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C. R. Acad. Sci. Paris, t. 331, Série I, p. 337–343, 2000 Problèmes mathématiques de la mécanique/Mathematical Problems in Mechanics Sur les inégalités de Korn en coordonnées curvilignes Philippe G. CIARLET, Sorin MARDARE Laboratoire d’analyse numérique, Université Pierre-et-Marie-Curie, 4, place Jussieu, 75005 Paris, France Courriel : [email protected] (Reçu le 17 juillet 2000, accepté le 20 juillet 2000) Résumé. On montre comment l’inégalité de Korn sur une surface régulière peut être établie comme un corollaire de l’inégalité de Korn tri-dimensionnelle, exprimée elle aussi en coordonnées curvilignes. 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS On Korn’s inequalities in curvilinear coordinates Abstract. We show how the inequality of Korn’s type for a smooth surface can be established as a corollary of the three-dimensional Korn inequality, likewise expressed in curvilinear coordinates. 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS Abridged English version The notations undefined here are defined in the French version (or see [7]). The three-dimensional Korn inequality plays a fundamental role in linearized three-dimensional elasticity. Although it is usually established in Cartesian coordinates [9], it may be also directly established in curvilinear coordinates ([6], [7], Theorem 1.7-4), in which case it takes the following form: THEOREM 1. – Let be a bounded, connected, open subset of R 3 with a Lipschitz-continuous boundary Γ, the set being locally on a same side of Γ, and let Γ 0 be a measurable subset of Γ, with area Γ 0 > 0. Define the space V(Ω) := v =(v i ) H 1 (Ω); v = 0 on Γ 0 . Let Θ ∈C 2 ( Ω; R 3 ) be a C 2 -diffeomorphism of onto its image Θ( Ω). Then there exists a constant C = C(Ω, Γ 0 , Θ) such that kvk 1,6 C X i,j e ikj (v) 2 0, 1/2 Note présentée par Jacques-Louis LIONS. S0764-4442(00)01671-2/FLA 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. 337

Sur les inégalités de Korn en coordonnées curvilignes

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C. R. Acad. Sci. Paris, t. 331, Série I, p. 337–343, 2000Problèmes mathématiques de la mécanique/Mathematical Problems in Mechanics

Sur les inégalités de Korn en coordonnées curvilignesPhilippe G. CIARLET, Sorin MARDARE

Laboratoire d’analyse numérique, Université Pierre-et-Marie-Curie, 4, place Jussieu, 75005 Paris, FranceCourriel : [email protected]

(Reçu le 17 juillet 2000, accepté le 20 juillet 2000)

Résumé. On montre comment l’inégalité de Korn sur une surface régulière peut être établie commeun corollaire de l’inégalité de Korn tri-dimensionnelle, exprimée elle aussi en coordonnéescurvilignes. 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales ElsevierSAS

On Korn’s inequalities in curvilinear coordinates

Abstract. We show how the inequality of Korn’s type for a smooth surface can be established asa corollary of the three-dimensional Korn inequality, likewise expressed in curvilinearcoordinates. 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales ElsevierSAS

Abridged English version

The notations undefined here are defined in the French version (orsee [7]). The three-dimensionalKorn inequalityplays a fundamental role in linearized three-dimensional elasticity. Although it is usuallyestablished inCartesiancoordinates [9], it may be also directly established incurvilinearcoordinates ([6],[7], Theorem 1.7-4), in which case it takes the following form:

THEOREM 1. –Let Ω be a bounded, connected, open subset ofR3 with a Lipschitz-continuousboundaryΓ, the setΩ being locally on a same side ofΓ, and letΓ0 be a measurable subset ofΓ, witharea Γ0 > 0. Define the space

V(Ω) :=v = (vi) ∈H1(Ω); v = 0 onΓ0

.

Let Θ ∈ C2(Ω; R3) be aC2-diffeomorphism ofΩ onto its imageΘ(Ω). Then there exists a constantC =C(Ω,Γ0,Θ) such that

‖v‖1,Ω 6C∑

i,j

∣∣ei‖j(v)∣∣20,Ω

1/2

Note présentée par Jacques-Louis LIONS.

S0764-4442(00)01671-2/FLA 2000 Académie des sciences/Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. 337

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for all v ∈V(Ω), where

ei‖j(v) :=1

2(vi‖j + vj‖i).

The functionsei‖j(v) are the covariant components of thelinearized change of metric tensorassociatedwith a displacement fieldvigi of the setΘ(Ω).

