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J Radiol 2009;90:1703-14 © Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2009 Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés article original ostéoarticulaire Suivi par IRM pelvi-rachidienne d’une cohorte de patients atteints de myélome multiple, traités par chimiothérapie à haute dose et autogreffe de cellules souches périphériques A Dumas (1), H Chiavassa-Gandois (1), N Sans (1), F Delaunay (1), O Lemaire (2), M Laroche (3) et JJ Railhac (1) e myélome multiple (MM) est une hémopathie maligne caractérisée par une prolifération monoclonale d’une population de plasmocytes au sein de la moelle osseuse. Dans le monde occi- dental le myélome multiple compte pour 10 % des hémopathies malignes (second rang après les lymphomes non-hodgki- niens) et 1 % des néoplasies. Son inciden- ce augmente avec l’âge, avec un pic de fré- quence à 70 ans (1). Les agents alkylants et la prednisone (ou chimiothérapie « conventionnel- le ») ont longtemps constitué le traite- ment de référence de cette maladie (2- 5). La chimiothérapie à haute dose s’est imposée plus récemment comme un traitement efficace dans le myélome, qu’elle soit initiée au diagnostic ou après l’échec d’une chimiothérapie con- ventionnelle (6). Elle permet d’obtenir de meilleurs taux de réponse, mais au prix d’une myélotoxicité importante. L’autogreffe de cellules souches péri- phériques utilisée en complément de la chimiothérapie intensive a donc été Abstract Résumé Pelvic and spinal MR follow-up of multiple myeloma patients after high-dose chemotherapy and autologous peripheral blood stem cell transplant J Radiol 2009;90:1703-14 Purpose. To evaluate the changes of bone marrow lesions on pelvic and spinal MR in patients with multiple myeloma after high-dose chemo- therapy and autologous peripheral blood stem cell transplant. Patients and methods. Pelvic and spinal MR examinations were obtained at presentation (myeloma diagnosis) and 1 year after trans- plant in 20 patients that were part of a group of 39 patients enrolled in a prospective study. The type of marrow replacement (classified in stages with stage 0: normal; stage 1: salt and pepper; stage 2: focal infiltration; stage 3: diffuse infiltration), the number and size of marrow lesions and the number of vertebral compression fractures were recorded. We have compared the findings prior to and following transplant, with corre- lation to the response to treatment and the use of biphosphonates. Results. The type of marrow replacement was improved following transplant in 65% of patients (not statistically significant). The number and size of nodules > 20 mm showed significant reduction (p=0.0224 and p=0.0237 respectively). Lesions on MR improved in 50% of patients with good response and 75% of patients with poor response to treatment. Patients receiving biphosphonates showed more vertebral compression fractures. Conclusion. The evolution of marrow replacing lesions on MR is discordant compared to the biological and clinical response to treatment. Pelvic and spinal MR evaluation at the time of diagnosis does not appear to be a good predictive factor of response to treatment. Biphosphonates do not appear to prevent new vertebral compression fractures. Pelvic and spinal MR provides interesting data in the follow- up of patients with myeloma following autologous transplant, especially in the local evolution of marrow replacing lesions, but our results do not justify its use in routine clinical practice. Objectif. Analyser l’évolution en IRM pelvi-rachidienne des lésions médullaires osseuses de patients atteints de myélome multiple traité par chimiothérapie à haute dose et autogreffe de cellules souches périphériques. Patients et méthodes. Des IRM pelvi-rachidiennes ont été réalisées à l’inclusion (diagnostic du myélome) et 1 an après autogreffe chez 20 patients parmi les 39 patients suivis dans une étude prospective. Ont été analysés le type d’atteinte médullaire osseuse (classification en stades « 0 : normal », « 1 : poivre et sel », « 2 : infiltration focale », « 3 : infiltration diffuse »), le nombre et la taille des nodules myélo- mateux, et le nombre de fractures-tassements vertébrales. Nous avons étudié l’évolution de ces données avant et après autogreffe, et les avons confrontées à la réponse au traitement et à la présence ou l’absence de traitement associé par biphosphonates. Résultats. Le type d’infiltration médullaire est amélioré par l’autogreffe chez 65 % des patients (résultat non significatif). Le nombre et respectivement la taille des nodules > 20 mm diminuent de façon significative (p = 0,0224, resp. p = 0,0237). Les lésions en IRM s’améliorent chez 50 % des bons répondeurs et chez 75 % des mauvais répondeurs au traitement. Les patients traités en plus par biphospho- nates présentent plus de nouvelles fractures-tassements vertébrales. Conclusion. L’évolution des lésions en IRM après autogreffe est discordante par rapport à la réponse clinico-biologique. L’IRM pelvi- rachidienne au diagnostic n’apparaît pas dans notre étude comme un bon facteur prédictif de réponse au traitement. Les biphosphonates ne semblent pas avoir d’effet protecteur sur l’apparition de nouvelles fractures-tassements vertébrales. L’IRM pelvi-rachidienne apporte des informations intéressantes dans le suivi des myélomes traités par autogreffe, notamment dans l’évolution locale des lésions myéloma- teuses, mais nos résultats ne permettent pas de recommander son indication en routine. Key words: Multiple myeloma. Autologous peripheral blood stem cell transplant. MRI. Mots-clés : Myélome multiple. Autogreffe de cellules souches périphériques. IRM. L (1) Service d’Imagerie médicale, Hôpital Purpan, place du Dr Baylac, 31059 Toulouse cedex 9. (2) Service de Rhumatologie, Hôpital Purpan, place du Dr Baylac, 31059 Toulouse cedex 9. (3) Hôpital Larrey, 24 chemin de Pouvourville, TSA 30030, 31059 Toulouse cedex 9. Correspondance : H Chiavassa-Gandois E-mail : [email protected]

Suivi par IRM pelvi-rachidienne d’une cohorte de patients atteints de myélome multiple, traités par chimiothérapie à haute dose et autogreffe de cellules souches périphériques

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Page 1: Suivi par IRM pelvi-rachidienne d’une cohorte de patients atteints de myélome multiple, traités par chimiothérapie à haute dose et autogreffe de cellules souches périphériques

J Radiol 2009;90:1703-14© Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2009

Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés article original ostéoarticulaire

Suivi par IRM pelvi-rachidienne d’une cohorte de patients atteints de myélome multiple, traités par chimiothérapie à haute dose et autogreffe de cellules souches périphériques

A Dumas (1), H Chiavassa-Gandois (1), N Sans (1), F Delaunay (1), O Lemaire (2), M Laroche (3) et JJ Railhac (1)

e myélome multiple (MM) est unehémopathie maligne caractériséepar une prolifération monoclonale

d’une population de plasmocytes au sein

de la moelle osseuse. Dans le monde occi-dental le myélome multiple compte pour10 % des hémopathies malignes (secondrang après les lymphomes non-hodgki-niens) et 1 % des néoplasies. Son inciden-ce augmente avec l’âge, avec un pic de fré-quence à 70 ans (1).Les agents alkylants et la prednisone(ou chimiothérapie « conventionnel-le ») ont longtemps constitué le traite-ment de référence de cette maladie (2-

5). La chimiothérapie à haute dose s’estimposée plus récemment comme untraitement efficace dans le myélome,qu’elle soit initiée au diagnostic ouaprès l’échec d’une chimiothérapie con-ventionnelle (6). Elle permet d’obtenirde meilleurs taux de réponse, mais auprix d’une myélotoxicité importante.L’autogreffe de cellules souches péri-phériques utilisée en complément de lachimiothérapie intensive a donc été

Abstract RésuméPelvic and spinal MR follow-up of multiple myeloma patients after high-dose chemotherapy and autologous peripheral blood stem cell transplantJ Radiol 2009;90:1703-14

