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1 VOUILLON Julia Université François Rabelais Master 1 Appro-Div S Y N T H È S E D U P O R T F O L I O 2006-2007 Dirigé par : Dominique CHARBONNEAU

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VOUILLON Julia Université François Rabelais Master 1 Appro-Div

SYNTHÈSE

DU PORTFOLIO

2006-2007 Dirigé par : Dominique CHARBONNEAU

2

Table des matières

INTRODUCTION .......................................................................................................................... 2

I. Les contextes de stages................................................................................................................ 4

1) LE CUEFEE ......................................................................................................................... 4

2) LA SONACOTRA................................................................................................................. 7

3) CONCLUSION.................................................................................................................... 12

II. Suffit-il d'enseigner pour que les apprenants apprennent ? ........................................................13

III. Vers la professionnalisation .................................................................................................... 22

CONCLUSION ............................................................................................................................ 28

BIBLIOGRAPHIE........................................................................................................................ 29

SITOGRAPHIE............................................................................................................................ 30

DOCUMENT ANNEXE 1............................................................................................................ 31

DOCUMENT ANNEXE 2............................................................................................................ 33

DOCUMENT ANNEXE 3............................................................................................................ 35

3

Le Portfolio a pour but de mettre en relief des acquis de formation ou d'expérience, articulés

autour d'un objectif précis. Dans le cadre du Master 1 professionnel FLE, le Portfolio doit favoriser

une pratique réflexive de l'enseignant, c'est-à-dire un retour sur ses pratiques, l'analyse de son

cheminement professionnel et un processus d'auto-évaluation.

Cette année de Master FLE ne m'a pas seulement apporté une formation théorique. J'ai été

directement intégrée dans un processus de professionnalisation par le biais de stages d'enseignement

effectif et grâce auxquels le Portfolio est entièrement réalisable.

Ce travail se présentera sous forme de synthèse du Portfolio dans laquelle les éléments les

plus pertinents, ressortant de toute cette année de Master, seront mis en relief à travers trois grandes

parties.

Dans un premier temps, je procéderai à une description minutieuse des contextes des stages

effectués tout au long de l'année, ce afin de permettre au lecteur de recontextualiser les deux

situations et de comprendre plus aisément la problématique qui s'en dégage.

Dans un second temps, j'accorderai une place plus importante à l'analyse et la réflexion à

travers une question qui m'a semblée pertinente et prédominante lors de mes expériences. Suffit-il

d'enseigner pour que les apprenants apprennent ?

Enfin, la troisième partie sera consacrée au processus de professionnalisation qui découle de

la formation théorique et des expériences de stage. Il me faudra adopter un point de vue objectif sur

mes pratiques et acquis, dans le but d'évaluer mon cheminement vers la professionnalisation.

4

Dans cette première partie, je décrirai de manière détaillée le contexte des deux stages

réalisés cette année dans le cadre du Master 1. Il s'agit de mes premières expériences dans

l'enseignement du français langue étrangère, à partir desquelles je ferai le lien avec ma formation en

FLE. Les points saillants mis en relief seront développés dans la deuxième partie de ma synthèse

autour d'une problématique reflétant de manière argumentée mes impressions et représentations

quant à mes stages.

1) LE CUEFEE

Nombre d'heures, institution et modalités d'enseignement :

Dans la totalité, j'ai effectué trente heures d'enseignement effectif au CUEFEE1 à raison

d'une heure et demie par semaine. Le CUEFEE est une institution rattachée à l'université François

Rabelais de Tours qui assure un enseignement destiné à faciliter l'intégration des étudiants

d'échanges.

Pendant toute cette année universitaire, j'étais chargée d'un atelier de renforcement

linguistique visant à reprendre des points grammaticaux en particulier, vus dans les cours de

grammaire de la semaine par mon enseignante tutrice. Je devais donc me conformer au programme

de la méthode Taxi 32 suivi par les étudiants, mais tout en ayant la possibilité de garder une réelle

autonomie quant à la préparation des cours et le choix des activités.

Le public :

Le CUEFEE accueillant de nouveaux étudiants et réorganisant ses classes chaque semestre,

j'ai donc eu deux classes différentes au cours de l'année. Les étudiants étaient de niveau

intermédiaire 2 (B1-B2 du CECRL3), adultes, allophones et non captifs, venus en France dans des

buts variés. Il est important de signaler que l'atelier de renforcement linguistique fait partie des

nombreuses options que les étudiants peuvent choisir, à raison de deux par semestre, ce qui

explique le faible effectif de mon cours. Je n'ai jamais eu plus d'une dizaine d'étudiants, ce qui me

1 Centre Universitaire d'Enseignement du Français pour Étudiants Étrangers 2 JOHNSON A.-M. (niveau 3), 2002-2004, Taxi 3, Paris, Hachette-Fle. 3 Conseil de l'Europe (2005), Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues, Didier

5

convenait parfaitement. Il était ainsi plus aisé de connaître les apprenants, leurs besoins, leurs

attentes, leurs difficultés, et de proposer des activités d'expression orale. De plus, je me suis sentie

moins intimidée durant les premiers cours.

Au premier semestre, mon atelier de renforcement linguistique était constitué de douze

étudiants en majorité chinois, ainsi que deux hongrois et un iranien. Il s'agissait d'une classe très

soudée, qui se prêtait très facilement aux travaux de groupe et aux activités d'expression orale.

Les étudiants du deuxième semestre étaient de nationalités plus diverses : chinoise,

japonaise, coréenne, mexicaine et russe. Ils étaient également une dizaine, mais venaient moins

régulièrement en cours que les étudiants du premier semestre.

Mon enseignante tutrice :

Corinne VASSEUR est enseignante au CUEFEE et assure plusieurs types de cours,

principalement pour le niveau intermédiaire : grammaire, compréhension et expression écrite et

orale, littérature.

Avant le début du premier semestre, nous avions convenu, lors d'une réunion, que mon cours

devait se construire autour d'activités variées, faisant appel aux quatre compétences (EE, EO, CE,

EO4) et basées principalement sur l'aspect ludique et créatif.

J'ai observé les trois premiers cours du semestre qu'elle a elle-même donnés, tout en ayant

une participation active. Elle m'a demandé de présenter quelques exercices et de passer dans les

groupes au moment des activités d'expression écrite. J'ai pu ainsi me familiariser avec les

apprenants et le type de cours. J'ai ensuite débuté seule à partir de la quatrième séance, en informant

systématiquement mon enseignante tutrice de mes intentions et de mes plans de cours.

Elle m'a de même beaucoup aidé au début quant au choix des activités et des manuels à

suivre.

Matériel et supports utilisés :

L'une de mes plus grandes préoccupations au départ était de ne pas avoir suffisamment de

supports pour trouver des idées d'activités. Je n'avais pas de manuel ni d'exercices déjà préparés, j'ai

donc dû effectuer plusieurs recherches dans les manuels de la bibliothèque universitaire (Forum 25,

Nouvelles Frontières 36, Campus 27, Mosaïque 2 ou 38, Cadences 29, etc.). Pour la préparation de

4 Expression Écrite, Expression Orale, Compréhension Écrite et Compréhension Orale 5 CAMPA A, MESTREIT. C, MURILLO. J, TOST. M (2006), Forum 2, Hachette FLE 6 DOMINIQUE.P, GIRARDET. J, et alii (1988-1990), Nouveau sans frontières 3, Paris, Clé international. 7 GIRARDET. J, PECHEUR. J (2002), Campus 2, Paris, Clé.

8 JOB. B, et alii (1994), Mosaïque 2-3, Paris, Clé international.

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mes premiers cours surtout, ainsi que pour quelques activités plus grammaticales, j'ai utilisé divers

exercices provenant de ces méthodes de FLE généralistes pour adultes. Cependant, les activités

proposées ne me plaisaient pas vraiment et ne convenaient pas au but fixé par mon enseignante

tutrice et moi-même. Il ne s'agissait pas de faire le même type d'activités que dans les autres cours,

mais de trouver plusieurs exercices ludiques, variés et à visée communicative sur un thème précis.

Puis ma tutrice m'a conseillé deux manuels très récents, Alter Ego 210 et Rond Point 211, sur

lesquels je me suis beaucoup appuyée tout au long de mon stage. Les thèmes proposés, les types

d'activités, la variété des compétences (EE, EO, CE et CO) convenaient parfaitement à mon public,

à leurs attentes, et à notre conception mutuelle de ce cours.

Enfin, j'ai essayé de varier les activités et les compétences visées en proposant aux

apprenants plusieurs exercices de compréhension orale (écoutes sur cd provenant des méthodes

Alter Ego 2 et Rond Point 2, reportage télévisé).

Les activités pédagogiques mises en place :

Durant mon stage au CUEFEE, j'ai tenté de mettre en place des activités variées, faisant

appel aux quatre compétences, afin d'exposer les apprenants à plusieurs types d'exercices, tant à

l'écrit qu'à l'oral.

