Sept écoles de la Ville de Montpellier Montpellier 2040, Thalia la … · 2018. 10. 11. · l’historique et les méthodes d’écriture des Mystères de Montpellier à la fin de

LES

MYS

TÈRE

S DE

MON

TPEL

LIER

Montpellier 2040, Thalia la jeune couturière high-tech trouvera-t-elle l’amour dans la Forêt de la Comédie ? Partis en 2080 sur les traces du presque célèbre archéologue le professeur Artone, Nova et Leys perceront-ils le secret de la cité engloutie construite en coquiton et bétalgué ? En 2044, vols en série d’animaux parlants : le mystérieux Monsieur

Wang, chef de fi le du PAN est-il dans le coup ? 2065, Noé et sa sœur Lali font une étrange découverte dans la cave de leur

immeuble : des cocons reliés à une drôle de machine… 10 000 ans plus tard, dans leur astronef pour visiter la ville de leurs ancêtres, toute une famille se demande quelle est la véritable histoire de l’œuf de Montpellier… Année 2750, en promenade avec la plus belle fi lle du monde à bord de sa navette aquatique Z360, Luc n’aurait jamais dû aller sur le lac interdit… Enfi n, les S/U/P/E/R, intrépide groupe de jeunes montpelliérains, ont-ils vraiment découvert le voyage dans le temps ?

Salade de grillons, sandwiches 3D, aéroskates, télescripteurs de mémoire, clones, solphones, lianes-ascenseurs, baobabs violets et même un étrange beignet spatio-temporel… Tout ça et bien plus encore dans ce nouveau tome d’anticipation ! Attention, Montpellier dans le futur, ça téléporte....

TOME

5

La mère posa sa tablette sur la table basse et prit sa tasse de jus d’insectes.Un temps pour elle

Mains et pieds sont palmés ! Plus de doutes, ce ne sont pas des humains.Sous la main d’Aglaé

C’est un chien avec un collier vocal, comme moi, je présume ?Oscar

Ho les Noé, on ne va pas attendre le déluge dans cette pièce !Quitte ou double

Soyez patients les enfants. Encore quelques galaxies et on y sera.Qui survole un œuf

J’ai la frousse. Je préfère réviser mon contrôle de modélisation holographique.Les Profondeurs

Regarde Phil, on dirait ce chercheur fou à l’origine de cette pagaille !Super sans peur

Sept écoles de la Ville de Montpellierprésentent

T O M E 5

02-MdM2014-CouvNOIRE-6mai-B.indd 1 07/05/14 10:33

Les Mystèresde Montpellier

7 écoles de la Ville de Montpellierprésentent

Ville de Montpellier

Direction des Services départementaux de l’éducation nationale

Canopé de l’Hérault

Tome 5

Illustration de couverture : école Docteur Calmette. Maquette : Alain Chevallier. édition mai 2014.

Remerciements à Philippe Caillon pour la coordination pédagogique, à Emmanuelle Ravier et Fabienne Desplanque pour leur relecture attentive

www. lesmysteresdemontpellier.fr

Un temps pour elle 7ÉCoLE FRéDéRIC BAzILLE

Sous la main d’Aglaé 21éCoLE AnnE FRAnCk-CHARLES DICkEnS

oscar 49éCoLE CHEng DU

Quitte ou double 79éCoLE PAUL BERT

Qui survole un œuf… 107éCoLE DoCTEUR CALMETTE

Les Profondeurs 131éCoLE PAUL BERT/VICToR HUgo

Super sans peur 165InTERnAT D’ExCELLEnCE

5

Cette année encore neuf enseignants de la ville de Montpellier et leurs élèves se sont engagés dans la grande aventure des Mystères de Montpellier. Ils ont pu ainsi découvrir la création littéraire en situation réelle, ont rencontré des auteurs de littérature de jeunesse et voici que leurs productions sont éditées. Au-delà du travail d’écriture, les élèves et leurs enseignants sont très fiers de recevoir un livre dont ils sont eux-mêmes auteurs, livre qui donne sens à tous ces mois de travail. Ils seront tout autant très fiers et très heureux de présenter leur nouvelle en salle Rabelais, puis de la dédicacer lors de la manifestation de « La Comédie du livre ».

Cette année le projet a eu pour thème Montpellier dans le futur. Ils ont ainsi pu rencontrer les personnes en charge du projet d’évolution de la ville pour les années futures.

Le cinquième volume des Mystères de Montpellier est de très haute facture. Les élèves et les enseignants méritent nos plus vives félicitations pour le travail fourni tout au long de l’année scolaire et tous nos encouragements à poursuivre pendant de longues années encore.

Mener à bien ce projet n’est possible qu’avec le soutien des partenaires : l’Inspectrice d’académie – Directrice académique des services de l’éducation nationale de l’Hérault, la Ville de Montpellier, le Canopé de l’académie de Montpellier-Hérault.

Chaque enseignant de la ville recevra un fascicule retraçant l’historique et les méthodes d’écriture des Mystères de Montpellier à la fin de l’année. Ainsi tous les volontaires pourront se joindre à ce magnifique projet et seront les bienvenus pour la prochaine édition, en 2014/2015.

Les élèves et les enseignants espèrent vous offrir le plaisir de lire.Anne-Marie FILHo

Inspectrice d’académie Directrice académique des services de l’éducation nationale de l’Hérault

École Frédéric BazilleCLASSE DE CE2 / CM1 / CM2 AVEC CHRISTEL LoPEz, nATHALIE PéDRoT, éLoDIE VInCEnT ET L’AIDE D’éLISABETH CREIgnoU

Chanel Baliardo • Giovany Baliardo Kenza Baliardo • Nélia Baliardo • Sanaï Baliardo Sokaïna Baliardo • Sidney Cargol Léandro Brugidou • Manuel Espinas Lyndsay Gimenez • Océane Gimenez Isaac Macua • Leven Maraval • Gino Marcou Melkina Marin • Clayan Mathieu Hosanna Mathieu • Youmana Mathieu Kélia Piala • Charlie Régis • Taïna Régis Sogan Sanchez • Kinsley Tricoit • Saray Venavente

7

Un temps pour elle

C H A P I T R E 1

Dans un quartier de Montpellier connu pour sa beauté, vivait une jeune fille du nom de Thalia. Elle était belle, avec la peau mate, les yeux verts et les cheveux bruns.

Le quartier Figuerolles était envié, car le soleil, en se reflétant sur le lac artificiel, formait un arc en ciel visible toute la journée. Et ce phénomène très rare n’avait lieu qu’à cet endroit précis de la ville.

Les algues présentes dans le lac fournissaient l’oxygène du quartier. Les habitants vivaient dans des maisons en forme de coquillages, certaines en coquille Saint-Jacques, d’autres d’escargots de mer. Les étoiles de mer étaient réservées aux premiers habitants de Figuerolles. Tout fonctionnait à l’eau chaude dans ces villas, car l’électricité n’existait plus. Les rues portaient le nom d’espèces marines. Le quartier avait été surnommé « Le Jardin de Mer ».

Thalia et sa mère avaient récemment emménagé dans une grande villa de couleur corail et blanc. Tous les matins, depuis son balcon, Thalia voyait l’arc-en-ciel de Figuerolles.

8

LES MySTèRES DE MonTPELLIER

La mère de Thalia venait de trouver un nouveau travail. En tant qu’avocate, elle devait défendre les humains qui avaient joué un rôle important dans la résistance contre l’invasion des robots dix ans plus tôt. En effet, en 2030, une armée de robots avait essayé d’envahir la Terre. Le Fg Code, police héroïque, les avait arrêtés et leur procès se déroulait en cet hiver 2040.

Thalia, quant à elle, avait tout juste 20 ans, elle était coutu-rière et adorait son métier. Elle venait de s’inscrire à un stage pour améliorer son inspiration artistique.

Elle était la seule dans la ville à utiliser encore des fils et une aiguille. L’habiateur l’aidait à reproduire chaque vêtement qu’elle avait créé puis elle vendait sa production à Montpellier.

Un lundi de décembre, Thalia venait de terminer ses commandes de la journée. Alors qu’elle s’apprêtait à déposer ses vêtements dans le tiroir copieur de l’habiateur, la musique de son dessin animé préféré attira son attention.

« oh, je l’adorais quand j’étais petite ! »Elle se rendit alors dans la pièce à souvenirs pour retrouver

le déguisement de son héroïne préférée de l’époque. La pièce à souvenirs était une salle blanche qui se trouvait

dans toutes les maisons. Les gens y mettaient tous leurs souvenirs, les plus touchants ou les plus désagréables.

Thalia retrouva ses souvenirs dans sa boîte tactile bleue. En regardant les photos, elle aperçut, au fond d’un coffre,

le journal intime qu’elle avait écrit dix ans auparavant. Elle ouvrit ce carnet et lut :

« Le 27 septembre 2030Quand je serai grande, mon prince charmant viendra

en chantant, on vivra dans un château et on aura beaucoup d’enfants. Ils seront bien élevés et très beaux.

Il y aura : Owen, Maïlan, Fanette, Anouk, Ylaïs, Loukian et le petit dernier éden. »

À la fin de sa lecture, elle se dit : « Il faut que je réalise cette promesse d’enfance ! »

9

Un TEMPS PoUR ELLE

Elle décida de montrer ce texte à sa mère. ú Maman, maman ! J’ai retrouvé le journal intime que

j’avais écrit quand j’étais petite ! ú Je peux voir ?

La mère, dans la cuisine, déclencha une des commandes de sa table et les déchets du repas disparurent dans un conduit vers la poubelle, tandis que les assiettes et couverts étaient amenés du lave-vaisselle au placard par un second conduit. Enfin, une autre commande fit disparaitre la table dans le sol.

10


Puis, la mère se mit à lire le carnet. Quand elle eut fini, elle le rangea soigneusement dans le sac de sa fille.

C H A P I T R E 2

Thalia dévalait les marches tout en pensant : « Je passe mon temps à travailler et j’ai oublié de penser à moi ! J’ai envie de me faire belle, de découvrir le monde et de rencontrer un jeune homme. »

En rentrant dans sa chambre, elle se dirigea vers son habiateur.

ú Bonjour Thalia ! Que voulez-vous que l'on envoie ?

ú Rien. Aujourd’hui, c’est pour moi. Je veux une jolie tenue pour aller en ville.

Elle pénétra dans la cabine et en sortit habillée d’un jean noir, d’un tricot bleu marine et d’escarpins noirs.

Thalia décida de se mettre en route. Chaque habitant possédait un transporteur dans sa maison : c’était un siège électronique en cuir noir dont on pouvait programmer la vitesse et la direction. Elle entra au salon et appuya sur un des boutons du transporteur. Les portes coulissantes s’ouvrirent.

Thalia programma l’écran de transport : 21 décembre 2040, destination : Forêt de la Comédie

La place de la Comédie était le seul endroit de la ville où l’on pouvait encore rencontrer des arbres, elle avait donc été rebap-tisée ainsi en souvenir de l’époque où la ville était couverte d’arbres et de verdure.

Thalia glissa le long de la rambarde et atterrit directement dans le siège. Elle pénétra dans le tunnel vitré, éclairé de chutes d’eau colorées et admira pendant son trajet les étoiles de mer collées sur les vitres et les différents poissons qui nageaient autour. Depuis 2030, la mer avait envahi les sous-sols de la ville. Toutes les rues de Montpellier étaient désormais équipées d’un sol vitré, excessivement solide.

11

Un TEMPS PoUR ELLE

Arrivée à la Comédie, Thalia remonta à la surface grâce à la barre automatique qui fonctionnait comme un ascenseur. Elle balaya du regard la place et se dirigea vers le marché de noël. Au milieu des arbres, des cubes de toutes les tailles propo-saient de la marchandise. Un interphone à commande vocale enregistrait les articles souhaités par les clients et ceux-ci les récupéraient par une trappe sur le côté du cube.

Thalia commanda une paire de chaussures pointure 36 et attendit quelques instants avant de voir apparaître deux superbes escarpins rouges et or.

Au loin, à côté du Musée Fabre, elle aperçut un magasin, qu’elle n’avait jamais vu auparavant, dont la vitrine ressem-blait à l’écran d’un ordinateur allumé. Il était écrit : « Si vouS cherchez l’amour, c’eSt ici. »

En voulant prendre ses gants dans son sac pour se réchauffer les mains, elle retrouva son fameux journal intime. Sans hésiter, elle se décida à entrer dans la boutique.

Thalia posa alors la paume de sa main sur l’icône « EnTER » et l’écran s’ouvrit. Elle alla à l’accueil et demanda s’il y avait un ordinateur libre. L’hôtesse lui en indiqua un. Thalia se dirigea au numéro indiqué et une voix lui dit : « Prenez place sur le fauteuil en cuir et patientez quelques secondes ». La jeune fille s’assit comme la voix le lui avait recommandé.

Tout à coup, un hologramme l’entoura. Devant elle, s’affi-chèrent des centaines d’icônes qui représentaient les caractéris-tiques physiques et intellectuelles des célibataires.

Avec son index, elle fit défiler les profils : la couleur des cheveux, des yeux, de la peau, la taille mais aussi les caractères et les situations professionnelles.

Thalia aimait les garçons bruns, à la peau mate et aux yeux bleus. Mais elle cherchait surtout quelqu’un de gentil qui ne serait jamais violent avec elle. Les séries télévisées et les faits divers dans les journaux lui faisaient craindre la violence des hommes.

L’hologramme lui montra plusieurs garçons qui pouvaient lui convenir. Mais ils se vantaient tous :

12


ú Moi je suis beau, choisis-moi et tu seras la plus heureuse ! ú Moi je suis riche…

Un seul de ces garçons ne se vantait pas, il disait juste : ú Bonjour, je m’appelle éthan, j’ai vingt-quatre ans, je

cherche l’amour, je suis célibataire et j’ai envie de te connaître. Il était le contraire de ce qu’elle cherchait : il avait la peau

claire, les yeux verts et les cheveux blonds. Il était originaire des quartiers froids de Marseille.

Malgré cela, elle décida de lui parler. ú Tu es comme moi, je ne suis jamais tombée amoureuse !

Heu, tu… tu… ú oui, dit éthan en devinant sa pensée, je veux bien te

rencontrer. Ils se donnèrent rendez-vous à la Fontaine aux Roses du

Jardin des Plantes. Cette fontaine était un lieu où se retrou-vaient tous les amoureux pour boire l’eau d’amour. Elle était entourée de zétéhiver, des fleurs d’une nouvelle variété : souples en été et dures comme de la pierre en hiver. Tout comme l’eau de la Fontaine de Jouvence rend immortel, l’eau de cette fontaine partagée par un couple, était gage d’un amour indes-tructible et éternel.

Le lendemain, chacun de leur côté, ils se préparèrent pour être les plus ravissants pour cette première rencontre. Thalia avait revêtu une robe rouge toute simple et lui portait un jean et une chemise noire rehaussée d’un nœud papillon écarlate. Bien sûr Thalia avait enfilé ses nouveaux escarpins !

La jeune femme était confiante, car en 2040, toutes les personnes étaient équipées d’une puce implantée dans le corps. Cette puce informait sur le passé des individus et permettait de savoir si la personne avait déjà été violente, malade ou si elle était non-humaine. Rien n’avait été signalé pour éthan.

Thalia était en retard au rendez-vous et courut vers la Fontaine d’amour. éthan arriva précipitamment de son côté, il la bouscula et c’est en la relevant qu’il la reconnut.

Ils s’approchèrent de la fontaine et Thalia puisa cette eau précieuse avec ses fines mains et en but quatre gorgées.

14


éthan, lui, trempa juste ses lèvres. Les jeunes gens se retrou-vèrent plusieurs fois en ville et peu à peu, la magie semblait opérer. Un soir, après un nouveau rendez-vous avec éthan, Thalia montra sur ses lunettes Photo’capture un portrait d’elle et de son petit ami à sa mère :

ú Maman, regarde comme nous sommes beaux ! ú …

La mère, en le découvrant, se sentit gênée. Elle avait l’étrange impression de le connaître, son visage lui était familier.

C H A P I T R E 3

Assise dans son grand canapé noir, la mère de Thalia lisait un polar sur sa tablette.

Elle en était à la page soixante-sept, au moment où l’ins-pecteur Manouch découvrait le corps sans vie d’une jeune femme.

Aussitôt, elle se mit à penser à sa propre fille :« Pourquoi éthan me met-il autant mal à l’aise ? D’après ma

fille, il semble gentil et amoureux. Il est intelligent, sportif et passe beaucoup de temps avec elle. »

Cette question la tourmentait. La mère posa sa tablette sur la table basse et prit sa tasse de jus d’insectes. Elle la porta à ses lèvres et but la dernière gorgée. Elle se leva et pensa : « Je crois que je me pose trop de questions. C’est la première fois que ma fille me présente un garçon… et ça me fait comme un vide dans le cœur. »

Pendant ce temps, les amoureux se retrouvèrent à la Cinéglace. Ils patinèrent sur le film Titanic 2 qui était projeté sur le sol de la patinoire, en se tenant par la main. Elle trouvait qu’il avait la main étrangement chaude dans ce lieu si glacé. Mais il lui caressa les cheveux et elle n’y pensa plus.

À la nuit tombée, ils prirent chacun leur transporteur. ú Transporteur, transporte-moi chez moi ! dit Thalia, en

appuyant sur le bouton de commande vocale.

15

Un TEMPS PoUR ELLE

Elle rentra chez elle et se fit démaquiller par Robot x. Elle enfila son pyjama et s‘endormit la tête pleine de rêves.

Le lendemain matin, éthan l’appela : ú on va au resto péniche ce soir ? À 20 heures ? ú ok !

Quand la nuit tomba, elle se prépara dans son habiateur et dit à sa mère :

ú Je vais manger en ville avec mes copines !Elle prit le transporteur, direction « Restaurant La

petite coccinelle ». Elle arriva la première et éthan peu de temps après.

Il était tout beau. Ils entrèrent : ú Je voudrais une table pour deux, s’il vous plaît !

Le restaurant était magnifique. Depuis le pont du bateau, on voyait toute la mer.

Ils commandèrent deux menus :Entrée : salade de grillonsPlat : steak de mouches

Dessert : gâteau aux pattes d’araignées ú C’est cool que tu sois là ! ú En fait, j’ai menti à ma mère, je lui ai fait croire que je

sortais manger avec des amies. ú Mais pourquoi avoir menti ? ú … Quand je lui parle de nous, elle semble mal à l’aise. Je

crois qu’elle a peur de me perdre ! Mais je regrette déjà d’avoir menti parce que je m’entends bien avec elle. J’ai pas envie de la faire souffrir.

Deux heures plus tard, ils sortirent du restaurant. Sur le quai, ils s’arrêtèrent devant le stand d’un vendeur de pommes d’amour.

Pendant ce temps, la mère de Thalia, profitant de l’absence de sa fille, se mit à chercher des informations sur éthan. Elle alluma son ordinateur, y trouva l’adresse du jeune homme, et rien d’autre. Alors, elle décida de fouiller dans ses fichiers personnels, son métier d’avocate ayant des avantages.

16


Elle entra le code du casier judiciaire d’éthan mais il était totalement vierge. La mère ouvrit alors le fichier Info 40 Eg où étaient inscrites toutes les informations sur les individus.

Elle put lire : « né le 24 juin 2015 – a fréquenté l’école primaire Frédéric Bazille, le collège Fontcarrade, a redoublé la classe de sixième, élève brillant au lycée Clémenceau, Bac scientifique option informatique avec mention TB, mémoire à l’université des sciences – Aucune indication sur ses parents – Allergique à l’eau, aux poils d’animaux et surtout aux souris – Travaille au bureau de recherche informatique de la mairie de Montpellier, spécialisé dans le domaine des puces corporelles – Passionné de nature. »

C H A P I T R E 4

Le 31 décembre 2040 arriva. éthan sonna chez la jeune fille. Et c’est la mère de Thalia qui ouvrit la porte.

ú Bonsoir madame, je viens chercher votre fille. ú Bonsoir jeune homme, Thalia finit de se préparer, entrez

donc !éthan s’exécuta et se sentit gêné de rester seul avec la mère

de Thalia. ú Voulez-vous boire quelque chose ? ú Volontiers, répondit éthan qui ne pouvait refuser.

Alors qu’elle revenait de la cuisine avec deux verres de Coca millésimé, elle en profita pour lui poser quelques questions.

ú Vous m’avez l’air plutôt timide mon garçon, où habitez-vous ?

ú J’habite dans la tour de Palavas. ú Quel âge avez-vous ? Quel est votre nom de

famille ? on ne s’est jamais vu auparavant ? Vous faites des études ? Quelle est votre passion ?

ú 24 ans. éthan Vallabert. non, je ne vous ai jamais rencontrée. J’ai fait des études à l’université des

sciences de Montpellier. Je suis passionné par le piratage

17

Un TEMPS PoUR ELLE

des programmes informatiques. À présent, je travaille à la mairie, sur les puces implantées dans nos corps.

ú Dites, quelle mémoire vous avez, s’exclama la femme, constatant qu’il avait répondu sans hésitation dans l’ordre à sa rafale de questions. Drôle de coïncidence, j’étais moi aussi étudiante à l’université des sciences. Comment s’appelle votre père ? et votre mère ?

ú Ma carte-mère… heu, ma mère s’app… À ce moment précis, la jeune fille arriva. La mère se retourna

et admira sa fille. éthan en profita pour jeter le contenu de son verre dans la plante, juste derrière lui.

Thalia était en effet majestueuse : elle était vêtue d’une longue robe rouge avec des paillettes dorées, des escarpins rouges et une pochette or. Son chignon laissait échapper deux mèches de chaque côté de son visage.

ú Quel beau couple ! Passez une belle soirée ! ú Merci Maman, j’ai quand même de la peine de te laisser

seule, veux-tu nous accompagner ? ú non, je vous laisse en amoureux. À l’année prochaine

ma chérie !éthan avait réservé une table dans un restaurant très, très

ancien, où la nourriture servie était celle des années 2010. on pouvait y déguster des sandwiches à l’ancienne, des tranches de pain serrant des steaks hachés cuits à point de vraie viande, accompagnés d’un verre de vin de pays. C’était délicieux, cela changeait des mouches, des fourmis et autres insectes.

Plus tard après le diner, alors qu’ils se promenaient, éthan dit :

ú Il est déjà 23 heures ! Dans une heure pile, c’est la nouvelle année.

ú Comment le sais-tu ? Tu n’as pas de montre. ú Euh… euh… dans le restaurant, tout à l’heure, oui c’est

ça, il y avait une horloge. ú Si tu le dis !

Dès que les deux amoureux partirent, la mère se sentit désespérement seule. Elle décida de monter dans la pièce à

18


souvenirs. Elle regarda des photos de Thalia petite. « C’est mon bébé et elle va bientôt s’en aller, le temps passe trop vite. »

Elle tourna la tête et vit une coupe qu’elle avait gagnée à la fac des sciences, à un concours d’informatique. Et juste à côté, le trombinoscope de l’année 2000. Sans hésiter, elle s’en empara.

Et soudain là, qu’est-ce qu’elle vit ? Juste devant ses yeux « non, ce n’est pas possible ! » Elle se souvint alors de ce jeune homme qui la regardait amoureusement sur les bancs de l’uni-versité. « Cela ne peut pas être…Il ne peut pas être un… ! »

Et elle laissa tomber au sol la photo de la promotion 2000, où posait juste à côté d’elle, souriant d’un air timide, éthan !

19

Un TEMPS PoUR ELLE

Les douze coups de minuit sonnèrent. Le feu d’artifice en 3D faisait apparaître un cœur et en son centre deux amoureux en train de s’enlacer. « Bonne année mon amour, la perle de mon cœur, tu es mon âme sœur, sans toi Thalia, je ne serais rien ! » Submergée par ses sentiments, bouleversée par les paroles d’éthan, elle ne savait que répondre tellement elle était émue et heureuse. Sa promesse d’enfance s’accomplissait enfin.

Alors, elle l’enlaça tendrement et mit sa tête contre la poitrine d’éthan, désireuse de savoir si son cœur battait aussi fort que le sien.

Mais, serrée contre lui, son oreille ne distingua qu’un bien curieux… « tic-tac… »

école Franck/DickensCLASSES CM2A DE CATHERInE VAnDEMEULEBRoUCk ET CM2 B DE CHRISTInE CHARTon

Narjesse Aboulghazi • Dorian Baïzan Khaira Benbarka • Léanne Bénito Jonathan Bezara • Camilia Bouchalta Pierre Chevalier • Arthur Cyprien Laurine David • Kenza Fernandez Macha Gharbi • Julie Guillaume • Sirine Lazizi Chérazad Machkokot • Wesley Ngakoutou Patasse • Johanes Pallot • Charlotte Piettre Inoë Puthod • Urièle Remer-Garcia Elisa Kirchmair • Axel Tondut • Lucas Vacheresse Anaïs Vanhee • Yannis-Enzo Verdier Melvyn Vigouroux

Yanis Abdenbi • Valentin Allemand Chloé Berthelon • Pauline Bondil Théo Bonnaterre • Marine Bouras Jewell Chalmeton • Liana Dadou Camille Dantony • Mathilde Delord Elise Dogan • Angelina Faelens • Victor Junillon Clément Larraz • Thibault Lorrentz • Kiliann Lopez Manon Mamberti • Abdellah Nassim Etienne Préa • Alexandra Rassat • Clara Raynal Laetitia Roumagnac • Swen Sériat

21

Sous la main d’Aglaé

C H A P I T R E 1

Professeur Artone Au fond du Lez

C’est la nuit, tout le monde dort… sauf moi. Je dois examiner ce fragment que j’ai en ma possession. Il est sensa-tionnel… C’est une main… En marbre de Carrare… C’est si rare de nos jours ! Cette blancheur, cette finesse, il n’a même pas une seule veine. Il est vraiment magnifique ! J’ai trouvé une main en marbre au fond du Lez. Moi, le professeur Artone. À moi les flashes et les interviews !

Examinons cette merveille de plus près… Je me demande d’où elle provient. oui, je me demande comment tu es arrivée au fond du Lez, toi. Cette sculpture doit être ancienne. Elle est bien conservée. Elle doit avoir plusieurs siècles. Vérifions cela rapidement en réalisant une première datation : mon speed-dator indique 1776. Ce fragment a donc plus de trois cents ans. Est-il possible qu il appartienne à… cette statue bien connue ? Je n’en reviens pas ! Mais alors, y aurait-il un lien avec la prophétie de ce savant fou ?

22


« Une clé existe à la surfaceUne cité sous le Lez ouvrira et refermera

De la belle Aglaé les non-humains retrouveront la mainAvec l’aide de deux humains »

Mais oui, lui, il savait… Il avait raison ! Elle existe, j’en suis certain. Il doit y avoir… oui, il doit y en avoir une. À moi de résoudre ce mystère. Cela fait tant d’années que j’attendais de faire une grande découverte. Serait-ce la preuve que je cherchais ? Je n’ose y croire… Quelle chance ! Je vais enfin pouvoir prouver à mes collègues que que j’ai raison ! J’ai hâte de voir la tête qu’ils feront quand ils verront ça.

Il faut que je poursuive mes recherches à la confluence du Lez et du Verdanson. Et puis comme ça, je pourrai peut-être trouver un fossile de chabot pour le cadeau d’anniversaire de ma fille. Ma chère nova, 14 ans déjà ! Je me souviens, quand elle était petite… Elle adorait les aventures et s’intéressait déjà aux animaux aquatiques. Toujours en train de poser des questions. Peut-être sera-t-elle archéologue comme moi ? Le temps passe si vite ! À présent elle est si autonome… Lorsque je m’absente pour mes recherches, je sais que je peux lui faire confiance. Et toujours aussi passionnée par les chabots, ces petits poissons qui vivaient à la source du Lez et qui ont aujourd’hui disparu à cause du réchauffement climatique.

Mince, j’entends du bruit… nova m’aurait-elle entendu marmonner ? non, personne… Il faudra que je lui parle de cette grande découverte. En attendant, vite, il faut que je mette ce fragment de statue en lieu sûr. Mmm… Je sais ! Je vais le placer dans mon coffre transparent à ouverture digita-lisée. Seuls nova et moi pouvons l’ouvrir et une fois fermé, il est parfaitement invisible.

Maintenant, passons aux choses sérieuses : je dois préparer ma prochaine exploration. Voyons… Tout d’abord mon jet-bag : ce propulseur aquatique à hélices qui filtrent l’oxygène est une invention géniale pour se déplacer et respirer sous l’eau. Sans oublier ma combinaison ultra-résistante, mes palmes en métalcaoutchouc et mes lunettes sous-marines de

23

SoUS LA MAIn D’AgLAé

vision nocturne. Ça-y-est, j’ai tout ce qu’il me faut : j’adore mon équipement de plongeur ultramoderne. C’est parti pour de nouvelles investigations au fond du Lez ! non mais quelle aventure !

C H A P I T R E 2

Leys SMS SOS ?

Ce film était vraiment super ! « Skate action ». génial ! Surtout quand le skateur fait son 720 en arrière sur son overboard et qu’il enchaîne avec un triple back flip. Trop top ! Allez, un p’tit tour à l’overpark, il faut que j’essaie.

Je me dirige vers la station des overmags. Une fois arrivé, je débranche mon overboard, c’est bon il est chargé à bloc. J’active le gPS, la voix de mon acteur préféré m’annonce : « nous sommes le 1er juin 2100, il est 14h35. » Puis elle me demande : « Itinéraire ? »

ú De la Comédie à l’overpark de Port Marianne. ú Itinéraire tracé, termine Brad DiCaprio. Je vois la carte

de Montpellier qui s’affiche sur la planche et mon itinéraire en jaune.

ú ok, top départ. Ah ! Je m’imagine réussir un 720 en arrière et je vois déjà ma

mère m’inscrire au concours de figures : je gagnerai le concours ! Et j’aurai la coupe ! Soudain j’entends le crissement d’un freinage d’urgence, j’ouvre les yeux. Horreur ! Un robot serveur juste devant moi ! Je manque de le renverser. ouf, j’ai eu chaud ! Le problème avec ces robots, c’est qu’ils servent les gens sans trop regarder autour d’eux. Heureusement que j’ai tourné à temps ! Enfin, juste quelques minutes et l’overpark apparaît. Cette fois je vais tenter un 360 en arrière et améliorer mon back flip, courage. Je termine mon 360 en avant, parfait comme d’hab’. Et là, en plein vol, je reçois une secousse digne d’un tsunami

24


25

TITRE DE LA noUVELLE (À PLACER APRèS PAgInATIon DéFInITIVE)

26


et m’écrase au sol. Pas de mal ! C’est nova. Je sors mon Icool, j’ai dû le régler trop fort. Ce portable invisible émet d’énormes vibrations quand nova appelle. Je modifierai les réglages pour les prochaines figures. L’hologramme sort doucement de mon portable, en lettres noires s’affiche tristement son message : « Viens vite. Parc d’attractions. Faut que j’te parle. »

Bon, c’était pas c’que j’avais prévu, j’aurais bien fait un petit tour au meilleur skate-food de la ville, j’adore leur petit logo, leur hamburger fétiche grimpé sur un overboard dernière génération, mais là c’est pas possible, il y a urgence ! Son message n’est pas normal, pas aussi long que d’habitude, pas de smileys, pas de jeux de mots… nova, qu’est-ce qui t’arrive ? Peut-être que son père la menace de l’internat à cause de ses derniers contrôles de robotique, hum… c’est pas son genre… ou pire : peut-être va-t-elle déménager ! La perdre, impossible ! oh non, j’arrive !

Je saute sur mon overboard pour la rejoindre.

Enfin, j’y suis ! « Attrack Lez », le bonheur des jeunes ! Je pénètre dans le parc. Une foule impressionnante a déjà envahi le parc. où est-elle ? J’arrive au skate-glace et la repère enfin, je m’approche d’elle. nova triture nerveusement son bracelet porte-bonheur, ça ne va pas fort. Je l’appelle mais elle ne m’entend pas. Trop de bruit. Elle a vraiment l’air triste. Comme elle est belle ! Ses longs cheveux blonds cachent à moitié son visage. Je m’approche encore, presque à la toucher, ses immenses yeux bleus sont emplis de larmes quand elle me regarde, puis elle lâche : « Mon père a disparu ! » Elle éclate en sanglots et se jette dans mes bras.

Je ne sais pas quoi lui dire. Enfin, nova se calme. Je lui souffle qu’on peut aller dans un endroit plus tranquille pour parler. Je vais chercher mon overboard et j’active le système pour deux personnes. Tout doucement se déploient un guidon et un siège arrière. Je l’entraîne vers mon skate antigravité, je réactive le gPS et de nouveau la voix de Brad Di Caprio me demande :

27


ú Itinéraire ? ú Allons plutôt chez moi, me suggère mon amie. ú ok, Attrack-Lez à chemin de Moularès. ú Itinéraire tracé, m’informe Brad DiCaprio.

