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22 septembre 2011 | 35 Supplément à Solidaire, 5 septembre 20 Spécial Solidaire 40 ans de Médecine pour le Peuple

Spécial Solidaire 40 ans de Médecine pour le Peuple

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Supplément réalisé par l'hebdomadaire Solidaire. www.solidaire.org.

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Supplément à Solidaire, �5 septembre 20��

Spécial Solidaire40 ans

de Médecine pour le Peuple

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À votre santé et à la nôtre

Cette année, Médecine pour le Peuple (MPLP) fête son quaran-tième anniversaire. Cela peut et doit s’arroser. Nous vous invitons tous à venir le fêter à ManiFiesta, la grande fête de la Solidarité,

le 24 septembre à Bredene. Venez boire un verre à votre santé et à la nôtre !

Et tant qu’à boire un verre, souhaitons aussi bonne continuation à Médecine pour le Peuple. Nous trouvons toujours de jeunes médecins et collaborateurs qui veulent s’engager dans notre projet de médecine gratuite et de qualité. Et nous bénéficions de reconnaissance et de respect dans des cercles de plus en plus étendus.

Mais nous avons aussi des adversaires. Comme l’Ordre des médecins du Hainaut qui a récemment menacé le docteur Sofie Merckx de saisie mobilière, tout comme son père Kris Merckx, fondateur de MPLP, il y a quarante ans. Après une action de ses patients, l’Ordre a bien reculé, mais pas encore en ce qui concerne le fond de l’affaire : ce club obscur et antidémocratique exige que nos médecins paient leurs cotisations. Et chez Big Pharma non plus, ils ne nous apprécient pas particulière-ment, depuis qu’avec notre cam-pagne kiwi, nous les avons forcés à baisser le prix de bon nombre de leurs médicaments.

Dans les nombreuses actions contre ces puissants adversaires, nous nous sommes également fait nombre de bons amis. En compagnie de ces amis, de nos patients et de nos sympathisants, nous continuons donc à aller de l’avant. Parce qu’aujourd’hui, une médecine gratuite et digne de ce nom est plus que jamais nécessaire. C’est ce qui ressort, par exemple, des toutes récentes enquêtes sur la santé : en 2008, 14 % des personnes interrogées disaient avoir reporté des soins de santé en raison de problèmes financiers. Il y a dix ans, elles n’étaient encore « que » 8 %. Presque un doublement des chiffres déjà en 2008, avant la crise financière. Nous estimons que c’est un scandale dans un pays riche comme le nôtre.

MPLP a également une étude en cours. À Deurne et à La Louvière, les patients entre 18 et 50 ans ont rempli un questionnaire de 100 ques-tions sur l’influence de la crise sur leur santé. Le résultat est préoccupant : 18 % des patients connaissent quelqu’un qui a envisagé de se donner

la mort dans la famille ou l’en-tourage, en cas de menace de licenciement au cours de l’année. Parmi les patients eux-mêmes licenciés, cela augmente à 30 %.

Les 11 maisons médicales de MPLP ont collaboré pour une autre étude sur l’allongement des carrières. Nous avons cherché

dans les dossiers médicaux de nos patients de 55 à 65 ans ceux qui souffraient d’une maladie chronique qui leur posait problème à leur travail. Et c’était le cas pour au moins deux sur trois d’entre eux ! Ce genre de chiffres est le reflet d’une très grande souffrance, et cache parfois même des tragédies autrement plus importantes que BHV.

Il y a donc toujours assez de raisons pour soutenir pleinement MPLP dans sa lutte contre les mesures qui répercutent la crise sur les petites gens. « Le droit à la santé et à une société en bonne santé » restera notre slogan dans les quarante années à venir. Outre bien d’autres, ce n’est qu’une des bonnes raisons pour venir à ManiFiesta. Et fêter avec nous notre quarantième anniversaire, bien sûr ! À votre santé !

En compagnie de nos amis, patients et sympathisants, nous continuons à aller de l’avant. Car aujourd’hui, une médecine gratuite est plus que jamais nécessaire.

Dirk Van Duppen, président

Riet Verspreet, organisation et gestion

Kris Merckx, fondateur

Parmi nos adversaires, il y a l’Ordre des médecins du Hainaut qui a récemment menacé le docteur Sofie Merckx de saisie mobilière, tout comme son père Kris Merckx, fondateur de MPLP, il y a quarante ans.

