastrophe climatique lorigine de la tourmente mdiatique svanouit. La courbe de mortalit franaise fonctionne depuis plusieurs dcennies comme une machine sous utilisant un plateau mouvant et un rateau, celle-l mme qui excite tant la convoitise de Mr Bean (dans cet pisode, au bout de 11mn16). Seul un vnement imprvisible et inattendu provoque une sortie en grand nombre, la faon de cette nime pice de monnaie tombe au bon endroit sur le tas, et qui fait basculer des dizaines d'autres pices.LInVs a donc mis le doigt sur un vnement sans prcdents dans lhistoire mdicale rcente, la banalisation de la pire des maladies, celle qui fait froid dans le dos, imprvisible et protiforme : chaque partie du corps ou chaque organe peut en effet receler une tumeur. Mme si cette nouvelle signifie un alourdissement des dpenses de sant (plusieurs fois voques dans ce blog), il faudrait pourtant se fliciter de cette nouvelle : lesprance de vie des cancreux progresse rapidement, ce qui leur redonne du moral, les fait participer la thrapeutique et augmente leurs chances de survie.Pression sociale oblige, lInstitut communique pourtant ces rsultats denqute en se gardant de tout triomphalisme. Le ton reste funbre, bien loign de celui employ pour un bulletin de victoire [1]. Les Cassandre y tiennent. En labsence de danger immdiat, la peur du cancer disparat, et les comportements dangereux (rprhensibles ?) reprennent vigueur. Lalcool et le tabac tuent moins les hommes ? Il ne faut pas sauter de joie car ils se rattrapent sur les femmes, susurrent les nouveaux jansnistes. Le cancer n'est pas mort, vive le cancer !Ainsi, les bonnes nouvelles nexistent pas et il ne faut jamais se rjouir de rien. En poussant l'extrme le raisonnement, je subodore que ce jansnisme hyginiste cache mme une approche pernicieuse du cancer. Derrire une faade irrprochable politique de prvention, de financement des soins et de la recherche se dissimulent d'improbables adorateurs. Ceux-ci transfigurent inconsciemment le cancer en une sorte de nouveau dieu Baal. Les Phniciens et les Carthaginois offraient ce dieu terrible des sacrifices humains pour obtenir ses bienfaits. Combien desprits aveugls considrent sans trop le proclamer le cancer comme une bonne chose !? Ils napportent aucun sacrifice, mais la maladie s'en charge leur place.Ce Baal des temps modernes anantit lobjet de leur excration, quil sagisse du nuclaire (radiations), de l'automobile (gaz d'chappement), des produits de l'agriculture productiviste (pesticides), du tabac, de lalcool, des graisses, ou de tout autre agent cancrigne. Cette drive pseudo-religieuse frustre ses adeptes, car l'esprance de vie augmente et le cancer tue moins. Il me semble qu'elle conduit de surcrot une distinction sournoise entre humains malsains - ceux qui dtriorent l'environnement ou/et qui se dtruisent - et les autres, les humains sains. Au plan mtaphysique, il n'y a pas de morts normales ou anormales. Toutes renvoient l'homme sa nature. Le progrs du cancer des poumons chez les femmes prouve de toutes faons que la criminalisation de la cigarette n'implique pas son rejet par les consommatrices. Le cancer constitue en tout cas pour longtemps une facette fondamentale du vieillissement occidental.*14 novembre 2008. Nos enfants nous accuseront... L'expression choisie fleure le sentimentalisme de pacotille. Dans un pays dont la moyenne d'enfants par femme n'atteint pas le seuil de renouvellement des gnrations ( 1,9), dont un tiers environ des couples n'a pas de descendance, que signifie cette question ? Le recours la premire personne du pluriel ddramatise il est vrai le propos. En mme temps, n'est pas Zola qui veut. La question laisse en tout cas planer le doute et aiguise la curiosit. De quoi pourront-ils bien nous accuser, ces enfants ?Nous les avons abandonns, privs du superflu, ou nous ne leur avons rien transmis. Nous ne nous sommes pas montrs la hauteur, insuffisamment patients, aimants, attentifs, ou encourageants. Non, nos enfants nous accuseront parce que nous avons failli sur les grands problmes de notre temps. En Afghanistan, en Irak, la guerre se poursuit. Au Proche-Orient, les conflits s'enlisent. En Afrique noire, le sang se rpand. Les grandes pidmies font des ravages. La faim et l'absence d'ducation dominent ici ou l. Nos crans de tlvision ou d'ordinateur disent tout et nous ne faisons rien.Malheureusement, le documentaire ne traite d'aucun de ces sujets. Nos enfants nous accuseront. L'ellipse contenue dans le titre se comprend au fur et mesure du visionnage de l'extrait disponible sur Daily motion. Ils nous reprocheront de les avoir gavs de mauvaise nourriture, voil comment pourrait s'intituler le documentaire. On comprendra bien sr que je m'insurge contre ce procs en sorcellerie, que je rejette l'accusation d'indignit. Il faut peut-tre commencer par le dclic du documentariste Jean-Paul Jaud : un maire d'une petite commune des Cvennes a rcemment dcid pour sa cantine d'instituer l'obligation de recourir des aliments bio. Grand bien lui fasse. A partir de cette accroche, Jean-Paul Jaud btit son histoire, et nglige ouvertement une mise en perspective pdagogique. Qu'est-ce que l'agriculture ? Une activit humaine naturellement dpendante des conditions du milieu et en particulier de la pdologie la qualit des sols et plus encore, soumise aux aleas de la mtorologie. Un champ souffre d'excs de pluies ou l'inverse d'une scheresse prolonge. Une bourrasque, un gel brusque ou tout autre vnement imprvisible mettent en pril la moisson. Des oiseaux, des insectes, ou des champignons surviennent, une maladie se dclare dans un troupeau : soudain, des mois d'efforts sont anantis. Les agriculteurs ont toujours cherch se prmunir contre ces risques. Avec la rvolution industrielle, des machines ont augment la productivit, les intrants favoris la lutte contre les agressions. Les Etats se sont mme ports garants de la modernisation de l'agriculture et ont agi dans le sens de l'amlioration de la condition agricole, ou de l'aide la production. En Europe, la PAC tire son origine de ces diffrents lments. L'histoire et la gographie de l'Occident sont ncessaires pour le comprendre : voir Une Poigne de Noix Fraches [ici ou l]. Les Occidentaux bnficient aujourd'hui d'une grande sret alimentaire. Certes, la mdaille a son revers. Jean-Paul Jaud ne s'embarrasse cependant pas de ces pralables : il veut frapper fort, toucher l'motion et non construire un raisonnement. Rsumons. Aprs des images de Paris la nuit, la premire scne commence par un amphithtre de la maison de l'Unesco, sur fond de musique de thriller amricain. Un intervenant pose des questions l'assistance. Le sous-titre prsente John Peterson Myers comme chercheur en sciences pour la sant environnementale. On ignore dans quelle universit, ou dans quel organisme. Il ne distribue pas la bonne parole, mais demande si vous pensez aux membres de votre famille ou vos amis, combien parmi eux ont t atteints d'un cancer ? Il encourage les personnes concernes lever la main, puis renouvelle sa question propos du diabte, de la strilit. A la fin, runissant tous ces maux en un seul, il enjoint ceux qui ont manifest lors des questions prcdentes lever ensemble la main. Pendant ce temps, la camra tourne en plan large. Alors, le doute n'existe plus : une partie de la population mondiale souffre d'une maladie que la science croit lie aux facteurs environnementaux. Si l'on manifeste un minimum d'objectivit, on constate ici une dmarche non scientifique, une faon d'entourlouper que ne renierait pas un gourou. Le tout se termine sur des conclusions compltement floues. Qu'appelle-t-on ici facteurs environnementaux ? John Peterson Myers assne que les enfants en train de grandir sont en moins bonne sant que leurs parents. Non seulement, il ne le dmontre pas dans l'extrait c'est effectivement les limites de la critique mais il utilise une expression gnraliste : la nourriture ne conditionne pas elle seule la bonne sant. Cette dernire passe par la non consommation de drogues, ou de stupfiants, une vie quilibre, un sommeil rparateur, la pratique de