C’est parti. À mi-chemin, je distingue une petite voix derrière moi : « Tes parents ne vont pas s’inquiéter de ton absence ? »

ú ne t’en fais pas, ils ont du travail !Au moment où je lui réponds, on arrive devant son

immeuble. C’est le plus beau du quartier : entièrement vitré, un cube de 50 mètres de côté. nous entrons dans le hall très lumineux et empruntons l’ascenseur tout en transpa-rence qui nous propulse en douceur au 11e étage. L’appar-tement des Artone est à droite au bout du couloir, nous y pénétrons. Devant la porte de sa chambre, j’essaie de détendre l’atmosphère :

ú Après vous, mademoiselle ! Elle étouffe enfin un petit rire. Raconte-moi tout.

nova s’assoit sur son lit et commence son histoire. ú Il y a dix jours, mon père a découvert une prédiction de

nostradamus aux archives. Elle disait qu’il y avait une ville engloutie sous le Lez, un peu comme l’Atlantide, et il a voulu aller la chercher. Malheureusement, personne n’y a cru, pas même tes parents. Ton père, le directeur des archives n’a pas voulu financer des recherches qui étaient hors de prix. Mon père a donc sacrifié des jours de congé pour aller seul explorer les fonds du Lez, m’explique-t-elle les larmes aux yeux.

ú Il ne t’a pas dit où il allait plonger ? espéré-je. ú non, mais il a trouvé le fragment d’une statue dans

ses investigations aquatiques, une main en marbre très pur, qu’il a ramenée chez nous. Quand il me l’a montrée, ça avait l’air vraiment important pour lui. Puis il est reparti plonger au confluent. Ça fait deux jours qu’il n’est pas rentré. Je commence à m’inquiéter, sanglote à nouveau nova.

ú Une main ! D’où vient-elle ? ú Je ne sais pas.

28


ú Et… Cette main, l’as-tu ? ú oui, elle est dans son laboratoire, dit-elle sans y prêter

attention. ú T’inquiète pas, on va retrouver ton père ! Je l’encourage :

on va la voir ? ú ok ! Viens. C’est par là. Attends, il y a le détecteur

d’ADn. Elle approche son œil du détecteur pour déclencher

l’ouverture de la porte et une voix mélodieuse annonce : « Analyse terminée. nova Artone, vous pouvez entrer. »

29


C H A P I T R E 3

Nova Coup de main, main de maître

ú Quel honneur d’entrer dans ce laboratoire ! Dis donc, c’est étonnant tous ces équipements ! s’extasie mon ami.

ú Viens, je te fais visiter, mais attention, ne touche à rien, il n’y a que des instruments scientifiques de dernière génération. Ultra sophistiqués !

ú Et toutes ces sculptures… c’est impressionnant ! Et là cette collection de fossiles… Dis-donc, c’est fascinant…

ú oui, il ne lui manque plus qu’un échantillon de chabot et sa collection de poissons du Lez disparus à tout jamais sera complète. Que dis-tu de cette maquette ?

ú Une maquette des fonds du Lez, ça me donne envie d’y faire du skate ! Ton père n’aurait pas en projet de créer un prototype de skate subaquatique par hasard ? Tu lui diras que je suis volontaire pour le tester ! C’est passionnant tout ça, mais où est-elle cette fameuse main ?

ú Je crois qu’elle est dans un coffre transparent… invisible en fait, par mesure de sécurité.

Leys commence à chercher le coffre en arpentant la pièce. Soudain je l’entends trébucher et tomber lourdement.

ú Je crois que je l’ai trouvé ! gémit-il en se relevant. ú Est-ce que tu t’es fait mal ? ú non, rien de cassé, ne t’inquiète pas. ú Bon maintenant il faut ouvrir le coffre. ú Mais comment ? ú Avec mon empreinte digitale ! Mon père m’a expliqué

comment l’ouvrir. Regarde !Je retrouve la forme incurvée où j’introduis mon pouce. Le

coffre apparaît et redevient visible. Il s’ouvre immédiatement et la main se révèle à nous…

ú Elle est magnifique ! Mais pourquoi ton père y tient-il tant ?

30


ú Il dit que c’est un trésor de l’Humanité. ú Un trésor de l’Humanité ? C’est vrai qu’elle est belle,

mais il manque une grande partie de la sculpture d’origine. ú Bon à présent passons-la au scanner. D’accord ? ú C’est parti !

Le scanner monté sur roulettes prend la forme d’un cube avec une caméra. J’ouvre la trappe supérieure, dépose délica-tement la main. La trappe se referme automatiquement, une alarme se déclenche accompagnée d’une lumière éblouissante comme un flash. Les données s’affichent immédiatement sur l’écran du vidéoprojecteur et défilent l’une après l’autre. nous apprenons qu’il s’agit d’une pièce du xviiie siècle, réalisée par le sculpteur Dantoine, auteur des fontaines de la Licorne et des Trois grâces. Cette dernière serait du style le plus approchant de la main.

ú Et si on cherchait sur intercool ? propose Leys. J’active ma montre intercool et j’annonce : « Statue des Trois

grâces ». Aussitôt des formes se projettent grandeur nature devant nous.

ú Regarde, dis-je, voici la statue holographique actuelle telle qu’elle est visible place de la Comédie et voilà la statue originale qui est conservée à l’opéra. Les Trois grâces ont toutes leurs mains ! La nôtre est ressemblante mais elle ne correspond à aucune de ces mains exactement. C’est étrange…

ú Et si on demandait l’aide de ma mère ? Je pense qu’elle pourrait nous être utile car elle travaille aux archives. Mais surtout elle est spécialisée dans le domaine des sculptures.

ú Excellent, allons-y !

Leys gare son overboard à la station des archives. Les deux amis lèvent les yeux et voient se déployer devant eux le portrait de la vedette du dernier film « Skate Action » : Alexis zuckerberg. Tous les samedis midi, place de l’Europe à Antigone, les quatre bâtiments des archives convergent, attirés par de puissants aimants et forment ainsi un seul bâtiment d’archives : c’est la fusion. Toutes les nouvelles données, les nouveaux documents

31


sont mis en commun et le spectacle commence : le puzzle de leurs façades s’assemble et fait apparaître l’image géante d’une célébrité du moment. Cette attraction est géniale, c’est la préférée des Montpelliérains, enfin la mienne.

ú Bonjour, les enfants, les accueille chaleureusement Laura, que faites-vous ici ? demande-t-elle en se levant pour les embrasser.

ú Bonjour maman, nous voulons recueillir des indices sur le fragment trouvé au fond du fleuve, dit Leys en embrassant distraitement sa mère.

ú Quel fragment ? ú La main en marbre, je précise un peu énervée en me

rappelant qu’elle n’a pas pris mon père au sérieux. ú Ah, la fameuse main en marbre ! rit-elle en levant les

yeux au ciel. Je serre les poings sans rien dire : si Laura avait cru mon

père, il n’aurait sans doute pas disparu. ú oui, je voudrais faire une surprise à mon père et identifier

cette main pour lui, il est débordé en ce moment. ú Bon, d’accord, mais soyez discrets, n’abîmez pas les

documents, manipulez-les avec précaution… Prenez ma montre, grâce à elle vous pourrez entrer sans être repérés par nos gardiens, ces robots sont très vigilants. Salle 201.

ú Merci de votre aide, Madame, et me tournant vers Leys, je lui lance : Allons-y !

nous entrons dans une pièce spacieuse avec une quinzaine d’allées coulissantes. À notre gauche, se trouvent des gants que nous enfilons pour consulter les documents originaux. Arrivés fin xviiie, au rayon des années 1770, nous remar-quons immédiatement une caisse qui dépasse légèrement du rayonnage. Et là, bingo : 1776. on dirait que cette caisse a été déplacée récemment par quelqu’un qui ne l’a pas rangée correctement. nous cherchons à la lettre « D », comme Dantoine et nous trouvons plusieurs originaux représentant les Trois grâces. nous repartons dans la salle de consultation

32


pour les étudier. nous nous installons confortablement afin de prendre soin des documents empruntés. nous observons attentivement les différentes mains esquissées par Dantoine. Soudain un détail me chiffonne : « Passe-moi la main en marbre, je veux vérifier la position des doigts ». Ils sont légèrement fléchis, exactement comme ceux de cette main dessinée par Dantoine : c’est la main d’Aglaé, l’une des Trois grâces ! La sculpture de l’opéra Comédie a été modifiée, je me demande bien pourquoi.

ú Wahoo ! Quelqu’un l’aurait-il falsifiée pour cacher un secret ?

ú Houlà ! Tu vas peut-être un peu loin ! s’exclame Leys. ú non… Je vais te prouver que j’ai raison. Récapitulons

tout ce que nous savons depuis le début. Pour commencer, mon père a trouvé une main en marbre en faisant des recherches au fond du Lez. Puis, subitement, il a disparu alors qu’il était allé reprendre ses investigations !

ú Et il a aussi déniché une étrange prédiction du célèbre nostradamus, complète Leys, peux-tu me la montrer nova ?

ú oui, je l’ai sur mon bloc-notes, lisons-la ensemble : « Une clé existe à la surface. Une cité sous le Lez ouvrira et refermera. De la belle Aglaé les non humains retrouveront la main. Avec l’aide de deux humains ».

ú Tu as vu : « De la belle Aglaé… la main », c’est la main des Trois grâces découverte par ton père, s’enflamme Leys. Ce serait la clé dont parle la prophétie, la clé d’un passage vers une cité inconnue ?

ú Dans ce cas, l’entrée doit se trouver sous la statue, mais pas à son emplacement actuel bien sûr puisqu’elle a été déplacée à l’opéra Comédie. Elle se dressait à l’origine dans l’oeuf, place de la Comédie.

ú oui, et « avec l’aide de deux humains », c’est proba-blement de nous dont il s’agit ! C’est papa qui a trouvé cette main, il est en danger, c’est sûr !

Je recommence à paniquer. Leys ne m’en laisse pas le temps, il enchaîne :

33


ú Il faut l’aider : le Lez, on ne peut pas y plonger nous-mêmes, pas d’équipement, dans ce cas suivons plutôt la piste des Trois grâces, j’en suis certain, c’est elle qui va nous mener à ton père.

C H A P I T R E 4

Leys Pliez, pivotez, saut de chat… entrez !

Une cité sous le Lez ? Une clé ? La main d’Aglaé ?Les Trois grâces ouvriraient-elles un passage sous la place ?

Mais comment les ramener à leur emplacement d’origine maintenant qu’elles se trouvent à l’opéra ?

ú Et si on faisait une copie des Trois grâces ? propose nova, nous pourrions y substituer la main d’Aglaé que nous avons trouvée à son homologue puis installer cette réplique à l’emplacement de la statue originale, place de la Comédie.

ú Excellent ! Allons chercher l’imprimante 3D de ton père. De retour, nous nous dirigeons vers l’opéra Comédie.

nous nous faisons passer pour des touristes prenant quelques photos de la célèbre statue montpelliéraine.

ú Je les imaginais beaucoup plus petites, elles sont trois et vraiment… gracieuses ! m’exclamé-je en faisant un petit clin d’œil à ma complice.

nova sort son Icool et se déplace autour de la sculpture de Dantoine, la photographiant sous toutes les coutures, notre réplique devant être la plus exacte possible. Bientôt tout est prêt pour exécuter notre plan, il ne nous reste plus qu’à attendre le moment propice pour agir en toute discrétion.

22h00. L’opéra Comédie ferme ses portes dès que les derniers spectateurs ont quitté le hall d’accueil. La place est déserte, nous la traversons et nous nous dirigeons vers l’holo-gramme des Trois grâces. Je sors la carte mémoire de l’Icool et

34


je la glisse dans l’imprimante 3D. nous voyons apparaître les Trois grâces. nous sommes stupéfaits devant tant de grandeur, de splendeur et… de grâce. Je les soulève et m’aperçois que cette réplique qui semble si authentique est en fait ultralégère. Puis délicatement, en tâtonnant, nova trouve le bon emplacement de la main et remplace avec précaution la main falsifiée par la main d’Aglaé trouvée au fond du Lez. À cet instant, la statue holographique s’évanouit. Tout autour de nous, les lampa-daires flottants en forme de bulle s’éteignent. Les enseignes des magasins cessent d’éclairer les vitrines et petit à petit, dans chaque appartement des immeubles alentour, des bougies électroniques rechargeables s’allument.

ú Que se passe-t-il ? Cette coupure n’était pas prévue ! As-tu apporté tes lunettes infrarouges ? s’affole nova.

ú oui, mettons-les tout de suite, nous pourrons voir… sans être vus ! affirmé-je.

ú Il y a des travaux pas loin, ça doit être pour cela que tout s’est éteint !

ú oui, tu as raison, ça doit être ça ! De plus, c’est une nuit sans lune : nous allons pouvoir agir en toute discrétion…

ú oui, nous avons vraiment de la chance ! C’est alors que nous entendons un son étrange, gai et

mélodieux, très rythmé aussi. ú oh ! écoute, ce sont les trois instruments qu’on étudie en

classe : le montimame, la fluticia et le marakechma ! ú J’adore ces instruments. J’aimerais bien les écouter de

plus près, il y a peut-être un concert sur l’esplanade ? C’est sans doute le spectacle qui a lieu à chaque nouvelle lune !

ú Allons, ce n’est pas le moment de se disperser, nous devons retrouver mon père en priorité, me rappelle nova. Profitons-en justement pour placer la… enfin tu sais de quoi je parle… ajoute-t-elle en chuchotant.

La foule est attirée par cette musique et s’éloigne de la place. C’est le moment idéal. À présent, toutes les conditions sont réunies pour mettre en place notre copie de statue. nous scrutons le sol à la recherche de l’emplacement voulu.

35


ú Regarde ces traces ! s’exclame nova. Une longue ligne courbe raye le sol dessinant l’ancien socle

de la statue à la place de l’hologramme. J’ajuste sans peine la réplique ultralégère des Trois grâces originales.

Soudain, le socle de la statue commence à se soulever. nous entendons un grondement sourd et profond qui semble provenir des entrailles de la terre. Un nuage de poussière jaillit et s’éparpille tout autour de nous. Les Trois grâces tournent sur elles-mêmes. Elles s’éloignent légèrement l’une de l’autre en dansant gracieusement.

ú Regarde, c’est impressionnant, les Trois grâces viennent de danser ! Je le savais !

ú Waouh, c’est magique !… C’est InCRoyABLE ! on avait raison ! Les Trois grâces cachaient bien un secret !

nous nous penchons vers le passage. C’est un trou béant. Une forte odeur qui nous pique le nez et nous gratte la gorge s’en échappe. nous entrons. Il fait froid et sombre, je vois nova trembler de peur. Je me demande ce qu’il y a au bout, ce passage secret me terrifie.

ú Tu es sûr qu’on doit avancer ? Ce grand couloir si profond et cette odeur de renfermé… C’est peut-être un piège, demande nova, pas très rassurée.

ú Mais non, ne t’inquiète pas, il n’y a rien à craindre, dis-je, juste pour la rassurer. Mais au fond de moi, je suis glacé de terreur.

Finalement, on s’engage dans le passage secret. Il se referme brusquement dernière nous.

36


37


38


C H A P I T R E 5

Nova Des chabots sortent de l’ombre

nous plongeons dans le noir, je sors ma lumino-luciole. J’appuie sur le bouton « on », elle s’allume et commence à s’envoler.

ú Waouh, cet engin est génial, tu l’as eu où ? me demande Leys.

ú C’est mon père qui me l’a prêté, c’est une lumino-luciole, il en a plein dans son bureau. Elle a des ailes et se recharge au gaz carbonique et à la poussière.

nous avançons doucement à tâtons en nous donnant la main. Il fait noir mais heureusement de petits cristaux scintillent sur notre passage. on sent l’odeur de la terre humide sous nos pas. Mais tout-à-coup ma lumino-luciole commence à émettre des bruits bizarres comme un grésillement électrique puis se met à bourdonner.

ú Mais que se passe-t-il ? m’exclamé-je. La lumière faiblit puis soudain s’éteint.

Elle roule à terre, nous sommes de nouveau plongés dans le noir. Leys me lâche la main pour la ramasser,

ú Mince, on n’a plus de lumière, il va falloir marcher à l’aveuglette, Leys… où es-tu Leys ?

ú Je suis là, ne t’inquiète pas nova, dit-il d’une voix un peu tremblante qui trahit son appréhension.

J’entends un bruit de pas, puis un tintement : Leys vient de ramasser la lumino-luciole.

Elle ne marche plus… nous poursuivons notre cheminement.

Les parois sont froides et humides. Des dizaines de pierres gisent sur le sol, si bien que toutes les cinq secondes, je trébuche sur

39


un caillou. Je suis effrayée, ce tunnel noir me terrorise. Mais l’idée de retrouver mon père me redonne du courage. nous avançons déjà depuis une demi-heure et pour la quinzième fois mon pied heurte une pierre, je tombe de fatigue.

ú nova, nova, où es-tu ? ú Je suis là je ne peux plus avancer. ú Viens, je vais te porter !

Je sens Leys me soulever et je sombre dans l’inconscience. Je ne sais combien de temps s’est écoulé lorsque j’entends :

ú nova, nova, réveille-toi ! ça fait environ dix minutes que tu t’es assoupie. La lumino-luciole, elle s’est rallumée ! À présent tout fonctionne, c’est mystérieux, peut-être étions-nous dans un champ électromagnétique ?

40


J’ouvre les paupières et un spectacle inoubliable s’offre à moi : une rivière souterraine bleu turquoise coule à mes pieds et des cascades tombent en chute du plafond. Mais le plus étrange, ce sont de drôles de poissons gravés sur la paroi rocheuse.

ú Regarde, leur forme me fait penser aux chabots, leurs nageoires sont identiques. Mais qui a bien pu les représenter sur ces murs ?

Je passe ma main sur la paroi. Lorsque j’effleure les poissons, la muraille s’enfonce légèrement faisant apparaître une porte qui s’ouvre alors. Derrière, un reflet attire notre attention. C’est une pirogue. nous montons dans cette embarcation. Malheureusement le courant est beaucoup trop rapide. nous manquons de chavirer plusieurs fois. J’ai les cheveux trempés et les chaussures de Leys sont pleines d’eau. Mais finalement nous arrivons à un petit ponton et grâce à notre agilité et à notre travail d’équipe nous voilà sur l’autre rive. Une énorme porte en marbre noir ornée d’un coquillage se dresse devant nous. La paroi est humide et la roche glissante, nous nous approchons prudemment. Au-dessus de la porte, sur un mur lézardé, apparaît une fresque représentant des chabots incrustés de corail. À côté se trouve un piédestal en cristal sur lequel sont gravés des symboles mélangés à des lettres.

ú Ça doit être une énigme, attends, voyons voir… Attiré par la lumière qui s’en dégage, Leys commence

à toucher les cristaux. nous remarquons qu’ils s’enfoncent lorsque nous appuyons sur les symboles. Au bout de quelques minutes, Leys se désespère :

ú Ah, je n’y comprends rien, dit-il à bout de souffle. ú Attends Leys, laisse-moi essayer.

Je vois dix lettres gravées, je cherche des mots ayant un rapport avec les poissons. Soudain tout s’éclaire. À présent cela me saute aux yeux ! La fresque illustre le mot de passe ! J’ai compris ! Il faut écrire « CHABoT ». J’appuie successivement sur les lettres : C, H, A, B, o, T. Voilà ! La porte s’ouvre dans un étrange crissement. Une lumière aveuglante nous éblouit. Un souffle d’air doux et humide nous enveloppe et fait ondoyer

41


ma chevelure. Une petite musique douce et entraînante se fait entendre comme pour nous souhaiter la bienvenue. nous sommes un peu ahuris. Après quelques hésitations, nous nous décidons : ce n’est plus le moment de reculer. En avant !

C H A P I T R E 6

Leys La Coméd’eau

ú Waouh ! C’est extraordinaire ! Regarde ! Ces immenses immeubles en forme d’algues ! s’émerveille nova

ú J’aperçois un édifice décoré de jolis coquillages en plein milieu de ce décor aquatique. Juste à côté de ce bâtiment, apparaissent des sortes de maisons portant des ailes sur leur toit. En cheminant, nous découvrons aussi de petits lacs. Je m’en approche. Mon regard est attiré par des poissons qui y nagent tranquillement. Leur ressemblance avec les chabots est frappante. nova est fascinée mais je la tire par la manche l’entraînant un peu plus loin vers une maison où il est écrit : « Bonbons en libre service ».

42


ú Eh, nova, tu crois qu’ils mangent des bonbons dans leur cité ?

ú Peut-être, on dirait même qu’ils adorent ça ! Toutes ces friandises multicolores nous font envie. Il y a en

a de toutes les formes, certaines ont l’air gélatineux, d’autres sentent le poisson. Juste à côté des bonbons en libre service, des chabots sautent, s’envolent et retombent dans le lac. Ils semblent bien s’amuser.

ú C’est étrange, on dirait que les chabots ont évolué : ils ont des membranes. À mon avis, elles leur servent à voler, suppose mon amie.

ú Apparemment ! Je les préfère comme ça, ils sont mignons !

ú Leys, regarde cette énorme bulle en haut !En levant la tête, j’aperçois une sphère transparente qui

englobe ce monde. La lumière la traverse, animant des reflets bleu-vert sur sa voûte. Incroyable, je n’en crois pas mes yeux, nous voilà juste sous le Lez ! Et ces petites bulles qui font des va-et-vient ! on dirait qu’elles se posent sur les toits des maisons pour ensuite repartir au centre de la grande sphère !

ú Mmm, regarde ce bâtiment rouge, bariolé de toutes sortes de bleus et portant une inscription : « école Charles Corail » ! remarque nova.

ú C’est étonnant ! Son nom me fait penser à celui de l’école primaire où nous nous sommes rencontrés, Charles Dickens. Peut-être ont-ils copié son nom ?

ú oui, c’est possible, mais elle est bien différente : les fenêtres sont des vitraux qui ressemblent à des animaux marins et leur contour est en corail…

ú Ah ! Mais qu’est-ce que c’est que ça ? Ces étranges… choses toutes bleues !

Je vois devant moi des… créatures vivantes. Leur peau est d’un beau bleu turquoise, deux paires d’yeux violets me fixent avec bienveillance, sur leur tête pointent deux fines cornes brunes noyées dans un océan de cheveux verts aux pointes bleues. Mon regard se pose sur leurs mains et glisse

43


jusqu’à leurs pieds : mains et pieds sont palmés ! Plus de doutes, ce ne sont vraiment pas des humains. Un peu plus loin, j’aperçois des êtres un peu différents des premiers, on dirait des filles : elles ont de longs cheveux fins et bleus aux pointes vertes. Effrayé, je recule et tombe sur quelque chose de souple.

ú Attention ! Regardez derrière vous ! m’avertit celui qui paraît le plus âgé.

ú Mais qui êtes-vous ? Vous êtes si… étrange !La créature a pourtant l’air accueillant et pacifique. Il nous

regarde avec des yeux émerveillés, comme s’il nous attendait avec impatience depuis longtemps.

ú Je m’appelle maître zokochi, répond-il gentiment. Je suis un Comédin. Et derrière moi, voici les Comédines.

ú Vous… Vous parlez notre langue ?Mon interlocuteur roule les « r », difficile de le comprendre !

ú oui, grâce aux humains, car nous voyons bouger leurs lèvres à travers la bulle qui nous sépare d’eux.

ú Sur quoi ai-je trébuché ? ú Tu es tombé sur le vitorail des aquariums de nos chabots.

Il s’est ramolli pour amortir ta chute alors qu’il est norma-lement dur ! C’est l’avantage avec la matière vivante…

ú De la matière vivante ?nova ne laisse pas maître zokochi poursuivre, déjà elle

s’écrie : ú Un aquarium à chabots ? Mais ils ont disparu depuis

longtemps ! C’est extraordinaire ! Merveilleux ! Sensationnel ! Je n’en crois pas mes yeux, merci d’avoir sauvé les chabots, je les aime depuis que je suis toute petite !

Calmement, Maître zokochi lui explique que les chabots ont seulement disparu en dehors de leur cité, mais que, dans ce monde, ils ont subsisté et sont même devenus leurs animaux de compagnie.

ú Mais qu’est-ce que c’est que ces énormes coquillages que nous avons aperçus en arrivant ?

ú Ce sont nos maisons. Venez, allons les visiter.

44


nous nous approchons de l’une d’entre elles. Elles sont immenses vues de près. Je lance un regard émerveillé à nova. nous sommes pressés d’y entrer, mais ne voyons pas de porte !

Je m’étonne : ú L’entrée se trouve-t-elle sur le toit ? ú Absolument. Le toit est en coquiton et les murs en

bétalgué, explique maître zokochi. ú Mais qu’est-ce que c’est du « coquiton » et du…

« bétalgué ? » demande nova. ú Comme leurs noms l’indiquent, le coquiton est un

mélange de coquillages et de béton et le bétalgué de béton et d’algues.

ú Alors si j’ai bien compris le vitorail des aquariums est un mélange de vitre et de corail, déduit nova.

ú Tu as tout compris à notre langue ! répond Maître zokochi.

Avant de rentrer dans la maison, je remarque un bâtiment différent des autres.

ú Ceci est notre Maison des lois. nous avons quatre lois très strictes, explique notre hôte. Je vais vous les énoncer : la première : Ne jamais pénétrer chez les humains, ni sortir de la « bulle », la deuxième : Ne jamais tuer un chabot (ils sont sacrés), la troisième : Avoir toujours des sucreries en réserve (des sucettes au crabe, des boncolores, des patates d’orge, des glaces au sussorail et du sufisch !), et enfin la quatrième : Ne jamais arracher sa plaque.

ú Mais qu’est-ce que c’est que cette plaque ? interroge nova.

ú C’est une plaque que tous les Comédins et les Comédines portent dès la naissance. Elle leur sert à transmettre leurs idées à la micipas, notre conseil, en réponse à une question posée par un membre de la cité. C’est ainsi que personne ici n’ignore votre venue. En fait, nous vous attendions depuis longtemps.

Tous les Comédins se mettent à genoux. Se tournant vers nous deux, Maître zokochi reprend : nous avons facilité votre arrivée. nous savions depuis longtemps que vous alliez venir dans notre cité.

45


ú Alors… cela veut dire que c’est vous qui… ú oui, c’est nous qui avons provoqué la panne d’électricité

pour que vous rentriez dans le tunnel sans être vus. ú Mais comment avez-vous fait ? demande nova. ú nous pratiquons la magie… Mais je suppose que nova

veut retrouver son père. ú Mon père ! oh, oui !… Comment le savez-vous ? ú La légende nous l’a dit. ú La légende ? Quelle légende ? interroge nova. ú La légende des enfants sauveurs que voici, reprend mysté-

rieusement Maître zokochi :

En l’an deux mille cent, Deux enfants leur père cherchant,

Viendront dans notre cité, Pour nous en rendre les clés, Et retrouveront un parent,

Perdu depuis trop longtemps, Et enfin rassurés, Délivreront la clé,

Qui fermera à tout jamais la cité, Enfouie sous Montpellier.

ú Seriez-vous prêts à nous restituer la main d’Aglaé, la clé de notre cité ?

ú Bien sûr, elle sera à vous dès notre retour. ú Maintenant je vais vous conduire à votre père. ú Vous savez où est mon père ! s’écrie joyeusement nova

les yeux tout ronds et la bouche grande ouverte. ú oui, nous l’avons capturé parce qu’il était sur le point de

découvrir la Coméd’eau, notre cité. En échange de sa liberté, vous devez nous rendre la clé, continue Maître zokochi. Suivez-moi.

nous apercevons une prison en coquiton, les barreaux sont faits d’algues. Le père de nova est là ! Les portes s’ouvrent. Et nova se jette dans ses bras.

46


C H A P I T R E 7

Le professeur Artone épilogue

notre retour à la surface : quel souvenir inoubliable… Accompagnés d’une centaine de Comédins et de Comédines nous avons parcouru le chemin inverse, Maître zokochi en tête du cortège. Puis l’heure des adieux est arrivée. nous avons promis de ne jamais révéler l’existence de la cité de la Coméd’eau. J’ai remis la main d’Aglaé à Maître zokochi. Alors il nous a offert deux chabots. Ce fut pour nova le plus beau des cadeaux ! Par la suite, j’ai pu annoncer au monde entier la découverte de ces étonnants spécimens et je dois dire que j’ai eu mon heure de gloire… Tandis que les chabots, très prisés, agrémentent aujourd’hui le moindre de nos bassins, nova est reconnue comme la plus éminente spécialiste de l’espèce. Je suis si fier d’elle ! Tiens la voilà qui vient me chercher pour la sortie de « Skate action 6 », elle tient absolument à ce que j’assiste à l’avant-première : son cher Leys tient le rôle principal. Il est incroyable ! Il est devenu une vraie star du skate aquatique. Il l’a lui-même mis au point, grâce aux conseils avisés de Maître zokochi qu’il n’a pas manqué de questionner sur le sujet avant son départ. Mais chut… c’est un secret !

Quant à moi, il m’arrive encore de plonger au fond du Lez. Parfois, lorsque mon regard balaie distraitement le lit du fleuve, il me semble apercevoir par transparence des formes onduler doucement, comme autant d’étranges créatures bleutées de l’autre côté d’un miroir sans fond. Alors je souris et je fais un petit signe de la main…

47


école Cheng DuCLASSE D’EMMAnUEL nAVoLy

CM1Dany Alkhadour • Lilou Bonzi Armando Collomb • Alyzée Couquillou Julie Dehoorne • Taliana Didier •Enzo Doree Gauthier Durupt • Matthieu Guiard-Dexet Kiliane Jean • Wellem Jean • Zahra Menasri Charles Piot •Yasmine Snani • Nathan Taillois

CM2Paul-Henri Bochel • Anna Dubout Mathis Gervais • Pauline Guitay • Mathieu Hajibe Afshan Hanif • Rayan Hasnaoui • Yasin Inan Iman Papouet • Wylliam Perlet • Romain Saïdou Maëlle Seblin • Anouar Soufiani

Merci à monsieur René Escudié pour son aide et ses conseils.

49

oscarC H A P I T R E I

Le ballon multicolore

Infonet AfP – 05/04/2044. HIer soIr, vers 23H,

une météorIte est tombée sur PArIs. Heureusement Aucune

vIctIme n’est à déPlorer. c’est déjà lA 47e météorIte

quI tombe sur le terrItoIre euroPéen cette Année.

La nuit est déjà tombée depuis quelques heures sur Montpellier. Les robots nettoyeurs de la SM2n ont commencé à ramasser les déchets du quartier Port Marianne. Dans l’appartement de la famille Lopez, près du bassin Jacques Coeur, tout le monde n’est pas encore couché. David et olivia, les parents, s’occupent de leur petit dernier, Léo, qui n’arrête pas de pleurer.

Malgré le bruit, Antoine, l’aîné de la famille, dort profon-dément. Demain mercredi, il doit se lever tôt pour aller au collège des Aiguerelles II. Une voix insistante parvient pourtant à le réveiller.

ú Antoine ! Antoine, lève-toi. Je dois faire pipi, le supplie oscar.

50


Le garçon à moitié endormi ouvre les yeux avec peine. Au-dessus du bureau, son holo-réveil affiche 23 h 47.

ú oscar… Laisse-moi dormir ! Il est tard… Je dois aller au collège demain !

ú S’il te plait ! Je ne peux plus me retenir, insiste oscar. ú Alors, demande aux parents ! ú Impossible, ils sont trop occupés avec le bébé. En plus

c’est le tour de ton père de le changer. Tu sais comme c’est important pour lui. Je ne veux pas les déranger.

ú Pfouh ! Tu ne peux pas aller aux toilettes pour une fois, râle Antoine ?

oscar répond l’air désolé. ú Tu sais bien que j’en mets partout quand j’essaie… ú Bon, d’accord… Va chercher ta laisse. ú Pas le temps ! Je te promets que je serai sage.

oscar saute sur Antoine. Le chien parlant lèche le visage de son jeune maître pour le remercier. Antoine le repousse pour se lever, puis enfile ses vêtements sur son pyjama. Avant de sortir, le garçon passe prévenir ses parents.

ú Papa, maman, je vais sortir oscar. Complètement débordés par le bébé qui continue de pleurer,

les parents d’Antoine répondent à peine. Sa mère se retourne quand même et le regarde, les yeux pleins de cernes.

