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1 Séquence 4 : LES BLASONS Objet d’étude : la poésie du Moyen Âge au XVIIIe siècle Problématique : En quoi l’écriture du blason se situe-t-elle entre expression des sentiments, réflexion sur le monde et jeu poétique ? Corpus : 1. Joachim du Bellay, « Ces cheveux d’or… », L’Olive, X, 1550 2. Maurice Scève, « Le Front », 1536 3. Clément Marot, « Blason du beau tétin », Épigrammes, 1535 4. Clément Marot, « Blason du laid tétin », Épigrammes, 1535 Lecture cursive : Louise Labé, Sonnets HDA - Jean Fouquet, La Vierge et l’enfant entouré d’anges (portrait d’Agnès Sorel) vers 1450 - Giambologna, Fontaine de Neptune à Bologne, 1565 - École de Fontainebleau, Portrait présumé de Gabrielle d’Estrées et de sa sœur la duchesse de Villars, vers 1594 - René Magritte, Le Viol, 1934 Documents complémentaires : fortune du blason aux XIXe et XXIe siècles - Charles Baudelaire, « La Chevelure », Les Fleurs du mal, 1861 - Charles Baudelaire, « Un hémisphère dans une chevelure », Le Spleen de Paris, 1869 - André Breton, « Union libre », Clair de terre, 1923 - Georges Brassens, « Le Blason »

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Séquence 4 : LES BLASONS

Objet d’étude : la poésie du Moyen Âge au XVIIIe siècle

Problématique : En quoi l’écriture du blason se situe-t-elle entre expression des

sentiments, réflexion sur le monde et jeu poétique ?

Corpus :

1. Joachim du Bellay, « Ces cheveux d’or… », L’Olive, X, 1550

2. Maurice Scève, « Le Front », 1536

3. Clément Marot, « Blason du beau tétin », Épigrammes, 1535

4. Clément Marot, « Blason du laid tétin », Épigrammes, 1535

Lecture cursive :

Louise Labé, Sonnets

HDA

- Jean Fouquet, La Vierge et l’enfant entouré d’anges (portrait d’Agnès Sorel)

vers 1450

- Giambologna, Fontaine de Neptune à Bologne, 1565

- École de Fontainebleau, Portrait présumé de Gabrielle d’Estrées et de sa

sœur la duchesse de Villars, vers 1594

- René Magritte, Le Viol, 1934

Documents complémentaires : fortune du blason aux XIXe et XXIe siècles

- Charles Baudelaire, « La Chevelure », Les Fleurs du mal, 1861

- Charles Baudelaire, « Un hémisphère dans une chevelure », Le Spleen de

Paris, 1869

- André Breton, « Union libre », Clair de terre, 1923

- Georges Brassens, « Le Blason »

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Étude de la langue :

- la syntaxe des relatives

Méthode :

- versification

- commentaire

- lecture expressive

Activité proposée à la classe :

- Visite de l’exposition « le portrait à travers les âges » à la Fondation

Bemberg

Ecriture d’un blason à partir de l’un des tableaux de l’exposition.

- Composition d’une anthologie à partir des Sonnets de Louise Labé.

Programme de la séquence :

✓ Séance 1 : Entrée dans la séquence : travail de recherches sur la

Renaissance

✓ Séance 2 : LL « Ces cheveux d’or » de Du Bellay

✓ Séance 3 : Présentation de la poésie du Moyen Age : Power point

✓ Séance 4 : Versification + Travail maison sur l’insertion des citations

✓ Séance 5 : LL « Le front » de Maurice Scève

✓ Séance 6 : Explication de l’oral : entraînement à partir du poème de

Maurice Scève

✓ Séance 7 : LL Blason du beau tétin (à présenter à la classe)

✓ Séance 8 : Blason du laid tétin

✓ Séance 9 : fortune du blason aux XIXe et XXIe siècles

- Séance 10 : Reprise de Louise Labé

- Séance 11 : HIDA

- Séance 12 : Evaluation orale

- Séance 13 :Evaluation écrite : rédaction d’un commentaire composé

A la maison : écrire un sonnet

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Séance 1 : Entrée dans la séquence : travail de recherches sur la

Renaissance

NOM :

1) Quelles sont les dates du règne de François 1er ?

2) La Renaissance est-elle venue

D’Allemagne

D’Espagne

D’Italie

De Grèce

3) Clément Marot est-il l’auteur

D’un grand roman de chevalerie

De la Farce de Maître Pathelin

D’une traduction de la Bible

D’une traduction des Psaumes de David

4) Maurice Scève est un auteur _______________________(quelle région ou quelle ville ?)

5) Un sonnet est constitué de _______________________________

Soit de __________________ vers

6) Erasme a inspiré les

Catholiques

Protestants

7) Les 95 thèses de Luther luttent principalement contre _____________

8) L’Institution de la Religion chrétienne (1541) est de

Calvin

Lefèvre d’Etaples

Luther

Erasme

9) L’Héptaméron de Margueritte de Navarre a pour référence le Décaméron de

____________________________

10) François Rabelais construit son roman Pantagruel comme

Un conte de fées

Un roman de chevalerie

Un roman d’amour

Une pièce de théâtre farcesque

11) Le massacre de la Saint Barthélémy a eu lieu le ____________________

12) La Pléiade comportait différents auteurs : lesquels

13) D’où vient le nom Pléiade ?

14) Les recueils de poèmes consacrés par Ronsard à Marie, Cassandre, Hélène s’appellent les

____________________________________________

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15) Les Antiquités (1558) et les Regrets (1558) de ___________________ font état des

sentiments du poète devant une grande ville, laquelle ?

__________________________

16) Les Essais sont de ________________________

17) Qui a découvert que la terre tournait autour du Soleil ? _____________

18) Comment s’appelle l’œuvre de Maurice Scève ?_________________________________

19) Qui appelait-on la « belle cordière » ?___________________________

20) La date de l’Edit de Nantes________________

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LA PROPOSITION RELATIVE

- Elle dépend généralement d’un nom ou d’un pronom appartenant à une autre

proposition et appelé antécédent. Etant une expansion du nom, on peut parler

de relative adjective.

- Mots subordonnants qui relient la subordonnée à la principale :

Pronoms relatifs (qui, que, quoi, dont, où, lequel + composés avec préposition à ou

de, duquel, auquel…)

Fonctions :

* Complément de l’antécédent

* La proposition subordonnée relative complète en effet un nom, un G.N ou un

pronom, nommé « antécédent »).

* Le pronom relatif occupe sa propre fonction dans la phrase (sujet, COD,

attribut, etc.)

Attention : la proposition relative peut aussi ne pas avoir d’antécédent et

jouer le rôle d’un groupe nominal dans la phase. Il s’agit dans ce cas d’une

relative substantive. Exemple : Envoyez chercher qui vous voudrez, je ne

paierai pas (la relative est C.O.D du verbe chercher.)

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Séance 2 : Joachim du Bellay, « Ces cheveux d’or… », L’Olive, X, 1550

Ces cheveux d’or sont les liens, Madame,

Dont fut premier1 ma liberté surprise

Amour la flamme autour du cœur éprise,

Ces yeux le trait2 qui me transperce l’âme. 4

Forts sont les nœuds, âpre et vive la flamme,

Le coup, de main à tirer bien apprise3,

Et toutefois j’aime, j’adore et prise4

Ce qui m’étreint, qui me brûle et entame. 8

Pour briser donc, pour éteindre et guérir

Ce dur lien, cette ardeur5, cette plaie,

Je ne quiers6 fer, liqueur, ni médecine :

L’heur7 et plaisir que ce m’est de périr 12

De telle main ne permet que j’essaie

Glaive tranchant, ni froideur, ni racine.

1 Premier : tout d’abord 2 Trait : flèche 3 Le coup a été tiré par la main d’un archer expérimenté. 4 Priser : accorder du prix, estimer 5 Ardeur : brûlure 6 Je ne quiers : je ne requiers, je ne demande 7 L’heur : le bonheur

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Séance 5 : Blasons Joachim du Bellay, « Ces cheveux d’or… », L’Olive, X,

1550 Vie de Joachim du Bellay

Né en 1522, Joachim du Bellay est issu d’une famille

noble. Ses parents sont seigneurs dans l’Anjou et son père

est gouverneur de Brest. Certains de ses oncles sont de

grands militaires, d’autres ont de hautes fonctions

ecclésiastiques, l’un est diplomate à la cour.

Tôt orphelin, il est confié à son frère qui néglige son

éducation. Il a le goût de la poésie très tôt mais doit trouver

un métier. Dès 1545, il étudie le droit à l’université de

Poitiers. Il y apprend le latin et le grec, suivant les cours de

Peletier du Mans (qui a publié les premiers poèmes de Ronsard et encourage du

Bellay à écrire).

De 1547 à 1549, il étudie au collège de Coqueret (sur la montagne Sainte

Geneviève), suivant les cours de l’humaniste Dorot, en compagnie de Ronsard et

Baïf, qui deviendront de grands poètes du XVIème siècle. Il admire Pétrarque et

Virgile, écrit des poèmes en latin et apprend l’italien.

Il compose en 1549 Défense et Illustration de la langue française, un

manifeste dans lequel, au nom de ses amis du collège de Coqueret, il annonce une

rupture dans la littérature. Ces jeunes poètes rejettent les genres anciens comme

les rondeaux et ballades. Ils veulent montrer les capacités du français à être une

langue poétique.

La même année, Du Bellay publie son premier recueil poétique, L’Olive, recueil

de cinquante sonnets – auxquels s’ajouteront soixante-cinq autres sonnets l’année

suivante, dans une réédition. Le titre du recueil correspond au prénom d’une femme

dont le poète chante les louanges. Il s’inspire de Pétrarque, poète italien du

XIVème siècle, très admiré par les humanistes, qui a écrit le Canzoniere, un recueil

de poèmes consacrés à Laure.

Du Bellay publie aussi d’autres poèmes ainsi que des traductions de textes

latins. Toutefois, il connaît des difficultés financières, qui le conduisent à

accepter l’offre de son oncle, cardinal : en 1553, celui-ci lui propose de

l’accompagner à Rome, en tant que secrétaire. D’autres raisons peuvent expliquer

son souhait de partir. Peut-être souhaite-t-il oublier ses soucis grâce au voyage :

depuis deux ans, il est malade et devient sourd. Par ailleurs, son frère aîné étant

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mort, il doit devenir le tuteur de son neveu et subvenir à ses besoins. Enfin, l’Italie

est le berceau de l’humanisme : Joachim du Bellay espère rencontrer les savants

les plus célèbres et s’instruire à leur contact.

À l’occasion de ce séjour, il écrit un journal de voyage, ainsi que des sonnets

comparant la Rome antique et la Rome moderne. Les thèmes du recueil Antiquités

de Rome seront beaucoup repris après lui : il dépeint la grandeur de la cité, puis

les ruines qui évoquent l’idée de mort, l’horreur des guerres civiles. Recueil

évoquant la Rome moderne, Les Regrets expriment la nostalgie de sa région natale,

l’Anjou. Du Bellay y critique aussi les mœurs de la cour du Pape, décrit la ville des

affaires et les bas quartiers.

En 1557, il revient à Paris mais il est déçu : la Cour de François Ier lui apparaît

marquée des mêmes défauts que la Cour pontificale. Il ajoute donc aux Regrets

des poèmes satiriques qui se moquent des courtisans.

Il meurt le 1er janvier 1560. Le public du XVIème siècle l’a reconnu comme un

grand poète, l’égal de Ronsard.

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Séance 2 :Joachim du Bellay, « Ces cheveux d’or… », L’Olive, X, 1550

Le mouvement de la Pléiade

La Pléiade est un mouvement poétique héritier de l’Humanisme. Composée de

sept poètes, elle doit son nom à la constellation de la Pléiade, formée de sept

étoiles.

Son chef de file est Ronsard. On trouve, autour de lui, du Bellay, Dorat

(professeur de grec des deux hommes) et des étudiants d’un collège voisin, comme

Jodelle ou Belleau.

Le manifeste du mouvement est une œuvre de Du Bellay, intitulée Défense et

Illustration de la langue française, publiée en 1549.

Comme les humanistes, les membres de la Pléiade considèrent qu’il faut

donner ses lettres de noblesse à la littérature écrite en français. En effet, le latin

était encore la langue des deux institutions détenant le savoir : l’Eglise et

l’Université.