sport ou dfaut des exercices rguliers, pour ne citer que quelques facteurs. Ce n'est pas acceptable ! conclut-il. On ne sait quoi il pense exactement.Le documentaire se poursuit Barjac, o les habitants vivent dans l'angoisse de la pollution. La camra se fixe sur la tte de l'intervieweur qui prononce des phrases dfinitives : ici commence un combat qui pourrait tre irrversible. Dans la cantine, les enfants finissent leurs assiettes, mais dj les images partent dans la campagne environnante (?). L'intervieweur questionne un agriculteur. Celui-ci reconnat qu'il n'aurait pas mang des produits recouverts de produits chimiques, l'poque o il en produisait. La camra filme au mme moment un tracteur remontant les rangs d'un verger en fleurs, et qui asperge les arbres de pesticide : musique angoissante, un enfant mange une pomme pendant un dizime de secondes. Le commentaire continue avec un nouvel interlocuteur, qui voque 30.000 ingrdients utiliss dans l'agriculture, puis affirme se plaindre de troubles neurologiques. Les images entrechoquent les bidons de produits toxiques verss dans une citerne et le plaignant qui se tient la tte avec une main, lgrement pench, dans une pose mlodramatique.Le spectateur retourne la maison de l'Unesco. Quelqu'un parle la place du chercheur amricain. Il dnonce les mfaits de l'agriculture industrielle et prconise la gnralisation d'une agriculture alternative. Selon lui, celle-ci ne cotera pas plus cher. Les applaudissements coupent l'explication. Pourquoi attend-on une telle rvolution ? Qui agit dans l'ombre et s'enrichit sur le dos des ignorants ? Sans une respiration, le documentaire repart dans les Cvennes. Dans une classe de primaire, des enfants chantent : l'eau c'est bien, l'air pur c'est mieux. Les usines salissent et le ptrole dtruit la plante. Les dernires notes retombent sur les images du tracteur prcdent et une nouvelle interlocutrice voquant un enfant souffrant d'une leucmie, ce dernier tmoignage se trouvant intrecoup par un nouvel intervenant la maison de l'Unesco. Lui se passera de preuves supplmentaires, rejettera les doutes. Pour lui, il ne faut plus qu'une volont politique, pour agir.En critiquant ce montage, le risque est fort de provoquer l'incomprhension. Le nombre de visites de l'extrait sur Daily Motion fait la preuve que le caractre farfelu et irrationnel de ce documentaire ne gne pas sa diffusion. Qu'indiquent les faits dmographiques ? L'esprance de vie continue progresser rgulirement. Examinons la situation franaise. Le rapport de France Mesl (INED) apporte un certain nombre de donnes. Toutes tranches d'ges confondues, l'amlioration n'a pas cess depuis 1950. L'cart entre hommes et femmes se restreint mme progressivement. Les enfants ns au dbut des annes 2000 devraient mourir en moyenne plus de 75 ans pour les garons et plus de 80 ans pour les filles. Les cancers tuent dsormais plus qu'aucune autre maladie. En ralit, les tableaux statistiques montrent que ceux-ci rgressent, mais selon une pente moins marque que celles reprsentant la diminution des maladies cardio-vasculaires, des maladies respiratoires ou des maladies infectueuses. La figure 10 (page 17) permet toutefois de balayer plus spcifiquement les sous-entendus du documentaire : elle concerne l'volution des cancers par type chez les 35 64 ans depuis 1950. Chez les hommes, la chute la plus spectaculaire est celle du cancer de l'estomac ! Deux cancers restent stables en revanche, ceux du sang et de l'intestin. Chez les femmes, la distinction provient de l'augmentation nette du nombre de cancer du sein et de l'explosion du cancer du poumon. Il occupe la deuxime place. En conclusion, la sant de la population franaise s'amliore, malgr le vieillissement. Voir ici ou l.N'y a-t-il pourtant aucune menace ? Les nouvelles maladies professionnelles, l'excs de mdicaments puissants, la sdentarit, les troubles de l'alimentation (anorexie et obsit) constituent des dfis puissants. Les modes de vie, et en particulier de la priurbanisation qui oblige utiliser la voiture, ne sont pas ngliger. Point n'est besoin d'en forger d'autres. Il est videmment plus facile de faire peur que de faire rflchir. Je ne sais si nos enfants nous accuseront.*25 novembre 2008. Fertilit masculine. Comme un clou chasse l'autre, les mdias s'emparent en cette fin d'automne d'un sujet touchant la survie de l'espce humaine, l'infertilit masculine. Comment se dfinit-elle en gnral, sans considration du sexe ? Le corps mdical utilise le terme d'infertilit en l'absence de grossesse chez un couple tentant en vain d'avoir un enfant pendant une priode d'un an (au minimum). Le terme de strilit remplace le prcdent quand le dlai double sans plus de rsultats, c'est--dire au bout de deux ans. Il faut prfrer le premier terme au second, qui porte de plus en plus une notion temporelle qu'il n'avait pas au dpart. Ainsi, l'infertilit dcrit un phnomne temporaire, par opposition la strilit dfinitive. Cette dernire s'avre statistiquement rare, puisqu'elle toucherait entre 5 et 7 % des couples.Tous les couples ne partent pas avec les mmes atouts. La fcondabilit fluctue en effet en fonction du sexe, de l'ge et des caractristiques de chaque cycle fminin. Pour les femmes, les tudes relvent avec prcision la monte en puissance de la fcondabilit jusqu' l'ge de 25 ans : entre 21 et 25 ans, une femme dispose d'une chance sur cinq environ d'tre enceinte au cours d'un cycle menstruel l'occasion d'un rapport sexuel non protg. Ce pourcentage dcrot ensuite lgrement. Si elle se trouve dans la fourchette des 35 - 40 ans, elle n'a plus qu'une chance sur vingt en moyenne [1]. Faute de pouvoir tablir des statistiques pour les hommes - l'andropause intervient progressivement et avec des variations d'un individu l'autre - on a pendant longtemps incrimin les femmes en cas d'infertilit ou de strilit. La rcente campagne mdiatique vise peut-tre rquilibrer cette approche. Cela tant, il n'existe plus aucun doute sur la co-responsabilit de l'homme dans l'infertilit au sein d'un couple : on serait mme tent d'affirmer qu'un cas sur deux est de son ressort [2] ! Intervient alors comme facteur principal l'insuffisance (aspermie ou hypospermie) ou la mauvaise qualit du sperme (azoospermie) [source].Ces donnes fondamentales n'excluent pas bien sr l'existence de causes annexes. Annexe ne signifie pas drisoire. Parmi ces causes, une distinction s'opre entre le mdical et l'environnemental, le premier tant plus clairement identifiable que le second. Les mdias ont toutefois jet leur dvolu sur ce dernier aspect. Ainsi, la pollution perturberait la reproduction humaine. Les futurs parents respirent un air malsain, boivent une eau souille et se nourrissent d'aliments contamins. On y reviendra un peu plus loin. Deux critiques s'imposent ce niveau. Dans de nombreux pays en voie de dveloppement, les donnes environnementales ne semblent pas dtriorer la fcondit gnrale. Les Territoires Palestiniens cumulent la plupart des maux prcdemment relevs, mme si la dtrioration de l'eau potable reprsente probablement le danger le plus grave, surtout dans la bande de Gaza [source]. A la mi-novembre, en plein blocus isralien, le Middle East Times rvle que des boulangeries palestiniennes recyclent des farines animales pour fabriquer leur pain. Or en 2005, le nombre d'enfants par femme est proche de six (5,6) [source]. En Hati, les temptes tropicales se suivent, les polluants se mlangent l'eau potable et les dcharges brlent longueur de journe. Si le crot naturel reste aussi lev, le pays comptera toutefois quinze millions d'habitants en 2050, le double de la population recense en 2003 ! L'Indice Conjoncturel de Fcondit est de 4,7 enfants par femme [source].Avant d'en appeler aux causes environnementales, il n'est pas inutile de se pencher sur le fonctionnement du couple occidental. L'cart entre l'ge idal et l'ge de la mre lors de la premire grossesse - on pourrait largir aux deux sexes - grandit par exemple : d'un ct la vingtaine, de l'autre la trentaine approchante (29,6 ans en 2004) [source]. Ce foss s'explique par l'allongement de la dure des tudes, par