Purpose. To evaluate the changes of bone marrow lesions on pelvic and spinal MR in patients with multiple myeloma after high-dose chemo-therapy and autologous peripheral blood stem cell transplant.Patients and methods. Pelvic and spinal MR examinations were obtained at presentation (myeloma diagnosis) and 1 year after trans-plant in 20 patients that were part of a group of 39 patients enrolled in a prospective study. The type of marrow replacement (classified in stages with stage 0: normal; stage 1: salt and pepper; stage 2: focal infiltration; stage 3: diffuse infiltration), the number and size of marrow lesions and the number of vertebral compression fractures were recorded. We have compared the findings prior to and following transplant, with corre-lation to the response to treatment and the use of biphosphonates.Results. The type of marrow replacement was improved following transplant in 65% of patients (not statistically significant). The number and size of nodules > 20 mm showed significant reduction (p=0.0224 and p=0.0237 respectively). Lesions on MR improved in 50% of patients with good response and 75% of patients with poor response to treatment. Patients receiving biphosphonates showed more vertebral compression fractures.Conclusion. The evolution of marrow replacing lesions on MR is discordant compared to the biological and clinical response to treatment. Pelvic and spinal MR evaluation at the time of diagnosis does not appear to be a good predictive factor of response to treatment. Biphosphonates do not appear to prevent new vertebral compression fractures. Pelvic and spinal MR provides interesting data in the follow-up of patients with myeloma following autologous transplant, especially in the local evolution of marrow replacing lesions, but our results do not justify its use in routine clinical practice.

Objectif. Analyser l’évolution en IRM pelvi-rachidienne des lésions médullaires osseuses de patients atteints de myélome multiple traité par chimiothérapie à haute dose et autogreffe de cellules souches périphériques.Patients et méthodes. Des IRM pelvi-rachidiennes ont été réalisées à l’inclusion (diagnostic du myélome) et 1 an après autogreffe chez 20 patients parmi les 39 patients suivis dans une étude prospective. Ont été analysés le type d’atteinte médullaire osseuse (classification en stades « 0 : normal », « 1 : poivre et sel », « 2 : infiltration focale », « 3 : infiltration diffuse »), le nombre et la taille des nodules myélo-mateux, et le nombre de fractures-tassements vertébrales. Nous avons étudié l’évolution de ces données avant et après autogreffe, et les avons confrontées à la réponse au traitement et à la présence ou l’absence de traitement associé par biphosphonates.Résultats. Le type d’infiltration médullaire est amélioré par l’autogreffe chez 65 % des patients (résultat non significatif). Le nombre et respectivement la taille des nodules > 20 mm diminuent de façon significative (p = 0,0224, resp. p = 0,0237). Les lésions en IRM s’améliorent chez 50 % des bons répondeurs et chez 75 % des mauvais répondeurs au traitement. Les patients traités en plus par biphospho-nates présentent plus de nouvelles fractures-tassements vertébrales.Conclusion. L’évolution des lésions en IRM après autogreffe est discordante par rapport à la réponse clinico-biologique. L’IRM pelvi-rachidienne au diagnostic n’apparaît pas dans notre étude comme un bon facteur prédictif de réponse au traitement. Les biphosphonates ne semblent pas avoir d’effet protecteur sur l’apparition de nouvelles fractures-tassements vertébrales. L’IRM pelvi-rachidienne apporte des informations intéressantes dans le suivi des myélomes traités par autogreffe, notamment dans l’évolution locale des lésions myéloma-teuses, mais nos résultats ne permettent pas de recommander son indication en routine.

Key words: Multiple myeloma. Autologous peripheral blood stem cell transplant. MRI.

Mots-clés : Myélome multiple. Autogreffe de cellules souches périphériques. IRM.

L(1) Service d’Imagerie médicale, Hôpital Purpan, place du Dr Baylac, 31059 Toulouse cedex 9. (2) Service de Rhumatologie, Hôpital Purpan, place du Dr Baylac, 31059 Toulouse cedex 9. (3) Hôpital Larrey, 24 chemin de Pouvourville, TSA 30030, 31059 Toulouse cedex 9.Correspondance : H Chiavassa-Gandois E-mail : [email protected]

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J Radiol 2009;90

1704 Suivi par IRM pelvi-rachidienne d’une cohorte de patients atteints de myélome multiple

A Dumas et al.

développée afin de réduire la durée dela myélosuppression et la mortalité dueau traitement à moins de 3 % (7-9).Malgré ces avancées thérapeutiques, lemyélome multiple est encore considérécomme incurable, avec des taux de surviehétérogènes variant de quelques semai-nes à plusieurs années. La médiane desurvie se situe autour de 3 ans avec lachimiothérapie conventionnelle et5 ans avec le traitement intensif associéà une autogreffe de cellules souches hé-matopoïétiques (1). L’arrivée récentedes traitements antinéoplasiques (thali-domide, bortézomib, lénalidomide),semble une alternative à l’autogreffe enterme d’efficacité thérapeutique.Le myélome multiple est caractérisé parson tropisme médullaire osseux spécifi-que, à l’origine d’une importante morbi-mortalité (10). Au cours de l’évolution dumyélome multiple, plus de 80 % des pa-tients vont présenter des douleurs osseu-ses, et plus de 70 % vont développer desfractures pathologiques (11).Actuellement, il existe très peu de publi-cations traitant de l’évolution de l’IRMdu squelette axial avant et après traite-ment par autogreffe. Ainsi, nous avonsétudié l’évolution en IRM du signal de lamoelle osseuse au cours d’un traitementpar autogreffe de cellules souches péri-phériques chez 39 patients atteints demyélome évolutif. Chez 20 de ces pa-tients finalement retenus, nous avonsrecherché une corrélation entre cetteévolution IRM et la réponse au traite-ment selon des critères clinico-biologi-ques, ainsi qu’une éventuelle valeur pro-nostique de l’IRM initiale.

Patients et méthodes

PatientsTrente neuf patients ont été inclus dansnotre étude prospective, réalisée entre fé-vrier 2004 et février 2007. Tous étaientpris en charge dans le service d’Hémato-logie de notre établissement pour un myé-lome multiple évolutif, traité par chimio-thérapie à haute dose suivie d’autogreffede cellules souches périphériques. Nousavons exclu les patients ayant un antécé-dent d’autogreffe. Tous les patients pré-sentaient les critères d’éligibilité à l’auto-greffe (âge < 70 ans, fraction d’éjectioncardiaque > 40 %, capacité de diffusionpulmonaire du monoxyde de carbone

