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SCIENCES
&
LETTRES
AU
MOYEN
AGE
et
a
l'poque
DE
LA
RENAISSANCE
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Paris.
Typographie de
Firmin-Didot
et C
ic
rue
Jacob,
56.
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9/684
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LE
ROI
DE NAVARRE,
HENRI
D'ALBRET
,
TROUVANT
LA
MARGUERITE
DANS
LES
JARDINS
D'ALENON.
Miniature
de
Yfnitiatowe instructive en
areUgion
chrestienne.
,
m
s excut
au
m
e
sicle
pour Marguerite
de
Navarre,
et
pouvant
tre
attribu
Geoffroy
Tory: n
(il)
T.
F.
de
la
Bibliothque
de
l'Arsenal
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SCIENCES
&
LETTRES
AU
MOYEN
AGE
ET A L'POQUE
DE
LA
RENAISSANCE
Par PAUL
LACROIX
(Bibliophile
Jacob)
CONSERVATEUR
DE
LA BIBLIOTHEQUE
NATIONALE
DE
I.'aRSENAL
OUVRAGE ILLUSTR
DE
TREIZE
CHROMOLITHOGRAPHIES
EXCUTES PAR
COMPRE.
DAUMONT,
PRALON
ET
WERNEK
ET DE
QUATRE CENTS
GRAVURES
SUR
BOIS
PARIS
LIBRAIRIE
DE FIRMIN-DIDOT ET
C
l
*
IMPRIMEURS
DE L'iNSTITUT
DE FRANCE,
RUE JACOB,
56
1877
Reproduction
et traduction
rserves.
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PRFACE
ows
terminons
enfin
notre
ouvrage
sur le
Moyen
Age
et
la
Renaissance,
par
ce
nou-
veau
et
dernier
volume,
dont
le
vaste
sujet
n'offre
pas
moins d'intrt
que celui
des
trois
volumes prcdents.
Au commencement
du
Moyen
Age,
Ventre
du
V
e
sicle
de notre
re,
les
peu-
ples barbares
se
prcipitent
sur l'ancien
monde
: ces invasions
successives
touffent
en
peu
d'annes la
civilisation grecque
et
romaine;
les tnbres
succdent
partout
Ja
lumire.
La religion
de Jsus-Christ
rsistera
seule
la
barbarie
envahissante
;
les
sciences
et
les
lettres
disparatront, avec
les
arts,
aie
la
face
du monde
,
pour se
rfugier
dans
les
glises
et les
monastres.
CYest
l qu'elles
doivent
se
conserver,
comme
un dpt sacr;
c'est
de
l
qu'ellles
doivent sortir, lorsque le
Christianisme
aura
renouvel
la
socit paemne.
Mais
il
faut
des sicles
et
encorde
des
sicles pour
que les
connaisscances
humaines
soient revenues
au
point
o elles
taient
arrives avantt
la chute
de
l'Empire
des Csars.
Il
faut
aussi
une
socit
nouvelle pouir
de nouveaux
efforts
de l'intelligence
qui
reprend
ses droits;
les coles-,
les universits
se
fondent
sous les
auspi-
ces
du
clerg
et
des
corporations religieuses :
les
sciences et
les lettres
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16/684
PREFACE.
s'chappent
alors
de
leur
tombeau.
L'Europe,
au
milieu
des
conflits
tumul-
tueux
de
la
politique
qui
fait
et
dfait
les
royaumes,
voit
renatre
de
toutes
parts
l'mulation
du
savoir
: les
potes,
les
'orateurs,
les
roman-
ciers,
les
crivains
se
multiplient et
rencontrent
une
sympathie
gnrale
;
les savants,
philosophes,
chimistes et
alchimistes,
mathmaticiens
et astro-
nomes,
voyageurs
et
naturalistes,
se
rveillent,
pour
ainsi
dire,
au
souffle
vivifiant
du
Moyen
Age;
de grandes
dcouvertes
scientifiques,
d'admi-
rables
ouvrages
en
tous
genres
attestent
que le
gnie
des
socits
modernes
n'aura
rien
envier
au gnie
de
l'antiquit.
L'imprimerie
est
trouve
:
devant
ce
foyer
lumineux,
le
Moyen
Age,
qui
a
fini
son
uvre
de
rnovation
sociale,
cde
la
place
la
Renaissance, qui
vient
rpandre
pleines
mains
les
fcondes
et
brillantes
crations
de
l'Art,
de
la
Science
et
des Lettres.
Tel est
le
tableau
grandiose
et imposant,
que
nous
avons
essay
de
retracer,
d'une
manire
synthtique,
sous la
forme
la
plus simple
et
la
plus
vraie,
qui
est
la
fois
narrative
et
descriptive,
sans
nous
garer
dans
les espaces
imaginaires
des
thories
et des
discussions
historiques.
Le
rle
de
l'historien
sincre
et
impartial
se
borne
raconter,
et
si son
opinion
personnelle
s'accuse
invitablement
dans
le
rcit
des
faits
qu'il
prsente
en
dtail
ou en
abrg,
il
ne
doit
pas
chercher
Vimposer
ses
lecteurs par
des
violences
de systme et
par
des
efforts
de
dmonstration
philosophique.
C'est
surtout
l'histoire
du
Moyen
Age qui
a
donn lieu
ces
excs
de
jugements
contraires
: pour les
uns, tout
est
mauvais,
tout
est
blmable
dans
le
Moyen
Age; pour les
autres,
tout
est
bon,
tout
est
admirable.
Nous
n'avions
pas nous
prononcer
entre
deux
extrmes:
nous
racontons,
nous
dcrivons,
en toute
franchise, en toute
sincrit.
Les
lecteurs
sont
l
pour
juger
.
Au reste,
la
plus
grande
partie de
notre
tche
tait
faite;
pour
ce
vo-
lume comme
pour
les
prcdents,
nous
n'avons
fait
qu'analyser
quelques-
uns des
chapitres
de
notre
premier
ouvrage
:
le
Moyen
Age
et
la
Renais-
sance,
en
compltant
toujours,
en amliorant
quelquefois
l'uvre
collective
de
nos
anciens
collaborateurs,
et en
ajoutant
aussi
cette
uvre,
aujour-
d'hui
si
justement
apprcie,
les
chapitres
quelle
ne
contient
pas
et dont
l'absence
regrettable
constate
son
imperfection
relative.
C'est
un
insigne
honneur
pour nous,
cependant,
que d'
avoir
fait
le plan
de cet
ouvrage
malheureusement
inachev
et
d'avoir
dirig
l'excution
d'une
entreprise
littraire
qui
a
mrit
les
plus
honorables
encourage-
ments
et des
loges
presque
unanimes.
Notre
pauvre
ami
Ferdinand
Ser,
qui est
mort
la
peine,
avait
merveilleusement
compris
l'illustration
de
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
17/684
PRFACE.
1
I
ce
livre
magnifique,
o
devaient
tre
reproduits
tant
de
monuments
indits
des arts du
dessin,
et
il a
t
trs-activement,
trs-habilement
second,
dans
son
travail,
par
un de
nos
premiers
dessinateurs
,
M.
Racinet, et
par
un de
nos
premiers
imprimeurs
lithographes,
M.
Lemercier.
Mais
les
temps
taient
durs
alors,
et
aprs
des
prodiges
de
courage
et
de per-
svrance,
il
fallut
s'arrter,
avant d'avoir
tenu
toutes les
promesses du
programme
que
nous
avions
trac, avant d'avoir pu
terminer
une uvre
laquelle
nous
avions
donn
tant
de
soins
et
tant
de veilles
pendant
plu-
sieurs
annes
conscutives.
Le Moyen
Age
et
la
Renaissance
n'a
donc eu
que
cinq
volumes
au
lieu
de
six,
qui
nous
auraient permis
de
parachever
cette
vaste
entreprise.
Il
s'en
est
fallu
de
peu,
toutefois,
que cet ouvrage,
qui
avait veill
bien
deflatteuses
sympathies,
ne
ft
mis
fin,
grce la
puissante
intervention
d'un
des
plus
illustres
reprsentants
de
l
Imprimerie
et de
la
Librairie
franaises
, notre
excellent
et vnrable
ami ,
le savant
M.
Ambroise
Firmin-Didot
,
dont la
perte
rcente
nous
laisse de
si
profonds
regrets.
M.
