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Tempêtes : reconstitution intelligente des massifs forestiers et bois énergie. (Avertissement : la présentation qui suit traite de la reconstitution des forêts suite à la tempête de décembre 99 – Il s’agit bien entendu d’éléments de prospective, très basiques et pour l’instant plutôt peu élaborés, étant donnée le délai relativement court écoulé depuis la tempête – L’ONF a déjà entamé une analyse de ses techniques de sylviculture pour les adapter à la situation nouvelle – Les résultats de cette analyse feront en temps voulu l’objet de présentations spécifiques – Il est cependant possible dés à présent de faire un certain nombre de paris sur l’avenir proche, en particulier en matière de choix entre reconstitutions artificielle (plantations) et naturelle (semis naturels), cette dernière semblant devoir être préférée pour des raisons évidentes de coûts et surtout d’origine des essences (notion de races locales) – De même, les difficultés techniques qui seront liées à la reconstitution résulteront nécessairement des choix techniques minimalistes imposés par le contexte en matière d’exploitation forestière (rémanents pour l’instant abandonnés et non traités), dont l’effet reste encore à préciser) Introduction : Les 26 et 28/12 derniers, une tempête dont la puissance n’avait semble-t’il jamais connu d’égale, a ravagé la plupart des régions françaises, avec des conséquences très graves sur la forêt : plus de 140 000 000 de m3 de chablis sur le plan national, dont un tiers pour les forêts publiques, soit l’équivalent de plus de 3 années de récolte ; localement, comme en Aquitaine, Limousin, Poitou Charentes ou en Lorraine, des régions très touchées, à la fois en volume et en surface concernés. Pour l’heure, en forêt publique comme en forêt privée, ce sont essentiellement les travaux de vente et de récolte des bois qui sont en cours. Pour des raisons d’urgence – des essences comme le hêtre ou certains résineux présentant un caractère périssable – , mais également d’offre surabondante, l’exploitation des bois est réalisée de façon très sommaire : les houppiers sont démontés sommairement, les cimes et les surbilles des grumes sont abandonnées sur place, seules les billes de qualité intéressante sortent des parcelles. Le volume de bois résultant de la tempête, et destiné à rester en forêt, parce que sa valeur ou son abondance sont aujourd’hui telles qu’il n’est économiquement pas intéressant de l’exploiter, est très important.

Tempêtes : reconstitution intelligente des

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Tempêtes : reconstitution intelligente des massifs forestiers et bois énergie. le délai relativement court écoulé depuis la tempête – L’ONF a déjà entamé une analyse de ses techniques de reconstitution résulteront nécessairement des choix techniques minimalistes imposés par le contexte en matière Les 26 et 28/12 derniers, une tempête dont la puissance n’avait semble-t’il jamais connu d’égale, a ravagé la

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Page 1: Tempêtes : reconstitution intelligente des

Tempêtes : reconstitution intelligente des massifs forestiers et bois énergie.

(Avertissement : la présentation qui suit traite de la reconstitution des forêts suite à la tempête de décembre 99 –

Il s’agit bien entendu d’éléments de prospective, très basiques et pour l’instant plutôt peu élaborés, étant donnée

le délai relativement court écoulé depuis la tempête – L’ONF a déjà entamé une analyse de ses techniques de

sylviculture pour les adapter à la situation nouvelle – Les résultats de cette analyse feront en temps voulu l’objet

de présentations spécifiques – Il est cependant possible dés à présent de faire un certain nombre de paris sur

l’avenir proche, en particulier en matière de choix entre reconstitutions artificielle (plantations) et naturelle

(semis naturels), cette dernière semblant devoir être préférée pour des raisons évidentes de coûts et surtout

d’origine des essences (notion de races locales) – De même, les difficultés techniques qui seront liées à la

reconstitution résulteront nécessairement des choix techniques minimalistes imposés par le contexte en matière

d’exploitation forestière (rémanents pour l’instant abandonnés et non traités), dont l’effet reste encore à préciser)

Introduction :

Les 26 et 28/12 derniers, une tempête dont la puissance n’avait semble-t’il jamais connu d’égale, a ravagé la

plupart des régions françaises, avec des conséquences très graves sur la forêt : plus de 140 000 000 de m3 de

chablis sur le plan national, dont un tiers pour les forêts publiques, soit l’équivalent de plus de 3 années de

récolte ; localement, comme en Aquitaine, Limousin, Poitou Charentes ou en Lorraine, des régions très

touchées, à la fois en volume et en surface concernés.

Pour l’heure, en forêt publique comme en forêt privée, ce sont essentiellement les travaux de vente et de récolte

des bois qui sont en cours. Pour des raisons d’urgence – des essences comme le hêtre ou certains résineux

présentant un caractère périssable – , mais également d’offre surabondante, l’exploitation des bois est réalisée de

façon très sommaire : les houppiers sont démontés sommairement, les cimes et les surbilles des grumes sont

abandonnées sur place, seules les billes de qualité intéressante sortent des parcelles. Le volume de bois résultant

de la tempête, et destiné à rester en forêt, parce que sa valeur ou son abondance sont aujourd’hui telles qu’il

n’est économiquement pas intéressant de l’exploiter, est très important.