Tel est le sens du titre du recueil : il s’agit de défendre la langue française

et d’illustrer ses beautés grâce à des œuvres de qualité. Comme les humanistes,

les membres de la Pléiade estiment qu’il faut révérer les écrits des auteurs

antiques et admirent la poésie italienne des XVème et XVIème siècles.

Ils affichent néanmoins une volonté de rupture par rapport aux humanistes.

Selon eux, il n’est pas acceptable d’ériger Marot – mort en 1544 – en modèle. Ainsi

condamnent-ils ce qui a été écrit en français avant eux. S’ils se réfèrent aux

poètes latins ou italiens, ils considèrent qu’il ne faut pas les imiter mais s’en nourrir

pour essayer de les surpasser, pour inventer une poésie française digne de la

poésie italienne.

Aussi veulent-ils enrichir le langage poétique. Ils empruntent des mots au

français des siècles passés, aux dialectes régionaux, aux langages techniques de

l’agriculture, de la chasse… Ils forgent aussi des néologismes.

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Estimant que la langue poétique doit être différente de la langue courante,

ils emploient de nombreuses figures de rhétorique : comparaisons, métaphores,

hyperboles… Ils recourent aux allusions mythologiques ou historiques.

Le genre qu’ils célèbrent et qu’ils adoptent le plus volontiers est le sonnet,

modèle tiré des œuvres de Pétrarque.

Composé de deux quatrains et de deux tercets, le sonnet se termine

généralement par une chute : la pointe du dernier vers surprend mais a été

préparée par l’ensemble du poème. Les deux quatrains sont composés des mêmes

rimes embrassées (ABBA ABBA). Les tercets, quant à eux, sont formés de rimes

suivies puis de rimes embrassées (CCD EED). À partir de 1547, on trouve

également des rimes croisées dans les tercets (CCD EDE).

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Séance 2 : Joachim du Bellay, « Ces cheveux d’or… », L’Olive, X, 1550

Au XVIe siècle, les poètes de la Pléiade entreprennent de donner ses lettres

de noblesse à la langue française, en composant des poèmes dignes des modèles

antiques ou italiens. Ils s’inspirent notamment du Canzionere de Pétrarque, auteur

italien du XIVe siècle, en reprenant le modèle du sonnet. Ainsi, Joachim du Bellay

publie en 1549 un recueil de cinquante sonnets chantant son amour pour une femme

dont le prénom donne son titre à l’œuvre, L’Olive. Le dixième poème est un blason

en décasyllabes célébrant les cheveux blonds de cette muse. Il est composé de

trois phases : chaque quatrain est composé d’une phrase, la troisième occupe les

deux tercets. Le poète exprime les souffrances de l’amour, en affirmant toutefois

les préférer à tout autre sentiment. Nous nous demanderons comment ce sonnet

exprime l’intensité du sentiment amoureux.

Citations Procédés Interprétations

« Ces cheveux d’or sont

les liens, Madame,

Dont fut premier ma

liberté surprise » (v.1-2)

« Ces cheveux d’or »

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12

« Madame »

« ma liberté »

« Amour la flamme

autour du cœur éprise »

« Ces yeux le trait qui

me transperce l’âme. »

Citations Procédés Interprétations

« Forts sont les nœuds,

âpre et vive la flamme,

Le coup, de main à tirer

bien apprise »

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13

« Et toutefois j’aime,

j’adore et prise

Ce qui m’étreint, qui me

brûle et entame. »

« j’aime, j’adore et

prise »

« Ce qui m’étreint, qui

me brûle et entame »

Citations Procédés Interprétations

« Pour briser donc, pour

éteindre et guérir

Ce dur lien, cette

ardeur, cette plaie

Je ne quiers fer, liqueur,

ni médecine »

Conjonction « donc »

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14

« L’heur et plaisir que ce

m’est de périr

De telle main ne permet

que j’essaie

Glaive tranchant, ni

froideur, ni racine. »

« L’heur et plaisir »

« L’heur et plaisir que ce

m’est de périr »

« De telle main »

Conclusion :

Ce blason s’attarde moins sur la description es cheveux de la femme que sur

les sentiments qu’ils suscitent. Du Bellay reprend des topoï de la poésie

pétrarquiste dans une longue métaphore filée. Elle lui permet de mettre en

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évidence la puissance de l’amour, dont le poète apparaît comme une victime. Elle

présente également les sentiments paradoxaux qui agitent le cœur du poète, qui

préfère mourir d’amour plutôt que de renoncer à ses sentiments. Ainsi, le jeu sur

les mots, à travers la reprise des topoï, est au service d’un éloge de l’amour bien

plus que des cheveux de la dame.

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Séquence 5 : Blasons

Joachim du Bellay, « Ces cheveux d’or… », L’Olive, X, 1550

Au XVIe siècle, les poètes de la Pléiade entreprennent de donner ses lettres

de noblesse à la langue française, en composant des poèmes dignes des modèles

antiques ou italiens. Ils s’inspirent notamment du Canzionere de Pétrarque, auteur

italien du XIVe siècle, en reprenant le modèle du sonnet. Ainsi, Joachim du Bellay

publie en 1549 un recueil de cinquante sonnets chantant son amour pour une femme

dont le prénom donne son titre à l’œuvre, L’Olive. Le dixième poème est un blason

en décasyllabes célébrant les cheveux blonds de cette muse. Il est composé de

trois phases : chaque quatrain est composé d’une phrase, la troisième occupe les

deux tercets. Le poète exprime les souffrances de l’amour, en affirmant toutefois

les préférer à tout autre sentiment. Nous nous demanderons comment ce sonnet

exprime l’intensité du sentiment amoureux.

Premier quatrain : évocation du coup de foudre

Le quatrain est composé d’une phrase construite sur une énumération, présentant

les étapes du coup de foudre : la vue des cheveux, la naissance du sentiment

amoureux, sa confirmation par le regard.

Citations Procédés Interprétations

« Ces cheveux d’or sont

les liens, Madame,

Dont fut premier ma

liberté surprise » (v.1-2)

Enjambement Relie les cheveux et la

perte de liberté, c’est-à-

dire qu’il les présente

comme la cause du coup

de foudre

Le connecteur temporel

« premier »…

… renvoie au thème du

coup de foudre.

La métaphore des liens… … souligne l’attachement

amoureux.

Diérèse sur le mot

« liens »

Met en relief la

métaphore du lien, donc

la force de l’amour

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17

« Ces cheveux d’or » Ce sont les premiers

mots du poème…

… de sorte que

l’attention est attirée

sur ces cheveux, qui font

l’objet du blason

La métaphore est un

topos…

… qui permet de célébrer

les cheveux blonds de la

femme en les associant à

un matériau précieux.

« Madame » Apostrophe L’adresse à la dame est

caractéristique de la

poésie lyrique : le poète

dédie son œuvre à la

femme aimée.

La rime entre

« Madame » et « âme »…

… renforce le thème de

l’amour.

« ma liberté » Emploi de la première

personne du singulier

Accentue le lyrisme

« Amour la flamme

autour du cœur éprise »

La métaphore de la

flamme est un topos…

… caractéristique du

lyrisme amoureux.

Les mots « amour »,

« flamme », « cœur »,

qui complètent les mots

« âme » et « liens » des

vers 4 et 1,

appartiennent au champ

lexical de l’amour.

Ce champ lexical met

l’accent sur le lyrisme.

« Ces yeux le trait qui

me transperce l’âme. »

La métaphore de la

flèche est un topos de la

poésie pétrarquiste.

Ce topos célèbre la

beauté du regard de la

femme.

Le verbe « transpercer »

est hyperbolique.

Il souligne la puissance

de l’amour.

Ainsi, ce quatrain est composé d’une seule phrase recourant aux topoï de la poésie

pétrarquiste pour célébrer la beauté de la femme aimée, en particulier de ses

cheveux blonds.

Deuxième quatrain : insistance sur la souffrance amoureuse

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Dans le second quatrain, le poète revivifie ces topoï en filant les métaphores pour

exprimer l’intensité de l’amour et de la souffrance de l’amant.

Citations Procédés Interprétations

« Forts sont les nœuds,

âpre et vive la flamme,

Le coup, de main à tirer

bien apprise »

Énumération reprenant

les métaphores du lien,

de la flamme et de la

flèche présentées dans

le premier quatrain.

Adjectifs exprimant

l’intensité (« forts »,

« âpre », « vive »)

Souligne la puissance du

coup de foudre, faisant

du poète une victime de

l’amour

Le rythme binaire des

adjectifs « âpre et

vive »…

… renforce la puissance

de l’amour

« Et toutefois j’aime,

j’adore et prise

Ce qui m’étreint, qui me

brûle et entame. »

La deuxième partie du

quatrain débute par un

adverbe exprimant

l’opposition.

La rupture avec ce qui

précède est clairement

mise en évidence. Elle

permet au poète de

jouer avec les

métaphores convenues

pour montrer encore

plus vivement la force de

son amour.

Deux rythmes ternaires

en antithèse, opposant

l’amour et la blessure

Souligne le paradoxe de

l’amour, qui fait aimer la

douleur qu’il cause

« j’aime, j’adore et

prise »

Rythme ternaire

énumérant des termes

au sens proche

Insistance sur l’amour du

poète pour la femme à

qui il s’adresse

« Ce qui m’étreint, qui

me brûle et entame »

Périphrase désignant

l’amour à l’aide d’une

énumération filant les

métaphores du premier

quatrain

Le jeu sur les images est

au service du discours

amoureux.

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Ce second quatrain présente le paradoxe de l’amour, qui fait à la fois souffrir et

éprouver du bonheur. Cette idée est un topos de la poésie du XVIe siècle1.

Tercets : évocation du bonheur que procure l’amour malgré la souffrance

Les deux tercets sont composés d’une seule longue phrase, coupée en deux parties,

entre les tercets, par les deux points. Avec ce rythme équilibré, elle apporte une

conclusion aux tercets : le poète affirme éprouver des sentiments si intenses qu’il

refuse de guérir de sa souffrance amoureuse.

Citations Procédés Interprétations

« Pour briser donc, pour

éteindre et guérir

Ce dur lien, cette

ardeur, cette plaie

Je ne quiers fer, liqueur,

ni médecine »

Conjonction « donc » Montre que les tercets

apportent la conclusion

des quatrains. (C’est une

caractéristique du

sonnet, qui se termine

souvent par une pointe,

un effet de chute

marquant.)

Trois vers en rythme

ternaire, qui se

répondent, en filant la

métaphore initiale : à

chaque métaphore de

l’amour correspond un

symptôme de souffrance

et un remède

envisageable.

L’allitération en [R]… … crée un lien entre les

trois vers. La fluidité du

rythme renforce

l’enchaînement des

idées, qui permet de

présenter au poète la

démonstration de son

amour.

Négations (« ne », « ni ») Soulignent le refus

paradoxal de guérir de la

souffrance amoureuse

On retrouve la diérèse

sur le mot « lien »…

… qui accentue

l’attachement amoureux,

causé notamment par la

1 On retrouve les antithèses liées à l’amour dans de nombreux poèmes de Louise Labé par exemple.

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vue des cheveux. Or cet

attachement est la

cause du refus de

guérison.

Emploi de la première

personne

L’implication du poète

est une caractéristique

du lyrisme.

« L’heur et plaisir que ce

m’est de périr

De telle main ne permet

que j’essaie

Glaive tranchant, ni

froideur, ni racine. »

On trouve, comme dans

le tercet précédent, la

négation des remèdes

possibles en rythme

ternaire

Insiste sur le refus

paradoxal de guérir de la

souffrance amoureuse

Deux occurrences de la

première personne

Mise en relief du lyrisme

par l’implication du poète

« L’heur et plaisir » Rythme binaire

présentant deux termes

proches (effet de

redondance)

Insiste sur l’intensité de

l’amour, puisque le poète

affirme aimer au point

de préférer la mort à la

fin de ses sentiments « L’heur et plaisir que ce

m’est de périr »

Paradoxe (mis en relief

par la rime interne entre

« plaisir » et « périr »)

« De telle main » Caractère mélioratif de

l’adjectif « telle »

Accentue l’éloge de la

femme

Conclusion :

Ce blason s’attarde moins sur la description es cheveux de la femme que sur

les sentiments qu’ils suscitent. Du Bellay reprend des topoï de la poésie

pétrarquiste dans une longue métaphore filée. Elle lui permet de mettre en

évidence la puissance de l’amour, dont le poète apparaît comme une victime. Elle

présente également les sentiments paradoxaux qui agitent le cœur du poète, qui

préfère mourir d’amour plutôt que de renoncer à ses sentiments. Ainsi, le jeu sur

les mots, à travers la reprise des topoï, est au service d’un éloge de l’amour bien

plus que des cheveux de la dame.