Ambroise
Firmin-Didot,
qui
la
Science
est
redevable
d'une
foule
de
travaux
remarquables
sur les
arts
et
les
lettres du
Moyen
Age,
entre
autres
l'Histoire
d'Aide
Manuce
,
la Monographie de
l'uvre
de Jean
Cousin,
les
Recherches
historiques sur
la
gravure en bois,
etc.,
eut
la
bonne
pense,
tout
en
rservant
pour
un
avenir
possible
la
continuation
ou
le
complment
du
Moyen
Age et
la Renaissance,
d'y
suppler
provisoirement
par un
ouvrage
destin
un
public
plus
nombreux
que celui
qui
avait
fait
le
succs
de l'ouvrage primitif.
Les
sciences
historiques
ont
fait
des
progrs
considrables
dans les
vingt
dernires
annes ,
me disait M. Ambroise
Firmin-Didot :
il
faut
en
tenir
compte.
Votre
Moyen Age est
un
livre
class
dans les
biblioth-
ques,
et
il
ne
perdra
pas la
place qu'il
s'y est
faite.
Mais vous
deve\ le
refaire
sous une
autre
forme
et
avec de
nouveaux
lments.
J'ai
suivi les
conseils
de ce
guide aussi
sr
qu
expriment
,
et
sous
ses
yeux
attentifs,
sous
son
heureuse
influence,
je
me
suis
attach
faire
un
livre absolument
neuf
en
mettant
contribution
le
livre
original qui
est et qui
restera
ce
qu'il est.
Les
quatre
volumes,
dont
se
compose
main-
tenant
le
nouvel
ouvrage,
sont la
fois
moins
tendus
et
beaucoup plus
complets
que les
cinq
volumes
du
premier. Le
plus grand
nombre
des
bois
qui
accompagnent
le
texte de
ces
quatr~e volumes
et
toutes
les
lithochromies qui
en
sont le plus splendide
accessoire
n'ont jamais
paru
dans l'ancien Moy.en
Age et
ne
le
cdent
en
rien
ceux
de
cette
belle
publication.
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18/684
IV
PRFACE.
Quant
au
texte,
o
j'ai
fait
ample
usage
des estimables
travaux
de
mes
anciens
collaborateurs
(combien,
hlas
ne
sont
plus
l aujourd'hui
pour
recevoir
Vhommage
d'affectueux
souvenir
que
je
me plais
leur rendre ),
je
n'ai pas
manqu de
recourir
des
uvres
excellentes qui
ont
paru
de-
puis
la
publication dupremiir Moyen
Age et
qui
m'ontpermis de
modifier
entirement
quelques-unes
des
parties
de
ce livre.
Ainsi
,
pour
ne
parler
que
du prsent volume, j'ai
revu les
chapitres
Philosophie
et
Universits,
d'aprs
les
beaux
ouvrages
philosophiques
et
histo?~iques de M.
Ch. Jour-
dain;
le chapitre
Romans,
d'aprs
les
dernires tudes
de
M.
Paulin
Paris et
les
importants travaux
de
MM.
Gaston
Paris
et
Lon
Gautier;
le
chapitre
Chants
populaires,
d'aprs
le
Rapport
de
M.
Ampre
au
Comit
des
Socits
savantes, etc.
Si
j'ai
russi
faire
entrer, dans
mon
livre,
quelques-uns
des
renseignements
nouveaux que
me fournissaient
en
abon-
dance
les meilleures
uvres
de mes doctes
contemporains
,
je
me
fais
un
devoir
et un plaisir
de
rapporter
eux seuls
tout
le
mrite
des
emprunts
que
je
leur
ai
faits.
Maison
ne
doit
pas
oublier que chacun
de mes
chapitres
est
une
espce
de
monographie et
que
cette monographie
a
t
souvent
l'objet
d'un ou de plusieurs
ouvrages
spciaux
parfois
trs-compliqus
et
trs-volumineux.
Je
ne pouvais
faire
qu'un
rsum
toujours
succinct et trop
souvent in-
complet
en
rdigeant
un
livre
qui
renferme
tant
de
sujets varis
;
mais
du moins
je
me suis
conform
de mon
mieux aux avis
judicieux
de
mon
digne
ami
M.
Ambroise Firmin-
Didot
,
qui me
rptait
sans
cesse:
Laisse^
aux autres
V
rudition
approfondie
et
minutieuse;
ne
soye\
qu'un
interprte
ingnieux
,
intelligent,
simple
et
naf,
agrable, s'il
est pos-
sible
:
tche{
de vous
faire
lire et
comprendre
par tout le
monde.
Les
grands succs
appartiennent
moins
aux
savants qu'aux
vulgarisateurs.
ier
novembre
1876.
PAUL
LACROIX
(bibliophile JACOB
)
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
19/684
SCIENCES
& LETTRES
AU
MOYEN
AGE
ET
A
L'EPOQUE
DE
LA
RENAISSANCE
UNIVERSITS,
COLES,
COLIERS
Lgende
de la
fondation
de l'Universit
de
Paris,
par Charlemagne.
coles du clotre Notre-Dame.
Origine
du
nom
de
l'Universit.
Organisation
universitaire.
Les quatre Nations
et
les
quatre
Facults.
Le
recteur
et
les
autres
officiers
de
l'Universit.
Les
grands
et
les petits
messagers.
Privilges
de
l'Universit.
Sa
puissance
et sa
dcadence.
Son rle politique.
Cration
des
Universits
provinciales.
Grandes
coles
de
la
rue
du
Fouarre.
Les
collges
de
Paris.
Dsordres
des
coliers.
Leurs
jeux.
Leurs
ftes.
Foire du
Lendit.
Universits trangres.
u
sixime
sicle de
Pre
chrtienne,
les
coles
de
Marseille, d'Autun,
de
Narbonne,
de
Lyon, de Bordeaux
et
de
Toulouse,
qui,
sous
la domination
romaine,
avaient
jet
sur la
Gaule un
si
vif
clat, grce
aux
noms
de
leurs
illustres
matres ou
lves,
les
potes
Ptrone
et
Ausone,
l'historien
Tro-
gue Pompe ,
les
orateurs
Salvien
et
C-
saire,
etc.,
n'taient
plus
qu'un
vague sou-
venir.
Le
rgne de
Dagobert
(638)
vit
s'teindre
les
dernires lueurs
du
gnie
antique.
Le clerg, qui
resta
ds
lors
Tunique
dpositaire
des
connaissances
humaines, se laissait,
son
tour,
envahir
par
les
tnbres
de
l'ignorance,
quand
vint
Charlemagne,
qui
devait ten-
ter
les plus
louables,
les plus
constants
efforts
pour
favoriser,
dans
SCIENCES
ET
LETTRES.
I
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
20/684
SCIENCES
ET
LETTRES.
son
vaste
empire,
une
sorte
de
rgnration
intellectuelle.
Par
ses
ordres,
le
moine
anglo-saxon
Alcuin et
quelques
doctes
clercs
trangers furent
appels
la
cour.
Ce
fut
sous
leurs
auspices qu'il
cra,
dans
son
palais
mme, une
acadmie dont
il
s'honorait
d'tre
membre
et
aux travaux
de
laquelle
il
ne
ddaignait
pas
de
prendre
part.
L'criture,
qui tait
devenue
indchiffrable, fut rectifie; la
langue
latine, qui
cdait
la
place
aux
idiomes
barbares,
fut remise
en honneur;
les
anciens
manuscrits
qui existaient
dans
les
monastres
furent
revus
et
reproduits avec
des soins plus
clairs.
L'enseignement
des sciences
et des
lettres recommena donc
fleurir
dans les coles
ecclsiastiques.
Aussi, bien
longtemps
aprs le
grand empereur,
cette
renaissance
litt-
raire
qu'on lui
attribuait,
et
que la lgende
avait
potise,
lui fit
donner
le titre de
fondateur
et
de
patron
de
l'Universit;
aujourd'hui
encore,, le
front de
saint Charlemagne
reste
couronn
de
l'aurole
pdagogique et
littraire
que
lui dcerna la reconnaissance
de
nos
aeux.
En
ces temps, raconte
Nicole
Gilles, chroniqueur du
quinzime
sicle,
qui
ne fait
que
paraphraser
un
passage
de la
chronique
carlovingienne du
Moine
de
Saint-Gall,
en
ces
temps
vinrent
d'Irlande
en
France deux
moines qui
toient
d'Ecosse,
et qui
toient
grands
clercs
et
de sainte
vie.