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Ceci aura bien entendu des conséquences sur la reconstitution à venir des forêts ravagées, parce qu’il sera

nécessaire, dans certains cas, avant de penser reconstitution, d’éliminer l’obstacle physique représenté par le

bois restant en forêt (car c’est bien cela le problème, en dehors de toute considération relative aux infestations

sous forme d’insectes).

Le cas particulier de la franche comté :

Si on examine la situation particulière de la franche comté, près de 4.5 millions de m3 ont été renversés par la

tempête, à un peu plus de 50 % en forêt publique : c’est l’équivalent grosso modo de 4 années de récolte, ce qui

situe à peu près la région dans la moyenne nationale.

Sur le plan des essences, la situation est nettement déséquilibrée : c’est essentiellement le résineux qui a été

touché, avec plus des ¾ du volume concerné – Ceci s’explique par les trajectoires suivies par les tempêtes, par

les effets sur les vents de la topographie en montagne, et par les importants volumes à l’ha présents en forêt

résineuse.

Typologie rapide des dégâts dans le résineux

Si on s’intéresse au cas du résineux, plusieurs situations se présentent aujourd’hui en ce qui concerne la nature

des dégâts en forêt et leur incidence sur le futur. Ces situations dépendent essentiellement de 4 facteurs :

• la quantité de chablis à l’hectare

• le type de chablis : cassés ou renversés

• l’essence dominante

• l’altitude / la station

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En croisant ces différents facteurs, il est assez simple de distinguer 3 grands types de situations, pour lesquelles

les stratégies de reconstitution seront vraisemblablement différentes :

1. les chablis sont dispersés, il s’agit essentiellement de bois renversés, à dominante épicéa, plutôt en altitude –

La situation est dans ce cas plutôt favorable :

• l’atteinte à la forêt est légère, par trouées

• les bois, essentiellement de l’épicéa, auront sans doute été exploités avec des découpes fin bout plutôt

faibles – les chutes restant sur place, dues à la casse, sont peu nombreuses

• les rémanents abandonnés seront plutôt de dimension modeste (branches fines dues à l’altitude,

découpes fin bout faibles)

il n’y a a priori pas d’obstacle à une reconstitution naturelle, sans assistance particulière : il n’est pas

indispensable d’envisager un traitement supplémentaire des rémanents, qui peuvent demeurer sur place.

2. les chablis sont denses, mais il s’agit essentiellement de bois renversés, en mélange sapin et épicéa, à

altitude moyenne – La situation peut rester dans ce cas relativement favorable, même si l’atteinte à la forêt

est forte :

• la quantité de purges restant sur le parterre de la coupe est modérée

• les branches - plutôt fines - et les cimes – plutôt courtes – également sur le parterre de la coupe

représentent des quantités tolérables, en matière de couche végétale formant obstacle à la germination

Si la surface unitaire des zones touchées reste faible (quelques hectares au maximum), il n’y a a priori

pas d’obstacle à une reconstitution naturelle, à condition de réaliser (ou d’avoir fait réaliser au moment

de l’exploitation) un traitement sommaire des rémanents : par exemple, le tronçonnage en morceaux de

2m maximum des branches et cimes des grumes restant sur place peut suffire, si les risques de

développement de la ronce sont faibles.

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3. Les chablis sont denses, comportent à la fois des bois renversés et cassés, essentiellement sapin, en altitude

relativement faible (par exemple 2ème plateau du Jura), sur sol plutôt fertile – La situation devient dans ce

cas nettement défavorable, d’autant plus que l’atteinte à la forêt est forte :

• la quantité de purges destinées à rester sur le parterre de la coupe est importante

• les branches - plutôt grosses - et les cimes – plutôt longues (présence fréquente de gui) – également sur

le parterre de la coupe représentent des quantités très importantes, en matière d’obstacle à la

germination

• le sol fertile et les conditions d’altitude nuançant le climat rigoureux, associés à la mise en lumière,

vont permettre le développement d’une abondante végétation concurrente (ronce par exemple)

Quelle que soit la surface unitaire des zones touchées, le traitement à réaliser doit avoir pour effet de

rendre inopérant l’obstacle à la germination ou à la plantation constitué par la quantité de branches et

cimes présentes – Dans le cas de plantation avec un objectif d’entretien mécanisé, il peut devenir

indispensable d’éliminer tous les billons de nature à rendre difficile la circulation rectiligne des engins

forestiers ou de détériorer leurs parties coupantes ou broyeuses.

Bien entendu, chaque cas réel sera un cas particulier, pouvant se situer dans une position intermédiaire entre

deux des cas ci-dessus.

Il n’en demeure pas moins que les cas se rapprochant des situations 1 et 2, qui correspondent à des volumes de

rémanents à l’hectare tolérables, peuvent se satisfaire d’un traitement sommaire des rémanents, suffisant pour

permettre la reconstitution de la forêt – En particulier, aucune transformation lourde ou aucun déplacement des

rémanents – c’est à dire aucun traitement très coûteux - ne sont nécessaires.