la difficult de se loger moindre cot en ville, ou encore par l'instabilit professionnelle et amoureuse des pradultes. Les Occidentaux retardent le moment pour s'tablir, mais la fcondabilit ne se dcale pas dans le temps ! Qu'on ne s'y trompe cependant pas, les socits dans lesquelles le travail fminin salari et les divorces sont courants - comme en France, en Islande ou aux Etats-Unis - sont moins menaces par la dnatalit que d'autres. L'Italie, l'Espagne et la Grce ptissent ce titre d'une conjonction entre structures traditionnelles (faible fminisation de la population active, faible taux de divorce) et natalit infrieure 1,5 enfant par femme... Voir Une Poigne de Noix Fraches. D'autres causes d'ordre mdical sont susceptibles d'interfrer, comme l'avortement, bien que les tudes infirment tout lien direct entre IVG et infertilit [CNRS / forum doctissimo]. Si la baisse du nombre d'enfants a prcd sa lgalisation, en France on recense en moyenne 200.000 Interruptions Volontaires de Grossesse chaque anne, c'est--dire 14 pour 1000 femmes (entre 15 et 49 ans) [Ined].La sant des individus dtermine plus encore la fcondabilit du couple. Les drglements alimentaires, la consommation d'alcool, de tabac, de cannabis - sans parler de la cocane ou de l'hrone dont la consommation s'accrot chez les moins de trente ans [3] - interviennent un titre ou un autre. Aucun ne reprsente une cause exclusive. Les effets restent le plus souvent rversibles, comme dans le cas d'un arrt des rgles li une trop forte perte de poids. L'obsit freine la fertilit, par modification du mtabolisme ou trouble du cycle ovarien, son influence varie d'un individu l'autre [source]. Certes, les tudes jaugent les effets d'une consommation soutenue d'alcool, de tabac ou de cannabis. Ces substances n'interviennent pas seulement sur les organismes mais aussi sur la libido du couple [source]. La campagne mdiatique voque au dpart se dsintresse de tous ces facteurs pour se focaliser finalement sur les causes environnementales de l'infertilit masculine. Il y a une trentaine d'annes, Woody Allen s'amusait du sexe fort. Le mle provoque dsormais la piti ou l'angoisse [4]Dans le Monde, Jean-Jacques Bozonnet parle de semence en dshrence. Selon une enqute mene par des chercheurs barcelonais sur 1200 jeunes Espagnols gs de 18 30 ans, 58 % arrivent en-dessous de la moyenne pour la concentration des spermatozodes. Mais en quoi consiste exactement la moyenne ? Etudier de surcrot une population passant par des centres de fcondation assiste biaise les rsultats. Jean-Jacques Bozonnet reprend toutefois les conclusions des chercheurs. Sur l'chantillon considr, l'ge, le stress ou la consommation de tabac, d'alcool et de drogues perturbent moins la fcondit que la contamination par des produits d'origine industrielle . Les chercheurs dduisent de la bonne tenue des Madrilnes le fait que la pollution atmosphrique produit peu d'effets. [5]Dans le journal la Croix dat du 25 novembre, le slogan choisi pour le dossier intrieur ne vise pas la pondration : L'environnement menace la fertilit humaine . Rien de moins. Les hommes (lesquels, o, et quand ?) produisent moins de sperme, les malformations et les cancers des testicules s'accroissent, et puis les animaux souffrent aussi. Les truites britanniques deviennent hermaphrodites tandis que les alligators du lac Apopka (Floride) ont un petit pnis. Tout se mlange et rien ne va plus. Dans la deuxime partie de l'article, Emmanuelle Friedmann recense plus srieusement les tudes d'impact des polluants sur la production de spermatozodes. Bien entendu, pas un parmi les scientifiques consults ne revient sur les causes principales de l'infertilit. Cela ne signifie pas qu'ils les ngligent, mais qu'ils rpondent sur leur domaine de recherche. Et il ne fait aucun doute que des produits toxiques nuisent la sant !La secrtaire d'Etat charge de l'Ecologie appele la rescousse par la Croix donne le mot de la fin : Si l'humanit n'est pas menace dans l'immdiat, il y a une susceptibilit inquitante notre environnement. L'augmentation des cancers des testicules, la diminution du nombre des spermatozodes, la multiplication des anomalies de l'appareil reproductif masculin, corrobores par les recherches sur le monde animal, ont de quoi nous alerter. Aujourd'hui, un jeune Danois sur cinq a un sperme de mauvaise qualit. D'ailleurs tout le monde est concern directement ou dans son trs proche entourage par ces problmes de strilit. Pour Nathalie Kosciusko-Morizet, les problmes d'un Occidental sont ceux des habitants du monde entier, qu'ils habitent dans les Territoires Palestiniens ou en Hati. Et puis il est plus facile d'incriminer des causes lointaines qu'immdiates, dsigner des coupables plutt que d'appeler la population prendre ses responsabilits : ge de la conception, tat de sant, ect...[1] La fcondabilit, selon (Lridon) est nulle avant la pubert, de 9 % avant 15 ans, 9,3 % 16 ans, 12,1 % 17 ans, 12,8 % 18 ans, 15,1 % 19 ans, 18 % 20 ans, 22,4 % 21-25 ans, 18 % 26 ans et plus, 10 % 30-35 ans et 5 % 35-40 ans. Pour la population globale, la fcondabilit est de 16,3 %. / Source.[2] Dans environ 33% des cas, il est trouv une cause purement fminine, dans 21% des cas une cause uniquement masculine, dans 39% des cas la fois une cause fminine et une cause masculine et dans 7% des cas aucune cause nest trouve (infertilits inexpliques). / CHU Toulouse.[3] La consommation d'hrone s'accrot chez les jeunes / Le Monde / 26 aot 2008. [...] En 2006, les interpellations pour usage slvent 4 955, soit une hausse de 10 % par rapport lanne prcdente. Ce nombre saccrot de nouveau depuis 2003, aprs une chute continue depuis le milieu des annes quatre-vingt-dix. / OFDT.[4] Rfrence Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade, co-auteurs du documentaire Mles en pril.[5] La qualit sminale est altre chez plus de la moiti des jeunes Espagnols / Le Monde / 24 novembre 2008 / Jean-Jacques Bozonnet.*6 avril 2009. Alimentation (et sentiment de perscution) Il y a peu de temps encore, la menace pesait la fois sur lesprit et le porte-monnaie On nous ment, on nous spolie ! La complainte du perscut sappuyait sur une analyse gnralement vite mene des penseurs du capitalisme (Marx, Engels, etc.) et de ceux de la rvolution, de Babeuf Mao, en passant par Lnine. Des grandes lignes de la lutte des classes, la victime dinjustices retenait la ncessit de passer laction. Il fallait identifier clairement lennemi, quitte caricaturer le notable, le grand propritaire, le puissant, et tous les relais de ce que lon appelait en dautres temps le parti de lOrdre. De ce temps rvolu (?), demeure langoisse de lcrasement et lenvie de se battre contre des moulins vent. Pourtant, lidal nest pas toujours dans la nature. Il y a deux ans dj, jexposai les arguments des normalistes de lalimentation, qui mnent un combat acharn contre ce quils appellent la malbouffe (voir un peu aprs). Les puristes ont russi imposer force de rabchage lide selon laquelle, au-del dune certaine limite, lIndice de Masse Corporelle indique que quelque chose cloche. Au mieux les obses ignorent-ils quils ptissent sans le savoir dune maladie. Au pire, ils tombent dans un pige prpar par des mchants industriels sans scrupules. Deux considrations simples passent alors las. On grossit, parce que lon napplique pas le prcepte de Molire, manger pour vivre et non vivre pour manger. On grossit parce que lon brle moins de calories que lon en consomme. La rgle gnrale ne vaut certes que pour les gens ingambes et en bonne sant. Cette ide simple semble dsormais oublie. Il ne faut parler ni de gloutonnerie, ni dinactivit physique, car on pourrait froisser les personnes vises. Soit. Cette tartufferie sest cependant accompagne dun triomphe des apparences et de la mise en place de politiques mdico-sociales qui discriminent brutalement les obses Pardon, les personnes atteintes de surpoids.Dans le Monde dat du 7 avril 2009, la journaliste au nom prdestin Virginie Malingre refait le point sur lobsession alimentaire de nos contemporains. En choisissant pour dcor la Grande-Bretagne, elle offre