The inequality of Korn’s type on a surface(due to [1];seealso [2] and [3]) plays a fundamental role inthe mathematical analysis of linearly elastic shells (see[7]). It takes the following form:

THEOREM 2. –Let ω be a bounded, connected, open subset ofR2 with a Lipschitz-continuousboundaryγ, the setω being locally on a same side ofγ, and letγ0 be a measurable subset ofγ, withlength γ0 > 0. Define the space

VK(ω) :=η = (ηi) ∈H1(ω)×H1(ω)×H2(ω); ηi = ∂νη3 = 0 onγ0

.

Letθ ∈ C3(ω; R3) be an injective mapping such that the two vectors∂αθ are linearly independent at allpoints inω. Then there exists a constantc= c(ω,γ0,θ) such that∑

α

‖ηα‖21,ω + ‖η3‖22,ω1/2

6 c∑α,β

∣∣γαβ(η)∣∣20,ω

+∑α,β

∣∣ραβ(η)∣∣20,ω

1/2

for all η = (ηi) ∈VK(ω), where

γαβ(η) :=1

2(ηα|β + ηβ|α)− bαβη3,

ραβ(η) := η3|αβ − bσαbσβη3 + bσαησ|β + bτβητ |α + bτβ|αητ .

The functionsγαβ(η) andραβ(η) are the covariant components of thelinearized change of metric, andlinearized change of curvature, tensorsassociated with a displacement fieldηiai of the surfaceS = θ(ω).

The purpose of this Note is to announce the following result, whose detailed proof will be found in [8]:

THEOREM 3. –Korn’s inequality on a surface(Theorem1) may be established as a consequence of thethree-dimensional Korn inequality in curvilinear coordinates(Theorem2) for ad hoc choices of setΩ andmappingΘ.

Principle of the proof. –For ε0 > 0 small enough, the mappingΘ : Ω0→R3 defined by:

Θ(y, x3) := θ(y) + x3a3(y) for all (y, x3) ∈Ω0,

where Ω0 := ω× ] − ε0, ε0[ , is a C2-diffeomorphism [7], Theorem 3.1-1. Consider next the mapping(proposed by [5])

F : η = (ηi) ∈VK(ω) 7→ v = (vi) ∈V(Ω0)

defined by

vi(y, x3)gi(y, x3) = ηi(y)ai(y)− x3(∂αη3 + bσαησ)aα(y), (y, x3) ∈Ω0.

The proof then hinges on the fact, of interest per se, that there existsε1 satisfying0< ε1 6 ε0 such thatthe mappingF is an isomorphism between the Hilbert spacesVK(ω) and

VKL(Ω) := v ∈V(Ω); ei‖3(v) = 0 in Ω,whereΩ := ω× ]− ε1, ε1[ .

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Sur les inégalités de Korn en coordonnées curvilignes

1. L’inégalité de Korn tri-dimensionnelle en coordonnées curvilignes

Les indices et exposants latins prennent leurs valeurs dans l’ensemble1,2,3. L’ inégalité de Korntri-dimensionnelle, qui joue un rôle fondamental en élasticité linéarisée tri-dimensionnelle, est d’habitudeétablie encoordonnées cartésiennes(voir notamment Duvaut & Lions [9]). Cependant, comme l’a montré[6] (voir aussi [7], théorème 1.7-4), elle peut aussi être établiedirectementen coordonnées curvilignes,auquel cas elle prend la forme suivante :

THÉORÈME 1. –SoitΩ un ouvert borné et connexe deR3, de frontièreΓ lipschitzienne, l’ouvertΩ étantlocalement d’un même côté deΓ, et soitΓ0 une partie mesurable deΓ, de surface> 0. On définit l’espace

V(Ω) :=v = (vi) ∈H1(Ω); v = 0 surΓ0

.

Soit par ailleursΘ ∈ C2(Ω; R3) un C2-difféomorphisme deΩ sur son imageΘ(Ω). Alors il existe uneconstanteC =C(Ω,Γ0,Θ) telle que(| · |0,Ω et ‖ · ‖1,Ω désignent les normes deL2(Ω) et H1(Ω)) :

‖v‖1,Ω 6C∑

i,j

∣∣ei‖j(v)∣∣20,Ω

1/2

pour toutv ∈V(Ω), où

ei‖j(v) :=1

2(vi‖j + vj‖i).