Par contre, les cas proches de la situation 3 – volumes de rémanents très importants – devront nécessairement

faire au moins l’objet d’un traitement lourd classique :

• Par broyage des rémanents, avec les risques habituels : couche de broyat trop importante et limitant la

germination des graines ou la reprise des plants, risque de broyage uniquement superficiel

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• Par mise en andains des rémanents, forcément mécanisée et forcément suivie d’incinération, étant donnés

les volumes concernés et leur densité.

Ces traitements sont bien entendu coûteux, mais éviter leur coût en faisant appel au bois énergie et à la plaquette

forestière n’avait jusqu’à présent pas été jugé suffisamment intéressant sur le plan économique.

Petit historique (récent) du bois énergie en franche comté :

En résumé, depuis 1992/93, date de la dernière crise sérieuse en matière de prix des sciages résineux et

d’interrogations sur la possibilité d’utiliser des techniques d’exploitation alternative – dont le bois énergie - , la

création d’une filière bois énergie “ industrielle ” en Franche Comté a poursuivi plusieurs axes de recherche et

de développement.

Dans un premier temps, la forêt a semblé pouvoir être le lieu idéal pour la production d’un combustible sous

forme de plaquettes forestières. Sur le plan technique, des solutions de production des plaquettes avaient été

développées à proximité (canton du Jura Suisse), dans un contexte semblable - sauf sur le plan économique et en

matière de politique de l’aménagement du territoire.

Après plusieurs mois d’analyse des coûts et de recherche de solutions, il s’est avéré que sur un plan strictement

économique, les rémanents forestiers devaient, pour être transformés en plaquettes, subir plusieurs traitements

(débardage, broyage, transport, stockage et séchage, livraison) dont les coûts rendaient finalement le

combustible obtenu moins intéressant économiquement que les énergies classiques.

Malgré les plans bois énergie départementaux, cette faiblesse de la plaquette forestière par rapport au fuel ou au

fuel lourd par exemple, était avérée, sans véritable porte de sortie.

Le développement de la filière, autour de chaufferies appartenant à des collectivités, s’est donc fait sur la base

des écorces de scierie, sous produit de la fabrication des sciages, qui n’avaient il y a quelques années encore que

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peu de débouchés. Ce combustible, parfaitement propre, facile à broyer pour obtenir une granulométrie

homogène, stocké en général sur des aires faciles d’accés, pouvait être facilement mobilisé et transporté

jusqu’aux chaufferies, en restant concurrentiel.

Reconstitution forestière et bois énergie

Quels sont les éléments qui ont pu changer en Franche Comté, en matière de bois énergie, par rapport à l’avant

tempête ?

• Pour les zones relativement peu touchées comme la Franche Comté, la matière première de type “ bois

énergie ”, présente en forêt, va être particulièrement dense et abondante pendant plusieurs années, puis

risque de se raréfier pendant quelques années, avant de retrouver un niveau identique à celui d’avant la

tempête – On peut en effet penser que, hors des zones localement malheureusement très touchées, la récolte

retrouvera globalement, après quelques à coups sur une période de 5/6 ans, la régularité qu’on lui

connaissait jusque là

• La reconstitution va passer dans certaines zones – dont la surface reste difficile à évaluer pour l’instant – par

des travaux plutôt lourds et couteux (zones en situation de type 3 ci-dessus) – Cette reconstitution s’étalera

sur quelques années, pour ce qui concerne le nettoyage du terrain

• Ces travaux vont bénéficier d’aides.

Sera-t’il possible, plutôt que d’envisager des traitements classiques dont l’effet est de détruire le “ déchet ”

rémanents forestiers, de passer à une logique d’utilisation d’un produit supplémentaire de la forêt, sous forme de

bois énergie ?

Les aides pourraient, à court et moyen terme, mettre le bois dans une position très concurrentielle, en tous cas

beaucoup plus favorable que jusqu’à maintenant : la ressource serait plus dense et son coût de mobilisation

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deviendrait – artificiellement – plus faible. Simplement, il s’agirait d’un effet ponctuel, avec de nouveau, après 1

ou 2 ans, une situation économique a priori identique à celle avant tempête.

Dans ces conditions, et ce “ malgré ” la tempête de fin 99, le contexte et les conditions nécessaires au

développement de la plaquette forestière comme combustible bois énergie risquent de ne pas changer : d’autres

critères que ceux strictement économiques devront être pris en compte pour justifier son intérêt, que seuls la

collectivité et ses élus peuvent intégrer, dans une approche de type patrimonial plutôt que strictement

économique : conséquences sur l’environnement, richesse régionale, emplois régionaux par exemple.

L’effet booster sur la plaquette forestière que pourrait induire la nécessité de nettoyer certaines zones forestières

doit absolument, pour avoir un effet durable, être accompagné de la volonté constante de développer ce

combustible : sans quoi, il ne s’agira éventuellement que d’un développement passager, certes tout à fait positif

pour la reconstitution de la forêt, mais ne s’inscrivant pas dans une politique axée sur la durée.