la possibilit aux lecteurs de sattrister dune situation valable ailleurs, mais pas sur notre sol : vrit au-del de la Manche, mensonge en de ! Virginie Malingre a inscrit son petit garon dans une cole pratiquant en effet le puritanisme alimentaire. En langue vernaculaire, cela sappelle - nous explique-t-elle - une healthy school. Martin, trois ans, ne soufflera pas ses bougies danniversaire sur un gteau au chocolat, mais en se penchant au-dessus dun saladier rempli de fruits venus de botes de conserve et baignant dans un sirop satur de sucre. On se rjouit pour lui.Virginie Malingre ne se flicite pas franchement de cette enthousiasmante initiative. Elle ne pourra au demeurant ne sen prendre qu elle-mme si son fils le lui reproche un jour. Personne ne lobligeait choisir cette maternelle ! De toutes faons, les bambins se privent une fois pour se goberger de calories le reste de la semaine : les menus du midi la cantine : pizza accompagne de pommes de terre en entre, ptes en plat principal et gelly en dessert est une combinaison qui revient souvent pour le djeuner de mon dernier. Larticle reprend la thse dj esquisse. Les Britanniques rattrapent les Nord-Amricains en tour de taille moyen. [1] Les gros souffrent, mais les gros vivent de la gnrosit de leurs (quasi) semblables. Ceux-ci ne brillent pas par la finesse de leurs apostrophes [2], mais les chiffres sont l. Et la journaliste grnent les comptes. Les gros cotent cher la collectivit : les milliards jonglent sans retranscription des calculs. Comment calcule-t-on exactement le cot des rondeurs ? Mystre.Et puis le pire simmisce. Depuis une dizaine dannes, si vous tes sujets de Sa Majest et que vos enfants font exploser la balance, la loi britannique considre que vous portez une responsabilit. Ainsi, en 2006, elle [lobsit] a t un facteur concourant, avec dautres, vingt placements denfants en dehors de leur famille. Des adoptions sont rgulirement refuses des couples uniquement parce que les services sociaux les jugent trop gros. Lignominie administrative est la btise ce que la Tour Eiffel est au boulon. On apprend galement grce Virginie Malingre la multiplication des directives pesant sur la restauration collective et la rintroduction des cours de cuisine au collge.La journaliste indique en parallle la mauvaise volont des parents qui amnent au parloir des goters ou des pique-niques plus copieux quautoriss. A-t-on imagin meilleure formule pour donner aux coles lapparence de prisons pour adolescents ? Dans la logique dune politique de sant publique visant isoler les malades, on a rinvent sans succs les quarantaines. Beaucoup dadolescents sachtent de la nourriture leur guise, hors les murs de leur tablissement. Pendant ce temps, le problme embellit, si je puis dire. Virginie Malingre se moque pour finir des entreprises - rapaces, qui font feu de tout bois. Plutt que de gmir sur largent corrupteur, elle gagnerait utiliser autrement ses exemples de clubs de remise en forme pour enfants et de camps de vacances pour grassouillets (fat camp). Elle pourrait dplorer un assistanat et une forme de sous-traitance coteuse et lutilit discutable Il faut sen amuser, puisque les dindons de la farce ont les moyens de se faire mener en bateau.Mais cette conclusion constitue mon sens un indice dune inquitude plus profonde. Il convient de rester mince parce que cela allonge lesprance de vie lchelon individuel, ou parce que les dpenses de sant augmentent lchelle nationale. Sans doute, mais comment se fait-il que la dmonstration comptable ne soit pas plus vidente, chiffres lappui ? Les conclusions (plus de morts, plus dargent) ne se posent pas comme telles, mais au contraire comme des postulats. Et si lobsit en tant que marqueur social proccupait davantage que tout le reste ? Puisque le travail arrive au sommet dans la hirarchie des valeurs () lembonpoint trahit linactivit, cest--dire la paresse et la dpendance vis--vis des minima sociaux. Or, pour tre respectable en vertu des critres dominants en Occident, il faut viter de se mlanger avec plus petit que soi, les fins lcart des pais. Cet effort de tous les instants passe par les apparences. Et les bourrelets disgracieux brouillent limage dune dascension sociale russie.Dans le Monde dat du mme jour, on trouvera un autre article sur une phobie en plein dveloppement, bien quen retrait par rapport aux phobies de linfertilit (Semence en dshrence), des accidents domestiques (Raymonde, cascadeuse domestique) ou du cancer (Le cancer nest pas mort, vive le cancer !). Elle aussi conduit une vision clivante du monde. Linsomnie tombe du ciel frappe les adolescents. Martine Laroncle rpercute quelques statistiques frappantes, avec sources lappui cette fois. Une seule retient mon attention Dans vingt-deux collges franciliens, 80 % des lves de Troisime se couchent aprs 22 heures. Dans une rgion accable par les temps de trajet - ceux des parents autant que ceux des enfants - ces donnes sont particulirement instructives. A quelle heure se met-on table ? A la moiti du tlfilm de France Tlvisions, qui ne culpabilise pas en prenant le chemin de son lit, la dernire bouche dans le bec ? Martine Laroncle interroge un syndicaliste qui pourrait sappeler Jourdain. Moins on dort, moins on est en forme. Une reprsentante dassociation familiale parle de deux heures de sommeil perdues en lespace de trente ans, puis surenchrit. Quand on dort mal, on sendort pendant la journe. Et qui ferme les yeux se bouche les oreilles, complte judicieusement un proviseur dcouvreur du fil couper le beurre. La journaliste constate quand mme que les adolescents - comme sils taient les seuls (!!!!) - reconstituent leur capital de sommeil le week-end. Mais qui incrimine-t-on ? Les crans, videmment [Ne pas confondre insomnies et inepties] Que les ploucs sont btes. Pourquoi passent-ils tant de temps scotchs devant la tlvision ?!! Ils auraient tant de choses divertissantes faire la place Evidemment, un prof qui peut faire du sport plusieurs fois par semaine, peut aller faire ses courses dans la journe et prendre en charge ses enfants sans trop de difficults a toute libert pour se placer en observateur extrieur Il recuse les censeurs, parce quil sait pourquoi il ne connat pas lennui. Cet ennui qui fait que lon mange pour combler le temps ou que lon saffaisse des heures devant la tlvision, il serait grand temps de lanalyser laune du monde contemporain.[1] Car, cest un fait tabli, la Grande-Bretagne produit de plus en plus dobses et sapprte rattraper son cousin amricain. Si lon se rfre lindice de masse corporelle (IMC), un quart des adultes rentrent dans cette catgorie. Et 61 % sont en surpoids. Pour les enfants de 5 6 ans, ces pourcentages sont respectivement de 9,9 % et 22,9 %. Le gouvernement prvoit que si cette tendance se confirme, en 2050, la moiti des femmes seront obses, tout comme 60 % des hommes et 25 % des enfants. / Un oeil dans lassiette du voisin / Le Monde / mardi 7 avril 2009.[2] Les plus modestes sont les plus menacs, limage de la famille Chawner - Philip, le pre, Audrey, la mre, et leurs deux filles, Emma (19 ans) et Samantha (21 ans) -, qui pse elle toute seule 83 stones, soit 527 kilos. Les parents nont pas travaill depuis 11 ans et vivent avec 12 000 livres dallocations par an. Avec linactivit et le poids sont venus le diabte, lasthme et lpilepsie, pour lesquels les Chawner touchent de largent public, en plus du chmage. Et depuis que la jeune Emma est passe dans une mission de tl-ralit, les Chawner sont devenus la cible des anti-gros. Sur Facebook, un groupe de plus de 3 500 personnes a aliment pendant des mois la haine contre les quatre obses, avant que la police ne fasse fermer le site. Bougez vos gros culs, Emma Chawner et ta famille, et trouvez un job, pouvait-on notamment y lire. / Id.