On rappelle que lesdérivées covariantesvi‖j et lessymboles de ChristoffelΓpij sont définis par (un point

courant deΩ étant notéx= (xi), on pose∂i := ∂/∂xi) :

vi‖j := ∂jvi −Γpijvp et Γpij := gp · ∂igj,

oùgi := ∂jΘ et les vecteursgj sont définis par les relationsgj · gi = δji .L’ inégalité de Korn tri-dimensionnelle « en coordonnées curvilignes »du théorème 1 fait intervenir

le tenseur linéarisé de changement de métriqueassocié à un champ de déplacementsvigi des points

de l’ensembleΘ(Ω), représenté ici par sescomposantes covariantesei‖j(v) exprimées en fonction descoordonnées curvilignesxi des points(xi) = Θ(x), x= (xi) ∈Ω, de l’ensembleΘ(Ω). On peut démontrercette inégalité à partir de l’inégalité de Korn en coordonnées cartésiennes, qui fait alors intervenir lescomposantes cartésiennes1

2 (∂j vi + ∂ivj), avec ∂i := ∂/∂xi, du tenseur linéarisé de changement demétrique.

Mais on peut aussi la démontrerdirectement, en suivant d’ailleurs une démarche analogue à celle « encoordonnées cartésiennes » de Duvaut et Lions [9] : pour commencer, on établit, à l’aide d’unlemmefondamental dû à J.-L. Lions(mentionné pour la première fois dans Magenes & Stampacchia [13] ; celemme a été ensuite étendu à un ouvert à frontière « seulement lipschitzienne », comme celui considéré ici,notamment par Bolley & Camus [4] et Geymonat & Suquet [10]) uneinégalité de Korn en coordonnéescurvilignes « sans conditions aux limites », i.e., valable pour toutv = (vi) ∈ H1(Ω). On établit ensuiteun lemme du mouvement rigide linéarisé « en coordonnées curvilignes », exprimant que la semi-norme

v→∑

i,j |ei‖j(v)|20,Ω1/2

devient une norme sur l’espaceV(Ω). On conclut en raisonnant par l’absurde.

2. L’inégalité de Korn sur une surface

Les indices et exposants grecs (saufν dans∂ν ) prennent leurs valeurs dans l’ensemble1,2. L’ inégalitéde Korn sur une surface régulière, établie une première fois en [1] à l’aide d’une démonstration parfoistrès « technique », puis une seconde fois en [2] à l’aide d’une démonstration différente, plus « naturelle »(brièvement résumée ci-dessous), joue un rôle fondamental dans l’analyse du modèle linéaire de coques

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de Koiter [11] (et, plus généralement, dans l’analyse mathématique des coques linéairement élastiques ;cf. [7]). Elle s’énonce de la façon suivante (on notera les analogies avec le théorème 1) :

THÉORÈME 2. –Soitω un ouvert borné connexe deR2, de frontièreγ lipschitzienne, l’ouvertω étantlocalement d’un même côté deγ, et soitγ0 une partie mesurable deγ, de longueur> 0. On définit l’espace(∂ν désigne la dérivée normale extérieure le long deγ) :

VK(ω) :=η = (ηi) ∈H1(ω)×H1(ω)×H2(ω); ηi = ∂νη3 = 0 surγ0

.

Soit par ailleurs θ ∈ C3(ω; R3) une application injective telle que les deux vecteurs∂αθ sontlinéairement indépendants en tout point deω. Alors il existe une constantec = c(ω,γ0,θ) telle que(| · |0,ω,‖ · ‖1,ω et‖ · ‖2,ω désignent les normes deL2(ω),H1(ω), etH2(ω)) :∑

α

‖ηα‖21,ω + ‖η3‖22,ω1/2

6 c∑α,β

∣∣γαβ(η)∣∣20,ω

+∑α,β

∣∣ραβ(η)∣∣20,ω

1/2

,

pout toutη = (ηi) ∈VK(ω), où

γαβ(η) :=1

2(ηα|β + ηβ|α)− bαβη3,

ραβ(η) := η3|αβ − bσαbσβη3 + bσαησ|β + bτβητ |α + bτβ |αητ ,

les fonctionsbαβ et bσα désignant respectivement les composantes covariantes et mixtes du tenseur decourbure de la surfaceθ(ω).