Par
les
cits
et par
les
pays
(campagnes), prchoient et crioient qu'ils
avoient
science
vendre,
et que
qui
en
voudroit
acheter
vnt
eux.
Ce
qui
vint
la
connoissance
de
l'empereur
Charlemagne,
qui les
fit
venir
devers
lui
et leur
demanda
s'il
toit vrai
qu'ils
eussent science
vendre
;
lesquels
rpondirent que, voirement, ils l'avoient
par
don de grce
de Dieu, et
qu'ils
toient
venus en
France
pour
la
prter et enseigner
qui la vou-
droit
apprendre. L'empereur leur
demanda quel
loyer (rmunration)
ils
voudraient
avoir, pour
la montrer. Et
ils rpondirent
qu'ils ne voudroient
rien,
fors
(si
ce
n'est)
lieux
convenables
ce
faire
et la substance
(subsis-
tance)
de
leur
corps
tant seulement,
et
qu'on
leur
administrt gens
et
enfants ingnieux pour
la recevoir.
Quand
l'empereur les
eut
ous, il
fut
bien
joyeux
et
les tint avec lui jusqu'
ce qu'il dut
aller en guerre. Et
lors
(alors)
commanda
l'un d'eux,
nomm
Clment, qu'il. demeurt
Paris,
et lui fit donner
les enfants de
gens de tous tats,
les
plus
ingnieux
qu'on
sut
trouver,
et fit
faire
lieux et
coles convenables pour
apprendre,
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
21/684
UNIVERSITS.
3
et
commanda
qu'on
leur
administrt
tout
ce
qui
leur
seroit
besoin,
et
leur
donna
de
grands privilges,
franchises
et
liberts.
Et
de
l
vint la
premire
institution du
corps de
l'Universit
de
Paris,
qui
toit
Rome,
o
auparavant
d'Athnes elle
avoit
t transfre.
Tels
sont
les
faits
qui
furent gnralement admis
comme
incontestables
Fig.
i.
Grande initiale, dessine
la
plume
(fin
du
xv
e
sicle),
reprsentant
des
types
d'coliers,
dans
un
des
registres
manuscrits
de la
Nation d'Allemagne.
Archives
de
l'Universit.
pendant
plus
de
huit sicles,
c'est--dire
jusqu'
ce
que
le
savant
Etienne
Pasquier
(1564),
en
dfendant
avec
ardeur,
mais
avec
impartialit,
les
an-
ciens
privilges
de
l'Universit de
Paris,
eut
dmontr,
de
concert
avec
l'avocat
Loisel
et
l'historien
Andr
Duchesne, que
ces
glorieuses
traditions
ne
reposaient sur
aucun
fondement
historique.
A
la
vrit,
il
ne
tint
pas
d'autres
savants
non
moins distingus, aux
Du
Cange,
aux
Mabillon,
aux
gasse du
Boulay,
aux
Crevier,
que l'origine
lgendaire
de
l'Universit
ne
reprt
dfinitivement
place
dans
l'histoire
;
mais
l'rudition
ayant
dit
son
dernier
mot,
part
toute
question de
patriotisme,
il
fut
reconnu
et
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
22/684
4
SCIENCES
ET
LETTRES.
avr
que
les
tablissements
acadmiques ou
scolaires
de
Charlemagne,
comme
beaucoup
d'autres
crations
de
son
gnie
universel,
ne
survcurent
pas
la
volont
puissante
qui
les
avait
fonds,
et
que
les
clbres
coles
de
Paris
naquirent
et se
dvelopprent
sous
l'influence
immdiate
de
l'glise.
Quant
l'tymologie
du
nom
de Y
Universit,
il
faut la
chercher
dans
le
sens
du
mot latin
universitas,
qui,
au moyen
ge,
reprsentait
une
ru-
nion,
une
catgorie
de
personnes.
Ainsi,
dans
les
actes
et
mandements
publis
au nom
des
coles
de
Paris,
on employait
la
formule
ordinaire
:
Noverit
universitas
vestra
(c'est--dire
: Sachez
tous
tant
que
vous
tes
),
et
cette formule,
qui
s'appliquait
tous
les
protocoles,
figurait
aussi
en tte
de tous les
diplmes
mans
des matres et
adresss
aux
lves.
On com-
prend
que le
mot
universitas,
prenant peu
peu
un sens
spcial
ou
res-
treint, finit
par
dsigner
particulirement
l'Universit
ou
la
totalit
des
tudiants,
puis
l'institution
universitaire
elle-mme
que
formaient
ces
tu-
diants, et,
enfin,
le vaste
quartier
de
la
ville
qui leur
tait
presque
exclu-
sivement
rserv sur
la
rive
gauche de la
Seine.
Les
annales
de l'Universit
de
Paris ne
sauraient
pourtant
remonter
au-del des
cours
publics
de
Pierre
Abailard,
cette
grande
et
sympa-
thique
illustration
qui demeura
si
vivement
empreinte
dans
la
mmoire
populaire.
Lorsqu'en
1
107
le jeune
et
infortun
docteur
vint
pour
la
pre-
mire
fois
dans
la
capitale
pour
y
complter ses
tudes,
l'cole
tait
encore,
pour ainsi
dire,
pendante
au
giron de l'glise.
C'tait
dans
le
clotre
de
Notre-Dame
qu'enseignaient
les
habiles
matres
Guillaume
Cham-
peaux
et
Anselme
de
Laon,dont
il
suivit
d'abord
les leons,
et
qu'il
devait
bientt
surpasser
l'un
et
l'autre. Cinquante ans
plus tard,
on
voit
appa-
ratre
dj
le
berceau
de
l'Universit, car Henri
II,
roi
d'Angleterre,
pro-
posait de
soumettre
le
diffrend
qui
s'tait
lev
entre
lui
et
Thomas
Bec-
ket, vque
de
Cantorbry,
l'arbitrage des coliers
des
diverses
nations,
tudiant
Paris.
Ce
tmoignage
d'estime
et
de
dfrence
l'gard
des co-
liers
de Paris
caractrise
d'une manire notoire
la
rputation
et le crdit
dont
jouissait,
cette
poque,
non-seulement
en
France,
mais encore
en
pays
tranger,
leur
universit
cosmopolite.
En
1200,
un
diplme
de
Philip-
pe-Auguste,
dat
de
Bthisy,
dans
lequel
se
trouve,
en quelque sorte,
le
fondement
des
privilges de
l'Universit,
nous
montre
cette
nouvelle insti-
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
23/684
UNIVERSITS.
5
tution
fonctionnant
sous
un
chef,
dont
l'immunit,
ainsi
que
celle
de
tous
ses
membres,
est
solennellement
garantie
vis--vis de
la
justice
laque.
Fig.
2.
Sceau
de
la
Nation
de
France.
Fig.
4.
Sceau
de
la
Nation
d'Angleterre.
xiv
sicle.
xiv
e
sicle.
Fig.
3.
Contre-sceau de
la
Nation
de France.
Fig.
5.
Contre-sceau
de
la
Nation
d'Angleterre
xiv
e
sicle.
xiv
e
sicle.
(Tirs
de
la collection
sigillographique
des
Archives
nationales.)
Enfin,
en
1260,
le
corps
universitaire
se
prsente
muni de
tous
ses
organes
constitutifs et parvenu
son
entier
dveloppement.
Il
faut
donner ici
une
ide
sommaire
de
cette
organisation
ingnieuse
et
complexe,
d'aprs
les
recherches
de
Vallet
de
Viriville
et
celles du
savant
M.
Charles
Jourdain,
le
dernier historien
de
l'Universit
de
Paris.
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
24/684
SCIENCES
ET
LETTRES.
Ds
le
principe,
une
division naturelle
s'tablit
entre
les-jeunes
gens,
que la
renomme
des
grandes
coles
parisiennes
y
faisait
affluer
de
tous
Fig.
6.
Sceau
de
la
Nation
de
Normandie.
Fig.
8.
Sceau
de
la
Nation
de
Picardie.
xiv
e
sicle.
XIV
c
sicle.
les
points
de
la
chrtient.
Les
coliers
se
grouprent
par
nations,
et
ces
groupes
ayant
adopt,
par
analogie de
langue,
d'intrt,
de
sympathie,
une
forme
plus
rgulire,
il
n'y
eut
que
quatre
Nations,
ainsi
dsignes
:
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
25/684
UNIVERSITS.