Des personnalités saluent

Médecine pour le Peuple

« Kris Merckx a été visionnaire »« Kris Merckx s’est révélé un visionnaire dans trois aspects. Il a été très clairement convaincu que les déterminants sociaux (conditions de logement, de vie, de travail) étaient essentiels dans la compréhension de la maladie et de la santé. Secundo, Kris Merckx a choisi sciemment de travailler dans le cadre des soins de santé de première ligne, lesquels doivent être accessibles, de qualité et efficaces sur le plan des coûts. Tertio, ce livre témoigne également de l’importance qu’il y a d’impliquer activement les patients et la population dans tous les processus relatifs aux soins de santé. »

Jan De Maeseneer, professeur en médecine générale à l’Université de Gand, président de l’European Forum for Primary Care.

« Un combat nécessaire »« J’ai lu avec émotion, un vif plaisir et beaucoup d’admiration ce très beau livre d’un médecin exceptionnel. Avec émotion, parce qu’à sa lecture, il m’est apparu – plus clairement encore qu’auparavant – combien le combat des équipes de Médecine pour le Peuple était et est toujours nécessaire, combien il a été et est toujours difficile, et combien nous lui sommes tous redevables. Avec plaisir, car l’auteur a un talent de conteur peu commun qui fait que même les chapitres traitant de difficiles sujets de santé publique se lisent d’une traite, comme un passage du meilleur romancier. Avec admiration, pour la fidélité aux engagements et la persévérance dans des combats aux enjeux fondamentaux. »

Jean-Jacques Amy, professeur émérite de gynécologie à la Vrije Universiteit Brussel.

« Notre engagement commun reste d’actualité »« Le livre de Kris montre bien les racines de notre engagement commun qui reste plus que jamais d’actualité. La crise économique n’a fait que s’amplifier, les inégalités sociales se sont aggravées partout dans le monde et la médecine à deux vitesses est en train de se développer sous nos yeux. Le mouvement des maisons médicales a acquis de l’ampleur et de la maturité mais nous n’avons pas à renier nos idéaux de départ. Nous voulions être “rouges et experts”, nous avons toujours à défendre une médecine de première ligne forte et de qualité, une sécurité sociale basée sur la solidarité de tous, une accessibilité maximale aux soins… »

Corinne Boüüaert, médecin à la maison médicale Bautista Van Schowen (Seraing), chargée de cours en médecine générale à l’Université de Liège.

« De petites oasis de socialisme réalisé : ça marche! »« Dans les années 1970, face à la toute-puissance du capitalisme et de la médecine “com-mercialisée”, une poignée de jeunes médecins communistes ont décidé, à contre-courant, de créer à travers leurs cabinets collectifs de petites oasis de socialisme réalisé. Et le miracle, c’est que ça marche depuis plus de 35 ans. »

Anne Morelli, professeure à l’Université Libre de Bruxelles.

Marcinelle. Des patients et sympathisants, y compris son père Kris, sont venus soutenir le docteur Sofie Merckx alors que l'Ordre des médecins voulait saisir son mobilier.

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MéDeciNe PoUr le PeUPle fête soN qUaraNtièMe aNNiversaire

«camarade docteur»

Quarante ans de Médecine pour le peuple, ça ne se résume pas facilement en quelques lignes. C’est autant d’années d’expé-rience, de combats aux portes des chantiers navals comme contre l’Ordre des médecins, d’alternative de société comme avec le modèle kiwi. Aperçu.

Il y a quarante ans – à l’époque où le docteur décidait encore tout seul de ce qui était bon ou pas pour nous –, Kris Merckx et Michel Leyers se sont lancés dans une tout autre pratique de la médecine. À deux, à Hoboken, dans une commune ouvrière de la banlieue anversoise. Aujourd’hui, Médecine pour le Peuple (MPLP) constitue un réseau de 11 maisons médicales réparties sur toute la Belgique. MPLP emploie une centaine de travailleurs médicaux – outre une bonne cinquantaine de médecins, des infirmiers, des diététiciens, des kinésithérapeutes et quelque 60 collaborateurs administratifs – ainsi que des centaines de bénévoles. Aujourd’hui, MPLP soigne plus de 25 000 patients. Tous reçoivent gratuitement leurs soins médicaux.