On rappelle que lesdérivées covariantesηβ|α, η3|αη , bτβ |α, les symboles de ChristoffelΓσαβ , et lesfonctionsbαβ et bσα, sont définis par (un point courant deω étant notéy = (yα), on pose∂α := ∂/∂yαet∂αβ := ∂2/∂yα∂yβ) :

ηβ|α := ∂αηβ − Γσαβησ, η3|αβ = ∂αβη3 − Γσαβ∂ση3,

bτβ |α := ∂αbτβ + Γτασb

σβ −Γσαβb

τσ, Γσαβ := aσ · ∂αaβ ,

bαβ := a3 · ∂αaβ et bσα := aβσbαβ,

où (a∧ b désigne le produit vectoriel dea, b ∈R3 et |a| la norme euclidienne dea ∈R3) :

aα := ∂αθ et a3 :=a1 ∧ a2

|a1 ∧ a2|,

et les vecteursai sont définis par les relationsai ·aj = δij (pour plus de détails sur la géométrie différentielledes surfaces deR3, on pourra se reporter à [7], Ch. 2).

L’ inégalité de Korn « sur une surface »du théorème 2 fait intervenirdeuxtenseurs, letenseur linéariséde changement de métriqueet le tenseur linéarisé de changement de courbure, associés à un champ dedéplacementsηiai des points de la surfaceθ(ω), représentés ici par leurscomposantes covariantesγαβ(η)et ραβ(η) exprimées en fonction descoordonnées curvilignesyα des pointsθ(y), y = (yα) ∈ ω, de lasurfaceθ(ω).

Comme il a été montré dans [2], cette inégalité de Korn peut, comme celle du théorème 1, s’établirpar une démarche analogue à celle de Duvaut et Lions [9] : grâce aulemme de J.-L. Lionsdéjà signaléau paragraphe 1, on établit pour commencer une inégalité de Korn sur une surface « sans conditions auxlimites », i.e., valable pour toutη = (ηi) ∈ H1(ω) × H1(ω) × H2(ω). On établit ensuite un lemme dumouvement rigide linéarisé « sur une surface », exprimant que la semi-norme

η 7−→∑α,β

∣∣γαβ(η)∣∣20,ω

+∑α,β

∣∣ραβ(η)∣∣20,ω

1/2

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devient une norme sur l’espaceVK(ω) (ce lemme constitue d’ailleurs l’étape la plus délicate de ladémonstration). On conclut en raisonnant par l’absurde.

Remarque. – Blouza & Le Dret [3] ont montré que l’on peut réduire significativement la régularité del’applicationθ, a condition de remplacer les fonctionsγαβ(η) et ραβ(η) apparaissant dans le théorème 2par des extensions ad hoc. Ils obtiennent ainsi uneinégalité de Korn sur une surface « peu régulière »,valable siθ ∈W2,∞(ω; R3).

3. L’inégalité de Korn sur une surface est une conséquence de l’inégalité de Korn tri-dimensionnelle

L’objet de cette Note est d’annoncer le résultat suivant, dont on trouvera la démonstration détailléedans [8] :

THÉORÈME 3. –L’inégalité de Korn sur une surface(théorème2) peut être établie comme uneconséquence de l’inégalité de Korn tri-dimensionnelle en coordonnées curvilignes(théorème1), pour unchoix particulier d’ensembleΩ et d’applicationΘ.

Autrement dit, le théorème2 est un corollaire du théorème1.

Principe de la démonstration. –Les notations non redéfinies dans ce qui suit sont les mêmes qu’auxparagraphes 1 et 2 ; par ailleurs, on utilise la convention de la sommation par rapport aux indices etexposants répétés. On se donne un ouvertω ⊂ R2, une partieγ0 de γ = ∂ω de longueur> 0, et uneapplicationθ ∈ C3(ω; R3), qui satisfont toutes les hypothèses du théorème 2.

Étape1. – Suivant [7], théorème 3.1-1, il existeε0 > 0 tel que l’applicationΘ définie par

Θ(y, x3) := θ(y) + x3a3(y) pour tout(y, x3) ∈Ω0,

où Ω0 := ω× ]− ε0, ε0[ , est unC2-difféomorphisme deΩ0 sur son imageΘ(Ω0). En particulier, les troisvecteursgi(y, x3) = ∂iΘ(y, x3) sont linéairement indépendants en tout point(y, x3) ∈Ω0.

