Sciences Po - Le Retour Des Villes Européennes

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  • 8/16/2019 Sciences Po - Le Retour Des Villes Européennes

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    Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche.érudit offre des services d'édition numérique de documents

    scientifiques depuis 1998.

    É

    Compte rendu

     Ouvrage recensé :

     LE GALÈS, Patrick. 2003. Le retour des villes européennes. Sociétés urbaines, mondialisation,

    gouvernement et gouvernance. Paris, Presses de sciences po, 454 p.

     par Claire PoitrasLien social et Politiques , n° 52, 2004, p. 161-162.

     

    Pour citer ce compte rendu, utiliser l'adresse suivante :

     URI: http://id.erudit.org/iderudit/010598ar 

    DOI: 10.7202/010598ar 

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    Notes de lecture

    • LE GALÈS, Patrick. 2003. Leretour des villes européennes.

    Sociétés urbaines, mondialisation,

     gouvernement et gouvernance.Paris, Presses de sciences po,

    454p.

    Au cours des dernières années, plu-sieurs chercheurs en études urbainesont démontré que, même si les métro-poles contemporaines évoluent dansdes espaces économiques fortementglobalisés, les villes ou les lieux ontencore leur importance. Partant d’un

    constat relatif au poids des villes —définies ici à la fois comme des gou-vernements urbains et des lieux deconflits sociaux —, l’ouvrage dePatrick Le Galès relance le débat surle rôle et le statut des villes. Carac-térisées par l’omniprésence desréseaux ainsi que par la multiplicitédes acteurs et des intérêts, les villes

    européennes occupent une nouvelleplace sur l’échiquier politique. Celas’explique pour une bonne part par lecontexte à l’intérieur duquel évoluentles villes et qui est défini par diversestransformations sociopolitiques†:recomposition des États, crise desrelations internationales, constructionde l’Europe. En bref, une série de

    mutations qui sont à même de donnerlieu à une redistribution des pouvoirset à la construction d’un nouvel

    espace politique au sein duquel lesvilles — véritables «†acteurs collectifsen devenir†» — sont susceptibles d’as-sumer de nouvelles fonctions.

    Selon l’auteur, nous serions entrain de vivre un «†“intermède histo-rique” de confusion et d’interdépen-dance des pouvoirs favorable àl’autonomie des villes dont la portéereste à définir†» (p. 24). Pour étayer sathèse, il scrute en détail les transfor-mations des rapports entre les États-nations et les villes en Europe ainsi

    qu’entre les groupes et les acteurs(associations, entreprises, groupesd’intérêts, gouvernements locaux etleaders politiques) qui interviennentdans l’arène politique locale. Troisnotions clés se trouvent au cœur del’analyse†: celle d’acteur collectif,celle de société locale et celle de gou-vernance. Le Galès privilégie le

    niveau intermédiaire ou meso de laville (p. 43) pour conduire son ana-lyse. D’une part, le recours à la com-paraison et, d’autre part, la réalisationd’études empiriques permettent debien faire ressortir la diversité dessituations examinées. En outre, lespectre des pays étudiés est très large,ce qui ajoute à la richesse empirique

    de l’ouvrage. Deux traits singularisentles villes étudiées ici†: elles sont detaille moyenne (ayant entre 200 000 et

    2 millions d’habitants) et possèdentun centre qui, en assumant un rôled’espace public urbain lisible et codi-fié, demeure fondamental.

    L’ouvrage est divisé en trois partiesqui traitent (1) du contexte sociopoli-tique et historique à l’intérieur duquels’inscrivent les villes et les sociétéseuropéennes, (2) des transformationspolitiques et économiques en cours etde ce qu’elles signifient pour les villeseuropéennes et (3) des nouvellesdynamiques d’agrégation, de repré-

    sentation et de gouvernement quiprennent place au sein des villes.

    Après nous avoir présenté, dansson premier chapitre, les éléments desa problématique et ses choix métho-dologiques, l’auteur nous convie à undétour historique du Moyen Âge aumilieu du 20e siècle. La stratégie de

    recherche consiste à revoir comment,historiquement, se sont noués les liensentre les États-nations et les villes. Enmontrant comment se sont constituésles gouvernements urbains et lesmécanismes par lesquels ont été régu-lés les conflits sociopolitiques, cetteanalyse fait le constat de la longuedurée des villes européennes. Prenant

    appui sur les travaux d’historiens, LeGalès met en lumière les processuspar lesquels les communes urbaines

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    ont contribué à la formation des Étatset comment l’État moderne s’estdéveloppé contre les villes. Une autreconclusion qui ressort de ce chapitreest celle de la stabilité du systèmeurbain européen (alors que la hiérar-chie du système urbain étatsunien

    s’est redéfinie depuis les années1950), constitué de villes de taillemoyenne (qu’on peut qualifier decapitales régionales) relativement pro-ches les unes des autres. Cette spécifi-cité européenne est fondamentale pourles suites de l’analyse.