*7 dcembre 2009 Alimentation en temps de ftes. En ce dbut de mois de dcembre, et lapproche des ftes de fin danne, des articles vont disparatre, lespace de trois quatre semaines. Suivront les soldes qui permettent de remplir les devantures de maillots de bain et de liquettes diaphanes, lheure des galettes au beurre et des frangipanes alourdies de crme damande. De mon enfance remontent des commentaires agacs. Les gens sen mettrent plein la panse entendais-je souvent la maison. Cest pas la fte du petit Jsus, cest la fte de la dinde . Le nouveau-n en cire entour de pailles plac prs de la crche ne paraissait pourtant pas souffrir de la faim. Je trouvais mme lpoque quil tranchait avec le discours jansniste familial. Je ny prtais gure attention, toutefois, et ne remarque quaprs coup ses cuisses potels, ses hanches gnreuses, ses joues roses et rebondies.A la maison, le rituel tranchait volontairement avec lair du temps. Mes parents prenaient dabord plaisir ne pas imiter leurs contemporains, de prfrence en le leur faisant savoir. Par exemple, la sortie de la veille de Nol, aussitt chant Il est n le divin enfant (ici avec Grard Lenorman) et une fois serres quelques mains dgantes, mon pre lanait la cantonnade : Je ne sais pas ce que vous faites, mais nous, nous allons boire notre tasse de chocolat chaud. Mes congnres mangeaient du saumon, du foie gras, et mille autres dlices accompagnes de vins capiteux. Moi je buvais mon lait dans lequel ma mre avait fait fondre pralablement du chocolat en morceaux, raffinement exceptionnel. La tasse datait du sicle prcdent et la petite cuillre tait aussi ancienne mais dpareille.Un croissant et une brioche accompagnaient cette boisson chaude, mais de repas point. Lenvie douvrir des cadeaux entreposs ct des chaussures faisait que lon expdiait vite les affaires courantes. Je ne me suis rebell contre cette habitude pittoresque quassez tard, lge clairant lapptit de bonnes choses. Mes parents ont petit petit coll aux personnages crs de toute pice pour fter Nol leur got. De rveillon du 31 dcembre, dbordement incomprhensible pour une page tourne de calendrier, il ntait pas question. A lautomne de la vie, il ne faut gure de force pour sextraire de festivits obligatoires.La presse prend garde en ce mois de dcembre ne pas gcher la fte en gratinant la priode de lAvent darticles sur la cuisine du chapon ou de la bche glace, de conseils sur les dcorations tonalits vertes conifres et rouges sang. Les articles mnagers servent confectionner des cadeaux, ou se prparer pour la circonstance. Les publicitaires engloutissent leurs budgets pour attirer lattention des lecteurs. Les journalistes ne doivent donc pas dtourner leur lecteur de leurs achats compulsifs. Sur le sujet de la nourriture surabondante et des kilogrammes superflus, et au regard dune anne ddition du Monde, le rcapitulatif plaide nanmoins pour un lger rquilibrage.Le 1er mars, le supplment tlvision du Monde donne le ton : Enfants au rgime . Lquipe de journalistes rappelle que le 18 fvrier les principaux patrons de chane de tlvision se sont runis autour de la prcdente ministre de la culture et de lactuelle ministre de la sant Roselyne Bachelot. Tous font part de leurs bonnes intentions. Les publicits incitent manger des plats prpars, des produits congels et des confiseries industrielles (Cocooning et engraissement ). Mais les mdias se nourrissent de recettes publicitaires agroalimentaires, un tiers pour les chanes de tlvision du groupe Lagardre Active (Canal J, Gulli). Dans ce sommet sur la nourriture enfantine, les personnalits cites souhaitent discuter du modus operandi. Une limitation des publicits alimentaires aux heures dcoute enfantine semble devoir simposer au printemps. Les chanes de tlvision franaises devront diffuser lavenir des dizaines dheures de programmes hyginistes en contrepartie de publicits barres davertissements sur les mfaits de la sdentarit. Chacune proposera ses propres missions, dans lesprit de lengagement sign. LInstitut national de prvention et dducation pour la sant (INPES) continuera acheter des espaces publicitaires la tlvision, mais un prix cass de 60 %.Le 7 mai, Sandrine Blanchard compose une chronique sur le thme dun mdicament (Alli) dtourn de son utilisation premire, et mis en vente libre depuis le dbut du mois. Rgime, ou gare aux toilettes ! Les clients peuvent se passer dsormais de prescription mdicale pour acheter ce laxatif. Grce Alli ils maigriront en allant aux toilettes. Par souci dharmonisation europenne, lAgence franaise de scurit sanitaire des produits de sant (Afssaps) a donn son accord pour une vente sans ordonnance. La journaliste alerte cependant ses lecteurs sur les effets secondaires du laxatif. Elle part du principe que lignorance rgne en matre, et insiste sur le fait que le laxatif rend inoprante toute contraception orale. Au fond Alli ne mtamorphose personne. Et tout rgime bas sur la privation temporaire de nourriture ne dure que le temps dun t. Qui lignore ? A 60 euros par mois le traitement, autant bien rflchir. Pour rduire sa consommation de gras, il ne suffit pas de limiter le beurre, lhuile ou la crme frache. Car on ne souponne pas tout le gras cach dans les plats prpars, les viennoiseries industrielles, le tarama, etc. Les futurs utilisateurs dAlli ont intrt bien lire les tiquettes des produits quils consomment. Je me souviens dun comdien pour qui ce fut une catastrophe sur scne !, nous a racont un mdecin nutritionniste. Pascale Santi se dsole le 11 novembre 2009. Les Franais narrtent pas de grossir . En douze ans, le pourcentage de personnes obses est pass de 8,5 % 14,5 % chez les adultes . Son inquitude tourne immdiatemement au catastrophisme, puisquelle subsitue au substantif obsit celui de maladie. Une enqute du laboratoire Roche sert de caution scientifique, qui value le nombre dobses 6,5 millions de personnes en France. Elle ne dit rien des questions poses aux 25.286 personnes interroges, mais nous recommande de rester la fois inquiets et fidles notre gnie national. Ces chiffres ne sont toutefois pas comparables avec ceux rencontrs chez nos voisins britanniques (environ 27 % dobses) et amricains (environ 30 % ) . Cocorico. Le poids moyen des Franais a augment de trois kilos en douze ans. Pascale Santi rsume grands traits les facteurs explicatifs, rappelant au passage le lien entre le niveau de revenu et le tour de taille : 6 % dobses dans la tranche + de 5.300 euros de revenus contre 22 % dans la tranche - de 900 euros de revenus [Si tu es pauvre fais du sport].Il reste quune population vieillissante se fminise. Cest le cas en France, lesprance de vie des hommes restant en de de celle des femmes. Or lobsit concerne davantage les secondes (15,1 %) que les premiers (13,9 %). Le vieillissement conduit mcaniquement une augmentation du poids moyen. Il nexiste certes aucun mdicament contre cette maladie-l. La journaliste donne enfin la parole un mdecin engag par Roche Il est impratif de changer lenvironnement et de continuer les messages de prvention qui invitent moins de sdentarit ou un rgime alimentaire plus quilibr, afin de baisser le surpoids des gnrations venir, martle Marie-Aline Charles. a ne sarrtera pas tout seul, il y a une inertie. Et notre systme de soins nest pas dimensionn pour prendre en charge les personnes obses. Le 14 novembre, Paul Benkimoun recense les travaux de recherche sur les liens entre flore intestinale et obsit. Cinq jours plus tard, Pascale Santi revient quant elle la charge. Il ny a plus de problmes, mais seulement des solutions entriner au plus vite. On redcouvre au passage le nom du laboratoire incrimin dans lenqute voque plus haut. La journaliste rappelle le contenu des politiques publiques au cours des douze dernires annes. Le docteur Franois Bourdillon, prsident de la Socit franaise de sant publique (Sfsp) sen rclame. La France a alors t lun des rares pays lancer un programme de prvention autour de la nutrition. Il faut continuer cette initiative, ni de droite ni de gauche Pascale Santi prcise que lElyse a command pour le 15 dcembre un rapport sur la prvention de lobsit. La journaliste brle toutefois de faire connatre les causes du sinistre, rapports et spcialistes lappui : la sdentarit et labsence dactivit physique. Un dcalage nat grce linterview du reprsentant du Groupe de rflexion sur lobsit et le surpoids (GROS). Celui-ci montre bien quil y a beaucoup redouter