ú D’accord mais fais vite… et toi, oscar, sois sage. ú oui, oui, promis. J’écouterai Antoine. Merci, merci.

oscar le labrador beige et son jeune maître sortent de l’appartement et descendent les escaliers. Une fois en bas, ils commencent à faire le tour du bassin. Le dispositif servant à créer des vagues artificielles est éteint à cette heure tardive. Les jets d’eau lumineux et les lampadaires illuminent suffi-samment la place. Antoine traîne des pieds en rouspétant pendant qu’oscar court dans tous les sens.

ú oscar, ça suffit, on rentre. ú Deux minutes encore, s’il te plait !

Le labrador parlant remarque alors un ballon multi-colore près d’une camionnette noire. Incapable de résister à

51

oSCAR

la tentation, oscar se précipite sur le jouet. Antoine crie pour rappeler son chien qui ne l’écoute pas.

Soudain, la porte coulissante de la camionnette s’ouvre en grand. Deux hommes habillés en noir et cagoulés jaillissent du véhicule, un grand sac à la main. Avant qu’oscar ait pu réagir, ils le mettent dans le sac et remontent aussitôt dans la camion-nette. Antoine, trop éloigné pour intervenir, assiste à la scène impuissant.

Le véhicule noir démarre à toute vitesse et disparait au coin de la rue. Choqué, le collégien remonte chez lui en criant pour prévenir ses parents.

C H A P I T R E I I

Au commissariat

WebPub – n'HésItez PAs, c’est nouveAu et c’est utIle ! AcHetez

un collIer PArlAnt à votre comPAgnon AnImAl ! trAducdog

Pour votre cHIen, trAduccAt Pour votre cHAt.

Le lendemain matin, Antoine et son père David, se rendent au commissariat. C’est un nouveau bâtiment qui ressemble un peu à un bateau. Sa façade est bleu pâle et blanc. Sur un grand mur, on peut lire en lettres lumineuses « Hôtel de Police ». Au-dessus de l’entrée, le drapeau tricolore flotte au vent.

David Lopez et son fils entrent dans le bâtiment, une expression grave sur leurs visages. Dans le grand hall, les murs sont faits de miroirs qui reflètent les silhouettes à l’infini. Antoine guide son père vers l’accueil. Une femme un peu ronde en uniforme bleu foncé les reçoit l’air fatigué. Après l’avoir saluée, monsieur Lopez lui explique aussitôt ce qui l’amène.

ú nous venons signaler un vol. ú Pour les déclarations de vols, vous devez prendre un

ticket à l’automate derrière vous.

52


Antoine se dirige vers la machine qu’on leur a indiquée et prend un ticket. Satisfait, il se tourne vers son père qui rajuste ses lunettes noires.

ú C’est bien, on ne va pas attendre longtemps. ú Qu’est-ce qui te fait dire ça ? ú on a le numéro 17 et ils en sont au 12 sur l’écran.

Une quinzaine de minutes plus tard, c’est déjà leur tour de passer. David et Antoine se dirigent vers le bureau des plaintes. Lâchant le bras de son fils, monsieur Lopez utilise sa canne blanche pour suivre la bande de guidage au milieu du couloir. Une fois arrivés, ils ouvrent la porte d’un bureau et entrent à l’intérieur. Là, Antoine découvre un grand policier sportif, cheveux courts et l’air sévère, accompagné d’un berger malinois installé sur un fauteuil.

ú notre chien a été volé ! s’exclame aussitôt le collégien.Le chien policier lui répond l’air désolé.

ú Malheureusement cela arrive de plus en plus souvent ces temps-ci. C’est un chien avec un collier vocal, comme moi, je présume ?

Antoine répond rapidement. ú oui, c’est ça ! Comment le savez-vous ? ú Eh bien, nous avons juste remarqué une augmentation

des vols d’animaux parlants ces derniers temps. nous ne savons pas encore pourquoi, mais nous avons plusieurs pistes…

Le policier humain interrompt son auxiliaire canin. ú Bien Layton, arrêtons de discuter et prenons la plainte

de ces messieurs… ú Tu as raison, Bernard… nom, prénom… ú Lopez, David…

Le berger malinois se penche sur le clavier de l’ordinateur pour écrire la plainte. Il appuie sur plusieurs touches en même temps avec ses pattes, grogne puis s’arrête.

ú Bernard, tu veux bien me remplacer ? J’ai du mal à écrire avec mes pattes…

Le policier athlétique remplace son collègue animal qui continue à poser des questions.

53

oSCAR

ú Pouvez-vous décrire votre chien ?Antoine répond à la place de son père.

ú Il s’appelle oscar, c’est un labrador beige qui a presque trois ans. Il est de taille moyenne. Son collier Traducdog est noir. C’est le chien d’aveugle de mon père. Il l’aide beaucoup. Il est gentil mais un peu fou-fou. Il adore courir après des ballons…

ú Quelqu’un a-t-il été témoin du vol ? ú oui, moi répond Antoine. Je lui faisais faire son tour,

hier soir… ú Vers quelle heure ? ú Minuit moins dix… oscar a vu une balle multicolore

à côté d’une camionnette noire. Quand il a voulu la prendre, deux hommes ont surgi de la camionnette et l’ont mis dans un sac… ça s’est passé tellement vite que je n’ai rien pu faire.

Le policier et son chien ont l’air désolé pour le collégien et son père. Layton, le berger malinois reprend la parole.

ú nous allons faire de notre mieux pour retrouver votre compagnon. Malheureusement ce n’est pas la première fois que nous entendons ce genre d’histoire…

L’agent de police Bernard Castel rappelle son compagnon à l’ordre.

ú Tu ne devrais pas trop parler, Layton. nous ne savons pas si ces affaires sont liées… Monsieur Lopez, Antoine, ne vous en faites pas, nous allons tout faire pour retrouver votre chien.

David Lopez répond l’air troublé. ú Merci. Tenez-nous au courant si vous trouvez quelque

chose. J’arrive à me débrouiller sans lui, mais nous l’aimons beaucoup et nous sommes très inquiets.

ú Comptez sur nous… Antoine et son père se lèvent et quittent le commissariat.

Une fois dehors ils échangent encore quelques mots. ú Je me demande où peut bien être oscar en ce moment,

dit le garçon l’air inquiet. Son père lui répond sur le même ton.

ú Moi aussi…

54


C H A P I T R E I I I

Chez les Michel

montPellIer ProgrAmme – ce soIr sur cAnAl montPellIer,

un nouveAu débAt Au sujet de lA mode des AnImAux PArlAnts

entre mAdAme selvIn des AAA (AssocIAtIon des AmIs

des AnImAux) et monsIeur WAng rePrésentAnt des PAn

(PArtI Pour les AnImAux nAturels).

Le lendemain matin, jeudi, Antoine arrive en retard au collège. Après s’être excusé et avoir présenté sa carte électro-nique de correspondance, il arrive enfin en classe et s’installe à côté de son amie Sacha. Les deux collégiens se connaissent depuis la maternelle. Sacha est une grande fille blonde, dynamique et sportive. Antoine et elle jouent dans la même équipe de foot zéro-g. Les camarades n’ont pas le temps de discuter car ils ont une évaluation d’histoire.

En sortant, Sacha préoccupée par son ami, lui demande ce qu’il a.

ú Alors, poto, t’as perdu au loto ? T’en fais une tête. ú Pas du tout ! J’ai pas le moral depuis qu’on a volé oscar.

En plus, j’ai raté l’évaluation. J’ai écrit son nom partout… ú Toujours pas de nouvelles ? demande Sacha l’air désolé. ú non, aucune… J’arrête pas de penser à lui. J’espère qu’il

va bien.

55

oSCAR

ú J’ai une idée. Vous n’avez qu’à venir manger chez nous demain soir. Ma mère sera d’accord. on verra ce qu’on peut faire pour retrouver oscar.

ú D’accord, répond Antoine sans trop y croire.

56


Le soir suivant, la famille Lopez se rend chez les Michel. Ils frappent à la porte, Anaïs, la maman de Sacha leur ouvre.

ú Bonsoir, bienvenue. ú Merci de nous avoir invités, répond olivia Lopez, la

mère d’Antoine. ú Avec plaisir, nous sommes très heureux de passer la

soirée avec vous. Et Sacha a beaucoup insisté pour que vous veniez ce soir.

La famille Lopez entre dans l’appartement des Michel. Ils sont un peu surpris par le robot qui vient leur nettoyer les chaus-sures. Antoine et Sacha se rendent ensuite dans la chambre de son amie. Là ils retrouvent noam, le petit frère de la collé-gienne. C’est un élève de CM1, plutôt grand et débrouillard pour son âge.

ú Salut noam, dit Antoine d’une voix triste. ú Ben alors, t’es pas content de nous voir, lui demande

noam ? ú Si mais je suis triste. Tu sais qu’on nous a volé oscar. ú Ah oui, c’est vrai ! Comment ça s’est passé ?

Antoine leur raconte l’enlèvement d’oscar puis la visite au commissariat avec son père. En voyant son air désespéré, ses amis essaient de lui remonter le moral.

ú on va t’aider, propose noam… Pour commencer, on va donner des idées chacun notre tour… Par exemple, on pourrait demander dans tout le quartier si personne n’a vu ton chien.

ú Ça sera trop long. on ne pourra jamais parler à tout le monde, répond Antoine.

ú J’ai une trop bonne idée ! s’écrie Sacha, on pourrait faire des affiches et en coller un peu partout.

ú Ah oui ! Ça c’est une super idée, s’exclame Antoine. ú on n’a qu’à commencer à les faire sur mon ordi et on ira

tous ensemble les coller demain. Les enfants se mettent aussitôt au travail. Au bout d’un

moment, madame Michel les appelle pour manger. Les enfants ont hâte d’être au lendemain pour coller leurs affiches.

57

oSCAR

C H A P I T R E I V

Rencontres dans le parc

WebPub – Avec vItAnIm, rendez vos AnImAux AussI IntellIgents

que vous. vItAnIm, essentIel Pour les AnImAux équIPés

de collIers PArlAnts !

Le samedi matin, Antoine et ses amis se retrouvent pour coller des affiches dans le quartier. Alors qu’ils sont près du parc Charpac, un passant et son chien s’approchent d’eux.

L’individu, barbu, est vêtu d’un costume blanc scintillant. Il fume une cigarette électronique des années 2015 complè-tement dépassée. Son chien, un dalmatien excité porte un collier « Traducdog » abîmé autour du cou.

L’homme s’adresse aux enfants d’un ton aimable. ú Bonjour, que faites-vous ? demande le monsieur avec sa

cigarette à la bouche. ú Euh, on colle des affiches, parce que j’ai perdu mon

chien, répond Antoine. ú Ah bon ? Quel genre de chien ? ú Un labrador beige avec un collier Traducdog noir. Il a

voulu attraper une balle multicolore et deux hommes l’ont enlevé.

ú Baballe ? demande le chien du passant.Les enfants regardent le dalmatien qui remue la queue en

tirant la langue. ú Vous ne l’avez pas vu, par hasard ? demande Sacha à

l’inconnu en costume. ú non, non, répond l’homme soudain mal à l’aise… Ah,

j’ai oublié mon sac à la maison et j’ai des courses à faire. Je vais devoir y aller. Au revoir les enfants.

ú Vous ne pouvez pas nous aider ? demande noam. ú non, non, j’ai oublié mon sac… Je dois aller le chercher…

Au revoir. Allez viens, Volt, on y va. ú Baballe ? Jouer, baballe !

58


L’homme au costume scintillant s’enfuit en traînant son chien derrière lui, tandis que les enfants les suivent du regard. Les enfants les regardent s’éloigner avec curiosité.

ú Il avait l’air bizarre celui-là, et son chien n’était pas très malin, remarque noam.

ú oui, c’est étrange, répond Sacha.

Un peu plus tard, dans le parc de la Lironde, les enfants rencontrent une dame un peu âgée portant un badge des AAA accroché à son gilet bleu turquoise. Elle lit l’affiche qu’ils viennent de coller avant de s’exclamer.

ú oooh ! Vous aussi, vous avez perdu une autruche ? ú non, un chien. Il s’appelle oscar, répond Antoine. Vous

savez quelque chose à propos des animaux disparus ? ú oui, je sais que ce sont les PAn qui ont fait le coup ! ú Ah, qu’est-ce qui vous fait dire cela, demande Sacha ? ú Ils détestent les animaux parlants ! Tout le monde le sait !

Et ma Violette, mon autruchette, ma Violettounette… Elle était équipée d’un collier parlant, comme votre chien ! Ce sont eux qui les ont enlevés, j’en suis sûre !

59

oSCAR

ú Vous l’avez dit à la Police ? demande noam. ú oui, mais ils ne font rien ! Ils n’ont pas retrouvé ma

Violette, ma petite autruchette… La vieille dame commence à pleurer. Les enfants remarquent

que son badge des AAA change de couleur et qu’un smiley triste apparait à côté du sigle des amis des animaux.

ú nous on vous a écoutée, madame. on vous préviendra si on retrouve votre Violette, lui dit noam pour la réconforter.

ú Merci les enfants, vous êtes très gentils. Bonne chance pour votre chien.

Après avoir collé leur dernière affiche, les trois enfants décident de rentrer chez eux. Sur le chemin du retour, ils se rendent compte qu’un vieux chat couvert de cicatrices les suit discrètement.

ú Tiens, qu’est-ce qu’il veut ce chat ? demande Sacha. ú Je ne sais pas, mais il a l’air sale et blessé, répond Antoine. ú on devrait le ramener et le soigner, propose noam. ú on n’a pas le temps pour ça, dit Sacha.

Le chat les suit jusque chez eux et les attend en bas de leur résidence.

60


C H A P I T R E V

Enquête au bureau des PAN

flAsH-Info – frAnce 3 l.-r. – nouvel enlèvement

d’un AnImAl équIPé d’un collIer PArlAnt. mArdI dernIer

à montPellIer, Aux envIrons de mInuIt, un cHIen A été enlevé.

celA Porte à dIx le nombre d’AnImAux PArlAnts enlevés

ces dernIers moIs.

L’après-midi, les enfants décident de se rendre au bureau local des PAn. Ils veulent se renseigner pour savoir si ce sont eux qui enlèvent les animaux parlants, comme le leur a dit la vieille dame dans le parc. Le bureau des PAn se trouve entre la place de la Comédie et l’Esplanade. En arrivant, les enfants s’aperçoivent que de grands voiles d’ombrage ont été déployés pour protéger les habitants du soleil. Avec ces pans de tissu blanc accrochés à des mâts, la place centrale de Montpellier ressemble au pont d’un immense bateau.

Un peu plus loin sous les platanes, le trio trouve l’entrée du bureau des PAn. La façade est vert clair avec des vitres en forme d’animaux. Antoine appuie sur une sonnette rouge puis entre avec ses amis. Le chat balafré les a discrètement suivis jusqu’ici. Il se faufile derrière eux avant que la porte ne se referme.

ú Que c’est grand, s’exclame noam ! ú oui, on ne dirait pas vu de dehors, remarque Antoine.

En effet, l’intérieur du bâtiment est étrangement grand. Plusieurs personnes vêtues de costumes de la même couleur que la façade transportent des dossiers, des papiers et surtout quantité de cartons faits de matériaux recyclés. Des grands, des petits, des larges, bref toutes sortes de cartons.

Les trois enfants et le chat se dirigent vers l’accueil du Parti pour les Animaux naturels. Une dame vêtue d’une veste orange et couverte de bijoux les accueille avec un sourire.

ú Bonjour les enfants, vous venez vous inscrire ?

61

oSCAR

ú non, répond Antoine. nous venons pour le journal du collège des Aiguerelles II. nous écrivons un article sur le PAn. nous voulons savoir ce que vous pensez des animaux à colliers parlants.

ú Vous devriez poser vos questions à monsieur Wang, notre président, répond la dame. Son bureau se trouve à l’étage, dit-elle en désignant un escalier noir en colimaçon au fond de la salle.

Les enfants la remercient et s’apprêtent à quitter l’accueil quand la secrétaire les arrête et leur parle à nouveau.

ú Je vois que vous avez un compagnon domestique. Les enfants surpris se retournent et découvrent le vieux chat

balafré derrière eux. ú oh, lui ! Il n’arrête pas de nous suivre depuis ce matin.

Vous voulez qu’on le mette dehors ? demande Sacha. ú non, nous n’avons rien contre les animaux chez les PAn.

Surtout s’ils sont naturels, ajoute la dame. Les enfants, suivis du chat errant, traversent le hall en

direction d’une porte ornée de nombreux logos écologistes. Ils se placent devant un écran intégré à la porte. Le visage d’un homme sévère aux cheveux noirs apparait et leur parle aussitôt.

ú Que voulez-vous ? leur demande-t-il d’un ton sec. ú nous venons pour le journal du collège. Pouvons-nous

vous poser quelques questions ? demande Antoine. ú Entrez, leur répond monsieur Wang d’une voix

monocorde. La porte s’ouvre toute seule. Les enfants entrent alors dans

le bureau du président des PAn. ú Bonjour les enfants, les salue l’homme aux cheveux

noirs, vêtu d’une veste de chasse. Je suis Lucas Wang, je vous écoute.

ú Pour commencer, dit Sacha, dites-nous ce que vous pensez des animaux équipés de colliers parlants.

ú nous trouvons ça bizarre au PAn, répond l’homme habillé en chasseur. Pourquoi les animaux devraient-ils parler notre langage ?

62


ú D’accord… et que pensez-vous des traitements pour rendre les animaux intelligents ? demande la collégienne.

ú nous pensons que ces traitements devraient être stric-tement interdits. Ils sont contre-nature, dit le président des PAn. Ces traitements sont pires que les colliers !

ú Pourquoi ? essaie d’approfondir Antoine. ú Ces traitements transforment les animaux pour toute

leur vie. Les colliers ne sont que des gadgets, en comparaison. ú Je comprends, dit le collégien. Est-ce que vous seriez

prêts à kidnapper des animaux intelligents à collier ? ú Bien sûr que non ! on n’aime pas ces animaux au PAn,

mais pas au point de leur faire du mal, se défend monsieur Wang. ú Connaissez-vous, dans votre parti, des personnes

capables de le faire ? demande Sacha. ú S’il y en a, on les exclut du PAn. on ne veut pas de ce

genre de personnes parmi nous. Les enfants écrivent sur leurs tablettes tactiles en espérant

que monsieur Wang leur en dise plus. Devant le silence du président des PAn, Sacha risque une nouvelle question.

ú y en a-t-il eu beaucoup à Montpellier ?Lucas Wang consulte ses dossiers sur son ordinateur de

bureau avant de répondre. ú Seulement, deux ou trois, mais ils ne sont pas restés.

L’ordinateur du président des PAn est équipé d’un écran transparent dernier cri. Les enfants plissent les yeux pour essayer de lire à l’envers le nom d’un homme qui apparaît sous une photo. L’individu est trapu, le crâne rasé. Il porte un tatouage représentant un crâne de taureau sur le bras. À la vue de cette image, les poils du chat errant se hérissent et il se met à cracher. Monsieur Wang s’aperçoit alors que les collégiens essaient de lire sur son écran. Le directeur des PAn met bruta-lement fin à l’entretien.

ú Bien, j’ai l’impression que vous n’êtes pas ici pour le journal de votre collège ! Je crois plutôt que vous menez une enquête pour les AAA. Je n’ai plus rien à vous dire ! Partez, maintenant !

63

oSCAR

Les enfants essaient de se justifier mais monsieur Wang ne veut rien entendre. Antoine et ses amis finissent par se lever et quittent rapidement le bureau du président.

64


C H A P I T R E V I

Le magicien

WebPub – venez vIte cHez KIds-lAnd AcHeter des sKAte 0g

et d’Autres AccessoIres tendAnce à PrIx bAs !

En sortant du bureau des PAn, les enfants toujours suivis du chat, se mettent à discuter en marchant.

ú Maintenant, on sait que les PAn n’y sont pour rien, dit Antoine.

ú Si ça se trouve, ce tatoué est peut-être la personne qui a volé oscar, rajoute noam. Quelqu’un a pu lire son nom ?

ú Christophe quelque chose, répond Antoine. ú Ménez, moi j’ai lu Ménez. Il a l’air d’une grosse brute,

c’est sûrement lui, rajoute Sacha l’air satisfait. Un peu plus loin, les enfants et le chat mystérieux découvrent

un attroupement. ú Qu’est-ce qu’il se passe ? demande noam. ú on dirait un spectacle de magie, répond Antoine.

Les enfants s’approchent pour voir le spectacle de rue. Ils découvrent un grand magicien, le visage caché derrière un masque qui agite une baguette au-dessus d’un lapin terrorisé. L’homme, mince et vêtu d’un costume noir, attrape l’animal par les oreilles et le fait disparaitre dans un grand chapeau. Le magicien secoue ensuite le haut-de-forme pour montrer qu’il est bien vide et en fait sortir un ballon en plastique multicolore.

ú Tiens, c’est le même ballon que celui qu’oscar a voulu attraper, remarque Antoine.

Captivés par le tour de magie, les enfants n’ont pas remarqué le chat à leurs côtés qui hérisse le poil en feulant.

ú Tu es sûr que c’est le même ballon ? demande noam. Il doit y en avoir plusieurs comme celui-là.

ú Je n’en ai jamais vu d’autres, en tout cas. Tu vois, il y a les mêmes étoiles colorées dessus…

Le magicien s’aperçoit alors que les enfants l’observent.

65

oSCAR

Il croise leurs regards et découvre le chat balafré le poil tout hérissé. À ce moment-là, l’animal saute sur le magicien pour le griffer. Surpris, l’homme masqué pousse un cri et recule. Il n’en faut pas plus à Antoine pour crier à son tour.

ú C’est sûrement lui qui a volé oscar ! ú on n’en sait rien, réplique noam. ú Si, si, c’est lui, je le reconnais ! Il y avait un grand maigre

parmi les voleurs ! C’est lui ! Au voleur ! Il a volé mon chien, s’écrie Antoine en montrant le magicien du doigt.

étonnés, les passants regardent les enfants crier, puis le magicien qui donne des coups de pieds au chat. L’homme masqué se retourne soudain et s’enfuit en courant dans une ruelle du vieux Montpellier. Sacha s’exclame à son tour.

ú Il s’enfuit ! C’est sûrement un des voleurs !La collégienne sportive aux cheveux blonds se lance à la

poursuite du grand magicien suivie par le chat en colère. Les deux garçons se mettent eux aussi à courir après l’homme masqué. Le magicien tourne dans plusieurs ruelles étroites pour essayer de les semer. À un moment, les enfants le perdent de vue. Heureusement, noam voit une forme sombre s’engager dans une rue étroite.

ú Le voilà ! Il a tourné dans cette ruelle !Les trois enfants et le chat se remettent à courir à toute

vitesse. Ils retrouvent le magicien et ne le laissent plus s’échapper. Au bout d’un moment, l’homme masqué se retourne dans une ruelle déserte et fait face aux trois enfants. Ici, il n’y a plus personne pour les aider. Les passants ne les ont pas suivis. Le grand magicien se retourne alors vers les enfants l’air menaçant.

ú Qu’est-ce que vous me voulez, sales gosses ? ú Rendez-moi mon chien ! crie Antoine en pointant son

doigt sur le magicien. ú Je n’ai pas volé votre chien, dit le magicien pour se

défendre. ú Comment savez-vous qu’il a été volé alors ? demande

noam.

66


ú Ton copain a crié plusieurs fois au voleur, répond le magicien.

ú Alors pourquoi vous êtes-vous enfuis comme un criminel ? poursuit Sacha.

ú Ça ne sert à rien de discuter avec vous. Vous n’êtes que des enfants, vous racontez n’importe quoi… Et de toutes manières, vous n’avez aucune preuve, répond l’homme masqué.

ú Pas besoin de preuve, on sait que c’est vous ! s’écrie Antoine.

Attiré par le bruit, un homme ouvre ses volets au-dessus d’eux. Le magicien jette alors une boule en verre qui explose sur le sol. Les enfants se retrouvent aussitôt dans un nuage de fumée qui les fait tousser et les empêche de voir.

Quand la fumée commence à se dissiper, noam remarque un téléphone par terre. Sans trop réfléchir, il le ramasse et le

67

oSCAR

met dans sa poche tout en se frottant les paupières. Antoine et Sacha s’essuient les yeux avec leurs manches pour sécher les larmes qui les brûlent et les empêchent de voir. À côté d’eux, le chat tousse plusieurs fois puis miaule de colère et fouette plusieurs fois le sol avec sa queue. Lorsqu’ils peuvent tous y voir à nouveau, les enfants s’aperçoivent que le magicien a disparu.

Antoine sort son téléphone et appelle aussitôt la police. ú Bonjour, je voudrais parler à Layton et Bernard, s’il vous

plait. ú L’agent Castel et son auxiliaire ne sont pas là pour

l’instant, c’est pour quoi ? leur répond le policier au téléphone. ú nous avons trouvé ceux qui ont volé mon chien oscar ! ú Je vous écoute…

Antoine lui raconte la rencontre avec le magicien. ú Un magicien, oui, oui, c’est noté, répond le policier pas

très convaincu avant de raccrocher. Un peu déçus et encore sous le coup de l’émotion, Antoine

et ses amis décident de rentrer chez eux en tramway. Le chat balafré les suit maintenant sans se cacher.

68


C H A P I T R E V I I

«On arrive Oscar !”

Infonet AfP – 09/04/2044 – Aujourd’HuI, un Peu AvAnt 15H,

les Portes d’un trAmWAy AérIen de lA vIlle de montPellIer

se sont ouvertes AvAnt l’Arrêt. troIs Personnes

sont tombées et ont été légèrement blessées.

Une fois descendus du tramway aérien, les enfants et le chat balafré se rendent chez les Michel. Quand ils sont tous réunis dans la chambre de Sacha, Antoine prend la parole.

ú Bon, récapitulons. Qu’avons-nous appris aujourd’hui ? ú Moi, je ne pense pas que ce sont les PAn qui ont volé

oscar. Par contre, il y a cet ancien membre qui a été licencié parce qu’il était trop violent. Celui avec les tatouages sur le bras. Lui il n’aimait pas les animaux, dit noam.

Le chat se met à miauler à ce moment-là. Comme ils n’arrivent pas à le comprendre, les enfants poursuivent.

ú Moi je me pose encore plusieurs questions, dit Sacha. Qui est ce magicien ? Est-il un complice de Christophe Ménez ? où sont les animaux ?

Quand sa sœur parle de l’homme masqué, noam met la main dans sa poche et sort le téléphone qu’il a ramassé.

ú J’avais complétement oublié, j’ai trouvé ça par terre dans la ruelle ! Vous croyez que c’est celui du magicien ?

Antoine prend le téléphone pour le regarder. ú Je ne sais pas. C’est dommage qu’il soit cassé, il faudrait

pouvoir le réparer pour voir à qui il est. ú J’ai une meilleure idée, dit Sacha. Sortez la carte

mémoire, on va voir sur mon ordinateur ce qu’il y a dessus. noam sort la mini-carte de l’appareil et la tend à sa soeur

qui l’insère dans son ordinateur. Aussitôt plusieurs photos apparaissent sur son écran.

ú Regardez tous ces animaux ! Je parie qu’ils ont tous été volés, dit noam.

69

oSCAR

ú Pourquoi les prendre en photo ? demande Antoine.Antoine se met à chercher rapidement dans les fichiers du

téléphone. Après quelques instants, il découvre le portrait d’un labrador beige enfermé dans une cage.

ú C’est oscar, c’est mon chien, je le reconnais ! ú Voilà la preuve que le magicien fait partie des ravisseurs !

s’exclame Sacha. ú C’est sûr, maintenant on a une vraie preuve, rajoute

Antoine. En tout cas, ils étaient au moins trois pour enlever oscar. Les deux qui l’ont attrapé et celui qui conduisait…

ú Pour l’instant on n’en connait que deux, dit noam. Le magicien et sûrement le tatoué… Comment il s’appelle déjà ?

ú Christophe Ménez, répond Antoine. Les enfants regardent les autres photos. Sur l’une d’elles, ils

voient le bras d’un homme qui tient une autruche par le cou. ú Regardez le tatouage sur son bras. C’est un crâne de

taureau, le même que celui du type exclu des PAn, remarque noam.

ú Tu le fais exprès ? demande sa soeur en soupirant. ú non, je n’arrive pas à me rappeler son nom, c’est tout. ú En tout cas l’autruche, c’est sûrement celle de la vieille

dame, dit Antoine. ú oui, elle s’appelle Violette, précise Sacha… Et là, sur

cette photo on voit un vieux bâtiment au fond. Tu le reconnais noam ? C’est un des bureaux abandonnés de la rue de Thor. on y passe parfois quand on se balade en vélo avec les parents.

Les enfants regardent un instant les photos en silence. ú C’est sûrement là qu’ils ont emmené les animaux. Si on

téléphonait à la police, propose noam. ú Ça ne sert à rien, soupire Antoine. Ils ne vont pas nous

croire, comme tout à l’heure. ú on n’a qu’à y aller nous-même, propose Sacha. ú oui, tu as raison, répondent les deux garçons.

Les enfants se préparent à partir en expédition. Ils prennent des sacs et les remplissent de tout ce qui leur semble utile. Un téléphone portable, une lampe de poche lumino-watt,

70


une bouteille d’eau, une boîte de burger-biscuits, des barres vitaminées pour animaux et même un couteau suisse… Quand ils sont enfin prêts, ils vont chercher leurs aéroboards et partent pour la rue de Thor, le vieux chat balafré toujours à leurs côtés. Alors qu’il patine pour faire avancer sa planche sans roulettes, Antoine pense à son chien. « Tiens bon, oscar. on arrive ! »

C H A P I T R E V I I I

Rue de Thor

WebPub – AéroboArd – nouveAu sKAte 0g tout terrAIn.

Il Peut tout fAIre : Aller sur les murs ou Au PlAfond.

100 % remboursé sI vous n’êtes PAs sAtIsfAIts !

Pressés par le temps, Antoine, Sacha, noam et le chat se rendent en aéroboard à l’adresse indiquée par l’ordinateur de la collégienne. Ils arrivent rue de Thor vers 18 heures 30. L’endroit est inquiétant. Sur place, ils découvrent un petit immeuble de bureaux désaffecté aux fenêtres sales et fissurées, entouré par une grille fermée par un portail délabré. Coup de chance, le portail coulisse sans difficulté. En entrant, les trois amis repèrent une camionnette noire garée dans une allée sombre. Antoine la reconnait aussitôt, c’est celle des ravisseurs.

Le plus discrètement possible, ils s’introduisent dans le bâtiment par une porte de secours enfoncée. À l’intérieur, ils découvrent de vieilles caisses couvertes de poussière et des grilles rouillées qui recouvrent les fenêtres abîmées. Un peu plus loin, dans un carton plus propre que les autres, les enfants trouvent plusieurs colliers traducteurs détériorés. Antoine se met aussitôt à chercher celui d’oscar.

ú Et si on en mettait un au chat ? propose Sacha. ú Bonne idée ! Comme ça, il pourra nous dire ce qu’il a,

répond Antoine.

71

oSCAR

La collégienne se penche pour passer un collier autour du cou du chat balafré. Elle a à peine le temps de le lui mettre quand une voix d’homme les fait tous sursauter.

ú Qu’est-ce que vous faites là ?Effrayé le chat s’enfuit à toute vitesse et disparait dans

l’ombre. noam se tourne vers l’homme habillé en noir et lui parle d’une voix peu rassurée.

ú nous nous sommes égarés. ú C’est ça, c’est ça… ne me prenez pas pour un imbécile.

L’homme qui les a surpris n’a pas l’air très malin. Il a des petits yeux noirs et des bosses sur la tête. Les enfants essaient de s’enfuir et partent en courant. L’homme se met aussitôt à crier.

ú Boss, boss ! Des intrus !Aussitôt, une brute surgit en courant de la cave en courant.

Les enfants reconnaissent immédiatement Christophe Ménez, l’homme exclu des PAn. Ils tentent de s’enfuir par la porte de secours mais le tatoué attrape noam au passage. Sacha essaie alors d’aider son frère. Malheureusement, la brute la saisit de son autre main. La collégienne fait tout pour se libérer mais n’y arrive pas, l’autre est bien trop fort. Antoine se retourne pour secourir ses amis, quand un troisième homme grand et mince sort de l’ombre. Il ne porte plus son masque, pourtant le collégien le reconnait quand même.

ú Vous ne vous échapperez pas cette fois, dit le magicien !Antoine esquive les bras de l’homme qui essaie de l’attraper

et tente une feinte. Malheureusement pour lui, le magicien aussi est très rapide. Il lance une poudre dans les yeux du collégien qui se met à éternuer et n’y voit plus rien. Aidé par le larbin au crâne couvert de bosses, le magicien finit par capturer Antoine.

72


C H A P I T R E I x

Confrontation

WebPub – vous rêvez d’AvoIr un cHIen IntellIgent ?

venez cHez cHIen et comPAgnIe !

un cHIen AcHeté, le deuxIème offert !