Étape2. – Suivant une idée de Chapelle [5] (déjà reprise par ailleurs dans [7], théorème 2.6-2), associonsà tout champ de vecteursη = (ηi) ∈VK(ω) le champ de vecteursv = (vi) : Ω0→R3 défini par

vi(y, x3)gi(y, x3) = ηi(y)ai(y)− x3(∂αη3 + bσαησ)aα(y) pour tout(y, x3) ∈Ω0.

Alors v ∈V(Ω0) et, de plus,

eα‖β(v) = γαβ(η)− x3ραβ(η) +x2

3

2

bσαρβσ(η) + bτβρατ (η)− 2bσαb

τβγστ (η)

,

ei‖3(v) = 0.

La suite de la démonstration consiste essentiellement à étudier les propriétés de l’application linéaire

F : η = (ηi) ∈VK(ω)−→ v = (vi) ∈V(Ω0)

ainsi définie.Étape3. –L’applicationF est continue.Notant quevi = (vjg

j) · gi et utilisant la forme particulière del’applicationΘ (étape 1), on obtient facilement les relations

vα = ηα − x3

(∂αη3 + 2bβαηβ

)+ x2

3

(bβα∂βη3 + bσαb

βσηβ),

v3 = η3,

d’où l’on déduit la continuité deF (on notera quebσα ∈ C1(ω)).Étape 4. – Il existe ε1 vérifiant 0 < ε1 6 ε0 tel que l’applicationF : VK(ω) → V(Ω), où Ω :=

ω× ]− ε1, ε1[ , soit injective.Si F(η) = 0, alorsη3 = 0 et il reste (étape 3)

ηα −(2x3b

βα − x2

3bσαbβσ

)ηβ = 0.

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Or, il existeε1 > 0 tel que la matrice d’éléments(δβα − 2x3bβα − x2

3bσαbβσ) soit inversible pour|x3|6 ε1 (et

l’on peut naturellement supposerε1 6 ε0).Étape5. –L’imageImF deVK(ω) par l’applicationF est l’espace

VKL(Ω) :=v ∈V(Ω); ei‖3(v) = 0 dansΩ

.

PuisqueImF⊂VKL(Ω) d’après l’étape 2, il suffit de vérifier l’inclusion opposée. Soit doncv = (vi) ∈VKL(Ω). On montre alors, par un calcul direct, que les relations∂3ei‖3(v) = 0 entraînent les relations(∂33v) · gj = 0, où v := vig

i, au sens des distributions surΩ (on peut en effet définir le produit d’unedistribution deH−1(Ω) par une fonction deC1(Ω)).

On en déduit que la relation∂33v = 0 est satisfaite dansΩ, à nouveau au sens des distributions. Il estalors classique (voir notamment Le Dret [12], lemmes 4.1 et 4.2) qu’il existe des champsη = ηia

i ∈H1(ω)et η1 = η1

i ai ∈H1(ω) nuls surγ0 tels quev = η+ x3η

1.Les relationseα‖3(v) = 0 entraînent alors queη1

α = −(∂αη3 + bσαησ) et η13 = 0 dansω, ainsi que

η3 ∈H2(ω) et∂νη3 = 0 surγ0.Étape6. – Conclusions.L’inégalité de Korn en coordonnées curvilignes sur l’ouvertΩ (théorème 1) et

l’expression des fonctionsei‖j(v) donnée à l’étape 2 montrent qu’il existe une constanteC1 telle que

‖v‖1,Ω 6C∑

i,j

∣∣ei‖j(v)∣∣20,Ω

1/2

6C1

∑α,β

∣∣γαβ(η)∣∣20,ω

+∑α,β

∣∣ραβ(η)∣∣20,ω

1/2

pour toutη ∈VK(ω), oùv := F(η). Pour conclure, il reste donc à établir l’existence d’une constanteC2

telle que ∑α

‖ηα‖21,ω + ‖η3‖22,ω1/2

6C2‖v‖1,Ω

pour tout η = (ηi) ∈ VK(ω), où v = F(η). Or cette inégalité ne fait qu’exprimer la continuité del’application inverseF−1 := VKL(Ω)→VK(ω) (qui est bien définie ;voir les étapes 4 et 5), continuité quirésulte du théorème du graphe fermé. En effet, l’application linéaireF : VK(ω)→VKL(Ω) est continue(étape 3), bijective (étapes 4 et 5), et les espacesVK(ω) etVKL(Ω) sont des espaces de Hilbert (il est clairqueVKL(Ω) est fermé dansV(Ω)). 2

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