Docteurs et patients sur la brèche les uns pour les autres

« Servir le peuple. » Tel fut en 1971 la devise de départ. Cela signifiait aussi s’engager concrètement pour les besoins quotidiens des gens. Et on a donc souvent vu aussi, au cours des premières années, le duo Merckx & Leyers aux portes du chantier naval de Cockerill Yards à Hoboken. Deux ou trois ans plus tard à peine, ce fut le contraire : les patients venaient à la maison médicale pour défendre leurs docteurs contre les attaques de l’Ordre des médecins qui taxait leur médecine gratuite de « pratiques de racolage » et de « comportement déloyal ». Dans les quarante ans qui allaient suivre, l’Ordre allait encore maintes fois mordre la poussière. S’il faut en croire l’Ordre, celui-ci, aujourd’hui, n’en a plus qu’après « ses » cotisations, mais on sait que ce n’est pas vrai. Il est plus facile de marier l’eau et le feu que la vision de l’Ordre et celle de MPLP : chez les premiers, tout tourne autour des médecins – surtout les spécialistes – et leur pognon ; chez les seconds, la motivation est fille du principe « les gens d’abord, pas le profit ». Autre chose que l’Ordre ne peut digérer : un médecin du peuple ne cesse pas son travail une fois ressorti de la maison médicale. Le « camarade docteur » travaille avec ses patients aux causes de la mauvaise santé. C’est pourquoi MPLP a mené des actions contre la fermeture d’un bassin de natation (Herstal), a forcé les communes à rendre leurs logements sociaux plus habitables (La Louvière et Marcinelle), a fait en sorte que les sans-papiers aient droit au remboursement des médicaments de première nécessité (Molenbeek et Schaerbeek), que le quartier délaissé de Sledderlo soit assaini (Genk), s’en est pris aux dégâts des eaux dans le quartier de Moretusburg (Hoboken), a fait disparaître des parkings payants (Zelzate), a contribué à prouver que la pollution au cadmium par l’Union Minière provoquait plus de cancers (Lommel)… Et a aidé les Anversois à enterrer le viaduc d’Anvers. Médecine pour le Peuple a fréquemment mené des actions avec le PTB. En outre, plusieurs médecins du peuple sont aussi conseillers communaux. Chez certaines personnes, ce lien avec le PTB suscite parfois des questions, alors que Médecine pour le Peuple pense que, au contraire, il s’agit d’un solide atout. « Cela a renforcé notre force de frappe, et nous avons pu réaliser des choses qui, sans cela, auraient été impossibles. Citons, par exemple, les résultats de note lutte contre l’Ordre des médecins, ou en faveur du modèle kiwi pour faire baisser le prix des médicaments », précise le Dr Dirk Van Duppen.

les fruits du kiwiAvant sa campagne kiwi, MPLP a également défié la toute-puissante industrie pharmaceutique. Elle a mené ce combat pour des médicaments au prix abordable en compagnie des syndicats, des mutualités… et les résultats ont été probants. Aujourd’hui, un million de patients souffrant de maladies cardiovasculaires ne paient plus leur aspirine qu’au quart du prix initial. Les malades chroniques ne doivent plus débourser pour leur paracétamol qu’un cinquième du prix d’origine. Tout cela, grâce au modèle kiwi. Les jeunes filles ne doivent plus sortir un seul centime pour le très coûteux vaccin contre le cancer de l’utérus : aujourd’hui, on le leur administre gratuitement dans les écoles. Le fondateur de MPLP, le Dr Kris Merckx, vient de prendre sa re-traite. Il pouvait s’en aller rassuré, a-t-il dit : « Ces dix dernières années, un nouveau contingent très prometteur s’est présenté et, ces quatre dernières années, l’afflux s’est encore accru. » À MPLP, tout le monde est paré pour les défis des quarante années à venir.

Gaston Van Dyck

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« Une illustration de ce que l’attachement sans failles à un idéal de progrès peut produire de positif »« En ces temps, où beaucoup d’intellectuels changent d’opinion comme de chemise, (…) il est réconfortant de se rendre compte qu’un homme, un médecin, poursuivi par l’Ordre parce qu’il professait, quand je l’ai connu, il y a plus de 30 ans, de “travailler pour le peuple” et non pour s’enrichir, que cet homme, Kris Merckx, n’a toujours pas changé en 2008 et se dévoue toujours pour soigner les plus démunis. Cet homme, que le tribunal voulait alors faire passer pour fou, est la plus belle illustration de ce que l’attachement sans failles à un idéal de progrès peut produire de positif. »

Josy Dubié, sénateur Ecolo et ancien journaliste de la RTBF

« soutien au docteur sofie Merckx »« Sofie, je viens de lire ton interview dans De Morgen. Etant moi aussi fils d’un médecin-rebelle et patient d’une Maison Médicale, je t’assure de toute ma sympathie. Courage ! » (sms du 24 août 2011, lors de l’action contre la saisie des meubles chez Sofie Merckx à Marcinelle à la demande de l’Ordre des médecins).