Les ravisseurs descendent les enfants dans la cave du bâtiment abandonné. Là, les trois amis découvrent de nombreux animaux, enfermés dans des cages, qui se mettent tous à faire du bruit en même temps. Antoine reconnait les aboiements de son chien parmi les cris des animaux emprisonnés.

ú oscar, oscar, c’est bien toi ? ú ouaf, ouaf, répond le chien qui ne peut pas parler sans

son collier. Sans rien dire, les ravisseurs jettent les enfants dans une

cage vide qu’ils referment aussitôt avec un gros cadenas. Une fois les trois amis enfermés, le magicien s’approche d’eux en ricanant.

ú À présent vous êtes nos prisonniers, leur dit-il. ú Qu’allez-vous faire de nous ? demande Antoine pas très

rassuré. ú Mmh, je ne sais pas trop. Je vais devoir y réfléchir… ú Vous devriez aller réfléchir un peu plus loin alors, dit

noam. on risque de vous gêner. ú Eh, c’est qu’il est pas bête ce gosse, remarque le larbin. ú Idiot, dit le tatoué en lui donnant une tape sur la tête. Ils

pensent qu’ils pourront s’enfuir si on s’en va !La brute se tourne alors vers les enfants l’air menaçant.

ú Vous croyez pouvoir vous échapper, bande de vermines ? ú Vous ne pouvez pas nous garder enfermés comme ça,

répond Sacha. ú Bien sûr que si… Et maintenant, vous allez rester dans

le noir avec les rats ! s’exclame le magicien en riant d’un air machiavélique.

73

oSCAR

Le magicien, la brute et le larbin, sortent de la cave et laissent les enfants dans le noir avec les autres animaux.

Une fois qu’ils sont seuls, Sacha se tourne vers son frère. ú noam, tu as pu garder ton couteau suisse ? ú oui, ils m’ont pris mon sac mais j’ai mon couteau et ma

lumino-watt. Le garçon sort un morceau de plastique de la taille d’une

gomme et appuie sur un petit bouton. Aussitôt, les trois enfants y voient à nouveau.

ú Tu peux couper les barreaux avec la pince du couteau suisse ? demande Antoine.

ú non, mais je peux démonter la serrure avec les autres outils.

noam se met tout de suite au travail. Très vite, les enfants se retrouvent hors de la cage. Antoine se précipite pour libérer oscar qui lui lèche le visage en couinant. Pendant ce temps, Sacha et son frère ouvrent la porte des cages des autres animaux, même celle de l’autruche Violette.

Excités, tous les animaux se mettent à crier en même temps « ouaf, ouaf ! Miaou, miaou ! Hihan, hihan ! ». Attirés par le bruit, les trois voleurs redescendent dans la cave. Quand ils ouvrent la porte, les animaux se précipitent pour s’échapper. Christophe Ménez écarte les bras pour les rattraper. noam tombe à genoux devant lui comme s’il avait peur.

ú Pitié, ne nous faites pas de mal. Le frère de Sacha plante alors son couteau suisse dans le

pied de la brute qui se met à hurler de douleur. oscar saute sur le tatoué pour le mordre. Aidés par les animaux, les enfants parviennent à s’enfuir et sortent du batiment abandonné en courant.

Dès qu’ils arrivent à l’extérieur, des lumières s’allument partout autour d’eux.

ú Ici la police, vous êtes cernés ! Libérez les otages ! ú C’est nous les otages ! crie Sacha.

L’agent Bernard Castel et Layton s’avancent alors vers les enfants.

74


ú Ah, vous allez bien. Tant mieux, dit Layton. C’est ce… chat qui est venu nous chercher.

Le berger malinois se tourne alors pour montrer le chat balafré derrière lui. Celui-ci leur fait un clin d’oeil et disparaît sans un bruit. Pendant ce temps, les autres policiers passent les menottes au magicien et à ses acolytes, encerclés par les animaux. Même l’autruche Violette leur donne des coups de becs sur la tête.

75

oSCAR

ú Bien, il est temps de vous ramener chez vous, dit l’agent Castel aux trois enfants.

oscar aboie pour dire qu’il est bien d’accord lui aussi.

76


C H A P I T R E x

Happy End

flAsH-Info – Aujourd’HuI, un grouPe d’enfAnts A découvert

de nombreux AnImAux volés dAns un bureAu AbAndonné rue

de tHor à montPellIer. Ils ont PermIs de mettre fIn à un

ImPortAnt trAfIc quI durAIt dePuIs des moIs. les voleurs

revendAIent les collIers Au mArcHé noIr et les AnImAux

à des lAborAtoIres Pour qu’Ils servent de cobAyes.

Le soir même, les enfants et leurs parents décorent le salon de l’appartement des Lopez pour faire une grande fête. Ils ont invité l’agent Castel et Layton, ainsi que la vieille dame pour lui rendre son autruche. Il y a plein d’animaux dans le salon et tout ça piaille, miaule, aboie. Antoine se tourne une nouvelle fois vers oscar pour le prendre dans ses bras.

ú Mon chien, tu m’as tellement manqué ! ú oupf, oupf ! ú Ah mais on ne t’a toujours pas remis ton collier ? Ça ne

te dérange pas trop on dirait. Le labrador aboie en secouant la tête. Quand Layton et l’agent Castel arrivent, les enfants se préci-

pitent pour les accueillir. Le policier et son auxiliaire canin les remercient encore.

ú Vous savez, ça faisait plus de trois mois qu’on était après cette bande. Merci de nous avoir aidés à les trouver, même si vous n’auriez pas dû. C’était très dangereux ce que vous avez fait.

ú Le magicien a dit qu’il se vengerait, vous croyez qu’il va essayer de le faire ? demande noam un peu inquiet.

ú ne vous faites pas de soucis, ils seront en prison un bon bout de temps. Avec ce qu’ils ont fait, répond l’agent Castel.

ú Je l’espère ! dit Antoine. Pourquoi enlevaient-ils les animaux, au fait ?

ú Eh bien, le magicien faisait des spectacles de ventriloquie

77

oSCAR

avec des animaux. Quand on a inventé les colliers Traducdog, il a perdu son meilleur tour. Les autres étaient des gardiens de nuit qui ont été remplacés par des chiens intelligents. Ils leur en voulaient d’avoir perdu leur travail. Alors ils les enlevaient et les revendaient sans leurs colliers à des laboratoires pour servir de cobayes !

ú C’est horrible ! Vous pensez qu’il peut y avoir d’autres voleurs d’animaux comme eux ? demande le collégien.

ú Qui sait ? répond Layton. Dans la ville de Montpellier, il y a toujours des mystères...

montPellIer tv-neWs

de notre envoyée sPécIAle cArolIne mArcHAl

ú Suite à l’arrestation de la bande responsable des vols d’animaux, nous allons interviewer des passants au sujet de ces vols et du trafic de colliers traducteurs… Bonjour monsieur, vous avez un beau dalmatien, je vois… êtes-vous au courant de tous ces vols d’animaux ?

ú keuh ! keuh ! Excusez-moi, c’est ma cigarette électro-nique. Des vols d’animaux, euh, non je ne suis pas au courant.

ú Vous savez qu’on les enlevait pour revendre leurs colliers au marché noir ?

ú Euh, non, non pas du tout, je ne le savais pas… Je suis désolé, je dois y aller. on m’attend pour… manger. Volt, tu viens ?

ú Baballe ?

école Paul BertCLASSE DE SERgE PoLIAkoW

CM1Hannady Bzar • Jonathan Cortes-Zaoui Hippolyte Cruaud • Hannah Gisca • Maya Goertz Rachid Haddouti • Kaya Irem • Yamina Khammes Eloïse Laval • Dylan Poumailloux • Jessica Sanvee Clara Schnell • Antonin Soliva

CM2Allyson Abourou • Bachi Leila Arthur Barthelemy • Cyprien Bonnefille Roland Bosc-Ain • Jeanne Clappier-Domenech Anna Fornaciari • Raphaël James Adèle Kahoul • Leïla Karkab • Laura Luong Basile Maisonneuve • Gino Michiels Sébastien Moll • Rania Nabil • Lucas Romano Mejdi Tafat Bouzid

Toute la classe tient à remercier Julie Perrin, M. Roubieu et M. Escudié pour leur soutien et leur participation à cette entreprise. La nouvelle porte en elle les couleurs de leurs précieux conseils.

79

Quitte ou double

I

Ah, quel déménagement !

Noé est impatient de découvrir sa future chambre. Il a onze ans et une soeur de dix ans forcément insupportable qui s’appelle Lali. Son papa Léo et sa maman Lisa ont commencé à emballer les premiers cartons car toute la famille déménage dans cinq jours pour habiter dans une grande maison aux Arceaux.

Les parents veulent déménager car papa a changé de travail. En habitant aux Arceaux, ce sera plus simple pour lui qu’en habitant à Antigone. En plus, le quartier des Arceaux est réputé comme l’un des cinq quartiers les plus agréables et les plus calmes de Montpellier. Les façades y sont peintes de toutes les couleurs, partout il y a des arbres ! Les rues sont piétonnes et très peu bruyantes. Dans la maison qu’ ils vont habiter, il y aura deux étages avec trois grandes chambres et surtout un grand jardin !

Chacun aura sa propre chambre. Ça, c’est le gros changement vital pour Noé car pour l’ instant il partage la même petite pièce avec sa sœur. Lali peindra sa chambre en mauve et lui, la sienne en vert.

80


Ce matin-là, noé jouait avec Lali à cache-cache et c’était au tour de Lali de se cacher pendant qu’il comptait les yeux fermés, contre l’un des murs du couloir des parties communes de leur immeuble à Antigone. Tout à coup, il entendit sa sœur crier très fort :

ú noé ! Vite ! Viens voir !Tout d’abord noé s’inquiéta et eut peur car il pensa qu’elle

s’était fait mal. Il suivit les cris qui le menèrent dans leur cave jusqu’à l’étagère à confitures. Lali s’affairait à débarrasser une étagère de ses pots.

ú T’es pas folle de crier comme ça ? ú Ce n’est pas ma faute, ce sont ces bruits que j’ai entendus

qui m’ont fait peur. ú Quels bruits ? ú Chut ! écoute, tu vas entendre.

noé tendit l’oreille afin de percevoir les bruits dont parlait Lali.

En effet, des bruits très inquiétants s’échappaient de derrière l’étagère. En y prêtant plus d’attention, noé remarqua alors qu’il y avait une porte dissimulée derrière les pots. Il la voyait pour la première fois. L’étagère avait été partiellement dégagée probablement au cours d’un premier déménagement. L’envie de voir ce que pouvait bien cacher cette porte fut plus forte que celle de continuer à jouer à cache-cache.

ú Ces bruits m’inquiètent mais j’ai très envie d’entrer, pas toi Lali ?

ú oui, moi aussi. Ces bruits, on dirait un monstre qui ronfle. Tu y vas toi d’abord, moi je couvre les arrières, dit Lali.

ú Pas question, c’est ensemble ou pas du tout. noé enjamba la planche dégagée de ses pots et poussa la

porte. Une fois le seuil franchi, les enfants éprouvèrent une curieuse sensation : d’étranges picotements remontaient le long de leur colonne vertébrale jusqu’à leur nuque. Cela cessa brutalement. Ils découvrirent une pièce plongée dans une obscurité presque totale. La peur les envahit et Lali s’agrippa au bras de noé. Le bruit était plus fort à l’intérieur de la pièce,

81

QUITTE oU DoUBLE

c’était comme le bruit d’une locomotive vivante qui respirait. Il y faisait assez froid ; une odeur marine baignait tout l’espace alentour. on distinguait vaguement en son centre deux formes ressemblant à de gros cocons. C’était cela qui produisait le son que les enfants avaient perçu depuis la cave. Il y avait sur le côté, contre le mur de droite, une console couverte de commandes lumineuses. La table clignotait en rythme avec une multitude des tuyaux qui s’échappaient de son socle. Ils s’enroulaient sur les gros œufs qui trônaient au centre. Les deux petits cœurs tapaient de plus en plus fort dans les poitrines des enfants et semblaient vouloir battre sur la mesure des deux gros cocons.

ne parvenant pas à distinguer le fond de la pièce, ils se décidèrent à avancer un peu plus pour mieux l’explorer.

À tâtons, noé chercha un interrupteur contre le mur le plus proche. Il finit par trouver un bouton qu’il enfonça fermement. La lumière inonda brusquement la pièce mais avec elle d’autres bruits se firent alors entendre : la console qu’ils avaient aperçue dans la pénombre semblait tout à coup excitée, ses touches de lumière transmettaient des ordres aux câbles qui les trans-portaient jusqu’aux cocons. Ceux-ci commencèrent à s’agiter énergiquement, ils se tortillaient dans tous les sens.

ú Quelque chose est en train de naître ! chuchota Lali à l’oreille de son frère.

ú on dirait la chrysalide d’un papillon, lui répondit noé. Les enfants étaient totalement hypnotisés, fascinés par

la scène à laquelle ils assistaient. Petit à petit, les cocons se déchirèrent, les tuyaux sifflèrent et tombèrent sur le sol. Puis émergea de cet amas de câbles d’abord une tête, puis les épaules et enfin tout le corps d’un petit garçon. Juste après, une petite fille sortit du second cocon. Les deux silhouettes se dressèrent lentement, péniblement. Les deux nouveaux êtres relevèrent la tête d’un même mouvement. Ce fut le choc ! C’était comme se regarder dans un miroir ! noé et Lali contemplaient leur image dans un reflet qui n’existait pas. Effrayée, Lali poussa un cri, trébucha et tomba dans les bras de son image. Elle se libéra pour retourner aussitôt aux côtés de son frère.

82


83

QUITTE oU DoUBLE

L’image de Lali était pareillement effrayée, elle aussi se précipita dans les bras de son compagnon. Les deux groupes restèrent un long moment face à face, se dévisageant mutuel-lement apeurés.

I I

Lali rassembla tout son courage : ú Qui êtes-vous ? ú nous sommes noé et Lali, répondirent les images. ú Menteurs ! C’est nous noé et Lali ! rétorqua vivement

Lali. Et Lali poursuivit par une série de questions auxquels les

doubles répondirent instantanément. ú Ah oui et qui donc est votre maîtresse ? ú Madame grosné, répondit l’image de noé. ú Quel est le nom de famille de maman ? ú Matinier. ú De quelle couleur est le papier peint de ma nouvelle

chambre ? ú Mauve. ú Je suis née quel jour ? ú Le 3 mars 2055. ú Et noé ? ú Je connais quand-même ma date de naissance ! répondit

l’image de noé. ú Bon d’accord. Mais peux-tu me dire quand mamie

Hélène a rencontré papi René ? ú Le 19 mai 2014. ú Quel était le nom du doudou de noé ? ú oh dis, tu exagères un peu : Lapinou, personne ne le

connaît aussi bien que moi !Lali n’en revenait pas, ils savaient tout ce qu’eux-mêmes

connaissaient, jusqu’aux secrets les mieux gardés. ú Mais comment est-ce possible que nous ayons les même

84


souvenirs alors que nous ne nous sommes jamais rencontrés ! s’exclamèrent les doubles de noé et Lali.

ú Ho les noé, on ne va pas attendre le déluge dans cette pièce ! Viens ici s’il te plaît noé, ajouta avec impatience Lali.

ú Lequel ? Lui ou moi ? interrogea noé. ú Les deux.

Tous deux avaient une ressemblance stupéfiante : les mêmes yeux verts, les cheveux tout aussi bruns l’un que l’autre ; tandis que Lali et son image avaient quant à elles les yeux bleus et les cheveux d’un brun un peu plus clair que ceux de noé. Quelque chose clochait par ici…

ú À quoi peuvent bien servir ces étranges machines ? demanda Lali.

ú Et tous ces boutons ? À quoi sont-ils utiles ? renchérit noé.

ú nous n’en n’avons pas la moindre idée, répondirent en chœur les deux « nouveau-nés ».

Toutes ces machines devaient avoir de l’importance sinon pourquoi les avoir si bien cachées dans cette pièce secrète ?

ú Dans les cocons, vous dormiez ? leur demanda noé. ú Je ne sais pas si nous dormions… lui répondit son image.

Il y avait tant de questions sans réponse… Les quatre enfants dirent dans un même élan : « Et si nous

menions une enquête ! » Ils ne pouvaient être que d’accord puisqu’ils avaient eu la

même idée au même moment. Les enfants commencèrent par observer minutieusement la pièce :

ú C’est peut-être une Machine à sosies ? lança Lali. ú Hein, cela veut peut-être dire que nous avons été sosifiés ! ú Je comprends maintenant, nous sommes vos sosies et

vous êtes nos sosies, dit joyeusement noé. ú Je propose, dit Lali, que pour mener notre enquête et

pour se reconnaître plus facilement le nouveau noé sorti du cocon soit appelé néo et que la nouvelle Lali à peine éclose soit prénommée Lila. Et à chaque fois que nous nous verrons, néo et Lila vous vous gratterez la tête.

85

QUITTE oU DoUBLE

ú ou bien vous pourriez taper du pied ? proposa noé. ú Mais non, cela ne serait pas discret, déclara Lali.

Les enfants pensèrent à tout dire aux parents, mais ils renoncèrent bien vite à cette idée car néo et Lila ne voulaient pas retourner dans ces machins-choses bizarres ; sans oublier que noé et Lali avaient peur de se faire punir.

ú Moi, j’étouffe dans cette cave, sortons ! dit Lila. ú Attendez, attendez ! Vous imaginez, si nos parents nous

voient tous les quatre !… Alors, discutons un peu avant de sortir.

Les enfants décidèrent de se disperser de la façon suivante : noé et Lila poursuivraient les recherches dans la pièce secrète tandis que néo et Lali retourneraient auprès de la famille. Au moment du repas, ils échangeraient leurs places afin que tous les quatre puissent manger.

Ils s’étaient donné rendez-vous, dans cette pièce, à cinq heures pour faire le point.

Après le départ de néo et Lali, noé et Lila entamèrent une exploration plus minutieuse parmi les nœuds de câbles emmêlés. Ils recherchaient une piste à suivre. Les enfants progressaient lentement. Tant de tuyaux, tant de fils électriques et de câbles… Ils étaient au centre d’un labyrinthe. Dans tout ce dédale, il fallait trouver un fil et le suivre jusqu’à la lumière, mais lequel tirer ?

ú Regarde, sur le bureau il y a plein de documents… Ils s’approchèrent prudemment de la console. Pendant

l’examen de celle-ci, Lila remarqua une plaque rivée sur l’un de ses flancs.

ú Regarde ça !on pouvait y décrypter cette étrange inscription :

« Stolontech »… ú C’est le nom de… ah, je le connais ce nom ! où l’ai-je vu

écrit ? où l’ai-je entendu ?

86


87


88


I I I

Pendant ce temps néo et Lali avaient regagné l’appartement tout encombré de cartons et de sacs.

Les deux enfants s’approchaient de leur chambre. Maman débarrassait le dressing juste à côté. C’est là que quelques leçons de théâtre leur auraient été bien utiles pour que la matinée se passe au mieux.

ú où étiez-vous passés ? Et puis, il est temps de vous y mettre les enfants, dit maman très affairée.

ú Euh… En fait euh… on était dans le salon et puis… euh…

ú on jouait à la PS 12 ! ú on l’a échappé belle ! chuchota néo lorsque maman

repartit vider quelques tiroirs. Dans la chambre, les enfants entreprirent de ranger leurs

affaires. ú Lali ! Rassemble tes jouets dans un carton puis va le

déposer dans le couloir de l’entrée ! cria maman en emportant avec elle une grosse boîte.

Lali chercha un carton qu’elle ramena sous son bras. ú néo ! Tu peux m’aider à sortir les jouets du coffre ! ú néo ? Mais depuis quand appelles-tu ton frère néo ?

interrogea maman. ú Euh… J’ai dit néo ? ah, oui, avec néo… pardon, avec

noé, on a inventé un jeu et… euh… en fait le jeu c’est que… on doit échanger les lettres… des prénoms !

Un peu avant midi, les enfants affamés par toutes ces aventures descendirent à la cuisine pour voir ce qu’ils allaient manger. Maman s’activait en tout sens au milieu des plats et des casseroles. néo emmena les verres sur la grande table rectangulaire de la salle à manger. Lali se chargea des assiettes décorées de petites fleurs bleues et maman apporta les couverts. Une fois la table préparée, maman cria : « À table ».

néo s’assit à côté de papa, Lali à côté de maman et papi s’installa en bout de table comme à son habitude.

89


90


Le repas allait commencer, comme tous les jours, par de la salade que papi René ramenait régulièrement de son jardin.

Papa prit la parole : ú Alors comment s’est passée votre matinée ? ú Bien ! nous avons cherché des indices sur cette drôle

d’histoire, dit néo. ú Quelle histoire ? Vous n’étiez pas censés trouver des

cartons pour le déménagement ? ú Si si si c’est ce que nous avons fait papa ! s’empressa

de répondre Lali. néo, heu… zut alors ! noé dit vraiment n’importe quoi !

ú Vous êtes sûrs que tout va bien ? interrogea papa. Lali voulut rapidement se sortir de ce mauvais pas et chercha

à faire diversion. ú Bon je vais amener la salade, elle est trop bonne ! ú Lali, tu n’aurais pas quelque chose à nous avouer ? dit

maman avec un petit air soupçonneux. ú Heu… non rien du tout ! bafouilla Lali. En tout cas la

salade de papi c’est vraiment ma préférée !Après avoir apprécié cette excellente entrée, papa alla donner

un coup de main à maman pour couper le gigot, rejoint de peu par papi qui voulait toujours apporter son petit conseil.

néo et Lali profitèrent de leur absence pour s’éclipser et laisser leurs places à noé et Lila qui étaient discrètement remontés. Au passage, ils récupérèrent le tactile de Lali. Une fois les deux enfants assis et les trois adultes revenus avec le plat, papi dit à Lila (que tout le monde prenait bien évidemment pour Lali) :

ú Tu préfères t’asseoir à côté de papa maintenant Lali ?Tout le monde se regarda étonné. noé et Lila ne comprirent

pas la remarque de leur grand-père. Enfin, noé qui avait très faim s’empara d’une tranche de

pain. C’est alors que papa lui fit remarquer que c’était déjà le cinquième morceau qu’il avalait. Il fallait que noé « ralentisse » sinon il terminerait son repas à l’hôpital. Tout le monde éclata de rire jusqu’à ce que Maman apporte le plat d’épinards…

ú oh non ! Pas ça ! crièrent en cœur les enfants.

91

QUITTE oU DoUBLE

ú Vous êtes de vrais sadiques ! renchérit papi René. Venez les enfants, je vous sauve la vie et vous emmène manger des frites bien grasses en regardant « Pocket-Monster » à la télé.

Papi René fit mine de se lever en riant de bon cœur. Lila comprit qu’il fallait se faire une raison : ils devraient manger les épinards sans broncher et puis elle avait faim, alors… Elle se permit tout de même une petite remarque :

ú Papi, de un : tu es le dernier dinosaure qui dit Pocket-Monster, les êtres civilisés du xxie siècle disent Pokemon ; et de deux : c’est plus vraiment de notre âge ni du tien.

La remarque de Lila provoqua un rire général autour de la table. noé ne pouvait s’empêcher de regarder avec admiration cette petite fille qui ressemblait comme deux gouttes d’eau à sa sœur et qui possédait en plus son humour.

Une fois le repas terminé, les enfants retournèrent à l’abri de la cave et noé en profita pour dire à Lila :

ú nous avons fait bien trop de gaffes, il va falloir être beaucoup plus prudent à l’avenir.

En début d’après-midi, néo et Lali, quant à eux, allèrent aider papi René à ranger les affaires dans des cartons.

En regardant dans une boîte, Lali vit un vieux porte-clés qui lui rappela ses vacances à Paris avec papi René.

ú Tu t’en souviens papi, on a partagé de bons moments là-bas.

Et papi René lui répondit : ú Bien sûr que je m’en rappelle ! Puis il la prit affectueu-

sement dans ses bras. ú Eh bien, on ne me fait plus de câlins noé ? dit papi en

ouvrant les bras pour accueillir néo. ú Si, si, si !… je suis tellement content !

néo serra très fort son grand-père contre son cœur.Un peu plus tard, les enfants surprirent papi, assis dans un

fauteuil feuilletant un album de photos où noé et Lali n’avaient pas encore cinq ans. Papi rêvait : il en était aux vacances qu’ils avaient passées ensemble cet hiver-là. Il en avait les larmes aux yeux.

92


Ils continuèrent à ranger dans la bonne humeur, apportant les petits cartons jusqu’à la camionnette. Puis papi leur offrit une glace. Ils rentrèrent joyeusement à la maison. Il était prati-quement cinq heures et il était temps d’arrêter les travaux pour aller retrouver noé et Lila dans la cave.

I V

ú Bon, alors, s’impatienta Lila, on commence par où ? ú Ben, il y a des rumeurs sur une société du nom de

Stolontech près du zoo de Lunaret, répondit noé qui pianotait à toute allure sur le tactile. Il baissa la voix :

ú Il semblerait qu’ils fassent des expériences sur les animaux !

ú ok, on va y aller en tram. Une demi-heure plus tard les deux enfants se trouvaient

dans le tramway : ligne cinq. À l’intérieur il y avait beaucoup de personnes âgées. Au dehors, on voyait les coques des téléphé-riques qui jouaient avec les rayons du soleil. Cinq arrêts plus tard le tram s’arrêta devant un immeuble flambant neuf aux parois entièrement végétalisées.

ú Tu penses que c’est là ? demanda Lila à noé. ú oui, répondit-il en désignant la pancarte en verre fumée

indiquant le nom de la société. Les deux enfants se mirent en route et se retrouvèrent

devant une grande porte en acier gardée par deux robots qui leur demandèrent d’une voix métallique :

ú Quel-â-ge-a-vez-vous ? ú Dix et onze ans, répondirent en chœur noé et Lila. ú E-reur-âge-mi-ni-mum-dix-huit-ans-qui-ttez-ces-li-eux-

si-non-nou-za-pe-lons-la-po-lice. »Les deux enfants partirent en courant, redoutant que la

police ne surgisse. Ils se réfugièrent à l’entrée du zoo et reprirent leur souffle.

Derrière eux, une porte donnant accès à la serre tropicale

93

QUITTE oU DoUBLE

s’ouvrit brusquement et un homme apparut sur son seuil. Les enfants se retournèrent vivement. Cette personne était immense, avec des main si grosses qu’on aurait pu croire qu’elle les avait empruntées à un gorille. Elle possédait un cou long comme celui d’une girafe et ses lunettes à vision augmentée lui donnaient le regard perçant d’un aigle !

ú Bonjour les enfants, vous avez l’air perdu. Avez-vous besoin d’aide ?

ú C’est-à-dire que… ú Moi, c’est Antoine et je travaille au zoo comme soigneur.

Un peu rassurés, les enfants se présentèrent à leur tour puis commencèrent à questionner le soigneur.

ú M. Antoine, savez-vous ce que fait l’entreprise Stolontech ?

ú Je connais un peu cette entreprise, répondit-il en détaillant Lila. Il ajustait ses lunettes tactiles avec insistance. Pourquoi vous intéressez-vous à cette société ?

Les enfants hésitèrent à répondre, ne sachant pas s’ils pouvaient vraiment lui faire confiance. M. Antoine remar-quait le trouble des enfants, il décida de leur venir en aide :

ú Je vois une petite tache sous ton bras droit, jeune fille, dit-il en s’adressant à Lila.

Les enfants restèrent silencieux, noé observa à son tour l’aisselle de Lila et découvrit effectivement la petite tache !

ú Venez avec moi les enfants je vais vous expliquer ce qu’est la tache que vous voyez.

Ces derniers le suivirent, il ajouta à l’attention de noé : ú Votre « sœur » est en fait un clone. ú Mais c’est quoi exactement un clone ? demanda noé. ú J’allais y venir : un clone est la copie parfaite d’un être

vivant, elle garde exactement les mêmes caractéristiques, les mêmes gènes que ceux de l’être dupliqué.

ú C’est quoi un gène ? poursuivit noé. ú C’est en quelque sorte le code d’identité d’un individu.

Chaque être humain, chaque animal et chaque plante possède un ensemble de gènes unique qui définit son identité. La

94


société Stolontech que vous recherchez, s’occupe justement de produire des clones.

ú Mais pourquoi produit-on des clones ? dit Lila. ú Suivez-moi, je vais vous faire visiter la section des plantes

et des animaux en voie de disparition dont je m’occupe. ú Regardez cette magnifique fleur, c’est une Rose

nepticula, elle ne s’ouvre que la nuit. Sans le clonage, cette rose n’existerait plus car il ne restait que trois exemplaires de cette fleur dans le monde avant que nous fassions appel aux services de la société de clonage. grâce à Stolontech nous pouvons préserver et même développer cette espèce rare. M. Antoine ajusta ses lunettes tactiles et poursuivit la visite.

La cage suivante semblait sans intérêt car elle n’abritait qu’un panda mais M. Antoine s’arrêta pourtant devant elle et dit :

ú Il s’agit de la copie conforme d’un panda qui vit en Chine : un clone que la Stolontech a réalisé sur la demande du zoo. Le panda est une espèce rare et il nous a semblé important de répliquer cet animal afin de l’élever et le faire se reproduire avec une femelle qui vit actuellement au zoo de Beauval. Ainsi nous participons au sauvetage de l’espèce. Comme pour le dauphin noir et le requin blanc qui, à force d’être chassés par les hommes ont failli totalement disparaître.

ú C’est incroyable ! Mais comment les reconnaît-on ? ú Ils ont tous une petite tache verte, appelée « stolon »,

sur le corps ou à la base des feuilles pour les plantes. Comme celle qu’a Lila sous son aisselle. Cette marque est plus qu’un tatouage, c’est un organisme implanté dans le corps qui assure et contrôle que les cellules se reproduisent à l’identique du modèle à cloner. Cet organisme est indispensable à la vie du clone car les cellules vivent et meurent sans arrêt.

noé semblait confus : ú Je comprends pourquoi le clonage existe pour les espèces

en voie d’extinction, mais pourquoi Lila ? ú Voilà la seconde activité de Stolontech : la fabrication de

« clones d’assurance ». M. Antoine se gratta la tête pour trouver les mots afin d’expliquer aux enfants de quoi il s’agissait.

95

QUITTE oU DoUBLE

ú Ce sont des clones réalisés très rapidement pour assurer à un individu riche la possibilité de disposer d’organes compa-tibles avec son organisme à n’importe quel moment de son existence. Mais on utilise de plus en plus ces clones pour prolonger la vie d’un individu au-delà de son temps d’existence normal.

M. Antoine regardait Lila avec tendresse. ú Voilà pourquoi on t’a cré... euh... t’a fait naître.

V

Aux environs de quatre heures, après avoir remercié M. Antoine pour sa gentillesse et sa disponibilité, noé et Lila rentrèrent rapidement à la maison et se cachèrent dans le couloir près de la cave, attendant que néo et Lali les retrouvent au lieu du rendez-vous.

ú Ah, les voila, dit Lila. Une fois réunis dans la chambre aux chrysalides, ils se

racontèrent leurs aventures respectives. ú Alors comme ça, on est des clones… ú ouais ! Et la « marque » de distinction, c’est une tache

verte que vous avez sous le bras !néo pâlit.

ú Qu’est-ce qu’il y a ? lui demanda Lila. ú Ben, il me semble avoir vu une tâche comme celle de

Lila sous le bras de papi quand il m’a pris dans ses bras tout à l’heure.

ú Quoi ! s’exclamèrent les enfants. Les enfants étaient stupéfaits par la révélation que néo

venait de leur faire au sujet de papi René. Tout à coup un bruit les surprit, Lali leur fit signe de se

taire en posant son doigt sur la bouche. Le bruit se répéta, il provenait du couloir. Personne n’osait

se retourner, la peur les avait littéralement paralysés. noé se rapprocha de Lali et lui prit le bras pour se rassurer, néo fit

96


de même avec Lila. Plus aucun bruit dans la pièce, jusqu’à ce qu’ils voient apparaître une ombre géante sur le mur du fond. Lali poussa un cri, elle ne pouvait contenir une minute de plus ses émotions. Lila se mit elle aussi à crier et les deux garçons aussi courageux soient-ils ne purent se retenir de hurler de concert.

Ce n’est qu’en reconnaissant le visage de leur grand-père et son doux sourire que les enfants se calmèrent un peu. Tout à la fois rassurés par la présence de papi mais également inquiets à la perspective de se faire gronder.

noé reprit ses esprits le premier et bredouilla : ú Tu sais papi, on n’a pas fait exprès. on ne voulait pas

faire de bêtises, tout s’est compliqué quand on a voulu y voir plus clair dans la pièce…

ú Ce n’est pas grave… chut, chut… Calmez-vous. Il est très important et urgent que nous ayons une petite discussion. Je vais vous expliquer. J’ai compris depuis déjà un petit moment

97

QUITTE oU DoUBLE

ce qui s’était probablement passé et je me demandais combien de temps vous mettriez à venir m’en parler.