> 50 % de la normale, transaminases< 2 fois la normale).À l’inclusion, la classification de Salmonet Durie (12) a été utilisée pour évaluer lamasse tumorale des patients.Les traitements d’induction ont consistéen une chimiothérapie par :• Dex Vel (Dexamethasone 40 mg/j J1-J4 ; bortezomib 1,3 mg/m2 à J1, J4, J8, J11,J1 = 21) : 8 patients (20,5 %) ;• Dex Thal (Dexamethasone 40 mg/j J1-J4 et J17-J20 pendant 3 mois puis J1-J4,J1 = J28 ; thalidomide 200 mg/j 2 patients(5,1 %) ; thalidomide 100 mg/j : 2 patients(5,1 %) ;• VAD (Vincristine 0,4 mg/j ; Adriamy-cine 9 mg/m2/j ; Dexamethasone 40 mg/jJ1-J4 un cycle sur deux, J1-J4 et J17-J20un cycle sur deux ; J1 = J28) : 27 patients(69,2 %).Seize patients (41 %) ont reçu en complé-ment un traitement par biphosphonates,dans l’optique de réduire le risque de sur-venue de fractures pathologiques (13).Lors de l’autogreffe, tous les patients ontreçu au moins 2 x 106 cellules CD34+ parkg. Tous les patients ont reçu au préalablele même conditionnement de chimiothé-rapie à forte dose avant l’autogreffe : Mel-phalan 200 mg/m2. 7 patients ont bénéfi-cié d’une deuxième autogreffe de cellulessouches.L’évaluation de la réponse au traitements’est faite selon les critères de l’Intergrou-pe Francophone du Myélome (IFM), pré-sentés dans le tableau I. Nous avons réunien « bons répondeurs » (BR) les RéponsesComplètes (RC), et les Très Bonnes Ré-ponses Partielles (TBRP) et en « mauvais

répondeurs » (MR) les Réponses Minimes(RM), les Réponses Partielles (RP), lesEchecs au traitement (E) et les patientsdécédés (décès du fait de leur myélome).Les patients ont bénéficié de deux bilans :à l’inclusion (B1, réalisé au diagnostic dumyélome) et 1 an après autogreffe de cel-lules souches périphériques (B2), au coursdesquels ont été réalisés :• une Imagerie par Résonance Magnéti-que (IRM) du rachis dorso-lombaire et dubassin ;• des radiographies standard du rachisdorso-lombaire de face et de profil, et dubassin de face. En complément, 32 pa-tients ont passé des radiographies de l’ho-losquelette (rachis en entier, crâne, fé-murs, humérus, de face et de profil, bassinde face, thorax de face) à l’inclusion ;• des prélèvements biologiques classi-quement réalisés au cours du suivi dumyélome.Parmi les 39 patients de notre cohorte,nous n’avons réalisé l’analyse statistiqueque sur 20 d’entre eux afin de limiter lesbiais, dans la mesure où 5 sont décédés aucours de l’étude et 14 n’ont pas pu bénéfi-cier d’IRM lors d’un des deux bilans.

Méthodes

Technique IRMLes IRM ont été réalisées sur un appareilGeneral Electric Signa 1,5 Tesla. Le ra-chis dorso-lombaire a été étudié avec uneantenne dédiée en phase array, en séquen-ces sagittales pondérées en écho de spin

Tableau ICritères de réponse au traitement de l’IFM (Intergroupe Francophone du Myélome).

Échec (E) Absence de réponse

Réponse Minime (RM) – Diminution des douleurs osseuses– Absence de nouvelle localisation osseuse

évolutive– Normalisation d’une hypercalcémie– Diminution de plus de 20 % du pic monoclonal

sérique à l’EPP, ou de la PBJ, mais restant < 50 %

Réponse Partielle (RP) – Mêmes critères– Avec diminution de plus de 50 % du pic

monoclonal sérique et d’au moins 75 % de la PBJ

Très Bonne Réponse Partielle (TBRP) – Mêmes critères– Avec diminution de plus de 90 % du pic

monoclonal sérique et d’au moins 95 % de la PBJ– Plasmocytose médullaire < 5 %

Réponse Complète (RC) – Diminution des douleurs osseuses– Pas de nouvelle localisation osseuse– Normalisation du bilan biologique (NFS,

calcémie, protéinurie, EPP)– Myélogramme normal

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A Dumas et al. Suivi par IRM pelvi-rachidienne d’une cohorte de patientsatteints de myélome multiple

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T1 (Temps de répétition 400 ms/tempsd’écho 20 –ms (400/20), matrice 416 x 256,nombre d’excitations : 2, coupes de 4 mmd’épaisseur, intergap de 0,4 mm, champde vue de 480 mm) et en séquences STIR(4 000/68, temps d’inversion 150 ms, ma-trice 416 x 320, nombre d’excitations : 2,coupes de 4 mm d’épaisseur, intergap de0,4 mm, champ de vue de 480 mm). Lebassin a été exploré en coupes frontalesavec une antenne body, en séquences pon-dérées en écho de spin T1 (575/20, matrice384 x 256, nombre d’excitations : 2, cou-pes de 5 mm d’épaisseur, intergap de1,5 mm, champ de vue de 420 mm), etSTIR (4 300/68, temps d’inversion150 ms, matrice 384 x 288, nombre d’exci-tations : 2, coupes de 5 mm d’épaisseur,intergap de 1,5 mm, champ de vue de420 mm).

Analyse des IRMLes IRM ont été lues par un radiologue, etclassées en 4 types (résumés dans letableau II et représentés schématique-ment dans la fig. 1) :• type 0 : moelle osseuse normale ;

• type I : lésions de type « poivre et sel » :(multiples lésions de quelques millimè-tres, en hypointensité T1 et hyperintensi-té T2, réparties sur l’ensemble du rachis) ;• type II : lésions focalisées de la moelle os-seuse : lésions en hyposignal T1 spin échoet en hypersignal STIR. Letype II est sub-divisé en 4 groupes :– IIA : lésions nodulaires de tailles toutes< 20 mm, appelées « micronodules », ré-parties en 3 sous-groupes (<10 microno-dules, 10 = micronodules < 25, ≥ 25 mi-cronodules), respectivement nomméssous-types « a », « b », « c » ;– IIB : 1 ou 2 lésions nodulaires de taille≥ 20 mm appelées « macronodules » ;– IIC : 3 ou 4 lésions nodulaires de taille≥ 20 mm ;– IID : ≥ 5 lésions nodulaires de taille≥ 20 mm.Pour les sous-types B, C et D, nous avonsmesuré chaque lésion macronodulairedans son plus grand axe, et calculé pourchaque examen la somme des grands axesde ces macronodules.• type III : lésions diffuses de la moelle os-seuse : la moelle apparaît en hyposignalhomogène diffus en T1 SE, dont l’intensi-

Tableau IIClassification des lésions en IRM.

Type 0 : IRM médullaire

normale

Type I : Lésions

poivre et sel

Type II : Lésions focales

Type III : Lésions diffuses

Tassements vertébraux

A : lésions toutes < 20 mmAa : < 10 nodulesAb : 10 à 25 nodulesAc : > 25 nodules

A : <25 % Nombre Type d’aspect bénin ou malin

B : 1-2 lésions ≥ 20 mm B : 25-50 %

C : 3-4 lésions ≥ 20 mm C : 50-75 %

D : ≥ 5 lésions ≥ 20 mm D : >75 %

Pour tous les nodules ≥ 20 mm : addition des tailles nodulaires

Fig. 1 : Représentation schématique des différents types d’infiltration médullaire osseuse en IRM.1. Moelle osseuse normale ; 2. aspect « poivre et sel » ; 3. infiltration focale ; 4. infiltration diffuse ; 5.infiltration mixte.

té tend à se rapprocher, voire à devenirplus basse que celle des disques interver-tébraux. Le type III est réparti en 4 grou-pes :– IIIA : infiltration concernant moins de25 % de la moelle osseuse ;– IIIB : infiltration concernant entre 25et 50 % de la moelle osseuse ;– IIIC : infiltration concernant entre 50et 75 % de la moelle osseuse ;– IIID : infiltration concernant plus de75 % de la moelle osseuse.Cette répartition en 4 groupes du type IIIest une subdivision semi-quantitative etsubjective en fonction du degré d’infiltra-tion diffuse : pour l’évaluer, nous avonsobservé le signal global des corps verté-braux en T1 en le comparant à celui desdisques intervertébraux, et nous avons es-timé le pourcentage de surface atteintepar cet hyposignal en T1.• Enfin, nous avons, pour chaque IRM,compté et classé le nombre de fractures-tassements vertébrales (TV), selon leur as-pect bénin (lié à l’ostéoporose) ou malin(secondaire à l’infiltration myéloma-teuse). Les critères évocateurs de mali-gnité étaient : le bombement du murpostérieur avec ou sans compressionmédullaire, l’infiltration nodulaire ducorps vertébral, l’aspect en hyposignalT1 diffus de l’ensemble du corps verté-bral, l’infiltration des pédicules et del’arc postérieur, l’envahissement destissus mous ou de l’espace épidural. Lescritères en faveur d’un TV béninétaient : l’absence d’anomalie de signalsur toutes les séquences (TV ancien),une bande en hyposignal adjacente à lafracture (TV récent), l’atteinte demoins de la moitié du corps vertébralpar les anomalies de signal, et le reculd’un fragment postérieur (souvent lecoin postéro-supérieur) (14).