7
celle
de
France
(fig.
2
et
3),
celle
C
Angleterre
(fig.
4
et
5),
celle
de
Nor-
mandie
et celle
de
Picardie
(fig.
6
9).
La
Nation
de
France se
compo-
sait de cinq Tribus,
qui
comprenaient
les
vchs
ou
provinces
mtropo-
litaines de
Paris, de
Sens, de
Reims
et
de
Bourges
(fig.
10
i3),
et tout
le
midi de l'Europe, en sorte
qu'un
Espagnol
et un
Italien,
qui venaient
tudier
Paris, taient
compris
dans
la
Nation de
France.
La
Nation
Fig.
10.
Sceau
de
l'Universit de
Reims
(i
568)
.
l'Universit
de
Reims
(
1
568
)
.
(Tirs de
la
collection
sigillographique des
Archives
nationales.)
d'Angleterre,
qui
se
subdivisait
en deux
Tribus,
celle
des insulaires
et
celle
des
continentaux,
embrassait
toutes
les
contres
du Nord
et de l'Est,
tran-
gres
la
France.
Mais
quand un
violent
antagonisme
se fut
dclar entre
les deux
peuples
que
spare le
dtroit
de la
Manche,
le nom
d'Angleterre
tant
devenu un
objet
d'excration
gnrale
pour
les
Franais,
la nation
universitaire,
qui
depuis
plus
d'un sicle
avait
port
ce
nom-l,
prit
celui
de Nation
d'Allemagne,
nom
seul employ dans
les actes
publics,
dater
de
la
rentre
de
Charles VII
Paris, en
1437
(fig.
1).
La Nation
de
Normandie
n'avait qu'une
seule
Tribu,
correspondant
la
province
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
26/684
8
SCIENCES
ET
LETTRES.
qui
portait ce
nom;
la
Nation
de
Picardie,
au
contraire,
en
avait
cinq,
reprsentant
les
cinq
diocses
de
Beauvais, de
Noyon,
d'Amiens,
de
Laon,
et
des Morins
ou de
Trouanne.
Les
quatre
Nations
runies
constiturent
d'abord
Y
Universit
des
tudes;
plus
tard
une nouvelle
division s'tablit,
selon
l'ordre
des tudes
de
chaque
Nation,
et
les Facults
prirent
naissance. Ds lors,
la
distinction
de
Na-
Fig.
12.
Sceau
de l'Universit
d'Aix
en
Provence.
xvi
e
sicle.
Fig.
i3.
Grand sceau
de
l'Universit
de
Bourges.
xv
c
sicle.
(Tirs de
la collection sigillographique
des
Archives
nationales.)
tions
ne
subsista
plus que
dans
la
Facult
des
Arts,
dnomination
qui
comprenait la grammaire,
les
humanits
et la
philosophie,
telles
qu'on les
enseignait dans les coles.
Envisags
un
autre
point
de
vue,
les
arts dits
libraux
embrassaient
le
trivium,
c'est--dire
la
grammaire,
la
rhtori-
que
et
la dialectique, et
le
quadrivium, c'est--dire
l'arithmtique,
la
go-
mtrie, la
musique et
l'astronomie.
Quand on
considre
la place
que
l'glise
occupait
dans
la socit
du
moyen ge, on ne
s'tonnera pas
que
l'enseignement
religieux
se
soit
con-
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
27/684
UNIVERSITS.
9
stitu
de
bonne
heure, et
qu'il soit
devenu
l'objet
mme
d'une facult
sp-
ciale, la Facult
de
thologie. Quand
plus tard
apparurent les
ordres men-
diants, fonds
par
saint Dominique
et par
saint
Franois, les
anciens
Fig.
14.
Une
cole
de moines
mendiants;
le
chtiment
des
verges.
Miniature
du
ms.
n*
21252
de
la
Bibliothque
de
Bourgogne
Bruxelles. xv
e
sicle.
matres en thologie
et
ceux
de
la
Facult
des
arts
refusrent
d'abord
d'en-
trer
en
concurrence
avec les
nouveaux
venus
;
mais ils
y
furent
contraints
par
saint
Louis
et par
le pape
Alexandre
IV,
et
Futile
coopration
de
ces
SCIENCES ET
LETTRES.
2
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
28/684
10
SCIENCES
ET
LETTRES.
auxiliaires
qu'elle
avait
d'abord
repousss
tourna bientt au profit
et
la
gloire
de la
Facult
de thologie
(fig.
14).
En
1 t
5
1
,
un
clerc de
Bologne, nomm
Gratian,
ayant
runi en
un
seul
corps,
sous
le
titre
de
Dcret,
les dcisions
anciennes et
nouvelles de
l'autorit
ecclsiastique,
qui
composaient toute la
jurisprudence cano-
nique,
le pape Eugne III
approuva
cette
compilation
et en ordonna ren-
seignement
dans
toute la
chrtient. Telle
fut l'origine de la
Facult
de
Dcret,
qui
n'tait
d'abord
qu'un
dmembrement
de
la Facult de Tho-
logie.
Vers
le mme
temps, les
Pandectes
de
l'empereur
Justinien,
dcou-
vertes
Amalfi,
en
Calabre, ajoutrent
une prcieuse source
de
documents
l'tude du
droit,
laquelle n'avait
pas
auparavant d'autres
bases que le
code
Thodosien,
les lois
barbares
et
les
capitulaires des rois de France.
Par-
tout
les
travaux
des
jurisconsultes
se ranimrent, et notamment
dans
l'Universit
de Paris;
cependant
le droit
civil
n'y prit sa place, que
beau-
coup plus tard,
ct
du
droit
canon. Plusieurs
papes,
considrant la
jurisprudence profane ou
sculire
comme
inutile,
sinon
contraire
la
jurisprudence
ecclsiastique,
publirent
des bulles pour
inviter
les coliers
n'apprendre
que
le
droit
canonique.
C'est aussi
vers la fin
du
douzime
sicle que
l'enseignement
de la
mde-
cine
semble
avoir
commenc
aux
coles
laques
de
Paris. Jusque-l,
les
clercs
et surtout les religieux, qui
seuls
possdaient
l'instruction
ncessaire
pour s'adonner aux tudes mdicales,
en
taient
aussi les seuls matres
;
mais
la
discipline
ecclsiastique
ne
tarda
pas
contrarier et mme
inter-
dire ces
tudes,
comme
elle l'avait
fait
pour le droit civil. Une Facult de
mdecine eut donc beaucoup
de
peine
s'tablir
dans
l'Universit. Il
est
vrai
que
la
mdecine,
cette science de faits
et d'observations,
ne
pouvait
gure
raliser de srieux progrs,
au
milieu
des
prjugs
de
toute espce et
sous
l'aveugle
autorit
des
catgories,
des formules
et des
mthodes empi-
riques
qui envelopprent si longtemps
la
pdagogie
universitaire. La
Facult
de mdecine
de Paris
ne
pouvait
donc
prtendre
dtrner les
clbres
coles de
Salerne et
de
Montpellier, qui
conservaient
le
dpt
des
connaissances
mdicales
de
l'antiquit
telles
que les
Grecs
et
les Arabes les
avaient
transmises au moyen
ge.
Les
trois
Facults nouvelles
cres
dans l'Universit
demeurrent
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
29/684
UNIVERSITS.
subordonnes,
malgr
leurs
accroissements
successifs,
la
Facult
des
Arts
(fig. i5);
le
corps
des
quatre
Nations,
qui
composaient
cette
der-
nire
Facult,
lui assurait
une
prpondrance
vidente,
avec
le
maintien
de
certaines
prrogatives
essentielles.
Ainsi
chaque
Nation
lisait
un pro-
cureur,
et
chaque
Facult
un
doyen.
Le mode
d'lection
des
procureurs et
le
terme
de leurs
fonctions
variaient,
toutefois,
suivant
les
Nations.
La
Fig.
i5.
Sceau
des
quatre
Nations ou
Facult
des
Arts, xvi
sicle.
Bibl.
nat.
de
Paris. Cab.
des
mdailles.
Facult
des
Arts
comptait
quatre
procureurs.
La
Facult
de
thologie,
indpendamment
de son
doyen,
qui
devait
tre
le docteur
sculier
le
plus
ancien
en
grade,
choisissait,
tous
les
deux
ans,
un
syndic
charg de
l'admi-
nistration
des
affaires
particulires
de
sa
compagnie.