Paul Magnette, Ministre du Climat et de l’Énergie

« les pionniers des maisons médicales »« En 1971, les docteurs de MPLP furent des pionniers en démontrant le lien entre santé et pauvreté, environnement et conditions de travail. Ils ont lutté durant des décennies pour développer ce concept et le faire ac-cepter. »

Dr Guy Peeters, président des Mutualités socialistes

« le patient d’abord, et non l’argent »« C’est le patient qui est au centre de la pratique de MPLP. En travaillant en équipe, en suivant soigneusement le dossier du patient et en accordant à celui-ci tout le temps nécessaire durant la consultation et en œuvrant à la pré-vention et à l’éducation à la santé. (…) Un grand bravo pour cet engagement dans la qualité et l’accessibilité des soins de santé envers les gens, et non l’argent. »

Marc Justaert, président national des Mutualités chrétiennes

« sans eux, la société serait plus injuste »« Nos délégués sont le centre du syndicat. Plusieurs d’entre eux sont des patients ou des militants de MPLP. Même si mon opinion diffère parfois des leurs au plan idéologique et stratégique, il faut reconnaître que, sans eux, la société serait bien plus dure et injuste. »

Rudi De Leeuw, président de la FGTB

« Une étape fondamentale dans les soins de santé »« MPLP a marqué une étape fondamentale dans le domaine des soins de santé de notre pays. La pauvreté rend malade et la maladie rend pauvre, encore maintenant et plus que jamais. C’est la raison pour laquelle nous ne devons jamais abandonner. Félicitations. »

Magda De Meyer, questeur honoraire à la Chambre (sp.a)

« le choix de la solidarité »« Le fait de travailler en tant que médecin au strict montant remboursé par la mutuelle et, donc, sans faire payer le ticket modérateur au patient, correspond complètement à une vision solidaire avec les moins favorisés de note société et n’a rien à voir avec le profit personnel ou le racolage de patients. »

Herman Mielants, ancien haut professeur de rhumatologie à l’Université de Gand

« Un succès scientifique et politique »« Dans le domaine du lien entre santé et envi-ronnement, MPLP a joué un rôle très actif et très important, en faisant connaître puis reculer la pollution au plomb a Hoboken. Le combat pour le modèle kiwi afin de rationaliser et de faire baisser le prix des médicaments est une autre histoire à succès. (…) Après 40 ans, cette expérience scientifique et politique peut être considérée comme un succès. »

Ben Nemery, médecin et professeur à la KUL

• La plupart de ces commentaires sont des réactions à propos de la sortie du livre de Kris Merckx, Médecin du peuple (Aden, 2009). D’autres citations sont disponibles (en néerlandais) sur le site www.krismerckx.be, dans la section « Quotes prominenten »• Les déclarations de Guy Peeters (Mutualités socialistes) et Marc Justaert (Mutualités chré-tiennes) datent de la réouverture officielle de la maison médicale de Hoboken après sa rénovation en 2009.• Certaines citations à propos du modèle kiwi sont des réactions à la publication du livre de Dirk Van Duppen, La guerre des médicaments (Aden, 2005).

Médecins, infirmiers, diététiciens, kinés, collabora-teurs administra-tifs... La famille Médecine pour le peuple grandit.

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Six voix pour Médecine pour le peuple

A l’occasion des 40 ans de Médecine pour le Peuple, nous avons recueilli six témoignages de person-nalités du monde de la santé, de patients, médecins, collaborateurs de Médecine pour le Peuple, ou « MPLP » pour les intimes.

Quentin Van Baelen, Jonathan lefèVre, thomas Blommaert et nick DoBBelaere<

« Un moyen de se désintoxiquer de la médecine commerciale »

Erik Lauriks, 56 ans, père de deux enfants, travaille comme laborantin dans un hôpital à Anvers où il est aussi délégué syndical. Il s’intéresse à la musique populaire et suit des cours de reliure artisanale. Tous les mardis soirs, depuis