Les activités de compréhension écrite étaient le plus souvent des documents fabriqués,

parfois authentiques, provenant de manuels. J'ai également proposé à plusieurs reprises, surtout

après quelques mois de stage, des activités sur des textes authentiques (articles de journaux ou

articles trouvés sur Internet), à partir desquels j'élaborais une série de petites questions, ou des

affirmations Vrai/Faux.

Les activités de compréhension orale : j'ai très souvent proposé des exercices d'écoute

durant mon stage, issus des manuels que j'utilisais le plus, Alter Ego 2 et Rond Point 2. Les écoutes

ne sont pas trop longues, donnent lieu à plusieurs types d'activités (questions de compréhension,

repérage d’informations, comparaison avec les informations d'un document écrit, etc) et

introduisent différentes façons de parler, différents registres, différentes voix.

Les activités d'expression écrite : pour ce type d'activités, j'ai préféré favoriser le travail en

groupe de deux ou trois étudiants, en essayant de mélanger le plus possible les nationalités afin de

9 BERGER. D, MÉRIEUX. R (1994-1995), Cadences 2, Paris, Hatier-Didier. 10 BERTHET. A, HUGOT. C, KIZIRIAN. V, SAMPSONIS. B, WAENDENDRIES. M (2006), Alter Ego 2, Hachette

Français langue étrangère 11 FLUMIAN. C, LABASCOULE. J, ROYER. C (2006), Rond Point 2, Grenoble, PUG

7

privilégier la production en langue cible et d'éviter le plus possible l'utilisation de la langue

maternelle12.

Les activités d'expression orale : un des objectifs du cours était de donner une place

importante à la production orale, en privilégiant la prise de parole active des apprenants à partir de

thèmes et activités variés. Tout d'abord, chaque travail de groupe donnait lieu systématiquement à

une mise en commun des idées à l'oral. De plus, les étudiants étant peu nombreux, je profitais de

chaque activité pour les faire tous participer ou donner leur opinion sur le sujet.

Pratiques évaluatives :

Ce cours fonctionnait conformément au système du contrôle continu, c'est-à-dire que les

étudiants étaient évalués grâce à plusieurs notes : différents travaux réalisés tout au long du

semestre et un examen final traitant de plusieurs points grammaticaux et thèmes vus en classe.

Je n'ai pas souhaité mettre de notes de participation orale en classe car je trouve que tout le

monde n'a pas la même facilité à s'exprimer en public, moi la première durant mon parcours

d'apprenante. Mon objectif était de les faire participer le plus possible, dans le but de constater leurs

progrès et de les aider à s'approprier la langue, mais en aucun cas pour les évaluer.

Cependant, j'aurais peut-être pu prendre en compte dans la note finale, les quelques élèves

qui faisaient ou rendaient les devoirs à la maison, car rares étaient ceux qui y pensaient...

Le fait de devoir mettre des notes m'a quelque peu troublée, je n'avais jamais songé

auparavant que cela pourrait être tâche aussi complexe. Les élèves ont tous eu de très bonnes notes,

entre 14/20 et 19,5/20, ce qui selon moi, était proportionnel au travail fourni durant le semestre.

Leur niveau en français était très bon et dépassait largement mes espérances. Cependant, à la suite

de cet examen, je me suis questionnée sur ma manière d'évaluer : peut-être mon barème n'était-il

pas assez rigoureux ? Ou était-ce l'examen qui était trop facile ? Était-il vraiment adéquat au niveau

des apprenants ? Le fait est qu'il m'a coûté de devoir mettre des notes, mais depuis le premier

semestre je crois que j'ai pris conscience de certaines choses, et j'ai évolué dans ma représentation

de l'enseignement et dans mes pratiques. Je dois absolument intégrer l'idée que l'évaluation fait

entièrement partie du métier d'enseignant !

12 Il y avait au moins deux étudiants de même nationalité au sein d'une même classe.

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2) LA SONACOTRA

Nombre d'heures, institution et modalités d'enseignement :

En complément du stage au CUEFEE, j'ai également donné des cours de français langue

étrangère et de soutien scolaire, à raison d'une heure et demie par semaine, à la SONACOTRA13

(récemment appelée ADOMA14) de Joué-lès-Tours, centre d'accueil pour les demandeurs d'asile

accueillant près de 160 résidents.

Le public :

J'ai eu à charge un public dont je méconnaissais les caractéristiques, mais qui cependant m'a

beaucoup attirée. Je ne m'étais encore jamais projetée dans cette branche du FLE en tant

qu'enseignante, cela explique peut-être les quelques difficultés d'adaptation auxquelles j'ai dû faire

face dès le début de mon stage.

J'ai donc été confrontée à un groupe d'environ huit jeunes majeurs15 demandeurs d'asile (leur

nombre variant au cours de l'année en fonction des arrivées et des départs), de niveau très

hétérogène (allant du niveau A1.1 au niveau B2 du CECRL), allophones, scolarisés ou non. Ils

provenaient en majorité de pays de l'Est (Russie, Tchétchénie, Arménie) et avaient donc la

particularité de partager une langue commune, qui n'est pas la langue maternelle de tous : le russe.

Se pose donc dans ce cas la question du rapport aux langues et de la place prédominante de la

langue maternelle ou étrangère dans la classe de FLE, que je développerai ultérieurement dans cette

synthèse.

J'ai très vite pris conscience que ce type de public avait des attentes et des besoins bien

précis : faire usage de la langue française dans un aspect pratique et communicatif, afin de pouvoir

s'intégrer au plus vite dans le pays d'accueil.

Ces jeunes majeurs, en attente de la nationalité française, se trouvent dans un processus de

mobilité identitaire importante étant donné qu'ils ont dû quitter leur pays d'origine pour des raisons

politiques dans des conditions difficiles et donc renoncer à leur nationalité, à leur identité nationale.

Ils ont trouvé refuge en France, pays d'accueil pour l'instant, mais qui n'est pas nécessairement leur

pays d'avenir. Les demandes de papiers sont susceptibles d'être déboutées, au bout d'un temps très

variable, certains jeunes étant en France depuis un an et demi. Ils sont donc partagés entre deux

nationalités.

13 SOciété NAtionale de COnstruction pour les TRAvailleurs 14 Nom construit sur le latin « ad » qui signifie « vers » et « domus », la maison. Par extension, invite à l'interaction et

au rassemblement. 15 Entre 18 et 22 ans environ

9

Ils n'ont pas tous eu le même parcours, c'est pourquoi nous avons à la Sonacotra un groupe

d'apprenants très hétérogène. À leur arrivée en France, certains n'avaient aucun préracquis en

français. Ils n'avaient jamais appris cette langue et c'est celle qui, dès à présent, sera leur langue

seconde s'ils souhaitent s'intégrer dans la société française. Je tiens à ajouter qu'une des spécificités

de ce type de public est peut-être une non-acceptation du processus d'apprentissage d'une langue

nouvelle, rattachée à un pays avec lequel ils n'avaient aucun lien auparavant. La mobilité identitaire

peut provoquer un fort sentiment d'insécurité linguistique et implique parfois que les apprenants ne

se sentent pas tout à fait prêts à entrer dans un nouvel apprentissage, aspect que je développerai

dans la deuxième partie de ma synthèse.

Place du stagiaire à l'intérieur de l'institution :

Parallèlement à ma place au sein de l'institution se pose également la question de mon statut

d'enseignante dans la classe de FLE. J'avais tout d'abord beaucoup de difficultés à considérer mon

groupe d'apprenants comme une classe à part entière, étant donné qu'ils ne venaient pas

régulièrement en cours et étaient de moins en moins nombreux au fur et à mesure de l'année. Je

tiens à préciser ici que ce point en particulier sera abordé dans la deuxième partie de ma synthèse et

constituera l'un des points de départ dans le développement de ma problématique.

Il était donc très difficile d'établir un suivi de chaque apprenant et de créer une progression

dans les activités. De plus, la question de l'évaluation et des notes ne s'est pas posée, et en effet,

même s'il m'est difficile de m'habituer à ces pratiques16, elles jouent pour moi un rôle important

dans ma représentation de l'enseignant. Enfin, d'autres facteurs ont quelque peu bouleversé mes

attentes en tant qu'enseignante stagiaire : une salle de rangement en guise de salle de classe, le fait

que les apprenants n'aient ni cahier ni crayon en arrivant en classe, ne notent pas même le

vocabulaire important et repartent sans les supports écrits donnés pendant le cours... Tous ces

éléments ont joué, je pense, sur mon implication dans mon rôle d'enseignante.

Quant à ma place dans l'institution, elle n'avait pas grande incidence étant donné que je

n'étais présente sur le lieu de stage qu'une heure et demie par semaine. En résumé, je pense avoir eu

un rôle d'intervenante plutôt que d'enseignante.