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Séance 3 : Présentation de la poésie du Moyen Age : Power point

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22

Séance 4 : Versification

I) LA PROSODIE

1) La diérèse : distinction prosodique des voyelles en contact.

Ex : délici -eux (4 syllabes)

li - on (2 syllabes)

respectu -eux (4 syllabes)

2) La synérèse : voyelles que l’on ne distinguent pas à la prononciation.

Fier (1 syllabe)

3) Le « e » caduc

Le « e » terminal d’un mot suivi d’une initiale vocalique ou d’un « h » non aspiré

est dit caduc. Il n’est pas prononcé et donc pas compté.

Apocope : disparition en fin de mot d’un « e » caduc non élidable.

Ex humain (e).

Syncope : disparition d’un « e » caduc dans le corps d’un mot.

Ex : seul (e) ment.

II) LA STROPHE

1) 1 vers : monostiche

2 vers : dystique

3 vers : tercet

4 vers : quatrain

5 vers : quintil

6 vers : sizain

7 vers : septain

8 vers : huitain

9 vers : neuvain

10 vers dizain

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23

2) Les rimes peuvent être plates : AABB

croisées : ABAB

embrassées : ABBA

3) Mètres : mesure du vers

Les strophes peuvent être isométriques (même mètre) ou hétérométrique (mètre

différent).

III) CESURES ET COUPES

1) Césure : Le point où se fait le départ entre les deux groupements syllabiques

constitutifs du vers.

6 / 6 : alexandrin classique

4/6 : décasyllabe classique

2) Hémistiche : Groupements syllabique délimité par la césure

IV ) ENJAMBEMENT, REJET ET CONTRE REJET

1) Enjambement : Simple débordement des groupements de la phrase par

rapport à ceux du mètre, sans mise en vedette d’éléments particuliers.

2) Rejet : Un élément verbal bref placé en début d’un vers ou d’un hémistiche se

trouve étroitement lié par la construction au vers ou à l’hémistiche

précédent, et prend par sa position une valeur particulière.

3) Le contre rejet : Procédé inverse : Un élément verbal bref placé à la fin d’un

vers ou d’un hémistiche se trouve étroitement lié par la construction au vers

ou à l’hémistiche suivant, et prend par sa position une valeur particulière.

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25

Méthode : insérer les citations - Exercices

Pour le : Exercice 1

Les citations soulignées ne sont pas correctement intégrées aux phrases.

Recopiez-les en corrigeant la rédaction. Des coupures ou des modifications grammaticales

sont parfois nécessaires.

1. Figaro déclare dans son monologue que « Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge

flatteur. »

2. Dans La Peste de Camus, le Père Paneloux décrit métaphoriquement l’épidémie en

déclarant à ses fidèles que « vous vous trouvez sous les murailles de la peste », que « c’est

à leur ombre mortelle » « qu’il nous faut trouver notre bénéfice ».

3. Le narrateur du Temps retrouvé souligne l’importance de la littérature pour comprendre

véritablement nos vies : « La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par

conséquent réellement vécue, c’est la littérature. »

Exercice 2

Insérez les citations dans une phrase suivant chacun des phrases proposées.

1. Le narrateur nous fait entrer dans la conscience de Frédéric, ébloui par la beauté de

Mme Arnoux.

« splendeur de sa peau brune » - « séduction de sa taille » - « finesse de ses doigts »

2. Balzac, romancier réaliste, attache une grande importance au milieu de vie des

personnages.

« toute sa personne explique la pension, comme la pension implique sa personne » (à propos

de la pension de Mme Vauquer)

3. Le poète décrit sa première rencontre amoureuse avec Cassandre.

« Le jour qu’un œil tira sur l’avril de mon âge. » (citation d’un poème de Ronsard)

Exercice 3

Insérez chaque citation dans une phrase de votre choix, en veillant à varier les verbes

introducteurs. Ajoutez une phrase qui identifie la figure de style utilisée et une

interprétation.

1. « L’homme est né libre, et partout il est dans les fers. » (Jean-Jacques Rousseau,

Contrat social)

2. « L’amour est un tyran qui n’épargne personne. » (Pierre Corneille, Le Cid)

3. « Faites des routes, faites des ports, faites des villes, croissez, cultivez, colonisez,

multipliez. » (Victor Hugo, Discours du 18 mai 1879)

4. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme. » (François Rabelais, Pantagruel)

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26

Méthode : insérer les citations

Présenter la citation

- Utiliser des guillemets

français « ».

- Ne pas se contenter

de placer les citations

entre parenthèses mais

les insérer dans une

phrase.

- Signaler les

modifications ou les

coupes à l’aide de

crochets [ ].

- Ne pas faire de coupe

si cela doit aboutir à

une phrase que l’on ne

comprend pas ou si

cela ne respecte pas la

syntaxe.

Citation longue

Ex : « Ceux qui ont

eu de grandes

passions se

trouvent toute leur

vie heureux et

malheureux d’en

être guéris. » (La

Rochefoucauld)

Citation courte

Ex : « légèretés »,

« folies »,

« caprices » (La

Bruyère)

L’introduire dans une

subordonnée, après un

verbe introducteur du

dialogue.

La Rochefoucauld estime

que « ceux qui ont eu de

grandes passions se

trouvent toute leur vie

heureux et malheureux

d’en être guéris. »

ou

La Rochefoucauld écrit :

« Ceux qui ont eu de

grandes passions se

trouvent toute leur vie

heureux et malheureux

d’en être guéris. »

Intégrer les mots dans une

phrase d’analyse.

Pour dévaloriser les

hommes, La Bruyère

dénonce leurs « légèretés »,

leurs « folies » et leurs

« caprices ».

Intégrer les mots avec des

expressions signalant le

passage à la citation.

On trouve le champ lexical

de la frivolité, composé des

mots « légèretés », « folies »

et « caprices ».

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Séance 5 : Blasons Maurice Scève, « Le Front », 1536

Vie de Maurice Scève (1501 ?-1562 ?)

Maurice Scève est né vers 1500 à Lyon,

ville dynamique du point de vue économique et

culturel. Il a reçu une bonne éducation : docteur

en droit, il connaît le grec, le latin, l’espagnol et

l’italien. Il a voyagé en France et en Italie.

Homme de lettres, il est l’un des poètes

officiels du royaume. Ainsi, en 1536, il participe

au Tombeau du défunt fils de François Ier,

recueil de poèmes consacrés à la mémoire du

Dauphin. En 1548, il règle les fêtes organisées

pour l’entrée d’Henri II à Lyon.

Imitateur de Pétrarque, il compose des poèmes amoureux. Il traduit

également un roman espagnol. Il participe à un concours de blasons.

En 1536, il s’éprend de la poétesse Pernette du Guillet, qui est mariée à un

autre homme l’année suivante. Elle est identifiée comme l’inspiratrice du recueil

Délie, objet de la plus haute vertu, qui paraît en 1544. Si Délie est le pseudonyme

de Pernette du Guillet, c’est aussi l’anagramme de « l’idée », ce qui confère au

recueil une dimension supplémentaire. Il ne s’agit pas seulement de poèmes d’amour

mais aussi de réflexions sur l’amour.

En effet, Maurice Scève fait partie des néoplatoniciens. Ce courant

philosophique s’inspire des œuvres de Platon, traduites en latin par l’italien Marsile

Ficin au XVe siècle. Pour Platon, l’âme est prisonnière du corps mais elle est attirée

vers le monde des Idées, le Beau, le Bien, le Bon. L’âme, avant d’être placée dans

un corps, a contemplé ces idées et c’est l’amour du Bien qui la meut. Pour y parvenir,

elle progresse de l’amour humain à l’amour divin. Les néoplatoniciens, sans suivre

pleinement la démarche du philosophe antique, conservent les métaphores de

l’amour du Bien, de l’amour de Dieu, et les appliquent à l’amour humain. Ils évoquent

ainsi le cœur prisonnier qui quitte le corps pour voler vers la femme aimée et

insistent sur le thème du regard, sur la contemplation de la beauté. De même que

la philosophie de Platon veut libérer l’âme du corps, les poètes néoplatoniciens

créent l’idée d’amour platonique, un amour purement spirituel et non charnel.

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Ainsi, dans Délie, Scève compose une poésie amoureuse et philosophique,

traduisant une recherche de l’amour idéal par un dépassement de l’amour humain.

Enfin, Délie est le surnom d’Hécate, déesse de la nuit, qui incarne une image de

femme froide et cruelle. Les poèmes expriment donc la souffrance de l’amant et,

paradoxalement, le bonheur de cette souffrance, rejoignant le goût des antithèses

de Pétrarque.

À la mort de Pernette du Guillet, en 1545, Scève se retire dans la solitude.

En 1574, il publie Saulsaye, églogue de la vie solitaire, recueil de poèmes vantant

la vie champêtre, supérieure à la vie de cour.

Il retourne ensuite vers la société et participe à la vie littéraire lyonnaise.

Il écrit le Microcosme, long poème scientifique et théologique, vraisemblablement

publié après sa mort.

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Séance 5 : Blasons Maurice Scève, « Le Front », 1536

Mouvement littéraire : les lettres lyonnaises

Au XVIe siècle, Lyon est un grand centre économique, aussi important que

Paris. La ville, abritant des banquiers italiens et hollandais, est un lieu important

du commerce européen. Quatre foires internationales s’y déroulent chaque année.

La ville reçoit aussi des grands personnages de la Cour ou de l’Église à

l’occasion des campagnes d’Italie.

Son caractère international, allié à la situation géographique de la ville, en

fait un lieu d’échange d’idées diverses. Lyon accueille à la fois l’influence

pétrarquiste ou néoplatonicienne de l’Italie, la tradition poétique des troubadours

et les idées de la Réforme venues de Genève.

Le partage du savoir est également facilité par la présence des imprimeurs,

qui se sont installés à Lyon dès 1473 (l’imprimerie a été inventée en Allemagne vers

1450). Ces imprimeurs sont à l’origine de deux innovations importantes : ils

remplacent les lettres gothiques par les italiques, qui facilitent la lecture, et

inventent le format in-octavo, petit volume maniable.

Par ailleurs, les humanistes sont présents à Lyon et attirent des visiteurs

prestigieux comme Rabelais ou Marot. La ville est donc un centre intellectuel riche.

Ce que l’on appelle l’école lyonnaise est un groupe d’hommes et femmes de

lettres, qui se regroupent autour de Maurice Scève et échangent dans des salons,

notamment autour de la question de l’amour. Néoplatoniciens, admirateurs de

Pétrarque, les plus célèbres, outre Maurice Scève, sont Louise Labé, Pernette du

Guillet et Pontus de Tyard.

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Séance 5 : Maurice Scève, « Le Front », 1536

Front large et haut, front patent9 et ouvert,

Plat et uni, des beaux cheveux couvert :

Front qui est clair et serein firmament

Du petit monde, et par son mouvement

Est gouverné le demeurant10 du corps : 5

Et à son vueil11 sont les membres concors12 :

Lequel je vois être troublé par nues13,

Multipliant ses rides très-menues14,

Et du côté qui se présente à l’œil

Semble que là se lève le soleil. 10

Front élevé sur cette sphère ronde,

Où tout engin15 et tout savoir abonde.

Front révéré, Front qui le corps surmonte

Comme celui qui ne craint rien, fors16 honte.

Front apparent, afin qu’on pût mieux lire 15

Les lois qu’amour voulut en lui écrire,

Ô front, tu es une table d’attente17

Où ma vie est, et ma mort très-patente18 !