quatre ou cinq ans, il assure l’accueil de la maison médicale. « J’ai toujours eu le cœur bien à gauche. J’ai fait mon apprentissage politique à l’école d’Anvers et j’ai ensuite rejoint le magasin du monde Oxfam à Wilrijk. J’ai connu Médecine pour le Peuple à l’époque des actions pour un meilleur accès à la médecine. J’ai toujours trouvé cette initiative extraordinaire. Mais je ne suis devenu bénévole à la maison médicale de Hoboken qu’après le départ de mes enfants, c’est-à-dire une fois que j’ai eu plus de temps libre. Accueillir les gens, noter les rendez-vous, j’aime beaucoup faire ça. L’ambiance est très chaleureuse et les médecins ne sont nullement prétentieux, au contraire. » « La journée, je travaille pour une clinique réputée et je constate que l’évolution des soins de santé est plutôt inquiétante. Prenez le financement des hôpitaux. Il est exécrable et la facture du patient s’en ressent et ne fait que s’alourdir. Celui qui ne possède pas d’assurance privée se retrouve dans le pétrin. Et le manque d’argent pour la recherche oblige les chercheurs à aller quémander auprès de l’industrie pharmaceutique, avec tout ce que cela entraîne comme conséquences. Cela fait du bien d’en parler de temps à autre à la maison médicale. Pour moi, Médecine pour le Peuple est un moyen de se désintoxiquer de la médecine commerciale. Je suis délégué CGSP et je vois de nombreux liens. » Il y a deux ans, Erik a aidé lors du déménagement de la maison médicale dans les nouveaux locaux situés dans la Commandant Weynsstraat. « L’immeuble où nous étions installés était devenu beaucoup trop petit. Je me souviens qu’il fallait grimper sur une échelle déglinguée pour aller rechercher les dossiers des patients, et personne n’osait s’y risquer. Les locaux dans lesquels nous sommes installés aujourd’hui sont beaucoup plus agréables et beaucoup plus spacieux. L’immeuble confère un certain prestige à la maison médicale. Médecine pour le Peuple a démontré sa maturité et sa capacité à prodiguer une médecine de très bonne qualité. Mais on ne peut pas en dire autant du programme informatique qui continue de faire des siennes. » (Rires.)

Erik Lauriks, bénévole

« �0 ans de travail, �0 ans de militantisme »

« Je connais Médecine pour le Peuple depuis longtemps. Je trouve que c’est un mouvement de maisons médicales qui à tout son intérêt : il faut reconnaître leur rôle moteur dans la création des équipes de santé pluridisciplinaires, qui sont devenues

les maisons médicales. Ils se sont bagarrés pour une accessibilité aux soins. Ils ne sont pas les seuls, mais ils en sont à l’initiative. 40 ans de travail, 40 ans de militantisme qu’il faut reconnaître, donc. Comme eux, je suis pour une accessibilité totale aux soins. Il n’y a pas que l’accessibilité financière : il y a l’accessibilité géographique, culturelle, etc. Ce qui compte avant tout, c’est l’accessibilité aux soins pour tous, plus que la gratuité. Les maisons médicales ont d’ailleurs recherché des modes de fonctionnement qui permet cette accessibilité à tous comme, par exemple, la pratique du fonctionnement au forfait. A l’occasion de la sortie du livre de Kris Merckx, le fondateur de MPLP, j’ai écrit un petit texte pour rendre hommage à son travail de militant de la première heure. Je voulais saluer, à travers lui, le côté populaire, au sens noble du terme, de MPLP auprès de ses différents publics. En plus de ce côté populaire qui caractérise MPLP, pour les définir, j’ajouterais “ engagé ”, qui “ tient le cap ”. J’aime bien chez MPLP leur cohérence, leur fil conducteur. A la Fédération des maisons médicales, on a une mixité au niveau du militantisme, des valeurs, etc. On a un socle commun de valeurs mais, au niveau de l’expression de ces valeurs, il y a des différences et on le revendique. Mais, à MPLP, on sent la cohésion qui unit leurs maisons médicales. »

Isabelle Dechamps, présidente de la Fédération des maisons médicales

« On travaille en équipe »

« J’ai connu Médecine pour le Peuple grâce à Médecine pour le Tiers-Monde. C’est une organisation qui travaille dans l’aide médicale structurelle dans les pays du Tiers-

Monde, en collaboration avec les populations locales. J’avais découvert cette organisation lors d’une soirée à l’université. Une étudiante en médecine qui avait fait un stage à l’étranger était venue parler de son expérience et expliquer ce qu’elle avait fait là-bas. Durant mes années d’études, j’ai alors fait un stage à l’étranger avec eux. C’était en Équateur, et ça m’a permis de voir que, dans le monde, il se passe des choses qui sont vraiment injustes, qui m’ont révoltée. Dans le temps, il y avait aussi des week-ends organisés par Médecine pour le Peuple, où ils se présentaient et proposaient des formations. J’ai été à l’un d’entre eux, et j’ai découvert ce qu’était MPLP. Après mon voyage en Équateur, j’ai voulu y faire un stage. Pour en apprendre au niveau médical,

d’une part, mais aussi à cause de la conception de la médecine, qui fait que, en plus de soigner le patient, on fait beaucoup de choses. On essaie de traiter aussi les causes profondes des maladies. On va plus loin que juste l’aspect médical. Ce qui m’a plu lors du stage et m’a convaincu d’y travailler réellement, c’est d’abord le fait que c’est une maison médicale. On n’est pas seul, on est toujours plusieurs à travailler ensemble, en équipe. Autre chose qui m’a enthousiasmée, c’est l’engagement que ça implique. Quand j’étais en stage, à l’époque, il y avait des études qui ont montré qu’il est important de ne pas seulement traiter la maladie avec des médicaments, mais de réfléchir plus loin aussi. Il faut trouver des solutions ensemble, avec le patient, même si ce n’est pas toujours facile. »

Saskia Deceuninck, Médecin à MPLP La Louvière

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« On soigne le patient, mais aussi ce qu’il y a autour du patient »

« Entre Médecine pour le Peuple et moi, c’est une très longue histoire. Lors de la faillite de la Sabena, j’ai rejoint le PTB avec toute la bande de militants qui était à l’époque à l’aéroport, et qui couvrait la faillite. Là, on a créé un comité de lutte.