dun manichisme alimentaire. Mais on replonge vite dans lalarmisme. La rdactrice du futur rapport nen dmord pas. Les politiques publiques sont bonnes. On peut videmment envisager de les assortir. En attendant, des mesures simples peuvent aussi tres mises en place. A commencer par des incitations financires ou fiscales pour favoriser les dplacements pied ou vlo. [Le Monde]La vision est donc unilatrale. Lobsit pose un problme de sant publique. La sant publique doit relever le dfi. Linfantilisation, et les organismes para-publics ne changent pourtant rien laffaire. Dans la mme priode concident les actions gouvernementales et laugmentation du nombre dobses. Limbrication absolue (obsit = problme = sant publique) suscite linterrogation, peut-tre mme le doute. Que dit-on du fait dmographique, sociologique ou encore gographique, une fois bien tablie la dimension mdicale de lobsit ? Lutter contre lutilisation de la voiture dans une ville tale est vain. Condamner les plats prpars trop gras ou les desserts trop sucrs, cest oublier la ralit des couples. Lhomme qui sinvestit faiblement dans les taches mnagres rve t-il, en plus du reste, de voir servie sa table la cuisine de sa maman ? Si les industriels salent en abondance, cest pour rehausser le got des plats. Ceux-ci cuisent des tempratures leves pour rpondre des critres dhygine.La liste des causalits pourrait facilement sallonger [Une poigne de noix fraches], mais en ces temps de ventres farcis, de tables familiales, dassiettes pleines, de plats en sauce et de crmes ptissires, la presse oublie la grande maladie de lobsit. La rangera-t-on dans la catgorie des maladies saisonnires, comme la grippe ? Finalement, je noublierai pas mes vieilles tasses de chocolat chaud*20 janvier 2009. Insomnie et modes de vie. Plus on vieillit, moins on dort. De 16 17 heures chez un nourrisson, la nuit passe ensuite 13 heures (vers l'ge de quatre ans) puis 7/8 heures par tapes successives, entre dix et seize ans. Cela tant, chaque individu a ses propres besoins, dans une fourchette variant entre 6 et 10 heures. Les mdias portent un intrt tout particulier ces drglements du sommeil - au point qu'elle prend toutes les allures du marronnier - parce qu'ils affligent un nombre grandissant de personnes. Curieusement, l'analyse s'arrte gnralement une succession d'ides reues plus ou moins vrifies, d'omissions et d'attaques en rgle contre tel ou tel flau suppos. Les cas les plus spectaculaires font les dlices des missions - plateaux : personnes hantes par des cauchemars atroces, personnes souffrant d'apnes du sommeil, ou de narcolepsie, hypersomniaques, somnambules, mais encore simples agits nocturnes.Au cours d'une nuit normale se succdent une phase dite lente et une phase dite paradoxale. Quatre tapes de plus en plus longues se suivent, chacune caractrise par sa propre activit crbrale. La premire (stade 1 / 10 % du temps d'endormissement) assure la transition entre la veille et le sommeil. La deuxime (stade 2 / 50 %) correspond un sommeil lger et la troisime (stade 3 / 10 %) un sommeil profond. Le sommeil paradoxal apparat lors de la quatrime et dernire tape (stade 4 / 20 %), avec une intense activit oculaire et une atonie musculaire. Un petit enfant peut avoir trs tt des problmes pour s'endormir, souvent en lien avec la recherche de propret. Les insomnies pisodiques s'avrent assez banales : somniloquie, bruxisme, somnambulisme, cauchemars et terreurs nocturnes troublent la nuit et rveillent parfois l'enfant.Les choses se compliquent l'ge adulte, car se surajoutent des facteurs extrieurs (soucis personnels, professionnels, angoisses, etc.), la baisse de l'activit physique, la consommation de drogue ou de mdicaments, l'alimentation dsquilibre engendrant un surpoids. Le simple fait de vieillir suffit apparemment perturber tout ou partie du sommeil, nuisant la complicit du couple, court-circuitant l'activit diurne, rendant dangereux l'utilisation sur longs trajets de l'automobile. Il existe presque autant de varits d'insomnies que d'individus, mme si on distingue gnralement les insomnies secondaires - au contraire de celles qualifies de primaires - parce qu'elles rvlent d'autres symptmes.Les mdecins opposent aussi les phnomnes pisodiques - thoriquement sans consquences - ceux chroniques qui peuvent dtruire quelqu'un, moralement et physiquement. Les insomnies ont une prvalence de 3 48 % selon les tudes. Elles augmentent avec l'ge. Elles reprsentent 50 % des motifs de consultation chez le gnraliste ou le spcialiste. 15 % des patients prennent des somnifres de manire rgulire. Il n'existe aucun examen complmentaire de confirmation diagnostique. [Facult de mdecine d'Angers].Marine Lamoureux, dans La Croix du vendredi 16 janvier 2009 insiste toutefois davantage sur les instruments que sur les responsabilits individuelles : En cinquante ans, des rythmes de vie chahuts. Elle trouve son accroche dans l'annonce rcente par le gouvernement de la suppression de la publicit sur les chanes publiques. Celle-ci ramne des horaires un peu moins tardifs les programmes de premire et de seconde partie de soire. Sauf considrer que les autres chanes mettent des programmes pour rien, l'argument de la journaliste ne tient pas. On peut lire dans l'article que l'Institut national du Sommeil et de la Vigilance dplore en tout cas en France un raccourcissement net des nuits depuis les annes 60, de 8h30 7h30 en moyenne. S'ensuit une numration de mcanismes ressemblant un enfilage de perles, avec un contresens concernant le seuil des annes 60. Rappelons que la socit franaise a bascul dans le monde urbain bien avant, ds l'entre-deux-guerres : au recensement de 1931, moins de 50 % de Franais rsident la campagne. L'exode rural a commenc prs d'un sicle plus tt. L'lectricit, la tlvision et Internet ont rvolutionn le monde. Mais le prsident de l'IVS parat cependant n'en retenir que du ngatif. Il tait le poids de l'ennui avant l'arrive du son et de l'image anime pour une majorit de Franais. Seuls s'en souviennent aujourd'hui les plus gs. Le travail a chang, apprend-on aussi grce Marine Lamoureux. Le stress n'existait donc pas autrefois : tout n'tait que travail stimulant, panouissant et sans risques, assorti d'indemnits confortables, avec des rapports professionnels excluant tout caporalisme et toute brimade. La journaliste ferme le ban avec des institutionnels. Or ceux-ci confisquent le dbat. Un mdecin gmit parce que notre socit est en privation chronique de sommeil. Mais on ignore quelle conspiration il dnonce. Un ministre instaure une journe nationale du Sommeil le 18 mars. A problmes complexes, conclusions simples : c'est la faute Voltaire...Sur la Toile, une recherche rapide renvoie en l'espace d'un instant des dizaines de sites - personnels ou non - qui rassemblent des informations. Certains proposent des parades, comme la luminothrapie. D'autres se rsolvent aux recettes de grands-mres, aux plantes (passiflore, aubpine, etc.), aux mdecines douces ou parallles, non sans tomber parfois dans le farfelu : massages avec des pierres chaudes, gymnastique zen, incantations diverses ou comptage de moutons. A moins d'avaler des pilules en fin de soire, le problme demeure donc entier, et les matines commencent pniblement. La tlvision accuse de supprimer l'envie de dormir tente dsesprment de secouer son auditoire : Youpi matin !Lorsque l'insomnie devient quasi systmatique, les causes prcdentes n'interviennent qu' la marge. Les personnes affectes gagnent alors consulter un mdecin. Mais il ne s'agit que d'une minorit. A ce stade, il convient de parler de maladie, mme si elle constitue souvent la partie merge de l'iceberg. En restant veille pendant des nuits entires, une personne manifeste ventuellement sa dpression (celle-ci touche trois millions de Franais / Rmy Clment), ses difficults professionnelles ou une vie de couple cahotique. Pour mmoire, les juges aux affaires familiales prononcent chaque anne entre 100.000 et 120.000 divorces, ce total ne prenant pas en compte les sparations [source]. Revenons toutefois aux causes annexes de l'insomnie. La facult de