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1706 Suivi par IRM pelvi-rachidienne d’une cohorte de patients atteints de myélome multiple

A Dumas et al.

Pour permettre l’analyse statistique destypes IRM chez les patients présentantplusieurs types lésionnels sur le mêmeexamen, nous avons considéré le staded’atteinte le plus péjoratif. La notion degravité s’appuie sur des données étayéesde la littérature, qui classent par ordre degravité croissante : le type 0 (normal), letype I (« poivre et sel »), le type II (infil-tration nodulaire), et le type III (infiltra-tion diffuse) (15-19). Par contre, pourl’analyse descriptive, nous avons conservél’ensemble des informations concernantles types lésionnels en IRM quand les pa-tients présentaient une infiltration mé-dullaire mixte.Pour étudier l’évolution des paramètresIRM en fonction du type de réponse autraitement (BR/MR), nous avons procédéainsi :• Évolution des types de lésion en IRMpour chaque patient : ont été considéréeen amélioration entre deux bilans succes-sifs les IRM des patients passant à un typelésionnel moins grave (par exemple deIIC à IIB, ou de IIIA à I), ou conservantleur stade 0 (normal). Ont été considéréesen aggravation les IRM de tous les autrespatients ;• Évolution des valeurs quantitatives(nombre de macronodules, tailles addi-tionnées des macronodules, nombre deTV) : pour chaque patient, entre chaquebilan, nous avons calculé le pourcentaged’augmentation ou de diminution de cha-cune de ces valeurs.

Analyse statistiqueL’analyse statistique a été réalisée en utili-sant un logiciel Statview®.Pour analyser l’évolution des critèresIRM nous avons utilisé un test de Chi2pour les données qualitatives (types lé-sionnels) et un test T de Student pour sé-ries appariées pour les données quantita-tives (nombre tailles des macronodules,nombre de TV).Pour étudier l’évolution de ces critèresIRM en fonction de la réponse au traite-ment, nous avons utilisé un test de Chi2pour l’évolution des données qualitatives(classées en « amélioration » ou « absenced’amélioration »), et un test F de Fisherpour les données quantitatives (pourcen-tages d’augmentation ou de diminutiondu nombre et des tailles des macronodu-les, et du nombre de TV).Pour tous ces tests statistiques, une valeurde p inférieure à 0,05 était considéréecomme significative.

Résultats

À l’inclusion (B1)Les patients sont âgés de 39 à 67 ans,56,5 ans en moyenne. A l’inclusion, 28 pa-tients (71,8 %) présentent un myélome destade III de Durie et Salmon, 9 patients(23,1 %) un stade II, et 2 patients (5,1 %)un stade I. L’autogreffe est néanmoins in-diquée chez ces 2 derniers patients, en rai-son de la présence d’une volumineuse lé-sion osseuse symptomatique. Lescaractéristiques cliniques et biologiquesdes patients à l’inclusion sont résuméesdans le tableau III et les données IRMdans les tableaux IV et V. Les figures 2 à 5montrent quelques exemples d’IRM issusde notre cohorte.Sur les 20 patients retenus pour les analysesdescriptives et statistiques, 3 patients (15 %)présentent une IRM normale, 1 seul patient(5 %) a une IRM de type poivre et sel, 15 pa-tients (75 %) montrent une forme nodulaire(type II), et 11 patients (55 %) se présententsous une forme infiltrative diffuse (type III).Ces pourcentages témoignent de la possibi-

lité d’association de plusieurs types lésion-nels pour un même examen. Le nombremoyen de macronodules est de 1,3 par pa-tient, et les tailles des macronodules sont de33,75 mm par patient. L’IRM détecte 29TV (chez 7 patients). Quatre vingt troispour cent des TV prennent un aspect béninet 17 % un aspect malin.Les radiographies standard révèlent deslésions lytiques du bassin chez 35 % despatients (n = 7), des lacunes au niveau desos longs périphériques chez 45 % des pa-tients (n = 9), et des lacunes au niveau ducrâne chez 75 % des patients (n = 15).Parmi les 3 patients qui présentent uneIRM axiale normale, 2 ont des lésions lyti-ques du crâne sur les radiographies stan-dard, c’est-à-dire non recrutées parl’IRM. Onze patients (55 %) présententdes lésions du rachis ou du bassin, c’est-à-dire dans des régions explorées par l’IRM.Dix neuf TV sont visualisés en radiogra-phie (chez 6 patients).Nous ne retrouvons pas de corrélationstatistiquement significative entre la gra-vité des types IRM et le stade de Durie etSalmon.

Tableau IIICaractéristiques épidémiologiques, cliniques et biologiques des patients à l’inclusion.

Caractéristiques Nombre ou moyenne (pourcentage) ± Écart-type

Écarts

Nombre de patients 39

Genre 22 femmes (dont 19 ménopausées), 17 hommes

Âge 56,5 ± 6,6 ans 39-67 ans

Type de chaîne monoclonale IgG : 31 (79,5 %)IgA : 6 (15,4 %)1 myélome non sécrétant (2,6 %)Pas de MM à chaînes légères

Sous-type de chaîne monoclonale IgG κ : 23 (59,0 %)IgG λ : 8 (20,5 %)IgA κ : 6 (15,4 %)IgA λ : 0IgD λ : 1 (2,6 %)Myélome non sécrétant : 1 (2,6 %)

Stade de Durie et Salmon Stade I : 2 (5,1 %)Stade II : 9 (23,1 %)Stade III : 28 (71,8 %)Sous-stade A : 37 (94,9 %)Sous-stade B : 2 (5,1 %)

Stade ISS Stade I : 26 (66,7 %)Stade II : 7 (17,9 %)Stade III : 6 (15,4 %)

Délétion du chromosome 13 Présente : 12 (57 %)Absente : 9 (43 %)Non recherchée : 18

Plasmocytose médullaire moyenne (%) 31,1 ± 22,6 2-97

Pic EPP moyen (g/l) 35,8 ± 21,9 0-113

β2-microglobuline moyenne (mg/l) 3,32 ± 2,10 1,3-8

CRP moyenne (mg/l) 12,1 ± 20,4 0-82

Hémoglobinémie moyenne (g/dl) 11,1 ± 1,6 7,6-14,7

Protéinurie de Bence Jones moyenne (mg/l) 618,9 ± 996,5 0-4060

Protéinurie moyenne (g/24 h) 0,81 ± 1,34 0-5,8

Créatininémie moyenne (μ mol/l) 94,5 ± 47,9 59-299

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Tableau IVReprésentation des différents types d’infiltration médullaire osseuse en IRM, certain patients présentant simultanément plusieurs types lésionnels.