Pour ce qui est de mes liens avec les responsables de la Sonacotra, il n'est pas difficile de

dire qu'ils ont été très minces tout au long de mon stage. Je travaillais en réelle autonomie pour la

16 Voir les pratiques évaluatives du CUEFEE p. 7

10

préparation de mes cours et leur déroulement. Je n'avais pas de tuteur attitré, et personne n'est venu

observer mes cours. Il faut signaler que dans cette institution, j'ai eu l'impression que les cours de

français langue étrangère n'étaient pas perçus comme une priorité. Il est vrai qu'aucun des

responsables de la Sonacotra n'est spécifié dans ce domaine. Ils se sont vite lassés de devoir

remotiver les jeunes majeurs chaque semaine pour qu'ils assistent aux cours de français et le seul

lien qu'ils avaient parfois avec nous, les stagiaires, étaient les fiches de suivi que nous devions

remplir à la fin de chaque cours. Une réunion tardive a cependant eu lieu au mois d'avril afin de

faire un bilan sur nos expériences.

Matériel et supports utilisés :

L'une de mes plus grandes difficultés au cours de ce stage a été de ne pas trouver de manuel

adapté à mon public. Étant quelque peu démunie quant à mon manque d'expérience dans ce

domaine, j'ai tenté de m'appuyer sur plusieurs manuels (Je lis, j'écris le français17 ; Je parle et je

pratique le français18 ; Les exercices de grammaire, A119 ; Exercices de vocabulaire en contexte,

niveau débutant20 ; Alter Ego 121) et d'adapter les activités en fonction du niveau de mes apprenants

et de leurs attentes.

Puis, petit à petit, j'ai pris conscience que l'écrit n'était pas, pour les apprenants, une priorité.

Hormis Alter Ego 1 qui propose des activités très variées, les manuels sur lesquels je me basais au

début du stage ne correspondaient pas aux attentes ni aux besoins de mon public. Il est à noter que

certains élèves n'ont probablement pas été scolarisés dans leur pays d'origine, ce qui implique qu'ils

éprouvent des difficultés à se concentrer sur un exercice trop axé sur l'écrit et qui requiert une

certaine rigueur. Il a donc fallu que je m'adapte et que je complète ces supports avec des exercices

plus motivants, à partir de documents authentiques (programmes de cinéma), ou du moins plus

ludiques (Pictionnary, jeu de questions,...).

Il est important d'ajouter que l'absence du support de base de l'enseignement m'a quelque

peu fait défaut : je n'avais pas de tableau ! Je m'y suis habituée, mais il est vrai que ce support est

presque indispensable pour fixer des mots et des phrases à l'écrit et donner des explications à

l'ensemble des apprenants.

17 BARTHE. M, CHOVELON. B (2004), Je lis, j'écris le français, Méthode d'alphabétisation pour adultes, Grenoble,

PUG 18 BARTHE. M, CHOVELON. B (2005), Je parle et je pratique le français, Post-alphabétisation pour adultes,

Grenoble, PUG 19 AKYUZ. A, BONENFANT. J et alii (2005), Les exercices de grammaire, A1, Hachette FLE 20 ELUERD. R (2005), Exercices de vocabulaire en contexte, niveau débutant, Hachette FLE 21 BERTHET. A, HUGOT. C et alii (2006), Alter Ego 1, Paris, Hachette FLE

11

Les activités pédagogiques mises en place :

Mes pratiques pédagogiques ont beaucoup évolué au cours de l'année. Au début, n'ayant

aucune expérience et ne connaissant pas encore vraiment les spécificités du public, je me suis vite

laissée déborder par les difficultés d'organisation dues au niveau très hétérogène des apprenants. Je

leur donnais donc des exercices de grammaire, structuraux, différents selon les niveaux. Mais

certains ne maîtrisant pas du tout l'écrit et paraissant ne pas adhérer à une méthode d'apprentissage

par la grammaire, j'avais donc beaucoup de mal moi-même à gérer les difficultés de tous mes

élèves. De plus, je pense que je me référais beaucoup aux modèles issus du Français Langue

Maternelle pour ce qui est des contenus et de la méthodologie de mes cours, ce qui n'était pas du

tout adapté à un public FLE.

J'ai ensuite pris conscience, petit à petit, que ce type de pratique ne leur permettrait en rien

de progresser dans la langue française telle qu'ils en avaient besoin pour s'intégrer dans la société.

J'ai donc concentré mes activités sur le vocabulaire de la vie quotidienne22 (le corps humain et le

visage, les vêtements, le temps qu'il fait, les couverts et la table, les transports, les lieux dans la

ville, les pièces de la maison...), d'activités plus ludiques et surtout d'avantage ciblées sur des

tâches23 (aller au cinéma et choisir un film en fonction de différents critères, savoir lire l'heure, les

dates, savoir se repérer dans la ville, etc). Les apprenants avaient également besoin de s'exprimer à

l'oral, j'ai donc profité de leur effectif restreint pour entamer de petites discussions sur des thèmes

divers. Les cours se sont améliorés depuis ces changements dans les activités. J'ai pu me concentrer

sur les difficultés de chacun et l'adéquation des exercices leur a permis de reprendre confiance en

leurs capacités et leurs aptitudes à les réaliser correctement.

Organisation de l'enseignement :

Il m'a été très difficile d'organiser mon enseignement de manière planifiée et progressive, les

apprenants ne venant pas régulièrement en cours. Il était donc presque impossible de réaliser un

suivi dans les activités. Certaines activités préparées n'ont pas pu être mises ne place durant les

séances prévues, par manque d'effectif. C'est pourquoi, pour chaque cours, je me munissais de

toutes les activités proposées depuis le début de l'année ainsi que celles préparées pour le jour

même, afin de pouvoir m'adapter sur le moment au nombre d'élèves et aux compétences déjà

acquises ou non lors des activités précédentes.

Il est à noter que ces jeunes majeurs demandeurs d'asile n'ont aucune obligation d'assister

aux cours de français proposés dans le centre. L'implication, les efforts ou les progrès ne sont pas

22 Voir annexe 1 23 Voir annexe 2

12

pris en compte dans l'accord ou le refus des papiers d'identité. Ces données peuvent seulement, et

dans des cas très rares, être mises en avant lors d'une demande de régularisation en cas de refus de

l'asile, comme c'est le cas de l'une de nos apprenantes. Cependant, je ne crois pas que tous les

demandeurs d'asile soient au courant d'une telle procédure, ce qui expliquerait peut-être leur

manque de motivation quant aux cours de français.

Une dernière précision est à ajouter : les apprenants, pour certains, assistent à d'autres cours

de FLE gratuits en dehors du centre d'accueil (au GRETA24 par exemple), mais sur une durée assez

courte et définie. Les apprenants y sont inscrits par les responsables de la Sonacotra., mais la

présence n'y est pas non plus obligatoire.

Pratiques évaluatives :

Au cours de ce stage, il n'a pas été question d'évaluer les apprenants sur leurs connaissances

ou leur compétences. La présence en classe était fortement conseillée, mais restait facultative, et les

objectifs de toute l'année ne pouvaient être clairement définis en raison de l'absentéisme récurrent,

de l'arrivée fréquente de nouveaux apprenants ou du départ de certains.

3) CONCLUSION

Les contextes de ces deux expériences permettent de mettre en évidence deux points

saillants.

Je pense que les deux stages sont très différents, presque opposés, l'un étant sécurisant,

l'autre non. En tant que stagiaire débutante, j'ai trouvé au CUEFEE tout ce qui relevait de mes

représentations et de mes attentes, peut-être quelque peu idéalisées, sur le métier d'enseignant : une

classe, du matériel, des supports adaptés, des examens, bref, un milieu cadré tel que j'en ai

l'habitude, notamment en tant qu'apprenante scolarisée en France. Pour ce qui est de la motivation

des apprenants, j'ai même été agréablement surprise et cela a je pense, beaucoup participé à ma

propre motivation. La Sonacotra, à l'inverse, a représenté pour moi un côté insécurisant. Je ne me

suis pas sentie enseignante, j'ai très vite été démunie et en manque de repères. Il a fallu que je fasse

preuve d'une plus grande capacité d'adaptation par rapport à un certain nombre de « difficultés »,

que je développerai dans la deuxième partie de cette synthèse.

24 Groupement d'établissement de formations pour adultes, proposant notamment une formation en FLE

13

Ces deux expériences ont également été marquées par un lien très fort entre l'implication et

le contexte. En effet, la difficulté d'enseigner à la Sonacotra et le manque de motivation des

apprenants au fur et à mesure de l'année ont eu sur moi un impact quelque peu négatif. Je me suis

moi-même démotivée à plusieurs reprises, à la grande différence du stage au CUEFEE, où l'enjeu

de faire progresser les apprenants et d'améliorer mes pratiques était, je pense, réellement atteint.

14

La première partie de ma synthèse m'a permis de mettre en relief quelques points saillants

conduisant à la problématique suivante : suffit-il de proposer un enseignement pour que

l'apprentissage fonctionne ? Plusieurs facteurs, notamment dans le contexte de la Sonacotra, ont

quelque peu bouleversé la représentation que je me faisais de l'enseignement du Français Langue

Étrangère. Il me paraît donc pertinent de les développer dans cette seconde partie, tout en essayant

de prendre en compte au mieux le poids et les spécificités du public, le lieu

d'enseignement/apprentissage et le contexte politique actuel.