mdecine d'Angers [voir plus haut] indique trois sources : la mauvaise hygine de vie, l'environnement de la chambre coucher (le chauffage par exemple), et les maladies associes. Au fond, la dgradation du sommeil donne des renseignements prcieux sur la population.Un grand nombre de Franais boivent du caf, fument du tabac - la nicotine est un excitant - et consomment chaque anne davantage de mdicaments. Les dners trop copieux retardent l'endormissement ? L'loignement entre domicile et lieu de travail conduit une rduction progressive du djeuner. Le soir, la faim tenaille alors l'estomac au plus mauvais moment de la journe. Encore faut-il rentrer chez soi et prparer le repas. Les trajets s'allongent entre le lieu de travail et le domicile, entre l'cole et la maison pour les enfants. En mme temps, la phase de dplacement pied ou vlo n'augmente pas, bien au contraire. Nul ne peut cependant se passer de sa voiture s'il vit en priphrie d'agglomrations, dans un quartier purement rsidentiel loign de tous commerces et services (Une Poigne de Noix Fraches). La sdentarit se conjugue parfois l'excs d'alimentation, deux fauteurs de trouble reconnus pour le sommeil. Selon les statistiques les plus alarmistes, 14,4 millions de Franais sont en situation de surpoids [enqute Insee 2002 / Source].En attendant, l'lectricit, la tlvision et Internet ressemblent l'arbre cachant la fort... Le mode accusatoire conomise les interrogations sur l'origine des troubles du sommeil ! Ne pas confondre insomnie et inepties.*22 mars 2010. Insomnie et vieillissement. Les Franais dorment mal. Des millions d'entre eux se plaignent d'insomnies rgulires et rptes. Il y a un peu plus d'un an, Geographedumonde s'est pench sur ce problme de sant publique mieux connu grce l'Institut national du sommeil et de la vigilance (Insv). J'ai essay alors d'isoler le symptme, au lieu d'insister sur quelques causes certes incontestables : la sdentarit, l'abus d'crans, ou la consommation d'excitants... Si l'on estime que l'insomnie cote cher la collectivit, il faut admettre que la varit des situations empche d'envisager des solutions toutes prtes. Comme s'il existait quelque part un remde cach jusque l, une lotion remise dans une armoire de grand-mre capable de gurir des millions de malades. Au lieu de replacer ce mal franais dans un contexte plus gnral, la presse suggre que les drangs du sommeil vivraient prcisment en France, et non ailleurs. Je ne reprendrai pas ici l'ensemble de mon argumentaire prcdent [Ne pas confondre insomnies et inepties]. Que rvle le nombre des insomniaques, si ce n'est l'ge moyen de la population ? L'esprance de vie s'accrot en effet, alors que la qualit du sommeil tend se dtriorer. Les activits de la journe peuvent dborder sur la soire et perturber l'endormissement, voire mme provoquer un rveil prcoce. Mais le stress professionnel ne date pas d'hier. En revanche, les temps de trajet augmentent rgulirement, et grignotent le temps libre, rduisant parfois nant les fins d'aprs-midi. Plus on passe de temps dans les transports, moins il en reste pour le coup de feu de la fin d'aprs-midi : enfants prendre en charge, courses ventuelles, travaux mnagers divers, prparation du repas, etc. Bizarrement, ce rythme trpidant de la fin de journe ne trouve pas grce aux yeux des observateurs. Ceux-ci prfrent les causalits directes. Qui jouit de plaisirs frelats en subit les consquences. L'alcool, le tabac et le caf stimulent effectivement le travailleur fatigu. La tlvision et l'ordinateur compltent incontestablement le tableau. J'aurai d ajouter les facteurs psychologiques : les statistiques sur la dpression parlent d'elles-mmes [source]. Agns Santi a repris il y a quelques jours son cheval de bataille, c'est--dire le raccourcissement des nuits, value sept heures en moyenne pendant la semaine (donnes Invs) : une heure et demi de moins qu'en 1960. Cette fois les agresseurs extrieurs n'occupent le devant de la scne que pour introduire les rponses, comme la contre-gurilla rpond la gurilla. Le lecteur suit alors une dmarche par lucidation, l'imitation du gnraliste tablissant son diagnostic. Le malade suppos se piquant de mdecine remplace grce au Monde son mdecin traitant. A l'heure de l'automdication, chacun possde le recul ncessaire, cela va sans dire. Argan a trouv meilleure mthode, en voulant marier sa fille un homme de l'art. ARGAN.- Ma raison est, que me voyant infirme, et malade comme je suis, je veux me faire un gendre, et des allis mdecins, afin de m'appuyer de bons secours contre ma maladie, d'avoir dans ma famille les sources des remdes qui me sont ncessaires, et d'tre mme des consultations, et des ordonnances. /TOINETTE.- H bien, voil dire une raison, et il y a plaisir se rpondre doucement les uns aux autres. Mais, Monsieur, mettez la main la conscience. Est-ce que vous tes malade? / ARGAN.- Comment, coquine, si je suis malade? si je suis malade, impudente? / TOINETTE.- H bien oui, Monsieur, vous tes malade, n'ayons point de querelle l-dessus. Oui, vous tes fort malade, j'en demeure d'accord, et plus malade que vous ne pensez; voil qui est fait. Mais votre fille doit pouser un mari pour elle; et n'tant point malade, il n'est pas ncessaire de lui donner un mdecin. /ARGAN.- C'est pour moi que je lui donne ce mdecin; et une fille de bon naturel doit tre ravie d'pouser ce qui est utile la sant de son pre. [Le Malade imaginaire / Acte I Scne V]On commencera d'abord (premire tape) par s'interroger : est-ce que je ne dors pas bien ? Une fois isol le mal insidieux, on pourra identifier les causes de l'insomnie, souvent multifactorielle (deuxime tape). La journaliste se permet une parenthse mi-chemin. Mfions-nous des sdatifs. Il font dormir, mais perturbent les cycles du sommeil. Il me semblait que des personnes avalent ce genre de mdicament justement pour se prmunir des insomnies ? Jol Paquereau, prsident de l'Invs sollicit par Pascale Santi recommande plutt de tenir un livret du sommeil. A chaque fois qu'un insomniaque ne russit pas s'endormir, il doit consigner par crit la dure de son insomnie. Pour en relever la fin, on suppose que le conjoint devra rester bien veill. Comment feront les clibataires ? Troisime tape, enfin, le malade consulte un spcialiste. Le prsident de l'Invs dirige justement le centre du sommeil Poitiers. L'article s'achve donc sur une batterie de conseils pratiques (problme complexe / solutions simples) runis par Pascale Santi auprs d'une psychiatre prsidente du rseau Morphe. Adieux extravagance et polissonneries. Il faut lutter contre les mauvaises habitudes, comme par exemple regarder la tlvision ou couter la radio au lit avec un plateau-repas ou un ordinateur sur les genoux. [...] Le temps pass au lit doit tre consacr au sommeil. Le lit doit tre le lieu pour dormir et la chambre doit garder ce ct intime, protecteur. [...] Il faut oublier de penser son sommeil, car souvent les personnes s'inquitent de ne pas s'endormir, et vouloir dormir peut tre un stimulant pour maintenir l'veil. Cette ultime observation implique un effort surhumain : ne penser rien de particulier l'heure du coucher. J'admets toutefois que les sujets d'actualit ouvrant sur le nant ne manquent pas en France. En tant qu'enseignant, je m'insurge en tout cas contre la conclusion de Jol Paquereau. Comme pour la nutrition, il faut agir sur la prvention, au niveau scolaire. Peu d'enseignants s'intressent ce sujet. Pourtant, presque tous les enfants se disent fatigus le lundi matin. C'est pourquoi nous recommandons de garder le mme rythme de rveil et de coucher le week-end que la semaine. Je me moque rgulirement de mes tudiants affals sur leurs tables. Leurs rponses varient plus ou moins, mais le fond demeure : la vie commence aprs les cours ! Qu'y puis-je ?Dans La Croix, [Quelles sont les consquences de la diminution du temps de sommeil des Franais ?] le prsident de l'Invs rompt avec les mthodes de la causalit. Jusqu' preuve du contraire, un dner copieux prive les convives de l'envie de dormir et repousse par voie de consquence l'heure du coucher. Jol Paquereau passe outre, associant insomnie