Quant
la
Facult
de
Dcret,
elle
n'avait
qu'un
doyen
d'ge ou
d'anciennet
dans
le
grade
de
doc-
teur,
et
la
Facult
de
mdecine,
un doyen
lu
tous
les
ans
parmi
les
docteurs
en exercice.
Doyens et
procureurs,
au
nombre
de
sept,
formaient
le
tribunal
suprieur
de
l'Universit.
La
Facult
des
Arts
avait
donc,
elle
seule,
dans
ce
tribunal,
une
part
quadruple
de
reprsentation,
et
disposait
de la
majo-
rit
des
suffrages.
Elle
s'tait
attribu,
en
outre,
le
privilge
exclusif
de
nommer le
recteur
ou
chef
suprme
de
l'Universit,
lequel
ne
pouvait
tre
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
30/684
1 2
SCIENCES
ET
LETTRES.
lui-mme
pris
que
dans
son
sein
(fig.
16).
Elle
seule, enfin,
avait
la
garde
du
trsor
des
archives,
l'administration
du
Pr-aux-Clercs,
et
la
nomination
ou
la
prsentation
de
tous
les
suppts
ou officiers
universitaires
non
lectifs.
Dans
l'origine,
le
recteur
lu
ne restait
en
charge
que
pendant
six
Fig.
16.
Recteur
et
docteur de
TUniversit de
Paris,
d'aprs
une
miniature de
la Cit
de
Dieu.
xv
e
sicle.
Ms. de la
Biblioth.
nat. de Paris.
semaines
environ
;
au
treizime
sicle,
la
dure de
ses
fonctions fut
tendue
trois
mois, et,
vers la
fin
du
quinzime
sicle, le
rectorat
devint
annuel,
de
fait, sinon
de
droit. Les
procureurs
des
Nations
(fig.
1
7)
avaient
t d'abord
investis
du
droit
de
choisir
le recteur; mais
des
brigues
scandaleuses
s'tant
produites
l'occasion de ce
droit, les
Nations
nommrent
quatre lecteurs
spciaux,
qui,
avant
de procder
l'lection,
prtaient
serment de faire
un
choix honorable
et
utile
l'Universit.
Le recteur,
la dignit
duqueltaient
attachs de grandes
prrogatives,
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
31/684
UNIVERSITS.
i3
exerait
sur
toutes
les
coles
une
juridiction
souveraine,
et
ne
reconnaissait
point
d'autorit
suprieure
la
sienne
sur
le
territoire
de
l'Universit.
Sou-
vent
appel
en
personne
au
Conseil
du
roi,
il
marchait
de
pair
avec
l'vque
de
Paris
et
le
Parlement,
dans les
crmonies
publiques.
Il
donnait
tous
les
coliers,
comme
tous
les
matres,
les
lettres
ou
diplmes
qui
leur
conf-
raient
les
privilges
de
leur
grade et
recevait
d'eux
leur
serment
d'ob-
dience
passive,
quelque
dignit
qu'ils
pussent
parvenir,
serment
qui
Fig. 17.
Matre
Jean de
Vandeuil,
procureur
de la
Nation de
Picardie,
xv
sicle.
Miniature
du
registre
manuscrit
n
11
(1476-
1483).
Archives
de
l'Universit.
emportait
de
srieuses
consquences.
Il
nommait
tous
les
offices
de
l'Universit;
il
clbrait ou
plutt
faisait
clbrer
son
avnement,
comme
sa sortie
de charge,
par
une
procession,
laquelle
il
invitait,
indpen-
damment
de
tous
les
suppts
ou
officiers
universitaires,
les
communauts
religieuses,
qui
rsidaient
dans
l'tendue
de
sa
juridiction.
En
141
2,
raconte le
chroniqueur
Jouvenel
des
Ursins,
lors
d'une
procession
solen-
nelle
de
l'Universit
l'abbaye
de
Saint-Denis,
pour
conjurer
les
malheurs
del
guerre, le
cortge
tait
d'une
telle
longueur,
que
la
tte
de la
procession
entrait
dans
la
ville de
Saint-Denis,
alors
que
le
recteur
se
trouvait
encore,
au
couvent
des
Mathurins,
dans la
rue
Saint-Jacques.
Aprs le
recteur,
il
y
avait,
immdiatement
au-dessous
de
lui,
le
syn-
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
32/684
H
SCIENCES
ET
LETTRES.
die,
appel
aussi
procureur,
promoteur
ou
procureur
fiscal,
lequel
tait,
vrai
dire,
l'administrateur
gnral
de l'Universit,
et
qui
pouvait
seul,
en
certaines
occasions,
contre-balancer
la
prpondrance
du
recteur.
Fig.
18.
Courrier
suisse,
d'aprs
une
statue
conserve
l'htel
de
ville
de Ble.
xv sicle.
Le
trsorier
avait
la
gestion
financire
des
revenus
et des
dpenses
de
l'Universit.
Les
dpenses
taient
considrables;
les
revenus compre-
naient,
outre
la
taxe
scolaire,
exige
de
tous les
coliers,
une
multitude de
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
33/684
UNIVERSITS.
i5
legs
et
de
fondations
charitables, le
produit
annuel du
Pr-aux-Clercs et
celui
des
messageries.
Le
greffier,
secrtaire ou scribe,
tait
charg de
tenir
la plume, de
lire
aux
assembles
les pices communiques
et de garder
dans
ses
archives
les
registres
de
l'Universit, dont
quelques-uns
seulement ont
t
conservs.
On
appelait
grands
messagers certains
bourgeois
notables
de
Paris,
Fig.
19.
Bedeau
de
l'Universit.
Jean
Lequeux,
messager de
Guise
en
Thirache,
au
diocse
de Laon.
Miniature
du registre
manuscrit
n 11
(1476-1483).
Archives de
l'Universit.
qui,
tablis
dans la
capitale
et
ne s'en
loignant
jamais,
servaient
de
correspondants
aux
coliers venus
de
diffrentes
provinces
de
France
et
de
divers pays
de l'Europe.
Accrdits
par les
familles
de
ces
coliers,
asserments prs l'Universit,
ils taient exempts
du service
de la
garde
urbaine et
jouissaient
des autres
immunits
universitaires.
Ils
devaient
fournir aux
tudiants,
moyennant
caution
pralable,
l'argent
dont ceux-ci
auraient besoin.
Le nombre de ces
grands messagers
tait
limit
de
telle
sorte
qu'il
y
en
eut un seul
pour
chaque diocse.
Ils
runissaient
sous
leurs
ordres,
mais
sans nombre
dtermin,
des
petits
messagers
ou
simples
fac-
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
34/684
i6 SCIENCES
ET
LETTRES.
teurs, qui
taient sans
cesse
par
voie
et
par
chemin, portant
et reportant,
de
Paris
l'extrieur
et
de l'extrieur
Paris,
les
lettres missives
et
autres
envois relatifs aux coles
et
aux
lves.
Il
faut
voir,
dans cette
organisation primitive,
l'origine de
la
Poste
aux
lettres
et
des
Message-
ries,
qui
ont
t
depuis leves
l'tat
de
services publics, la Poste, par
Louis
XI,
les Messageries,
par Louis
XIV (fig. 18 et
19).
L'Universit
avait encore ses bedeaux, nomms
aussi
sergents,
mas-
siers ou
appariteurs,
au
nombre
de
quatorze;
chaque
Nation
et
chaque
Facult
en
nommait
deux,
un
grand
et unpetit.
Le
recteur se
faisait ordi-
nairement
prcder
des
deux
bedeaux
de
la Nation laquelle
il appar-
tenait
lui-mme.
Ces fonctionnaires,
destins originairement
un
service
de
sret ou de crmonie, finirent
par
prendre la plume dans les
actes publics
et
par
devenir
des personnages
demi-serviles
et
demi-littraires
(fig.
19).
A
ces
officiers,
grands
et petits, il faut
ajouter
les deux
chanceliers,
dpendant des glises de Notre-Dame
et
de Sainte-Genevive, les deux
conservateurs des privilges de
l'Universit
:
l'un,
conservateur
royal,
n'tait autre
que le
prvt
de
Paris, qui, lors de son installation,
devait
s'engager
par serment
respecter
et
maintenir
les
droits
de
l'Uni-
versit;
l'autre,
conservateur apostolique,
tait
choisi
entre
les
trois
vques
de
Meaux, de
Beauvais
et
de Senlis.