Après ça, j’ai aidé bénévolement le secrétariat du PTB pendant un an, pendant les élections. Il y avait une camarade dont le mari était tombé malade. Elle assurait à ce moment-là l’accueil à la maison médicale de Molenbeek, et elle m’a dit “ Je n’en peux plus ”. Ça m’intéressait, parce que le secrétariat, c’était trop grand pour moi. Je ne me retrouvais pas dans une petite équipe conviviale, ce n’était pas un environnement assez intimiste pour que je puisse me développer personnellement. Je voulais aider Médecine pour le Peuple. En plus, j’épouse tout à fait la conviction de la médecine forfaitaire, et surtout pour la médecine de première ligne, qui est très importante. J’ai donc commencé à travailler bénévolement pour Médecine pour le Peuple par conviction. Je suis membre du parti, et je trouve que ce que fait le PTB est très important comme contre-courant dans cette société qui va à la dérive. Si on est de gauche, il faut les soutenir. D’ailleurs, je pense qu’une médecine comme la pratique MPLP ne fonctionne que si on a une base sur laquelle on peut se reposer, c’est-à-dire une base politique. Je vois ça très bien chez nous. Quand on soigne un patient, on ne soigne pas seulement la pathologie, on soigne aussi ce qui entoure le patient : est-ce qu’il a un bon logement, un travail… On s’occupe d’autres facteurs importants pour le bien-être du patient, chose qu’un médecin généraliste classique ne peut pas faire. Nous, on a cette structure qui fait qu’on peut travailler à plusieurs niveaux, ce que je trouve extraordinaire. Je retrouve de nouveau une certaine solidarité, une famille, c’est-à-dire que je peux de nouveau me situer dans un contexte de travail, de relations sociales, qui à l’époque était très fort à la Sabena. C’est pour ça qu’on l’appelait “la grande famille Sabena”. Je retrouve ça très fort ici, d’abord avec ma maison médicale, ensuite, dans un contexte plus grand, avec les autres maisons médicales, et enfin au PTB en général. »

Marion Spee, bénévole

« Un contrepoids à la médecine pour riches »

« Médecine pour le Peuple (MPLP) représente une forme de médecine intègre, un contrepoids idéal à un modèle de médecine pour les riches, ce que je trouve très sain. Les médecins de MPLP œuvrent à offrir des soins de santé de très

grande qualité dans les quartiers où cela ne va pas de soi. C’est pour cela qu’ils ont toute mon estime. MPLP contribue sans aucun doute à l’existence de meilleurs soins de santé. Ils font en sorte qu’il y ait un réseau de soins pour ceux qui, sans eux, ne pourraient y avoir accès. Et je suis certain qu’il existe également des médecins qui, tout en n’appartenant pas à MPLP, travaillent avec la même philosophie. L’approche des médecins de Médecine pour le Peuple est exemplaire. Ils offrent une médecine accessible sans que cela se fasse au détriment de la qualité. Certains avancent que ce n’est pas faisable lorsqu’on pratique une médecine gratuite. Pourtant, chez MPLP, il n’y a jamais eu aucun doute à ce propos, et c’est un très grand mérite. J’observe, entre autres, la manière dont la vaccination contre la grippe y est organisée : c’est réglé à la perfection, avec d’excellents résultats, ce que j’apprécie à sa juste valeur. Dans sa lutte contre l’Ordre des médecins, je soutiens la position de Médecine pour le Peuple : l’Ordre est une organisation sclérosée. On y promet du changement, mais sans aucun vrai résultat. Selon moi, dans bien des cas, l’Ordre est juge et partie. En outre, il fait preuve d’un grand manque de transparence à propos de l’utilisation de l’argent des cotisations de ses membres. On peut être adhérent d’un club colombophile et savoir parfaitement où va l’argent, qui y fait quoi, et profiter en plus d’un journal spécialisé, dont la lecture est bien plus agréable que les assommants traités de l’Ordre... Il y a un autre argument avancé à l’encontre des docteurs de Médecine pour le Peuple : puisqu’ils travaillent à des tarifs bien moins élevés, ils ne seraient pas “collégiaux”. Ce que je n’ai jamais constaté, et je connais peu de médecins ayant cette opinion. Je pense que, si l’on faisait un sondage dans les milieux médicaux à propos de la sympathie qu’inspire MPLP, le résultat serait bien meilleur que ce que l’on pourrait penser à première vue. En résumé, j’ai beaucoup d’admiration pour cette organisation. »