ú Papi, dit Lali, nous avions peur de nous faire gronder et nous ne comprenions pas nous même ce qui venait de se produire.

ú Comment as-tu découvert qu’on était des clones Lila et moi ? demanda néo à papi.

ú J’ai commencé à avoir un doute lors du repas quand vous avez échangé vos places et que vos propos étaient incohé-rents. Puis, j’en ai eu la certitude lorsque j’ai vu sous le bras droit de néo la tache de clonage. Voila voilà… Pour en avoir le cœur net, je me suis rendu à la « chambre de vie », c’est-à-dire ici. À l’entrée, les téléscripteurs de mémoire indiquaient qu’ils avaient chargé vos souvenirs tôt ce matin et j’ai découvert les caissons vides.

ú Mais toi aussi tu as une tache sous le bras droit papi, lança néo.

La remarque de néo eut l’effet de stopper le temps. Les enfants avaient l’impression que la fin du monde était toute proche.

ú Ben…, papi René inspira profondément et ajouta : moi aussi… je suis un clone…

ú Quoi ! dirent en cœur les enfants. ú Je suis un clone, répéta papi René.

Brusquement, Lali se mit à pleurer. ú C’est… C’est pas vrai !… Imposteur !… Mon papi est

toujours vivant !Papi René prit Lali dans ses bras et la serra contre lui

tendrement. ú Je suis papi René, rassurez-vous ! Et si je suis encore ici

parmi vous c’est bien parce que je vous aime. Les enfants ne répondirent rien. Mais sur chacune de leurs

petites joues une larme coula. Puis il les invita à s’asseoir autour de lui afin de leur raconter en détail son histoire :

ú Voilà : il y a huit ans, je… enfin papi, a commencé à se sentir de plus en plus faible. Des examens médicaux ont alors

98


révélé qu’il était porteur d’un gène responsable de son état. Ce gène provoque une maladie qui se manifeste à un âge avancé de la vie. Cela condamnait votre grand-père à mourir rapidement. Les médecins ont immédiatement procédé au dépistage du gène chez tous les membres de la famille. Les analyses de Lisa et Léo furent heureusement négatives. Les analyses de vos parents Léa et Léo furent heureusement négatives. En revanche… vos parents comment dire… les deux vôtres ont montré que vous étiez porteur de ce gène, dit papi en regardant noé et Lali. Vos parents étaient effondrés. Ils prirent alors la décision de contacter la société Stolontech pour qu’elle produise vos deux clones. Vous étiez si petits encore à cette époque, personne ne trouvait les mots pour vous expliquer tout cela. Quelques jours plus tard, papi René retira toutes ses économies pour réaliser son propre clone et aider vos parents à payer la création de néo et Lila. Il se sentait en partie responsable de ce qui vous arrivait. Je poursuis sa vie à présent, je suis tellement attaché à vous et je vous aime de tout mon cœur… ne m’en voulez à pas, ni non plus à vos parents.

V I

Les enfants comprirent que papi René allait les aider à trouver une solution pour ne pas renvoyer néo et Lila au « dortoir de la Stolontech ».

ú Papi, comment allons-nous faire ? ú ne t’inquiète pas noé, j’ai une idée : voilà, cela fait

longtemps que j’ai très envie de partir m’installer en Chine. ú En Chine ! s’exclamèrent les enfants. ú oui, en Chine. Mais j’y ai toujours renoncé par amour

pour vous et le lien qui nous unit ne me permettait pas de vous quitter. Aujourd’hui, je pourrai partir tout en profitant de vous… Et oui ! En partant avec néo et Lila, j’aurai le sentiment de rester près de vous. De plus néo et Lila pourront grandir sans retourner chez Stolontech.

99

QUITTE oU DoUBLE

ú géniale, cette idée ! dit néo. ú J’ai toujours rêvé de partir visiter la Chine, dit Lila. ú Je suis heureux de voir autant d’enthousiasme pour mon

projet. ú ne plus te voir, mais ce sera horrible pour nous ! dit Lali. ú non mes enfants. grâce à ce départ, vous aurez la chance

de découvrir un nouveau pays en me rendant régulièrement visite pendant vos vacances scolaires. De plus, nous passerons de bons moments ensemble quand nous nous retrouverons tous les cinq.

ú nous pourrons aller voir la grande muraille de Chine ? dit noé.

ú Et la Cité interdite ? dit Lali. ú Bon les enfants, chaque chose en son temps. D’abord je

crois qu’on ne peut pas garder plus longtemps un pareil secret, il faut que nous le dévoilions à vos parents.

ú non s’il te plaît ne le leur dis pas, ils vont nous remettre dans les sarcophages ! s’inquiétèrent néo et Lila.

ú Mais non, ayez confiance. Après tout, vos parents sont aussi mes enfants !

100


101


102


Ils quittèrent la pièce secrète pour se rendre à la cuisine où se trouvaient en ce moment Lisa et Léo.

Leur entrée dans la pièce eut l’effet d’un sortilège jeté sur tous ses occupants. Aucun bruit, si ce n’est celui des bulles que produisait l’aquarium. Pas un geste non plus, seuls les ombres des voitures qui passaient dans la rue et les phares qui éclairaient par intermittence la pièce venaient perturber cette paralysie.

Se raclant la gorge, papi René attira l’attention de tout le monde dans la cuisine. Papa a fait une tête ! De gros yeux, la bouche ouverte et les mains qui tremblaient… Mais maman croisait les bras, la bouche mécontente, les yeux fixés sur les enfants…

ú Papa, maman, euh… fit péniblement Lali. ú oui ma chérie, dit froidement maman. ú Bon je me lance : d’accord, on a fait une grosse, mais

méga grosse bêtise… Lali se tourna vers son grand-père qui lui adressait un sourire radieux et l’encouragea à poursuivre avec un petit hochement de la tête.

ú … dans la cave ce matin, j’ai trouvé une porte derrière l’étagère aux confitures. J’ai appelé noé… La porte, et ben… elle était ouverte ! Alors nous, on a dégagé une étagère et puis on est entrés.

Lali reprit son souffle. ú Vous pouvez tout leur dire, dit papi d’un ton rassurant.

C’est noé qui poursuivit. ú D’abord Lali a trébuché, j’ai voulu allumer la lumière

mais ce n’était pas le bon bouton et là, nous avons assisté à l’éclosion de néo et Lila.

ú C’est nous, dirent en même temps les deux enfants qui avaient également levé timidement le bras, dévoilant ainsi la marque si reconnaissable du clonage.

Puis, rassurés par l’absence de réactions hostiles, les enfants continuèrent tous ensemble et racontèrent à qui mieux-mieux leurs aventures de la journée.

ú Donc vous savez pour papi ?

103

QUITTE oU DoUBLE

ú oui, répondirent en cœur les enfants. Enfin, papi René présenta avec enthousiasme à Lisa et Léo

son projet de vie à l’étranger aux côtés de néo et Lila. ú Il va nous rester par conséquent un peu de place dans la

chambre de vie de notre nouvelle maison : quatre cocons pour deux chrysalides ! dit maman.

ú Comment ça deux chrysalides ! demanda Lila, surprise. ú Pour accueillir les petits derniers, pardi ! répondit

maman un sourire aux lèvres en se caressant le ventre. Les enfants se regardaient sans comprendre puis soudain

noé et Lali crièrent ensemble : ú Un petit frère ! ú Une petite sœur ! ú Un peu l’un et un peu l’autre, dit papa qui avait retrouvé

le sourire. Maman est enceinte de Julien et Juliette !

104


Petit lexique à l’usage des lecteurs du passé

Sommeil artificiel : sommeil provoqué et maintenu à l’aide de substances et d’appareils de contrôle variés.

Biogénétique : partie de la biologie qui a pour objet de rechercher et de reconstituer les conditions physiques et chimiques qui permettent l’apparition, le développement et l’adaptation de la vie sur la terre. Cela aboutit à l’édification d’êtres vivants autonomes.

Clones d’assurance : ensemble des individus obtenus sans fécondation, à partir d’un seul individu. Ils sont réalisés très rapidement pour assurer à un individu riche la possibilité de disposer d’organes compatibles avec son organisme à tout moment de son existence. Ces clones seront par la suite utilisés pour prolonger la vie d’un individu au-delà de son temps d’existence normal ; puis, par réplications répétées, ces clones successifs d’un même individu créent une lignée quasi immor-telle d’une seule et même personne.

Téléscripteur de mémoire : instrument déployant dans l’atmosphère une très grande quantité de nanorobots (robots de la taille d’une molécule) pour copier les souvenirs d’une personne après avoir pénétré son cerveau. Ils se propagent dans l’organisme par les voies respiratoires et sanguines.

Cycle de reproduction sexuée : cycle de reproduction dans lequel il y a fécondation. La reproduction sexuée implique la participation de deux organismes parentaux de même espèce, de sexes différents. Ce mode de reproduction fait intervenir l’union de deux cellules germinales (gamètes) mâle et femelle.

105

QUITTE oU DoUBLE

Cycle de reproduction végétative : cycle de reproduction dans lequel il n’y a pas de fécondation ; des «rejets» sont fabriqués à partir de racines ou de cellules-mères ou bien à partir d’un stolon (organe végétal de multiplication asexuée, souvent une tige aérienne qui porte des feuilles réduites à des écailles au niveau des nœuds).

Hôte végétal : stolon génétiquement modifié de manière à être compatible avec l’organisme humain pour contrôler la reproduction cellulaire chez le clone et ainsi conserver une ressemblance parfaite avec le modèle.

Reproduction cellulaire (ou mitose) : la division cellulaire est le processus par lequel la cellule se reproduit, et c’est la base de la perpétuation de la vie. Le processus de division cellulaire est complexe puisque la cellule requiert une duplication exacte et une division égale de l’ADn qui contient la programmation génétique de la cellule (le génome).

école Docteur CalmetteCLASSE CM1 DE CHRISTIAn MoREAU

Léa Amerdeil • Clément Berthet Yasmine Boukhenouna • Célia Buignet-Merali Louis Calleja • Célia Clément • Maxime Combès Justine Coulet • Floriane Delon Mathieu Desrousseaux • Abderrahmane El Balawy • Coralie Font-Gravier • Malik Hassani Shaïma Hassi • Axelle Izard • Thalya Jolivet Luis Kaltz • Pauline Maffrand Lisa Maïmoun-Nande • Julien Mezghrani Tanguy Parlant • Louis Retsch • Yann Ribereau Marc Risueño-Taule • Laura Therond Noah Thibaudault • Nicolas Tocheport Gabriel Triquère

Merci à René Escudié pour ses conseils et son enthousiasme, à Julie Perrin qui nous a aidés à faire décoller notre vaisseau, à Nicolas Roubieu pour sa vision du futur, à Aurélie Sala pour son aide lors des ateliers d’écriture, et à tous les aliens qui ont accepté de figurer dans nos histoires.

107

Qui survole un œuf…

ú Papa, c’est quand qu’on arrive ? ú Maman, c’est encore loin ? ú Soyez patients les enfants. Encore quelques galaxies et

on y sera. Vous vous rappelez où on va ? ú oui Maman, tu nous l’as dit cent fois. on va sur une

petite planète appelée Terre, qui tourne autour d’un soleil quelque part dans la voie lactée. Un coin perdu sûrement !

ú Un peu de respect voyons ! C’est la planète d’où nos ancêtres sont partis il y a 10 000 ans. on va tous ensemble visiter leur ville de départ. Vous vous souvenez de son nom ?

ú Monpied, Monpanier, Monpoulailler… Quelque chose comme ça.

ú Ah ah ! Montpellier ! Et savez-vous ce qu’elle a de parti-culier cette ville ?

ú Euh… non. ú Eh bien quand on la survole, on aperçoit une trace en

forme d’œuf. Et savez-vous pourquoi il y a cette trace ? ú non. Tu nous le racontes ? ú Volontiers. Voici l’histoire de l’œuf de Montpellier.

108


Le récit de Maman

C’était en 7014. À cette époque, le noyau de la Terre était devenu extrêmement chaud. La chaleur avait fini par trans-percer la croûte terrestre. Dans de nombreux pays on ne pouvait plus poser un pied sur le sol à cause de la température qui pouvait atteindre plusieurs centaines de degrés, et même, dit-on, deux mille degrés à certains endroits. Les habitants avaient donc décidé de quitter la surface de leur planète et d’habiter au niveau des nuages.

La ville de Montpellier en nuages était composée de milliers de maisons flottant parmi les cumulus avec leurs balcons fleuris. Des palmiers étaient plantés sur les trottoirs menant à la plage au bord de la mer de nuages. De nombreuses voitures volantes circulaient dans les allées en rasant les passages piétons. Haut dans le ciel, on distinguait les traînées blanches des vols interplanétaires.

Un matin, une petite Terrienne, Lanéa, se réveilla après avoir fait un horrible cauchemar. Lanéa était une jolie petite blonde aux cheveux longs et aux yeux marron chocolat. Ces derniers temps, elle faisait de plus en plus de mauvais rêves.

Elle avala sa brioche, ses pains à la myrtille et des céréales accompagnées d’un verre de lait. Tous ces produits venaient d’une immense ferme installée près de l’école sur un stratocu-mulus bien plat. on y cultivait des céréales et on y récoltait des fruits et des légumes. Elle prit son sac de goûter et empoigna son cartable-cube, un cube minuscule qui contenait toutes ses affaires de classe miniaturisées, le glissa dans sa poche et sortit en claquant la porte.

Lanéa aimait bien marcher sur les nuages. on s’enfonçait un peu dedans et on avait l’impression d’être léger comme une plume.

Pendant le trajet, elle repensa à son rêve. Il parlait d’une maman alien, une sorte de reine extraterrestre, qui accou-chait dans une fusée spatiale. Malheureusement son œuf tombait de la fusée et chutait à travers l’espace vers la planète

109

QUI SURVoLE Un œUF…

Terre. Ce rêve tournait en boucle dans sa tête et envahissait son esprit.

Enfin elle arriva à l’école. De grandes palissades blanches entouraient le bâtiment. Le sol de la cour de récréation, fait de mosaïques taillées dans des stratus, reflétait les couleurs du ciel environnant. Lanéa courut pour aller dans sa classe. Elle passa devant le gymnase où des enfants jouaient au volley avec un nuage compressé. Une douce mélodie sortait de la salle de musique. Elle passa devant l’infirmerie, située à côté du bureau de la directrice et arriva dans sa classe. Dans la salle, décorée de grands rideaux aux motifs étoilés, les tables et les chaises flottaient dans les airs.

Elle s’assit à sa place et posa son cartable-cube sur sa table. Elle cliqua dessus et en sortit sa tablette. Pendant ce temps, le maître installait la sienne, une tablette géante d’environ trois mètres. Puis il s’écria :

ú Tout le monde assis ! Silence !Lanéa trouva, comme toujours, son maître très sévère.

Heureusement les cours passèrent vite et la récréation arriva. Mais avant que les enfants posent un pied dans la cour un grand BoUM se fit entendre dans toute l’école.

ú Encore une météorite, se dit Lanéa. Décidément il en tombe de plus en plus souvent.

Comme tous les autres, elle se précipita vers la chose qui avait causé l’énorme bruit.

Ce n’était pas une météorite ordinaire. C’était une sorte d’œuf bizarre, tout blanc avec de microscopiques points verts. D’étranges rayons surgirent de l’intérieur de l’œuf et tranchèrent la coquille en deux. Une espèce de gros lézard en sortit.

Tout le monde recula. ú on dirait un alien ! s’exclama Lanéa.

Elle avait le sentiment que le rêve qu’elle faisait ces dernières nuits était en train de se réaliser.

Les autres élèves reculèrent tous de quelques pas. Lanéa s’approcha. La créature qui émergeait de l’œuf semblait

110


gentille. Un être court sur pattes, vert pâle, avec des mains qui ressemblaient à des pinces. Ses trois gros yeux noirs, de la taille de balles de tennis, sortaient de leurs orbites, semblant chercher quelque chose.

Soudain, la petite créature plongea dans le sac de Lanéa et commença à grignoter son goûter. Les professeurs arrivèrent.

ú Que se passe-t-il ici ? demanda la directrice. Que faisiez-vous tous en rond ?

Personne ne répondit. Elle regarda le centre du cercle formé par les enfants, mais

il n’y avait plus rien. Les morceaux de coquille avaient disparu. ú Bien, reprit la directrice, puisque personne ne veut parler,

vous me recopierez sur tablette la table du… Un deuxième BoUM se fit entendre. Une fusée spatiale

géante se posa et quarante gardes aliens en uniforme militaire

111


en sortirent. Une alien à trois yeux, aux longs cheveux blanchâtres et à la peau verdâtre descendit à son tour et se posta devant les gardes. Sa longue robe semblait faite dans sa propre peau et couvrait ses pieds. Ses mains ressemblaient à des pinces, comme celles du petit alien. Elle avait une couronne sur la tête qui tombait assez souvent à ses pieds.

Un garde cria : ú Sa Majesté la reine Jennohsia vingtième du nom ! ú Rendez-moi mon bébé ! hurla-t-elle. Sinon je désintègre

cette horrible planète. Lanéa qui était première de sa classe en langues extrater-

restres, comprenait parfaitement ce que disait la reine. Le petit alien, ayant terminé son repas, sortit la tête du sac en gigotant.

Voyant cela, la reine hurla : ú gardes, emmenez-la !

Les gardes entourèrent Lanéa et l’un d’eux la ligota avec un champ d’énergie. La reine se précipita et reprit son bébé.

ú Je n’aurais qu’à appuyer sur ce bouton pour faire exploser ta maudite planète.

Les professeurs et les élèves partirent en courant dans leurs classes en criant :

ú Au secours !Pendant que la reine des aliens ricanait méchamment, son

bébé sauta de ses bras et se dirigea à petits pas vers Lanéa. Il coupa le champ d’énergie avec ses mains pinces et la libéra. Voyant cela, la mère fonça sur la petite fille. Mais le bébé se planta devant Lanéa pour la protéger.

ú Elle m’a sauvé. Sans elle je serais mort de faim. Je vous en prie, ne la tuez pas.

La reine resta clouée sur place. Dans son espèce, la première créature qui nourrissait un bébé était considérée comme sa véritable mère. Le petit reprit :

ú Je resterai sur cette planète avec Lanéa. Je saurai très bien me débrouiller à ses côtés. Vous pouvez repartir.

La reine le serra une dernière fois dans ses bras puis se dirigea lentement vers la fusée dans laquelle elle avait atterri.

112


Elle avait l’air très vexé quand elle entra à l’intérieur avec tous ses gardes derrière elle. La fusée décolla. on ne la revit jamais.

Les années passèrent. Lanéa et son ami grandirent ensemble. Adolescente, Lanéa soignait les dents de l’alien pour s’entraîner pour ses études de dentiste. Quand elle devint maman, c’est lui qui fit la nounou : il endormait les enfants en leur chantant des berceuses extraterrestres qui parlaient de biberons de voie lactée chauffés dans la casserole de la grande ourse.

Lanéa et son ami vécurent assez longtemps pour voir la température de la surface terrestre commencer à baisser. Enfin l’alien vieillit jusqu’à devenir un papi-alien. Et quand il mourut on lui creusa une tombe. Une tombe en forme d’œuf. Voilà pourquoi il y a une place de l’œuf à Montpellier.

ú Mais pas du tout ! Mais pas du tout ! Ça ne s’est pas passé comme ça !Tu sais je t’aime beaucoupMais tu racontes n’importe quoi. Je la connais, moi, la véritable histoire de l’œuf de

Montpellier. ú Vas-y Papa, raconte. on t’écoute.

Le récit de Papa

C’était en 6014. À cette époque, la ville de Montpellier, comme toutes les villes de tous les pays du monde, était surpeuplée. Tellement surpeuplée que tous les immeubles se touchaient, ils occupaient toute la surface, ils recouvraient tout. Des milliers de gratte-ciels avaient été construits, si serrés qu’il n’y avait plus assez de place entre eux pour les rues. on passait directement d’un bâtiment à l’autre sans passer dehors. De toute façon dehors on ne pouvait plus respirer. L’air était beaucoup trop pollué.

Comme il n’y avait plus du tout de place au sol pour de nouvelles constructions, des architectes Montpelliérains

113


avaient inventé les H. S. Rien à voir avec « Hors Service », HS voulait dire « Habitations Spatiales ». C’étaient des construc-tions bâties en plein ciel. Toutes ces HS formaient la ville de Montpellier-le-Haut qui flottait comme un plafond à quelques kilomètres au-dessus de la ville du dessous.

À Montpellier-le-Bas, le Jardin des Plantes, classé monument historique, avait été conservé sous un dôme de verre. on y cultivait des quantités d’arbres et de fleurs originaires d’autres planètes. C’était le dernier endroit de la ville où on pouvait respirer de l’air pur. Partout ailleurs les capsules respiratoires étaient nécessaires.

114


Comme les routes et les rues avaient disparu faute de place, pour aller de la ville du haut à la ville du bas, on avait inventé un nouveau mode de déplacement : le tube.

Des milliers de tubes en plastique transparent traversaient le ciel, formant une gigantesque toile d’araignée dans l’espace, un incroyable labyrinthe de tuyaux transparents qui permet-taient d’aller d’un endroit à un autre.

Un matin, un petit Terrien nommé ynur, se réveilla dans son HS. Il se leva, mangea ses Lunax, des céréales cultivées sur la Lune, et grignota ses cookies Saturnia. Il enfila ses vêtements en fil d’Uranus, puis il mit dans sa bouche sa capsule respira-toire, indispensable pour pouvoir respirer dans le tube. Et il partit à l’école.

Il ouvrit la porte d’entrée du tube avec, comme à chaque fois, une petite boule au ventre. Il n’était pas encore complè-tement habitué à la sensation de vertige. Auparavant les dépla-cements en tube lui donnaient même mal à la tête mais maintenant cela avait disparu. Il tapa son code de destination sur son ordimini et se laissa aspirer.

Au milieu du trajet, le tube se ferma brusquement devant lui. Cela signifiait qu’un voyageur prioritaire croisait son chemin. Le passage se libéra très rapidement et ynur continua son trajet.

Arrivé à l’école, il rejoignit ses amis qui discutaient du film L’Age de glace 618. La sonnerie retentit et le robot-maître arriva, avec son costume noir et sa voix électronique. Chaque élève enfila son casque scolaire. Le maître régla la longueur d’ondes et leur envoya les leçons du jour.

Enfin la journée se termina. ynur remonta chez lui par le tube. Mais celui-ci était bouché par une sorte de grosse boule. ynur poussa de toutes ses forces. D’abord rien ne se passa, la chose était vraiment bloquée. Puis elle se décoinça, et le garçon put la pousser, petit à petit, jusque dans son HS. Il prit le temps d’examiner l’objet. C’était une grosse pierre ronde d’un bleu très foncé avec un bouton noir. ynur appuya dessus et la pierre se fendit en deux. À l’intérieur, apparut un petit œuf d’environ

115


dix centimètres. ynur le saisit et un liquide bleu lui gicla sur les doigts. Sans réfléchir il le goûta et sentit ses poumons se gonfler anormalement. Il ouvrit la fenêtre et s’aperçut qu’il pouvait respirer sans capsule.

Il regarda le liquide bleu qui restait et se dit que cette découverte serait bien utile à la planète. Mais d’où venait cette pierre ? Comment était-elle arrivée dans le tube ?

Soudain une voix terrifiante le fit sursauter : ú Rendez-nous ceci !

ynur se retourna et vit une grosse créature vêtue de noir, avec une corne sur la tête. Elle lui rappela une très ancienne race animale qu’il avait vue dans une leçon de préhistoire, le rhinoquelquechose.

ú Donnez-moi cette pierre. C’est notre invention, elle nous appartient.

Terrorisé, le jeune garçon balbutia : ú Qu’allez… qu’allez-vous en faire ? ú nous en avons besoin pour respirer sur votre planète

polluée. Car nous allons nous installer ici. nous allons conquérir la Terre !

ú Jamais ! voulut crier ynur. Mais aucun son ne sortit de sa bouche. Paralysé par la peur,

il lâcha l’œuf qui tomba vers Montpellier-le-Bas. Aussitôt la créature plongea par la fenêtre à la poursuite du précieux objet. Il était trop tard, l’œuf s’écrasa au beau milieu de la caserne du régiment d’infanterie. L’alien atterrit à son tour et fut immédia-tement encerclé par les soldats.

Alors la créature détacha sa corne et souffla dedans. La sonnerie assourdissante alerta ses compagnons qui station-naient en orbite autour de la Terre.

Mais quand les créatures arrivèrent, elles étaient attendues par les militaires. Une bataille éclata. Des rayons laser bleus, rouges, verts, partirent dans tous les sens. Les aliens ne s’atten-daient pas à une telle résistance. Après deux heures de bataille, ils battirent en retraite, laissant les Montpelliérains fêter leur victoire.

116


Le centre-ville de Montpellier avait souffert. Beaucoup d’immeubles étaient détruits. Les bâtiments qui s’étaient écrasés au sol formaient une place libre. on décida de la conserver et d’y installer un monument pour rappeler cette journée historique. on demanda à ynur, le jeune héros de la ville, d’imaginer le monument. Il demanda que l’on trace au sol la forme d’un œuf qu’il pouvait voir chaque fois qu’il regardait par sa fenêtre. Cet œuf est toujours visible.

ú Mais pas du tout ! Mais pas du tout ! Ça ne s’est pas passé comme ça !Tu sais je t’aime beaucoup Mais tu racontes n’importe quoi. Je la connais, moi, la véritable histoire de l’œuf de

Montpellier. ú Vas-y Tatie, raconte. on t’écoute.

Le récit de Tatie

C’était en 5014. À cette époque la surface de la planète était entièrement occupée par la végétation. Pendant longtemps, les Terriens avaient laissé la pollution et les machines envahir leur monde, la Terre était devenue toute grise. Mais ils avaient enfin pris la bonne décision : planter des millions d’arbres et des milliards de plantes pour combattre la pollution, pouvoir respirer et chasser toute cette grisaille. Le gris était parti, disparu, envolé. Et depuis, la Terre, recouverte de végétaux de toutes les couleurs, était surnommée la planète Emeraude.

Dans la ville de Montpellier, tout le monde habitait maintenant dans les arbres. Des milliers de maisons de toutes les couleurs en plastique recyclable étaient perchées sur les branches des mûriers platanes ou des micocouliers.

Le zoo de Lunaret s’était beaucoup agrandi et abritait une multitude d’espèces animales et végétales. Sur des centaines d’hectares on pouvait se promener à pied au milieu des

117


118


herbivores et en skate volant pour survoler la partie réservée aux carnivores. on pouvait également se déplacer dans des tunnels transparents qui traversaient les enclos.

Au cœur de toute cette végétation se trouvait un arbre merveilleux : le fruitia. C’était un arbre aux feuilles rouges et aux fruits qui ressemblaient à des œufs dorés. Des lianes s’enroulaient autour de son tronc énorme. Pendant la journée, le fruitia restait caché au milieu des autres arbres. Mais la nuit il grandissait, il s’élevait au-dessus de tous les autres, et il se mettait à briller. Alors les œufs du fruitia changeaient de couleur, ils passaient du jaune à l’orange, du vert au bleu, comme un véritable arc en ciel. Quand on cueillait un des œufs à ce moment précis, on pouvait s’en servir pour colorier tout ce qu’on voulait : les murs, les meubles, les vêtements, les animaux et même la peau des humains. Quand l’œuf était usé il devenait tout petit et tout gris. Comme un caillou. Mais heureusement il en poussait un nouveau sur le fruitia.

Un matin comme les autres, Cléophée, une petite Terrienne, se réveilla. Elle mit une goutte d’eau sur l’œuf de fruitia qu’elle avait cueilli la veille au soir et choisit ses couleurs. Elle étala du bleu ciel et du mauve sur ses vêtements et se colora la peau en violet. Elle adorait ça. Elle trouvait que ça allait bien avec ses cheveux blonds. Elle prit son petit déjeuner express et emprunta la tyrolienne pour rejoindre son école.

Pendant le trajet, elle aperçut une chose bizarre, une sorte d’objet volant qui se dirigeait vers le zoo. Curieuse, elle ne put résister à l’envie de découvrir ce que c’était et le suivit. Elle le trouva au sommet d’un pin. Elle secoua l’arbre et la chose tomba. Une porte s’ouvrit et il en sortit des petites créatures de vingt centimètres de haut, avec de grands yeux clairs et la peau foncée. Cléophée fut très surprise mais elle les trouva mignons.

Celui qui semblait être le chef portait une cape noire et une couronne grise. Il prit la parole :

ú nous Miniputiens. Vouloir œufs dorés pour colorer planète nous.

119


ú Quoi ? répondit Cléophée. Je ne comprends pas. ú Planète nous toute grise. ú Pourquoi ? ú Planète vous chasser pollution, mais pollution atterrir

sur planète nous. Alors toute grise. ú Je suis désolée. ú Et nous furieux pas contents. Alors venir chercher

couleurs. ú Ah ! Je comprends, fit Cléophée.

Elle les emmena voir le fruitia. Comme ils étaient petits le trajet dura longtemps et ils arrivèrent au crépuscule. L’arbre commençait à briller.

Quand les Miniputiens virent les belles feuilles rouges et les œufs étincelants ils furent émerveillés. Ils n’avaient jamais rien vu d’aussi beau.

Cléophée leur expliqua comment les œufs donnaient de la couleur. Ravis, les Miniputiens lui demandèrent :

ú Toi venir sur planète nous ? ú Je dois d’abord demander la permission à mes parents.

Suivez-moi. Les parents furent bien surpris de voir arriver leur fille avec

ces drôles d’invités. Le chef Miniputien prit la parole : ú Bonjour. nous besoin fille vous pour apporter couleurs

planète nous. Vous permission elle venir voyage vaisseau nous ?Cléophée expliqua qu’elle devait aider ses nouveaux amis en

partant avec eux mais qu’elle reviendrait dans deux jours. Son père faillit accepter car il vit que sa fille y tenait

beaucoup. Sa mère n’était pas du tout d’accord même si elle était à deux doigts de craquer devant les créatures si mignonnes. Elle refusa tout net.

Cléophée, qui était une petite Terrienne têtue, attendit que ses parents soient endormis et sortit de la maison en cachette. Elle alla cueillir un grand panier d’œufs de fruitia puis elle rejoignit les Miniputiens à leur minuscule vaisseau. Le chef appuya sur un bouton et le vaisseau s’agrandit suffisamment pour que la jeune fille puisse y entrer. L’intérieur était tout

120


gris, tout triste. Cléophée comprit pourquoi les Miniputiens avaient besoin des œufs de Fruitia. Puis le vaisseau reprit sa taille normale mais Cléophée ne se rendit compte de rien.

Le voyage se passa sans problème. Dès son arrivée sur la planète des Miniputiens, Cléophée

reconnut la pollution grise qui avait autrefois recouvert la planète Emeraude. En débarquant, elle fut impressionnée de voir autant de Miniputiens autour d’elle. Et eux furent ravis de voir cette petite Terrienne toute colorée.

Elle sortit un œuf de fruitia, versa une goutte d’eau dessus et apprit à tout le monde comment étaler de la couleur. Elle garda le dernier œuf pour le planter en terre. Elle l’arrosa, et très vite un fruitia commença à pousser.

Les Miniputiens furent ravis du nouvel aspect de leur planète. Ils remercièrent Cléophée :

ú Petite Terrienne colorée, nous offrir toi couronne fleurs éternelles pour merci toi de couleurs planète nous.

Puis ils la ramenèrent chez elle. Cléophée était un peu triste de quitter ses nouveaux amis mais ravie d’avoir pu les aider. Les parents de Cléophée, très heureux de retrouver leur enfant, lui pardonnèrent sa fugue.

Pour symboliser l’amitié et le partage entre les peuples on dessina un œuf sur la place centrale de Montpellier. Il y est encore. Et on dit qu’il change parfois de couleur.


Montpellier. ú Vas-y Mamie, raconte. on t’écoute.

121


122


Le récit de Mamie

C’était en 4014. À cette époque, Montpellier était devenue la ville la plus avancée en recherche technologique et surtout en recherche médicale. Les hôpitaux montpelliérains étaient les meilleurs du monde.

C’est dans un de ces hôpitaux que les chercheurs avaient mis au point un médicament qui guérissait tout, un remède universel. Ils l’avaient appelé le pharmatotal. C’était une petite gélule en forme d’œuf. Il suffisait d’en prendre une et on guérissait presque instantanément.