Les
titres qualificatifs,
que
portaient
les
suppts
ou
officiers suprieurs
et
subalternes de
l'Universit, ne
tenaient
qu'
leurs
fonctions tempo-
raires.
Ces
titres-l
taient absolument
distincts et
indpendants
des titres
de
scolarit, grades ou degrs, qu'il fallait acqurir,
en
justifiant
d'une
somme
de savoir
plus
ou
moins
grande.
Avant
le treizime
sicle,
il n'y
avait
videmment
que
deux
degrs
dans
le
corps
universitaire
:
celui
des
coliers
et celui des matres.
Quiconque
se
sentait assez habile
ou
assez
hardi
pour
affronter les
hasards d'une
audition publique,
ouvrait
cole;
le
succs rcompensait souvent son audace.
Remarquons
que
,
ds
le
temps
d'Abailard,
les
adversaires de
cet
loquent docteur
lui
repro-
chrent de
s'tre fait
lui-mme, de sa propre
autorit,
matre
en
thologie.
Une
fois
l'Universit
institue, il
y
eut trois
grades
auxquels
les
coliers
devaient aspirer successivement. Le premier,
celui
de
bachelier,
tirait
indirectement
son nom,
suivant
quelques
tymologistes,
du
mot
latin ba-
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
35/684
UNIVERSITS.
17
culum
(bton
et,
par
extension, toute
arme
de
main),
par
allusion
aux
dif-
frents exercices
qui
prludaient
l'ducation
militaire
de
la
jeune
noblesse.
Les
plus anciens bacheliers furent les
bacheliers
s
arts.
Aprs
avoir
bien
tudi
son
trivium,
l'aspirant
au
baccalaurat
dterminait
,
c'est--dire
subissait
un examen
et
soutenait
des disputes
sur
la
grammaire,
la
rhto-
SC1ENCES
ET
LETTRES.
3
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
36/684
r8
SCIENCES
ET
LETTRES.
rique
et
la
dialectique.
Ces
disputes
avaient
lieu
solennellement,
Tune
avant
Nol,
les
autres
pendant le
carme.
Le
candidat,
s'il avait
fait
preuve
d'une
instruction
suffisante,
obtenait
le
triple
privilge:
i
de
porter
la
chape ronde,
insigne distinctif
de
son grade;
2
d'assister aux
messes des
Nations
;
3
de
commencer
es
arts, c'est--dire d'enseigner,
son
tour,
sous
la
direction et la surveillance d'un matre. Le bachelier, menant de
front
l'tude
et l'enseignement, expliquait les livres
d'Aristote
sur la
logique, la
philosophie
naturelle,
la
mtaphysique et la
morale;
et
quand
il croyait
bien
possder
tous
ces
ouvrages
qui
nous
font
aujourd'hui
reculer
par
leur
obscurit,
il s'adressait
l'autorit ecclsiastique
pour
obtenir d'elle la
licence. Le droit de
confrer
ce second
grade
universitaire
fut d'abord
par-
tag
entre
l'vque
de Paris et l'abb de Sainte-Genevive,
souverains
spirituels
du
territoire
scolaire; il resta,
par
la suite,
attribu
presque
exclusivement au chancelier
de Notre-Dame,
comme dlgu de
l'vque.
Le licenci, une fois
approuv
par
l'glise,
revenait
devant
les
matres
de
la
Facult des
Arts,
pour recevoir de
ceux-ci,
avec une
pompe
nouvelle,
le troisime
grade,
c'est--dire
le bonnet
et
les
autres
insignes du
doctorat,
qui lui
donnait
le titre
de
matre
es
arts.
Dans les
Facults
suprieures,
ainsi qualifies
parce que la Facult
des
Arts
servait,
en quelque
sorte, d'introduction
aux
Facults
de
Thologie,
de Dcret et de
Mdecine,
les
choses se
passaient peu
prs
de mme,
si
ce n'est que ce
troisime
grade
ou
degr, qu'on n'obtenait
pas, dans
lesdites
Facults,
sans
avoir
soutenu
en
public
une
thse longue
et difficile,
tait plus
spcialement
accompagn du
titre
de
docteur (fig.
20).
L'Universit
de
Paris, comme
toutes
les institutions
qui devaient
durer
et
prosprer,
s'tait place sous l'gide paternelle de l'glise et
de
la
Royaut. Aussi, la gnreuse
assistance du
pouvoir
temporel et l'appui
tutlaire
du pouvoir spirituel ne
lui
firent
jamais dfaut.
Le
Saint-Sige
aimait et encourageait chez elle la
voix
loquente
de la France, qui,
depuis
le rgne
de Clovis,
converti par
sainte Clotilde, avait
mis
au service
du
catholicisme
et
de
la
papaut
toutes les forces, toutes les influences
de
son gnie et
de son caractre national. Les
rois
de
France n'aimaient
pas moins,
n'apprciaient
pas
moins
l'Universit, qui
leur
offrait,
pour
la
capitale du
royaume, une source
de richesse
et
d'honneur;
pour
leur
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
37/684
UNIVERSITS.
'9
Conseil,
une
rserve
d'hommes
d'tat
minents;
pour
leur
politique
et
leur
diplomatie,
une
ppinire
de
sujets
distingus
et
capables.
Souve-
rains
pontifes
et
rois
favorisaient
donc
l'envi,
chacun
dans
la
mesure
de
ses
propres
intrts,
cette
fconde
et
puissante
institution,
qui
nan-
moins,
en
quelques
graves
circonstances,
reconnut
bien
mal
les
bien-
faits
dont elle
avait
t
comble
par
ses
augustes
protecteurs.
L'histoire
de
Paris
est
remplie
d'pisodes
singuliers,
trop
souvent
tra-
giques,
qui
accusent
l'esprit
turbulent
et
sditieux
des
coliers
de
l'Uni-
versit.
Cette jeunesse
folle
et
indiscipline
se
permettait
tout,
sous le
bnfice
de
l'espce
d'inviolabilit qu'elle
devait
l'affection
aveugle et
gn-
reuse
de
ses
patrons
religieux et
laques.
L'Universit
donnait
elle-mme,
ses coliers,
l'exemple
de
cet
esprit
de
rvolte,
ds
qu'il
s'agissait
de
dfen-
dre
la
moindre
de
ses
prrogatives.
Elle
avait
alors
trois
moyens
de
reven-
dication,
ou,
comme
le dit
son
historiographe
officiel,
gasse
du
Boulay,
trois
remdes
contre
les
infractions
ses
privilges.
Si
la
violation
venait
du
pouvoir
sculier,
elle
en
rfrait
directement
au
roi,
attendu que sa
juri-
diction
ressortissait
immdiatement
au
pouvoir
royal.
Si
elle
avait
se
plaindre
de
l'autorit
ecclsiastique,
elle
envoyait
Rome
mme
une
ambassade,
choisie
parmi
ses
docteurs,
lesquels avaient
souvent
la
chance
de
retrouver
en la
personne
du
successeur
de saint
Pierre
la
sympathie
d'un
ancien
condisciple,
li
d'ailleurs
immuablement
leur
association
fraternelle
par
le
serment
qu'il
avait
prt
comme
gradu
de
l'Universit.
Le
pape
se
refusait-il
donner
satisfaction
la
requte
que
lui
adressait
l'Universit,
celle-ci
en
appelait
l'glise
universelle
et
au
futur con-
cile.
Elle
avait
enfin
une
dernire
ressource,
qu'on
pourrait
appeler
l'excommunication
universitaire.
En
pareil
cas,
la
cessation
gnrale
des
tudes
tait
ordonne
par
son
recteur et
ses hauts
dignitaires
:
on
suspen-
dait
subitement
toute
lecture,
tout
enseignement
public. Les
matres
et
les
docteurs
en
thologie
s'abstenaient de
monter
en
chaire
dans
les
glises.
La
vie
intellectuelle,
morale et
religieuse
de la
capitale
tait
comme
sus-
pendue.
Si
la
crise
persistait,
les docteurs,
rgents
et
bacheliers
des
quatre
Facults
fermaient
toutes
leurs
coles et
menaaient
d'migrer
en
masse,
entranant
aprs
eux
toute
une arme
de
suppts
et
de
clients,
qui
formaient
plus d'un
tiers
de
la
population
parisienne.