Les paramètres d'un cours de Français Langue Étrangère

Avant de m'intéresser à l'enseignement du FLE je ne m'étais pas réellement interrogée sur

les divers paramètres qu'il faut, en tant qu'enseignant, prendre en compte dans l'élaboration et le

déroulement de notre cours. Et c'est non seulement le Master 1 FLE qui m'a apporté tous ces

éléments théoriques si utiles dans la pratique, mais également mes deux expériences de stage.

Auparavant, j'imaginais qu'un enseignant devait être apprécié de ses apprenants pour que le cours

soit un « bon » cours, c'est-à-dire pour que les apprenants apprennent ce qu'il leur enseigne.

Cependant, j'ai pris conscience que tout ne se basait pas sur la relation

enseignant/apprenants. Nombreux sont les autres paramètres qui entrent en compte dans le cours de

FLE et qui garantissent ou bien au contraire font obstacle à l'apprentissage. Dans un premier temps,

tout cours de FLE s'adresse à des apprenants étrangers, ce qui, bien évidemment, implique une

confrontation entre différentes cultures d'apprentissage, différentes histoires, différentes

représentations de l'enseignement/apprentissage. Certains publics ont des passés plus lourds, et plus

notables sont donc les conséquences sur l'apprentissage et la motivation des apprenants.

D'autre part, nous ne pouvons négliger d'autres types de paramètres tels que l'institution, le

rôle du cours dans cette dernière, la place de l'enseignant, etc, autant de notions qui apparaissent

dans la première partie de cette synthèse, « les contextes de stage », et qui interrogent ma

problématique. Ces paramètres sont présents dans tout cours de Français Langue Étrangère. Qu'est-

ce qui, toutefois, diffère entre mes deux lieux de stage ?

15

L'absentéisme

L'absentéisme a été un problème majeur tout au long de l'année, surtout à la Sonacotra et

lors du deuxième semestre au CUEFEE.

À la Sonacotra, nombreux ont été les efforts de mobilisation et de motivation auxquels nous

nous sommes prêtés. Les cours de français à la Sonacotra pour les jeunes majeurs étaient un

phénomène nouveau et il a fallu du temps et de la patience pour que tout se mette en place et que les

apprenants s'habituent aux horaires et aux jours des cours de chacune d'entre nous. Clémentine,

Marie et moi avons en effet proposé trois possibilités de cours par semaine, en variant les jours et

les horaires selon nos disponibilités et celles des apprenants. Il a fallu sensibiliser les jeunes à

maintes reprises sur la nécessité d'apprendre le français, en organisant plusieurs réunions, jusqu'à ce

qu'ils acceptent enfin de participer aux cours. Leur présence dans les cours suivants était donc assez

assidue, pour diminuer à nouveau au fil des semaines.

Nous ne connaissions pas toujours la raison de leurs absences. Parfois, il s'agissait de

rendez-vous divers, d'autres fois ils ne donnaient signes de vie et n'étaient sûrement pas au centre,

ou encore ils n'étaient pas loin mais ne se présentaient pas en cours. Dans ce cas, la plupart du

temps, nous devions aller les chercher nous-même pour leur rappeler que le cours devrait être

commencé. Une autre raison peut-être était un oubli systématique de l'heure du cours. J'ai donc

entrepris une révision de l'heure, mais je me suis rendue compte que le problème ne venait pas de

là: ils savaient parfaitement comprendre les heures en français.

Le même problème s'est posé lors du deuxième semestre de mon stage au CUEFEE où

l'effectif de mon groupe atteignait rarement plus de quatre ou cinq étudiants au lieu de dix. Je n'ai

pas non plus eu connaissance des « vraies » raisons de leurs absences. La seule différence de ce

stage avec celui de la Sonacotra, est que les apprenants devaient être pénalisés au niveau de

l'évaluation. Les apprenants de la Sonacotra, eux, mettaient directement en péril leur chance

d'apprendre la langue d'intégration.

Le taux d'absentéisme s'est révélé être un obstacle. Dans un premier temps, il était très

difficile de procéder à un suivi dans les activités et donc de proposer des exercices réellement

adaptés. Dans un second temps, cela a parfois entraîné une baisse de motivation dans mon propre

enseignement, j'ai parfois eu envie d'arrêter de fournir des efforts que je considérais inutiles. Mais il

est important de souligner que ce problème a eu des impacts également positifs et m'a permis de me

remettre en question plus d'une fois. Je me suis très souvent demandée si le problème justement ne

venait pas de moi, de mes méthodes et pratiques d'enseignement, et c'est de cette manière que j'ai

réussi à le surmonter. Peut-être n'ai-je pas assez fixé les « règles » dès le début. Au CUEFEE, je

16

pense que j'aurais dû informer plus clairement les étudiants de mes pratiques évaluatives, c'est-à-

dire inclure dans le contrôle continu une note de présence. Il est vrai que je n'y avais pas songé

avant le début de mon stage, et qu'il ne s'agit pas d'une pratique à laquelle j'adhère totalement, mais

lors de mes prochains stages ou emplois, je pense que je réfléchirai à cette question avec un regard

nouveau. De plus, je tiens à ajouter que j'ai sûrement accordé beaucoup de confiance à leur statut

d'adultes, tant au CUEFEE qu'à la Sonacotra. La raison se trouve peut-être dans le fait que j'ai

longtemps été animatrice pour des enfants, qui n'était pas un public totalement autonome. Quand je

me suis retrouvée face à ces apprenants adultes, mon premier ressenti était que je devais leur laisser

beaucoup plus de liberté et d'autonomie en raison de leur âge. Mais peut-être ont-ils eu trop le

choix, finalement.

Quant à la Sonacotra, le problème se posait différemment, les apprenants n'étant ni évalués,

ni obligés de venir en cours. Je crois donc que j'aurais peut-être dû les sensibiliser davantage sur

l'enjeu de ce cours pour eux, me montrer plus autoritaire, leur faire comprendre que l'effort devait

être réciproque. Suite à ma remise en question, je me suis également fixé de nouveaux objectifs et

j'ai procédé à un choix des activités plus adapté au public, à leurs attentes, leurs besoins, leur

niveau, en essayant de toujours varier les compétences et le type d'activités. Ces nouvelles

méthodes m'ont permis de proposer des cours plus appropriés et plus dynamiques. Cependant,

malgré mes efforts, le taux d'absentéisme n'a pas diminué et je n'ai pas réussi à remédier à ce

problème.

De plus, en me rendant à la Sonacotra chaque mercredi, je ne savais jamais ce qui

m'attendait. Tout était totalement imprévu et aléatoire. Je préparais auparavant des activités mais ne

savais jamais qui en aurait le bénéfice, quel apprenant serait présent, à quelle heure il viendrait. À

plusieurs reprises de même, j'ai eu quelques surprises : l'arrivée d'un apprenant le jour même,

n'ayant jamais appris le français. Le cours était, évidemment bouleversé car je n'avais aucune

activité appropriée à son cas.

Je ne parvenais donc pas à m'établir sur des bases solides. Rien n'était jamais acquis et il

fallait presque renouveler à chaque cours les efforts du début.

Qu'avaient-ils appris à la fin des cours ?

Le stage à la Sonacotra a été pour moi quelque peu déstabilisant. Tout comme au CUEFEE,

il s'agissait de ma première expérience d'enseignement. Je comptais donc beaucoup sur ces stages

pour acquérir des compétences, de la pratique, une attitude d'enseignante. Je ne me sentais pas

capable d'enseigner avant d'entrer en Master 1 FLE, et les stages étaient pour moi l'occasion de

17

confirmer mon choix professionnel, de prendre confiance quant à ma capacité à enseigner.

D'une part, le CUEFEE m'a confortée dans mes projets, d'autre part la Sonacotra a

bouleversé mes représentations de l'enseignement/apprentissage. J'ai eu l'impression, à maintes

reprises, d'être inutile. Il me semblait que les apprenants n'avaient rien appris à la fin de la séance.

Au cours de l'année, j'ai voulu revoir des notions que je pensais assimilées, mais ce n'était pas le

cas. De plus, les apprenants repartaient sans les polycopiés sur lesquels nous avions travaillé en

classe j'avais donc la nette impression que ce que nous avions abordé en classe allait très vite être

oublié. J'ai très souvent considéré cela comme un manque d'implication personnelle dans

l'apprentissage du français, de par, je pense, ma propre expérience de l'apprentissage d'une langue

étrangère. Mes représentations à ce sujet, c'est-à-dire le travail personnel à fournir pour apprendre

une langue, l'apprentissage du vocabulaire, une pratique régulière et hors de la classe, m'ont

probablement amenée à faire ce constat. Néanmoins, je me suis petit à petit accoutumée à l'idée que

les apprenants pouvaient eux aussi avoir leur propre représentation de l'apprentissage.

La mise en projet

Durant le stage à la Sonacotra, nous avons, Clémentine, Marie et moi, toutes les trois

chargées du groupe des jeunes majeurs, essayé de remédier aux problèmes dus au manque de

motivation, notamment en proposant un projet de sortie au cinéma25 en lien direct avec des activités

faites en classe. Il a eu lieu le mercredi 14 avril 2007 et nous avons choisi un film policier français

(Contre-enquête). Ce projet avait comme objectifs principaux de familiariser les apprenants au

cinéma français, à un domaine de la culture française et à une autre variété de français que celle

qu'ils apprennent en cours de FLE, ainsi que de renforcer la dynamique de groupe et de contribuer

au maintien de la motivation pour l'apprentissage du français.