Un mercredi, un petit Terrien nommé Agari tomba malade. Sa mère, qui était infirmière, l’emmena aussitôt à l’hôpital Hôpertout.

Dès son arrivée, on l’installa sur un lit et on lui donna le fameux médicament qui guérit tout. Il avala le petit œuf qui fit « pshiiit » dans sa bouche. Rapidement, Agari se sentit beaucoup mieux. on lui fit quelques examens complémen-taires et il put se lever. Il demanda alors la permission d’accom-pagner sa maman qui distribuait le pharmatotal aux patients.

À la fin de la journée, quand il sortit de l’hôpital avec sa mère, il vit une armée d’extraterrestres verts qui encerclait le bâtiment. Ils avaient trois yeux jaunes, deux antennes sur la tête et une grande trompe à la place de la bouche. Par cette trompe ils criaient dans leur langue :

ú Trixtobi toreti !Autour de l’hôpital c’était la panique. Tout le monde

hurlait, se bousculait, se piétinait et courait dans tous les sens sans savoir où aller.

Les extraterrestres répétèrent plus fort : ú Trixtobi toreti !

Personne ne comprenait ce que ces visiteurs voulaient. Agari sentit une vibration dans sa poche. C’était son

traducteur de langues. Il le sortit, lut l’écran et dit à sa maman : ú Ils disent : on veut le médicament qui soigne tout ou on

fait exploser l’hôpital !

123


Il s’adressa aux extraterrestres : ú non ! ne faites rien exploser ! Cet hôpital contient

bien trop de patients. Mais comment connaissez-vous le pharmatotal ?

ú Teriti tirotiou siroki. nous l’avons appris sur notre chaîne d’informations.

Ils montrèrent à Agari leurs mains carrées dans lesquelles un écran greffé sous la peau diffusait des images. Leurs doigts télescopiques rentrèrent et l’écran s’éteignit.

ú Et si nous vous donnons un peu de pharmatotal, proposa Agari, vous laisserez les Terriens tranquilles ?

ú nloug ! répondirent les extraterrestres. nous voulons la totalité de vos réserves. Et nous voulons aussi la formule du médicament.

ú ne faites pas ça, intervint la maman d’Agari. Si vous prenez tout, nous en manquerons et des patients mourront. Et si vous détruisez l’hôpital et le laboratoire nous ne pourrons plus en fabriquer.

ú Le laboratoire, il est dans la réserve ? demanda Agari à l’oreille de sa maman. La salle ovale en forme d’œuf ?

ú Chut ! souffla sa maman. Mais les extraterrestres avaient tout entendu. Eux aussi

possédaient un traducteur de langues. À partir de ce moment, ils savaient où se trouvaient les réserves de pharmatotal.

Ils attendirent la nuit et se glissèrent dans le bâtiment après avoir assommé les gardes.

ú Crr, crr, crr, ricanait le chef des extraterrestres. Quel idiot ce petit Terrien, d’avoir parlé de cette salle.

Ils pillèrent la réserve et emportèrent tout sur leur vaisseau avec l’intention de s’enfuir sur leur planète. Mais au moment où ils décollèrent, les gardes, qui avaient repris conscience, tirèrent sur eux avec une kalachnikov laser.

Le vaisseau extraterrestre touché s’écrasa au sol, laissant une trace en forme d’œuf sur la place centrale de la ville. Cette trace est encore visible, on l’a laissée pour se souvenir de cette victoire et pour symboliser Montpellier et son médicament universel.

124



Montpellier. ú Vas-y Tonton, raconte. on t’écoute.

Le récit de Tonton

C’était en 3014. À cette époque, à cause du réchauffement climatique, une grande partie de la Terre était inondée. Le groenland avait totalement disparu sous les eaux et l’Antarc-tique avait fondu depuis longtemps. Les villes du bord de mer disparaissaient les unes après les autres. La ville de Montpellier commençait à être menacée par la montée des eaux. Et la mer avançait chaque jour un peu plus.

Un matin, Hungo, un petit Terrien de neuf ans, prit son petit déjeuner habituel : une tartine de bidustalgue et un bol de cornfish. Puis il partit à l’école sur son aéroskate. Pendant le trajet, il s’aperçut que l’eau avait encore monté pendant la nuit. Chaque jour l’eau montait de quelques centimètres mais cette fois-ci le niveau avait augmenté de près d’un mètre. Bientôt elle atteindrait son école. Seuls le centre-ville et certains quartiers du nord n’étaient pas encore inondés.

Les routes et les rues étaient pratiquement toutes inutili-sables. Heureusement à cette époque on ne se déplaçait plus qu’en voitures volantes, en aéroglisseurs ou en skates volants, appelés aéroskates, facilement transformables en hydroskates pour aller sur l’eau.

Avec ses cheveux blonds, ses yeux bleus comme la mer et ses taches de rousseur, Hungo avait l’air à la fois sportif et intel-lectuel. Il était gentil, bon camarade et bon élève. Mais ce jour-là il n’avait pas envie d’aller à l’école. Alors il se promenait au-dessus du parc inondé sur son skate volant.

125


Tout à coup il aperçut un curieux objet qui flottait dans les airs. Il s’approcha et l’attrapa. C’était petit, métallique, en forme d’œuf. ne réussissant pas à identifier la chose, Hungo fila retrouver ses copains Junco et Junline à l’aéroskate Park.

ú Regardez ce que j’ai trouvé ! ú C’est peut-être un œuf de Pâques ? dit Junco. ú non, non, on dirait un œuf de la poule électronique de

mon grand-père, répondit Junline. La jeune fille avait à peine terminé sa phrase que PoUF,

l’objet grossit d’un mètre. Hungo le lâcha aussitôt et l’engin tomba à terre.

ú Ça alors ! Qu’est-ce que c’est ? demanda Junline. ú Je ne sais pas, répondit Hungo. on dirait une sorte de

cabine, mais c’est trop petit pour qu’on puisse rentrer dedans. ú L’objet grossit encore d’un mètre. ú ouahhh ! crièrent les enfants. Mais qu’est-ce que c’est

que ce truc ?Les trois amis se trouvaient maintenant devant une grande

boîte métallique ovale. En regardant attentivement, Hungo vit un numéro gravé : 34000.

Il avança la main et une porte s’ouvrit automatiquement. Pendant que les deux autres, apeurés, restaient dehors, plantés comme des poteaux, Hungo jeta un œil à l’intérieur et entra timidement. Il découvrit des boutons et des cadrans. on aurait dit le cockpit d’un vaisseau spatial.

Soudain une voix robotique le fit sursauter : ú Bonjour. Vous voici dans la cabine de téléportation

numéro 34000. où voulez-vous aller ? ú Je… je ne sais pas… répondit Hungo, surpris. ú Bien, allons-y.

La cabine se mit à trembler, il y eut un flash et Hungo se sentit soudain comme dans un ascenseur filant à la vitesse de la lumière. Puis la sensation s’arrêta et la porte s’ouvrit. Hungo sortit de l’engin et se sentit plus léger. Sur le sol il découvrit des plantes inconnues. En levant les yeux il vit des étoiles… et la Terre !

126


127


128


ú Vous êtes en sécurité ici, dit une voix rassurante. Vous êtes sur la planète Titan.

Pendant ce temps à Montpellier, devant la cabine, Junco et Junline commençaient à s’inquiéter. Enfin la porte se rouvrit. Malheureusement ils ne virent pas leur copain, la cabine était vide, Hungo avait disparu. Junline et Junco entrèrent. Aussitôt la cabine se mit à trembler, il y eut un flash.

Quand ils sortirent de l’engin ils virent Hungo. Il les rassura aussitôt en leur expliquant qu’ils n’avaient rien à craindre car les cabines de téléportation étaient là pour secourir les Terriens. Les Titaniumiens observaient la Terre depuis longtemps, ils avaient vu la montée des eaux et avaient décidé d’aider les Humains en envoyant ces cabines..

À Montpellier, les habitants furent d’abord effrayés par les engins. Puis ils y pénétrèrent et furent envoyés sur la planète Titan. Il était temps. La ville disparut. Engloutie.

Ainsi dans toutes les villes menacées, des cabines furent envoyées et un grand exode eut lieu vers Titan. La planète Terre n’était plus qu’un immense océan sur lequel flottaient les cabines de téléportation.

Au bout de trois siècles, le niveau de la mer commença à baisser. Mais la vie sur Terre était toujours impossible. À Montpellier l’eau était un peu descendue. Une cabine, ronde comme un œuf, était venue se poser en équilibre sur le toit de l’opéra. Un soir, le vent se leva et souffla de plus en plus fort. La cabine bascula et vint s’écraser sur une pierre qui dépassait de l’eau. Quelques morceaux partirent avec le courant, d’autres coulèrent et se déposèrent sur le fond.

Quand l’eau s’évapora, il restait sur le sol la trace ovale de la cabine. Les premiers Terriens qui rentrèrent à Montpellier découvrirent cette forme d’œuf et décidèrent de la conserver, comme un symbole du retour de la vie.

ú Mais pas du tout ! Mais pas du tout ! Ça ne s’est pas passé comme ça !Tu sais je t’aime beaucoup.

129


Mais tu racontes n’importe quoi. Je la connais, moi, la véritable histoire de l’œuf de

Montpellier. ú Vas-y Papy, raconte. on t’écoute.

Le récit de Papy

C’était en 2014. À cette époque il n’y avait que sept milliards d’habitants sur Terre. Il restait encore de la place dans la plupart des pays. Les gens pouvaient encore respirer à l’air libre presque partout. Le réchauffement climatique n’avait pas fait fondre toute la banquise mais la pollution commençait à envahir la planète. Un matin, Mathilde, une petite Terrienne de neuf ans se réveilla, fit sa toilette, prit son petit déjeuner habituel, lait, chocolat, céréales et confiture, et se prépara pour aller à l’école. Elle vérifia qu’elle avait bien ses livres et ses cahiers, ferma son sac et monta dans la voiture où sa maman l’attendait déjà. Ensemble elles roulèrent prudemment jusqu’à l’école.

ú Attends Papy. Tu as dit : « Elles roulèrent » ? ú oui. ú La voiture elle roule par terre ? ú Ben oui. ú Et elle a quoi dans son sac la petite Terrienne ? ú Des livres et des cahiers. En papier, pour lire et écrire. ú Pff… C’est ridicule. Des voitures qui roulent sur le sol

et des écoliers qui lisent du papier ou qui écrivent dessus… Désolé Papy mais on n’y croit pas une seule seconde à ton histoire.

ú Et puis de toute façon on est bientôt arrivé. on va se poser.

ú Comment on dit « se poser » ici ? ú Atterrir. ú Eh bien avant d’atterrir on va déjeuner. ú Qu’est-ce qu’on mange ? ú Une omelette.

école Paul Bert/ Victor HugoCLASSE DE CM1/CM2 DE PHILIPPE CAILLon

Walid Boulaajoul • Lucien Clappier-Domenech Diego Leroux-Harchache • Léo Santa-Cruz Marcus Sicard • Yanis Touil • Gloria Urbinati-Gayrand • Jules Valat • Macéo Beaugrand Nursin Beyaz • Bonoiar Bouyousfi Shana Clodomir • Yume Combret • Maé Courrieu Nino Ducros • Ines El Mssalhi • Louiza Ferchiche Tom Gout • Charles Guardiola • Tom Guichard émile James • Stéphane Jean • Oliwia Karwalska Oussama Khadraoui • Ny Tia Rajaonary Mhadji Sousa • Alexis Tavier • Meï Lí Tehio

Tous nos remerciements à René Escudié, écrivain, et Emmanuelle Ravier de Canopé de l’Hérault, pour leurs précieux conseils ; à Nicolas Roubieu, de « Montpellier 2040 » pour ses informations sur l’urbanisme au présent et dans le futur ; et enfin à Aline Jarousse et Julie Perrin de la médiathèque émile Zola pour toutes les références qu’elles nous ont apportées quant à la littérature fantastique, d’anticipation et de science-fiction.

131

Les Profondeurs

P R o L o g U E

27 décembre 2185

Le ciel gris lâche des cordes de pluie dans la mer et sur la terre. Des vagues heurtent la toute nouvelle digue de six mètres de haut qui parcourt la côte pour protéger Montpellier de la montée des eaux. Le paysage orageux et les énormes défer-lantes effraient les ouvriers. Tout le monde pense qu’elle va céder. Les mouettes s’éloignent en émettant des bruits stridents et criards. Les plus faibles meurent coincées entre les débris, asphyxiées par la pollution ou en avalant des déchets. Les ouvriers travaillent sur les passerelles avec beaucoup d’énergie et de courage, luttant contre le vent. Les vagues arrachent des morceaux de la digue. Tout à coup, un rocher dévale la paroi et écrase un ouvrier en contrebas. Les autres arrivent à son secours. on l’évacue en urgence mais il est trop tard.

Plus tard, pendant la pause-déjeuner, des ouvriers discutent : ú C’était horrible.

L’un d’eux s’assied près du rocher sous lequel son camarade a été écrasé.

132


133


134


ú Viens, ne reste pas là, lui dit le contremaître. Mais il reste muet, immobile.

ú Qu’est-ce qu’il a, l’autre ? demande un des hommes. ú C’te question ! répond le contremaître.

Il sort son repas et finit de manger en silence. ú Bon allez ! Faut finir vite avant que l’eau ne monte trop.

Tout à coup, un bruit les surprend. Un vaisseaucoptère vert et noir de la sécurité civile se pose sur la tour de contrôle. Le chef de chantier met sa capuche et en sort en courant. Il descend l’échelle, se dirige vers le contremaître :

ú Que s’est-il passé ? ú C’est…

Un bruit sinistre résonne au-dessus d’eux, comme un craquement inhabituel.

ú Chef ! Regardez ! Là-haut !

135

LES PRoFonDEURS

Ils lèvent les yeux vers le tronçon de la digue en chantier et voient les échafaudages vaciller, tandis que la paroi commence à se lézarder. De l’eau s’engouffre à travers la fissure qui s’agrandit. Un craquement retentit à nouveau, couvrant les bruits de la tempête. La pression est de plus en plus forte. Des morceaux de la digue commencent à céder.

ú Courez ! Courez ! hurle le chef de chantier. évacuez les hommes dans les vaisseaucoptères !

Les ouvriers foncent vers la tour de contrôle. Le chef de chantier reste au pied de la tour avec le contremaître pour contrôler l’évacuation lorsqu’une violente première vague s’engouffre à travers la brèche et les emporte tous les deux.

Dans les rues de la ville, des publicités défilent sur des écrans géants tout au long de la journée. Des personnes courent pour éviter la pluie. Soudain tous les écrans deviennent noirs. Les gens devant leurs solphones1, leurs ordinateurs, leurs lunettes à réalité augmentée, s’immobilisent, inquiets. Puis les écrans se rallument et le visage d’un journaliste apparaît : « Ce message a un caractère urgent. À cause de la tempête, la digue a cédé et une énorme vague arrive sur Montpellier. Pour votre sécurité, montez vite sur les toits des immeubles. Des vaisseaucoptères vont parcourir la ville pour transférer la population vers les montagnes. Merci de suivre ces consignes sans attendre et dans le calme. »

La vague, qui atteint maintenant odysseum, déracine les arbres et emporte tout sur son passage, des vélos, des voitures. Les vitrines se brisent et l’eau s’engouffre dans les commerces, piégeant les gens qui s’y sont réfugiés. L’hydrotram glissait au-dessus du centre commercial lorsque la vague le jette contre les murs. Les passagers trébuchent. Certains hurlent, des bébés pleurent. Le conducteur est assommé. Des gens appellent au secours. D’autres essaient de fuir par les vitres brisées.

1. Solphone (n. m) : téléphone miniaturisé sous forme de montre qui se déplie et projette des hologrammes avec lesquels on peut communiquer. « Tout à l’heure, mon patron a essayé de m’appeler sur mon solphone »

136


Sur la place de la Comédie, c’est l’affolement. Tout le monde se précipite vers les immeubles les plus hauts pour éviter la vague. Des passants sonnent chez des inconnus pour pouvoir monter sur les toits. À la mairie, les gens fracassent les portes en verre et les baies vitrées pour pouvoir sortir. Au Corum, un enfant de trois ans pleure au milieu de la foule car il a perdu sa mère. Des policiers évacuent les élèves de l’école Victor Hugo en courant vers les immeubles, plus hauts, de la rue des Deux Ponts.

Pierre monte en courant les marches de la gare Saint Roch. Il sent la vague se rapprocher, comme si un torrent coulait tout près. ou plutôt mille torrent prêts à jaillir des rues tout autour de lui. Au loin, en direction du nord, il peut voir se dresser vers le ciel les poutrelles métalliques de la future ville en chantier, comme des flèches d’acier. normalement, la digue aurait dû permettre d’attendre la fin de la construction, après la montée des eaux. Il redescend vers la Comédie, s’arrête devant la porte de l’immeuble de Julie et passe son solphone devant le scanner. Une dame à sa fenêtre, voyant l’eau s’engouffrer dans la rue, hurle « Attention petit ! Derrière toi ! » juste au moment où il pénètre dans l’immeuble. Il grimpe les marches quatre à quatre jusqu’au troisième étage en se demandant pourquoi il a pris les escaliers au lieu de grimper dans le trans-level2. Ça aurait été plus rapide. Essoufflé, il appuie plusieurs fois sur la sonnette.

ú Salut, lui dit Julie d’un air amusé. Qu’est-ce que t’as de si important à me dire pour t’acharner comme ça sur ma sonnette ?

Pierre entre, ferme la porte et lui montre du doigt la grande baie vitrée du salon. Elle tourne la tête et voit une gigantesque vague arriver sur eux. Il la prend par le bras et l’entraîne vers le toit-terrasse. Elle se dégage :

ú Vas-y, monte. ne t’occupe pas de moi, je te rejoins !

2. Translevel (n. m.) : ascenseur extérieur commandé par les solphones. « Il a pris les escaliers au lieu de grimper dans le translevel. »

137

LES PRoFonDEURS

Il fait quelques pas vers l’escalier, commence à monter et se retourne pour voir si elle est là. Elle serre un stockeur-journal3 dans ses bras. Il lui sourit. Ils reprennent leur course vers le toit. D’autres personnes se sont déjà réfugiées là-haut. Tout le monde est envahi par la peur. Il regarde à côté et voit une dame en train de pleurer. Des gens s’étreignent pour se dire adieu. Julie s’approche de Pierre. Ils s’agenouillent en se serrant l’un contre l’autre. Julie lui dit quelque chose à l’oreille. Pierre répond « moi aussi » à voix haute. Ils se sourient. Et tout d’un coup, plus rien !

3. Stockeur-journal (n. m.) : boîtier avec une puce électronique verouillée par un code sur laquelle on peut stocker des textes, des images et des hologrammes. « Elle garde précieusement son journal intime dans son stockeur-journal »

138


L’exploration : 23 mai 2750 – 11h

ú Luc ! Va jouer dehors ! Va voir tes copains ! ú Maman, je te rappelle qu’ils sont tous partis en vacances

sauf Fred et Hugo. ú Hé bien va les voir ! ú Je les ai vus hier et…

Trop tard, elle me fiche à la porte. Je réfléchis un instant et je décide d’aller voir émilie. Je sors de chez moi et me dirige vers le ponton métallique. Je détache mon z630, une mini-navette aquatique, monte à bord et me dirige vers son immeuble.

Au-dessus des gratte-ciel, s’étend un grand toit invisible qui protège la ville de la pluie. Cela permet de marcher sans être mouillé. Sous ce dôme, une canopée nous protège de la chaleur du soleil. Les immeubles sont arrondis et faits de vitres pour mieux capter la lumière. Il y a quinze arrêts où les tramways tout-terrain passent en permanence. Ceux-ci sont décorés en fonction du climat et des lieux qu’ils traversent pour une meilleure harmonie. on peut aussi se déplacer en navette aquatique en empruntant les canaux de la ville et, pour les plus riches, en vaisseaucoptère.

Il fait chaud et l’eau est claire. Le cyber-marchand me propose une réduction sur les roses. Je prends donc un bouquet pour émilie. Il est sympa ce marchand (enfin, ce robot). C’est merveilleux de voir les poissons nager entre les algues des canaux. Les immeubles arrondis défilent devant moi avec leurs grandes vitres et leurs mosaïques. Les boutiques sont très nombreuses. Je prends le virage et admire l’imposante statue de Jean Crayon, l’homme qui a créé la sphère qui nous protège.

Après avoir fait au moins le tour du monde, j’arrive devant son immeuble. Je mets mon œil devant le détecteur et une liane descend d’un des arbres de la canopée, s’enroule autour de ma taille et me soulève. En montant, je passe devant des portes jaunes argentées. Sur l’une d’elle est écrit : « Salut, ça gaze ? » Au quinzième étage, j’aperçois enfin la porte d’Emilie.

139

LES PRoFonDEURS

Je la reconnais avec ses reflets arc-en-ciel. Son père ouvre la porte :

ú Bonjour Luc. Le bouquet ? C’est pour moi ? ú Euh… C’est… ú Je plaisante ! émilie ! dit-il d’une voix forte en se

retournant. Viens immédiatement ! ú J’suis occupée ! Quoi encore ? ú y’a quelqu’un pour toi !

Elle arrive tout de suite. Elle est si belle avec sa robe blanche et ses sandales, ses cheveux bruns, ses yeux bleus qui brillent au soleil. Je reste bouche bée, comme d’habitude.

ú Luc ? Arrête de faire ça, je sais que tu es amoureux de moi. Dis-moi plutôt ce qui t’amène ici.

ú Euh… Je t’ai apporté un bouquet de roses. on pourrait aller se balader… Enfin, si tu es d’accord.

ú Bien sûr, allons-y, me répond-elle de sa voix de fée. nous nous allongeons dans le z630 et nous nous racontons

nos vies en nous laissant dériver. ú T’as pas peur qu’on ait un accident ? demande Emilie en

redressant la tête. ú J’ai enclenché le cyber-pilote. on pourrait aller au

Mégapark. ú T’as de bonnes idées, toi ! Comme il fait beau, si on allait

plutôt à Lattes II ? répond-elle en m’embrassant sur la joue. ú Allons au restaurant tant qu’on y est !

Là, je sens à sa grimace que je l’ai légèrement vexée. Mais comme dit le proverbe, rien n’est plus fort que l’amour.

ú Ce paysage, le chant des oiseaux… on se croirait au paradis, me chuchote Emilie dans l’oreille.

Le moteur électrique de la navette s’arrête. ú oups ! J’ai oublié de m’arrêter à l’électrolienne hier soir.

C’était mon tour ! ú Le coup de la panne, soupire Emilie. Ma mère me l’avait dit.

Heureusement que j’ai les rames en bois de papi Paul dans le tiroir-stock. J’en donne une à la plus belle fille du monde puis nous nous mettons à ramer.

140


ú L’électrolienne la plus proche est là-bas, près du lac interdit, dit-elle en pointant du doigt une immense étendue d’eau déserte au-delà d’une épaisse haie de roseaux.

ú C’est aussi le coin le moins fréquenté de la région, dis-je un peu inquiet.

ú C’est une balade qui nous coûtera moins que ton resto !Ça y est ! Elle tient sa revanche. Arrivés sur place, on se branche sur le chargeur. En

attendant, on sort l’imprimante 3D pour tirer deux sandwichs et des gâteaux. Des cris étranges d’animaux résonnent. Au-dessus de nous se dressent des panneaux sur lesquels est écrit : Ne pas franchir cette limite.

ú Quelle limite ? dis-je étonné. ú Celle du panneau, ahuri ! on est à la limite du lac

interdit. T’as un cerveau… ou pas ?Elle se penche pour contempler les poissons. Elle laisse sa

main glisser au fil de l’eau. Soudain, elle pousse un hurlement. En essayant de dégager sa main, son bracelet bleu, un bijou qui appartenait à une arrière-arrière-grand-mère, se coince dans la branche d’un arbre immergé.

ú Qu’est-ce qu’il t’arrive ? ú Là ! J’ai vu comme un squelette ! répond-elle toute pâle.

Et mon bracelet… J’ai peur. Aide-moi à le récupérer. Fais quelque chose !

J’ai probablement autant peur qu’elle mais je plonge tout de même la tête dans l’eau pour essayer de voir ce fichu bijou. Je l’aperçois. Au moment où j’essaie de m’en emparer, il glisse et s’enfonce dans les algues. J’essaie de garder en mémoire l’endroit où il se dépose lorsque je distingue quelque chose d’étrange… je sors la tête et me tourne vers Emilie :

ú Je n’y suis pas arrivé, désolé. Il a glissé. Il va falloir plonger avec du matériel. Mais par contre, j’ai vu des trucs au fond de l’eau, des formes géométriques, comme des ruines.

ú Qu’est-ce qu’on fait ? ú Il faut aller voir Fred et Hugo. Ils s’y connaissent. Et

prendre du matériel de plongée.

141

LES PRoFonDEURS

ú ok. Je vais les chercher, répond-elle un peu déçue. Je pensais…

ú non, je viens avec toi, dis-je en souriant. on forme une équipe !

Journal de Julie : 28 septembre 2185

Bienvenue dans mon histoire secrète. Je vais te confier ma vie amoureuse et plein d’autres choses encore.

Nous sommes en 2185 et j’ai 11 ans. J’ai rencontré un garçon, Pierre il a mon âge. Hier, il m’a regardée, c’ était fantastique. Il m’a demandé un stylo pour écrire quelque chose. À la récré, il est venu me remercier, je me sentais rougir et tout le monde me regardait. Je suis partie en courant dans les toilettes pour me «dérougir» et réfléchir un peu. En sortant retrouver mes amis, je l’ai vu entrer dans la classe et mettre quelque chose dans ma trousse. Je l’observais attentivement. Lorsqu’ il est sorti, j’ai fait comme si je n’avais rien vu. À la sonnerie, j’ai couru me ranger. Je me suis mise toute seule au bout du rang. Pierre s’est placé à côté de moi. Il allait me parler quand la maîtresse a réclamé le silence. Nous sommes donc rentrés en classe sans nous adresser la parole.

Je me suis précipitée sur ma trousse. J’en ai fouillé tous les recoins et là, j’ai vu un bout de papier. Je me suis jetée dessus comme si j’allais avoir un cadeau. Je l’ai déplié et j’ai tourné la tête. J’ai vu Pierre qui me souriait. J’ai commencé à lire : « Chère Julie, je ne veux pas te le demander devant mes amis alors je le fais par ce message. Voudrais-tu devenir mon amie ? » Je m’attendais à autre chose. J’allais replier la feuille quand j’ai vu écrit « Ce sera notre secret… » J’ai tourné la tête et lui ai fait un sourire. La maîtresse m’a dit : « Julie, quelle est la capitale de Paris ? » Tout le monde s’est mis à rigoler. Je ne comprenais pas pourquoi. Pierre m’a glissé à l’oreille « C’est déjà une capitale, elle ne peut pas en avoir une. » C’est mon sauveur ! Je n’avais rien écouté.

142


143


144



Fred et Hugo sont à l’aquaparc en train de jouer au jet-water. Ils sont jumeaux. Mais si Hugo adore tous les sports nautiques, Fred est plutôt un scientifique. Emilie se dirige vers eux :

ú Eh ! Les garçons ! J’ai quelque chose à vous dire. Venez avec nous, c’est urgent !

ú Que se passe-t-il ? demande Hugo. ú on vous le dira en chemin, dis-je. ú nous montons à bord de la navette. ú Voilà, explique Emilie, on était au lac interdit… ú où ? s’exclame Fred. ú oui, je sais… soupire-t-elle. ú Mais vous êtes fous ! on va pas là-bas ! s’écrie Fred. Tu

sais tout ce qu’on raconte dessus ? ú Ecoute-nous au moins ! dis-je. ú Bon, continue Emilie. on se promenait. J’ai fait tomber

mon bracelet dans l’eau. Luc a essayé de l’attraper et il a vu des sortes de ruines.

ú Ah ça, réagit Hugo, ça a l’air intéressant ! ú Justement, on est venu vous voir parce que vous vous y

connaissez en plongée. nous retournons en ville. Après avoir convenu d’un rendez-

vous, nous déposons Fred et Hugo chez eux. Puis nous passons chez moi.

Je monte dans la chambre de mes parents. J’ouvre la porte du placard, doucement pour qu’ils ne m’entendent pas. Je prends la grosse caisse noire. Je l’emmène dans ma chambre et je l’ouvre en espérant ne pas faire trop de bruit. J’attrape le triton4 et là, j’entends un grincement ! Je glisse la caisse sous mon lit et je file me cacher.

ú Ça va en haut ? demande maman. ú oui, oui, dis-je embarrassé.

4. Triton (n. m.) : appareil permettant de respirer sous l’eau. « Pour faire de la plongée, j’ai pris mon triton »

145

LES PRoFonDEURS

ú Je monte te voir dans un instant, ajoute-t-elle. ú non… euh… oui. ú Ma mère doit se douter de quelque chose. Elle a entendu

du bruit. Je récupère la caisse, j’en sors ma thermo-combi, mes palmes à propulsion, ma lampe et mon casque-radio. Je remets la caisse dans le placard et je file discrètement rejoindre Emilie qui m’attend à bord du z630.

nous fonçons chez elle. La liane s’enroule autour d’Emilie et la monte à l’étage. Je peux suivre ce qui se passe grâce à nos LRA (lunettes à réalité augmentée) qu’elle a mises en mode webcam. Elle pénètre discrètement chez elle, regarde dans la remise quand soudain… Ding dang dong ! Elle fait un bond.

ú Bonjour ma chérie, tu es déjà revenue ?zut ! C’est sa mère !

ú Heu… oui. J’étais fatiguée. Mais toi, pourquoi t’es là ? ú Je suis rentrée plus tôt du travail. Je ne me sentais pas

bien. ne fais pas de bruit s’il te plaît. Je vais dans ma chambre dormir.

Sa mère s’éloigne et ferme la porte. Emilie monte sur une chaise et tente d’attraper le sac de matériel de plongée… en vain. Elle empile une autre chaise. Mais celle du dessous cède… Crac !

ú Silence ! crie sa mère ú oups, désolée, murmure Emilie

Elle remonte et tire sur la poignée du sac qui s’écrase par terre dans un vacarme qui la fige.

ú J’ai dit… SILEnCE ! ú Euh, ben… je vais peut-être te laisser te reposer. Salut.

nous nous retrouvons tous les quatre conformément à notre rendez-vous sur le z630 avec le matériel de plongée.

ú Hum… Belle journée ensoleillée, nous dit Fred. ú ouais ! D’ailleurs, je devais justement aller à mon

concours d’overboard au lieu de plonger dans un lac dégoûtant et qui, de plus, est interdit ! répond Hugo, visiblement moins arrangeant.

146


Sur le chemin, nous ne faisons attention ni aux publicités ni aux cyber-marchands qui essaient de nous vendre leurs articles :

ú Venez ! Admirez mes magnifiques bracelets. ú Ah d’ailleurs, c’est pas à cause de ce fichu bracelet qu’on

en est là ? demande-t-il énervé. ú Hé ! La ramène pas s’il te plaît ! répond Emilie. Est-ce

que toi t’as un bracelet qui a des centaines d’années ? ú Peut-être pas. Mais moi, j’ai un cerveau. ú Je te rappelle que ton crâne est un espace à louer, inter-

vient Fred. Une dispute éclate quand tout à coup, je me mets à crier :

ú Taisez-vous ! on est arrivés…

Journal de Julie : 30 septembre 2185

Ma mère et moi, c’est comme si on était sœurs parce qu’elle me confiait beaucoup de secrets. Mais c’ était avant. Avant que mon père nous quitte. Et puis elle a dû accepter ce travail pour la construction de la digue qui doit nous protéger de la montée des eaux. Elle est architecte. Maintenant, elle travaille vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Elle me dit tout juste de manger. Même plus de ranger ma chambre vu qu’elle n’y entre jamais pour me dire bonne nuit ou m’ouvrir les volets le matin et me dire debout. En plus, elle ne m’emmène plus à l’ école et on se dispute de plus en plus souvent.

Journal de Julie : 29 octobre 2185

Devinez qui sort avec moi : Pierre ! Et j’ai rêvé que lui et moi allions nous marier. Lorsque le prêtre m’a demandé si je voulais l’ épouser, j’ai dit oui. Puis il a dit oui et il m’a passé la bague au doigt. Et je me suis réveillée en sursaut. Je me suis dit que c’ était juste un rêve et rien qu’un rêve…

147

LES PRoFonDEURS


ú Bon Fred, tu viens ? lui demandé-je ú J’ai la frousse. Je préfère rentrer réviser mon contrôle

de modélisation holographique. Et puis je vous parie qu’il y a 95 % de chances de rencontrer des requins sous ce lac.