9 Patent : découvert (c’est le sens ancien du mot, qui aujourd’hui signifie « évident ») 10 Le demeurant : le reste 11 Vueil : volonté 12 Concors : accordés 13 Nues : nuages 14 Très-menues : très petites, très fines 15 Engin : intelligence (le mot vient du latin ingenium, qui signifie génie) 16 Fors : sauf 17 En héraldique, une table d’attente est un panneau resté momentanément sans inscription. C’est par exemple un écu dont le contour, dont la forme seule existe. (On trouvait des tables d’attentes sur les armoiries des jeunes filles, qui présentaient, pour une part, le blason de leur famille, et d’autre part une place vacante pour les armoiries de leur futur mari.) 18 Patente : évidente

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Séance 5 : Maurice Scève, « Le Front », 1536

Front large et haut, front patent19 et ouvert,

Plat et uni, des beaux cheveux couvert :

Front qui est clair et serein firmament

Du petit monde, et par son mouvement

Est gouverné le demeurant20 du corps : 5

Et à son vueil21 sont les membres concors22 :

Lequel je vois être troublé par nues23,

Multipliant ses rides très-menues24,

Et du côté qui se présente à l’œil

Semble que là se lève le soleil. 10

Front élevé sur cette sphère ronde,

Où tout engin25 et tout savoir abonde.

Front révéré, Front qui le corps surmonte

Comme celui qui ne craint rien, fors26 honte.

Front apparent, afin qu’on pût mieux lire 15

Les lois qu’amour voulut en lui écrire,

Ô front, tu es une table d’attente27

Où ma vie est, et ma mort très-patente28 !

19 Patent : découvert (c’est le sens ancien du mot, qui aujourd’hui signifie « évident ») 20 Le demeurant : le reste 21 Vueil : volonté 22 Concors : accordés 23 Nues : nuages 24 Très-menues : très petites, très fines 25 Engin : intelligence (le mot vient du latin ingenium, qui signifie génie) 26 Fors : sauf 27 En héraldique, une table d’attente est un panneau resté momentanément sans inscription. C’est par exemple un écu dont le contour, dont la forme seule existe. (On trouvait des tables d’attentes sur les armoiries des jeunes filles, qui présentaient, pour une part, le blason de leur famille, et d’autre part une place vacante pour les armoiries de leur futur mari.) 28 Patente : évidente

Commentez la nature et la

fonction des mots soulignés

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Séance 5 : Blasons Maurice Scève, « Le Front », 1536

Au XVIe siècle, la ville de Lyon est un centre économique et culturel

florissant. Les poètes s’y inspirent de la Renaissance italienne, notamment du

poète Pétrarque et du courant néoplatonicien, pour composer des œuvres

célébrant l’amour comme un absolu. Chef de file de cette école lyonnaise, Maurice

Scève participe en 1536 à un concours de blasons, qu’il remporte grâce à ses cinq

poèmes, « Le Sourcil », « La Larme », « La Gorge », « Le Soupir » et « Le Front ».

Ce dernier, composé de dix-huit décasyllabes en rimes plates, loue à la fois la

beauté et l’intelligence de la dame. Nous nous demanderons comment ce blason

célèbre la femme aimée.

Séance 5 : Blasons Maurice Scève, « Le Front », 1536

Au XVIe siècle, la ville de Lyon est un centre économique et culturel

florissant. Les poètes s’y inspirent de la Renaissance italienne, notamment du

poète Pétrarque et du courant néoplatonicien, pour composer des œuvres

célébrant l’amour comme un absolu. Chef de file de cette école lyonnaise, Maurice

Scève participe en 1536 à un concours de blasons, qu’il remporte grâce à ses cinq

poèmes, « Le Sourcil », « La Larme », « La Gorge », « Le Soupir » et « Le Front ».

Ce dernier, composé de dix-huit décasyllabes en rimes plates, loue à la fois la

beauté et l’intelligence de la dame. Nous nous demanderons comment ce blason

célèbre la femme aimée.

Citations Procédés Interprétations

« Front » Premier mot du poème

Huit occurrences dans

l’ensemble du poème

Insiste sur la partie du

corps décrite. C’est le

propre du blason.

« Front large et haut,

front patent et ouvert »

(v.1)

Parallélisme avec

répétition de « front »

L’objet du blason est

ainsi mis en évidence.

Dans ce parallélisme, on

trouve quatre adjectifs

mélioratifs, qui insistent

sur la grande taille de

ce front (avec un effet

de redondance).

Cela construit un éloge

de la femme ainsi

décrite. En effet, au

XVI siècle, un grand

front est un critère de

beauté. (On le voit sur

les portraits présumés

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de Louise Labé et

Pernette du Guillet.)

Un grand front est aussi

considéré à cette époque

comme un signe

d’intelligence1.

Les premiers vers

montrent donc que

l’éloge est double, à la

fois esthétique et

intellectuel.

« Plat et uni, des beaux

cheveux couvert : » (v.2)

Grâce à un

enjambement,

l’énumération

d’adjectifs mélioratifs

en rythme binaire se

poursuit sur le

deuxième vers.

Souligne la beauté du

front décrit (ce qui est

une caractéristique du

blason)

Un adjectif mélioratif

est également utilisé

pour décrire les

cheveux.

« Front qui est clair et

serein firmament

Du petit monde » (v.3-4)

Métaphore

Rejet

Le front de la femme

apparaît comme un

microcosme, un abrégé

du ciel, si bien qu’elle est

magnifiée, presque

divinisée.

Le rejet permet de

mettre l’accent sur

cette idée de

microcosme.

On trouve à nouveau

deux adjectifs

mélioratifs en rythme

binaire

Le jeu sur le rythme, par

la reprise du même

procédé, insiste sur

l’éloge.

« et par son mouvement La métaphore du

mouvement désigne la

pensée.

Le blason du front met

ainsi l’accent sur la

pensée le poète paraît

1 En effet, la physiognomonie est alors en vogue : selon cette pseudo-science, la personnalité d’un individu se reflète dans les traits de son visage.

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35

Est gouverné le

demeurant du corps »

(v.4-5)

La personnification du

front en fait un

gouverneur du reste du

corps.

épris de l’intelligence de

la dame encore plus que

de sa beauté.

« Et à son vueil sont les

membres concors » (v.6)

Poursuite de la

personnification qui fait

du front un souverain

dirigeant tout le reste

du corps

La personne paraît ainsi

définie par son esprit

avant tout. Il n’y a en

effet pas de sensualité

dans ce blason. C’est d’un

amour idéal que brûle le

poète, selon la tradition

néoplatonicienne.

Le mot « concors »,

placé à la rime, est mis

en évidence.

Il connote l’harmonie et

contribue ainsi à l’éloge

de la perfection de la

femme.

« Lequel je vois être

troublé par nues » (v.7)

La métaphore du ciel,

présentée au vers 3, est

filée dans le vers 7.

Présenté comme ce qu’il

y a de plus élevé, le

front acquiert une

importance considérable.

Il établit un lien entre la

femme et l’idée d’envol,

ce qui peut renvoyer au

néoplatonisme. En effet,

ce courant envisage

l’envol de l’âme vers le

monde des idées grâce à

l’amour.

« Multipliant ses rides

très-menues » (v.8)

L’adverbe « très », à

valeur superlative,

ajouté au verbe

« multiplier »…

… contribue à l’éloge de

la femme, en vantant à la

fois la finesse de ses

traits et la variété de

ses expressions.

« Et du côté qui se

présente à l’œil

Semble que là se lève le

soleil » (v.9-10)

La métaphore filée du

ciel se poursuit.

Contribue à diviniser la

femme.

La rime entre « œil » et

« soleil »…

… suggère la splendeur

du regard, donc

l’intelligence.

« Front élevé sur cette

sphère ronde,

La périphrase désignant

le front reprend la

métaphore filée du ciel,

Fait de la femme un

microcosme, une

totalité.

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36

Où tout engin et tout

savoir abonde. » (v.11-12)

en associant le visage à

la terre.

Rythme binaire (« tout

engin et tout savoir »)

avec hyperbole

Célèbre l’intelligence et

la culture de la dame, ce

qui est conforme à l’idéal

humaniste.

« Front révéré, Front qui

le corps surmonte

Comme celui qui ne craint

rien, fors honte. »

Répétition du mot

« front »

Insiste sur la partie du

corps blasonnée

Personnification du

front, accentuée par la

comparaison

Emploi de l’adjectif

« révéré »

Contribue à faire de la

femme une divinité

Rime entre

« surmonte » et « rien

fors honte »

Souligne la majesté de

ce front

« Front apparent, afin

qu’on pût mieux lire

Les lois qu’amour voulut

en lui écrire »

Rime entre « lire » et

« écrire »

Fait du front (et donc de

la femme) un mystère à

élucider, à décrypter,

pour comprendre les lois

de l’amour. On remarque

ainsi l’inspiration

néoplatonicienne du

poème.

« Ô front, tu es une

table d’attente

Où ma vie est, et ma

mort très-patente ! »

Apostrophe et emploi de

la deuxième personne du

singulier

En s’adressant au front,

le poète lui confère une

importance considérable.

Par ailleurs, il recourt

ainsi au lyrisme, ce qui

est conforme à la

tradition du blason.

Emploi de la première

personne à deux

reprises (alors qu’elle

n’a été utilisée qu’une

fois dans le reste du

poème)

Retour au lyrisme dans

les derniers vers,

accentuant le thème de

l’amour

La métaphore de la

table d’attente…

… renforce l’idée que la

femme est

indéchiffrable mais

qu’elle conduit à la

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37

compréhension des

mystères du monde.

La reprise de l’adjectif

« patent », qui clôt le

poème après l’avoir

ouvert…

… met l’accent sur ce

front, qui par sa

grandeur permet au

poète de lire l’ensemble

de son existence et

même son avenir. La

beauté de ce front

permet donc d’accéder à

une connaissance

supérieure.

L’antithèse entre « vie »

et « mort »…

… n’est pas seulement

utilisée, comme dans le

pétrarquisme, pour

montrer la violence du

sentiment amoureux,

mais pour faire de la

femme un univers, un

abrégé du monde.

Conclusion

Maurice Scève propose un blason du front célébrant moins la beauté que

l’intelligence et la culture de la femme aimée. Celle-ci est présentée comme un

microcosme, un univers dont le front serait le ciel. Le poème loue ainsi la

perfection de cette femme qui, par l’amour qu’elle inspire, relie le poète au monde

et l’invite à mieux le comprendre. Il s’agit d’un amour idéal, inspiré des théories

néoplatoniciennes : il s’agit de percevoir la totalité du monde par la médiation de

la contemplation du Beau. Cette mystique de l’amour se retrouve, bien des siècles

plus tard, dans le blason surréaliste d’André Breton, « Union libre », qui fait

également de la femme aimée un abrégé du monde.

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38

Méthode : le déroulement de l’oral de français au baccalauréat

Préparée pendant trente minutes, l’épreuve orale en dure vingt. Elle a un

coefficient 5, en série générale ou en série technologique.

I. Préparation

L’examinateur vous fait entrer dans la salle. Il vérifie que vos textes ne

comportent aucune annotation. Il vous remet un bordereau indiquant le texte que

vous devrez étudier et une question de grammaire. Il vous donne également des

feuilles de brouillon.

Vous signez le bordereau puis vous allez travailler, pendant trente minutes, au

fond de la salle.

Notez les éléments nécessaires pour faire l’introduction et la conclusion.

Assurez-vous que chacune de vos remarques relie citation, procédé d’écriture et

interprétation. Vous pouvez écrire sur votre texte.

Préparez la réponse à la question de grammaire. (Il peut être souhaitable de

commencer par ce point, pour être sûr d’avoir le temps de le traiter.)

II. Première partie de l’épreuve orale : exposé sur l’un des textes du

descriptif

Cette partie de l’épreuve, qui doit durer douze minutes, se déroule en trois

temps.

1. Lecture expressive (deux points)

Vous situez brièvement le texte dans l’œuvre ou dans le parcours. C’est en

quelque sorte votre introduction.

Vous lisez le texte à voix haute, de façon correcte et expressive.

2. Explication linéaire (huit points)

Vous présentez le thème du texte et sa forme (genre, type, registre).

Vous décrivez le mouvement du texte, c’est-à-dire les différentes étapes qui le

composent.

Vous proposez une piste de lecture, une problématique.

Vous développez l’explication linéaire en reliant la forme et le sens.

Vous proposez une conclusion qui récapitule l’explication et ouvre la perspective.

3. Question de grammaire (deux points)

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Il s’agit de proposer l’analyse syntaxique2 d’une courte phrase ou d’une partie

de phrase, en réponse à la question posée par ‘examinateur.

Afin d’analyser la syntaxe des phrases, pour définir la fonction des mots et

groupes de mots, il est nécessaire d’avoir recours aux manipulations syntaxiques

de base (déplacement, effacement, substitution, ajout, encadrement). Des

manipulations peuvent donc être demandées lors des épreuves orales.