Néanmoins, j'ai été très déçue de voir que ce projet, pourtant bien organisé et dont le

déroulement avait répondu à nos attentes (tous les apprenants ont participé, ont montré de la

satisfaction et ont fait preuve d'efforts dans la compréhension du film), n'a pas entraîné

d'améliorations quant à l'assiduité en classe et à la motivation. Les étudiants n'ont pas assisté à mon

cours la semaine suivante, pour lequel j'avais préparé un travail de feed-back sur le film ainsi qu'un

travail sur l'enquête policière.

25 Voir Document annexe 3

18

Le statut des langues étrangères dans la classe et en dehors

À la Sonacotra s'est immédiatement posée la question de la langue maternelle ou seconde

des apprenants. Si je souhaite aborder ce sujet c'est parce qu'il fait partie des nombreux paramètres à

prendre en compte pour l'enseignement/apprentissage dans ce stage. Le russe était en effet une

langue partagée par presque tous, qu'ils soient russes, arméniens ou tchétchènes. Au début, je ne

savais comment réagir face aux interactions récurrentes des apprenants dans cette langue que je ne

comprenais pas. J'avais beau leur dire de s'exprimer en français, ils continuaient à faire usage du

russe continuellement. Cela me gênait beaucoup car je me rendais bien compte que ce dont ils

parlaient n'avait aucun rapport avec le cours de français et je me suis vite sentie exclue. De plus, je

voyais l'utilisation de la langue maternelle ou seconde comme un obstacle à l'apprentissage de la

langue cible et je souhaitais qu'ils puissent avoir l'occasion de pratiquer uniquement le français dans

mon cours, puisque cela n'est pas le cas entre eux au quotidien.

Ce n'est que plus tard dans l'année et grâce à ma formation de Master 1 FLE que j'ai pris

conscience que l'usage de cette langue n'était pas vraiment un obstacle, mais une marque d'identité

très forte chez les apprenants. Il s'agit d'un public en situation d'insécurité linguistique à qui je ne

pouvais enlever ce qui leur restait de leur culture d'origine : leur langue.

J'ai finalement appris à utiliser cette langue comme un atout et à m'en servir comme stratégie

d'enseignement. J'ai tout d'abord pu tirer partie du niveau très hétérogène de la classe dans les

moments d'incompréhension totale. Les apprenants de niveau plus avancé ont, à plusieurs reprises,

fait usage du russe pour traduire aux autres le vocabulaire difficile ou les consignes des activités, ce

qui permettait, sans non plus se laisser aller à la facilité à chaque moment difficile, de rendre plus

accessible la réalisation des exercices. J'ai de même tenté de procéder à des comparaisons entre le

français et le russe, pour ce qui est de la construction grammaticale, de la syntaxe et de la

morphologie afin de permettre aux apprenants de s'appuyer sur leurs compétences et de développer

ainsi de nouvelles stratégies d'apprentissage. Cette méthode a facilité à plusieurs reprises

l'acquisition du français, mais il s'est avéré également que certains se reposaient trop sur leurs

acquis et ne réussissaient pas à s'approprier la langue cible.

Le parcours migratoire et le poids du public

Tel que je l'ai évoqué brièvement dans la première partie « contextes de stages », le public

de la Sonacotra a des particularités bien à lui. Les apprenants sont des jeunes majeurs demandeurs

d'asile ayant quitté leur pays d'origine pour des raisons politiques. Leur sécurité dans ce pays ne

pouvant être assurée par les autorités, ils comptent à présent sur la protection, contre la persécution,

19

de la France comme État d'accueil26.

Ils vivaient, dans leur pays, dans des conditions plus ou moins bonnes (une de mes

apprenantes venait d'obtenir son diplôme d'assistante sociale) et ont dû tout abandonner dans une

souffrance terrible. Ils sont actuellement contraints de vivre dans des conditions misérables dans un

pays qu'ils ne connaissent pas, et avec lequel, pour la plupart, ils n'avaient aucun lien. Presque tous

mes apprenants sont arrivés ici il y a plus de six mois et n'avaient jamais appris le français

auparavant. Très peu ont obtenu une scolarisation en collège ou lycée en France. Les autres n'ont

donc aucun contact avec l'extérieur, mis à part pendant les cours suivis au GRETA ou dans d'autres

associations.

D'un point de vue sociolinguistique, il est à noter que le passé et le parcours migratoire des

apprenants peuvent être un frein à l'apprentissage d'une langue nouvelle. Je pense que dans ce cas, il

faut réussir à se détacher de nos propres représentations des langues comme expériences nouvelles

et atouts pour l'émancipation personnelle. Notre parcours en tant qu'universitaires dans des filières

de langues étrangères affecte l'objectivité de notre point de vue. Nous n'avons jamais ressenti le

poids d'un parcours migratoire parsemé de souffrance, et constitué d'un rejet de l'identité nationale.

Ce sont tous ces éléments extérieurs à la classe qui impliquent qu'une personne en mobilité

linguistique peut mettre un certain temps avant d'entrer réellement dans l'apprentissage d'une langue

nouvelle, même si cette langue est celle du pays d'intégration. Ces facteurs peuvent donc constituer

un obstacle à une mise en apprentissage active et efficace.

Dans cette question du poids du public, j'ai donc spécifié la difficulté pour les apprenants

demandeurs d'asile de la Sonacotra de s'intégrer dans la société du pays d'accueil. Mais n'oublions

pas que les apprenants du CUEFEE sont eux aussi des étrangers. Quel est leur statut en France ?

Leur passé a-t-il eu autant d'incidence sur l'enseignement/apprentissage ?

Il est à noter tout d'abord que les apprenants sont des étudiants, inscrits au CUEFEE pour un

temps donné, avec des buts précis tels que poursuivre un cursus universitaire en France ou dans leur

pays, ou assurer leur avenir professionnel par l'acquisition d'un certain nombre de connaissances et

compétences en langue française. Pour pouvoir suivre un cursus universitaire en France, ils se

voient dans l'obligation, avant de quitter leur pays, d'obtenir un visa de long séjour, mention

« étudiant ». Peu de visas sont refusés pour ces étudiants, constituant une grande majorité des

apprenants du CUEFEE. Pour ces apprenants se pose beaucoup moins le problème de l'acceptation

26 Selon l'OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides), Qu'est-ce que l'asile ?

20

dans le pays d'accueil, être étudiant ne présentant pas les mêmes caractéristiques et représentations

dans les mentalités qu'être demandeur d'asile. Le poids du contexte historique n'est donc que peu

présent en classe et la perte de l'identité des apprenants n'est pas engendrée. Au CUEFEE, d'autres

préoccupations sont prises en compte par les apprenants telles que trouver un travail parallèlement

pour financer les cours suivis, entamer des inscriptions dans les universités françaises, etc. Tout cela

nous amène donc à la notion d'immigration choisie. Les étudiants sont acceptés en France de

manière beaucoup plus souple que les demandeurs d'asile, ce qui implique pour ces derniers le

sentiment de mal-être dû au contexte politique actuel.

Dans la question du poids du public, il est également important de prendre en considération

la culture d'apprentissage des apprenants et leur scolarisation ou non dans leur pays d'origine.

Certains n'ont pas été scolarisés et ne sont donc inscrits dans aucun établissement en France. Ce qui

différencie, de ce fait, certains apprenants de la Sonacotra à ceux du CUEFEE, est donc l'insertion

dans un processus d'apprentissage déjà existant et qui conditionne leur attitude face aux cours de

Français Langue Étrangère proposés.

La politique d'immigration en France et le processus d'intégration

La France, accueillant traditionnellement une forte immigration, est devenue en 1998 le

premier pays européen d'accueil des demandeurs d'asile. Elle s'est cependant engagée par la suite

dans un mouvement de réformes et la maîtrise de l'immigration est, depuis 2003, définie comme

une priorité par le Ministère de l'Intérieur.

Une loi datant de décembre 2003 s'attache quant à elle, à la réforme des procédures d'asile.

Elle a pour objectif de réduire les délais d'instruction des demandes d'asile en unifiant les

procédures et en les recentrant autour d'un Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides

(OFPRA). 27

On compte actuellement quatre conditions de refus de la demande d'asile, à savoir « la

demande relève de la compétence d'un autre État européen », « le pays d'origine est considéré

comme sûr » (17 pays en mai 2006 dont l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Sénégal, et récemment

l'Arménie et la Tchétchénie), « la présence du demandeur d'asile est une menace grave à l'ordre

public » et « la demande d'asile est l'objet de recours abusif »28. La plupart des apprenants de la

Sonacotra sont donc susceptibles de voir leur demande déboutée étant donné qu'ils proviennent de

27 Source : http://www.ambafrance-dz.org/IMG/politique_immigration.pdf 28 Source : Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_d%27asile_en_France

21

pays « sûrs » où les génocides ont été « reconnus », tels que l'Arménie ou la Tchétchénie.