Classification des IRM DIAGNOSTIC (B1) 1 AN POST-GREFFE (B2)

Type 0 3 (15 %) 4 (20 %)

Type I 1 (5 %) 1 (5 %)

Type II A total 6 (30 %) 9 (45 %)

Aa 3 (15 %) 5 (25 %)

Ab 0 (0 %) 1 (5 %)

Ac 3 (15 %) 2 (10 %)

B 4 (20 %) 6 (30 %)

C 4 (20 %) 0 (0 %)

D 1 (5 %) 0 (0 %)

TOTAL 15 (75 %) 15 (75 %)

Type III A 1 (5 %) 6 (30 %)

B 8 (40 %) 2 (10 %)

C 2 (10 %) 1 (5 %)

D 0 (0 %) 1 (5 %)

TOTAL 11 (55 %) 10 (50 %)

Tableau VÉvolution du nombre et des tailles des macronodules et du nombre de tassements vertébraux (TV), entre B1 et B2.

DIAGNOSTIC (B1) 1 AN POST-GREFFE (B2) Évolution

Nb moy de macronodules/ patient

1,3 0,4 – 69 %p = 0,0224

Moy des tailles des macronodules / patient (mm)

33,75 12,45 – 63,1 %p = 0,0237

Nb moyen de TV/patient 1,45 2,35 + 62,1 %p = 0,0351

Fig. 2 : Femme de 57 ans atteinte de myélome multiple de stade III.IRM du rachis en séquence sagittale T1 spin écho (a) et sagittale STIR (b) : infiltration de type « poivre et sel » (type I) : aspect de multiples nodules millimétriques répartis de façon homogène sur l’ensemble de la moelle osseuse.

a b

À 1 an post-autogreffe (B2) (fig. 6 et 7)Cinq patients sont décédés. Parmi les 20patients survivants et ayant bénéficiéd’une IRM aux deux bilans, 6 (30 %)sont en RC, 2 (10 %) en TBRP, 8 (40 %)en RP, et 4 (20 %) en RM. 8 patients(40 %) sont donc BR et 12 (60 %) sontMR. Les paramètres biologiques, enparticulier ceux qui reflètent la chargetumorale, se sont tous améliorés, et cet-te évolution est statistiquement signifi-cative pour le pic sérique d’immunoglo-buline monoclonale (p < 0,0001), laprotéinurie (p = 0,0162), l’hémoglobi-némie (p = 0,0001), et l’albuminémie(p = 0,0002).En analyse descriptive, on compte 4IRM normales, 1 IRM de type I, 15 IRMde type II et 10 IRM de type III. Il existedonc une augmentation de la représen-tation des IRM normales, une stabilitédes types I et II et une diminution sensi-ble d2u type III. Parmi les IRM de typeII, les stades nodulaires les plus graves(IIC et IID) sont passés de 5 (25 %) à 0,et les stades les moins graves (IIA etIIB) ont augmenté de 10 (50 %) à 15(75 %). Parmi les stades III, les sous-groupes AB et CD sont stables en effec-tifs. Entre B1 et B2, les lésions IRMs’améliorent pour 13 patients (65 %),sont stables pour 3 patients (15 %), ets’aggravent pour 4 patients (20 %).L’analyse statistique ne révèle pasd’amélioration significative (p = 0,6979)pour ces différents types lésionnels enIRM.Le nombre moyen de macronodules parpatient diminue de 69 % (0,4 à B2), et cet-te évolution est statistiquement significa-tive (p = 0,0224). La moyenne des taillesdes macronodules par patient diminue de63 % (12,45 mm à B2), et cette évolutionest aussi statistiquement significative(p = 0,0237).

Le sous-groupe IIAa (moins de 10 micro-nodules) comprend 5 patients en B2 (con-tre 3 en B1), le sous-groupe IIAc (plus de25 micronodules) diminue de 3 à 2 pa-tients et le sous-groupe intermédiaireIIAb passe de 0 à 1 patient.On compte en B2 47 TV, dont 73 % ontun aspect bénin et 27 % un aspect malin.Le nombre moyen de TV par patient aaugmenté de 1,45 à 2,35 de B1 à B2(+ 62 %), de façon statistiquement signifi-cative (p = 0,0351).

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Analyse des IRM en fonction de la réponse au traitement (tableaux VI et VII, fig. 8 et 9)Parmi les BR (RC et TBRP) (8 patients sur20), 4 patients (50 %) améliorent parallèle-ment leurs lésions IRM, alors que les lé-

sions IRM sont stables pour 2 patients(25 %) ou se sont aggravées pour les 2 der-niers (25 %). Parmi les 12 patients MR, 9(75 %) voient une amélioration de leurs lé-sions IRM, contre 25 % une stabilité (1 pa-tient) ou une aggravation (2 patients).L’analyse statistique n’est pas significative.

Fig. 3 : Femme de 54 ans atteinte de myélome multiple de stade III.IRM du bassin en séquence frontale T1 spin écho (a) et frontale STIR (b) : infiltration micronodulaire (nodules de moins de 20 mm, type IIA), apparaissant en hyposignal T1 et hypersignal STIR.

a b

Fig. 4 : Homme de 53 ans atteint de myélome multiple de stade III.Forme nodulaire de type IIB IIA. IRM du rachis en séquence sagittale T1 spin écho (a) et sagittale STIR (b) : macronodule sacré et micronodule thoracique, tous deux en hyposignal T1 SE et hypersignal STIR.Notons l’aspect en hypersignal T1 de type graisseux des vertèbres lombaires, lié à une radiothérapie locale, et l’aspect en hyposignal T1 et STIR du corps vertébral de L3, en rapport avec une vertébroplastie percutanée.

a b

Fig. 5 : Homme de 53 ans atteint de myé-lome multiple de stade III.IRM du rachis en séquence sagit-tale T1 spin écho (a) et sagittale STIR (b) : infiltration diffuse (type IIIC): les corps vertébraux présen-tent en T1 un signal anormale-ment bas, en isosignal par rap-port aux disques intervertébraux adjacents.

a b

En B2, les IRM des BR sont également ré-parties entre les types II et III. Tous les ty-pes lésionnels 0 (n = 4) et I (n = 1) sont re-présentés par les MR. Les types IIreprésentent 50 % (n = 9) des lésions enIRM des MR, et les types III 22,2 %(n = 4).Il n’existe pas de corrélation statistique-ment significative entre le pourcentage decroissance ou de décroissance du nombreou de la taille des macronodules et la ré-ponse au traitement. Le nombre moyende macronodules diminue de 72,9 % chezles BR et de 66,4 % chez les MR. Lesmoyennes des tailles des macronodulesdiminuent de 62,1 % pour les BR et de63,9 % pour les MR).Entre B1 et B2, les BR ont plus de nou-veaux TV (+ 83,3 %) que les MR(+ 46,5 %).Si l’on observe les IRM pré mortem des 5patients décédés, on remarque que tousprésentaient une infiltration diffuse de lamoelle osseuse à l’IRM (1 type IIIA, 1 typeIIIB, 1 type IIIC et 2 types IIID), plus oumoins associée à une infiltration nodulai-

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re (2 types IIB, 1 type IIC et 1 type IID).La moyenne des tailles des macronodulesétait de 88 mm par patient. De plus, lespatients présentaient pour 4 d’entre euxde nombreux micronodules (sous-groupeIIAc). Enfin, les 5 patients décédés souf-fraient tous de TV (en moyenne 6 parpatient).Rétrospectivement, en analysant les IRM àl’inclusion, on retrouve 1 forme nodulaireet 9 formes diffuses dans le groupe des BR,contre 3 IRM normales, 1 type poivre et sel,

4 types focaux et 6 types diffus pour lesMR. L’analyse statistique ne retrouve pasde corrélation significative entre le typeinitial d’infiltration en IRM et la réponseau traitement au dernier bilan.Par ailleurs, la comparaison des types lé-sionnels sur l’IRM et le stade ISS (Inter-national Staging System) au bilan initial,considéré comme bon facteur pronosti-que, ne permet pas de faire ressortir detendance remarquable en dehors du faitque les 3 types 0 ont un ISS à 1 et le seul ty-

Fig. 6 : Proportion des différents types lésionnels en IRM en B1 et B2.