III. Deuxième partie de l’épreuve orale : présentation de l’œuvre choisie par

le candidat et entretien

Cette deuxième partie dure huit minutes et est évaluée sur huit points.

Au cours du mois de mai, vous aurez choisi, parmi les œuvres étudiées en classe

ou les lectures cursives, celle que vous souhaitez présenter à l’examinateur. Vous

aurez donc eu l’occasion de préparer en amont ce que vous direz au moment de

l’épreuve.

Cette deuxième partie de l’épreuve orale se déroule en deux temps.

1. Brève présentation de l’œuvre et du choix (deux minutes environ)

Présentez brièvement l’œuvre que vous avez retenue et les raisons de votre

choix. On attend une implication personnelle : vous devez montrer que vous n’avez

pas choisi par défaut, que vous avez perçu les enjeux de l’œuvre, si possible qu’elle

vous a touché.

2. Entretien avec l’examinateur (six minutes environ)

L’examinateur vous pose des questions, à partir de votre présentation, pour vous

encourager à développer vos impressions de lecture et pour s’assurer de votre

connaissance de l’œuvre.

Vous devez justifier vos choix en donnant des exemples variés. Proposez

appréciation critique, présentez une émotion ou un jugement d’ordre esthétique.

Tissez des relations entre l’œuvre choisie et d’autres éléments abordés dans

l’année ainsi que des activités diversifiées. Par exemple, référez-vous au carnet

de lecture, aux écrits d’appropriation, aux sorties culturelles.

Montrez également que vous vous êtes approprié, à travers cette lecture, des

connaissances sur les genres, l’histoire littéraire et culturelle, l’histoire des arts,

les médias...

2 La syntaxe est la partie de la grammaire qui étudie les relations entre les mots et unités constituant une proposition ou une phrase.

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Séance 6 : Explication de l’oral : entraînement à partir du poème de

Maurice Scève

Lecture : articulation, rythme, respect du texte et de sa ponctuation,

expressivité

Explication linéaire :

➢ Identification d’un enjeu important du texte dans le projet de lecture

➢ Analyse argumentée qui suit le mouvement du texte, progression de

l’analyse

➢ Mise en évidence des procédés d’écriture marquants, des effets produits

➢ Mobilisation pertinente d’une culture littéraire (genre, mouvement,

littéraire, contexte historique ou culturel…)

➢ Clarté et cohérence des explications, qualité de l’expression

Séance 6 : Explication de l’oral : entraînement à partir du poème de

Maurice Scève

Lecture : articulation, rythme, respect du texte et de sa ponctuation,

expressivité

Explication linéaire :

➢ Identification d’un enjeu important du texte dans le projet de lecture

➢ Analyse argumentée qui suit le mouvement du texte, progression de

l’analyse

➢ Mise en évidence des procédés d’écriture marquants, des effets produits

➢ Mobilisation pertinente d’une culture littéraire (genre, mouvement,

littéraire, contexte historique ou culturel…)

➢ Clarté et cohérence des explications, qualité de l’expression

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Séance 7 : LL Blason du beau tétin / Blason du laid tétin (à présenter à

la classe)

Séquence 5 : Blasons

Clément Marot, « Blason du beau tétin », Épigrammes, 1535

Vie de Clément Marot (1496-1544)

Né à Cahors, Clément Marot est le fils de Jean Marot,

poète qui appartenait au courant des Grands rhétoriqueurs.

Ceux-ci jouaient avec le langage, poussaient jusqu’au bout

les règles de la rhétorique et de l’ornementation du discours.

Jean Marot a enseigné tout cet art à son fils.

Dès 10 ans Clément Marot suit son père à la cour

d’Anne de Bretagne, femme de Louis XII. À dix-neuf ans, il

est nommé valet de chambre de la sœur de François Ier,

puis passe au service du roi. Il considère que la Cour a été

sa « maîtresse d’école ».

En 1515, il publie son premier recueil de poèmes, Le Temple de Cupido,

s’inspirant de la tradition poétique du Moyen-âge. Il participe aussi aux travaux des

humanistes : il traduit des poètes latins puis édite des poèmes (ceux de François Villon

et ceux de son père).

Il est, comme Marguerite de Navarre, proche du milieu des Évangélistes, qui

sont séduits par les thèses de Luther et veulent réformer l’Eglise catholique. Cela lui

vaut des ennuis. En 1526, il est incarcéré au Châtelet pour avoir « mangé le lard en

Carême ». Ce crime pouvait être puni de mort. Il est libéré grâce à l’intervention de la

reine. En 1527, il est à nouveau incarcéré pour avoir délivré un homme que les soldats

du guet (c’est-à-dire la police municipale) emmenaient en prison. Comme il est alors

valet de chambre du roi, celui-ci lui accorde sa grâce.

De 1527 à 1534, il est le poète officiel de la Cour. Il invente des genres

nouveaux : c’est à lui que l’on doit l’apparition en France du sonnet, de l’églogue3, de

l’élégie4, de l’ode5. Il écrit aussi des épigrammes6, imitées de la poésie latine.

En 1545 éclate l’affaire des Placards : on a placardé sur la porte de la chambre

du roi des affiches de propagande pour les idées réformées. François Ier sent son

autorité politique atteinte et choisit le clan catholique. Les persécutions des protestants

3 Poème lyrique en vers, de longueur variable, évoquant la vie des bergers. 4 Poème lyrique dont le sujet est triste (il s’agit souvent de plainte amoureuse ou de l’évocation de la mort d’un être cher). 5 Long poème découpé en strophes de longueur égales, en octosyllabes, adressés à des grands personnages ou à des valeurs. C’est un poème aussi caractérisé par sa langue soutenue et imagée. 6 Poème satirique.

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commencent. Marot est considéré comme un suspect et quitte Paris. Il va d’abord à

Pau, où il apprend qu’il a été condamné en son absence : il fuit à l’étranger, en Italie.

Le 10 décembre 1536, il peut enfin rentrer en France car un édit autorise le

retour des suspects. Cependant il poursuit un travail dangereux en traduisant des

psaumes : l’Eglise ne veut pas que les hommes créent des prières personnelles,

comme les protestants le demandent. Les persécutions reprenant, Marot s’exile à

Genève. Il y écrit des psaumes sous la direction de Calvin.

Son indépendance s’accorde mal avec la rigueur de Genève, on lui reproche

notamment d’avoir joué aux cartes, ce que la morale de la Réforme interdit. Il doit à

nouveau partir.

Il meurt à Turin en 1544.

Séquence 5 : Blasons

Clément Marot, « Blason du beau tétin », Épigrammes, 1535

Mouvement littéraire : l’Humanisme

La Renaissance est une période de mutations culturelles. Celles-ci se

caractérisent notamment par une ouverture sur le reste du monde, pour des raisons

commerciales. Le développement des villes entraîne un changement dans le niveau

d’instruction des populations. À côté des grandes universités (existant depuis le Moyen

Age), se développent dans les villes des collèges, plus accessibles.

Ces bouleversements culturels constituent le contexte dans lequel se

développe l’humanisme, au cours du XVème siècle et du XVIème, en Europe.

En latin, l’expression litterae humaniores désigne « l’étude des lettres qui rend

plus digne du nom d’homme ». De là vient le mot « humanisme » : le mouvement a

pour but de s’approcher d’un modèle de perfection humaine grâce à l’effort de la

raison. Les humanistes souhaitent s’inspirer de la sagesse antique. Ils veulent aussi

réformer l’enseignement.

Dès le XIVème siècle, en Italie, des savants, comme Pétrarque, retrouvent des

manuscrits anciens et traduisent en latin des textes grecs. Ils essaient d’imiter les

auteurs antiques en écrivant en italien. Grâce aux voyages des professeurs et des

étudiants, aux campagnes militaires, aux échanges commerciaux et à la diffusion des

manuels scolaires, l’humanisme se répand en Europe.

En France, la première caractéristique de ce mouvement est de s’intéresser aux

textes anciens. Ils sont commentés et traduits. De nombreux dictionnaires et ouvrages

de grammaire sont publiés. On réfléchit sur la langue (latine, grecque, hébraïque).

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Par ailleurs, la langue française est de plus en plus unifiée. Elle devient, à la

place du latin, la langue des textes de lois. C’est aussi désormais la langue de

l’enseignement, et surtout celle de la littérature. Enfin, depuis l’invention de

l’imprimerie, en 1448, et sa propagation en France, dès 1470, les livres se diffusent de

plus en plus. On invente le format de poche (in-octavio).

Les humanistes sont souvent en butte aux critiques des autorités religieuses.

En effet, ils appliquent aux textes bibliques les mêmes méthodes d’analyse qu’aux

textes antiques : ils les soumettent à un examen critique. Cela apparaît comme un

sacrilège aux yeux du clergé.

La réflexion pédagogique a également sa place dans l’humanisme. Les

penseurs considèrent qu’il faut équilibrer les disciplines intellectuelles (langues,

sciences, musique), physiques (jeux, sports, danse) et morales (religion, règles de vie

sociale).

Les humanistes ont un esprit cosmopolite. Ils croient dans le progrès de

l’homme. Ils sont généralement pacifistes.

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Clément Marot, « Blason du beau tétin », Épigrammes, 1535

Tétin refait7, plus blanc qu’un œuf,

Tétin de satin blanc tout neuf,

Tétin qui fais honte à la rose,

Tétin plus beau que nulle chose ;

Tétin dur, non pas tétin, voire8,

Mais petite boule d’ivoire,

Au milieu duquel est assise

Une fraise ou une cerise,

Que nul ne voit, ne touche aussi,

Mais je gage9 qu’il est ainsi.

Tétin donc au petit bout rouge

Tétin qui jamais ne se bouge,

Soit pour venir, soit pour aller,

Soit pour courir, soit pour baller10.

Tétin gauche, tétin mignon,

Toujours loin de son compagnon,

Tétin qui portes témoignage

Du demeurant du personnage11.

Quand on te voit, il vient à maints12

Une envie13 dedans les mains

De te tâter, de te tenir ;

Mais il se faut bien contenir14

D’en approcher, bon gré ma vie,

Car il viendrait une autre envie.

7 Refait : nouvellement formé 8 Voire : à vrai dire 9 Je gage : je parie 10 Baller : danser 11 Du demeurant du personnage : de tout le reste de la personne 12 Maints : beaucoup de personnes 13 Il faut prononcer « envie » en trois syllabes, en prononçant le « e » final après une diérèse. 14 Mais il faut bien se retenir

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Ô Tétin ni grand, ni petit,

Tétin mûr, Tétin d’appétit,

Tétin qui nuit et jour criez

« Mariez-moi tôt15, mariez ! »

Tétin qui t’enfles, et repousses

Ton gorgias16 de deux bons pouces17,

À bon droit heureux on dira

Celui qui de lait t’emplira,

Faisant d’un tétin de pucelle18

Tétin de femme entière et belle.

15 Tôt : vite 16 Gorgias : corsage (le gorgias était une pièce de lingerie du costume féminin, destinée à orner le cou, les épaules et une partie du corsage) 17 Soit environ cinq centimètres. 18 Pucelle : jeune fille

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Séance 7 – Clément Marot, « Blason du beau tétin », Epigrammes, 1535

Durant la Renaissance, les Humanistes souhaitent s’approcher d’un modèle de

perfection humaine grâce à la culture et à l’effort de la raison. Ils admirent les

auteurs de l’Antiquité. Ils les traduisent et s’en inspirent pour composer leurs

œuvres. Ainsi, Clément Marot publie en 1535 Épigrammes, recueil de poèmes

satiriques imités du latin. On y trouve le « Blason du beau tétin », poème de trente-

quatre octosyllabes aux rimes plates louant le sein d’une jeune fille. Quoique le

poème ne soit pas divisé en strophes, on peut y distinguer deux mouvements. Les

dix-huit premiers vers célèbrent la beauté de ce sein, tandis que les seize derniers

évoquent le désir qu’il suscite. Nous nous demanderons comment, à travers cette

description, le poème fait l’éloge de la femme.

Des vers 1 à 18, le poète célèbre le « beau tétin ».

Citations Procédés Interprétations

« Blason du beau tétin » Le titre met l’accent la

beauté de l’objet décrit.

Insistance sur le sein

décrit dans le poème.

C’est la caractéristique

du blason, qui met

l’accent sur une partie

du corps.