Quant au dispositif d'insertion, autant dire qu'il n'existe pas de projet global d'insertion pour

les demandeurs d'asile en France. Un Contrat d'Accueil et d'Intégration (CAI) a été créé pour

« faciliter l'accueil et l'intégration des migrants arrivant sur le territoire et souhaitant s'installer

durablement en France »29. Il propose « un bilan linguistique », « une formation linguistique

adaptée aux besoins du migrant », « une journée d'information sur la vie en France », « une

formation sur l'accès à l'emploi et à la formation professionnelle », et en signant ce contrat, le

migrant « s'engage à suivre la formation linguistique qui lui a été prescrite »30. Ce contrat ne

s'adresse cependant pas aux demandeurs d'asile mais aux migrants admis à résider sur le territoire

français, tel que le spécifie le CAI : « Vous avez été admis à résider sur le territoire de la

République française. Pour faciliter votre intégration, la France vous offre la possibilité de

bénéficier du contrat d’accueil et d’intégration ». Ce n'est donc qu'une fois la demande d'asile

acceptée qu'ils peuvent bénéficier des formations linguistiques et professionnelles.

Une autre donnée va probablement rentrer en compte dorénavant : une nouvelle loi

s'intégrant dans la politique de l'immigration choisie et impliquant l'acceptation de migrants en

France selon leur compétences linguistiques. Un étranger souhaitant ou devant s'établir en France

pour diverses raisons devra auparavant prendre des cours de français afin d'atteindre un certain

niveau de compétences.

Nous nous rendons bien compte que les demandeurs d'asile ne font pas réellement partie du

processus d'intégration des migrants. S'intégrer dans la société française et s'approprier la langue

n'est donc pas tâche facile, surtout pour les jeunes qui ne sont pas scolarisés. Cette situation n'est

pas encourageante, ce qui explique peut-être les difficultés de prendre en main son apprentissage et

de faire le choix d'apprendre la langue du pays d'accueil.

Conclusion :

Je me suis énormément impliquée dans ce stage, notamment par le biais d'une constante

remise en question sur mes pratiques et mon rôle. J'ai tenté de proposer plusieurs types d'activités et

ai constaté que certaines étaient plus appropriées que d'autres. J'ai également fait en sorte

29 Source : http://www.grouperf.com/depeches/11544.html 30 Contrat d'accueil et d'intégration : http://www.anaem.social.fr/IMG/pdf/CAI.pdf

22

d'impliquer plus activement les apprenants dans l'apprentissage du français, grâce à la mise en place

d'un projet, et de leur faire prendre conscience de l'importance de venir régulièrement en classe.

Ce processus de remise en question m'a non seulement aidé à améliorer mes pratiques, mais

il m'a également permis de reprendre confiance. En effet, j'ai compris que tout ne dépendait pas de

moi. Certains facteurs extérieurs à la classe avaient de lourdes conséquences, auxquelles je pouvais

difficilement remédier, sur l'attitude d'apprentissage des apprenants.

Il est, à mon avis, primordial d'envisager le métier d'enseignant selon tous ces composantes.

Le stage à la Sonacotra ne correspondait pas, au départ, à la représentation que je m'étais faite de ce

métier. Il faut aussi accepter le fait que les apprenants n'apprennent pas forcément, même si notre

enseignement s'y prête. Proposer un enseignement n'implique donc pas systématiquement réussir

l'apprentissage de ses apprenants, bien que cela soit accompagné d'un réel sentiment d'échec pour

l'enseignant.

23

J'ai développé, en deuxième partie de mon travail, une problématique centrée principalement

sur les apprenants, leurs spécificités et les difficultés survenues lors des stages. Il convient à présent

de clore cette synthèse sur ma propre auto-évaluation en tant qu'enseignante à l'issue des stages et

de la formation de Master. Plusieurs points seront à prendre en compte, tels que l'émergence d'une

compétence professionnelle, mes projets professionnels, ainsi que le cheminement vers ma

professionnalisation à travers la formation théorique et la formation pratique.

En quoi l'expérience professionnelle et la formation théorique ensembles participent de la

professionnalisation ?

Mes expériences de stage au CUEFEE et à la Sonacotra étaient mes premières expériences dans

l'enseignement du Français Langue Étrangère. J'ai donc entièrement découvert ce domaine grâce

aux stages et à la formation de Master 1. Autant dire que l'un sans l'autre n'aurait pas participé

totalement à ma professionnalisation.

D'une part, les expériences de stage ont eu de l'incidence sur la formation de Master 1. En effet,

sans l'expérience qui se forgeait progressivement, je n'aurais pas pu me sentir si impliquée dans les

cours à l'université. Des liens se créaient systématiquement entre des faits et actes rencontrés lors

des stages et des éléments apportés durant la formation théorique.

Il est important de noter également que la diversité des expériences des élèves de la classe de

Master FLE a apporté une extrême richesse aux discussions et a, je pense, favorisé l'accès vers la

professionnalisation. Certains ayant déjà eu quelques expériences dans l'enseignement du FLE,

d'autres non, nous étions face à diverses motivations, projets, récits d'expériences, doutes,

difficultés, qui ont façonné petit à petit notre propre chemin vers la professionnalisation.

D'autre part, j'ai pu appliquer immédiatement les connaissances acquises lors de la formation

théorique telles que la relation enseignant-apprenants, les pratiques évaluatives, la connaissance de

supports et d'activités variés, etc. Le côté pratique de certains cours de Master m’a permis, pour ce

qui est du CUEFEE, de ne pas me sentir démunie face aux apprenants et aux contenus des cours.

Pour donner quelques exemples, de manière non exhaustive, je dirais que de nombreux éléments

issus des cours de « Didactique générale et méthodologie », « Séquences de classe »,

24

« Descriptions linguistiques », « Écrit-Oral », « Communication et interactions » ainsi que de

« Phonétique » m'ont beaucoup apporté pour les stages, notamment au CUEFEE. En effet j'ai appris

à évaluer et à me servir d'un manuel, à créer un barème d'évaluation des apprenants, à utiliser des

documents authentiques, à distinguer les différents types d'exercices et d'activités et à savoir les

utiliser à bon escient. Il m'a de même été très utile de savoir adapter les activités aux objectifs,

travail que nous avons eu à faire régulièrement lors de la formation de Master. Lors des cours, j'ai

également pris conscience de l'intérêt de préparer des activités de « secours » au cas où l'une d'entre

elles ne fonctionnerait pas, de considérer les différences de cultures et les codes de communication

de chacun afin de s'assurer du bon déroulement des interactions, et de favoriser le travail en groupe

dans certains cas pour faciliter les échanges entre les apprenants. J'ai même appris, lors du cours de

« Phonétique » que je ne prononçais pas correctement un phonème, ce qui m'a permis de pouvoir

me corriger quand je m'exprimais devant mes apprenants.

Bien que la plupart de ces éléments m'aient également été utiles dans le cadre de la Sonacotra, il

me paraît important d'insister sur le fait qu'ils ne manifestaient pas de lien si évident avec ce type de

public et d'institution. La formation de Master était extrêmement basée sur un type d'enseignement

auquel nous étions déjà accoutumés, à savoir des apprenants regroupés par classes, une institution

type, des supports à notre disposition, des objectifs précis, etc. Nous n'étions cependant pas préparés

à un milieu tel que la Sonacotra, où certains éléments apportés n'étaient pas utilisables, comme le

travail en groupe, le suivi dans les activités, etc.

Ce n'est qu'au deuxième semestre que deux cours, à savoir « Illettrisme et alphabétisation » et

« Sociolinguistique », m'ont permis de prendre conscience de l'importance du poids du public et du

contexte historique dans l'enseignement du FLE. Le premier semestre a donc été assez pauvre quant

à l'aide apportée pour la réalisation de ce stage. Les éléments vus en cours sur l'enseignement en

général ne prenaient pas en compte les apprenants en parcours migratoire et en situation

d'illettrisme ou d'alphabétisation. J'ai donc du affronter seule les difficultés et développer des

compétences à l'issue de ma propre expérience.

Je tiens à mentionner que je n'ai pas souhaité évoquer ce sujet lors de la deuxième partie de ma

synthèse, tel que j'avais envisagé de le faire initialement, car il me semblait plus approprié de

l'aborder dans cette dernière partie. En effet, les liens, plus ou moins forts, entre la formation et les

stages, m'ont permis de construire une compétence professionnelle, soit en m'apportant des

éléments directement applicables en cours de FLE, soit en me conduisant vers une acquisition

autonome de ces compétences.

25

Les compétences professionnelles :

Il est clair que les stages et la formation de Master ont tous deux contribué à l'émergence de

ma compétence professionnelle, la théorie et la pratique étant très liées, et pour ma part,

indissociables.