Fig. 7 : Évolution du pourcentage des différents types lésionnels en IRM entre B1 et B2.

Tableau VIComparaison des types lésionnels en IRM à un an après l’autogreffe entre les BR et les MR au traitement, les patients pouvant présenter simultanément plusieurs types lésionnels.

À 1 an post-autogreffe BR (8 patients) MR (12 patients)

Types IRM Type 0 0 (0) 4 (22,20 %)

Type I 0 (0) 1 (5,60 %)

Type II 6 (50 %) 9 (50 %)

Type III 6 (50 %) 4 (22,20 %)

Tableau VIIÉvolution des données concernant les nodules myélomateux et les TV chez les bons et les mauvais répondeurs au traitement.

Diagnostic (B1) –> 1 an post-greffe (B2) Bons répondeurs

Mauvais répondeurs

Amélioration des types lésionnels en IRM 50 % 75 %

Stabilité ou aggravation des types lésionnels en IRM 50 % 25 %

Nombre moyen de macronodules par patient

En B1 1,37 1,25

En B2 0,37 0,42

Variation du nombre moyen de macronodules par patient – 72,9 % – 66,4 %

Moyenne des tailles des macronodules par patient (mm)

En B1 35,25 32,75

En B2 13,37 11,83

Variation de la moyenne des tailles des macronodules par patient (mm)

– 62,1 % – 63,9 %

Nombre moyen de TV par patient En B1 1,5 1,42

En B2 2,75 2,08

Variation du nombre moyen de TV par patient + 83,3 % + 46,5 %

pe I a un ISS à 2 ; les types II et les types IIIse répartissent en majorité chez les pa-tients aux ISS de stade 1 (respectivement60 % et 74 %). Le reste des types II et IIIest réparti indifféremment entre les ISSde stade 2 et 3. L’analyse statistique nerapporte pas de résultats significatifs(p = 0,2657).

Analyse du nombre de TV en fonction de la présence ou l’absence d’un traitement par biphosphonates (tableau VIII)

Les patients traités par biphosphonates(n = 11) ont plus de nouveaux TV(+ 101 %) que les patients non traités(n = 9) (+16%). Cette tendance n’est passtatistiquement significative. A l’inclu-sion, les proportions respectives de TVd’aspect bénin et malin sont sensiblementégales entre les deux groupes de patients.Puis la proportion de TV d’aspect malinaugmente chez les patients traités alorsqu’il n’apparaît pas de nouveaux TV d’as-pect malin chez les patients non traités.

Discussion

Rappels des données de la littératureAu bilan initial, l’IRM pelvi-rachidienneaméliore la prise en charge initiale desplasmocytomes et des MGUS en détec-tant des lésions non visibles sur les radio-graphies standard, transformant alors lediagnostic en myélome vrai. Ce nouveaustatut est associé à une mauvaise réponse àla radiothérapie locale et à une transfor-mation systémique plus précoce de la ma-

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ladie par rapport aux patients présentantdes IRM normales (20, 21). Dans le cas duplasmocytome, l’IRM permet en outre demieux apprécier son extension locale,pour la délimitation du champ d’irradia-tion notamment (15).Par sa sensibilité supérieure à celle des ra-diographies standard, l’IRM pelvi-rachi-

dienne visualise plus de lésions du rachisou du bassin (22, 23).Les patients présentant une IRM normaleou poivre et sel au diagnostic ont plutôt desfaibles masses tumorales, alors que des va-leurs plus élevées de plasmocytose, d’hy-percellularité, une anémie et une insuffi-sance osseuse se retrouvent généralement

Fig. 8 : Comparaison entre les groupes de bons et mauvais répon-deurs des moyennes par patient du nombre de macrono-dules (a), des tailles des macronodules (b), et du nombre de TV (c).

a bc

Fig. 9 : Évolution des moyennes par patient du nombre de macronodules, des tailles des macronodules, et du nombre de TV, chez les bons et mauvais répondeurs.

chez des patients ayant des types d’infiltra-tion diffuse à l’IRM (24). Néanmoins,l’IRM pelvi-rachidienne ne peut se substi-tuer à l’holosquelette radiographique, quireste l’imagerie de référence pour l’évalua-tion de la masse tumorale (25).L’IRM pelvi-rachidienne initiale permetd’apporter des éléments pronostiques :une IRM anormale chez un patient destade I de Durie et Salmon indique unrisque de progression plus rapide de lamaladie vers une forme agressive (16, 26,27). Pour les stades avancés de myélome,l’implication pronostique de l’IRM estmoins bien définie, même s’il semble quedes patients ayant des IRM initiales nor-males ont une meilleure réponse à la chi-miothérapie et une survie plus longueque ceux qui présentent des lésions foca-les ou diffuses (19). De même, il semblequ’une IRM anormale soit un facteur demoins bonne réponse au traitement,mais les différents types d’infiltrationn’ont pas montré isolément de relationpronostique évidente (19). La place del’IRM au sein des facteurs pronostiquesreste encore mal définie en dépit des in-formations importantes qu’elle délivre,en raison notamment de l’incertitude surl’utilité de traiter des patients de faiblemasse tumorale (stade I de Durie et Sal-

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mon) présentant des lésions de la moelleosseuse en IRM non détectables sur lesradiographies. Pourtant la significationpéjorative de ces lésions est bien établie(26, 28, 29). Notons qu’il n’a pas été dé-montré de corrélation entre le taux élevéde β2-microglobuline (meilleur facteurde mauvais pronostic (30)) et les types delésions à l’IRM (14).Enfin, l’IRM est l’examen le plus indiquépour réaliser le bilan de complicationsaxiales (fracture-tassement vertébrale,compression médullaire ou radiculaire)(25). Elle peut aider au diagnostic diffé-rentiel entre fracture-tassement vertébra-le maligne ou ostéoporotique (15).Au cours de la surveillance, l’IRM axialefournit des informations intéressantessur l’évolution locale de la réponse deslésions vertébrales myélomateuses autraitement. L’évolution des lésions tu-morales n’est pas nécessairement corré-lée à la réponse biologique au traitement,l’atteinte osseuse du myélome conti-nuant parfois d’évoluer sur les IRM alorsmême que les patients présentent une ré-ponse satisfaisante au traitement sur lesplans clinique et biologique. Néan-moins, l’IRM est sans aucun doute pré-conisée dans le suivi des myélomes àchaîne légère ou non excrétants/sécré-tants (25).

Place de l’IRM dans le bilan initialDans notre étude, l’IRM pelvi-rachidien-ne à l’inclusion est anormale chez 17 pa-tients (85 %), alors que les radiographiesstandard ne retrouvent des lésions du ra-chis et du bassin que chez 11 patients(55 %). De même, sur les 29 TV décrits àl’IRM, 19 seulement sont retrouvés sur lesradiographies. De nombreuses études ontdéjà prouvé la sensibilité nettement supé-rieure de l’IRM sur les radiographiesstandard pour l’exploration du rachisdorsolombaire et du bassin (16, 22, 26, 28,29). C’est pour cela que Durie et al. ontproposé d’intégrer l’IRM pelvi-rachi-dienne dans le bilan initial du myélome,dans la classification de « Durie/SalmonPlus staging system » (tableau IX), aumême titre que le TEP-scanner : ces mo-difications présentent l’avantage de réo-rienter vers des stades supérieurs (requé-rant un traitement) des patients de stade Iprésentant un bilan radiographique né-gatif, de classer des myélomes peu ou nonsécrétants, et d’attribuer un pronostic dé-favorable aux patients présentant plus de20 lésions focales et/ou une maladie extra-médullaire (13, 31).A contrario, notons que parmi les 3 pa-tients qui présentaient une IRM axialenormale, deux montraient des lésions ly-

Tableau VIIIComparaison du nombre de TV en IRM en fonction de la présence ou l’absence de traitementpar biphosphonates.