Vers 1 à 5 Anaphore du mot

« Tétin » dans les cinq

premiers vers

D’ailleurs, dans

l’ensemble du poème…

on trouve dix-huit

occurrences du mot

« tétin », souvent en

anaphore.

« Tétin refait, plus blanc

qu’un œuf » (vers 1)

Comparaison

Hyperbole

La comparaison avec un

œuf, qui renvoie à la

naissance, souligne la

jeunesse de la femme

célébrée : le poète fait

l’éloge d’une jeune fille,

dans la fleur de sa

beauté.

Par ailleurs la blancheur

est connotée

positivement : la

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blancheur de la peau est

un critère de beauté au

XVIe siècle. L’hyperbole,

qui accentue cette

blancheur, renforce

donc l’éloge.

« Tétin de satin blanc

tout neuf » (v.2)

Rime « œuf » et

« neuf » (v.1 et 2)

Insistance sur cette

jeunesse

Comparaison La comparaison avec le

satin blanc est

méliorative à double

titre : la couleur suggère

la pureté, la perfection ;

tandis que le satin

renvoie à la douceur.

Se mêle donc à l’éloge de

la beauté une part de

sensualité.

« Tétin qui fais honte à la

rose » (v.3)

Verbe conjugués à la

deuxième personne

(qui permet de

comprendre que l’emploi

du mot « tétin », au

début de chaque vers,

est une apostrophe)

Le sein est personnifié

et le poète s’adresse à

lui. Cela souligne

l’importance de la partie

du corps qui est

blasonnée.

Hyperbole Accentue la perfection

de ce sein, puisqu’il est

plus beau que la plus

belle des fleurs.

Le choix de la rose n’est

pas anodin, dans la

mesure où elle est

généralement associée à

l’amour.

Par ailleurs, cette fleur

est fréquemment

célébrée pour son

parfum, de sorte que ce

vers, comme le

précédent, comporte une

évocation des sens

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(l’odorat après le

toucher).

« Tétin plus beau que

nulle chose » (v.4)

Hyperbole En concluant l’anaphore,

ce vers résume l’éloge

fait dans les vers

précédent à l’aide de

l’hyperbole.

« Tétin dur, non pas

tétin, voire,

Mais petite boule

d’ivoire,

Au milieu duquel est

assise

Une fraise ou une cerise,

Que nul ne voit, ne

touche aussi,

Mais je gage qu’il est

ainsi. » (v.5 à 10)

Modification du rythme

en raison des

enjambements, qui

créent une accélération

Cette accélération

souligne plaisamment la

chute de la première

partie : après la longue

description, précise,

vient l’aveu de

l’ignorance du poète. Le

lecteur comprend donc

que la vue du corsage

suscite l’imagination du

poète et donc son désir.

« Tétin dur, non pas

tétin, voire,

Mais petite boule

d’ivoire » (v.5 et 6)

Comparaison La comparaison à l’ivoire

reprend l’éloge de la

blancheur du sein

présentée dans les vers

précédents, éloge

accentué par le fait que

l’ivoire est un matériau

précieux. S’y ajoute

l’idée de fermeté,

annoncée par l’adjectif

« dur ». La jeunesse de

la femme décrite est

ainsi à nouveau évoquée.

La présence de

l’adverbe « voire »…

… marque la subjectivité

du poète qui fait l’éloge

du sein.

« Au milieu duquel est

assise

Une fraise ou une

cerise » v.7-8

Personnification Donne une importance

considérable au « tétin »

Métaphores Ces métaphores de

fruits ajoutent une

autre sensation à la

description : après la

vue, le toucher et

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l’odorat, le goût est

convoqué. La sensualité

est ainsi fortement

présente.

De plus, l’insistance sur

la couleur rouge, qui

contraste avec la

blancheur du sein, en

met la perfection en

relief.

« Que nul ne voit, ne

touche aussi

Mais je gage qu’il est

ainsi » (v.9)

Deux négations

Conjonction « mais » qui

marque l’opposition +

une des deux seules

occurrences de la

première personne dans

le poème

Les négations insistent

sur la chasteté de la

jeune fille et l’opposition

souligne le désir du

poète. Cela annonce

plaisamment la chute,

dans laquelle s’exprime la

préférence pour une

femme qui connaît

l’amour charnel.

« Tétin donc au petit

bout rouge » (v.11)

La conjonction

« donc »…

… annonce une

conclusion. Ainsi, le vers

résume prosaïquement

les métaphores des

quatre vers précédents.

Cette rupture crée un

effet comique.

Reprise de l’adjectif

« petit », déjà présent

au vers 6. Comme au

vers 6, l’adjectifs est

suivi de la syllabe

« bou ». Cet effet

d’écho…

… insiste sur la finesse,

la petite taille d’un sein

de jeune fille.

« Tétin qui jamais ne se

bouge » (v.12)

Hyperbole Souligne la fermeté de

ce sein jeune

« Soit pour venir, soit

pour aller/ Soit pour

courir, soit pour baller »

(v.13-14)

Rythme régulier lié au

parallélisme, rime

intérieure

Le rythme enlevé de ces

vers reproduit le

mouvement. Le langage

poétique illustre donc le

propos et conduit le

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lecteur à imaginer, à son

tour, les mouvements de

la jeune fille.

« Tétin gauche, tétin

mignon » (v.15)

Dans un rythme binaire,

deux adjectifs qui

connotent la jeunesse

Gauche : peut renvoyer au

sein gauche opposé au

droit, mais connote aussi

la maladresse

Mignon : qui charme par sa

délicatesse, sa petitesse

Évoque l’enfance, la

jeunesse de celle dont le

sein est magnifié

« Toujours loin de son

compagnon » (v.16)

Personnification et

insistance liée à l’emploi

de l’adverbe

« toujours »

La personnification

accentue l’éloge : le sein

apparaît comme le

destinataire du poème.

Par ailleurs, la

description physique (de

petits seins écartés) est

conforme aux canons de

beauté du XVIème siècle

et ressortit donc à

l’éloge.

« Tétin qui portes

témoignage

Du demeurant du

personnage » (v.17-18)

Verbe conjugué à la

deuxième personne

Personnifie le sein et lui

donne de l’importance.

C’est accentué par le

sens du vers, qui fait du

sein l’emblème de la

femme décrite.

Rime entre

« témoignage » et

« personnage »

Met l’accent sur la

fonction métonymique du

blason : l’éloge du sein

conduit à l’éloge de la

femme.

Ce blason présente la perfection d’un sein, dont la description est longuement

détaillée. Cette précision du portrait conduit à une évocation du désir que le « beau

tétin » fait naître.

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Des vers 19 à 34, le poème évoque le désir que fait naître la beauté du

sein.

Citations Procédés Interprétations

« Quand on te voit, il

vient à maints/ Une

envie dedans les mains »

(v.19-20)

Paronomase placée à la

rime

Le jeu sur les mots

accentue l’expression du

désir

« De te tâter, de te

tenir » (v.21)

Deux verbes du champ

lexical du toucher (qui se

joignent aux mots

« mains » au vers 19,

« dur » au vers 5 et

« touche » au vers 9).

L’importance du sens du

toucher insiste sur le

désir du poète.

Allitération en [t] Le jeu sur les sonorités

fait écho au mot

« tétin » et met l’accent

sur le geste de la main.

« Mais il se faut bien

contenir

D’en approcher, bon gré

ma vie » (v.22-23)

Rupture marquée par la

conjonction « mais »

Présence de la première

personne (deuxième

occurrence dans le

poème)

Opposition avec la

sensualité évoquée

précédemment, pour

exprimer une

interdiction

« Car il viendrait une

autre envie » (v.24)

Euphémisme L’effet comique de

l’euphémisme souligne le

désir

« Ô Tétin ni grand, ni

petit » (v.25)

Apostrophe Célébration du sein, qui

est le destinataire du

poème

Négations en rythme

binaire

Insistent sur la

perfection du sein

« Tétin mûr, Tétin

d’appétit » (v.26)

Rythme binaire utilisant

deux termes du champ

lexical du goût

(reprenant l’évocation de

la « fraise » ou la

« cerise »)

La sensualité est

accentuée par l’emploi du

champ lexical du goût

dans la description.

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« Tétin qui nuit et jour

criez/ Mariez-moi tôt,

mariez ! » (v.27-28)

Hyperbole

Discours direct qui

conduit à une

personnification du sein

(prosopopée19)

Répétition du verbe

« mariez » (avec

allitération en [m] qui

insiste sur ce mot)

Le poète imagine le désir

pressant de la jeune

fille, comme si son

propre désir trouvait un

écho auprès d’elle.

Par ailleurs, la présence

du discours direct

ajoute un cinquième sens

dans le blason, celui de

l’ouïe.

« Tétin qui t’enfles, et

repousses

Ton gorgias de deux

bons pouces » (v.29-30)

Verbes à la deuxième

personne du singulier

Deux occurrences de la

deuxième personne

Personnification du sein

qui lui confère une

grande importance

Enjambement L’allongement du rythme

accompagne le

gonflement du sein, ce

qui peut faire sourire le

lecteur.

« À bon droit heureux on

dira/ Celui qui de lait

t’emplira/ Faisant d’un

tétin de pucelle / Tétin

de femme entière et

belle »

Ces quatre vers

ressemblent à une

morale en raison des

effets de généralisation

(« on », « celui qui »).

D’ailleurs, on trouve

plusieurs tournures

impersonnelles dans le

poème (« il vient », « il

se faut », « il

viendrait », « on dira »)

alors qu’il n’y a que deux

occurrences de la

première personne.

Révèle qu’il ne s’agit pas

vraiment d’un blason

appartenant à la lyrique

amoureuse (où le poète

s’adresserait à la femme

aimée) mais d’un propos

général sur le désir

Opposition entre

« pucelle » et « femme

entière »

La jeune fille, encore

vierge, est finalement

présentée comme

incomplète.

1919 Figure de style qui consiste à faire parler un mort, une abstraction, un objet ou un être inanimé.

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Périphrase à valeur

d’euphémisme comique

pour désigner l’amant

(« celui qui de lait

t’emplira »)

Le poème se termine par

une sorte d’aphorisme,

mais celui-ci n’a rien de

moral. Il s’agit d’une

pointe comique, qui loue

l’amour charnel.

Marot renoue grâce à

cette chute avec la

tradition de l’épigramme.

Passage du présent au

futur dans les derniers

vers du poème

Le changement de temps

souligne le passage de la

jeunesse à l’âge adulte

« Tétin de femme

entière et belle »

Le dernier vers se

termine par deux

adjectifs qui associent la

beauté et la plénitude à

la maturité.

Célébration de la femme

mûre, présentée comme

supérieure à la jeune

fille.

Ce blason du sein insiste donc de façon plaisante sur le désir à travers l’évocation

des sens. Le jeu poétique sur le rythme et les sonorités accompagne le jeu sur la

sensualité. Cette insistance sur le désir prépare la leçon du poème, qui traite de

la transformation de jeune fille en femme.

Conclusion :

Ce poème décrit le sein d’une femme pour en faire l’éloge. Le blason célèbre

la perfection de ce « beau tétin », louant à la fois sa forme, sa blancheur et sa

fermeté. Cette description précise conduit à une évocation du désir : l’importance

des sens et le jeu sur le langage poétique suggèrent de façon plaisante la convoitise

du poète. De là s’opère une distinction entre la jeune fille et la femme mûre : si la

première est louée pour sa beauté, la seconde est préférée puisqu’elle est associée

à la satisfaction du désir. Clément Marot ne compose donc pas un blason lyrique :

il s’agit surtout d’un jeu littéraire, où l’éloge possède une dimension comique. Il

s’inscrit ainsi dans la tradition latine de l’épigramme, proposant un modèle de

blason satirique en français. Georges Brassens, quatre siècles plus tard, reprend

un modèle similaire en composant « Le Blason », chanson où la célébration d’une

femme est surtout le prétexte à un jeu sur l’évocation de la concupiscence.

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Séance 8 : Clément Marot, « Blason du laid tétin », Épigrammes, 1535

Tétin qui n’as rien que la peau,

Tétin flac1, tétin de drapeau2,

Grand’tétine, longue tétasse,

Tétin, dois-je dire besace3 ?

Tétin au grand vilain bout noir 5

Comme celui d’un entonnoir,

Tétin qui brimballe4 à tous coups,

Sans être ébranlé ni secoux5.

Bien se peut vanter qui te tâte

D’avoir mis la main à la pâte. 10

Tétin grillé, tétin pendant,

Tétin flétri, tétin rendant

Vilaine bourbe en lieu de lait,

Le Diable te fit bien si laid !