Il
n'y
avait
pas
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
38/684
20
SCIENCES
ET
LETTRES.
de
puissance
qui,
au
treizime
sicle,
ft
capable
de
rsister
longtemps
cette
protestation
inflexible
et
muette.
En
1221,
par
exemple,
l'Universit,
qui avait
se
plaindre,
pour
quel-
que
excs
d'autorit,
de
l'vque
de
Paris,
son
justicier
ordinaire,
ferma
ses
coles
pendant
six
mois.
En
1225,
dans
une
circonstance
analogue,
le
lgat
du
pape
se
vit
assailli,
dans
sa
maison,
par les
coliers
en
armes,
qui
blessrent
plusieurs
de ses
gens
et
qui
l'eussent
maltrait
lui-mme,
s'il
ne
s'tait
ht
de
s'enfuir.
A
la
fin
du carnaval
de
1228,
la
reine
Blanche,
qui tait
rgente
pendant
la
minorit de
son
fils
Louis
IX,
fit
punir
rigou-
reusement
des
coliers,
qui,
en
tat
d'ivresse,
avaient
caus
de
sanglants
dsordres,
au
bourg
Saint-Marcel
(faubourg
Saint-Marceau).
L'Uni-
versit,
aprs
avoir
inutilement
adress
au
roi
des
remontrances,
congdia
les
matres
et
les
coliers,
laissa
pour
deux
annes
la
capitale
en
interdit,
et n
consentit
reprendre
le
cours
normal
de
l'enseignement,
qu'aprs
avoir
arrach
au
pouvoir
royal
les
rparations
qu'elle
exigeait
(fig.
2
1).
Toutefois,
il
faut
bien
le
reconnatre,
l'Universit
n'achetait
de
sembla-
bles
victoires
qu'aux
dpens
de ses
privilges
et
au
prjudice
de
sa
propre
existence
;
car
les
matres,
disperss
et l
pendant
la
fermeture
des
coles,
aidaient
souvent
la
fondation
d'universits
rivales
dans
les
villes
o
ils
taient
venus
rsider
temporairement,
et
o ils se
fixaient
pour
toujours.
En
outre,
ces
temps
de
lutte
et
de
perturbation
tournaient
au
profit
des
autres
corps
enseignants,
qui
s'empressaient
d'ouvrir
des
coles,
de
crer
des
chaires,
et
qui
souvent
obtenaient,
de
l'autorit
spiri-
tuelle
ou
temporelle,
la
faveur
d'tre
admis,
par
l'effet
d'une
bulle
ou
d'une
ordonnance,
dans
l'Universit
elle-mme.
C'est
ainsi
qu'en
i25y
les
Dominicains,
soutenus
par
le
roi
Louis
IX,
qui tait
leur
lve,
et
par
les
papes
qui
avaient
t
leurs
confrres,
pntrrent
de vive
force,
et
comme
par
la
brche,
dans
l'Universit
de
Paris,
en
dpit
de
la
dfiance
et
de
l'animosit
qu'y
soulevaient
leurs
doctrines.
C'est
ainsi
que
l'Uni-
versit se
vit
force
d'ouvrir
ses
rangs et
d'accorder
le
bonnet
de
docteur
frre
Thomas
d'Aquin,
frre
Bonaventure,
qui furent
les
flam-
beaux
lumineux
des
coles
philosophiques,
mais qui
restrent
attachs
l'un
l'ordre
de
saint
Dominique,
l'autre,
l'ordre
de saint
Franois,
bien plus
qu'
la
Facult
de
thologie.
Du
reste,
l'espce
d'omnipotence
7/24/2019 SCIENCES ET LETTRES AU MOYEN AGE.pdf
39/684
UNIVERSITS.
morale
et
politique,
conquise
par
l'Universit,
au
moyen
ge,
n'a
pas
t
la
mme
toutes
les
poques,
et
Ton
peut
constater,
dans
l'histoire
de cette
grande
institution,
diffrentes
phases,
o
son
esprit
et
son ca-
ractre
se
transforment
selon
les temps.
Dans
la
premire
priode,
les
coles de
Paris
ne
sont
encore qu'une
manation
de
l'Eglise qui
tend
se
sculariser. Peu
peu
l'institution
se fonde,
et
l'harmonie
s'tablit
entre
elle
et
les autres
institutions
publiques.
En
l'anne
1200,
Philippe-Auguste
Fig.
2i.
Saint
Louis,
roi
de
France,
allant
de
nuit,
matines,
aux
Cordeliers
de
Paris,
ung estudiant
par
mesprison
lui
tumba
son orinal
sur
son
chief.
Le
roi,
au
lieu
de
punir
l'tudiant,
lui donna la
prbende
de
Saint-Quentin, en
Vermandois,
pource
qu'il
estoit
coustumier
de
soy
relever
celle heure
pour
es-
tudier.
Miniature
d'un
ms. du
xv
e
sicle.
Biblioth.
de
Bourgogne,
Bruxelles.
dlivre
un
diplme
qui
rassemble
en
un
corps
d'Universit
et
dote
de
pr-
cieux
privilges
cette
multitude
d'coliers,
accourus
de
tous
les
pays
du
monde, et
que
dj,
quatre-vingts
ans
auparavant,
Abailard
runissait,
au
pied
de
sa chaire,
captifs
sous le
charme
de
sa parole.
De
cette
foule
passionne
pour
la
science,
l'avenir
devait
faire
sortir
plusieurs
papes
et
cardinaux,
quantit
d'archevques
ou
d'vques,
et
tant
d'hommes
sup-
rieurs,
que
l'Universit
allait
former
dans
son
sein, au
treizime
sicle,
afin
de
les
donner
la Science,
l'tat,
l'glise.
Jusqu'au
milieu
du
quatorzime
sicle,
l'Universit
voit
de
jour
en
jour
son
autorit,
son
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40/684
2 2
SCIENCES
ET
LETTRES.
importance
s'accrotre,
s'tendre,
s'affermir.
De
1297
i3o4,
elle
prte
Philippe
le
Bel un
utile
et
patriotique
concours,
dans
sa
lutte
avec
le
pape Boniface
VIII.
En
i3
16
(mort
de
Louis
X)
et en
i328
(mort
de
Charles
IV),
son
suffrage
fut
d'un
grand
poids,
pour
fonder
la
jurispru-
dence
du
royaume
l'gard
de la
loi
salique
et
empcher
que le
gouverne-
ment de
France
ne passt
aux
mains
d'un
prince
anglais.
Conseillre
des rois,
institutrice
des
peuples,
concile
permanent
des
Gaules, elle
pour-
suit avec
clat sa
haute mission
:
la voici
parvenue
son
apoge,
l'poque
de
la plus
grande
splendeur.
C'est
alors
que
tous
ses
membres,
matres
et
lves,
sont
indistinctement
reconnus
inviolables,
exempts
de
pages,
de
subsides, d'impts,
du service
de
guerre
et
mme
des
devoirs
de
simple
milice
urbaine.
C'est
alors
que
Charles
V
lui octroie le
titre
de
fille
ane des
rois,
pour
mettre
le
comble
aux faveurs
dont il
l'a hono-
re, titre
ambitieux
dont
elle ne cessa
depuis
de se
parer et
de se
glorifier.
Mais
bientt
commence
pour
l'Universit
la
priode
de
dcadence.
La
vnalit,
le sophisme
et
l'esprit
de
parti
s'emparent
de ses
principaux
membres.
En
i38o, l'or
de la
maison
de
Bourgogne
stipendie
des
cra-
tures
politiques
parmi les
docteurs
en
thologie.
En
1407,1e
duc
d'Orlans,
frre
du roi,
tombe
assassin
dans
un
guet-apens, et
matre
Jean
Petit
monte
en
chaire pour
dfendre
les
meurtriers
et
faire
l'apologie
de l'assassinat
politique.
Puis,
viennent
les
Anglais,
au joug
desquels
une
partie de
l'Uni-
versit
se
soumet
lchement
jusqu'
provoquer, avec
une sorte
de
fanatisme
complaisant,
l'inique
sentence
qui condamne
au
bcher
l'hroque
Jeanne
d'Arc.
Les
reprsailles,
le
chtiment,
ne se font
pas
attendre.
Le roi
Char-
les
VII
porte les
premiers
coups
l'antique
institution,
nagure
protge
par
les
rois
ses
prdcesseurs
:
il
semble
punir
l'Universit
de Paris
de
n'avoir
pas
su
garder sa
vieille
rputation
de sagesse
et
de patriotisme.