Patients traités par biphosphonates (n = 11)

Patients non traités par biphosphonates (n = 9)

B1 B2 B1 B2

Nombre moyen de TV 1,45 2,91 1,44 1,67

Variation entre B1 et B2

+ 101 % + 16 %

Proportion de TV d’aspect malin

18,8 % (3 TV)

34,4 % (11 TV)

15,4 % (2 TV)

13,3 % (2 TV)

Proportion de TV d’aspect bénin

81,2 % (13 TV)

65,6 % (21 TV)

84,6 % (11 TV)

86,7 % (13 TV)

Tableau IXClassification du « Durie/Salmon Plus staging system ».

Classification de Durie et Salmon Intégration de l’IRM ou du 18F-FDG-PET scanner

Stade I < 5 lésions focales ± faible infiltration rachidienne diffuse

Stade II 5-20 lésions focales ± infiltration rachidienne diffuse modérée

Stade III > 20 lésions focales ± infiltration rachidienne diffuse sévère

tiques du crâne sur les radiographies stan-dard, c’est-à-dire non recrutées parl’IRM. Ces données illustrent bien lesfaux-négatifs de l’IRM axiale en raison deson manque d’exhaustivité spatiale, pou-vant occulter des sites potentiellement at-teints par le myélome (crâne, côtes, ster-num, etc…) L’IRM corps entier,actuellement en cours de développement,pourra probablement pallier ce manquede sensibilité (25).A l’inclusion, il existe une part non négli-geable d’IRM normales ou « poivre etsel » (20 %), dans notre cohorte de myélo-mes sévères. D’autres publications ont dé-crit des patients en stade II ou III de Du-rie et Salmon qui présentaient des IRMpelvi-rachidiennes normales (19, 32-34).D’autre part, des études rapportent desinfiltrations focales et diffuses en IRMchez des patients de stade I de Durie etSalmon (29). De plus, l’analyse statistiquene retrouve pas de corrélation statistique-ment significative entre le stade de Durieet Salmon et la gravité du type lésionnelen IRM. Ces données corroborent le faitque l’IRM reste insuffisante dans l’éva-luation de la masse tumorale (35). Inver-sement, d’autres auteurs ont montrél’existence d’une forte corrélation entre lestade clinique et le type d’infiltration vi-sualisé sur les IRM rachidiennes lors dudiagnostic du myélome (18, 36). On peutégalement lire dans la littérature que lespatients présentant une IRM normale ou« poivre et sel » à l’inclusion ont plutôtdes faibles masses tumorales, alors quedes valeurs plus élevées de plasmocytose,d’hypercellularité, une anémie et une in-suffisance osseuse se retrouvent générale-ment chez des patients ayant des typesd’infiltration diffuse à l’IRM (24). Ainsi,la fiabilité de l’évaluation de la masse tu-morale par l’IRM reste donc sujette à con-troverses (37), en particulier en raison del’absence d’évaluation d’une grande par-tie du squelette par l’IRM axiale (32, 33).Actuellement, l’IRM pelvi-rachidiennene semble pouvoir se substituer à l’holos-quelette radiographique, qui reste encorel’imagerie de référence pour l’évaluationde la masse tumorale (12).

Évolution des lésions IRMDans notre étude, les lésions IRM s’amé-liorent pour 13 patients (65 %), sont sta-bles pour 3 patients (15 %), et s’aggraventpour 4 patients (20 %). L’analyse statisti-que de l’évolution de chaque type lésion-nel n’est pas significative. L’évolution est

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caractérisée par une hausse de la repré-sentation des types normaux (0), une sta-bilité des lésions « poivre et sel » (I) et no-dulaires (II) et une baisse discrète dunombre d’infiltration diffuse (III). L’ana-lyse de l’évolution du nombre et de lataille moyenne des macronodules (nodu-les > 20 mm), révèle une amélioration si-gnificative entre le diagnostic et le bilan à1 an post-autogreffe (-69 % pour le nom-bre de macronodules, p = 0,0224, et -63 %pour l’addition des tailles des macrono-dules, p = 0,0237). Nous n’avons pas réali-sé d’étude statistique sur les micronodules,représentés par des effectifs trop faibles.Peu d’articles ont étudié l’évolution desIRM après autogreffe de cellules souchespériphériques. Lecouvet et al. ont compa-ré les IRM de 25 patients souffrant d’unmyélome classé stade III de Durie et Sal-mon, avant et après allo- ou autogreffe demoelle : les IRM normales sont passées de7 à 10, et les IRM anormales de 18 (14 lé-sions focales, 4 lésions diffuses), à 15 (12lésions focales, 3 diffuses) (38). Mais cetteétude visait surtout à étudier la valeurpronostique d’un « index d’évolution dela moelle osseuse ».Dans le groupe des bons répondeurs, seu-lement 50 % des patients ont amélioréleur stade en IRM entre B1 et B2, alorsque l’autre moitié montre une IRM iden-tique ou aggravée. Inversement, au seindes mauvais répondeurs, la stabilité oul’aggravation du type IRM ne concerneque 25 % des patients. La comparaison del’évolution du nombre et de la taille desmacronodules, entre les groupes de bonset mauvais répondeurs n’a montré aucu-ne corrélation significative. Rappelonsque les 5 patients décédés de notre étudeprésentaient des lésions graves en IRM(type III pour tous, associé à des lésionsnodulaires pour 4 d’entre eux).Nos résultats sont discordants par rapportaux publications dans la littérature. Dansune étude de Angtuaco et al. portant sur90 patients autogreffés, les IRM pelvi-ra-chidiennes montraient une améliorationaprès traitement dans le groupe des bonsrépondeurs au traitement. La disparitioncomplète des anomalies à l’IRM, concer-nant 40 patients, était de plus associée àune meilleure survie par rapport aux pa-tients gardant des lésions après le traite-ment (65 mois au minimum contre 46mois) (39). Ces observations sont retrou-vées dans d’autres publications (38, 40).Le nombre de nouveaux TV augmentede 83,3 % chez les BR et de 46,5 % chez les

MR, montrant également une évolutiondiscordante par rapport à la réponse autraitement : Pourtant, les BR n’avaientpas, au départ, un nombre de TV signifi-cativement plus élevé que les MR. Parcontre, on peut signaler que le groupe deBR étant plus réduit (8 patients sur 20)que celui des MR (12 patients), les varia-tions individuelles, même faibles, ont plusde répercussions sur les résultats. La dif-férence d’âge entre les BR (58,6 ans) et lesMR (56,4 ans) est trop faible pour invo-quer un éventuel facteur causal associé telque l’ostéoporose liée à l’âge. Quoi qu’ilen soit, la confrontation de l’évolution dunombre de TV à la réponse au traitementperd de son intérêt quand on prend encompte la physiopathologie multifacto-rielle des TV au cours du myélome : po-pulation sujette à l’ostéoporose, traite-ment par corticothérapie, infiltrationplasmocytaire maligne, activité ostéoclas-tique accrue au cours du myélome, effon-drement de la trame osseuse après dispa-rition d’une masse tumorale aprèstraitement, etc. (41, 42)Nos résultats montrent donc qu’il existeune discordance entre l’évolution des lé-sions IRM et la réponse au traitement.Plusieurs explications peuvent être pro-posées concernant cette discordance : soitle traitement n’est efficace que sur l’ex-pression de la protéine monoclonale parles plasmocytes atypiques, mais n’est quetrès peu efficace sur l’infiltration maligneelle-même, sauf peut-être dans les zonestopographiques les plus périphériques(médullogrammes réalisés en sternal) ;soit l’évolution de l’imagerie IRM est dif-férée par rapport à l’amélioration de lamasse tumorale ; enfin, l’IRM du squelet-te axial peut ne pas être un bon reflet de lamasse tumorale globale, comme nousl’avons rappelé plus haut (43). De plus,l’aspect d’hyposignal diffus homogène dela moelle osseuse n’est pas pathognomo-nique d’une infiltration maligne maispeut correspondre à une moelle hémato-poïétique hyperplasique (dont la distinc-tion avec une infiltration tumorale peutêtre extrêmement difficile en particulierchez le sujet jeune (44)). On la retrouvedans certaines circonstances : en casd’anémie chronique, d’infection chroni-que, de déficit en fer, de tabagisme, detraitement par érythropoïétine, etc…(45). Il est important de garder ces situa-tions en tête afin de ne pas interpréter àtort une hypointensité diffuse en T1 de