Tétin pour tripe réputé6, 15

Tétin, ce cuidé-je7, emprunté

Ou dérobé en quelque sorte

De quelque vieille chèvre morte.

Tétin propre pour en Enfer

Nourrir l’enfant de Lucifer ; 20

1 Flac : flasque, affaissé 2 De drapeau : comme une guenille 3 Besace : sac de matière souple, jeté sur l’épaule 4 Qui brimballe : qui bouge tout le temps 5 Secoux (prononcé « secous’ ») : secoué 6 Pour tripe réputé : que l’on prend pour des boyaux 7 Ce cuidé-je : à ce que je crois

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Tétin, boyau long d’une gaule8,

Tétasse à jeter sur l’épaule

Pour faire – tout bien compassé9 –

Un chaperon10 du temps passé,

Quand on te voit, il vient à maints 25

Une envie dedans les mains

De te prendre avec des gants doubles11,

Pour en donner cinq ou six couples12

De soufflets sur le nez de celle

Qui te cache sous son aisselle. 30

Va, grand vilain tétin puant,

Tu fournirais bien en suant

De civettes13 et de parfum

Pour faire cent mille défunts.

Tétin de laideur dépiteuse, 35

Tétin dont Nature est honteuse,

Tétin des vilains le plus brave,

Tétin dont le bout toujours bave,

Tétin fait de poix et de glu,

Bren14, ma plume, n’en parlez plus ! 40

Laissez-le là, ventre saint George,

8 Long comme une canne à pêche 9 Tout bien considéré 10 Capuchon muni d’une bande d’étoffe pendant par derrière 11 Gants doubles : gants deux fois plus grands 12 Couples : paires 13 Odeur très forte qui vient de la glande prélevée sur l’animal du même nom (à petite dose, utilisée en parfumerie) 14 Bren : terme grossier pour désigner des excréments

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56

Vous me feriez rendre ma gorge15.

15 Jeu de mots : « rendre gorge » signifie « mourir », mais Marot joue avec la référence à la poitrine que désigne aussi le mot « gorge »

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57

Ecrire un SONNET

Il y a une colonne à cocher à gauche pour vous, vous cochez ce que vous pensez

avoir fait.

La colonne à cocher à droite m'est réservé.

Evidemment, votre poème sera constitué de deux quatrains, deux tercets en

alexandrins avec rimes identiques des quatrains et alternance

féminin/masculin. Et dans les tercets, libre à vous de ne garder que deux

rimes ou d’en utiliser trois mais attention, pas de distique à la fin.

Le thème est CARPE DIEM

I Les champs lexicaux

Champ lexical N° 1

PREMIER THEME (l’être aimé, un

thème concret)

Champ lexical N° 2

DEUXIEME THEME (un élément, un

sens, des éléments ou des sens etc.

quelque chose de plus abstrait)

Champ lexical N° 3

DOMAINE COMMUN

DOMAINE HORS

SUJET/INCONGRU

II Les figures de style

Croisez les champs lexicaux pour former des figures de style ( 5 ou 6)

Soulignez-les dans le texte

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58

élève

Nom de la

figure de style

Je cite ce

que j'ai

mis dans

mon

poème

prof

élève

Nom de la figure

de style

Je cite ce

que j'ai

mis dans

mon

poème

prof

métaphore parallélisme

litote Enumération ou

gradation

comparaison anaphore

chiasme parataxe

hyperbole hypotypose

oxymore euphémisme

polyptote personnification

III Travail des sonorités

élève

Nom du

procédé

Je cite ce

que j'ai mis

dans mon

poème

prof

élève

Nom du

procédé

Je cite ce

que j'ai mis

dans mon

poème

prof

assonance alexandrins

assonance rejet

allitération contre-rejet

allitération enjambement

chiasme diérèse

chiasme Rime interne

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Pour le professeur : évaluation

Eléments évalués Appréciation Notation

LE SONNET

La forme est-elle respectée ?

/ 10

I Les champs lexicaux

/10

II Les figures de style

/10

III Travail des sonorités

/10

Effets produits sur le lecteur

( Y a t-il une tonalité ? Est-ce que je

comprends bien le poème ? Est-ce que

cela produit des émotions chez le

lecteur ? etc. )

/10

Appréciation finale note globale

/40

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Séance 9 : fortune du blason aux XIXe et XXIe siècles

Charles Baudelaire, « La Chevelure », Les Fleurs du Mal, 1857

Ô toison, moutonnant jusque sur l’encolure !

Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir !

Extase ! Pour peupler ce soir l’alcôve obscure

Des souvenirs dormant dans cette chevelure, 4

Je la veux agiter dans l’air comme un mouchoir !

La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,

Tout un monde lointain, absent, presque défunt,

Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique ! 8

Comme d’autres esprits voguent sur la musique,

Le mien, ô mon amour ! nage sur ton parfum.

J’irai là-bas où l’arbre et l’homme, pleins de sève,

Se pâment longuement sous l’ardeur des climats ; 12

Fortes tresses, soyez la houle qui m’enlève !

Tu contiens, mer d’ébène, un éblouissant rêve

De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts :

Un port retentissant où mon âme peut boire 16

À grands flots le parfum, le son et la couleur ;

Où les vaisseaux, glissant dans l’or et dans la moire,

Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire

D’un ciel pur où frémit l’éternelle chaleur. 20

Je plongerai ma tête amoureuse d’ivresse

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Dans ce noir océan où l’autre est enfermé ;

Et mon esprit subtil que le roulis caresse

Saura vous retrouver, ô féconde paresse, 24

Infinis bercements du loisir embaumé !

Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues,

Vous me rendez l’azur du ciel immense et rond ;

Sur les bords duvetés de vos mèches tordues 28

Je m’enivre ardemment des senteurs confondues

De l’huile de coco, du musc et du goudron.

Longtemps ! toujours ! ma main dans ta crinière lourde

Sèmera le rubis, la perle et le saphir, 32

Afin qu’à mon désir tu ne sois jamais sourde !

N’es-tu pas l’oasis où je rêve, et la gourde

Où je hume à longs traits le vin du souvenir ?

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Baudelaire, « Un hémisphère dans une chevelure », Le Spleen de Paris,

1869

Un hémisphère dans une chevelure

Laisse-moi respirer longtemps, longtemps, l’odeur de tes cheveux, y plonger

tout mon visage, comme un homme altéré dans l’eau d’une source, et les agiter avec

ma main comme un mouchoir odorant, pour secouer des souvenirs dans l’air.

Si tu pouvais savoir tout ce que je vois ! tout ce que je sens ! tout ce que

j’entends dans tes cheveux ! Mon âme voyage sur le parfum comme l’âme des autres 5

hommes sur la musique.

Tes cheveux contiennent tout un rêve, plein de voilures et de mâtures ; ils

contiennent de grandes mers dont les moussons me portent vers de charmants

climats, où l’espace est plus bleu et plus profond, où l’atmosphère est parfumée

par les fruits, par les feuilles et par la peau humaine. 10

Dans l’océan de ta chevelure, j’entrevois un port fourmillant de chants

mélancoliques, d’hommes vigoureux de toutes nations et de navires de toutes

formes découpant leurs architectures fines et compliquées sur un ciel immense où

se prélasse l’éternelle chaleur.

Dans les caresses de ta chevelure, je retrouve les langueurs des longues 15

heures passées sur un divan, dans la chambre d’un beau navire, bercées par le roulis

imperceptible du port, entre les pots de fleurs et les gargoulettes

rafraîchissantes.

Dans l’ardent foyer de ta chevelure, je respire l’odeur du tabac mêlé à

l’opium et au sucre ; dans la nuit de ta chevelure, je vois resplendir l’infini de l’azur 20

tropical ; sur les rivages duvetés de ta chevelure je m’enivre des odeurs combinées

du goudron, du musc et de l’huile de coco.

Laisse-moi mordre longtemps tes tresses lourdes et noires. Quand je

mordille tes cheveux élastiques et rebelles, il me semble que je mange des

souvenirs. 25

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Union libre d’André Breton

Ma femme à la chevelure de feu de bois

Aux pensées d'éclairs de chaleur

A la taille de sablier

Ma femme à la taille de loutre entre les dents du tigre

Ma femme à la bouche de cocarde et de bouquet d'étoiles de dernière grandeur

Aux dents d'empreintes de souris blanche sur la terre blanche

A la langue d'ambre et de verre frottés

Ma femme à la langue d'hostie poignardée

A la langue de poupée qui ouvre et ferme les yeux

A la langue de pierre incroyable

Ma femme aux cils de bâtons d'écriture d'enfant

Aux sourcils de bord de nid d'hirondelle

Ma femme aux tempes d'ardoise de toit de serre

Et de buée aux vitres

Ma femme aux épaules de champagne

Et de fontaine à têtes de dauphins sous la glace

Ma femme aux poignets d'allumettes

Ma femme aux doigts de hasard et d'as de cœur

Aux doigts de foin coupé

Ma femme aux aisselles de martre et de fênes

De nuit de la Saint-Jean

De troène et de nid de scalares

Aux bras d'écume de mer et d'écluse

Et de mélange du blé et du moulin

Ma femme aux jambes de fusée

Aux mouvements d'horlogerie et de désespoir

Ma femme aux mollets de moelle de sureau

Ma femme aux pieds d'initiales

Aux pieds de trousseaux de clés aux pieds de calfats qui boivent

Ma femme au cou d'orge imperlé

Ma femme à la gorge de Val d'or

De rendez-vous dans le lit même du torrent

Aux seins de nuit

Ma femme aux seins de taupinière marine

Ma femme aux seins de creuset du rubis

Aux seins de spectre de la rose sous la rosée

Ma femme au ventre de dépliement d'éventail des jours

Au ventre de griffe géante

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Ma femme au dos d'oiseau qui fuit vertical

Au dos de vif-argent

Au dos de lumière

A la nuque de pierre roulée et de craie mouillée

Et de chute d'un verre dans lequel on vient de boire

Ma femme aux hanches de nacelle

Aux hanches de lustre et de pennes de flèche

Et de tiges de plumes de paon blanc

De balance insensible

Ma femme aux fesses de grès et d'amiante

Ma femme aux fesses de dos de cygne

Ma femme aux fesses de printemps

Au sexe de glaïeul

Ma femme au sexe de placer et d'ornithorynque

Ma femme au sexe d'algue et de bonbons anciens

Ma femme au sexe de miroir

Ma femme aux yeux pleins de larmes

Aux yeux de panoplie violette et d'aiguille aimantée

Ma femme aux yeux de savane

Ma femme aux yeux d'eau pour boire en prison

Ma femme aux yeux de bois toujours sous la hache

Aux yeux de niveau d'eau de niveau d'air de terre et de feu.

André Breton (1931)

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Georges Brassens, « Le Blason », 1972

Ayant avecque lui toujours fait bon ménage,

J’eusse aimé célébrer, sans être inconvenant,

Tendre corps féminin, ton plus bel apanage63,

Que tous ceux qui l’ont vu disent hallucinant. 4

C’eût été mon ultime chant, mon chant du cygne

Mon dernier billet doux, mon message d’adieu.

Or, malheureusement, les mots qui le désignent

Le disputent à l’exécrable, à l’odieux. 8

C’est la grande pitié de la langue française,

C’est son talon d’Achille et c’est son déshonneur,

De n’offrir que des mots entachés de bassesse

À cet incomparable instrument de bonheur. 12

Alors que tant de fleurs ont des noms poétiques,

Tendre corps féminin, c’est fort malencontreux

Que ta fleur la plus douce et la plus érotique

Et la plus enivrante en ait de si scabreux. 16

Mais le pire de tous est un petit vocable

De trois lettres, pas plus, familier, coutumier,

Il est inexplicable, il est irrévocable,

Honte à celui-là qui l’employa le premier. 20

Honte à celui-là qui, par dépit, par gageure,

Dota du même terme, en son fiel venimeux,

Ce grand ami de l’homme et la cinglante injure,

63 Apanage : ce qui appartient en propre à quelqu'un ou à quelque chose, ce qui en est le privilège

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66

Celui-là, c’est probable, en était un fameux. 24

Misogyne à coup sûr, asexué sans doute,

Au charme de Vénus absolument rétif,

Était ce bougre qui, toute honte bue, toute,

Fit ce rapprochement, d’ailleurs intempestif. 28

La malepeste soit de cette homonymie !