ú Possible, lui répond Hugo. Mais il y a 100% de chances que ma main se retrouve sur ta face. Et je dirai à maman que tu as eu un zéro en sport parce que tu n’avais pas ta combi.

ú Bon d’accord, je viens, soupire Fred. Mais à une condition, je remonte en premier !

nous enfilons nos thermo-combis, nos palmes à propulsion et nos casques-radios, nous attrapons nos tritons et nous nous laissons tomber dans l’eau l’un après l’autre. J’ai l’impression de plonger dans une piscine de plus de trente mètres de profondeur. Mais l’eau est un peu salée. nous voyons des milliers de poissons tourner autour de nous. Hugo me fait un signe en direction d’une silhouette massive juste en dessous. nous descendons vers ce qui ressemble à un grand hangar avec, sur une des façades, deux grandes lettres jaunâtres, I et k. nous pénétrons à l’intérieur du bâtiment. Un escalier avec une rampe en forme de serpent mène vers un étage.

ú Curieux cet endroit, chuchote Emilie dans son micro. Ça n’a pas l’air d’être un hangar. Il devait s’agir d’appar-tements. Regardez, d’après ce qu’il en reste, on dirait des salons et des chambres.

C’est alors que nous apercevons à quelques dizaines de mètres une silhouette de plongeur.

ú Il manquait plus que ça ! on va se faire repérer. Venez vite ! dit Fred.

ú Ce sont sûrement des inspecteurs de la mairie, répond son frère. Ils ont dû voir le z630.

148


Vite, nous repartons. Fred se tient toujours à la rampe-serpent. Je lui dis de se dépêcher mais il reste muet. D’autres silhouettes se déplacent maintenant. on remonte.

ú Ces hommes me font peur, me dit Emilie d’un air inquiet.

ú Froussard ! se moque Hugo, à l’adresse de Fred. Moi, je suis un homme, un vrai !

Soudain, un requin passe dans l’allée où nous nous trouvons. Hugo pousse un hurlement.

ú Un homme ? demande Fred amusé. Le requin s’éloigne, indifférent. nous en profitons pour

sortir du hangar et remonter vers la surface. En faisant le singe, Hugo lance :

ú Ah ! Enfin sortis de cette eau dégoûtante ! ú Tu as raison ça pue ! dit Fred en essayant de faire pire

que lui. Hugo est le roi des grimaces. Il a déjà gagné deux coupes

et trois médailles d’or lors de compétitions. C’est pour ça que Fred et moi le défions quand on peut. nous nous arrêtons derrière un rocher couvert d’algues quand tout à coup, plusieurs hommes en noir avec des capture-objets nous surprennent :

ú Qu’est-ce que vous faites là ? C’est interdit ! Vous devrez payer une amende de 250 tinqs en or, donnez la monnaie ! dit l’un d’eux.

ú Sûrement pas ! on n’a pas un sou en poche, répliquent en même temps Fred et Hugo.

ú Insolents ! Vous osez répondre ! ú Et vous pourquoi êtes-vous là ? demande Emilie en

reculant contre un rocher. ú C’est pas tes affaires, petite ! répond le plus costaud d’une

voix caverneuse. ú S’il vous plaît monsieur, supplie Emilie de sa voix de fée.

S’il vous plaît… Finalement, elle réussit à lui arracher un sourire :

ú C’est un lac interdit, c’est marqué sur le panneau. Ha ! La jeunesse… soupire le plus âgé du groupe.

149

LES PRoFonDEURS

ú Bon maintenant, disparaissez ! intervient un autre, plus jeune.

ú Allez les gars ! Ce ne sont que des enfants ! ú S’il vous plaît, renchérit Emilie. on ne voulait rien faire

de mal. on cherchait juste un bracelet que j’avais perdu. ú Bon, au point où on en est, on va s’expliquer. Vous venez

de découvrir qu’il y a une ville sous l’eau. Vous n’avez pas intérêt à en parler autour de vous !

ú D’accord, mais arrêtez de nous faire la morale, répond Hugo.

Sentant monter la tension, je leur demande : ú C’est promis. Mais que faites-vous ici ? ú nous sommes archéologues. ú Quoi ? ú nous nous attendions à tout sauf à ça. ú J’étais sûr que vous seriez surpris. on va déjà commencer

par se présenter. Moi, c’est Martin. Lui, c’est Philippe, Jean-Jacques, le plus âgé du groupe et Christophe. Et vous ?

ú nous quoi ? demande Fred. ú Ben… Vos noms ! ú Ah ! Voici Luc, Emilie et mon frère Hugo. Et moi, c’est

Fred. Qu’est-ce que vous cherchez ici ? ú on essaie de comprendre ce qui s’est passé ici il y a sept

cents ans et comment vivaient les hommes avant la grande catastrophe qui a englouti cette ville, enchaîne Philippe. Venez, suivez nous !

Il plonge. nous le suivons. Le groupe nous entraîne vers le fond du lac en direction d’un groupe de bâtiments que longe un long tunnel de béton. Ils s’approchent du tunnel, ouvrent un sas et pénètrent à l’intérieur. nous entrons à notre tour. L’eau s’évacue. Ils enlèvent leur triton, leur masque et l’archéo-logue reprend son explication :

ú nous avons asséché cette partie pour stocker les objets que nous collectons lors de nos fouilles. La ville finance nos recherches et en échange, nous préparons le futur musée archéologique de Montpellier. Il aura de grandes vitres qui

150


donneront sur un parc, une immense porte marron, des piliers blancs, de grands panneaux solaires. Mais là, nous sommes dans un tunnel d’hydrotram de la ville de Montpellier.

En effet, une rame hors service gît à quelques mètres de là. ú À quoi servent les traits parallèles qui suivent ces engins ?

demande Hugo. ú Ça s’appelle des rails. Ça servait à guider les trains. ú C’est quoi des trains ? ú Vous le verrez plus tard. ú Est-ce qu’on peut la visiter maintenant ? intervient

timidement Fred. ú Bien sûr.

C’est émouvant. Hugo veut reculer pour contempler tout le wagon lorsqu’il sent quelque chose dans son dos. Par réflexe, il lève les mains en l’air.

ú Tu joues à quoi ? lui demande Emilie intriguée. ú Je dois tout prendre au sérieux ! dit-il en restant les bras

levés. Je contrôle la situation. Les… forces de l’ordre sont derrière moi et je ne dois pas bouger.

ú Voyons, Hugo ! Il n’y a personne derrière toi ! s’exclame Emilie en riant.

ú Ah bon ? s’interroge Hugo dépité. ú Bien sûr. T’as juste heurté un boîtier. D’ailleurs, tant

qu’on en parle, à quoi ça servait ? demande-t-elle en se tournant vers les archéologues.

ú Ce qu’Hugo percevait comme une arme n’est en fait qu’un vulgaire composteur de billets.

ú À quoi ça servait, un composteur ? demande Emilie. ú Un composteur… ça servait à composter des billets…

des billets de voyages, répond Marc, un peu agacé par toutes ces questions.

ú Des voyages ? Quels voyages ? reprend Emilie. ú Des voyages en tramway ! Les tickets étaient en carton.

Tes ancêtres réfugiés ici les connaissaient sans doute. Après sont venues les cartes électromagnétiques et on a complè-tement oublié les tickets.

151

LES PRoFonDEURS

Puis ils nous emmènent dans la réserve et nous montrent quelques objets qu’ils ont prélevés sur le site.

ú Ça par exemple, c’est ce qu’ils appelaient une bougie. ú Ça servait à quoi ? demandé-je. ú En fait, ça sert à éclairer. ú Ah, comme le kzx1, dit Emilie. ú oui, un peu comme ça. Mais tu l’allumais avec une

allumette. ú Une allumette ? dis-je étonné. Mais qu’est-ce que c’est ? ú Pffiouuu… Ça fait beaucoup de questions. on n’a pas

l’habitude, nous. C’est un petit bâton avec du soufre au bout. on le frotte contre un grattoir pour l’enflammer et allumer la bougie. Bon allez ; il se fait tard. La visite est terminée. Ah oui ! J’allais oublier. C’est à vous ceci ?

Et il brandit le bracelet bleu d’Emilie. Elle se jette dessus. ú oh merci ! Vraiment merci ! Après cette histoire, je l’avais

complètement oublié. Après un long moment de délibération dans le sas, les

plongeurs nous proposent de les accompagner demain dans leur exploration du site. Et comme n’importe quel enfant le ferait, nous répondons bien évidemment « oui » avec enthousiasme.

152


Journal de Julie : 15 novembre 2185

Aujourd’hui, la maîtresse nous a raconté que la température augmentait depuis plus de deux cents ans. On a atteint la plus haute température depuis dix mille ans. La maîtresse n’est pas fière parce que le réchauffement entraîne une fonte des glaces et donc une augmentation du niveau de la mer. Elle dit que toutes les villes proches de la mer risquent d’ être inondées et que c’est pour ça qu’on est obligé de construire une digue maintenant. Et aussi que massacrer le littoral, c’est laid et qu’on pourrait aller vérifier nous-mêmes.

Après l’ école, j’ai pris l’ hydro-tram qui m’a menée sur le Lez jusqu’ à la mer. J’ai vu la digue en chantier. C’est vrai que c’est très laid. C’est comme une épaisse muraille qui longe la plage sur des kilomètres. On ne voit plus la mer. Des dizaines de grues tournoient. Des centaines d’ouvriers s’agitent et courent dans tous les sens comme dans une fourmilière. Il n’y a plus d’enfants qui jouent sur le sable comme d’habitude. Que des engins de chantier, des cris, du métal, du béton. Ça m’a donné des frissons. Alors c’est à ça que travaille maman ? C’est nul et agaçant. Je suis vite repartie à la maison. J’avais envie de parler à Pierre.


nous avons rendez-vous avec les archéologues à neuf heures. Je passe prendre Emilie, Fred et Hugo et nous filons vers le lac interdit. Les plongeurs nous attendent sur la berge. Ils ont écarté les algues pour pouvoir passer.

ú Allez, suivez-nous. n’avancez pas comme des tortues ! ú on vous suit. Mais où nous amenez-vous ?

Sur une grande place. Pour vous montrer deux autres endroits de la ville, répond Jean-Jacques. nous mettons nos masques et nos tritons et nous commençons l’exploration. nous descendons vers un bâtiment surmonté d’un dôme de roche, impressionnés par le bruit sinistre des profondeurs.

153

LES PRoFonDEURS

ú nous y sommes !Je peux voir au-dessus de nous l’électroancre sans fil du

z630 et les bulles d’air qui s’échappent de nos tritons. Chris-tophe écarte de la main la vase pour trouver la poignée rouillée de la porte. nous pénétrons à l’intérieur. Ça doit être un « cinémax » parce qu’il y a des chaises relax pliables au milieu des algues, éventrées par les animaux qui vivent là, et ce qui devait être un grand écran à moitié rongé sur lequel se déplacent des homards. Il paraît qu’ils passaient des films, que les gens allaient voir à plusieurs. Je prends une bobine de pellicule couverte de vase en souvenir. L’un des archéologues m’explique que les images étaient projetées à partir de cette bobine par un appareil. Je pourrais peut-être la nettoyer chez moi pour voir à quoi ça ressemble. Mais à mon avis, elle sera en trop mauvais état.

nous ressortons sur la grande place et nageons vers une sculpture recouverte de mousse et d’algues. nous arrivons vaguement à distinguer trois femmes. nos guides s’approchent :

ú Regardez, si on enlève la mousse, on voit qu’elles sont nues.

ú C’est dégoûtant ! s’exclame Hugo en s’étouffant. on entend rire les archéologues qui s’agitent pour ne pas

couler. ú Regarde les reflets sur les statues. Que c’est beau ! dit

Emilie. ú C’était sûrement une fontaine parce qu’à leurs pieds, il y

a des tuyaux en métal. Puis nous nous dirigeons vers de grands bâtiments et aussi

de plus petits, dont des maisons avec des jardins. Cela existe encore dans les terres non inondées au nord-est.

nous bifurquons à grands coups de palmes vers un très grand bâtiment en verre encadré à gauche par des escaliers et à droite par une belle descente que longent des rails de tramway. Les archéologues nous disent que c’était un centre commercial avec plusieurs magasins, le Polygone. nous pénétrons par une des vitres brisées où les poissons semblaient déambuler. C’est

154


horrible car l’endroit où il y a le plus de squelettes, c’est ici. Je rentre dans un des magasins et je prends un boîtier avec un disque à l’intérieur, un « DVD ». Jean-Jacques m’explique qu’après avoir utilisé la pellicule comme celle que j’ai prise dans le « cinémax » pour montrer des films, on les a stockés sur ces disques.

nous ressortons un instant de l’eau pour déposer nos objets et refaire le plein d’oxygène. Je monte à bord du z630 pour imprimer quatre sandwiches. Après une pause rapide, nous plongeons à nouveau.

Journal de Julie : 1er décembre 2185

Ça me manque de ne plus avoir la présence d’un père. Car quand je vais à l’ école, les papas de mes copines viennent les chercher. Et moi, je dois rentrer toute seule. Ça me rend triste. Et puis quand je vois ma mère seule, sans personne le matin pour lui dire « je t’aime, à ce soir », ça me fait de la peine pour elle. La maison est vide sans lui. Je me demande s’ il avait fini ce qu’ il avait à faire dans notre vie. Mais bon, c’est comme ça. Maman est plutôt tendue. Elle a rencontré un homme à son travail, qui lui plaît. Il s’appelle Eric Douglas. Elle a pris son adresse et son numéro de téléphone.

Hier soir, elle est restée coincée à son travail. C’ était une « urgence », comme elle dit à chaque fois. J’ étais à la maison. Je me sentais un peu seule dans ma bulle. Quand elle est rentrée, maman m’a dit en soupirant : « Il m’ énerve ce patron à la noix » Mais ça lui permet de gagner sa vie. Heureusement, à chaque fois, Pierre m’appelle pour me tenir compagnie. J’ai un peu moins peur après. Mais c’est mon père qui me manque.

155

LES PRoFonDEURS


nous descendons petit à petit dans les profondeurs marines vers une grande allée, et ce qui devait être une fontaine. nous faisons un palier de décompression à vingt mètres de profondeur. Vu de là-haut, c’est magnifique. Puis nous appro-chons d’un grand bâtiment qui, d’après les archéologues, s’appelait le Musée Fabre. Dedans, il y a les cadres de très anciennes peintures. Il n’y a plus rien à voir évidemment mais l’architecture est très belle. nous descendons dans un sous-sol. Il y a deux portes cassées l’une à côté de l’autre avec deux dessins bizarres. Je rentre à l’intérieur et je vois des lavabos pleins de crabes et des toilettes. Lorsque je ressors, je ne vois plus les autres. Je les appelle mais la liaison semble coupée. Je panique. J’allume ma webcam, je n’ai pas d’image. Je panique encore plus. Je sors du sous-sol quand j’entends Emilie :

ú Luc ? Tu m’appelais ? Qu’est-ce qu’il y a ? ú Vous êtes où ? ú À l’entrée du musée. on t’attend.

Une fois arrivé dans le grand hall, je retrouve tout le monde, soulagé. nous suivons les archéologues vers la grande place de ce matin. Au bout d’un moment, un grand bâtiment se dresse devant nous, surmonté tout le long d’une bâche en lambeaux laissant s’échapper par les trous de lumières des poissons multicolores.

ú oh ! C’est magique ! dit Emilie. ú Ceci s’appelait une gare, explique Jean-Jacques. À notre

époque, on pourrait nommer cet endroit un PDST.

156


ú Vous voulez parler d’un Point De Stationnement Tempo-raire que l’on a, vue la taille du mot, raccourci en mettant uniquement les initiales, ce qui a donné un de ces mots impro-nonçables, non ? rétorque Fred.

nous restons bouche bée. Seul Jean-Jacques a quelque chose à dire :

ú Euuuuuh, oui ! Si on veut, répond-il l’air un peu gêné. ú Que diriez-vous si on passait au sous-sol ? dis-je.

nous descendons sur les quais. Hugo, comme d’habitude, passe en premier. À peine est-il en bas qu’il pousse un cri d’effroi :

ú Aaaah ! s’écrie-t-il. ú Qu’est-ce qu’il se passe ? demande Christophe juste

derrière lui. ú Ici, répond Hugo en pointant du doigt un train tout

entier couché au sol. ú ne t’inquiète pas ! Il est là depuis longtemps.

Pendant la visite du quai, nous remarquons à nouveau les fameux « rails » qui servaient de supports aux trains, des locomo-tives tirant des wagons de voyageurs ou de marchandises.

ú Pas d’esclaves, nous rassure Jean-Jacques. En ressortant, nous voyons, accumulé contre la façade de

cette gare, un immense dépotoir. Des milliers d’objets recou-verts par la vase.

ú Comment c’est arrivé là ? demandé-je. ú À cause de la vague, répond Christophe. ú Elle était si énorme que ça pour tout emporter ? ú oh oui !

Martin installe le quadrillage-laser. Ce sont quatre boîtiers que l’ont place au sol pour former un carré. Lorsqu’on les active, ils quadrillent la zone délimitée.

ú Ça nous sert à repérer les zones de fouille, dit Martin. Bon, commençons !

Il sort une pelle électrique et l’active. Elle se met à creuser. Philippe l’arrête et poursuit son travail au pinceau.

ú observez, les enfants, dit Christophe. Je crois que Philippe a trouvé quelque chose.

157

LES PRoFonDEURS

ú J’ai trouvé une télé ! Je relève les coordonnées. ú C’est quoi une télé ? demande Emilie ú Un appareil électronique pour voir des images. Mais on

l’a remplacé ensuite par l’hologramme. Ça avait un peu les mêmes fonctions qu’une tablette.

ú Une quoi ? demandé-je. ú Je ne t’entends pas bien, me répond Martin en me faisant

des signes. Arrange ton micro. ú Je demandais ce qu’était une tablette… ú Ah ! Comme un padel mais à la place des hologrammes,

les images étaient en 2D. Après cette séance de fouille, nous remontons un instant

pour nous reposer. Le temps de prendre un goûter et de déposer les objets collectés… nous nous dirigeons maintenant vers ce qui devait être la vieille ville.

ú Le monument en-dessous de vous s’appelle une cathé-drale, nous dit l’un des archéologues. Les hommes allaient prier là.

Plus loin, au milieu des algues, je distingue une vieille tour, comme celle dont on parle dans les histoires de châteaux forts. Je propose d’y aller mais des requins me font hésiter.

ú Vous voyez qu’il y en a ! s’exclame Fred. ú Ah… on devrait peut-être partir. ú Aucun risque, nous dit Jean-Jacques. Ils n’ont pas l’air

d’avoir faim. D’ailleurs, ils s’éloignent déjà. ú Allez Fred ! s’exclame Hugo en colère. Dépêche ! ú Mais… y’a des requins. Je ne… ú n’oublie pas ma promesse. ú Laquelle ? ú De dire à maman que tu as eu zéro en sport… ú Bon, je viens, dit-il d’un air effrayé.

Pendant qu’ils se disputent, Emilie et moi nageons vers la tour en ruine pendant que les archéologues explorent la cathé-drale. Elle me demande où sont Fred et Hugo. Je soupire. Au pied de la tour se trouve un petit escalier avec une rampe métal-lique qui donne sur une porte à moitié détruite que traversent

158


159


160


des poissons de toutes sortes. Sur la pierre sont gravés les mots « Tour des Pins ». Emilie remarque un petit boîtier en plastique couvert de vase, coincé dans les marches.

ú Beurk ! s’exclame-t-elle. Elle l’essuie avec la main et aperçoit un objet étrange à

l’intérieur. ú glisse-le vite dans ta thermo-combi, lui dis-je. Sinon les

archéologues vont rappliquer et ils vont nous dire de le leur donner. on le regardera avec Fred et Hugo !

Effectivement, quelques instants plus tard, nous entendons Jean-Jacques dans nos oreillettes :

ú Hum, hum, les enfants… Vous n’avez rien trouvé ? Car pour nous, ça avance bien !

« Blup, blup ! » des bulles sortent de leurs masques. Ils sont juste derrière nous !

ú Euh… Ben, non… répondent Hugo et Fred un peu gênés.

ú Bon, tant pis, répondent-ils tous en chœur. L’eau devient sombre et froide.

ú Il va falloir y aller maintenant, ajoute Jean-Jacques. on remonte à la surface !

Arrivés aux navettes, nous déposons tous nos objets, à l’exception du boîtier qu’Emilie garde bien caché dans sa thermo-combi. Les archéologues nous donnent quelques explications sur ce qu’ils ont trouvé. Puis nous nous séparons après leur avoir promis à nouveau de ne rien dire de ce que nous avons vu aujourd’hui. nous filons à bord du z630 en direction de la ville. Au bout d’une demi-heure, nous arrivons chez Fred et Hugo.

Journal de Julie : 15 décembre 2185

Hier, Pierre est venu me chercher à une heure de l’après-midi et nous sommes partis tous les deux au Jardin des Plantes. Nous avons traversé la forêt de bambous. Un peu plus loin, il m’a cueilli

161

LES PRoFonDEURS

sans autorisation une fleur de jasmin d’hiver et l’a cachée dans son sac. On a longé une allée entre deux rangées d’arbustes. Il a sorti une feuille et un stylo et m’a montré un arbre plein de trous, à l’ intérieur desquels il y avait des bouts de papier. Il m’a dit que c’ était un arbre à souhaits, mais qu’on l’appelait aussi l’arbre aux amoureux. Il m’a tendu son stylo et on a écrit un mot qu’on a caché tout en haut de l’arbre.

C’est alors qu’on a entendu une voix dire «Votre jardin préféré va bientôt fermer. Veuillez vous diriger vers la sortie. »

Passé le portail, Pierre m’a demandé ce que j’avais pensé de notre promenade en amoureux. Je lui ai répondu que j’avais adoré. Il m’a raccompagné jusque chez moi et m’a dit bonsoir en me faisant un bisou sur la joue. Je lui ai dit à mon tour bonsoir, un peu rouge et je suis rentrée chez moi comme si j’avais gagné au loto.

é P I L o g U E

ú Allez dans l’atelier au bout du couloir, dit Fred. C’est une pièce éclairée par une grande fenêtre. À l’inté-

rieur, se trouvent des pinceaux multi-fonctions, un chiffon électromagnétique, un fer à souder, des tournevis, des circuits électroniques, des écrans, des projecteurs holographiques et tout un tas d’autres choses. Emilie sort la précieuse découverte et tente d’ouvrir la petite boîte hermétique, en vain.

ú Elle a l’air pourtant trop simple à ouvrir, dis-je en la lui prenant des mains.

ú Tu vois ! T’y arrives pas, répond-elle agacée. Alors comment on va le remettre en marche ?

ú D’abord, on le sort de la boîte hermétique, dit Fred en ouvrant précautionneusement celle-ci sans forcer.

ú Pour une fois, dit Hugo d’un ton moqueur, t’arrives à faire quelque chose avec tes mains. Bon, on le nettoie avec le pinceau multi-fonctions… Et pour finir, on l’essuie avec le chiffon électromagnétique. Mon oncle m’avait montré de vieux objets électroniques et expliqué comment étaient réalisés

162


les circuits à l’époque. Il y a des fils de couleur soudés aux extrémités.

Fred et Hugo les regardent un peu désemparés. ú Tu me prêtes ton pistolet soudeur ?

Il me le tend. Je sors la plaque du circuit intégré. Les fils sont reliés à une batterie sauf deux qui se sont détachés. Je les ressoude. Mais rien ne se passe. Fred enlève la batterie et essaie plusieurs modèles à la place. Soudain, un hologramme surgit de l’objet. Mais il est légèrement brouillé. Je tente un réglage sur le circuit intégré. L’image est enfin nette. nous voyons apparaître devant nous une petite fille blonde de onze ans, vêtue de bleu et de noir. Emilie murmure à mon oreille :

ú C’est vraiment super de t’avoir comme ami. Et elle m’embrasse. Je deviens tout rouge. La fille de l’holo-

gramme commence à parler : ú Bienvenue dans mon histoire secrète. Je vais te confier

ma vie amoureuse et plein d’autres choses encore. ú oh ! disent Fred et Hugo en chœur. Qu’elle est belle ! ú nous sommes en 2185 et j’ai 11 ans, continue la voix.

nous nous regardons abasourdis. Elle a vécu il y a presque six cents ans. nous l’écoutons en silence raconter sa vie. Elle parle d’un garçon qui s’appelle Pierre, de sa mère qu’elle ne voit pas souvent et de la montée des eaux qui menace sa ville. Au bout d’un long moment, nous la voyons sur le toit d’un immeuble avec un garçon (peut-être Pierre). Elle lui dit quelque chose à l’oreille. Il lui répond « moi aussi ». Ils se sourient. Et d’un coup plus rien.

Emilie prend ma main et la serre très fort. Je n’ose pas la regarder. Je crois qu’elle pleure.

163

LES PRoFonDEURS

Internat d’excellenceCLASSE DE JoëL PALPAnT

Arefan Ali Bedja • Adam Ammi Ismaïl Ben Lahbib • Rhyan Bertolaso • Lilian Bette Fabrice Calmont • Yann Cornut • Jade Domacq Théo Gutierrez • Lucas Haoues Jamila Laasri-Boukhoubza • Safi Lamamria Yanis Laoukiri • Inès Lombardo • Kéziah Mastoura Mathéo Maunier • Sami Mecherouh Nathalie Morozov • Yohann Roca Tania Tsimiday • Tom Vuillaume • Reda Yettou Mehdi Zemzami

Remerciements : Valérie Sindres-Segui et René Escudié.

165

Super sans peur

U n B E I g n E T I n A T T E n D U

Je vais vous raconter notre histoire. nous sommes quatre. Quatre amis, frères, sœurs. Sarie est ma jumelle et Umi et Ellya sont aussi jumeaux. Aussi loin que notre mémoire se souvient, nous partageons nos souvenirs ! nous nous sommes rencontrés à la crèche « Les Marmousets » et déjà, selon nos parents, étions inséparables. nos mères ont continué à nous emmener au parc Montcalm ou au parc Méric où nous nous retrouvions pour explorer les toboggans et bacs à sable. Mais ce qui nous lie le plus c’est notre goût pour les beignets et le chocolat : noir, au lait, aux noisettes ou blanc, on adore ! Mais… j’ai oublié de me présenter, et je ne peux pas commencer l’histoire sans cela : je suis Phil, le cerveau du groupe. À nous quatre, on pratique le handball, la natation, de préférence dans les bassins de la piscine olympique d’Antigone ; les filles adorent la danse et raffolent de patinage artistique à Végapolis. Ma sœur est intel-ligente et réfléchit beaucoup, c’est une jeune fille de onze ans, de taille moyenne avec de longs cheveux roux et de petites taches de rousseur sur le bout du nez. Elle a son caractère et je n’ai pas toujours le dernier mot avec elle ! Il faut dire qu’elle

166


sait y faire à la maison, maman lui fait une confiance aveugle. Ellya, elle, est forte en informatique et explore dès qu’elle le peut la nouvelle technologie. C’est la meilleure amie de Sarie, on dirait des sœurs tellement elles se ressemblent ! Aussi espiègles et malignes l’une que l’autre. Quant à mon ami Umi, je dirais qu’il est assez musclé, grand, brun et plutôt secret. Il ne parle pas beaucoup, ce n’est pas comme moi, mais son visage est très expressif et je sais ce qu’il pense et ressent à chaque instant. En fait je ne sais pas si tout le monde lit dans les pensées d’Umi comme moi, car je crois que j’ai ce pouvoir mais quand j’essaie d’en parler, personne ne semble s’intéresser à ma théorie.

nous nous appelons parfois le club des cinq ou les SUPER car Ruby est le cinquième mousquetaire. C’est notre toutou, une boule de poils blanche, fainéante et gourmande comme nous, et qui ne nous quitte pas d’une semelle ! Il est même arrivé qu’il accompagne Sarie en classe, un jour de décembre, alors que le chocolat chaud et les pains d’épices garnissaient les bancs de l’école. SUPER nous est venu alors que nous étions sur la plage de Carnon. Ce jour-là, Sarie a gravé son initiale dans le sable mouillé, puis a encouragé Umy de faire de même. Puis nous nous sommes rendus compte que S plus U plus P plus E composait un mot… SUPE. Et là nous avons tenté plusieurs combinaisons de lettres. « Il nous manque un o et on pourrait être les SoUPE » a déclaré Umy. Ruby est arrivé, et foufou comme il est, a attiré notre attention en courant et effaçant nos essais. C’est alors que nous avons intégré le « R » de Ruby… S/U/P/E/R… génial ! Mais le plus surprenant, ce n’est pas que l’on forme les doigts de la main, mais qu’en plus de nos passions communes, on a un don incroyable : nous avons le pouvoir de vivre l’avenir.

Tout a commencé un lundi de vacances, alors que nous avions quitté notre école d’experts, comme on l’appelle. nous allions à la piscine. Le tram s’arrêta net et tout le monde en descendit. Umi mangeait son beignet au chocolat lorsqu’une

167

SUPER SAnS PEUR

lumière blanche nous a éblouis et moi je ne pus m’empêcher de cligner des yeux tellement la lumière était réfléchissante ! C’est à ce moment que se produisit quelque chose d’étrange, comme si personne d’autre que nous n’assistait à la scène. nos regards se croisèrent, la peur nous prit. nos corps étaient aspirés en avant, mais ce n’était qu’une sensation car nous ne bougions pas. À cet instant, les filles nous prirent par le bras, l’un de nous frappa des mains et le sortilège se volatilisa. Je compris, en regardant mon compagnon, que quelque chose de sérieux venait de se produire. Sur le chemin du retour le silence s’ins-talla, chacun rentra chez soi. Sarie et moi, dans notre tour de vingt étages dans le quartier Saint Martin et Umi et Ellya en centre ville, place de la Comédie. Dans le temps nous étions voisins directs, c’est-à-dire voisins de paliers mais nous avons déménagé suite aux problèmes de travail de Maman et nous habitons maintenant un peu plus loin. Mais nous avons des copains dans le quartier et surtout une super boulangerie avec des beignets au chocolat… ils sont divins. Et puis, pour Ruby c’est bien mieux, il y a plus d’espaces verts pour ses prome-nades journalières.

ú Que s’est-il passé, frangin ?, questionna Sarie. ú n’as-tu rien ressenti dans le tram ? répondis-je. ú nous semblions être transportés ailleurs et pourtant nos

corps ne bougeaient pas , répliqua Sarie. ú C’est tout à fait ça, j’avais la sensation que nous nous

téléportions je ne sais où et cela s’est arrêté lorsque tu as frappé dans tes mains. C’est grâce à toi si nous sommes là, sains et saufs !

Après des échanges téléphoniques et des chats sur internet avec mes camarades, nous avions convenu de nous retrouver dans ce même tram, après avoir déjeuné. Comme par supers-tition, nous avions choisi de monter dans la même rame, en queue de ligne et d’attendre le signal. nous voulions repro-duire exactement la même situation que plus tôt ce matin. Tout est arrivé très vite : à peine Umi croque son beignet que la lumière est apparue ainsi que des sièges comme sortis de nulle

168


part. nous nous sommes assis en rang d’oignons, personne ne semblait nous voir, nos esprits et pensées ont été happés dans une spirale étourdissante… En fait, le temps semblait être suspendu, les gens figés. nous sommes sortis de nos propres corps, nous pouvions nous observer, comme des clones de nous-mêmes. Ruby notre chien était blotti sur les genoux de Sarie (il semblait fixer cette stupide affiche publicitaire) et Ellya s’accrochait à son frère autant que je me cramponnais à lui. nous avancions tous les cinq dans le même brouillard : le décor autour de nous avait changé, des os et croquettes pendaient alors que des chats de toutes tailles déambulaient de toute part. nous étions dans un drôle de monde, celui que seul un cabot pouvait imaginer… Sarie a claqué des mains et nous avons quitté ce lieu pour nous retrouver dans le tram, à l’endroit même où nous nous trouvions avant la lumière. nous avons repris possession de nos « vrais » corps et nous voilà ramenés à la réalité.

ú nous avons peut-être voyagé dans le temps ? deman-dèrent en chœur les filles.

ú Etait-ce le futur ou le passé ? demanda Umi ú Je ne sais pas, ajoutai-je, mais ce qui est sûr c’est que le

lieu était un endroit rêvé pour un chien ! Sans doute imaginé par Ruby. Je me demande si nous pouvons être transportés dans un monde que nous imaginons, dans lequel nous rêvons de vivre. on pourrait alors aller dans le futur et voir ses consé-quences ! Et si nous réessayions demain ? demandai-je.

Les cris de joie ne se firent pas attendre. nous avons donc convenu de nous retrouver le lendemain, à la même heure.