Non-seulement
il
reconnat
et
confirme
l'existence
de plusieurs
nouvelles
universits
de
province
(fig.
10 i3), mais
encore, refusant
de dfrer
la
requte
des
universitaires
qui
ne voulaient
pas
d'autre
tribunal
que
le
Con-
seil
du
roi
ou
Grand
Conseil,
il renvoie
simplement
leurs
causes
la
comp-
tence
du
Parlement
(1445).
Cinquante-cinq
ans
plus
tard, Louis
XII,
ayant
gard
aux vux
des
tats-gnraux
convoqus
sous
le
rgne
de
Chartes
VIII,
enlve
aux
privilges
de
l'Universit tout
ce
qu'ils
avaient
de
trop
anor-
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SCIENCES
E
importance
s'accrotre,
s'tendre,
s'affermir.
De
1297
i3o4,
elle
prte
Philippe
le
Bel un
utile
et
patriotique
concours,
dans sa
lutte
avec
le
pape Boni
face
VIII.,
En
i3iG
(mort
de
Louis X)
et
en
i328
(mort
de
Charles
IV),
son suffrage
fut
d'un
grand
poids,
pour
fonder
la
jurispru-
dence
du
royaume
l'gard
de la loi
salique
et
empcher
que
le
gouverne-
ment
de
-France
ne passt
aux
mains
d'un
prince
anglais.
Conseillre
des
rois,
institutrice
des
peuples,
concile
permanent
des
Gaules,
elle
pour-
suit avec
clat
sa
haute mission
: la
voici
parvenue
son
apoge,
l'poque
de
la
plus
grande
splendeur.
C'est alors
que tous
ses
membres,
matres
et
lves,
sont
indistinctement
reconnus inviolables,
exempts
de pages,
de subsides,
d'impts,
du service
de
guerre
et
mme
des
devoirs
de
simple milice
urbaine.
C'est alors
que Charles
V
lui
octroie
le
titre de
fille
ane
des
rois,
pour
mettre le comble
aux faveurs
dont
il
l'a
hono-
re,
titre
ambitieux
dont
elle
ne
cessa
. depuis
de
se
parer
et
de
se glorifier.
Mais
bientt
commence
pour
l'Universit
la
priode
de
dcadence.
La
vnalit,
le
sophisme
et
l'esprit
de
parti
s'emparent
de
ses principaux
membres.
En r3So,
l'or
de
la
maison
de Bourgogne
stipendie
des
cra-
tures
politiques
parmi
lesdocteurs
en
thologie.
En 1407,1e duc
d'Orlans,
frre
du
roi,
tombe
assassin
dans
un guet-apens, et
matre
Jean
Petit
monte
en
chaire
pour
dfendre
les
meurtriers
et
faire
l'apologie
de
l'assassinat
politique.
Puis,
viennent
les
Anglais,
au
joug desquels
une partie
de
l'Uni-
versit
se
soumet
lchement
jusqu'
provoquer,
avec
une sorte
de fanatisme
complaisant,
l'inique
sentence
qui
condamne
au bcher
l'hroque
Jeanne
d'Arc.
Les
reprsailles,
le
chtiment,
ne
se
font
pas
attendre.
Le
roi
Char-
ges
VII
porte les
premiers
coups
l'antique institution,
nagure
protge
par
les
rois
ses
prdcesseurs
:
il semble
punir
l'Universit
de
Paris
de
Ravoir pas
su
garder sa
vieille
rputation
de
sagesse
et
de
patriotisme.
Non-seulement
il
reconnat
et confirme
l'existence
de
plusieurs
nouvelles
universits de
province
(fig.
to
i3), mais
encore,
refusant
de
dfrer
la
requte
des
universitaires
qui
ne voulaient pas
d'autre
tribunal
que le
Con-
seil
du roi
ou
Grand
Conseil,
il
renvoie
simplement
leurs causes
la
comp-
tence
du
Parlement
(1445).
Cinquante-cinq
ans
plus
tard,
Louis
XII,
ayant
gard
aux
vux
des
tats-gnraux
convoqus
sous
le rgne
deCharles
VIII,
nive
aux
privilges
de
l'Universit
tout
ce qu'ils avaient
de
trop
anor-
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Umuic
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Pralon
Lith
Imp.Fraillerv
EORGE
CHASTELAIN
OFFRANT
SON
LIVRE
A
CHARLES,
DUC DE
BOURGOGNE
de
V
Instruction d'unjeune
Prince-
par G
. Chastelain.
Ms du xv
c
sicle,
excut par
les
peintres
de
La
cour
de
Bourgogne
,
n
33
S. A.
F. de
la Bibliothque
de
l'Arsenal.
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UNIVERSITS.
23
mal,
et
les
ramne,
par
son
dit
du
3i
aot
1498,
aux
limites
du
droit
commun.
L'Universit
essaye
de
rsister
et,
comme
aux
jours
de
sa
puis-
sance, veut
recourir
ses
foudres
traditionnelles.
Le
recteur
ordonne
la
cessation
gnrale
des leons
dans
les
coles et
des
prnes
dans les
glises.
Mais c'est avec un
visage
irrit que
le roi,
absent
de
sa
capitale,
reoit
les
dputs
de
sa
Jille
ane,
sans leur
accorder
une
rponse;
puis, en-
tour
de sa
maison
militaire,
arm
de toutes
pices, la
lance au
poing,
il
traverse
cheval
le quartier
de
l'Universit
et
ne daigne pas
s'arrter
pour
entendre
la
harangue
du
recteur, qui
tait
venu,
au-devant
de
lui,
accompagn
de
ses
suppts et
suivi de
tous
ses
coliers.
L'Universit
cda et
obit.
Ce
fut
la dernire
fois qu'elle
tenta de
maintenir, par
un
coup de
force,
ses
prrogatives
fodales.
C'en
est fait
de
l'Universit
comme centre de
domination
intellectuelle.
L'imprimerie
est
dcouverte
et
rpand dans
toutes
mains
les
instruments
d'tude
et
de
savoir. La
Rforme
a
proclam la
libert
d'examen.
On
court
de
prfrence aux
coles
libres
qui
s'tablissent,
par
toute l'Europe,
avec
les
nouvelles
doctrines
religieuses.
Paris
n'est
dj
plus la
source
exclusive
de
la
science;
Rome
restera pourtant
le
seul
foyer
de
la lumire divine.
L'Universit
perd son
unit
et
sa force,
quand
elle
renonce
s'appuyer
exclusivement
sur
l'Eglise et sur la Royaut.
Aprs ce
rapide
expos des
vicissitudes que
l'Universit a
subies
jus-
qu'au
seizime sicle,
il convient de
passer
en
revue
divers tablissements
pdagogiques,
qui,
relevant d'elle ou chappant
son
ressort,
constituaient
l'ensemble du
systme
d'ducation
scolaire
au
moyen ge.
Lors
de
l'arrive d'Abailard
Paris
en 1
107,
il
y
trouva deux
matres
en renom,
qui enseignaient
dans la
maison
de
l'vque
situe ct
de
la
cathdrale.
C'est
non
loin de
cette maison
et aux
portes
mmes du
clotre
Notre-Dame, o
demeuraient le
chanoine
Fulbert et
sa
pupille
Hlose,
qu'Abailard
ouvrit d'abord son
cole. Quelques
annes
plus
tard, Guillau-
me
de Champeaux
quittait
son
archidiaconat de la
cathdrale et
se retirait
au
prieur
de
Saint-Victor, sur
la
rive
gauche
de la
Seine,
hors
des
murs
de
la ville,
pour
y
fonder une
nouvelle
cole
publique.
Abailard,
de
son
ct,
chass
de
l'cole
qu'il occupait,
dans
la
Cit,
prs de la
maison
pis-
copale,
se
rfugia
sur
la
montagne
Sainte-Genevive,
o
le
suivirent
ses
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2
4
SCIENCES
ET
LETTRES.
disciples.
Cependant
les
coles
de
la cathdrale,
continuant
s'accrotre
et
ne
pouvant plus
se
dvelopper
dans l'enceinte
de la
Cit, se
divisrent
Fig.
22.
Bas-relief
du
matre-autel de
Saint-J ulien-le-Pauvre,
Paris
(travail du
xn
e
sicle).
Deux
coliers
s