    Les trois chapitres qui composent

    la deuxième partie de l’ouvrage trai-tent de la période contemporaine. Letroisième chapitre aborde les nou-veaux paramètres de la gouvernanceurbaine, dont une des variables clésest le processus d’intégration euro-péenne, ce dernier étant favorable à laredéfinition du rôle des États et desvilles. L’analyse de l’auteur nous pré-

    sente un État qui demeure fort dansplusieurs pays européens, ce qui faci-lite la réalisation de politiquesurbaines (intervention dans ledomaine du logement, de l’aménage-ment du territoire, offre de servicescollectifs). En outre, les mécanismesd’européanisation des villes de mêmeque la mise en place de réseaux trans-

    nationaux sont susceptibles de créerde nouvelles opportunités pour lesgouvernements urbains, mais le jeu de

    la concurrence peut également fairedes perdants. Les transformationssociales des milieux urbains sontmises en perspective dans le qua-trième chapitre, tandis que les nou-

    velles formes du capitalismefortement globalisé font l’objet ducinquième chapitre.

    Composée de deux chapitres, ladernière partie porte sur la recomposi-tion politique des villes et les dyna-miques d’institutionnalisation del’action collective liées, notamment,

    aux réformes fonctionnelles et institu-tionnelles. Trois groupes d’acteurssont particulièrement interpellés†: lesmouvements urbains, les élites écono-miques et les leaders politiqueslocaux. Faisant une large place à lasociologie des mouvements sociaux,l’analyse de l’auteur met l’accent surla contribution des mobilisations

    sociales eu égard à la transformationrécente des dispositifs de gestion de laville, ces derniers n’étant plus stricte-ment la prérogative des élites poli-tiques locales et des gestionnairesurbains. Un autre groupe d’acteurstrès sollicité par les nouvelles formesde gouvernance urbaine est la classed’affaires. Pour compléter la trilogie,

    le dernier chapitre de cette partie sepenche sur les élus et les gouverne-ments urbains, qui constituent, selonLe Galès, «†les piliers de la formationdes modes de gouvernance enEurope†» (p. 373).

    La principale force de cet ouvrageest de passer en revue plusieurs thèses

    récentes quant aux transformationséconomiques et sociopolitiques encours — qu’on peut regrouper sous lethème générique de métropolisation— et à leurs impacts sur les villes. Ensomme, il s’agit d’un ouvrage trèsriche et très fouillé, à la fois sur leplan théorique et sur le plan empi-rique. L’auteur nous présente un por-

    trait nuancé, mais somme toute desplus optimistes, des nouvelles oppor-tunités offertes aux villes et aux

    agglomérations urbaines par les trans-formations récentes de l’État. En fai-sant ressortir la «†relative robustessedes villes européennes†», Le Galèss’éloigne des analyses proposées par

    certains chercheurs selon qui lesmilieux urbains européens vivent destransformations qui les rapprochentdes villes étatsuniennes. En d’autrestermes, à quelques exceptions près —pensons notamment aux villes britan-niques et à certaines villes indus-trielles du 19e siècle —, sur le plansociopolitique, le modèle de la ville

    duale sous-jacent au processus d’amé-ricanisation n’a pas encore franchi lesportes des villes européennes.

    Claire PoitrasINRS-Urbanisation, Culture et Société

    • Maurin, Éric. 2004. Le ghetto français. Enquête sur le sépara-

    tisme social. Paris, éditions duSeuil, coll. «†La République desidées†».

    Une société où l’on change

    souvent de trottoir

    L’ouvrage d’Éric Maurin apparaît

    singulièrement en phase avec cenuméro de Lien social et Politiquesqui s’interroge sur la pertinence duterritoire comme instrument de l’ac-tion publique. Éric Maurin est un purproduit de l’élitisme français, dans cequ’il a de meilleur sans doute†: poly-technicien, ingénieur, docteur en éco-nomie, chercheur au CNRS. Il n’en

    est pas à son premier essai†: il y deuxans, dans la même collection, ilpubliait L’égalité des possibles(Maurin, 2002). Il s’agit donc d’unapprofondissement de sa réflexion etde ses travaux sur la structure sociale,les inégalités et la « †fluidité sociale†»,pour reprendre une de ses expressionsfavorites. Cette fois il s’attaque à la

    question territoriale, avec cette thèseparadoxale et stimulante†: le territoireapparaît tout à la fois comme un fac-

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    LIEN SOCIAL ET POLITIQUES–RIAC, 52

    Notes de lecture