régénérescence médullaire comme uneinfiltration maligne myélomateuse.Aucun type de lésion sur l’IRM initiale nes’est révélé être un facteur prédictif debonne ou de mauvaise réponse à l’auto-greffe. Les BR présentaient des lésionsIRM plus graves que les MR. De même, laconfrontation des types d’infiltration austade ISS en B1 (considéré comme un bonfacteur pronostique (46, 47)), n’a pas per-mis d’établir de corrélation. À l’inclusion,tous les BR (8 patients) ont une IRM de ty-pe II, III ou mixte II et III, alors que chezles MR, on compte un tiers de type 0 et I,et deux tiers de types II, III ou mixtes II etIII. Pour Lecouvet et al., dans une étudeportant sur 80 myélomes de stade III sui-vis pendant plusieurs années, il semblequ’une IRM anormale soit un facteur demoins bonne réponse au traitement (19).Inversement, des patients avec des IRMinitiales normales ont une meilleure ré-ponse à la chimiothérapie et une survieplus longue que ceux qui présentent deslésions focales ou diffuses (19). Mais lesdifférents types d’infiltration considéréschacun isolément n’ont pas montré de re-lation pronostique évidente. Cette équipea proposé, sur ces données, de combinerradiographies et IRM de manière systé-matique pour une meilleure appréciationdu pronostic initial des patients myélo-mateux de stade avancé (22).En dépit des avantages qu’elle possède, laplace de l’IRM au sein des facteurs pro-nostiques reste encore insuffisammentdocumentée dans les myélomes de stadeII ou III.

Rôle des biphosphonates dans l’évolution des fractures-tassements vertébralesLes biphosphonates n’ont pas montré,dans notre étude, d’effet protecteur surl’apparition de nouveaux TV. Au con-traire, on a constaté une progression plusimportante des TV dans le groupe de pa-tients traités. Les faibles effectifs de TVau sein de chaque groupe doivent inciter àune interprétation prudente des résultats.Quelques publications ont montré un ef-fet préventif des biphosphonates sur l’ap-parition de nouvelles fractures périphéri-ques ou vertébrales (48, 49). Par ailleurs,plusieurs publications ont démontré laperte d’efficacité clinique et biologique dece traitement chez les sujets carencés envitamine D (50). Un déficit non substituéen vitamine D (fréquent chez ces patients

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souvent âgés, alités, et déminéralisés parle myélome), peut aggraver l’ostéoclastoseavec l’utilisation de biphosphonates, endiminuant la calcémie et aggravant ainsiune hyperparathyroïdie secondaire. Maisdans notre étude, le groupe de patientstraités par biphosphonates présentait àl’inclusion un taux moyen de 25OHD3supérieur à celui du groupe non traité(13,3 ng/ml contre 10,0 ng/ml pour unenormale comprise entre 9 et 45 ng/ml).Cependant, de nombreuses publicationsont montré l’effet bénéfique des biphos-phonates dans le myélome sur l’hypercal-cémie (51), la douleur (48, 52), et la dimi-nution de la résorption osseuse (53, 54).

BiaisLa présente étude peut présenter quel-ques biais. Tout d’abord, dans cette étudeprospective, les 39 patients n’ont pas putous bénéficier d’une IRM à chaque bilan.Pour éviter des biais dans l’analyse de nosrésultats, nous n’avons conservé que lesdonnées des 20 patients ayant bénéficiéd’une IRM lors des premier et dernier bi-lans. L’inconvénient qui en résulte est laréduction de l’effectif de patients.Par ailleurs, les IRM n’ont été relues quepar un seul radiologue. L’interprétationdes IRM du squelette axial peut s’avérersubjective et la classification des types lé-sionnels parfois discutable. En particu-lier, la classification des types III (infiltra-tions diffuses) peut s’avérer discutable enfonction du lecteur mais aussi d’un pa-tient à l’autre. D’autre part, de nombreuxpatients présentaient des lésions IRMmixtes (types II et III sur un même exa-men). Ceci nous a posé un problème pourl’analyse statistique qui nécessite de fairecorrespondre à chaque bilan un seul typeIRM, afin d’en analyser l’évolution. Nousavons choisi de considérer le stade d’infil-tration le plus grave, quand il en existaitplusieurs, pour l’analyse statistique. Maiscette simplification n’a modifié en rien(nous l’avons vérifié patient par patient) lesens de l’évolution entre B1 et B2 (amélio-ration ou aggravation des lésions IRM).Pour l’analyse descriptive, nous avons parcontre conservé l’ensemble des informa-tions afin de représenter de façon fiablechaque type de lésions en IRM.Enfin, il faut signaler également un biaiscommun aux études traitant de maladiesmettant en jeu le pronostic vital : les cinqpatients décédés au cours de notre étudele sont du fait de leur maladie, et appar-tiennent à ce titre au groupe des mauvais

répondeurs. Cependant, faute de denierbilan, leurs données IRM n’ont pu êtreprises en compte. Ces patients présen-taient des lésions IRM graves.

ConclusionL’intérêt de notre étude est d’apporter desinformations sur l’évolution des lésionsen IRM pelvi-rachidienne chez des pa-tients myélomateux traités par autogref-fe, avec un recul d’environ 2 ans, alorsqu’il existe peu de publications sur ce su-jet. Les principaux résultats obtenusmontrent que :L’IRM pelvi-rachidienne initiale n’est pastoujours corrélée à l’évaluation clinico-biologique, ainsi que l’ont montré plu-sieurs publications.Même si le type d’infiltration médullaireest amélioré par l’autogreffe chez 65 %des patients, l’évolution des lésions enIRM est discordante par rapport à la ré-ponse clinico-biologique.L’IRM pelvi-rachidienne au diagnosticn’apparaît pas dans notre étude commeun bon facteur prédictif de réponse autraitement.Les biphosphonates ne semblent pasmontrer d’effet protecteur sur l’appari-tion de nouvelles fractures-tassementsvertébrales.L’IRM pelvi-rachidienne apporte des in-formations intéressantes dans le suivi desmyélomes traités par autogreffe, notam-ment dans l’évolution locale des lésionsmyélomateuses. Celle-ci n’est pas rensei-gnée par les critères biologiques de suiviactuels et est mal analysée par les radio-graphies standards. Mais ni nos résultatsni le faible nombre d’études publiées nepermettent pour l’instant de recomman-der son indication en routine dans le suivides myélomes traités par autogreffe.Enfin, l’IRM corps entier, encore en coursd’évaluation, pourrait être une techniqued’imagerie prometteuse dans la prise encharge initiale et le suivi du myélomemultiple, permettant une évaluation sen-sible et exhaustive des lésions dans lemyélome multiple.

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