169


170


L E V o L C A n A U x P I E R R E S P R E C I E U S E S

Mardi matin. Je lance l’application Midi Libre sur la tablette de la maison et tout en buvant mon chocolat chaud. Je parcours les nouvelles du jour. Maman est abonnée et ne manque pas de le lire avant d’aller travailler. À la Une est écrit « À Montpellier ça creuse ! ». Des chercheurs affirment que des gisements de pierres précieuses sont présents sous la ville de Montpellier. Un minerai aussi utile pour la fabrication de bijoux que pour la fabrication de médicaments. Mon docteur m’a bien prescrit une cure de cuivre et de fer l’hiver dernier… Mais plus important encore, il y a des terres rares. Ces métaux rares servent aujourd’hui et serviront demain à la fabrication des minuscules composantes qui habitent nos appareils électro-niques. C’est un véritable enjeu mondial. En tant qu’experte en informatique, Sarie pourra nous expliquer tout cela un jour. Je poursuis donc la lecture de l’article, le faisant défiler d’un glissement de doigt sur l’écran. Le Maire a décidé de fouiller le sous-sol de la ville et des mines vont être mises en exploitation. Voilà pourquoi des charriots et des pelleteuses circulent dans la ville depuis plusieurs jours. Je profite de cet instant privi-légié avec ma mère pour lui demander ce qu’elle pense de cette recherche de pierres précieuses. Elle me répond qu’elle serait fière de porter un bijou orné d’un diamant de Montpellier comme doivent l’être les Polynésiens dont les perles de Tahiti sont connues dans le monde entier.

ú Sarie, tu es réveillée ? crié-je depuis la cuisine. Aucune réponse, alors je décide de faire un brin de toilette

avant d’aller réveiller ma marmotte de sœur. ú Je suis presque prête ! répond-elle d’une voix endormie.

Le rendez-vous est prévu à dix heures aux Arceaux avec Umi et Ellya et avec un peu de chance nous serons à l’heure. Une brève poignée de mains, une étreinte pour les filles et un ébouriffage de poils pour le cabot et nous montons dans le tram. La voiture de queue est déserte, Umi croque dans son

171

SUPER SAnS PEUR

beignet et la magie opère : nous nous retrouvons non loin de la station où nous étions, sur la promenade du Peyrou, je pense, entourés de mineurs crasseux, de rails et chariots, de marteaux piqueurs et de policiers en faction. Des galeries semblent avoir été construites sous la statue de Louis xIV, que j’ai du mal à repérer d’ailleurs, et des montagnes de minerais ont été extraites du ventre de la ville. Cela me rappelle quelque chose. Mais oui, les gros titres du journal de ce matin ! J’étais tellement intrigué par cette nouvelle que cette information occupait toutes mes pensées…

ú Excusez-moi monsieur, quel jour sommes-nous aujourd’hui ? demandé-je à un passant.

ú nous sommes mardi, mon petit ! me répond-il. ú oui, merci, mais le combien ? ú Euh, eh bien, mardi 12 avril, petit ! ú 2014 ? ajouté-je. ú 2024, plutôt ! Tout va bien les enfants ? nous demande-t-il.

Après quelques secondes d’effarement, nous comprenons que nous avons vraiment voyagé dans le temps, vers le futur ! J’explique rapidement à mes amis les nouvelles lues le matin et nous nous rendons à l’évidence : j’ai transporté les SUPER dans un monde futur, celui du projet d’extraction de pierres précieuses à Montpellier. nous allons pouvoir découvrir le résultat de ces fouilles.

Je décide d’arrêter un autre passant pour lui demander où est passé la population, pourquoi tout est désert et surtout quelle est donc cette montagne noire sur l’esplanade du Peyrou.

ú Vous ne devriez pas être là. Comment se fait-il que vos parents ne vous aient pas expliqué ce qui s’est passé il y a dix ans déjà ? nous demande une vieille dame.

Elle nous raconte comment, alors qu’elle se promenait près de l’Arc de Triomphe, le sol s’était mis à trembler, des fissures apparaissant sur la route. Les immeubles bougeaient, il y avait beaucoup de bruit, au loin, des gens couraient. De la fumée sortait des galeries, il faisait très chaud, le sol vibrait sous les pieds. Elle nous apprend qu’elle assistait alors à un

172


tremblement de terre, c’était incroyable ! À Montpellier ! Elle se souvient des pompiers paniqués, fuyant vers les terres, expli-quant qu’une éruption volcanique était imminente. Un volcan loin d’être naturel. Jamais les géologues n’ont trouvé de traces même infimes d’une activité sismique ici depuis la nuit des temps. Cette éruption était le résultat d’une exploration trop profonde. Cette dame décrit des gens qui décampaient à toute vitesse fuyant les coulées de lave. Ce liquide flamboyant dévalait la rue de la Loge et montait rapidement jusqu’aux premiers étages des immeubles de l’Ecusson. Les mots dans la bouche de cette pauvre femme s’enchaînent, il est question de tremblement de terre, d’éruption volcanique, de vagues géantes à l’horizon… Elle poursuit sa narration en nous expliquant que le tremblement de terre a créé un tsunami au large de Palavas. Cette vague géante est entrée dans les terres refroidissant instantanément la lave recouvrant les rues de Montpellier. Une croûte de plusieurs mètres d’épaisseur de lave séchée a remplacé le pavé de la ville. Des monuments tels que la statue de Louis xIV, l’arc de triomphe, l’aqueduc des Arceaux, le château d’eau du Peyrou ou même la statue des Trois grâces ont été, soit ensevelis, soit fortement mutilés soit même détruits.

À ce moment-là, nous sommes sur les hauteurs de Montpellier et avons une vue privilégiée sur le Pic Saint Loup et Palavas. Ce que nous voyons à cet instant nous glace : une véritable catastrophe naturelle a eu lieu ici il y a une décennie environ ! Montpellier ne semble plus exister, du moins en apparence. Hormis le sommet de l’Arc de Triomphe qui dépasse encore de la croûte, nous n’avons plus aucun repère. Montpellier a été engloutie. Montpellier est devenue une cité souterraine.

notre instinct nous commande d’explorer cette cité. ú Ruby ? où es-tu ? Viens là mon toutou ! gémit Sarie.

J’ai du mal à respirer, ça sent bizarre, et j’ai très peur dans l’obscurité.

ú ne t’inquiète pas, sœurette, la galerie est équipée de lampes, et cette odeur c’est du soufre. Trouve-nous de quoi

173

SUPER SAnS PEUR

nous alimenter et boire pendant qu’Umi et moi allons encore aux nouvelles.

ú À part des vers de terre et des racines de platanes, je ne vois pas trop quoi manger par ici ! me répond Sarie.

ú Super ! plaisante Umi. ú non, pas super ! répond sèchement Ellya. En plus j’ai les

cheveux emmêlés et couverts de boue et je ne mange pas ces trucs-là !

ú Tu exagères Sarie, regarde ces provisions, tout est organisé pour que tu te serves, surenchérit Umi.

ú Phil, viens voir, je crois que nous pourrions utiliser le chien pour sortir. on attache un message à son cou, comme on le fait aux pigeons voyageurs, et nous demandons de l’aide. Qu’en penses-tu ? me demande Umi.

ú Ce chien ne serait pas capable de trouver un trou dans un gruyère ! À part des sucreries, c’est tout ce qu’il peut dénicher ! ne nous séparons pas, lui réponds-je.

nous marchons de longues minutes à travers la galerie souterraine. on ne peut qu’imaginer ce qu’ont dû vivre les Montpelliérains dans les premiers instants de cet évènement. nous rencontrons quelques survivants et chacun nous révèle un détail. Il n’est plus possible de remonter à l’air libre, la lave, durcie par l’eau du littoral, a formé une épaisse croûte sur la ville. Certains parlent de catastrophe due aux fouilles qui ont perforé la terre trop profondément. D’autres disent que l’air et l’eau sont en quantité suffisante car des aérations perforent la croûte. D’autres encore racontent comment il a fallu attendre des semaines entières pour retrouver une vie normale après avoir été privés d’eau potable, d’électricité, de vivres suffisantes sans contact avec l’extérieur…

ú oh non, déclare Ellya, même pas un ordinateur pour communiquer avec l’extérieur !

nous rencontrons des gens organisés qui nous expliquent que nous avons emprunté la galerie la plus difficile de la ville. Elle est restée à l’identique du jour où la Terre a tremblé. Comme un témoignage du passé. D’autres galeries sont

174


comme des rues, éclairées, à hauteur d’homme, comme jadis à l’air libre en fait. Ces gens recueillaient l’eau qui coulait le long des parois, ont réparé les canalisations, les installations électriques, et ont percé des cavités dans la croûte qui recouvre la ville pour que l’air circule et que la lumière du jour pénètre un peu cette vie souterraine. nous nous asseyons alors tous les cinq, les uns contre les autres, et réfléchissons à nous demander comment sortir de ce trou, comment retrouver notre vraie vie, pas celle-ci, pas cette vie souterraine à revivre comme des rats, à quatre pattes dans l’obscurité et la poussière. Et tout cela à cause de l’avidité des hommes qui veulent toujours plus de richesses, qui abîment et meurtrissent la Terre en la forant, la transperçant, la pillant de l’intérieur…

ú Pourquoi ce cabot est-il collé à Umi de la sorte, on dirait qu’il veut entrer dans sa poche ?

ú Umi, qu’as-tu dans ta poche ? demandé-je à mon ami. Umi farfouille dans sa poche, en sort des papiers, un

vieux chewing-gum et… « Ah ça ? C’est un vieux morceau de beignet ! »

ú C’est un signe, il est temps de s’en retourner chez nous ! Tenons-nous par la main, je vais claquer des doigts, avec un peu de chance nous nous téléporterons à l’endroit où nous nous trouvions dans le tram.

À peine ai-je fini de prononcer ma phrase qu’un tourbillon nous emporte. nous nous retrouvons à nos places respectives, comme si le temps s’était arrêté, dans le wagon de queue du tram. Chacun rentre chez soi, sans échanger un mot. nous avons besoin de goûter au confort de nos chambres et au bon repas préparé par nos parents pour réaliser que même si 2024 est dans le futur, pour nous c’est loin derrière nous.

175

SUPER SAnS PEUR

L A F ê T E A U x B o n B o n S

Umi n’est pas de bonne humeur depuis notre aventure dans les bas-fonds de Montpellier. Il ne nous parle pas beaucoup et semble rêver, seul, dans son coin. Comme c’est mon meilleur ami, je lui propose d’aller nous restaurer autour d’une bonne friandise mais même cela il n’en veut pas.

ú non merci, Phil. Tu sais, depuis que le dentiste a dit à ma mère que je devais manger moins de sucreries, c’est la guerre du sucre à la maison. Tu as vu cette annonce à la télévision qui va interdire les ventes de bonbons et les fêtes foraines sous prétexte que la santé des enfants en dépend ?

ú C’est donc pour cela que tu déprimes ? Je comprends mieux maintenant… Allez, viens, un dernier beignet avant la guerre des épinards-courgettes !

nous voilà partis, un beignet dans chaque poche, en direction de la ligne trois du tram, prêts pour une nouvelle aventure. Le « croc », la lumière, les sièges, tout y est.

En une fraction de seconde nous sommes projetés dans un monde incroyablement beau, coloré et odorant. nous n’en croyons pas nos yeux, il y en a de partout ! Des barbes à papa, des donuts roses et violets, des sucres d’orge accrochés à des arbres dont le tronc est en chocolat, les branches en nougatine et les feuilles en pop-corn ! Les fleurs sont en réglisse et quelle odeur… enivrante.

En plus des couleurs et des parfums, des feux d’arti-fices éclairent le ciel, même en plein jour, d’où retombent des bonbons par milliers. Mais ce n’est pas tout, il y a de la musique, entraînante comme dans une fête foraine. Ce monde est complètement irréel, magique, fantastique, un rêve d’enfant en somme !

Un petit garçon s’approche alors de nous et nous propose de choisir un bonbon parmi une pleine valise. Umi refuse poliment expliquant qu’à cause des caries il ne peut plus en manger. Mais le garçon insiste en ajoutant que ces bonbons sont sans sucre et ne provoquent aucune carie. Il nous explique

176


l’origine de tout cela. Pour lutter contre les problèmes dentaires et d’obésité des enfants, Montpellier a recruté des scientifiques, des cuisiniers, des botanistes du monde entier. Ils ont travaillé dans le plus grand secret, signant même un contrat de confi-dentialité. Au bout de plusieurs années de recherches intenses, ils ont mis au point un produit révolutionnaire. Un bonbon, sans sucre, bon comme les autres. Mais ce n’est pas tout. Ce bonbon se plante, pousse, se multiplie. Ce bonbon est bon pour la santé. Il peut être fabriqué uniquement dans les terres montpelliéraines. La Ville a construit une usine, et a commer-cialisé cette friandise révolutionnaire ! Les gens du monde entier peuvent l’acheter, mais ne peuvent pas le cultiver, eux… Montpellier est devenue une ville très riche. Pour couronner le tout, la ville est devenue une fête foraine géante car les habitants, d’après un sondage de 2014, ne se considéraient pas très heureux dans leur vie. Riche de son commerce de bonbons, la Ville s’est mise en tête de faire de la vie des Montpelliérains une fête au quotidien.

Après cette belle explication, je plonge ma main dans la valise du jeune garçon et me sers le premier, suivi de près par Umi rassuré et moins coupable de croquer dans un bonbon.

ú Je regrette que les filles ne soient pas là ! C’est quand même plus drôle que la dernière fois ! dit Umi.

ú oui, je ne sais pas si elles vont nous croire ! Essayons un manège ou deux, de toute façon elles n’aiment pas quand il y a des sensations fortes !

Le tram fantôme nous arrête à la station Corum où un squelette nous ouvre la cabine. Puis ce sont les montagnes russes et leurs bosses renversantes. Les tickets sont des gaufres nature qu’il faut oblitérer dans une sorte de grille-pain qui chauffe. Les contrôleurs vérifient la validité des

177


billets en croquant ces derniers. Ils doivent être recrutés pour leur appétit et leur gourmandise. Dans ces manèges il y avait toute sorte de gens, des enfants mais aussi des mères avec leurs petits et des hommes et femmes habillés comme nos parents lorsqu’ils vont travailler. C’est étrange, comme si le tram fantôme, le grand huit et des autos tamponneuses emmenaient les gens au travail et les enfants à l’école. Je décide de mener une petite enquête.

ú Excusez-moi monsieur, pouvez-vous nous dire si vous êtes là pour vous amuser ou si vous voyagez ? demandé-je à un homme, de taille moyenne, vêtu d’une veste sombre et d’un chapeau.

178


ú Est-ce que j’ai l’air de m’amuser ? réplique-t-il sèchement. ú non monsieur. Mais pourquoi ? continué-je. ú Tu as l’air un peu perdu petit. Tu es nouveau à

Montpellier ? Tu ne sais donc pas que les fontaines en chocolat, la pluie de Smarties et la pêche aux pommes d’amour sont notre quotidien ? C’est épuisant, écœurant et j’en suis blasé.

ú Bien sûr… bien sûr. Comment tout cela est-il arrivé ? ajouté-je.

ú À la suite de l’interdiction de bonbons et sucreries, les enfants sont devenus voleurs, menteurs et faisaient les poubelles à la recherche de la moindre sucrerie. Le maire de la ville s’est tourné vers la science pour trouver une solution à ce nouveau fléau. Depuis ce jour, une ville bonbon a remplacé notre belle agglomération : des arbres-bonbons poussent dans les jardins, le nougat a recouvert les routes et les Trois grâces, et la crème glacée est en libre-service dans tous les parcmètres.

nous remercions le passant et continuons notre chemin. nous, nous ne sommes ni blasés ni ennuyés par toutes ces merveilles et picorons Dragibus et autres Tagadas tombés à nos pieds. Au bout de quelques heures d’ivresse, nous nous asseyons sur un banc de chocolat blanc et observons ce spectacle féerique. Tous nos sens sont en émoi et pourtant nous commençons à être las et observons autour de nous.

Le stand de crêpes au chocolat est désert, celui des gaufres à l’abricot aussi, les jeux de chevaux et de billard sont fermés… l’engouement des premiers mois de fête semble passé. J’interroge mon ami :

ú Sens-tu le doux parfum du caramel ? ú non, je ne le sens plus. Et toi, as-tu remarqué que la

place de l’œuf se nomme la place de la Poule en Chocolat ? répond Umi.

ú non, je ne l’avais pas remarqué. Et le serveur en costume de gaufre, l’as-tu vu ? nous sommes-nous habitués à toute cette magie au point que tout semble normal et moins épous-touflant qu’au début ?

ú Peut-être, en tout cas, c’est triste une fête foraine vide,

179

SUPER SAnS PEUR

des marchands qui ne travaillent pas et des gens blasés ! ajoute Umi avant de se lever et de reprendre la balade.

En passant devant le Corum, je remarque que c’est un palais du rire et que les statues qui ornent la place sont en Chamallow. gardaland en Italie n’est rien à côté de cela. Pourtant, le tram fantôme ne fait plus peur aux Montpel-liérains, les tickets-gaufres des contrôleurs ne font plus rire, le grand huit n’offre plus assez de sensations. La tentation de croquer dans la guimauve nous a déjà quittés, nous poursuivons jusqu’à l’arrêt du tram en bas des marches et d’un regard de connivence décidons qu’il est grand temps de rentrer dans notre vraie vie, retrouver nos sœurs respectives et notre repas épinards-courgettes. En un claquement de doigts, nous sautons dans la dernière rame et nous retrouvons où nous étions quelques heures auparavant. Tranquillement, le sourire aux lèvres, nous rejoignons notre domicile, pressés de raconter la douceur du caramel et le collant des pommes d’amour. Umi avoue à sa mère qu’il a mangé quelques bonbons. Celle-ci, le prenant dans ses bras, laisse échapper un petit rire moqueur en lui disant qu’aujourd’hui c’est le 1er avril et que ce jour, même les journalistes font des blagues…

180


L E B A o B A B R o S E / V I o L E T

En me levant ce matin, je remarque le magnifique soleil qui inonde ma chambre. Quelle belle journée ! J’ai rendez-vous avec mes amis cet après-midi, ça tombe bien ! on se retrouve tous les quatre au skate park de grammont et chacun prend du plaisir en marchant, sautant, roulant ou grimpant. Sarie est absorbée par un grand panneau publicitaire invitant les Montpelliérains à être citoyens.

ú Montpellier / zéro pollution, Montpellier se met au Vert ! C’est une bonne idée mais est-ce que tout le monde va se mettre au vert, ça c’est une autre histoire ! commente Sarie.

ú Tu sais, avec ma mère, nous faisons les courses en vélo et recycler est devenu une habitude, lui répond Ellya.

ú Mais regarde, Ellya, la nature souffre, les déchets sont partout, les arbres étouffent sous le goudron et les voitures polluent tellement… si on pouvait communiquer avec la nature, elle nous gronderait assurément… continue Sarie.

ú Sois contente, toutes les villes ne sont pas aussi investies que la nôtre dans l’écologie. Les choses vont changer ! Déjà, ici plus qu’ailleurs, les espaces verts grandissent, insiste Ellya.

En rentrant, en fin d’après-midi, ma sœur me demande de l’emmener dans une aventure, la dernière lui ayant été contée… Après un petit détour à la boulangerie du coin, un « croc » et hop ! nous voilà envoyés dans un monde vert et odorant, orné d’orchidées géantes, de pétunias et de muguet. Un univers qui ressemble à tout ce qu’aime ma petite sœur. Quelle senteur agréable ! Les épicéas, bouleaux et sapins s’alignent le long des routes mais les voitures semblent absentes.

En levant les yeux pour apercevoir leur cime, nous assistons à un spectacle incroyable, un balai de voitures volantes et silencieuses. En fait, les routes sont réservées aux piétons et vélos qui arborent les couleurs du tram à fleurs. La ville est calme, parfumée et colorée. nous déambulons jusqu’à la gare, complètement recouverte de lianes et plantes rampantes. Mais plus curieux, la lumière du soleil peine à atteindre le sol,

181

SUPER SAnS PEUR

nous sommes dans une luminosité tamisée, les plantes luttant et montant jusqu’au ciel. Sur un panneau publicitaire, on peut lire la biographie d’un scientifique qui semble important et on peut même admirer son portrait. C’est un homme barbu, maigre, à la peau mate, vêtu d’une chemise à carreaux et d’une blouse blanche. Il travaille à la serre amazonienne de Montpellier et a inventé un produit à base d’engrais, de diffé-rentes sèves d’arbres et d’un curieux colorant rose.

ú Mais à quoi cela a-t-il bien pu servir ? me demande Sarie.

ú Lisons la suite… Il est question d’un baobab géant planté sur la Place de la Comédie.

ú Viens Sarie, allons voir cet arbre curieux et essayons de comprendre ce qui se passe dans notre ville. J’ai une drôle de sensation…

nous contemplons cet arbre majestueux en lieu et place de la fameuse statue des Trois grâces quand nous remarquons qu’autour, d’autres plantes sont excessivement grandes et ont une teinte violette. Des étudiants nous expliquent plusieurs choses. Le baobab ne pouvant pas survivre en climat méditer-ranéen, il lui fallait un complément nutritif pour qu’il se sente bien à Montpellier. Ce baobab est rapidement devenu le symbole du Montpellier nature ! Ce complément a été créé par le fameux scientifique à base de substances naturelles. Le produit s’est diffusé partout sous terre par les racines du baobab et il a infecté tous les végétaux de la ville qui semblent désormais devenir vivants et surtout intelligents avec une rapidité de croissance hallucinante. Les plantes sont affamées et le compost réalisé par les habitants avec les brisures d’œufs et les pelures de pomme de terre ne suffit plus. Les végétaux n’ont plus rien d’autre sous la main hormis des sacs plastiques et des pots de yaourts. Des habitants ont même donné du fer, de l’aluminium. Les plantes se nourrissent des déchets des hommes. Un rêve pour ne plus polluer ! Les plantes ont tellement grandi qu’elles ont commencé à recouvrir la ville. Elles ont tout le temps faim et se servent seules, chapardant les

182


bouteilles d’eau de la main des passants. Les mauvaises herbes font une cage autour des enfants pour leur prendre leur goûter, les marguerites utilisent leurs pétales comme projectiles pour aveugler les gens et les détrousser ! La nature se rebelle. En effet, ce paradis vert est désormais oppressant, même Sarie semble nerveuse.

ú Que se passe-t-il ici ? me demande-t-elle. ú Si j’ai tout compris, Montpellier a perdu le contrôle

des espaces verts et la population n’est plus aussi heureuse de vivre dans un paradis luxuriant car les végétaux sont devenus agressifs, voleurs et carnivores.

ú oui, je suis bien d’accord avec toi, mais il n’y a rien de grave, il suffit de remettre les plantes à leur place car pour le reste c’est formidable de ne plus avoir de pollution sonore et toxique ! réplique ma sœur.

ú Mais pourquoi ces affreuses plantes se mangent-elles entre elles ? demande Sarie à un passant.

ú Eh bien, mademoiselle, certaines plantes sont violacées mais pas toutes. Elles sont infectées et sont dominatrices. Elles mangent tout ce qu’elles trouvent, même leurs congénères ! À force de courir sur les toits et les fils électriques elles ont formé une cloche au-dessus de la ville nous dérobant lumière et air pur. C’est devenu irrespirable et insup-portable. Même les ondes ne passent plus et il est difficile de capter la radio et d’avoir une ligne téléphonique correcte. Certains ont essayé d’arracher des branches, de les ligoter, mais rien n’y fait. Elles en ressortent encore plus vigoureuses et agressives.

ú Et les fleuristes et botanistes, n’auraient-ils pas des substances pour se débarrasser de ces plantes ? insiste Sarie.


ú Il n’y a plus de fleuristes à Montpellier, ce métier est interdit en ville. Le plus urgent c’est de conserver nos réserves en eau car les racines pompent l’eau des mille kilomètres de canali-sations montpelliéraines. Depuis peu, la piscine olympique a fermé pour cause de bassins vides et le Lez et la Mosson sont asséchés. nous vivons une catastrophe les enfants !

En effet, Montpellier est prise au piège de sa jungle. Chacun essaye de mettre fin à ce cauchemar : des gens décapitent la tête des fleurs, tronçonnent les troncs, coupent les hautes herbes avec des machettes essayant de « tuer » ces monstrueuses plantes écrasantes et étouffantes. C’est une guerre qui oppose le règne humain contre le règne végétal…

184


En remontant le boulevard Henri IV, aux abords de la faculté de médecine, nous croisons deux jeunes hommes distribuant des tracts. Il s’agit des travaux du chimiste qui a inventé le produit à l’origine de la croissance du baobab. Le prospectus dit que le chercheur est sur le point de trouver l’antidote à ce produit et que bientôt nous serons débarrassés de cette masse verte qui s’agite au-dessus de nos têtes ! Il dit aussi de ne pas combattre les plantes, qu’elles repoussent encore plus fortes et grosses et du coup puisent le peu d’eau qu’il reste à la ville…

nous redescendons le boulevard du Jeu de Paume et bifur-quons pour retourner vers la Place de la Comédie quand nous apercevons un grand homme vêtu de blanc transportant un énorme sac.

ú Regarde Phil, on dirait ce chercheur fou à l’origine de cette pagaille !

ú Suivons-le, il semble tellement concentré qu’il ne remar-quera pas notre présence, réponds-je à ma sœur.

nous marchons lentement rue des étuves, passons derrière le théâtre et arrivons face au baobab violacé encore plus énorme qu’il ne l’était ce matin. notre chercheur est en pleine conver-sation avec son assistante, une femme en blouse blanche, gants et masque de protection. Il lui parle d’une chenille géante venue tout droit de Madagascar, conçue pour absorber le colorant et donc enlever aux plantes leur appétit et force. En quelques secondes la larve de deux mètres de long broie le cœur du baobab et aspire sa sève teintée. Les plantes retrouvent progres-sivement leur couleur naturelle et perdent leur pouvoir dévas-tateur. La chenille, elle, capte les couleurs, devient tantôt rose, tantôt violette, puis verte, jaune et bleue. C’est magnifique à voir… Je regarde ma sœur du coin de l’œil, elle n’en perd pas une miette. Au fur et à mesure que la chenille se transforme, les rayons du soleil nous parviennent, la végétation devient moins dense. La chenille grossit aussi vite que les plantes rapetissent, et les clameurs des Montpelliérains se font entendre. Il est temps pour nous de rentrer chez nous, j’attrape la manche de

185

SUPER SAnS PEUR

Sarie qui ne peut décrocher ses yeux de ce spectacle incroyable. ú Attends, Phil, que cette cheville devienne le papillon

multicolore le plus incroyable que personne n’ait jamais vu ! ú on ne peut pas, Sarie, le temps passe et quelques

minutes ne suffiront pas à cette métamorphose… et puis, es-tu sûre que cette chose à venir sera bien un papillon inoffensif ? Pourquoi pas un scarabée ou même un alien… lui réponds-je avec beaucoup d’inquiétude mais de douceur tout de même.

Et pourtant, le temps n’est plus le même : alors qu’il aurait fallu des jours à cette chenille pour devenir papillon, voilà qu’en quelques minutes, un papillon multicolore, comme un mélange de toutes les couleurs et de tous les motifs qui décorent les rames du tramway, prend son envol et disparaît dans la forte luminosité du soleil enfin revenue sur cette ville verte, gazonnée, à nouveau sereine…

ú nous nous postons en fin de rame, le temps de claquer des doigts et nous voilà au point de départ, essoufflés et contents de retrouver notre square tel que nous l’avons laissé.

ú Comme quoi, frangin, il faut respecter l’environnement, polluer le moins possible mais ne pas tomber dans les excès !

ú C’est certain, la science peut être mal utilisée !

186


P L A C E A U x E n F A n T S

nous nous sommes donné rendez-vous « Place des grands hommes » au cœur du centre commercial odysseum. nous avons profité du fait que nos parents allaient dans ce lieu pour faire quelques achats et courses. Peut-être que de se retrouver entourés de toutes ces personnalités du monde, qui ont changé la vie des gens, nous donnera l’inspiration et nous permettra de faire un point sur ces trois fantastiques aventures. nous aurions pu aussi choisir de nous rassembler autour de la fontaine du Jardin des Plantes où le calme, la zénitude et la quiétude règnent.

nous nous disposons en cercle autour de l’étoile jaune sur fond bleu qui est gravée au sol en plein centre de la place. Heureusement, la température est idéale pour prendre l’air et un bain de soleil, en plein été, on n’aurait pas résisté longtemps à lézarder ainsi.

ú Quelle morale devons-nous tirer de ces voyages inoubliables et farfelus ? demandé-je à mes compagnons de route et amis.

ú nous n’avons pas visité de Montpellier parfait ! répond Umy. Chaque univers, chaque monde partait d’une bonne idée avec de très bonnes intentions.

Chercher et trouver des pierres précieuses pour rendre Montpellier plus riche qu’avant et permettre des avancées scientifiques et médicales semblait sans danger et pourtant…

Pouvoir manger des confiseries non sucrées pour rester en bonne santé et permettre à toute la population de s’amuser à chaque moment de la journée paraissait idéal, et pourtant…

Vouloir privilégier la nature, oublier la moindre pollution était un pari pour le bien-être des Montpelliérains et pourtant…

La vérité se trouve sûrement en mélangeant tout cela.

nous, les SUPER, on pourrait devenir les P/E/U/R/S si on se décourageait de l’avenir. Mais nous sommes jeunes,

nous sommes amis et nous avons envie d’un futur qui soit le meilleur possible. on fera sûrement des erreurs comme nos aînés, à nous d’en tenir compte, de ne pas les refaire pour au contraire réaliser une ville qui ressemble à celle-ci :

Mon : ma ville, celle où je grandis, apprends et à qui je donne…

PEU : limiter les erreurs, limiter les injustices, si chacun fait un peu ça change beaucoup…

LIER : unir, rassembler les gens quels que soient les horizons, les générations, les idées, les envies, les projets et les ambitions…

Rendez-vous en 2040… à Montpellier

Achevé d’imprimer en mai 2014Dépôt légal : mai 2014

ISBn978-2-86626-488-8

Imprimeur JouveCanopé de l’académie de Montpellier

Directrice : ève AvigoCoordination : Jean-Serge Vigouroux

LES

MYS

TÈRE

S DE

MON

TPEL

LIER

Montpellier 2040, Thalia la jeune couturière high-tech trouvera-t-elle l’amour dans la Forêt de la Comédie ? Partis en 2080 sur les traces du presque célèbre archéologue le professeur Artone, Nova et Leys perceront-ils le secret de la cité engloutie construite en coquiton et bétalgué ? En 2044, vols en série d’animaux parlants : le mystérieux Monsieur

Wang, chef de fi le du PAN est-il dans le coup ? 2065, Noé et sa sœur Lali font une étrange découverte dans la cave de leur

immeuble : des cocons reliés à une drôle de machine… 10 000 ans plus tard, dans leur astronef pour visiter la ville de leurs ancêtres, toute une famille se demande quelle est la véritable histoire de l’œuf de Montpellier… Année 2750, en promenade avec la plus belle fi lle du monde à bord de sa navette aquatique Z360, Luc n’aurait jamais dû aller sur le lac interdit… Enfi n, les S/U/P/E/R, intrépide groupe de jeunes montpelliérains, ont-ils vraiment découvert le voyage dans le temps ?

Salade de grillons, sandwiches 3D, aéroskates, télescripteurs de mémoire, clones, solphones, lianes-ascenseurs, baobabs violets et même un étrange beignet spatio-temporel… Tout ça et bien plus encore dans ce nouveau tome d’anticipation ! Attention, Montpellier dans le futur, ça téléporte....

TOME

5

La mère posa sa tablette sur la table basse et prit sa tasse de jus d’insectes.Un temps pour elle

Mains et pieds sont palmés ! Plus de doutes, ce ne sont pas des humains.Sous la main d’Aglaé

C’est un chien avec un collier vocal, comme moi, je présume ?Oscar

Ho les Noé, on ne va pas attendre le déluge dans cette pièce !Quitte ou double

Soyez patients les enfants. Encore quelques galaxies et on y sera.Qui survole un œuf

J’ai la frousse. Je préfère réviser mon contrôle de modélisation holographique.Les Profondeurs

Regarde Phil, on dirait ce chercheur fou à l’origine de cette pagaille !Super sans peur

Sept écoles de la Ville de Montpellierprésentent

T O M E 5

02-MdM2014-CouvNOIRE-6mai-B.indd 1 07/05/14 10:33

Documents

Sept écoles de la Ville de Montpellier Montpellier 2040, Thalia la … · 2018. 10. 11. · l’historique et les méthodes d’écriture des Mystères de Montpellier à la fin de