C’est injuste, madame, et c’est désobligeant

Que ce morceau de roi de votre anatomie

Porte le même nom qu’une foule de gens. 32

Fasse le ciel qu’un jour, dans un trait de génie,

Un poète inspiré, que Pégase soutient,

Donne, effaçant d’un coup des siècles d’avanie,

À cette vraie merveille un joli nom chrétien. 36

En attendant, madame, il semblerait dommage,

Et vos adorateurs en seraient tous peinés,

D’aller perdre de vue que, pour lui rendre hommage,

Il est d’autres moyens et que je les connais, 40

Et que je les connais.

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Séance 10 : Préparation au journal du lecteur : « Sonnets » de L. Labé,

1) En quoi cette femme est-elle exceptionnelle pour son temps ?

2) Pourquoi était-elle surnommée « La belle cordière » ?

3) Dans ses sonnets elle évoque son amour pour un homme. Qui pourrait-il

être ? Quelles qualités lui attribue-t-elle ?

4) Lisez la préface. Quelle idée générale développe-t-elle ? Relevez une

citation pour justifier votre réponse.

5) Combien de sonnets le recueil compte-t-il ?

6) En quoi le premier témoigne-t-il de l’éducation humaniste de Louise Labé ?

7) Une autre caractéristique de l’humanisme est l’attrait pour les cultures de

l’Antiquité. Relevez deux références mythologiques (dans deux poèmes

différents) et explicitez-les.

8) En vous aidant de la définition du terme élégiaque et en vous appuyant sur les

textes et le lexique, expliquez pourquoi on peut considérer la poésie de Louise

Labé comme élégiaque.

L’adjectif élégiaque désigne un ton, un thème, un poème exprimant une

plainte douloureuse, la mélancolie, ou un poète qui a écrit des élégies

9) Lisez le poème d’Olivier de Magny présenté ci-dessous.

Ô beaux yeux bruns, ô regards détournés

Ô chauds soupirs, ô larmes épandues,

Ô noires nuits vainement attendues

Ô jours luisants vainement retournés !

Ô tristes plaints, ô désirs obstinés,

Ô temps perdu, ô peines dépendues,

Ô mille morts en mille rets tendues,

Ô pires maux contre moi destinés !

Ô pas épars, ô front, ardente flamme

Ô douce erreur, ô pensers de mon âme

Qui çà, qui là, me tournez nuit et jour,

Ô vous mes yeux, non plus yeux mais fontaines,

Ô dieux, ô cieux, et personnes humaines,

Soyez pour dieu témoins de mon amour.

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Quel sonnet de Louise Labé y répond ? Quelle supposition pouvez-vous donc faire ?

8) Louise Labé recourt à plusieurs métaphores filées pour qualifier l’amour.

Retrouvez-les en précisant le poème concerné.

- Une métaphore animalière :

- Une métaphore médicale :

- Une métaphore climatique :

- Une autre de votre choix :

11) Lisez les sonnets X, XVI et XIX. Ils proposent sensiblement le même récit de

vie. De quoi s’agit-il ?

13) Quelle figure de style domine dans le sonnet VIII ? Comment l’interprétez-

vous ?

Cherchez un autre poème qui utilise le même procédé.

14) En quoi peut-on dire que le sonnet XXIV propose, en quelque sorte, la leçon à

tirer du recueil ?

15) Louise Labé évoque la dualité de l’amour qui est à la fois source de bonheur

et de douleur. Complétez la grille de mots croisés ci-dessous pour retrouver des

termes appartenant au champ lexical de cette douleur.

SUR LE JOURNAL DU LECTEUR :

Lisez les vingt-quatre sonnets de Louise Labé.

Dans votre journal de lecteur, proposez un abécédaire pour accompagner votre

lecture du recueil.

Sélectionnez dix lettres de l’alphabet, initiales de dix mots correspondant aux

idées qui vous paraissent les plus importantes pour qualifier le recueil de Louise

Labé.

Pour chaque lettre, indiquez le mot choisi. Expliquez brièvement pourquoi il vous

semble représentatif du recueil. Illustrez ce mot par la citation d’un sonnet de

Louise Labé (dont vous indiquerez la référence) et par une illustration

(référencée).

Soyez attentif à la présentation et au caractère esthétique de votre

abécédaire.

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Vie de Louise Labé (1524 ?-1566)

On connaît très peu la vie de Louise Labé,

à tel point que certains chercheurs ont avancé

l’hypothèse qu’elle n’a pas réellement existé,

qu’elle est une création littéraire de ses

contemporains.

D’après ce que l’on sait, Louise Labé est née

à Lyon en 1524. Son père est un riche artisan,

fabricant de cordes. Aussi est-elle surnommée

« la belle cordière ».Elle reçoit une bonne

éducation : elle lit le latin et l’italien, connaît la

musique (elle joue du luth et compose) et elle est

réputée habile écuyère. On suppose qu'elle a

participé à un tournoi devant le futur Henri II.

En 1543, elle épouse Ennemont Perrin, un

riche cordelier. Elle se consacre entièrement à

ses activités littéraires. Appartenant au cercle de Maurice Scève et Pernette du

Guillet, elle reçoit dans son salon les lettrés lyonnais ou les humanistes parisiens

fréquentant la ville, où abondent les imprimeurs.

Cette éducation et son mode de vie relativement indépendant lui valent la

réprobation de certains de ses contemporains.

On suppose qu’elle est tombée amoureuse d’un homme à l’âge de seize ans et

qu’il l’aurait délaissée. Certains commentateurs ont supposé qu’il s’agissait d’un

gentilhomme de la suite royale. Cependant, il est possible que ce que l’on considère

aujourd’hui comme une histoire d’amour ne soit qu’une extrapolation à partir de

ses œuvres, qui expriment la joie de l’amour et la souffrance de l’absence.

Elle semble aussi avoir entretenu une liaison avec le poète Olivier de Magny,

vers 1553. Elle a, quoi qu’il en soit, collaboré avec ce poète, comme avec Jacques

Peletier du Mans, autour de l’atelier de l’imprimeur Jean de Tournes.

Entre 1545 et 1555, elle compose le Débat de Folie et d’Amour, trois

élégies64 et vingt-trois sonnets. Ses Œuvres ont paru en 1555 et ont été rééditées

en 1556, assorties d’un ensemble d’hommages de poètes contemporains.

Elle meurt en 1566, dans sa maison de campagne de Parcieux, au nord de

Lyon.

64 Élégie : poème lyrique exprimant une plainte douloureuse, des sentiments mélancoliques.

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71

Séquence4 : Blasons - Sonnets de Louise Labé

Exploration du recueil en classe avant la lecture cursive

1. Lisez la préface. Quelle idée générale développe-t-elle ? Relevez une citation

pour justifier votre réponse.

Selon la préface, les femmes doivent montrer leur talent d’écrivains, bien plus

important et honorable que les activités futiles qui leur sont habituellement

réservées. L’étude et la création des femmes seront profitables à tous,

puisqu’elles pousseront aussi les hommes à s’améliorer, de crainte d’être surpassés

par les femmes.

« Étant le temps venu, Mademoiselle, que les sévères lois des hommes n’empêchent

plus les femmes de s’appliquer aux sciences et disciplines : il me semble que celles

qui ont la commodité, doivent employer cette honnête liberté que notre sexe a

autrefois tant désirée, à icelles apprendre et montrer aux hommes le tort qu’ils

nous faisaient en nous privant du bien et de l’honneur qui nous en pouvaient venir »

2. Combien de sonnets le recueil compte-t-il ?

En quoi le premier témoigne-t-il de l’éducation humaniste de Louise Labé ?

Le recueil compte vingt-quatre sonnets de Louise Labé, et un dernier qui lui est

attribué mais dont il n’est pas certain qu’elle soit l’auteur.

Le premier sonnet est écrit en italien. Il témoigne de l’éducation humaniste de

Louise Labé, puisqu’elle est capable d’écrire en italien, la langue de Pétrarque.

3. Une autre caractéristique de l’humanisme est l’attrait pour les cultures de

l’Antiquité.

Relevez deux références mythologiques (dans deux poèmes différents) et

explicitez-les.

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- Sonnet III : Amour, c’est-à-dire Éros, le fils d’Aphrodite. Il est ici

représenté sous sa caractéristique classique d’archer pour évoquer le coup

de foudre. On le retrouve dans les sonnets IV, XI, XXIII.

- Sonnet V : est évoquée Vénus, à la fois déesse et astre

- Sonnet VI : Flore, déesse romaine des fleurs et du printemps (le plus beau

don de Flore est la rose). Aurore, déesse de l’Aurore. Beauté de la nature

qui s’épanouit grâce au soleil, comme l’amante sous le regard de l’amant.

- Sonnet X, premier quatrain : allusion à Orphée, qui désigne l’amant comme

un poète

- Sonnet XIII : les poètes de la Renaissance prennent l'Euripe, fleuve grec,

pour symbole de la passion inconstante

- Sonnet XVI : Soleil personnifié, comme dieu du soleil (Apollon chez les

Grecs, Phébus chez les Romains), Zéphyr : personnification du vent d’ouest,

qui est prié de ramener le soleil, figure de l’amant

- On retrouve Phébus dans le sonnet XVI, avec la mention de sa sœur,

vraisemblablement Athéna, déesse casquée (ou Artémis-Diane, jumelle

d’Apollon)

- Sonnet XIX : Diane, déesse chasseresse, déesse vierge. Elle représente la

chasteté, qui s’oppose à la passion dévorant la poétesse

- Sonnet XXII : nombreuses figures mythologiques, dont plusieurs sont aussi

des planètes. Endymion : berger, d’une grande beauté, amant de Séléné,

déesse de la lune. Pour préserver cette beauté, elle demande à Zeus de

faire dormir éternellement le jeune homme et elle le contemple depuis le

ciel.

- Sonnet XXIV : on retrouve la figure d’Amour. Il est aussi question d’Adonis,

un humain, amant d'Aphrodite, célèbre pour sa beauté. Vulcan est mis pour

Vulcain, dieu du feu ; aussi est-il associé dans le poème à l’ardeur.

4. Lisez les sonnets X, XVI et XIX. Ils proposent sensiblement le même récit de

vie. De quoi s’agit-il ?

Les trois poèmes racontent comment la poétesse a été séduite par la cour assidue

d’un homme, qui l’a délaissée au moment où elle s’est éprise de lui.

5. Lisez le poème d’Olivier de Magny présenté ci-dessous.

Quel sonnet de Louise Labé y répond ? Quelle supposition pouvez-vous donc faire ?

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Le sonnet II répond au poème d’Olivier de Magny, dont il reprend les quatrains. Le

sonnet de Magny jure un amour éternel, tandis que celui de Louise Labé blâme

l’indifférence de l’amant.

On peut faire deux suppositions. Peut-être le poème de Louise Labé s’adresse-t-il

véritablement à Olivier de Magny, pour lui reprocher son insensibilité

(interprétation biographique). Peut-être s’agit-il d’un jeu d’écriture partagé par

les deux poètes, qui auraient choisi la même contrainte de départ.

6. Quelle figure de style domine dans le sonnet VIII ? Comment l’interprétez-

vous ?

Cherchez un autre poème qui utilise le même procédé.

Ce sonnet recourt massivement aux antithèses afin d’illustrer les émotions

contradictoires de la poétesse et le désordre de l’état amoureux. Ce procédé est

un héritage pétrarquiste.

On retrouve l’antithèse dans d’autres sonnets du recueil, bien qu’elle y soit utilisée

de façon moins systématique. Par exemple, le sonnet XI oppose la beauté du regard

de l’amant à la cruauté de son cœur. Le sonnet XVI oppose l’âpreté de l’orage au

retour du soleil, puis la flamme de la poétesse à la froideur de l’amant.

7. En quoi peut-on dire que le sonnet XXIV propose, en quelque sorte, la leçon à

tirer du recueil ?

Le sonnet XXIV s’adresse aux « Dames ». En cela, il répond à la préface, qui

recommandait aux femmes d’écrire. Mais il ne s’agit pas là d’une réflexion sur

l’écriture mais plutôt sur les sentiments. La poétesse reprend l’évocation de sa

passion amoureuse, parfois évoquée avec sensualité dans le recueil, et recommande

aux femmes de ne pas la juger durement pour avoir cédé à cet amour. Elle rappelle

que chacune pourra sombrer à son tour dans la passion.