Avant de définir les compétences que j'ai acquises tout au long de cette année de Master 1

professionnel, il serait judicieux d'énoncer celles qui m'ont manqué, notamment à la Sonacotra. Au

départ, je n'étais pas vraiment renseignée sur les spécificités de ce type de public, que j'ai évoquées

dans la deuxième partie de ma synthèse. Je ne connaissais ni leur besoins ni leurs attentes quant aux

cours de français. N'ayant aucune compétence dans l'enseignement du FLE, et encore moins pour ce

type d'apprenants, il est vrai que quelques aides ou formations m'auraient été bénéfiques. Une

réunion de bilan tardive a cependant ouvert quelques pistes sur les apprenants, telles que des

données importantes sur leur scolarisation ou non scolarisation antérieure et la difficulté de leur

situation en France, permettant de mieux cerner le public.

Je ne pense pas avoir encore acquis toutes les compétences nécessaires pour travailler dans

ce domaine et je pense qu'il aurait été bénéfique d'avoir auparavant une connaissance plus vaste des

activités et supports d'enseignement/apprentissage, une capacité à trouver des objectifs précis et à

intégrer le cours dans un but communicationnel immédiat. Je n'exclue pas cependant la possibilité

de renouveler cette expérience après quelques années de pratique dans l'enseignement du FLE, qui

m'auront sans doute apporté des connaissances et compétences plus solides.

Il est important de préciser également que j'ai pu réutiliser, dans le cadre des stages,

certaines compétences acquises antérieurement. J'ai par exemple longtemps exercé la fonction

d'animatrice et d'assistante d'éducation dans un collège, ce qui m'a permis d'acquérir une certaine

aisance quant au contact avec un groupe d'enfants ou de jeunes. Bien évidemment, le statut qui

m'était conféré cette année lors des stages était différent. Être enseignant requiert d'autres

compétences. Cependant, ce côté relationnel a été un atout et je me suis aussitôt sentie à l'aise face

aux apprenants, ce qui a permis de favoriser un contact agréable entre nous. Dans les deux stages,

une bonne ambiance de classe s'est instaurée, où chacun pouvait s'exprimer sans craintes, mais dans

un respect mutuel malgré tout.

Parmi les compétences que j'ai acquises tout au long de cette année de Master, l'une des plus

significatives pour moi est la confiance en moi. En début d'année scolaire, j'appréhendais

inévitablement à l'idée d'enseigner car je ne me sentais pas prête pour une telle expérience.

26

Cependant, ce sentiment a très vite disparu lors de mon premier cours donné au CUEFEE pour

évoluer en une réelle conscience professionnelle dans ce milieu. J'ai été confortée dans mes projets

d'avenir et j'ai trouvé, tant dans la formation théorique de Master que dans les stages, une

signification bien précise quant à mon choix de devenir enseignante.

Lors du stage au CUEFEE j'ai également appris à évaluer les apprenants lors de contrôles

continus et d'examens pour les deux semestres. Durant les premiers mois, il m'a été extrêmement

difficile de mettre des notes proportionnelles au travail fourni lors des examens. Je ne parvenais pas

à faire abstraction de la participation de l'apprenant en classe, de son absentéisme fréquent ou non.

Il me coûtait de prendre en compte la qualité de l'examen écrit uniquement. De plus, il ne me

paraissait pas légitime, dans mon rôle de stagiaire, de corriger des examens. Néanmoins, petit à

petit, j'ai commencé à y prendre goût et à accepter le fait que, dans le métier d'enseignant,

l'évaluation est inévitable presque dans tous les cas. Le Master FLE et mon expérience grandissante

dans la pratique m'ont appris à créer un barème de correction adapté à chaque type d'examen et au

niveau des apprenants.

Il est important de souligner également que le stage à la Sonacotra, bien que m'ayant laissée

quelque peu démunie et livrée à moi-même, a joué un rôle important dans l'acquisition de

compétences, tant didactiques que professionnelles. Aussi ai-je appris à me remettre en question, ce

qui, je pense, est une démarche à ne pas oublier dans le métier d'enseignant. Tous les publics étant

différents et présentant des caractéristiques diverses, il est important d'adapter ses pratiques tout en

acceptant de les faire évoluer si elles ne sont pas appropriées.

Par ailleurs, il n'est pas sans dire que ce stage m'aura permis de découvrir l'un des nombreux

champs d'actions du Français Langue Étrangère et d'élargir ainsi mes connaissances à ce sujet.

Aussi, j'ai pris conscience de l'importance de toujours considérer le poids du public dans son

enseignement, d'en connaître les spécificités. Ce que j'ai acquis à la Sonacotra me sera bien sûr

toujours utile dans ma future carrière d'enseignante, même si je ne pense pas m'orienter tout de suite

vers ce type de public.

Ce stage, tout comme le CUEFEE, m'a de même formée au travail en autonomie, pour ce qui

est de la recherche des supports, de la préparation des cours, du déroulement des séances, et de la

mise en place d'un projet. J'ai ainsi appris à rechercher des activités grâce à des moyens variés tels

que les manuels, Internet, etc, qu'elles soient authentiques ou fabriquées par moi-même. Ce sont

autant de compétences qui me seront utiles lors de mes prochaines expériences dans l'enseignement

du Français Langue Étrangère et qui ont été acquises grâce à la formation de Master, qui alliait

théorie et pratique, et les expériences de stage.

27

Où en suis-je à l'heure actuelle et quelles perspectives s'ouvrent à moi ?

Les stages et la formation m'ont permis de construire des compétences dans l'enseignement du

Français Langue Étrangère, de mobiliser des ressources utiles et nécessaires pour mes expériences

futures et de me former à différents contextes. Ma représentation de moi-même en tant

qu'enseignante a beaucoup évolué depuis le début de l'année universitaire : j'ai pris conscience de

mes capacités, ce qui correspond pour moi à un grand pas en avant.

Cependant, je ne me considère pas encore à l'heure actuelle comme une enseignante à part

entière. Je pense que je ne me suis pas encore détachée réellement du statut d'étudiante et de

stagiaire. Je ne sais pas quand viendra le jour où je répondrai « je suis enseignante » au moment où

l'on me demandera quelle est ma profession. Mais c'est justement pour cette qualité d'apprentissage

incessant que je suis attirée par ce métier. Un enseignant reste aussi un étudiant, en quelque sorte. Je

sais que j'aurai toujours à apprendre de mon public, de mes pratiques, de la langue française.

J'espère de même avoir la possibilité d'enseigner dans des pays différents pour avoir ainsi à

apprendre constamment de la civilisation et des pratiques culturelles de mes apprenants.

Ce que j'attends du stage MAE :

Mon projet professionnel immédiat est la réalisation d'un stage longue durée du Ministère

des Affaires Étrangères en Ukraine. J'attends particulièrement de ce stage qu'il me forme à des

responsabilités variées afin d'acquérir des compétences dans divers domaines. Il me semble

important de compléter également l'expérience de stage de cette année de Master 1 et d'évaluer mes

capacités à enseigner.

Ce stage me conforte également dans l'idée que je vais faire un grand pas en avant, mais tout en

restant stagiaire encore pour une année, ce qui me rassure énormément. Il s'agira, bien sûr, d'un

stage à responsabilités plus amples que ceux que j'ai réalisés durant cette année de Master, mais qui

me permettra cependant d'entrer petit à petit dans le monde de l'enseignement.

Qu'est-ce qu'un bon enseignant ?

À l'issue des stages et de la formation de Master 1, ma représentation du « bon enseignant » a

bien changé. Je ne prétends pas apporter une réponse à cette grande question, mais je suis

consciente cependant que mon point de vue a évolué à ce sujet. Les stages m'ont amenée à penser

que l'on ne peut égaler dans tous les domaines. Le public que l'on a en face de soi, le contexte,

l'institution, la nature du cours, nos représentations, etc, mobilisent chez l'enseignant des

28

compétences différentes à chaque fois. Nous ne pouvons enseigner de la même manière selon les

contextes. L'enseignant doit, je pense, être conscient de ses propres compétences avant tout. C'est

ainsi qu'il pourra les mobiliser à bon escient, les adapter et en développer de nouvelles chaque fois

que s'en ressentira le besoin.

Je n'avais en effet pas imaginé auparavant que l'enseignement du FLE pourrait être un domaine

aussi vaste, présentant des publics et des contextes si diversifiés. C'est l'une des raison pour laquelle

l'enseignant doit savoir être, lui aussi, un apprenant, et tirer partie de toutes les situations dans

lesquelles il se trouve.

29

Avant de m'inscrire en Master 1 professionnel FLE, j'avais dans l'idée de m'orienter vers

l'enseignement de l'espagnol en France, d'où mes trois années d'étude en Licence LLCE Espagnol.

Une année à l'étranger en tant qu'étudiante Erasmus a cependant provoqué un changement dans mes

projets : l'envie de repartir à l'étranger m'a dirigée vers la mention FLE en Licence puis en Master 1.

Je n'avais jamais envisagé de pouvoir enseigner ma langue maternelle auparavant, ne lui

accordant que peu de considération par rapport aux langues étrangères que j'aimais tant. Cependant,

grâce au Master FLE et aux stages, j'ai appris à la considérer elle-même comme une langue

étrangère pour les apprenants et à l'explorer à nouveau dans le cadre de l'enseignement du Français

Langue Étrangère.