Marc Van Ranst, commissaire ministériel Influenza

« Ne pas s’arrêter aux symptômes, mais également chercher les causes »

Il y a quelques années, Tim Vermast, 34 ans, représentant commercial, est venu s’installer à proximité de la maison médicale « De Bres » de Médecine pour le Peuple à Deurne. Très vite, son épouse, leur petit bout de deux ans et lui-même se sont inscrits comme patients. « Je

me suis directement senti chez moi. Accueil chaleureux, salle d’attente spacieuse, personnel aimable. J’ai tout de suite apprécié cette maison médicale moderne. » Tim y est aujourd’hui bénévole. « Lorsque Médecine pour le Peuple participe à une braderie ou lorsqu’on a besoin

de bras pour le call center, que ce soit pour ManiFiesta ou une enquête, je réponds toujours présent. Ce que j’apprécie particulièrement, c’est que Médecine pour le Peuple ne se contente pas d’analyser les symptômes, mais recherche aussi les causes. C’est ça “Les gens d’abord, pas le profit”. Les médecins ici essaient de changer la société, pas seulement en paroles, mais avec des actes concrets. C’est ce qui me motive moi aussi à retrousser mes manches. Finalement, les réactions par rapport à mon engagement ne sont pas si mal que ça. (Rires) Mais ma belle-mère a dit un jour en riant que ces médecins devaient probablement être fous pour accepter de travailler pour un salaire si bas ».

Tim Vermast, patient et bénévole

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QuaranteansdeMédecineRevivez l’histoire de Médecine

pour le Peuple. À travers les images de quelques moments

« chauds », découvrez les combats, les projets et

l’engagement de ces médecins qui joignent les actes aux paroles.

Les débuts en 1971 : une grande simplicité.

Couillet, 2007. Action devant la maison

du docteur Eric Hufkens. Au milieu, Kris Merckx.

Soutenus par de nombreux

patients, le docteur Jan-Harm Keizer

de La Louvière et son avocate

Marianne Petré plaident

leur cause devant le

Conseil d’appel de

l’Ordre à Bruxelles

(2003).

Les docteurs Chris Deprédomme (à gauche) et Leen Vermeulen (à droite), de Molenbeek, ont elles aussi été poursuivies par l’Ordre devant le juge de paix en 2003 (ici, lors d’une manifestation pour la gratuité du vaccin contre la grippe, en 2008).

L’émouvant discours de la mère de Leonardo Vento lors de l’hommage à son fils de 21 ans, tué lors d’une explosion à la cokerie d’Ougrée (octobre 2002). Le docteur Hans Krammisch, du C-Dast à Seraing, la soutient.

Les habitants

du quartier fleuri

Moretusburg agissent

pour l’assai-nissement

de leur quartier.

Le docteur Staf

Henderickx en 1988

lors d’une randonnée

à vélo passant par les endroits pollués aux

métaux lourds dans

le nord de la Campine.

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pourlePeupleenimagesLe 8 octobre 2006, fête de la victoire à Zelzate, où le PTB+ a raflé 6 des 23 sièges du conseil communal. Sur la photo, le groupe des candidats avec les élus : le Dr Geert Asman (à l’avant-plan, accroupi), le Dr Karl Segers (1er à droite), le Dr Frans Van Acoleyen (4e à droite), Maureen Tollenaere (5e à droite), Dirk Goemaere (6e à droite), le Dr Roland Van Acker (1er à gauche, CPAS) et Riet Verspreet (3e droite, CPAS).

Yasser Arafat remercie

le docteur Guido

Gorissen, qui est venu

proposer de l’aide

médicale durant le siège de

Tripoli, au Nord-Liban (décembre

1983).

L’équipe de notre centre

La Clé à Schaerbeek

est représentative

du public de patients. On

y trouve 53 nationalités. À gauche, la

fondatrice, le docteur

Claire Geraets.

Dirk Van Duppen durant l’excursion en car à Hulst pour le paracétamol (avec le KWB et MC). Aux Pays-Bas, l’antidou-leur coûte neuf fois moins qu’en Belgique.

La nouvelle génération est là. Sofie Merckx, la fille de Kris, est docteur à la maison médicale de Marcinelle. Elle aussi a eu affaire à l’Ordre des médecins.