et obsit. Il faut frapper les esprits, manifestement : Cette diminution du temps de sommeil a aussi un impact sur lorganisme. Par exemple, elle facilite la prise de poids, car lorsquon dort, il y a une inhibition de la sensation de faim. Aux tats-Unis, des tudes ont montr que le surpoids est en partie li ce phnomne. Des problmes de rgulation mtabolique peuvent aussi se dclarer : le taux de sucre dans le sang augmente. Si le sort s'en mle, un diabte peut mme se dclarer. Contre toute vidence, le spcialiste inverse les facteurs. Ce ne serait plus la corpulence qui rejaillirait sur le sommeil, mais l'inverse. Ainsi, le proverbe populaire s'applique, et le praticien se contente d'une paraphrase. Qui dort dne. La suite s'impose. Qui dort peu mange trop. Concernant les troubles de l'alimentation, parmi lesquels se range l'obsit, on dnombre plusieurs causes, mais pas un seul remde miracle... *1er septembre 2010. Alimentation et phobies alimentaires (derrire la vogue de la nourriture hallal) A la fin du mois de mars 2010, le magazine Usine nouvelle a publi un article instructif sur le march de la nourriture halal. Comme dans dautres articles traitant du mme sujet, lauteur part du principe que chacun connat le sens de ce mot directement tir de la langue arabe. A tort, jy reviendrai. Il pose en outre comme postulat que le march se dveloppe rapidement, au point de reprsenter un chiffre daffaire de quatre cinq milliards deuros [Chiffres Ipsos]. Patrick Dniel sinterroge nanmoins sur ce qui constitue ses yeux lobstacle principal lactivit des industriels. Il nexiste en effet aucune norme de certification unique. Mais le journaliste ne va pas jusqu soulever la question de la cohrence des entreprises concernes. Celles-ci nont visiblement pas attendu la mise en place dun cahier des charges incontestable. Passons. Les producteurs et les distributeurs ont cependant forg leurs propres marques, qui - je le cite - semploient rpondre au dsir des consommateurs musulmans de produits labors et diversifis. Cela tant, les non musulmans peuvent manger de la nourriture halal sans se retrouver immdiatement croyants. Dans le cas prcis de la viande, les enqutes montrent en outre quune partie des consommateurs disent choisir un morceau halal selon un motif non religieux ; elle leur parat meilleure, plus saine, ou plus conforme leur ide dune mort digne des animaux [source]. Faute de norme clairement dfinie, des industriels ont sollicit et obtenu une forme de certification. Ils recourent pour cela aux reprsentants des trois plus grandes mosques franaises : Evry, Lyon et Paris [Mosques, passion franaises]. Ceux-ci dlguent des personnes charges de transmettre leurs exigences en terme de rituels et de recettes. A Mcon (Rhne), labattoir de dindes Corico (43 millions deuros de chiffre daffaires), intervenant historique, travaille avec la mosque dEvry. Nous avons quatre sacrificateurs et un contrleur salaris agrs par la mosque. Celle-ci peut venir faire des contrles quand elle le souhaite. Sur llabor, nous demandons nos fournisseurs dingrdients une certification halal galement valide par la mosque, explique Christine Daron, le PDG. Nous verrons que cette solution prsente de nombreux avantages, mais ne provoque pas l'unanimit.A ct des trois mosques, une cinquantaine doprateurs (associations, socits) se sont rigs en certificateurs, avec des cahiers des charges, des modes de contrle et des modalits financires trs diverses. Il ny a pas de dfinition lgale du halal, donc pas de possibilit dinstaurer un contrle, constate Florence Bergeaud-Blackler, de lInstitut de recherche et dtudes sur le monde arabe et musulman (Iremam) la facult dAix-Marseille. A lInstitut national de la proprit industrielle (Inpi), des dizaines dallgations halal sont dposes, sans cahier des charges prcis. Patrick Dniel se fait lcho des oprateurs, quitte oublier que loffre suscite la demande. Chaque entrepreneur du halal tente de simposer en dnigrant ses concurrents. Le problme ne se situe-t-il pas du ct du Conseil franais du culte musulman (CFCM) cr en 2003 par lancien ministre de lIntrieur et actuel prsident de la Rpublique ? Lorganisation nest pas parvenue imposer une norme valable pour tous les croyants. Selon le journaliste de lUsine nouvelle, lAutriche a ouvert la voie une harmonisation nationale et donnerait ainsi lexemple en la matire. Les autorits autrichiennes auraient mme propos leur propre label aux instances europennes comptentes.Halal signifie licite, permis. Lexpression recouvre donc une ralit la fois tendue et complexe, mais sans rapport avec des notions de qualit ou de got. Le poisson est class comme halal parce quil vit dans la mer. La viande rpond ce qualificatif si lanimal meurt selon un rituel prcis. Tous les musulmans saccordent sur les grandes lignes, mme s'ils discutent sans fin des dtails [source]. Il n'est donc pas surprenant de constater que la vogue du halal dclenche des discussions lintrieur mme de la communaut des croyants. Le portail Al-kanz a multipli ces derniers mois les articles et les commentaires acerbes. Les grandes surfaces accepteraient de vendre des produits conformes, mais en cherchant ne pas se couper de leur clientle traditionnelle [source]. Elles joueraient avec le label [source]. Elles mlangeraient les produits, au risque de pousser le croyant se tromper [source]. Une falsification grande chelle donne de la substance ces accusations. Il s'agit des merguez. La Direction gnrale des fraudes a relev en 2008 des dizaines de cas litigieux, avec une utilisation gnrale de viande de porc [source]. Seulement voil, la grande distribution ici accuse prouve sa bonne volont, voire son souhait de raliser des bnfices avec ses clients musulmans. Ne trouverait-on pas incongru - ou scandaleux - quune ou plusieurs enseigne(s) dcide(nt) de proposer une norme halal ? Le dveloppement du march halal renvoie en ralit au vieux combat entre les gros et les petits. Le fait que les supermarchs prosprent sur les ruines du petit commerce remonte Aux bonheurs des dames [voir sur ce thme cette enqute de l'Insee en Normandie]. Dans les grandes villes, les petites piceries de quartiers tenues par un Maghrbin rsistent mal la concurrence des petites suprettes [exemple]. Mais la disparition des petits commerces nest pas seule en jeu. Et ceux qui sortent des mouchoirs ont la mmoire courte sur l'hygine et les prix pratiqus au temps jadis par le commerant du coin. Lorsquun habitu achte sa viande chez un boucher quil connat parce quil vit proximit, il a confiance en lui et na donc aucune raison de souponner un commerant indlicat. Lexistence dun march du halal tmoigne donc mon sens dune sortie des quartiers regroupements confessionnels. Les enfants ou petits-enfants qui sinstallent ailleurs, dans des zones pavillonnaires par exemple o ils ctoient des non-musulmans, vivent soudain loin de ces commerces rassurants. Ils font alors leurs courses ailleurs. Mme sils ne leur en savent pas gr, les supermarchs leur rendent un grand service ; avec lassurance dtre reconnus diffrents. Dans le rayon halal, non loin du rayon lgumes et fruits bios ou du rayon produits verts leurs aliments labliss paraissent certes aussi anodins que tous les autresLorsquune grande chane annonce louverture de restaurants rapides vendant des hamburgers halal, les mdias font des gorges chaudes [Figaro]. Tout fait vendre, surtout les saintes indignations. On nest pas chez nous sentend et se lit chaque ligne de commentaire. Linterdit alimentaire banalis prouve surtout combien les fast-foods sont populaires. Tout le monde bafouille un menu imprononable devant les mmes comptoirs, se retrouve derrire les mmes tables visses au sol et sous les mmes nons aveuglants. Qui note ce que les uns et les autres retirent avec leurs doigts huileux de leurs botes en carton ? Les fast-foods incrimins uniformisent les consommations. Jaffectionne les contre-pieds et postule donc que la vogue du halal ne signe pas les prmices dun envahissement du monde occidental, mais bien la redoutable dissolution dune communaut dans le bain acide de la banale modernit.