L'expérience de cette année de formation et de pratique m'a donné confiance en ce projet

professionnel dans l'enseignement du FLE. Les stages, malgré les difficultés, m'ont confortée dans

l'idée que je veux et vais être enseignante. J'ai tenté, dans cette synthèse de Portfolio, de rendre

compte au mieux du cheminement vers ma professionnalisation, jusque là inconsciente. Ce travail

m'a en effet dirigée vers l'objectivation de mes pratiques, en constante évolution tout au long de

l'année, et m'a amenée à m'auto-évaluer en tant qu’enseignante.

Il ne s'agit pas d'affirmer, au terme de ces expériences, si j'ai été ou non une « bonne

enseignante » lors de mes stages. Le constat n'est pas si manichéen. Il s'agit de prendre conscience

des compétences que l'on a acquises ou non, de ce que signifie être enseignant de Français Langue

Étrangère, de se constituer un projet professionnel. Pour ma part, je me trouve dans un processus de

professionnalisation qui j'espère, durera tout au long de ma carrière d'enseignante. Nous ne serons

jamais de bons enseignants que si l'on accepte d'apprendre de toutes les situations.

30

− AKYUZ. A, BONENFANT. J et alii (2005), Les exercices de grammaire, A1, Hachette FLE

− BARTHE. M, CHOVELON. B (2004), Je lis, j'écris le français, Méthode d'alphabétisation

pour adultes, Grenoble, PUG

− BARTHE. M, CHOVELON. B (2005), Je parle et je pratique le français, Post-alphabétisation

pour adultes, Grenoble, PUG

− BERGER. D, MÉRIEUX. R (1994-1995), Cadences 2, Paris, Hatier-Didier.

− BERTHET. A, HUGOT. C et alii (2006), Alter Ego 1, Paris, Hachette FLE

− BERTHET. A, HUGOT. C, KIZIRIAN. V, SAMPSONIS. B, WAENDENDRIES. M, (2006),

Alter Ego 2, Hachette Français langue étrangère

− CAMPA. A, MESTREIT. C, MURILLO. J, TOST. M (2006), Forum 2, Hachette FLE

− CASTELLOTTI. V (2001), La langue maternelle en classe de langue étrangère, Clé

International

− Conseil de l'Europe (2005), Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues, Didier

− CUQ. J-P, (2003), Dictionnaire de didactique du français- Langue étrangère et seconde, Clé

international

− DOMINIQUE. P, GIRARDET. J, et alii (1988-1990), Nouveau sans frontières 3, Paris, Clé

international.

− ELUERD. R (2005), Exercices de vocabulaire en contexte, niveau débutant, Hachette FLE

− FLUMIAN. C, LABASCOULE. J, ROYER. C, (2006), Rond Point 2, PUG

− GIRARDET. J, PECHEUR. J (2002), Campus 2, Paris, Clé.

− JOB. B, et alii, 1994, Mosaïque 2-3, Paris, Clé international.

− OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides), Qu'est-ce que l'asile ?

http://www.ambafrance-dz.org/IMG/politique_immigration.pdf � Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_d%27asile_en_France � http://www.grouperf.com/depeches/11544.html � Contrat d'accueil et d'intégration : http://www.anaem.social.fr/IMG/pdf/CAI.pdf

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DOCUMENT ANNEXE 1

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La maison

Associez les mots suivants à chaque numéro : La chaise - l'étagère - la chambre à coucher - le sous-sol - le grenier - la cuisine - la réfrigérateur - la salle à manger - la table - la salle de bain - le lit - l'escalier - le salon - l'évier - des bouteilles - la machine à laver - le canapé - la porte d'entrée - le fauteuil - le bureau - le lavabo - la valise 1 : ............................... 2 : ................................... 3 : ................................... 4 : ....................................

5 : ............................... 6 : ................................... 7 : ................................... 8 : ....................................

9: ................................10 : ..................................11 : ..................................12 : ...................................

13 : .............................14 : ..................................15 : ..................................16 : ...................................

17 : .............................18 : ..................................19 : ...................................20 : ..................................

21 : .............................22 : ..................................

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DOCUMENT ANNEXE 2

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Dans la rue DIALOGUE 1. Excusez-moi Monsieur, je suis perdue. Je cherche la place du Châtelet. 2. Châtelet... C'est très simple ! Vous prenez la prochaine rue à droite, la rue Dauphine. Vous allez

tout droit, et vous traversez le pont Neuf. Ensuite, vous allez à droite et vous longez la Seine. Vous verrez le Théâtre du Châtelet, sur votre gauche.

3. Et c'est loin ? 4. Non, c'est à 10 minutes à pied environ. 5. Merci beaucoup Monsieur. 6. De rien. Au revoir, et bonne journée !

Comment dire ? Demander son chemin: Excusez-moi, Madame / Monsieur. Pour aller à... / Je suis perdu. Je cherche la rue... / l'avenue... / le boulevard... / la place... Pourriez-vous me dire comment aller à... Décrire un itinéraire : Vous allez / continuez tout droit. Vous prenez la prochaine rue à droite / à gauche. Vous tournez à droite / à gauche. Vous traversez la rue / la place / le boulevard / le pont / le parc... Vous longez le fleuve / la rivière / le canal / le parc... 1. Regardez le plan et repérez l'itinéraire décrit dans le dialogue.

2. Un touriste vous demande comment aller de l'Hôtel de Ville au boulevard Saint-Michel. Quel itinéraire lui conseillez-vous ?

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DOCUMENT ANNEXE 3

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SONACOTRA, Joué-lès-Tours BEAUFILS Clémentine 2006-2007 RASOLOMANANA Marie VOUILLON Julia

PROJET DE SORTIE AVEC LES JEUNES MAJEURSPROJET DE SORTIE AVEC LES JEUNES MAJEURSPROJET DE SORTIE AVEC LES JEUNES MAJEURSPROJET DE SORTIE AVEC LES JEUNES MAJEURS

DESCRIPTION ET DÉROULEMENT DE LA SORTIE

Nature du projet : sortie au cinéma pour voir un film français

Groupe concerné : jeunes majeurs

Accompagnateurs : Clémentine, Marie et Julia

Lieu : Cinéma Studio ou CGR Centre au centre ville de Tours

.

Procédure de réservation : appeler le cinéma au 02 47 20 27 15 (Studio) et préciser l'horaire et le

film prévu. Pour le CGR Centre, la réservation n'est pas nécessaire.

Procédure préalable : chaque personne doit auparavant remplir et remettre le coupon d'inscription

aux accompagnatrices (Clémentine, Julia et Marie), à Aude ou à Marie-Laure. Cela nous permet de

savoir le nombre de personnes exact pour la sortie et de pouvoir ainsi réserver le cinéma et le bus.

Toute absence imprévue nous porterait évidemment défaut quant aux tarifs de groupe.

Déroulement de la sortie : aller en bus à Tours centre (bus n°3 ou n°6 jusqu'à l'arrêt Jean Jaurès).

Partir 1h avant le début du film (tout dépend aussi des heures de circulation et de la durée du trajet).

Puis trajet à pied de l'arrêt de bus Jean Jaurès au cinéma Studio ou CGR Centre (10 min de marche).

Le retour se fera en groupe également, en bus du centre ville de Tours jusqu'à la Sonacotra.

TRAVAIL EN CLASSE AUTOUR DU PROJET

Mise en place du projet avec les jeunes majeurs : ce projet sera en lien direct avec les cours de

français de chacune d'entre nous. Selon le film choisi, il serait intéressant d'effectuer un travail

préalable avec les jeunes : aider à la réalisation du projet, choisir le film, aborder le thème du film,

le type de film, le champ lexical du cinéma, parler du cinéma en France en général.

Après la sortie au cinéma, nous pourrions faire plusieurs travaux comme donner son opinion sur le

film, rédiger la critique du film sous forme d'article pour le journal de la Sonacotra.

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Objectifs de la sortie :

− Initier les jeunes au cinéma en France

− Approche culturelle très intéressante à aborder en classe

− Le cinéma est un bon moyen de se familiariser à la langue française selon différents contextes,

différents sujets.

PRIX

Prix de groupe pour le cinéma Studio : tarif de groupe à partir de 15 personnes, pour les séances de

14-15h, 17-17h45, et éventuellement 19h. Le prix par adulte (à partir de 18 ans) est de 5.10 euros,

et 2.50 euros pour les mineurs, ainsi qu'un adulte gratuit. Nous précisons que nous possédons toutes

les trois la carte d'abonnement au Studio, la place nous revient donc à 4.10 euros.

Prix de groupe pour le cinéma CGR Centre : tarif de groupe à partir de 10 personnes, avec un

adulte gratuit. Le prix par personne est de 5,60 euros.

Le bus : les jeunes ayant tous une carte de bus, il n'est pas nécessaire de prendre une carte de groupe

pour le transport.

Prix total pour 15 personnes : entre 69.4 euros et 78.4 euros en fonction du cinéma (Studio ou

CGR Centre) et du nombre de personnes. (12 jeunes, 3 accompagnatrices, dont une gratuite pour le

cinéma).