À Genk, le docteur Harrie

Dewitte a été la figure de proue de la

lutte pour un environnement

propre dans la commune de

Sledderlo, alors très polluée. En

2006, il a été élu au Conseil communal sur

la liste PTB+.

Le docteur Jan Cools

lors de son arrivée à

Zaventem en 1989.

Le docteur Cools a

été gardé onze mois en otage,

alors qu’il se rendait au

Liban pour aider dans les camps

de réfugiés palestiniens.

Octobre 1973. Les docteurs Kris Merckx et Michel Leyers, lors du procès qui leur a été intenté pour avoir continué à exercer la médecine malgré une suspension imposée par l’Ordre. Photo tirée de Volksgazet du 23 février 1973.

Page 8: Spécial Solidaire 40 ans de Médecine pour le Peuple

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Kris Merckx viendra dédicacer

son livre « Médecin du Peuple »

Kris Merckx, fondateur de Médecine pour le Peuple, viendra dédicacer son livre Médecin du Peuple à ManiFiesta. Ce livre retrace l’histoire captivante de Médecine pour le Peuple, ses principes et sa méthode de travail. Depuis l’ouverture de la première maison médicale, le 4 janvier 1971, jusqu’à l’organisation moderne regroupant onze maisons médicales qu’est devenue Médecine pour le Peuple. Des récits et témoignages d’amitié et de lutte recueillis au cabinet médical ou au cœur de l’action. D’un bout à l’autre, un livre passionnant, mais aussi une vision des soins de santé de demain.

Séances de dédicace :

• de 12 h 30 à 14 h 30 • de 16 h 30 à 17 h 30

Tarif ManiFiesta

8 euros à la place de 20 eurosau stand de livres sous le chapiteau MPLP

Le docteur Hans Krammisch porte son stéthoscope depuis trente ans, le docteur Staf Henderickx depuis presque quarante. « Quand j’ai commencé mon métier, j’ai encore soigné des patients qui avaient la silicose, la maladie des mineurs, se souvient le docteur Krammisck. Mais la maladie du nouveau siècle, c’est le stress ! »

Staf Henderickx & Hans Krammisch, Docteur je vais craquer ! Le stress au travail,

Aden, 2010, 20 euros.

Le médecin Dirk Van Duppen enquête sur les pratiques des grandes firmes pharmaceutiques qui pillent ce bien public qu’est notre droit à la sécurité sociale. Ne se contentant pas uniquement de dénoncer un système, Van Duppen propose un modèle qui permettrait à la Sécurité sociale de faire des éco-nomies considérables au détriment des lobbies du médicament et des multinationales.

Dirk Van Duppen, La Guerre des médicaments. Pourquoi sont-ils si chers ?, Aden, 2005, 20 euros.

TexTe de vision MPLP

Le droit à la santé dans une société en bonne santé

Voulez-vous connaître l’analyse critique de Médecine pour le peuple à propos des soins de santé aujourd’hui ? Et surtout, quelle alternative existe-t-il ? Cette brochure utile et bon marché (seulement 1 euro) apporte des réponses complètes. En 70 pages et 89 références, les points suivants sont développés et bien documentés :1. Les soins de santé sont un droit et ne peuvent être une marchandise2. La santé : une question de combat contre l’injustice sociale3. Les revendications leviers de Médecine pour le peuple4. Médecine pour le Peuple : pratique quotidienne de l’année 2010.

Dispo-nible à Ma-niFiesta au stand de livres dans la tente MPLP.

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Travail scientifique« Nous ciblons également un public d’étudiants et de travailleurs médicaux progressistes. Ils peuvent découvrir notre travail médico-scientifique et notre savoir-faire dans des domaines comme le travail et la santé, l’environnement et la santé. »

Infos locales« Chaque maison médicale a sa propre page sur le site. Outre des infos pratiques, on y trouve des infos sur les campagnes et activités locales. Et bien sûr, des infos pratiques sur les consulta-tions, les visites à domicile, les services de garde. »

Campagnes« La conscientisation et les campagnes sont extrêmement importantes et cela fera toujours partie du travail de MPLP. Et parfois, nous parvenons effectivement à faire la différence. Pensons à la campagne kiwi pour les médicaments moins chers, qui a abouti à des baisses de prix de

Infos générales« Il se passe tant de choses, à MPLP, mais on en parle rarement. Avec le nouveau site, nous diffusons des tas d’infos sur ce qui se passe à l’intérieur et autour des maisons médicales. »

Blogs« Nombre de nos médecins ont un blog sur le site : ils y racontent des anecdotes ou communiquent leurs réflexions. »